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De la mécanique à la mécatronique - emse.fr · "Après abandon des voies de résolution sans potentiel et concentration sur le mode de ... l’impact de la réduction de contrainte

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ll’’iinndduussttrriiee ?? Les Rencontres Européennes de Mécatronique (EMM), créées par Thésame, rassemblent depuis 4 ans les principaux acteurs de l'industrie, de la formation et de la recherche. La ville de Saint-Etienne accueillait l'édition 2006 en synergie avec le congrès INCOM'2006. 800 participants de 45 nationalités, industriels et chercheurs, ont échangé durant 4 jours autour du thème de l’usine intelligente.

La mécatronique peut se définir comme l'utilisation simultanée des techniques du génie

mécanique, de l'électronique, de l'automatisme, de la micro-informatique et de l'analyse système en vue de la conception et de l'optimisation de produits, d’équipements et de procédés. Allant un peu plus loin, Pascal Laurin, responsable marketing Bosch Rexroth explique que sa société "est non seulement multi-technologique au sens ou elle offre plusieurs technologies (entraînement et hydraulique et translation et pneumatique), mais surtout mécatronique car elle offre des technologies associées (le "et" devient alors "+") par division, pour des composants mécatroniques et sur l'ensemble des divisions, pour des systèmes mécatroniques ".

Mais la conception des équipements mécatroniques ne saurait se résumer à l'adaptation de systèmes de commande électronique pilotés par ordinateur sur des mécanismes existants. Elle nécessite dès le début de l'étude, l'intégration des différentes technologies répondant aux exigences fonctionnelles. On parle alors d'ingénierie parallèle, simultanée, concourante, ou collaborative que l'on regroupe parfois sous le vocable "ingénierie intégrée". Et la mise en œuvre d'une démarche d'ingénierie intégrée conduit à repenser l'organisation interne de l'entreprise et son mode de fonctionnement. Dans cette perspective, les "processus" qui concourent à l'élaboration des produits, évaluent les solutions techniques permettant de répondre au besoin de l'utilisateur final et des acteurs du cycle de vie (concepteurs, fabricants, logisticiens, vendeurs, utilisateurs, réparateurs...). Mais la complexité des produits, l'intégration croissante des métiers d'ingénierie et de maintenance et le mariage des technologies génèrent des problèmes de fiabilité, de sûreté de fonctionnement et de maîtrise des risques qui deviennent une préoccupation majeure.

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Pour expliquer les apports et les concepts de base de l’ingénierie intégrée, Jean-Claude Bocquet, Ecole Centrale Paris, prend l'exemple du système de freinage Messier Bugatti de l'A 380. Le développement de ce système hautement mécatronique a été envisagé dans le cadre d'un système industriel traversé par les flux opérationnels et flux support. Dans les arborescences de processus, d'activités et de décisions, le problème majeur de développement des produits est alors de savoir comment maîtriser les processus décisionnels collaboratifs. Avec pour but d'intégrer à la fois le cycle de vie, les partenaires, les flux, les systèmes, les contraintes, les décisions, les process, les outils, les données… Parlant du déploiement de l’ingénierie de fiabilité lors du processus de conception, Patrick Lyonnet, ENI Saint-Etienne, recense les outils mis en oeuvre pour évaluer et construire la fiabilité des systèmes mécatroniques. Fiabilité définie comme "la probabilité pour qu’un élément remplisse une fonction requise dans des conditions définies et pendant une période définie (norme ISO 8927)". "Pour mettre en place une politique de fiabilité, il faut prendre en compte les processus de conception (fiabilité prévisionnelle et fiabilité expérimentale ), d'industrialisation, de fabrication (déverminage) et de SAV (fiabilité

