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48 FEMMES DU MAROC | OCTOBRE 2010 Elles ont entre 6 et 16 ans. En l’espace d’une journée, leur vie a basculé et elles sont passées d’enfant à femme mariée sans en avoir conscience. Victimes d’une double injustice, ces fillettes sont à la fois privées de leur enfance et voient leurs droits bafoués. Voyage au cœur des montagnes arides et hostiles du Haut Alats Oriental. par Dounia Z. Mseffer Reportage I l y a trois ans, une grande fête a été organisée dans le village où vivent Aïcha et Fatema. Elles avaient 7 ans. Comme toutes les petites filles de leur âge, elles ont revêtu leurs plus beaux habits pour l’occasion. Ce jour-là, on célébrait leur mariage. Au- jourd’hui, Aïcha et Fatema ont 10 ans. Timides, elles baissent la tête dès qu’elles aperçoivent celui à qui elles ont été promises. D’ici quelques mois, une fois qu’elles seront pubères, elles iront rejoindre leur mari… Des centaines, voi- re des milliers de filles sont condam- nées au même sort dans les montagnes du Haut Atlas Oriental. Nous sommes dans la région d’Imil- chil à plus de deux mille mètres d’altitu- de. C’est ici, au milieu de paysages aussi enchanteurs que contrastés, composés de champs fertiles, de forêts denses, de hauteurs imposantes, de vallées ver- doyantes, de rivières cristallines, de sols ingrats, et d’oueds asséchés, que la Fon- dation Ytto pour l’hébergement et la ré- habilitation des femmes victimes de vio- lence a organisé, du 15 au 23 juillet der- nier, une caravane humanitaire. Des vies sacrifiées au nom de traditions désuètes Reportage-176 25/09/10 15:12 Page 48

Des vies sacrifiées au nom de traditions désuètes

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Elles ont entre 6 et 16 ans. En l’espace d’une journée, leur vie a basculé et elles sont passées d’enfant à femme mariée sans en avoir conscience. Victimes d’une double injustice, ces fillettes sont à la fois privées de leur enfance et voient leurs droits bafoués. Voyage au cœur des montagnes arides et hostiles du Haut Alats Oriental.

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Elles ont entre 6 et 16 ans. En l’espace d’une journée, leur vie a basculé et elles sont

passées d’enfant à femme mariée sans en avoir conscience. Victimes d’une double

injustice, ces fillettes sont à la fois privées de leur enfance et voient leurs droits

bafoués. Voyage au cœur des montagnes arides et hostiles du Haut Alats Oriental.

par Dounia Z. Mseffer

R e p o r t a g e

Il y a trois ans, une grande fête a étéorganisée dans le village où viventAïcha et Fatema. Elles avaient 7ans. Comme toutes les petites fillesde leur âge, elles ont revêtu leurs

plus beaux habits pour l’occasion. Cejour-là, on célébrait leur mariage. Au-jourd’hui, Aïcha et Fatema ont 10 ans.Timides, el les baissent la tête dèsqu’elles aperçoivent celui à qui elles ontété promises. D’ici quelques mois, unefois qu’elles seront pubères, elles irontrejoindre leur mari… Des centaines, voi-re des milliers de filles sont condam-nées au même sort dans les montagnesdu Haut Atlas Oriental.

Nous sommes dans la région d’Imil-chil à plus de deux mille mètres d’altitu-de. C’est ici, au milieu de paysages aussienchanteurs que contrastés, composésde champs fertiles, de forêts denses, dehauteurs imposantes, de vallées ver-doyantes, de rivières cristallines, de solsingrats, et d’oueds asséchés, que la Fon-dation Ytto pour l’hébergement et la ré-habilitation des femmes victimes de vio-lence a organisé, du 15 au 23 juillet der-nier, une caravane humanitaire.

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Durant neuf jours, 40 membres de laFondation créée en mai 2004, maisaussi de l’Association INSAF, INSATde Beni Mellal, de l’Association pourl’éducation des droits de l’homme(AEDH) et une vingtaine de jeunes, ontvisité cinq douars de la région d’Imil-chil et de Rich dans le cadre d’une cam-pagne de sensibilisation et de régulari-sation des mariages coutumiers. Unepratique très répandue dans toute cetterégion. Sauf qu’ici, les mariées ont àpeine 6 ou 7 ans !

L’injustice est double pour ces fillettes :elles sont non seulement promises à unhomme, confiées à la belle-famille etcontraintes à servir de bonne à tout faireen attendant d’avoir l’âge de procréer,mais elles sont aussi privées de leursdroits les plus élémentaires car le maria-ge coutumier n’a aucune valeur légal.

