164
DH LE MAGAZINE DU DECIDEUR HOSPITALIER 145 1 er trimestre 2013 www.dhmagazine.fr Restaurer la confiance Informatique de santé Les technologies sont matures et les volontés affichées, ne manque qu’une dynamique commune Edouard Couty Interview exclusive de Tour de France des hôpitaux CHU Angers CHRU Brest, CH Annemasse-Bonneville, Armentières, Arras, Charleville-Mézières, Fécamp, Roubaix De l'air Un enjeu de santé publique Anatomie et Cytologie Pathologiques Historique d’une discipline ancienne mais méconnue Photo couverture : CHU d'Angers - Maternité © Catherine Jouannet

DH Magazine 145 - 1er trimestre 2013

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Le magazine du Décideur Hospitalier

Citation preview

DHLE MAGAZINE DU DECIDEUR HOSPITALIER

1451er trimestre 2013

ww

w.d

hmag

azin

e.fr

Restaurer la confiance

Informatique de santéLes technologies sont matures et les volontés

affichées, ne manque qu’une dynamique commune

Edouard Couty Interview exclusive de

Tour de France des hôpitauxCHU Angers CHRU Brest, CH Annemasse-Bonneville, Armentières, Arras, Charleville-Mézières, Fécamp, Roubaix

De l'airUn enjeu de santé publique

Anatomie et Cytologie PathologiquesHistorique d’une discipline ancienne mais méconnue

Pho

to c

ouve

rtur

e : C

HU

d'A

nger

s - M

ater

nité

© C

athe

rine

Joua

nnet

31er trimestre 2013 / DH magazine 145

O N T p a r T I C I p é à C E N U M é r O :ABADIA-UgArte David, cadre sup., chargé de la coordi. de la rech. en soins et de l’ens., CHU d’AngersAgUeSSe Jérôme, directeur de centre, Dalkia France, CHU d’AngersBArIL (Dr) Jean-Yves, chef du pôle mère-enfant, CHI du Pays des Hautes FalaisesBArtHeLAIX (Pr) Annick, prof. des Université, praticien hospitalier, CHU d’AngersBeNSADOUN Bernard, directeur général Délégué PCA-AHO, NantesBeNSLIMANe Acyl, expert de Cap gemini Consulting BONeNFANt Christian, coord. du Centre d'Investigation Clinique, CH d’ArmentièresBrAJeUL rémi, directeur adjoint en charge de la recherche, CHrU de Brest BrICOteAU (Dr) Didier, président de la CMe, CH de roubaixBUBIeN Yann, directeur général du CHU d’AngersBUrNeL Philippe, directeur d’hôpital eHeSP, Secrétaire général à la DSSISCALOt (Dr) Philippe, chef du pôle médical aigu, CHI du Pays des Hautes Falaises CHetrItt (Dr) Jérôme, vice-président du SMPF, Médecin PathologisteCIrILLO Frédéric, rSIO-DSIO du CH de l’Agglomération de NeversCOUtY edouard, directeur d’hôpital, conseiller maître à la Cour des comptes De BrUX (Pr) Jean-Louis, chef s. de chirurgie cardiovasculaire et thoracique, CHU d’AngersDerUDDre Hélène, directeur adjoint, directeur général du CH d’ArrasDeSMAretZ Dr Jean-Luc, Président CMe, Praticien Hospitalier en réa., CH d’Armentières DI MAJO Pascal, ingénieur hospitaliers, CH Alpes-LémanDOMKeN Nicolas, responsable assurance qualité, gestion des risquesDUPONt Bernard, directeur général du CHrU de BresteMILe (Pr) Jean, prof. hono. de neurologie, doyen hono. de la Fac. Méd. et Pharma., CHU d’AngersFALLeNOt Agnès, des libertés et de la détention, tribunal d’ArrasFeNOLL (Pr) Bertrand, chirurgien pédiatre, Président de la CMe, CHrU de Brest FONtAINe (Dr) Xavier, resp. du service de médecine d’urgence, CH de Charleville-MézièresFrANgI (Dr) Issan, chirurgien, président CMe et de la Clinique du Parc à Charleville-MézièresFreMIN Nathalie, cadre supérieur de santé, CHrU de Brest gASQUet gérald, Ingénieur logisticien, CHU d’AngersgeOrgeS-PICOt Antoine, vice-président en charge du secteur Santé, Cap gemini Consulting gertYCH (Dr) Witold, chef du service gynécologie obstétrique, CH Alpes-LémangrANrY (Pr), Jean-Claude, chef du pôle Anest.-réa., Urgences SAMU-SMUr, CHU d’AngersgUICHet Fabrice, Primum Non Nocere®

gUICHOt Lân, directeur Business Development, Agfa HealthCaregUIU (Dr) Michel, président du SMPF HACHArD Jean-Luc, cadre du pôle, CHI du Pays des Hautes FalaisesHAOUArI (Dr) Nora, praticien hospitalier en néonatologie, CH de roubaix

HeUCLIN (Dr) Philippe, chef s., prati. hospitalier en soins palliatifs, CH de roubaixHUreAUX (Dr), José, praticien Hospitalier, pneumologue en cancérologie, CHU d’AngersJOVIADO Sylvie, consultante Primum Non Nocere®

JUrVILLIer thibault, membre d'eHeSP Conseil KHUL Muriel, cadre du pôle, CHI du Pays des Hautes FalaisesLeFOULON guillaume, membre d'eHeSP Conseil LerOY (Dr) Bernard, praticien hospitalier en anesthésie, CH de roubaixMASSOt Odile, docteur en endocrinologie, biochimisteMOLL (Dr) Marie-Christine, médecin délégué qualité gestion des risques, CHU d’AngersMOttIer (Dr) Dominique, coordi. Centre d'Investigation Clinique, CHrU de BrestN’gUYeN (Pr) Sophie, neuropédiatre, prof. des Universités, prati. hospitalier, CHU d’AngersPADILLA (Dr) Norbert, médecin Pathologiste libéralPAMArt Pierre, Directeur général du CH d’ArmentièresPASCO-PAPON (Dr) Anne, prati. hospi. imagerie médicale, Maître de conf. des Uni., CHU d’AngersPAUL Marie-Christine, directeur du CH de roubaixPeLtIer Sylviane, responsable Communication & Culture, CH d’ArmentièresPHeLeP Jean-Christophe, directeur du CH de Charleville-MézièresPIQUILLOUD (Dr) gaël, chirurgien plasticien, CH Alpes-Léman POtAUX Éric, directeur du SI et du Dossier Patient au CHU de PoitiersPrUDHOMMeAUX Bertrand, dir. des services financiers, dir. gal du CH d’Arras rALAIMIADANA Irene, membre d'eHeSP Conseil reLIAt Claude, cadre sup. de santé resp. de la formation pro., CHU d’AngersreNAUD Alain, directeur général du CHI du Pays des Hautes FalaisesregNAULt Vincent, resp.des services informatiques, CHI du Pays des Hautes FalaisesrOBIN (Dr) Jean-Yves, directeur de l’ASIP Santé rOOS Jacques, président de l’asso. des ingénieurs hospitaliers de France (IHF)SAILLArD Marie-Odile, directeur général du CH d’Arras SeNOVILLe Carole, cadre du pôle, CHI du Pays des Hautes FalaisesStArOZ (Dr) Frédéric, vice-président du SMPF, Médecin PathologistetHOMAS Pr Olivier, responsable scientifique du projet AICHA, LereS, eHeSPtOMA Olivier, président du C2DStreLY Vincent, président de l’APSSIS et Directeur de PrOXIMA CONSeILVAPAILLe edmond, dir. des investissements et de la logistique, CHU d’Angers VIgNOLI (Dr) Paul, radiologue, CH Alpes-LémanVILLerS (Dr) Valérie, chef du pôle de gériatrie, CHI du Pays des Hautes FalaisesVINCeNt Bruno, directeur général du CH Alpes-LémanWINKLer Wiebke, C2DS

DH MAgAZINe trimestriel : 4 000 ex. INPI : 1716-633 - ISSN : 1277-4383 w w w . d h m a g a z i n e . f rFondateur, directeur de la rédaction : Marc gUILLOCHON, directeur d’hôpital eHeSP [email protected] du siège social : 67, rue du général Michel Audéoud 83053 tOULON cedex [email protected] gérant & directeur de la publication : gaston gUICHet 04 42 66 54 99 [email protected] & publicité : Janine LAUDet 04 94 09 49 90 [email protected]ée de rédaction : Brigitte DeLMOtte-VUAteLet 04 98 01 08 01 [email protected] : Christel SIMONNeAU 04 94 714 714 [email protected]égie : Holding Communication 04 98 01 08 01 [email protected] : Jean-Claude DANDrIeUX 04 75 26 48 52 [email protected] : Benjamin COUrCOt assisté de Marine PLANCHeNAULt [email protected] Impression : IMPrIMerIe De CHAMPAgNe

Avec la participation de :

éDITOrIaLLe quotidien des hospitaliers, leurs débats, leur art de la navigation en mer agitée et leur abnégation en font de légitimes prétendants à l’oscarisation. L’écosystème de santé se transforme vite et s’adapte aux enjeux du 21ème siècle... L’évolution démographique et « l’éducation numérique » sont les catalyseurs d’un nouveau genre de patients : éduqués, formés, informés et exigeants. Les citoyens, devenus acteurs de leur santé, obligent le système de soins à repenser ses modèles... Les hospitaliers adaptent leurs pratiques à l’accélération des processus et à la rationalisation des moyens... Mais, ne pas confondre vitesse et précipitation sera probablement l’un des enjeux de notre système de santé et de l’adhésion des hospitaliers, eux aussi acteurs des révolutions en cours.

La rédaction

DHLE MAGAZINE DU DECIDEUR HOSPITALIER

4 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

GRAnd dossieRRestauReR la confiance. edoUARd CoUTY, directeur d’hôpital, conseiller maître à la Cour des comptes

RUBRiQUe : LA QUALiTé de L’AiR inTéRieUR De l’aiR ! La qualité de l’air intérieur,

un enjeu de sante publique - Vivre bien dans un air sain oLivieR ToMA, président du C2DS

insPiReR, eXPiReR. odiLe MAssoT, docteur en endocrinologie, biochi-miste, professeur associé à l’Université d’Angers

tout cela est Dans l’aiR - traite-ment de l’air intérieur, quels enjeux ? sYLvie JoviAdo, consultante PrIMUM NON NOCere®

une PReMièRe en MilieuX Hos-PitalieR - Analyse d’une centaine de substances chimiques en milieu hospi-talier. PR oLivieR THoMAs, responsable scientifique du projet AICHA, LereS, eHeSP

sensiBiliseR et MesuReR PouR alleR Plus loin - retour de terrain : « Haro sur le formaldéhyde » WieBke WinkLeR, C2DS

l’aiR notRe Bien coMMun, PRe-neZ en soin - Des précautions utiles. FABRiCe GUiCHeT, Primum Non Nocere®

la PReuVe PaR l’eXeMPle. niCoLAs doMken, responsable assurance qualité, gestion des risques, référent dévelop-pement durable, Polyclinique du parc rambot, Aix en Provence

Rien n’est JaMais acQuis. JACQUes Roos, président de l’asso-ciation des ingénieurs hospitaliers de France (IHF)

RUBRiQUe : sYsTèMes inFoRMATiQUe de sAnTé ÉDItOrIAL : est-ce la grippe, Docteur ?Systèmes d’Information de Santé : l’heure de la modernité concertée et assumée. vinCenT TRéLY, Président de l’APSSIS et Directeur de PrOXIMA CONSeIL

ÉcaRtèleMent - Quand les SIH se transforment en SIS. FRédéRiC CiRiLLo, rSIO-DSIO du Centre Hospitalier de l’Agglomération de Nevers, Président du Collège régional des DSIO des Centres Hospitaliers de Bourgogne

ResteR Des les clouDs ? La vision de l’ASIP Santé : un SIH adapté, ouvert et… réaliste. dR JeAn-Yves RoBin, Directeur de l’ASIP Santé

toMBent les teXtes - Avec la péné-tration It dans les unités de soins, la donne a changé ! éRiC PoTAUx, Directeur du Système d’Information et du Dossier Patient au CHU de Poitiers

la fin Des scHeMas HistoRiQues Nomadisme informatique et portabilité des systèmes : deux voies incontour-nables. BeRnARd BensAdoUn, Directeur général Délégué PCA-AHO, Nantes

iDentifieR les enJeuX - Coordina-tion des soins, information du patient, bases de données santé... PHiLiPPe BURneL, Directeur d’hôpital eHeSPSecrétaire général à la DSSIS, Déléga-tion à la Stratégie des Systèmes d'Infor-mation de Santé

suRf - Le Best of Breed ou les meilleurs systèmes qui parlent entre eux ! Lân GUiCHoT, Directeur Business Development, Agfa HealthCare

BRuits De fonD - Une amélioration impérative des SI malgré des résultats en demi-teinte.AnToine GeoRGes-PiCoT, Vice-Président en charge du secteur Santé, Cap gemini Consulting, ACYL BensLiMAne, expert de Cap gemini Consulting

RUBRiQUe : AnAToMie eT CYToLoGie PATHoLoGiQUes ACP, UNe SPeCIALIte MeDICALe eN

MUtAtION - Le DIAgNOStIC ACPUne spécialité méconnue mais irrempla-çable - Une restructuration indispensableQuels enseignements faut-il tirer de ce rapport ? MiCHeL GUiU, Président du Syn-dicat des Médecins Pathologistes Fran-çais (SMPF), FRédéRiC sTARoZ, Vice-Pré-sident du SMPF, Médecin Pathologiste à Quimper, JéRôMe CHeTRiTT, Vice-Prési-dent du SMPF, Médecin Pathologiste

au cŒuR D’un caBinet D’anato-Mie et cYtoloGie PatHoloGiQuenoRBeRT PAdiLLA, Médecin Pathologiste libéral

CHU AnGeRs Solidité et équilibre entRe le Bien et le Bien

YAnn BUBien

foRuM ! Une nouvelle approche de la chirurgie cardiaque et vasculaire. PR JeAn-LoUis de BRUx, dR Anne PAsCo-PAPon

B.B. MoDèle - BB-eeg, plate-forme d’aide à l’interprétation de l’élec-troencéphalogramme du nouveau pour la détection des lésions cérébrales. PR soPHie n’GUYen

cHÂteauX De saBle - Vivre plus longtemps chez soi, le reste de son âge. PR AnniCk BARTHeLAix, PR JeAn eMiLe

siMuleR sans tRicHeR - La simula-tion médicale au service de la sécurité des patients. PR JeAn-CLAUde GRAnRY

MauVaise nouVelle - La simulation en santé : la consultation d’annonce d’un cancer. dR José HUReAUx, CLAUde ReLiAT

sÉcuRitÉ attituDe - L’objectif de fond, c’est d’augmenter la fiabilité humaine. dR MARie-CHRisTine MoLL

la RecHeRcHe est une ReMise en cause ! Les programmes hospitaliers de recherche médicale s’avèrent particu-lièrement actifs au CHU d’Angers. dAvid ABAdiA-UGARTe

RelieR les cHaÎnons - Les référents logistiques : un nouveau métier pour une nouvelle organisation. GéRALd GAsQUeT

la fin Des fossiles - Le chauf-fage biomasse, une solution d’avenir. edMond vAPAiLLe

CHRU BResTBretagne occidentale tiReR l’HÔPital VeRs le Haut -

Faire comprendre les évolutions techno-logiques et sociales est rarement chose aisée. BeRnARd dUPonT, Directeur général du CHrU de Brest

le Patient n’est Pas la PRoPRiÉtÉ Du MÉDecin - Président de CMe, une mission à large spectre. PR BeRTRAnd FénoLL, Chirurgien pédiatre, Président de la CMe

ici, cHeRcHeuRs - Intuition, certes mais aussi organisation et rigueur ; la recherche ne s’improvise pas. dR doMiniQUe MoTTieR, Coordonnateur du Centre d'Investigation Clinique, RéMi BRAJeUL, Directeur adjoint en charge de la recherche

tout n’est Pas ÉcRit D’aVance Dans les Étoiles - transferts de com-pétences infirmières. nATHALie FRéMin, Cadre supérieur de santé

CH ALPes-LeMAnFace aux Alpes le Defi De la concuRRence

La qualité des soins et la performance sont les impératifs. BRUno vinCenT, directeur général

iMPact enViRonneMental - La maitrise de l’impact environnemental de l’activité hospitalière prévient l’émer-gence de nouvelles maladies. PAsCAL di MAJo, ingénieur hospitaliers

RestauRation De la confianceL’ouverture du nouvel hôpital a res-tauré la confiance des patients. WiToLd GeRTYCH, chef du service gynécologie obstétrique, GAëL PiQUiLLoUd, chirurgien plasticien, PAUL viGnoLi, radiologue

6

10

12

13

15

17

18

19

20

21

22

25

26

29

30

32

33

35

38

40

45

52

54

58

62

64

66

68

70

73

75

77

80

82

86

89

91

94

96

100

102

51er trimestre 2013 / DH magazine 145

CH ARMenTièResFlandre intérieure Point De MÉDecins, Point D’HÔPi-

tal - Mettre les nouveaux médecins en situation de responsabilité. PieRRe PAMART, Directeur général du CHrU d'Armentières

saint GRaal ou autoDÉfense ?Appel à la mobilisation pour une réforme de la t2A et des MIgAC. dR JeAn-LUC desMAReTZ, Président CMe, Praticien Hospitalier en réanimation

l’autoMate D’aRMentièResDistribuer les médicaments sans « dis-tribuer » les erreurs : le rôle des CreX.CHRisTiAn BonenFAnT, coordonnateur du Centre d'Investigation Clinique

Jeu De coM’ - L’aspect apparemment ludique de la communication n’en néces-site pas moins beaucoup de profession-nalisme. sYLviAne PeLTieR, responsable Communication & Culture

CH ARRAsUn ensemble plus vaste coMPetition ! Face à une très forte

concurrence du privé, le CH d’Arras ne manque pas d’atouts et sait les optimi-ser. MARie-odiLe sAiLLARd, directeur général

PoKeR MenteuR - Comment maintenir un niveau de frais financiers compatible avec le cycle d’exploitation de l’hôpital. BeRTRAnd PRUdHoMMeAUx, directeur des services financiers

un JuGe in situ - La Loi du 5 juillet 2011 relative au droit des patients hospi-talisés en psychiatrie a introduit un nou-veau joueur : le Juge. HéLène deRUddRe, directeur adjoint, politique en faveur des personnes âgées, Santé mentale, AGnès FALLenoT, des libertés et de la détention

CH CHARLeviLLe-MéZièRes Coopération dans les Ardennes

les clÉs Du cHanGeMent - Créa-tion du groupement de Coopération Sanitaire territorial Ardenne-Nord. JeAn-CHRisToPHe PHéLeP, directeur de l’hôpital de Charleville-Mézières et admi-nistrateur du gCS

PaRtaGe Du Bloc - Les Ardennes : un département face au défi de la démo-graphie médicale. dR xAvieR FonTAine, médecin responsable du service de médecine d’urgence et Vice- président de la CMe

suRMonteR les DifficultÉsLa permanence des soins au cœur du gCS. dR issAM FRAnGi, chirurgien urologue et président de la CMe de la Clinique du Parc

CH inTeRCoMMUnAL dU PAYs des HAUTes FALAisesLes hauteurs de Fécamp

sans concuRRence ! La confiance dans la qualité des professionnels de santé. ALAin RenAUd, directeur général

entRe « sillaGe » et « GÉnois »La refonte du système d’information en un temps record. vinCenT ReGnAULT, responsable des services informatiques,

Petites toucHes PRaGMatiQuesPlus de délégations aux pôles pour une meilleure gestion. dR vALéRie viLLeRs, chef du pôle de gériatrie et CARoLe sénoviLLe, cadre du pôle, dR JeAn-Yves BARiL, chef du pôle mère-enfant et JeAn-LUC HACHARd, cadre du pôledR PHiLiPPe CALoT, chef du pôle médical aigu et MURieL kHUL, cadre du pôle

CH RoUBAixUn hôpital en mutation situation, DÉcision, action

Bousculer le rythme d’évolution de l’établissement. MARie-CHRisTine PAUL, Directeur de l’Hôpital de roubaix

Question De confiance - Une « attente » sans concession ni langue de bois. dR didieR BRiCoTeAU, Président de la CMe

un RaYon De soleil - L’accueil des familles et des enfants en soins palliatifs. dR PHiLiPPe HeUCLin, Chef de service, praticien hospitalier en soins palliatifs

le cHallenGe De la GRanDe PRÉMatuRitÉ - Le grand prématuré doit être pris en charge de façon globale. dR noRA HAoUARi, praticien hospitalier en néonatologie

la DouleuR n’est Pas une fatalitÉ - La douleur chronique n’est plus un simple symptôme mais évolue comme une propre maladie et s’accompagne d’un retentissement émotionnel, psychosocial et parfois familial. dR BeRnARd LeRoY, praticien hospitalier en anesthésie

SOMMaIrE104 132 142

144

149

154

156

158

134

137

139

106

108

110

112

114

116

118

121

124

126

129

131

6 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubr

ique

DH

: eD

Oua

rD C

Out

Y

rubrique DH : eDOuarD COutY

DH magazine − Édouard Couty, pourquoi vous ? Édouard Couty − Cette question a été d’ailleurs

posée par un journaliste le jour de l’installation :

le 7 septembre. « Pourquoi Édouard couty, qui,

il y a 20 ans, a réalisé un rapport sur l’hôpital et

dont on se souvient encore ? » Avec un sourire non

dénué d’humour, la ministre a répondu – je cite de

mémoire : « Vous êtes peut-être journaliste depuis

plus de 20 ans, on vous lit toujours avec plaisir. Voi-

là pourquoi j’ai sollicité Édouard couty. Je voulais

quelqu’un qui connaisse le monde hospitalier, qui

soit également connu du monde hospitalier et qui

ait un peu de distance par rapport à tout cela, c’est-

à-dire qui n’ait pas d’enjeu personnel sur le sujet. »

et c’est vrai, il n’y a aucun enjeu personnel. Une fois

cette mission terminée, je retournerai à mes chères

études. (rires)

C’est la version deux ou une évolution de carrière ?Pour l’évolution de carrière, vous arrivez trop tard

car je suis aujourd’hui conseiller maître honoraire à

la Cour des comptes... (sourire) Plusieurs gouver-

nements m’ont confié différentes missions dans

des champs différents : la santé mentale – 2008 –,

les assises du médicament après l’affaire Médiator

– 2011 – et maintenant le pacte de confiance...

Lors de ma première mission sur l’hôpital, il s’agis-

sait de préparer la réforme hospitalière de 1991.

Restaurer la confiance

EntrEtiEn avEcEdouard couty, conseiller maître à la cour des comptes, directeur d’hôpital, ancien directeur général des hôpitaux

Le titre fait penser bien sûr à la campagne d’afghanistan « restore hope », toutefois

on n’est pas sur le terrain militaire, mais sur le terrain hospitalier. Bien que la loi HpST commence à peine à montrer ses effets,

le gouvernement a perçu un malaise, une inquiétude. Il n’est pas question, en tout

cas pas encore, de remettre en cause la loi. Mais la ministre de la Santé a confié à

édouard Couty une mission qui vise à évaluer la confiance des Français dans l’hôpital.

Nous avons sollicité quelques informations à notre collègue édouard Couty, qui, avec sa

bienveillance et sa patience habituelles a bien voulu se prêter au jeu de l’interview.

6 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

71er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : eDOuarD COutY

Aujourd’hui, nous sommes dans un contexte complète-

ment différent : il ne s’agit pas de préparer une ixième

réforme, il s’agit de travailler sur un axe essentiel, qui

s’appelle la confiance, le pacte de confiance.

une mission pour trois groupes et trois femmes. C’est le hasard ?Pas tout à fait... Pour le premier groupe, il me parais-

sait très important de confier la présidence à un repré-

sentant des usagers. D’où mon choix de Bernadette

de Victor, présidente de la Conférence nationale de

santé – CNS –, qui dirigera le groupe de travail sur « le

service public hospitalier dans le système de santé ».

Le deuxième groupe, qui traite du dialogue social, ne pou-

vait être confié qu’à quelqu’un ayant la confiance des par-

tenaires sociaux de la fonction publique hospitalière et des

syndicats de praticiens hospitaliers. Danielle toupillier,

Directrice générale du Centre national de gestion – CNg –,

dirigera le groupe de travail sur « le dialogue social à

l’hôpital et les ressources humaines ».

Pour le troisième groupe, il fallait quelqu’un qui ait une

expérience de direction d’hôpital et qui soit aussi une re-

présentante des ArS. Aussi, j’ai choisi Monique Cavalier,

Directrice générale de l’Agence régionale de Santé

(ArS) de Bourgogne, qui dirigera le groupe de travail sur

« l’organisation et le fonctionnement de l’hôpital ».

Dans les trois cas, il s’agit de personnes de confiance et

de grandes professionnelles. Je sais que je peux comp-

ter sur elles...

donc, trois femmes pour « restaurer la confiance »... en quelque sorte (rires), mais elles ne sont pas seules...

Aujourd’hui, il y a un réel déficit de confiance, qui s’ex-

prime à plusieurs niveaux. Confiance des patients par

rapport à l’hôpital. Confiance des professionnels par rap-

port à l’avenir de leur institution et à leur propre avenir.

et troisièmement, confiance des tutelles et des pouvoirs

publics à l’égard de l’hôpital, mais aussi confiance des

hospitaliers vis-à-vis des pouvoirs publics. Cela fonc-

tionne dans les deux sens.

Les patients ont confiance dans l’hôpital mais ils

attendent plus de transparence, plus d’information.

Ça, c’est un premier point. Deuxième point : les

professionnels qui travaillent à l’hôpital. Quelle est la

confiance qu’on a en eux, en leur capacité de prendre

des initiatives ? et les hospitaliers, ont-ils confiance dans

l’institution et dans son avenir ?

Notre système est « bloqué », pyramidal, hiérarchique.

La vision de l’hôpital-entreprise n’est certainement pas

la bonne vision de l’hôpital public. Les hospitaliers sou-

haitent un service public hospitalier moderne à hauteur

des enjeux de santé publique, ils veulent un mode de

tarification adapté, ils attendent que, d’une manière ou

d’une autre, on leur exprime du respect, de la confiance

dans ce qu’ils peuvent faire, dans ce qu’ils savent faire.

Ils attendent des espaces de participation à l’élaboration

des projets... Ils veulent que le mode de gouvernance

soit réajusté pour tenir compte de manière plus effective

des avis émis par les professionnels.

Les malades ne semblent pas particulièrement inquiets...Les patients et leurs représentants sont inquiets. Ils sont

inquiets parce qu’aujourd’hui, dans notre droit, le service

public hospitalier n’existe plus : il n’est plus limité qu’à

14 missions, toutes les autres activités ne sont pas dans

le service public. et ces 14 missions représentent en

volume d’activité 20 à 30 % de l’activité d’un hôpital.

tout le reste est dans le champ de la concurrence et sou-

mis à la directive européenne « service ». Les soins, la

maternité… ne sont plus soumis aux obligations du ser-

vice public ! tout cela, c’est encore de la théorie mais,

néanmoins, c’est le droit actuel ! L’inquiétude est réelle

et justifiée !

Confiance des patients par rapport à l’hôpital. Confiance des professionnels par rapport à l’avenir de leur institution et à leur propre avenir. Confiance des tutelles et des pouvoirs publics à l’égard de l’hôpital

8 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

C’est tout de même une analyse un peu « provocatrice »...S’agissant de la gouvernance de l’hôpital,

dans le modèle de l’entreprise privée, le

conseil de surveillance nomme le prési-

dent du directoire et le staff de direction.

Il délibère sur les matières stratégiques,

y compris les finances, et il a les moyens

de surveiller ce que fait l’exécutif. Les comités d’audit

sont un de ces moyens. C’est pour cela qu’il s’appelle

conseil de surveillance. Dans cette même logique, le

directoire, c’est un vrai exécutif. À l’hôpital, le conseil

de surveillance délibère sur pas grand-chose et il ne sur-

veille rien ! Le directoire ne dirige pas, c’est un conseil,

il donne un avis au directeur. Le modèle « hôpital-entre-

prise » ne convient pas à l’activité de l’hôpital public.

L’hôpital n’est ni une entreprise, ni une administration

classique. C’est, pour moi, une évidence ! Cela dit, il

faut être clair, l’ancien conseil d’administration n’était

guère plus pertinent que l’actuel conseil de surveillance.

Conseil d’administration, conseil de surveillance, il ne

faut pas se limiter au nom des choses : il faut peut-être

inventer quelque chose d’autre !

Vous remettez en cause tout l’édifice institution-nel de l’hôpital...Non, je ne vais pas jusque-là. Mais les institutions ne

sont pas adaptées et, surtout, elles ne sont pas équili-

brées. Pour qu’un système complexe fonctionne, il faut

trouver un équilibre dans la gouvernance. Il faut un équi-

libre entre l’assemblée délibérante et un exécutif qui

doit être fort et responsable. La première doit pouvoir

surveiller ce qui se passe. Il y a aussi des instances qui

donnent des avis – CMe, Cte…

Aujourd’hui, ces instances sont le plus souvent « infor-

mées ». Les CMe ont considéré que cela était vexatoire,

c’est pour le moins un manque de considération et de

reconnaissance. Les présidents de CMe qui cosignaient

avec le directeur des actes importants, comme le contrat

d’objectifs et de moyens, sont désormais écartés ; c’est

là encore un manque de reconnaissance et, surtout, un

manque d’implication dans le fonctionnement de l’éta-

blissement. Quand les présidents de CMe ont vu arriver

la loi, ils se sont dit : « on n’existe plus » ! Du reste,

pour assurer un fonctionnement harmonieux et efficace,

de nombreux établissements n’appliquent pas la loi sur

cet aspect-là. Même si le président de CMe s’est vu

confier des responsabilités importantes sur le secteur

de la qualité des soins. CMe et président ne donnent

plus leur avis sur la nomination des responsables, sur les

finances… Le ressenti est très fort. et la loi n’est qu’un

aspect des choses, il y a aussi la manière de faire... Ce

ne sont pas des choses que nous pouvons ignorer... Il

s’agit bien de restaurer la confiance !

on arrête la t2a et on retourne au budget global.Non, certainement pas, il faut conserver ce qui marche

et modifier les aspects négatifs, et donner plus de trans-

parence dans l’élaboration des tarifs, qui doivent être

effectivement fonction de la lourdeur des pathologies

traitées. Comment avoir confiance dans un système

devenu incompréhensible ? Nous allons préconiser un

système mixte entre tarification à l’activité et dotation

forfaitaire. De plus, la ministre a installé un groupe de

travail sur le sujet de la réforme du financement ; ce

groupe associe tous les partenaires concernés.

La t2A avait été instituée en 2004... La loi prévoyait

une convergence des tarifs public-privé jusqu’à un tarif

unique pour 2012. Les députés avaient voté une prolon-

gation de la convergence jusqu’en 2018. tous les ans, il y

avait donc un transfert de crédits de la masse hôpital sur

la masse clinique, et ce jusqu’à ce que la convergence

soit totale. La loi de financement de la Sécurité sociale

pour 2013 a supprimé la convergence et il y a donc deux

échelles de tarifs. Ceci ne remet pas en cause la t2A.

La confiance s’exprime aussi en termes de dia-logue social.Il y a plusieurs stades : la concertation, la consultation et

la négociation. Aujourd’hui, qu’existe-t-il à l’hôpital ? Au

premier stade, la concertation est en principe liée aux

personnes. Le directeur organise la concertation, sauf

qu’aujourd’hui, les textes ont supprimé les conseils de

services, de pôle… Ces structures, qui étaient l’essence

même de la concertation et de l’information, n’existent

plus. Le deuxième stade, les instances consultatives –

rubrique DH : eDOuarD COutY

À l’hôpital, le conseil de surveillance délibère sur pas grand-chose et il ne surveille rien !

91er trimestre 2013 / DH magazine 145

CMe, Cte – ne donnent plus d’avis sur de nombreux

sujets, ils sont simplement informés. et, au troisième

stade, la négociation formelle qui consiste à négocier et

signer un accord opposable avec des partenaires sociaux

n’existe pas. Dans l’hôpital d’aujourd’hui, les espaces de

concertation, il n’y en a plus beaucoup ! La consultation,

c’est pratiquement fini ! La négociation, ça n’a jamais

existé ! On ne peut pas dire que le dialogue social à l’hô-

pital soit structuré. et la question se pose ainsi : devant

un système qui est verrouillé, comment peut-on recréer

des espaces de concertation, de consultation voire de

négociation ?

Qui dit confiance dit aussi reconnaissance : des médailles, des primes ?La reconnaissance n’est pas seulement avec une mé-

daille ou une prime. elle est dans la vie quotidienne et

dans la gestion, et c’est très lié au mode de manage-

ment et au financement. est-ce que les contrats de pôle,

c’est de dire : vous allez faire de la production d’actes

pour que le budget soit équilibré ? et donc, je vous de-

mande de produire, et si vous ne produisez pas, vous

n’êtes pas bons ! Les soignants ont une autre vision

de leur profession. C’est tout l’enjeu de la réforme du

financement. Vous ne pouvez pas dire en même temps :

« Vous êtes quelqu’un de compétent et je le reconnais »

et immédiatement après : « Vous avez un compte qu’il

faut équilibrer et vous n’y parvenez pas, donc vous êtes

nuls ! »

Il faut reconfigurer l’approche d’une manière différente :

« Vous êtes un professionnel, on a besoin de votre com-

pétence pour faire tourner la maison, je vous écoute et,

en même temps, vous devez comprendre que j’ai des

contraintes ! » C’est une toute autre manière de faire.

La gouvernance, c’est l’organisation, mais c’est aussi le

dialogue social.

Que peut-on déjà dire du pré-rapport Couty ?Il y a un très large consensus de tous les acteurs pour

rétablir la notion de service public. Adapter le mode de

financement : dans son modèle actuel, la t2A n’est pas

bien adaptée à la prise en charge des pathologies au long

cours, des maladies chroniques, des polypathologies. Le

modèle t2A va bien sur certains types d’activités, mais

pas sur d’autres. tel qu’il est conçu actuellement, ce

modèle est inflationniste : on compte la production et la

quantité des séjours. Il faudrait orienter le modèle vers

la qualité et la pertinence des indications.

Le rapport sera remis fin février et la ministre devrait

indiquer, dans les tous premiers jours de mars, les suites

qu’elle entend donner aux propositions qui sont faites.

De manière générale, il faut saluer le travail accompli

par les trois groupes, qui ont mobilisé plus de soixante

personnes chacun au rythme d’une réunion hebdoma-

daire de cinq à six heures pendant trois mois et demi.

Il faut remarquer la très grande qualité des échanges et

des contributions produites par les acteurs concernés.

tous ont montré leur attachement à l’hôpital public et

à la qualité de notre système hospitalier. enfin, le très

bon travail des équipes d’animation des groupes : pré-

sidentes, vice-présidents et rapporteurs a grandement

facilité le travail de synthèse. n

rubrique DH : eDOuarD COutY

Il y a un très large consensus de tous les acteurs pour rétablir la notion de service public

Marseille, le 24 janvier 2013 - La Conférence des Présidents de CME de CHU accueille favorablement les orientations du pré-rapport Couty. Elle salue le souhait exprimé par Edouard Couty du retour à un service public hospitalier de plein droit et son ouverture sur le territoire, tel qu’exprimé par la Conférence lors de son audition et de ses rencontres avec le Rapporteur. Elle se montre très favorable à une révision de la place du CHU au sein des territoires de santé avec la possibilité de participer à plusieurs Communautés Hospitalières de Territoire affirmant ainsi son rôle pivot dans l'organisation des soins, de l'enseignement et de la recherche en partenariat avec les établissements de santé de ces territoires. Elle réaffirme sa volonté de la communauté hospitalo-universitaire de promouvoir la place singulière du CHU au sein de ce service public hospitalier rénové. Extrait du Contact presse :Stéphane Idrac – Medial / [email protected]

Pré-raPPort couty lEs PrésidEnts dE cME dE cHu satisfaits

10 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

ru

briq

ue

DH

: D

ÉVeL

OPP

emen

t D

ur

abL

e

De l’airLa qualité de l’air intérieurun enjeu de santé publique

10 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

111er trimestre 2013 / DH magazine 145

Vivre bien dans un air sainpar olivier Toma

Inspirer, expirer interview du dr odile Massot

Traitement de l’air intérieur : quels enjeux ? n Tout cela est dans l’air interview de sylvie Joviado n Une première en milieu hospitalier interview du Pr olivier Thomas

Sensibiliser et mesurer pour aller plus loin n Retour de terrain : « Haro sur le formaldéhyde dans l’air intérieur » par Wiebke Winkler n La campagne de sensibilisation du C2DS « L’air, notre bien commun, prenez-en soin » n Des préconisations utiles interview de Fabrice Guichet n La preuve par l’exemple interview de nicolas domken n Rien n’est jamais acquis interview de jacques Roos

121314

18

La qualité de l’air intérieur est une préoccupation récente,

alors que nous passons 80 à 90 %, c’est-à dire environ 22 h

sur 24 en espace clos ou semi-clos et que nous savons désor-

mais que la concentration de polluants est supérieure à l’inté-

rieur qu’à l’extérieur.

La qualité de l’air intérieur est bien sûr liée à celle de l’air exté-

rieur, au point qu’il existe une corrélation entre les pics de

pollution et les hospitalisations. La pollution atmosphérique

provoque 16 % de nouveaux cas de maladies chroniques, et

exacerbe les symptômes de maladies respiratoires dans 16

à 29 % des cas. Aujourd’hui, entre 20 et 30 % des Français

souffrent d’allergies. Ce pourcentage pourrait même atteindre

50 % en 2030. À l’intérieur, les pollutions intérieure et exté-

rieure s’ajoutent, mais peuvent aussi interagir en créant

d’autres polluants.

Le grenelle 2, le Plan National Santé-environnement 2,

Plan de Santé au travail, la Stratégie nationale de

développement durable, sont autant de cadres

réglementaires qui nous alertent sur les risques

pour la santé publique liés à l’air que nous res-

pirons à l’intérieur des bâtiments. Une étude

menée au États-Unis par le très sérieux

greenguard environmental Institute nous

révélait qu’il est urgent de s’en préoccu-

per. en effet, les mesures faites dans

une crèche attestent que l’air respiré

par de charmantes têtes blondes

est contaminé par plus de

300 produits chimiques...

contre seulement deux dans

l’air extérieur. L’environmen-

tal Protection Agency (ePA)

considère la qualité de l’air inté-

rieur comme la quatrième plus

importante menace de pollution

pour les Américains. Quid de la

France ? À notre connaissance, les

données chiffrées sont peu nom-

breuses et peu d’établissements

ont réalisé des mesures de la qualité de l’air, démarche qu’il

faudra pourtant systématiser. Seuls 10 % en effet, selon l’Ob-

servatoire C2DS - IDD 2011.

La qualité de l’air intérieur constitue un axe fort de progrès en

santé-environnement et tout particulièrement dans les établis-

sements de santé. en effet, les établissements sont par défi-

nition des espaces confinés au sein desquels tous les efforts

portent sur la qualité bactériologique et biologique de l’air mais

non sur sa qualité chimique (à l’exception de quelques zones

très spécifiques).

Or, les établissements concentrent une grande quantité de

sources polluantes liées aux activités des occupants, aux équi-

pements, aux matériaux de construction, de rénovation, de

décoration, d’ameublement, à l’entretien et la maintenance,

au nettoyage, aux pesticides et à la pollution extérieure.

Ce dossier a été réalisé par le C2ds –– Comité pour le

développement durable en santé. Chef de rubrique : olivier Toma,

président du C2ds. Le dossier a été coordonné par véronique

Molières, BvM communication. Les interviews ont été réalisées

par Lucie kostmann, journaliste, BvM communication. Le C2ds

est une association de loi 1901 à but non lucratif créée en 2006

et qui compte aujourd’hui plus de 302 établissements adhérents

– publics, privés, esPiC – mobilisés par le développement

durable. L’objectif du C2ds est d’informer, de sensibiliser et

d’accompagner les acteurs de la santé aux avantages des

bonnes pratiques du développement durable afin de mieux

maîtriser l’impact humain, environnemental et économique

de leur activité.

Contact : C2ds

[email protected]

Tel/fax : 02 47 30 60 34

www.c2ds.eu

111er trimestre 2013 / DH magazine 145

Olivier Tomaprésident du C2DS

12 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Vivre bien dans un air sainqualité de l’air intérieur, quels enjeux ?

Par Olivier Toma,président du C2DS

Contribution :Lucie Kostmann

Contribution :Wiebke Winkler, chargée de la veille juridique et politique

Chef de rubrique :Olivier Toma, président du C2DS

Coordinatrice :Véronique Molières, BVM communication

Bien que les quantités des différents toxiques présents

soient faibles dans les établissements de santé, aucune

mesure ne permet d’analyser ce nouveau cocktail, en par-

ticulier dans les espaces à risques tels que le service de

stérilisation et les blocs opératoires. L’air que l’on respire

peut avoir des effets sur le confort mais également la

santé, depuis la simple gêne (odeurs, irritation des yeux

et de la peau) jusqu’à l’aggravation ou le développement

de pathologies comme par exemple les allergies respi-

ratoires, l’asthme, les allergies, l’hypersensibilité bron-

chique, une MCS (Hyper Sensibilité Chimique Multiple)

ou un SBM (Syndrome Bâtiment Malsain) ou encore un

cancer… Il est urgent de prendre à bras le corps cette pro-

blématique, en particulier au regard du personnel d’entre-

tien, de stérilisation et de bloc opératoire, soumis à une

exposition particulière compte tenu des produits utilisés

dans le cadre de leur profession et au regard des patients

fragiles (patients immunodéprimés, prématurés, enfants,

femmes enceintes, personnes âgées). Les polluants me-

surés dans l’air intérieur proviennent de plusieurs sources

et inversement, chaque source peut être à l’origine de plu-

sieurs pollutions. D’une manière générale, l’évolution de

la nature des matériaux et des modes de vie et de travail

contribue à une augmentation des pollutions intérieures

alors que la maîtrise des énergies contrarie une aération

naturelle et constante. La spécificité de l’activité de soins

amène un confinement particulier des espaces au sein

des établissements de santé. Les polluants proviennent

de trois sources principales intérieures : les constituants

du bâtiment incluant les équipements et mobiliers (for-

maldéhyde, composés organiques volatils – COV, fibres),

l’activité humaine (moisissures) et l’activité profession-

nelle de soins (produits de soins, produits nettoyants et

désinfectants). Améliorer la qualité de l’air intérieur au

sein d’un hôpital signifie veiller notamment à la qualité

des peintures, à la nature des colles utilisées pour fixer

sol et protections murales ou à celles présentes dans les

meubles, à la qualité de matériau des sols, la toxicité des

produits nettoyants utilisés quotidiennement et celle des

produits de désinfection et de soins. La qualité de l’air est

appréhendée exclusivement aujourd’hui à travers la lutte

contre les infections nosocomiales. Il est temps d’abor-

der cette problématique d’une manière beaucoup plus

globale : la qualité de l’air intérieur est un fil rouge dans

une démarche de développement durable.

Au-delà de l’impact sanitaire, l’impact économique au ni-

veau d’un pays est considérable. Aussi, agir dans le sens

de la prévention des pathologies associées permettrait de

réduire considérablement les maladies et le coût de leur

traitement. Atteindre cet objectif de réduction des mala-

dies et des coûts repose sur la mise en place de deux

actions solidaires que nous appelons de nos vœux : l’ins-

tauration d’une politique de « prévention »partagée, et la

création d’une authentique recherche et Développement

en santé. Nous pourrons tous alors devenir des acteurs

efficients de ce changement.

Managers d’établissements de santé, architectes, pro-

moteurs, industriels, consommateurs, nous sommes

tous des acteurs de santé sur le long terme. Que nous

le sachions et le voulions ou non. Passer à côté de cette

prise de conscience aujourd’hui, engagera, demain, notre

responsabilité pénale. Ces nouvelles contraintes néces-

saires, maintenant bien identifiées, sont non négociables

pour protéger notre santé et celle de nos enfants.

Acceptées et mises en œuvre avec bonne volonté,

elles se transformeront en une véritable aubaine,

tant sur le plan de la santé publique que sur celui

des coûts et de la résorption des déficits. n

131er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

C2DS – Comité pour le développement durable en

santé : Qualité des matériaux, qualité de l’air : quels

enjeux ?

odiLe MaSSot − Nous passons notre temps à respi-

rer. Dans les poumons, au niveau des alvéoles, il n’existe

pas de barrière qui filtre les polluants. Ils passent direc-

tement dans le sang qui les transporte dans tout l’orga-

nisme. Une étude de l’Observatoire de la qualité de l’air

intérieur (OQAI) montre une augmentation dans l’air des

habitations expertisées de polluants tels que le toluène,

le benzène et le formaldéhyde (ces deux derniers étant

classés CMr). Par ailleurs les composés organiques

volatils exacerbent, de manière générale les pathologies

respiratoires. grâce au grenelle de l’environnement et

à la nouvelle réglementation, la plupart des industriels

ont modifié la composition de leurs matériaux et sont

soumis à des contrôles plus stricts. Le formaldéhyde,

fortement allergisant, utilisé comme liant des matériaux,

disparaît peu à peu. Malheureusement l’étiquetage ne

se fait que sur autodéclaration. en France une personne

sur trois développe une pathologie respiratoire et 15 %

des enfants sont touchés par l’asthme en europe. L’on

rencontre de plus en plus de personnes qui développent

de l’asthme et des allergies après 60 ans ! et l’on a du

mal à comprendre pourquoi !

C2DS – Comment allier performance énergétique et

sanitaire dans la construction des bâtiments ?

o. M. − Depuis le choc pétrolier de 1970, les gens

confondent isolation et calfeutrage ce qui entraine une

augmentation de la concentration des polluants. Les bâ-

timents de basse consommation (BCC) sont plus perfor-

mants d’un point de vue énergétique mais ne sont pas

satisfaisants en ce qui concerne la qualité de l’air inté-

rieur. en effet, nous sommes en train de normaliser le

confinement des bâtiments. Nous alertons beaucoup les

architectes et la maîtrise d’ouvrage sur la ventilation, car

le renouvellement d’air est souvent inadapté aux condi-

tions physiologiques et la réglementation auquel il est

soumis est obsolète puisqu’elle date de 1983. Or, une

mauvaise gestion du renouvellement de l’air entraine

une augmentation de l’humidité relative. L’enquête

ISAAC (International study of asthma and allergies in

childhood) montre que la fréquence des crises d’asthme

et des allergies augmente de 2,7 fois en présence de

moisissures dans l’environnement des enfants déjà sen-

sibles. L’enjeu de demain sera donc de créer des bâti-

ments peu énergivore mais à fort renouvellement d’air.

C2DS – Comment dépasser cette contradiction

énergie versus santé ?

o. M. − Aujourd’hui nous sommes face à un conflit sa-

nitaire : si on ouvre les fenêtres pour améliorer la qua-

lité de l’air intérieur et par conséquent la santé de nos

concitoyens, on augmente la facture énergétique. Il faut

renouveler le règlement inadapté à la rt 2012. en effet, si

l’on ouvre les fenêtres il y a une déperdition de chaleur et

donc une déperdition énergétique. La solution est entre

les mains de la domotique qui peut apporter des réponses

satisfaisantes, pour un habitat étanche mais sain.

C2DS – Sans attendre une prise de position poli-

tique que pouvons-nous faire concrètement ?

o. M. − Il faut avoir un taux de renouvellement d’air

satisfaisant. Pour cela il faut entretenir régulièrement

les circuits, changer régulièrement les filtres, nettoyer

les gaines de ventilation sans quoi un biofilm peut se

développer, coloniser les gaines et se retrouver dans les

espaces. Si le nettoyage ne se fait pas rigoureusement,

surtout dans les systèmes hospitaliers, cela peut provo-

quer une condensation et développer des germes. n

Inspirer, expirer...

Entretien avec Odile Massot, Docteur en endocrinologie, bio-chimiste, spécialiste des moisissures de l’habitat. Professeur associé à l’Université d’Angers et respon-sable pédagogique du master « Risques en Santé dans l’environ-nement bâti » depuis septembre 2011. Consultante cabinet SEPT (Santé environne-ment pour tous).

14 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Traitement de l’air intérieur quels enjeux ?

étiquetage sanitaire des produits de construction et de décoration, création de postes de conseillers médicaux en environnement intérieur, surveillance obligatoire des établissements recevant du public font partie

des mesures réglementaires visant à limiter la pollution de l’air intérieur. La surveillance de la qualité de l’air bactériologique et chimique pour limiter les sources de pollution et l’assurance d’un renouvellement d’air suffisant, tels sont les enjeux d’une « saine » gestion de la qualité de l’air intérieur. La conception du bâtiment doit veiller à limiter

l’émission et la diffusion des contaminants aériens pouvant se dégager des produits de construction, des équipements en particulier aérauliques, ou des déchets. La maintenance des systèmes de chauffage, de

ventilation et de conditionnement d’air et la fréquence des opérations d’entretien

sont également importantes.

14 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

151er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Tout cela est dans l’air…

Entretien avec Sylvie Joviado, consultante pour l’agence Primum Non Nocere®, pôle Exper-tise du C2DS, experte bilan carbone accré-dité Adem, niveau II, conseillère médicale en environnement intérieur

* Felicia W, Environnement Health Perspective, 2007

C2DS – Comité pour le développement durable en

santé : Sylvie Joviado, vous êtes conseillère médi-

cale en environnement intérieur, de quoi s’agit-il ?

SyLVie JoViado − Frédéric de Blay, chef du service

pneumologie à l’Hôpital civil de Strasbourg a créé en

1991 la profession de conseiller médical en environ-

nement intérieur (CMeI) à la faculté de médecine. Ce

dernier a pour mission de rechercher les sources de

polluants dans l’environnement pouvant être à l’origine

ou exacerbant les symptômes de personnes sensibles.

Cela passe par la réalisation d’un audit de la qualité de

l’air et la mesure des polluants incriminés. Il y a au-

jourd’hui près de 35 CMeI en France, qui peuvent inter-

venir sur demande ou sur prescription médicale pour

mesurer la qualité de l’air intérieur chez des particuliers.

en 2009, sous l’impulsion de Chantal Jouanno, alors

secrétaire à l’Écologie, un budget d’1 million d’euros

a été attribué à un appel à projets régional pour créer

des postes de CMeI pouvant intervenir à la demande

d’un médecin pour toute suspicion de pathologie liée

à l’environnement intérieur (acariens, allergènes d’ani-

maux domestiques, moisissures, formaldéhydes, COV).

Une étude américaine* montre que l’intervention d’un

CMeI, permet une réduction pouvant atteindre jusqu’à

-13 % de prise de médicaments, -19 % de visites aux

urgences et -21 % de jours de classe manqués. L’amé-

lioration de la qualité de l’air agit donc directement sur

les symptômes. Selon une étude de l’ONAP (l’Obser-

vatoire national de l’asthme professionnel), les person-

nels de santé (médical et de nettoyage) sont devenus

la seconde catégorie de personnels la plus touchée par

les problèmes d’asthme, après les boulangers. Certes,

ce n’est plus le formol qui est mis en cause dans les

produits de nettoyage car ils ont été supprimés depuis

plusieurs années, mais ce sont les ammoniums quater-

naires qui sont des nouveaux facteurs de risque.

C2DS – Concrètement, comment procédez-vous

pour trouver la source des polluants et établir un

diagnostic ?

S. J. − On se rend au domicile des patients hypersen-

sibles, sur leur lieu de travail ou encore dans les écoles.

Lors de la visite, on enquête et on passe la maison au

peigne fin pour identifier les sources des polluants. Il

peut s’agir d’acariens, de moisissures, l’utilisation ré-

cente de peinture ou de solvants stockés dans le ga-

rage, on interroge sur la date d’achat des meubles, leur

matière pour détecter une trace de formaldéhyde par

exemple. Cela peut également être lié à une mauvaise

combustion du chauffage, au tabagisme qui exacerbe

toutes les maladies. On vérifie la situation de la maison :

est-elle construite près d’une station-service, d’une

autoroute, d’un pressing, etc. On mesure l’hygromé-

trie. Un taux d’humidité trop élevé, souvent associé au

développement de moisissures, peut être lié à l’exposi-

tion de la maison, un problème de ventilation, pas assez

d’aération et des activités ménagères importantes et la

présence de plantes vertes en excès. On passe au crible

les produits d’entretien. Utilise-t-on du désodorisant ?

De l’encens ? Quid de la poussière ? Une fois que l’on a

passé en revue tous ces critères, on envoie un rapport

au médecin qui nous a diligentés et qui va lui permettre

d’établir des préconisations.

C2DS – Quelles difficultés pour motiver les établis-

sements, est-ce un sujet acquis ou non ?

S. J. − Paradoxalement, quand on réalise des mesures,

les problèmes ne viennent pas tant des moisissures que

des produits chimiques. Le directeur de l’établissement

est souvent conscient des enjeux car il est responsable

de la rédaction du Document unique où doit être consi-

gné l’ensemble des risques encourus par ces salariés,

c’est-à-dire, les risques psycho-sociaux, les risques liés

à la chimiothérapie, les risques chimiques, etc.). en ce

qui concerne la qualité de l’air, doit également être véri-

fié l’utilisation et le stockage, les équipements de pro-

tection des salariés (masques, gants, etc.). Souvent, ce

sont les personnels qui manipulent ces produits dan-

gereux quotidiennement qui n’ont pas conscience des

risques qu’ils encourent. Certains personnels respirent

8 heures par jour des produits, comme par exemple les

solutions contenues dans des bacs de pré-trempage

et peuvent développer de l’asthme professionnel ou

des allergies. Paradoxalement, le tabagisme est très

contrôlé alors que le chef d’établissement n’en est pas

responsable, contrairement à l’exposition aux risques

chimiques.

C2DS – Quelles sont les préconisations que vous

êtes amenée à formuler ?

S. J. − On sensibilise beaucoup aux gestes simples

comme fermer les bouchons des produits, les utiliser

de manière cohérente en fonction de la composition

pour éviter les cocktails réactifs. On établit une carto-

graphie du stockage. On vérifie les fiches de données

de sécurité. On fait bien sûr un travail de sensibilisa-

tion auprès du chef d’établissement afin qu’il mette en

œuvre un plan d’action et qu’il dédie un référent que

l’on va former. C’est seulement en répétant inlassable-

ment la même chose que l’on parvient à faire prendre

conscience des risques et des enjeux. n

16 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

171er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Une première en milieu hospitalier…

Entretien avec lePr Olivier Thomas, responsable scienti-fique du projet AICHA, LERES, EHESP

(*) Liste des compo-sants séléctionnés : hydrocarbures aroma-tiques, hydrocarbures aliphatiques, hydro-carbures halogénés, alcools, aldéhydes, cétones, phtalates, terpènes, éthers de glycol.

C2DS – Comité pour le développement durable en

santé : Monsieur thomas, quel est l’objet de l’étude

aiCHa ?

oLiVier tHoMaS − Il s’agit de la première étude au

monde qui a pour objet la mesure et l’analyse d’une

centaine de substances chimiques en milieu hospitalier.

Cette étude, financée par l’ANSeS, est destinée à amé-

liorer les connaissances sur le niveau d’exposition des

personnels et patients dans un établissement de soins,

sur la base de mesures d’ambiance avec pour objectif,

entre autres, d’estimer la nature de la contamination

chimique de l’air intérieur à l’aide des méthodes analy-

tiques spécifiques. Il est important de souligner que le

choix des substances à mesurer s’est fait suite à une

enquête préliminaire in situ qui a permis de recenser

les produits chimiques utilisés dans différentes zones

de l’hôpital et de les classer selon cinq catégories (les

produits de laboratoire, les détergents/désinfectants, les

solutions hydro-alcooliques ou SHA, les médicaments/

antiseptiques et les gaz anesthésiques)*. ensuite nous

avons pris des mesures et effectué des prélèvements

pendant trois jours au CHU de rennes Pontchaillou,

dans le hall d’accueil, dans une chambre, une salle de

soins infirmiers, une salle de coprologie, une salle de

réveil post-opératoire et une unité de désinfection et de

stérilisation des endoscopes.

C2DS – Que nous montrent les résultats ?

o. t. − Les principaux résultats obtenus montrent que la

contamination de l’air des différentes zones étudiées est

dominée par les alcools, à des concentrations mesurées

largement en dessous des valeurs limites d’exposition

professionnelle réglementaire en France. De plus, les

valeurs moyennes du benzène et du formaldéhyde sont

inférieures aux valeurs fixées par le décret qui oblige les

erP (dont les établissements de soin à partir de 2023)

à respecter des valeurs guides de 2 et 10 µg/m3 respec-

tivement.

C2DS – Comment cette étude a été accueillie par les

personnels du CHu ?

o. t. − La réussite de cette étude est en grande par-

tie due à la très forte adhésion du personnel soignant.

Une première phase de prise de contact avec les dif-

férents acteurs (partenaires, chefs de service, cadres

de santé, comités...) a permis de mettre en place une

relation de confiance, d’expliquer les objectifs et les

enjeux scientifiques et sanitaires d’une telle étude.

Sensibilisation et formation, tels sont les enjeux clefs

qui permettront de faire prendre conscience des enjeux

liés à la qualité de l’air intérieur en milieu hospitalier. n

PrEMièrE étudE au MondE qui a pour objet la mesure et l’analyse d’une centaine de substances chimiques en milieu hospitalier

18 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Bureau de direction, salle de naissance, blanchisserie,

pharmacie…, l’action collective « Haro sur le

formaldéhyde dans l’air intérieur » qui a eu lieu entre

avril et juillet 2012 avec 16 établissements de soins

volontaires a donné lieu à 152 mesures*. elle a permis

de rendre visible un

risque invisible, de

mettre en lumière et

d’appuyer le besoin

urgent d’agir en

faveur de la qualité

de l’air intérieur.

L’hôpital s’avère,

avec la crèche, l’un

des deux espaces

publics où la qualité

de l’air intérieur est

particulièrement préoccupante. Une analyse, même

ponctuelle, de formaldéhyde dans l’air intérieur permet

aux établissements de chiffrer la présence de cette

substance chimique et de travailler à sa diminution

dans l’ensemble des services concernés.

lEs valEurs liMitEs dans les établissements recevant du public (ErP)

Pour le formaldéhyde, la valeur guide fixée par l’ANSeS

pour les erP est de 30 µg/m3 pour une exposition de

longue durée. Cette valeur sera réglementaire à partir

de 2015 dans ces établissements ; par la suite, l’objec-

tif est de la fixer à 10 µg/m3 en 2023. Pour l’action col-

lective du C2DS, 23 % des mesures n’ont pas dépassé

cette dernière valeur et 66 % d’entre elles se situent entre

10 et 30 µg/m3. Les résultats de l’action collective

du C2DS ont ainsi révélé une présence moyenne de

18,7 µg/m3 de formaldéhyde, avec un maximum mesuré de

106 µg/m3 et un minimum de 2,2 µg/m3 dans l’air intérieur.

Les valeurs limites d’exposition professionnelle (VLeP

court-terme et 8 h) sont actuellement fixées à 0,6 et

1,2 mg/m3, l’ANSeS a toutefois recommandé une impor-

tante diminution de ces taux réglementés par le code du tra-

vail. Dans la pratique, le risque est jugé préoccupant lorsque

la teneur mesurée en polluant atteint 10 % de la VLeP.

unE action collEctivE au service de la profession

L’amélioration de la qualité de l’air intérieur passe par

une meilleure compréhension des enjeux sanitaires liés

à celle-ci et surtout par la prise en compte de ces enjeux

par l’ensemble des parties prenantes : équipes, décideurs

en santé, fabricants et professionnels du bâtiment. De par

l’objet de l’association défini par ses statuts, le C2DS est

au cœur de la coordination des parties prenantes autour

du développement durable en santé et se doit de porter

des sujets jugés prioritaires pour le compte de ses adhé-

rents, dont la qualité de l’air intérieur.

