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© Fotolia.com/ juridique | gestion I l est toujours arrivé en LABM, et il arrive tou- jours en LBM, que les associés se disputent. Cela tient sans doute à la personnalité des professions libérales puisque cela se rencontre également dans les autres professions médicales ou pharmaceutiques. Exemples de mésentente Les conflits chez les biologistes peuvent prendre des dimensions dramatiques ; citons notamment le cas d’un biologiste qui ne voulait pas d’un regroupement et qui en était arrivé à envoyer des lettres à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) pour dénoncer des actes plus ou moins litigieux, et écrivait aux patients que les analyses n’étaient pas exécutées dans le laboratoire. Il y eut aussi le cas intéressant de deux biologistes, directeurs d’une belle société civile profession- nelle (SCP), qui ne se parlaient plus (ils se connais- saient depuis l’enfance) : les commerciaux étaient obligés de prendre rendez-vous avec l’un, puis avec l’autre. Lors de la fusion avec d’autres labo- ratoires, cette mésentente a failli faire échouer tout le projet de regroupement jusqu’à ce que, après bien des péripéties, une solution soit trou- vée en séparant finalement les deux compères, l’un allant travailler sur un autre site puisque c’est la société d’exercice libéral (SEL) qui allait deve- nir propriétaire de tous les laboratoires, et que le fait de travailler dans l’un ou l’autre site était finalement moins important, quoique la fierté et les convenances personnelles eussent longtemps empêché la raison de prévaloir. Aujourd’hui, les conflits sont plus difficiles à régler dans la mesure où les biologistes “principaux” se retrouvent sur le plateau technique et que les autres laboratoires deviennent souvent des centres de prélèvements. Ainsi, la gestion des “ressources humaines” à commencer par celle des “patrons” est essentielle dans tout projet de regroupement, sauf à ce que des conflits écla- tent après la fusion, ce qui risque alors d’être beaucoup plus dommageable. Une jurisprudence récente en donne une idée. Une dissolution validée par la Cour de cassation Une société civile de moyens (SCM) a été créée par deux médecins, puis un tiers des parts fut cédé à un troisième. Faisant état de l’inexécution de ses obligations par ce dernier et de la mésen- tente existant entre les associés, les fondateurs demandent la dissolution de la société pour justes motifs. La Cour de cassation constate que : – le conflit qui oppose les associés concernant la contribution du dernier arrivé aux charges de la SCM a dégénéré après les propos agressifs tenus par ce dernier et les poursuites disci- plinaires engagées contre lui par les autres associés ; – le fonctionnement de la société est complè- tement et définitivement bloqué, l’absence de l’associé ayant empêché de rassembler les trois quarts des parts sociales nécessaires à la réu- nion d’une assemblée générale extraordinaire dans les conditions prévues par les statuts ; – l’associé ne paye plus sa part de charges de sorte que le secrétariat n’est plus organisé en commun et que de nombreuses procédures, lon- gues et coûteuses, opposent les parties ; – au lieu de chercher une solution en participant aux assemblées générales, l’associé fait défaut et a demandé l’annulation des assemblées tenues hors sa présence. En conséquence, la Cour de cassation fait droit à la demande après avoir déduit des constatations ci-dessus que le fonctionnement de la société était paralysé tant en raison de l’inexécution de ses obligations par l’associé que de la mésentente entre les trois associés. | GÉRARD GUEZ Avocat à la Cour de Paris [email protected] Mésentente entre associés

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I l est toujours arrivé en LABM, et il arrive tou-jours en LBM, que les associés se disputent. Cela tient sans doute à la personnalité des

professions libérales puisque cela se rencontre également dans les autres professions médicales ou pharmaceutiques.

Exemples de mésententeLes conflits chez les biologistes peuvent prendre des dimensions dramatiques ; citons notamment le cas d’un biologiste qui ne voulait pas d’un regroupement et qui en était arrivé à envoyer des lettres à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) pour dénoncer des actes plus ou moins litigieux, et écrivait aux patients que les analyses n’étaient pas exécutées dans le laboratoire. Il y eut aussi le cas intéressant de deux biologistes, directeurs d’une belle société civile profession-nelle (SCP), qui ne se parlaient plus (ils se connais-saient depuis l’enfance) : les commerciaux étaient obligés de prendre rendez-vous avec l’un, puis avec l’autre. Lors de la fusion avec d’autres labo-ratoires, cette mésentente a failli faire échouer tout le projet de regroupement jusqu’à ce que, après bien des péripéties, une solution soit trou-vée en séparant finalement les deux compères, l’un allant travailler sur un autre site puisque c’est la société d’exercice libéral (SEL) qui allait deve-nir propriétaire de tous les laboratoires, et que le fait de travailler dans l’un ou l’autre site était finalement moins important, quoique la fierté et les convenances personnelles eussent longtemps empêché la raison de prévaloir.

Aujourd’hui, les conflits sont plus difficiles à régler dans la mesure où les biologistes “principaux” se retrouvent sur le plateau technique et que les autres laboratoires deviennent souvent des centres de prélèvements. Ainsi, la gestion des “ressources humaines” à commencer par celle des “patrons” est essentielle dans tout projet de regroupement, sauf à ce que des conflits écla-tent après la fusion, ce qui risque alors d’être beaucoup plus dommageable. Une jurisprudence récente en donne une idée.

Une dissolution validée par la Cour de cassationUne société civile de moyens (SCM) a été créée par deux médecins, puis un tiers des parts fut cédé à un troisième. Faisant état de l’inexécution de ses obligations par ce dernier et de la mésen-tente existant entre les associés, les fondateurs demandent la dissolution de la société pour justes motifs.

La Cour de cassation constate que :– le conflit qui oppose les associés concernant la contribution du dernier arrivé aux charges de la SCM a dégénéré après les propos agressifs tenus par ce dernier et les poursuites disci-plinaires engagées contre lui par les autres associés ;– le fonctionnement de la société est complè-tement et définitivement bloqué, l’absence de l’associé ayant empêché de rassembler les trois quarts des parts sociales nécessaires à la réu-nion d’une assemblée générale extraordinaire dans les conditions prévues par les statuts ;– l’associé ne paye plus sa part de charges de sorte que le secrétariat n’est plus organisé en commun et que de nombreuses procédures, lon-gues et coûteuses, opposent les parties ;– au lieu de chercher une solution en participant aux assemblées générales, l’associé fait défaut et a demandé l’annulation des assemblées tenues hors sa présence.En conséquence, la Cour de cassation fait droit à la demande après avoir déduit des constatations ci-dessus que le fonctionnement de la société était paralysé tant en raison de l’inexécution de ses obligations par l’associé que de la mésentente entre les trois associés. |

GÉRARD GUEZ

Avocat à la Cour de Paris

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