En avril dernier, vu justement la fai-blesse des campagnes de sensibilisa-tion, l’isolement de certaines régions etleur éloignement des services adminis-tratifs spécialisés dans l’authentificationdes actes de mariages, l’enregistrementà l’état civil et l’absence d’une justicemobile pouvant travailler les jours desouks, afin de faciliter l’accomplisse-ment des mesures administratives, l’ar-ticle 16 du Code de la Famille a été pro-longé pour une période de cinq annéessupplémentaires afin de permettre à denombreux couples “sans papiers” de ré-gulariser leur situation.

Dociles et obéissantes… Anfgou, une bourgade de 2.500 habitantssituée à 41 km d’Imichil en direction deTounfit, sortie de l’ombre il y a 3 ans sui-te à une vague de froid qui avait fait 30morts, est la première étape de la carava-ne. En 2008, lors du dernier mariagecollectif organisé par les habitants,<

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LE CODE DE LA FAMILLE, SIX ANS APRÈS !

■ Selon les derniers chiffresdu ministère de la Justice,33.253 actes de mariage demineures ont été conclusen 2009, soit 10,58 % del’ensemble des unions,contre 9,98 % en 2008. Lemariage des mineurescontinue ainsidangereusement à avancersans l’ombre d’uneamélioration. A titred’information, en 2007,33.560 requêtesd’agrément de mariage demineures sur 38.710 ontété acceptées. La justice a

même autorisé le mariagede 1.900 filles âgées de 15ans et de 159 filles âgées de14 ans. Parmi les régions lesplus touchées figurent :Ouarzazate et sa région,Beni Mellal, Marrakech et larégion du Rif. Par ailleurs, les mariagespolygames ont égalementconnu une hausse. Leur taux est passé de 0,27 % en 2008 à 0,31 % en2009. Autre constat : lesdivorces ont enregistré unebaisse importante avec24.170 cas en 2009 contre

27.935 en 2008. Les cas de divorce par voie judiciaire sont passés de7.213 jugements en 2004 à31.085 en 2009. Les cas de divorce par accordmutuel représentent quant àeux 40.91 % alors que 20.4 %des actes de mariage ont étéconclus par des filles adultes avec le consentement deleurs parents mais sanstutelle. Le nombre d’actes de mariage aégalement enregistré unehausse pour atteindre314.400 en 2009. ■

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94 fillettes âgées de 6 à 16 ans ontété mariées. Toutes par la “Fatiha”. “Lespopulations vivent dans la pauvreté la plusextrême et n’ont aucun moyen d’investirpour régulariser leur situation, expliqueNajat Ikhich, présidente de la FondationYtto. Les problématiques sont nombreuses :absence d’infrastructures, de transport, demoyens et, surtout, un changement de men-talités qui ne s’opère toujours pas. Beau-coup de gens ne savent même pas ce qu’est lenouveau Code de la Famille”. Selon Haya-ne Bassou, le président du conseil desJoummouê des tribus de la région, cesmariages font partie de leurs us et cou-tumes, des traditions ancestrales perpé-tuées au nom de la religion ! “Chez nous,une fille de plus de 14 ans ne vaut plus rien.On marie les filles tôt pour qu’elles s’habi-tuent à leur nouvelle famille, à leur mari,qu’elles apprennent à se comporter, à obéiret à faire ce qu’on leur dit”. En effet, à unâge aussi précoce, les fillettes sont do-ciles, obéissantes, et “sont surtout plus fa-ciles à “dresser”… Par ailleurs, pour les pa-rents, c’est une façon d’éviter d’éventuels ac-cidents de parcours !”, explique HaddouOubrahim, un jeune de 28 ans.

Ainsi, pendant trois jours, les béné-voles travailleront sans relâche sous deuxtentes installées au centre du village :identification des cas, information et sen-sibilisation, collecte de dossiers en vue derégularisation, distribution de vêtementset de médicaments… Mais très vite, les ca-ravaniers doivent faire face à un problè-me de taille : le nombre élevé de per-sonnes ne disposant pas d’état civil. Lesinformations sont donc souvent approxi-matives, voire erronées. Cet état de fait estjustement une conséquence parmi tantd’autres des mariages par la “Fatiha” : desenfants illégitimes, non reconnus,d’autres “sans papiers” qui un jour seronteux aussi contraints de se marier par la“Fatiha” si rien n’est fait pour changer lasituation. “Le mari ou le père prétend que lafille a déjà 18 ans, or il suffit de voir son

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TÉMOIGNAGES■ Roukia, 60 ans.J’ai été mariée très jeune en même temps queplusieurs autres filles du village. Je devais avoir 6ou 7 ans. Ce sont nos traditions. Les parents dé-cident, et nous on obéit. J’ai eu onze enfants,mais j’en ai perdu quatre. Quand je suis alléevivre avec mon mari, personne ne m’a expliquéce qu’il fallait faire. J’étais livrée à moi-même… Enfait, ici, on ne réfléchit pas trop : on se marie, onenfante, on travaille jusqu’à l’épuisement et onmeurt… C’est à ça que se résume notre vie.

