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1 « Don’t Worry, Be Nappy » un film écrit et réalisé par Xavier Houezo et Benoît Sourty durée 52 minutes

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« Don’t Worry, Be Nappy »

un film écrit et réalisé

par

Xavier Houezo et Benoît Sourty

durée 52 minutes

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SOMMAIRE

LE SUJET Page 3

UN VOYAGE Page 4

NOTE D’INTENTIONS DES AUTEURS Page 5

SYNOPSIS Page 9

TRAITEMENT Page 26

INTERVENANTS Page 28

CV DES AUTEURS Page 29

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LE SUJET

Tresses plaquées ou dreadlocks se généralisent et traversent les générations, les continents

et les catégories sociales. Blancs ou Noirs les adoptent, que leurs cheveux soient crépus ou non.

Parallèlement, le défrisage des cheveux crépus se propage au sein de communautés noires au gré

des couvertures de magazines. Dans les deux cas, ces engouements actuels en faveur ou en rejet

des coiffures issues des cultures Noires, traduisent bien plus qu'un phénomène de mode : ils

masquent en réalité la menace de voir peu à peu disparaître la symbolique et l’esthétique que ces

coiffures véhiculent depuis des siècles en Afrique ainsi que l'ancrage identitaire au sein de la

« diaspora » négro-africaine.

.

En quoi est-ce grave?

Béninois vivant en France depuis 38 ans, je me souviens encore du jour où lisant « Nations

Noires et Culture », l’oeuvre culte de Cheikh Anta DIOP portée par l'ambition de la renaissance

africaine, le déclic s'est produit et j'ai décidé de porter des dreadlocks.

Constatant comment les groupes de cosmétiques jouent avec la volonté d'une frange de la

communauté africaine et afro-descendante de se débarrasser du cheveu crépu considéré comme

un boulet à traîner, je veux faire prendre conscience que la coiffure afro ne peut pas être balayée

d'un revers de peigne car c'est alors un pan de notre culture qui est malmené, nié, abandonné.

Et lorsque j'observe comment les salons de coiffure Afro ne désemplissent pas dans certains

quartiers de Paris, je choisis de remonter le temps à la recherche des gestes traditionnels et de

leurs significations originelles. Je prends la route, et quitte les salons Afro de Paris pour découvrir

au fur et mesure des rencontres que la fierté d'être Noir s'est trop souvent heurtée dans l'histoire

et encore aujourd'hui, au rejet par le Noir lui-même des propres fondements de sa personnalité.

Au bout du voyage, la rencontre avec le photographe nigérian Okhai Ojeikere, met en lumière

qu’il fut un temps où les femmes africaines considéraient la coiffure comme une oeuvre d’art qui

racontait un peu de la vie de la femme qui la portait. Ses milliers de photographies représentent

donc bien davantage que les traces d’un patrimoine ou la valorisation d’un savoir-faire ancestral.

Alors reviennent les interrogations posées au début du voyage : que veut dire être belle aux yeux

de la femme Noire d’aujourd’hui pour qu’elle accepte de se soumettre à des contraintes

esthétiques étrangères à ses spécificités ethno-culturelles ? Comment cette simplification s’est-

elle enracinée au fond des esprits ? Et pourquoi est-il si important pour moi de sortir de cette

aliénation?

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UN VOYAGE

Venues de rites égyptiens, malmenées par les patrons esclavagistes aux Antilles, nourries

de la lutte des Noirs Américains contre la discrimination, récupérées par une jeunesse blanche

qui y projette des symboles de liberté ou de rébellion qu’elles n’avaient pas au départ, les

différentes façons de coiffer les cheveux crépus sont le fil conducteur de ce film.

Et en le déroulant, ce fil nous guide à travers le labyrinthe des critères de beauté et de

laideur qui changent selon les lieux ou les époques. Face aux préoccupations mercantiles de

groupes industriels cosmétiques qui jonglent subtilement entre recherches identitaires et suivis

des tendances, le savoir-faire ancestral perdure tout de même dans les gestes et les

préoccupations de quelques femmes en Afrique.

Le film est le récit de cette épopée du cheveu crépu depuis l’Egypte pharaonique jusqu’aux salons

de coiffures afro parisiens, en passant par les discours des Black Panthers, ou les angoisses des

esclaves en Martinique.

Comme s’il était égyptien au temps des Pharaons, ou revivait de l’intérieur l’angoisse de

l’esclave qui veut lisser ses cheveux pour plaire au maître blanc, comme s’il écoutait Angela

Davis ou James Brown lui raconter l’importance d’être fier d’être noir, Xavier Houézo raconte ce

qu’il voudrait retenir de ces rencontres.

Le voyage commence dans les salons de coiffure Afro de Paris et embarque le récit à travers les

continents au gré de certaines rencontres. Certaines rencontres sont virtuelles et se font grâce aux

archives , accompagnées par la voix off de Xavier Houézo comme s’il se trouvait aussi bien face

aux Black Panthers que face aux Egyptiennes des temps pharaoniques. D’autres rencontres sont

réelles, commencent en France avec la sociologue Juliette Sméralda et la créatrice du salon

Boucles d’ébène Aline Tacite et vont jusqu’au Nigeria avec le photographe Odjekhere véritable

mémoire artistique d’un savoir-faire qui passe à travers les siècles.

La fonction sociale identitaire de la coiffure du cheveu crépu passe par une nouvelle perception

de soi, avec, au bout du voyage : la célébration d’un nouvel homme Noir.

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NOTE D’INTENTION DES AUTEURS

Xavier Houézo :

« Récemment, j’attendais mon tour dans un établissement lorsqu’une inconnue s’est approchée

de moi, me touchant les cheveux comme par évidence. Elle semblait animée par une envie

incontrôlable. Stupéfait, je lui demandai des explications sur son geste. Je n’eus droit à aucune

réponse. En revanche, elle me posa une série de questions :

«Comme ils sont drôles vos cheveux ! Comment faites-vous pour leur donner cet aspect? Vous les

tressez ? Avec quoi vous les lavez ?»

Son attitude et ses interrogations m’évoquèrent aussitôt des souvenirs lointains, comme l’effet

d’un parfum ou d’une voix pleine de réminiscence.

Je suis « Métis », né au Bénin, de mère française et de père béninois. Arrivé en France à l’âge de

huit ans, j’ai très vite découvert que j’avais une couleur de peau qui suscitait des kyrielles

d’injures et quelques rares fois, un intérêt intelligent. Adolescent, je portais une coiffure afro et on

m’appelait Willy (de la série télévisée américaine « Arnold et Willy »). Ou Gérard Janvion (un

ancien footballeur international français). Aujourd’hui, je porte des dreadlocks ce qui fait de moi

un fidèle de Bob Marley, catalogué fumeur de joints, toujours dans un état léthargique, un rasta

cool !

Mon origine culturelle, mon identité, mes sentiments, mes goûts, mes choix, ma personnalité ne

retenaient pas l’attention; seuls la couleur de ma peau et mon système capillaire provoquaient

une grande curiosité. Ainsi ma coiffure et la texture de mes cheveux intriguent, devenant une

source de questionnements et de curiosité à la fois saine et malsaine, liée à la couleur absolue de

l’altérité ( « Je peux te toucher les cheveux ? On dirait de la laine. Comment tu fais pour les laver ?

Avec quoi tu les coiffes ? »), Je découvrirai plus tard que ce genre de réflexion n’était que la partie

émergée d’un ensemble de discriminations que subissent les Noirs, et qui les poussent recourir à

des pratiques plus extrêmes (« Qui suis-je ? Pourquoi ai-je cette couleur de peau ? »).

Il fut un temps où les femmes africaines, loin de détester leurs cheveux crépus, faisaient de la

coiffure un exercice de style et très souvent une oeuvre d’art. La texture laineuse et dense de nos

cheveux nous inspiraient, nous poussaient à nous surpasser dans la créativité et la sophistication

esthétique. Mais aujourd’hui, il est bien passé ce temps où chaque femme africaine, parée de ses

tresses aux lignes compliquées et ornées de perles, ressemblait à une reine.

