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1 9 8 4 G E O R G E O R W E L L dans une adaptation de D U N C A N M A C M I L L A N & R O B E R T I C K E C O M P A G N I E 1 3 / 1 0 È E N U T

dossier 1984 en word - Théâtre du Pays de Morlaix · 3 LA VOIX. A cet instant, la réalité apparut : ce qu’il s’apprêtait à faire, c’était de commencer un journal. Si

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1 9 8 4 G E O R G E O R W E L L

dans une adaptation de

D U N C A N M A C M I L L A N & R O B E R T I C K E

C O M P A G N I E 1 3 / 1 0 È

E N U T

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Pourquoi lavien’offre-t-ellepasunechosesurquoiposerlamainetpouvoirdire:C’estça?

VirginiaWoolf,Journal,27février1926

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LA VOIX. A cet instant, la réalité apparut : ce qu’il s’apprêtait à faire, c’était de commencer un journal. Si on le découvrait, il serait puni de mort.

Il était impossible de savoir si on était observé à un moment précis. A quelle fréquence, ou par quels moyens, la Police de la Pensée regardait une personne en particulier ne pouvait être que pure conjecture. On pouvait même imaginer qu’ils regardaient tout le monde à tout instant.

Sommaire

ENTREEENMATIERES

Constructionduprojet………………………………………………………………………..4

Dequoi1984est-illenom?………………………………………..……….....…………6

Leromand’Orwell…….……………………………..…………..……………………………8

L’adaptationd’IckeetMacmillan…………………………………………………..…….9

Elémentsdescénographie……………………………………………………………….…11

BIOGRAPHIES

LaCompagnie……………………………………………………………………………………15

GeorgeOrwell…………………………………………………………………………………..17

DuncanMacmillan…………………………………………………………….…….…….…19

RobertIcke…………………………………………………………………………….………….20

Lescitationscontenuesdanscedossiersontextraitesdelapièce1984d’IckeetMacmillan,danslatraductiondeRonanMancec.

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L’HOMME. C’est de ça que ça parle. De l’incertitude, de l’impossibilité de tenir pour vrai / quoi que ce soit.

LE PERE. L’austérité / les politiques impopulaires, la guerre permanente, l’incertitude.

LA MERE. L’amour. / Le futur. L’espoir. L’humanité. La liberté.

L’HOMME. L’oppression. La torture. Les soulèvements. La révolution.

LA MERE. Absolument.

ConstructionduprojetGenèse

1984estletitreduromand’Orwell,maisaussiceluidel’adaptationscéniquequ’ontécrit,en2013,deux dramaturges anglais, DuncanMacmillan et Robert Icke. Suite à une commandepassée parFrédériqueMingant,latraductionfrançaisevientd’êtreréaliséeparRonanMancec.Ils’agiradoncd’unecréationdecetexteenFrance.

DistributionMiseenscène

Traduction

Collaborationartistique

Interprétation

Scénographie

Créationlumière

Créationsonore

Créationvidéo

Costumes

Régiegénérale

FREDERIQUEMINGANT

RONANMANCEC

NOËLLEKERUZORE

VINCENTBRAMOULLE

KARIMKADJAR

CAROLINEMENON-BERTHEUX

SYLVAINOTTAVY

REJANEPOUPIN

DELPHINEVESPIER

NICOLASVIAL

(encours)

ANTOINEVASSEUR

FABRICELEFUR

THOMASFERNIER

JULIEPAREAU

SOPHIEHOARAU

CEDRICLEROUX

Mentionobligatoiresurtoutdocumentdecommunication:L'oeuvreestreprésentéedanslespaysdelanguefrançaisepar l'agenceMCR,MarieCécileRenauld,Paris.Adressemail: [email protected]/site internet:www.paris-mcr.fr,enaccordavecCasarottoRamsay&AssociatesLondres.

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CalendrierLa création de 1984 est prévue pour la saison 2016/ 2017. Des périodes de répétitions’échelonnerontentreseptembre2016etjanvier2017.Datedelapremière:17janvier2017.

LespartenairesduprojetCoproductions:Compagnie13/10èenUt/L’Archipel,scènedeterritoire,Fouesnant/LeCanal,scèneconventionnée,Redon/LaMaisonduThéâtre,Brest/ThéâtreduPaysdeMorlaix/ThéâtreLaPaillette,Rennes/CentreculturelJacquesDuhamel,Vitré.Soutiens:L’Hermine,Sarzeau/L’Atelierculturel,Landerneau.AveclaparticipationartistiqueduJeuneThéâtreNational.LadiffusiondecespectaclebénéficiedusoutienfinancierdeSpectaclevivantenBretagne.