■ Otman, 25 ans, accompagné de sa femme, 12 ans.Cela fait trois ans que nous sommes mariés. Ce sont nos parents qui nous ont mariés, maisj’étais d’accord avec leur choix. Au moins, je sais qu’elle est propre, que personne ne l’a tou-chée, qu’elle n’a jamais parlé avec un autre homme, qu’elle sera docile… Je compte bienl’éduquer et la dresser pour qu’elle m’obéisse au doigt et à l’œil, sans jamais broncher oudire quoique ce soit. C’est comme ça qu’on traite les femmes ici et puis de cette façon, jesuis sûr qu’elle ne s’en ira jamais. D’ailleurs, où pourrait-elle aller ? Maintenant, elle vit avecnous, mais j’évite de trop la brusquer.Elle est encore jeune et n’est pas ca-pable de tout assumer. Je ne la toucheque très peu. On s’est mariés selon noscoutumes locales, par la “Fatiha”.Quand je serai convaincu qu’elle meconvient, je lui ferai les papiers mais pasavant... Personnellement, je considèreque je n’ai rien fait de mal… Le Prophè-te Sidna Mohammed a bien épousé Aï-cha, et elle n’avait que neuf ans.

■ Aïcha, 9 ans.J’ai neuf ans aujourd’hui et je vais à l’école. Maisdans pas longtemps, il faudra que j’y renonce.Cela fait trois ans que je suis mariée, et bientôt jevais devoir aller retrouver mon mari, s’il veut en-core de moi bien sûr. Si c’est le cas, je n’aurai plusle temps d’étudier… Il a 15 ans et a l’air gentilmais je n’ai pas envie d’être avec lui. Je suis enco-re trop jeune pour le mariage.

■ Hadda, 20 ans.J’en suis à mon deuxième mariage. La première fois, j’avais 11 ans, j’ai dormi avec mon mariselon nos coutumes mais il ne m’a pas touchée. Ensuite, je me suis remariée à 14 ans. Au-jourd’hui, j’ai un enfant de 10 mois. Je veux faire l’acte de mariage pour reconnaître mon en-fant, mais je dois d’abord fournir un cer-tificat de divorce de mon premier mari.Ce qui est bien sûr très compliqué vuque je suis déjà remariée et lui de même.La seule solution d’après ce qu’on nous adit est que je divorce de mon secondmari, que mon ex fasse de même, qu’onse remarie, qu’on fasse nos papiers etqu’ensuite, on redivorce pour pouvoirenfin ré-épouser nos conjoints actuels…Tout ça est impossible à faire ! ■

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“LE MAROC A

ÉVOLUÉ, MAIS NOUS

NON. ON CONTINUE

À VIVRE COMME IL Y

A TRÈS LONGTEMPS.”

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visage et son regard pour se rendre comp-te qu’il s’agit d’une petite fille de 14 ans.Quand on est face à des cas pareils, on refu-se de les enregistrer”, dit Housnia, une jeu-ne de 22 ans, membre de la Fondation Yt-to qui en est à sa troisième caravane.

Normalement, des juges et des adoulsdevaient participer à la caravane afin d’évi-ter aux populations à avoir à parcourir plu-sieurs kilomètres et trouver sur place des

solutions amènes de démêler des situa-tions qui semblent déjà perdues d’avanceet aux conséquences irréversibles. C’est lecas de Hadda, 20 ans, ou encore Fatema,24 ans (cf. témoignages). Mais à la derniè-re minute, ceux-ci ont décliné l’invitationde la caravane. “C’est un combat de chaqueminute. On essaye tout le temps de nous dis-suader de faire notre travail. Le chef du villa-ge qui représente l’autorité morale du douar apar exemple tout fait pour que les gens neviennent pas et a diffusé de mauvaises infor-mations. Par ailleurs, l’information n’a pas étérelayée aux autres douars. Ils profitent del’ignorance des populations et de leur mécon-naissance de la loi. On se demande à qui pro-fite tout ceci ? Comment se fait-il que ces pra-tiques continuent à être perpétuées en touteimpunité ?”, s’insurge Saïda Bajjou,membre de la Fondation Ytto.

