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DÉCEMBRE 2008 - 8 - N° 640 FOCUS X-AFRIQUE ET LE PROJET MARCOTTAGE Une discipline multiforme, de l’information à la décision La guerre économique est aujourd’hui planétaire Connaissance et anticipation au cœur de la stratégie d’entreprise REVUE MENSUELLE DE L’ASSOCIATION DES ANCIENS ÉLÈVES ET DIPLÔMÉS DE L’ÉCOLE INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE DOSSIER ÉNERGIE ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

DOSSIER INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE - La Jaune … · – Gestion du risque sur les marchés de l’énergie janvier 2009 ... 5 > L'intelligence économique, ... 51 >La puissance par

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DÉCEMBRE 2008 - 8 - N° 640

FOCUSX-AFRIQUE ET LE PROJET MARCOTTAGE

➔ Une disciplinemultiforme,de l’informationà la décision

➔ La guerreéconomiqueest aujourd’huiplanétaire

➔ Connaissance et anticipation au cœur de la stratégie d’entreprise

REVUE MENSUELLE DE L’ASSOCIATION DES ANCIENS ÉLÈVES ET DIPLÔMÉS DE L’ÉCOLE

INTELLIGENCEÉCONOMIQUEINTELLIGENCEINTELLIGENCEDOSSIER

ÉNERGIE ETDÉVELOPPEMENT

DURABLE

JR couverture_640.indd 1 26/11/08 9:47:24

640_couv2e.indd 1 26/11/08 12:47:19

1LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Le Collège de Polytechniques’adresse aux populations-clés de l’entreprise.

Executive managers, dirigeants, hauts potentiels

• Élaboration et animation de parcours de développement professionnel• Accompagnement lors de changements de grande envergure• Développement de compétences spécifiques : leadership,

management, innovation, conduite de projet• Notre prochain événement :

– Petit-déjeuner Découverte de l’Executive Master Classle 4 décembre 2008, pour tout renseignement : 01.55.80.50.63.

Managers et chefs de projet

• Accompagnement et parcours de développement professionnel fondéssur la dimension humaine du management

• Nos prochains séminaires de formation :– Piloter l'innovation décembre 2008– Manager une équipe de managers décembre 2008– Prendre la parole pour convaincre décembre 2008– Stage pratique de communication

par les techniques théâtrales janvier 2009

Experts, ingénieurs, chercheurs, managers techniques

• Développement de la performance technologique• Nos prochains séminaires de formation :

– Architecture des systèmes complexes décembre 2008– Aéroacoustique : modélisation et calculs janvier 2009– Gestion du risque sur les marchés de l’énergie janvier 2009– Méthodes performantes pour le calcul scientifique

sur les calculateurs parallèles et multicœurs février 2009

Notre offre se décline en :– Dispositifs sur mesure– Accompagnement personnalisé, coaching individuel ou collectif– Formations interentreprises

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Sommairedécembre 2008 – n°640

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Intelligence économique5 > L'intelligence économique, fille de l'École polytechnique

éditorial de Philippe Laurier7 > Une discipline multiforme, de l'information à la décision

par Philippe Laurier10 > Connaissance et anticipation au cœur de la stratégie d'entreprise

par Henri Martre (47)12 > La guerre économique est planétaire

par Bernard Esambert (54)16 > Deux approches comparées d'appui aux entreprises, en France et au Japon

par Jean-Yves Bajon (80)19 > Trois théorèmes pour caractériser le cyberespace

par Philippe Wolf (78)22 > Les moteurs de recherche, acteurs stratégiques

par François Bourdoncle (84)25 > Les cabinets de conseil spécialisés apportent un éclairage unique

par Benoît Desforges (04)28 > Le nouveau sang des entreprises

par Bernard Esambert (54)32 > Bien s'informer en respectant l’éthique

par Jean-Pierre Bouyssonnie (39)34 > Une dimension nouvelle dans le monde virtuel

par Philippe Wolf (78)37 > Quelques exemples concrets

La double invention de la machine à vapeur ;Les indiscrétions des transports en commun ;Ma cave à vin n'a plus de secret ;Des X à la DGSE : pour quoi faire ?L'affaire Farewell

Rendez vous sur le site de La Jaune et la Rouge pour accéder aux informations complémentaires,réagir sur les forums et consulter les numéros déjà parus. http://www.lajauneetlarouge.comCourriel : [email protected]

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SAVOIR +

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Directeur de la publication : Daniel DEWAVRIN (58)

Rédaction en chef :Jean-Marc CHABANAS (58), Hubert JACQUET (64)

Secrétaire de rédaction : Michèle LACROIX

Assistante : Françoise BOURRIGAULT

Correctrice : Catherine AUGÉ

ÉDITEUR :Association des anciens élèves et diplômésde l’École polytechnique5, rue Descartes, 75005 ParisTél. : 01.56.81.11.00Courriel : [email protected] : 01.56.81.11.01

COMITÉ ÉDITORIAL :Maurice BERNARD (48), président,Pierre LASZLO, Philippe ALQUIER (E.P.),JEAN DESCHARD (E.P.), Gérard PILÉ (41),Jean DUQUESNE (52), Michel HENRY (53),Michel GÉRARD (55), Christian MARBACH (56),Charles-Henri PIN (56), Alain MATHIEU (57),Jacques-Charles FLANDIN (59), Jacques PARENT (61),François Xavier MARTIN (63), Gérard BLANC (68),Alexandre MOATTI (78), Jean-Philippe PAPILLON (90)

WEBMESTRE : Rachel COUDRAY

ABONNEMENTS, ANNUAIRE, COTISATIONS :Tél. : 01.56.81.11.05 ou 01.56.81.11.15

ANNONCES IMMOBILIÈRES :Tél. : 01.56.81.11.11 – Fax : 01.56.81.11.01

BUREAU DES CARRIÈRES :Tél. : 01.56.81.11.14 – Fax : 01.56.81.11.03

RÉDACTION :5, rue Descartes, 75005 ParisTél. : 01.56.81.11.13Courriel : [email protected]

TARIFS 2009 :Prix du numéro : 8 eurosAbonnements :10 numéros par an : 40 eurosPromos 1999 à 2002 : 30 eurosPromos postérieures : 01.56.81.11.15

PUBLICITÉ :FFE, 18, avenue ParmentierBP 169, 75523 Paris Cedex 11Tél. : 01.53.36.20.40

CONCEPTION, RÉALISATION : Key Graphic

IMPRESSION : Groupe MAURY Imprimeur

COMMISSION PARITAIRE n° 0109 G 84221ISSN n° 0021-5554TIRAGE : 11400 exemplairesN ° 640 – DÉCEMBRE 2008

EN COUVERTURE : antenne près du Fort deBregille (Besançon)© TELECOM PARISTECH PATRICK CLEMENT

Revue mensuelle del’Association des anciens élèves et diplômésde l’École polytechnique

56 > Théâtre par Philippe Oblin (46),Récréations scientifiques par Jean Moreau de Saint-Martin (56)

57 > Bridge par Gaston Méjane (62),Discographie par Jean Salmona (56)

58 > Musique en images par Marc Darmon (83),Solutions du bridge

59 > Livres,Solutions des récréations scientifiques

RENCONTRES44 > Pandore et la modernité

par Pascale Sevault-Desnos

VIE DE L'ÉCOLE45 > Une grande école, pourquoi pas moi ?

par Pauline Serraz46 > Transmettre le goût de la science

par Pauline Serraz

FORUM SOCIAL48 > Lutter contre l'exclusion par le système éducatif : un défi

par Hubert Jacquet (64)

IN MEMORIAM50 > Henri Lerognon (39) et Jacques Aubry (46), pionniers de

la microélectronique françaisepar André Danzin (39) et Guy Kemlin (39)

LIBRES PROPOS51 > La puissance par le gratuit

par Bruno Martin-Vallas (68)

ARTS, LETTRES ET SCIENCES

FOCUS

EXPRESSIONS

52 > L'Afrique, un lien qui vient du cœurpropos recueillis par Jean-Marc Chabanas (58)

54 > Quels enjeux pour X-Afriquepar Alain Ducass (73)Aider les porteurs de projetspar Carole Ramella

55 > Créer des activités avec Marcottagepar Alain Ducass (73)Un potentiel pour la planètepar Jean-François Sorro (72)

X-Afrique et le projet Marcottage

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5LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

D.R.