Laboratoire Anapath à part, ce sont les résultats de me-

sure des lieux à faible renouvellement d’air et chauffés

qui interpellent en priorité, comme le bureau administra-

tif ou médical (mesure maximale de 74,8 µg/m3), la phar-

macie (mesure maximale de 58,5 µg/m3), la chambre de

patient (mesure maximale de 33,5 µg/m3) et la salle de

réunion (mesure maximale de 72,5 µg/m3). Les résultats

d’analyse de cette action collective démontrent ainsi le

rôle essentiel que joue la ventilation face à cette subs-

tance très volatile. Mais ils démontrent aussi le néces-

saire concours des professionnels du bâtiment et des

fabricants pour réduire le formaldéhyde à la source. n

Sensibiliser et mesurer pour aller plus loin

Par Wiebke Winkle, chargée de la veille juridique et politique & des groupes de travail au C2DS

* Mesures conduites par le Laboratoire ETHERA, échantillon-nage actif avec débit 200 ml / min. et cap-teur nanoporeux, kit Profil’air® d’ETHERA.

retour de terrain : action collective C2DS« Haro sur le formaldéhyde dans l’air intérieur »

191er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Sensibiliser et mesurer pour aller plus loin

dEs Préconisations utiles

Choisir les produits liés à la construction, la rénovation

ou l’ameublement en tenant compte du taux d’émission

de composés organiques volatils est une clef impor-

tante pour l’amélioration de la QAI. Il faut donc adopter ce

nouveau « critère de choix » sans délai et exiger cet éti-

quetage des polluants volatils lors de nos achats, sans at-

tendre le 1er septembre 2013. Nous devons être vigilants

face à des industriels peu scrupuleux qui pourraient avoir

tendance, pendant cette période, à « vider » les stocks

qu’ils ne pourraient plus vendre au-delà de ces dates.

Au-delà, les matériaux utilisés doivent être exempts de

nanoparticules, ce qui n’est pas le cas actuellement, bien

au contraire. On constate une dangereuse propension

des produits à base de nanoparticules d’argent ou de

dioxyde de titane (tiO2) à envahir nos établissements

recevant du public. Cela constituera un fléau à court

terme, car ces nanoparticules dans les matériaux sont

dangereuses à tous les stades de leur existence :

à la fabrication, lors de la pose et en fin de vie. Ces

déchets nécessiteront la mise en place de filières du

type « amiante », pour protéger notre environnement

de ces particules très fines. Le coût de traitement en

sera certainement prohibitif et nous devons l’anticiper

en coût global, dans le cadre de nos politiques d’achat,…

tout ce qui entre dans une pièce doit être choisi en

fonction de ce taux de COV, ce qui sous-entend que

les produits d’entretien et de maintenance doivent être

éco-labélisés. enfin, il faut veiller à un excellent niveau

de ventilation des locaux, pour que le renouvellement

d’air contribue à puri-

fier l’atmosphère. Les

systèmes à double flux,

permettent d’associer

traitement d’air et bâti-

ment basse consom-

mation (BBC). Il n’est

pas rare de trouver des

chambres d’hôtels ou

d’hôpitaux sans ven-

tilation, ces systèmes

de renouvèlement d’air

étant seulement en place dans les salles de bain. Sur ce

point précis, la règlementation doit évoluer, mais, dans

cette attente, les constructeurs et concepteurs doivent

impérativement l’anticiper, car les risques en termes de

santé publique sont nombreux et les surcoûts pour ajou-

ter des systèmes de ventilation, à terme deviendront

colossaux.

Des outils de mesure et d’analyse existent pour per-

mettre aux établissements d’identifier les impacts des

sources de pollution et de diminuer l’exposition des

personnels. Un diagnostic rcov® permet de mesurer le

taux de composés organiques volatils dans un établis-

sement recevant du public, c’est l’étape indispensable

pour mettre en œuvre un plan d’action et atteindre le

niveau de qualité d’air intérieur propice à une bonne

santé au travail. Un diagnostic rchos® est une analyse

des risques chimiques. Au-delà, l’agence Primum Non

Nocere®, pôle expertise du C2DS, propose une presta-

tion d’accompagnement à court et moyen terme. Notre

équipe d’experts formés en toxicologie, accompagne

les établissements de santé dans des actions de préven-

tion, de management, de formation et/ou d’information

sur les risques chimiques et toxiques des produits. n

L’air, notre bien commun, prenez en soin

Par Fabrice Guichet, Primum Non Nocere®, pôle Expertise du C2DS

Le C2DS place l’année 2013 sous le signe de l’amélio-ration de la qualité de l’air intérieur et lance une large campagne de sensibilisation auprès de ses établisse-ments de santé adhérents.

20 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

la PrEuvE par l’exemple

C2DS – dans le cadre du diplôme universitaire,

droit et gestion du développement durable en

santé, vous avez rédigé un mémoire sur le thème

« air intérieur, la prise de conscience d’une pollu-

tion silencieuse ». Pourquoi s’intéresser à la qualité

de l’air intérieur dans un établissement de santé ?

NiCoLaS doMKeN − Les pratiques professionnelles

des établissements de santé impliquent l’utilisation de

produits chimiques qui sont souvent à l’origine d’une

pollution intérieure. Les exigences élevées en hygiène

auxquelles nous sommes soumis en fait un secteur

particulièrement concerné. Mes recherches sur le sujet

m’ont fait découvrir que le sujet de la qualité de l’air

intérieur n’était pas une découverte. Les codes du tra-

vail, de la construction et de l’environnement intègrent

depuis bien longtemps les principes de précaution, de

prévention et de substitution face au risque chimique

et la nécessité de concevoir des locaux aérés et pré-

voyant un renouvellement d’air adapté à l’activité qui y

est pratiquée.

C2DS – Qu’avez-vous pu conclure suite à vos re-

cherches ?

N. d. − La démarche de sensibilisation à mettre en

œuvre ne concerne donc pas uniquement les établisse-

ments de santé mais l’ensemble de la population. Il a été

démontré qu’évoluer dans une atmosphère polluée avait

des conséquences sur la concentration des individus.

Améliorer la qualité de l’air intérieur, c’est améliorer les

conditions de travail de tous et donc améliorer la qualité

du service rendu et la sécurité des soins. Cela peut éga-

lement être une piste pour endiguer l’absentéisme qui

touche particulièrement le secteur de santé.

C2DS – avez-vous pu faire profiter votre établisse-

ment de vos conclusions ?

N. d. − Nous avons commencé à travailler sur le sujet

depuis maintenant 3 ans. Un référent risques chimiques

a été nommé par la direction. Il intervient dans les

services auprès des professionnels pour rappeler les

bonnes pratiques (port des équipements de protection

individuels, stockage et utilisation des produits…).

Une communication sur le sujet a aussi été réalisée

à plusieurs niveaux pour sensibiliser un maximum

de personnes. Nous avons aussi fait des mesures de

COV. enfin, nous travaillons sur notre politique achat en

privilégiant l’achat de peintures peu ou pas émissives et

l’utilisation de produits écolabélisés. n

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

Entretien avec Nicolas Domken, responsable qualité et gestion des risques référent développe-ment durable polycli-nique du parc Rambot, Aix-en-Provence

rien n’est jamais acquis…

Entretien avec Jacques Roos, Président de l’asso-ciation des ingénieurs hospitaliers de France (IHF)

C2DS – Comité pour le développement durable en

santé : Quel est le niveau de prise de conscience au-

près des ingénieurs hospitaliers ?

JaCQueS rooS − La qualité et le traitement de l’air

sont des sujets récurrents dont les fondamentaux sont

bien maîtrisés par les ingénieurs hospitaliers. Par contre

des sujets plus nouveaux tels que les émissions de COV

doivent être approfondis en parallèle avec le dévelop-

pement et la standardisation des fiches de déclarations

environnementales et sanitaires des matériaux mis en

œuvre ainsi que l’établissement de référentiels et de

standards de mesure.

C2DS – Vous êtes sur le terrain, et devez quotidien-

nement faire face à des problèmes liés à la qualité

et au traitement de l’air. Comment faciliter le travail

sur le terrain ?

J. r. − Les enjeux concernant la qualité de l’air ne sont

jamais « d’ores et déjà acquis ». Les évolutions liées à

l’apparition de nouveaux enjeux de santé publique, au

développement durable (étanchéité des bâtiments,

économies d’énergie) et aux innovations des équipe-

ments techniques nécessitent une formation et une

mise à niveau des connaissances permanentes. elle se

fait notamment au travers d’une veille réglementaire et

technique et de formations thématiques et/ou de confé-

rences comme les Journées d’étude et de formation

des Ingénieurs Hospitaliers de France qui se tiennent

chaque année et sont l’occasion de s’informer des

dernières tendances et innovations ainsi que de

retours d’expériences. Pour information, plusieurs

interventions sur différents aspects de la qualité et

du traitement de l’air intérieur sont programmées lors

des Journées IHF 2013 qui se dérouleront du 19 au

21 juin au Parc Floral de Paris. n

20 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

211er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : DÉVeLOPPement DurabLe

22 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Système

d'information de santél’heure de la modernité concertée et assumée

ru

briq

ue

DH

: in

fOr

ma

tiq

ue

ÉcartèlementQuand les SIH se transforment en SISpar Frédéric CirilloRester dans les clouds ?La vision de l’ASIP Santé : un SIH adapté, ouvert et… réaliste par dr Jean-Yves Robin Tombent les textes par éric PotauxLa fin des schémas historiquespar Bernard BensadounIdentifier les enjeuxpar Philippe BurnelSurf - Le Best of Breed ou les meilleurs systèmes qui parlent entre eux !par Lân GuichotBruit de fondpar Antoine Georges-Picot & Acyl Benslimane

2526

2930323335

22 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

231er trimestre 2013 / DH magazine 145

Est-ce la grippeDocteur ?Le temps presse, disent certains. Les déficits des hôpitaux,

les revendications de personnels soumis à de nouvelles règles

managériales, une législation complexe et des décrets souvent

inapplicables, un enchaînement de réformes sont autant de

facteurs qui contribuent à gripper sévèrement la santé. il devient

urgent d’unir nos forces et nos atouts pour œuvrer à la construction

d’un système d’information de santé digne du système de santé

français. cette informatisation intelligente, ce passage inéluctable

du papier au numérique, la vision d’un système ultra-communicant

et sécurisé, bref, un schéma directeur national ambitieux mais

pragmatique, c’est l’une des clés de la modernisation du système

et de son passage réussi au XXième siècle.

loi HPst, t2a, PMsi, dMP, dPi, télémédecine sont quelques acronymes

et concepts bien connus des initiés, mais surtout des sources de

bouleversements majeurs et trop rapides d’un écosystème encore

victime de ses lenteurs et de ses processus décisionnels complexes.

des notions de raison, qu’il faut savoir manier avec pédagogie :

plans de financement réalistes, rentabilité des investissements

lourds ou mesure de performance et efficience font parfois bondir

le milieu médical car « la santé n’a pas de prix ». Michel Puech,

philosophe, maître de conférences à Paris-sorbonne l’exprime bien :

« on souhaiterait que la santé soit une valeur absolue. ce n’est pas

le cas. Elle se matérialise par des coûts. »

les systèmes d’information constituent un levier de passage en

douceur vers un nouveau modèle. c’est cette évidence, celle qui

consiste à tirer le système vers le haut, dans un contexte d’irréver-

sibilité des mutations engagées, en particulier celle des technolo-

gies, que nous devons porter. c’est sur les principes d’une commu-

nication positive, d’un réel accompagnement aux changements, de

recadrage vers des projets « réalisables » et apportant une réelle

valeur qu’il faut se fédérer. la réussite passe indéniablement par un

système informatique de santé pensé et construit intelligemment à

l’échelle nationale. les technologies sont matures et les volontés

affichées. Ne manque qu’une dynamique commune car les success

stories sont encore trop souvent locales et isolées.

DOSSIER RéALISé PAR

Vincent TrélyPrésident de l’APSSIS

et Directeur de PROXIMA CONSEIL www.apssis.com

[email protected]

231er trimestre 2013 / DH magazine 145

24 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

251er trimestre 2013 / DH magazine 145

écartèlementQuand les SIH se transforment en SIS

Par Frédéric Cirillo,RSIO-DSIO du Centre Hospitalier de l’Agglo-mération de NeversPrésident du Collège régional des DSIO des Centres Hospitaliers de Bourgogne

Les Systèmes d’Information Hospitaliers (SIH) ont enta-

mé leur mutation en Systèmes d’Information de Santé

(SIS), articulés autour du parcours de soin du patient et

des prises en charge par tous les professionnels de san-

té. Nouveaux acteurs, nouveaux enjeux, nouveaux rôles

pour les DSI. Les centres hospitaliers, et notamment les

établissements dits « pivots » des territoires, vont devoir

adapter leur stratégie et prendre une part prépondérante

dans cette (r)évolution.

en matière de gouvernance, nous voyons naître une mul-

titude de projets portés par des maîtrises d’ouvrage aussi

diverses que les groupements de Coopération Sanitaire,

chargés de décliner la politique nationale et régionale,

mais également des collectivités locales « portant » des

projets de maison de santé, dont la réussite est souvent

liée à la télémédecine ; sans compter les projets locaux

alliant aux structures sanitaires des structures médico-so-

ciales, des libéraux, la prévention adossée aux conseils

généraux, ou encore des plateaux techniques (laboratoire

d’analyses, cabinet de radiologie, etc.).

Les niveaux de compétences de ces acteurs en matière

de système d’information sont souvent très disparates.

Les notions d’urbanisation, d’interopérabilité ou encore

de sécurité sont parfois oubliées ou même ignorées. Sans

compter une méconnaissance des référentiels, normes

et contraintes réglementaires, telles que le décret héber-

geur de données de santé ou le référencement (puis la

certification) des Éditeurs de Logiciels et Intégrateurs du

Marché de la Santé (reLIMS).

Ces nouveaux partenaires apportent également leurs pro-

blématiques, leurs temporalités, leurs modes de finance-

ment, leurs organisations, leurs modèles économiques

et leurs enjeux ; certes, on retrouve la permanence des

soins, l’amélioration du service rendu au patient ou en-

core l’alternative à l’hospitalisation, mais également la

désertification médicale, l’attractivité des territoires ou

d’autres enjeux connexes, desquels les SIH n’ont jamais

eu à se soucier et auxquels les SIS et la télémédecine

devront répondre.

Si la DSI de CH ne sort pas de sa tour d’ivoire hospitalière,

elle va très vite voir cogner à sa porte une multitude de

projets plus ou moins bien construits, redondants

ou boiteux, clamant leur place dans le par-

cours de soins du patient, et donc au

sein des SIS. Les CHt restent très sou-

vent balbutiantes et éloignées des pro-

blématiques de systèmes d’information ;

elles fourniraient pourtant autant de

postes avancés pour la concertation, la

coordination et la mise en œuvre de tous

ces projets, maillant ainsi les territoires.

À cela s’ajoute la prégnance croissante des gCS qui,

sans vraiment s’immiscer dans les SIH, captent une part

importante des moyens régionaux et incitent à l’utilisa-

tion de leurs services, ainsi qu’à la généralisation des

expériences locales, encouragées par les ArS. Le DSI de

CH devra donc, lui aussi, entamer sa mutation en DSI de

Santé ; garant de l’atteinte des objectifs de son établisse-

ment, notamment ceux désormais inscrits au CPOM en

matière de télémédecine et de systèmes d’information

partagés, il devra affirmer sa place dans tous les projets

de territoire, participer à la définition et au pilotage des

projets régionaux. Il devra également être en capacité de

mobiliser des moyens, notamment humains, pour mettre

en œuvre des SIS répondant aux enjeux d’amélioration

du service rendu au patient et aux attentes de tous les

professionnels de santé.

Écartelé entre les trois prérequis très « hospitalo-cen-

trés » du plan Hôpital Numérique et l’ouverture vers

les SIS des cinq domaines prioritaires, les établisse-

ments de santé vont devoir réinventer les rôles, les

missions et l’organisation de leur Direction des Sys-

tèmes d’Information, désormais de Santé. n

Les CHT fourniraient pourtant autant de postes avancés pour la concertation, la coordination et la mise en œuvre de tous ces projets, maillant ainsi les territoires

rubrique DH : infOrmatique

26 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

La vision de l’ASIP Santé : un SIH adapté, ouvert et… réaliste

Par le Dr Jean-Yves Robin, Directeur de l’ASIP Santé

DH magazine : Comment voyez-vous ou sou-haitez-vous voir évoluer les Si de Santé Hospitaliers en 2013 ? JeaN-yVeS robiN − L’évolution la plus souhaitable

serait de réconcilier l’offre et la demande ! C’est un

sujet qui ne trouve pas aujourd’hui de réponse satis-

faisante. La difficulté d’aligner l’offre d’industriels

connaissant leurs propres problèmes avec la demande

de clients hospitaliers assez insatisfaits des services et

des solutions est toujours présente. C’est probablement

à horizon 24 mois ce à quoi l’on devrait prioritairement

s’attacher. Cela passe à la fois par un renforcement de

la capacité des maîtrises d’ouvrages hospitalières – pour

la partie hôpital –, par des actions de normalisation, de

certification, de standardisation – côté offreur – et, enfin,

par une action des pouvoirs publics visant à mieux cla-

rifier la politique industrielle dans ce secteur, en étant

plus clairs et plus précis sur des questions-clés : que

faut-il acheter ? À quel moment ? Quelles priorités ?...

Le programme hôpital numérique apporte des réponses,

mais il faut aller au-delà du programme en lui-même.

Les établissements de santé sont-ils prêts à se diri-ger vers cette standardisation ? C’est une des causes de difficulté entre l’offre et la de-

mande. Il y a trop de cahiers des charges spécifiques qui

imposent de construire des solutions ad hoc, d’introduire

du sur mesure sur des solutions existantes – cela se fai-

sant au détriment de l’industrialisation du secteur et des

principes de standardisation. Cette attitude génère éga-

lement des coûts évitables par un recentrage de l’offre

et une lutte contre les demandes trop spécifiques de

certains donneurs d’ordre. Quand je parle de politique in-

dustrielle, je pense à une politique qui soit plus globale,

plus nationale, de façon à s’assurer que chaque établis-

sement qui lance un appel d’offres le lance bien sur des

fonctionnalités compatibles avec l’offre existante. Il n’y

a pas la place pour 15 opérateurs de SIH en France. La

France n’est pas un gros marché. Les industriels ont des

difficultés pour deux raisons majeures : solutions qu’ils

ne vendent pas assez cher et/ou trop coûteuses à main-

tenir à cause de variantes et des exotismes précités.

une stratégie semble se dessiner : la régionalisa-tion ? Je reste dubitatif car je pense que le meilleur client pour

une solution est celui qui l’utilise. en l’occurrence, le fait

qu’un hôpital soit en capacité d’acquérir et de choisir

la solution qu’il va utiliser reste un moyen de sécuriser

l’appropriation par l’utilisateur de la solution retenue.

L’évolution la plus souhaitable serait de réconcilier l’offre et la demande

Il n’y a pas la place pour 15 opérateurs de SIH en France

Rester dans les clouds ?

rubrique DH : infOrmatique

271er trimestre 2013 / DH magazine 145

Le mode consistant à faire acheter une solution pour

une région entière par un acteur – qui va acheter pour

le compte de tiers – fait penser au modèle anglais, qui

avait adopté cette solution mais en est rapidement re-

venu, constatant combien il était compliqué d’imposer

une solution à des acteurs pas toujours convergents.

L’installation de situations de quasi-monopoles régio-

naux, où l’on n’aurait qu’un seul système d’informa-

tion par région, ne me paraît pas très « moderne » !

ensuite se posera le problème de les faire communi-

quer entre eux et de les pérenniser. Que des établis-

sements, au titre de la mutualisation, se mettent à

plusieurs pour acheter un système en mode service –

SaaS – et/ou hébergé – cloud – et sur la base de besoins

communs, c’est une bonne chose et qui fonctionne

déjà assez bien, mais d’en faire une politique d’achat

sur une logique régionale, je ne suis pas convaincu…

Quels sont les leviers que permettent d’activer les Si de Santé pour aider les professionnels ? S’agissant de l’hôpital, l’un des grands leviers est la

communication ville-hôpital, supportée par un SIH qui

permette de désenclaver l’hôpital et le mette en situa-

tion de coopération réelle avec l’ensemble de son envi-

ronnement, que ce soit à travers des outils « simples »

de messageries sécurisées ou ceux de télémédecine,

de télé-expertise, de télésurveillance, d’un DMP…

Un des grands défis, au-delà de l’efficience intrahospi-

talière, c’est d’ancrer l’hôpital dans son territoire et de

lui donner les moyens de mieux travailler avec le reste

de l’écosystème. Un outil simple, réellement efficace,

mais qui n’existe pas encore et que l’on va s’attacher

à promouvoir en 2013, c’est un système efficient de

messagerie sécurisée, basée sur des annuaires à jour.

une vision sur l’hôpital du futur ? La bonne vision est un continuum quasi transparent

pour le patient sur l’ensemble de son parcours de

soins. Les technologies de l’information le permettent,

mais cela ne peut se réaliser qu’avec l’acceptation

des patients et des professionnels de santé. Le sujet

est loin d’être purement technologique. n

Un outil simple, réellement efficace, mais qui n’existe pas encore et que l’on va s’attacher à promouvoir en 2013, c’est un système efficient de messagerie sécurisée, basée sur des annuaires à jour

Un continuum quasi transparent pour le patient sur l’ensemble de son parcours de soins

rubrique DH : infOrmatique

28 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

291er trimestre 2013 / DH magazine 145

Avec la pénétration IT dans les unitésde soins, la donne a changé !

DH magazine - Pourriez-vous nous dresser un état des lieux ? ÉriC Potaux − Le Système d’Information, ou plutôt,

devrais-je dire, les Systèmes d’Information Hospita-

liers, ont de grandes difficultés à s’implanter dans les

établissements ; tant que nous étions sur les parties

administratives, dont les process sont maîtrisés depuis

longtemps, il n’y avait aucun souci pour déployer les

outils nécessaires au bon fonctionnement de l’hôpi-

tal. Avec la pénétration It dans les unités de soins, la

donne a changé ; les procédures et les workflows sont

variés, là aussi maîtrisés depuis bien longtemps mais

sous forme papier. La notion de rapidité de transmis-

sion de l’information est prégnante, contradictoire avec

un système où il faut du temps pour saisir, temps pré-

cieux difficile à dégager dans des services, résultat

des déploiements complexes à gérer et des projets

fixés sur des échelles de temps peut-être trop longues.

et les réglementations s’accélèrent, s’affolent, les

textes tombent les uns à la suite des autres, voire les

uns à côté des autres dans la mesure où certains en-

traînent des contradictions dans les délais de mise en

œuvre ou dans la faisabilité technique. On passe un

décret « confidentialité » en 2007 qui, à ce jour, n’est

pas mis en œuvre, on lance la facturation au fil de l’eau

sans que les industriels aient le temps d’apporter les

réponses aux Clients et l’indicateur « nombre de lits dé-

ployés » dans le cadre du CBUM (Contrat du bon usage

du Médicament) est un surprenant moyen de forcer les

déploiements d’outils informatisés de prescriptions…

L’effort porté par les établissements hospitaliers sur les

SI est important et, pour autant, les outils de prescrip-

tion peinent à se déployer. Un point positif : le PACS,

qui est une technologie fédératrice et source de pro-

jets médicaux sur des territoires ou en interrégional.

Cela annonce-t-il des mutations profondes ? Les SIH sont voués à accompagner les établissements

hospitaliers dans les réorganisations des cartes sani-

taires, notamment en proposant des solutions sur des

territoires de santé ; l’enjeu est de taille et pour autant

complexe. L’interopérabilité doit jouer à plein, les normes

IHe doivent être maîtrisées, pour permettre aux établis-

sements de communiquer les uns avec les autres, sans

modification ou retraitement de l’information.

Or, les sociétés interprètent, dévoient un peu

les normes. Les prestataires doivent com-

prendre qu’ils ne sont plus dans une logique

de déploiement local mais bien dans la propo-

sition de solutions avant tout communicantes.

Quels sont les grands axes à développer pour faire avancer le Si de santé ? Le DMP est un axe très intéressant car il force les DSI

à mettre à plat la cohérence des informations stockées

dans les systèmes, à les formater, les normaliser en vue

d’un enrichissement des dossiers. D’aucuns critiquent

la pauvreté actuelle des contenus sur les DMP créés à

ce jour. Pourtant, sur une échelle de temps raisonnable,

une fois le travail de normalisation réalisé, il deviendra

possible d’enrichir facilement et rapidement le DMP des

patients. L’ouverture des plateaux médico-techniques,

tels que les PACS, ou les systèmes de gestion de bio-

logie territoriaux ou régionaux, sont autant de réponses,

notamment pour des établissements non équipés,

avec le déploiement de services d’échanges et de par-

tages entre professionnels et un support à la télémé-

decine. Le SIH devient SI territorial, voire SI régional.

rôle des régions ? offre ? Compétence ? Pilotage ? Dans ce cadre, les régions doivent, au travers des es-

paces Numériques régionaux de Santé, accompagner

ces projets transversaux en mutualisant au maximum

les moyens et les services nécessaires au déploiement

de ces nouveaux formats de systèmes d’information.

elles doivent aussi remonter les bonnes pratiques au

niveau national pour une meilleure mutualisation d’en-

semble et un retour empreint d’une réelle valeur ajou-

tée pour les structures porteuses. L’ASIP Santé a cette

difficile mission de compilation, mais son rôle s’avère

stratégique dans la coordination d’ensemble. Il reste,

à mon avis, beaucoup d’inégalités sur le pilotage en

région et je suis intimement convaincu qu’avec une

bonne remontée d’informations et une plus grande im-

plication des agences nationales, ces écarts pourraient

diminuer rapidement. Il demeure malgré tout la ques-

tion de fond, en cette période d’austérité : quelle sera la

place des investissements It dans les arbitrages finan-

ciers des régions ou des établissements ? n

Tombent les textes

rubrique DH : infOrmatique

Par éric Potaux, Directeur du Système d’Information et du Dossier Patientau CHU de Poitiers

© C

HU

-Poi

tiers

-Com

mun

icat

ion

30 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Nomadisme informatique et portabilité des systèmes :

deux voies incontournables

DH magazine – Qu’est-ce qu’un groupe de cliniques peut attendre au-jourd’hui de son ou de ses systèmes d’information ?berNard beNSadouN − L’hospitalisa-

tion privée, comme l’ensemble des établis-

sements de santé du secteur MCO, répond d’abord à

des impératifs de sécurisation des prises en charge et

d’objectifs « Qualité ». Par ailleurs, le secteur privé a

la réputation d’un suivi médico-économique efficient,

indissociable d’une informatique pointue visant à per-

mettre à ses dirigeants de disposer d’indicateurs et

d’outils de pilotage pour leur établissement. C’est dans

ces trois principaux domaines que les attentes vis-à-

vis des systèmes d’information sont les plus grandes.

Cependant, pour être complet, il me semble indispen-

sable d’y adjoindre les domaines de la communica-

tion et de la e-santé, qui sont deux secteurs-clés de la

relation avec les usagers, particulièrement amenés à

évoluer et à modifier profondément les modèles clas-

siques de prises en charge et de trajectoires de soins.

Concernant la sécurisation des prises en charge et la

démarche qualité, les exigences de la certification

V2010 sont suffisamment explicites pour orienter la

politique informatique d’un établissement – circuit

du médicament et identitovigilance, par exemple.

Dans ce domaine, d’ailleurs, les choix des éditeurs

sont de véritables décisions stratégiques, qui en-

gagent conjointement les praticiens et leur direction.

Le suivi médico-économique, pour un groupe de cli-

niques réparties sur le territoire, consiste à remon-

ter et à consolider des données de production de

soins – activité, ressources humaines, ressources

matérielles, données financières… Depuis quelques

années, les évolutions informatiques liées à l’intero-

pérabilité des bases de données permettent d’envi-

sager d’alimenter des entrepôts de données – data

warehouses – pour retraiter celles-ci dans différentes

dimensions afin d’élaborer des indicateurs facilitant à la

fois le parangonnage et la prise de décisions éclairée.

Le Patient devient-il un e-acteur de son parcours de soins ? De nouveaux enjeux sont récemment apparus avec le

développement de la communication en santé et l’avè-

nement de la e-santé. Les patients sont de mieux en

mieux renseignés sur leurs droits et sur leurs intérêts.

À ce titre, un établissement moderne, indépendamment

de son statut, se doit de répondre aux attentes de ses

patients potentiels, en mettant à disposition une infor-

mation pertinente, fréquemment réactualisée, et trans-

parente, disponible sur les médias les plus consultés. De

la même manière, les générations de patients qui arri-

vent ont intégré la puissance de l’informatique dans leur

quotidien ; elles réclament un accès au monde médical

au travers du web et de ses technologies associées. Il

faut s’attendre, dans ce domaine, à ce que la e-santé

bouleverse les schémas historiques, non pas pour les

remplacer mais pour les compléter.

Quels sont les principaux enjeux stratégiques du Si – contenant, contenu, ouverture ? Les enjeux sont directement corrélés aux attentes, les

systèmes d’information des groupes hospitaliers privés

se doivent d’être beaucoup plus communicants qu’ils

ne le sont aujourd’hui. Cet axiome est pour le coup

beaucoup plus vrai qu’à l’hôpital public, pour une raison

La fin des schémas historiques

rubrique DH : infOrmatique

Par Bernard Bensadoun, Directeur Général Délégué PCA-AHO, Nantes

De mauvais choix en matière de système d’information auront des retentissements sur la qualité des soins prodigués, sur la qualité

des conditions de travail et sur l’efficience de la structure

311er trimestre 2013 / DH magazine 145

majeure : l’activité des établissements privés est direc-

tement liée à la médecine libérale. en effet, très sou-

vent, les praticiens consultent en ville et opèrent sur le

plateau technique de la clinique. Cette dissociation sous-

entend que les systèmes d’information des cabinets et

de la clinique soient interopérables pour rapprocher les

données « patient » nécessaires à l’alimentation d’un

dossier consolidé.

Ces opérations sont aujourd’hui insuffisamment automatisées, avec une réelle complexité de mise en œuvre. Le DMP pourrait être une forme de réponse à ce besoin

d’interopérabilité et de consolidation ; cependant, sa

mise en œuvre paraît laborieuse dans un contexte où

les éditeurs ont fait de la « DMP compatibilité » un argu-

ment financier pour justifier des évolutions de version

plutôt que de parier sur la puissance de sa démocratisa-

tion. Au-delà de l’interopérabilité, les autres enjeux que

doivent relever les établissements de santé sont ceux

de leurs infrastructures et des capacités de celles-ci à

véhiculer de l’information VDI – voix, données, images –,

dont les nouvelles technologies, imagerie, téléméde-

cine, visioconférence pour rCP – réunions de Concerta-

tion Pluridisciplinaires – sont très consommatrices.

Par ailleurs, améliorer le débit de ses infrastructures,

c’est se donner les moyens de choisir sa politique d’ar-

chivage des données médicales en tablant, au besoin,

sur une externalisation encadrée – au sens du décret

hébergeur ASIP Santé – mais non bridée par les capa-

cités fonctionnelles. enfin, la médecine, comme c’est

déjà le cas pour beaucoup d’autres disciplines, va devoir

intégrer les applications développées autour du noma-

disme informatique et de la portabilité des systèmes.

Les médecins qui constituent une clientèle historique

chez Apple se sont très vite dotés des premiers Iphones

et attendent avec impatience que les éditeurs de dos-

siers patients adaptent leurs produits aux tablettes et

Smartphones, qui pourraient ainsi devenir des outils de

prescription à distance, de télésurveillance ou d’informa-

tion clinique.

Que peut ou doit attendre un groupe de cliniques de la politique nationale en matière d’informatisa-tion des processus de soins ? La loi HPSt comporte en elle beaucoup d’éléments de

réponses aux attentes de la médecine moderne : colla-

boration entre professionnels de santé, télémédecine,

décloisonnement ville-hôpital / sanitaire-médico-social,

qui sont autant de domaines dans lesquels l’informa-

tique tient une place prépondérante. Les décrets d’ap-

plication tardent cependant à sortir ou, quand ils sont

sortis, ils ne sont pas accompagnés des mesures inci-

tatives qui permettraient à de nouvelles pratiques de se

développer – financement des actes de télémédecine,

accompagnement au développement du DMP…

Par ailleurs, en dépit de l’élaboration de l’INS-C, la pro-

blématique d’une identification unique commune à tous

les systèmes d’information reste entière. enfin, les an-

nonces faites autour du plan hôpital numérique et des

nouvelles modalités de financement retenues pour ce

plan national paraissent complexes et contraignantes, au

point que les acteurs ne s’y retrouvent pas et rechignent

à se lancer dans des opérations dont l’accompagnement

n’est pas entériné dès le départ.

Comment un dG de clinique(s) voit-il son implication dans la stratégie Si de son/ses établissement(s) ? On est clairement dans le domaine de la stratégie. De

mauvais choix en matière de système d’information au-

ront des retentissements sur la qualité des soins prodi-

gués, sur la qualité des conditions de travail et sur l’effi-

cience de la structure. a contrario, le choix judicieux, la

capacité à l’expliquer et à y faire adhérer les équipes sont

de nature à créer une dynamique positive et fédératrice à

l’intérieur d’un groupe professionnel. Les révolutions en

santé ont toujours été portées par les hommes, l’infor-

matique semble être un bon prétexte pour changer de

paradigme dans un environnement économique qui sera

encore plus contraignant dans les années à venir. n

rubrique DH : infOrmatique

32 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Coordination des soins, information du patient, bases de données de santé…

DH magazine – Quels sont les grands enjeux des Si de santé sur 2013/2015 ?PHiLiPPe burNeL − J’identifie trois grands

enjeux en matière d’objectifs stratégiques :

Le renforcement de la coordination des soins, dans

une logique de médecine de parcours pour une meil-

leure prise en charge des maladies chroniques. L’ou-

tillage par les SI est indispensable pour permettre aux

professionnels de santé d’échanger ou de partager

des informations sur les patients qu’ils prennent en

charge – messagerie sécurisée, télémédecine ou dos-

siers partagés –, ainsi que pour faciliter « la gestion »

des parcours mobilisant des ressources diversifiées –

annuaires ou répertoires de ressources, outil des ges-

tionnaire de cas des MAIA….

L’information des patients sur la santé, sur l’offre de

soins et de services disponibles. Au-delà de la simple

information – sites internet –, l’offre de services peut

s’enrichir dans une direction plus interactive pour offrir

des fonctions d’aide à l’orientation ou faciliter l’accès

aux services de consultation par le développement de

téléservices – prise de rDV ;

La santé publique, qui doit pouvoir bénéficier, tant en

matière de pilotage que de recherche, des possibilités

qu’offre la constitution de grandes bases de données

médicales ou médico-économiques issues des SI de

production.

en quoi la dSSiS s’y inscrit-elle ? Le rôle de la DSSIS est d’identifier les enjeux pour en

dégager des orientations stratégiques qui structurent

l’action de la puissance publique. Son action se fonde

notamment sur deux constats principaux :

Le développement des SI ne peut s’opérer « hors-sol »

sur la base d’une simple logique technologique – ce que

la technique rend possible –, mais doit s’appuyer sur une

organisation elle-même portée par une logique médicale

et un degré plus ou moins important de protocolisation ;

Pour l’essentiel, les outils nécessaires existent ; l’enjeu

n’est donc pas de développer de nouvelles offres en ma-

tière de SI, mais de consolider, de rationaliser, de mettre

en cohérence les systèmes existants et d’en développer

l’usage par les professionnels de santé.

Comme dans toute action de management, l’identifica-

tion d’une stratégie est primordiale mais pas suffisante.

La coordination des actions conduites, en vérifiant de

façon continue leur alignement avec la stratégie, est

essentielle. C’est pourquoi une partie importante de l’ac-

tion de la DSSIS s’organise autour de la gouvernance et

de la maîtrise des actions identifiées comme critiques.

Quelles sont les grandes orientations de l’action de la dSSiS ? Concrètement, il résulte de ce qui précède trois champs

d’actions pour la DSSIS :

Comme indiqué précédemment, des actions de gou-

vernance et de détermination du cadre de développe-

ment des SI. Ceci se traduit notamment par la conduite

d’études d’urbanisation sur différents champs, comme

les SI de l’autonomie ou l’information des patients…

Le développement et la mise à disposition d’offres de

services génériques, telles que la messagerie sécurisée

ou le DMP – alimenté par le dossier pharmaceutique ;

La mise à disposition de référentiels sur lesquels s’ap-

puient les SI de santé : référentiels d’identification des

patients – quel INS ? –, des professionnels – rPPS – et

des structures – FINeSS –, de sécurité – recomman-

dations relatives à l’usage des SI dans les différents

contextes d’usage – et, bien sûr, référentiels d’intero-

pérabilité – technique mais aussi sémantique – pour per-

mettre les échanges.

Pour ce faire, la DSSIS, qui a un rôle d’anima-

tion stratégique et de coordonnateur, s’appuie sur

une gouvernance associant les parties prenantes

concernées par chacun des sujets – notamment les

directions d’administration centrale du ministère des

Affaires sociales et de la Santé, les ArS, la CNAMtS,

la CNSA… –, en concertation avec les profession-

nels de santé et les industriels, et s’appuie sur la maî-

trise d’ouvrage opérationnelle de l’ASIP Santé. n

Identifier les enjeux

rubrique DH : infOrmatique

Par Philippe Burnel, Directeur d’hôpital EHESP, Secrétaire Général à la DSSISDélégation à la Stra-tégie des Systèmes d’Information de Santé

331er trimestre 2013 / DH magazine 145

Le Best of Breed ou les meilleurs systèmes qui parlent entre eux !

L’informatisation de la santé s’est réalisée, jusqu’à pré-

sent, de façon morcelée, selon une logique dictée par

des exigences réglementaires ou des priorités par do-

maine d’activité. elle s’est faite en trois vagues :

l’informatisation par domaine de la gestion de « l’en-

treprise hôpital »,

l’informatisation par une démarche verticale de la bio-

logie, la radiologie et la pharmacie,

et, enfin, l’informatisation par une démarche horizon-

tale du Dossier Patient, s’adressant à l’ensemble des

services et des utilisateurs.

L’objectif d’une solution unique est visé, mais les

contraintes sont très fortes. Alors, les patrimoines SIH

existants sont considérés avec une normalisation des

échanges via des eAI. Cela a permis de bâtir des sys-

tèmes d’information « best of breed », composés de

solutions hétérogènes (la meilleure dans sa catégorie)

qui interopèrent.

La troisième vague se cherche une voie d’évolution,

même si la destination probable est connue : l’informa-

tisation de la médecine personnalisée. Les usages ont

suivi les tIC Santé par l’évolution des partages : partage

des plates-formes techniques, partage de la donnée

structurée (IHe/HL7) et partage des rôles (workflows).

au canada, 80 établissements sont fédérés pour qu’une

radio puisse être acquise dans un lieu proche du pa-

tient et interprétée à distance. le médecin généraliste

consulte l’image et le compte rendu dans son cabinet

en moins de 5 secondes. Ces projets d’informatisation

ont tous un point commun : ils sont tous différents ! Il

serait plaisant de le croire, mais ils ont en effet tous le

même objectif : le meilleur soin possible au patient. tout

ce foisonnement atteste d’un nombre important d’ex-

périences d’informatisation, qui démontre une grande

maturité de la technologie et des fournisseurs. Bref, la

technologie est là ! Les organisations hospitalières sont-

elles aussi avancées ?

Il faut sans doute adopter une démarche pragmatique,

partant des besoins et des moyens, mais aussi considérer

les usages. Les constructeurs de matériel l’ont compris,

l’informatique des systèmes d’information sera mobile.

L’avènement des Smartphones et des tablettes pousse

les professionnels vers des besoins de collaboration,

Surf

rubrique DH : infOrmatique

Par Lân Guichot, Directeur Business DevelopmentAgfa HealthCare

34 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

où la coordination des rôles est cruciale. Le patient est

alors actif de son parcours de vie, eu égard à ses don-

nées médicales personnelles. Il devient alors efficient de

segmenter le système d’information en deux parties :

le SI de production de l’information et le SI de diffusion

de cette information.

À cela sont croisées des exigences de sécurité et de

cycle de vie de la donnée, pour la produire et la diffuser.

Un espace numérique de santé peut ainsi être constitué

par apports pluriels, interrogeable de façon sécurisée et

naturelle, comme tout un chacun aujourd’hui le fait avec

son outil mobile. le système d’information de télésanté

aquitaine concentre les résultats de biologie de 60 pro-

ducteurs, pour les normaliser et les diffuser aux profes-

sionnels, mais aussi aux patients, directement sur leur

solution mobile.

Les politiques identifient le patient à un patient/citoyen

qui vit plus longtemps, car, pour eux, il faut aujourd’hui

adresser les enjeux du vieillissement de la population.

Il faut alors s’attendre à la parution de mesures inci-

tant les industriels à faire évoluer leurs solutions pour

considérer, en plus de l’existant sanitaire, les enjeux

du maintien à domicile, de la gestion du continuum de

soins hôpital/domicile ; bref, à définir la « géronto-tech-

nologie ». Ces solutions pourraient alors s’inspirer du

concept des réseaux sociaux pour mieux entourer ces

nouveaux patients en leur offrant des services coordon-

nés visant leur bien-être. Ces patients/citoyens sont plus

exigeants, plus informés, plus âgés aussi car soignés

plus efficacement, mais perdent leur autonomie au fil du

temps. les enjeux sont importants au plan national et

gigantesques au plan international, quand un soin à do-

micile coûte 25 % de celui réalisé en établissement. en

2030, 14,5 millions de français auront plus de 65 ans ;

dans le monde, des centaines de millions.

Finalement, les tIC Santé sont matures, de nouveaux

besoins apparaissent : gageons que les moyens de

l’informatique de santé seront au rendez-vous pour que

cette industrie crée l’innovation par l’usage, avec un mo-

dèle économique de paiement au service rendu. L’heure

est à la « rigueur mais pas à l’austérité » : il serait tout à

fait bienvenu et logique que des acteurs financiers, tels

que les assurances et mutuelles des patients, puissent

intervenir dans le financement de ces nouveaux mo-

dèles et nouveaux usages.

Les cogniticiens parlent « utilisabilité » plutôt que

mobilité, car ils conseillent de privilégier l’observation

des sens de l’homme pour créer des solutions (le tou-

cher a conduit au tactile). Alors, en plus de mettre en

œuvre les méthodes agiles pour développer de façon

plus efficiente, la r&D des éditeurs prendra conscience

qu’il faut réduire la complexité par une démarche

« bottom-up ». Démarche où l’on part du bas, l’échelon

le plus fin, pour consolider progressivement et opérer

une synthèse réduisant le « time to market ». L’intelli-

gence ambiante au cœur de l’explosion des tIC en san-

té saura-t-elle privilégier les usages ? Cette synthèse,

issue de toute l’expérience en SI de santé, profitera

au patient et aux professionnels qui l’entourent. n

rubrique DH : infOrmatique

351er trimestre 2013 / DH magazine 145

Une amélioration impérative des SI malgré des résultats en demi-teinteLe SI de Santé en France fait l’objet chaque année de

nombreux audits publics, études, points de vue qui

mettent en exergue ses lacunes. Ce bruit de fond occulte

les progrès essentiels de la période qui vient de s’écou-

ler et les ruptures à l’œuvre. trois acquis principaux

changent les conditions du débat sur le SI de Santé :

- Il est désormais acquis que le SIS doit être opérationnel

24/7 (en tout lieu et à toute heure), car il est la condition

de la qualité des soins délivrés.

- De la même manière, l’amélioration de la performance

de l’hôpital, que ce soit au bloc, aux urgences, à l’ima-

gerie, à la facturation des séjours et consultations, au

pilotage des pôles, etc., ne peut se penser sans une

informatique intégrée et réactive.

- L’hétérogénéité des systèmes est admise et les règles

permettant l’interopérabilité entre eux ont été écrites et

diffusées.

Ces acquis ont été renforcés par la création d’une

agence dédiée et pérenne, l’ASIP Santé, d’une Déléga-

tion au Système d’Information de Santé avec rang de

direction au ministère de la Santé et de moyens signi-

ficatifs budgétés dans le plan Hôpital 2012. Cette dyna-

mique a favorisé l’émergence de trois ruptures qui sont

en cours de concrétisation :

- Un SI de Santé qui sort des murs de l’hôpital :

Le DMP et sa déclinaison verticale, le Dossier Cir-

culant de Cancérologie, le programme SOFIA SOPHIA

de la Cnamts pour les diabétiques, le Dossier Pharma-

ceutique, les projets parcours de soins qui seront finan-

cés par le grand emprunt en sont l’illustration.

De manière très opérationnelle, les démarches de

schéma directeur se conçoivent désormais à l’échelle

d’un territoire (par exemple, projet Unisanté en Lorraine,

SDSI de l’Artois, SDSI de l’Ariège…).

- Le patient est désormais reconnu comme un acteur

de son SI de santé. Cet acquis du DMP prend une

nouvelle dimension avec les projets Santé 2.0, qui

placent le patient au sein de communautés de patients,

comme www.carenity.com, ou patients-soignants,

comme Diabeo.

- Les exigences de disponibilité placent la mutualisation

des systèmes et la recherche d’une masse critique au

cœur des choix et des évolutions. L’offre de services va

se concentrer sur les acteurs à même de garantir cette

permanence de services.

Dans ce contexte de mouvement, il y a trois défis par-

ticuliers qui conditionnent l’accélération du mouvement

en cours :

- L’officialisation d’un identifiant patient personnel, qui

facilite l’agrégation et la circulation des données.

- L’appui au développement des démarches s’intéres-

sant en priorité au parcours du patient sur un bassin de

vie. Les modes d’organisation de l’offre de soins évo-

lueront pour optimiser le parcours dans une logique cen-

trée sur le patient, compatible avec sa prise en charge

efficiente. Cet appui passe par le développement de

messageries sécurisées et de plates-formes d’anima-

tion des parcours des patients en ALD.

- Une place grandissante de l’HAS dans le SI de santé,

dans la mesure où il devient un outil de coordination

sécurisé de la délivrance des soins.

Quand on observe les pays qui ont aujourd’hui une in-

sertion forte du SI de santé dans les pratiques profes-

sionnelles de soins, on ne peut qu’être frappés par les

moyens qui y ont été consacrés. On peut ironiser sur les

12 milliards de livres investis dans le projet anglais de

SPINe, pour un résultat qui reste en deçà des ambitions

initiales, mais qui présente des réalisations comme

NHS Direct, que nous ne pouvons que leur envier. On

doit constater que les 4 % du budget consacrés depuis

20 ans par les Hôpitaux Universitaires de genève à leur

SI leurs donnent une avance de plusieurs années sur les

meilleurs champions du marché français.

Dans une période où les hôpitaux sont contraints par

une baisse des tarifs, dégager ces moyens nouveaux

à la hauteur des défis exige une amélioration des ca-

pacités d’autofinancement des établissements et une

réduction des coûts informatiques des systèmes exis-

tants. Au-delà des moyens financiers, la réussite pas-

sera par un renforcement des équipes à tous les niveaux

sur un marché des compétences tendu, mais où la santé

dispose d’un atout : l’attractivité des enjeux de la santé

et la contribution du SI pour y répondre. n

Bruit de fond

Par Antoine Georges-Picot, Vice-Président en charge du secteur Santé, Cap Gemini Consulting (en photo)&Acyl Benslimane,Expert de Cap Gemini Consulting

rubrique DH : infOrmatique

36 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

371er trimestre 2013 / DH magazine 145

La recherche d’une efficience opérationnelle est de plus en plus présente, et le contexte règlementaire de plus en plus fort. Il est impératif pour l’établissement de santé de garantir la confidentialité, l’intégrité et la disponibilité de l’information médicale dont il est responsable. Le ton est donné : le coupable lors d’une utilisation frauduleuse des données sera celui qui n’a pas protégé l’accès à celles-ci, donc l’établissement.

Pour répondre à ces exigences, celui-ci devra obligatoirement maîtriser les acteurs et leurs actions au sein de son système d’informations. Il devra s’assurer que les personnes agissant sous sa responsabilité accèdent uniquement aux données auxquelles elles sont habilitées et n’en fassent pas mauvais usage. Ces personnes devront pouvoir produire, consulter, mettre à jour et partager de l’information en toute sécurité et ceci en garantissant la capacité de traçabilité de toutes ces actions. Ces exigences de sécurité se renforcent encore avec le partage de l’information au-delà des murs de l’établissement et se précisent avec des projets comme le DMP, le rASS ou encore la MSS.

Ces projets d’établissement sont de vrais chantiers organisationnels, et ne peuvent pas être menés avec une approche uniquement technique. L’établissement devra d’abord mettre à plat le découpage fonctionnel de son organisation. Il faudra définir les différents profils agissant dans la structure et les critères de regroupement, pour y associer les habilitations à transmettre aux applications du SIH.

La sécurité est avant tout perçue comme la somme de

contraintes techniques et fonctionnelles. Pourtant,

les projets d’IAM (Identity and access management)

sont également sources de confort et d’optimisation

pour tous les acteurs. Avec l’automatisation des

tâches, les administrateurs et les intervenants du

support seront beaucoup moins sollicités pour la

création des identités dans chaque application du

SIH, pour la réinitialisation des mots de passe et ils

éviteront la saisie et re-saisie des informations dans

les différents systèmes. De plus, ils auront enfin

une vision des entrées et sorties des usagers du SI.

Les utilisateurs, quant à eux, gagneront en réactivité

sur l’ouverture de leurs accès aux applications lors

de leur arrivée dans l’établissement ou dans un

service. Fini, les comptes génériques et l’utilisation

du compte d’un ancien collègue déjà à la retraite

depuis deux ans. Une seule authentification pour

ouvrir leur session, avec une carte CPS ou avec une

carte d’établissement, et les utilisateurs pourront

se connecter automatiquement à leurs applications

sans avoir besoin de s’authentifier à nouveau au

lancement des applications métiers. Plus besoin,

non plus, de se souvenir de tous ces mots de

passe avec des complexités grandissantes et à

changement obligatoire tous les 3 mois.

Pour mener à bien cette démarche de sécurisation,

il faudra bien entendu prendre en compte la réalité

opérationnelle. Il faudra rechercher la solution

technique la plus adaptée face à des besoins qui

évoluent, notamment en terme de mobilité, mais

attention à ne pas céder à l’engouement sur des

nouvelles technologies non adaptées aux cas

d’usages réels rencontrés sur le terrain. n

Questions à sébastien Wetter, ingénieur produit Gamme sécurité pour EnovacomParoles d’expert

coMMEnt MaîtrisEr l’accès à l’inforMation MédicalE ?la GEstion dEs idEntités Et dEs accès, lEs ProjEts incontournablEs Pour la sécurisation d’un siH.

Ces dernières années, ont été particulièrement

marquées par l’informatisation croissante et la

dématérialisation des données médicales. Comme

toujours cette informatisation met en évidence

les différents risques et menaces, qui attiraient

beaucoup moins l’attention dans les usages papier.

Sébastien Wetter – Ingénieur produit Gamme Sécurité pour Enovacom

38 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

ACP Anatomie et Cytologie Pathologiques Une spécialité médicale en mutation

ru

br

iqu

e D

H :

aC

P

un rapport de la direction générale de l’offre de soins, consultable sur le site du Ministère des affaires sociales et de la santé, souligne l’importance d’une spécialité médicale diagnostique au cœur des décisions thérapeutiques : l’anatomie et cytologie Pathologiques (acP).http://www.sante.gouv.fr/iMG/pdf/rapport_anatomie_cytologie_pathologiques.pdf

38 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

391er trimestre 2013 / DH magazine 145

« Sepulchretum : sive anatomia practicaex cadaveribus morbo denalis »

Historique d’une discipline ancienne mais méconnue

le premier traité d’anatomopathologie, publié en 1679 et réalisé par théophile bonet, marque la naissance de l’anatomo-cyto-pathologie (acP). Pour le dr anne-catherine baglin, chef du service d’anatomopathologie de l’hôpital foch (suresnes), « cette spécialité fut véritablement fondée en 1761 lorsque l’italien Giovanni battista Morgagni publia un ouvrage montrant les causes de la mort en rapport avec les lésions des organes retrouvées lors d’une nécropsie.* »

« Marie françois Xavier bichat, premier pathologiste français, précise le dr frédéric staroz, a inventé la méthode anatomique. ainsi, grâce à l’autopsie, on étudiait les dégâts causés par la maladie et leurs conséquences sur les tissus ou les organes. bichat affina cette technique et commença à créer une classification rationnelle des maladies à partir des anomalies créées dans le corps. bien entendu, on ne trouvait pas la cause des maladies mais seulement leurs conséquences « visibles » ! les techniques s’améliorant, en particulier grâce à l’apport du microscope, aux anomalies macroscopiques – visibles à l’œil nu – se sont ajoutées les anomalies visibles au microscope. la classification des maladies s’est alors affinée. au début, il s’agissait de simples constatations post-mortem, dont l’intérêt thérapeutique était faible. Ensuite, les pathologistes sont parvenus à faire des diagnostics du vivant du patient. aujourd’hui, à partir de ces classifications qui évoluent sans cesse, nous établissons un diagnostic précis permettant d’ajuster les traitements. »demain, l’acP intégrera les données moléculaires et les mutations génétiques des tumeurs permettant au pathologiste de réaliser une synthèse diagnostique globale, de la macroscopie à la mutation génétique.

* le diagnostic au microscope

Michel GuiuPrésident du Syndicat des Médecins Pathologistes Français (SMPF),

Frédéric StarozVice-Président du SMPF, Médecin Pathologiste à Quimper, Ancien Interne et

Assistant Hospitalo-Universitaire - APHP,

Jérôme ChetrittVice-Président du SMPF - Médecin Pathologiste,

et avec la participation de

Norbert PadillaMédecin Pathologiste libéral

DoSSIeR RÉALISÉ PAR LeS DoCTeURS

théophile bonet, 1620-1689

Marie françois Xavier bichat 1771-1802

391er trimestre 2013 / DH magazine 145

40 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : aCP

L’Anatomie et Cytologie Pathologiques (ACP), familière-

ment appelée « anapath », est une spécialité méconnue

du grand public mais indispensable dans la chaîne de

soins. Le médecin pathologiste porte un diagnostic de

maladie (notamment cancéreuse) et détermine des élé-

ments pronostiques et prédictifs permettant le traitement

le plus adapté, voire la thérapie ciblée la plus personnali-

sée. Son diagnostic s’appuie sur l’étude au microscope

des modifications tissulaires, cellulaires et moléculaires

des différents tissus humains. Dans le domaine de la can-

cérologie, le pathologiste est, de fait, le véritable prescrip-

teur du traitement, qu’il soit chirurgical ou médical.

en pratique courante, le médecin pathologiste fait de

« l’imagerie cellulaire » en examinant au microscope un

« objet ». Celui-ci correspond à une coupe ultrafine

(4 µm), réalisée à partir de tissus et de cellules, mise entre

lame de verre et lamelle. L’interprétation de ces images

par le médecin pathologiste est similaire à celle du radio-

logue devant une radio ou un scanner, ou d’un dermato-

logue devant des anomalies cutanées. elle contient une

part de subjectivité et peut être difficile en cas de caracté-

ristiques inhabituelles d’une maladie.

unE sPécialité méconnue mais irremplaçable

Compte tenu de l’importance de ce rôle, soulignée dans

les deux plans cancers successifs et, plus récemment,

dans le rapport DgOS, le manque de visibilité de cette

spécialité peut paraître paradoxal étant donné son im-

pact médico-économique majeur.

Cette méconnaissance est présente à tous les niveaux.

Le grand public en ignore le plus souvent l’existence.

L’ACP est vraisemblablement l’une des spécialités

médicales dont le mode de fonctionnement est le plus

étranger aux médecins n’ayant pas suivi cette filière.

Les services administratifs des établissements de santé

peinent à la distinguer de la biologie étant donné son

faible coût. Les tutelles politiques et administratives

s’en sont depuis toujours désintéressées car cette spé-

cialité « vertueuse » ne pose pas de problèmes d’accès

aux soins ni de dépassement d’honoraires. elle n’appa-

raît sur aucun « radar ».

Cette situation découle de plusieurs éléments. Vis-à-

vis du grand public, l’absence de contact direct entre le

pathologiste et le patient est l’élément-clé. C’est le spé-

cialiste d’organe ou le chirurgien qui informe le patient

du diagnostic porté par le pathologiste. Malgré l’accès à

l’information médicale que permet internet, le « diagnos-

tic » médical, dans toute sa finesse, reste incompris.

Concernant les médecins, la France, contrairement à

d’autre pays, n’impose pas aux étudiants en médecine

de stage en ACP. Si tout médecin sait, au moins par-

tiellement, interpréter un examen radiologique ou porter

un diagnostic à partir de résultats de biologie, il est, par

contre, incapable de porter un diagnostic à partir d’une

image ACP. Seul le compte rendu ACP, donnant en

toutes lettres le nom et les caractéristiques de la mala-

die, est interprétable par le clinicien.

Pour les services administratifs, la confusion avec la bio-

logie est compréhensible. Comme le grand public, ils ne

rencontrent pas les pathologistes et n’appréhendent pas

le service médical rendu dans le cadre du « diagnostic

médical » et de son impact économique. De plus, les

personnels techniques en ACP et en biologie étant issus

des mêmes formations, il leur paraît naturel de regrou-

per ces disciplines sous le terme générique de « labos ».

Cette situation explique la prédominance des pôles de

biologie-pathologie, alors que des pôles « diagnostic mé-

dical » regroupant radiologie, médecine nucléaire et ACP

auraient une plus grande cohérence médicale. Lors des

réunions précédant la publication du rapport DgOS sur

Le diagnostic aCp

Compte tenu de l’importance de ce rôle (…), le manque de visibilité de cette spécialité peut paraître paradoxal étant donné son impact médico-économique majeur.

411er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : aCP

l’ACP, il avait été préconisé de favoriser la création de

SrOS médico-techniques, diagnostiques et théranos-

tiques, regroupant radiologie, ACP et biologie.

Pour les autorités de tutelle, en plus des autres raisons

citées, l’ACP est une spécialité « microscopique »,

comptant tout au plus 1 450 médecins, avec un budget

qui, tant en libéral qu’à l’hôpital, relève plus de la variable

d’ajustement que de l’enjeu financier.

unE rEstructuration indispensableNéanmoins, les médecins ACP, réunis au sein de leur

Collège National Professionnel (CNPath), ont su se faire

entendre sur la nécessité d’améliorer l’organisation de

la profession. Sous l’égide de la DgOS, des groupes de

travail représentant toutes les composantes de la pro-

fession, des autorités sanitaires et de tutelle ont été mis

en place pour aboutir, en 14 mois, à la publication du

rapport de la DgOS en avril 2012.

Ce rapport confirme la place centrale de l’ACP dans le

parcours de soins, particulièrement en cancérologie

mais également dans d’autres domaines. Il préconise un

cadre juridique unique, stable et lisible, individualisant

sans ambiguïté l’ACP de la biologie. Il insiste sur l’impor-

tance de la mise en place d’une démarche de qualité,

dont le surcoût est, à l’échelle de la société, largement

compensé par l’efficience ainsi obtenue dans la pres-

cription des thérapies en cancérologie, particulièrement

onéreuses. Il considère comme nécessaire la restruc-

turation de la spécialité. Ce point est essentiel ; il doit

être abordé en cohérence avec les contraintes démogra-

phiques et financières actuelles.