Houssain est père de deux filles et deuxgarçons. Lors du dernier mariage collectiforganisé à Anfgou en 2008, il en a profitépour marier sa fille âgée alors de 10 ans.Après les festivités, l’enfant est revenuevivre auprès des siens le temps de “mû-rir”, autrement dit en attendant qu’elle aitses règles et soit apte à procréer ! “Le Ma-roc a évolué bien sûr, mais nous non, dit-il.On continue à vivre exactement comme il y a

100 ans ou plus. Rien n’a changé. J’ai mariéma fille jeune parce que sinon personne ne vou-dra d’elle après. Aujourd’hui, je tiens à établirun acte de mariage pour la protéger ainsi quemes futurs petits-enfants. Mais, il faut d’abordque je l’inscrive à l’état civil. Ici, on est isolés,on n’a jamais entendu parler du Code de la

Famille. La télévision, nous n’y avons accèsque depuis deux ans et puis on ne parle pasbien l’arabe. C’est pour cela que le ministère dela Justice doit absolument avoir vent de ce quise passe ici pour le diffuser aux caïds, auxcheikhs qui informeront à leur tour les habi-tants afin que ces coutumes cessent”.

“L’acte contre 1.000 DH” A Tamalout à une trentaine de kilomètresd’Anfgou en direction de Tounfit, la plu-part des filles du village sont divorcées.Pourtant, elles ont à peine 14, 15 ans. Cer-taines sont déjà mamans. Ici, dans cedouar, où il n’y a ni école, ni dispensaire desanté, les “jeunes mariées” ne passentparfois qu’une semaine chez leur époux,le temps de consommer le mariage. Ytto,18 ans, est mariée et divorcée aujourd’hui.Elle avait 13 ans le jour de ses noces et n’estrestée mariée que durant un mois. Zinba,12 ans, n’est restée chez son mari que troisjours. Roukia, 11 ans, 10 jours. Hafida, 14ans, une semaine. Fatima, deux mois.Toutes ont consommé leur mariage !“C’est de la pédophilie officielle approuvée parles cheikhs du village”, s’écrie Saïda Bajjou.

Le divorce se passe aussi très facilement :il suffit que le mari répudie sa femme de-vant deux témoins. “Vu que tout se fait par la“Fatiha”, c’est facile, on se marie et on divorcesans même réfléchir. Tout se fait sur place. Onn’a pas à aller à Midlet, voir le juge, dépenserde l’argent… Certains hommes ont épousé jus-qu’à 10 femmes. Par contre, pour les filles cen’est pas évident car une fois divorcées, ellessont mal vues et auront des difficultés à re-trouver un mari”, dit Abdellah, 27 ans, unjeune du douar marié et divorcé deux fois.

Le même scénario se répète à Aït AbdiOulghazi, situé à 24 km d’Imilchil et àTissarouirine dans la commune rurale deAït Yahia à 106 km, dernière étape de lacaravane. Mariées jeunes et considéréescomme des bêtes de somme, la vie des

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“LES “JEUNES MARIÉES” NE PASSENT PARFOIS

QU’UNE SEMAINE CHEZ LEUR ÉPOUX, LE TEMPS DE CONSOMMER LE MARIAGE.”

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filles n’est que souffrance et misère. Dès4h du matin, elles doivent tous les jourspréparer le petit déjeuner, chercher dubois et de l’eau, travailler aux champs, fai-re le ménage, la cuisine, s’occuper desenfants… Mais à Tissraouirine, les cara-vaniers ont relevé une nouvelle donnée :même si le nombre de filles divorcées àun âge précoce est important, elles ontcependant presque toutes leur acte demariage. “Ma fille avait 13 ans mais j’airéussi à lui obtenir l’acte en donnant dessous à droite à gauche… En tout, j’ai payé1.000 DH”, confie ce père.

Les conséquences de ces mariages sontdes “épouses” sans droits en cas de violen-ce, de répudiation ou de décès du mari, etdes enfants sans papiers qui seront privésde leur droit à la scolarisation du fait qu’ilsne sont pas enregistrés à l’état civil. Sur leplan sanitaire, le mariage précoce favorisela mortalité maternelle et infantile, essen-tiellement à cause des grossesses préma-turées. Maltraitées et souvent rejetées,celles qui n’arrivent pas à refaire leur vie seretrouvent soient coincées dans leur douarsans aucun avenir, soit basculant, pour cer-taines d’entre elles, dans la prostitution,loin de la pression de la famille mais aufond du gouffre de la rue et de ses dangers ;ou encore dans la mendicité comme laplupart des femmes de Tissraouirine.Quand à la possibilité d’avoir une secondechance, elles sont peu à espérer cela !