LaCompagnie13/10èenutestsubventionnéeparlaDRACBretagneautitredel’aidelacréationdramatique,leConseilRégionaldeBretagneetlaVilledeRennes.

L'oeuvre est représentée dans les pays de langue française par l'agence MCR, Marie CécileRenauld,Paris.Adressemail:[email protected]/siteinternet:www.paris-mcr.fr,enaccordavecCasarottoRamsay&AssociatesLondres.

Tournée17au19(ou20)janvier2017-ThéâtreLaPaillette/RENNES

26et27janvier2017-LaMaisonduThéâtre/BREST

8et9février2017-LeCanal,ThéâtreduPaysdeRedon/REDON

28février2017–L’Atelierculturel/LANDERNEAU

2et3mars2017-LeThéâtredupaysdeMorlaix/MORLAIX

9et10mars2017-L’Archipel/FOUESNANT

14mars2017–L’Hermine/SARZEAU

17mars2017-CentreculturelJacquesDuhamel/VITRÉ

30marsou7avril2017–Quaidesrêves/LAMBALLE

octobre-novembre2017-CentreculturelCapellia/LACHAPELLE-SUR-ERDRE

avril2018-LeThéâtredeVerre/CHATEAUBRIANT

Pour1984,laCiedéposeradesdemandesauprèsdel’ADAMI,duCNTetdelaSPEDIDAM.

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MME PARSONS. Je me demandais si vous pouviez encore y voir clair ou si vous aviez un problème de courant vous aussi. C’est juste moi ou doit-on s’attendre à des frappes aériennes ou…

WINSTON. Je ne sais pas ce qui se passe.

MME PARSONS. Non ? D’accord. Très bien.

Dequoi1984est-ill’histoire?

1984estl’histoired’unetentativederésistanceautotalitarisme.Un totalitarisme de dystopie: mondial, omnipotent, omniscient, ayantréussi àétablirunepenséeuniquebaséepourunepart sur l’adhésion,pour une autre sur le conditionnement, la restriction du savoir, lasurveillancepolicièreet ladélation,untotalitarismeparvenu-ousurlepoint de parvenir - à la mise au pas de l’être humain sous tous sesaspects: physique, mental, social, culturel, passionnel, existentiel,spirituel.Laquestionestalors:commentlutter?Chaquepersonnageduromanincarneuneréponseàcettequestion.Parmieux:Winstonetsarébellion contre l’amnésie étatique, Julia qui pense que la seule façond’êtrelibre,c’estde«hurleraveclesloups».

1984 est donc l’histoire d’une oppression, mais de quellenature?etoùenestlasource?OnnevoitjamaisBigBrother.Ilestuneicône, omniprésente dans l’espace public, il est un regard: celui desaffiches, des télécrans, des hélicoptères, du voisin depalier. Il pourraitnepasexister. Ilestunedispersion,unediffusion,unepropagation,unéparpillement, et par là même, insaisissable. Le système qu’il dessinetientmoinsdelapyramidequedurhizomeoudelatoiled’araignée.Aumoment oùOrwell publie1984, Armand Robin, dans La fausse parole,écritque lapropagandeaceladeparticulierqu’elleacquiert,à l’usage,tellementdeforce,qu’ellefinitpars’auto-nourrir,sansqu’ilnesoitplusbesoinnidupropagandistenideson idéologie.Resteuneparolevidéede sa substance, sans émetteur défini, sans destinataire ciblé, sanssourcerepérableniintentionnalitéspécifique.Danscesconditions,oùsetrouvelepouvoir?Etcommentfairepourlesavoir?

1984 est donc un «retour aux sources», une enquête danslaquelleWinston Smith tente de trouver des réponses sur le passé del’Océania. Journaux, livres d’histoire, télévision, radio, archives,témoignages:àquellesourcesefier,alorsmêmequesontravail-danslequel ilexcelle-consiste à réécrire les Times archivés?Letitreduromanestlui-mêmeunehypothèse.Winston,commençantsonjournal,

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écritladatedujouravantderéaliserqu’iln’estpassûrd’êtreen1984.