Selon le rapport DgOS, il existe un déséquilibre entre

les secteurs public et privé. « le secteur privé effec-

tue 2/3 des actes d’anatomie pathologique, biopsies et

pièces opératoires, et 90 % des fcu [Frottis cervico-uté-

rin]. (…) avec les fcu, le secteur hospitalier représente

26,3 % et le secteur libéral 73,7 %. Hors fcu, le sec-

teur hospitalier représente 31,7 % et le secteur libéral

68,3 % ». globalement, 54 % des pathologistes exer-

cent en secteur public et 46 % en secteur privé.

L’ACP Française compte trop de structures (environ

450) dont la taille et/ou l’activité par médecin sont in-

suffisantes. Ces deux critères – taille et activité – sont

déterminants pour favoriser l’émergence d’une ACP effi-

ciente, tant médicalement qu’économiquement.

Le « critère du NOMBre de médecins » est un fac-

teur souvent limitant en secteur libéral. en effet, un

grand nombre de structures est en dessous du seuil de

4 médecins préconisé par la DgOS. Ce nombre semble

nécessaire pour qu’une structure puisse être médicale-

ment capable de prendre en charge tous les types de

prélèvements et couvrir l’ensemble de la pathologie.

Néanmoins, cette petite taille des structures libérales

est surtout vraie dans les très grandes villes (Paris, Lyon,

toulouse…) et beaucoup moins ailleurs. La situation est

plutôt inverse en secteur hospitalier. Les structures réu-

nissant un grand nombre de pathologistes dominent

dans les métropoles, alors que beaucoup de service

d’ACP de CHg comptent moins de 4 ACP.

Le « critère ACtIVItÉ » est tout aussi important dans

la recherche de la meilleure efficacité économique et

médicale. Il touche essentiellement le secteur public.

Ce critère est à rapprocher des seuils d’activité qui sont

imposés en chirurgie. La DgOS fixe un seuil, hors frottis

cervico-utérin, de 4 000 examens/an/médecin etP. Ce

seuil paraît minimal. Il est conforme aux préconisations

du royal College of Pathology anglais sur une activité

« générale ». Les structures d’ACP allemandes sont

bien au-delà de ces chiffres (environ 8 000 examens/an/

médecin à l’hôpital et plus en secteur libéral).

Le rapport DGOS confirme la place centrale de l’ACP dans le parcours de soins, particulièrement en can-cérologie mais également dans d’autres domaines.

42 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

431er trimestre 2013 / DH magazine 145

en France, le secteur libéral est au-dessus du seuil

d’activité préconisé, avec environ 7 000 examens/an/

médecin (15 000 avec les FCU). en secteur hospitalier,

les CHU sont les établissements publics de soins dont

l’activité en ACP par médecin se rapproche le plus des

seuils de la DgOS. Viennent ensuite les CHg, puis les

CrLCC et les espic.

Les chiffres réels d’activité restent cependant difficiles

à connaître en secteur hospitalier. Là où le seul mar-

queur en libéral est la nomenclature (NgAP puis CCAM

à partir de 2010), le secteur hospitalier associe cotation

à la nomenclature et cotation « hors nomenclature ».

Ces cotations sont, dans les statistiques SAe reprises

dans le rapport DgOS, souvent confondues. La confu-

sion est encore accentuée par le fait que la très grande

majorité des « P hors nomenclature » comptabilisés ne

correspondent pas à des actes innovants et ne sont que

des descripteurs techniques d’une activité de routine.

Le recueil unique des actes en CCAM (actuellement V1

et courant 2013) devrait permettre une évaluation plus

simple de l’activité hospitalière.

QuEls EnsEiGnEMEnts faut-il tirer de ce rapport ?

en premier lieu, il est essentiel de considérer l’ACP

comme ayant une place particulière et « incontournable »

dans le parcours de soins. Si des synergies sont pos-

sibles avec d’autres services (radiologie, biologie…), il

serait contreproductif de vouloir « dissoudre » l’ACP

dans plus gros que lui. Le service médical rendu ne

pourra qu’en être affecté et cette décision irait à l’en-

contre de l’intérêt du patient et de la recherche d’une

plus grande efficience médico-économique.

en deuxième lieu, des restructurations, tant en sec-

teur libéral que public, s’avèrent nécessaires pour que

les structures d’ACP répondent aux critères DgOS et

justifient la création de plateaux techniques complets.

Dans les grandes métropoles, il est vraisemblable que

des synergies entre différents types d’établissements

publics ou privés puissent se créer.

Dans des centres urbains de moindre importance, des

coopérations public-privé seront probablement néces-

saires autour d’un seul plateau technique pour un (voire

plusieurs) territoire de santé donné. Ce plateau technique

(public ou libéral, en fonction de critères d’efficience et

d’économies de santé) prendrait en charge les examens

des établissements publics comme privés. Il atteindrait

ainsi la taille critique nécessaire, tant en nombre de pa-

thologistes qu’en activité ACP pour assurer un « service

ACP » de qualité au meilleur coût.

L’ACP a tous les atouts en main pour définir, de façon

innovante, les contours d’une médecine personnali-

sée, à la condition que les autorités de tutelle prennent

conscience de son importance, et ce pour un rapport

coût-bénéfice certainement unique en médecine. n

rubrique DH : aCP

Si des synergies sont possibles avec d’autres services (radiologie, biologie…), il serait contreproductif de vouloir « dissoudre » l’ACP dans plus gros que lui.

* L’activité libérale correspond à l’activité sous-traitée par les hôpitaux au secteur privé

44 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

451er trimestre 2013 / DH magazine 145

unE journéE acP La matinée commence par des examens extemporanés.

Cet acte est réalisé en cours d’intervention sur un pré-

lèvement tumoral enlevé par le chirurgien. Il permet de

répondre immédiatement aux questions qui se posent :

« est-ce bénin ou malin ? les sections chirurgicales sont-

elles saines ? les ganglions sont-ils métastatiques ? »

Pour cela, le pathologiste dispose, à proximité du bloc

opératoire, d’un local où il examine immédiatement

l’échantillon tumoral avec son propre matériel.

De retour au cabinet, il réalise les tâches administratives :

signature des comptes rendus d’examens, lecture du

courrier... Puis, avec l’aide d’une technicienne, la mati-

née se poursuit par une séance d’étude macroscopique

des pièces opératoires. enfin, l’après-midi est consacré

à l’interprétation au microscope des prépa-

rations qui ont été « techniquées ». « c’est

toute notre partie diagnostique qui sera en-

suite émaillée de techniques complexes :

colorations, techniques immunohistochi-

mie… », précise le Docteur Padilla. À la

différence de la biologie, le diagnostic ACP

ne peut être automatisable. Il ajoute égale-

ment que, malgré des journées bien rem-

plies, « il est indispensable de s’octroyer

régulièrement du temps pour se tenir au

courant des innovations ou lire les articles

récents », sans oublier les réunions de

Concertation Pluridisciplinaire (rCP) aux-

quelles il assiste 1 à 2 fois par semaine.

avantaGEs et inconvénients « si j’ai du travail, c’est parce qu’il y a une demande et

s’il y a une demande, c’est parce que je réponds plei-

nement à cette demande ! » Son activité dépend de sa

réactivité et de la qualité du travail fourni. « Mais au-

jourd’hui, poursuit-il, le souci en libéral vient du fait que

nous ne sommes pas à égalité de moyens techniques et

financiers avec l’hôpital. ensuite, nous supportons nous-

mêmes une importante prise de risque par rapport au

pathologiste hospitalier – achat de matériel, investisse-

ment, gestion de personnel, responsabilité juridique…

enfin, il y a un certain nombre d’actes non cotés que je

ne peux réaliser, tandis que, pour les autres actes, je

dois me contenter d’une dotation figée depuis 30 ans.

sans effectuer de vaines revendications, le coût d’une

structure acP ne cesse d’augmenter : personnel, maté-

riel, consommables, timbres, sécurité sanitaire et, de-

main accréditation des structures… un certain nombre

d’ajustements simples pourraient être réalisés : pouvoir

répercuter les hausses de coût des consommables,

pouvoir bénéficier et utiliser les nouvelles technologies

pour être plus pertinents ou encore avoir la possibi-

lité d’accueillir des internes dans nos cabinets… » n

rubrique DH : aCP

au cœur d’un cabinet d’anatomie et Cytologie pathologiquesPathologiste libéral, le docteur norbert Padilla a accepté de nous ouvrir les portes de son cabinet. installé au Mans (72), avec 18 employés (secrétaires et techniciens), il réalise plus de 1 900 actes d’anapath par mois et environ 3 000 actes de cytopathologie. « Le pathologiste, c’est le généraliste de l’intérieur », dit-il. Passionné de physiologie et d’histologie, il revient sur sa spécialité et sur les difficultés qu’un pathologiste libéral rencontre.

Dr Norbert Padilla, pathologiste libéral

46 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

471er trimestre 2013 / DH magazine 145

tristant debove, qu’est-ce qui justifie cette récompense et cet éloge de la plate-forme HealthShare ? HealthShare met en œuvre l’ensemble du sa-voir faire d’InterSystems en termes de technolo-gie informatique et d’er-gonomie dans le cadre de projets réels, ambi-tieux et variés, et ayant

donné des résultats concrets dans plusieurs pays et régions en europe. HealthShare a été récompensée pour sa capacité à répondre à des besoins métiers en intégrant et en connectant entre elles différentes applications du domaine de la santé pour l’échange de données médicales. en effet, la plate-forme HealthShare est une plate-forme stratégique pour l’échange d’infor-mation médicale entre différents acteurs d’un ter-ritoire de santé : hôpitaux, laboratoires, cabinets médicaux, cliniques, etc. HealthShare permet ainsi de réaliser un dossier patient électronique communautaire. Un des avantages de notre plate-forme est qu’elle permet aux différents prestataires de santé de l’adopter tout en conservant leur propre système d’information. Il était en effet essentiel qu’un médecin ne se voit pas refuser l’accès aux informations médicales de son patient parce qu’il ne disposerait pas de la même application que la clinique d’origine ! Ainsi, HealthShare permet de connecter entre eux différents systèmes d’information de Santé qui peuvent être par exemple la solution trakCare™ proposée par InterSystems ou bien une autre solution proposée par la concurrence.

La plate-forme HealthShare est-elle compatible avec le dMP ? tout à fait. Nous prenons garde à respecter les exigences des pouvoirs publics qui sont des donneurs d’ordre en la matière. La technologie HealthShare est donc bien compatible avec le DMP car elle est basée sur InterSystems ensemble, homologué en 2012. HealthShare peut être complémentaire au DMP en ce sens que l’on peut travailler sur le patient lui-même et son parcours de soin. À titre d’exemple, avec HealthShare, le médecin peut avoir accès en ligne aux plages horaires disponibles pour faire passer un examen à son patient chez tel ou tel prestataire de santé connecté. Une telle technologie nécessite une plateforme informatique puissante ainsi qu’un

accompagnement en mode projet des entités qui vont mettre en œuvre cette application. Avec cette technologie, InterSystems réalise le dossier patient des Pays-Bas, de la Suède, du Danemark et de l’ecosse et ce pour l’ensemble des acteurs que sont la médecine de ville, les hôpitaux, les cliniques privées. Chaque pays ou chaque région a une approche différente du parcours patient, et HealthShare permet de s’adapter à toute forme d’architecture.

en quoi la plate-forme HealthShare peut-elle intéresser les hôpitaux français ?en France, nous avons travaillé dans le cadre ce qui est proposé par le gouvernement au niveau du DMP. Sur cette base, nous avons élaboré pour les hôpitaux français « la Box » qui s’appuie sur des composants standard de connectivité de HealtShare. elle consti-tue une solution simplifiée et packagée par rapport à HealthShare, en répondant de façon plus adaptée aux besoins des hôpitaux. Ainsi, tout établissement hospitalier peut mettre en œuvre une DMP Box en quelques jours. La Box, incluant le package logiciel et la mise en œuvre forfaitaire, est un produit clef en main qui per-met de concentrer ensemble les applications de l’établissement qui doivent envoyer des informations au DMP. elle offre une traçabilité de ces informations. en outre, par le biais de nos solutions de mainte-nance, la Box évolue au fil du temps en s’adaptant à la réglementation.

La plate-forme offre t’elle des garanties suffisantes au niveau de la confidentialité ? Nous disposons de la technologie pour mettre en œuvre les politiques de confidentialité demandées par chaque donneur d’ordre. Ainsi, les flux et les données peuvent être cryptés. Nous nous appuyons sur une identification de l’utilisateur et faisons en sorte que chaque catégorie d’utilisateurs n’ait accès qu’aux informations qui la concernent. n

Questions à tristan debove, country sales Manager – core technologies chez intersystemsParoles d’expert

troPHéE frost & sullivan EntrEPrisE EuroPéEnnE 2012 Pour intErsystEMs corPoration

intersystems Corporation, éditeur mondial de logiciels dans le domaine de la santé, a reçu le trophée Frost & sullivan entreprise européenne de l’année 2012 dans la catégorie Technologies des systèmes d’informations de santé connectés. Les analystes de Frost & sullivan ont notamment fait l’éloge de la plate-forme Healthshare.

Phot

o ©

Fre

d M

arig

aux

- Int

ersy

stem

s

Entretien réalisé par Guillaume Lefoulon, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

48 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

491er trimestre 2013 / DH magazine 145

Monsieur Sénéchal, pouvez-

vous nous présenter les

projets et réalisations de SQLi

en Martinique ?

JeaN-Marie SÉNÉCHaL −

Avec le gCS Système d’in-

formation de Santé Mar-

tinique, nous avons

déployé une plate-

forme régionale de

services composée

de la suite IdéoSanté

répondant aux exi-

gences de prise en charge

des patients et à la production de soins dans l’en-

semble des établissements : la « Plateforme régio-

nale de Martinique » (www.sante-martinique.fr).

Nous étions le maitre d’œuvre et le gCS le maitre

d’ouvrage.

Cette plate-forme est composée de plusieurs

applications dans les domaines suivants : gestion des

rCP, gestion des AVC, télémédecine, messagerie

sécurisée, annuaire, production de soins… homologuée

DMP compatible par l’ASIP, l’organisme qui s’occupe de

la mise en place du DMP au niveau national. Nous avons

accompagné le gCS en mettant en place une équipe

dédiée dans notre agence Martinique afin d’apporter

des réponses rapides et efficaces tout au long du projet.

existe-t-il des spécificités propres à la Martinique

sur ce type de projet ?

J.M.S. − Pas spécialement. Nous avons simplement

été amené à créer une salle blanche avec le gCS, c’est-

à-dire une salle informatique spécialement dédiée à la

plate-forme et ce afin de ne pas être tributaire des accès

internet entre la métropole et la Martinique. L’important

était surtout d’avoir une plate-forme urbanisée

permettant de répondre aux exigences des processus

de prise en charge d’un patient au sein des différents

établissements.

où en êtes-vous dans le déploiement ?

J.M.S. − Nous avons créé en Martinique une agence

locale pour le déploiement du projet. La plate-forme est

opérationnelle depuis plus de deux ans. Nous sommes

en cours de déploiement de notre dossier de production

de soins IdéoMed. en trois mois, nous avons déployé

10 services, soit environ 200 lits, sur 6 établissements

différents. 350 personnes ont été formées. À moyen

terme, environ 60 services seront concernés sur

l’ensemble de la Martinique. L’objectif : être conforme

aux critères de l’HAS en termes de sécurité des

prescriptions et de prise en charge pour les patients.

Madame Pandore, pouvez-vous nous présenter la

plate-forme idéoSanté telle qu’elle est vue par les

soignants ?

bÉatriCe PaNdore − Notre solution prend en

compte le point de vue des soignants. Ses avantages

sont différents selon les corps de métiers. Pour

une infirmière par exemple, elle apporte davantage

de précisions quant à la prescription du médecin

concernant la posologie exacte, la durée etc... Le

médecin peut aussi mettre un commentaire particulier.

L’avantage pour les médecins repose sur la prescription

polymodale. Le logiciel permet de prescrire sur

un même écran des soins, des médicaments, des

examens de laboratoire. D’où une ergonomie qui offre

un gain de temps et davantage de flexibilité pour les

utilisateurs ou encore la possibilité de mettre en place

des protocoles qui seront ensuite réutilisés. La plate-

forme aide en outre à une meilleure traçabilité des

données patients. elle incite à une harmonisation des

pratiques de soins et à la sécurité de la prise en charge.

Pouvez-vous nous en dire plus concernant les

formations et les délais d’informatisation des

services ?

b.P. − Les formations durent entre 4 et 6 heures

par profil utilisateur. Au début, tout le monde a une

appréhension puis elle est rapidement dépassée.

Les délais pour informatiser un service et déployer

sur un établissement sont variables : d’une à deux

semaines. Nous nous adaptons aux spécificités métier

de chacun. n

Questions à jean-Marie sénéchal et béatrice Pandore, respectivement responsable projet et cadre de santé chez sQli.Paroles d’expert

belle réussite pour l’installation d’une plate-forme idéosanté à la martinique

Cette plate-forme est composée de plusieurs applications dans les domaines suivants : gestion des RCP, gestion des AvC, télémédecine, messagerie sécurisée, annuaire, production de soins…

Entretien réalisé par Guillaume Lefoulon, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

du décisionnel

du pilotage

pour les établissements de santé

Maya business solutions propose différents modules métiers développés avec Qlikview. Pré-packagés mais gardant toute la souplesse et l’agilité apportée par les technologies de dernière génération : associativité et analyse en mémoire.

Maya business solutions183-184 Quai de brazza33100 bordEauXsite : www.maya-bsi.com contact : [email protected]

fidEslookAnalyse des flux de facturation

PMsilookanalyse des données PMsi : Mco, ssr,

Had, Psy et Had

rHlookanalyse des données issues des

systèmes de gestion des ressources humaines

rtHlookanalyse des données issues des

systèmes de gestion du plateau de radiothérapie

le spécialiste

et

Le Mipih s’allie à MaYapour développer son offre de pilotage

Les réformes du monde hospitalier (nouvelle gouvernance, t2A, HPSt, FIDeS) imposent aux établissements une

exigence d’efficience dans leur gestion. Ils doivent se doter d’outils permettant de contrôler, maîtriser et piloter le

recueil de l’activité, la facturation mais aussi les dépenses tant consommables que ressources humaines. Conscient

de ses enjeux, le MiPih propose une offre de pilotage opérationnel et décisionnel, déjà en production sur une vingtaine

d’établissements : CgA et Ql.

Dans le cadre de son évolution et de sa stratégie de développement de ces outils, le MiPih entame aujourd’hui un

partenariat avec la société MAYA Business Solutions.

MAYA est une SSII spécialisée dans le pilotage de projets décisionnels pour les établissements de santé. Son statut

de partenaire eLIte de Qliktech France, éditeur de l’outil décisionnel QlikView, certifie son expertise technique à

intégrer cette solution d’analyse de données. Le MiPih fera appel à la société Bordelaise pour intervenir notamment

sur le CgA, outil d’analyse développé avec la technologie QlikView sur laquelle MAYA Business Solutions possède

une très forte expertise.

lE cGa,outil de pilotage opérationnel

entrepôt de données contribuant à la facturation, l’objectif du CgA est de collecter les éléments factuels et de les

corréler aux règles de gestion PMSI et de facturation. Il s’appuie sur QlikView, outil de production d’indicateurs et

d’analyse de leurs données source. Le CgA propose une analyse des indicateurs au travers de graphes et tableaux

croisés dynamiques permettant une approche selon différents axes (Structure, gestionnaires, débiteurs, comptes,…).

Il donne une vision partagée aux différents acteurs de l’hôpital : DIM, pharmacien, responsable de pôle, DAF, bureau

des entrées...

contactJuliette BOUgeAULt

Chargée de communication MiPih

tél. : 05 67 69 73 01 - [email protected]

MiPiH

Éditeur de progiciel leader dans le domaine des

Systèmes d’Information Hospitaliers, le MiPih est

également fortement présent sur les activités de

service et d’infogérance.

Le MiPih se compose de trois agences, à toulouse

(siège social), Amiens et reims et compte plus de

400 agents. en adhérant au groupement d’intérêt public

MiPih, plus de 400 établissements de santé (CHU, CH,

ePSM…) répartis sur l’ensemble du territoire ont choisi

de participer activement à la définition de leur Système

d’Information Hospitalier.

Premier producteur de paie hospitalière, le MiPih

traitre plus de 3 millions de bulletins par an, pour

260 établissements de santé.

www.mipih.fr

Maya grâce à son expertise des progiciels présents dans les

établissements de santé et sa compréhension

des enjeux liés à l’activité médicale, MAYA a su se

positionner en tant qu’acteur expert pour déployer

la solution QlikView. Cette expertise fait de MAYA le

partenaire privilégié des professionnels de la santé.

MAYA Business Solutions a de plus développé une suite

de modules spécifiques :

• Module d’analyse des données de RH sur l’ensemble

des systèmes

• Analyse des données de radiothérapie : données

issues d’ArIA.

• Module de contrôle des flux FIDES

• Module d’analyse des données PMSI MCO, SSR, PSY

www.maya-sante.fr

52 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

545862646668 70737577

Centre HospitalierUniversitaire

entre le bien et le bien Yan Bubien, directeur général

Forum ! avec le Pr Jean-Louis de Brux et le dr Anne Pasco-Papon

BB modèle avec le Pr sophie n’Guyen

Châteaux de sable avec le Pr Annick Barthelaix et le Pr Jean émile

Simuler sans tricher avec le Pr Jean-Claude Granry

Mauvaise nouvelle avec le dr José Hureaux et Claude Reliat

Sécurité attitude avec le dr Marie-Christine Moll

La recherche est une remise en cause ! avec david Abadia-Ugarte

Relier les chaînons avec Gérald Gasquet

La fin des fossiles avec edmond vapaille

Phot

o ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

531er trimestre 2013 / DH magazine 145

CHU d'angerssolidité et équilibre Une excellence revendiquée tant pour les missions d'expertise que de proximité du CHU et qui conforte sa place co-leader dans le paysage sanitaire régional et son attractivité auprès des professionnels de santé…

54 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Après un passage aux Hospices Civils de Lyon, Yann Bubien

intègre la FHF en 2000, où il rejoint le nouveau délégué général

gérard Vincent, qui venait de quitter la Direction des Hôpitaux.

Créative, conquérante, sans a priori, la nouvelle équipe qui ve-

nait de se constituer allait « battre campagne » dans un tour de

France des hôpitaux avec gérard Larcher puis Claude Évin...

C'est probablement de cette période que vient à Yann Bubien

son appétence pour un management de terrain, où proximité

rime avec réactivité.

Il la mettra à profit au CH Sud-Francilien (Évry-Corbeil), dont il

deviendra secrétaire général ; période pour Yann Bubien tout

aussi enthousiasmante que la précédente, quoique plus diffi-

cile. L’établissement était considéré, à l’époque, comme l'un

des plus « ardus » de France. S'il y a apprécié les relations

au quotidien avec le corps médical et les salariés, il reconnaît

que « l'administration de l'établissement y était délicate ». Les

directeurs s'y forgeaient ainsi une expertise incontestable, à

telle enseigne que beaucoup étaient très vite « repérés » et

appelés vers d'autres postes...

dE Paris à Paris Au cours de sa « période » FHF, Yann Bubien avait été amené

à collaborer brièvement avec le Dr Antoine Perrin ; c'est ce

dernier qui lui ouvre le chemin du ministère de la Santé, en

2007, en tant que conseiller technique puis conseiller social

au Cabinet de roselyne Bachelot-Narquin, alors ministre de la

Santé, de la Jeunesse et des Sports. « l’exercice en minis-

tère est une opportunité qu’aucun directeur d’hôpital ne devrait

manquer », dit Yann Bubien. C’est l’occasion d’évoluer au-delà

du seul cercle hospitalier, de se confronter à d'autres modes

de fonctionnement et de rencontrer d’autres corps de la haute

fonction publique : énarques, Mines, Polytechnique... ou en-

core de grandes directions ministérielles : finance, armée...

et, bien sûr, du monde politique… Le travail en direct avec un

ministre est véritablement une expérience stimulante. « Je ne

Entre le bien

et le bien

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

La direction générale ne s'exerce pas en solo

yann bubien,directeur général du cHu d'angers

Phot

o ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

551er trimestre 2013 / DH magazine 145

connaissais pas du tout Roselyne Bachelot. J'ai décou-

vert une femme brillante et cultivée, auprès de laquelle

on apprend à prendre rapidement des décisions ». Au

ministère, dit Yann Bubien, « tout est politique et proces-

sus de communication, des décisions nouvelles sont à

prendre tous les jours, sans délais. et il faut décider non

entre le bien et le mal, ce qui serait facile, mais entre le

bien et le bien... »

en 2009, sa carrière au ministère connaît un intermède

diplomatique ; il est nommé conseiller en charge des

affaires sociales auprès de l’Ambassadeur de France au

royaume-Uni, Maurice gourdault-Montagne. Là encore,

il s’agit d’une séquence atypique, au cours de laquelle il

s’initie au langage diplomatique. C'est d'ailleurs quand

on lui indique les coordonnées de son futur médecin

généraliste, imposé par le NHS, que Yann Bubien me-

sure concrètement la différence entre le système de

santé britannique et le nôtre. Cela lui permettra, à tout

le moins, de « relativiser les critiques faites au système

français... » Mais la « campagne » anglaise est brève...

retour à Paris, où roselyne Bachelot lui propose de re-

venir pour prendre, cette fois, le poste de directeur de

cabinet adjoint, qu'il occupera jusqu'en novembre 2010

au changement de gouvernement.

Xavier Bertrand renouvelle alors entièrement l’équipe du

cabinet, mais propose à Yann Bubien de rester à ses cô-

tés. Ce que ce dernier fera jusqu’en octobre 2011, date à

laquelle il prendra ses fonctions de directeur général au

CHU d’Angers. Avec Xavier Bertrand, il fait l’expérience

d’un nouveau mode de fonctionnement mais retrouve le

même degré d’exigence : « il faut être disponible 24 h sur

24, on ne débranche pas le portable et on ne fait pas les

choses à moitié. » en quelque sorte, un miroir de la culture

hospitalière et de l'hôpital, desquels il reste très proche.

trio GaGnant À Angers, il prend la direction « d’un très bel outil, un

établissement de premier plan à taille humaine qui sait

capitaliser sur ses succès. » Il se trouve alors aux com-

mandes d'un établissement à l’équilibre financier depuis

7 ans. Après un an, son premier bilan dégage un solde

excédentaire de 800 000 € et une diminution de l’endet-

tement de plus 11 millions, avec une capacité d'autofi-

nancement de l’ordre de 33,6 M€ par an. Des résultats

validés par la démarche de certification des comptes

dans laquelle est engagé l’établissement.

Des résultats qui s’expliquent, en partie, par la qualité de

la gouvernance et des relations au sein du « trio gagnant » :

directeur général, doyen, président de la CMe, ainsi

qu’une collaboration étroite avec le président du conseil

de surveillance, essentielle

pour « porter » la politique

externe de l'établissement.

Le bon fonctionnement des

institutions à l’hôpital « re-

pose sur la confiance, avec

un impératif absolu : il faut que ça marche », appuie Yann

Bubien... et, à Angers, ça marche, avec une dynamique

de projets réactivée en permanence.

Le nouveau Projet d’Établissement en cours d'élabora-

tion en sera le témoignage. Couvrant la période 2013-

2017, il engagera la communauté hospitalière dans

nombre de domaines. Mais le Directeur général ne re-

doute pas les projets à long terme : « Je veux laisser le

cHu en bon état, aussi bon que celui dans lequel je l'ai

trouvé. c’est pour nous tous, les hospitaliers, une res-

ponsabilité majeure. c’est aussi le cœur d’une démarche

citoyenne. » Cette dernière trouve son incarnation avec

la mise en place d'un forum citoyen. Cette instance,

composée de citoyens et de représentants d'usagers,

portera un regard critique et constructif sur les axes du

Projet et suivra sa mise en œuvre après son adoption.

Comme aime à le rappeler Yann Bubien : « le Projet

d'Établissement 2013-2017 du cHu d'angers sera un

acte collectif ambitieux et respectueux des attentes

que tout citoyen est en droit de concevoir à l'égard d'un

centre Hospitalier universitaire. »

De fait, « un cHu ne peut construire l'avenir en autarcie,

il doit se donner les moyens d'être à l'écoute du public

et de son environnement. » Le CHU d'Angers est un

établissement bien intégré à l'environnement local avec

son implantation en ville : 40 hectares à deux pas du

centre. « notre caractéristique pavillonnaire est une op-

portunité car elle nous permet d’adapter en continu nos

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

C’est l’occasion d’évoluer au-delà du seul cercle hospitalier, de se confronter à d'autres modes de fonctionnement et de rencontrer d’autres corps de la haute fonction publique

Il faut être disponible 24 h sur 24, on ne débranche pas le portable et on ne fait pas les choses à moitié

56 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

ZA Rue de Rosengart 22192 PlérinT. 02 96 79 81 85 - F. 02 96 79 81 86

[email protected] w w . t o n n o i r . f r

Conception, réalisation, maintenancede réseaux et équipements de fluides

médicaux

TONNOIR

FluIdesmédIcaux

571er trimestre 2013 / DH magazine 145

infrastructures au regard de l’évolution des techniques

médicales, des besoins de la population et, bien sûr, des

normes de sécurité : il y a toujours deux ou trois projets

de travaux en cours. aussi, notre taux de vétusté est-il

très bas. » À titre d'exemple, 2011 aura été le témoin

de l’ouverture de l’Institut de Biologie en Santé et du

plateau technique de gynécologie-obstétrique. et 2012,

celui de l'engagement de trois grands chantiers : pro-

jet robert Debré 2015, restructuration de l’Hôtel Dieu

Nord, extension du bâtiment Larrey. « cette stratégie

immobilière nous met à l'abri des endettements scléro-

sants que peuvent entraîner les très grosses opérations

portant sur un hôpital entier ; elle nous permet d'envi-

sager notre Projet d'Établissement 2013-2017 avec une

sérénité justifiée. »

Ce Projet, qui porte les valeurs de toute une commu-

nauté, ne fait pas perdre de vue au Directeur général que

si « l’avenir d'un cHu se construit de projets institution-

nels et transversaux, la qualité quotidienne du service

aux patients s'appuie sur les projets de terrain portés

par les équipes. » Les grands projets n’empêchent pas

les petits, voire les tout petits : des petits projets prag-

matiques et réalistes portés par des médecins et des

soignants. Aussi, pour Yann Bubien, la logique institu-

tionnelle ne s’oppose pas aux logiques individuelles ;

tout au contraire, elles se complètent et s'enrichissent

mutuellement. Les petits projets font aussi « avancer la

machine ». Il faut, dit Yann Bubien : « Repérer les projets

noyés dans la masse, les accompagner et les soutenir.

l’institution doit pouvoir leur apporter des moyens hu-

mains et financiers, des locaux, de la logistique, la maî-

trise du labyrinthe administratif... le porteur du projet ne

doit pas être seul... il faut être attentif à ne pas découra-

ger ceux qui veulent se mobiliser. »

Préparé aux responsabilités importantes par ses mis-

sions précédentes, Yann Bubien l'était par ses expé-

riences sur le terrain. Ainsi, à son arrivée, il a visité

tous les services du CHU, y compris la nuit, la plupart

du temps seul pour mieux « entendre » la parole des

équipes, sans filtre, sans déformation du regard d'un

tiers. toujours présent au CHU, il est attentif à rencontrer

régulièrement médecins, cadres, internes… Sans négli-

ger les relations en tête-à-tête, il n’en rappelle pas moins

que : « la direction générale ne s'exerce pas en solo. il

n’y a pas un directeur général et un Directeur général

adjoint, mais un directeur général et un directeur général

bis. nous devons être capables de décider l’un comme

l’autre. la direction générale peut aussi être collective ! »

aMbition rEcHErcHEL’approche managériale fait écho à une vision de la gou-

vernance d’une communauté hospitalière ambitieuse,

à l'instar de la recherche clinique. Au CHU d'Angers,

celle-ci s'affiche comme un axe majeur. Ici, la recherche

est bien valorisée. Si, par la taille, le CHU est classé au

26ème rang des 32 CHU, il est au 18ème pour les publica-

tions et au 16ème si l'on ne retient que les publications

de rangs A et B ! « avec 150 enseignants-chercheurs et

son centre de recherche clinique, la recherche du cHu

est reconnue pour son efficience. en 2012, le cHu a

doté de 250 000 € un appel d’offres interne pour les

projets de recherche, dont 25 000 € pour la recherche

paramédicale. ce financement est destiné à nos jeunes

chercheurs, qui ne peuvent pas encore prétendre accé-

der aux Programmes Hospitaliers de Recherche clinique

– PHRc. J'ai d'ailleurs souhaité que 25 000 € soient

consacrés à la recherche paramédicale, dont j'estime

qu'elle est un véritable levier pour favoriser la diffusion

du savoir infirmier. »

Ce n’est donc pas par hasard que le CHU d'Angers organise

les 1ères Journées Francophones de recherche en Soins,

les 11 et 12 avril prochains (inscription sur www.jrfs.fr).

On trouvera dans ce reportage un article sur la recherche

paramédicale. Une initiative qui va dans le sens de l'his-

toire, dans le sens des attentes des soignants, qui favo-

rise le développement de la démarche scientifique dans

les pratiques de soins.

« Porter » l'excellence dans chacune des dimensions

du CHU – et la recherche y participe – est l'ambition

majeure de Yann Bubien : « une excellence revendi-

quée tant pour les missions d'expertise que de proxi-

mité du cHu et qui conforte sa place co-leader dans le

paysage sanitaire régional et son attractivité auprès des

professionnels de santé… » n

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Créé en 2004, le Cercle Esculape est une association de réflexion sur la santé. Les échanges entre les médecins et les directeurs restent trop souvent formels, « institutionnels ». Cela n’a rien d’une fatalité. Le Cercle veut faire travailler ensemble les professionnels de toutes catégories, de tous les âges, et pas seulement des professionnels du secteur santé. Le Cercle n’a pas de « parole officielle » ; c’est un espace libre, libre, entre autres, de préoccupations politiques. La seule politique d’Esculape, c’est la politique de santé. Le Cercle prépare une série de conférences et envisage la tenue d’un prochain congrès. Le mot-clé est l’échange. Cercle Esculape, siège social au 59 rue Letellier, 75015 Paris - Association loi de 1901 - [email protected], www.cercle-esculape.com - Le site est en cours de rénovation.

cErclE EsculaPE

58 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – en quelques lignes, pouvez-vous nous présenter vos activités hospitalières ? JeaN-LouiS de brux − Mon activité principale,

c’est la chirurgie cardiaque. Mon équipe réalise environ

650 interventions par an. Je suis responsable de la ges-

tion du service de Chirurgie cardiovasculaire et thora-

cique, et coordinateur adjoint du « Pôle de spécialités

médicales et chirurgicales intégrées ». J’ai aussi mes

activités d'enseignement à la faculté et, pour compléter

mon dossier, je suis co-responsable de la base nationale

de chirurgie cardiaque, base ePICArD*.

aNNe PaSCo − Je suis neuroradiologue, responsable

de l'unité de neuroradiologie vasculaire. Mon activité

principale est la neuroradiologie interventionnelle. Cette

activité consiste à traiter par voie mini-invasive, endo-

vasculaire ou percutanée, les pathologies vasculaires du

système nerveux – AVC, anévrismes ou autres malfor-

mations – ou les pathologies rachidiennes.

Ce n’est plus tout à fait de la radiologie...

a.P. − Absolument... Il s'agit d'une spécialité rela-

tivement jeune – débuts dans les années 1980-

1990 –, hybride, se situant entre la chirurgie et

l'imagerie. Son essor a suivi celui de toutes les

techniques mini-invasives, dont la sécurité et

l'efficacité ont été validées par les études scien-

tifiques. C'est une activité astreignante car il

existe très peu d'opérateurs. elle nous amène

bien évidemment à collaborer étroitement avec

les spécialités médico-chirurgicales – neurochirurgiens,

neurologues, chirurgiens OrL... – et avec les anesthé-

sistes-réanimateurs, dont nous dépendons complète-

ment car il s'agit d'une véritable activité chirurgicale,

lucrative pour une structure hospitalière universitaire.

Or, cette « reconnaissance chirurgicale » n'est pas ac-

quise dans les faits, en particulier en matière d'organisa-

tion. Cette tribune est une aubaine, et je vous en remer-

cie, pour alerter les instances hospitalières à prendre

conscience de la montée en puissance de l'activité

« chirurgicale mini-invasive », dans tous ses aspects –

humains, valorisation, PMSI... Cela n'est actuellement

pas le cas.

Le CHu d’angers vient de dépasser 10 000 inter-ventions à cœur ouvert depuis 22 ans. est-ce seu-lement un événement médiatique ou ce chiffre va-t-il au-delà ?

J.-L.d.b. − Pour commencer, nous voulons rendre hom-

mage à tous les personnels impliqués, sans lesquels tout

cela aurait été impossible. La chirurgie en général, et la

chirurgie cardiaque en particulier, est affaire d'équipe ;

je devrais dire d'équipes au pluriel. en effet, nombreux

sont les professionnels impliqués dans la prise en charge

des patients : en dehors des chirurgiens et internes,

ceux qui font que cela « marche » sont les infirmiers

et aides-soignants des unités d'hospitalisation, du bloc

opératoire – IBODe –, les perfusionnistes responsables

de la circulation extracorporelle – CeC ; au-delà du strict

cadre du service, bien évidemment, les anesthésistes et

infirmiers anesthésistes – IADe – du bloc opératoire et

de la réanimation. Mais aussi les personnels de cardiolo-

gie, explorations fonctionnelles vasculaires, la radiologie,

les laboratoires, etc.

Forum !Une nouvelle approche de chirurgie cardiaque et vasculaire

Entretien avecDr Anne Pasco,Praticien hospitalier au département d’image-rie médicaleMaître de conférences des universités

Pr Jean-Louis De Brux,Chef du service de chirurgie cardiovascu-laire et thoracique

(*) La base de données EPICARD a été mise en place en 2007, elle comprend à ce jour, 61 équipes de chirur-gie cardiaque.

Cette tribune est une aubaine, et je vous en remercie, pour alerter les instances hospitalières à prendre conscience de la montée en puissance de l'activité « chirurgicale mini-invasive », dans tous ses aspects – humains, valorisation, PMSI...

591er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Une nouvelle approche de chirurgie cardiaque et vasculaire

dans votre spécialité, vous faites face à une insuf-fisance de l’offre de soins... J.-L.d.b. −L'activité de chirurgie cardiaque et vasculaire

va de pair avec l’augmentation régulière de la population

de la région depuis plus de 15 ans, ainsi qu’un vieillisse-

ment de cette même population. Nous faisons par ail-

leurs face à un déficit chronique d'offre de soins dans la

région des Pays de la Loire, et dans l'ouest de la France

plus généralement. Les projets d'agrandissement de la

réanimation et de la capacité en lits du service vont bien-

tôt nous donner un peu « d’air ». Cela contraste avec

une stagnation, en termes quantitatifs, de notre spécia-

lité au niveau national, due au développement des angio-

plasties coronaires notamment.

Valves « percutanées », assistance circulatoire : eCMo, chirurgie mini-invasive... Les innovations en chirurgie cardiaque à angers ne manquent pas... Mais, pour le béotien, même hospitalier, ce n’est pas réellement simple. Pouvez-vous nous aider à nous y retrouver...

vALves PeRCUTAnées « Valve percutanée » est un terme impropre. Il vaut mieux

dire implantation de valve par voie transartérielle, mais le

terme aujourd'hui consacré – on peut le regretter – est

l'acronyme anglo-saxon « tAVI » (transcathether Aortic

Valve Implantation). Il s'agit de l'implantation au travers

d'un gros cathéter, inséré par l'artère fémorale, de valves

biologiques qui viennent remplacer la valve aortique rétré-

cie de patients inopérables ou à très haut risque chirurgi-

cal. Les voies, d'abord, vont au-delà de l'artère fémorale :

on peut utiliser l'artère sous-clavière, la carotide, la pointe

du ventricule gauche, même l'aorte ascendante.

Il s'agit d'une technique en plein essor, qui a aujourd'hui

fait ses preuves au moins sur le court terme, et qui per-

met de rendre service à des patients autrefois contre-

indiqués ; le secret de la réussite de cette technique est

double : sélection drastique des patients et coopération

multidisciplinaire entre cardiologues interventionnels,

échocardiographistes, chirurgiens cardiaques, anesthé-

sistes. On voit ainsi se modifier nos spécialités : autre-

fois bien distinctes, les frontières entre ces spécialités

bougent, les compétences de chacun doivent évoluer.

Le maître mot est collaboration interdisciplinaire. Les

progrès de ces nouvelles techniques sont rapides ; au-

jourd'hui, la valve aortique, demain la valve mitrale, les

troubles du rythme…

On peut rapprocher des « tAVI » la chirurgie endovas-

culaire et la chirurgie vasculaire hybride, qui font appel

à la fois aux techniques chirurgicales classiques et à la

chirurgie endovasculaire. Les tAVI, la chirurgie endovas-

culaire et hybride se font idéalement dans des salles de

radiologie spécialement étudiées et dédiées, ce que l'on

appelle une « salle hybride ». L'une de ces salles est en

cours de construction au CHU d'Angers et sera opéra-

tionnelle courant 2014.

eCMo eCMO est lui aussi un acronyme anglo-saxon : extraCor-

poreal Membrane Oxygenation. Il s'agit d'une assistance

circulatoire – dans ce cas, on dit « eCLS » : extraCorpo-

real Life Support – et/ou respiratoire dite « de niveau 1 »,

c'est-à-dire utilisable assez facilement dans des hôpi-

taux tels que le nôtre, qui ne disposent pas d'assistance

circulatoire lourde comme le cœur artificiel, réservé aux

centres pratiquant la transplantation cardiaque.

L'eCMO – ou eCLS – sert à soutenir la fonction circula-

toire et/ou respiratoire de certains patients en défaillance

cardiocirculatoire grave – post-chirurgie cardiaque, ou

bien intoxication médicamenteuse par médicament

cardiotrope, myocardite aiguë, hypothermie profonde

accidentelle –, ou en défaillance pulmonaire pure résis-

tant aux traitements maximaux classiques. L'exemple

typique de cette dernière catégorie de patients est la

défaillance respiratoire en rapport avec la grippe H1N1.

Il est même possible – ce que nous avons fait au CHU

d'Angers – de mettre au point une unité mobile d'assis-

tance circulatoire – UMAC –, qui peut aller chercher des

patients dans une réanimation à distance, les mettre

sous eCMO – ou eCLS – et les rapatrier sur le CHU,

où l’on poursuit leur prise en charge, le plus souvent en

réanimation médicale.

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

60 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Quel est l’apport des ces techniques pour le ma-lade ? J.-L.d.b. − La mortalité reste élevée – entre 30 et 50 % –,

mais il est sûr que, sans le recours à cette technique,

la mortalité serait de 100 %. L'eCMO/eCLS, comme le

recours à l'UMAC, mobilisent des moyens matériels et

humains, des énergies non négligeables, assez souvent

les patients occupent des lits de réanimation pendant des

périodes relativement longues. Les indications doivent

donc être mûrement réfléchies et discutées afin de ne

pas disperser les moyens au détriment d'autres patients.

La chirurgie cardiaque « minimalement » invasive est un

peu différente de ce qui précède ; il s'agit dans ce cas de

diminuer l'agression chirurgicale en réduisant la taille de

la voie, d'abord en s'aidant d'instruments et de caméras

dédiées, permettant une intervention chirurgicale dont

les gestes, réalisés directement par le chirurgien avec

des instruments adaptés – ce n'est pas un robot – sont

suivis sur un écran. très séduisante, cette approche

« minimalement » invasive n'en comporte pas moins

des dangers et des complications spécifiques ; il faut

être très prudent dans sa mise en œuvre.

Vous évoquiez, avant le début de notre entretien, les « endoprothèses » et les « prothèses hybrides ». Là encore, nous avons besoins de vos... « lumières » ! J.-L.d.b. − J'évoquais, il y a quelques instants, ces

endoprothèses « hybrides » : la chirurgie vasculaire a

développé, depuis plusieurs années, des endoprothèses

qui peuvent s'implanter par voie endovasculaire avec

l'aide d'appareils de radiologie performants. Mais ces

endoprothèses ne répondent pas à toutes les situations.

Dans certains cas, l'approche chirurgicale ouverte est

encore nécessaire : par exemple, lorsque l'on intervient

sur les vaisseaux à destinée cérébrale et la crosse aor-

tique, ou bien lorsque l'anévrisme ne se prête pas à la

mise en place d'une endoprothèse pour une raison ou

une autre.

Dans certains de ces cas « frontières », on peut « mixer »

une approche chirurgicale classique et une voie endo-

vasculaire avec des prothèses spécialement étudiées.

Là encore, une parfaite collaboration entre différents

spécialistes, dont les compétences étaient autrefois

complètement séparées, est la clé du succès. Il devient

donc de plus en plus indispensable que les jeunes chirur-

giens soient, au cours de leur formation, initiés à ces

techniques, qui ne faisaient pas partie de l'arsenal théra-

peutique il y a encore quelques années. Les maquettes

d'internat doivent donc impérativement être modifiées

en conséquence.

S’agissant du neurovasculaire, quid de la prise en charge de l'aVC ischémique et les nouvelles tech-niques de thrombectomie intra-artérielle ? J.-L.d.b. − Le traitement des anévrismes intracrâniens

par voie endovasculaire a déjà complètement supplanté

la chirurgie à ciel ouvert, avec un taux de conversion

proche de 100 %, avec de plus des innovations très

récentes, comme les techniques de « flow diversion »

avec les « endoprothèses couvertes ».

a.P. − Désormais, il n'est plus nécessaire d'ouvrir le

crâne pour traiter un Accident Vasculaire Cérébral !

Je suis volontairement provocante, mais la réalité est

proche de cette remarque. Pour être plus précise, il est

par exemple devenu exceptionnel, dans la plupart des

CHU français, de traiter une rupture d'anévrisme par

trépanation et clip. À Angers, 100 % des anévrismes

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

611er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

rompus sont traités par technique endovasculaire et

99 % des anévrismes non rompus le sont également.

Cela vaut également pour toutes les autres malforma-

tions vasculaires intracrâniennes ou médullaires. en ma-

tière d'accident vasculaire ischémique – les infarctus cé-

rébraux –, la neuroradiologie interventionnelle prend une

part croissante et exponentielle avec les techniques de

thrombectomie, qui consistent, par voie endovasculaire,

à aller le plus rapidement possible chercher et ramener

le caillot qui obstrue l'artère. Ce sont des techniques en

plein développement, en cours de validation.

À l'instar de ce que disait le Pr Debrux pour la sphère

cardiovasculaire, les techniques de neuroradiologie

interventionnelle sont beaucoup moins lourdes pour le

patient que ne l'est la chirurgie. Les suites opératoires

sont beaucoup plus simples. Ces techniques requièrent

un environnement ultrasophistiqué, des appareils dédiés

onéreux et, globalement, une organisation tout à fait

identique à celle des blocs opératoires. C'est pour cette

raison que nous militons pour un rapprochement et une

mutualisation des structures et des hommes.

La réalisation de ces interventions justifie de moyens de plus en plus importants et de plus en plus coûteux... J.-L.d.b. − Cela peut difficilement être contesté. Ce

qu’il faut comprendre, nous travaillons avec de gros

blocs opératoires, avec des interventions nombreuses,

des rencontres permanentes entre les praticiens et, ce

n’est pas ce qui est le plus coûteux, des salles de débrie-

fing. tout le monde discute en même temps avec tout le

monde, cela a un petit côté « forum » !

Vous insistez beaucoup sur le caractère de plus en plus pluridisciplinaire de la spécialité cardio-vasculaire. Pourquoi « de plus en plus » ? J.-L.d.b. − La pluridisciplinarité, ce sont des médecins –

chirurgiens, cardiologues, radiologues, anesthésistes... –

qui interviennent pour un patient ensemble et en même

temps. Unité de lieu, unité de temps et unité d’action !

Ce que nous avons détaillé plus haut illustre bien cette

mutation, qui semble bien irréversible. Le paysage de la

chirurgie est en train de se modifier rapidement et, d'ici

quelques années, la prise en charge multidisciplinaire

des patients sera la règle, la prise en charge « classique »

à ciel ouvert sera devenue plus rare.

a.P. − Nous avons à l'intérieur du même bloc les trois

salles d'imagerie vasculaire – cardio, neuro et périphé-

rique –, la salle hybride à vocation mixte médico-chirur-

gicale et la salle de réveil, et tout cela à proximité immé-

diate du plateau d'imagerie scanner et IrM.

La chirurgie du troisième millénaire ? a.P. − Aujourd’hui, nous nous efforçons de décloison-

ner les spécialités et, ce faisant, de remettre en cause

l'organisation traditionnelle de « compartimentalisation »

des activités. À présent, nous avons besoin d’espaces

nouveaux, où les meilleurs hommes œuvrent ensemble.

J.-L.d.b. − Sachant qu’il nous faut quand même

conserver ces compétences classiques héritées de nos

maîtres, ne serait-ce que pour être capables de faire

face à des complications curables uniquement grâce à

« la bonne vieille chirurgie » ! n

REMERCIEMENTS

GPAA - GAëllE PéNEAu ARChITECTE ET ASSoCIéSCabinet d’Architecture

2 Allée des Hélices44200 NANTES

www.gpaa.fr

On voit ainsi se modifier nos spécialités : autrefois bien distinctes, les frontières entre ces spécialités bougent, les compétences de chacun doivent évoluer. Le maître mot est collaboration interdisciplinaire

62 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – Je n’ai guère eu d’information sur le sujet avant de vous rencon-trer, mais je crois qu’il s’agit d’eeG et d’un projet inno-vant... Vous ne m’en voudrez

pas de me montrer parfois ignare... SyLVie N’GuyeN tHe tiCH − Dans ce cas, commen-

çons par le commencement. Vous savez, bien sûr, ce

qu’est un électroencéphalogramme : un examen qui

consiste à poser des électrodes sur la tête du patient

pour enregistrer l'activité cérébrale. Jusque là, c’est

facile. Mais, ici, nous sommes en pédiatrie, avec des

bébés prématurés voire grands prématurés, minuscules

et très fragiles, que l’on peut à peine manipuler. Leur

poser des électrodes – même adaptées à leur taille, bien

évidemment – est toujours un examen extrêmement

délicat. et, bien sûr, ils ne sont pas toujours d’accord.

(sourire) Un examen dure environ 45 minutes, ce qui

peut leur sembler fort long...

Quel est l’intérêt de cet examen pour les bébés ? L'eeg nous donne des indications sur le fonctionnement

du cerveau. C'est important chez les bébés prématurés,

car cela permet de suivre la maturation neurologique et

de rassurer les parents quand tout va bien, ce qui est

le plus souvent le cas car, heureusement, les prématu-

rés n’ont pas tous des problèmes neurologiques... C'est

utile aussi chez des bébés pour qui la naissance a été

difficile, pour voir s'il y a eu un manque d'oxygène au

niveau du cerveau, et aussi, plus rarement, pour des

bébés qui souffrent de convulsions ; mais je ne vais pas

vous entraîner trop loin. Dans une telle situation, il faut

rapidement savoir ce qui ne va pas. L’eeg est l’un de

nos instruments de mesure les plus précieux...

Une fois l’examen terminé, il faut faire défiler l'enregis-

trement sur l'écran et pointer les séquences normales

et/ou anormales. Pour le nouveau-né, et surtout dans

la grande prématurité, c’est un travail très pointu et qui

prend du temps. Sans doute, c’est variable en fonction

des nourrissons, mais ce sont des analyses qui durent

rarement moins de 20 à 40 minutes.

Dans les cas où les tracés ne sont

pas suffisamment clairs, nous avons

besoin de comparer nos observations

avec des collègues. À ce niveau, nous

ne sommes qu’une trentaine de neu-

rophysiologistes spécialisés pour toute la France. C’est

réellement très peu ! Beaucoup d'entre nous travaillent

déjà à distance pour des hôpitaux qui n'ont pas de spé-

cialistes. Le projet BB eeg*1 va nous permettre d'utiliser

plus facilement la télétransmission pour échanger plus

facilement et plus régulièrement.

Merci pour cette présentation... Le peu que je savais, c’est que vous avez été l’initiatrice et le maître d’œuvre d’un projet original... Je suis effectivement la responsable du Projet BB eeg,

plate-forme informatique pour l'analyse de signaux eeg

chez le nouveau-né. Soutenu par l’ANr*2, le pôle Images

et réseaux et la région des Pays de la Loire et porté

par le CHU et l'université d'Angers LISA*3, ce projet en-

gage des logiciels, réseaux, traitements et analyse des

signaux, images, sans oublier l'e-learning.

Peut-on en savoir plus ? BB eeg développe trois types de services : télédiagnos-

tic, apprentissage et traitement de signal.

D’abord, le télédiagnostic. Plusieurs hôpitaux de la

région*4 ont formé des techniciens spécialisés capables

de réaliser in situ des électroencéphalogrammes. À

l’aide d’un système vidéo, le technicien peut montrer

le comportement de l'enfant au neuropédiatre avant

de télétransmettre les données, de manière sécurisée.

elles sont reçues et analysées par le neuropédiatre. Les

télédiagnostics sont alors « relayés » vers les hôpitaux

et/ou les médecins traitants concernés. La télétransmis-

sion nous permet, je parle en tant que neuropédiatre,

de nous « rencontrer » sans souci de la distance pour

analyser collectivement les séquences d’enregistrement

inhabituelles, certaines étant souvent très difficiles à in-

terpréter.

BB modèle Plate-forme d'aide à l'interprétation de l'électroencéphalogramme du nouveau-né pour la détection de lésions cérébrales

Entretien avecPr Sylvie N’Guyen The TichNeuropédiatreProfesseur des Universités - Praticien hospitalierPôle Enfant - Neurolo-gie pédiatrique

(*1) BroadBand ElectroEncephalogram pour BB EEG

(*2) Agence Nationale de la Recherche.

(*3) Laboratoire d'Ingénierie des Sys-tèmes Automatisés.

(*4) Saint-Nazaire, Ancenis, La Roche-sur-Yon, Le Mans....

631er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

(*5) À Nantes, le 25 octobre 2012

Le second service relève de la pédagogie. C'est une

« plate-forme » d'apprentissage en ligne destinée à for-

mer pédiatres et techniciens aux conditions très spéci-

fiques de l'électroencéphalographie du nouveau-né.

Le troisième service sollicite les techniques les plus

avancées du traitement du signal : quantification des

données, algorithmes mathématiques, critères de déci-

sion... elles permettent de compléter le diagnostic visuel

et de l'accélérer par une analyse automatique de l'eeg.

Le logiciel pourra émettre une alerte à chaque séquence

symptomatique d'une anomalie.

Quels sont les enjeux ? technologiques, bien sûr, mais pas seulement. Le pari

ne se limitait pas à la télétransmission. Il s’agissait, dans

une même plate-forme « intégrée », de manager à la

fois différents services et de proposer un modèle orga-

nisationnel et économique. La télémédecine ou la télé-

transmission ne résolvent pas tout. Il faut aussi gérer les

structures, les organisations, les problèmes et s’adapter

à de nouvelles habitudes de travail. On juxtapose une

culture de type industriel à la culture, toute différente,

des professionnels de santé. La pratique de la télémé-

decine relie un maillon à la chaîne de prise en charge du

patient.

On est, aujourd’hui encore, au stade des questions, sou-

vent basiques : qui est responsable et de quoi ? Com-

ment garantir la pérennité des services et des presta-

tions ? Qui paie quoi et à qui ? en soi, elles ne sont

pas très complexes, c’est leur intrication qui freine au-

jourd'hui le développement de la télémédecine, en dépit

d’une volonté générale qui existe partout, en France

comme au niveau international.

La télémédecine est à une période charnière. La loi

HPSt de 2009 à complété le cadre juridique et a été pré-

cisée par un décret d’octobre 2010. Les techniques sont

à maturité et des expériences ont montré les bénéfices

que l'on peut en attendre. À travers BB eeg comme

exemple type, il reste à valider un modèle organisation-

nel et économique qui conviendra aux différentes par-

ties prenantes.

Qui sont les partenaires de bb eeG ?Le projet réunit plusieurs partenaires, dont quatre

centres hospitaliers – CH Le Mans, CHU Angers, CH

Laval, CH Saumur –, l'Université d'Angers (LISA), Uni-

versité catholique de l'Ouest, et trois PMe : 4SH, etiam,

theleme. Durée : 30 mois. Coût total : 1,3 M€. Aide au

financement : Agence Nationale de la recherche.

et votre projet a été primé...BB eeg a obtenu*5 le deuxième prix des

« trophées Loading the Future » organisés par le pôle

de compétitivité mondial Images & réseaux pour le

projet : « télémédecine au service des nouveau-

nés ayant besoin d’un électroencéphalogramme,

examen nécessitant normalement l’intervention de

spécialistes rares. » n

À travers BB EEG comme exemple type, il reste à valider un modèle organisationnel et économique qui conviendra aux différentes parties prenantes

Pho

to ©

360

imag

es -

CH

U A

nger

s

64 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – Pr barthe-laix, pouvez-vous nous parler de vos activités profession-nelles ? aNNiCK bartHeLaix − Je suis

Chef de service du laboratoire de

neurobiologie/neuropathologie au

CHU d’Angers. Le laboratoire a pour

objet de contribuer au diagnostic

et à la recherche sur des maladies

inflammatoires, auto-immunes*1 et

dégénératives du système nerveux

central et périphérique. Nos outils :

des analyses, des prélèvements

sanguins, de liquide céphalorachidien, des biopsies de

muscle et de nerf et, in fine, du tissu cérébral... enfin,

vous connaissez déjà tout cela. (rires).

Mais vous avez, comme l’on dit amicalement, « plusieurs casquettes ». a.b. − À vrai dire, je suis embarrassée pour répondre

objectivement à votre question car je ne porte jamais de

casquette. Mais je confesse que je suis aussi chargée

d’une « Mission d'ordre général pour la mise en place du

Centre de ressources Biologiques du CHU », centre qui

a vocation à préparer et conserver, dans le cadre régle-

mentaire et éthique, des échantillons biologiques desti-

nés à la recherche scientifique et biomédicale. Alimen-

tant des « catalogues », ils seront disponibles pour la

recherche publique et industrielle dans le cadre de colla-

borations scientifiques ou autres formes de partenariats.

et vous-même Pr Émile ? J.e. − Je ne suis plus en activité au CHU mais ai gar-

dé des liens avec l'Alzheimer. J'ai en effet été méde-

cin coordonnateur d'un eHPAD à proximité d'Angers.

J'avais défendu son ouverture parce qu'il était « dédié »

aux seuls patients Alzheimer, avec une architecture favo-

risant les soins, leur surveillance et, last not the least, la

qualité de vie et celle de leurs soignants, lesquelles sont

interdépendantes. Au terme de cette activité, j'étais mûr

pour une réflexion sur « le chez eux » de ces patients.

est-ce qu'une organisation différente de leur habitat ne

leur aurait pas permis d'y vivre plus longtemps avec

leur conjoint ? Cette disposition d'esprit avait probable-

ment à voir aussi avec la thématique de recherche – les

fonctions exécutives et leurs altérations – du laboratoire

de neuropsychologie qui, sous l'impulsion de Didier

Le gall s'était développée dans le service que j'avais

dirigé au CHU.

Mais, vous avez une ambition commune... a.b. − effectivement, Jean Émile et moi nous sommes

rejoints sur le sujet des conditions et obstacles au main-

tien à leur domicile des patients Alzheimer. en effet,

j'étais confrontée, à titre personnel, à ce problème pré-

cis du maintien à domicile à propos de cette maladie,

dont les aspects cliniques m'étaient familiers puisqu'elle

était au cœur de ma thématique générale de recherche.