“Certaines personnes commencent àprendre conscience du mal qu’elles font à cespetites filles, dit Najat Ikhich. Mais pour ar-river à changer les mentalités, il faut un tra-vail de fond auprès de ces populations. Cesont des citoyens marocains mais qui sontrestés enfermés derrière les montagnes et ou-bliés depuis des années. Personne ne vientchez eux pour les sensibiliser, les informer deslois… Pour eux le Maroc, c’est là où ils vivent.Il faut maintenant que les jeunes soient sen-sibilisés et s’opposent à ce genre de pratique.C’est par eux que viendra le changement careux aussi sont des victimes. Eux aussi ont étémariés de force, trop jeunes et noyés sous desresponsabilités qui ne sont pas de leur âge”.

Mais les mentalités ont la peau duredans ces régions. Ceux qui ont essayé derésister, se sont vus exclus et mis au bancde la société. Alors certains, pour échap-per à cette vie, ont préféré s’exiler et allertenter leur chance en ville, comme Mi-loud, 26 ans, Mohamed, 27 ans ou Fate-ma, 18 ans. Combien de jeunes devront-ils fuir leur terre, quitter leur famille pourque l’Etat se décide enfin à lutter contreces pratiques ancestrales qui se font sou-vent au nom de la religion ? ■

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TÉMOIGNAGES■ Touda, 18 ans.Je suis mariée depuis cinq ans maintenant. Monmari est relativement gentil, il ne me bat pas entout cas… Je suis tombée enceinte alors que jen’avais que 15 ans je pense, sauf qu’à six mois degrossesse, j’ai fait une fausse couche. D’après lemédecin, mon corps n’a pas supporté la grossessecar j’étais trop jeune. En plus de ça, je passais montemps à travailler dans les champs, à couper et por-ter du bois… Ici, la vie est assez dure avec nous, lesfemmes. La plupart de mes amies ont été mariées très jeunes, vers 11 ans. Mais souvent, le ma-ri les répudie après une semaine ou un mois, en ayant consommé le mariage.

■ Fatema, 24 ans.On m’a mariée à l’âge de 12 ans. Mon mari devaitbien avoir 20 ans de plus. Je n’étais chez lui que de-puis deux mois quand il a décidé de me mettre à laporte alors que j’étais enceinte de deux mois. J’aitout fait pour qu’il reconnaisse ma fille, mais il atoujours refusé. Selon lui, elle n’est pas de lui. J’avais13 ans, comment voulez-vous que je mente à cetâge-là ? Les gens du douar et mes parents ont essayéde le convaincre… en vain ! Depuis 2004, je n’ai pas

arrêté de porter plainte. A chaque fois, je me déplace jusqu’à Midlet et emmène 12 témoins queje prends entièrement à charge et toujours rien. Ma fille a aujourd’hui 11 ans. Je ne peux mêmepas l’envoyer à l’école vu qu’elle n’a pas d’état civil. Pendant ce temps, lui a refait sa vie. Il habiteà quelques pâtés de maisons avec son épouse et son autre enfant qu’il a reconnu.

■ Abdallah, 27 ans.Ma femme, Mouna, a 17 ans. On s’est mariés paramour. Mais il s’agit de mon deuxième mariage.J’avais 15 ans la première fois, et mon épouse 12.Ce sont nos parents qui nous ont forcés. Ce gen-re de mariage nous traumatise car on nous volenotre enfance. Vu que tout se fait par la Fatiha, lecheikh du village refuse de nous remettre descertificats de célibat si on souhaite se remarierlégalement et il est difficile d’obtenir une attes-tation de divorce parce qu’à la base, on n’a pasété mariés dans les règles... Du coup, on se re-trouve enfermés dans un cercle vicieux dont il est impossible de sortir. Avec Mouna, j’ai te-nu à avoir un acte. J’ai dû pour cela me déplacer à Boumia et obtenir de faux papiers.

