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DOSSIER DE PRESSE 2016/2018

DOSSIER DE PRESSE - lesoliloquedegrimm.fr · 1 . THEATRE ESSAION du 16 NOVEMBRE 2017 au : 27 JANVIER 2018 En choisissant d'aller écouter ce texte, ... Quechua, un canapé défoncé,

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DOSSIER DE PRESSE 2016/2018

Le théâtre de l'Essaïon affiche à partir de demain, le Soliloque de Grimm ....une mise en lumière de la vie chaotique de Fred Loisel, à la rue depuis trois ans, sans-abri imbibé de belles paroles et de mauvais alcool...... tendre, grave, drôle, heureux, ce personnage vous embarque dans son quotidien fragile et féroce, celui des SDF ! Hanté par son fantôme d’amour et les spectres d’une carrière de comédien, ce « locataire du froid » gravite entre délire et réalité. Dans sa cour sans miracle faite de gueules cassées et de vies éclatées, aujourd’hui est un jour spécial, c’est son anniversaire...venez le réchauffer ... au théâtre de l'Essaïon à partir de demain jeudi 16 novembre 2017 et jusqu’au 27 janvier 2018.

Jane Villenet Novembre 2017

Il se cache à lui-même sa face d’homme, il a perdu les traces de lui-même, ensevelies par la misère et le temps inexorable qu’il a passé à tricher ou plutôt à jongler avec ses rêves et la sordide réalité. Sa véritable compagne est la solitude, cynique, terrible. Monsieur Fred Loisel, sdf de son état, abuse d’elle de façon insensée à coups de rasades de vinasse.

Comment sauterait-elle sur ses genoux la réalité, n’est-elle point juste un cliché aux abois, un frottement sur la partition des mimiques de Monsieur et Madame bien élevés, têtes baissées sur leurs portables dans le métro. Clodo plus vrai que nature, cherchez l’erreur ! Monsieur Fred est une devinette à lui tout seul comme dans ses images d’Epinal qui fourmillent de détails recouvrant la silhouette d’un personnage.

Pas d’attaché de presse pour un clodo ! Je me souviens d’en avoir vu un reculer de frayeur en voyant arriver dans un cocktail un supposé clodo. Le clodo en question avait la besace pleine de poèmes !

« Il ne joue plus la coquette », il est vrai, Fred depuis 3 ans, convaincu qu’il joue son dernier rôle de philosophe alcoolique, de Diogène impénitent ! Il s’est recréé un univers au milieu d’un dépotoir (la mise en scène de Jean-Philippe AZEMA est très éloquente). C’est incroyable comment dans sa cour de miracles, un vieux sac de supermarché peut exprimer à sa façon le désespoir. Rions donc de le fixer tel qu’il est usagé avec ses couleurs flétries.

Ah la belle enseigne ! Ah le beau papier journal qui une fois lui sert de papier toilettes ! Fred fait figure comme le sac de supermarché d’homme usagé, un homme qui a roulé sa bosse mais celle- ci a tellement grossi qu’elle lui fait un peu d’ombre, voilà tout. Nous spectateurs, nous croyons qu’elle va nous empêcher de le regarder ce gueux, crasseux, puant, dégoûtant ! Et pourtant l’innocence est là qui gravite autour du bonhomme, elle a le regard d’une femme qu’il a aimée qu’il aime toujours.

Tendresse ! Au bout du rouleau, l’homme devient un Prince, un heureux magicien, trompe-la-mort. Une leçon de vie, une leçon de choses délivrées par le dramaturge Bruno GEORGE et son interprète formidable Fred SAUREL qui incarne à discrétion, une idée de l’homme et ses ailleurs, bien au-delà des apparences !