La chance a alors voulu que nous puissions sensibiliser

un architecte, Didier Salon, à cette idée de travailler sur

un habitat aussi adapté que possible à des personnes

développant un déficit progressif des fonctions cogni-

tives – cas de la maladie d'Alzheimer. Un projet a alors

pu se construire.

Une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer peut

difficilement vivre seule hors institution. elle a, elle

aura, besoin d'être accompagnée 24 h sur 24 par une

personne que l'on qualifie « d'aidant(e) ». C’est, la plu-

part du temps, le conjoint ou un parent proche. C’est un

engagement qui va bien au-delà des « soins à domicile ».

Pour l’aidant, « l’astreinte » est permanente et de plus

en plus lourde au fil des mois et années, ce qu'exprime

bien le vocable « fardeau de l'aidant ». Des études ont

montré une réduction de sa durée de vie de plus d'un

an… Ce qui est évidemment une façon dramatique de

mettre un terme au maintien à son domicile du patient !

Châteaux de sableVivre plus longtemps, chez soi, le reste de son âge

Entretien avecPr Annick Barthelaix,Professeur des Université, praticien hospitalier

Pr Jean émile,Professeur honoraire de neurologieDoyen honoraire de la Faculté de Médecine et de Pharmacie d’Angers

(*1) Les maladies auto-immunes sont dues à une hyperac-tivité du système immunitaire.

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

651er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

(*2) L’anosognosie est un trouble neuropsy-chologique qui fait qu'un patient atteint d'une maladie ou d'un handicap ne semble pas avoir conscience de sa condition.

La maladie d’alzheimer n’est pas un processus brutal comme un aVC ou un infarctus... Je vois que vous avez de solides bases médicales. (sou-

rire) L’Alzheimer est en effet un processus lent. L’évolu-

tion de la maladie peut durer jusqu’à 5, 10, 15 ans… On

assiste à une diminution progressive des facultés mémo-

rielles. Le processus ne revient jamais en arrière, mais on

ne sait pas à quelle vitesse la maladie va progresser. Il y a

oubli à mesure de ce qui est dit au malade, de ce qu'il fait.

Il perd ses capacités d’apprentissage, est souvent apa-

thique, ne prenant plus d'initiatives. Des propos comme :

« Je ne sais pas », « Je m’ennuie », « Je n’arrive pas »

et les remarques de l’entourage : « Je te l’ai déjà dit »

sont significatives de la maladie. Le malade ne sait plus

se projeter dans l’avenir. Il ne vit que dans le présent. et,

souvent, il se contente de rester sur sa chaise...

Que peut-on faire ?On ne dispose pas actuellement de médicaments véri-

tablement efficaces, même si l'on peut penser qu'il y

en aura un jour... pour une pathologie dont le poids est

pourtant extrêmement important. Le soin dit relationnel,

qui peut paraître « peu de choses », est pourtant consi-

dérable pour les patients et il faut le faire en ciblant sur

le malade, mais aussi sur l’aidant… Ce dont le malade

tirera un bénéfice supplémentaire. Les possibilités de la

rééducation sont modestes. Il s'agit plus en fait de créer

les conditions d'une meilleure adaptation, ce que com-

plique le fait que le malade ne se considère pas vraiment

comme tel du fait de l'anosognosie*2.

Aussi faut-il, en quelque sorte, « l’adapter », chez lui,

aux activités de sa vie quotidienne. Il faut lui donner

une chance de faire par lui-même, lui éviter les mises

en échec, le stimuler sans pour autant l'infantiliser. Les

possibilités de planification de ses activités étant alté-

rées, il est important de s'appuyer sur les routines, les

habitudes, simplifier les séquences, suggérer les tâches,

éviter les « distracteurs ». Le handicap d'origine cognitive,

on le voit, est une terrible réalité, mais on voit aussi qu'il

est moins visible/lisible que le handicap moteur, la surdité

ou la cécité. Il est aussi un peu honteux, masqué, caché.

il y a des appartements spécialement adaptés pour les handicapés....Pour les handicapés moteurs, oui, avec des normes

anticipant ce risque. Pour le handicap qu'entraîne le

déficit cognitif de la maladie d'Alzheimer, non. Ce

déficit a statut d'oublié. Le malade l’Alzheimer n’est pas

handicapé physiquement, pas plus qu’au plan mental,

son handicap, et il est de taille, est qu’il n’est plus

capable de mémoriser et ne s’en rend pas compte. Il

ne sait pas où il doit aller, ce qu’il doit faire... Le malade

parle normalement, il comprend ce qu’on lui dit, puis il

oublie aussi rapidement ce qu’il a entendu. Il peut aussi

lire et écrire, mais ne sait plus, quelques instants plus

tard, ce qu’il a lu ou écrit.

Quel sera le résultat de tout ce travail ?La question est pour nous d'apporter, avec la recherche

que nous avons menée, des arguments à la prise en

compte en matière d’habitat du risque Alzheimer, comme

l'est aujourd'hui le risque handicap physique. Le projet

porte sur ce qui pourrait être utile dans l'organisation

de l'habitat des sujets vieillissants. Il serait, en effet,

souhaitable que soit anticipé ce risque d'un déficit cognitif.

Aussi, parmi les thérapeutiques non médicamenteuses,

notre choix s'est porté sur l'habitat. Plusieurs membres de

l'équipe universitaire du laboratoire de neuropsychologie

du CHU ayant bien voulu s'associer au projet, ainsi que

des designers, nous avons pu présenter un projet de

recherche à la région des Pays de la Loire et obtenir son

soutien financier. Cette recherche a abouti au concept

d'un habitat matriciel appelé Domantio.

Nous pensons que ses déclinaisons sont de nature

à maintenir à leur domicile plus longtemps les

personnes qui viendraient à développer un tel déficit

ou chez lesquelles il commence. La MFAM – Mutualité

Française Anjou-Mayenne – ayant bien voulu qu'une

déclinaison de sa partie cuisine soit intégrée au projet

d'appartement test LeNA – Logement evolutif pour

une Nouvelle Autonomie –, qu'elle a développé dans le

cadre du CeNtICH – Centre d’expertise National Des

technologies de l’Information et de la Communication

pour l’autonomie –, nous disposons ainsi d'une première

matérialisation. elle va en particulier nous permettre

d'engager une démarche de validation et d'évaluation

de patients vus en neurologie au CHU. Le CeNtICH

offre au projet Domantio, du fait de cette implantation,

des conditions préférentielles d'intégration de ces

technologies et la possibilité de choisir et d’évaluer les

outils domotiques les plus adaptés. n

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

Est-ce qu'une organisation différente de leur habitat ne leur aurait pas permis d'y vivre plus longtemps avec leur conjoint ?

66 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – C’est un service hospitalier ordinaire, comme dans tous les hôpitaux de France. Mais, on n’y voit au-cun malade, entend aucun cri, aucun bruit... on dirait un vais-seau fantôme... et c’est vous, Professeur Granry, qui en êtes le capitaine... JeaN-CLaude GraNry − C’est

bien moi, mais je vous assure que

je ne suis pas un fantôme ! Ce-

pendant, c’est vrai, en dehors des

journées de simulation, ce service peut sembler un peu

étrange. Contrairement aux services de soins, le centre

de simulation du CHU d’Angers ne fonctionne pas 24

heures sur 24. (sourires) Mais, rassurez-vous, il fonctionne.

revenez quand vous voulez, vous pourrez participer vous-

même à une séance de simulation…

et plus concrètement ? Une séance dure entre 60 et 90 minutes et est rythmée

en trois temps : présentation ou briefing, déroulement

du scénario puis débriefing. Il s’agit de conforter l'ensei-

gnement par une implication « émotionnelle ». Chaque

apprenant doit s'auto-évaluer... La simulation peut, par

ailleurs, évaluer les comportements d'une équipe. Les

« stagiaires » doivent d’abord

s’approprier l’environnement

et les matériels : mannequins,

respirateurs d'anesthésie,

chariot de médicaments… La

crédibilité de la simulation est

l’élément-clé de la réussite.

elle doit être réaliste et repro-

duire le milieu dans lequel

évoluent quotidiennement

les participants.

Chaque séance est basée sur

un scénario répondant à des

objectifs pédagogiques adap-

tés au niveau du participant.

Les scénarii sont conçus à

partir de programmes défi-

nis et peuvent correspondre

à des situations rares, mais

réelles. Le participant doit poser, par exemple, des déci-

sions et les actes sur le mannequin – intubation trachéale,

pose de voie veineuse centrale, dispensation de médi-

caments spécifiques… –, tel qu'il aurait eu à le faire en

situation réelle. Suis-je suffisamment concret ? (sourire)

et ensuite ? ensuite ? La volonté du centre est de juxtaposer deux

objectifs. Le premier est fondamental : « never the first

time with the patient » ou, si vous préférez : « Jamais

la première fois avec le malade ». Ce devrait être un

principe de base des études médicales. Le deuxième

objectif en découle naturellement : tout médecin doit

s’entraîner. Aujourd’hui, ce principe est étendu à tous

les soignants, et pas seulement aux médecins. Les si-

mulations se font souvent à plusieurs et reproduisent

des situations réelles où s’activent, médecins, infir-

mières, aides-soignantes. L’entraînement est d’autant

plus important que, non seulement chacun doit savoir

ce qu’il a à faire, mais que tous doivent travailler d’une

manière coordonnée et efficace ...

Que retirez-vous de ces enseignements ? Mais plein de choses. (sourire) Une première constata-

tion : soignants non médicaux, comme médecins, n’y

vont pas « décontractés » en se disant : « même si on

fait des conn..., il n’y aura pas de conséquence ». en fait,

c’est l’inverse qui se produit. Au moment d’exécuter les

gestes, les soignants sont aussi concentrés et aussi

tendus qu’en situation réelle, voire plus... Pour chacun,

l’enjeu est important, la pression de même. « est-ce que

je vais bien faire ? suis-je effectivement compétent ? »

Simuler n’est pas tricherLa simulation médicale au ser-vice de la sécurité des patients

Entretien avecPr Jean-Claude Granry,Chef du pôle Anes-thésie-Réanimation, Urgences SAMU-SMUR, Psychiatrie, Médecine Légale, Addictologie, Maladies Infectieuses, Médecine et Santé au Travail

accompagné sur la photo de Dr Jérôme Berton, Praticien (à droite)

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

671er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Mais ceci, de surcroît, sous le regard des collègues. Ce

n’est pas neutre. Cela contribue aussi à l’humilité…

Un autre point : la caméra. Impitoyable caméra qui ne

juge rien mais qui voit tout... Il n’est pas si aisé de se

regarder. elle permet aussi d’observer les comporte-

ments : communication dans l'équipe, avec le patient,

coordination des gestes. C’est un ensemble où tout doit

être au meilleur niveau. Cet outil s'adresse d'abord, bien

évidemment, aux jeunes en formation. Nous leur appor-

tons un terrain d'entraînement en « milieu protégé »,

c’est-à-dire sans risque pour le patient ! en simulation,

je peux vous assurer que le « fautif » se souvient de

« l’erreur », mais, pour autant, elle n’est pas une « faute ».

et cela n’a rien à voir avec l'amphi !

Autre enseignement encore : de plus en plus de seniors

sont demandeurs. La simulation leur permet d'approfon-

dir des compétences comportementales ou de rester à

niveau sur des cas rares. Moyennant quoi aucun méde-

cin, aucun soignant, quel qu’il soit, ne peut dire « je suis

capable de réagir avec succès à n’importe quelle situa-

tion, je ne fais jamais d’erreur et je n’ai nul besoin de

votre simulateur... » !

autrement dit, la « culture médicale de l’erreur »... mais tout ceci ne les empêche pas ! Je souris car c’est l’expression qu’aime bien utiliser mon

confrère le Docteur Berton. À propos, il est désolé d’être

absent aujourd’hui, il était en train de simuler une inter-

view. (éclats de rire) Oui, vous avez raison, en médecine,

il n’y a pas de zéro défaut. Mais on peut limiter l’erreur et

la simulation en est un des moyens les plus pertinents.

Chaque erreur est une opportunité d’éviter de la répéter.

Autre point encore. Oui, mes propos sont un peu décou-

sus, mais il y a tellement de choses à dire... Un exemple

classique : l’erreur dans l'administration des médica-

ments. L’infirmière distribue souvent les médicaments

dans différentes petites boîtes ; l’une de ses collègues

vient lui demander une information quelconque. Votre in-

firmière s’interrompt et donne l’information souhaitée...

et la possibilité d’erreur augmente fortement. Donc, les

soignants ne doivent pas être dérangés dans une acti-

vité à risque. Autre « astuce » dans ces situations, dire à

haute voix ce que l’on est en train de faire ; il n’est plus

possible de faire autre chose, ce qui optimise la concen-

tration... essayez, vous verrez !

L’erreur induit la sanction...Non, et je le redis de manière très claire, bien évidem-

ment sauf l’erreur volontaire. La formation est toujours

« non sanctionnante ». Le problème n’est pas la « faute » ;

ce qui est important, c’est pourquoi elle a été commise

et comment on peut l’éviter pour qu’elle ne se renouvelle

pas. À l’hôpital « normal », on ne peut pas « ne pas faire » ;

en simulation, si ! L'erreur est toujours envisageable : l’ex-

pert est celui qui saura en minimiser les conséquences.

Une fois la simulation terminée, la deuxième partie, aus-

si importante, commence : le débriefing. Il doit être sys-

tématique. Il n’y a pas de simulation valide sans débrie-

fing. Montrer l’erreur, c’est la première partie ; réfléchir

pour savoir comment on l’a commise est la seconde. Au

débriefing, on se détend. On prend un café et on discute

sans pression et, ne l’oubliez pas, collectivement. Après

l’acte, il y a la réflexion sur l’acte. Le débriefing permet

de rediscuter de la prise en charge du « patient » ; dis-

cussion sur les aspects techniques comme non tech-

niques. La simulation ayant été filmée, le soignant peut

l'appréhender avec recul et esprit critique. Ce visionnage

est aussi intéressant pour les aspects non techniques :

communication, leadership, gestion des ressources…

Vous avez bien tout dit ?Oh, non. Moi, je n’ai jamais tout dit ; il y a tant de

choses à dire. Mais, si vous l’acceptiez, j’aimerais parler

quelques minutes de notre centre de simulation, initiale-

ment dénommé César.

Veni, vidi, vici ?Absolument ! C’est exactement cela ! (rires) CeSAr

– Centre de Simulation en Anesthésie-réanimation –

propose des simulations en anesthésie-réanimation sur

mannequins dans un environnement dédié : salle de si-

mulation configurable avec matériel audio-vidéo intégré

et retransmission en direct dans une salle de débriefing.

Nous avons à notre disposition des simulateurs « pro-

céduraux » – têtes d’intubation, bras de perfusion... –,

des simulateurs dits « basse fidélité » et des simulateurs

« haute-fidélité », qui correspondent au corps entier et

sont pilotés par ordinateurs – mannequins adultes, nour-

risson et nouveau-né.

La simulation ne se

limite pas aux manne-

quins… Nous avons mis

en place un programme

de formation à la consul-

tation d'annonce – can-

cer, maladie grave, pré-

lèvements d'organes…

–, avec la participation

des acteurs de la troupe

théâtrale du CHU. Ces

formations sont très

appréciées des partici-

pants. en outre, le centre

est maintenant multiprofessionnel – médecins, pharma-

ciens, infirmières, aides-soignantes, dentistes… – et

multidisciplinaire. Anesthésistes-réanimateurs bien sûr,

mais aussi urgentistes, cancérologues, pédiatres, psy-

chiatres, cardiologues, et bientôt chirurgiens participent

à l'activité du centre….

et votre conclusion ?Je souhaiterais que nous puissions créer une plate-

forme de simulation en santé et de sécurité des soins

qui concerne un maximum de disciplines médicales et

de professions de santé. L’intégration des patients au

sein de cette plate-forme devra être aussi un objectif.

Il me semble nécessaire de fédérer le maximum de

professionnels pour une optimisation de la formation,

avec la volonté de travail en équipe pour une meilleure

prise en compte des facteurs humains. n

Impitoyable caméra qui ne juge rien mais qui voit tout

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

68 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – Quel est votre rôle respectif ? JoSÉ Hureaux − Je travaille à mi-temps en Pneumo-

logie ; les pathologies de mes patients vont du cancer

bronchique jusqu'aux soins palliatifs. Je résume un peu

abusivement. Le Centre de Coordination en Cancérolo-

gie – dire C3 pour les initiés – occupe mon second mi-

temps : mise en place des Plans cancer dans tous les ser-

vices prenant en charge des patients cancéreux au CHU.

CLaude reLiat − Mon activité s'oriente essentiellement

vers l’ingénierie de formation pour le personnel. Proposer,

créer, innover, rassembler et fédérer les personnels pour

développer de la compétence individuelle et collective.

dans quel contexte ? Le contexte, c’est le cancer. Pas très marrant, je vous

l’accorde... en trois phases, je vous propose un bref his-

torique.

I - en 1998, la Ligue nationale contre le cancer orga-

nise ses « 1ers États généraux des malades du cancer ».

Il s’agissait pour les malades, proches, soignants de

« briser le silence » face à l'indifférence et la peur du

cancer. Il s’agissait aussi que tous puissent s'exprimer

et réfléchir ensemble. Un livre blanc fut édité en 1999.

II - Lancé en 2003 par le Président de la république,

Jacques Chirac, le Plan cancer 2003-2007 impulse une

dynamique nouvelle dans la lutte contre le cancer.

III - en 2008, le Pr Jean-Pierre grünfeld est missionné

par le Président de la république, Nicolas Sarkozy. Le

second Plan cancer s’étale de 2009 à 2013. Il se struc-

ture sur 5 axes, 30 mesures et 6 mesures phares. Vous

pouvez aisément vous référer au site www.e-cancer.fr,

le Plan cancer y est bien expliqué...

Quand on se découvre un cancer, on n’a pas réel-lement envie de faire la fête... D’une manière générale, non. Mais, en fait, les réactions

sont très différentes d’un individu à l’autre : sidération,

colère, agressivité, questionnement, déni de réalité... Le

ressenti du malade, c’est une condamnation à mort ; la

mort programmée ! Auparavant, le médecin se réfugiait

derrière son savoir. Il s’efforçait d’être le plus distancié

possible, presque comme s’il avait peur que le « mal »

le suive... Le manque d’humanité des médecins n’était

souvent qu’une protection. J’évoque une époque un peu

ancienne maintenant. en 15 à 20 ans, les choses ont

considérablement évolué. et, depuis 5 à 10 ans, la dou-

leur est « respectée » à défaut d’être « respectable ».

Cela dit, notre projet montre bien que le problème de-

meure bien réel. Le malade souffre, mais aussi le méde-

cin. L’annonce d’un cancer est un des moments les plus

« durs ». Pour le médecin, la pression est énorme. Ceux

qui quittent cette spécialité ne sont pas rares ! Il serait im-

pensable qu’un pilote d’avion soit autorisé à voler sans un

nombre respectable d’heures de vol... sur simulateur. Aux

États-Unis, quand un étudiant choisit sa future faculté de

médecine, l’un de ses critères de sélection est la qualité

du centre de simulation. en France, la simulation prend

progressivement une part de plus en plus importante

dans la formation des professionnels de santé.

Mauvaise nouvelleLa simulation en santé : la consultation d’annonce d’un cancer

Entretien avecJosé Hureaux,(à droite) Praticien Hospitalier, pneumologue qualifié en cancérologieMembre de la communication des médicaments et des dispositifs stérilesPôle des Spécialités Médicales et Chirur-gicales Intégrées et Centre de Coordination en Cancérologie

Claude Reliat,Cadre supérieur de santé responsable de la formation profes-sionnelle

Pho

to ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

691er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

revenons au C3 que nous évoquions tout à l’heure : qu’est-ce qui est simulé ? Le C3 ne simule pas. Le « simulateur », c’est CeSAr.

Autrement dit, le Centre de Simulation en Anesthésie-

réanimation. Il permet la mise en situation des jeunes

médecins et infirmières sur le principe éthique fonda-

mental : « Jamais la première fois sur le patient ». Le

CeSAr peut aussi se prêter à l’apprentissage de pro-

cédures techniques ou du travail en équipe pluriprofes-

sionnelle lors d’une situation de crise, comme un arrêt

cardio-respiratoire. Initiateurs et pilotes du CeSAr, le

Pr granry et le Dr Berton nous « permettent » d’y faire

appel. C’est dans cette structure que vient se glisser

notre tréteauscope. Le dispositif fonctionne sous forme

d’un triptyque : CeSAr, C3 et tréteauscope ! C’est

vrai, pour s’en sortir avec nous, il faut être un peu initié.

D’autant plus que le tréteauscope n’est pas un appareil

médical – encore que –, mais une troupe de théâtre où

l’on joue essentiellement des drames !

autrement dit, César va au théâtre... Oui, et il y a de nombreuses représentations. (sourires)

La première phase, c’est ce que nous appelons « l’écri-

ture en amont ». Avant la simulation proprement dite,

on prépare l’écriture du scénario. De la même manière

qu’une pièce de théâtre. Les « dramaturges » rédigent

leurs pièces à partir des expertises des médecins ba-

sées sur des cas réalistes. La pièce écrite, on la joue.

Les acteurs de tréteauscope font partie de la troupe des

comédiens amateurs de l’association culturelle du CHU.

regroupés systématiquement en binôme – un médecin

et un soignant –, « les spectateurs-apprenants » sont

confrontés à de vrais-faux patients auxquels ils doivent

annoncer leur pathologie : le cancer !

Les spectateurs applaudissent-ils la pièce ? Oui. tous la trouvent fort instructive. La séance de

débriefing permet de faire le point. On y va pour commenter

et comparer ce que l’on a vu et entendu. Les médecins

stagiaires, les acteurs, « experts », la psychologue et moi-

même apportons des commentaires et des conseils, pour

que les apprenants tracent des perspectives de progression.

Mais, contrairement à une formation « classique », il n’est

pas « question de juger ou de noter ». Il s’agit d’accompagner

les gens dans leur autocritique, de leurs proposer des axes

de progression et de voir si les comportements sont en

relation avec les recommandations officielles.

et le budget de la représentation ? Oh, à peine moins

que le prix d’un

scanner : 2 000 €

pour l’année !

Ce n’est pas en raison de la modestie de votre budget que vous avez reçu le « Grand prix aNFH 2012 » pour le projet « L’annonce en oncologie par simulation avec la troupe de théâtre du CHu d’angers »... Attention, le jury est souverain... (rires) Mais cette cause

semble peu probable. Nous avons simplement su mon-

trer que notre projet était très innovant. et c’est proba-

blement sur ce critère que le jury nous a attribué son

grand Prix 2012 de l’ANFH. et c’est une belle reconnais-

sance du travail réalisé.

Quels étaient vos objectifs ? D’abord, montrer que c'est un projet innovant, issu d'un

travail multi-équipe du CHU : soignants, universitaires,

centre de simulation, acteurs bénévoles. Il a été pos-

sible grâce à un soutien institutionnel fort : Direction

générale et CMe. ensuite, montrer aux décideurs que la

simulation permet de mieux former des soignants à des

tâches difficiles, obligatoires pour des raisons éthiques

et réglementaires. et, maintenant, il faudrait aller au-delà

et réaliser un grand projet fédérateur pour tous les ser-

vices du CHU car l'annonce de mauvaise nouvelle – pas

uniquement pour le cancer – est une problématique quo-

tidienne à l'hôpital. et elle concerne tous les soignants.

en conclusion, s’entraîner aux mauvaises nou-velles, c’est une bonne nouvelle ? Votre conclusion est quelque peu cynique ; mais elle

est intéressante. Pour certains malades atteints de

cancer, le cynisme est l’une des armes plus ou moins

efficaces pour lutter. Il y a sans doute aussi une forme

de déni. Mais rien n’est si simple. La bonne nouvelle,

c’est que la société s’efforce de lutter contre le can-

cer : les « Plans » successifs en sont la preuve. La

bonne nouvelle, c’est que des soignants du CHU

d’Angers se mobilisent, même si cela peut sembler

modeste, pour apporter aux malades une prise en

charge pleine d’humanité et d’efficience. n

Mauvaise nouvelle

Phot

os ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

70 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – Même dans les industries très « sécurisées », on n’en constate pas moins des acci-dents très graves, avec des consé-quences qui ne le sont pas moins... Marie-CHriStiNe MoLL − Vous avez

raison. Spontanément, on évoque tou-

jours l’industrie nucléaire et l’aéronautique comme des

secteurs « dangereux » : la catastrophe de Fukushima,

au Japon, ou les accidents d’avion. Plus un processus

est complexe, plus le risque d’erreur est élevé. Pour au-

tant, si l’on se réfère aux statistiques, on constate qu’au

nombre de passagers transportés, l’avion est l’un des

moyens de transport les plus sûrs ! L’accident du Japon,

malgré sa gravité et ses conséquences – que l’on ne sait

pas mesurer – ne vicie pas la démonstration... Comp-

tons le nombre de morts dans les mines de charbon de

nombreux pays...

en revanche, je constate deux choses qui sont irréfu-

tables. La première, c’est que si nucléaire et aéronau-

tique restent « sûres », c’est parce qu’elles ont été

conçues et gérées avec des conditions de sécurité qui

visent la sureté de fonctionnement. Dans la plupart des

cas, la défaillance a une origine humaine ; le système

est donc conçu pour faire face à ce type de défaillance.

et à l’hôpital, peut-on oser une comparaison ? Le mode de fonctionnement est différent. Les hôpi-

taux sont des entreprises « de service », basées sur

l’humain, gérant des activités complexes. Plus grands

sont les risques d’erreurs. en aéronautique comme dans

le nucléaire, la marge de décision de l’individu est très

étroite. À l’hôpital, la marge de décision d’un hospitalier

est considérablement plus importante, le risque aussi.

Dans un CHU comme Angers, on compte un événe-

ment indésirable grave tous les 5 jours, ce qui est dans

la moyenne nationale ; deux enquêtes françaises suc-

cessives l’ont mis en évidence. Ce sont, dans la plupart

des cas, des erreurs dont les conséquences sont réver-

sibles, mais certaines peuvent s’avérer mortelles. L’une

des causes principales de ces erreurs – 50 % toutes

catégories confondues – est l’interruption de tâche. Une

personne qui reprend une tâche après quelques minutes

d’arrêt prend un risque... Le cas de la préparation et de

l’administration des médicaments dans les services est

assez éclairant. On constate aussi que différents types

d’incidents ont souvent les mêmes types de cause... et

le même incident insignifiant dans une situation donnée

peut devenir dramatique dans une autre !

Constater, c’est bien, remédier, c’est mieux ? Je suis tout à fait d’accord. Pour remédier, il faut aussi

regarder, parler avec les gens et réfléchir. entre l’erreur

« simple » et l’erreur irréversible, il n’y a pas de diffé-

rence de nature mais de gravité. Personne n’est à l’abri

d’une erreur, même le professionnel le plus aguerri. Évi-

ter l’erreur irréversible, c’est réfléchir à l’avance : « s’il

m’arrive cela, même si c’est invraisemblable, qu’est-ce

que je dois faire ? » tout cela, il faut y penser avant,

Sécurité attitude

Entretien avecDr Marie-Christine Moll, Médecin délégué qualité gestion des risques

Médecin diplômé de l’école centrale Paris en matière de gestion des risques, le Dr Moll œuvre depuis 1991 pour la qualité et la sécurité des soins, tout d’abord dans les établissements de transfusion sanguine, puis à l’Hôpital, lors de la mise en place des démarches de certifi-cation. Elle est aussi commissionnée par la HAS pour mener à bien une étude natio-nale sur la simulation en santé, et coordonne un réseau qualité d’établissements sur l’hémi-région est des Pays de Loire.

L’erreur est humaine, c’est un fait : aucun système vraiment sûr ne s’attache à éradiquer toutes les erreurs. Ce serait une vaine

entreprise. Par contre, concevoir des systèmes qui savent apprendre de leurs erreurs et surtout, qui savent les récupérer alors que l’entreprise en vaut la peine.

711er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

dès maintenant. C’est cela la culture de la sécu-

rité. La sécurité a besoin de « repères ». Des

repères qui permettent d’identifier les situations

dangereuses. Celles favorisant l’erreur. Analyser

et comprendre les causes, c’est déjà y remédier.

traiter les causes les plus fréquentes, c’est aussi

modifier certains comportements dans certaines

situations que l’on a identifié. Un entraînement

intelligent à « l’exposition à l’erreur » est un élé-

ment pédagogique fondamental.

Le comportement d’un individu isolé est modifié

par ses interactions avec une équipe. La trans-

mission des messages est l’un des éléments

essentiels. L’émetteur doit produire des informa-

tions justes, non équivoques et compréhensibles.

Il doit aussi s’assurer que le message a bien été

adressé et reçu. L’erreur se produit quand le

« récepteur » n’a pas entendu le message, ne

l’a pas compris ou mal compris. La qualité des

transmissions est un des premiers éléments de

la sécurité. Voilà des choses auxquelles on peut

« remédier ».

et une fois que j’ai remédié ? Il faut « se préparer » à l’action. Il faut préparer la liste

des courses avant de préparer le repas. Ce n’est pas par

hasard que le concept de « check-list » vient de l’indus-

trie aéronautique. Au-delà de la liste des ingrédients, il

faut que la cuisinière sache quel menu elle va préparer.

Les soignants n’agissent pas sous forme d’une impul-

sion, ni seuls. Les actes doivent être pensés et réfléchis.

Les soignants doivent pouvoir anticiper collectivement

les problèmes auxquels ils devront faire face. La prépa-

ration à l’action va permettre de meilleures synergies

d’équipe. Les équipes synergiques sont des équipes

plus sûres.

dans « sécurité attitude », il y a un aspect culture... L’objectif de fond, c’est d’augmenter la fiabilité humaine.

« Sécurité attitude », c’est savoir activer, dans des

situations exposant au risque, certains comportements

qui vont permettre de limiter ou de récupérer des

erreurs. Ce sont des attitudes pragmatiques, simples

sur le principe, mais parfois nécessitant un changement

culturel important. Parfois, même le médecin doit avoir

l’humilité de dire « je ne suis pas sûr », « j’ai besoin

d’aide », « j’accepte que quelqu’un d’autre porte un

regard sur ce que je fais. »

Quel est le coût de la sécurité ? Dans les industries ultra-sûres, la sécurité des personnes

prime sur toutes les autres considérations. Peut-on affir-

mer aujourd’hui que cette préoccupation soit celle de la

gouvernance des établissements de santé ? Ce n’est

pas certain.

alors, la place de la sécurité à l’hôpital ? Avant la fin de notre entretien, je voudrais souligner que

la sécurité ne se résume pas à un service administra-

tif du CHU. La sécurité, c’est la volonté collective de

tous les hospitaliers de l’établissement. La sécurité ne

peut passer que par l’adhésion du management et des

médecins, qui sont partie prenante. et la clé de voûte

de l’ensemble, c’est avant tout l’implication forte de la

Direction générale et de la Commission Médicale d’Éta-

blissement, mais aussi la conscience de chaque individu

d’être un acteur au plus près du patient et de sa sécurité.

C’est la sécurité attitude... n

Sécurité attitude

Phot

o ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

L’objectif de fond, c’est d’augmenter la fiabilité humaine. « Sécurité attitude », c’est savoir activer, dans des situations exposant au risque, certains comportements qui vont permettre de limiter ou de récupérer des erreurs.

72 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

731er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – La recherche médicale, on connaît, mais la recherche paramédicale, c’est un peu flou, non ? daVid abadia-uGarte − Cela n’a rien de flou du tout.

Vous devez vous référer à deux circulaires de 2009*1

et de 2010*2 relatives au lancement des programmes

hospitaliers de recherche infirmière et paramédicale –

PHrIP. Yann Bubien, notre Directeur général, en a été

l’un des initiateurs. et Marie-Claude Lefort, notre Direc-

teur des Soins Coordonnateur général, a toujours été

très mobilisée sur ce sujet ; elle a même été lauréate

d'un PHrIP. Mais la recherche, ce n’est pas, bien sûr,

qu'un empilement de textes juridiques.

La recherche est une remise en question des pratiques

existantes : « Pourquoi on fait ce que l’on fait ? » La

recherche, c’est aussi une démarche et une méthode

scientifiques. en ce sens, la méthodologie de recherche

d'ordre médical ou paramédical est la même, ce qui

changera sera la problématique, c'est-à-dire l’objet

même de la recherche. Dans tous les cas, on se trouve

devant l’obligation de travailler en équipe, dans une dé-

marche horizontale plutôt que verticale.

La recherche paramédicale, tant au niveau local qu’inter-

national, mobilise un nombre de plus en plus important

de chercheurs. Pour ce qui nous concerne, les équipes

de recherche sont toujours des équipes multidiscipli-

naires, avec des professionnels médicaux, paramédi-

caux, des statisticiens, des « méthodologistes » et, si

besoin, nous faisons aussi appel à des compétences

extérieures.

Comment en définissez-vous la problématique ? Définir la recherche en quelques mots ou en quelques

formules n’est pas très aisé ; on court le risque d’être

excessivement réducteur. Chaque professionnel a

sa propre idée, ses propres questionnements... en

tout cas, toute problématique bien rédigée doit ap-

porter les éléments indispensables

pour pourvoir comprendre le but de

l’étude et persuader de son intérêt ;

cela nécessite un esprit de synthèse,

éviter d’être trop technique et éviter un

jargon scientifique.

À la fin de l’équation de toutes ces approches, on doit

pouvoir répondre à la question : est-ce que ça sera utile ?

en cas de réponse positive, tout n’est pas dit, bien évi-

demment, mais c’est déjà, me semble-t-il, un grand pas

en avant... car la recherche, a mon humble avis, n'est

ni plus ni moins qu'une approche scientifique, systéma-

tique et rigoureuse, qui a pour but d'augmenter le savoir

autour de la personne malade ou handicapée pour mieux

la soigner.

La formule ternaire classique : savoir, savoir-faire et faire

savoir est aussi valide en matière de recherche... Il faut

toutefois veiller à ce que la ou les méthodologies utili-

sées ne bloquent jamais la créativité. La recherche, je

crois, est un espace de liberté. C'est une question de

rigueur et pas de rigidité, car les dossiers doivent être

bien construits et avoir une cohérence, sans oublier que

ce n’est pas du tout la même chose dans le cadre d’un

appel d’offres national ou, plus encore, international.

Quel est votre rôle ? C'est un rôle transversal. Je travaille pour soutenir le

développement de la recherche en soins et l'améliora-

tion des pratiques des professionnels paramédicaux. Je

me positionne pour permettre l'essor d'une démarche

d'amélioration des connaissances, en accompagnant et

en faisant vivre la mise en avant de l'effort de recherche

dans toutes les dimensions du soin, que cela concerne

les pratiques professionnelles ou leur organisation.

D’abord, mon objectif est de mettre en œuvre une dé-

marche de coordination de toute l'activité autour de la

recherche paramédicale au CHU d'Angers.

La recherche est une remise en cause

Entretien avecDavid Abadia-Ugarte,Cadre supérieur de santé, Chargé de la coordination de la recherche en soins et de l’enseignement,Vice-président du comité scientifique pour les premières journées francophones de la recherche en soins

(*1) Circulaire n° DHOS/MOPRC/RH1/2009/299 de lancement des pro-grammes hospitaliers de recherche infirmière (PHRI)(*2) Circulaire N° DGOS/PF4/2010/258 du 9 juillet 2010 relative au pro-gramme hospitalier de recherche infirmière et paramédicale (PHRIP) pour 2011

Initiés par la DGOS en 2009, les programmes hospitaliers de recherche médicale s’avèrent particulièrement actifs au CHU d’Angers

74 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Dans un premier temps, je dois « prioriser » : à quel

moment et pourquoi on provoque l'émergence d'une

problématique plutôt que d'une autre. Certains choix

ne sont pas très aisés... ensuite, je dois « accompa-

gner » les futurs investigateurs paramédicaux : faciliter

leurs démarches, leur permettre de situer le projet de

recherche dans son contexte. en montrant les apports

de celui-ci à l’évolution des connaissances dans le do-

maine. Je dois aussi veiller à ce que l’on soit bien dans

le bon axe de travail pour aller au bout du dossier... et,

de temps à autre, un appui moral n’est pas négligeable.

ensuite, je dois encore « relativiser ». Un futur inves-

tigateur a toujours des doutes : est-ce que je ne suis

pas en train de travailler pour rien ? Mais un problème

insurmontable et impossible à gérer – on est au niveau

de ressenti – n’est peut-être pas aussi ingérable si l’on

s’y remet calmement. On revient

dans le réel. enfin, je pense qu'il

est important de « démystifier »

la recherche auprès des paramédi-

caux, montrer que c'est possible,

que l'on n'a pas besoin d'être un

génie pour bien réviser la « littéra-

ture » sur un sujet...

Je crois tout sincèrement que, même

si tout le monde n’a pas le profil d’un

chercheur, tout le monde peut avoir

une bonne idée. À ce titre, je dois

« attirer » les faiseurs de projets

éventuels. Donc : prioriser, accompa-

gner, relativiser si besoin et démysti-

fier la recherche auprès de paramé-

dicaux, voilà mon « job », enfin, une

partie. J’ai à montrer, d’abord, que

« c’est possible » et, ensuite, « ce

qui est possible » !

et plus concrètement... Depuis déjà dix ans, je travaille au

CHU d'Angers. Je suis bien identi-

fié auprès des collègues paramédicaux et je suis égale-

ment aisément accessible. On peut parler avec moi sans

préjugés et en toute simplicité pour m'exposer une idée.

Je ne porte jamais un jugement de valeur. en revanche,

je peux expliquer qu’un projet n’est pas encore tout à

fait mature et que l'on doit mieux définir la question. Il

faut qu'un projet soit bien structuré, mais l’objectif n’est

pas la contrainte, c’est la faisabilité du projet.

Avant de réaliser un projet, une sorte de préalable est

à observer : il faut du temps, il faut lire, il faut réflé-

chir... L’idée initiale surgit peut-être de façon instanta-

née, mais la mise en œuvre est plus longue et doit être

bien construite pour aboutir à l'élaboration d'un projet

de recherche. Cette construction se fait surtout grâce

au développement d'une synergie et d'une collaboration

méthodologique entre la Direction des Soins, la DrCI –

Délégation à la recherche Clinique et l'Innovation – et

les différents partenaires institutionnels du CHU d'An-

gers. C'est avant tout un travail d'équipe.

« Des chercheurs, on en trouve ; mais des trou-veurs, on en cherche ! » avait lancé le général de Gaulle. Qu’en pensez-vous ? Au CHU d’Angers, il y a les deux ! (rires) généralement,

on est d’abord chercheur puis, dans un second

temps, trouveur... Plus sérieusement, avant d'arriver

à un résultat valable, il y a souvent un long chemin à

parcourir. Nous devons rester modestes... ensuite, une

fois que l’on a une réponse, il faut partager son savoir,

il faut publier. Les revues scientifiques jouent un rôle

majeur dans cette démarche. Pour un investigateur, la

publication d'un papier dans une revue scientifique est

un aboutissement et, peut-être, le lancement d’une

nouvelle recherche.

Vous êtes l’un des organisateurs les plus impor-tants des Journées Francophones de la recherche en Soins, qui vont se tenir à angers les 11 et 12 avril prochains. Pouvez-vous nous en parler un peu ? C’est notre Directeur général, Monsieur Bubien, qui est

à l'origine des JFrS et l'idée d’un Congrès Internatio-

nal concernant les pays francophones a rapidement fait

l’unanimité. Ainsi, l'organisation des 1ères JFrS naît d'une

volonté forte de promouvoir la recherche, la collabora-

tion et le partage des connaissances et des meilleures

pratiques en soins infirmiers et paramédicaux.

Ces 1ères Journées Francophones de la recherche

en Soins auront lieu les 11 et 12 avril 2013 au Centre

des Congrès d’Angers. Ce congrès, éligible à la forma-

tion continue, sera le plus grand rassemblement fran-

cophone autour de la recherche en soins de l’année.

Professionnels de santé, chercheurs, industriels, pres-

tataires de santé à domicile ou étudiants sont invités à

venir y actualiser leurs connaissances auprès d’experts

reconnus dans le monde de la recherche en soins.

Le programme scientifique de ces journées est axé

autour de quatre grandes thématiques : expertise cli-

nique, pédagogie, méthodologie, et management et

stratégie. Comme vous le voyez, ce congrès consti-

tuera un événement majeur pour la communauté

paramédicale francophone. C'est une vraie marque

de reconnaissance pour la recherche en soins :

les Journées Francophones de la recherche en

Soins d’Angers vont marquer les esprits ! n

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Même si tout le monde n’a pas le profil d’un chercheur, tout le monde peut avoir une bonne idée

Phot

o ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

751er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – « Police (hospitalière), vos

papiers, s’il vous plaît ! »

GÉraLd GaSQuet − Les voilà... Ingénieur logisticien

depuis treize ans au CHU d'Angers, j'ai l'opportunité

de mettre en œuvre des démarches de progrès logis-

tique dans des domaines très divers : circuit des pro-

duits pharmaceutiques, stérilisation, biologie, hôtelier…

Actuellement en responsabilité du Département Appro-

visionnements et Logistique, je concilie le management

au quotidien des équipes avec des missions d'ingénierie

logistique. La richesse de mon domaine d'intervention

est, à mon sens, d'avoir le regard tourné vers les étoiles

et les pieds ancrés au sol, de concilier travail de terrain

et vision de la logistique de demain. Le rôle du logisticien

est de relier l'ensemble des chaînons des différents pro-

cessus logistiques.

depuis trois ans maintenant, le CHu d'angers a

mis en place un nouveau métier « référent logis-

tique de pôles »... Quatre pages pour la seule défi-

nition du poste, c’est sensiblement plus compli-

qué que de devenir pilote d’essai à la NaSa...

effectivement, c’est tout à fait comparable... (rires) Plus

sérieusement, ce profil de poste est le reflet de la pro-

fessionnalisation et de la diversité des fonctions logis-

tiques, mais également des nombreuses compétences

requises afin de mener ces missions. Je reconnais que

ce profil de poste est un peu détaillé, mais il s'agissait

d’un nouveau poste, avec une nouvelle organisation

logistique. Nous avons eu la volonté de l’identifier de

manière aussi précise que possible, d’où une volonté

d’exhaustivité. Au nombre de vingt, les référents logis-

tiques sont répartis au sein des cinq pôles médicaux,

des deux pôles médico-techniques – biologie pour l’un

et pour le second : pharmacie, imagerie, stérilisation – et

des blocs opératoires.

Ces référents ont été soigneusement choi-

sis par un jury composé d'un directeur des

soins, d'un cadre supérieur de santé et de

moi-même, et cela à partir de critères fai-

sant ressortir une exigence forte pour des compétences

relationnelles, la connaissance des services, la connais-

sance des produits et des procédures, sans omette

la capacité d’organisation. essentiellement aides-soi-

gnants, les référents sont formés à la logistique avec

une grande exigence. et aujourd’hui, après trois ans de

fonctionnement, nous avons un système très largement

opérationnel.

rattachés hiérarchiquement au cadre supérieur de santé

du pôle, les référents logistiques sont les interlocuteurs

privilégiés entre les équipes soignantes et la logistique

des prestataires internes du CHU : département appro-

visionnements, magasin général, biomédical, services

techniques, restauration, blanchisserie... Dans le cadre

de leurs missions, ils ont une grande autonomie d'action

et d'organisation.

un référent, pour quoi faire ?

Ils centralisent et anticipent les commandes avant de les

adresser dans les services. Avec l’expérience, chaque ré-

férent connaît chaque personne dans son pôle et chaque

personne connaît « ses » référents, qui sont identifiés.

Leur rôle est de piloter les flux et de réapprovisionner

les unités de leur pôle. On sait donc immédiatement à

qui s’adresser. À cet égard, le référent est une personne

ressource. Pour faciliter la circulation des informations

et produits – les soignants ne sont pas formés à la lo-

gistique –, les référents « font passer le message » !

L'ensemble des tâches logistiques qu'ils accomplissent

permet aux équipes soignantes de se recentrer sur leurs

missions auprès des patients.

Entretien avecGérald Gasquet,Ingénieur logisticienPôle ressources matérielles

La logistique consiste en la planification, la mise en œuvre et le contrôle de l’efficacité et du bon fonction-nement des flux et stockage de produits, et des informations qui leur sont liées, depuis le point d’origine du produit jusqu’à son point de consommation, en vue d’une satisfaction complète et maîtrisée des besoins du client (Council of Logistics Management)

Les référents logistiques : un nouveau métier pour une nouvelle organisation

Relier les chaînons

Phot

o ©

Cat

herin

e Jo

uann

et -

CH

U A

nger

s

76 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

travaillant en échange avec différents partenaires, ils

sont à l'écoute des soignants et réactifs à leurs de-

mandes. Ils savent s'adapter à tous nouveaux change-

ments, faire face aux demandes particulières, anticiper

les besoins des unités afin d'éviter les ruptures de stock,

intégrer les différentes contraintes ainsi que le code des

marchés publics, les budgets… La gestion des stocks,

des commandes et la réception de tous matériels néces-

saires à la bonne marche des unités – hôtellerie, pape-

terie, biomédical, dispositifs médicaux pour les blocs et

quelques secteurs… – font partie de leur quotidien. en

association avec les cadres de gestion de leur pôle, leur

participation à l'élaboration des budgets permet d'antici-

per les besoins nouveaux.

Leurs actions d'amélioration permettent de satisfaire les

besoins courants des services en supprimant les dota-

tions imposées. Ainsi ces « gains » bénéficient-il aux

patients ou à leur pôle : achat de déambulateurs, vais-

selle ergonomique...

Vous disiez « au bout de trois ans, je respire. » Maintenant, votre vie est devenue « un long fleuve tranquille... » en quelque sorte, sauf que, dans le film comme dans

la réalité, le titre ne correspondra pas entièrement au

scénario ! effectivement, porter un projet de cette

ampleur est très prenant et pas-

sionnant, mais « souffler un peu »

n'est pas dans ma nature et ne signifie

pas, heureusement, n’avoir plus rien

à faire... Management opérationnel

des services approvisionnements et

transports : réunions hebdomadaires

avec les N-1, prise de décisions au

quotidien, validation des priorités des

équipes... Management fonctionnel

des référents logistiques. réunions

mensuelles, portant aussi bien sur les

sujets de fond que pour répondre à

des problématiques ponctuelles. Vali-

dation de référencement de nouveaux

produits, lien avec le Département

achats, sollicitations ponctuelles de

tous ordres... Bref, même si le service fonctionne parfai-

tement, il reste toujours de quoi « s’amuser » ! C’est l'in-

génieur logisticien qui manage l'ensemble des maillons

de la chaîne ; et aucune rupture n’est acceptable ! De

plus, et pour reprendre la métaphore, mon regard étant

tourné vers les étoiles, je compte bien m'appuyer sur

l'ensemble des compétences logistiques afin de mener

à bien de nouveaux projets au profit du bien-être des

patients, de l'amélioration des processus logistiques.

Mais tout se fait de manière automatique... tout n’est-il pas informatisé ? Bien sûr ! Heureusement ! Un des exemples de tâches

sans réelle valeur ajoutée était l'existence de nom-

breux formulaires « papier », de diverses validations

des demandes de consommables, de ressaisies dans

différents logiciels… Maintenant, tout est sur internet

– portail d'approvisionnement PAD - UniHA –, y compris

les signatures. Il ne manque que la carte bancaire, mais

celle-ci est remplacée par une enveloppe budgétaire.

L'ensemble du processus, du pôle jusqu'au fournisseur,

est dématérialisé. Les référents ont accès au catalogue

approvisionnements. Ont été également prévues des

procédures d’urgence… même si nous n'y avons que

très peu recours, grâce à la bonne gestion réalisée par

les référents logistiques !

Ce nouveau métier est-il valorisé ? effectivement, l’un des objectifs est de valoriser le rôle

de « référent Logistique de Pôle » et de valoriser aussi

les femmes et hommes qui en sont chargés, ainsi que la

disponibilité dont ils font preuve. Nous avons prouvé que

notre démarche était valide et que ce métier se justifiait

entièrement. Nous avons démontré, je pense, l'apport

qu'ont les référents logistiques au sein de leur pôle, que

cela s'inscrit dans une démarche plus globale de type

« Lean management ». responsabilisation, implication

des différents acteurs du processus d'approvisionne-

ment des unités de soins, la logistique : un métier, des

compétences. La cohérence de l'ensemble du proces-

sus s'appuie sur des interlocuteurs « métiers » et mana-

gés en « transversalité ». La clé de voûte du système est

l’interlocuteur unique !

Vous venez d’évoquer le « Lean management ». encore du management ? Oui. Même sans en connaître le terme, vous savez

certainement de quoi il s’agit. Initié par toyota, le Lean

Management est l’élimination des gaspillages qui ré-

duisent la performance d'une entreprise. transposé aux

établissements de santé par Mayo Clinic, aux États-

Unis, sous la dénomination de « Lean Healthcare », puis

dans de nombreux établissements canadiens et québé-

cois – Lean santé, Lean hospitalier –, cette démarche

managériale concilie implication de personnel et amé-

lioration des processus en se recentrant sur la chaîne

directrice de la valeur. Les Japonais se réfèrent aussi

au Kaizen. tout un programme ! Même si nous n'envi-

sageons pas de former prochainement les référents au

japonais (rires), cela ne nous empêche pas de nous ins-

pirer de ces bonnes pratiques afin de poursuivre nos dé-

marches d'amélioration continues. n

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Valoriser le rôle de « Référent Logistique de Pôle » et valoriser aussi les femmes et hommes qui en sont chargés, ainsi que la disponibilité dont ils font preuve

771er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

DH magazine – Quels choix énergétiques pour le CHu d’angers ? « le cHu, qui étend son parc d’activité sur plus de trente

hectares, et dont les installations, vieilles de plus de

trente ans, ont recours à des technologies vieillissantes,

se doit d’anticiper l’expiration de son contrat d’exploita-

tion de chauffage à la fin 2013 », explique edmond Va-

paille, Directeur des investissements et de la logistique

du CHU. C’est ainsi que l’hôpital s’est lancé dans un pro-

jet de production d’énergie à partir de biomasse, intégré

dans un contrat plus large de gestion et d’exploitation

de génie thermique. Dalkia France, dont la gestion de

l’énergie et la maintenance des installations techniques

et énergétiques est le cœur du métier, a été choisi

comme partenaire sur ce projet d’envergure. La nou-

velle installation sera mise en service à l’horizon 2014,

soit deux ans et demi après le lancement du projet. Le

CHU agit dans le cadre d’un partenariat public-privé, et

a bénéficié du soutien du Fonds Chaleur de l’ADeMe.

Le bois, énergie renouvelable de demain ? On définit par « biomasse » l’ensemble des matières or-

ganiques qui vont servir soit à produire du combustible

pour les chaudières, soit du carburant. Le bois est une

composante de la biomasse, tout comme le fourrage

ou la paille. Le CHU d’Angers a fait le choix du bois, le

plus ancien des modes de chauffage, qui fait son grand

retour, à travers toute l’europe, sur le devant de la scène

des énergies renouvelables. Comment peut-il en être

ainsi ? L’accroissement naturel de nos forêts représente

un volume de 103 millions de m3 de bois par an.

tant que la consommation annuelle sera en deçà de

cette valeur, nos forêts seront préservées et le bois

restera une source d’énergie renouvelable à privilégier.

et, dans ce domaine, la France n’est pas mal lotie : son

parc forestier couvre 15 millions d’hectares, soit plus

d’un quart du territoire national. 35 millions de m3 sont

consommés chaque année par la filière bois-énergie, ce

qui en fait la deuxième énergie renouvelable derrière

l’énergie hydraulique. La consommation pourrait donc

doubler sans mettre aucunement la filière en péril. Outre

l’impact positif sur l’environnement grâce à la réduction

des émissions de CO2, l’approvisionnement en bois

se fait dans un rayon maximum de 100 km autour de

l’établissement, favorisant ainsi le développement des

énergies et l’emploi local. Comme le souligne edmond

Vapaille, « il faut se départir des énergies fossiles ! »

La fin des fossiles

Entretien avecEdmond Vapaille,(en photo)Directeur des inves-tissements et de la logistique

Jérôme Aguesse,Directeur de Centre, Dalkia France

La biomasse : une solution d’avenir

Le CHU d’Angers, dans le cadre de sa démarche de développement durable initiée il y a plusieurs années déjà, a commandité un vaste projet de rénovation et d’optimisation de son système de chauffe...

78 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Peut-on vraiment rendre l’hôpital moins énergi-vore ? Pour répondre aux besoins en énergie de l’hôpital, qui

s’élèvent à 42 000 MWh par an, avec des ratios compris

entre 350 et 600 kWhep/m2/an selon le type d’activité et

les bâtiments – ratios qui se situent dans la moyenne du

secteur qui est de 450 kWhep/m2/an –, le système de

chauffage s’appuyait jusqu’à présent sur une chaufferie

principale au gaz, à laquelle était adossée une cogénéra-

tion. Compte tenu des développements actuels du CHU,

les besoins totaux sont amenés à atteindre environ

47 000 MWh à l'horizon 2014, année prévue pour la mise

en service. La nouvelle installation biomasse permettra

de couvrir environ 90 % des besoins d'énergie pour le

chauffage et la production d'eau chaude sanitaire, soit

un impact de l'ordre de -150 kWhep/m2/an sur le site.

« Dalkia france met également en œuvre un vaste projet

de réduction des consommations de chauffage du cHu,

avec un objectif de réduction de 25 %, se traduisant par

une baisse supplémentaire de 10 % du ratio d'énergie

primaire consommée par m² », précise Jérôme Aguesse.

La chaudière biomasse, comment ça marche ? « il s’agit d’un procédé industriel simple, nous explique

Jérôme Aguesse, directeur de Centre. les deux chau-

dières biomasse du cHu sont alimentées par des pla-

quettes forestières, approvisionnées trois à quatre fois

par jour en saison hivernale – contre deux à trois fois

par semaine en saison estivale. le bois est acheminé

jusqu’aux chaudières grâce à des échelles racleuses

qui réalisent l'extraction de la biomasse. cette dernière

tombe sur un tapis l’emmenant directement à l'entrée

des chaudières, qui prélèvent la quantité dont elles ont

besoin pour fonctionner. » La combustion de la biomasse

dégage de l’énergie qui permet de chauffer de l’eau

envoyée sur le réseau de chaleur, laquelle va chauffer

les différents espaces, ainsi que les blocs opératoires du

CHU. Le système garantit une stabilité de la production

de chaleur sur le site. en cas de panne, une chaufferie

gaz prend le relais automatiquement, sans interruption

de service pour le CHU.

Quel impact sur l’environnement ? La biomasse rend possible une réduction 15 000 tonnes

de CO2 par an pour le CHU d’Angers, limitant ainsi les

émissions de gaz à effet de serre. Sur le plan sanitaire,

conformément aux critères drastiques imposés par le

Fonds Chaleur de l’ADeMe, une filtration optimale sera

mise en œuvre dans un souci de protection de l’envi-

ronnement. « les seuils que nous respecterons seront

encore plus exigeants que ceux imposés par l’aDeMe,

affirme edmond Vapaille. nous sommes également en

train de réaliser notre bilan carbone. » Jérôme Aguesse

de préciser : « le traitement des fumées s’appuie sur

la complémentarité de trois technologies : un multicy-

clone, un filtre à manche puis un laveur de fumée. la ré-

glementation fixe la limite des émissions de poussières

à 30 mg/m3. l’aDeMe fixe son seuil à 20 mg/m3 et Dal-

kia s’engage à atteindre moins de 20 mg/m3. »

une solution d’avenir ? Oui, sans aucun doute. La chaudière biomasse est une

solution efficiente et pérenne sur le plan écologique,

mais qu’en est-il de l’aspect financier ? « l’investisse-

ment s’élève à 16 millions d’euros. cela peut sembler

important, mais il s’agit d’une rénovation complète des

installations, qui inclut notamment la chaufferie bio-

masse. Grâce à la subvention de l’aDeMe, nous ciblons

5 à 10 % d’économies sur la production de chaleur. il

faut envisager le projet dans sa globalité et le considé-

rer en regard de la modernisation et de l’optimisation

de l’établissement. Dalkia s’engage sur 25 % d’écono-

mie d’énergie chauffage ; de plus, la modernisation des

équipements permet de baisser significativement les

coûts d’exploitation de l’ensemble du périmètre », note

Jérôme Aguesse.

Persiste et signe ? « si c’était à refaire, nous nous investirions dans ce

projet sans hésiter ; simplement, nous envisagerions

un montage juridique moins contraignant que le parte-

nariat public-privé, tempère edmond Vapaille. au-delà,

nous parions sur l’avenir, avec une évolution du prix du

bois sensiblement moindre que celle du prix du gaz, et

le développement de l’emploi local. » Alors, pourquoi

pas vous ! n

rePOrtage DH : CHu d'angers (maine-et-LOire)

Phot

o ©

Alb

ert -

CH

U A

nger

s

791er trimestre 2013 / DH magazine 145

Questions à éric cambon, ingénieur des services techniques du cHu d’angersParoles d’expert

Éric Cambon, comment est née l’idée d’installer un nouveau réseau pneumatique au CHu d’angers ? À dire vrai, les instal-lations pneumatiques existent dans le CHU depuis 1980. Celles-ci se sont notamment développées dans les années 1990 pour le transport de sang et de divers échantillons. tou-tefois, les laboratoires du CHU étaient écla-tés sur trois sites. Si

l’ancien réseau de pneumatiques a été conservé, la perspective d’un regroupement des laboratoires sur un seul bâtiment pour mai 2011 a relancé l’intérêt de la mise en place d’un nouveau réseau davantage adapté à cette nouvelle configuration. Aujourd’hui, le CHU dispose de deux réseaux de pneumatiques pour neuf kilomètres de lignes répartis sur trente hectares.

en quoi consiste le système pneumatique à pochettes et pourquoi ce choix ? Il résulte d’abord d’un choix institutionnel de partir sur un « tout pneumatique ». Auparavant, d’autres systèmes étaient largement utilisés notamment le transport des échantillons sanguins par un véhicule du laboratoire. L’avantage essentiel de l’installation pneumatique est de permettre un meilleur lissage des flux. Dans ce cadre, le système à pochettes, lequel consiste à transporter les analyses biologiques à l’intérieur d’une pochette plastique à usage unique, répondait davantage à nos besoins. Nous souhaitions en effet que les stations de pneumatiques soient directement situées au sein des unités de soins. Il fallait donc un système qui prenne le moins de place possible et soit moins contraignant au niveau des travaux d’où le choix du pneumatique unidirectionnel à pochette sur le système cartouche multidirectionnel. Le coût était en outre inférieur à l’installation. Le débat a été vif car il y a aussi des inconvénients à ce système notamment le fait de jeter la pochette à chaque envoi ou encore le fait que, pour bien fonctionner, celui-ci exige une certaine rigueur de la part de ceux qui remplissent et envoient les pochettes.

Quels sont les bénéfices de cette installation pneumatique ?Je suis globalement satisfait de ce système avec lequel nous réalisons près de 1000 envois par jour. Certains éléments, spécifiques à notre CHU, sont particulièrement intéressants : les arrivées sont concentrées en un seul point et le système informatique de gestion des envois et de supervision est particulièrement performant. grâce à lui, l’opérateur du laboratoire peut avoir une vision sur l’ensemble des quatorze lignes grâce à un code couleur très parlant (envois en attente, envois en cours, etc..).

