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Imagerie de la Femme 2005;15:195 Éditorial 195© Masson, Paris, 2005
Éditorial
Dépistage : le numérique sort de l’ombre
Corinne Balleyguier 1, Karen Kinkel 2
1. Service de Radiodiagnostic, Institut Gustave Roussy, Ville juif, France.2. Clinique des Grangettes, Chêne-Bougerie, Suisse.
Qu’en est-il de la comparaison entre mammographieanalogique et numérique pour la mammographie dedépistage ? L’étude DMIST (Digital MammographicImaging Screening Trial) a enfin publié ses premiersrésultats [1] dans le respecté journal de médecine internele New England Journal of Medecine. La méthodologie inat-taquable utilisée avait fait l’objet d’un article séparé publiétrois mois auparavant [2]. Tout avait été préparé pour ren-forcer la crédibilité du résultat final.
En quoi consiste cette fameuse étude DMIST ? Ils’agissait d’une étude prospective réalisée par l’AmericanCollege of Radiology et promue par l’Institut National duCancer aux États-Unis pour comparer les performancesrespectives de la mammographie numérique et analo-gique. Entre 2001 et 2003, 33 instituts radiologiquesaméricains et canadiens ont fait participer et ont suivi42 760 patientes. Ces patientes ont bénéficié le même jourd’une mammographie de dépistage numérique et analogi-que par la même manipulatrice avec une mammographiede contrôle entre 12 et 15 mois plus tard. Les deux mam-mographies numérique et analogique ont été interprétéespar des radiologues différents. L’analyse des résultatsmammographiques tenait compte de la sensibilité, spécifi-cité et la performance diagnostique sous forme de l’aire endessous de la courbe ROC qui était d’ailleurs la seule àpouvoir montrer des différences en fonction de sous-grou-pes d’âge ou de densité mammaire.
Le résultat de l’étude est particulièrement intéressant :en analysant l’ensemble des patientes, les deux techniquesmammographiques, analogique et numérique, sont équiva-lentes, ce qui peut rassurer les pays qui n’avaient pas encoreautorisé la mammographie numérique dans le cadre dudépistage organisé. La supériorité de la mammographienumérique sur la mammographie analogique apparaît clai-rement pour les patientes de moins de 50 ans (attention ledépistage débute à 40 ans aux États-Unis ! et se réalise à unrythme annuel), les patientes de densité mammaire élevée(densité 3, dense hétérogène, et densité 4, très dense, 47 %de la population étudiée) et les patientes en pré- ou péri-ménopause (37 % de la population étudiée).
Le papier a utilisé tous les subterfuges statistiquespour la mise en évidence d’une différence entre les grou-pes. En effet, si seulement les sensibilité ou spécificitéavaient été analysées, les conclusions auraient été nette-ment moins fortes. En travaillant sur les courbes ROC(une courbe tenant compte d’une série de combinaisonde sensibilité/spécificité à différents seuils de malignité),on augmente la puissance statistique pour démontrer desdifférences de performance diagnostique. Les radiolo-gues devaient d’ailleurs rendre deux diagnostics, leBIRADS et un diagnostic censé être plus fin et qui tenaitcompte d’une échelle de malignité en 7 points. Il est inté-ressant de constater que l’échelle BIRADS était supé-rieure à la sensibilité de l’échelle de malignité en 7 pointsquelle que soit la technique mammographique utilisée.L’effort des traducteurs en français de la version améri-caine était donc justifié…
Dans le groupe de femmes de moins de 50 ans, seule lasensibilité BIRADS de 78 % de la mammographie numé-rique atteignait une supériorité statistique par rapport à lasensibilité BIRADS de 51 % de la mammographie analo-gique. La spécificité, qui se situait globalement entre 90 et92 %, était équivalente dans tous les sous-groupes.
Que conclure sur ces résultats ? Tout le monde ytrouve son compte. Ceux qui avaient récemment investidans du matériel analogique peuvent l’utiliser en toute con-fiance, tout en sachant qu’ils seront peut être limités pour« les dépistages » avant 50 ans. Ceux qui ont fait l’effortfinancier d’acquérir du matériel numérique sauront qu’ilsont fait un bon choix, surtout dans la perspective d’uneextension du dépistage aux femmes de moins de 50 ans.
Références[1] Pisano ED, Gatsonis C, Hendrick E, Yaffe M, Baum JK, Acharyya S
et al. Diagnostic Performance of Digital versus Film Mammogra-phy for Breast-Cancer Screening. N Engl J Med 2005;16:16.
[2] Pisano ED, Gatsonis CA, Yaffe MJ, Hendrick RE, Tosteson AN,Fryback DG et al. American College of Radiology ImagingNetwork digital mammographic imaging screening trial: objecti-ves and methodology. Radiology 2005;236:404-12 Epub 2005 Jun2016.