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Les nattes et les tresses sont des techniques de coiffage essentiellement issues des cultures

africaines. De l’antiquité à nos jours, comme l'atteste les peintures rupestres du Tassili N’Ajjer

dans le Sahara Algérien (environ 7000-6000 ans avant JC) montrent des femmes aux coiffures

apprêtées. Ces coiffures sont guère peu différentes de celles que l’on trouvait il y a encore

quelques décennies en Afrique où l’art de la coiffure s’est transmis de génération en génération,

généralement de mère en fille.

De tous les types sociaux ou types « raciaux » qu'il y a sur terre, seuls les « Négro-africains »

arborent des coiffures aux arrangements esthétiques les plus sophistiquées, qu'ils aient les

cheveux crépus, pour la plupart ou raides, comme les habitants de la Corne de l'Afrique. Seules

les Soudanaises du nord se définissent comme "Arabes" et ne se tressent pas. Les raffinements

des tresses ou nattes sont un trait culturel, critère de distinction et d'identification . Bien qu’étant

la coiffure la plus ancienne depuis l’antiquité et la préhistoire ; l’Égypte et la Nubie ou Méroé, les

tresses et les nattes restent aujourd’hui encore indémodables.

En diaspora, et principalement aux Etats-Unis, les afro-descendants ont, par la force des choses,

réinventé la fonction symbolique des origines mais ce que je trouve remarquable c’est la

réappropriation de son moi par ce détour capillaire peut-être encore stigmatisé. Cette quête

identitaire va jusqu’au retour en Afrique avec la sophistication proprement africaine des

coiffures : la récupération des tresses dont la maîtrise de l’art touche le sublime avec la confection

de véritables sculptures capillaires où beauté et identité se rejoignent !

Il est toujours embarrassant de parler de soi, de se livrer mais la pratique du défrisage que l’on

peut observer de plus en plus, au-delà des intentions affirmées ou inavouées des femmes,

interpelle en définitive la conscience de tous les Noirs. La volonté de se faire belle ne suffit pas, à

elle seule, à expliquer cette pratique. S’agit-il d’un complexe profondément enfoui dans

l’inconscient collectif des Nègres ? Ou devrait-on simplement imputer cette pratique au niveau

de conscience individuelle des femmes qui s’y livrent ?

Ma volonté d’en connaître un peu plus aboutira sur une rencontre, celle de Juliette SMERALDA,

véritable chantre de la désaliénation par une nouvelle auto perception de soi et la célébration

d’un nouvel homme Noir.

En quête de réponse, je décide donc de poser cet acte ; l’écriture et la réalisation de ce film

documentaire « Don’t Worry Be Nappy » pour asseoir efficacement cette quête spirituelle et

identitaire avec pour ambition de proposer des pistes de réflexion et inciter le Noir à prendre

possession de sa personnalité aliénée par la culture dominante. Il me paraît évident qu’un détour

dans le passé est nécessaire pour nous débarrasser de nos vêtements d’emprunt, ceux de

l’asservissement et de l’assimilation, deux formes de passivité et affirmer notre être. Autrement

dit, détruire le « mort » et réinventer la vie. Je ne suis pas assuré de poser les bonnes questions, de

formuler les bonnes interrogations, ni de fournir les réponses adaptées, justes, équitables,

efficientes. J’aimerai contribuer non à délivrer un message qui prétendrait à l’exhaustivité et à la

généralité mais à apporter une modeste part à une pertinente problématisation de la question

identitaire Noire,

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Intentions du co-auteur

Benoît Sourty

Xavier Houézo est un ami. Depuis peu.

Nous nous sommes rencontrés à l'occasion de ce projet de film “Don’t worry , be nappy".

Il est arrivé un matin, chargé d'un nombre considérable d'informations sur les cheveux

crépus, leurs rôles dans l'histoire de civilisations anciennes, leurs significations lors des

revendications identitaires des Noirs américains aux USA dans les années soixante, l'enjeu qu'ils

représentent actuellement pour les groupes de cosmétiques à la recherche de nouveaux

marchés..... Une masse d'éléments dont je ne soupçonnais pas d’autre intérêt qu'ethnographique,

voire celui de la découverte d’une technique contraignante pour se coiffer.

Si le combat des Black Panthers m’est connu, s’il est facilement perceptible que les

préoccupations mercantiles de groupes industriels cosmétiques jonglent entre recherches

identitaires et suivis des modes, je n’avais pas conscience que la remise en question par l’Africain

de sa propre identité n’était pas seulement apparue durant la dramatique époque de l’esclavage .

En effet si revendication identitaire il y a aujourd’hui, elle est cantonnée à une seule

préoccupation esthétique et perpétue finalement inconsciemment ce rejet par l’homme Noir de sa

propre identité. Car le critère de beauté , nous le savons tous , fluctue et, varie avec les pressions

socio-économiques. Comment pourrait-il dès lors constituer un fondement identitaire solide ?

Alors, je comprends la tristesse pour Xavier Houezo de voir oubliée aujourd’hui la

sophistication des coiffures . Cette perte va au-delà de la perte d’une esthétique : la disparition d’

un savoir-faire ancestral traduit la perte d’ une sociabilité qui n’existerait désormais plus.

Au fur et à mesure que nous tournions autour du film à sa recherche, une évidence s’est

progressivement imposée : l’importance de ce sujet pour Xavier Houezo. Ce déclic n'a rien

d'artificiel. Il ne s'agit pas seulement pour moi de trouver une façon de m'approprier le sujet, de

faire en sorte qu'il me concerne, moi originaire de Bretagne avec mes cheveux raides de Blanc,

autant qu'il concerne Xavier , béninois à la tête recouverte de dreadlocks.

Ce n'est pas seulement le cheveu crépu à travers les âges, les continents ou les civilisations qu’il

est important de raconter, c'est aussi et surtout ce que révèle l'histoire d'un type qui, un jour qu'il

se fait rembarrer pour sa coiffure considérée comme bizarre par une jeune fille en France, en

arrive naturellement à se demander comment il peut être aussi attaché à la nature de quelques

poils qui se dressent sur sa tête.

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Il est bien sûr tentant quand on veut faire un film de lui imaginer son univers propre et le

temps de sa dramaturgie. Et me représenter Xavier racontant la fonction sociale des cheveux

crépus à travers le temps comme s’il traversait lui-même ces époques et ces sociétés devient une

façon amusante et logique de montrer l’importance de cette histoire pour lui. Xavier considère les

cheveux comme un lien entre lui et les Black Panthers de New-York, un lien entre lui et une

femme égyptienne de l’époque Pharaonique ou entre lui un guerrier Massaï, un lien qui

cristalliserait l’identité Noire autour des nouvelles fonctions du cheveu au sein de la diaspora.

Cela doit être raconté, expliqué, ressenti.

Cette histoire est la sienne et c’est aussi celle d'une humanité entière.

Pas besoin de courir le monde pour cela. Ses interrogations sont personnelles mais elles

resteraient sans réponses si Xavier ne trouvait sur son chemin un ou deux repères qui

l'embarquent sur la route de la connaissance. Revenir au savoir-faire ancestral en racontant en

route les significations sociales de gestes de la main qui coiffe, entraîne alors mon ami vers ses

racines.

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SYNOPSIS

Pré générique :

Extrait d'un journal télévisé du 2 avril 2012 au sujet d'une mise pied imposée à un salarié d'Air

France sous le prétexte que ce stewart porte des dreadlocks. Voilà deux ans que cet homme,

originaire des Antilles est contraint de porter une perruque lisse. Il n'en peut plus et décide un

matin de venir à bord d'un avion avec des magnifiques tresses plaquées sur son crâne, une très

belle coiffure qui ne plait pas son employeur.