D’ailleurs,cetuniversexiste-t-il?ToutnousparvientparleprismedeWinston. Dumonde qui l’entoure, nous n’avons accès qu’à ce queWinston en perçoit et en comprend. Orwell nous place donc dans lecerveau d’un homme et nous fait accéder au kaléidoscope qui leconstitue:sonregard,sonodorat,sessentiments,sapenséeconsciente,ses rêves, sesdouleurs,physiquesoumentales, sa folie, aussi. C’est ceque lui dit O’Brien, pendant une séance de torture: «Vous savezparfaitement ce que vous avez. Vous le savez depuis des années, bienque vous ayez lutté contre cette certitude. Vous êtes dérangémentalement».Oui,peut-êtresommes-nousjustedanslecerveaud’undément.Peut-êtresommes-nousdans lecerveaud’unhommequi jouetous les rôles, qui est en même temps le bourreau et la victime, enmême temps le citoyen modèle et le terroriste, en même temps lelinguiste et celui qui ne peut plus parler. Tout cela peut êtrel’extériorisation de fantasmes que nous nourrissons conjointement: lephantasmede toutengloberetde tout régir, lephantasmedupouvoirabsolu, lephantasmede la rébellion, lephantasmede la tranquillitéetdelabonneconscience,lephantasmedel’hédonisme,lephantasmedumessie.

Oupeut-êtresommes-nousdansunrêve.NouspourrionsêtredansunautreAliceaupaysdesMerveilles.L’universde1984tientautantdeLewisCarollqued’HuxleyoudeWelles.Nouspourrionsêtre«del’autrecôté dumiroir». C’est d’ailleurs ce que sous-entendOrwell avec cetteinversiondel’année1948dontilfaitletitredesonroman.Dansce1948en miroir, Orwell développe un certain rapport au non-sense: onreconnaîttout,maisonnecomprendrien.Ilyaquelquechosequin’estpas normal, mais qui n’est pas non plus complètement étranger. Lapensée n’a aucun sens, en même temps le raisonnement, pour peuqu’onacceptedelesuivre,setientdeboutenbout.

Toutes ces strates coexistent, de la plus politique à la plusfantasmagorique. A elles toutes, elles dessinent un monde complexedans lequel, comme Winston, nous errons «dans les forêts desprofondeurs».Cettecomplexitém’intéresse.Dansunepériodeoùnotrediscernement estmis constamment à l’épreuve et où la lisibilité est siminime, 1984 questionne plus que répond et, chemin faisant, dessineunefigurehumaine,aveccequilaconstitueetcequipeutladétruire.

FrédériqueMingant

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SYME. Vous n’appréciez pas vraiment la Novlangue, Winston. Non ? Pas vraiment. Pas besoin d’être expert pour savoir que la Novlangue est la seule langue au monde dont le vocabulaire se réduit chaque année. C’est très beau, la destruction des mots.

Leromand’Orwell

1984estunromandystopiqueécritpar l’auteuranglaisGeorgeOrwellen1948.L’histoiresedérouleen1984dansunLondresfuturiste,dévastéquaranteansauparavantparuneguerrenucléairemondialequia entièrement bouleversé la carte géopolitique. Ne restent que troisgrandes puissances, constamment en guerre l’une contre l’autre.Londres est la capitale de l’Océania, une puissance totalitaire dont ledirigeantestBigBrother:unhommequepersonnen’a jamais vumaisqui potentiellement voit tout, au moyen de «télécrans» installéspartoutdansl’espacepublicetprivé.Danscettesociétépolicièreoùtoutvoisin ou parent est un délateur potentiel, l’homme est constammenttenu d’être irréprochable, tant dans ses actions, réduites à leur plussimple utilité sociale, que dans ses pensées. Pas d’échappatoire si cen’est cette Fraternité, un groupe de résistants dont l’existence n’estpeut-êtrequ’une inventiongouvernementale conçuepourexacerber lesentimentpatriotique.

Winston Smith travaille au Commissariat des Archives. Safonction est de corriger les anciens articles du Times qui necorrespondent plus à la ligne défendue par le parti, elle-mêmeconstamment changeante. Horrifié par cette immense entrepriseétatiquedere-fabricationdupassé,del’Histoire,delaconscience,maisaussidelalangue(parlamiseenplaceduNovlangue),WinstonSmithcommenceàécriresonjournal.