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opérationnelle) ". Il fait ensuite le tour des outils de fiabilité "statique" (analyse fonctionnelle, AMDEC, AEEL, bloc diagramme, REX…) et "expérimentale" (essais de qualification, essais sévérisés, accélérés, technique bayésienne…). Dans le prolongement, Dominique Charpentier (Ineris) définit ce qu'est le risque tolérable d'un événement dangereux ainsi que les niveaux de protection pour réduire la fréquence de cet événement. Intervenant sur la maîtrise des risques et la conception des dispositifs de sécurité, il précise que le concept de réduction du risque est fondamental dans le développement des produits et définit différentes techniques d’analyse de risque issues de l’arbre de défaillance et de l’AMDEC (graphe de risque, matrice de criticité, méthode "layer of protection analysis"…) Une étude de cas porte sur la conception de la fonction de sécurité d'un méthanateur pétrochimique (protection contre le risque d’emballement thermique assurée par des transmetteurs de température).

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Comment dimensionner un essai et prendre en compte tous les facteurs influant sur la qualité de

la pièce ? Anthony Poncet, Renault Trucks, s'appuie sur le célèbre cycle en V pour montrer comment assurer un bon niveau de fiabilité des composants d'un système. "Si l'exigence première est de réduire les coûts, il faut par conséquent réduire la durée des essais ". Partant de l'idée qu'un modèle défaillant est généré par des facteurs endommageants influant sur la fiabilité, il détermine un essai synthétique accéléré de tous les facteurs endommageants, ainsi que l'appréciation de ces facteurs d'accélération par rapport à des essais en situation normale. L'exemple précis d'une application sur des engrenages, avec une série d'essais sur quatre conditions de couple/température permet de prendre en compte toute la variabilité du client.

Reprenant lui aussi cette thématique du nombre d'essais représentatifs, Aymeric Debavelaere, Renault, présente un autre outil statistique d'aide à la fiabilité : les plans d'expériences numériques. "Ils permettent de quantifier l’influence des facteurs, de modéliser/optimiser la réponse, de réduire sa variabilité et in fine, d’optimiser le nombre d’essais ou de simulations à réaliser pour hiérarchiser des influences, modéliser une surface de réponse, optimiser une prestation..." L'exemple de mise en oeuvre sur une boîte de vitesse permet de rechercher les paramètres influents sur le saut de marche arrière. La démarche de résolution consiste à construire un arbre défaillance (identification des paramètres) et un plan d’expériences (hiérarchisation de ces paramètres) à 12 essais sur un modèle numérique (outil Romax Designer). "Après abandon des voies de résolution sans potentiel et concentration sur le mode de défaillance majeur qui consistait en un "dévissage" des crabots des deux pignons par micro reptations, la solution à ce désengagement intempestif de marche arrière a été trouvée en 3 jours ".

Pour optimiser les coûts de maintenance dans le "design to cost" des hélicoptères, Guillaume Poncelin (Eurocopter) part de l'importance (30%) des Direct Maintenance Cost (DMC) et de la nécessité de développer une méthode pour les maîtriser dès les phases de conception des produits. "La méthode FIDES de prédiction de fiabilité de l'électronique que nous avons développée permet la prévision des DMC, l'identification et la quantification des causes externes de non-fiabilité qui mènent à l'étude de rentabilité. Elle propose un guide procédural pour un cycle de vie fiable des équipements. En calculant l’impact de la réduction de contrainte extérieure (gain par secteur thermique, vibratoire, chimique…) dans chaque zone de l’appareil (nez, planche de bord, pupitre, poutre de queue…), FIDES permet d'aller pas à pas vers une conception au "juste nécessaire" des solutions de résolution des contraintes et vers une sélection des produits les plus adaptés ". FIDES sera prochainement étendu aux domaines mécaniques et électro-mécaniques. Pour systématiser le déroulement des analyses de risques, APSYS (groupe EADS) a développé un atelier de simulation et d'optimisation de la sureté de fonctionnement des systèmes (progiciels Simfia), de maintenance (Simlog) et de diagnostiic (Diagsys) afin d’assister un opérateur ou un agent de maintenance dans la recherche de pannes. Selon Emmanuel Arbarétier (APSYS), les quatre étapes de leur méthodologie de modélisation concernent l'élaboration des spécifications, l'élaboration d'un premier modèle de la solution interne, la détermination du support exécutif et de la configuration et enfin la réalisation physique. "L'ingénierie des modèles est la meilleure des solutions pour les études de fonctionnement. Elle nécessite un investissement de départ (production des modèles, intégration des outils dans les SI de l'entreprise, formation des utilisateurs…), mais ce référentiel unique permet de simuler tous les points de vue nécessaires (analyse de mode de défaillance, AMDEC, sécurité, performance…) ".