C'est le point de départ du film.

http://www.people-bokay.com/la-coiffure-rasta-refusee-sur-air-france/

Suite à l'extrait de 2', nous découvrons Xavier Houezo, debout dans une pièce, qui regarde le sujet

sur son poste télévisé.

Sa voix off commence à l'issue de cette rediffusion:

Qu'est-ce que l''attitude d'un employeur qui refuse à un employé de se coiffer comme il

veut, révèle de notre société? Et surtout qu'est-ce que cette attitude cache en réalité?

Xavier Houezo quitte son appartement et se retrouve dans les rue de Paris tandis que en off, un

extrait du fameux “Say it loud I’m black and I’m proud”, concert que James Brown a donné en 1971 à

l’Olympia accompagne les prises de vues de Paris aujourd'hui.

Générique :

La voix off de Xavier revient et continue sur des prises de vues de Paris. Les gens sur les trottoirs

filmés en longue focale passent dans le cadre. Parmi eux, on distingue Xavier qui approche, la

caméra le perd, le retrouve, des visages, des voitures passent.

Récemment, j'attendais mon tour dans une administration lorsqu'une femme s'est

approchée de moi, me touchant les cheveux comme par évidence. Elle semblait animée par

une envie incontrôlable et me posa une série de questions :

« Comme ils sont drôles vos cheveux ! Comment faites-vous pour leur donner cet aspect?

Vous les tressez ? Avec quoi vous les lavez ? »

Alors sont revenus des souvenirs lointains, comme un parfum.

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Salon d'Aline Tacite

A Bagneux, un petit salon de coiffure sur une place. Par la vitrine, l'intérieur du salon , avec trois

coiffeuses et quelques clients. La voix off de Xavier Houezo continue :

Je suis Métis, né au Bénin, de mère française et de père béninois. Arrivé en France à l'âge

de huit ans, j'ai très vite découvert que j'avais une couleur de peau qui suscitait des

kyrielles d'injures et quelques rares fois, un intérêt intelligent.

Les sons « in » prennent peu peu le pas sur la voix off, et dans un des salons, on perçoit de mieux

en mieux la discussion entre Aline et une de ses clientes.

Installées dans un coin du salon, Aline s'entretient avec cette cliente en lui posant des questions

inattendues pour un salon de coiffure : régime alimentaire de la cliente, consommation d'eau par

jour, activité physique, si ses cheveux sont naturels ou pas. Et si la cliente porte des locks, quelle

technique de coiffage utilise-t-elle? Si elle couvre ses cheveux le soir pour dormir? … Autant de

question qui surprennent mais établissent immédiatement Aline comme ayant une approche

particulière de son métier. Il s'agit en fait d'un diagnostic qui met en évidence l'approche

spécifique de la coiffure par Aline.

Puis la cliente s'installe et ce sont alors les gestes précis, la technicité et la dextérité d'Aline qui

apparaissent évidents lorsqu'elle coiffe ses clientes.

Tout en coiffant successivement plusieurs clientes, et alors que la caméra observe les gestes

répétitifs et techniques autour de cheveux aux textures différents, Aline parle de sa façon

d'appréhender les cheveux, sa formation aux USA, sa conviction que la coiffure est partie

intégrante de l'identité d'une personne au point qu'elle refuse tout ce qui ne sera pas lié à une

coiffure de cheveux naturels.

Depuis l'ouverture de son salon spécialisé dans les coiffures afro, elle a vu défiler assez de clients

et clientes pour être précise sur leurs préoccupations : la schizophrénie des ados face aux choix

des coiffures à porter, la panique des femmes devant la cassure de leurs cheveux ou leur alopécie

pour celles qui auraient abusé du lissage des cheveux pratiqué dans d'autres salons...

Laura, par exemple, 33 ans, est une cliente. Elle est là aujourd'hui et raconte justement comment

elle est tiraillée depuis son adolescence entre se lisser les cheveux ou rester naturelle. Titulaire

d'une maîtrise universitaire, elle est au chômage, convaincue que ses cheveux crépus sont un

frein à son embauche, que les hommes dans la rue sont davantage attirés par les coiffures lisses,

défrisés. Laura est une personne très franche qui assume son questionnement et son sentiment de

traîner les cheveux crépus et les tresses comme un boulet, elle l'assume. De la même façon qu'elle

assume être séduite par les images des stars noires du mannequinat aux cheveux défrisés et lisses

que renvoient les magazines et la télévision. Mais elle avoue avoir du mal à tenir avec ce

tiraillement au fond d'elle, elle en parle librement. D'ailleurs si elle est aujourd'hui dans le salon

d'Aline , c'est à la fois pour nous en parler ( rencontrée lors des repérages, elle accepte de revenir

pour le tournage) et afin qu'Aline lui fasse un soin pour ses tresses.

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Le point de vue d'Aline à ce stade du récit est intéressant et un dialogue entre elle et Laura

trouve naturellement sa place dans le salon. Il met bien en évidence la problématique et l'enjeu

du film : les femmes qui veulent se lisser les cheveux, cherchent des prétextes pour se justifier :

cela permettrait des coiffures plus faciles à entretenir , c'est une façon d'être mieux acceptée...

Les possibilités de discussions avec les clientes et les clients sont évidentes dans ce salon. Comme

cette rencontre avec deux soeurs et leur mère. Suite à l'expérience de sa grande soeur (perte de

cheveux...) , Clémence a toujours préféré garder ses cheveux naturels. La présence de la mère

permet alors d'aborder la notion de la transmission qui existe de moins en moins, dans les

sociétés actuelles.

Dans tous les cas, et sans faire la morale aux clientes parce que ce n'est pas du tout dans la

personnalité de Aline de donner des leçons, ses explications mettent en lumière que la

méconnaissance des femmes Noires de leurs propres cultures est une façon de se retrouver

amputées d'une richesse qui leur est propre : le potentiel de coiffures magnifiques que permettent

les cheveux crépus. Mais ce qu'Aline veut surtout que l'on retienne est que l' oubli du savoir-faire

ancestral révèle aussi qu'en se coupant de ses racines, l'homme ou la femme Noirs entretiennent

une forme de négation de leur identité.

C'est la conclusion que porte Aline à cette séquence, mais il ne suffit pas de l'entendre le dire aux

clientes. Xavier veut comprendre ce que veut dire Aline.

En quoi cette méconnaissance de notre culture serait-elle préjudiciable? Qu'y a-t-il à voir

au delà de la technique magnifique que je vois dans les gestes de celles qui la maîtrisent?

Les images quittent le salon , laissant les clientes avec Aline, tandis que la voix de Xavier Houezo

reprend le fil de ses interrogations.

Alors qu'il parle, les images s'attardent sur des mains en gros plan qui coiffent rapidement des

cheveux noirs. La dextérité et la technicité des gestes est impressionnante, la coiffure magnifique

et compliquée à la fois. Nous découvrons Animatou, coiffeuse spécialisée dans les coiffures très

sophistiquées. Nous sommes dans les coulisses d'un défilé pour Jean-Paul Gauthier, Animatou ,

une des coiffeuses attitrées de défilés de mode. Elle coiffe quelques mannequins puis nous parle..

Sa connaissance des coiffures précises et, le fait qu'elle ne se contente pas de coiffer les cheveux

naturels et accepte les coiffures artificielles la rende intéressante après le point de vue d'Aline.

Toutes les deux maintiennent une tradition de technicité mais les chemins pour y arriver ne

semblent pas les mêmes. La prise de conscience par Animatou, de l'enjeu de la connaissance des

coiffures traditionnelles et des ravages qu'elle observe sur les cheveux de nombreuses

mannequins , ravages extérieurs et peut-être intérieurs, est à écouter. Ressent-elle ces ravages

comme un fléau contre lequel lutter à l'aide de connaissance ancestrale de la coiffure? Comment

ne pas céder aux demandes d'un secteur tape à l'oeil quelqu'en soit le prix à payer par ceux ( et

surtout celles) qui le véhiculent?

