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Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
La dénutrition résulte d’un déséquilibre entre les apports et les besoins de l’organisme. Un apport protéino-énergétique insuffisant par
rapport aux besoins physiologiques entraîne des conséquences fonctionnelles négatives de sévérité variable. Lors de dénutrition sévère, il y a toujours des déficits nutritionnels spécifiques associés (fer, acide folique, vitamine B12, zinc, etc.).La dénutrition est une maladie en soi et non, seu-lement, une complication de l’affection basale. Elle peut être accentuée par l’isolement, la dépres-sion, la désinsertion sociale, les handicaps physiques ou psychologiques, ou encore les difficultés financiè-res. L’appétit et la soif peuvent alors être émoussés. Il s’agit d’une maladie fréquente, méconnue et sour-noise, d’installation progressive, pouvant entraîner des pronostics sévères, qui doit être dépistée.La prévalence de la dénutrition est de 4 à 10 % chez les personnes âgées vivant à domicile, de 15 à 38 % en institution et de 30 à 70 % chez les malades âgés hospitalisés. Elle augmente également avec l’âge.
Causes et conséquences de la dénutritionLe vieillissement n’est pas l’unique cause de dénu-trition. En effet, elle s’installe chez le sujet âgé en présence d’insuffisance d’apports alimentaires (dénu-trition exogène) et/ou de maladies chroniques dégé-nératives, infectieuses ou inflammatoires (dénutrition endogène) (figure 1).
La dénutrition endogène peut être liée, selon la Haute Autorité de santé (HAS), à :− des cancers ;− des défaillances d’organe chroniques ou sévères ;− des pathologies à l’origine de mal-digestion et/ou de malabsorption ;− un alcoolisme chronique ;− des pathologies infectieuses et/ou inflammatoires chroniques ;− des situations susceptibles d’entraîner une diminu-tion des apports alimentaires et/ou une augmentation des besoins énergétiques ;− des pathologies liées à l’âge (troubles bucco-den-taires, dépendance, syndromes démentiels…). La dénutrition exogène est liée à la diminu-
tion des apports alimentaires dans un contexte social difficile. L’isolement social et/ou familial, le manque d’aide pour l’organisation des courses et la préparation des repas, de faibles ressources financières ont un impact sur la qualité des repas. La baisse des capacités psychiques (dépression, démence…) et physiques du sujet âgé entraîne une perte d’autonomie pour les actes de la vie quotidienne. L’ignorance des besoins nutrition-nels, des fausses idées sur les régimes (sans sel, hypocholestérolémiants…), une surconsomma-tion médicamenteuse ou un choc psychologique comme un deuil contribuent à la diminution des apports nutritionnels.
Définition et dépistage de la dénutrition
La dénutrition, fréquente, surtout dans la population âgée, engendre de nombreuses
complications, notamment la survenue d’affections ou l’aggravation d’un pronostic
de maladie en cours, et augmente ainsi le risque de morbidité.
Figure 1 : Les causes de la dénutrition.
Vieillissement
Affections
Environnement
s Médicaments et régimes
Dénutrition
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R
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Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
Dépistage, prise en charge et suivi de la personne âgée dénutrie
Ces deux types de dénutritions sont le plus sou-
vent liés et s’aggravent mutuellement, entraînant des difficultés thérapeutiques.
Les complications de la dénutrition Les conséquences de la dénutrition sont graves
et nombreuses : allongement des durées d’hospita-lisation, augmentation des risques d’infection noso-comiale, de chute, de fracture ou d’entrée dans la dépendance, déficit immunitaire, dépression, aggra-vation des maladies chroniques… L’incompétence du système immunitaire favo-
rise des infections, responsables d’anorexie et d’hy-percatabolisme, aggravant la dénutrition et le déficit immunitaire, et entraînant un cercle vicieux. La dénutrition se répercute sur d’autres fonc-
tions physiologiques comme la sécrétion hormonale, la synthèse d’albumine ou l’équilibre minéralo-calci-que. Le déficit vitaminique lié à la malnutrition peut provoquer une asthénie et des troubles psychiques ou neurologiques. La carence en calcium favorise la fragilité osseuse (ostéoporose). La dénutrition augmente la morbidité infectieuse
de 2 à 6 fois et multiplie le risque de mortalité par 2 à 4. Elle multiplie également de 2 à 4 la durée d’hos-pitalisation pour la même affection. Elle augmente le risque d’infections nosocomiales et d’escarres. Elle peut être responsable de l’épuisement des réserves de l’organisme, de la perte d’autonomie, jusqu’au décès (figure 2). De plus, selon certaines études, le risque de démence sénile peut varier en fonction de facteurs alimentaires.