Philippe Laurier,enseignant à Polytechnique et Télécom ParisTech

ÉDITORIAL

L’intelligence économique,fille de l’École polytechniquePOUR LA PATRIE, LES SCIENCES ET LA GLOIRE. Cette devise

aurait pu, pour une part, s’inscrire égalementau fronton de l’intelligence économique :

• préparer l’innovation par une veille technologique,sociétale, normative, etc. (Pour la science…);• transformer l’information recueillie en décision «heu-reuse» et gagnante (la gloire…), dans les sciences, l’en-trepreneuriat ou l’État. Napoléon avait coutume de de-mander avant de promouvoir un officier s’il savait mettrela «chance» de son côté et la transformer en réussite,c’est-à-dire savoir anticiper, détecter les signaux fai-bles, ou, comme le disait Pasteur, préparer son espritpour favoriser le «hasard» et découvrir. Cette notion desuccès préparable ressort plus vigoureusement dans laformulation anglo-saxonne de l’intelligence économi-que, nommée par eux intelligence compétitive, qui privi-légie une logique concurrentielle. L’approche américainese veut tranchante quant aux objectifs d’éviction duconcurrent, tandis que l’acception française se désireplus globale, moins marginalisante d’autrui, plus en re-cherche de solutions communes et équilibrées; en quel-que sorte si besoin, de gloire collective;• évoquer les thèmes du patriotisme économique (etla patrie). Les États-Unis – qui ont refusé l’achat d’unede leurs sociétés pétrolières par la Chine – ou l’Alle-magne – qui vient d’adopter des décrets en ce sens –redécouvrent ses vertus pour soutenir leurs industriesclés. Le démantèlement de Péchiney a laissé dansl’Hexagone un goût amer de gâchis.La parenté entre intelligence économique et École poly-technique transparaît en rapportant sa naissance à sespères fondateurs. Henri Martre a porté ce concept surles fonds baptismaux par son rapport de 1994 au Com-missariat général au Plan, Bernard Esambert pour sapart a, dès les années 1970, dégagé le concept deguerre économique. Nous verrons ici que d’autres an-ciens élèves explorent diverses voies ou leur apportentdes applications industrielles, à l’exemple des moteursde recherche dans l’informatique.

Un troisième cousinage se découvre à travers la per-sonnalité des fondateurs de l’École. Monge, on l’a ou-blié, supervisa l’espionnage technologique français desannées 1780 et 1790. Un rappel historique évoquera dans ce numéro la mis-sion d’espionnage d’un futur professeur de l’École, lechevalier Bétancourt. De même, Gaspard-Marie Prony,enseignant à l’X et directeur de l’École des ponts etchaussées, s’impliqua dans plusieurs opérations. L’une,en Italie, lui vaudra une courte arrestation par l’autoritéautrichienne d’alors.En Italie toujours, les lettres de Monge conservées àla bibliothèque de l’X sont savoureuses en ce que la« veille technologique » effectuée par ses soins dansles villes conquises par Bonaparte eut pour traductiondes matériels scientifiques saisis et expédiés sous es-corte à Paris, pour doter les laboratoires de Normalesupérieure et autres écoles, sous la réserve, notait-il,que «si ces instruments avaient été de quelque utilitéaux sciences dans les mains de ceux qui les détenaient,nous les aurions respectés, mais ils n’ont pu seule-ment nous en montrer l’usage» :

Rome, le 10 germinal de l’an V dela République une et indivisible,

Citoyens collègues,

Nous avons trouvé dans le cabinet de physique du ci-devant gouverneur de Milan, une machine électriqueanglaise qui n’avoit pas été déballée, et que nous avonscru pouvoir être utile à l’École polytechnique.Salut et fraternité

MONGE

On le constate, Polytechnique et l’intelligence écono-mique étaient voués à se croiser, probablement à faireun bout de chemin commun, pour la Patrie, les scien-ces et la gloire.

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6 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

GRAND ANGLE

Intelligence économique

Une discipline multiforme, de l‘information à la décisionPhilippe Laurier p. 7

L’intelligence économique se veut une réponse; plus qu’uncorpus délimité ou une discipline universitaire, elle s’estconstruite – empiriquement parfois – face à des besoins :gérer l’information et les processus décisionnels, compren-dre et maîtriser son environnement, protéger un patrimoineproductif et intellectuel, solidariser… ou désolidariser desgroupes humains. En tant que réponse à des besoins, elleest multiforme et rejoint de nombreuses sphères.

Connaissance et anticipation au cœur de la stratégied’entrepriseHenri Martre (47) p. 10

La conduite d’une entreprise exige de recueillir et d'inter-préter correctement une multitude d’informations et d’enappréhender les interactions. Ce travail doit mobiliser tou-tes les compétences de l’entreprise à travers des équipespluridisciplinaires s’appuyant sur des méthodes rigoureu-ses. Une indispensable ouverture au monde qui ne se limitepas aux entreprises : l’École polytechnique, comme bien d’au-tres entités publiques, y est naturellement amenée.

La guerre économique est planétaireBernard Esambert (54) p. 12

La compétition économique est désormais planétaire. Laconquête des marchés et des technologies a pris la placedes anciennes conquêtes territoriales et coloniales. Les armess’appellent innovation, productivité, taux d’épargne, consen-sus social et degré d’éducation. Les défenses se nommentdroits de douane, protections monétaires et entraves au com-merce international. Les combattants, Japon, États-Unis, Eu-rope, Chine, Russie, mais aussi tiers-monde, s’affrontentsans merci.

Deux approches comparées d’appui aux entreprises,en France et au JaponJean-Yves Bajon (80) p. 16

Comparé au réseau français, le dispositif japonais de dévelop-pement des entreprises japonaises à l’étranger est clair etcohérent. Le dispositif français est cependant engagé dansun grand nombre de réformes : meilleur ciblage des destina-tions et des services rendus, rationalisation du réseau, meil-leure articulation avec les chambres de commerce.

Trois théorèmes pour caractériser le cyberespacePhilippe Wolf (78) p. 19

À la fois monde nouveau et reflet du monde réel, le cybe-respace constitue un champ privilégié pour l'exercice del'intelligence économique. Comprendre cette infosphèreest un préalable à la définition et mise en œuvre d'unevraie stratégie en la matière. Cette appréhension peuts'articuler autour de grands principes structurants quiont une force comparable à celles des théorèmes en ma-thématiques.