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Cette première journée orientée en priorité vers les bureaux d’études, s'est prolongée par les perspectives qu'offre le prototypage rapide (Rapid Prototyping Technologies) aux concepteurs (petites séries, pièces complexes, visualisations). Philippe Bertrand, ENISE, rappelle d'abord comment on est passé de la stéréolithographie (années 80) à l'outillage rapide (1992) puis à la fabrication directe (aujourd'hui). Il explique qu'au cours des dix dernières années, les machines, les poudres, l'offre et les applications ont beaucoup évolué. "Aujourd'hui, la fabrication directe par fusion de poudre autorise la fabrication d'objets 3D à géométrie complexe en multimatériaux et usages multifonctionnels. Elle permet d'avoir des propriétés mécaniques comparables aux procédés conventionnels. Seuls, les problèmes de précision et d'état de surface nécessitent des opérations de finition supplémentaires. Aussi, pour percer le monde industriel, il faudra augmenter la robustesse du procédé, utiliser uniquement des poudres du commerce, réduire le coût des machines et augmenter productivité ". Le procédé utilise en fait deux technologies : sur lit de poudre ou par apport direct de poudre. Le premier part d'un fichier CAO qui découpe la pièce en tranches (couches). Un post-processeur programme la machine qui fuse la poudre grâce à un faisceau laser et reconstruit la pièce couche par couche en "bonne matière". La fabrication directe par apport de poudre se fait par rechargement laser grâce à une buse d'injection coaxiale au faisceau laser. Cette technique permet de réaliser des pièces "multimatériaux". "A l'heure actuelle, le lit de poudre est le plus facilement transférable à l'industrie, mais c'est l'injection coaxiale de poudre qui présente le plus de potentialité à cause de la possibilité de fabriquer directement des pièces multimatériaux multifonctionnelles ". Le Grand Projet Poudre (GPP) Multimat porté par le CETIM est intégré dans le pôle Via Méca. Igor Smurov, directeur du Laboratoires Diagnostic et Imagerie des Procédés Industriels (DIPI) prolonge cette présentation en mentionnant les études effectuées par son équipe sur une machine Phénix. Notamment la recherche des paramètres opératoires (nombre et épaisseur des couches, avance de dépôt…) sur divers matériaux (inox 904L, Ni625, inconel 750, Cu/Sn, W, WC…) et pour la réalisation de "murs" de 100, 200 et 400 µm d'épaisseur.

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Pour introduire l'idée de la compétitivité par l’innovation de l’intégration mécatronique, Patrick

Ranson, CETIM, rappelle d'abord que le bon positionnement concurrentiel d’un produit résulte de l’application de la stratégie des 4P (Mac Carthy) : Produit (différenciation/concurrence, adéquation au besoin du client, innovation, intégration…), Prix (accord avec le juste prix estimé par le client), Place (distribution) et Promotion (communication). "Dans un projet mécatronique, la stratégie produit est cruciale, car la différentiation par rapport à la concurrence sera fortement dépendante du caractère innovant, de la profondeur d’intégration, des fonctions émergentes, du niveau de qualité (fiabilité) ". Après avoir évoqué deux réussites mécatroniques, la raquette de tennis "Protector" de HEAD Technologie EDS et le roulement de roue ASB de SNR, il poursuit en affirmant que "l’intégration de la mécatronique a permis à ces deux sociétés de prendre des parts de marché (ou de nouveaux marchés) et d’élargir leur offre : SNR est ainsi fournisseur potentiel d’électronique de mesure et Head est en posture d'une dimension paramédicale. Elle leur a aussi permis de devenir un interlocuteur privilégié en passant d'un rang n au rang n – 1, d’augmenter leur rayonnement industriel, de développer leur réseau de partenaires dans le cadre de la R&D (SNR avec le LETI ou l’Université d’Annecy) et de développer de nouveaux partenariats industriels (SNR avec Continental THEVES pour l’intégration du capteur dans le volant) ".