■ Haddou Oubrahim, 28 ans.Pour régler ce problème, il faut emprisonnertous ceux qui ont épousé ou veulent épouserdes fillettes, à commencer par moi. Mes parentsm’ont marié à mon insu alors que j’étais en vil-le. A mon retour, je me suis retrouvé avec unefemme de 15 ans. Je m’y suis opposé mais aprèsavoir pensé à la fille qui n’y était pour rien etdont j’aurais brisé la vie en la répudiant, j’ai dûme résigner. Nous avons une fille maintenant et

je veux faire l’acte pour qu’elle puisse avoir une identité, des papiers et un avenir. C’estpour cette raison qu’il faut absolument criminaliser ces pratiques pour que les parents etceux qui préfèrent les petites filles comprennent le mal qu’ils font. ■

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“Un travail de proximité est primordial”

FDM : Quel est le bilan de la dernière cara-vane organisée en juillet par la FondationYtto dans la région d’Imilchil ? Najat Ikhich : La caravane a pu réaliser sonobjectif en donnant la parole aux femmeset aux populations de douars enclavés etmarginalisés qui vivent dans un autretemps et une autre dimension, loin detout programme de modernisation. Nousavons pu constater que dans cette région,le Code de la Famille est loin d’être àl’ordre du jour et que les droits desfemmes sont complètement bafoués.

La caravane a ainsi pu être un espace deprise de parole où les jeunes filles, lesjeunes garçons ainsi que les femmes etles hommes des différents douars visitésont pu s’exprimer, raconter leur vécu,leurs souffrances et leur quotidien ; et en-fin décrire les difficultés rencontrées vialeurs expériences de villageois pour se dé-barrasser de coutumes ancestrales. Descoutumes qui sont perpétuées par despersonnes refusant catégoriquement toutdéveloppement et évolution.

La caravane a également été un observa-toire ambulant qui a réussi à détecter l’am-pleur de la non application du Code de la Fa-mille mis en œuvre depuis plus de cinq ans,des mariages forcés des filles et des garçons,et enfin des mariages précoces puisque quedans cette région les petites filles continuentà être mariées à l’âge de 7 et 8 ans.

La caravane a surtout démontré enco-re une fois que le travail de proximités’impose de plus en plus. N’oublions pasque la plupart des régions au Marocmanquent cruellement d’infrastructureset sont enclavées. L’analphabétisme, lapauvreté sont à l’origine du non accèsdes populations à l’information et à lasensibilisation dont bénéficient relative-ment les grandes villes. Le Maroc se re-trouve ainsi divisé en deux pays : un paysqui avance à quatre vitesses et l’autre quiest toujours au point mort.

Un des objectifs de la caravane était de pou-voir remettre au tribunal de Midelt l’en-semble des dossiers collectés durant votrecampagne, mais à la dernière minute, le vi-ce-président du tribunal les a rejetés. Qu’enest-il aujourd’hui ? 128 dossiers de régularisation de ma-riages coutumiers ont été rassemblés.

Mais une quarantaine de dossiers a été re-jetée à cause de l’âge précoce des “ma-riées”. Une commission est en traind’examiner les dossiers et réfléchir sur leséventuelles solutions et actions à envisa-ger pour pouvoir répondre aux attentesdes villageois et surtout pour la protectiondes droits des femmes.

Comment expliquez-vous ce rejet sachantque vous aviez eu un accord au préalable duPrésident dudit tribunal en juin dernier ? Depuis le lancement du nouveau Codede la Famille qui garantit “relative-ment” les droits des femmes et ceux despetites filles et des enfants en général,nous avons constaté de fortes résis-tances quant à son application. Ces ré-sistances ont pour objectif de saboter leprocessus de mise en œuvre et donc debloquer l’instauration d’un projet de so-ciété moderne en maintenant un projetde société patriarcal basé sur des pra-tiques ancestrales.

Au niveau du tribunal de Midelt, il y ades résistances. On nous met des bâtonsdans les roues pour nous décourager etnous obliger à renoncer à notre devoir,qui est de protéger les droits des femmes,mais aussi ceux des hommes et des en-fants, et de veiller à la bonne applicationdu Code de la Famille.

Quelles seraient selon vous les solutions àmettre en place pour éradiquer cette pro-blématique ?L’Etat, à savoir le ministère de la Justice,le ministère de l’Intérieur, les autoritéset les élus, doivent assurer et veiller àl’application du Code de la Famille. Parailleurs, un grand travail de proximitédoit être fait et cela doit être la prioritén°1 des différents acteurs sociaux : asso-ciations féminines, société civile, élus,etc. Il faut également sensibiliser etconscientiser via des campagnes decommunication et de plaidoyer.

Une forte implication du ministère del’Education nationale est également in-dispensable. Il est impératif que les fa-milles (parents, enfants…) soient sensibi-lisées, et qu’aussi bien les hommes queles femmes puissent bénéficier de coursd’alphabétisation qui peuvent être dis-pensés dans les écoles des douars. Parailleurs, le ministère de la Justice, en par-tenariat avec les associations féminines,doit mettre en place un programme desensibilisation adressé aux villageois, etun plan de formation des associations lo-cales et surtout des juges, des juristes etdes avocats à l’échelle locale, régionale etnationale afin de les impliquer égalementdans le processus d’une mise en œuvresérieuse du Code de la Famille. ■

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Entretien avec Najat Ikhich, présidente de la Fondation Ytto.