Evelyne Trân • THEATRE AU VENT 27 janvier 2018

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THEATRE ESSAION du 16 NOVEMBRE 2017 au : 27 JANVIER 2018 En choisissant d'aller écouter ce texte, vous prendrez la décision d'entendre tout ce que vous évitez soigneusement et aussi un peu piteusement il faut bien le dire, dans la vraie vie. Car, ces êtres en marge … nous les fuyons la plupart du temps comme si une contagion était possible. En réalité, ils nous font peur car les exemples sont trop nombreux, vont croissant et à la longue deviennent cauchemardesques.

Où est l'époque pas si éloignée que cela où l'on disait qu'en France, plus personne n'avait faim ni froid ? Tenir ce genre de discours dans les années 80 était encore possible même si certains signes avant-coureurs se profilaient déjà à l'horizon.

Fred, ce bon gros nounours un peu crasseux certes et passablement imbibé de mauvais alcool (l'expression est stupide quand on sait qu'il n'y en a pas de bon, sinon au goût ) fut jadis un comédien et pas n'importe lequel puisqu'il interprétait du Shakespeare ; c'est sans doute la raison pour laquelle il ressemble de plus en plus à Falstaff ?

Le copain Fred s'est retrouvé dehors le jour où Nelly, son épouse en a eu assez de cohabiter avec cette distillerie ambulante. Au préalable, le comédien en guise de " panouille " avait accepté le cachet constitué par une pub houblonnée qui lui avait fait prendre de mauvaises habitudes ... Le crescendo arrive vite en ce domaine et ce fut le commencement de la fin, bref la dégringolade.

Il a donc rejoint l'un de ces villages de tentes qui fleurissent désormais un peu partout sorte de Cour des Miracles en ce 21ème siècle où l'argent virtuel coule à flots, où certains font fortune sur un simple coup de bluff et où d'autres deviennent des crève-la-faim dans l'indifférence générale.

" Chacun pour soi et Dieu pour tous ! "

Une seule chose permet encore à ce clochard sublime de tenir le coup : c'est l'humour qu'il nous fait partager en dépit de ce " karma pourri " qu'il traîne depuis des années. Alors il soliloque et entre deux lampées nous narre sa vie, exposant son présent sans avenir ... Fred SAUREL joue ce personnage avec un réalisme confondant. Gageons qu'après l'avoir entendu vous ne verrez plus ces malheureux " frères humains " qui hélas errent, que dis-je, stagnent dans le froid des rues du même oeil qu'auparavant. Pour cela, que le trio constitué par l'auteur, Bruno George, le metteur en scène, Jean-Philippe Azéma et l'interprète déjà nommé en soient remerciés.

Simone Alexandre Lien

Sur scène, une tente qui a fait la fortune de Décathlon, un vieux fauteuil Club défoncé et un campement hasardeux. Il éructe et grogne, et s'extrait de cette toile Quechua, avec grande difficulté. Il est sans abri depuis trois ans, il s'appelle Fred Loisel, il était comédien, et sort d'une vieille boîte en fer, un article qui parle de lui. J'ai eu l'impression d'être un voyeur, incapable de réagir. Si j'avais rencontré un ancien copain, en telle situation, j'aurais essayé de l'aider... Mais si, en moins d'une heure, il avait bu une bouteille de Vodka, une autre de Get27, et ensuite le meilleur Rhum blanc, pour finir par fêter son anniversaire avec un coup de Pich... Je n'aurais su quoi lui dire... Ce témoignage d'une misère difficile est talentueusement interprété par Fred SAUREL! Mais qui est qui ? Sur le dossier de presse, on lit: "Nul n'est à l'abri de vivre sans amour, nul amour ne peut vivre sans abri". C'est très bien interprété, c'est dérangeant et perturbant. Ne fermons pas les yeux sur ce qui se passe autour de nous ! Une écriture de Bruno GEORGE. Une Mise en Scène de: Jean-Philippe AZEMA, assisté par Camille FAU-PRUDHOMOT. Décor très réussi de Benjamin LAVARONE. Maquillage: Sophie PRE C'est drôle, émouvant, et triste à la fois...