Les moteurs de recherche, acteurs stratégiquesFrançois Bourdoncle (84) p. 22

Devenus un outil aussi indispensable que le téléphone, lesmoteurs de recherche présentent bien des pièges : risques demanipulation, espionnage de brevets, atteinte à la vie privée.Les moteurs de demain mettront en contact les internautesqui partagent les mêmes centres d’intérêt.

Les cabinets de conseil spécialisés apportent unéclairage uniqueBenoît Desforges (04) p. 25

La mondialisation et l’accélération des changements obli-gent les entreprises à mettre en place une veille stratégiquedéveloppée et efficace. Le recours à un cabinet de conseilspécialisé ouvre l’accès à des informations non diffusées,voire confidentielles, ce qui élargit le champ des perspectiveset facilite l’anticipation d’évolutions encore mal perçues. Desurcroît, il offre la possibilité d’un accompagnement dans lesactions de lobbying jugées utiles.

Le nouveau sang des entreprisesBernard Esambert (54) p. 28

L’intelligence économique consiste pour l’État à créer un en-vironnement favorable à ses entreprises et à les mobiliser;pour les entreprises à connaître leur situation sur le marchémondial, celle de leurs principales concurrentes, l’état del’art, les caractéristiques économiques, sociales, politiques etculturelles de leur champ d’expansion.

Bien s’informer en respectant l’éthiqueJean-Pierre Bouyssonnie (39) p. 32

Les entreprises doivent se doter d’un cadre éthique dans unenvironnement concurrentiel où certaines dérives se sontinstallées, faites de contrefaçon, de lobbying outrancier, de dé-nigrement des rivaux ou de leur déstabilisation. L’intelligenceéconomique doit revenir à des bases saines, orientées vers lacapacité à bien s’informer en respectant l’éthique.

Une dimension nouvelle dans le monde virtuelPhilippe Wolf (78) p. 35

Le cyberespace nous fait entrer dans une dimension nou-velle des activités humaines. Un outillage de plus en plus so-phistiqué permet un développement sans précédent de lacollecte et l’analyse des données disponibles, permettant laconstitution d’un authentique patrimoine informationnel. Pa-trimoine qu’il est impératif de protéger par la mise en œuvred’une politique de sécurité en constante évolution, politiquequi relève avant tout de l’intelligence humaine.

Quelques exemples concrets p. 37

La double invention de la machine à vapeur;Les industries des transports en commun;Ma cave à vin n'a plus de secret ;Des X à la DGSE : pour quoi faire?L'affaire Farewell.

DOSSIER COORDONNÉ PAR PHILIPPE LAURIER

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

La face légale : développer et exploiteret protéger un patrimoine d’information

L’intelligence économique cherche à la fois àprotéger et « enrichir ». Son pivot central estl’information, collectable par une action deveille, qu’on analyse, diffuse, transforme encompréhension, vision, parfois en décision…ou en absence de décision (Sartre dit que nepas choisir est un choix, qui ne nécessite pasmoins d’avoir été bien éclairé). La finalité estde se ménager son rythme décisionnel et, par-tant, sa capacité à jouer sa partition, à la vitessequi nous convient, quand il nous convient dela jouer : l’intelligence économique est le talentde se préparer un surcroît de liberté d’action.À ce titre, elle se dote des outils à disposition,de moteurs de recherche informatiques, deréseaux humains gérés par des cellules deveille ; elle organise l’entreprise ou l’État afinque l’information parvienne à la bonne per-sonne au bon moment. Au-delà de simplementcréer des « rencontres », faire en sorte que labonne question surgisse chez cette personne,une prise de conscience de son besoin de savoir,se remettre en cause. Si l’intelligence écono-mique ne permettait que de savoir douter, ellejustifierait par ce seul point les espoirs pla-cés en elle.

L’information s’élargit au patrimoine : nossavoirs individuels ou collectifs, les matéria-lisations de ce savoir (brevets, transferts detechnologie, partenariats), sa mise en œuvre(usines, équipes…), pour les coiffer par ce quicimente le tout, notre cohésion sociale (cimentinterne), susceptible d’attaques subversives,autant que notre réputation, notre image demarque (enduit externe).

Observez une rumeur de plan de licenciementet constatez que la cohésion, le rattachement

Une discipline multiforme,de l‘information à la décision

L’intelligence économique se veut une réponse ; plus qu’un corpus délimité ou une disciplineuniversitaire, elle s’est construite – empiriquement parfois – face à des besoins : gérer l’informationet les processus décisionnels, comprendre et maîtriser son environnement, protéger un patrimoineproductif et intellectuel, solidariser… ou désolidariser des groupes humains. Elle offre un outil– une boîte à outils – d’adaptation à une époque où la compétition économique sous-tend lesstratégies de coopération, de domination ou de survie, du local à l’international : coursetechnologique, aptitude à emporter des contrats, maîtrise des aléas (à l’exportation…), accèsaux «gisements de savoir-faire». En tant que réponse à des besoins, elle est multiforme et rejointde nombreuses sphères : cindynique (science des risques), techniques de communication,psychologie, droit des affaires, etc. Cette adaptation se retrouve dans les enseignements, chaquefois dédiés à des profils particuliers d’élèves.

PAR PHILIPPE LAURIER

enseignant àPolytechnique et

Télécom ParisTech

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

7

Une discipline enseignéeà Polytechnique

L’enseignement se présente sous la forme d’un

séminaire ouvert en 2006. Il diffère de ceux

d’autres écoles qui préparent plus aux postes

de chef de projet, et se focalisent sur la veille

commerciale ou technologique. Formant des

diplômés pouvant être appelés à des fonctions

stratégiques, le cours de l’X privilégie la gestion

et la protection de l’information sensible, l’étude

de rumeurs – vraies ou fausses –, les dangers

de déstabilisation d’entreprise ou d’équipe

dirigeante, de mise sous influence. L’occasion

de partager le vécu d’anciens venus témoigner.

p. 7 à 9 27/11/08 9:04 Page 7

à un sentiment d’identité et d’appartenancereprésentent un socle, à protéger par l’intel-ligence économique.

La face obscure : du légal à l’illégal

Le spectre couvert par l’intelligence écono-mique va du légal à l’illégal – ne serait-ce quepour s’en défendre. En 1993, le président Clintonordonna officiellement à ses services secretsd’appuyer les entreprises sur le gain de contratsà l’international, avec comptabilisation annuelledes emplois ainsi sauvés. Les services chinoisopérèrent leur conversion vers la même épo-que. Vladimir Poutine demanda publiquementle même soutien pour les entreprises russes.La France n’a pas fait exception, quoique lesmoyens soient plus légers. Le seul pays n’ayantpas requis ses services est le Royaume-Uni…qui n’en n’avait pas besoin car l’honorableIntelligence service est jumelé à la City deLondres depuis quatre siècles, aboutissant àune subtile osmose familiale, vague consan-guinité, à tout le moins convergence intellec-tuelle qui s’exonère de consignes explicites.

Sans s’y réduire, l’intelligence économiqueobserve ces phénomènes sulfureux, elle lestrace et en saisit la portée concurrentielle etsocio-économique : comment ne pas prendreen compte l’emprise de la Camorra sur l’in-dustrie napolitaine, alors que des entreprisesfrançaises y possèdent des filiales et négo-cient des contrats en gestion des eaux urbai-nes ? Comment oublier l’entrisme de sectesexotiques dans nos domaines nucléaires ouaérospatiaux, lorsque des pays « amis de laFrance » ont bâti de longue date des passe-relles entre leurs sectes et leurs services derenseignements, en vue d’instrumentaliserdes adeptes ou d’en convertir à l’intérieur deslaboratoires cibles ? L’ex-URSS en décompo-sition vit fleurir ces missions prosélytes prèsde centres technologiques possédant de beauxrestes de savoir sensible – les réacteurs d’avionsnotamment – pour apporter, qui en doute,réconfort et capacité d’écoute à des scientifi-ques désorientés par la chute de leurs réfé-rents mentaux.