Pour illustrer le poids économique de l’électronique automobile, Thierry Dujardin (cabinet Décision) fait état d'un taux de croissance global de l'industrie électronique de 6,5% avec pour l’électronique automobile un taux de 6,7%, soit un poids pour l'UE de 25 MM€/an, (le CA d’Airbus Industrie était de 22,3 MM€ en 2005 !). Selon lui, les principaux "moteurs" de la mécatronique automobile sont la baisse des coûts, la satisfaction de fonctions innovantes, l'accroissement de la "prestation client" et l'amélioration des technologies "traditionnelles" (mécaniques, hydrauliques…). C'est aussi l'apport d'une plus grande fiabilité et d'auto-diagnostics puissants (remèdes aux pannes), l'observation de réglementations de plus en plus contraignantes (pollution, consommation, sécurité des passagers et piétons…) et la garantie d'une barrière face aux pays "low cost".

Thierry Dujardin estime que le marché européen de la mécatronique évalué aujourd'hui à 32 MM€ devrait atteindre 39 MM€ en 2015, soit une croissance de 3,5% par an sur la période 2010 – 2015.

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L’électronique rentrant pour 25 % du coût d’une automobile en 2004, sera présente à hauteur de 30 % en 2010, mais… Et nous revenons aux notions de fiabilité puisqu'aujourd’hui, 35% des défaillances proviennent de l’électronique (chiffre ADAC). "Les constructeurs doivent donc faire évoluer leur organisation, historiquement très "mécanique" avec trois grandes approches : la mise en place d’une véritable culture mécatronique, le développement d’une véritable standardisation, (est-il nécessaire qu'il y ait un ABS Peugeot et un ABS Renault ?) et enfin une approche globale de la conception à la mise sur le marché ". Analysant les compétences qu'exige la mécatronique, il pose quelques facteurs clés de réussite (voir encadré).

Facteurs clés de succès pour une entreprise de culture mécanique • S’intéresser à l’usage qui est fait du composant par l’acheteur, • S’intéresser à l’ensemble final, à la technologie employée et à son évolution, • Raisonner en "fonction" et non en "pièce, • Disposer d’ingénieurs et de techniciens curieux, créatifs, "vendeurs” de leurs idées, • Protéger son idée dès le début par des brevets, • Donner aux ingénieurs les moyens de s’informer, de développer et maquetter leurs idées, • Savoir s’entourer de compétences complémentaires connaissant les métiers porteurs, • S’allier à des laboratoires de recherche, • Rester dans son cœur de métier, • Passer des alliances stratégiques avec de grands équipementiers (SNR-Bosch) • Informer les clients potentiels des avancées de la technologie.