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FDM : Selon les derniers chiffres du minis-tère de la Justice, le nombre de mariage demineurs contractés en 2009 a augmentépar rapport à 2008, comment expliquez-vous cela ? Khadija Rouggany : Théoriquement etconformément au Code de la Famille, l’âgedu mariage est fixé à 18 ans. Les mariagesde mineurs sont donc en principe des casexceptionnels soumis à l’autorisation desjuges qui doivent prendre en compte plu-sieurs facteurs dont l’accord des mineurs etcelui des parents. La loi recommande parailleurs une expertise médicale et psycho-logique du concerné ainsi qu’une enquêtesociale. Mais dans la pratique, le juge secontente souvent d’une évaluation person-nelle sur la base de l’aspect physique duconcerné. La taille de la fillette peut ainsi luisuffire pour délivrer l’autorisation. Les sta-tistiques du ministère et des associationsféminines le démontrent clairement : l’ob-jectif voulu par le Code de la Famille lors desa promulgation n’est pas atteint.

Les mariages des mineurs sont duscertes à l’analphabétisme, la non scolarisa-tion, la pauvreté, le chômage… mais éga-lement aux mentalités rétrogrades de cer-tains juges qui continuent à perpétuer despratiques ancestrales. Ces derniers n’ad-hèrent pas à ce projet de société alors quece sont les premiers concernés. Il y a éga-lement le problème de la corruption. C’estun aspect très important qui freine la bon-ne application du Code de la Famille.

Il faut signaler également le fait qu’ilexiste des différences entre les régions.Dans certaines, le juge n’autorise le ma-riage que si le mineur a 16 ans ou plus.Dans d’autres zones, c’est à partir de 13,14 ans. Ces différences sont encore unefois dues aux mentalités ancestrales etmasculines. Le ministère de la Justice adonc le devoir d’intervenir en donnantdes directives claires, en faisant des cir-culaires et en effectuant des contrôlespour contrer ces dérives.

Un autre problème se pose, celui des ma-riages coutumiers… Oui, c’est effectivement un grand pro-blème qui existe aussi bien en ville quedans le monde rural. Ces pratiquesexistent car, encore une fois, il s’agitd’un problème culturel. Les gens n’ontpas conscience de l’importance desactes de mariage. Les Marocains n’ontpas été suffisamment sensibilisés à ce-la. Il est vrai que de nombreux couplesont pu régulariser leur mariage durantles cinq années prévues par l’article 16du Code de la Famille, mais le problè-me persiste encore.

Quels recours ont les femmes mariées parla “Fatiha” pour faire reconnaître leur ma-riage et leur(s) enfant(s) ?En fait, le Code de la Famille ne prévoitrien et ne mentionne pas de pièces justi-ficatives. Ce sont donc les avocats qui onttrouvé des parades pour permettre à desfemmes de faire reconnaître leurs droitset ceux de leurs enfants. Ainsi, une fem-me qui souhaite faire reconnaître son ma-riage doit prouver qu’elle vit ou vivait avecson mari. Pour cela, elle peut soit amenerdes témoins, soit présenter sa carted’identité où il sera noté qu’elle habite à lamême adresse que l’homme en question,ou une copie du registre de l’hôpital dansle cas où il y aurait des enfants, ou encoredes photos… Ceci dit, rien n’est gagné cartout dépendra des juges.

L’article 16 a été reconduit pour une pério-de de cinq ans. Pensez-vous que ce délai

soit suffisant pour régler le problème desmariages coutumiers ? Non absolument pas car le problème esttrès profond. Il y a d’abord le problèmede moyens économiques : la reconnais-sance du mariage coûte chère car il fautcomptabiliser les frais de transport, sur-tout pour ceux qui vivent dans les mon-tagnes loin des instances administra-tives, la prise en charge des témoins, lesfrais d’avocat, les frais d’enregistre-ment… N’oublions pas non plus que laplupart des personnes qui se marientsans acte ne disposent pas d’état civil cequi peut compliquer la procédure.

S’ajoute à cela le fait que dans certainesrégions les populations n’ont jamais euvent du Code de la Famille. Ils en igno-rent l’existence et continuent donc à semarier sans acte sans être inquiétés.

Quelles seraient selon vous les mesures àmettre en place pour éradiquer cette pro-blématique ?