Stratégies de dépistageLa Haute Autorité de santé (HAS) recommande un dépistage chez toutes les personnes âgées :− au minimum une fois par an en ville ;− au minimum une fois par mois en institution ;
− lors de chaque hospitalisation.Un dépistage est également préconisé chez les per-sonnes âgées à risque de dénutrition, de façon plus fréquente, en fonction de l’état clinique de la per-sonne et de l’importance du risque.Le protocole de dépistage d’une dénutrition chez le sujet âgé est présenté sur la figure 3.
Recherche des situations à risque
Les situations liées à la dénutrition peuvent être spé-cifiques de la personne âgée (tableau 1, page sui-vante) ou sans lien avec l’âge : cancer, insuffisance rénale, insuffisance hépatique, insuffisance cardia-que, insuffisance respiratoire, pathologies digestives à l’origine de mal-digestion et/ou malabsorption,
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Figure 2 : La spirale de la dénutrition (selon le Dr Monique Ferry).
Figure 3 : Dépistage d’une dénutrition chez un sujet âgé.
Recherche des situations à risque
Prise en charge rapide
Corrections des risques nutritionnels
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: Dépistage d’une dénutrition chez un sujet âgé
Prise en charge nutritionnelle
Estimation de l’appétit des apports alimentaires
Diagnostic Dénutrition Dénutrition sévère
Perte de poids > 5 % en 1 mois
> 10 % en 6 mois
Indice de masse corporelle < 21 < 18
Albuminémie < 35 g/L < 35 g/L
Échelle MNA < 17
Les 12 signes d’alerte de la dénutrition
La présence d’un seul de ces éléments suffit à évoquer
un risque de dénutrition :
− des revenus financiers insuffisants ;
− une perte d’autonomie physique ou psychique ;
− un veuvage, une solitude, un état dépressif ;
− des problèmes bucco-dentaires ;
− des régimes restrictifs ;
− des troubles de la déglutition ;
− une consommation de deux repas par jour seulement ;
− une constipation ;
− une prise de plus de trois médicaments par jour ;
− une perte de 2 kg pendant le dernier mois ou de 4 kg durant
les six derniers mois ;
− une albuminémie < 35 g/L ou cholestérolémie < 1,60 g/L ;
− toute maladie aiguë sévère.
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Définition et dépistage de la dénutrition
Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
alcoolisme, pathologies infectieuses et pathologies inflammatoires.
Évaluation de l’état nutritionnel
La diversité de l’alimentation est évaluée auprès du sujet âgé et de son entourage :− consommation de fruits, légumes, protides (vian-des, poissons, œufs), de produits laitiers ;− apports hydriques.Un livret d’accompagnent destiné aux professionnels de santé est disponible sur le site internet du Pro-gramme national nutrition santé (PNNS) : http://www.mangerbouger.fr/pnns/.L’évaluation peut s’effectuer à l’aide de deux outils : le calcul des ingesta et le Mini nutritional assessment.
Le calcul des ingestaUne grille de surveillance alimentaire (tableau 2, page suivante) permet la mesure des aliments réellement consommés (les ingesta). Cet outil est mis en œuvre en institution ou lors d’une hospitalisation. Il est diffi-cilement réalisable à domicile. La grille doit être com-plétée par la personne qui aide le sujet âgé à manger. La surveillance doit être menée sur 24 heures, voire sur 3 jours.L’évaluation précise des apports se fait par une enquête alimentaire, au mieux réalisée par un dié-téticien, ce qui n’est malheureusement pas toujours possible. Un interrogatoire alimentaire simple permet :− d’apprécier l’appétit du patient ;− de repérer des “erreurs alimentaires” évidentes (saut de repas, idées fausses sur les besoins, pas de consommation quotidienne de viande, d’œuf ou de poisson, absence de fruits et de légumes, excès de boissons alcoolisées...) ;− de repérer un régime élaboré par la personne elle-même ;− de repérer des troubles du comportement alimentaire.Les apports nutritionnels conseillés (ANC) en énergie et en protéines pour la population âgée (tableau 3, page suivante) sont de 36 kcal/kg de poids corporel/jour et de 1 g/kg de poids corporel/jour. Le risque de dénutrition est élevé pour des apports inférieurs à 25 kcal/kg de poids corporel/jour (soit 1 500 kcal/jour), ou de 0,8 g/kg de poids corporel/jour pour les protéines. En cas de dénutrition avérée, les ANC en protéines sont d’au moins 1,5 g de protéines/kg de poids corporel/jour.