A cepremier acte subversif, en soi déjà susceptibled’entraînersonarrestation,Smithenajouteunautre:celuidetomberamoureuxdeJulia,«crimeparlapensée»aumêmetitrequeledoutepolitiqueoulesentimentdemal-être.PersuadésquelaFraternitéexisteetqu’O’Brien–un haut fonctionnaire qu’ils côtoient au Ministère – en fait partie,Winston et Julia décident d’entrer en contact avec lui. Cette erreur dejugementleurestfatale:lecoupleestarrêtéettorturé.Lebutdecettetorture physique etmentale –Winston Smith finit par le comprendre-n’est pas tant de lui faire avouer ses actes non-conformes que de leconvaincre de la réalité instituée par Big Brother. C’est un hommedétruit,vidéetdésormaisdocilequiestlibéré.Lare-fabricationaopéré.

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O’BRIEN. Winston. Winston Smith. Où pensez-vous être ?

WINSTON. Qui êtes-vous ?

O’BRIEN. Allons, Winston, vous le savez très bien. Vous l’avez toujours su.

WINSTON. Ça n’est pas possible ça n’est pas possible ça n’est pas possible.

O’BRIEN. Nous nous retrouverons, Winston, là où les ténèbres n’existent plus.

L’adaptationd’IckeetMacmillan

LeprédicatsurlequelIckeetMacmillanappuieleurdramaturgieestquecen’estpaslafininventéeparOrwell.Eneffet,aprèsledernierchapitreduroman,Orwellarédigéunappendice,intitulé«LesprincipesdelaNovlangue».Cetappendice,quiressembleàunepostfaceouàuncommentaire d’éditeur, explique que la Novlangueétait la langueofficielle qu’avait voulu instaurer un régime totalitaire dirigé par BigBrother. Le temps utilisé par Orwell dans cet appendice indique doncque l’articleestécritdansuneépoquepostérieureà l’année1984,unepériode oùBig Brother n’existe plus. Le fait que nous puissionscomprendre et lire facilement cet article nous informe en outre quel’entreprise d’instauration de la Novlangue a elle aussi échoué. Il y adoncdeux futurs, dans le roman d’Orwell : un premier, en 1984, unsecond,auxenvironsde2050.

Decetappendice,IckeetMacmillantirentlesélémentsfortsdeleur adaptation. En réponse à l’enchâssement, par Orwell, d’un futurdans un autre, ils inventent un groupe de gens, qu’ils nomment une«compagnie», vivant dans une époque qui pourrait être la nôtre ounotre futurproche.Cette compagnieest composéede septpersonnes,formant une sorte de petite société: l’homme, l’animateur, le père, lamère, la fille, la serveuse et Martin. Ce sont eux qui deviennent,changeant de rôle, les protagonistes permettant à Winston de vivre(revivre?)sonhistoire.Quelliendecauseàeffetya-t-ilentrecesdeuxmondes? Est-ce cette compagnie qui se penche sur l’histoire deWinstonet la reconstitue?Oubienest-ceWinstonSmithqui s’inventeun futur? «Nous sommes dans sa tête, vous savez», dit lamère, «ilnous imagine». La question n’est pas tranchée, rendant en celal’adaptationfidèleauprincipedelaréalitéinstableetparanoïdequifaitlecœurduromand’Orwell.

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Porositéentrelesréalitéstemporelles,doutesystématiquesurl’identitéde l’interlocuteur, variation de la réalité perçue: cette fragilité desfrontières participe à la question centrale que posent Robert Icke etDuncanMacmillan : àquelle réalité se fier ?Comme ils l’écriventdansl’avant-propos de l’édition de 1984 : «Traiter l’Appendice d’Orwellcomme fondamental rend l’œuvre bien plus subjective et complexequ’une simple contre-utopie futuriste et lugubre: au derniermoment,elle déborde avec audace de la forme romanesque pour renvoyer aulecteur ses questions centrales. Peut-on faire confiance aux preuves?Peut-onjamaissavoircequiestvrai?Etdansquelespaceetqueltempsvoustrouvez-vous,lecteur,àcetinstant?»Ladernière répliquede lapièceestunequestionqui, comme la finduromand’Orwell,ouvreunenouvelleperspective:sommes-noussûrsquele régime de Big Brother a échoué? Ne serait-il pas justement dansl’intérêtdeBigBrotherquedefairecroirequ’iln’existeplus?

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O’BRIEN. Vous croyez que la réalité est objective, extérieure à vous. Que la réalité existe en soi. Vous pensez que si vous la voyez, alors tout le monde doit voir la même chose que vous. Mais vous vous trompez. La réalité n’existe que dans l’esprit, et nulle part ailleurs.