Les pages des faits divers allongent au fil desannées la liste de détectives privés, d’offici-nes ou de retraités des services, égarés par-delà la bienséance : pose de microphones,

prestation en « sous-marin » chez le concur-rent, fouille de poubelles, vol de micro-ordina-teurs ou de ces agendas électroniques deve-nus l’organe communicant, mais aussimémorisant, de cadres soucieux de la der-nière mode.

Les pouvoirs publics français se sont inquié-tés du parcours inopportun emprunté par cer-taines messageries d’agendas, les faisant tran-siter par des pays membres du réseau d’écoutestéléphoniques Echelon (États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande).Les technologies de l’information ouvrent unvaste champ d’actions illicites : on considèrequ’un quart des communications Internet mon-diales font l’objet d’interception automatisée,par Echelon : peu le cousin de Carpentras,mais plus les décideurs économiques ou poli-tiques. L’accusation lancée en 2007 contre lesservices chinois, de pénétration informatiquedans les administrations allemandes, améri-caines ou néo-zélandaises, officialise une joute

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 20088

Le talent dese préparerun surcroît deliberté d’action

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

L’illusion des paradis fiscaux(Le paradis n’existe pas)

Le récent cas d’écoutes téléphoniques à grande

échelle par la CIA, à l’encontre du système de

télécommunications interbancaire SWIFT,

rappelle que le secret bancaire s’applique… au

client de la banque.

L’achat en 2008 par les services allemands, pour

cinq modestes millions d’euros, de listes de

clients bancaires au Liechtenstein, fait basculer

enfin dans la sphère de la lutte contre l’évasion

fiscale des données que divers services

collectaient depuis des décennies à des fins

inavouées.

Face au réseau Echelon et ses capacités de

pénétration dans les systèmes informatiques

bancaires (lesquels utilisent des logiciels ou

ordinateurs conçus souvent aux États-Unis),

divers paradis fiscaux deviennent ce qu’ils sont

en réalité : des convenances tolérées par les

Grands, des apparences de confidentialité qui

n’engagent que ceux qui veulent y croire,

déposants naïfs à qui l’on a instillé l’illusion que

telle île ou micro-État possède la pierre

philosophale, procédé apte à transmuter l’argent

sale en argent anonyme. Sans deviner que ces

paradis sont pénétrés par les meilleurs services

secrets capables de rétribuer leurs sources en

bon argent vraiment anonyme, sans comprendre

même que tel paradis fut créé avec la bénédiction

de tel service.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

à fleuret moucheté que se livrent ces servi-ces depuis une décennie.

Faut-il citer cette anecdote banale concernantun courrier Internet adressé en 2005 entre lesécoles des Mines et des Télécommunicationsde Paris ? L’analyse du parcours empruntérévéla son transit par le territoire des États-Unis, franchissant l’Atlantique, alors que deuxkilomètres séparent ces écoles. Le chemine-ment des tuyaux Internet, leurs capacités res-pectives, aboutit à ce que des routeurs jugentoptimal de faire effectuer 12 000 kilomètres.Avec un risque d’interception confraternelleinhérent à ce détour… Sauf à supposer que lesécoles d’application de Polytechnique n’inven-tent rien qui motivât des écoutes.

La dimension éthique et philosophique

Cette discipline a ceci d’atypique qu’elle englobel’enjeu de préservation des libertés et de la vieprivée – face aux risques d’écoutes –, les droitsde l’individu – contre les désinformations –, lesinstitutions – face au lobbying –, la propriétéintellectuelle – face à la contrefaçon ou la fal-

sification de données. Le cursus identique àl’École des ponts et chaussées s’intéresse auxmenaces de manipulation de cours boursiers :comment, qui, dans quels buts?

Pas d’intelligence économique sans rattache-ment à la géopolitique, à l’histoire des faits,des croyances, des techniques de lutte, jusqu’àla poliorcétique. L’incontournable «société del’information» a permis de prononcer en chairebien des bêtises et lieux communs, de prédiredes trajectoires erronées, toutefois elle s’ins-crit comme un phénomène de société, où lanumérisation de l’information transforme cesdonnées immatérielles en quasi-matière pre-mière, avec ce que cela suppose d’utilisationcomme de manipulation.

Savoir choisir

Au final se dégage une capacité à savoir choi-sir : quelles règles du jeu concurrentiel accep-tons-nous? Quels partenaires refusons-nous?Plus généralement, quelle société voulons-nous? Symbole de ce cadre de réflexion, le séminaire àl’X dépend du Département HSS, Humanités.

Un quart descommunications

mondialesintercepté

par Echelon

9

Le bon profil des praticiens

UNE INCOMPRÉHENSION généralisée entoure le plus souvent le terme et donc l’activité dite en France«d’intelligence économique», incompréhension doublée encore d’une incrédulité de bon aloi. Pourtant,rendre INTELLIGIBLE une question obscure, complexe, stratégique est une activité noble, respectable

et cruciale pour notre économie et le plus souvent parfaitement faisable.La pratique efficace et durable de cette intelligence économique (la «Competitive Intelligence» des Britanniques)est aujourd’hui possible et essentielle, avec un respect scrupuleux de la légalité. La formule favorite del’amiral Lacoste, « du renseignement à l’intelligence économique », montre assez qu’il ne s’agit plusd’espionnage ou de «récupération» d’informations brutes, mais plutôt de méthodes, d’ouverture d’esprit, derecoupements, de réflexion, d’humilité et d’analyse très intellectuelle mais aussi très concrète.La quasi-disparition des «officines», des «détectives privés», parallèle à l’immense croissance des moyensd’accès aux données et aux « informations» est passée par là. Dans ce contexte les qualités que l’on doitchercher pour pratiquer et faire pratiquer l’intelligence économique sont par ordre décroissant les suivantes :1. un profil personnel (par opposition à une compétence «technique»). Curieux, discret, imaginatif, rigoureuxmais aussi prudent, obstiné, organisé;2. une connaissance du milieu professionnel, dans lequel on évolue, sans laquelle les analyses ou lacompréhension des signaux apparaissent vite inappropriées;3. une crédibilité acquise qui crée la confiance, permet de travailler efficacement et de gérer les difficultésconjoncturelles sur les sujets sensibles.Mais cette simple énumération ne doit pas faire oublier que l’efficacité d’une activité d’intelligence économiquetient aussi autant aux caractéristiques du «système» mis en place, que des qualités de tel ou tel individu aussibrillant soit-il.Système qui se compose notamment :• des collaborateurs d’une équipe, où donc il importe de les regrouper de manière complémentaire tant il estvrai que chacun a ses «spécialités» et son bagage culturel et professionnel, mais aussi que la confrontationdes interprétations est au cœur de la qualité ;• des systèmes de recherche d’informations et de données, même si cela n’est pas l’objet de ce court texte;• et, bien sûr, même si on en parle moins, des personnes, sociétés et cabinets qui assurent des prestationsd’investigations et de remontées d’informations. Ici, la confiance qui se crée et la rigueur totale sont capitales,de part et d’autre.Et c’est bien des qualités de l’ensemble des éléments de ce «système» dont il faut parler pour obtenir un bonrésultat durablement.