Robert BONNARDOT 17 novembre 2017

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Un face à face avec la dramatique Solitude d!un sans-abri Le soliloque de Grimm met en lumière la vie chaotique de Fred Loisel, à la rue depuis trois ans, sans-abri imbibé de belles paroles et de mauvais alcool. Le texte fut écrit par Bruno George pour Fred Saurel, qui campe avec talent ce personnage à la fois drôle, pénible, attachant et tragique, un peu comme « ton meilleur pote », pour reprendre l!expression du metteur en scène Jean-Philippe Azéma. À découvrir au théâtre de l!Essaïon jusqu!au 27 janvier. « Ces gens n!ont plus de toit ; ils sont les locataires du froid. » Dans la belle salle voûtée du théâtre de l!Essaïon (Paris), le décor est planté sitôt notre arrivée en salle : une tente Quechua, un canapé défoncé, un abri de bois et de rouille en guise de toilettes... Sur le mur du fond, entre les horaires des messes et une affiche fatiguée de Richard II de William Shakespeare, une petite table surmontée d!une structure en bois accueille pêle-mêle bassine, bidon, sac Lidl. La scénographie paraît d!emblée presque trop évidente, dans son réalisme travaillé. C!est avant de savoir que nous sommes dans un campement sauvage, où chacun se ménage un espace pour vivre, pour survivre. Tâtonnement vital et verbal À l!extinction des feux de ce monde, à la lueur des éclairages théâtraux, le voici qui sort de sa tente : une grosse main s!agrippe à la toile ; le corps lourd, rendu massif par le «costume» – expression devenue bien ironique, depuis la petite formule d!Emmanuel Macron, dès lors que nous sommes confrontés à une personne sans abri, se déploie péniblement, pour aussitôt saisir la bouteille, première d!une longue série.

Le comédien, d!abord silencieux, comme tâtonnant dans sa vie aussi bien que dans ses mots, évoque sa situation, celle de ses camarades – Bon-tant-pis, Cartouche, Kadhafi, Terminator, Chabal... –, la manière dont les journalistes profitent de leur misère pour nourrir les lamentations télégéniques, dès lors que le froid commence à mordre la chair jusqu!à la fendiller en de multiples endroits, quand la neige recouvre totalement la crasse véritable « miracle de Noël ». Soudain, comme en passant, Batman – son surnom dans le camp – évoque celle qui l!a « foutu dehors »... Nelly... apparition furtive d!un amour encore omniprésent dans son existence, quand il a déserté depuis plusieurs années celle de la compagne d!autrefois. Il ne s!y attarde pas, pas tout de suite. Richesse du langage Il a tant à dire, et si peu de mots pour l!exprimer, du moins le pense-t-il : « Moi, les mots, c!est ce qui m!a toujours manqué. C!est un sacré handicap dans la vie, surtout pour un comédien. » C!est donc l!histoire d!un comédien qui joue un sans-abri qui fut comédien... sur les

planches polies du théâtre hier, sur les planches pourries du campement aujourd!hui. Sans personne à qui adresser sa tirade, glorieusement shakespearienne et tristement loiselienne : « Après Richard II, j!ai surtout joué Pochard III : trois grammes d!alcool dans le sang et ta royauté décline ! »

Les jeux de mots se succèdent, préservent une légèreté dans la chute, tracent un cynisme de survie : le poivrot qui « manque un peu de bouteille », la « loque soliloque », la « fête foraine pour un foireux sans reine », le« Clodo et ses Claudettes », « Auchan twelve » (vol de carburant dans un supermarché), ou encore « Je suis Clocharlie »... Le comédien s!attarde parfois trop sur les effets de ces formules, comme pour vérifier la compréhension du public.