Elémentsdescénographie

Pour concevoir la scénographie,nousnous sommesappuyés sur l’espaceque proposent Icke etMacmillan, soit un endroit qui «pourrait être unebibliothèque,unesalled’archives,çapourraitêtreuneécole,uneprison,unbâtimentofficiel.Cegenredepiècesexistepartoutdans lemonde,depuisdesannéesetdesannées.»

Ils’agitdoncd’unlieuquirecèleplusieurscaractéristiques:

C’estunlieudemémoire,justementl’undesthèmescentrauxde1984,oùlerégimedeBigBrotherorganisepolitiquementl’amnésiesystématique.

C’estlelieuoùtravailleWinston,chargéderéécrirelesanciensarticlesduTimesnonconformesàl’actualité.

C’est peut-être – nous partons en tout cas de cette idée – le lieu où laCompany vient chercher des informations sur ce fameux Winston etreconstituersonparcours.

C’estunlieuoùl’ontrouvebeaucoupdepapier,et1984estune«histoirede papier»: le journal queWinston écrit, le compte-rendu de la vie deWinston (écrit par qui? La Company ne réussit pas à trancher cettequestion),lelivredissidentdeGoldsteinquel’onsepassesouslemanteau,les journaux queWinston réécrit, le petit papier sur lequel Julia lui écrit«je t’aime», lepapier sur lequelO’Brienécrit sonadresse, scellant ainsisondestin,etc.

C’estun lieuofficiel (à ladifférenced’une librairieoud’unebibliothèquedesalon),c’est-a-direunlieudepouvoir,un«dispositif»telqu’enparlentAgemben et Foucault: «tout ce qui a, d’unemanière ou d’une autre, lacapacitédecapturer,d’orienter,dedéterminer,d’intercepter,demodeler,de contrôler et d’assurer les gestes, les conduites, les opinions et lesdiscoursdesêtresvivants».

C’estunlieuoùl’onpense.

C’estpeut-êtreaussiunemémoire,uncerveau,lessouvenirsdeWinston–ousesrêves.

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FranckBohbot–Bibliothèquedel’HôteldeVille

AurélienVillette–Réminiscence,livrésàeux-mêmes

Notredispositif

Ledispositifquenousposonsestbasésurdeuxprédicats:lareconstitutionetl’expérimentation.

Ilestcomposédetroisespacesdistincts:- l’espacedeWinston,aucentre.Winstonestcontinuellementprésent: ilestlàlorsquelalumières’allume;c’estsurluiquelespectaclesetermine.C’estluiquel’onobserve,c’estàsoncombatetàsesmétamorphosesquel’onestconviés.Sonespaceestunlieud’expérience(telquenousl’avionsimaginédansGasparddePeterHandke),cepeut-êtreaussiunringouunearène.

-l’espacedelaCompanyoccupelabordure,ilencadrel’espacedeWinstonet lecirconscrit.C’estun lieud’observation,d’étude.C’estaussi l’endroitd’où l’on part pour venir participer à la reconstitution de l’histoire deWinstonenendevenantundesprotagonistes.

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- l’espace de la Company occupe la bordure, il encadre l’espace deWinston et le circonscrit. C’est un lieu d’observation, d’étude. C’estaussil’endroitd’oùl’onpartpourvenirparticiperàlareconstitutiondel’histoiredeWinstonenendevenantundesprotagonistes.- l’espace de la vidéo: un écran surplombe et domine l’espacescénique.

Descriptif

- Aucun pendrillonnage du plateau: les murs sont à vue. Leséléments matériels se trouvant sur le plateau (extincteurs,blocs lumineux de sorties de secours, etc.) serontéventuellement,sinonmisenvaleur,dumoinsassumés.Nousenvisageons de rajouter des signalétiques au-dessus desportes donnant vers les coulisses (liées à l’univers de la salled’archive).

- Au sol: une moquette sombre (peut-être grise) avec de lamatière, en sorte qu’elle puisse réagir de façon différenteselonlesmodesd’éclairage.

- L’espacescénique:Il est composé de 9 tables individuelles disposées en U: 5tables forment une ligne en fond de scène. De chaqueextrémité part une rangée perpendiculaire de tables.L’ensemble crée un espace central carré. Chacune de cestablesestpourvued’unelampecommeonentrouvedanslesbibliothèques, et d’une chaise. Cet espace (d’observation, deréflexion,delecture,etc.)estceluidelaCompany.L’espacecentralestceluideWinston.Ilcomprendluiaussiunetable,unechaise,unelampe(àpriori,d’unenaturedifférentedes tables extérieures), ainsi que 3 grandes étagèresmétalliquesrempliesdedossiersd’archives.Derrière la rangée de table située en fond de scène estsuspendu un grand écran. Ses extrémités doiventcorrespondreàcellesdelalignedetablesdufondscène(soitenviron9à10mètres).Deux rangées de néons, du fond vers l’avant-scène, créentdeuxlignesdelumièreetpermettent,aveclesliseusessurlestables,detravailleraussilalumière-objet.