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Animatou travaille parfois avec Aline dans son salon de Bagneux. Elle est donc tout à fait

consciente que les mannequins sont éloignées de préoccupations identitaires autres que celles de

leurs statuts sociales. Elle tente à son échelle de minimiser les dégâts en utilisant autant que

possible des produits naturels et en convaincant les mannequins que certaines pratiques sont

moins nocives extérieurement et intérieurement que d'autres. Un long chemin en perspective

qu'elle semble capable de tenir sur la distance tellement cette jeune femme apparaît bien dans sa

peau.

Images des préparatifs et du défilé lui-même, magnifique tandis qu'en off arrive une voix en

Anglais ( sous-titrée).

C'est la voix de Malcolm X qui exhorte les Africains-Américains à changer de paradigme

intellectuel en se questionnant sur les pratiques que sont le défrisage et la décoloration de la

peau. Sur les images du défilé, les mots résonnent :

« Ils se sont moqués de vos noms et vous avez changé de nom. Ils se sont moqués de vos

habits et vous avez changé d'habits. Ils se sont moqués de vos cheveux et vous avez

acheté des défrisants. Ils se sont moqués de votre peau et vous avez acheté des éclaircissants. Ils

se sont moqués de vos langues et vous avez adopté les leurs. Ils se sont moqués de vos

religions et vous avez embrassé les leurs. »

Des images d'archives du film documentaire : Make it plain sur Malcolm X , la voix en In :

« Qui vous a appris à haïr la texture de vos cheveux ?Qui vous a appris à haïr la couleur de votre

peau? Au point de la blanchir pour être comme l’homme Blanc. Qui vous a appris à haïr la forme

de votre nez et la forme de vos lèvres ?Qui vous a appris à vous haïr du sommet de votre tête à la

plante de vos pieds ?Qui vous a appris à haïr votre nature ? A haïr la terre de vos ancêtres, à haïr

la race à laquelle vous appartenez au point de ne pas vouloir être à côté les uns des autres? Quand

allons-nous prendre conscience ? »

Fondu au noir

- Paris, Boulevard de Saint Denis.

Boulevard de Strasbourg, boulevard de l’Afrique. Dans le dixième arrondissement autour de la

gare de l'Est, la rue prend des airs "afro". Il y a une multitude de salons de coiffure, cosmétique, et

manucure. Rendez-vous sur un autre continent. Les rabatteurs accostent les femmes, distribuent

des papillons publicitaires pour le salon auquel ils sont affiliés.

Le trottoir est encombré par des poussettes et quelques scooters. Les passants se bousculent,

Afro-antillais pour la plupart. Les enseignes aux couleurs fluorescentes attirent l’oeil, les photos

de mannequins aux coiffures parfaitement lisses et aux ongles soigneusement manucurés aussi.

Les prises de vues isolent en longue focale des visages, des coiffures variées, dreadlocks portées

par des hommes et femmes.

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Intérieur d'un des salons.

Sceptiques, les rabatteurs laissent passer la caméra qui pénètre alors dans un gigantesque salon

fait de petites pièces qui s'enchaînent les unes derrière les autres. C'est bondé de monde, de

bruits, de musique. Il y a là des hommes, des femmes, des enfants. Les regards convergent vers

cette caméra, sentiment d'intrusion jusqu'à ce que Pascal, propriétaire des lieux , accorde une

interview. Il parle de la clientèle, des produits, des demandes des clients , de ses fournisseurs en

produits plus ou moins bons pour la santé, de la mode...La langue de bois fait partie du sujet :

comment surfer sur la mode et les tendances est aussi une façon d'exister et pense-t-il de

s'intégrer. Malcom X est loin...

Ce lieu est un véritablement impressionnant par le nombre de chaises , de glaces, de clients en

train de se faire coiffer ou en train d'attendre, une cinquantaine de personnes dans ces pièces

petites, mais qui avec les glaces et les alcôves donnent pas une impression de gigantisme.

Les mains au travail, les mouvements des bras, les postures et les crânes en transformation. Les

gestes précis des coiffeuses et coiffeurs professionnels.

Ailleurs dans un autre salon, même ambiance. Fofana, le patron d'un de ces salons parle en même

temps qu'il coiffe ses clients. Il est LE coiffeur des stars du club de foot du PSG Il raconte ce que

viennent chercher hommes ou femmes lorsqu'il s'agit de rester plusieurs heures au salon :

sociabilité, reconnaissance, look.

Là encore, les propos de Xavier essayent d'entraîner la conversation vers ces notions de défrisage, et de blanchiment de la peau. Pour évoquer les risques afférents, Xavier peut montrer les étiquettes de flacons : les mots isolés depuis la composition des mixtures montrent que certains

actifs sont présents dans les « produits embellissant : hydroxyde de sodium, soude... » , Et lorsque

Xavier évoque que l'utilisation répétée de ces produits provoque souvent des alopécies (perte

définitive des cheveux), des brûlures du cuir chevelu, ses interlocuteurs peuvent s'amuser et

dédramatiser cette description apocalyptique des nombreux produits dits « ethniques » , tout

particulièrement les crèmes défrisantes, dont l'application nécessite le port de gants, tellement ils

sont corrosifs. Cette dangerosité peut arriver peu à peu dans la conversation mais ne semble pas un enjeu majeur pour les patrons...ni les clients.

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Alors , peu à peu les sons « in » s'éloignent, le brouhaha des discussions et des demandes

spécifiques des clients disparaissent. Tandis que la voix introspective de Xavier Houézo revient.

Jamais il ne me serait venu à l'idée de blanchir ma peau, lisser mes cheveux ou y

ajouter des mèches. Pourtant il me suffirait de passer commande auprès de l'une

des trente usines chinoises, qui enverrait aussitôt un technico-commercial en

Inde afin qu’ il rapporte des échantillons de cheveux coupés à même la tête

d'enfants dociles et de femmes ravies de se faire tondre contre quelques roupies et

persuadés que leurs cheveux serviront d'offrande aux Dieux... Ensuite ces

cheveux seraient conditionnés en Chine d'où ils seraient expédiés en France, en

Allemagne ou ailleurs. 180 euros pour une perruque en cheveux naturels + 150

euros de pose, tout ça pour avoir la tête propre comme on dit parfois.

Mais ce n'est bien sûr pas pour raison économique ou esthétique

que je n'ai pas cédé. L'enjeu pour moi est bien ailleurs. Ma prise de conscience a

commencé en Egypte, il y des siècles, je me souviens...

Rupture de ton : aux images vivantes de la rue et des salons ont fait place des détails de

sculptures égyptiennes et de bas-reliefs. Les bruits de la ville et des clients se sont tus.

Le silence s'impose autour de ces oeuvres d'art qui représentent des coiffures. Le lieu se dévoile :

c'est le Département des Antiquités Egyptiennes du Musée du Louvre.

A l'image, les statuettes et fresques représentent les cheveux crépus, tresses, de la période

pharaonique

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La voix de Xavier Houezo reprend et le décalage entre ses propos et les images créent peu à peu

un pont entre les époques .

Pour quel idéal de beauté certaines femmes noires n 'hésitent-elles pas à prendre

tant de risques pour leur santé, à se ruiner en produits cosmétiques,? S'agit-il

pour elles d'avoir la sensation de partager leur identité avec celles qui suivent la

même mode?

Cette standardisation me fait peur.

Je me souviens des Egyptiennes de mon enfance. Comme elles étaient belles.

Qu’est devenue cette beauté?

Et toutes les histoires que racontaient ces coiffures? Perdues à tout jamais ?

Montage parallèle avec les images désormais muettes des salons de coiffures dans lesquels des

mains lissent les cheveux comme pour effacer les coiffures magnifiques des sculptures et des bas

reliefs qui apparaissent alors en fondus enchaînés ou en surimpressions.