Batman affirme de ne pas avoir le langage pour s!exprimer, mais celui-ci se déverse abondamment en un texte simple (signé Bruno George), avec une facilité déconcertante, quand bien même la mémoire flanche par endroits et qu!une chanson de Serge Reggiani est nécessaire pour exhumer les noms enfouis du passé. Fred sait apposer des mots sur ce qu!il vit – une richesse que tant d!autres, accolés au bitume, n!ont pas. Quand le miroir devient mouroir Ce qui lui manque, c!est davantage un regard extérieur, celui – impossible – du «fantôme» qui partageait son existence, celui qui le distancie de lui-même pour offrir une altérité féconde. Mais il n!a que cet impitoyable miroir, dans lequel se noie le personnage, jusqu!à ne plus voir que lui-même. Telle la diabolique reine de Blanche-Neige, avec qui il

partage une maladie : « le soliloque de Grimm ». Inutile de regarder dans un dictionnaire ; ce mal n!existe que dans l!imaginaire de l!auteur.

Bruno George compare en effet l!interrogation de la reine à celle de son personnage... au risque d!être un peu trop rapide. C!est oublier que le miroir répond à la reine, brisant précisément le soliloque, quand il demeure désespérément silencieux pour Fred Loisel. Mais le dramaturge s!intéresse ici à une autre dimension : l!enfermement dans une contemplation de soi. La reine n!a d!yeux que pour sa beauté quand le comédien n!entend que son verbe haut, qui fit son succès dans Richard II, jusqu!à ne plus ressentir la présence de Nelly à ses côtés, lorsqu!il vivait encore avec elle.

La trouvaille est belle, subtile : le soliloque de Batman, si bien interprété par Fred Saurel entre deux gorgées, n!a pas son origine dans la misère, mais dans l!emprisonnement intérieur d!un être contre lequel vient se briser toute altérité, toute chaleur humaine (le prénom Nelly ne vient-il pas du terme grec hélê qui signifie « éclat du soleil » ?), celle-là même que, une fois perdue, il guette indéfiniment.

La séparation et la solitude interviennent comme des accélérateurs d!un processus de décomposition sociale. Et le miroir devient mouroir.

Pierre MONASTIER avec Pauline ANGOT

28 Novembre 2017 Lien

« Le soliloque de Grimm » Jusqu'au 27 janvier 2018 à l'Essaïon Une tente quechua passablement déglinguée, un fauteuil défoncé d'où déborde le crin, une radio, un jerrycan, une vieille affiche de théâtre, une chaise percée pour SDF du vingt-et-unième siècle, une cuvette à l'émail ébréché, un camping-gaz, une vieille casserole, tout l'univers des sans-abris est là. Un homme s'extrait de la tente péniblement, titube un peu, boit, fait chauffer de l'eau, s'effondre dans le fauteuil. Cela fait trois ans que Fred Loisel est dans la rue, trois ans à soliloquer, à coups d'aphorismes et d'humour désespéré, et surtout à boire. Il fut un temps où il était comédien et où il avait une femme, Nelly. Et puis un jour elle « en a eu marre de faire répéter une loque qui soliloque ». Désormais son monde s'est réduit à des hommes aussi cabossés que lui et, j'oubliais, une femme, Nicole, encore plus imbibée d'eau de vie que ses compagnons de misère. Aujourd'hui est pour Fred un jour spécial, c'est son anniversaire. Le texte de Bruno George passe de la tendresse à la cruauté, de la gravité au burlesque, de la crudité à la poésie pour dessiner un monde où la férocité côtoie la fragilité. Pour dire ce texte à l'humour désespéré, il fallait un comédien particulier. C'est pour lui que Bruno George a écrit ce texte. Fred Saurel est formidable dans ce rôle. Il semble se débattre entre les fantômes de son amour défunt et les gueules cassées qui l'entourent. Il arrive à mettre à distance le misérabilisme par le rire, un rire triste mais si intelligent. Il a beau dire que les mots lui viennent de plus en plus difficilement car « l'environnement n'y est pas favorable », il a de beaux restes ! Il faut l'entendre dépeindre ses voisins SDF, ces « locataires du froid », parler de la mort qui rôde car comme il le dit avec son humour dévastateur : « Le problème de l'alcool, c'est que si t'es pas au volant, tu meurs lentement et à force, tu noies les autres dans ton chagrin ». Tout son corps dit l'usure de la vie dans la rue et les méfaits de l'alcool qui n'est plus consolation mais destruction. Il est drôle, désespéré, émouvant, poignant !