La scénographie crée un espace ludique épuré, composé de lignesfortes.L’ensembledoitêtre lemoinsdatéetparticularisépossible,etressort plutôt de l’univers technique (métal, bois blanc) que dudécoratif.

Laquestiondésormaisestcelledesmétamorphosesdecetespace,qui,pourWinston,devienttouràtoursonappartement,sonlieudetravail,unecantine,unechambre,lemagasindel’antiquaire,lacampagne,laprison, la salle 101, etc. Nous partons de l’idée que ce n’est pas

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Laquestiondésormaisest celledesmétamorphosesdecetespace,qui,pourWinston,devienttouràtoursonappartement,sonlieudetravail, une cantine, une chambre, le magasin de l’antiquaire, lacampagne,laprison,lasalle101,etc.Nouspartonsdel’idéequecen’estpasl’espacescénographiquequisemodifie,maislaperceptionqu’on en a. C’est-à-dire que nous prenons aumot ce dontO’Brientente de convaincre Winston lors de la scène de torture: «Vouscroyezque la réalitéestobjective,extérieureàvous.Que la réalitéexisteen soi.Mais vous vous trompez. La réalitén’existequedansl’esprit,etnullepartailleurs».

Pourcefaire,nouscommençonsdésormaiscetravailsur letroubledes perceptions avec les autres éléments esthétiques à notredisposition:leson,lalumièreetlavidéo.

LepapeInnocentXFrancisBacon(1953)RéflexiongraphiqueenrapportaveclascènedelatorturedeWinston.

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JULIA. Nous ne sommes pas encore morts. Me voilà. Voilà ma main. Voilà mon cou. Voilà ma tête. Et ma jambe. Et ma joue. Je suis en vie. Je suis REELLE. J’EXISTE. En ce moment. Regarde.

Elle l’embrasse.

C’est aussi simple que ça. Je viens de tuer Big Brother.

WINSTON. Tue-le encore.

Lacompagnie

LaCompagnie13/10èenUtaétécrééeàRennesenseptembre2001 par Frédérique Mingant et Sylvain Ottavy; c’est autour de leurdialogue que se construisent les équipes artistiques et techniques. Lesconstantesdelacompagniesont:l’importanceaccordéeautexteetàladramaturgie, l’acteur comme centre vivant autour duquel touts’organise,lerapportàl’autrecommeendroitprivilégiéd’interrogation.

Leurpremierspectacle,ThyestedeSénèque(2002),aétémisenscène par Sylvain Ottavy. La deuxième création de la compagnie,GasparddePeterHandke,estmiseenscèneparSylvainOttavyen2005,puisco-miseenscènedansunedeuxièmeversionen2006.Depuis2007etlatroisièmeversiondeGaspardqu’ellesigne,FrédériqueMingantestlametteureenscènedelacompagnie.

CestroissaisonsavecHandkesontsuiviesdetroissaisonsavecl’auteurpolonaisWitoldGombrowicz.Deuxcréationsvoient le jour:BakakaïouCourteshistoiresd’amouren2008,puisYvonne,princessedeBourgogne

HôtelPalestine,FalkRichter

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en2009.LongtempsartisteassociéeauThéâtrelaPaillette(Rennes),lacompagnie a été pendant trois ans associée au Grand Logis à Bruz.C’est là qu’est créé Hôtel Palestine de Falk Richter en 2011.Poursuivantsurl’écrituredeFalkRichter,elleproposeuneadaptationdeTrustpourunacteuren2013auThéâtredePoche(Hédé).Pourlasaison 13/14, la compagnie était associée à L’Archipel à Fouesnant(29).ElleyacrééLesCapricesdeMarianned’AlfreddeMusset,ainsiquedeuxlectures,extraitesrespectivementdeConfessiond’unenfantdusiècledeMussetetd’UnechambreàsoideVirginiaWoolf.PourlaScèneNationale 61, ellemonte Lorenzaccio deMusset, représenté àAlençonenjuin2014.