Je me souviens des tresses et de nos coiffures sophistiqués, parfois ornées de fils d'or et

autres raffinements. Huiles, parfums , fleur de lotus, on accordait à la chevelure un soin

particulier parce qu'elle symbolisait notre rang social ou parce que pour certains, elle

permettait de communiquer avec le divin. Les coiffures égyptiennes qui se lisent

comme autant d'histoires individuelles font référence à la naissance, au mariage,

au deuil, à toutes ces étapes de la vie. Où est l'extraordinaire créativité

capillaire des peuples d'Afrique ?

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Et puis au détour d'une salle du musée, un autre univers .

Le choc du contraste entre l'Egypte pharaonique et l'époque de l'esclavage.

Le contraste est saisissant à l'image. D'une sculpture à l'autre. La voix de Xavier s'est tue.

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Puis la voix revient

Le haut de mon crâne considéré comme le lieu de l'âme, là où pousse le souffle

vital . Ma tête comme un sanctuaire mis à mal par l'histoire. Mes croyances ont fui

et notre identité avec elles. Comme si nous en avions honte.

Dans une des salles Xavier Houezo est en discussion avec Juliette Sméralda, sociologue et auteur

du livre ? Peau noire, cheveu crépu. L'histoire d'une aliénation” . La voix de Xavier s'estompe, Juliette Sméralda raconte comment le rapport intime que l'Africain entretient avec ses cheveux a été littéralement bouleversé :

“Déportés dans des conditions inhumaines et d'insalubrité extrême sur le continent

américain et dans la Caraïbe, les Africains développent déjà sur le bateau des maladies du

cuir chevelu (poux, teignes...) qui entraînent des alopécies et des démangeaisons

importantes. Ces affections du cuir chevelu sont aggravées par une méconnaissance des

plantes du «Nouveau Monde » et la difficulté d'accès aux soins pour la plupart de ceux qui

travaillent aux champs. Généralement, les hommes se rasaient la tête et portaient un

chapeau tandis que les femmes portaient des nattes sous un fichu.

Progressivement, les esclaves utilisent les ingrédients à leur portée pour leurs "soins" : maïs

et kérosène pour le shampoing, graisse à essieu ou graisse de porc sur les cheveux lissés

avec un couteau à beurre chauffé ou encore mélange de soude et pommes de terre écrasées

en guise de défrisant.

La signification sociale du défrisage et les représentations du cheveu dans la culture

occidentale s’expliquent donc par les conditions de rapports d’inégalité entre Blancs et

Noirs. Oublier le savoir-faire ancestral, c'est s'oublier soi-même.».

On quitte Juliette Sméralda, les sculptures et les iconographies sur l’esclavagisme qui

accompagnent parfois ses propos pour retrouver Xavier Houezo dans les rues de Paris.

Les bruits de la ville sont lointains, Xavier et le film sont encore habités par l’analyse que

la sociologue vient d’émettre.

Il monte dans un taxi sans que nous sachions pour l’instant où il va.

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Les rues défilent par les vitres du taxi. Sur des affiches pas de publicités traditionnelles.

(pour des produits cosmétiques par exemple).Au contraire, insertions de quelques images

de l’Egypte et des hommes et femmes esclaves en incrustation sur des affiches dans Paris,

iconographies qui accompagnent Xavier alors qu’il regarde la ville (les foules sur les

trottoirs, les façades d’immeubles, les affiches) défiler à travers les vitres du taxi.

Le taxi sur l’autoroute quitte Paris, direction Roissy comme l’indiquent les panneaux qui

défilent. Les mots de Juliette Sméralda reviennent et résonnent encore dans la séquence

qui filme maintenant Xavier Houezo pénétrant dans le hall de l’aéroport de Roissy

Charles de Gaulle.

La vie de l’aéroport avec son personnel d’entretien, ces touristes qui affluent. Comme

pour les prises de vues dans les rues du X° arrondissement, la longue focale isole des

visages, les arrières plans sont flous, des visages passent sortent du champ, c’est ici un

type qui change le sac poubelle d’une corbeille publique, là, une jeune fille qui sert au

comptoir d’un fast-food.

Les mots de Juliette Sméralda résonnent à nouveau en off

« L’influence exercée par le regard et la parole du maître, développe chez l’homme Noir une

perception négative de ses propres caractères, une dépréciation qui va impliquer une

nouvelle image de la beauté. Le Noir va ainsi adopter des pratiques destinées à le rendre

conforme à cette nouvelle idée du beau ou de l’acceptable, qui a germé en lui. L’homme et

la femme noires finissent consciemment ou inconsciemment par rejeter l’image qu’ils ont

d’eux-mêmes ».

Ailleurs dans le hall, une famille débarque poussant devant eux des chariots remplis de bagages,

tandis que passe une autre famille. Tous sont blacks ou si soudain un homme blanc ou une jeune

femme blanche est filmée c’est parce que sa coiffure retient notre attention...

Les bruits ambiants sont comme étouffés tandis que la voix off de Xavier revient doucement

s’interroger

Comment être bien avec les autres si déjà , on n’est pas bien avec soi-même…Cet

oubli volontaire ou subi de la beauté des origines, cela ne date pas d’hier. Ce désir de

ressembler aux autres, au patron esclavagiste d’abord, puis au patron tout

simplement, à celui qui dicte le rythme de la vie ou de la mode à suivre. .

Les modes qui nous transforment en nouveaux esclaves.

Des images de foules, de famille qui font la queue, les chariots plein de bagages pour

l’enregistrement. Les queues aux guichets, les valises sur les tapis roulant, les embarquements, le

tarmac, la piste de l’aéroport défile par le hublot , l’avion quitte le sol tandis qu’en off, à nouveau

Juliette Sméralda :

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L’interview de la sociologue Juliette Sméralda revient comme une conscience qui accompagne Xavier

dans ses interrogations.

« L’arrachement de l’Africain à sa matrice, sans aucun des accessoires nécessaire au coiffage de

son cheveu et au soin de sa peau, les conditions inhumaines de son asservissement sur des

plantations où il travaillait telle une bête de somme sans répit, sans hygiène, sans soins d’aucune

sorte, sont les paramètres déterminants à prendre en compte pour comprendre le sens du défrisage

et de l’éclaircissement. Un complexe d’infériorité face à ceux dont ils "imitent" la texture de

cheveu, et cherchent à atténuer la couleur de leur peau, risque de s’ancrer désormais dans les

gènes ! »

Xavier Houézo dans un avion. Par le hublot de la carlingue : le ciel, la mer.

La voix de Xavier Houézo revient en off (comme un va-et-vient avec celle de la

sociologue)

Je me souviens que déjà avant même d’arriver, mes repères étaient restés au fond

d’une cale.

Je me souviens de nos conditions de voyage avant d’arriver aux Antilles ou sur le

continent américain, les poux se battaient contre les teignes. Nous, ne nous

battions contre personne d’autres que nous-mêmes, exténués.

Je me souviens de nos démangeaisons de peau que nous ne savions pas traiter du

fait de notre méconnaissance des plantes du «Nouveau Monde ». Alors on se rasait

la tête tandis que les femmes portaient des nattes sous un fichu. Je me souviens que

certains pour ne pas se raser, lissaient leurs cheveux avec un couteau chauffé ou

encore mélangeaient de la soude et des pommes de terre écrasées puis rajoutaient de

la graisse à essieu ou de la graisse de porc en guise de défrisant sur les cheveux.

Déjà l’apparition du défrisage...

Par le hublot, comme des apparitions en surimpression dans le ciel, les nuages ou sur l’océan , les

images de la traite négrière. Montage d’images de cette iconographie représentative de

l’esclavage des Africains aux Amériques qui « s’enchaînent » aux images du voyage dans des

fondus ou surimpression.

Illusion grotesque de ressembler un jour au blanc. À l'époque, je me souviens que

certains d’entre nous utiliser leurs coiffures pour nous lancer des messages. Par

exemple, pour signaler qu'elles voulaient s'échapper, les femmes tressaient une

coiffure dont les tresses courbées représentaient les routes qu’elles utiliseraient pour

s'échapper. Dans les tresses, elles gardaient aussi de l'or et cachaient des graines

qui les aideraient à survivre dans leur fuite.