Micheline Rousselet 17 novembre 2017

Un clochard alcoolique, sympathique et prosaïque

Avec des bouts de bois et des morceaux de carton, un fauteuil défoncé et un réchaud vieillot, Grimm a créé une niche à tout vent, prolongée par une tente Quéchua : un domicile que le vent ou la police peuvent détruire juste en passant. Ce SDF survit comme il peut. Il boit sans modération. Comme aujourd’hui, c’est son anniversaire, il boit encore plus. Il trinque à son amour perdu et à sa carrière cassée. Il était … comédien. Mais ça n’a pas marché. Et l’on peut craindre que, dans cet abri brinquebalant, vêtu d’habits qui se déchirent, l’homme coule un jour à pic. Pourtant, il rit, blague, fait de la résistance...

La pièce de Bruno George est un monologue sensible et traversé d’humour. L’interprétation de Fred Saurel, colossal clochard, retrouve avec un ton personnel les images classiques de l’exclus sympathique et folklorique. C’est la mise en scène de Jean-Philippe Azéma qui ne convainc pas, bien qu’elle dirige bien le comédien. Pourquoi instaurer ce réalisme dépourvu d’imagination ? Si le théâtre, c’est reproduire exactement la vie quotidienne, sans apporter un angle de vue, une stylisation, le regard de l’art en même temps qu’un regard humain, autant aller regarder la rue et ses malheureux. Cela nous donnerait plus mauvaise conscience, nous secouerait davantage que ce spectacle qui, manifestement, émeut son public mais en reste à un tranquille prosaïsme.

Le Soliloque de Grimm de Bruno George, mise en scène de Jean-Philippe Azéma, décor de Benjamin Lavarone, avec Fred Saurel.

Gilles Costaz

08/01/18 Lien

Monologue tragi-comique de Bruno George interprété par Fred Saurel dans une mise en scène de Jean- Philippe Azéma. Avec le décor naturaliste de Benjamin Lavarone, l'immersion dans l'épouvantable monde parallèle et noir de la rue, celui des SDF, et plus précisément dans celui trivial et prosaïque de la Tribu très avinée des Nez rouges, est immédiate.

Le guide est Fred dit Batman qui, survit dans son pré-carré, Tente Quetchua, kitchenette de fortune et commodités privatives rustiques, émergeant d'une longue nuit de biture.

Et il cause, cause, cause beaucoup car atteint du syndrome du "Soliloque de Grimm. Alors il raconte les habitants en perdition et les moeurs violentes d'un lieu- ghetto mortifère et, surtout, entre évocation douloureuse du passé et désolation du présent, sa descente aux enfers, de son éphémère carrière de comédien qui l'a conduit à devenir une "viande saoûle", à l'abandon de la belle Nelly.

Le monologue de Bruno George ne s'inscrit pas dans la tradition théâtrale de la figure tragique, voire céleste, ou du miroir existentiel du clochard, du "Roi Lear" shakespearien au gardien pinterien en passant notamment par le duo beckettien de "En attendant Godot" mais dans une veine tragi-comique. Sans verser ni dans l’idéalisation ni dans la victimisation, il livre le portrait réaliste d'un homme dans l'inexorable dénuement d'une humanité déchue sous forme d'un monologue tragi-comique écrit sur mesure pour le comédien Fred Saurel.

Avec sa "bille de clown" aux faux airs coluchiens et sa verve truculente, Fred Saurel réussit, sous la direction avisée de Jean-Philippe Azéma qui veille à éviter l'écueil du numéro d'acteur et de l'émotion pathétique, une belle composition réaliste.

MM

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LE SOLILOQUE DE GRIMM Article publié dans la Lettre n° 444 du 20 décembre 2017

Théâtre Essaïon 4e.