Ce système permet également de fixer une priorisation des envois ce qui était l’une de nos exigences afin de pouvoir être certain de recevoir certains échantillons le plus rapidement possible. Pour faire face aux pannes, nous nous sommes également assurés que chaque bâtiment soit traversé par au moins deux lignes. Ainsi les utilisateurs ont la possibilité d’utiliser une autre ligne en mode dégradé à moins de 60 mètres de leur service. n

cHu d’anGErs lE cHoiX dE l’installation d’un systèME PnEuMatiQuE à PocHEttEs sWissloG

Le CHU d’Angers a opté pour le système pneumatique monodirectionnel Urgence 21 swisslog, utilisant des pochettes à usage unique. Ce système, en service depuis mai 2011, permet l’envoi des prélèvements sanguins depuis 116 stations. Chaque unité de soins dispose ainsi d’une ligne raccordée à une station d’arrivée unique concentrée en seul lieu : la station de réception du PBH (Plateau Biologique Hospitalier). Un processus innovant.

Phot

o ©

C. J

ouan

net -

CHU

Ang

ers

Entretien réalisé par Guillaume Lefoulon, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

80 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

82

86

89

91

Centre HospitalierRégional Universitaire

Tirer l’hôpital vers le haut entretien avec Bernard dupont,directeur général

Le patient n’est pas la propriété du médecinavec le Pr Bertrand Fénoll

Ici, chercheurs !avec le dr dominique Mottier et Rémi Brajeul

Tout n’est pas écrit d’avance dans les étoilesavec nathalie Fremin

80 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Phot

o ©

Fré

déric

le M

ouill

our

811er trimestre 2013 / DH magazine 145

CHrU de BrestBretagne occidentale

811er trimestre 2013 / DH magazine 145

Loin d’être une forteresse hospitalière battue par les flots, le CHRU de Brest est naturellement tourné vers son territoire. Au service des malades, il intervient en proximité comme en recours ! Il n’en demeure pas moins la poutre maîtresse de l’organisation hospitalière de l’ouest de la Bretagne.

82 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

trajEctoirE DH magazine – d’aSH, infirmier, à directeur général de CHu, cela fait une trajectoire aussi impressionnante que peu fréquente.berNard duPoNt − Pas si impressionnante ! et mon

parcours individuel n’a pas d’importance. S’il faut lui trouver

un sens particulier, je dirais qu’il témoigne de la capacité de

l’hôpital public, du service public hospitalier, à être ce qu’on

appelait un ascenseur social. Cela reste vrai. Autre aspect, il

montre que l’opposition sans cesse évoquée entre soignants

et direction, entre soins et gestion ne peut être que virtuelle.

Soignant il y a 30 ans, je reste dans le même esprit, avec une

préoccupation constante : au-delà des intérêts particuliers, des

corporatismes parfois, l’hôpital public doit être au service du

malade, de la population. Ni au service des professionnels qui

font l’hôpital, ni de son compte de résultat !

Dire, quand même, que mon parcours professionnel n’aurait

pas été possible sans quelques figures qui l’ont orienté : Jean-

Michel Krivine, chirurgien, militant, qui fut mon chef de service

il y a 35 ans, le syndicalisme, Vincent Le taillandier de gabory,

Directeur de l’hôpital d’eaubonne, qui m’a « envoyé faire

l’ensP », Michel Moujart, qui m’a appris le métier de directeur,

Paulette guinchard, ministre, ancienne infirmière, dont j’ai été

le chef de cabinet… et d’autres, trop nombreux pour être cités ;

croisés il y a 40 ans, comme plus récemment…

Atypique mon parcours ? Peut-être, mais il se voudrait cohé-

rent : serviteur du service public hospitalier ! Pour autant, je

n’aurais jamais pensé devenir directeur d’hôpital. Mon ambi-

tion de soignant était plus immédiate ; j’étais passionné par

l’imagerie, par les soins d’urgence... Mais, à chacun, il appar-

tient de saisir les opportunités, d’être curieux, dans la vie pro-

fessionnelle comme personnelle.

Entretien avec :Bernard Dupont, Directeur général

Tirer l’hôpital

vers le haut

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

Atypique mon parcours ? Peut-être, mais il se voudrait cohérent : serviteur du service public hospitalier !

Faire comprendre les évolutions technologiques et sociales est rarement chose aisée

831er trimestre 2013 / DH magazine 145

Phot

o ©

Fré

déric

le M

ouill

our

PolitiQuE dans un CHu, quand on vous dit « politique », que répondez-vous ?Politique ? C’est une préoccupation naturelle ! Le CHU

est un service public. et qu’est-ce qu’un service public

sinon une organisation éminemment politique ? Lorsque

le CHrU de Brest s’intéresse à la santé sur le territoire,

dans la cité, il est d’abord dans un rôle politique. Ce rôle

auprès de la population amène le directeur d’hôpital à

travailler avec des élus, élus médicaux – n’oublions pas

cet acteur essentiel, majeur, qu’est le président de la

CMe – et élus politiques : maire, député, président du

Conseil général. Chacun a ses propres contraintes :

lorsque l’on est élu par ses concitoyens pour gérer la

cité, la nation, on gère des services publics dans une my-

riade de contraintes contradictoires – comme l’hôpital !

Le service public hospitalier en fait partie, mais doit par-

ticiper aussi aux solutions. Un directeur d’hôpital qui ne

se verrait que comme un technicien – des marchés, des

finances, de la DrH… – s’ampute d’une partie de son

métier. Il en oublierait l’essentiel, ce qui en fait la parti-

cularité essentielle, alors que le métier de directeur, c’est

d’abord d’être un acteur de santé, proactif dans la vie

publique. Le contact, la coopération avec les élus font

partie d’un tout. Leur attente à l’égard de l’hôpital est

très forte ; même si certains en ont une image parfois

erronée. Il nous importe de les informer, parfois de se

« former » réciproquement. C’est à ce prix, pourtant bien

modeste, qu’ils s’impliquent volontiers. La santé est un

élément fort de la vie politique ; c’est aussi une préoccu-

pation majeure des citoyens avec le travail et l’éducation.

tErritoirE Vous avez dit « territoire » ?Situé au bout du monde – finis terrae – et souffrant d’un

relatif enclavement, un hôpital comme le CHrU de Brest

est nécessairement très tourné vers son territoire ! C’est

sa raison d’être. Si un CHU oublie qu’il est CH, il sape son

fondement essentiel. Si un CH oublie qu’il n’existe que

parce qu’il sert un territoire, une population, il perd tout

sens ! Obnubilés par des leurres économiques, par des

techniques de pointe, par une « sociologie des élites »,

on a peut-être oublié d’ancrer l’église au milieu du village !

Le CHU, les hospitaliers sont d’abord au service des

malades, en proximité comme en recours !

La concentration des compétences, des moyens écono-

miques, des équipements dans des forteresses hospita-

lières au milieu de déserts sanitaires a parfois pu paraître

justifiée économiquement, elle a pu aussi s’appuyer

sur des apparences de sécurité, de qualité. On voit au-

jourd’hui que cela n’est pas toujours aussi exact. Les

orientations de la mission Pacte de confiance, deman-

dée par Marisol touraine à Édouard Couty, me semblent

bien plus pertinentes ! Mais il faudra conduire une vraie

révolution culturelle : chez les décideurs, dans les ArS,

comme chez les hospitaliers : médecins, partenaires

sociaux, directeurs… retrouver des équilibres raison-

nables ne va pas être simple !

aMbulatoirE dix-huit ans à peine après l’inauguration de la

« Cavale blanche », il faut déjà reconstruire ! on

aurait oublié les urgences et l’ambulatoire ?

La conception de l’hôpital de la Cavale blanche a près de

30 ans : conçu dans les années 70/80, inauguré en 1996,

cet hôpital est le témoignage de la qualité, de la capacité

d’anticipation des collègues qui l’ont réalisé. Cela dit,

après un tiers de siècle, les urgences ont explosé, les

techniques médicales se sont transformées. et l’hôpital

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

84 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

8 rue d’Ouessant – BP 46138 - 35761 ST GREGOIRETél : 02 99 68 85 85 / Fax : 02 99 68 70 33 Email : [email protected]

8 rue d’Ouessant – BP 46138 - 35761 ST GREGOIRETél : 02 99 68 85 85 / Fax : 02 99 68 70 33 Email : [email protected]

Electricité Industrielle & tertiaireRéseaux et systèmes

d’informationSolutions globales de communication

Réseaux de communication Haut Débit

Système de sécurité & suretéEnergies Renouvelables

Cegelec Brest10 bis Bd Gabriel Lippmann – BP 155

29803 BREST Cedex 9T. 02 98 42 70 00 - F. 02 98 42 70 01

www.cegelec.com

REMERCIEMENT

EMPlACEMENT RéSERvé

FAlhER JEAN-YvES SAS Menuiserie Kerhélène Bonen

22110 ROSTRENENwww.menuiserie-falher.com

[email protected]

851er trimestre 2013 / DH magazine 145

de la Cavale, s’il porte encore beau, même s’il fait illu-

sion, est devenu très inadapté à la chirurgie ambulatoire :

les services d’hospitalisation, les blocs opératoires,

les réanimations devraient pouvoir connaître un traite-

ment… chirurgical ! Parallèlement, l’hôpital Morvan,

l’hôpital de Carhaix doivent aussi s’adapter… Si la mé-

decine évolue, alors que les besoins, les matériels, les

organisations évoluent rapidement, les murs ont parfois

du mal à suivre. L’attente de la population en matière

de soins ambulatoires s’est aussi avérée beaucoup plus

importante que les médecins l’avaient prévu. C’est aussi

une question d’organisation et de culture médicale. Au-

jourd’hui, la demande est plus forte que l’offre au CHrU.

PÔlEs Les pôles comme stratégie à tout faire ? Plas-tiques, polymorphes, adaptables…Je crois à la capacité des professionnels à se prendre en

main ! C’est sans doute un effet de mon parcours. L’idée

d’une direction toute puissante, décidant de tout, ayant

un avis sur tout, dans le détail, me semble illusoire.

et contre-productif : pour l’organisation des soins, les

conditions de travail, l’efficience médico-économique.

Je crois à la responsabilisation des acteurs. Le pôle me

semble la bonne échelle, en tout cas plus pertinente que

ces immenses organisations que sont les CHU. Pour des

établissements au périmètre moins large, la question

mérite d’être posée. Mais je ne suis pas un partisan de

l’uniformité, de l’hôpital local au CHU.

L’effet taille a de nombreux avantages, de mise en com-

mun, mais aussi et surtout de solidarité, au niveau du ter-

ritoire notamment. C’est pourquoi je suis partisan d’un

« hôpital public de territoire » solide et solidaire, plutôt

que de multiples féodalités qui, plus sûrement que la

dureté économique, tuent le service public en donnant à

chacun l’impression d’être autonome. L’impression seu-

lement, car en vérité… c’est souvent l’indépendance de

l’indigent ! Même si cela pose des questions difficiles,

notamment pour les directeurs, cette réflexion exigeante

doit être menée. encore une fois, posons la question

principale : qu’est-ce qui est bon pour les malades ? et

pas seulement ceux des grands centres urbains.

Dans ce cadre, le pôle, notamment de territoire, retrouve

son sens : il positionne les acteurs de proximité en

responsabilité ; avec des délégations de gestion rigou-

reuses, il rapproche les questionnements de gestion de

ceux essentiels des soins. Dans un cadre déterminé, par

des mécanismes de subsidiarité, il rend aux profession-

nels la maîtrise de leur quotidien, de leur organisation,

dans un objectif qui, lui, reste celui fixé par les pouvoirs

publics, détenteurs d’une légitimité républicaine. Le mé-

decin-chef de pôle, le cadre du pôle doivent ainsi devenir

des acteurs majeurs, les directeurs retrouvant alors leur

rôle plus politique de facilitateurs, plus technique d’orga-

nisateurs du système…

intEndancE Évolution rapide, changements fréquents, com-plexité croissante, obsession de la qualité et des risques… tension entre 6 500 salariés… L’inten-dance suit-elle ?Il n’est jamais aisé de faire comprendre que le monde

évolue et, surtout, que chacun est concerné et impliqué

dans cette évolution. Il faut rencontrer les salariés sur leur

lieu de travail et être extrêmement attentif à la dimen-

sion humaine. Mais, aussi, savoir décider… Chaque hos-

pitalier est aussi un utilisateur qui exige que le service

public s’adapte à ses attentes : qualité de l’organisation,

sécurité, prise en charge du patient, évolution technique,

recherche... Les agents du service public – et les hospita-

liers tout comme d’autres professions – craignent la perte

d’habitudes, le changement d’organisation, de vie… Pour-

tant, je pense que les hospitaliers se sous-estiment, ils

sous-estiment aussi bien leur volonté et leurs capacités

d’adaptation. et il ne faut pas oublier, dans la colonne des

« plus », le fort esprit local, l’engagement et l’attache-

ment aux valeurs du soin, à l’établissement et à la région.

vision Votre vison de l’hôpital à 5 ans ?Notre établissement est devenu l’acteur majeur de

l’organisation territoriale de l’ouest de la Bretagne. Ce

mouvement se poursuivra sans que les autres établis-

sements ne perdent leur autonomie : réseaux, équipe-

ments partagés… Le CHrU doit rester l’acteur de réfé-

rence pour les activités « pointues » et doit faire monter

le niveau des prises en charge de manière cohérente.

Comme avec le nouvel « Institut de Cancérologie de Bre-

tagne Occidentale » – ICBO –, dont la construction est

un enjeu majeur, encore sous-évalué, pour l’ouest bre-

ton… enfin, et je ne l’ai nullement oubliée : la recherche.

Celle-ci ne s’arrête pas aux murs du CHU mais implique

tous les moyens du territoire. C’est un des points forts

du CHrU. Le Professeur Mottier, président du CIC, vous

en parlera plus longuement ! Notre objectif à tous est

simple : tirer l’hôpital vers le haut. n

L’idée d’une direction toute puissante, décidant de tout, ayant un avis sur tout, dans le détail, me semble illusoire

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

86 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

DH magazine – À quoi sert un prési-dent de CMe ?

bertraNd FÉNoLL − La question

mérite effectivement réflexion…

(sourire) Je dirais que le président

de la Commission Médicale d’Éta-

blissement est « une sorte de garant

du projet médical, de référence de

la communauté médicale ». Cette

formule me semble bien convenir à la réalité que je

connais. Par ailleurs, je constate aussi l’individualisme

des médecins. et j’ai l’impression qu’ils le sont de plus

en plus. D’où l’importance du président de la CMe pour

renouer des liens qui apparaissent fragilisés. La com-

munauté médicale n’existe pas en soi. Pour qu’elle ait

une réalité tangible, il lui faut un projet commun. Une

cohérence d’ensemble de toutes les actions et projets

de chaque médecin est nécessaire ; il faut éviter « que

ça parte dans tous les sens » !

doit-on vous considérer comme une interface entre la communauté médicale et les « person-nels non médicaux » et, le cas échéant, « l’exté-rieur » ?

Une interface, c’est la réponse à deux systèmes qui ne

se parlent pas, ce qui n’est pas la réalité. en matière mé-

dicale, je préfère de nouveau parler

de création ou de renforcement des

liens. tout projet de médecins doit

être décliné en projet de soins par

les paramédicaux, et les médecins

n’ont pas toujours pleine conscience

des conséquences que peuvent

avoir, pour les soignants, la modification d’une organi-

sation médicale, une optimisation de certaines prises

en charge, une modification du parcours de soins des

patients ou le développement d’une nouvelle activité. La

démarche médicale et paramédicale devrait s’effectuer

dans le même temps et c’est une particularité française

que l’une succède à l’autre. Un des rôles du président de

CMe est de le rappeler et d’encourager les médecins à

toujours plus de travail commun avec les paramédicaux,

que ce soit dans la mise en œuvre pratique de projets

ou sur le plan plus institutionnel au cours de séances

communes de la CMe et de la CSIrMt.

territoire ici, territoire là… N’y en a-t-il pas un peu trop ?

trop, pas assez, je ne sais pas... Il ne s’agit pas de quan-

titatif mais de qualitatif… Ce que je sais – et c’est ma

conviction profonde –, c’est que la préoccupation du

« territoire sanitaire » fait partie intégrante de la fonction

de président de la Commission Médicale. Cela fait partie

de sa « responsabilité populationnelle », selon la formule

actuellement utilisée. Le Président que je suis, de même

que le Directeur général, sont les serviteurs – et les pro-

moteurs – de l’organisation sanitaire au sein du territoire

de rayonnement de l’établissement. et ce territoire est

pour un CHU la somme des territoires de proximité,

des territoires « pertinents ». Il est de plus nécessaire

d’assurer une cohérence sanitaire de chaque bassin de

vie avec le territoire voisin, tant dans le domaine sani-

taire que médico-social. Aujourd’hui, l’hôpital, fut-il CHU,

n’est qu’un élément de l’organisation sanitaire territoriale,

une des étapes du parcours de santé des patients. C’est

cela qui est fondamental. en quelques années, les choses

ont beaucoup et profondément évolué. L’hôpital n’est

plus une structure organisée dans une sorte de splendide

isolement. Cela fait partie de l’histoire, du passé…

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

Le patient

du médecinn’est pas la propriété

Président de CME, une mission à large spectre

Entretien avecPr Bertrand Fénoll, Chirurgien pédiatre, Président de la CME, Chef du pôle Femme-Mère

La préoccupation du « territoire sanitaire » fait partie intégrante de la fonction de président de la Commission Médicale

871er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

Pour autant, l’adhésion des médecins à un projet ter-

ritorial ne va pas de soi. Surtout quand ces projets

impliquent plusieurs établissements hospitaliers,

plusieurs autres institutions, avec le poids de l’his-

toire de leur coexistence passée. Ce peut être diffi-

cile, aussi, pour les autres personnels ; on ne modifie

pas d’un trait de plume des habitudes bien ancrées,

même si cela se justifie. toutes ces évolutions

télescopent parfois les statuts des médecins hospita-

liers. Pour que de tels ensembles deviennent fonction-

nels et valides, ils doivent être cohérents dans tous les

domaines, et l’apport d’un meilleur service rendu aux

patients doit être indiscutable.

et, dans cette approche, où se trouve le malade ?

C’est effectivement la seule question. Vous vous en

doutez, je n’ai pas toutes les réponses. Mais, il y en au

moins une que je veux souligner : le patient n’est pas la

propriété du médecin ! Le terme « patient » est du reste

un peu équivoque… Le patient n’est pas celui qui pa-

tiente, qui doit attendre, mais celui qui doit être soigné

– et, parfois, au sens étymologique latin de « patiens »,

celui qui souffre. Ce n’est pas la même chose.

Au-delà de la clinique, au-delà du colloque singulier, au-

delà du diagnostic, la mission – globale si j’ose dire – du

médecin est de connaître le mieux possible le parcours

de soins du patient qu’il prend en charge. Ceci inclut

aussi, dans la mesure des possibilités, les aspects fami-

liaux et sociaux. Le travail du médecin s’organise autour

des soins. C’est à la fois son objet et sa finalité. Sans

doute tout cela apparaît-il comme des évidences. Mais,

parfois, il est nécessaire de les rappeler. Les médecins

hospitaliers ont, dans cette prise de conscience, beau-

coup à apprendre des médecins généralistes.

il n’y pas si longtemps, le CH de Carhaix avait dé-frayé la chronique. L’établissement jouait le rôle du village gaulois d’astérix… aujourd’hui, César a imposé la pax romana…

Le CH de Carhaix, c’était en 2008 la synthèse de ce que

le système de santé français était en train de laisser au

bord du chemin ! Plus de précarité sociale qu’ailleurs, un

isolement géographique indiscutable, des difficultés de

formation des personnels, une démographie médicale

péjorative conduisant au recours à l’intérim… Autant

d’indicateurs peu favorables… S’ajoutait une « prise de

pouvoir » politique à l’hôpital… Un maire qui affirmait

ses exigences de résultats en ignorant ce que cela impli-

quait en matière de moyens et une réflexion politique

qui prenait le pas sur la réflexion médicale… sur la ré-

flexion de santé publique.

C’est aujourd’hui une situation qui, heureusement, est

dépassée depuis la fusion entre le CH de Carhaix et le

CHU en 2009. Plus d’une quinzaine de praticiens ont été

embauchés ; l’hôpital a ainsi pu maintenir son niveau

d’activité et pérenniser la présence de l’établissement

dans la ville. Il était essentiel que les patients ne soient

pas pénalisés par une organisation médicale imparfaite-

ment utilisée. Nous avions une obligation de résultat.

J’ai été, je le suis toujours d’ailleurs, sensible à la situa-

tion, en particulier des enfants et des personnes âgées.

L’égalité d’accès aux soins n’est pas une abstraction

« juridique », c’est surtout une réalité quotidienne dans

les activités dites programmées comme dans les situa-

tions d’urgence ! récemment, sur le site de l’hôpital,

une Maison médicale de garde a été créée et travaille

étroitement avec les urgences du CH. La complémen-

tarité entre la médecine de ville et la médecine hospita-

lière n’est pas un vain mot.

À force d’être utilisé tous les jours et à tout pro-pos, le concept d’excellence ou de pôle d’excel-lence est devenu récurrent et, peut-être même, faiblement crédible. « Ce qui est excessif est insi-gnifiant », disait talleyrand. appliquerait-il ce mot aux hôpitaux publics ?

Difficile à dire, nous ne pouvons plus le questionner sur

les questions hospitalières, ni lui expliquer que, désor-

mais, les chirurgiens pédiatres savent opérer les pieds

bots ! (rires) Le CHU de Brest compte 11 pôles, tous

88 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

sont des pôles d’excellence… y compris, bien sûr, le

pôle de psychiatrie. Ce dernier est un peu une excep-

tion locale au sein d’un CHU puisque, comme vous le

savez, la psychiatrie est organisée autour des centres

hospitaliers spécialisés... Je vous accorde que le terme

« excellence » est un peu outré, mais je m’attache plus

à la réalité du terrain qu’à la sémantique. en tant que

médecin, l’excellence d’un CHU, pour moi, c’est une

organisation et des compétences qui permettent de

prendre en charge le plus faible et de mettre en œuvre

la recherche la plus performante.

Aujourd’hui, qu’on le veuille ou non, nous sommes dans

une culture de la performance, mais c’est l’honneur des

hospitaliers – et ils ne revendiquent aucune exclusive –

de distiller une culture de qualité des soins. L’excellence,

c’est aussi une volonté : celle des personnels médicaux

comme non médicaux. La qualification d’« excellence »

n’est pas, pour les hospitaliers d’un service ou d’un pôle,

quelque chose d’anodin, ni un dû, mais plutôt une exi-

gence qui les oblige : celle de la qualité. C’est aussi une

motivation forte... Il n’y a vraiment rien de sémantique

dans tout cela !

en région bretagne, comme de nombreuses autres régions, la France compte des secteurs sanitaires dont la médicalisation est insuffisante, imparfaite. dans ces conditions, comment l’éga-lité d’accès aux soins peut-elle être autre chose qu’un vœu pieu ?

C’est effectivement l’un des problèmes fondamentaux.

C’est un droit, mais il n’est pas encore parfaitement mis

en œuvre. Ce n’est pas facile et, précisément, nous de-

vons trouver des solutions. La Bretagne compte ainsi plu-

sieurs secteurs très pauvres économiquement, malgré son

maillage tout à fait particulier de villes moyennes. et ceci

est encore renforcé par le vieillissement de la population

et la place prise, désormais, par les maladies chroniques…

Si l’on veut que cette égalité d’accès aux soins soit

autre chose qu’un vœu pieu, plusieurs conditions de-

vront être réunies, et notamment : un lien accru entre

l’aménagement de territoire et l’organisation sanitaire,

une meilleure osmose entre le sanitaire et le médico-

social, une prise de responsabilité des établissements

sur leur environnement – et donc un rôle d’impulsion

des présidents de CMe pour ce qui concerne les coopé-

rations –, un meilleur lien entre la médecine hospitalière

et la médecine de ville, une modification du financement

des établissements, prenant en compte l’exception géo-

graphique et la qualité des soins, une anticipation dans

la prospective d’installation des médecins en lien avec

les facultés de médecine, un renforcement du rôle des

conférences de territoire, et une plus grande place faite

aux usagers dans les instances des établissements… La

convergence et la cohérence de tous ces facteurs n’ont

rien d’impossible.

Qu’avez-vous encore à dire pour votre défense ?

La richesse d’un hôpital ce sont les hommes…

et surtout les femmes ! n

L’excellence d’un CHU, pour moi, c’est une organisation et des compétences qui permettent de prendre en charge le plus faible et de mettre en œuvre la recherche la plus performante

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

891er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

DH magazine : Pouvons-nous essayer de mieux cerner la notion de recherche ? doMiNiQue Mottier − À la différence de la recherche

fondamentale qui questionne les causes profondes, la

recherche clinique s’efforce d’inventer et de prouver

l’efficacité de nouveaux traitements ou techniques.

Bien sûr, la frontière entre l’une et l’autre est souvent

« poreuse ». On peut aussi évoquer la recherche « trans-

lationnelle » à proximité du patient et qui doit permettre

l’application rapide des connaissances au bénéfice du

malade. Les soins sont indissociables de la recherche.

La statistique est aussi un outil de base pour la recherche

clinique. enfin, n’oublions pas que la recherche clinique,

c’est produire des preuves.

Comment est organisée la recherche au CHu de brest ?

dM − en matière de recherche, on est progressivement

passé de l’obscurantisme à la démarche scientifique. Cela

ne s’est pas fait instantanément… Jusqu’au début des

années 1990, la recherche clinique hospitalière a été es-

sentiellement le fait d’initiatives individuelles ou de petits

groupes de chercheurs avec peu de relations les uns avec

les autres. La recherche était alors quasi clandestine... en

1995, le CHrU de Brest a créé un poste d’attaché de re-

cherche clinique. Dix-huit ans après, ce sont 119 personnes

qui sont affectées à la recherche. Le soutien fort du direc-

teur général a alors une importance fondamentale !

rÉMi braJeuL − Ce n’est qu’à partir de 1991 que la

loi sur la recherche biomédicale – dite loi Huriet – a été

mise en œuvre : elle instaurait un cadre juridique strict

qui organise la recherche, en garantit le sé-

rieux et assure la protection des patients.

et c’est seulement en 1993 qu’a été créé

le Programme Hospitalier de recherche

Clinique : le PHrC permet, après sélec-

tion, de retenir et de financer des projets de recherche

clinique, en fonction de thématiques de santé publique

prioritaires. Clinique : c’est une plate-forme clinique ou-

verte aux cliniciens, aux chercheurs fondamentalistes et

aux promoteurs industriels et institutionnels. Le CIC de

Brest date de 2005.

Dernière brique : la Délégation régionale de la re-

cherche Clinique et de l’Innovation. C’est une structure

– une dans chaque CHU – qui permet de réaliser de la

recherche clinique de manière sécurisée et avec une

méthodologie rigoureuse. elle facilite la communication

entre le monde hospitalier et le monde extérieur afin

d’en valoriser les réalisations. elle assure un rôle d’infor-

mation, d’incitation et d’aide méthodologique

auprès des équipes hospitalo-universitaires et

de tous les investigateurs qui souhaitent pré-

senter un projet. elle en suit la mise en œuvre

selon les bonnes pratiques cliniques.

À quoi servent toutes ces structures administra-tives ?

rb − Les chercheurs sont demandeurs d’un accompa-

gnement, ne serait-ce que pour les formalités adminis-

tratives, parfois bloquantes pour certains. Notre rôle est

de leur faciliter la tâche de sorte qu’ils se concentrent à

la recherche stricto sensu. Il faut aussi les aider à forma-

liser leurs projets. Ce « management » de la recherche a

pour charge de mobiliser, d’encadrer, de définir des péri-

mètres d’actions... Chaque chercheur, chaque équipe de

recherche doit pouvoir « accéder » à l’institution ! La

position du chercheur dans l’institution est fondamen-

tale ; l’information doit pouvoir y circuler librement. tout

cela, c’est aussi une forme d’expertise !

Intuition, certes mais aussi organisation et rigueur ; la recherche ne s’improvise pas

Entretien avecDr Dominique Mottier, Vice-Président Recherche du directoire du CHRU de Brest, Coordonnateur médical du Pôle Institut Pluridisciplinaire de Recherche, Coordonnateur du Centre d’Investigation Clinique Inserm 0502

Rémi Brajeul, Directeur adjoint en charge de la recherche,Chef du pôle de Gestion « Recherche - Droits des Patients », Coordonnateur administratif du pôle Institut Pluridisciplinaire de la Recherche

Ici,chercheurs !

90 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

dM − Même à partir d’une idée géniale – au moins

considérée comme telle –, on ne lance pas un projet de

recherche sans une réflexion préalable. Il faut prendre le

temps de poser les questions : que veut-on faire ? Pour

aller où ? Quelles sont les limites à ne pas dépasser ? et

une question parfois un peu occultée : que puis-je déjà

faire avec l’existant ? La recherche doit être en cohé-

rence avec l’institution : on ne doit pas aller dans tous

les sens. elle doit également être pertinente. enfin, il ne

faut jamais oublier l’objectif initial.

Qu’est-ce qui distingue le chercheur parmi les médecins ? dM − La recherche clinique, c’est poser des questions.

Le bon chercheur, c’est celui qui a la « forme d’esprit

recherche », une sorte de « recherche attitude »… La

recherche, c’est une pratique quotidienne. On ne fait pas

de la recherche une fois toutes des deux semaines entre

15 h et 18 h ! Je n’irais pas jusqu’à dire que j’y pense

même en me rasant, mais presque… (rires) La fonction

de chercheur n’est pas dénuée d’ambiguïté. Je suis un

médecin, donc je soigne ; mais comme chercheur, je suis

dans une zone d’ombre, avec souvent plus d’incertitudes

que de certitudes. Chercher n’est pas trouver…

Au CHU, on traite les cas les plus importants, mais la

recherche doit aussi concerner les pathologies moins

graves, ou des stades moins évolués. Pour cela, il faut

pouvoir impliquer la médecine générale ainsi que les

autres établissements de santé. C’est pourquoi il nous

faut étendre la recherche clinique à tout notre territoire

de santé : Morlaix, Carhaix, Quimper… Cette diversifi-

cation et cette extension du recrutement des patients

majorent la puissance des essais cliniques. La recherche

clinique se situe désormais au niveau du territoire.

Le CHru de brest est classé 25ème sur 32 CHu et CHr, mais, en matière de performance de son activité recherche, il est classé 6ème ! il y a de quoi être satisfait… dM − Sans aucun doute, les chiffres sont flatteurs ! Il

existe une vraie recherche au CHrU de Brest, ce n’est

pas mince et nous en sommes tous très fiers. Hélas, au

lieu de me réjouir que la bouteille soit à moitié pleine,

je suis de ceux qui observent qu’elle est aussi à moitié

vide ! Le système des reconductions automatiques des

subventions ne génère ni la remise en cause, ni la créa-

tivité. Puisque, par définition, la recherche est utile : la

réflexion ne va pas plus loin ! Dans certains cas, on ne

réfléchit même pas du tout ! Il faudrait pourtant qu’il soit

plus clair que l’objectif n’est pas la pêche aux subven-

tions mais la recherche pour les malades.

La recherche est-elle suffisamment valorisée ? dM − Peu, trop peu ! en tout cas, pas assez à mon

goût. Le système actuel est éminemment critiquable :

il y faut plus de transparence, en identifiant bien les

dépenses directes et les recettes générées par la re-

cherche. Le nombre de brevets déposés est très faible

voire insignifiant si l’on se réfère aux États-Unis ou à

l’Allemagne, par exemple. De trop nombreux cher-

cheurs – je ne parle pas du CHU mais de la recherche

en général – ne ressentent pas le besoin de déposer

des brevets dont ils ne perçoivent pas l’utilité ! et pour-

tant, la recherche produit de la richesse. Vous le voyez,

il y a encore du pain sur la planche. n

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

Le bon chercheur, c’est celui qui a la « forme d’esprit recherche », une sorte de « recherche attitude »…

630 353

9111

projets en cours

publications

équipes dont 2 uMr-insErM

institut de recherche fédératif

centre d’investigation clinique

unité de recherche clinique en cancérologie

Chiffres-clés

Résultats d’évaluation 2011l’année 2011 a été marquée par l’évaluation des équipes de recherche par l’agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supé-rieur (aErEs), avec d’excellents résultats.

nEssais à promotion externe : 508 ndont essais industriels : 206ndont essais institutionnels : 302 nProgrammes soutenus par la drci : 142 ndont promus par le cHu : 54

laboratoire du traitement de l’information médicale. Pr roux : ExcellenceGénétique, génomique fonctionnelle et biotechnologie. Pr férec : Excellencecic plurithématique. Pr Mottier : Excellence

immunologie et pathologie. Pr Pers : Evaluation a

laboratoire de neurobiologie cutanée, gliale et neurosenso-rielle. Pr Misery : Evaluation aGroupe d’étude de la thrombose de bretagne occidentale. Pr le Galoptimisation des régulations physiologiques. Pr Mansouraty éthique professionnelle et santé. Pr david

laboratoire universitaire de biodiversité et écologie Micro-bienne. Pr barbier

Mouvement sport santé. Pr delamarche

sfr - science et ingénierie en biotechnologie. Pr lehn

uMr 1101uMr 1078

cic 0502 Ea 2216

EaEa 3878Ea 4324

EaEa 3882Ea 1274

sfrÉtat des essais : 650 au total

Financements MERRI : 22 811 K€

911er trimestre 2013 / DH magazine 145

DH magazine – Cadre supérieur responsable de pôle n’est pas une petite responsabilité… Comment assumez-vous cette charge ?NatHaLie FreMiN − Je suis Cadre supérieur de santé

du pôle Femme-Mère-enfant ; je travaille en collabora-

tion étroite avec le Chef de pôle, le Pr Fénoll, chirurgien

pédiatre. À ce titre, j’assure la gestion et l’organisation

des soins dans ce pôle ; j’ai la responsabilité de la ges-

tion des ressources humaines et matérielles et suis l’un

des responsables Qualité du pôle. Je travaille en collabo-

ration avec des cadres de santé de proximité, un cadre

supérieur sage-femme pour l’obstétrique et, bien évi-

demment, les équipes médicales. enfin, je suis chargée

d’une mission transversale, de la mise en œuvre et de

l’accompagnement des démarches de coopération entre

professionnels de santé…

et vous êtes en train de charger votre barque un peu plus…C’est une approche très réductrice. Mais, surtout, les

cadres supérieurs de santé sont tellement surchargés

qu’elles ne le remarquent même plus. (rires) J’ai choisi

de m’occuper de ce vaste sujet parce qu’il concerne à la

fois les patients et les professionnels, avec des enjeux

non négligeables dans notre système de santé. Cette

mission me permet également de garder une vision ins-

titutionnelle et de « sortir » de mon quotidien… Cela dit,

le transfert de compétences du médical au soignant non

médecin, le plus souvent, est un problème qui doit être

considéré avec beaucoup d’attention. Comme pour une

pièce de monnaie, il faut en examiner les deux côtés.

Les protocoles de coopération sont une réponse aux en-

jeux de notre système de santé : le premier, cela étant

dit très grossièrement, est de répondre au problème de

la démographie médicale. Plus précisément, c’est per-

mettre aux professionnels de se centrer sur les activités

où leur plus-value est la plus grande. Les autres, et ils

sont tout aussi essentiels, sont de répondre aux besoins

de plus en plus nombreux d’une population vieillissante

et de permettre ou de faciliter l’accès aux soins de la

population, de réduire les dé-

lais de prise en charge dans

certains domaines. en

d’autres termes : optimi-

ser les parcours de soins

et assurer la qualité et la sécurité des soins. enfin, c’est

la possibilité pour les soignants de se substituer au

médecin pour certains actes médicaux ou activités, bien

délimités et avec des conditions très strictes.

Cette possibilité est ouverte pas la loi HPSt de 2009.

L’article 51 a prévu de nouvelles formes de coopération

entre professionnels de santé. Ceci concerne des actes

à titre dérogatoire. Certains actes peuvent être effectués

dans le cadre de protocoles validés par la HAS et l’ArS.

Des infirmières peuvent se voir déléguer de nouveaux

actes techniques qui étaient l’apanage des médecins.

Les actes dérogatoires ont aussi une « façade » santé

publique. Pour faire face au vieillissement de la popu-

lation, à diverses formes de précarité, à certains types

de pathologie. Les soignants peuvent se voir conférer le

droit de réaliser certains actes. La délégation de compé-

tences médecin/infirmière – ou paramédicale – est aussi

liée à la nature des soins et activités de soins.

y a-t-il des protocoles au niveau national et d’autres au niveau du CHu de brest ? Lesquels ? À ce jour, la Haute Autorité de Santé a instruit 59 proto-

coles et rendu 15 avis favorables ; 6 arrêtés d’autorisa-

tion ont été pris par les directeurs généraux des ArS.

70 protocoles sont en cours d’élaboration au niveau na-

tional ; 20 régions sur 26 ont au moins transmis un pro-

tocole à la HAS. Ces protocoles concernent la réalisation

d’actes techniques – échographie, ponction ostéo-mé-

dullaire… –, mais aussi les activités ou conditions d’une

prise en charge optimisée – pathologies chroniques – ou

des activités de prévention – consultations, structuration

de filières…

Au CHrU de Brest, le protocole sur les prélèvements

de cornées vient d’être validé par la HAS et est porté au

n’est pas écritTout

d’avancedans les étoiles

Transferts de compétences infirmières

Entretien avecNathalie Fremin, Cadre supérieur de santé Pôle Femme-Mère-Enfant

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

92 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

niveau national. Un autre protocole fait l’objet d’une sai-

sine de la HAS : la prise en charge thérapeutique des infec-

tions sexuellement transmissibles et des hépatites [...].

D’autres protocoles sont en cours de rédaction/instruc-

tion avec l’ArS Bretagne.

Vous évoquiez trois types de protocoles : les pro-tocoles « acquis au niveau national », ceux « bien avancés » et ceux « en réflexion ». Pouvez-vous nous éclairer ? Le protocole sur les prélèvements de cornées réalisés

par une infirmière est validé au niveau national : ce trans-

fert de compétences de l’équipe brestoise a pour intérêt

de libérer du temps médical ; il permet de trouver de

nouvelles organisations de travail pour mettre en œuvre

de nouvelles activités ; par exemple, les prélèvements

de peau. Pour les professionnels paramédicaux autori-

sés, la continuité dans la prise en charge du donneur

permet d’optimiser les délais de prélèvements et d’amé-

liorer la qualité des cornées.

L’équipe brestoise s’est rapprochée, à la demande de la

HAS, de l’équipe de coordination de Chalon-sur-Saône

pour valider ce protocole au niveau national.

Ainsi, les autres régions pourront, sur arrêté d’autorisa-

tion par le Dg de leur ArS, mettre en œuvre ce proto-

cole. De nombreuses équipes élaborent des protocoles

de coopération qui sont en cours d’instruction et font

l’objet d’échanges entre les établissements et leur ArS,

chargée de les accompagner dans cette démarche.

il y aurait une « grosse cinquantaine » de proto-cole en cours de validation par la HaS. C’est un peu brumeux pour le non initié ; comment cela fonctionne-t-il ?Pour faire simple, les professionnels de santé volon-

taires élaborent et soumettent un protocole de coopéra-

tion selon le modèle type-rédaction de la HAS. Ils le sou-

mettent à l’Agence régionale de Santé, qui s’assure de

la recevabilité du protocole – dérogation aux conditions

légales d’exercice avéré, profession inscrite au code de

la santé publique. Par ailleurs, l’ArS vérifie que ce pro-

tocole répond à un besoin de santé régional. ensuite,

l’ArS transmet ce protocole à la HAS, qui émet un avis

se fondant sur une évaluation de la qualité et de la sécu-

rité de la prise en charge du patient. Quand toutes ces

conditions sont réunies, l’ArS autorise la mise en œuvre

du protocole par arrêté. Les professionnels de santé

concernés peuvent adhérer au protocole autorisé, ceux

qui l’ont créé comme les autres.

en quoi la création d’un protocole au CHu de brest est-elle – ou non – complexe ? Quel est votre apport pour faire aboutir ces protocoles locaux ?La procédure de rédaction, dans sa première version,

était très « lourde » et les professionnels de santé

étaient peu habitués à rédiger les protocoles avec un

tel degré d’exigence, notamment dans leur formalisme.

Mon rôle est d’accompagner les équipes médicales et

paramédicales, dès lors qu’elles ont émis le souhait de

créer un protocole : je suis chargée, notamment, de véri-

fier que l’acte ou l’activité requise est bien dérogatoire ;

ensuite, je participe, avec l’équipe concernée, à la rédac-

tion du protocole ; je suis le lien entre l’établissement

et l’équipe qui nous accompagne au niveau de l’ArS ;

enfin, si l’équipe le souhaite, après autorisation de mise

en œuvre par l’ArS, je l’aide à l’appliquer sur le terrain.

Mon rôle est aussi de « remonter » à l’ArS et à la HAS

les difficultés rencontrées tout au long de la procédure.

Ainsi, différentes équipes ont souligné la lourdeur de

l’instruction, la complexité de rédaction des protocoles,

les faiblesses récurrentes en matière de gestion des

risques, d’indicateurs, de formation ou bien d’informa-

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

931er trimestre 2013 / DH magazine 145

tion des patients… Face à ces constats, plusieurs orien-

tations ont été décidées en accord avec le ministère

de la Santé, notamment : (1) renforcer l’accompagne-

ment des équipes sur le terrain […], (2) Faire évoluer le

support rédactionnel pour les professionnels : l’objectif

étant de guider, pas à pas, la démarche des profession-

nels et de leur proposer des aides concrètes concernant,

par exemple, la formation, les indicateurs, l’information

des patients, (3) Simplifier la procédure d’instruction des

protocoles de coopération.

en matière d’acte dérogatoire, que signifie le « consentement éclairé du patient » ? en quoi est-ce différent des actes infirmiers stricto sensu ?

a priori, il n’y a pas de différences, l’information doit être

claire, précise, avec un vocabulaire adapté au niveau de

compréhension du patient. La délégation de compé-

tences doit lui être explicitée. L’information doit être

délivrée de telle sorte que le patient puisse librement

exercer son consentement : il doit disposer d’un temps

de réflexion avant la mise en œuvre du protocole.

Comment gérez-vous la communication des transferts de compétences : au CHru, avec les malades, avec les autres hôpitaux et, ce n’est pas le moins important, le grand public ? La télévision en a-t-elle parlé ? de quelle manière ?Il faut informer et communiquer auprès de la population.

Au stade actuel, c’est ce qui me semble être le point faible

de cette démarche à l’échelon national. Mais je me trompe

peut-être… Après plusieurs mois, je me rends compte qu’il

faut également informer régulièrement les professionnels,

expliciter la démarche, la procédure… Il faudra également

investir les instituts de formation en santé… La communi-

cation doit être améliorée à tous les niveaux…

Ces transferts seront-ils valorisés ? Comment ?Il faut développer et valoriser les protocoles de coo-

pération entre professionnels de santé afin de mieux

répondre aux besoins de santé de la population. Les at-

tentes ne manquent pas : accès aux soins, délai d’accès,

accès à la technicité, qualité de PeC dans les domaines

tels que les pathologies chroniques, suivi des patho-

logies lourdes... Nous disposons de deux principaux

atouts : valoriser le travail déjà fait par les équipes du

CHrU et s’en servir comme levier de motivation pour

relancer les professionnels sur ce sujet. Ce n’est pas

facile dans le contexte actuel...

Combien de services du CHru de brest sont concernés par ces transferts ?Cinq équipes ont travaillé ou travaillent actuellement sur

des protocoles : (1) prélèvements de cornées, (2) prise en

charge thérapeutique des infections sexuellement trans-

missibles et des hépatites au sein du Centre d’Information,

de Diagnostic et de Dépistage des ISt, (3) prescription

d’un ralentisseur intestinal par l’IDe stomathérapeute,

(4) télé-suivi des patients porteurs de stimulateurs car-

diaques et de défibrillateurs automatiques implantables,

(5) prescription de patch addiction au tabac.

Quelles sont la motivation et la mobilisation des personnels concernés ? La motivation est un facteur important si l’on veut voir

aboutir ces protocoles car cela demande un investisse-

ment conséquent. C’est aussi un travail de réflexion sur

les pratiques de soins et les priorités de santé publique,

mais également sur l’avenir de la profession d’infirmière

notamment. Les coopérations offrent des possibilités

en matière d’attractivité des professions, d’évolution

et de perspectives de carrière par la reconnaissance

de l’évolution des compétences. Au total, c’est tout un

ensemble d’éléments qu’il faut réunir : les bons ingré-

dients, les bonnes recettes et… les bonnes infirmières.

(rires) tout cela ne se fait pas si aisément ; cela va nous

obliger à mettre de la cohérence entre les métiers, les

emplois, les formations et les besoins de santé de la

population…

un syndicat infirmier a lancé une consultation, du 29 novembre au 15 décembre 2012, auprès des professionnels infirmiers. Sur 13 234 réponses, 87 % sont hostiles aux modalités de ces coopéra-tions. Qu’en pensez-vous ? Les transferts de compétences sont un sujet neuf et

c’est aussi un sujet d’avenir, mais tout n’est pas écrit

dans les étoiles. On apprend au fur et à mesure du pro-

jet. La reconnaissance et la valorisation des coopéra-

tions à travers la rémunération ou les perspectives de

carrière apparaissent comme un élément déterminant,

mais il n’est pas, pour l’instant, pris en compte. Il est

indéniable que cela constitue un frein à la motivation et à

la mobilisation pour ces protocoles de coopération.

Selon-vous, qu’est-ce qui pêche dans le système ? Des interrogations demeurent : quelle validation des

compétences ? Sur le long terme incomplet. Quelle

valorisation financière ? reconnaissance et diplôme ?...

Quelles autres informations ou suggestions inté-ressantes pouvez-vous nous apporter ? Mon questionnement : que sont prêts à faire le ministère

et les établissements de santé pour que se développent

ces démarches ? et cette question a de nombreuses

facettes : formations initiales, financement, accompa-

gnement des équipes, valorisation salariale des profes-

sionnels engagés. La loi et les textes sont une chose,

la réalité sur le terrain en est une autre. Avec de l’appui

et des moyens adaptés, on peut faire encore mieux. n

rePOrtage DH : CHru de brest (finistère)

94 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

951er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

CH alpes LemanFace aux Alpes

Le tout nouvel hôpital d’Annemasse-Bonneville, pardon, le Centre Hospitalier Alpes-Léman, est un établissement construit et complètement « pensé »

autour d’un nouveau projet médical ambitieux. Partant d’une situation initiale difficile, il commence à parfaitement remplir les missions

qui lui ont été confiées. Regagner la confiance des patients était aussi, le pari déjà très largement

engagé.

Reportage de Irène Ralaimiadana, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

96 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

DH magazine – Quel bilan faites-vous un an

après l’ouverture du nouvel hôpital ?

bruNo ViNCeNt − Ce bilan est positif. Nous ne nous

sommes pas contentés de reconstruire les murs mais

nous avons aussi complètement repensé les différentes

organisations et mis en œuvre un projet médical

ambitieux. rappelons que l’hôpital fonctionnait sur deux

sites [Annemasse et Bonneville], et que les travaux ont

permis le regroupement sur un plateau technique unique.

Il y a eu un effet immédiat sur l’activité qui a augmenté

fortement dans certains secteurs, alors que ces dernières

années nous avions une croissance très faible. « l’effet

multiplicateur » lié au Nouvel Hôpital a joué à plein.

Quelles sont vos prévisions pour l’exercice 2012 et

quels sont vos principaux projets pour les années

à venir ?

Nous réalisons une augmentation d’activité de l’ordre de

15 % nous permettant d’atteindre un taux de marge de

8% fixé par notre autorité de tutelle, ce qui représente

un montant de l’ordre de 8 millions d’euros. Ce résultat

correspond à 50% du montant du loyer, l’autre partie

étant couverte par la subvention allouée dans le cadre du

plan Hôpital 2007. Nous travaillons sur le nouveau projet

médical 2013-2017 et sur le CPOM qui l’accompagne.

Nous voulons développer de nouvelles spécialités

comme le neurovasculaire pour la prise en charge de

l’AVC, ainsi que différents segments de la Chirurgie.

Le développement de la chirurgie ambulatoire où une

marge de progression est possible se poursuit.

Le CHAL fait partie des 220 établissements sélectionnés

pour l’expérimentation nationale du financement

par la qualité. Cette participation nécessitera

l’approfondissement des démarches qualité, leurs

déclinaisons et leurs évaluations. Le CHAL est intéressé

par ce mode de financement sélectif et discriminant basé

sur la performance et la qualité. Nous sommes dans un

environnement concurrentiel ou l’offre de soins est

dense ; nous nous devons de relever le défi par la mise

en œuvre de la qualité. Nous sommes aussi candidats

pour faire partie de l’échantillon d’établissements

participant à l’étude nationale des couts.

La visite de certification V2010 aura lieu du 9 au

16 février 2013. La précédente s’est bien déroulée mais

l’ouverture du nouvel établissement nous a laissé peu

de temps pour « peaufiner » sa préparation ; la confiance

reste de mise cependant.

Le bail emphytéotique a-t-il rempli ses promesses ?

Le bail emphytéotique est une formule complexe à

gérer. L’équipe projet que nous avons mise en place

au CHAL a effectué un travail intense pour dégager

les meilleurs aspects du dispositif. Le bilan est plutôt

positif car ce partenariat passe par une phase de

dialogue compétitif qui s’est révélée fructueuse. Définir

un programme en termes de performances à atteindre

et d’objectifs d’exploitation maintenance à couvrir

sur 30 ans nécessite des arbitrages difficiles. Le bail

emphytéotique (BeH) est peu adapté à l’hôpital qui est

souvent amené à faire évoluer son programme pendant

les phases de conception et de réalisation. Or la clé du

succès d’un Be est de n’apporter aucune modification au

programme. Certains exemples hospitaliers montrent

que les changements de programmes passent par des

avenants au coût très élevé et qui génèrent des retards

de livraison. Le gestionnaire hospitalier doit se montrer

vigilant sur ce point et adopter une ligne de conduite

intransigeante tout au long du projet.

lE défi dE la concurrEncEla Qualité dEs soins Et la PErforMancEsont lEs iMPératifs

EntrEtiEn avEcbruno vincent,directeur général du cH alpes-léman

971er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

Quel est le montant du loyer du CHaL et

est-ce le juste prix ?

À l’issue des deux premières années, il sera de 15 millions

d’euros et couvre le remboursement de l’investissement,

l’exploitation, la maintenance et le renouvellement

des principales installations pendant 30 ans afin que

l’ouvrage nous soit remis, en bon état de fonctionnement

à l’issue du bail. Ce dispositif intègre un transfert de

risque sur l’emphytéote qui représente un prix à payer

supplémentaire par rapport à une formule classique.

Quelle est la nature de vos relations avec eiffage ?

Nous considérons que le contrat doit s’appliquer dans sa

plénitude. Nous recherchons le compromis. en cas de

difficulté d’interprétation persistante ou de divergence,

nous avons recours à une procédure d’arbitrage ou

d’expertise judiciaire ; nous procédons également à

l’application de pénalités.

Le CHaL se retrouve dans un contexte concurren-

tiel difficile après l’ouverture d’un établissement

privé en plein centre-ville d’annemasse. Quelles

stratégies avez-vous pu mettre en œuvre pour

augmenter vos parts d’activité ?

Nous devons être exigeants, notamment sur la qualité

de l’accueil et de la prise en charge. Chaque patient a la

liberté de choisir l’établissement où il sera soigné et nous

oblige à penser en termes de parts de marché. Il s’agit

de proposer une offre d’activités et spécialités médicales

la plus large possible pour répondre aux besoins de

la population. À titre d’illustration notre établissement

a choisi de développer la Chirurgie esthétique et de

a reconstruction ainsi que la Chirurgie bariatrique,

spécialités parfois délaissées par l’hôpital public.

Parallèlement, le CHAL s’efforce de proposer des

parcours de soins complets et cohérents ainsi que

des alternatives à l’hospitalisation complète. Nous nous

associons également à d’autres partenaires publics

et privés pour atteindre ces objectifs. C’est le cas de

l’insuffisance rénale chronique où nous louons des locaux

à des partenaires privés spécialisés dans la dialyse lourde

alors que l’hôpital assure l’activité de Néphrologie. C’est

encore le cas des Soins de Suite et de réadaptation qui

seront pris en charge au sein de notre établissement par

un partenaire privé à but non lucratif.

Quels sont les secteurs qui ont connu un regain

d’activité ?

tous les secteurs progressent ; pour autant les plus

fortes progressions sont à mettre au compte de la

Maternité avec une augmentation de près de 40 %

et de la Chirurgie avec une progression de 20 %. en

2012, le CHAL a réalisé plus de 1700 accouchements

contre 1250 l’année précédente. La reconstruction d’un

nouvel hôpital à mi-distance des villes d’Annemasse et

bruno vincent,directeur général du cH alpes-léman

98 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Mont blancorthopédie

Frédéric terrier

atelier sur place - déplaceMent à doMicile

délais rapide - appareillage adapté à la morphologie

orthopédie - prothèses appareillages spéciFiques des sportiFs aMputés corsets sur Moulage carbone pré-iMprégné

615, rue Saint-maurice74800 St-pierre en faucigny

tél. 04 50 03 74 33 - fax 04 50 97 36 21

REMERCIEMENTSBRuYNZEEl RANGEMENTS SAS

Solutions de rangement d’archives et de stockage1 rue Alfred Kastler

67201 ECKBOLSHEIMwww.bruynzeel.fr

CABINET ClEMENT & ASSoCIES Assistance à maîtrise d’ouvrage, Ingénierie contractuelle,

Montage d’opérations complexes90 rue Paul Bert

69446 LYON cedex [email protected]

991er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

Bonneville nous a permis de retrouver la clientèle de

parturientes que nous avons perdue lorsque la maternité

de Bonneville avait fermé.

Par ailleurs, en se déportant d’une dizaine de kilomètres

seulement d’Annemasse, le CHAL se situe au carrefour

des grandes vallées et plus proche de certaines stations de

sports d’hiver qui drainent une clientèle supplémentaire

en période d’hiver. Ce sont des « activités de saison »

que nous n’avions ni à Annemasse ni à Bonneville. Le

CHAL devra probablement modifier ses organisations

pour mieux s’adapter à ce phénomène saisonnier.

avez-vous pu recruter facilement les personnels

médicaux et soignants ?

Nous sommes situés en région de montagne, loin des

villes sièges des universités et des agglomérations

les plus importantes. Les professionnels préfèrent

souvent s’installer dans les villes plus grandes comme

Lyon, Chambéry ou Annecy. Aujourd’hui, la tendance

s’infléchit car la nouvelle structure attire des praticiens.

De plus, le CHAL est situé à une dizaine de kilomètre de

la métropole genevoise où les conjoints des personnels

hospitaliers peuvent trouver plus facilement un emploi.

Pour ce qui est du personnel soignant, nous avons connu

cette année une « embellie » grâce à une double sortie

d’IFSI mais la situation reste tendue.

Le CHaL fait partie d’une CHt, quels sont les

éléments qui la caractérisent ?

La CHt regroupe trois établissements de taille

sensiblement équivalente installés dans le nord de la

Haute-Savoie. Le Chablais est couvert par les hôpitaux du

Léman issus du regroupement de thonon et Évian ; les

Hôpitaux de Sallanches - Chamonix sont installés dans la

vallée de l’Arve ; le CHAL se trouve au cœur de la région

du genevoix et du Faucigny. La spécificité de la CHt

de Haute-Savoie Nord est de réunir des établissements

de taille comparable sans que l’un d’entre eux puisse

prétendre jouer un rôle de référent.

Cette CHt ne peut progresser que sur la base de projets

où chacun est « gagnant » ; elle se doit aussi d’être à

géométrie variable, associant selon les projets deux ou

trois établissements.

À titre d’exemple le CHAL a concédé la Chirurgie

carcinologique OrL aux Hôpitaux du Léman ; la fonction

Stérilisation du CHAL est effectuée par l’Hôpital de

Sallanches ; une partie de l’activité biologique des

Hôpitaux de thonon et de Sallanches est réalisée sur une

plate-forme située au CHAL. Les coopérations en œuvre

sont solides et donnent des résultats encourageants.

Mais on doit commencer à réfléchir aux coopérations

stratégiques comme la Chirurgie carcinologique soumise

à seuil et éventuellement aboutir à une répartition

cohérente des spécialités pour éviter des pertes

d’autorisations. La CHt doit être un lieu de concertation

en vue de préserver et pérenniser les activités et cela

passe par des concessions mutuelles. Dans d’autres

domaines comme les achats, les échanges sont déjà

effectifs. La réflexion doit s’intensifier dans le domaine

logistique et des systèmes d’information.

Vous avez créé 80 emplois à l’heure où la réduction

d’effectif est en œuvre dans les hôpitaux ?

Il convenait pour notre structure de prendre des risques

et d’anticiper sur le développement de nos activités en

sachant que le recrutement du personnel soignant est

difficile dans une zone si proche de la Suisse. Cette

prise de risque s’est avérée pertinente et nous a permis

d’atteindre les bons résultats cités précédemment. n

100 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

iMPact

EnvironnEMEntal

Entretien avec Pascal Di Majo,Ingénieurhospitaliers

DH magazine – Quel bilan faites-vous un an

après l’ouverture du nouvel hôpital ?

PaSCaL di MaJo − Le développement durable

à l’hôpital c’est agir sur plusieurs axes de

sorte que l’exploitation générale du bâtiment

garantisse la durée dans le temps des installations

et réduise l’impact sur la santé et l’environnement.

Lors de la construction du nouvel établissement, nous

avons fixé des cibles et des objectifs d’une politique de

développement durable (DD) au CHAL. Le choix d’un

site à l’extérieur de la ville a été propice à une démarche

de préservation de l’environnement.

À l’hôpital où l’activité principale est le soin, il parait

difficilement concevable de ne pas maitriser les

pollutions intérieures qui ont un impact négatif sur la

santé, ou de négliger la qualité de vie des agents qui

y travaillent. Le CHAL tient compte de ses dimensions

économiques, et sociétales ou sociales pour construire

une démarche de développement durable efficace.

Cette politique de DD est construite autour de 4 axes

majeurs qui relèvent de la préservation des ressources

en eau, la maitrise des consommations d’énergie et la

maitrise des pollutions internes et externes qui passe

par la qualité sanitaire des matériaux utilisés lors de la

construction et le respect des atouts naturels du site.

Chaque axe a abouti à des orientations précises qui ont

été imposées au constructeur.

Quel est le point fort de cette politique de dd

conduite par le CHaL ?

La présence de résidus médicamenteux dans l’eau

est un problème sanitaire, or les eaux usées des

hôpitaux sont aujourd’hui rejetées et traitées par les

mêmes filières celles des communes. L’hôpital traite

des patients infectés, on utilise une grande quantité

de produits pharmaceutiques et de médicaments qui

s’évacuent avec les eaux usées.

Le CHAL participe à une étude nationale qui consiste

à comparer les résidus contenus dans les effluents

hospitaliers et les effluents d’une commune après

leur traitement en station d’épuration. Il est le seul

établissement de santé en France qui bénéficie

d’une filière de traitement spécifique de ses eaux

usées. La station d’épuration communale a doublé sa

capacité afin de créer une filière d’épuration réservée

exclusivement aux exutoires de l’hôpital. Il devient

possible de mesurer et comparer des indicateurs de

qualité des effluents communaux et hospitaliers après

leur traitement d’épuration. elle permet également de

mesurer l’efficacité des techniques d’épurations sur les

pollutions hospitalières et de contrôler la présence de

résidus avant les rejets dans la rivière.

L’hôpital ne pollue pas plus que les particuliers :

on retrouve dans les deux échantillons les mêmes

molécules. Cette étude permet également de tester

les nouvelles techniques de traitement de certaines

molécules et bactéries et c’est une première en France.

Les premiers résultats de cette étude seront présentés

lors d’une conférence de presse prévue pour le

13 février.

Les analyses ont démontré que certaines molécules

spécifiques à l’activité hospitalière ne sont pas éliminées

par le traitement (molécules utilisées en chimiothérapie,

hormones, produits détergents spéciaux…) et cela

veut dire que tous les établissements de santé sont

à l’origine de ce type de pollution. L’étude nationale

est primordiale pour avancer dans la recherche sur le

traitement et la maitrise de la pollution hospitalière.