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"Les entreprises forteresses, c'est terminé ! La mécatronique pousse les entreprises vers l'extérieur ". Selon Jean Denis Sauzade, Telemaq, il y a trois raisons à cela. L'entreprise est organisée par métier, or la mécatronique exige la pluridisciplinarité, l'ouverture vers d'autres métiers (société "en réseau", entreprise élargie…) et la quête d'informations extérieures (veille technologique). Elle est aussi organisée séquentiellement (BE, BM, R&D, production…) alors que la mécatronique implique une approche globale et induit l'idée de relations coopératives (ingénierie concourante, co-conception…). Enfin, l'entreprise est hiérarchisée alors que la mécatronique conduit à la flexibilité, d'où l'accès aux notions d'agilité… "La conception externalisée est une clef de succès. Elle suppose une certaine neutralité face aux solutions technologiques (pas d’historique, pas de préjugés…). Les transferts technologiques permettent de bénéficier d’expériences acquises dans d’autres domaines, d'augmenter le rythme d'innovations (réduction du "time to market"), d'avoir un meilleur contrôle des coûts de R&D et d'accélérer les prises de décision ".

La mécatronique générant une nouvelle approche d'un projet, elle induit aussi une évolution du métier du vendeur vers un mélange des technologies (mécanique, électrique, information). Pour Pascal Laurin (Bosch Rexroth), le vendeur spécialiste doit devenir un multi-spécialiste. "Un vendeur de composants pneumatiques, de formation plutôt mécanique, doit évoluer vers une compétence automatisme et savoir parler de bus de terrain, de diagnostic, d'Ehernet. Un vendeur motorisation et commande, de formation plutôt automatisme doit d’évoluer vers une compétence mécanique ". Le vendeur mécatronique doit aussi aller vers la recherche de clients demandeurs de systèmes intégrés et compacts et devenir un "chargé d’affaires". Enfin, il doit se positionner différemment pour aborder un marché, une affaire, un projet. "La vente dite "individualiste" doit devenir une vente d’équipe : si un projet implique deux technologies, pneumatique et électrique, par exemple, il est indispensable de veiller à ce que les deux vendeurs spécialisés sur ces technologies discutent avec les deux interlocuteurs du BE client sans les étiquettes "pneumatique" et "électrique". La démarche mécatronique suppose un mixage des technologies, des compétences ainsi que des interlocuteurs-décideurs. Le vendeur idéal est un homme/femme de synthèse, capable d'aborder un projet dans sa globalité et de fédérer différents services ".

Philippe Lutz (Laboratoire d’Automatique de Besançon, introduit ensuite le concept de micro-usines pour la production de composants mécatroniques (ou autres) dont les tailles sont de plus en plus réduits.

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Alpes Deis (Développement Electronique Informatique Systèmes) a mené 388 projets en 10 ans dont 64 projets mécatroniques (défini comme suit : une fonction historiquement mécanique a été optimisé par adjonction de l'électronique). Elle possède un porte-feuille de clients aussi prestigieux que Nestlé, SEB, Invensys, PSA, SNR, EDF, Thalès ou Somfy. Mentionnant un échec (niveau d'une bouteille de gaz) et deux réussites (montre haut de gamme "Swiss made" avec mouvement mécatronique et support mural pour écran télévision motorisé télécommandable), Eric Bruyat, responsable de laboratoire, analyse les facteurs d'échec liés au marketing (concurrent plus rapide, idée trop en avance, gadget…), au cahier des charges (manque de rigueur et oubli, précision excessive…), à l'étude (données de sortie insuffisante, mauvais partenaire…), à la fabrication (choix du partenaire industriel, choix de délocalisation…). Parmi les facteurs de succès, il propose de savoir profiter des fonctions gratuites de l'électronique… et d'avoir vécu des échecs pour en tirer les conséquences !

Serge Grygorowicz, directeur RB3D, note pour sa part qu'une démarche mécatronique génère trois axes de gains. Gains commerciaux par l'originalité de l'offre et des outils manuels standards. Gains de développement par le biais d'un métissage technique impliquant créativité, cohésion d'équipe, compacité et intégration des produits et définition des interfaces en amont. Gains en production enfin : "on voit apparaître aujourd'hui l'émergence d'une nouvelle race de monteurs multi-métier qui règlent un positionnement avec un tournevis et un oscilloscope ". Ludovic Marais, Rexroth, montre pour sa part, comment la mécatronique a totalement métamorphosé une vanne pneumatique en incorporant le pilotage au cœur de la partie pneumatique. Le CETIM s'est mobilisé (entre autre) sur l'intégration de mécatronique et d'intelligence dans les engins mobiles. Guy Galand, Startec, mentionne trois secteurs d'étude (sécurité/réglementation, augmentation des performances, maintenance préventive) sur trois démonstrateurs : une structure poly-articulée hydraulique (mini-pelle hydraulique Volvo), une nacelle (détection d'obstacles) et un treuil installé sur banc.