Atraversleprojet1984,c’estladémarcheartistiquede13/10èquiestrequestionnée, ses outils, ses moyens d’expression, sa dramaturgie,sonrapportàl’acteur.LacompagniedéveloppeenoutreunprojetsurRennes Métropole autour du collectif anglais Theatre Uncut etréfléchit à la création d’une autre pièce deDuncanMacmillan,EveryBrilliantThing.

LaCompagnie13/10èenUtestsoutenueannuellementparlaVille de Rennes et le Conseil Régional de Bretagne. Elle bénéficie enoutre du soutien de la DRAC Bretagne, au titre de l’aide au projet,depuis2006.

LesCapricesdeMarianne–AlfreddeMusset

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WINSTON. Aujourd’hui, cette semaine, nous sommes en train de faire disparaître le moindre petit bout de preuve que nous avons été un jour en guerre contre l’Eurasie et en paix avec l’Orientasie.

JULIA. Je croyais qu’on avait toujours été en guerre contre l’Orientasie.

WINSTON. Qu’est-ce que tu viens de dire ?

JULIA. Quelle importance ? Ce sont des mensonges de toute façon. Tu viens de le / dire.

WINSTON. Tu ne peux pas avoir oublié que / nous sommes –

JULIA. On ne peut rien y faire alors pourquoi gâcher le temps qu’on passe ensemble à parler ?

WINSTON. Tu ne comprends pas ? L’histoire s’est arrêtée. Rien n’existe en dehors d’un présent sans fin, où le Parti est / toujours dans le vrai.

JULIA. Ça m’est égal Winston. Honnêtement. C’est chiant.

GeorgeOrwell

GeorgeOrwell,desonvrainomEricBlair,naîten1903en Inde. Aprèsune enfance en Angleterre et des études à Eton, il s’engage dans laPolice Impériale en Birmanie. Cette expérience, qu’il relatera dans sonroman Une histoire birmane (1934) fonde son opposition farouche àl’impérialismebritanniqueetmarqueledébutdesonengagementsocial.RevenuenAngleterreen1927avec ledésirdedevenirécrivain,Orwellmultiplielesemploisdefortune.Touràtourserveur,répétiteur,pigiste,plongeur àParis, c’est finalementpar le journalismequ’Orwell arrive àl’écriture.Chroniqueuret critiquelittéraire, ilécritdesrecensionspourdenombreuxjournauxanglaisdontTheGuardian,TheTimes,etc.

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L’année1936estdéterminantedanssonparcours: lorsd’un reportagedansleszonesminièresdunorddel’Angleterre,Orwellestfrappéparlaconditiondeviedesmineursetl’inégalitédusystèmesocialanglais.Ilenferal’objetdesonromanLeQuaideWigan,paruen1937).Puisilrejointle front espagnol pour combattre les franquistes aux côtés desrépublicains. Là-bas, il est témoin des déchirements internes et desrèglementsdecompteorchestrésparlePSUC,mouvementcommunistestalinien,avantd’êtrerapatriéaprèsuneblessureà lagorge.Deretouren Angleterre, Orwell est abasourdi par la façon dont les journauxanglais et les intellectuels de gauche relatent les événements du frontespagnol, relayant la propagande diffusée par le PSUC.Hommage à laCatalogne(1938)auraàcœurdefaireentendreuneautreversionetdeporter témoignage. Cette expérience espagnole le marqueprofondément et forge sa conviction anti-totalitaire. «A partir de cemoment», dira-t-il, «tout ce que j’ai écrit de sérieux a été écrit,directementouindirectement,etjusquedanslamoindreligne,contreletotalitarismeetpourlesocialismedémocratique».

Fragilisé par sa blessure, George Orwell ne peut prendre part auxcombatslorsdelasecondeguerremondiale.Ilanime,pendantdeuxans,uneémissionàlaBBC.Ildémissionneen1943etprendladirectiondespages littéraires de l’hebdomadaire The Tribune, puis, à la fin de laguerre, il estenvoyéspécialenFranceetenAllemagnepour le journalTheObserver.

Atteintdetuberculose,Orwellsait,dès1945qu’illuirestepeudetempsà vivre. C’est dans cette urgence à écrire qu’Orwell – qui a désertédepuissixanslaformeromanesque-rédigesesdeuxœuvresmajeures:LaFermedesanimaux(1945)et1984,quiparaîten1949,quelquesmoisavantsamort,le21janvier1950.