Tableau 1 : Situations liées à la dénutrition spécifique
de la personne âgée
Situations Causes possibles
Psycho-socio-
environnementales
Isolement social
Deuil
Difficultés financières
Maltraitance
Hospitalisation
Changement des habitudes de vie
(entrée en institution)
Troubles bucco-dentaires Troubles de la mastication
Mauvais état dentaire
Appareillage mal adapté
Sécheresse de la bouche
Candidose oro-pharyngée
Dysgueusie
Troubles de la déglutition Pathologie ORL
Pathologie neurodégénérative ou vasculaire
Troubles psychiatriques Syndromes dépressifs
Troubles du comportement
Syndromes démentiels Syndrome confusionnel
Troubles de la vigilance
Syndrome parkinsonien
Autres troubles neurologiques Syndrome confusionnel
Troubles de la vigilance
Syndrome parkinsonien
Traitements médicamenteux
au long cours
Polymédication
Médicaments entraînant une sécheresse de la
bouche, une dysgueusie, des troubles digestifs,
une anorexie, une somnolence…
Corticoïdes au long cours
Toute affection aiguë
ou décompensation
d’une pathologie chronique
Douleur
Pathologie infectieuse
Fracture entraînant une impotence fonctionnelle
Intervention chirurgicale
Constipation sévère
Escarres
Dépendance pour les actes
de la vie quotidienne
Dépendance pour l’alimentation
Dépendance pour la mobilité
Régimes restrictifs Sans sel
Amaigrissant
Diabétique
Hypocholestérolémiant
Sans résidu au long cours©
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Les apports nutritionnels conseillés en énergie et en protéines pour la population âgée sont de 36 kcal/kg de poids corporel/jour et de 1 g/kg de poids corporel/jour.
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Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
Dépistage, prise en charge et suivi de la personne âgée dénutrie
Le Mini nutritional assessmentLe Mini nutritional assessment (MNA) existe en version détaillée et simplifiée (tableaux 4 à 6, page suivante). Le MMA simplifié explore l’appétit, la dépendance, le mode de vie et l’alimentation. Il s’agit d’un outil nutri-
Tableau 2 : Surveillance alimentaire (dépistage et suivi) par mesure des ingesta
Date :
Consommation Rien < moitié > moitié Tout Rien < moitié > moitié Tout Rien < moitié > moitié Tout
Petit-déjeuner
Café ou thé
Lait
Biscotte beurrée
Bouillie
Identification soignantP T P T P T
Collation
Supplément boisson
Identification soignantP T P T P T
Déjeuner
Entrée
Viande
Légumes
Fromage/laitage
Dessert
Boisson
Identification soignantP T P T P T
Goûter
Identification soignantP T P T P T
Dîner
Potage
Viande
Légumes
Fromage/laitage
Dessert
Boisson
Identification soignantP T P T P T
P : aide partielle ; T : aide totale.