A terme une règlementation qui oblige les hôpitaux à

traiter leurs effluents avant le rejet pourrait voir le jour.

La maitrise de l’impact environnemental de l’activité hospitalière prévient l’émergence de nouvelles maladies

1011er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

Quelles sont les actions concrètes pour limiter les

pollutions de l’eau ?

Nous avons modifié nos pratiques. C’est une démarche

volontaire qui consiste à utiliser la vapeur pour nettoyer

et désinfecter les locaux et les équipements en

remplacement des produits chimiques de bio nettoyage.

La décontamination par vapeur d’eau sans additif a fait

ses preuves dans les blocs opératoires et nous avons

été intransigeants : un niveau d’efficacité identique et

des résultats équivalents à ceux des produits chimiques.

Comment économiser l’eau à l’hôpital ?

Les solutions techniques permettant la réduction de la

consommation en eau ont été privilégiées. Nous avons

installé des équipements hydro sanitaires économes

comme les doubles chasse d’eau pour les sanitaires, les

systèmes « Presto » dans les douches des personnels.

Ces actions sont significatives en terme d’économie

de volume d’eau et nous notons une modification

des comportements : les quantités d’eau utilisées

correspondent aux besoins réels et les gaspillages sont

évités. De même nous récupérons les eaux pluviales dans

des citernes. elles sont ensuite réutilisées pour arroser

les plantes. Dans ce domaine, nous aurions pu aller plus

loin et utiliser cette eau récupérée pour alimenter les

chasses d’eau mais c’était déjà plus compliqué à mettre

en œuvre et nous n’avons pas franchi le pas.

Quelles autres actions le CHaL a-t-il mis en place

pour maitriser sa consommation d’énergie ?

Nous avons été ambitieux en dépassant de 15% les

objectifs de la règlementation thermique 2005 qui

prévoit des cibles en matière d’isolation thermique des

bâtiments. Nous avons fait installer un triple vitrage avec

un fort coefficient d’isolation afin de réduire les besoins

en énergie de chauffage. en parallèle, nous récupérons

la chaleur rejetée par le système d’extraction d’air pour

compenser nos besoins en chauffage. Nous utilisons

une chaudière à plaquettes de bois d’octobre à mai

en alternance avec la chaudière au gaz. Le bois séché

a un rendement plus intéressant pour la production de

chaleur. La chaudière à gaz prend le relais entre mai et

octobre pour produire l’eau chaude sanitaire. L’hôpital

a opté pour des éclairages extérieurs qui ne s’activent

qu’au crépuscule ou par temps de brouillard. Dans les

couloirs, l’éclairage est relié à un programmateur horaire

qui réduit l’intensité des lumières pendant la nuit.

Quels matériaux ont été privilégiés lors de la

construction ?

C’est le choix de matériaux très faiblement polluants

qui a été déterminant. Peu d’établissement optent pour

cette solution à cause du cout d’achat élevé. Au CHAL

les sols sont en caoutchouc, produit naturel qui ne rejette

aucun polluant comme le formaldéhyde ou des dérivés

halogénés. Sa pose est difficile mais c’est un matériau

d’entretien facile qui nécessite très peu de produits

détergents. De même les peintures sont exemptes de

produits alcaloïdes volatils. A l’intérieur du bâtiment, nous

avons privilégié les espèces végétales hypo allergisantes

pour protéger la santé des patients et personnels.

Qu’est-ce que le respect des atouts naturels du

site ?

Il s’agit de limiter l’impact de l’activité hospitalière sur

le site et de valoriser les atouts naturels. Le bâtiment

a été construit en respectant les cours d’eau et trames

végétales environnantes. Des espèces végétales

et animales protégées ont été découvertes autour

du chantier et des solutions ont été trouvées pour

préserver leurs habitats. Un comptage régulier de ces

espèces est réalisé. Pour l’entretien des espaces verts

nous n’utilisons pas de désherbants et nous réduisons

la fréquence de la taille des végétaux. Nous avons

opté pour les plantes à faible besoin hydrique tout en

préservant une esthétique correcte. n

102 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rEstaurationdE la confiancE

Entretien avecDr Witold Gertych,chef du service gynécologie-obstétrique

Dr Gaël Piquilloud, chirurgien plasticien

Dr Paul Vignoli, radiologue

et extraits de la lettre gynécologie-obstétrique éditée par le service

DH magazine – Quels sont les projets ou les

perspectives pour votre service ?

WitoLd GertyCH − Il faudrait améliorer nos moyens

de communication modernes et faire savoir ce qu’on

fait au service gynécologie-obstétrique. Les moyens

internet sont beaucoup utilisés par les établissements

« concurrents ». Les patients se renseignent et

vérifient la notoriété d’un praticien, ils recherchent cette

information sur les sites internet.

L’hôpital doit soigner particulièrement son image

à travers son site. On doit y trouver l’information,

la déclinaison des spécialités qu’on y exerce, les

parcours professionnels des praticiens, leurs domaines

d’expertises, le nombre d’actes qu’ils réalisent. On

pourrait même y mettre leur photo pour que les patients

se familiarisent avec leurs visages. Je pense que ce

type de communication deviendra rapidement tout à

fait normal. et j’estime qu’on est en retard par rapport

aux établissements privés qui mettent un peu plus de

moyens dans la communication promotionnelle.

Pensez-vous que les établissements doivent faire

de la publicité pour leurs praticiens ?

WG − Il ne s’agit pas de publicité pour les praticiens mais

pour l’établissement qui met en avant les compétences

médicales. L’hyper spécialisation va distinguer certaines

activités et attirer la patientèle pour faire gagner des

parts de marché au CHAL.

GaëL PiQuiLLoud − Cette communication n’a rien de

publicitaire, c’est de l’information et de la visibilité sur

des activités. L’hôpital public ne peut plus dire que la

communication ne relève pas de ses attributions.

Quelles sont les atouts du service gynécologie-

obstétrique du CHaL ?

PauL ViGNoLi − Le CHAL possède le seul mammo-

graphe équipé de tomosynthèse du département. Un

article paru dans le « Dauphiné libéré » a amené un

flux de patientes dont certaines venues d’Annecy, uni-

quement parce qu’elles ont lu le journal. L’information

apporte forcément un retour positif.

WG − Le CHAL emploie également un chirurgien

plasticien à temps plein alors que dans les autres

établissements ils sont vacataires ou à temps partiel.

GP − La chirurgie plastique à l’hôpital permet dans

certains cas de pratiquer, en collaboration avec

les chirurgiens gynécologues, une reconstruction

mammaire immédiate. en termes de reconstruction du

sein, nous nous démarquons également en pratiquant la

microchirurgie, une technique innovante et unique parmi

les hôpitaux du département.

avez-vous des projets de coopération ou de

partenariat avec d’autres établissements dans le

domaine de la prise en charge des pathologies de

la femme et de la parturiente ?

WG − Au niveau de la CHt, c’est difficile car chaque

établissement veut augmenter son activité pour

rentabiliser sa structure.

PV − Le mammotome® (mammographe équipé de

tomosynthèse) est un appareil performant. Nous

souhaitons partager son utilisation avec les autres

praticiens de la CHt mais pour l’instant ce dossier est

resté sans suite. n

L’ouverture du nouvel hôpital a restauré la confiance des patients

Le début de l’année a été marqué par notre déménagement dans une nouvelle structure engendrant quelques perturbations. au fils du temps, les craintes se sont dissipées et nous avons très rapidement regagné la confiance de nos patients.

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

1031er trimestre 2013 / DH magazine 145

QuElQuEs

cHiffrEs clés

Et événEMEnts iMPortants au sErvicE

GynécoloGiE obstétriQuE1 cas d’unE PatiEntE traitéE Pour un

cancEr du col utérin avEc rEcHErcHE dE GanGlion sEntinEllE PElviEn.

Le CHAL utilise couramment la procédure de repérage

du (des) ganglion(s) sentinelle dans les cancers du sein,

de la vulve et les mélanomes. Cette technique permet

de localiser le premier relais ganglionnaire susceptible

d’être touché par le processus métastatique. Dans

les cancers gynécologiques, la recherche de ganglion

sentinelle pelvien présente deux intérêts : rechercher

de manière plus performante des micro-métastases

ganglionnaires et déterminer si les voies de drainage

lymphatique sont habituelles ou aberrantes. Si la voie

de drainage lymphatique aberrante est identifiée en per

opératoire, l’intervention peut être organisée de manière

à ôter tous les ganglions potentiellement envahis, ce qui

contribue à améliorer le pronostic de la patiente.

1 cas d’unE PatiEntE traitéE Pour un cancEr du col utérin avEc curaGEloMbo-aortiQuE Par voiE rétro-PéritonéalE

La véritable chirurgie mini-invasive en cancérologie

gynécologique a permis une optimisation du traitement.

elle est indiquée dans des cas bien précis de patientes

atteintes d’un cancer du col ou du corps utérin.

2 nouvEauX MédEcins obstétriciEns ont rEnforcé l’éQuiPE.

L’équipe médicale du service s’est entièrement

renouvelée depuis deux ans. elle est dynamique et les

médecins se « sur-spécialisent » comme dans certains

hôpitaux universitaires. Le but est que chaque praticien

construise sa « réputation » dans son domaine très

précis. en se spécialisant, nous augmentons notre

niveau d’expertise et c’est la recette pour gagner en

qualité, tout en étant reconnus par nos correspondants.

L’objectif est de fidéliser la patientèle et éviter qu’elle se

tourne vers le secteur privé ou plus loin vers les centres

universitaires ou anti cancéreux.

3 fois Plus dE cancErs du sEin Pris En cHarGE au cHal En 2012. Depuis 2010 le nombre de cas de

cancer du sein traités au CHAL est en augmentation.

81 cas ont été déclarés à la HAS fin 2012. Le CHAL dé-

tient une véritable filière complète de prise en charge

cancérologique « du diagnostic à la reconstruction mam-

maire ». Deux chirurgiens spécialisés en cancérologie

sont aux services des patientes.

14 % d’accoucHEMEnts Par césariEnnE.

C’est la preuve que nous nous efforçons de respecter

la physiologie de l’accouchement conformément aux

recommandations sanitaires. Le taux de césarienne moyen

est de l’ordre de 21% en France (source HAS 2010).

21 cas dE cancEr PElviEn Pris En cHarGE.

39 % c’Est lE tauX dE l’auGMEntation du noMbrE dE naissancEs Par raPPort à 2011.

Nous finissons l’année 2012 avec 1712 naissances,

ce qui positionne notre maternité en deuxième

place dans le département, juste derrière le Centre

Hospitalier d’Annecy. Cet accroissement s’accompagne

d’une qualité de prise en charge conservée, par une

augmentation de notre personnel soignant, pour lequel,

les parturientes nous témoignent de leur satisfaction

au quotidien. en tant que maternité niveau 2A nous

travaillons en étroite collaboration avec l’équipe de

néonatologie de notre établissement. Le CHAL s’est

équipé de nouveaux outils de surveillance prénatale en

2012 : mesure des lactates au scalp en per partum et

monitoring fœtal avec analyse sophistiquée du rythme

cardiaque par procédé OXFOrD. Ce dernier permet une

évaluation du bien être fœtal chez des fœtus atteint d’un

retard de croissance intra utérin.

419 Ponctions d’ovocytEs, 506 inséMinations.

Autant de témoins d’un grand dynamisme du Centre

Départemental de PMA. n

rePOrtage DH : CH aLPes - Leman (Haute-saVOie)

104 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013104 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1051er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

CH d’armentièresFlandre intérieureConstitué en Communauté Hospitalière de Territoire avec les CH d’Hazebrouck et de Bailleul, le CH d’Armentières est l’établissement référent du secteur Flandre Lys... Ce qui n’empêche pas, au contraire, un partenariat très fort avec le CHU de Lille, distant de 25 km. Projet médical, développement de partenariats, constitution de réseaux de santé sont les éléments d’action sanitaire assurant à la population des Flandres intérieures une exigence de qualité et de sécurité des soins au meilleur niveau.

1051er trimestre 2013 / DH magazine 145

106 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

DH magazine – Quelles sont les priorités

pour l’hôpital d’armentières ?

Pierre PaMart − Il y en a tellement (sourire). La

première, une sorte de priorité parmi les priorités, est la

consolidation et la diversification des équipes médicales.

Dans cet esprit, nous mettons en place un « coaching »

des chefs de pôle pour mettre très vite les nouveaux

médecins en « situation de responsabilité ». Nombre de

nos praticiens se rapprochent de l’âge de la retraite ; il

est essentiel que nous soyons capables de mettre en

place la nouvelle génération. Point de médecins, point

d’hôpital !

L’hôpital d’aujourd’hui ne travaille plus seul. Quid

des partenariats ?

Ils sont multiformes et concernent aussi bien les secteurs

publics que le privé. Plateau imagerie : développement

d’un partenariat public-privé avec les cliniques et les

radiologues libéraux… Ouverture vers la médecine de

ville, par exemple avec la « Maison de promotion de

la santé ». et, bien évidemment : CHt – Communauté

Hospitalière de territoire –, gCS – groupement de

Coopération Sanitaire – et CHrU. Le terme de réseau

multiforme me semble assez juste. Nous vivons une

évolution lourde, de la gestion hospitalière en particulier,

et de la santé en général. La loi HPSt a accéléré cette

évolution.

Vous êtes très attentifs à la qualité…

Évidemment, d’autant qu’il s’agit d’un de nos atouts.

Notre score agrégé ICALIN 2012 est de 90/100. Sur la

base un panel de 400 CH non CHU, le CHA [comprendre

centre Hospitalier d’armentières, ndlr] se situe, en gros,

parmi les dix premiers pour la qualité des soins. Pour

autant, en santé, la victoire est toujours provisoire ;

nous ne devons pas nous relâcher. Ainsi, nous sommes

en train de conduire une enquête de satisfaction. Le

directeur a pour fonction de fixer les objectifs, de

soutenir les hospitaliers, de « maintenir la pression ». Ce

n’est pas toujours aussi difficile qu’on le pense : travailler

au CHA constitue une évidente fierté pour les salariés de

l’établissement. Pour le directeur aussi, d’ailleurs (rires).

Pour l’informatique, c’est plus facile, vous êtes un

passionné…

Le thème passionné est peut-être excessif mais,

c’est vrai, dans ma carrière, j’ai fait mettre en œuvre

Point dE MédEcins, Point d’HÔPital

EntrEtiEn avEcPierre Pamart,directeur général du cH d’armentières

Mettre les nouveaux médecins en situation de responsabilité

1071er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

les systèmes d’information – SI – de quatre centres

hospitaliers. toutefois, la décision de lancer un SI ne

suffit pas. Il faut générer un contexte consensuel et

susciter l’adhésion des médecins, des soignants, des

administratifs... Il faut aussi du temps ! Un SI, c’est un

ensemble d’éléments : un prestataire, des méthodes,

des personnels et des coûts. Le réalisme des projets est

aussi un élément qu’il ne faut pas omettre. On n’ajoute

pas des logiciels supplémentaires pour faire plaisir à un

médecin. Évidemment, au CHA, cela n’existe pas. (rires)

et les critères de choix…

Il faut bien choisir les fonctionnalités dont l’hôpital a

besoin selon l’activité réelle des services. Les interfaces

entre les différents systèmes doivent fonctionner

ensemble, si possible harmonieusement. Le coût réel

n’est pas financier, c’est la qualité du résultat « tout

compris ». Nous avons sélectionné le CrossWay de

McKesson. C’était le choix de tous les hospitaliers du

CHA. Nos critères ont été : le prestataire, les personnels,

la méthode et les prix. Le résultat est parfaitement

satisfaisant.

et les problèmes financiers ?

Notre situation est difficile, malgré les efforts non

négligeables de l’établissement. Nos recettes ne

relèvent du t2A que pour 87 %. Le reste correspond

aux MIgAC : permanence des soins, précarité,

éducation thérapeutique du patient, coordination de

cancérologie… Fondamentalement, nous souffrons

d’une insuffisance de facturation. Nos ami Belges nous

font une concurrence effrénée, allant jusqu’à distribuer

dans les boîtes aux lettres de la région de superbes

plaquettes vantant leur établissement… Si notre activité

est stable, elle n’en est pas moins insuffisante… Nous

suivons nos recettes pratiquement au jour le jour. Nous

avons une réunion de directoire tous les quinze jours.

Nous bénéficions de l’appui de l’ArS Nord-Pas-de-

Calais, ce qui n’est pas mince, mais tout n’est pas résolu

pour autant.

Quelle conclusion ?

Je résumerais volontiers notre stratégie en quelques

mots : cohésion, compétence, travail ensemble, mé-

thode, spécialisation… Notre ambition : une culture de ré-

sultat ! et, pour terminer, le vieil adage : « aide-toi, le ciel

t’aidera ! » C’est ce que nous essayons de faire. n

REMERCIEMENTS

CAN-WEllServices et conseils en logistique

Contrôle, traçabilité, matériel médical ZI des Bruyères - 9 rue Jean Monnet

78990 ELANCOURTwww.can-well.com

DESCAMPS ASSAINISSEMENTAssainissement – Maintenance industrielle

Déshydratation des boues 97 rue des Résistants – BP 80062

59427 ARMENTIERES CEDEX

DIRE SARlEntreprise générale second œuvre

16 rue de l’Epinette59133 CAMPHIN EN CAREMBAULT

lEvEQuE FluIDES SARlInstallations et maintenances Fluides Médicaux,

gaz Labo 194 rue des Postes

59000 LILLEwww.levequefluides.fr

NS CARRElAGEEntreprise de bâtiment

557 rue de Faumont59310 FAUMONT

SAS SIGN PluSSignalisation horizontale, verticale

Glissière de sécurité, Mobilier urbain, Sols souples 70 rue Jean Jaurès

62800 LIEVIN

La victoire est toujours provisoire, nous ne devons pas nous relâcher !

108 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

Le Centre Hospitalier d’Armentières se veut

être l’hôpital pivot de la Flandre intérieure.

Il est l’hôpital référent de la Communauté

Hospitalière de territoire signée entre

Hazebrouck, Bailleul et Armentières le

14 décembre 2011. Il entend affirmer son

positionnement comme établissement de

santé de référence du territoire de Flandre Lys dans

le cadre successivement défini par le schéma de la

CHt, le schéma régional d’organisation sanitaire et par

contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.

Le projet d’établissement et le projet médical sont

basés sur des développements de partenariats, de

constitution de réseaux de santé, avec comme objectifs :

l’efficience, l’adaptation aux besoins de la population des

Flandres intérieures, avec une exigence de qualité de

sécurité des soins au meilleur coût. Malgré ces bonnes

intentions et des activités soutenues, la situation actuelle

de notre établissement a rompu le cercle vertueux du

retour à l’équilibre financier, amplifié par la détérioration

de l’environnement économique global.

cHiffrE d’affairEsDans certains secteurs, nous ne parvenons pas au

niveau d’activité souhaitée. D’année en année, le chiffre

d’affaires global augmente, mais notre système, de

façon endogène, crée son déficit et nous n’atteignons

pas le Saint graal, c’est-à-dire l’ePrD. Les médecins,

les soignants en général ont de grandes difficultés à

se confronter à cette vision médico-économique. Leur

intérêt est le vivant, la personne malade, sa souffrance,

le maintien de son bien-être, qui doit être le socle de la

politique de la CMe.

L’hôpital d’Armentières, un hôpital « normal » dans

un paysage hospitalier. Le déficit consolidé des 1 200

établissements de santé publics s’est élevé à 487 millions

d’euros en 2011. Cela représente à peu près 1 % de leur

budget, autant qu’en 2010. Il en sera probablement de

même en 2012. Les CHU ont amélioré leurs comptes au

prix d’une compression de leurs charges de personnel,

parfois en réduisant leurs effectifs. Les hôpitaux

diminuent encore leur déficit au prix d’importantes

suppressions d’effectifs. Aussi, quelle attitude adopter ?

Y-a-t-il des solutions face à cette problématique car notre

hôpital ressemble étrangement à d’autres ?

La vision locale, au niveau de l’hôpital, est de s’adapter.

Nous défendons notre vision qui est d’optimiser mais de

ne pas casser notre outil de travail. Le cap 2013 se plani-

fie, comme dans beaucoup d’autres établissements, en

optimisant, en revisitant toutes les organisations, en lut-

tant contre les gaspillages, en motivant, en demandant la

participation de chaque acteur du Lean management*1.

Mais ce système a ses limites, qui sont en fait le rapport

à « comment augmenter l’activité afin de ne pas cas-

ser l’outil de travail ». Là, la MOBILISAtION de tous les

acteurs de la santé s’impose. Il nous faut, me semble-t-

il, faire valoir :

- une réforme de la t2A (le système a atteint ses limites

si utilisé comme régulateur économique),

- une valorisation des missions de services aux patients,

- une valorisation des soins préventifs, etc.

lEs liMitEs dE t2aAujourd’hui, sommes-nous aux limites du système t2A ?

Dans son journal info en santé de décembre 2012, la

FHF, dans son éditorial, nous dit « malgré ses limites,

la t2a reste le meilleur système connu à ce jour. »

L’idée initiale était : définissons l’activité hospitalière

en groupes homogènes de malades (gHM), éclairons

ensuite un coût puis un tarif pour chaque groupe*2.

Chaque établissement reçoit donc en principe la même

allocation financière pour le même type de malades.

Cependant, aucun établissement ne peut être rémunéré

uniquement sous cette forme : il a d’autres activités que

le soin stricto sensu, des activités de soins difficilement

répertoriables (urgences) et des contraintes « externes »

(liées à sa région, comme les distances d’accès, la

nature de la population reçue, etc.).

Au financement par la t2A, il faut donc ajouter une

somme déterminée par l’ensemble de ces paramètres.

Il faut enfin introduire un dernier critère de pondération

(un niveau d’activité cible par établissement) pour éviter

que celui-ci n’augmente son volume d’activité au-delà

de ce qui est souhaitable afin de bénéficier de recettes

saint Graal ou autodéfEnsE ?

appel à la mobilisation pour une réforme de la T2a et des MIGaC

Entretien avecDr Jean-Luc Desmaretz, Président CMEPraticien Hospita-lier en Réanimation

(*1) Le Lean management est une approche systémique per-mettant de tendre vers l’excellence opérationnelle. Le Lean management met à contribution tous les acteurs pour éliminer les gaspillages qui ré-duisent l’efficacité et la performance d’une entreprise, d’une unité de production ou d’un département, notamment grâce à la résolution de problèmes. (source Wikipédia)

(*2) On s’est aperçu que l’alignement des tarifs sur les coûts faisait perdre une bonne partie de son intérêt à la T2A.

1091er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

supplémentaires, mais non vraiment justifiées en regard

de la politique de santé décidée nationalement. en

théorie, la t2A a trois vertus principales : elle améliore

la transparence financière (n’est payé que ce qui est

fait), l’équité entre établissements (à activité égale,

rémunération égale) et l’efficience (améliorer le coût

du même service rendu). Par contre, il est important

de remarquer qu’elle n’est pas conçue pour améliorer

l’accès, la qualité et la couverture optimale des soins.

elle peut cependant être un élément de leur amélioration

ou de leur dégradation au sein d’une politique de santé.

Quelle est la réalité de notre hôpital, la t2A un enfer

malgré les bonnes intentions : (1) la définition des gHM

est loin de se faire de manière transparente et concertée ;

(2) les tarifs baissent quand l’activité hospitalière globale

augmente afin de respecter au mieux les objectifs de

dépense définis nationalement ; (3) les tarifs sont

proches de la moyenne des coûts, ce qui n’incite pas

les établissements les plus performants à persévérer et

donne un objectif sous-optimal aux moins performants.

Ce qui limite singulièrement l’intérêt de la t2A !

loGiQuE dE « boutiQuiEr »Que conclure ? Qu’il n’y a pas de méthode idéale et

que la t2A a ses avantages et ses limites, à condition

qu’elle soit utilisée pour ce qu’elle peut faire et qu’elle

le soit de manière transparente. La t2A a profité au

secteur public, dont l’activité a connu une progression

continue. L’hôpital public a de nouveau pris une part

majoritaire dans l’activité hospitalière. La t2A a incité les

établissements à réorganiser leur activité, à s’interroger

sur l’évolution et l’efficience de celle-ci, ainsi que sur

la coopération avec leur environnement. C’est un outil

managérial décisif, qui lie l’activité et la rémunération.

Malheureusement, la t2A souffre de nombreuses

insuffisances. C’est incontestablement un mode de

financement inflationniste. Sa compatibilité avec la

pertinence des actes pose problème et il conduit à

réaliser des actes inutiles. Les enveloppes dédiées aux

missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation

(MIgAC) servent de variable d’ajustement ou

« d’apaisement ». À travers les gels de crédits, la régulation

budgétaire s’effectue sur les missions d’intérêt général,

mais cette enveloppe n’est pas moins nécessaire au

fonctionnement de l’hôpital que celle dévolue aux soins.

Au quotidien d’un président de CMe, la t2A constitue

un puissant frein aux coopérations. elle alimente

une logique de « boutiquier », chacun ayant intérêt à

maximiser les revenus de sa structure, en contradiction

avec les objectifs de coopération fixés par la loi HPSt.

reste que la t2A n’est pas le diable. en revanche, la

méthode française pour la mettre en œuvre risque de

conduire en enfer s’il n’y a pas de réflexion menée pour

la faire évoluer. reStONS MOBILISÉS. n

Darwin consultants, SARL fondée en 2003, spécialisée en conseil et service en sciences humaines et sociales, et originaire de l’Université Lumière Lyon 2. www.darwin-consultants.fr

Des psychologues de plus de 30 ans

d’expérience... Une expertise reconnue

des épreuves de sélection...

Conception d’épreuves de tests d’aptitudes (tests psychotechniques) et d’épreuves écrites (culture

générale) au programme des concours et sélections d’entrée en formation pour les écoles paramédicales (IFSI, AUX PUER, PUER, KINE, ORTHO…), pour de grands nombres de candidats.L’IFSI d’Armentières nous confie sa sélection depuis de très nombreuses années.

Le manuel interactif des-tiné à l’éducation et à

l’entraînement des aptitudes intellec-tuelles, accessible 24h/24. Un pro-gramme inspiré des méthodes dites d’éducabilité cognitive, à la disposition des élèves inscrits en préparation à l’IFSI d’Armentières.

A.COUSINA (Dirigeante Darwin consultants) et G.BROYER (Professeur Emérite de psychologie clinique)

Auteurs depuis 2001 de 3 ouvrages, toujours en publication, dédiés à la préparation dans un esprit d’éducation/formation.

Activité principAle

Activités éditoriAles

www.cervo-coaching.com

Editions ElsEviEr Masson

NISSAN LOMME8, rue Lavoisier - 59160 LOMME

Tél : 03-20-38-88-38Fax : 03-20-38-88-30

www.nissan-lomme.fr

110 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

DH magazine – « Votre » automate n’est pas celui de Maelzel ; plutôt que de jouer aux échecs, il distribue des médicaments… Vous êtes, bien sûr, à l’origine de ce projet d’automatisation !CHriStiaN boNeNFaNt − toute la profession

réfléchit à l’acquisition d’automates pour

généraliser la délivrance nominative des médicaments.

Des hôpitaux de la région Nord-Pas-de-Calais sont

déjà équipés. Les avantages de l’automatisation sont

le gain de temps et une sécurisation de la délivrance

des médicaments, avec une diminution du risque

d’erreur. La mise en place de la délivrance nominative

pour les lits de gériatrie nécessite 5 préparateurs

ou l’acquisition d’un automate de dispensation. La

deuxième solution a été retenue par le directoire lors

de la présentation du projet de pôle. L’informatisation

de tous les lits d’hospitalisation est un préalable à

la réalisation du projet. en 2013 commence l’étude

de faisabilité, en espérant que le projet se concrétise

en 2014. Pour le moment, soyons prudents, nous

sommes encore au stade « études et perspectives ».

Comment fonctionne un automate de distribution des médicaments ? Quels sont les avantages ? en dehors du coût, y a-t-il des inconvénients ?L’automate est connecté au logiciel de prescription. Il

peut ainsi préparer les doses à administrer par patient.

en fait, l’automate a l’intérêt de regrouper par patient,

par prise, l’heure de délivrance étant adaptée au tour

médical. Il est plus fiable que l’humain. Il permet un

important gain de temps. Il décharge l’infirmier(e) des

soucis de l’approvisionnement aujourd’hui réalisé. L’in-

firmière serait plus disponible lors de la préparation et

de l’administration des médicaments, avec réduction

des risques d’erreur médicamenteuse, liée notamment

aux interruptions de tâches. Mais il y a aussi quelques

contraintes et inconvénients. L’organisation de la déli-

vrance doit être parfaitement adaptée à l’organisation

médicale et infirmière. Il faut savoir gérer les pannes et

avoir des solutions « dégradées ». Des contrôles régu-

liers doivent être effectués pour vérifier le bon fonction-

nement de l’automate et de l’interface avec le logiciel.

Sans oublier que la mise à jour des nouvelles versions

des logiciels est souvent source de dysfonctionnement.

Le coût en consommables n’est pas non plus à négliger.

L’automate permet-il de distribuer n’importe quel médicament ?enfin, en fonction du type d’équipement, l’automate

ne sait pas toujours distribuer toutes les formes de

médicaments. Certains automates sont généralistes, ils

permettent de délivrer les formes orales et injectables,

mais ils ne préparent pas les doses orales liquides

à partir du conditionnement d’origine multidose –

flacon de solution buvable. D’autres ne délivrent que

les formes orales sèches – comprimés, gélules – non

fractionnées. Il existe aussi un automate spécifique

à la délivrance des doses orales liquides. Dans le

principe, tous les médicaments sont « automatisables »,

sauf les gros volumes tels que les solutés massifs, les

médicaments de chimiothérapie qui sont obligatoirement

reconstitués en pharmacie, les stupéfiants. Dans tous les

cas, l’automate reste sous le contrôle et la responsabilité

du pharmacien. L’investissement va de 250 000 € à

1 000 000 € selon le type d’automate. Bien sûr, il faut

prévoir le coût de la maintenance du matériel, des

interfaces avec le logiciel de dispensation, le coût en

consommables.

Vos compétences ne se limitent pas à la pharmacie, vous êtes aussi très sensibilisé aux erreurs dans la prise en charge médicamenteuse du patient. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette activité ? et, en particulier, quid du Crex ? La gestion des erreurs médicamenteuses fait partie

de l’activité pharmaceutique à partager avec les autres

professionnels de santé : médecins, sages-femmes,

infirmières, préparateurs. tout a commencé en 2009

avec ma participation à la sous-commission « erreurs

médicamenteuses » de l’OMeDIt Nord Pas-de-Calais,

la mise en place d’une fiche de déclaration des erreurs

médicamenteuses et une campagne de sensibilisation à

la déclaration – présentation en CMe, formation dans les

services de soins.

l’autoMatE d’arMEntièrEs

Distribuer les médicaments sans « distribuer » les erreurs : le rôle des CrEX

Entretien avecChristian Bonenfant, Pharmacien chef du CH d’ArmentièresPharmacien des Hôpitaux depuis 1980

La gestion des erreurs médicamenteuses fait partie de l’activité pharmaceutique à partager avec les autres professionnels de santé : méde-cins, sages-femmes, infirmières, préparateurs.

1111er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

(*) Retour d’expé-rience sur ce qu’on aurait dû faire et qu’on n’a pas fait, c’est-à-dire une erreurs médicamen-teuses.

De 2010 à 2012, nous avons constitué des comités de

retour d’expérience – CreX* – pluridisciplinaires : un

CreX central pour tout l’établissement et des CreX

par service ou pôle – réanimation, urgence, cardiologie,

pédiatrie, gynécologie obstétrique, chirurgie, gériatrie.

À chaque réunion de CreX, les erreurs déclarées sont

classées en fonction de la criticité et de la gravité.

Des actions sont proposées pour éviter que l’erreur

ne se reproduise. Le groupe peut sélectionner une

erreur pour une analyse approfondie selon la méthode

reMeD – revue des erreurs Liées aux Médicaments

et Dispositifs médicaux associés – élaborée par la SFPC

– dont je suis membre –, travail coordonné par Édith

Dufay. L’identification des causes permet d’élaborer un

plan d’action d’amélioration et de sécurisation.

Quels sont vos résultats ?Nous nous limitons aux erreurs médicamenteuses ;

les autres risques liés aux soins sont gérés par les

coordonnateurs de gestion des risques. Nous avons

enregistré 350 erreurs déclarées en 2011 à toutes

les étapes de la prise en charge médicamenteuse

– prescription, analyse pharmaceutique, délivrance,

administration, stockage –, mais les déclarations ne

sont pas exhaustives. Nos résultats ne s’arrêtent pas

aux chiffres. Nous réalisons un important travail de

sensibilisation des professionnels de santé au risque

d’erreur médicamenteuse, à la déclaration des erreurs.

Il faut travailler sur les organisations à chaque étape

de la prise en charge médicamenteuse, « faciliter » les

interfaces entre les différents acteurs de la prise en

charge médicamenteuse.

Comment faut-il comprendre le terme « erreurs interceptées » ?La mise en place de mesures barrières – analyse phar-

maceutique des prescriptions, contrôle à la délivrance,

contrôle lors de la préparation et de l’administration

au patient – permettent d’intercepter des erreurs à

chaque étape de la prise en charge médicamenteuse,

avant que le médicament ne soit administré au pa-

tient. L’erreur avérée est celle qui parvient au patient.

Qu’est-ce que la « conciliation thérapeutique » ? La conciliation thérapeutique consiste à comparer

le traitement de ville d’un patient hospitalisé avec

la prescription à l’admission du patient, d’identifier

les divergences et de corriger la prescription lorsque

cette divergence n’est pas intentionnelle car inconnue

du prescripteur. Nous avons effectué un peu plus de

500 conciliations en 2012. Lors d’une étude sur

2 mois, 25 % des patients « conciliés » présentaient une

divergence non intentionnelle.

Comment définissez-vous un « médicament à risque » ? Comment les gérez-vous ?Les médicaments à risque sont définis dans l’arrêté

du 6 avril 2011 sur le management de la qualité de la

prise en charge médicamenteuse en établissement de

santé. Pour ces médicaments, l’erreur d’administration

au patient a des conséquences graves, voire fatales.

L’exemple le plus souvent cité est l’injection intravei-

neuse directe de chlorure de potassium par confusion

avec les ampoules injectables de chlorure de sodium iso-

tonique. Nous avons défini une liste des médicaments à

risque au CHA, élaboré une fiche de gestion des risques

par médicament, diffusé une affiche lors de la semaine

sécurité des soins et, prochainement, les médicaments

à risque seront spécifiquement identifiés dans tous les

lieux de stockage.

CoQua pour un pharmacien, c’est de la « provo-

cation » ?

La COQUA est simplement la COmmission QUAlité qui

regroupe l’ensemble des groupes de travail qui travaillent

sur différentes thématiques de la prise en charge du

patient : douleur, hygiène, médicament, transfusion,

gestion des risques, éducation thérapeutique, parcours

de soins, dossier patient, information patient, éthique,

maltraitance… elle propose à la CMe un programme

d’action annuel et présente un bilan annuel des actions

réalisées. Pour le nom de la commission, le président de

CMe m’avait demandé d’en trouver un que tout le monde

retiendrait. Si j’en juge à votre réaction, nous avons

parfaitement rempli ce dernier objectif ! n

Démarrage de la dispensation à la délivrance nominative en 2008Tous les lits MCO en dispensation nominative en 2011

--> Début de l’informatisation du circuit du médicament en 2010. Fin de l’informatisation de tous les lits MCO et Gériatrie à la fin du 1er semestre 2013--> Gestion des risques liés aux médicaments :

n déclaration des erreurs médicamenteuses, animation de CREX et organisation de REMED à partir de 2009 n cartographie des risques de la prise en charge médica-menteuse à partir de 2011 n conciliation thérapeutique à partir de 2012

--> Activités transversales : n Président du CLIN de 1992 à 2010 n Président de la commission qualité de la CME depuis 2011--> En PROJET :

n accompagnement de l’ANAP pour la mise en place du tableau de bord des indicateurs d’activité, de qualité et de gestion des risques du pôle PUI-EOH-GRASn automatisation de la délivrance des médicaments

évolution dEs activités

112 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

DH magazine – Les responsables de « Com’ » ont des formations de base souvent très diverses. Quelle est la vôtre ?SyLViaNe PeLtier − Après le bac, j’avais

entrepris des études de psychologie à Lille III, mais la vie réserve des surprises. Des petits problèmes d’argent, un intérim dans le service marketing naissant d’une

grande entreprise du Nord et me voilà « repérée » comme communicante à fort potentiel ! Après, naturellement, je me forme aux techniques du marketing et de la communication – à l’époque les deux étaient indissociables. On est dans les années 80 et la communication, qui deviendra « La Com’ », n’en est qu’à ses débuts. Pour la petite histoire, l’eFAP*1 a ouvert ses portes en 1980, année où j’ai donné naissance à ma fille !

Vous n’avez pas toujours travaillé à l’hôpital… Mon cursus m’a amenée à travailler dans des structures diverses en taille et variées quant à leurs activités. Mon dernier poste avant d’intégrer le CHA ? Attachée de presse à La Poste. Métier qui vous apprend l’importance du relationnel et du carnet d’adresses ! Au CHA, le poste est très complet et j’ai en charge tous les métiers de la communication : com. interne, externe, relation presse. Je prends même les photos !

Lors de mes entretiens au CH d’armentières, j’ai pu constater que vous étiez un personnage original, plutôt hors norme… Êtes-vous d’accord avec cette « accusation » ?Mon style de communication va quand même dans le sens des Anglo-Saxons. J’aime que la com. interpelle. On vend de la lessive, mais on promeut la santé publique ! On interpelle sur les comportements à risque : tabac, alcool... Mais je ne suis pas convaincue qu’une « bluette » du style « chaussette rose, chaussette bleue » qui dit : « faut pas, c’est pas bien… » soit d’une grande efficacité. Personnellement, je vous mets une affiche choc : « tu vois ce que tu fais avec ce type de comportement ? » Par contre, je reste tendre avec ce qui doit l’être, maternité, allaitement, massage bébé, dépistages, etc. Il faut expliquer, mais pour ça, il faut être vu et quoi de plus visible que quelque chose qui dérange ou qui amuse mais qui, de toutes façons, ne laisse pas indifférent ?

effectivement, ça peut « déranger »… C’est un peu « hard », non ?Au début, mes campagnes d’affichage provoquaient de vives réactions, mais bon, il faut croire que les gens s’habituent… Maintenant, j’ai quelquefois des réactions

« fatalistes », du style : « la com a encore frappé. » Je m’amuse beaucoup avec la création, j’aime bien le côté « directrice artistique ». De plus, grâce aux rencontres Com’ organisées par la FHF, j’ai créé des liens avec quelques communicants hospitaliers. Nous mutualisons lorsque c’est possible. et, lorsque l’une d’entre nous « sèche », elle appelle les autres. J’ai créé les e.r.I.C.*2 au CHA et l’idée a été reprise dans d’autres hôpitaux. Lorsqu’une idée est bonne, nous essayons de la partager. Ça aide quand même, les hôpitaux ne sont pas très riches et ce n’est pas non plus un haut lieu de l’innovation communicante.

Vous n’êtes pas une créative pour rien… Vous avez également créé trois revues au CHa. Parlez-nous de chacune de ces trois revues ? jal’CHa - C’est le journal interne de l’hôpital. À mon arrivée, le journal interne – qui deviendra le jal’CHA, titre que je lui ai donné – était « en panne ». Plusieurs personnes avaient essayé de s’en occuper, mais c’est beaucoup de boulot. Les « intéressés » ont

un jEu dE coM’ ?

Entretien avecSylviane Peltier, Responsable Com-munication & Culture

(*1) La vocation de l’EFAP est de former des responsables de communica-tion capables de s’adapter à la diversité des tâches et à l’évolution des métiers grâce à un enseignement intimement lié à la vie professionnelle. (Source EFAP)

(*2) Espaces Ren-contre Information-Communication

L’aspect apparemment ludique de la communicationn’en nécessite pas moins beaucoup de professionnalisme

1131er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’armentières (nOrD)

bien dû se rendre à l’évidence : c’est méchamment chronophage et souvent très ingrat. Lorsque l’on a bossé sur les sujets proposés, rencontré les gens, pris les photos, travaillé la mise en page, les couleurs… bref, lorsque l’on s’est investie pour s’entendre dire : « c’est cher » – sans en connaître le prix s’entend – et « Personnellement, je ne l’ouvre même pas ! », il y a de quoi baisser les bras ! Mais c’est aussi ça, la com. : aider les gens à dépasser ce type de comportement. Les aider à avancer et à faire avancer l’hôpital.CHa’doc - C’est la documentation du CHA : elle dépend des médecins et de leur bon vouloir. Un document qui pourrait devenir un puissant support de com…CHa’alors - reliée directement à l’e.r.I.C., le Cha’alors est une sorte de fiche technique sur un sujet donné. Cela peut aller de l’allaitement à la situation budgétaire de l’hôpital. Du reste, c’est plus facile lorsque l’on s’appelle Centre Hospitalier d’Armentières, je peux jouer avec CHA…

Voulez-vous nous parler un peu d’e.r.i.C. ?e.r.I.C., c’est nos « espaces rencontre Information-Communication ». Chaque service a des actions internes. Promouvoir telle ou telle technique ou expliquer le pourquoi du comment. Se dire que, dans l’hôpital, un soignant peut souhaiter intégrer un autre service et donc s’intéresser à ce qu’il s’y passe. Bref, un e.r.I.C. permet d’informer plus avant l’ensemble de l’hôpital sur un sujet donné. Il s’organise en deux temps : on informe par mail des dates et du sujet des rencontres – une sur l’hôpital, l’autre sur le pôle gériatrie puisqu’ils ne sont pas situés sur le même site –, mail qu’il faudra renouveler au moins deux fois. Quand c’est possible, on donne l’info dans le jal’CHA. Le numéro dudit jal’CHA étant majoritairement consacré au service organisant l’e.r.I.C., une adresse mail est à disposition pour que chacun puisse poser ses questions. Pour le jour J, un CHA’alors est rédigé et remis à chacun des participants. C’est aussi un endroit où l’on pose les questions, où l’on trouve des réponses auprès des collègues. L’intérêt de telle ou telle technique, on valorise, on explique : on échange.

Votre philosophie est à l’épreuve des balles… L’hôpital a quand même du mal avec tout ce qui est « communication » ; du reste, j’ai écrit un article dans le journal interne pour expliquer à quoi ça sert ! Édifiant, non ? Naïvement, je pensais qu’au XXIème siècle, les gens ne diraient plus des trucs du genre « ça coûte des sous », « ça sert à rien », « à la place, on pourrait embaucher une infirmière », bref, des choses bizarres dans un siècle où l’on est sollicité à longueur de télé pour la moindre savonnette ! Mais, la Com’ est un métier passionnant, riche et innovant. On apprend chaque jour, et le champ est large. La Com’, plus qu’un métier, une passion ! n

1er fournisseur d’électricité et de gaz créé par des Entreprises Locales de Distribution

Alterna est un groupement de régies municipales, de sociétés coopératives agricoles d’élec-tricité et de SEML*: fournis-seurs historiques d’électricité, indépendants d’EDF.Alterna fédère des acteurs ayant un savoir-faire historique en ma-tière d’énergie, conseils et ges-tion de contrats multisites.Alterna est implanté locale-ment dans 12 départements et répond à vos besoins sur l’en-semble du territoire national.

IDEA Pro, c’est - 5 % sur votre abonnement par rapport aux tarifs réglementés. C’est un contrat souple, sécurisé, sans engagement de durée et sans frais de résiliation. Alt’Expert, c’est une offre d’électricité sur mesure pour les collectivités et entreprises.

Contactez la Régie d’Electri-cité de Loos : 03 20 10 14 50

* Soregies (Vienne, Poitou-Charentes) - Régie d’Electricité de Loos (Nord, Nord-Pas de Calais) - Terralis (Aisne) - Régie d’Allemont (Isère, Rhône-Alpes) - Régie de Bazas (Gironde, Aquitaine) - Energie Développement Service du Briançonnais (Hautes-Alpes, PACA) - Sicae du Carmausin (Tarn, Midi-Pyrénées) - Régie Gaz-Electricité de Carmaux (Tarn, Midi-Pyré-nées) - Régie de Cazouls-les-Béziers (Hérault, Languedoc-Roussillon) - Régie de la Ferrière (Isère, Rhône-Alpes) - Energies Services Lannemezan (Hautes-Pyrénées, Midi-Pyrénées) - Régie de Martres-Tolosane (Garonne, Midi-Pyrénées) - Régie de Pinsot (Isère, Rhône-Alpes) - SICAE de la Région de Pithiviers (Loiret, Centre) - Régie syndicale d’Electricité du Sud de la Réole (Gironde, Aquitaine) - Régie d’Energies de Saint-Marcellin (Isère, Rhône-Alpes) - Régie de Saint-Pierre d’Allevard (Isère, Rhône-Alpes) - Régie de Séchilienne (Isère, Rhône-Alpes) - Régie de Cazeres (Garonne, Midi-Pyrénées) - Régie électrique de la Caba-nasse (Pyrénées Orientales, Languedoc-Roussillon) - Régie Municipale multiservices de La Réole (Gironde, Aquitaine) - Régie de Miramont Les Comminges (Garonne, Midi-Pyrénées).

w w w. a l t e r n a - e n e r g i e . f r

Unique fabricant Français de lave-bassins

Découvrez le lave-bassin dont est équipé le Centre Hospitalier d’ARMENTIERES :

Le lave-bassins thermique CLINOX 3A Auto- Double pédale pour une sélection des cycles et un

démarrage sans aucun contact manuel- Chasse d’eau intégrée de série, pour une utilisa-tion en mode « vidoir traditionnel »- Un système de lavage haute performance, validé par l’institut Pasteur de Lille- Chargement par le dessus pour une ergonomie optimale- Jusqu’à 6 urinaux/bocaux lavés et désinfectés simultanément

Le lave-bassins qui en fera toujours plus.

ZI de la HOUSSOYE – Rue Ambroise PARE – 59280 BOIS-GRENIERTél : 03 20 10 36 90 - Fax : 03 20 35 95 [email protected] - www.arcania.com

Depuis 12 ans, Montaigne, société indépendante, conseille les établissements de santé en stratégie, organisation, gestion, finances, RH.

Montaigne / M-Accompagnement27 bd des Italiens - 75002 PARIS

01 80 05 21 [email protected]

Quoi de plus visible que quelque chose qui dé-range ou qui amuse, mais qui, de toutes façons, ne laisse pas indifférent ?

114 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013114 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1151er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

CH d’arrasUn ensemble plus vasteAu cœur de la Communauté Urbaine, le Centre Hospitalier d’Arras veille sur la santé de près de 300 000 habitants, dans un territoire qui s’étend sur la moitié du département. Entièrement reconstruit en 2007, il offre un cadre de soins moderne et accueillant, doté des technologies les plus en pointe. Il s’inscrit dans la Communauté Hospitalière de Territoire, qui réunit 4 établissements de dimensions équivalentes : Arras, Douai, Lens, Béthune. Cet ensemble devient la plus grosse communauté hospitalière de France.

1151er trimestre 2013 / DH magazine 145

116 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

DH magazine – Vous avez « attaqué » d’emblée sur le système informatique du CH ; est-ce votre projet prioritaire ? Marie-odiLe SaiLLard − L’idée d’un hôpital

entièrement numérique date d’un peu avant 2007. L’objectif

n’était rien de moins que d’être à la pointe de la technologie

numérique au CH d’Arras. L’objectif a été atteint : notre

informatique est réellement de très haut niveau. Cela fait

un peu prétentieux, mais puisque c’est vrai… tant pis. (rires)

Cette approche « moderniste » de l’hôpital, la volonté du

zéro papier, correspond largement à la réalité. D’accord, il

y a encore quelques dossiers papier dans mon bureau,

mais n’oubliez pas qu’en tant que directrice, on m’accorde

un statut spécial. (rires) Les médecins sont très en pointe

et devancent souvent l’administration. Seule la directrice

générale montre-t-elle parfois un léger agacement quand

tout le monde tape sur l’ordinateur lors des réunions au lieu

d’écouter… signe des temps !

L’un de vos prédécesseurs a été le concepteur du CH d’arras…tout à fait. C’était un hôpital « révolutionnaire » – ça l’est

toujours, d’ailleurs – et qui marche ! Son processus de

création n’a pas été évident d’emblée. D’un certain point

de vue, le CH s’est fait « un peu seul contre tous… ».

Mais, aujourd’hui, tout le monde se félicite du résultat.

Bien sûr, il a fallu consolider toutes ces innovations plus

ou moins fiables et, surtout, continuer à investir pour

conserver des infrastructures conformes à l’état de l’art…

Mais il n’y a pas que l’informatique…L’informatique n’est qu’un outil et non une valeur en soi.

Au CH d’Arras, nous avons un sens aigu de la collaboration.

Nous avons la volonté de faire les choses ensemble.

Cela n’est pas récent, depuis longtemps il existait, déjà,

entre nos établissements « des conventions dans tous

les sens ». Puis, notre réflexion sur le rapprochement

des quatre centres hospitaliers s’est cristallisée sous

EntrEtiEn avEcMarie-odile saillard,directeur général du cH d’arras

aussi dynamique que sans complexe, Marie-odile saillard dit les choses sans circonlocutions. directrice générale depuis mi-2010, elle a hérité d’un hôpital neuf « tout informatique », que lui ont laissé ses prédécesseurs.

Face à une très forte concurrence du privé, le CH d’arras ne manque pas d’atouts et sait les optimiser

coMPétition

1171er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

forme de « Convention constitutive de ce projet de

CHt de l’Artois-Douaisis » en 2009. C’était, il faut le

souligner, une initiative et une volonté hospitalière des

établissements. en 2010, l’ArS est entrée dans le jeu et

nous a apporté un redécoupage du territoire incorporant

le Douaisis et, partant, une CHt non plus à trois mais à

quatre avec le Centre Hospitalier de Douai. La convention

constitutive de la CHt est aujourd’hui presque réalisée :

il ne manque plus que la signature des parties. elle est

prévue le 14 février, jour de la Saint-Valentin ! Heureux

présage, indubitablement. Cette toute nouvelle CHt est

« un beau projet », qu’il faut bien conduire et pour lequel

nous n’avons pas le droit d’échouer. Ces quatre CH –

Arras, Lens, Béthune et Douai —couvrent aujourd’hui un

territoire d’1 250 000 habitants et « pèsent » 600 M€ de

budget annuel !

Qu’en est-il avec le secteur privé ?Ces collaborations sont importantes. Nous sommes

néanmoins plus souvent au stade de la compétition

que de la coopération… Le rapprochement public/privé,

fortement encouragé, est moins simple qu’il n’y paraît

et parfois situé entre la réflexion intellectuelle et le vœu

pieux. Les établissements privés ne se plient à l’exercice

que lorsqu’ils y trouvent leur intérêt objectif.

Soyons réalistes, nous avons en face du CH deux

grosses cliniques de la « générale de Santé » qui

viennent de se regrouper, sans oublier un très gros

cabinet privé de radiologie. Ces entreprises ont réalisé

des investissements importants et entendent bien

– c’est leur logique – les rentabiliser ! Il n’y rien de

choquant dans cela. De notre côté, notre atout est la

qualité. Nous entendons bien utiliser ce levier et nous

ne nous en priverons pas. Cependant, le secteur privé

bénéficie d’une grande souplesse d’action qui nous

fait défaut. tout au contraire du secteur privé qui peut

sélectionner les activités rentables, le secteur public

assume et assure tous les besoins des malades, quels

qu’ils soient… Bon, vous connaissez l’antienne depuis

longtemps… (rires)

et alors ?Nombre de médecins, chirurgiens et radiologues sont

sensibles au chant des sirènes du secteur privé. De fait,

la chirurgie et l’imagerie sont devenues l’apanage du

secteur privé : 80 % au privé contre 20 % au public.

À titre d’exemple, le CH ne dispose que de 5 etP de

radiologues ! C’est une situation peu confortable. Nous

ne sommes pas à égalité. Les choses seront, nous

l’espérons, rééquilibrées un petit peu avec – je touche

du bois – une IrM supplémentaire prochainement. Ce

challenge est très dur.

Mais, vous avez aussi quelques atouts…tout à fait, nous faisons nettement mieux avec la

maternité : 2 200 naissances à l’hôpital contre 800 dans

le secteur privé. Cette réussite n’est nullement liée au

hasard : qualité du chef de pôle et des chefs de service,

très bon encadrement médical, bon esprit de l’équipe.

Sans oublier l’atout du service de réanimation néonatale

et de notre unité kangourou. et, ce n’est pas surprenant

– les choses s’enchaînent naturellement – le service

dispose d’une très bonne image de marque dans toute

la région. Quand nous avons les même « armes », nous

pouvons nous montrer aussi bons, voire meilleurs, et

plus performants.

et en dehors de la maternité ?Je dois souligner la création d’une unité neurovasculaire,

sous l’impulsion du Dr Patrick Le Coz et avec le

Dr François Kenmogne Kambem, que vous allez

rencontrer tout à l’heure. Ils vous en parleront bien

mieux que moi. Par ailleurs, nous envisageons une

augmentation importante de la chirurgie ambulatoire, qui

représente aujourd’hui un peu plus de 30 % des séjours

de chirurgie, ce qui n’est pas suffisant : nous laissons

encore partir des parts de marché au secteur privé.

N’omettons pas que le CH d’Arras est le siège du SAMU

62, qui est un maillon central de l’offre publique de

soins de notre département. S’agissant des urgences, la

fréquentation est croissante d’année en année.

et les finances, toujours sous la ligne de flottaison ?Notre budget prévisionnel est à peine déficitaire : à

peu près 0,4 % du total des produits et je pense que

nous améliorerons ce chiffre avant la fin de l’exercice.

Cela veut dire que l’on s’en sort. Pour ce qui est de la

dette, reconnaissons-le, c’est plus difficile mais nous

ne relâchons pas notre effort, avec l’appui de l’ArS

qui nous a récemment soutenus et accompagnés dans

une démarche complexe de renégociation d’emprunts

toxiques. Cette démarche nous a permis de sécuriser,

jusqu’à fin 2015, une enveloppe totale de 46 M€.

Notre Directeur des services financiers, notre collègue

Bertrand Prudhommeaux, vous en parlera tout à l’heure.

Comme la quasi-totalité des autres hôpitaux, nous

sommes en recherche perpétuelle de marges pour

asseoir notre équilibre financier de façon pérenne, ce qui

implique d’importants efforts de la part de la collectivité

hospitalière arrageoise, et des arbitrages douloureux.

Vous plaidez coupable ?Certainement pas !!! (éclats de rire) La forte concurrence

des secteurs privé et public ne nous empêche pas

d’être les meilleurs sur plusieurs compartiments du

jeu. Par ailleurs, ce n’est pas la quantité d’actes réalisés

qui est essentielle mais la qualité des soins. Chez

nous, la volonté « d’excellence » n’est pas un vain

mot. L’hôpital marche bien, l’hôpital se bat, l’hôpital

fait du bon boulot. Donc, je ne plaide sur rien du tout !

Persiste et signe ! n

Public/privéQuand nous avons les même « armes », nous pouvons nous montrer aussi bons, voire meilleurs, et plus performants

Le CH d’Arras, un acteur majeur de la prise en charge hospitalière du territoire de l’Artois (chiffres 2012) : 45 000 passages aux

urgences, 47 000 séjours hospi-

taliers, 2 204 naissances 7 539 interventions au

bloc opératoire 8 pôles, dont

Médecine, Chirurgie, Obstétrique, Gériatrie et Santé mentale 2 400 agents, dont

200 médecins 185 M€ de budget

118 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

DH magazine – Quelle est la différence entre un emprunt à taux variable et un emprunt structuré ? bertraNd PrudHoMMeaux − Un emprunt à taux

variable – classique – est un emprunt dont le taux n’est

pas connu à l’avance car ce dernier est « arrimé » à un

indice – euribor, par exemple. Un emprunt structuré

se caractérise par la vente d’une option au profit de la

banque, ce qui se caractérise la plupart du temps par la

présence au contrat de la formule « si…, alors… ». Par

exemple, si l’euribor 3 mois est inférieur ou égal à 5,50 %

– on appellera ce taux une barrière –, alors le taux

applicable à l’emprunt sur la période est de 3,10 % ; si

l’euribor 3 mois est supérieur à la barrière, alors le taux

sera de 3,10 % + 5* (euribor 3 mois – 5,50).

Combien d’emprunts structurés le CH d’arras a-t-il contractés ?en réalité, la majeure partie de la dette du CH d’Arras est

constituée d’emprunts structurés, pour un total d’une

centaine de millions d’euros. environ 50 % de ce capital

peuvent être qualifiés de relativement inoffensifs.

L’autre moitié nous expose à un niveau de risque

beaucoup plus important : il s’agit d’emprunts structurés

indexés sur des cours de devises. Bien évidemment, ce

sont eux qui concentrent l’essentiel de nos efforts de

renégociation. Ces emprunts sont considérés comme

« hors Charte gissler ».

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est la « Charte Gissler » ? Que signifie, pour un emprunt, d’être « hors Charte Gissler » ?La Charte gissler est une classification du niveau de

risque associé aux différents emprunts en fonction de

deux critères :

L’indice sous-jacent au calcul de la formule de taux

d’intérêt – de 1 à 5, du moins risqué au plus risqué.

Ainsi, un emprunt assis sur un indice de la zone euro

sera considéré comme moins risqué qu’un emprunt

dont l’indice de référence est hors zone euro.

La structure de la formule – de A à e, du moins au

plus risqué. Par exemple, il est bien entendu moins

risqué de souscrire un emprunt à taux fixe – A – qu’une

option d’échange, ou swaption, qui permet à la banque

d’opter à une date déterminée pour un taux fixe ou un

taux variable – C.

Les emprunts les plus risqués – parfois cotés 6F – sont

considérés « hors charte ». Il en va ainsi de tous les

produits indexés sur des taux de change. Nous avons

trois emprunts de ce type, dont deux ont été renégociés :

> Le premier est indexé sur le rapport euro/Franc suisse,

pour un montant de 8 M€ courant sur 30 ans. C’est un

emprunt multiphase qui, après une première phase à

taux fixe, devait passer en mode structuré en novembre

2012.

> Le second a été souscrit auprès d’un autre

intermédiaire bancaire. Il porte sur un montant de 35 M€

et court jusqu’en 2035. Il est indexé sur le rapport Dollar/

Franc suisse.

> Le troisième emprunt, qui court jusqu’en 2039, est

également indexé sur le rapport Dollar/Franc suisse et

présente un capital restant dû de 11 M€. toujours dans

une phase taux fixe, il n’a pas encore été renégocié.

Comment fonctionnent ces emprunts ? en réalité, si l’on ne se laisse pas bluffer, ce n’est guère

compliqué. Comme vous l’avez compris, le taux d’intérêt

applicable à l’encours est subordonné à la réalisation

d’une condition, qui s’analyse en une option vendue par

l’hôpital en échange de taux d’intérêt bonifiés. Si cette

condition se réalise, par exemple le rapport euro/Franc

suisse franchit à la baisse une barrière fixée à 1,44, ce

Comment maintenir un niveau de frais financiers compatible avec le cycle d’exploitation de l’hôpital

PokEr MEntEur

Entretien avec Bertrand Prudhommeaux, Directeur adjoint, finances, pilotage médico-économique et SIH

le centre Hospitalier d’arras pré-sente un endettement important et risqué, conséquence de sa reconstruction, d’où le caractère

éminemment stratégique de la ges-tion de la dette. il s’est agi, en premier lieu, de renoncer au recours à l’emprunt pendant plu-sieurs années pour diminuer l’endettement. le capital restant dû total est ainsi passé de 163 M€ en 2007 à 145 M€ aujourd’hui. Mais l’équipe actuelle a également entrepris de renégocier certains des emprunts structurés contractés quelques années auparavant, en priorité les montages à devise, les plus risqués.