Bertrand Deroubaix (X74), (PC79),

directeur de l’intelligence économique du groupe Total

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La conduite d’une entreprise exige de recueilliret d‘interpréter correctement une multituded’informations et d’en appréhender lesinteractions. Ce travail doit mobiliser toutesles compétences de l’entreprise à travers deséquipes pluridisciplinaires s’appuyant sur desméthodes rigoureuses. Une indispensableouverture au monde qui ne se limite pas auxentreprises : l’École polytechnique, commebien d’autres entités publiques, y estnaturellement amenée.

Piloter une voiture est certainement undes exercices les plus répandus dans le mondeet l’on considère qu’il est accessible à toutesles populations. Il impose cependant une dis-cipline stricte et sans appel : une attentionpermanente doit être portée à une foule d’in-formations, la route, les usagers, les bruits,les instruments. Il faut intégrer toutes cesinformations dans une perception globale dela situation, mais également interpréter lesmessages à partir de la connaissance du fonc-tionnement de la voiture ainsi que de l’état del’environnement. Enfin il faut anticiper de nom-breux paramètres.

Piloter une entreprise

Piloter une entreprise est un exercice d’uneautre nature, mais qui présente néanmoinsquelques similitudes. Il s’agit là aussi de pren-dre de bonnes décisions et pour cela d’exploi-ter au mieux la connaissance de l’entrepriseet de son environnement. Il faut bien entenduposséder à fond son métier, ses produits, sesclients et ses concurrents, en bref son domained’activité et ses perspectives d’évolution. Pourtout cela, il a suffi pendant longtemps d’expé-rience et de bon sens pour maîtriser des réa-lités familières.

Mais celles-ci sont devenues beaucoup pluscomplexes avec la mondialisation, la courseà l’innovation, la numérisation et la financia-risation. La mise en jeu de ces différents fac-teurs a changé les dimensions de l’entrepriseet de son environnement et a rendu l’exercicedu métier beaucoup plus difficile en créantdans tous les domaines des diversités, desinstabilités et des territoires inconnus. Uneméthodologie rigoureuse devenait nécessairepour les prises de décision de l’entreprise etplus particulièrement pour les décisions stra-tégiques ayant des effets à moyen et long terme.L’information utile pour éclairer ces décisionsétant beaucoup plus étendue, complexe et dif-ficile à interpréter on a créé les concepts de« competitive intelligence » et « d’intelligenceéconomique ».

Les différentes étapes de cette logique sontbien connues : rassemblement des informa-tions, validation, mise en cohérence et en pers-pective, compréhension. Vient ensuite l’exer-cice le plus hasardeux, celui de l’anticipationoù il est prudent d’établir des scénarios alter-natifs. Il y a déjà une quinzaine d’années quecette méthodologie a été mise en pratique dansde nombreuses entreprises. On y a d’ailleursassocié le concept corrélatif, celui de protec-tion de l’information générée par l’entreprise.Au-delà l’idée est venue à certains d’utiliserdes leurres comme instrument de déception,d’où le concept de « guerre économique ».

Des pratiques à améliorer et généraliser

On ne peut pas dire cependant que les princi-pes et les pratiques sont bien assimilés et quel’outil apporte toutes les satisfactions qu’onpourrait en attendre. L’actualité abonde d’exem-ples d’échecs et de crises imputables à deserreurs stratégiques grossières. Les unes sontdues à une mauvaise connaissance des réali-

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Connaissance et anticipationau cœur de la stratégie d’entreprise

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR HENRI MARTRE (47)

président d'honneurde l'Académied'intelligenceéconomique

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INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

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tés et d’autres découlent d’anticipations erro-nées liées à une insuffisante compréhensionde l’évolution de l’environnement et des acteurs.Les principaux défauts constatés viennent dumanque de compétences et de la subjectivitédes opérateurs, de la saturation des décideurset de l’inadéquation et la lourdeur des organi-sations (voir encadré). On arrive ainsi à préci-ser quelques orientations de base pour la gou-vernance des entreprises à vocation mondiale.La première est que Pic de La Mirandole estloin derrière nous et que seule une équipepluridisciplinaire est capable de maîtriser leprocessus conduisant aux décisions stratégi-ques. Encore faut-il que chacun dans sondomaine ait la compétence et la connaissancenécessaires à une excellente compréhensiondes réalités. La seconde est qu’il y ait un lienorganique permanent entre informateur etdécideur : l’informateur doit savoir quel est lebesoin, le décideur doit être alimenté en per-manence par les nouvelles fraîches et surtoutpar leur interprétation et leurs conséquencespossibles. Quand on parle d’informateur et dedécideur il faut bien comprendre qu’il s’agitd’équipes qui doivent vivre en parfaite sym-biose. Et c’est là que le bât blesse : on sait bienquel est le rythme d’un patron qui court lemonde et de combien de temps il dispose pourla concertation et la réflexion.

Libéralisme et dirigisme

Mais les pires difficultés sont devant nous. Lemonde ne cesse d’évoluer et il va bien falloirs’adapter à ses changements pour en tirerprofit. Le modèle occidental du libéralismeéconomique s’est progressivement répandudans l’ensemble du globe à la suite de l’échecdu communisme et nos grandes entreprises s’ysont parfaitement adaptées. Cependant ledéveloppement rapide des puissances émer-gentes est en train de modifier les équilibreséconomiques et leur influence ira en grandis-sant. Parmi celles qu’on rassemble sous levocable BRIC et qui pèsent de plus en pluslourd, la Chine et la Russie ont certes abandonnéle collectivisme pour vivifier leurs entrepri-ses, mais elles n’ont pas cessé d’être dirigis-tes. Elles se sont enrichies, ont accumulé desréserves et prennent le goût d’interventionsmassives dans la vie économique à traversleurs « fonds souverains ». Nous ne sommesqu’au début de cette évolution mais il faut s’at-

tendre à ce que les États pèsent de plus enplus sur les structures des entreprises. Lelibéralisme subsistera, mais le dirigisme sedéveloppera et il faudra bien en tenir comptedans la définition des stratégies. Au niveau del’intelligence économique, l’échange et laconcertation entre responsables publics etprivés deviendront incontournables.

Dans cette révolution de l’environnement éco-nomique des affaires, que devient notre Écolepolytechnique ? Eh bien, elle fait elle-mêmesa révolution ! Sous la conduite de dirigeantséclairés elle s’est complètement transforméeen quelques années pour s’adapter au XXIe siè-cle. Elle s’était certes modernisée, mais res-tait conforme à sa tradition : sélection sévère,enseignement scientifique de haut niveau pen-dant deux ans pour former des ingénieursgénéralistes susceptibles de se spécialiserpar la suite. Elle est maintenant devenue lecœur d’un vaste complexe universitaire inter-national associant enseignement et recher-che pour assurer la formation en quatre annéesd’une palette d’ingénieurs diversifiée à l’ex-trême. Cette transformation n’a été possiblequ’en tissant des liens de coopération avec ungrand nombre d’institutions françaises et étran-gères réparties à travers le monde. Diversificationdes recrutements, diversification des cultu-res, diversification des formations, diversifi-cation des compétences, l’École a su se recons-truire à l’image du monde de demain pourmieux l’appréhender. C’est un bel exerciced’intelligence économique et nous ne pouvonsque souhaiter qu’elle maîtrise complètementcette complexité.

Pic de LaMirandole

est loinderrière

nous

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Quelques écueilsde l’intelligence économique

Prendre ses désirs pour des réalités.