Tableau 3 : Apports nutritionnels indispensables
du sujet âgé
Un apport en protéines de 1 g/kg/jour (voire 1,2 g), réparti en 60 % de protéines
animales et 40 % de protéines végétales. La viande rouge apporte également
du fer aisément assimilable
Un apport en vitamines du groupe B, notamment les vitamines B1, B9 et B12
nécessaires au fonctionnement cérébral
Des oligoéléments : zinc et sélénium, deux antioxydants essentiels
De la vitamine D et du calcium nécessaires à la solidité osseuse
Des acides gras essentiels de type oméga 3 pour le fonctionnement cérébral
en particulier, et la qualité des vaisseaux sanguins
tionnel validé pour le dépistage des personnes âgées. Il aborde de manière globale le risque de dénutrition grâce à une enquête alimentaire rapide et à la mesure de marqueurs nutritionnels. Il permet de distinguer les patients :− non dénutris ;− à risque de dénutrition ;− dénutris.Les six premiers items “dépistage” permettent, en 2 à 3 minutes, une approche du risque. Ce MNA simplifié doit toujours être réalisé afin d’évaluer l’état nutri-tionnel d’une personne âgée. Le pharmacien peut également effectuer ce dépistage, rapide et efficace, au vu des signes d’alerte, et orienter le patient vers son médecin traitant, notamment si le score du MNA simplifié est ≤ 11 points. En effet, dans ce cas, il est nécessaire de réaliser un MNA détaillé , plus tech-nique et plus long, mais qui reste du domaine des
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Définition et dépistage de la dénutrition
Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
Tableau 4 : Mini nutritional assessment (MNA) détaillé
Mini nutritional assessment (MNA)
Évaluation nutritionnelle détaillée
Date du test
Nom Prénom
Âge Sexe
Poids (kg) Indice de masse corporelle (IMC) = poids/(taille)2 Hauteur talon-genou
Taille (cm)
Indices anthropométriques
IMC < 19 kg/m2
19 ≤ IMC < 21 kg/m2
21 ≤ IMC < 23 kg/m2
≥ 23 kg/m2
0
1
2
3
Circonférence branchiale (cb en cm) cb < 21
21 < cb < 22
cb > 22
0
0,5
1
Circonférence du mollet (en cm) cm < 31
cm > 31
0
1
Perte de poids < 3 mois Perte de poids > 3 kg
Ne sait pas
Perte de poids entre 1 et 3 kg
Pas de perte de poids
0
1
2
3
Évaluation globale
Le patient vit-il de façon dépendante à domicile ? Non
Oui
0
1
Prend-il plus de 3 médicaments par jour ? Non
Oui
0
1
Le patient a-t-il présenté une maladie aiguë ou un stress psychologique
lors des 3 derniers mois ?
Non
Oui
0
1
Motricité Du lit au fauteuil
Autonome à l’intérieur
Sort du domicile
0
1
3
Problèmes neuropsychologiques Démence ou dépression sévère
Démence ou dépression modérée
Aucun
0
1
2
Escarres ou plaies cutanées Non
Oui
0
1
Indices diététiques
Combien prend-t-il de véritables repas par jour ?
(petit-déjeuner, déjeuner, dîner > 2 plats)
1 repas
2 repas
3 repas
0
1
3
Consomme-t-il 1 fois/jour au moins des produits laitiers ?
Consomme-t-il 1 ou 2 fois/semaine des œufs ou des légumineuses ?
Consomme-t-il chaque jour de la viande, du poisson ou de la volaille ?
Si 0 ou 1 oui
Si 2 oui
Si 3 oui
0
0,5
1
Consomme-t-il 2 fois/jour au moins des fruits ou des légumes ? Non
Oui
0
1
Le patient présente-t-il une perte d’appétit ?
A-t-il moins mangé durant les 3 derniers mois par manque d’appétit,
problèmes digestifs, de mastication ou de déglutition ?
Anorexie
Anorexie modérée
Pas d’anorexie
0
1
2
Combien de verres de boissons (eau, jus, café, lait, vin, bière…)
consomme-t-il/jour ?
Moins de 3 verres
De 3 à 5 verres
Plus de 5 verres
0
1
2
Manière de se nourrir Nécessite une assistance
Se nourrit seul avec difficulté
Se nourrit seul sans difficulté
0
1
2
Évaluation subjective
Le patient se considère-t-il bien nourri ? Malnutrition sévère
Ne sait pas ou malnutrition modérée
Pas de problème de nutrition
0
1
2
Le patient se sent-il en meilleure ou moins bonne santé que la plupart
des personnes de son âge ?
Moins bonne
Ne sait pas
Aussi bonne
Meilleure
0
0,5
1
2
Score total de dépistage (maximum 30 points)
> 24 : état nutritionnel satisfaisant ; 17-23,5 : risque de malnutrition ; < 17 : mauvais état nutritionnel
Tableau 5 : Mini nutritional assessment (MNA) simplifié
Mini nutritional assessment short form (MNA)
Évaluation nutritionnelle simplifiée
Date du test
Nom Prénom
Âge Sexe
Poids (kg) Indice de masse corporelle (IMC)
= poids/(taille)2Hauteur talon-genou
Taille (cm)
Le patient présente-t-il une perte
d’appétit ?