Ses neuf romans ainsi que ses nombreux articles où il développe unepensée fouillée, un esprit curieux et un ton très personnel, volontierspolémique,dessinentunhommeengagé,tantdanslesbouleversementspolitiquesdesonépoquequedanssonamourdelalangueanglaise.Sansdouteest-ilparvenu,aveccesdeuxderniersromans,àmatérialisersondésir,celuid’être«unécrivainpolitique–endonnantautantdepoidsàchacundesdeuxmots»

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O’BRIEN. Le pouvoir c’est le pouvoir sur les gens, Winston, le contrôle de leur corps, oui, mais avant tout de l’esprit. Le contrôle de la réalité extérieure et objective n’a pas d’importance.

La réalité est à l’intérieur du crâne.

DuncanMacmillan

Néen1980,DuncanMacmillanestauteuretmetteurenscène. Ilécritaussibienpourlethéâtre,laradio,latélévisionetlecinéma.

AuteurdeMonsteren2007,piècepourlaquelleilobtientplusieursprix,AnObjecten2008(enco-écritureavecMikeBartlett),Platformen2010,iladapteen2011DonJuanrevientdeguerred’OdonvonHorvath,piècenomméedansquatrecatégoriesdesOffWestEndAwards.Toujoursen2011,sapièceLungs, trèsremarquée,reçoitelleaussiplusieursprixenAngleterreainsiqu’auxEtats-Unis.En2013,ilécritEveryBrilliantThing,ainsiquel’adaptation,avecRobertIcke,de1984pourHeadlong.

Depuis 2011, il collabore régulièrement avec Cathy Mitchell qui crééplusieursdesestextes(Lungs,unadaptationdeVoyagedanslaNuitdeFriedericke Mayröcker, une autre du Malheur Indifférentde PeterHandke,ForbiddenZone,ainsique2071,sadernièrepièce).

Outre1984,iladirigéKarposideNickGill(2006),180secondesetCradleMedeSimonVinnicombe (2006et2008), saproprepièceLungs(2010)etContractionsdeMikeBartlett(2013).

Pour1984,DuncanMacmillanestimequeledéfiétaitdereprésenterlesambiguïtésdu romanetnonde tenterde les résoudre:«Jen’aipasàm’exprimer surceque le théâtredoitounedoitpas faire,mais je saisque,pourcequimeconcerne,c’estlacomplexitéquim’intéresse».

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LA MERE. Mais enfin est-ce qu’ils…

Si le Parti…

Comment savons-nous si la Parti a chuté ? Est-ce que ça ne serait pas dans leur intérêt de structurer le monde de telle sorte que nous croyions qu’ils ne sont plus…

Elle perd le fil de sa pensée.

RobertIckeNéen1986,RobertIckeestmetteurenscène.OriginaireduNord-Estdel’Angleterre, il se fait remarquer par plusieurs travaux sur Shakespeareau lycée puis à l’université de Cambridge où il suit des études delittérature. Il y dirige Beaucoup de Bruit pour Riende WilliamShakespeare et L’Alchimiste de Ben Jonson en 2006,Motordown deSimonStephensetRoméoetJuliettedeWilliamShakespeareen2008.

En2010,ilrejointlacompagnielondonienneHeadlongavecquiilmonteBoys d’EllaHicksonetRoméoet Juliette deShakespeareen2012,puis1984 de George Orwell dont il signe, avec Duncan Macmillan,l’adaptationet lamiseen scène,en2013. Il estactuellementdirecteurassociéauthéâtreAlmeidaàLondres,auxcôtésdudirecteurartistiqueRupertGoold. IlyadéjàmontéMrBurnsd’AnneWashburnen2014etTheFeverdeWallaceShawndébut2015.

Porté par des convictions radicales et sans compromis, Robert Ickecherche à faire vivre aux spectateurs une expérience viscérale. «Lethéâtrea lepotentieldefairepasserplusdetout:plusdejoie,plusdesurprise, plus de vie. Je ne crois pas qu’il le fasse la plupart du temps,mais je crois qu’il le peut». Pour adapter et monter 1984, Icke a étéguidéparl’idéequedirigerunclassiqueimpliquede«sedébarrasserde300ansd’histoireduthéâtre.Ledéfiestdeconvaincrelepublicqu’ilneconnaîtpasl’œuvreaussibienqu’illecroit».

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COMPAGNIE13/10èENUT

3Bruedu10èRégimentd’Artillerie35000RennesSiret:44133663300041Licences:1011016/1011017Courriel>[email protected]>www.1310.frDirectionartistique>Frédé[email protected]>Laurè[email protected]