Écarter l’information qui fâche.

Négliger les signaux faibles.

Prendre des vessies pour des lanternes.

Rester insensible aux incohérences.

Oublier les différences de civilisation.

Ne pas se mettre à la place de l’autre.

S’isoler dans sa tour d’ivoire.

Retenir l’information comme un bien personnel.

Décider sans consulter les compétences.

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La compétition économique est désormaisplanétaire. La conquête des marchés et destechnologies a pris la place des anciennesconquêtes territoriales et coloniales. Les armess’appellent innovation, productivité, tauxd’épargne, consensus social et degréd’éducation. Les défenses se nomment droits dedouane, protections monétaires et entraves aucommerce international. Les combattants,Japon, États-Unis, Europe, Chine, Russie, maisaussi tiers-monde, s’affrontent sans merci.

Nous vivons désormais en état de guerreéconomique mondiale, et il ne s’agit pas seu-lement là d’une métaphore militaire. L’objetde cette guerre est, pour chaque nation, decréer chez elle emplois et revenus croissants,parfois au détriment de ceux de ses voisins.Au-delà du formidable accroissement du com-merce mondial qui en est la manifestation laplus éclatante, la guerre économique imposeégalement des débarquements chez « l’en-nemi» par implantation à l’étranger, la défensede l’arrière par des entreprises à caractèrerégional et l’établissement de protections.

Aujourd’hui, sur chaque méridien du monde secroisent des navires chargés des mêmes pro-duits et cette boulimie d’échanges de produitsindustriels, 10000 milliards de dollars annuel-lement, probablement 15000 si l’on y ajoute lesservices et les invisibles, démontre que lesnations se livrent une compétition effrénée quia toutes les caractéristiques d’une guerre dontles acteurs seraient les entreprises et les fir-mes multinationales qui, par le biais de leurimplantation industrielle et scientifique à l’étran-ger, consolident leurs exportations.Les nations qui gagnent sont celles qui réus-sissent à avoir un commerce extérieur suré-quilibré et important par rapport au PNB (cesdeux caractéristiques allant souvent de pair).Et les morts de la guerre économique sont leschômeurs et les misérables, les exclus de lacroissance.

Équilibre et stimulationCette compétition a deux caractéristiques ; lapremière est celle « d’un jeu à somme nulle »car les surcroîts d’exportations de certainesnations sont compensés par les déficits de labalance du commerce extérieur des autres.Quand le Japon ou l’Allemagne surexportent,d’autres pays, dont hélas la France, ont undéficit significatif de leur commerce extérieurmais, au total, au niveau de la planète, les cho-ses s’équilibrent.Mais, c’est aussi et surtout un jeu à sommepositive dans la mesure où le commerce inter-national stimule le développement économi-que et constitue l’une des principales causesdu formidable enrichissement moyen des paysdéveloppés de la planète que nous avons connuau cours des trois dernières décennies. Etmême d’un certain nombre de pays du tiers-monde qui en ont profité pour décoller.

Le veau d’or de la consommationPartout dans le monde le maître mot est le« pouvoir d’achat ». Et il indique que le besoinde consommer recouvre une compétition, voire

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La guerre économiqueest planétaire

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR BERNARD ESAMBERT (54)

ancien conseillerindustriel etscientifique deGeorges Pompidou;ancien président du Conseild’administration del’École polytechnique;ancien présidentde l’Institut Pasteur

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INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

REPÈRESPaul Louis a publié en 1900, en feuilleton, La Guerre

économique * qui contenait nombre des idées contem-

poraines sur ce sujet. Maurras écrivait « Les autres nous

font la guerre économique. » Louis Renault a utilisé

l’expression dans les cahiers de sa société, vers 1920.

En 1935, le président Roosevelt, dans un discours prononcé

à Atlanta, a proposé au chancelier Hitler « Faisons-nous la

guerre commerciale, la guerre qui nous enrichira tous,

plutôt que la guerre qui meurtrit les chairs. » En 1941, c’est

Hitler lui-même qui utilisera l’expression « Il n’y a plus de

guerre économique en Allemagne », la lutte des classes

dans son esprit.

* L’auteur de ces lignes croyait avoir inventé l’expression

en 1971, qu’il a abondamment utilisée vis-à-vis des élèves

de l’X en les qualifiant d’officiers de la guerre économique.

Il s’est récemment découvert quelques prédécesseurs.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

une guerre. Avec une économie de l’offre etde la demande abondante, on assiste à l’avè-nement du client-roi pour qui la consomma-tion est indissociable du bonheur. Les acteursdu changement de ces quarante dernièresannées ont donc été les consommateurs quisacrifient au veau d’or de la consommation –les richesses accumulées par les plus richesn’ont plus aucun rapport avec leurs besoinsréels – avec la ferveur et l’intensité que d’au-tres générations réservaient à des causes plusexaltantes.Mais les excès des uns ne condamnent pasnécessairement les effets bienfaisants de lacompétition internationale pour le plus grandnombre.

Cette compétition devra pourtant s’assagir : sil’on extrapole la situation actuelle, le commerceinternational, qui représente déjà le tiers de larichesse produite annuellement sur la planète,devrait en représenter les deux tiers vers 2020et l’humanité travaillera trois jours sur troispour l’exportation dans quarante ans. En France,toute notre production de biens et services seraexportée, tandis que nous importerons l’équi-valent de la richesse produite par notre pays. Uneasymptote se dessine à l’horizon.

LES ARMES

L’innovationL’arme la plus importante c’est l’innovationqui n’est pas sans lien avec la recherche-déve-loppement car c’est par l’innovation que l’onacquiert des positions stratégiques sur le mar-ché mondial.Cette arme est importante au niveau des entre-prises, c’est-à-dire au niveau microéconomi-que. Elle l’est, bien sûr, au niveau macroéco-nomique et donc au niveau des États cette fois.Les nations qui ont un taux de recherche-déve-loppement important, surtout quand celui-ci estorienté vers la recherche appliquée, se por-tent mieux et portent plus haut leurs couleursdans la compétition internationale.

La productivitéLa deuxième munition de la guerre économi-que est la productivité. Cela semble évident. Celal’est un peu moins si l’on regarde les chosesde plus près, au travers de l’exemple suivant.La compétitivité de l’industrie française estsupérieure dans de nombreuses branches àcelle de l’industrie germanique. Mais lesAllemands exportent bien davantage que nous.Dans la guerre économique, comme d’ailleursdans d’autres formes de guerre, la ténacité, lacontinuité, la persévérance jouent un rôle impor-tant. Cela fait quarante ans que l’Allemagnedéveloppe un potentiel industriel de qualité avecl’appui de puissants réseaux commerciaux et demaintenance à l’étranger, lesquels ont créé laréputation de qualité des produits allemands.Cette réputation est telle aujourd’hui que lesproduits germaniques peuvent se vendre pluschers que les produits concurrents, cet écartde prix faisant plus que compenser les écartsde prix de revient liés à la productivité.

Le commerceinternational

stimule ledéveloppement

économique

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Les malheurs de la guerre

Aux États-Unis, par exemple, des pans entiers de

l’industrie ont disparu en conséquence de cette

compétition effrénée à laquelle se livrent les

entreprises et les nations au niveau planétaire :

une partie de l’électronique, de l’industrie

automobile, sans parler, bien sûr, des secteurs

qui ont sombré depuis longtemps, comme celui

des appareils photographiques, des motos et

quelques autres. Des centaines de milliers

d’emplois ont été détruits. La métaphore

militaire n’est pas trop forte. On retrouve là

la destruction créatrice de Schumpeter.