1191er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

n’est plus le taux bonifié qui s’applique ; le montant des

frais financiers est alors, pour chaque période, le fruit

de l’application d’une formule de calcul – niveau collège.

Le problème est que, pour certains de ces produits

structurés, en fonction des conditions de marché,

l’application de la formule peut entraîner une véritable

explosion des frais financiers, en raison de l’application

de forts coefficients multiplicateurs. Il s’agit donc d’une

forme de pari sur l’avenir.

Malheureusement, nous sommes nombreux à avoir

perdu. Dans notre exemple, le fait que le Franc suisse

joue un rôle de valeur refuge en temps de crise a eu

pour effet d’apprécier sa valeur relative au regard de

l’euro, d’où le très net franchissement de la barrière,

ce qui n’était jamais arrivé depuis la création de l’euro !

Un chiffre qui donnera froid dans le dos à tous mes

collègues DAF : au cours enregistré le 10 juillet 2011,

deux de nos emprunts – heureusement en phase taux fixe

à l’époque –, pour un total de plus de 40 M€, s’exposaient

virtuellement à des taux respectifs de 22 % et 23 %...

Pour rendre les produits structurés encore plus attractifs

aux yeux des décideurs publics, les banques ont souvent

proposé des emprunts « multiphases », pour lesquels la

fameuse structure n’entrait en action qu’après une première

phase à taux fixe à des taux incroyablement bas… Ainsi,

le CH détenait dans son portefeuille jusqu’à une période

récente un emprunt au taux record de 0,98 % !

Mais quand se trouve-t-on dans cette situation, il faut bien s’en sortir… Alors, on renégocie les emprunts. Ce n’est pas chose

facile et il n’y a pas de solution miracle ; si les anticipations

de marché ne sont pas favorables, il n’est pas possible

de désensibiliser ses emprunts sur toute leur durée de

vie : l’indemnité de remboursement anticipé est parfois

nettement supérieure au capital restant dû ! Nous avons

donc fait le choix de viser la sécurisation provisoire de

ces encours, en espérant qu’à l’issue d’une période

de deux ou trois ans, les cours soient stabilisés à un

niveau qui nous permette d’envisager des solutions plus

pérennes. Les négociations ont duré plusieurs mois,

avec, dans la phase la plus aiguë, des rencontres quasi

hebdomadaires, à la direction générale de l’hôpital,

entrecoupées de nombreux e-mails et conférences

téléphoniques.

La principale difficulté tient en l’asymétrie d’information

entre la banque et le dirigeant hospitalier : les mécanismes

financiers sur lesquels reposent les produits structurés

sont assez mal connus de la plupart d’entre nous… Il

est donc primordial de réduire au maximum cet écart.

Par ailleurs, si les banques concernées sont assez

ouvertes aux opérations de réaménagement de la dette,

les premières propositions sont souvent inacceptables

et font porter l’intégralité du coût de la sécurisation sur

la collectivité publique. Évidemment, on nous renvoie à

NHVUrgences médicalesSecours en merOffshore

NHV France21 Avenue Le Corbusier – 59042 LilleSiret n° 443 013 230 RCS LilleT : + 32 3 59 56 16 08E : [email protected] : www.nhv.be

120 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

l’équilibre financier du contrat signé, à la dépendance

vis-à-vis de la salle des marchés, à l’absence de

contreparties pour traiter l’opération, etc.

Les moyens de pression à notre disposition ? Pas grand-

chose, à part le risque d’image que représenterait pour

l’établissement bancaire la cessation de paiement de

l’hôpital pour cause de frais financiers exorbitants… Au

rang des atouts, il faut mentionner le rôle de l’ArS Nord

Pas-de-Calais, qui nous a toujours apporté son soutien, en

confiance et sans ingérence. Bien entendu, la première

pierre de cette relation de confiance, c’est la transparence

de l’établissement quant à la stratégie de renégociation

mise en place et un reporting régulier sur son déroulement.

Étant donné les volumes financiers en jeu et l’ampleur des

risques encourus, c’est bien le moins…

Pour quels résultats ?Considérant le contexte extrêmement défavorable dans

lequel se sont déroulées ces négociations – Franc suisse

au plus haut au regard tant du Dollar que de l’euro – et

sachant que la deadline était proche – entrée en action

de la phase structurée au 1er novembre 2012 pour l’une

des lignes –, je qualifierais le résultat de satisfaisant.

Les opérations traitées fin 2012 ont notamment permis

au CH d’Arras de :

a) geler temporairement la structure de l’« emprunt

n° 1 », c'est-à-dire le passer à taux fixe pour les deux

prochaines années. Le taux obtenu est certes plus élevé

que le taux bonifié correspondant à la première phase,

mais il n’a rien de prohibitif.

b) Scinder un autre emprunt structuré – prêt avec barrière

sur CMS 30 ans –, moins risqué, au capital restant dû

de 19 M€, la moitié de l’encours passant à taux fixe

sur toute sa durée de vie, l’autre moitié conservant sa

structure mais avec un abaissement du niveau de risque

– coefficient multiplicateur.

c) Passer à taux fixe l’« emprunt n° 2 » jusqu’à fin 2015.

Au global, le coût payé par l’établissement est supérieur à

celui généré par les taux bonifiés de ces dernières années,

mais il est nettement inférieur à celui dont nous nous

acquitterions si nous avions laissé ses produits vivre leur vie.

Quel a été le rôle du consultant ?

Franchement, essentiel ! J’évoquais tout à l’heure la

nécessité de réduire au maximum l’asymétrie d’information

entre la banque et l’hôpital : il va sans dire qu’il faut savoir

s’appuyer sur un bon consultant ! Certains d’entre eux ont

travaillé pour l’« ennemi », ils sont donc parfaitement à

même de décrypter les situations et les discours et d’aider

l’établissement à analyser les offres. Là encore, il s’agit

d’établir une relation de confiance. Pour les établissements

confrontés aux emprunts structurés, ma recommandation

serait de commencer par un audit global de la dette, qui servira

de base à l’élaboration d’une stratégie de renégociation. Il

est également primordial de se fixer des objectifs chiffrés

compatibles avec la perspective budgétaire pluriannuelle :

à quel niveau de frais financier l’établissement sera-t-il

capable de faire face dans les années à venir ?

Quel a été le rôle du décret du 14 décembre 2011 ?

Le premier objectif du décret du 14 décembre 2011 est

de soumettre à l’autorisation du Directeur général de

l’ArS le recours à l’emprunt des établissements de santé

dépassant certains ratios d’endettement. Par ailleurs,

il limite la possibilité offerte aux établissements publics

de santé de recourir à certains types d’emprunts et de

produits dérivés, en se fondant sur la matrice constituée

par la Charte gissler. Bien évidemment, les emprunts

« hors Charte » sont dorénavant interdits ! Le texte

prévoit, en outre, que les opérations de renégociation

menées sur les emprunts structurés doivent avoir pour

effet une réduction du risque, sous le contrôle de l’ArS.

Quelle expérience en retirez-vous ?

Au premier abord, ce sont des dossiers très techniques

et ardus, mais, en réalité, c’est « ultra-intéressant » et

intellectuellement stimulant. On a l’impression d’avoir

soulevé un coin du voile. en fait, il faut comprendre

comment ça marche. Les banquiers sont plutôt disponibles

et répondent assez facilement aux questions posées. C’est

également une expérience extrêmement enrichissante

en matière relationnelle. C’est quand même un mélange

de négociations et de coups de poing sur la table. Les

discussions sont suivies mois après mois, avec plusieurs

niveaux d’interlocuteurs. Il ne faut pas « jouer » au niveau

affectif, mais il y a toujours un côté poker menteur. Au départ,

l’hôpital paraît très mal armé pour traiter avec les banquiers,

mais il ne faut pas nourrir de complexe ! n

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

On a l’impression d’avoir soulevé un coin du voile. En fait, il faut comprendre comment ça marche

1211er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

DH magazine – Jusqu’à présent, la psychiatrie était peu présente dans dH Magazine, mais aujourd’hui, nous sommes sous contrainte devant vous... tout à fait, vous avez raison, mais, aujourd’hui, il y a

une considérable différence, vous avez le privilège de

passer devant un juge... (sourires) La mise en application

de la « loi du 5 juillet 2011 relative au renforcement

des droits des patients hospitalisés en psychiatrie » a

substantiellement modifié la donne. Jusqu’en 2011,

l’intervention systématique du juge en psychiatrie n’avait

pas été retenue par le législateur français, à l’inverse

de ses voisins européens. Désormais, le maintien en

soins psychiatriques d’un patient hospitalisé sans son

consentement est soumis à l’approbation du juge des

libertés et de la détention (JLD).

Le JLD est saisi de toute hospitalisation sans

consentement devant se poursuivre au-delà de 15 jours,

puis à nouveau tous les 6 mois. en plus de la saisine

facultative du juge, possible à tout moment, tous les

patients, sauf décision médicale contraire, sont donc

auditionnés et peuvent être représentés par un avocat.

Je suis donc aujourd’hui bien mieux protégé...S’agissant des soins, vous êtes déjà très bien

protégé, surtout si vous êtes hospitalisé au CH

d’Arras, dont la réputation n’est plus à faire.

(rires) S’agissant de votre liberté, vous êtes

assurément encore mieux protégé. Une

hospitalisation psychiatrique ne peut se faire

sans une procédure très stricte, de nature à

éviter toute contrainte qui ne se justifierait pas.

La première protection est le certificat

médical d’admission. Il exige, sauf

urgence et en cas de péril imminent,

deux médecins. Dans le cadre

de la procédure d’admission à la

demande d’un tiers classique et dans

celle de soins à la demande du représentant de l’État

– ex-hospitalisation d’office –, le premier certificat doit

émaner d’un médecin extérieur à l’établissement. Il doit

être circonstancié – état mental, caractéristiques de la

maladie – et daté de moins de 15 jours.

Deuxième protection, le « certificat de 24 heures » et

le « certificat de 72 heures », réalisés dans les mêmes

conditions. Le psychiatre constate l’état mental du

malade et confirme la nécessité de maintenir les soins

psychiatriques au regard des conditions d’admission.

Lorsque l'hospitalisation a été ordonnée avec un

seul certificat rédigé par un médecin appartenant à

l'établissement d'accueil, le certificat de 24 heures et

le certificat de 72 heures doivent être rédigés par un

médecin différent. ensuite, un psychiatre propose, dans

un avis motivé, la forme de prise en charge : hospitalisation

complète ou programme de soins. troisième protection,

La loi du 5 juillet 2011 relative au droit des patients hospitalisés en psychiatriea introduit un nouveau joueur : le Juge

un juGE in situ

Entretien avec Hélène Deruddre, Directeur adjoint,Politique en faveur des personnes âgées et de la Santé mentale

Agnès Fallenot,Juge des libertés et de la détention

122 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

enfin, le « certificat de huitaine » – 6, 7 ou 8ème jour – à

compter de l’admission initiale : c’est un nouveau certificat

médical circonstancié par un psychiatre indiquant si les

soins sont toujours nécessaires et précisant si la forme

de prise en charge demeure adaptée.

Mais je suis toujours en prison « contre mon plein gré »...Un hôpital psychiatrique ne peut pas être considéré

comme une prison... Le principe de base est clair :

le juge doit intervenir avant l'expiration du 15ème jour

d'hospitalisation. Cela signifie que sa décision doit être

prononcée au plus tard le 15ème jour suivant l'admission

en soins psychiatriques. À défaut, la levée est automa-

tique. en pratique, l'audience a lieu entre le 9ème jour et le

15ème jour – il faut que le dossier comprenne tous les

certificats. Mais le malade a le droit de demander immé-

diatement à voir son avocat. À tout moment, il peut éga-

lement saisir le juge ; c’est ce que l’on appelle la saisine

facultative.

il y a, je crois, plusieurs procédures d’urgence... tout à fait. D’abord, vous avez la procédure d’urgence

d’admission à la demande d’un tiers. elle intervient

de manière exceptionnelle en cas de risque grave

d'atteinte à l'intégrité du malade. Un seul médecin peut

en décider en fonction de l’état de santé du malade.

ensuite, la situation de péril imminent. La procédure

dite du péril imminent est mise en place s’il n’y a aucun

tiers, c’est alors la direction qui joue ce rôle. Mais

le médecin intervenant ne doit pas être un médecin

de l’établissement. enfin, les soins à la demande du

représentant de l’État – ex-hospitalisation d’office

– à la demande du maire – dans le cadre d’un arrêté

provisoire – ou du Préfet. C’est la situation lorsque les

troubles mentaux deviennent « d’ordre public ». Un seul

certificat médical d’admission est suffisant, mais il ne

peut pas émaner d’un psychiatre de l’établissement. en

revanche, un urgentiste peut le rédiger.

Qu’est-ce qu’un tiers ? N’importe qui peut-il être un tiers, un ambulancier, un membre du personnel de l’hôpital, un passant... ? Pour être qualifié de tiers, la personne doit justifier de

relations antérieures avec le patient lui donnant qualité

pour agir dans son intérêt. Le tiers ne peut donc pas être

un ambulancier ou un hospitalier. en revanche, ce n’est

pas nécessairement un membre de la famille : un voisin,

par exemple, peut être retenu comme tiers.

Que se passe-t-il quand le malade détenu doit être présenté devant le juge des libertés et de la détention ?Peut-être vaut-il mieux parler de malade sous contrainte

plutôt que de « détenu ». Le malade n’a commis

aucune faute qui justifierait une incarcération. Il est

sous contrainte pour se protéger de lui-même et aussi

pour protéger les autres... À remarquer qu’un patient

« sous contrainte » n’est pas nécessairement hospitalisé.

L’audience « ordinaire » se fait au tribunal : le malade doit

se déplacer, la plupart du temps avec un accompagnant.

Ce qui est peu pratique et pas nécessairement agréable... Nous en sommes tout à fait d’accord ! Aussi, dès l’été

2011, une étroite collaboration s’est instaurée entre le

ministère de la Justice – tribunal de grande Instance

d’Arras –, l’Ordre des avocats et le CH d’Arras. elle a

permis de répondre efficacement à l’un des aspects

réglementaires de la loi, celui du déroulement des

audiences au sein de l’établissement d’hospitalisation.

Ce qui représente un réel confort pour le patient, moins

angoissé qu’à l’idée de devoir se rendre au tribunal.

et concrètement ?Le juge et les avocats se rendent à l’hôpital une

fois par semaine. entre une et cinq personnes sont

auditionnées. Une salle d’audience a été installée à

1231er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH d’arras (Pas-De-CaLais)

l’hôpital selon des critères précis et très contraignants.

Les avocats disposent d’un espace leur permettant de

s’entretenir avec leur client en toute confidentialité. De

la même manière, le juge dispose d’un espace propice

à la délibération. et tout ceci est d’autant en moins

simple qu’il s’agit d’une audience publique. Même si

l’assistance se réduit à une ou deux personnes dans

le meilleur des cas, la procédure doit être respectée.

Le juge sait quand même faire preuve d’un peu de

« souplesse procédurale ».

Il peut ainsi décider de siéger en chambre du conseil,

ce qui signifie que l’audience perd son caractère

public. Il peut le faire notamment si les débats

risquent de porter atteinte à l'intimité de la vie

privée du patient, ce qui est facile à établir puisque

ce sont ses problèmes médicaux qui sont exposés.

resteront alors dans la salle le juge, sa greffière, le

patient, l’infirmier qui l’accompagne et le tiers qui a

fait la demande de soins. À l'issue de l’audience, le

juge fait part oralement de sa décision de maintien

ou de levée de l'hospitalisation, qui n’est donc pas

confidentielle. en revanche, la décision « papier »

n'est remise qu'aux parties, qui peuvent en relever

appel.

y-a-t-il des contraintes ?

Oui, pour la juge ! (rires) Ceci est souvent en fonction

de la disponibilité du juge ou de la distance entre

l’hôpital et le tribunal. C’est une des limites de notre

action ; si un nouveau juge estime n’avoir pas le temps

disponible, les audiences se feront à nouveau au

tribunal. Aujourd’hui, cette procédure est utilisée par

environ un quart des juridictions. en 2012, le CH d’Arras

a eu à organiser 202 mesures sous contrainte, dont :

152 sur demande d’un tiers, 19 en péril imminent et 31

sur décision du représentant de l’État. n

CLINIQUE PSYCHIATRIQUE LE RYONVAL

Tél : 03 21 50 71 71 - Fax : 03 21 24 27 28182 route de Lens

62223 SAINTE CATHERINE

EMPlACEMENT oFFERT

par le cabinet d’anatomie et

de cytologie pathologiques partenaire du Centre Hospitalier

Cette collaboration a permis de répondre efficacement à l’un des aspects réglementaires de la loi, celui du déroulement des audiences au sein de l’établissement d’hospitalisation

124 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013124 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1251er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

Ch de Charleville-MézièresCoopération dans les Ardennes

La coopération public-privé redessine l’offre de soins dans les Ardennes. Pour préserver l’activité d’une clinique de Charleville-Mézières, l’hôpital s’est associé avec divers partenaires publics et privés dans le cadre d’un Groupement de Coopération Sanitaire (GCS) : le GCS Territorial Ardenne Nord, au sein duquel mutualisation et coopération sont de mise. Il s’agit de l’un des exemples de coopération public-privé les plus aboutis sur le territoire national.

1251er trimestre 2013 / DH magazine 145

Reportage de Guillaume Lefoulon, membre d'EHESP Conseil, associa-tion des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

126 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

iMPact

EnvironnEMEntal

rePOrtage DH : CH de CHarLeViLLe-mÉzières (arDennes)

lE Gcs : unE solution pour préserver l’activité de la clinique du Parc À l’origine de la création du gCS, il y a la décision du

groupe propriétaire de la Clinique du Parc de Charleville-

Mézières de vendre cette dernière. Les perspectives

de la démographie médicale dans le département et au

sein de la clinique sont un élément important de cette

décision. La polyclinique, financièrement à l’équilibre,

soigne 11 000 patients par an.

Certains acheteurs potentiels se sont manifestés mais

il existait le risque d’un transfert de fait d’une part de

l’activité chirurgicale de la clinique en dehors du dépar-

tement. Dès lors, avec le soutien de l’Agence régionale

de Santé (ArS) de Champagne-Ardenne et de plusieurs

acteurs locaux, l’hôpital de Charleville-Mézières a déci-

dé, en partenariat avec celui de Sedan, de se position-

ner pour la reprise de la polyclinique en s’associant à

d’importants partenaires dans le cadre du gCS territorial

Ardenne Nord. C’est finalement cette solution qui a été

retenue.

lE rEdrEssEMEnt budGétairE de l’hôpital de charleville : un préalable nécessaire à la reprise de la clinique du ParcLa création du gCS accompagne le redressement

financier de l’hôpital et inversement. Un hôpital exsangue

dans ses comptes n’aurait eu aucune crédibilité pour

se positionner au sein d’un gCS visant à maintenir et à

développer certaines activités médicales sur le territoire.

Par ailleurs, un établissement dont la situation budgétaire

est dégradée attire peu. Lorsque j’ai pris mes fonctions, fin

2010, le déficit réel, hors aides, de l’hôpital de Charleville

atteignait 7,2 millions d’euros, soit environ 5 % du budget.

Fin 2011, il était de 1,7 million d’euros. L’hôpital a dégagé

un excédent net de 500 000 euros en 2012, avec une

progression de l’activité médicale

située entre 4 et 5 %.

Pour y parvenir, nous avons

mis en place une gestion en

pôles, accompagnée d’une

importante réorganisation de l’hospitalisation.

Ainsi, de nombreux services sont passés à une

hospitalisation de semaine. De la sorte, nous soignons

davantage de patients en un temps plus réduit.

La prise en charge en ambulatoire a, en outre, augmenté

de 20 %. Certaines unités se sont ouvertes à plusieurs

spécialités au sein d’un pôle, ce qui a permis de fluidifier

le parcours du patient et d’optimiser l’utilisation des

ressources. Le corps médical a été largement impliqué

dans ces réformes.

Les pôles sont intéressés à l’amélioration de leurs

performances : si l’hôpital est excédentaire, 80 % de

l’excédent est partagé entre les pôles excédentaires

au prorata de leurs contributions respectives à cet

excédent. en revanche, dans les services où il y a peu

d’activité, les capacités ont été revues à la baisse. Les

clés du changement furent donc le développement

de l’hospitalisation à la semaine et de l’ambulatoire,

le décloisonnement des lits entre spécialités,

l’intéressement des pôles, l’implication des personnels

médicaux et non médicaux.

Il existait le risque d’un transfert de fait d’une part de l’activité chirurgicale de la clinique en dehors du département

EntrEtiEn avEcjean-christophe Phélep, directeur de l’hôpital de charleville-Mézières et administrateur du Gcs

1271er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH de CHarLeViLLe-mÉzières (arDennes)

lE Gcs : la MisE En PlacE d’un partenariat équilibré public-privé dans l’intérêt du territoireLe gCS ne consiste pas pour l’hôpital public à

assumer les pertes d’une clinique privée au nom de

l’aménagement du territoire. D’ailleurs, la Clinique du

Parc était bénéficiaire et le prix à payer pour la reprise

était donc relativement élevé. L’opération consiste en un

véritable partenariat gagnant-gagnant entre des acteurs

issus du public comme du privé. en effet, la mutualisation

logistique permettra de dégager davantage d’excédents

pour le gCS comme pour l’hôpital.

Au sein du gCS, les attributions des différents parte-

naires se répartissent ainsi : les activités de court séjour

sur les sites des hôpitaux de Sedan et de Charleville-Mé-

zières, l’Hospitalisation à Domicile (HAD) sera gérée par

la Mutualité des Ardennes, l’activité SSr ainsi que 50 lits

d’eHPAD par le groupe Orpéa. Par ailleurs, c’est Orpéa

qui a racheté les murs de la clinique et qui se charge de

la reconvertir en un établissement de soins de suite mo-

derne de plus de 100 lits. Le SSr accueillera notamment

les patients de l’hôpital et les médecins qui le gèreront

seront ceux de l’hôpital. Le montage peut paraître relati-

vement complexe. Notons toutefois que, sur le terrain,

les professionnels travaillent ensemble sans que nous

ne souffrions de la moindre opacité.

lE Gcs : un EsPic qui participe à la Permanence des soins (Pds) Le gCS, de droit privé, est un Établissement de Santé

Privé d’Intérêt Collectif (eSPIC) et fonctionne comme

tel. Les médecins sont libéraux. Le gCS transmet son

activité à l’Assurance maladie, puis reverse aux méde-

cins leurs honoraires. Nous avons également demandé

au gCS de participer à la permanence des soins pour

faire face au défi de la démographie médicale dans la

région. Cela faisait partie de la négociation globale ayant

donné lieu à son élaboration. enfin, le gCS renforce

notre attractivité auprès des médecins puisque nous

sommes en mesure de leur offrir le choix entre une acti-

vité libérale proche des conditions des cliniques privées

et une carrière de médecine hospitalière. Par ailleurs, il a

été mis fin aux dépassements d’honoraires sur les actes

chirurgicaux. n

Le GCS ne consiste pas pour l’hôpital public à assumer les pertes d’une clinique privée au nom de l’aménagement du territoire GCS renforce notre attractivité auprès

des médecins puisque nous sommes en mesure de leur offrir le choix

128 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

+ 33 (0)1 53 43 62 83contact@eurobioconcept. fr

www.eurobioconcept. fr

Expert en solution de confinement et conception d’isolateur

Spécialiste dans la réalisation d’unité de préparation

des produits cytotoxiques pour les pharmacies hospitalières.

Z.A. Les Grands Prés26110 Saint Maurice sur Eygues

Tél : 04 75 28 26 65 - Fax : 04 75 28 51 08

63X45-ATLANTIS-NH 7:Mise en page 1 7/12/0

Z.A. Les Grands Prés26110 Saint Maurice sur Eygues

Tél : 04 75 28 26 65 - Fax : 04 75 28 51 08

63X45-ATLANTIS-NH 7:Mise en page 1 7/12/0

28 Bis rue de la Gare08090 Tournes

T. 03 24 54 92 64 - F. 03 24 54 90 [email protected]

Maçonnerie Plâtrerie (Traditionnel – Protection feu)

Menuiseries diverses(Fabrication sur mesure

Escaliers - meubles...)

Plafonds suspendus, décoratifs

REMERCIEMENT

lESS FRANCE SARl Commercialisation de consommables

et d’accessoires de laboratoires 18 Rue derrière la Montagne

77500 CHELLESwww.lessfrance.com

ASCOHAssistance & conseil

Organisation, management, assistance technique, juridique et ingénierie

T. 09 64 28 08 83GSM 06 32 81 82 06F. 04 72 82 05 [email protected] &[email protected] Le Millenium - Bât C.4, rue de la Buire 69003 LYON

Robert PerezIngénieur général

hospitalier honoraire

Domaine hospitalier

abonnEZ-vous ! réaBONNEZ-VOUS !

À TITrE INSTITuTIONNEL Version papier ——————————————————————————————————— 30 € Verion papier & pdf ———————————————————————————— 30 € Version pdf uniquement ——————————————————————— 15 €

À TITrE pErSONNEL Version papier ——————————————————————————————————— 22 € Verion papier & pdf ———————————————————————————— 22 € Version pdf uniquement —————————————————————— 10 €

DHLE MAGAZINE DU DECIDEUR HOSPITALIER

DH Magazine, c’est 4 numéros par an.Toute l’information dans le monde hospitalier.Abonnement en version papier et en version web disponible à des tarifs exceptionnels, jusqu’à 50 % de remise.

Merci de nous retourner par courrier votre réglement, à DH Magazine - 67, bd du Gal Michel Audéoud - 83000 Toulon. Une facture vous sera retournée. Pensez à bien remplir les champs ci-contre.

Nom : ...................................................................................................................................................................................

Prénom : .........................................................................................................................................................................

Adresse : .........................................................................................................................................................................

......................................................................................................................................................................................................

CP : ....................................................Ville : .................................................................................................................

Tél : ................................................................................................................................................... (Réf. DH145)&

1291er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH de CHarLeViLLe-mÉzières (arDennes)

fairE facE à unE déMoGraPHiE médicale vacillante ou comment soigner mieux avec moins de médecins

DH magazine – Qu’en est-il de la démographie

médicale dans les ardennes ?

xaVier FoNtaiNe − elle est déjà inférieure à la

moyenne nationale. Bien que notre région dispose de

certains atouts, elle peine à attirer les jeunes médecins.

Or, du fait des départs à la retraite, elle va faire face dans

les prochaines années à un grave problème de démo-

graphie médicale. 50 % des chirurgiens du département

seront à remplacer dans les 5 ans. entre la clinique, les hô-

pitaux de Sedan et Charleville, 75 médecins spécialistes

vont partir à la retraite d’ici 7 ans. Cette démographie

médicale en berne implique une profonde réor-

ganisation sanitaire pour maintenir la qualité des

soins dans le département des Ardennes. Une

tâche que l’on pourrait résumer par la formule :

soigner mieux avec moins de médecins. La démogra-

phie médicale fait partie des facteurs à l’origine du projet

de création du gCS territorial Ardenne Nord, ainsi que

des nombreux travaux et restructurations menés depuis

deux ans sur l’hôpital de Charleville-Mézières.

un effort de ModErnisation dE l’HÔPitalPouvez-vous nous en dire plus sur ces travaux de

reconstruction et ces restructurations de services ?

Ils s’inscrivent dans notre constant effort de modernisa-

tion, ainsi que dans le plan de retour à l’équilibre finan-

cier de l’hôpital. Ce dernier était historiquement scindé

en deux grands bâtiments : Corvisart et Manchester. Les

travaux de construction et de modernisation

des bâtiments ont de permis de rapatrier l’acti-

vité de court séjour sur Manchester. L’impor-

tant était notamment de prendre en compte la

typologie des soins, ainsi que les grandes

tendances que sont le développement de

l’hôpital de semaine et l’ambulatoire. tou-

tefois, les reconstructions continuent pour

encore quatre services. Concernant les restructura-

tions et réorganisations de services qui les accom-

pagnent, elles sont issues d’une réflexion sur le par-

cours de soins des patients. Pour prendre un exemple

qui me touche directement, le SAMU et les Urgences

ont fusionné en un seul service : le Service Médical d’Ur-

gences, mais on pourrait aussi citer la mise en place des

hôpitaux de semaine de chirurgie et de médecine.

PartaGE du bloclEs ardEnnEs : un déPartEMEnt facE au défi dE la déMoGraPHiE MédicalE

Entretien avec Dr Xavier Fontaine, Médecin esponsable du service de médecine d’urgenceet Président de la CME du CH de Charleville-Mézières

130 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

cHirurGiEns dE l’HÔPital Et dE la cliniQuE vont partager un bloc opératoire

Qu’est ce qui va changer concrètement pour

les équipes de l’hôpital avec la création du GCS

territorial ardenne Nord ? Nous allons devoir apprendre à travailler ensemble.

Dorénavant, les médecins libéraux de la Clinique du

Parc viendront travailler sur l’hôpital. Au sein de celui -ci,

deux services seront dédiés à la chirurgie est de

monter des astreintes chirurgicales communes avec les

praticiens libéraux, qui en ont accepté le principe. Avoir

une équipe plus importante permettra davantage de

souplesse dans l’organisation et davantage d’attractivité

auprès des jeunes médecins, auxquels nous pourrons,

en outre, donner le choix entre différents statuts : libéral

dans le gCS ou public à l’hôpital.

accuEillir lEs intErnEs dans les meilleures conditions possibles

Quelles sont vos solutions pour faire face aux

difficultés du territoire en matière de démographie

médicale ?

essentiellement pour l’hôpital, veiller à accueillir les

internes dans les meilleures conditions possibles. Cela

consiste, sur le terrain, à leur donner de très bonnes

conditions de travail et d’apprentissage, avec un plateau

technique satisfaisant, mais aussi à maintenir une bonne

ambiance dans le service pour que les jeunes aient

envie de revenir travailler avec nous. et puis, il y a des

possibilités d’action très concrètes pour l’accueil des

nouveaux médecins : aider à trouver un logement, une

place en crèche ou une école pour les enfants. Cela est

d’autant plus nécessaire qu’il y a un effet ciseau entre

démographie médicale en baisse et vieillissement de la

population, donc accroissement des besoins.

MaintEnir l’offrE dE soins sur les ardennes

Les ardennes sont-elles particulièrement touchées

par le vieillissement ?

Comme l’ensemble du territoire national. Le vieillissement

impose une réflexion sur l’organisation des structures

et de l’offre de soins, ainsi que le maintien voire le

développement de services-clés pour répondre aux

besoins des patients : gériatrie, diabétologie, neurologie,

cardiologie notamment. Le gCS est l’un des éléments

qui vont permettre de répondre à cet objectif. n

le centre Hospitalier de charleville-Mézières constitue

le principal pôle sanitaire du département des ardennes.

centre hospitalier de référence du secteur sanitaire

« ardennes nord », il dessert un bassin de population de

230 000 habitants. il est aussi une des plus importantes

structures sanitaires publiques de la région champagne-

ardenne, derrière le cHu de Reims et à égalité avec le

centre Hospitalier de troyes (aube).

l’établissement exerce également une attraction

géographique qui s’étend aux départements limitrophes

de l’aisne et de la Meuse. trois cantons de la Meuse

(Montmédy, stenay et Dun-sur-Meuse) et deux de l’aisne

(Rozoy-sur-serre et Hirson) recourent fréquemment au

centre Hospitalier de charleville-Mézières.

le centre Hospitalier de charleville-Mézières est un

établissement multisite, qui offre des possibilités de

prise en charge d’un grand nombre de pathologies,

depuis la naissance jusqu’au grand âge. il dispose d’une

capacité d’accueil de 457 lits en médecine, chirurgie,

obstétrique, auxquels s’ajoutent 48 places de chirurgie

ambulatoire et hospitalisation de jour et 68 lits de soins

de suite et de réadaptation.

il est doté d’un service d’accueil des urgences,

siège du saMu 08, d’un service mobile d’urgence

et de réanimation (sMuR) et d’un plateau technique

complet et de qualité, d’équipements lourds : iRM,

scanners, gamma-caméra, angiographie numérisée.

le centre Hospitalier est classé centre périnatal de

niveau ii B et dispose d’une unité de soins intensifs

néonataux.

le secteur des personnes âgées comporte 65 lits en

soins de longue durée et 239 lits en eHPaD. n

FOCUS SUr l’HôPiTAl DE CHArleVille-Mézières

rePOrtage DH : CH de CHarLeViLLe-mÉzières (arDennes)

1311er trimestre 2013 / DH magazine 145

un ProjEt soutEnupar une grande majorité du corps médical de l’ancienne clinique du Parc

DH magazine – Vous êtes issu de l’activité

de médecine libérale de la Clinique du Parc. dès le

départ, vous avez soutenu l’offre de reprise de la

clinique dans le cadre du GCS. Pourquoi ?

iSSaM FraNGi − en effet. Cela n’a pas été sans sou-

bresauts. tout changement entraîne une résistance

spontanée et vous pouvez imaginer les tensions et les

doutes, qui s’exprimaient parfois violemment chez les

médecins. in fine, une très large majorité du corps médi-

cal exerçant au sein de la Clinique du Parc a accepté ce

projet. Il permettait aux médecins de continuer à exercer

dans la même ville, et, à peu de choses près, dans les

mêmes conditions.

Nous conservions également la possibilité de travailler

avec nos équipes paramédicales, ce qui était essentiel.

L’indépendance des médecins libéraux était respectée.

et puis, certains médecins craignaient de devoir aller

exercer à reims, à 50 minutes de la ville. La possibilité

de maintenir l’activité sur Charleville était essentielle.

enfin, cette proposition nous semblait la plus pragma-

tique par rapport aux autres offres de reprise. elle était

humainement, médicalement et financièrement le plus

réaliste. De plus, ce projet se fait dans l’intérêt des Ar-

dennes qui font déjà face à de graves difficultés écono-

miques et une démographie déclinante.

L’ensemble de ces facteurs explique que le projet

ait été largement soutenu par le corps médical…

Nous sommes conscients qu’il y aura au début des

difficultés, mais les problèmes sont faits pour être

surmontés. D’ailleurs, les difficultés sont situées

de part et d’autre : du côté du libéral qui appréhende

l’atterrissage dans un site hospitalier, mais aussi

du côté de l’hospitalier qui accepte de

céder une « partie de son territoire ».

Mais peut-être qu’il est important de se

rappeler qu’avant d’être des libéraux ou des

hospitaliers, nous sommes des médecins.

unE PErManEncEdes soins renforcée

Comment le GCS s’intègre-t-il dans la

permanence des soins sur les ardennes ?

Le gCS offre plus de facilités pour créer une

permanence des soins commune. Il la favorise

par le biais du regroupement de spécialités

sur un même site. Ceci se met en place

progressivement. À titre d’exemple, les

chirurgiens urologues libéraux et hospitaliers ont

déjà démarré des astreintes communes à l’échelle

du département. Cette astreinte spécifique en urologie

faisait partie auparavant de celle de chirurgie générale.

Le gCS a permis indubitablement la concrétisation de

cette astreinte.

un ProjEt innovantsur le point d’aboutir

où en êtes-vous actuellement ?

Le déménagement des libéraux sur le site de l’hôpital

est prévu début mai 2013. Sur plusieurs aspects, le gCS

est bel est bien lancé.

Quels sont les facteurs qui ont contribué à

l’aboutissement du projet ?

Le fonctionnement indépendant et séparé des libéraux a

bien été respecté. La psychologie des médecins libéraux

a été parfaitement comprise. Le fait que les médecins,

dans leur grande majorité, travaillaient à temps plein

à la Clinique a favorisé l’implication de chacun d’entre

nous dans la recherche d’une solution. Par ailleurs, Il

est certain que le dynamisme de l’administrateur du

gCS, directeur de l’hôpital, et sa connaissance du milieu

libéral ont également pesé fortement dans la réussite de

ce projet. n

surMontEr lEs difficultésla PErManEncE dEs soins au cœur du Gcs

Entretien avec Dr Issam Frangi, chirurgien urologue et Président de la CME de la Clinique du Parc - Groupement de Coopération Sanitaire Territorial Ardenne Nord

Mais peut-être qu’il est important de se rappeler qu’avant d’être des libéraux ou des hospitaliers, nous sommes des médecins.

rePOrtage DH : CH de CHarLeViLLe-mÉzières (arDennes)

132 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Reportage de Thibault Jurvillier, membre d'EHESP Conseil, association des élèves de l'école des Hautes études en Santé Publique (EHESP)

1331er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

CH Intercommunaldu pays des Hautes Falaises

Les hauteurs de FécampAprès la construction du nouveau Centre Hospitalier (2006), c’est le tour de l’architecture… informatique, qui apporte sa pierre à l’édifice, en particulier avec le lancement du Dossier Patient Informatisé. Architecture aussi, celle des pôles médicaux, qui se voient confier une délégation de gestion substantiellement accrue. Mais, le ciment qui assure la solidité de l’édifice, c’est la proximité et le sens du dialogue de tous les professionnels de l’établissement.

134 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

DH magazine – Pourriez-vous résumer

l’histoire récente de l’hôpital ?

aLaiN reNaud − Il y a une dizaine d’années, l’hôpital

était dans des bâtiments vieillissants et inadaptés

en centre-ville, avec un taux de fuite important vers

Le Havre. Il y avait également une clinique qui était

moribonde, dans une situation assez proche de celle

de son concurrent public. Le besoin de reconstruire

était patent. L’Agence régionale de l’Hospitalisation a

alors conditionné son financement à la rationalisation de

l’offre de soins sur le territoire en mettant le public et

le privé sous le même toit et sans concurrence. Cette

initiative a été salutaire. Le nouveau bâtiment et la qualité

de l’ensemble du personnel ont permis d’augmenter

l’activité de 36 % depuis 2006.

Comment s’organisent les relations avec la

clinique ?

La clinique verse un loyer à l’hôpital pour l’occupation

des locaux. Une mutualisation des fonctions logistiques

a été mise en place. Ainsi, la stérilisation est assurée par

la clinique. L’hôpital gère la blanchisserie et la restaura-

tion est en projet. Par ailleurs, l’architecture informatique

est commune aux établissements et le CH est chargé de

la maintenance de l’équipement et du développement

de l’infrastructure, comme le wi-fi. Il existe même un

annuaire commun aux professionnels des deux établis-

sements. Une piste d’approfondissement intéressante

serait la mutualisation des blocs opératoires.

C’est un mariage de raison, il y a des intérêts mutuels

et des engagements réciproques. Les urgences sont

un point d’entrée essentiel pour les deux structures.

L’affaiblissement de l’une ne profiterait pas à l’autre

mais serait préjudiciable aux deux. J’insiste sur le fait

que cette synergie n’est possible que par la qualité des

acteurs. Cela reste un équilibre subtil et réversible.

Quels sont les atouts de l’établissement ?

Les locaux sont encore neufs et en excellent état. Les

équipes médicales s’entendent bien et l’ambiance

est bonne. L’établissement est dans une dynamique

d’augmentation de son activité depuis son installation

sur le nouveau site, ce qui témoigne d’une attractivité

retrouvée. Dans son environnement général, la qualité

de vie à Fécamp est un atout, avec le bord de mer

et un port de plaisance. rouen est à 1 heure et Paris

à 2 heures 30.

sans concurrEncE !

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

EntrEtiEn avEcalain renaud, directeur Général

La confiance dans la qualité des professionnels de santé

Cette synergie (Public-Privée) n’est possible que par la qualité des acteurs

1351er trimestre 2013 / DH magazine 145

Quelle est la situation financière de l’établisse-

ment ?

L’investissement au cours de ces dernières années a

été très important, avec la reconstruction de l’hôpital

sur le nouveau site, la création du centre de gériatrie

Yvon Lamour et du pôle logistique. Comme tous les

établissements qui ont investi massivement, le niveau

d’endettement est significatif, mais il est maîtrisé et

commence à amorcer une décrue. L’équilibre financier

global est respecté, à la nuance près que les soins

de suite et de réadaptation - SSr - sont notoirement

sous-dotés. Nous attendons donc avec impatience le

financement du SSr par la t2A pour combler ce manque

à gagner significatif, mais la réforme est sans cesse

repoussée et notre dotation n’est pas revalorisée. Ce

qui va avoir un impact très négatif dans les exercices

prochains. L’ArS, qui a validé cette analyse, se montre

bienveillante, dans un accompagnement qui devrait

aider l’établissement jusqu’à la mise en œuvre de la

t2A. Néanmoins, pour l’instant, la gestion prudente de

notre fonds de roulement nous permet de conserver un

niveau de trésorerie satisfaisant, ce qui est actuellement

un atout capital.

Quels sont les grands projets en cours pour

l’établissement ?

Nous sommes en train de préparer le déploiement

d’un système d’information entièrement refondu,

comportant à la fois la gestion du Dossier Patient

Informatisé - DPI -, dont le Circuit du Médicament et

les solutions administratives. Par ailleurs, nous sommes

déjà très avancés dans la délégation de gestion faite

aux pôles en matière de ressources humaines et nous

souhaitons poursuivre ce mouvement.

Pourquoi tout faire en même temps en informa-

tique ?

C’est une question d’opportunité et un hasard de

calendrier lié aux contraintes de notre système actuel.

Il est en effet difficilement interopérable et non achevé.

Dès lors que nous envisagions d’introduire le DPI, la

question de la pérennité du système administratif actuel

se posait. L’idée de faire d’une pierre deux coups pour

la partie médicale et administrative a fini par s’imposer.

Pourquoi avez-vous une telle volonté de déléguer

aux pôles ?

Évidemment, une équipe de direction bien constituée

détient une expertise indispensable au

bon fonctionnement de l’établissement.

Néanmoins, à titre personnel, j’ai la

conviction que ceux qui savent le mieux

comment organiser les services sont ceux

qui les pratiquent au quotidien. Pour cela,

ils ont besoin de délégations et d’accompagnement.

La gestion du terrain par le terrain est une des pierres

angulaires de la loi HPSt. n

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

La gestion du terrain par le terrain est une des pierres angulaires de la loi HPST

136 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Logements familiaux

Départements : 14-50-61-76-80

16, place du Général Leclerc 76405 FECAMP Cedex: 02.35.10.20.50www.seminor.fr

Résidences pour Personnes Agées

ABAX NORMANDIE GARDIENNAGE

177 BD DE L’YSER 76000 ROUEN

Tel : 02 35 15 58 09

Les domaines et secteurs d’activités : › Industrie › Tertiaire › Sites sensibles et stratégiques... Les missions : › préviennent les risques, › sécurisent les sites, › protègent les biens et les personnes, › interviennent sur site...

La Communauté de communes de Fécamp, à vos côtés, dans la construction d’un territoire dynamique, attractif et solidaire…

Développement économiqueTourisme - Petite enfance

Loisirs des jeunes - Centre aquatique Lutte contre les inondations

Déchets ménagerswww.cc-fecamp.fr

RADIOLOGIE NUMERISÉE – DENTAIREMAMMOGRAPHIE NUMÉRIQUE

ÉCHOGRAPHIE – DOPPLEROSTÉODENSITOMÉTRIE

SCANNER – IRM

SELARL Caux-Albâtre

Résidence du Mazert rue Saint-Pierre 76190 YVETOT

Tél : 02 35 95 08 57

30 rue Jules Ferry – 76400 FÉCAMPTél : 02 35 28 13 00

CENTRE D’IMAGERIE MÉDICALEDocteurs M. HAKAM D. MARIN

A. MORIAUX A. SANCHEZ

REMERCIEMENT

MIluMEl Lait infantile

Parc d’activité de Torcé Secteur Est

35370 TORCEwww.milumel.fr

1371er trimestre 2013 / DH magazine 145

DH magazine – Quelles sont les principales

caractéristiques du système d’information de

l’hôpital aujourd’hui ?

ViNCeNt reGNauLt − L’arrivée sur le nouveau site

en septembre 2006 avait été l’occasion de moderniser

le parc informatique et de recenser l’ensemble des trai-

tements automatisés de l’information. La spécificité du

site est que toute l’infrastructure est mutualisée entre

l’hôpital et la clinique. elle sous-traite en effet la ges-

tion de son parc informatique et de son système d’infor-

mation au CHI de Fécamp. La mutualisation porte sur

l’ensemble du réseau informatique. Les établissements

ont en commun leur sortie web, l’annuaire et le système

de messagerie, la politique de protection antivirale, les

systèmes de fichiers et les sauvegardes.

Ces dernières années, nous avons investi dans des

développements importants, comme un PACS qui

permet l’archivage de tous les clichés de scanner, la

réplication de la salle informatique sur un site distant,

ou encore la mise en place d’un réseau wi-fi au second

semestre 2012. Mais nous sommes

sur le point de franchir un cap avec

le déploiement du dossier patient

informatisé.

Quelles sont les solutions que vous avez retenues

pour mener à bien ce projet ?

Les applications administratives que nous avons

aujourd’hui sont issues d’une gamme de produits très

difficiles à interfacer et qui n’est pas aboutie dans

certaines branches. Le déploiement du DPI nous oblige

donc aussi à revoir ces outils, mais c’est en même temps

une formidable opportunité. Pour le DPI, nous avons

retenu Sillage et génois pour le circuit du médicament,

tous deux étant édités par le Syndicat Interhospitalier de

Bretagne. Pour la partie gestion administrative du patient,

la gestion financière et des ressources humaines, nous

avons retenu les produits proposés par le gIP MiPih.

L’ensemble des données et des couches

applicatives seront hébergées au MiPih.

Avec seulement trois informaticiens au

sein de notre établissement, il était plus

optimal et sécurisé d’avoir recours à un

hébergeur agréé de données de santé,

à qui nous déléguons l’installation des

machines, leur suivi, l’installation des mises à jour et

des sauvegardes. Par ailleurs, un tel hébergeur présente

toutes les garanties en matière de réversibilité et de

récupération des données et du système.

Comment ce projet a-t-il été mené ?

C’est un projet qui a été mené conjointement avec

d’autres établissements de la communauté hospita-

lière de territoire - CHt - de l’estuaire*, créée en no-

vembre 2011. Au milieu de l’année 2011, nous avons

entamé des démarches de recherche d’un DPI. en

mars 2012, les établissements ont fait le choix de

maquetter Sillage et génois sur une plate-forme com-

mune. La CHt est très utile pour les échanges et retours

d’expérience entre les acteurs des différents établis-

sements. Le souhait initial était d’avoir un DPI partagé

au sein de la CHt avec un établissement qui aurait été

agréé hébergeur de données de santé, mais, pour l’ins-

tant, ce n’est pas le cas. Par ailleurs, la question du

consentement du patient se serait posée. D’où notre

choix pour l’hébergement de nos données au MiPih. La

collaboration au sein de la CHt se poursuit et est ados-

sée à un groupement de Coopération Sanitaire - gCS

- de moyens, qui nous permet de mutualiser des achats,

l’assistance utilisateur et la veille technologique.

EntrE « sillaGE » Et « Génois »la rEfontE du systèME d’inforMationEn un tEMPs rEcord

Entretien avec Vincent Regnault,Responsable des services informatiques

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

Le déploiement du DPI nous oblige donc aussi à revoir ces outils, mais c’est en même temps une formidable opportunité

(*) La CHT comprend le Groupe Hospitalier du Havre, le CHI Pays des Hautes Falaises de Fécamp, le CHI Caux-Vallée de Seine (hôpitaux de Bolbec et Lillebonne), le CH de la Risle de Pont-Audemer et le CH de Saint-Romain-de-Colbosc

138 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

Quel est le calendrier du déploiement ?

Au 1er janvier 2013, nous démarrons le volet qui

concerne la gestion économique, financière et

ressources humaines. À compter de juin 2013, la

gestion Administrative des Malades sur l’ensemble de

l’établissement et le Circuit du Médicament avec le DPI,

qui seront progressivement déployés dans les services

avec une flotte de chariots mobiles qui permettront

d’avoir le poste de travail au pied du patient.

y a-t-il un accompagnement prévu ?

Pour mener à bien ce projet, une équipe a été constituée,

comprenant huit personnes représentant les principaux

groupes d’utilisateurs de l’hôpital. Par ailleurs, des

référents métiers sont formés par les éditeurs et

assureront le transfert de compétences vers les équipes.

Quelles sont les garanties pour la sécurité du

système ?

Il convenait de se conformer aux exigences

réglementaires en matière de confidentialité des

données médicales, tant pour la conservation que pour

la transmission - décret de confidentialité.

Le premier élément pour cela a été la mise en place

du SSO, ou simple authentification en français. très

concrètement, le personnel médical et soignant dispose

d’une carte de professionnel de santé - CPS. Un simple

passage de la carte devant le poste de travail suffit pour

avoir accès à la session utilisateur. Le gros avantage

est que leur session étant itinérante, ils la retrouvent

ainsi dans l’état où ils l’avaient laissée sur le précédent

poste de travail. Cela est très utile par exemple aux

urgences, où les professionnels de santé passent

d’un box à un autre. Voilà une bonne illustration que

sécurité, simplicité et satisfaction des usagers ne sont

pas incompatibles, bien au contraire ! Le personnel

administratif disposera également de sa carte de Carte

de Personnel d’etablissement - CPe -, qui fonctionnera

selon les mêmes modalités.

Le second point très important concerne la traçabilité

des accès aux dossiers des patients. Pour un dossier

patient donné, il est possible de décrire l’ensemble des

actions et consultations réalisées par les professionnels

de santé, toutes applications informatiques confondues,

grâce à l’IPP - Identifiant Permanent du Patient. Par

ailleurs, l’établissement a opté pour une solution

innovante de traçabilité avec la société FairWarning, qui

consiste à collecter l’ensemble des actions utilisateurs

des applications médicales sur un seul et même boîtier.

Il s’agit de garantir la protection de la vie privée de nos

patients en obtenant facilement, pour le responsable

des traitements du Centre Hospitalier - le chef

d’établissement -, des éléments de preuve en cas de

besoin, notamment pour les demandes de l’action

judiciaire. enfin, les envois à des professionnels de

santé extérieurs à l’établissement par voie électronique

se font par messagerie sécurisée. Si le destinataire n’est

pas équipé de système sécurisé, l’envoi se fait en papier.

Vous exercez également les fonctions de

Correspondant informatique et Libertés - CiL -,

pourriez-vous nous préciser de quoi il s’agit ?

J’exerce cette fonction depuis 2008. Le CIL est

principalement chargé de s’assurer que l’ensemble

des traitements de données à caractère personnel

sont identifiés. Il est en ce sens le responsable de la

conformité des traitements de l’établissement. Il tient

en interne un registre qui fait foi en cas de contrôle.

Cela permet également de gagner du temps pour la

mise en œuvre des traitements. Au-delà de cet aspect

réglementaire, c’est un vecteur important au sein de la

structure de sensibilisation à la protection des données.

L’établissement s’inscrit résolument dans une démarche

de protection de la vie privée des patients et de respect

du secret professionnel et médical. Cette démarche

visait aussi à anticiper l’arrivée du Dossier Patient

Informatisé, volonté portée par le Directeur général de

l’établissement. Pour que davantage d’établissements

aient un CIL, une piste est la mutualisation de cette

fonction au sein d’une CHt. Ils gagneraient aussi en

indépendance et en compétence. C’est d’ailleurs l’idée

que je développe dans la thèse que j’ai consacrée à ce

sujet*. n

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

(*) Thèse de mastère spécialisé à l’Institut Supérieur d’Electronique de Paris : « Le Correspondant Informatique et Libertés mutualisé au sein d’une Communauté Hospitalière de Territoire »

1391er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

DH magazine s’est entretenu avec les chefs et cadres de

pôle, qui ont expliqué comment ils se sont approprié ce

nouveau mode managérial dans la gestion quotidienne.

S’ils n’hésitent pas à pointer certaines limites, voire

des inquiétudes dans un contexte général de tension

économique et de rareté de la ressource médicale,

tous s’accordent sur les atouts de cette démarche

structurante de délégation aux pôles. L’hôpital est

désormais articulé autour de trois pôles médicaux, qui

correspondent aux grandes filières de prise en charge

de l’établissement :

n Un pôle mère-enfant, comprenant une maternité qui

réalise environ 700 accouchements par an, une chirurgie

gynécologique et un service de pédiatrie.

n Un pôle de gériatrie, comportant notamment 300 lits

d’eHPAD, 60 lits en SSr, 40 lits USLD, un service de

rééducation, une consultation mémoire et un accueil de

jour.

n Un pôle médical aigu, né de la fusion de trois

pôles (court séjour, activité continue et médico-

technique), il comprend principalement les urgences de

l’établissement, une unité de surveillance continue, une

unité de cardiologie, une autre consacrée à la médecine

polyvalente, un plateau d’imagerie et la pharmacie.

Chaque pôle est dirigé par un chef de pôle, assisté par

un cadre de pôle issu du monde soignant. Le pôle mère-

enfant comprend également une sage-femme dans

l’équipe de direction du pôle. Les délégations portent

déjà, en matière de ressources humaines, sur les

effectifs permanents et s’élargissent au 1er janvier 2013

aux emplois non permanents.

l’éQuiPE diriGEantEd’un pôle porte des valeurs dont les responsables sont les garants

Loin de l’image d’Épinal du mandarin hospitalier

omnipotent, les chefs de pôle rencontrés soulignent

le rôle fondamental des cadres

de pôle, tant pour le travail

de fond que pour l’aide à la

décision, même si ce sont eux

qui valident. Le Docteur Villers

insiste sur le fait que le chef et

le cadre de pôle forment un binôme qui repose sur le

partage de valeurs. C’est une responsabilité éthique

partagée vis-à-vis des patients et du personnel. Il

est nécessaire d’être exemplaire dans l’exercice

de ces fonctions pour pouvoir exiger des autres.

C’est une responsabilité éthique partagée vis-à-vis des patients et du personnel

Entretien avecDr Valérie Villers (à gauche), chef du pôle de gériatrie, et Carole Senoville, cadre du pôle

Dr Jean-Yves Baril, chef du pôle mère enfant et Jean-Luc Hachard, cadre du pôle

Dr Philippe Calot, chef du pôle médical aigu, et Muriel Khul, cadre du pôle

PEtitEs toucHEs PraGMatiQuEsPlus dE déléGations auX PÔlEsPour unE MEillEurE GEstion

140 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

Les pôles commencent à avoir des moments

institutionnels, qui sont l’occasion de faire des bilans

et de présenter des projets. Ainsi, à l’occasion de la

première réunion plénière du pôle de gériatrie, ont

été notamment présentés l’activité, le budget, la

formation du personnel, les axes de la qualité et les

projets. Les valeurs spécifiques liées à la prise en

charge de personnes âgées vulnérables ont également

été rappelées. M. Hachard attache lui une grande

importance à la communication auprès des équipes et

à la diffusion de l’information à tous les niveaux par un

discours intelligible.

la conduitE dE ProjEts transversaux au sein des pôles

Il ressort également des entretiens qu’un pôle structuré

de façon cohérente permet en outre de mener à bien

des projets qui visent une meilleure prise en charge du

patient et la fluidification de son parcours de soins. en

la matière, le Docteur Calot est partisan d’une approche

pragmatique par petites touches plutôt que d’annoncer

des grands projets qui ambitionnent de tout révolution-

ner. Le pôle médical aigu a ainsi entrepris une démarche

d’amélioration du

temps de transfert

vers les services de

soins des patients

arrivés par les ur-

gences. Pour cela,

un audit interne est réalisé par la cadre des urgences et

la cadre de pôle. Cette démarche est enrichie par l’ana-

lyse de l’enquête de consultation.

Au sein du pôle de gériatrie, la mise en place de l’UHr

(unité d’hébergement renforcée) dans le cadre du plan

Alzheimer est également un bel exemple d’amélioration

globale de la prise en charge au sein du pôle. L’UHr

comporte 14 lits dédiés aux patients ayant des troubles

sévères du comportement et bénéficiant d’une prise en

charge non médicamenteuse. Mme Senoville explique

que dès lors que le patient met un pied dans la filière

gériatrique, il est pris en charge par un réseau d’acteurs

qui se connaissent bien et qui ont à cœur d’assurer

la continuité de sa prise en charge, avec une bonne

articulation ville-hôpital.

lEs déléGationsauX PÔlEs permettent une meilleure gestion et intelligibilité du système

en matière de gestion du personnel, M. Hachard

trouve que cette nouvelle approche est davantage

responsabilisante et qu’elle pousse à une analyse plus

pointue des besoins pour le service, avec une meilleure

projection dans le déroulement des carrières. Au sein du

pôle médical aigu, Mme Khul nous a fait part du travail de

fond qui a été mené avec les cadres de pôle pour avoir

une connaissance fine des compétences et des souhaits

Partisan d’une approche pragmatique par petites touches plutôt que d’annoncer des grands projets qui ambitionnent de tout révolutionner

1411er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH de fÉCamP (seine-maritime)

des agents. Ainsi, cela permet d’avoir une gestion plus

optimale du personnel avec une meilleure adéquation

entre les postes et les profils des agents. Cela nécessite

de réaliser des évaluations de qualité des agents, dont

l’intérêt ressort beaucoup mieux dans cette perspective,

ce n’est plus un simple exercice obligatoire.

La comptabilité analytique est perçue comme un

énorme pas en avant. Le Docteur Baril constate que la

présentation analytique des comptes de l’établissement

(CreA) par pôle lui a ouvert les yeux. Cette nouvelle lec-

ture permet d’appréhender les contraintes économiques

sous un autre angle et de mieux les accepter car elles

sont mieux comprises. Cela invite aussi, dans la mesure

du possible, à repenser des pratiques dans un souci de

meilleure efficience, comme les prescriptions d’examen

de laboratoires par exemple.

lE souHait d’avoir les moyens d’approfondir la démarche

Les chefs de pôle s’accordent sur la difficulté d’exercer

ces fonctions en ayant aussi peu de temps. Le Docteur

Calot estime ainsi par exemple qu’il consacre 95 % de

son temps à soigner les patients. Il peut en résulter

une certaine frustration à ne pas pouvoir s’engager

davantage dans cette fonction managériale qui

nécessiterait de dédier plus de temps aux équipes. Le

corolaire pour les chefs de pôle, qui sont très pris par

leur pratique médicale dans les services, peut être la

difficulté d’incarner un rôle de décisionnaire sur le terrain,

comme le fait remarquer le Docteur Villers. elle pointe

également un éventuel conflit de valeurs entre le soin et

la finance. en cela, elle rejoint la remarque formulée par

l’IgAS en 2010 , qui remarquait qu’il était problématique

pour un pôle de déterminer si l’orientation prioritaire doit

être celle de la gestion et du retour à l’équilibre ou celle

de l’amélioration de la qualité de la prise en

charge médicale du patient.

La solidarité financière entre des pôles

structurellement excédentaires et d’autres

structurellement déficitaires, en raison de

la construction des tarifs, apparaît aux yeux

de tous comme un élément indiscutable. Mais ceci est

également perçu comme la limite de l’exercice puisque

le redéploiement en interne est limité. Cette solidarité

est renforcée par le fait que les pôles exercent des

fonctions transverses, comme l’hygiène par le pôle

mère-enfant.

Il existe une forte demande en matière de formation pour

mieux exercer ces nouvelles responsabilités. Ce souhait

d’être mieux préparé s’exprime notamment en matière

financière, où il peut sembler difficile pour le profane de

bien percevoir quels sont les éléments significatifs et

pertinents. Des échanges d’expériences ou de bonnes

pratiques avec les pôles d’autres établissements

hospitaliers seraient souhaités, davantage qu’un contenu

théorique. Les échanges sans tabou et la proximité

de la direction sont désignés comme des conditions

importantes pour la solidité de l’édifice. Le mot de la fin

pourrait revenir au Docteur Baril, qui ne souhaite qu’une

chose : « que la Direction poursuive sa démarche de

délégations aux pôles dans la même direction » n

Cela permet d’avoir une gestion plus optimale du personnel avec une meilleure adéquation entre les postes et les profils des agents

« que la Direction poursuive sa démarche de délégations aux pôles dans la même direction » !