(a-t-il moins mangé durant les
3 derniers mois par manque d’appétit,
problèmes digestifs, de mastication
ou de déglutition ?)
Anorexie sévère
Anorexie modérée
Pas d’anorexie
0
1
2
Perte récente de poids (< 3 mois) > 3 kg
Ne sait pas
1 à 3 kg
Aucune
0
1
2
3
Motricité actuelle Du lit au fauteuil
Autonome à l’intérieur
Sort du domicile
0
1
3
Maladie aiguë ou stress
psychologique dans les 3 derniers
mois
Oui
Non
0
1
Problèmes neuropsychologiques Démence ou dépression
sévère
Démence ou dépression
modérée
Aucun
0
1
2
IMC IMC < 19 kg/m2
19 ≤ IMC < 21 kg/m2
21 ≤ IMC < 23 kg/m2
IMC ≥ 23 kg/m2
0
1
2
3
Score total de dépistage (maximum 14 points)
Si score < 11 (risque de malnutrition)
milieux spécialisés et médicalisés (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes – Ehpad – et hôpitaux).
Facteurs biologiques
Une albumine < 35 g/L et une transthyrétine < 200 mg/L sont les seuils retenus pour définir une dénutrition (tableau 7, page suivante). Dans les cas de dénutrition par carence d’ap-
ports alimentaires protéino-énergétiques sans agression associée, en dehors de tout syndrome inflammatoire, la perte de poids précède la baisse de l’albuminémie. Au contraire, dans les cas de dénutrition asso-
ciée à une agression, à une maladie aiguë, avec syndrome inflammatoire important (protéine C réac-tive [CRP] > 50 mg/L), les protéines plasmatiques
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Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
Dépistage, prise en charge et suivi de la personne âgée dénutrie
s’effondrent rapidement, alors que l’amaigrissement peut être modeste. Les formes mixtes sont fréquentes chez les sujets
âgés, chez qui le diagnostic de dénutrition est sou-vent posé à l’occasion d’une pathologie aiguë, après un amaigrissement progressif.La CRP traduit l’intensité de l’hyper-catabolisme et donc une augmentation des besoins nutritionnels. Elle doit
toujours être mesurée en parallèle, ne serait-ce que pour vérifier l’absence de pathologie sous-jacente.
Intérêt de la mesure du poids, de la taille
et de l’IMC
L’évaluation de la dénutrition requiert également de surveiller le poids, la taille et l’indice de masse cor-porelle (IMC) du sujet âgé, des indicateurs simples et explicites.
Le poidsL’évaluation nutritionnelle repose avant tout sur la mesure du poids corporel. Il est recommandé de peser le sujet en sous-vêtements, avec un pèse-personne respectant les normes NF ou ISO stable, suffisamment large pour que la personne puisse s’y tenir debout. Au domicile, la mesure doit être effec-tuée avec le même pèse-personne.Une perte de poids de plus de 2 kg par mois doit alerter si elle n’est pas liée à des œdèmes, une insuffi-sance cardiaque, une ascite ou une déshydratation.Une perte du poids corporel de plus de 5 % en un mois, ou de 10 % en 6 mois, permet de diagnostiquer une dénutrition. Le sujet doit être surveillé tous les mois, voire toutes les semaines, selon les cas. L’ob-jectif est de retrouver le “poids habituel” du patient, ou au moins de stabiliser le poids. En cas d’impossibilité de pesée (patient à mobilité réduite), la circonférence du bras et/ou du mollet ou les dosages de protéines plasmatiques peuvent apporter des renseignements utiles.
La tailleLa mesure de la taille nécessite une toise. Lorsque la station debout est impossible ou en cas de défor-mation rachidienne (cyphose), différentes formules permettent d’estimer la taille à partir d’un segment, et notamment la formule de Chumlea, qui estime la taille à partir de la hauteur talon-genou.
Les critères de dénutrition
Patients adultes < 70 ans :
− perte de poids ≥ 5 % en un mois ou ≥ 10 % en six mois ;
− et/ou indice de masse corporelle ≤ 18,5 kg/m2 ;
− et/ou albuminémie < 30 g/L.
Patients ≥ 70 ans :
− perte de poids ≥ 5 % en un mois ou ≥ 10 % en six mois ;
− et/ou indice de masse corporelle ≤ 21 kg/m2 ;
− et/ou albuminémie < 35 g/L ;
− MNA ≤ 17 (/30).