Un effet bienfaisant

En trente ans, l’écart entre les revenus moyens

des plus pauvres et des plus riches a doublé. Les

dix plus grosses fortunes de la planète

représentent la richesse de la totalité des pays

les plus pauvres. Mais en sens inverse, moins de

deux Asiatiques sur dix vivent aujourd’hui dans la

misère contre six sur dix en 1975.

Croissance et R&D

Il y a une corrélation très étroite entre le taux de

croissance d’une nation à long terme et le taux de

croissance de la recherche-développement, ainsi

qu’entre le taux de croissance du PNB et le taux

de R&D rapporté à ce PNB. Ce qui veut dire que

les nations qui ont un taux de recherche-

développement de 3 % par rapport à leur PNB,

objectif que toutes les nations développées

cherchent à atteindre, se comportent mieux sur

le long terme que celles qui en restent à un taux

de 2 %.

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Le taux d’épargneLa troisième munition est le taux d’épargne.Au niveau des entreprises, un taux d’épargnenational élevé se traduit par le fait que les entre-prises trouvent à financer leurs investisse-ments. Au niveau macroéconomique, une mai-gre épargne, mobilisée en priorité par l’immobilieret certains services, n’irrigue pas suffisammentles secteurs industriels. On sait qu’il y a unecorrélation entre le taux d’épargne à long termedes nations et le taux de croissance du PNB.

Le consensus socialQuatrième atout, le consensus social qui fait que,dans une entreprise, les travailleurs, l’encadre-ment, l’animation ont foi dans le développementde la communauté dans laquelle ils travaillent.Ils marchent du même pied, ce qui permet cettecontinuité qui paraît jouer un rôle important dansla guerre économique. C’est vrai bien sûr auniveau de la nation qui doit, elle aussi, pratiquerun minimum de consensus social pour bien secomporter dans cette forme de compétition.

Le degré d’éducationPlus le niveau d’éducation générale d’unenation est élevé, cohérent, homogène, et pluscette nation est capable de donner les coupsde collier qui s’imposent, de réagir avec l’in-telligence et le degré de mobilisation néces-saires. Dans ce domaine encore, l’exemple duJapon a été particulièrement éclairant.

LES DÉFENSES

Les droits de douaneLa première protection, bien sûr, est celle desdroits de douane. Il y a cinquante ans, cette bar-rière était importante. Elle pouvait représen-ter plus de 40 % des prix des produits.Aujourd’hui, l’Uruguay Round a réduit les droitsde douane résiduels à quasiment zéro et aamorcé l’extension de ce désarmement auxservices et aux produits agricoles qui n’étaientpas visés par les négociations antérieures. Il adébouché à Marrakech sur la création d’uneOrganisation mondiale du commerce (OMC) ausein de laquelle sont ou devraient être débat-tus les problèmes du commerce international.

Les protections monétairesÀ partir du moment où les protections doua-nières se sont quasiment évanouies, une nou-velle forme de protection a fait son apparition

en 1971, époque à laquelle Richard Nixon, voyantapparaître un déficit important du commerceextérieur pour la première fois dans l’histoiredes États-Unis, a dévalué le dollar (une deuxièmedévaluation du dollar en 1973 a ouvert la voie auflottement général des monnaies). C’est par desemblables dévaluations que beaucoup de paysse sont, depuis, protégés d’échanges trop agres-sifs qui auraient conduit un certain nombre desecteurs industriels à en subir les effets dévas-tateurs. On sait pourtant maintenant qu’aucontraire il faut avoir épisodiquement une mon-naie forte et stable, qui oblige à des surcroîtsd’efforts bénéfiques pour le tissu économiquede la nation.

Les entraves au commerce internationalLa troisième forme de protection est de naturenon tarifaire. Il s’agit des entraves de toutenature au commerce international. Le GATTen avait recensé 6 ou 7 000.

En matière de norme, le florilège des protec-tions nées de l’imagination humaine est sanslimite dès lors qu’une industrie est menacée. Dansle début des années soixante-dix, les réfrigé-rateurs français fabriqués par les firmes Brandtet Thomson se voyaient soumis à une forteconcurrence des réfrigérateurs Zanussi d’ori-gine italienne. Bien entendu, les Français accu-saient les Italiens de dumping et appelaient ausecours les pouvoirs publics. Ceux-ci ont mis enœuvre à l’époque une norme de dimensions etde thermicité pour les réfrigérateurs, interdi-sant ainsi l’importation de réfrigérateurs ita-liens. Mais les ingénieurs transalpins, dont onconnaît l’agilité d’esprit, ont mis moins de troismois pour fabriquer des réfrigérateurs aux nor-mes françaises qui ont de nouveau déferlé surnotre marché.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 200814

La réputationde qualitédes produitsallemandsleur permetde se vendreplus cher queles produitsconcurrents

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

Buy American

Les Américains appliquaient il y a quelques

décennies leurs droits de douane, non pas sur

le prix des produits importés, mais sur le prix du

produit américain le plus cher du secteur, ce qui

permettait de gagner déjà ainsi 20 à 30 % sur

l’assiette. Il s’agit de «l’American selling price».

Aux États-Unis toujours, il y a eu un «Buy

American act» qui a interdit, par exemple,

d’importer un centimètre de fibre susceptible

d’entrer dans la confection d’une paire de

chaussettes, qui pourrait elle-même être utilisée

par l’armée américaine.

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LES NATIONS COMBATTANTES

Le JaponLe Japon est la nation qui pendant trois décen-nies a porté au plus haut ses couleurs danscette forme de conflit. Tout s’est passé commesi les Japonais avaient tenté de prendre uneforme de revanche après la guerre sur lesEuropéens et sur les Américains. Quand onpasse en revue les atouts dont ils ont disposédans la guerre économique jusqu’à la fin desannées quatre-vingt, force est de constaterqu’ils les possédaient tous au plus haut degré.Du côté de la recherche-développement, le tauxde R&D du Japon a presque atteint 3 % du PNBalors que nous en sommes à un peu plus de2 %. Le taux d’épargne y était très élevé (la nationfourmi…). Enfin, le consensus social est total.

Les États-UnisÀ l’autre extrémité du spectre, les États-Unisdisposaient de munitions de mauvaise qua-lité : la productivité y était une des plus faiblesdu monde développé, le taux de recherche-développement également. S’agissant duconsensus social, on pouvait plutôt parler dedéchirure. Mais les facultés de rebond desAméricains sont immenses quand le pays estmenacé. Ce sera le cas à partir du début desannées quatre-vingt-dix quand la croissancede l’Amérique s’accélérera et dépassera cellede l’Europe d’un bon demi-point par an. Aumême moment, le Japon entrera dans unestagnation dont il n’est toujours pas véritable-ment sorti.Ainsi, ces deux nations nous ont-elles démon-tré que la guerre économique n’est jamaisdéfinitivement gagnée ni perdue.

L’EuropeEn Europe, la Grande-Bretagne a décliné régu-lièrement depuis la fin de la Seconde Guerre

mondiale par rapport aux autres nations euro-péennes. Son renouveau depuis une vingtained’années n’en est que plus spectaculaire.L’Allemagne, comme le Japon, possède tou-tes les munitions de la guerre économique.Toutes les volontés sont concentrées vers cettenouvelle forme de conquête. L’intégration del’Allemagne de l’Est a toutefois amoindri untemps le dynamisme de l’ensemble.Quant à la France, elle est alternativementdans un camp et dans l’autre, avec une pério-dicité d’une moyenne de dix ans (qui varie entresix et treize ans). Nous sommes constants,sérieux, raisonnables pendant plusieurs années,puis légers et frivoles au cours des annéessuivantes, tout cela n’ayant pas forcément àvoir avec les clivages politiques.