Il n’existe pas de solution miracle biensûr. Ceci dit, l’Etat doit prendre ses res-ponsabilités et intervenir pour que cegenre de pratique cesse car les consé-quences sont importantes. Il faut d’abordfaciliter les procédures, réduire les fraisd’enregistrement, former les juges… En-suite, il faut sensibiliser et vulgariser leCode de la Famille en allant vers les po-pulations enclavées et marginalisées. Ilest également urgent de résoudre les pro-blèmes sociaux tels que la déscolarisa-tion, la pauvreté, le chômage…

“Le Code de la Famille doit être revu dans son ensemble”Corruption, mentalités rétrogrades, pratiques patriarcales, absence de contrôle… autant de facteurs quifreinent aujourd’hui l’instauration du principe de l’égalité entre les sexes. Si, en théorie, le Code de la Famillepromeut les droits des femmes, dans la pratique, c’est loin d’être le cas ! Six ans après sa promulgation, labataille est loin d’être gagnée. La parole est donnée à Khadija Rouggany, avocate au barreau de Casablanca etmembre de l’Association Marocaine des Droits des Femmes.

“PLUSIEURS DISPOSITIONS DU CODE DE

LA FAMILLE SONT VAGUES ET DONNENT LIEU À

DES INTERPRÉTATIONS SOUVENT NÉGATIVES.”

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Une des solutions serait également decriminaliser les mariages sans acte. Pourcela, le ministère de la Justice pourraitmobiliser les autorités locales comme lescheikhs des douars afin qu’ils rapportentce qui se passe sur le terrain...

Qu’en est-il de l’application du Code de laFamille sur le terrain de manière générale ? Le Code de la Famille doit être revu dansson ensemble car plusieurs dispositionsdu texte sont vagues et donnent lieu à desinterprétations souvent négatives. Cer-tains articles du Code n’étant pas assezdétaillés, plusieurs décisions de juge-ment sont laissées à la discrétion desjuges qui détiennent un grand pouvoird’appréciation par rapport à plusieurs dis-positions du Code de la Famille, de la po-lygamie au mariage des mineurs, en pas-sant par les montants des pensions ali-mentaires ou le partage des biens.

Les paramètres pour l’octroi des pen-sions, par exemple, ne sont pas du toutclairs. Ce qui ouvre la porte à tous lesabus. Certains juges ne prennent pas encompte, au moment de fixer le montantde la pension, les frais de scolarité, les

frais médicaux, le niveau de vie dans lequelvivait l’enfant avant le divorce… Et on se re-trouve avec des pensions dérisoires et ce,même si le père est milliardaire et a lesmoyens de donner plus. Quant à l’expul-sion du domicile conjugal (article 53), il y alà un vide juridique. Les autorités ramè-nent au domicile conjugal la partie expul-sée mais sans offrir aucune mesure de pro-tection. D’où l’urgence de réformer le Codepénal et le code des procédures pénales.

Autre fléau : la corruption. On est sou-vent confrontés à des jugements injusti-fiés, discriminatoires, et contraires àl’esprit du Code.

Ce mois-ci, on fête la Journée Nationale dela Femme Marocaine. Où en est selon vousla situation de la femme au Maroc ? Il y a eu de nombreuses avancées pour lapromotion des droits des femmes. Il exis-te une forte volonté politique… mais, mal-heureusement, sur le terrain ça ne suitpas. Il reste encore beaucoup à faire, àcommencer par le domaine social et éco-nomique. Les femmes sont les premièrestouchées par la pauvreté, l’analphabétis-me et le chômage, et même si l’INDH

semble favoriser les associations defemmes, cela reste insuffisant.

Concernant le Code de la Famille, il fautque le ministère de la Justice se donne lesmoyens, recrute des gens qualifiés, formeles magistrats en leur inculquant la cultu-re des droits de l’homme, des droits de lafemme et de l’enfant, en les sensibilisantsur ces questions. Il faut que l’impartiali-té des juges soit instaurée et exigée. Il fauts’attaquer à la corruption qui gangrène lajustice dans notre pays.

Ce n’est pas en changeant le statut per-sonnel de la femme et en adoptant le Codede la Famille que nous résoudrons les pro-blèmes que subissent les femmes. Il fautfixer des barèmes, donner des directivesclaires, et procéder à la réforme de la justi-ce. Il faut également l’implication detoutes les instances étatiques : le ministè-re du Développement social, de la Justice,de l’Intérieur, de la Santé, de l’Educationnationale, de l’Emploi… Il y a urgence carnous ne pourrons jamais prétendre à la dé-mocratie si la femme continue à être dis-criminée, marginalisée et traitée commeun être de seconde zone, et si les droits del’homme ne sont pas respectés. ■

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