Tableau 6 : Interprétation des résultats du Mini nutritional assessment (MNA) simplifié et du MNA détaillé
Si MNA simplifié ≥ 12/14 ou MNA détaillé > 23,5/30
Il existe un faible risque de dénutrition, mais une surveillance
régulière est nécessaire, à l’aide de questions simples concernant :
− le poids ;
− l’alimentation ;
− l’hydratation du patient.
Si MNA ≤ 11/14 ou ≤ 23,5/30
Il existe un risque effectif de dénutrition. Dans ce cas, il faut :
− rechercher les éventuelles erreurs alimentaires et donner des
conseils nutritionnels en prévoyant, si possible, une consultation
diététique ;
− évaluer l’intérêt d’une alimentation enrichie ;
− apprécier l’indication des compléments nutritionnels oraux
(CNO) ;
− encourager l’activité physique quotidienne, selon les
recommandations du programmen national nutrition santé
(PNNS), adaptée à l’âge et au degré d’autonomie de la personne ;
− évaluer si une aide à domicile est nécessaire.
Lorsqu’un MNA détaillé (réalisation 10 minutes) est réalisé, il
est important de porter une attention particulière aux items qui
font diminuer le score, par exemple :
− si la personne âgée ne fait que 2 véritables repas dans la
journée ou présente une anorexie, il faut rechercher la présence
de troubles du comportement alimentaire ;
− si la personne âgée ne mange pas certains types d’aliments
(fruits, légumes, produits laitiers, viande), il faut essayer de
faire évoluer son comportement alimentaire en lui rappelant les
recommandations du PNNS et lui remettre un guide nutrition qui
la concerne. Il faut également refaire le MNA 3 mois plus tard
afin d’évaluer l’évolution du statut nutritionnel.
Si MNA < 17/30
La dénutrition est présente. Dans ce cas, il faut réaliser :
− une prise en charge nutritionnelle ;
− un dosage d’albumine, de la transthyrétine et de la protéine
C réactive (CRP) ;
− un dosage des protéines plasmatiques, si le score obtenu
au MNA évoque une dénutrition probable, ou s’il y a une perte
de poids, ou pour rechercher une dénutrition chez un sujet en
surpoids.
Le plus souvent, on effectue le dosage de deux protéines
plasmatiques : l’albumine et la transthyrétine (ou préalbumine).
Aucune n’est réellement spécifique de l’état nutritionnel
car leurs concentrations plasmatiques peuvent chuter
indépendamment de toute carence d’apport alimentaire
(syndromes inflammatoires, inflation hydrosodée) ou, à l’inverse,
augmenter de façon importante en cas de déshydratation,
principalement chez les patients fragiles. Cependant, elles
complètent utilement l’évaluation nutritionnelle, en orientant
le diagnostic vers le type de dénutrition.
Tableau 7 : Facteurs biologiques
Albumine Marqueur de dénutrition
Facteur pronostique
Transthyrétine(préalbumine)
Baisse rapide au cours des dénutritions chroniques
Critère d’efficacité d’une renutrition
Protéine C réactive (CRP)
Marqueur d’inflammation aiguë
Permet de dissocier une infection (CRP < 100 mg/L)
et une autre inflammation
Orosomucoïde(alpha 1 glycoprotéine acide)
Marqueur d’inflammation chronique
Utile pour dissocier une guérison d’un passage
à la chronicité
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Définition et dépistage de la dénutrition
Actualités pharmaceutiques n° 521 Décembre 2012
En fonction du sexe du patient, il faut utiliser l’une ou l’autre face du mètre ruban pour mesurer la distance talon-genou. Le patient doit être positionné sur le côté, le genou levé, formant un angle de 90° entre le tibia et la cuisse. Le pied fait aussi un angle de 90° avec la jambe. La partie gauche du mètre ruban est placée sous le talon, la partie mobile au-dessus des condyles fémoraux. L’axe du mètre ruban doit être parallèle à l’axe du tibia.
L’indice de masse corporelle L’IMC est défini par la formule : poids (kg)/taille2 (m2).