Ne pas oublier ce que nos ancêtres ont apporté avec eux quand ils sont venus", Les

tresses comme un mouvement pour honorer les ancêtres. Comment résister

autrement? ….Je me souviens d’Angela.

Ce sont maintenant des images d’archives de New York vue d’avion.

Comme si regardant par le hublot Xavier Houézo continuait sa remontée du temps, l’histoire où

des époques se mélangent et se complètent par les images de la vie de la ville aujourd’hui au XX°

siècle.

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Sur des images d’archives de la ville de New York, apparaît alors une archive avec Angela Davis

tandis qu’en off le morceau « It is because I’m black » de Sly Johnson ( ou James Brown qui chante

“Say it loud I’m black and I’m proud”) remplace la voix off de Xavier Houézo.

Archives autour du combat d’Angela Davis, sur ses rapports avec le FBI à l’aide d’extraits

d’entretiens et de discours autour de ses prises de positions.

Les figures charismatiques qui se sont imposées : celle de la militante afro-américaine Angela

Davis dont le « casque afro » s'est étendu à la fin des années 60, à toute la « diaspora », en même

temps qu'il pénétrait le continent Noir peut être considérée comme une résistante radicale.

L’émergence des plus importantes figures tel que Malcom X, Mohamed Ali, puis les Black

Panthers est représentée ici par des images d’archives qui parlent d’elles-mêmes et racontent

comment la lutte pour l’émancipation des Noirs s’est imposée comme revendication et la coiffure

afro comme une affirmation identitaire.

- Un extrait du film « Blacks Panthers » de Agnès Varda dans lequel ils justifient l’importance de

leurs coiffures et les revendiquent comme un acte politique. Leurs propos sont très clairs et ce

véritable document d’époque est très intéressant à ce stade du film.

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Et sur les images du film arrive en off la voix de Xavier Houezo comme s’il réagissait à la

séquence d’archives pour reprendre le fil de son histoire :

Aujourd’hui, je porte des dreadlocks ce qui fait de moi un fidèle de Bob Marley,

catalogué fumeur de joints, toujours dans un état léthargique, un rasta cool !

Est-ce inconsciemment un hommage aux racines africaines, une reproduction

aménagée des coiffes des guerriers Massaïs et Ethiopiens. Ou une façon de dire

merde poliment à ceux qui voulaient nous faire choisir entre les cheveux crépus

façon Afro ou lisses façon mal dans sa peau.

Qu’en penses-tu Bob ?

La voix off de Xavier Houezo laisse la parole à Bob Marley qui dans une interview en images

d’archives extraites du film : «Time will tell » dans lequel il explique l’importance de la coiffure

rasta et le lien avec sa musique. Le discours de liberté et d’émancipation véhiculé par cette

musique, a été naturellement appliqué à la coiffure des chanteurs de Reggae. Et l’emblème du

lion de Juda est à la fois un symbole de vie , la représentation d'une force tranquille maîtrisée et

d'une puissance pacifique.

LAGOS :

L’avion a atterri depuis longtemps au Nigeria, nous sommes à Lagos.

Une personne vient chercher Xavier Houezo. Voiture, la route , les pistes vers un village tandis

qu’arrivent en parallèle des reproductions de photos en Noir et Blanc représentant de façon très

esthétiques différentes coiffures de cheveux crépus. Elles défilent au fur et à mesure de la piste.

Un village .

Rencontre avec le photographe JD OKHAI OJEIKERE chez lui.

Quelques unes de ses photographies mettent en évidence la beauté visible et sublimée des

coiffures. Comme les traces archivées d’un savoir-faire, ces photographies deviennent à ce stade

du film, les héritières de gestes et de significations issues de la période pharaonique déjà

évoquées plus tôt dans le voyage.

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Le Nigérian J.D Okhai Ojeikere raconte son histoire, son parcours. Né en 1930 il a réalisé

entre 1968 et 1999 plus de 1000 photos regroupées dans la série Hairstyles. A travers ces clichés

pris dans toutes les régions du Nigeria, Ojeikere a sublimé l'inépuisable richesse des coiffures

pratiquées dans son pays tout en témoignant d'une culture et d'un monde en pleine évolution.

Une partie très importante de son travail est centrée autour de plusieurs milliers de

photographies représentant les coiffures telles qu’on les observe encore dans certaines parties

d’Afrique aujourd’hui, dans les régions où l’art capillaire est d’une beauté rare avec un travail

précis, ancestral..

Ojeikéré est un grand connaisseur de ce sujet, il y a consacré une partie de sa vie. Son expérience

et la qualité de son travail, sa personnalité même, font de cette rencontre un instant rare. C’est la

première fois que Xavier Houézo le rencontre, cette rencontre est peut-être ce pourquoi il

souhaitait faire ce film par-dessus tout.

Plus de voix off donc, Xavier écoute.

Le photographe raconte ce que certaines des photographies révèlent de la situation de la femme

qui porte telle ou telle coiffure, de l’occasion qui l’ a engendrée …

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Et le photographe raconte.

« Malgré sa fantaisie apparente, la coiffure africaine est très codée. Dans certaines

communautés, on observe encore de nombreuses coiffes correspondant à des étapes de la

vie : la naissance, l’initiation, le mariage et le deuil. Au Mali par exemple, la coiffure a

d’abord été un élément d’identification culturelle et sociale. Dans certaines communautés

comme chez les peuhls, seuls les « esclaves » pouvaient tresser les femmes nobles. Dans

des contrées comme Khaso, Macina, Bwatu, chaque coiffure avait une signification.

Le modèle de coiffure permettait d’identifier une nouvelle mariée, une veuve, une femme

libre de tout engagement (divorcée), le statut social d’une femme et par extension celui de

son mari, une fille nouvellement excisée, etc. L’amour, la déception, le déshonneur, le

deuil s’exprimaient également par la coiffure ».

On pourrait écouter Ojeikere durant des heures. Sa connaissance esthétique et symbolique du

sujet ramène le film sur des images de Paris qui reprennent l’univers du début du film.

Paris : Salon boucles d’Ebène

Sa voix continue en off et accompagne un va et vient des images du Salon Boucles d’ébène. À

Montreuil qui s’entremêlent avec ses photographies.

« Chaque pays et ethnie de l’Afrique sub-saharienne a su créer son propre style avec des

matériaux aussi divers que l’argile, le karité, la laine, le raphia, le fil d’or, les coquillages et

les perles ».

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A Montreuil, c’est l’effervescence propre aux manifestations qui réunissent sur de nombreux

stands, des salons de coiffure conviviaux.

Les gestes ancestraux revenus à Montreuil aujourd’hui permettent ces coïncidences entre les

photographies esthétisantes et les prise de vues réalistes du quotidien d'un salon de coiffure : on

retrouve d'ailleurs Aline et Animatou parmi les salons de coiffure qui sont exposants et

organisatrices de ce salon dont l'ambition, comme le montrent certains ateliers est pédagogiques

(comment entretenir ces coiffures? Quelles dreadlocks adopter?...)

Xavier Houezo reprend son récit en off :

Récemment, j’attendais mon tour dans un établissement lorsqu’une inconnue s’est

approchée de moi, me touchant les cheveux comme par évidence. Elle semblait animée par

une envie incontrôlable et me posa une série de questions :

«Comme ils sont drôles vos cheveux ! Comment faites-vous pour leur donner cet aspect?

Vous les tressez ? Avec quoi vous les lavez ?

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A Paris, quatre jeunes femmes afro caribéenne ont créé le « Salon boucles d’ébène » pour

valoriser le cheveu naturel, sans dénaturation, sans produit qui pourrait l’abîmer . C’es la

"Nappy attitude ». Après la phase je « ré-apprivoise » mon cheveu crépu, les Nappy-girls

sont passées à la phase je « réinvente », je « recrée », je « sophistique ». L’afro n’est pas

juste une histoire de cheveux, c’est tout un état d’esprit,».