142 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013142 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1431er trimestre 2013 / DH magazine 145

RePo

RTA

Ge

CH de roubaixUn hôpital en mutationÀ 15 km du CHU de Lille et face à une très forte concurrence, le CH de Roubaix se transforme et s’adapte. Les équipes médicales sont structurées et complètes. Certaines filières sont particulièrement bien organisées : cancérologie, vasculaire, addictologie, périnatalité. Réparti sur 11 sites, la réalisation de son projet immobilier implique l’adaptation et la rénovation des structures existantes. La reconstruction de la maternité fait également partie de ses projets prioritaires.

1431er trimestre 2013 / DH magazine 145

Centre Hospitalierde Roubaix

144 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

DH magazine – Votre arrivée au CH de roubaix en 2010 a, semble-t-il, été vécue comme un bouleversement. Certains ont été « déroutés ». Comment leur répondez-vous ?Marie-CHriStiNe PauL − tout changement,

après une longue période de stabilité, peut devenir

un bouleversement. J’estime ne rien avoir fait

d’extraordinaire, que de promouvoir des valeurs

professionnelles ; j’ai rappelé quelques règles et

principes, permettant aux acteurs de trouver des

repères. Par contre, j’ai sans doute bousculé le

rythme d’évolution de l’établissement. Je l’ai accentué

parce que, de mon point de vue, cela est désormais

incontournable : la vitesse d’adaptation, de prise de

décision et de réalisation des projets est capitale si l’on

ne veut pas rater des opportunités et être en décalage

avec l’environnement.

Les équipes ont pu considérer que ce changement

était trop brutal, mais, pour moi, c’est l’environnement

et le contexte qui ont changé fortement et l’Hôpital

de roubaix doit s’adapter. Ce n’est pas une option, ce

n’est pas un choix, c’est un impératif. Dans certains

départements, il n’y a qu’un seul hôpital « central ».

C’est le cas du Mans, ville que vous connaissez (sourire) :

le CH du Mans a le monopole. À roubaix, c’est une

situation qui n’a strictement rien à voir. Nous sommes

dans un tissu urbain très dense, avec une offre de soins

tant privée que publique extrêmement fournie, avec en

outre un CHU à 15 km. Ce que nous ne ferons pas bien

ou de manière trop coûteuse, d’autres pourront le faire

à notre place. Cela n’est pas facile à percevoir au niveau

des équipes.

Comment analysez-vous la situation d’au-

jourd’hui ?

Le CH est dans un plan de retour à l’équilibre. Ce qui

n’est jamais une situation facile pour un établissement.

Nous essayons de ne pas induire de spirales négatives,

avec les réductions d’effectifs que cela entraîne.

Nous avons donc un volet développement d’activités

dans notre plan de retour à l’équilibre, sur lequel nous

comptons autant que le volet réduction de charges. Le

CH de roubaix a beaucoup d’atouts : de bonnes équipes

médicales et paramédicales, une bonne accessibilité, un

plateau technique de grande qualité.

Il est handicapé par son éclatement sur onze sites, qui

majore les coûts logistiques, la vétusté de sa maternité et,

du coup, l’existence de deux blocs opératoires, un mode

de fonctionnement lié beaucoup plus à l’urgence qu’à

l’activité programmée. en outre, la concurrence est forte

sur le territoire. Le bassin de population est très important,

l’offre n’est pas surdimensionnée, mais une partie de la

population est très mobile. enfin, la population du territoire

souffre d’une grande précarité, qui nous oblige souvent

à aller sur le terrain social. Une évolution importante

est en cours pour développer l’activité programmée

et rééquilibrer ainsi le profil de l’établissement. Nous

avons un plan d’actions, notamment autour du circuit du

consultant, pour aider à cette mutation.

situation, décision, actionbousculEr lE rytHME d’évolution dE l’établissEMEnt

EntrEtiEn avEcMarie-christine Paul,directeur général du cH de roubaix

Centre Hospitalierde Roubaix

Ce que nous ne ferons pas bien ou de manière trop coûteuse, d’autres pourront le faire à notre place. Cela n’est pas facile à percevoir au niveau des équipes

1451er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Vous êtes pessimiste ?

Certainement pas. Je suis réaliste ! Je sais que rien

n’est jamais acquis ! Les atouts dont nous disposons

aujourd’hui, nous pouvons les perdre demain. Le secteur

santé est mobile, voire instable. La concurrence est rude.

Les situations en apparence les mieux acquises peuvent

être rapidement remises en question. Le pessimisme,

ce serait de dormir sur ses deux oreilles en espérant que

rien ne changera !

Par exemple : quels dangers ? Quelles opportuni-

tés ? Sur quels points jugez-vous qu’il faut, et que

l’on peut, aller vite ?

Les patients et leur médecin traitant recherchent

des filières organisées de prise en charge : nous

travaillons en interne à mieux organiser ces filières

et faire travailler en coordination les services de

l’Hôpital. On doit pouvoir progresser vite dans ce

domaine puisque certaines d’entre elles sont déjà

très opérationnelles.

Le CH de roubaix est un des gros CH non CHu.

Mais la densité de l’offre de soins est très

importante : le CHu de Lille, les CH de Wattrelos

et de tourcoing, et plusieurs établissements

privés importants. Comment luttez-vous contre

la concurrence ?

La permanence des soins est très bien organisée : la

population et les médecins généralistes le savent et

ont confiance dans le CH de roubaix. Par contre, la

variété de notre offre de soins n’est pas suffisamment

connue. Nous travaillons sur ce point, ainsi que sur

l’accessibilité à nos services : prise de rendez-vous,

notamment. Le CH de roubaix se caractérise par la

variété de ses activités : il propose toutes les spécia-

lités médicales et chirurgicales, hormis la neurochirur-

gie, la chirurgie thoracique et la chirurgie cardiaque. Les

équipes médicales sont structurées et complètes. Cer-

taines filières sont particulièrement bien organisées :

cancérologie, vasculaire, addictologie, périnatalité.

Vous avez un service d’urgence important :

70 000 passages à roubaix, contre « seulement »

110 000 passages au CHu de Lille. Pourquoi cette

forte fréquentation ?

Il s’agit d’un recours de proximité et d’un mode de

recours aux soins. Le recours aux urgences se substitue

parfois à la consultation programmée, pour laquelle,

dans certaines disciplines, les délais de rendez-vous sont

longs. Nous avons essayé de minimiser ce phénomène

en développant une des premières maisons médicales

de garde avec les libéraux. Cela permet de réorienter une

partie des urgences. Pour faire face aux urgences, notre

« arsenal » est à la fois classique et complet : un service

d’urgence, un SMUr, des praticiens de garde sur place

et en astreinte dans toutes les disciplines, un plateau

technique disponible en permanence, des capacités

d’hospitalisation dans de nombreuses disciplines.

Marie-christine Paul,directeur général du cH de roubaix

Centre Hospitalierde Roubaix

146 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1471er trimestre 2013 / DH magazine 145

Vous venez également d’inaugurer, le 22 novembre

2012, un centre de cardiologie interventionnelle.

Ceci dans le cadre de la Communauté Hospitalière

roubaix-tourcoing-Wattrelos. Pouvez-vous nous

en parler ?

Cette expérience de cardiologie interventionnelle au

sein de la Communauté Hospitalière de territoire est

particulièrement intéressante, et sert de modèle pour

les coopérations à venir. elle s’est appuyée sur une

fédération médicale, toujours active, et qui promeut le

projet médical de cardiologie de la CHt. Cette cohésion

médicale a permis l’obtention des autorisations d’USIC

et de cardiologie interventionnelle. Le centre vient

d’intégrer un cardiologue belge de l’Hôpital de Mouscron

et des patients belges sont traités en urgence sur le site

de roubaix.

Le CH est composé, pour partie, de bâtiments

anciens et un peu dispersés. Quels sont vos

projets immobiliers et votre programme de

travaux ? Quid de la sécurité incendie ?

Avec la reconstruction attendue de la maternité sur

le site de l’Hôpital, tous les services de MCO – sauf

l’addictologie – seront sur ce site. Les autres sites

accueillent des activités SSr et médico-sociales. Le

projet immobilier consiste à adapter et rénover les

structures existantes, notamment l’Hôpital Victor Provo,

âgé de 28 ans. Ces travaux se font en exploitation et

s’échelonnent donc sur plusieurs années. L’opération

de reconstruction de la maternité est en attente depuis

plusieurs années. L’opération sera menée en conception-

réalisation pour un montant total ttC de 55 000 000 €.

Le projet intègre la construction d’un nouveau service de

réanimation. Il s’agit d’une maternité de niveau 2B, avec

2 800 naissances par an.

Quid du système d’information ?

Le système d’information du patient va devoir être

renouvelé à partir du 2ème semestre 2013. en effet, la

solution actuelle n’est plus maintenue par l’éditeur.

Il s’agit d’une grosse opération, dont le CH se serait

bien passé car cela ajoute un autre volet important

de changement dans l’établissement. Nous n’avons

malheureusement pas le choix.

Vous êtes parfois critiquée. Que répondez-vous à

ces critiques ?

« noboby’s perfect except the captain… » (éclat de rire)

Non, je ne postule pas à la perfection… J’accepte les

critiques. Dès lors qu’elles sont honnêtes et parfaitement

justifiées, je dois corriger le tir : surtout si l’on me

propose des solutions viables. Mais les critiques en

elles-mêmes ne m’effraient nullement. Les accepter est

aussi un exercice démocratique. Je suis à la disposition

de toute la communauté hospitalière du CH de roubaix

et je suis très fière d’en être le Directeur.

Qu’avez-vous à dire pour votre défense ?

C’est, je crois savoir, la question finale d’une interview

par DH Magazine… Ce n’est pas moi que j’essaye de

défendre mais le CH de roubaix. Pour le reste, aux

autres de juger. Dites-moi si je dois faire appel à un

avocat ? (rires) n

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

148 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

SARL ETAP 53/55 RUE JEAN JAURES - BATIMENT LT6 – ENTREE A3èME ETAGE 59000 LILLETEL : 03 28 55 37 80 – FAX 03 20 88 38 62 Email : [email protected] CE médical N° 23746 délivrée par le LNE le 13 juillet 2012Société certifiée ISO 13485

Apres plusieurs années en tant que sous-traitant en études de réseaux fluides médicaux, la société Etap a décidé, en janvier 2012, de franchir le pas en créant son propre service d’installation et de maintenance.

Pour cela nous avons, grâce à nos collaborateurs dyna-miques, obtenu la certification CE médicale en un temps record de moins de 6 mois.

Nous tenons à remercier le CH de Roubaix et particu-lièrement Mme Marie-Christine PAUL, directrice, et son équipe pour avoir été les premiers à nous avoir fait confiance.

ILS NOUS ONT ÉGALEMENT FAIT CONFIANCE :

• CHRU de Lille• CH Epernay• CH Noyon• CH Béthune• Centre de cancérologie de Rouen• CH Saint Quentin• Hôpital Saint Vincent de Paul à Lille• CH Bertinot Juel de Chaumont-en-Vexin

Votre partenaire en réseau et maintenance

fluides médicaux

1491er trimestre 2013 / DH magazine 145

EntrEtiEn avEcdr didier bricoteau, Président de la cMEchef de service département d’information Médicale

DH magazine – Si vous êtes PH et Chef de service, vous êtes aussi un « médecin de santé publique ». La manière dont vous le soulignez montre l’importance que vous y attachez. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?didier briCoteau − Il me semble qu’en même temps

qu’un besoin majeur d’innovation de changements du

fonctionnement hospitalier et de courage, la situation

critique de notre société nécessite plus que jamais

d’avoir des bases éthiques et sociétales fortes. La santé

publique, par définition, porte des valeurs fortes de bien

commun et de vision solidaire, et c’est pourquoi j’y

attache une importance toute particulière.

Vous êtes également un médecin du « Service Public Hospitalier ». Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?Je note que dans le pré-rapport d’Édouard Couty, suite

au gros travail mené par trois groupes dans le cadre du

pacte de confiance, il est d’actualité de remettre à jour

le principe même du service public hospitalier et non

plus simplement de ses missions. Cela veut dire une

exigence très forte de compréhension des besoins de

la population et de la satisfaction dans les meilleures

conditions et au meilleur coût de ceux-ci, en partenariat

étroit avec les représentants des usagers. C’est pour moi

la justification absolue du travail à l’hôpital public car, si je

n’ai aucune prévention contre le privé, le principe même

d’une rémunération des actionnaires sur les revenus de

l’activité réalisée est une ponction supplémentaire sur

les ressources publiques disponibles qui, comme tout le

monde le sait, sont limitées.

Quelles sont vos autres « caractéristiques » médicales et hospitalières ?Ancien enseignant en histoire, avec des études

secondaires littéraires et un bac philo en 1970, je suis

un atypique. De plus, j’avais décidé de faire médecine

pour être psychiatre et, après avoir testé longuement

cette discipline et m’être rendu compte que je ne

supportais pas les psychopathes, la santé publique

m’a semblée plus en accord avec mes envies et mes

possibilités. Pour compléter mon cursus d’interne

et de chef de clinique en santé publique, j’ai fait un

DeSS à Dauphine d’économie de santé et un DeA de

« Systèmes de santé et sociétés », ainsi que plus

de 20 ans d’enseignement de santé publique.

M’occuper du DIM, qui n’est pas que le PMSI,

mais aussi le système d’information de l’hôpital et

l’aide à la décision pour les services, les pôles et

l’établissement lui-même, m’est apparu une tâche

utile et très intéressante. J’ai assuré la direction de

la médecine préventive universitaire des universités

de la métropole lilloise et de ses 60 000 étudiants

pendant deux ans, en plus de mes fonctions

hospitalières, et cela m’a beaucoup plu. J’ai par ailleurs

continué mes fonctions d’enseignant de Santé publique

en DU, Licence, Master, Faculté de Médecine et dans

des écoles d’infirmières, de sages-femmes, etc.

dans quelles conditions – et à quelle date – êtes-vous devenu président de la CMe ? Dans la logique de ma réponse ci-dessus, le fait de me

présenter à la présidence de la CMe en avril 2007 m’a

semblé la continuation et l’affirmation plus forte de mon

parcours et de ce que je veux et me sens capable de

faire. Il faut dire que j’avais travaillé étroitement avec le

président de la CMe précédent lors de ses deux mandats

et avais acquis une connaissance réelle de ce qu’était

cette fonction et de ce qu’elle requérait comme qualités

et compétences. J’ai, par contre, dû abandonner mes

fonctions à la médecine préventive universitaire, ainsi

que ma charge d’enseignement car la présidence de la

CMe d’un établissement de plus de 3 000 personnes

est une tâche très lourde. J’ai été réélu très largement

fin 2011 et j’en suis très reconnaissant à la communauté

médicale.

QuEstion dE confiancEunE « attEntE » sans concEssion ni lanGuE dE bois

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

150 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

1511er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

Quelle a été votre motivation pour briguer cette charge ?Il m’a semblé que j’étais bien armé et bien formé

pour assumer cette tâche. Par ailleurs, mon passé

d’enseignant depuis de très longues années m’a permis

d’être un bon communicant et un bon pédagogue,

qualités importantes à un tel poste. enfin, et sûrement

surtout, j’avais envie de m’impliquer plus dans la

vie institutionnelle et l’information médicale seule

commençait à ne plus suffire à mon plaisir au travail.

travailler plus sans bénéfice secondaire me semble

à terme voué à l’échec, mais, heureusement, qui dit

bénéfice secondaire ne dit pas obligatoirement bénéfice

financier.

aujourd’hui, après plusieurs années de « prési-dence », qu’est-ce qui vous motive encore ?C’est l’intérêt commun, la défense et l’approfondisse-

ment de celui-ci. C’est le sentiment que je peux fédé-

rer une équipe qui soit dans la même logique que la

mienne et c’est le travail en commun sur la politique de

l’établissement, mais aussi son organisation vers plus

d’efficience qui me motive toujours. J’aime les respon-

sabilités et j’aime les défis.

Quelle est votre analyse « technique » et « tactique » de la situation du CH de roubaix ?L’Hôpital de roubaix est à la croisée des chemins. Il

est trop gros pour perdurer sous sa forme actuelle

et trop petit pour tout faire tout seul. Sa taille et ses

moyens matériels comme humains devraient en faire

l’hôpital de recours du versant nord-est de la métropole,

ce qu’il n’arrive pas à être. La CHt avec tourcoing et

Wattrelos m’apparaît vraiment comme une chance

à ne pas rater, mais j’ai souvent l’impression d’être

très isolé sur cette question. La plupart des médecins

ne saisissent pas encore l’importance de la CHt, la

direction est très méfiante, mais c’est aussi vrai des

autres établissements constitutifs, les syndicats sont

tétanisés par la peur du changement et l’ArS ne fait

rien pour rendre effectif cette CHt, si ce n’est par

des injonctions paradoxales bien plus pernicieuses

qu’aidantes. La proximité du CHrU de Lille – 15 km –

et une facilité d’accès réelle rendent indispensables des

liens forts et voulus entre nos deux structures, d’autant

que la taille de la population – plus de 1,3 million de

personnes dans la métropole – rend parfaitement viable

l’existence de ce pool hospitalier public, à condition que

les moyens se potentialisent et non se neutralisent dans

une concurrence stupide et suicidaire.

Quelles évolutions attendez-vous pour l’hôpital dans les 5 ans à venir ?Un enracinement dans la vie collective de son bassin

de recrutement. Une compréhension et une prise en

compte beaucoup plus fortes de la population qu’il

soigne, ainsi qu’une inventivité et un courage qui lui

permettent de secouer tous les corporatismes. Une

compréhension des enjeux de société dans lesquels la

santé et le soin ont une part importante et l’impérieuse

nécessité de tout faire pour faire vivre le principe de la

L’Hôpital de Roubaix est à la croisée des chemins. Il est trop gros pour perdurer sous sa forme actuelle et trop petit pour tout faire tout seul

152 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

MainTEnanCE inDuSTRiELLEConSTRuCTion MéTaLLiquE

ouvRaGE D’aRTCHauDRonnERiE

MéTaLLERiE

226 Route du Chapeau Rouge59229 TeteghemT. 03 28 26 00 60F. 03 28 26 05 00

ValpieSARL

Le Champs Voisin 61340 Préaux du PercheT. 02 33 25 06 30 - F. 02 33 25 12 [email protected]

Feutres, Molleton et fournitures

Vente et pose de molletons et feutres sur sécheuses repasseuses

Vente fournitures (rubans décolleurs, cires, bandes

sécheuses, antirouille...)

Nous sommes les seuls en France a avoir des garnitures (molletons et

feutres) aiguilletées en NOMEX autorisé par Dupont de Nemours S.A.

Technicien de 25 ans d’expérience

REMERCIEMENTS

ENvIE 2E NoRD S.A.S.Collecte et traitement de DEEE

10 avenue des Sports – BP 6050059815 LESQUIN cedexwww.envie2enord.com

ToShIBA NoRD PICARDIEMultifonctions noir et couleur,

logiciels et services 11 rue de la Performance Bat BV1

59654 VILLENEUVE D’[email protected]

SECuRIGuARDSurveillance, Gardiennage,

Sécurité Incendie, PC 24/24 à disposition du client

ZI B – 2 rue du Luyot 59113 [email protected]

spécialiste des protectionsd’incontinence et produitsd’hygiène personnelle

01 41 84 61 00w w w. t e n a . f r

1531er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

sécurité sociale, qui est le vrai aboutissement actuel de

notre histoire, à savoir chacun paye selon ses moyens et

reçoit selon ses besoins.

Qu’est-ce qu’un président de CMe idéal ?Un médecin qui comprenne que l’hôpital n’est qu’un

maillon de la prise en charge des patients dans un territoire

et qui soit un acteur très actif dans la compréhension et

la mise en place de rapports utiles et efficaces avec tous

les autres acteurs de cette prise en charge. Un médecin qui

comprenne la problématique financière et ne se retranche

pas derrière sa position de soignant pour refuser tout

choix budgétaire, mais qui, parallèlement, ait une éthique

médicale forte et n’accepte pas de compromis ? sur les

principes fondamentaux de cette éthique.

Un médecin qui sache susciter l’adhésion au projet, qui

respecte tous les médecins, mais aussi, plus largement,

toutes les personnes qui travaillent dans son hôpital et

qui sache très bien communiquer, de la façon la plus

transparente possible, sur ce qu’il fait, ses objectifs et les

résultats de son action. Un médecin qui lutte clairement

contre tous les corporatismes et qui n’ait, comme seul

intérêt, que l’intérêt commun, indépendamment, autant

que faire se peut, de toutes ses amitiés et inimitiés. Un

médecin qui se forme perpétuellement pour répondre

au mieux aux connaissances que nécessite sa mission.

Qu’avez-vous encore à dire pour votre défense ?

Je suis un homme de conviction qui sait parfaitement

qu’il peut se tromper, mais qui défend ses idées tant que

l’on ne lui a pas montré qu’il avait tort. Je suis par contre

un homme qui reconnaît volontiers ses erreurs qui s’en

excuse publiquement auprès de celles et ceux qui en

ont pâti et qui fait tout pour ne pas les reproduire.

y-a-t-il une vie après la CMe ?

Bien sûr, je n’ai pas l’intention de mourir à 63 ans. Par

contre, il est vrai que je regrette que seule la position de

Président permette de faire certaines choses, comme

par exemple travailler dans le cadre d’une conférence

nationale. Même si je suis partisan de la limitation

dans le temps des mandats, il est vrai que deux

mandats maximum de quatre ans dans cette fonction

me semblent courts. Le premier mandat permet de

prendre la mesure de la fonction. Le deuxième permet

de s’ancrer régionalement et nationalement et d’essayer

de faire partager ses convictions et ses expériences. Un

troisième mandat permettrait de tirer la quintessence de

ce que l’on a appris et compris lors des deux premiers

et de tout faire pour la mettre en œuvre de façon la plus

pérenne possible. Douze ans, cela ne représente en fait

maintenant qu’un peu plus de 25 % du temps d’une vie

professionnelle… n

Un président de CME est un médecin qui sache susciter l’adhésion au projet, qui respecte tous les médecins, mais aussi, plus largement, toutes les personnes qui travaillent dans son hôpital

154 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

DH magazine – Soins palliatifs ou gériatrie ?PHiLiPPe HeuCLiN − C’est la bonne question

parce qu’elle montre bien votre ignorance

(sourire), comme celle de la plupart des gens,

y compris dans le domaine hospitalier. elle

est compréhensible : la moyenne d’âge de

nos malades est de l’ordre de 75 ans, mais

« l’éventail » va de 20 à 99 ans. Sans sourire, nous avons

eu récemment un malade de 99 ans… La durée moyenne

de séjour est de l’ordre de 12 jours. La durée de la prise

en charge va de quelques heures à 3 à 4 mois. Il n’y a pas

de malades types ; le service est le reflet de la population.

Donc, il faut le dire clairement : les soins palliatifs sont tout

à fait différents de la gériatrie, mais les soins en gériatrie

peuvent intégrer les soins palliatifs. La prise en charge de nos

malades correspond à trois « critères » : une maladie grave,

évolutive et qui ne justifie plus un traitement spécifique. elle

concerne le malade, bien sûr, mais également la famille –

pas seulement le conjoint – et l’entourage. C’est une prise

en charge que je qualifierais de « large », mais elle est aussi

« lourde » et nécessite du temps.

Quels sont vos moyens thérapeutiques ? Vous le savez, nous avons

à faire à des malades

très « altérés » : environ

70 % décèdent dans le

service. Dans une partie

des cas, la souffrance est

telle que l’on instaure une

sédation. Le médicament

supprime douleur et/ou

symptômes d’intensité

sévère, non contrôlables par

les traitements habituels,

mais coupe aussi toute

communication avec le malade. Nous utilisons le

midazolam dans le cadre d’un « protocole de sédation ».

La prise en charge de la douleur est fondamentale,

plus encore dans un service comme le nôtre. « on ne

communique pas avec un malade qui a mal. » Pour

autant, si l’on ne peut pas toujours supprimer la douleur,

il faut en diminuer l’intensité. Le malade ne souhaite pas

toujours une augmentation du traitement ; il exprime

qu’il veut « retrouver son corps »… Pour notre travail,

nous utilisations aussi des échelles d’évaluation de

l’intensité de la douleur.

Outre la thérapeutique proprement dite, s’y associent,

fondamentalement, le soutien psychologique, l’écoute

des patients et de l’entourage. Le thérapeute, le

soignant va s’efforcer de diminuer le ressenti par rapport

à ce qu’exprime le malade : « est-ce que je vais mourir ?

Pourquoi je vais mourir ? etc. » en soins palliatifs, le

malade a besoin de beaucoup plus de « temps d’écoute »

que dans un service MCO… et ce temps d’écoute nous

est souvent trop compté !

Quels sont les moyens de votre service ?Le service compte 12 lits et 3 PH – 2,8 etP. Mais, au-

delà de ces chiffres, il faut faire ressortir l’objectif. Il

est simple : mieux prendre en charge le malade dans

un cadre pluridisciplinaire. Le médecin d’aujourd’hui ne

travaille plus seul. La prise en charge d’un patient est

une action collective. Ce travail collectif ne concerne pas

que les médecins mais tous les personnels soignants.

Le personnel est formé aux soins palliatifs, DU ou DIU

– Diplôme Universitaire ou Diplôme Inter-Universitaire.

Le principe de base : les soignants travaillent toujours

en binôme : un(e) infirmier(e) et un(e) AS. Deuxième

principe : la prise en charge complète. Outre les

infirmières et les aides-soignantes, notre « task force »

comporte aussi : psychologue, cadre de santé,

kinésithérapeute et secrétaire. C’est le « cœur » du

service ; ses ressources vitales y sont concentrées. en

« périphérie » – mais rien là de péjoratif –, le service

de soins palliatifs dispose de ressources spécialisées :

assistante sociale, ergothérapeute, orthophoniste,

diététicienne – importance de l’odeur et des couleurs de

la nourriture – et esthéticienne. C’est cette complétude

qui nous permet de parler de prise en charge complète,

la prise en charge de la vie !

un rayon dE solEill’accuEil dEs faMillEs Et dEs Enfants En soins Palliatifs

Le malade ne souhaite pas toujours une augmenta-tion du traitement ; il exprime qu’il veut « retrouver son corps »…

Entretien avec Dr Philippe Heuclin, Praticien hospitalier, Chef de serviceMédecin responsable des soins palliatifs

1551er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

Vous avez souligné, tout à l’heure, que les parents et l’entourage faisaient aussi partie de la thérapeutique. Mais, ce n’est pas facile pour eux, comment pouvez-vous les aider ?Dans la limite de nos moyens, et avec modestie,

nous avons réalisé deux petits projets, tout simples :

une garderie et une cuisine familiale, toutes deux

autogérées. La cuisine est une grande salle, confortable,

complètement équipée comme une cuisine ordinaire

avec tables et chaises, couverts, plats… où parents et

entourage peuvent apporter des provisions et faire de la

cuisine. Plutôt que le malade reste dans sa chambre, il peut

venir y retrouver un « moment familial », intime, dans cette

grande pièce devenue, pour un instant, sa « maison ». Cela

peut sembler dérisoire ; certainement pas pour ceux qui

ont vécu cette expérience. Dans certaines circonstances,

des choses habituelles dans un service hospitalier, peuvent

acquérir une importance sans commune mesure.

Les jeunes enfants, on s’en doute, n’éprouvent

guère d’intérêt à rester trop longtemps auprès d’un

proche hospitalisé, même proche de la mort. D’où

l’idée d’une garderie. La pièce dont nous avons pu

disposer est très grande et ouverte sur trois côtés ;

elle est inondée de lumière et de soleil selon le moment

de la journée. C’est un endroit merveilleux pour les

enfants, avec beaucoup de jeux, de livres, de couleurs…

Ils s’y plaisent tellement qu’au moment du retour, certains

resteraient bien plus longtemps. C’est une association, Des

étoiles dans les yeux, qui a aménagé cette salle de jeux.

Que ce soit pour la cuisine ou la garderie, les personnels

n’interviennent jamais et tout se passe bien en général ;

nous rencontrons peu de difficultés.

il ne doit pas toujours être facile de travailler en permanence avec la mort… Ce n’est pas la mort que nous apportons, mais la vie.

Même si cette vie va être brève. Même si la mort est

au rendez-vous, il y a « toujours quelque chose à faire ».

Écouter, être disponible, apporter au malade quelques

moments, aussi brefs soient-ils, de rire, de joie, d’humour

est aussi valorisant pour le soignant. Il sait qu’il apporte

quelque chose de concret et de fort. Les soins palliatifs, ce

n’est pas un lieu pour mourir, c’est un lieu de vie, qui peut

être brève mais qui peut être intense. Même si le malade

va mourir, nous ne travaillons jamais pour rien.

Cela dit, vous avez raison. Il n’est pas facile de travailler

avec la mort tous les jours, même pour les médecins.

tout le monde souffre. Cette souffrance s’exprime de

manière différente pour chaque soignant. L’intensité

de la relation entre le malade et le soignant est un

paramètre essentiel. Mais, là aussi, il y a toujours

quelque chose à faire.

Alors, premier point, fondamental : les salariés

travaillent en équipe, souvent très soudée. tout le

monde se soutient. Sans doute n’est-ce pas toujours

facile, mais la solidarité de groupe est très forte.

La « dynamique de groupe » n’est pas que de la

littérature. Deuxième point : c’est la communication

entre les personnels ; il ne faut pas que les soignants

intériorisent leur souffrance en serrant les dents. tout

au contraire, il faut que chaque soignant puisse en

parler, il faut que le groupe parle… À cet égard, nous

avons créé un véritable groupe de parole. troisième

point, c’est l’importance de la considération et de

la reconnaissance qui doivent être données aux

personnels par l’institution ; peut-être ce dernier point

est-il en réalité le premier ! n

156 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

DH magazine – Quel est le contexte de la maternité du CH de roubaix ?Nora Haouari − environ 2 800 bébés

naissent chaque année dans notre

maternité. environ 2 % sont des grands

prématurés, c’est-à-dire des enfants qui naissent avant

33 SA. Le service de néonatologie comprend 20 lits

de néonatologie, 14 lits de soins courants et 6 lits de

soins intensifs. Il compte 8 pédiatres, 32 puéricultrices

et 9 auxiliaires de puériculture. Une kinésithérapeute,

une assistante sociale, une psychologue complètent

l’équipe. Nous travaillons également en collaboration

avec l’orthophoniste et la psychomotricienne du CAMSP

– Centre d’action médico-sociale précoce – de roubaix.

Le service de néonatologie est d’un niveau de soins 2B ;

nous prenons en charge les enfants qui naissent à partir

d’un âge gestationnel de 29 SA. Les enfants qui sont

susceptibles de naître avant ce terme sont transférés

in utero à la maternité du CHrU de Lille pour être pris

en charge dans un service de réanimation néonatale.

Ces enfants sont transférés secondairement dans notre

service lorsqu’ils ne nécessitent plus de prise en charge

réanimatoire.

Sous la responsabilité du dr Sylvaine rousseau, chef de service, vous faites partie de l’équipe médicale du service de néonatologie. Quels sont votre place et votre rôle ? Je pilote le projet sur les soins de développement.

L’équipe du service de néonatologie, soutenue par

la direction, a engagé une formation sur les soins de

développement. La décision a été prise d’implanter

le programme NIDCAP pour soutenir les soins de

développement. Nous sommes pour cela aidés par une

formatrice de Bruxelles. Cette formation se compose

d’un coaching de l’équipe sur site et d’une formation à

l’observation détaillée de l’enfant pour 4 membres de

l’équipe ; 3 puéricultrices et moi-même. J’anime les

réunions du comité de pilotage pour aider l’équipe à

évoluer, autour des soins de développement.

Comment peut-on définir un grand prématuré ?

À moins de 37 SA(*1), un bébé est considéré comme un

prématuré. À moins de 33 semaines, on parle d’un grand

prématuré – environ 2 % des naissances – et de très

grande prématurité pour les enfants qui naissent avant

28 SA – moins de 1 % des naissances. Avant 25 SA, le

risque de décès en période néonatale est très élevé.

Comment le prend-on en charge ?

Le grand prématuré est pris en charge de façon globale.

Il nécessite des soins techniques – support respiratoire,

nutrition parentérale sur cathéter, prise en charge de

la douleur – dans un environnement souvent agressif

en matière de bruit et de lumière. Un des aspects

fondamentaux de la prise en charge est que le cerveau

de l’enfant prématuré est encore en développement et

que l’environnement technique – bruit, lumière – peut

être délétère pour le bébé. D’où la réflexion et l’intérêt

sur les soins de développement.

en matière de développement cérébral, quelles

différences peut-on établir entre le bébé

« normal » et le grand prématuré ?

Le cerveau du fœtus se développe dans l’utérus dans un

environnement liquidien, dans un lieu où les bruits sont

moindres, où il n’y a pas de stimulations lumineuses. Le

fœtus parvient à garder des postures en flexion grâce aux

limites de l’utérus. Alors que le nouveau-né prématuré

séjournera parfois plusieurs mois dans un service de

néonatologie, dans un environnement très différent du

milieu utérin. On sait maintenant que l’environnement

joue un rôle dans la survenue des séquelles présentées

par ces enfants nés très prématurément.

la GrandE PréMaturité Est un cHallEnGE

Le grand prématuré doit être pris en charge de façon globale

Entretien avec Dr Nora Haouari, Praticien Hospitalier, Unité de néonatologie Ancien chef de clinique du CHRU de LilleDESC de néonatologie

1571er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

Quelles sont les séquelles et les difficultés que va subir le grand prématuré ? Les problèmes rencontrés par les enfants nés très

prématurément concernent dans un premier les sphères

respiratoire, digestive et neurologique. Au niveau du

cerveau, il existe un risque de lésions hémorragiques

et d’atteinte de la substance blanche. Ces enfants ont

également beaucoup plus de risques de développer des

troubles visuels. Les études réalisées montrent qu’ils

sont très à risque de séquelles neurologiques. Ainsi,

l’étude epipage, portant sur plus de 6 000 enfants nés

avant 33 SA en 1997, révèle qu’à l’âge de 5 ans, près de

40 % des anciens grands prématurés étudiés présentent

des troubles moteurs, sensoriels ou cognitifs. Ces

troubles sont d’autant plus fréquents que les enfants

sont nés à un âge gestationnel faible.

un grand prématuré peut-il ingérer du lait maternel ?Le lait maternel peut être considéré comme un

médicament pour le prématuré. Il est l’aliment le plus

adapté pour le nourrir. Il permet une diminution des

infections et un meilleur développement chez l’enfant né

très prématurément. Quand on accompagne les mères

qui ont le projet d’allaiter un enfant né très prématurément

et que les mises au sein sont effectuées précocement,

les enfants montrent des compétences extraordinaires et

peuvent être autonomes au sein très tôt.

Plus encore que pour un bébé normal, l’environ-nement familial est déterminant. Comment ap-préhendez-vous ce « dossier » ?La place des parents est fondamentale auprès des

enfants dans le service de néonatologie. Le service

est ouvert aux parents 24 h/24. Nous leur proposons de

participer aux soins de leur enfant. Nous les considérons

comme les personnes les plus importantes pour prendre

soin de leur bébé, en partenariat avec l’équipe soignante.

Nous organisons une fois par mois une rencontre pour

la fratrie des enfants hospitalisés, encadrée par la

psychologue et des membres de l’équipe soignante.

D’autre part, beaucoup d’études scientifiques montrent

l’importance du portage en peau à peau pour l’enfant

et les parents. Le fait d’être porté en peau à peau

permet à l’enfant de mieux maintenir sa température,

de garder des paramètres physiologiques plus stables

– moins d’apnées ou de ralentissements du cœur,

meilleure oxygénation –, une meilleure prise de poids

et une autonomie alimentaire plus rapide. Les durées

d’hospitalisation s’en trouvent raccourcies.

Vous êtes le responsable de l’implantation du programme NidCaP dans le service. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?NIDCAP – Neonatal Individualized Developmental Care

and Assessment Program – a été conçu et développé

aux États-Unis*2. NIDCAP est arrivé en France il y a

plus d’une dizaine d’années. C’est une « philosophie »

de soins destinée aux nouveau-nés prématurés. Cette

approche se base sur l’observation du comportement

de l’enfant et sur les réponses spécifiques à son

développement. Des études ont démontré les impacts

bénéfiques de ce programme sur l’évolution de l’enfant

et sur sa durée d’hospitalisation.

Au CH de roubaix, le programme NIDCAP est en cours

d’implantation dans l’unité de néonatologie. Il aide à

la mise en place des soins de développement au sein

du service. et les soins de développement aident à

soutenir le développement cérébral des enfants nés très

prématurément. toute l’équipe est sensibilisée à veiller

à maintenir un environnement le plus adapté possible.

C’est donc, pour une part importante, de l’obser-vation…Quatre personnes – dont moi-même – sont formées à

observer le bébé et, à notre tour, les éléments de son

développement. Nous observons le bébé avant, pendant

et après les soins afin de voir ses réactions par rapport

à son environnement – bruit, lumière – et par rapport au

soin. Nous essayons à la suite de cette observation de

définir où il en est de son développement et de proposer,

en partenariat avec les parents et les soignants, des

recommandations pour prendre en charge l’enfant de

façon individualisée et de façon adaptée à son étape de

développement. Le rapport d’observation est destiné à

l’équipe et aux parents pour les aider à adapter les soins

à l’état de l’enfant. Dans l’idéal, ce rapport est réalisé

toutes les semaines pendant la durée d’hospitalisation

et jusqu’à la sortie de l’enfant.

Quel est votre challenge ?Nous avons besoin de soigner avec une sécurité

maximale, mais, en même temps, de garder à l’esprit que

l’enfant prématuré continue son développement dans le

service de néonatologie. Le challenge est également de

faire des parents des partenaires à part entière dans la

prise en charge de leur enfant. n

(*1) SA = semaine d’aménorrhée. L’aménorrhée est l’absence des règles ou menstruation.

(*2) Dr Als et ses colla-borateurs à la Harvard Medical School de Boston.

158 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

DH magazine – Pourquoi ce choix d’anesthésiste-réanimateur plutôt qu’une autre spécialité ? berNard Leroy − J’ai choisi cette spécialité

parce qu’elle touche à de nombreux domaines

de la médecine, l’anesthésiste ayant un rôle clinique

important dans les services de chirurgie. Le médecin

anesthésiste doit évaluer les patients avant l’acte

chirurgical pour les préparer au mieux à l’intervention ;

il doit ensuite les prendre en charge pendant la période

postopératoire pour limiter les risques de complications,

et pour dépister et prendre en charge ces complications.

À côté de ce rôle clinique, j’ai aussi été attiré par le côté

technique de cette profession, notamment pendant la

période peropératoire. L’anesthésie est une discipline

technique récente, qui a énormément progressé au cours

des 50 dernières années pour atteindre un excellent

niveau de sécurité. J’ai enfin probablement également

été influencé par mon environnement familial, mon père

et mon grand-père ayant exercé le métier de médecin

anesthésiste.

Comment cette évolution personnelle vers un travail sur la douleur ? Un des rôles importants du médecin anesthésiste est la

prise en charge de la douleur aiguë per- et postopératoire.

Je me suis donc naturellement intéressé à la douleur et,

progressivement, à la douleur chronique, qui, lorsqu’elle

se prolonge, n’est plus un simple symptôme mais évo-

lue comme une propre maladie et s’accompagne d’un

retentissement émotionnel, psychosocial et parfois

familial, qu’il faut savoir dépister et prendre en charge.

J’ai été attiré par la complexité de la prise en charge

de ces douleurs et, surtout, par l’intérêt d’une approche

globale et pluridisciplinaire en équipe. La consultation

de la douleur du Centre Hospitalier de roubaix regroupe

9 spécialistes de disciplines différentes : anesthésistes,

rééducateur fonctionnel, neurologue, médecin acupunc-

teur, médecin psychiatre, psychologue. Nous recevons

les patients en consultation, puis nous organisons une

réunion de synthèse tous les 15 jours pour discuter

des dossiers et proposer ensuite une conduite à tenir

au médecin demandeur qui nous a adressé le patient.

J’apprécie particulièrement le contact avec le patient –

les consultations ont une durée moyenne de 45 mn – et

le travail en équipe.

Les médecins sont souvent – ou ont été – indif-férents à la douleur des patients. Comment les « interpellez-vous » sur ce comportement ?Il est vrai que la prise en charge de la douleur a longtemps

été négligée par les médecins, son développement ayant

été freiné d’une part par une éducation majoritairement

judéo-chrétienne, d’autre part par une méconnaissance

médicale de la douleur et une insuffisance de moyens de

prise en charge. Pendant mes études médicales, débu-

tées en 1976, aucun cours ne traitait spécifiquement la

douleur. Heureusement, la prise en charge de la douleur

est maintenant devenue une priorité dans les hôpitaux,

les comités de lutte contre la douleur et les consultations

de la douleur se sont développées, la formation des per-

sonnels soignants s’est améliorée et les prises en charge

médicamenteuses et non médicamenteuses de la dou-

leur ne cessent de progresser.

Quelles sont les typologies des patients face à la douleur ?Classiquement, les douleurs sont classées en douleurs

par excès de nociception, douleurs neuropathiques,

douleurs à composante sympathique et douleurs psycho-

gènes. Les douleurs par excès de nociception sont liées à

la doulEur n’Est Pas unE fatalité

La douleur chronique n’est plus un simple symptôme mais évolue comme une propre maladie et s’accompagne d’un retentissement émotionnel, psychosocial et parfois familial

Entretien avec Dr Bernard Leroy, Praticien hospitalier, médecin anesthésiste dans le service de gynécologie-obsté-trique, coordonnateur de la consultation de la douleur depuis sa création, Président du CLUD, comité de lutte contre la douleur

1591er trimestre 2013 / DH magazine 145

rePOrtage DH : CH De rOubaix (nOrD)

Centre Hospitalierde Roubaix

un excès d’afflux de message douloureux en provenance

de la périphérie. Ce sont les douleurs les plus courantes,

rencontrées après un traumatisme : fracture, intervention

chirurgicale ou après une lésion cancéreuse évoluée… Ces

douleurs répondent aux traitements antalgiques classiques

– paracétamol, anti-inflammatoires, morphiniques...

Les douleurs neuropathiques sont

liées à une lésion nerveuse et s’ac-

compagnent d’un défaut d’inhibition

de la transmission de la douleur. elles

répondent aux thérapeutiques de la

classe des antiépileptiques et des anti-

dépresseurs. Les douleurs à com-

posante sympathique

sont rencontrées dans

certaines pathologies,

telles que les syndromes

douloureux régionaux

complexes – ancienne-

ment appelés algodys-

trophie Les douleurs

psychogènes ne sont

pas des douleurs simu-

lées. Ce sont de réelles

douleurs sans étiologie

organique retrouvée

mais liées à des fac-

teurs psychologiques,

émotionnels et com-

portementaux. elles ré-

pondent aux différentes

prises en charge psycho-

logiques.

on parle souvent de « douleurs psychologiques » : quelle en est votre défi-nition et comment en perçoit-on les symptômes ? Les douleurs psychologiques sont des douleurs

réelles sans lésions organiques, liées à des facteurs

psychologiques, émotionnels et comportementaux.

Leur évaluation doit être globale et faite à la fois

par un médecin somaticien, mais également par un

psychologue ou un médecin psychiatre. Après avoir

éliminé une cause organique et évoqué l’origine

psychogène de la douleur, la prise en charge reposera

essentiellement sur des entretiens avec le psychologue

et/ou le psychiatre, qui pourront éventuellement mettre

en place des techniques de prise en charge de type

cognitivo-comportementales, relaxation ou hypnose par

exemple.

Certains sont, dit-on, « durs au mal ». Quelle analyse en faites-vous ? Nous ne sommes, en effet, pas tous égaux face à la

douleur. Pour un même stimulus douloureux, la douleur

est perçue de façon différente selon les individus. La

perception de la douleur dépend de facteurs génétiques,

mais également de facteurs éducatifs, environnemen-

taux, familiaux ou liés aux expériences douloureuses

antérieures. C’est pourquoi il est primordial d’évaluer

objectivement la douleur des patients avec des outils

d’évaluation adaptés à leur âge, à leurs capacités cogni-

tives et, éventuellement, à leur pathologie.

dans la documentation que vous m’avez communiquée, rien n’est mentionné à propos des drogues « dures » : morphine, héroïne et autres. Comment traitez-vous ces drogues ? Pourquoi ne sont-elles pas mentionnées explicitement ? La morphine et ses dérivés font évidemment partie de

l’arsenal thérapeutique mis à notre disposition. Nous uti-

lisons ces médicaments très largement. Ils sont utilisés

dans les douleurs par excès de nociception, mais éga-

lement dans la prise en charge des douleurs neuropa-

thiques. Dans les douleurs par excès de nociception, ils

sont utilisés en suivant la classification des antalgiques

de l’OMS en 3 paliers. Nous commençons par utiliser

les antalgiques de palier 1 : paracétamol, anti-inflamma-

toires, puis les antalgiques de palier 2 : association du

paracétamol avec la codéine, tramadol…, puis les antal-

giques de palier 3 : essentiellement représentés par les

substances morphiniques. Dans les douleurs neuropa-

thiques, les morphiniques sont utilisés en troisième in-

tention lorsque l’association d’un antidépresseur et d’un

antiépileptique ne donne pas de résultat satisfaisant.

S’agissant exclusivement de la douleur, quelle est l’importance de votre travail : mi-temps ? tiers temps ? À quoi correspond le reste de votre activité ?Je consacre 40 à 50 % de mon activité à la prise en charge

de la douleur. Je suis coordonnateur de la consultation de

la douleur du Centre Hospitalier de roubaix et président

du CLUD – comité de lutte contre la douleur. Le reste

de mon activité est consacré à l’anesthésie. Je suis en

effet médecin anesthésiste depuis 1984 et exerce cette

activité essentiellement dans le service de gynécologie

et d’obstétrique du CH de roubaix. n

160 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : juriDique

Par ordonnance n° 11/01306 du 14 mars 2012, le juge des référés du tribunal de grande instance de grenoble a enjoint au Centre Hospitalier Alpes-Isère d’informer son comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCt) de tous les événements indésirables portant sur la santé physique et mentale des sala-riés et/ou sur les conditions de travail, dans le délai de 15 jours suivant leur survenue, ou dans le délai de 15 jours à compter de la date où il en aura eu connais-sance, par tout moyen utile et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé le délai de 15 jours.

Sévère et exigeante, l’ordonnance invite le juriste à s’inter-roger sur le sens de l’injonction adressée à l’employeur de transmettre au CHSCt le signalement des événements in-désirables, sur la valeur de cette décision et sur les consé-

quences pratiques induites par la position du juge.

lE sEns : l’employeur est sommé de transmettre au cHsct le signalement des événements indésirables

Il importe d’emblée de reproduire le passage intéressant de la décision considérée :« - l’absence de transmission des événements indési-rables ;attendu que le conseil exécutif du centre hospitalier a mis en place en juin 2006 un système de gestion des risques et de vigilance et que la gestion de ces événements indé-sirables est assurée par l’utilisation d’un logiciel siGnal ;

Qu’il n’est pas contesté que le centre hospitalier est op-posé à informer, de manière systématique et par courriel, le cHsct de tout événement indésirable dès lors qu’il s’en produit un mais qu’il a proposé d’en faire le bilan exhaustif et détaillé en séance du cHsct avec remise d’un document écrit ; que ce document a été présenté lors de la réunion du cHsct du 26 janvier 2012 ;

attendu toutefois qu’aux termes de l’article l. 4614-9 du code du travail, le cHsct reçoit de l’employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l’exercice de sa mission ;

Qu’en refusant d’informer le cHsct des événements indésirables relatifs à la santé physique et mentale des salariés, le cHai fait obstacle à l’exercice par le cHsct de ses missions telles que définies aux articles l. 4612-1 et suivants du code du travail et plus particulièrement à celle visée à l’article l. 4612-5 du code du travail relative aux enquêtes en matière d’accident du travail ou de maladie professionnelle ; que ce refus, en ce qu’il porte atteinte aux pouvoirs du cHsct, est constitutif d’un trouble mani-festement illicite, auquel le juge des référés doit mettre fin ; qu’il sera fait droit à la demande présentée par le cHsct dans les conditions précisées au dispositif. »

Il importe de relever que l’expression « événement indési-rable » n’est utilisée que par le code de la santé publique, et dans un contexte précis, celui des produits de santé (article r. 6322-4 du code de la santé publique), de la recherche biomédicale (article r. 1123-39 du CSP, lequel donne de l’événement indésirable la définition suivante : « (…) toute manifestation nocive survenant chez une per-sonne qui se prête à une recherche biomédicale que cette manifestation soit liée ou non à la recherche ou au produit sur lequel porte cette recherche »), du geste de la mise en œuvre d’un dispositif médical (article r. 1123-48 du CSP) et des soins (article L. 1413-14 du CSP, relatif à l’obligation de déclaration dans le cadre de la vigilance sanitaire ; article r. 6111-1 du code de la santé publique : « constitue un événement indésirable associé aux soins tout incident préjudiciable à un patient hospitalisé survenu lors de la réalisation d'un acte de prévention, d'une investigation ou d'un traitement. »).

en l’absence de définition générique, ou même de défini-tion spécifique à la santé physique ou mentale des sala-riés, et à leurs conditions de travail, il est possible d’évo-quer celle donnée par l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAeS), ancienne dénomina-tion de la Haute Autorité de Santé (HAS).

Il s’agit d’une « situation qui s’écarte de procédures ou de résultats escomptés dans une situation habituelle et qui est ou serait potentiellement source de dommages (dys-fonctionnement, incident, accident) » (ANAeS, Principes méthodologiques pour la gestion des risques en établisse-ments de santé, janvier 2003). Par la généralité des termes utilisés, cette définition couvre parfaitement l’ensemble des occurrences pouvant entraîner un dommage.

contestations de certains tarifs pratiqués par les experts agréés missionnés par les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (cHsct) aux frais des établissements de santé, reproches quant à la médiocre qualité de certains rapports d’expertise, le cHsct des centres hospitaliers fait couler beaucoup d’encre juridictionnel, jusqu’à rendre parfois des décisions étonnantes. Explication par Maître omar yahia, avocat au barreau de Paris.

sous l’œil du CHSCT

Le signalement des événements indésirables

1611er trimestre 2013 / DH magazine 145

rubrique DH : juriDique

en l’espèce, il était à craindre que le CHSCt ne s’empara, en quelque sorte, de cet outil pour en faire une procédure d’urgence afin d’agir rapidement sur l’événement indési-rable, ce qui dénaturait la démarche d’amélioration conti-nue de la qualité et de la gestion des risques, instaurée par l’établissement.

Le juge judiciaire, culturellement favorable aux CHSCt, n’a pas été sensible à l’argumentation ni aux inquié-tudes de l’établissement, l’instance représentative du personnel soutenant, pour sa part, qu’il lui appartenait de connaître immédiatement, ou à tout le moins dans les meilleurs délais, de réalisation des événements in-désirables relevant de son champ de compétences afin de pouvoir diligenter des enquêtes en matière d'acci-dents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel, selon les termes de l’article L. 4612-5 du code du travail.

la valEur : un fondement textuel très discutable

Dans son ordonnance, le juge s’est fondé, essentielle-ment mais pas exclusivement, sur l’article L. 4612-5 du code du travail pour donner gain de cause au CHSCt du Centre Hospitalier, ce qui démontre la vision étroite des événements indésirables par le magistrat, pris unique-ment sous l’angle des accidents du travail et des maladies professionnelles.

en réalité, le signalement des événements indésirables gagne à être replacé dans le contexte plus global de la gestion des risques.

Il aurait été plus logique pour le juge des référés de se fonder sur les articles L. 4612-2 et L. 4612-3 du code du travail, dès lors que le premier de ces articles précise que le CHSCt procède à l’analyse des risques profes-sionnels auxquels peuvent notamment être exposés les travailleurs de l'établissement, ainsi qu'à l'analyse des conditions de travail, d’une part, et que le second article dispose en particulier que le CHSCt contribue à la pro-motion de la prévention des risques professionnels dans l'établissement et suscite toute initiative qu'il estime utile dans cette perspective.

On retrouve, dès lors, une véritable légitimité à la solu-tion retenue par le juge des référés : la prévention (article L. 4612-3) et l’analyse des risques (article L. 4612-2).

en se fondant sur l’article L. 4612-5 du code du travail relatif aux enquêtes sur les accidents du travail et les ma-ladies professionnelles, l’ordonnance a, en quelque sorte,

affaibli son raisonnement.

la PortéE : une vigilance constante de l’employeur s’impose Au plan juridique, il ne s’agit assurément pas d’une décision de principe, mais sa teneur et sa tournure renseignent sur l’approche juridictionnelle toujours bienveillante en faveur du CHSCt.

Nul ne conteste l’utilité du recueil des événements indésirables, la jurisprudence très récente montrant même que leur signalement a permis d’alerter l’employeur sur le manque chronique de personnel dans certains services (cardiologie, bloc opératoire), conduisant les agents à suspendre, à abréger ou à renoncer à leur pause repas (CA grenoble, Chambre sociale, 29 novembre 2012, Centre Hospitalier régional de Valence c/ CDHSCt du CH de Valence, n° 12/02548. Sur des faits similaires, on peut citer CA toulouse, Chambre sociale 4, Section 1, 28 juin 2012, SAS Clinique d’Occitanie c/ CHSCt de la Clinique d’Occitanie, n° 11/04647).

Mais, au plan pratique, et en fonction de la taille de l’établissement, de la diversité et de son niveau d’activité, une telle obligation consistant à renseigner systématiquement le CHSCt de chaque événement indésirable, au moment où son signalement a lieu, peut se révéler extrêmement fastidieuse, voire contre-productive.

Le signalement dépendra naturellement des déclarants, du niveau de diffusion de la culture du risque au sein de chaque établissement, de la commodité pratique des conditions de signalement (logiciel et/ou fiches papier), et enfin, voire surtout, du retour d’information auprès du ou des déclarants afin que ces derniers puissent continuer à s’investir pleinement dans la démarche.

À une sollicitation du CHSCt, en rapport avec ses attributions, il est dès lors difficile pour le chef

d’établissement de dire non… sous l’œil du juge. n

Omar YahiaAvocat au Barreau de ParisVice-président de l’Association pour la Promotion de la Sûreté des Systèmes d’Information de Santé (APSSIS)Mail : [email protected]

162 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

rubrique DH : LittÉrature

Me raconte des blagues et comptes fort gentils.Plantant là tous ces contes : ils sont d’apothicaireJe laisse les grands sages à leur conte monétaire.Plutôt que de pleurer, je fais fi de ces peurs,Me gave de poèmes et vers consolateurs.Pour retrouver la paix, ils me font diversion,en m’orientant l’esprit vers d’autres distractions.Ces contes rassurants sont lecture plus belleQue les comptes d’augures aux tons de MachiavelQue les remords des banques et leurs contes de faits,Quand on parle réforme ou d’autres grands bienfaits…

Alors, qu’en a-t-on fait du siècle vingt et un ?Après douze ans de vie, ses comptes sont atteints.en guise de cadeau, on attend le déluge,Chacun courbe le dos, espérant un refuge !Qui doit payer comptant est rarement content,Même si mécontent n’est pas mauvais payant.Ceux qui disent qu’un jour, les contes seront bons,Ils nous la comptent belle ; avec leurs contes ronds.Ceux du Père Noël ne sont pas plus carrés,S’annonçant cette année, bien pauvres en jouets.Morale de ces vers : quoi que content les pontes,Jamais d’un traître mot, n’ayez foi en leurs comptes,ni d’un petit euro, n’avancez un acompte ;Des dettes ils laisseront pour solde de tout conte …

dernière parutionde jacques Grieuéchec et mâtsle Gambit de la dameéd. les 2 encres, collection encres nomades 20,50 €

Bonne damnée !Compte de nouvel anPoème de jacques Grieu

l’intrigue du livre se passe dans un club d’échecs de Rouen, dans cette unique salle, un vendredi de l’année 1997 entre 14 h 05 et 19 h 45. Même si l’on s’en évade souvent en parlant beaucoup de la grande pêche, de la marine à voile et de fécamp, ville chère aux pro-

tagonistes du récit, avec son port, ses falaises, ses traditions, ses souvenirs et ses… harengs. trois joueurs retraités, amis fécampois de toujours et une Pari-sienne, s’y réunissent régulièrement depuis plus de dix ans, voire même vingt pour certains, pour en découdre lors de parties ani-mées. Deux d’entre eux sont puissammentattirés l’un vers l’autre. un couple qui s’était autrefois juré fidélité. Pourquoi se sont-ils brutalement séparés quarante ans auparavant ? et se sont-ils maintenant retrouvés sans pouvoir vivre ensemble ? armelle, l’épouse de thomas, s’est-elle réellement suicidée ? Pour quelle raison ? c’est ce que, à travers des digressions souvent passionnées ou farfelues devant l’échiquier, le lecteur va petit à petit finir par découvrir. une émouvante histoire sentimentale où la mer est toujours en toile de fond.

La crise maintenue rend mes vers éternels, et chaque année je peux les reprendre tels quels. Si je change la date, hélas jamais la dette !Désenchantés, mes contes iront-ils à perpette ?

L’An Deux Mille a treize ans : c’est encore un enfant !À l’image des temps, serait-ce un délinquant ? Arrivant menaçante et qu’on prédit mal née,La treizième du siècle est déjà condamnée ?Comme un vieux triple A qui se sait moribond,elle traîne les pieds, n’augure rien de bon.est-ce une année maudite, à faillite, à séismes ?L’année de tous les cracks, de tous les cataclysmes,Que les économistes, experts, tous ceux qui savent,Nous prédisent effrayante et que leurs peurs aggravent ?le chômage et la dette… et le pire à subir,taxation, récession, voilà votre avenir.Haro sur les plus riches, ou exilés fiscaux, Qui content à l’étranger leurs cent pour cent d’impôts.

Ce sont là des exemples ; on les prend à son compteSans peur d’entendre dire : on s’en tire à bon conte !S’il y a comptes et contes, on n’oublie pas les comtes,Je ne m’amuserais à en faire décompte,etendus pour le conte, ils se trouvent contus,Sans s’être rendu conte avec leurs comptes rendus,Que les comptes de fées, ont leurs charmes rompus,Que l’aide à l’État n’est plus du superflu…Comptés en langue suisse, les contes émeuvent mieux,et tous ceux de Belgique sont aussi mélodieux …

Certains, faisant leurs comptes, disent : tous contes faits,ce crack catastrophique est un drame surfaitAlors, bombant le torse, ils reprennent confiance,et s’endorment le soir sans plus penser finances …Mais leur assureur-vie perd de son assurance,Leur paradis fiscal oublie ses échéances,La panique surgit avec l’argent qui manque ;Ils ne se soucient plus que de leurs contes en banque.Devrais-je, avec ces comptes, me sentir mé-contant,Pendant qu’à mon banquier, je me plains en pleurant ?Faut-il changer ma banque où des doutes m’assaillent ;La mienne est donc la pire ? et si elle défaille ?Ceux de Franche-Comté, sont-ils mieux que les autres ?La femme du voisin surpasse bien la nôtre !

Malgré l’austérité dont on fait tous les frais,Notre notation, au compte tomberait ?Jamais plus de ma vie, ne m’en laisserai compter ;Même compter fleurette, il faudra me méfier.toutes ces prédictions, je les traite au mépris,

162 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013

164 DH magazine 145 / 1er trimestre 2013