Il est différent selon le sexe :− chez la femme : taille = 84,88 - 0,24 x âge (années) + 1,83 x hauteur talon-genou (cm) ;− chez l’homme : taille = 64,19 - 0,04 x âge (années) + 2,03 x hauteur talon-genou (cm).Concernant l’IMC, on parle de dénutrition modérée lorsque l’IMC est < 21 kg/m2. Une dénutrition sévère est évoquée lorsque l’IMC est < 18 kg/m2.La valeur normale est comprise entre 21 et 25 kg/m2. Un IMC ≤ 21 kg/m2 suffit au diagnostic de dénutrition chez la personne âgée (tableau 8), sauf dans le cas d’un patient ayant eu cette valeur d’IMC toute sa vie.Un sujet en surpoids ou obèse peut présenter une dénutrition. Estimation de la masse grasse
La masse grasse s’estime à l’aide de la mesure du pli cutané tricipital, réalisée avec un compas de Har-penden. La mesure s’effectue à mi-distance entre l’olécrane et l’acromion, sur le bras non dominant. Estimation de la masse musculaire
La masse musculaire s’estime à partir de la mesure de la circonférence musculaire brachiale (CMB) :− CMB = index représentatif de la masse musculaire d’un sujet, déterminé à partir de la circonférence bra-chiale (CB) et du pli cutané tricipital (TCP) ;− TCP = (épaisseur peau + graisse) x 2 ;− CMB (cm) = CB (cm) - [0,314 x TCP (mm)].Les valeurs minimales sont de : 170 mm chez l’homme et 160 mm chez la femme.Cette mesure doit s’effectuer lorsque l’on ne connaît pas le poids et la taille de la personne. En revanche, en cas d’œdème des membres supérieurs, cette mesure n’est pas valide.
ConclusionLa dénutrition est responsable d’une augmentation de la morbidité, d’où l’importance du rôle du phar-macien, professionnel de santé de proximité, dans le dépistage de la dénutrition chez les personnes âgées, « avant qu’il ne soit trop tard… ». Une discussion ciblée peut permettre d’évaluer et de déceler une per-sonne à fort risque de dénutrition, notamment grâce à de petites confidences du type : « j’ai perdu mon mari il y a trois mois et je ne me remets pas, j’ai perdu du poids ». L’intérêt du pharmacien d’officine doit se porter sur : l’évolution de sa santé sur les 3 derniers mois ; sa perte de poids ; son alimentation ; un bou-leversement survenu dans sa vie ; l’appréciation de son état de santé.Le patient doit être orienté vers son médecin trai-tant si la perte de poids est significative et que ses réponses confirment les inquiétudes. Une évaluation nutritionnelle simplifiée peut également conforter dans cette décision. �
Valérie Battu
Pharmacien orthopédiste, Limoges (87)
Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Pour en savoir plus
Ferry M, Alix E. Nutrition de la personne âgée. Collection Abrégés.
Issy-les-Moulineaux: Masson, 2007.
Ferry M. La prévention de la dénutrition, bonnes pratiques.
Spécial Assises. JMC 2012; 45.
Haute Autorité de santé (HAS). Stratégie de prise en charge
en cas de dénutrition protéino-énergétique chez la personne âgée.
Recommandations professionnelles, 2007. www.has-sante.fr
Hébuterne X, Alix E, Raynaud-Simon A, Vellas B. Traité de nutrition
de la personne âgée. Paris: Springer; 2008.
Programme national nutrition santé (PNNS) 2011-2015. Livret
d’accompagnement destiné aux professionnels de santé.
Guide nutrition à partir de 55 ans. Guide nutrition pour les aidants
des personnes âgées. Institut national de prévention et d’éducation
pour la santé (Inpes). www.inpes.fr
Attention
Le développement des hommes et des femmes diffère.
En effet, à partir de 60 ans, une femme perd environ 1 cm
tous les 5 ans (tassements vertébraux). Chez une femme âgée
de 65 ans ou plus, il faut donc penser à prendre en compte
ce paramètre.
Tableau 8 : Classification de la dénutrition selon
l’indice de masse corporelle (IMC)
État Grade Indice de masse corporelle
Maigreur I 17-18,5 kg/m2
Dénutrition II 16-16,9 kg/m2
III 13-15,9 kg/m2
IV 10-12,9 kg/m2
V < 10 kg/m2
Décès chez la femme
Décès chez l’homme
9-11 kg/m2
10-12 kg/m2