Quelques paroles de chansons de Bob Marley accompagnent la fin du film:"Emancipate yourself

from mental slavery, none but ourselves can free our minds" sur des images faisant un va et vient

entre les traces du passé et l’actualité des coiffes aujourd’hui.

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TRAITEMENT

CONSTRUCTION

Ce film est un voyage.

Non pas parce que les déplacements sont mis en scène mais parce que le personnage de Xavier,

parfois dans le cadre, incarne l’enquête qui part de Paris pour se terminer au Nigeria.

Peu d’étapes durant ce voyage, parfois sous la forme de souvenirs, (archives filmées ou

iconographiques) parfois sous forme de rencontres au fur et à mesure du voyage. Chaque étape

apporte une information nouvelle qui complète la précédente. Cette recherche met progressivement

en évidence comment une revendication identitaire peut revoir le jour et se reconstruire à chaque

étape du voyage.

Ce film est aussi un voyage dans le temps.

En allant à la rencontre de l’Egypte pharaonique, reproductions de gravures et mosaïques du musée

du Caire, le récit du film remonte l’histoire.

Puis à travers quelques étapes fondamentales et représentatives de luttes sociales : de l’esclavage au

XIX° siècle jusqu’aux luttes contre les discriminations aux USA notamment, les époques se

succèdent, leurs univers visuels et sonores dessinent un patchwork dans lequel joie et douleur

peuvent s’emmêler, et résonner d’une séquence à l’autre.

Sous forme d’archives comme s‘il s’agissait de la mémoire visuelle et sensorielle de Xavier

Houézo qui semble se souvenir de tout cela comme s’il l’avait vécu. Ce n’est évidemment qu’un

effet de style mais qui a du sens : l’interrogation de Xavier n’est pas seulement la sienne,

individuelle, elle devient universelle sans avoir besoin de le dire autrement que par sa voix:

« lorsque je vivais en Egypte avec les Pharaons », ou « je me souviens quand Angela Davis… » ou

bien « en 2050 j’irai encore dans le salon afro » …

UNIVERS SONORES

La voix off, / les voix off

Le récit est raconté par une voix off, qui pose des interrogations. Cette voix est une introspection

de Xavier, nourrie des rencontres ou de ce qu’il observe.

Ce texte, lu par Xavier Houezo, raconte ses réactions au fur et à mesure qu’il découvre l’incongru

des situations (vouloir changer de peau, y risquer sa santé), ou leur beauté et leur force ( l’art des

tresses, la signification des coiffures). Ce texte subjectif traduit les impressions du narrateur et

entraîne le récit progressivement dans chacune des étapes du film. Il n’est pas dans le ton de la

révolte mais de la confidence. Il se raconte.

Les archives sonores ou l'interview de Juliette Sméralda joueront aussi un rôle de dialogue avec la

voix de Xavier lorsqu'elles seront utilisées en off les unes et les autres pour accompagner

simultanément des images de séquences ( aéroport + voix de la sociologue et de Xavier, Voix de

Malcom X accompagnant Xavier sur le défilé de mode, Voix des Black Panthers et de Xavier sur

les images de New York)

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La musique des lieux

Que ce soit un salon de coiffure Afro à Paris qui ne désemplit pas, un village en Afrique, une boîte

de Jazz à New York, chaque lieu possède son ambiance que le film veut mettre en évidence.

Le voyage étant composé d’images d’archives ou de prises de vues réalisées pour l’occasion, la

création sonore sera confiée à un créateur sonore autant pour colorer chacune des séquences dans

une ambiance qui respecte leur univers que pour unifier l’ensemble. Des musiques ou des sons

propres aux histoires, aux époques, des bruits ambiants rapportés du tournage au Nigéria,

inspireront ce « designer sonore ». Il s’agit donc de ne pas se contenter des bruits ambiants même

très riches des salons afro. Il s’agit d’inventer un univers sonore pour accompagner Xavier Houezo

dans sa voix off introspective. Une mélodie à trouver arrangée différemment selon les lieux.

UNIVERS VISUELS

Aux USA, les archives montées doivent raconter les années de luttes des Black Panthers en mêlant

photographies, films d’archives, les rues de Brooklyn et les images de salons de coiffure du

quartier.

Ailleurs, les archives iconographiques et photographiques retraceront les épisodes douloureux

(l’arrachement de l’esclave à sa terre natale, les conditions de vie dans le bateau pendant le trajet,

ses cales) tandis que les photographies contemporaines de Ojeikere seront des éléments de narration

propres à l’Afrique et représenteront les traces de gestes ancestraux

Concernant les salons de coiffures, il s’agira de capter leur activité et d’observer les gestes, les

mains au travail, les postures et les têtes en transformation Au-delà du simple décorum que

représentent ces salons, ils sont une mémoire collective. Le brouhaha des lieux ne doit pas entraîner

une image brouillonne. C'est au contraire une esthétique des gestes et d’un savoir-faire qu’il s’agit

de mettre en scène plus que de simplement capter.

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INTERVENANTS

J. D. 'Okhai Ojeikere Un apprentissage empirique, des tâtonnements et beaucoup d’intuition

résument les premières années de formation d’Ojeikere. Il prend conscience du rôle primordial

de la photographie dans la préservation d’une culture longtemps transmise par la tradition

orale. Lors de ses déplacements, il constitue une photothèque de plus de 20 000 négatifs, se

rapportant à la danse, au théâtre, aux enfants… dans laquelle il apparaît très vite que les

photographies de coiffure – élément important de la culture nigériane – constituent un

ensemble singulier. Réalisée de 1968 à 1999, la série des « Hairstyles » rassemble plus de 1000

clichés que Ojeikere réunit dans un album. Inlassablement, pendant trente ans, il dresse un

corpus d’?uvres éphémères, dues aux talents de femmes « artistes des cheveux ». Chaque

coiffure, est en général photographiée trois fois, essentiellement de dos « parce qu’elles sont

plus abstraites et révèlent mieux l’aspect sculptural des coiffures ».

J. D. 'Okhai Ojeikere est né en 1930 à Ovbiomu-Emai, il vit à Lagos (Nigéria).

Par sa connaissance du sujet, Juliette Sméralda analyse les incidences du passé sur le corps de

l’homme et la femme aujourd’hui. Comment le beau a pu devenir laid…

Se libérer du dénigrement de ce que l’on est, lutter contre l’oppression et l’exclusion se fait par

une réponse dont la violence est à la hauteur de celle reçue : dépigmentation, lissage des cheveux…

Aline Tacite, 35 ans, est un personnage indispensable ànotre projet du fait de son approche à la fois

scientifique et humaine de son métier de coiffeuse. De façon à connaître à travers les prismes

technique, esthétique , historique, les enjeux de la coiffure des cheveux crépus, elle a suivi

différentes formations spécifiques aux USA, en Afrique. Son salon à Bagneux ne désemplit pas et

convertit de plus en plus de personnes séduites par son approche pour coiffer le cheveu naturel. La

création du salon boucles d’ébène est une façon tous les deux ans de réunir des spécialistes autour

d’ateliers et de tables rondes . Ce salon prouve le sens des responsabilité d’Aline Tacite face aux

risques de voir disparaître un pan de la culture noire et l’enjeu de la pédagogie auprès des

générations différentes.