Les années de cloche ont sonné la misère, Fred y a connu la descente inexorable aux enfers du dénuement dans des flots d’alcool frelaté. Le Richard II des beaux jours du comédien est devenu Pochard III. Son royaume pour une tente quechua qui ne l’abritera pas dans les sommets… Les bas-fonds, il y invite avec force jeux de mots et rires tonitruants qui s’étouffent dans une toux de sanglot.

Toilette de chat, hygiène plus succincte encore, son quotidien est tissé de violence et de solidarité sous condition avec les compagnons de dérive, qui lui ont organisé pour ses quarante ans une fête à tout casser. Mais y a-t-il encore quelque chose à casser dans ce cocktail façon Molotov ?

Autour de lui, il y a Nicole la Picole, Chaval le géant slave qui mangeait les chats vivants, Kadhafi et ses méchouis de rats, et surtout la nostalgie de Passe-Partout, son tout petit parrain qui l’initia aux lois de la jungle avant de sombrer aux bords du périphérique. Dans cette location d’un froid sans pitié, comment se réchauffer ? On fait semblant d’apprendre l’anglais pour redevenir shakespearien, on met la table pour grignoter les trésors qu’on a retirés, après un regard circonspect, de l’antre du fauteuil éventré. Miroir mon beau miroir, on lui cligne de l’œil, quand il fait resurgir les relents d’une carrière qui s’est brisée sur les récifs impitoyables de l’alcool.

Nelly la bien aimée, de désespoir, a fini par chasser son incurable poivrot, mais il ne l’a jamais chassée de la mémoire de son corps, de son amour en miettes, de son soliloque en loques. La radiocassette l’interpelle, il hurle à la face du Ciel. Fred Saurel est bouleversant dans sa souplesse obèse et son sourire d’inespoir. Où finit le rire du sarcasme salvateur, où commence l’hallucination qui ronge ? Quand perd-on définitivement l’élémentaire dignité ? Peut-être choisit-on de se taire avant…

A.D Lien

LE SOLILOQUE DE GRIMM A L’ESSAÏON, INDISPENSABLE Le Soliloque de Grimm pointe sa lumière sur la vie chaotique et rude d’un clochard, à la rue depuis 3 ans, d’un sans-abri imbibé de belles paroles et de mauvais alcool. Aujourd’hui est un jour spécial, c’est son anniversaire. Fred Saurel interprète le clochard et le rôle lui sied comme un gant. La pièce impossible. Que l’on se rende au spectacle en métro, en taxi ou à pied, nous croiserons un ou plusieurs sans-abri allongés à même le trottoir et nous tournerons la tête, pour ne pas voir la détresse, la saleté, la décrépitude, pour ne pas nous alourdir des images de la décadence. Aussi, les raisons nous manquent d’assister au théâtre à un spectacle que nous fuyons dans la réalité. D’autant que le Soliloque de Grimm ne nous préserve de rien ; le personnage boit jusqu’à un « plus soif » qui n’arrive jamais, défèque, urine sur scène; d’autant que la petite salle de l’Essaïon crée une proximité avec la misère que nous avions refusée dehors. Sauf que cette pièce impossible est un objet littéraire puissant et que l’interprétation solide de Fred Saurel fait chuter nos dernières défenses. La disparition de « l’autre ». Tout commence par le réveil au son d’une musique rock. Fred sort de sa tente Quechua pour une nouvelle journée, celle de son anniversaire, celle des souvenirs ressassés, les souvenirs de son bonheur perdu, et de ses échecs ; au point central la chronique sans complaisance de sa pente vers l’alcoolisme et vers une séparation amoureuse. Par petites touches alternativement cruellement réalistes, ou poétiques mais délirantes, il va peindre devant nous son ancienne vie, et l’actuelle. Il va nous raconter le froid, la faim, la soif, l’absolue désespérance. Le dégoût ne nous quittera jamais, de cet homme qui ferait son affaire de cette cour des miracles où l’on vit au jour le jour. Mais quelque chose se passe entre le comédien et nous. Au sein de ce renoncement radical émergent par le talent bluffant de Fred Saurel une pensée et avec elle une humanité. Nous saisissons ce qui fabrique un clochard après son aller sans retour vers un monde parallèle où l’autre humain a disparu. Hors du regard du monde, il perd tout projet de vie. La pièce devient de surcroît un objet militant. Elle est indispensable pour cela.