Enfin, dernier exemple du déploiement de la mécatronique dans l’industrie, Denis Reboul, Cegelec et Jean-Pierre Thomesse, Loria Nancy présentent le système Proteus, plate-forme d'intégration d'outils de maintenance. Système qui part du constat qu'un équipement peut être vu de plusieurs manières différentes par la maintenance (par le système de gestion CMMS, par l'ERP, par un système experts…) et que "tous sont complémentaires, mais pas forcément cohérents. La nécessité de Proteus est de donner une cohérence à la description des modèles des outils ".

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Former des mécatroniciens, oui ! Mais qui, quand, en combien de temps, par qui, pour qui et comment ? Jacques Lottin, ESI d’Annecy, cerne le secteur de la formation en mécatronique et la façon dont elle répond aux attentes industrielles. Il pose aussi une autre question : peut-on anticiper les capacités d'un technicien ou d'un ingénieur à gérer un projet mécatronique ? En effet, cet homme/femme doit avoir une spécialité, mais parallèlement il doit avoir une certaine pertinence en mécanique, en électronique, en informatique, en automatique… voire même en science des matériaux ! La perspective d'une "sainteté mécatronique" a fait sourire l'assistance. "Mieux vaut cependant revenir sur terre : promouvoir le développement de la culture mécatronique, assurer les moyens de compléter la formation des jeunes ingénieurs (d'où la nécessité de formations continues) et attirer des étudiants… qui préfèrent parfois se sécuriser en se spécialisant dans une seule discipline ". Un intervenant fait remarquer qu'on ne peut avoir une bonne formation de mécatronicien en sortant de l'école. "On le devient avec l'expérience et après avoir pris des coups dans l'entreprise. On ne regarde pas assez la mécatronique au niveau de la formation continue et là, les Centres Techniques ont un rôle fondamental à jouer ". En réponse à une question sur une éventuelle stagnation de la mécatronique, André Montaud, Thésame, affirme que "les industriels affichent rarement le "Mécatronique Inside" comme un facteur différenciant… même si (a contrario) le concept commence à devenir un élément marketing. La difficulté à "entrer en mécatronique" se situe plus au niveau de l'industrialisation que de la conception, car le basculement est un vrai changement de métier surtout au niveau du contrôle qualité ". Rebondissant sur l'idée que les PME ne pourront jamais maîtriser la totalité des disciplines de la technologie, il évoque le CIME : "Arve Industrie développe l'outil mutualisé CIME (Centre d'Intégration Mécatronique Européen) qui

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rassemble les offreurs publics (formation, R&D et précompétitif), les offreurs privés acteurs du développement (fournisseurs de briques mécatroniques, BE spécialisés…) et enfin les utilisateurs (PME ou groupes industriels) qui "récupèrent" les flux apportés et les transforment en produits ". Thierry Dujardin pense que la mécatronique est un bon exemple de ce dont l’industrie a besoin aujourd’hui. "Le métier d'ingénieur change… Les industriels ont besoin d’experts de plus en plus "pointus" qu’il faut garder comme experts en leur donnant les moyens de "voir ailleurs" pour conforter leur expertise. Ils ont également besoin de chefs de projet capables de diriger une diversité de talents (d'experts !) en posant les bonnes questions, en comprenant les réponses et en tirant les bonnes conclusions ". Jean-Yves Catherin et André Montaud Synthèse réalisée pour le compte de Thésame