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Xavier HOUEZO

10 rue Galilée

Né le 08 septembre 1965 (46 ans) 78990 Elancourt

Célibataire 01.70.70.52.43 [email protected]

Responsable de diffusion

EXPERIENCES PROFESSIONNELLES

Technicolor Network Service France (ex-VCF Thématique) Groupe Thomson

Depuis Août 1999 Responsable de diffusion Prestation technique de la régie finale de MultiThématiques pour Canal plus (bouquets Canal satellite et TPS) émettant 23 chaînes : Canal Jimmy, Premier, Classic, Planète, Thalassa, Seasons, TPS Stars, Cinéstar, Télétoon …

Supervision technique de la plate-forme : Automation SGT Dbos/ Serveurs vidéo Grass valley Divarchive Archive Storagetek / gestion des trasnferts SGT Process Cartes Snell Grille Grass valley, convertisseurs Thomson

Responsable d’équipe (4 techniciens) Maintien de la continuité d'antenne/gestion transferts archives serveurs Conduite des extérieurs pour captations en direct

Janvier 1995 – Août 1999 Exploitant Vidéo en diffusion (VCF)

Surveillance des chaînes et maintien de la continuité des programmes Mise à jour et suivi de programmation

Numérisation, contrôle et vérification des programmes

Décembre 1991 – Janvier 1995 Exploitant Vidéo en diffusion à Canal Horizon

Opérateur régie finale Chef antenne Préparation technique des directs sportifs et d’émissions musicales

Conduite des extérieurs pour captations en direct ou en différé

JANVIER 1991 – DECEMBRE 1991 Technicien de Vidéocommunication à Téléservice

Ile de France (Groupe C.G.E.)

OCTOBRE 1989 – JANVIER 1991 Technicien d’exploitation Vidéomage Production et Post-Production Vidéo

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Benoît Sourty

42 rue de France

77300 Fontainebleau

tél : 06 61 91 84 32 [email protected]

Réalisateur/Scénariste

Réalisateur

2010 »Le Pont sur l’Oyapock » et « Le Contesté une épopée diplomatique » RFO 2 x 52’

relations franco brésilienne à travers un conflit territorial de 5 siècles, et

situation géopolitique actuelle 2009 « Hervé Bize , Galeriste » Prodaction/ France 3 Lorraine 26 ‘ Portrait du métier d’un galeriste d’art contemporain à l’occasion des 20 ans de sa

galerie nancéenne. Avec les artistes François Morellet et Bernard Borgeaud. 2008 « de Dieppe à Dieppe » France 3 Normandie 52’ Suivi du travail photographique de Régis Houlet qui part de Dieppe en Normandie

à la découverte des liens qui unissent sa ville à celle de Dieppe au Canada 2007 "Cigarettes Russes" court métrage fiction production Stations Services 12 ' Grâce à une cigarette fumée en 2007, une vieille femme se souvient de la libération

du camp de Ravensbrück en 1945

2006 "Enfants clandestins" France 3 Aquitaine/Alsace/Limousin 52'

Les souvenirs d'enfants juifs cachés pendant la seconde guerre mondiale

2005 " Mécanique de la métamorphose" LaLanterne 52'

Le comédien Roland Bertin, le philosophe Denis Guénoun, l'é

Tiothérapeute Patrick Latour interprètent chacun dans leur domaine

ce que jouer implique, tandis que le film suit un court d'art dramatique

par Daniel Berlioux auprès d'élèves comédiens

« Otages en France 1914/18" France3Alsace/Lorraine/RhôneAlpes 52'

Journal de captivité d’un civil lorrain pris en otage par l’armée française en 1914

2003 « Sortir de l’impasse » ArcEnCiel/CitéTV 66’

Suivi de la procédure judiciaire pour les mineurs délinquants au

tribunal pour enfants de Lyon

2002 « Strasbourg/Périgueux:destins communs » 52’

France3 Alsace/Aquitaine/France 5

Histoire de l’évacuation de Strasbourg entre 1939 et 1945

2001 « Les quatre saisons » ArcEnCiel/CityzenTV 52’

Suivi durant un an d’un jeune couple qui décide de vivre de sa ferme

2000 « Gueules de bois » LaLanterne 64’

Portrait d’un chez d’entreprise qui a choisi de devenir SDF

« Jean Mineur Magicien de l’entracte » France3 26’

Portrait de l’inventeur du cinéma publicitaire

1999 : « Désir d’étreintes » LaLanterne/C9TV 52’

Suivi du travail du chorégraphe Cyril Viallon

« Le sentiment de la mouette » Centre Beaubourg 52’

Interrogation sur les sources d’inspiration chez les peintres et sculpteurs

Didier Mahieu, Charles Maussion et Pierre Edouard

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1998 « Autopsie d’un match » LaLanterne/C9TV 52’

Les enjeux de la montée en division 1 pour un club de foot, le LOSC

« L’amour fantôme » LaLanterne/C9TV 47’

Parallèle entre le récit d’une histoire d’amour réelle vécue par une

coiffeuse et « le vaisseau fantome » de Wagner vue à travers ses répétitions

1997 « Un petit vélo dans la tête » LaLanterne/Planète 52’

Quelques personnages autour d’une course cycliste

1996 « Une place au soleil » IoProduction/Planète 26’

Quand la vie en cité entraîne la délinquance

1995 : « Dockers » IoProduction/Image+ 52’

Autour d’un métier difficile et de ses revendications syndicales

1993 : « Lamparo » France 3 /Littoral 45’

les gestes d’hommes durant une pêche artisanale, la nuit

1989 "Tout le monde est un petit garçon" fiction 35'

Comment l'anodin du quotidien cimente l'amitié entre deux types

Scénariste et conseiller artistique (dramaturgie)

Collaboration à de nombreux scénarios de courts-métrages et documentaires

« Fièvre jaune » de JD Bécache TV5/RTBF/RFO 52’

« Voyage vers l’identité » de Michel Montgénie RFO 52’

« Destins d’après-guerre » de Barcha Bauer France3 52’

« Michel Slitinsky, le combat d’une vie » de B Bauer France3 52’

" Une place pour chacun" de Erik Grillo France 3 52'

« Kigali-Jérusalem d’un génocide à l’autre » de Jérémie Fazel 77’

« A la porte » de Frédéric Harlez AvenueB production 90’

« la bière à travers le monde » copro Franco Canadienne 5 x 52’

Scénariste de fiction :

« Annapurna, premier 8000 » téléfilm ARTE co-écrit avec Louis Charles Sirjacq

« La finale » co-écrit avec Louis Charles Sirjacq

les projets suivant ont reçu l’aide à l’écriture long métrage du CNC

« Le Phare »

« Rendez-vous à Sarajevo »

« Chiennes de Vies" co-écrit avec Louis Charles Sirjacq

Parution en juin 2007 d'un roman : "Loin des yeux" (éd.Travioles) Parution de plusieurs nouvelles dans la revue Travioles

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Autres Expériences professionnelles

Formateur

1987/1989 "histoire et sémiologie du cinéma" école ISCOM Paris 12°

2005/2007 "le montage : une technique, une écriture" Lapins Bleus formation

module de 40 jours pour JRI, assistants monteurs, monteurs

"Ecrire et réaliser un documentaire " Ecole Sup. de Journalisme ,

module de 40 jours pour assistants réalisateur, JRI…

2007/2008 "La société contemporaine en douze thèmes et quelques films"

modules de 12 x 10 heures Ecole Multimédia et Cinéma ,ISCPA 2009/2011 Référent pédagogique pour la filière Journaliste AudioVisuel à l’Institut

International de l’Image et du Son

Directeur de production

1986 « Futur’s » de I et G Bogdannoff Pixibox/TF1 25x26’

1989/1992 « Lire et ecrire » de P Dumayet et R Bober Arte/Taxi 6x52’

« Mafia rouge » de Jean-Michel Meurice Taxi/France 2 76’

« Au nom du même père » de Gareth Jones Chanel4/TF1 3x52‘

« France décennie 90 » Quai d’Orsay 52’

1993/1994 films institutionnels et courts métrages à Iris Création

Assistant réalisateur

1995 « James Joyce » de A Gallien France2/Image et Cie 45’

1996 « Cézanne et Zola » de A Gallien Arte/BFC 52’

Formation

1983 : diplôme de l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon

1985/1986 assistant réalisateur et régisseur sur courts métrages