David Rofé-Sarfati 22 novembre 2017

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Théâtre : « Le Soliloque de Grimm », de Bruno Georges, au Théâtre Essaïon à Paris. S.d.f. « Le Soliloque de Grimm » interroge. C’est fait pour. Et fait rire. C’est aussi fait pour. La pièce met en scène un comédien fini qui vit dans une tente Quechua, sur un terrain vague. Mais il ne faut pas se tromper d’interprétation : ce spectacle, malgré l’apparence, ne se veut pas documentaire. Il n’illustre pas mais médite sur la condition de sans domicile fixe. Qu’a perdu celui-là ? Qu’a-t-il trouvé ? Les réponses viennent peu à peu, sous forme de formules bien senties : « nul n’est à l’abri de vivre sans amour, nul amour ne peut vivre sans abri », par exemple. Car, si certaines sont des traits sur la condition de miséreux (« Au départ, les tentes Quechua, c’est quand même prévu pour les mecs qui montent aux sommets, pas pour ceux qui touchent le fond ») en général, le personnage reste celui d’un ex- comédien qui s’imbibe désormais de mauvais alcool et de bonnes paroles dans un soliloque dont il est à la fois l’acteur et le spectateur. On rit. Mais on est aussi mal à l’aise. Peut-on rire de tout ? Se demande-t-on en sachant que la condition de cet homme peut devenir celle de tout un chacun en un bref délai par les temps qui courent. Un « vrai » sans domicile fixe a-t-il réellement abdiqué toute dignité ou bien ce que nous voyons est-elle une image d’Épinal ? Les réponses à ces questions sont impossibles. Restent un jeu parfaitement crédible et des réflexions qui font mouche.

Pierre FRANÇOIS 8 décembre 2017

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« LE SOLILOQUE DE GRIMM » AU THÉÂTRE ESSAÏON, NOUS Y ÉTIONS ! Aussi intéressant que divertissant, aussi drôle que chargé émotionnellement, « Le Soliloque de Grimm » de Bruno George est un petit bijou théâtral. L’auteur a écrit une œuvre brillante sur un sujet fort de société sur lequel personne ne peut fermer les yeux puisque nous croisons tous au quotidien des sans-abris. Seul sur scène, Fred Saurel incarne Fred Loisel un SDF qui va durant 1h10 raconter la vie au sein d’un village de tentes mais aussi quelques uns de ses souvenirs. Sans être larmoyant ni donneur de leçons, « Le Soliloque de Grimm » touche en plein cœur et fait réfléchir car tout est tellement juste dans ce spectacle que l’on ne peut pas ne pas penser à ce que vivent ces « oubliés de la vie » qui dorment dehors pendant que nous, nous sommes au chaud chez nous, même si chacun à ses propres problèmes. La mise en scène de Jean-Philippe Azéma, les accessoires, l’incroyable performance de Fred Saurelservent le texte et offrent un vrai beau et bon moment théâtral. Tout est mis en œuvre dans ce spectacle pour que vous soyez en totale immersion dans l’univers de Fred qui est loin d’être une caricature, ses traits ne sont pas grossis, c’est un homme en souffrance qui boit certes mais il y a de la dignité chez lui, beaucoup d’humour, de la gouaille, c’est un vrai personnage dans tous les sens du terme et le spectateur ressent beaucoup de l’empathie pour lui que de la pitié. Le final est tout aussi intense qu’inattendu !

Steph Musicnation

5 Janvier 2018 LIEN