La Chine et la RussieQuant à la Chine où le maoïsme a détruit desdizaines de millions de Chinois mais aussi desformes de rigidité ancestrales qui limitaienttoute forme de développement, on peut diag-nostiquer qu’elle ne se satisfera pas longtempsde son statut d’atelier du monde et qu’elle sevoudra temple de l’intelligence. Le bouillonne-ment des universités en témoigne.Restera à observer la Russie qui combine tantbien que mal un libéralisme ouvert à tous lesexcès et un impérialisme hérité du stalinismequi a détruit « upper-class » et paysannerie.

Plus le niveaud’éducation

généraled’une nation est

élevé et pluselle est capable

de réagir

15

Les théières espagnoles

Nos amis espagnols boivent curieusement plus

de thé que les Britanniques et ils consomment

donc plus de théières. Une norme espagnole

spécifie que les théières utilisées en Espagne

doivent résister à une chute de dix mètres et à

une surpression d’un bar, ce qui semblerait

accréditer l’idée que les lois de la physique ne

sont pas tout à fait les mêmes de part et d’autre

des Pyrénées!

Le tiers-monde aussi

Les nations en voie de développement jouent un

rôle non négligeable dans la compétition

économique mondiale. Une partie du tiers-monde

est déjà immergée dans cette compétition,

s’agissant d’un certain nombre de pays d’Asie du

Sud-Est qui ont dépassé depuis longtemps le

stade du décollage grâce notamment à un accès

privilégié au marché américain, ou de certains

pays africains qui arrivent à faire croître leur

PNB légèrement plus rapidement que leur

population et qui profitent ainsi, mais

marginalement, des avantages de la guerre

économique. Pour les pays en voie de

développement, la recette du développement est

maintenant connue. Elle peut se résumer ainsi :

éducation, libéralisme économique, démocratie

politique et accès aux marchés des pays

développés.

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Comparé au réseau français, le dispositifjaponais de développement des entreprisesjaponaises à l’étranger est clair et cohérent. Ledispositif français est cependant engagé dansun grand nombre de réformes : meilleurciblage des destinations et des services rendus,rationalisation du réseau, meilleure articulationavec les chambres de commerce.

L’action de l’État en faveur du développe-ment international des entreprises est assu-rée principalement par l’agence Ubifrance,sous tutelle du ministère de l’Économie, del'Industrie et de l’Emploi, et dans une certainemesure par la Coface ; côté japonais, elle estassurée par le Jetro, organisme sous tutelledu ministère de l’Économie, du Commerce etde l’Industrie (METI).Ubifrance et Jetro ont un statut d’agence dis-posant d’une certaine autonomie et les dotantde moyens budgétaires dans le cadre de contratspluriannuels conditionnés – plus ou moins –à l’atteinte d’un certain nombre d’objectifs.Mais des différences existent clairement entreles deux.

Développement et promotionLe Jetro regroupe à la fois les missions de déve-loppement des entreprises japonaises à l’étran-ger et de promotion de l’investissement étran-ger au Japon (campagne Yokoso Nikon) alorsque la valorisation de l’attractivité du territoirerevient en France à un autre EPIC, l’Agencefrançaise pour les investissements internatio-naux (AFII). Même si Ubifrance et l’AFII sontinstallées aujourd’hui sur le même site à Paris,boulevard Saint-Jacques, chacune dispose d’unegouvernance, d’un management et d’objectifspropres, à cela près qu’à l’étranger les Missionséconomiques peuvent être amenées à repré-senter les deux entités (cf. infra).

La taille des réseaux à l’étrangerUbifrance est forte, depuis sa création en 2003,à la suite de la fusion de l’Association Ubifrance(ex-CFME ACTIM) et du Centre français ducommerce extérieur (CFCE), d’un effectif deprès de 600 personnes qui se concentrent surdeux sites, Paris et Marseille.Pour sa représentation à l’étranger, Ubifrancerepose sur le réseau des Missions économi-ques 1, les bureaux du Minefe situés au sein desambassades de France, doté de 2000 person-nes environ sur 150 sites dans plus de 100 payset dont un millier est dédié exclusivement àl’appui aux entreprises (collecte d’informationsur les marchés, missions B to B, organisa-tion de séminaires et salons). Une réformeimportante est engagée qui organise dans lesdeux années à venir la dévolution à l’agenceUbifrance des personnels des ME consacrés àl’appui aux entreprises pour constituer unevéritable « chaîne de valeur » au service desexportations et des investissements français.Le Jetro dispose, quant à lui, de 800 agents àl’étranger implantés sur 73 sites dans 54 paysclairement identifiés en fonction de leur impor-tance pour le commerce extérieur japonais.Le dispositif japonais est donc plus compact

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Deux approches comparéesd’appui aux entreprises,en France et au Japon

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR JEAN-YVES BAJON (80)

ancien responsable dela Mission économiquede Tokyo

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INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

REPÈRESLa préoccupation des autorités françaises auxquestions d’intelligence économique a pris del’ampleur depuis plusieurs années, avec lerapport du député Carayon et la mise en place duHaut responsable en charge de l’intelligenceéconomique (HRIE), rattaché aux services duPremier ministre et qui coordonne de façoninterministérielle la politique française dans cedomaine. L’ensemble des facettes de l’actionpublique et des parties prenantes est bien décritsur le site du HRIE :www.intelligence-economique.gouv.fr

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avec un focus plus précis, même si l’initiative« pays cibles » lancée en 2003 par FrançoisLoos alors ministre délégué au Commerceextérieur a permis de focaliser un peu plusl’action du réseau public français.

Le maillage localUn des autres grands chantiers qui ont étéengagés par l’agence Ubifrance est celui desa représentation sur le territoire français.Hormis quelques agents détachés au sein desdirections régionales du Commerce extérieur,Ubifrance n’a pas de maillage de proximitépour aller au-devant de ses clients en régions.Plus grave, il existe une concurrence histori-que et latente entre le réseau public d’une part(Ubifrance et les ME) et celui des chambresde commerce françaises en France, fédéréespar l’Association française des CCI (ACFCI), età l’international, fédérées par l’Union des CCIfrançaises à l’étranger (UCCIFE). Sans oublierle développement des services des collectivi-tés locales et territoriales (Agences régiona-les de développement notamment).Un des objectifs prioritaires du secrétaire d’Étataux Entreprises et au Commerce extérieur estdonc d’optimiser cette importante ressourceet de faire en sorte que ces structures fonction-nent mieux entre elles en consacrant, dans un

cadre conventionnel, leurs points forts res-pectifs, réseau international des uns et connais-sance du tissu local des autres, pour offrir,dans le meilleur des mondes, une sorte de« one stop shop » organisé en réseau au ser-vice de toutes les entreprises françaises.Le Jetro, quant à lui, dispose de 800 person-nes réparties entre le siège tokyoïte et 35 bureauxsitués dans les plus grandes villes japonaises.Le Jetro est donc une organisation complèteet dont on n’entend guère dire qu’il est en riva-lité avec les services des collectivités localeset avec ceux des chambres de commerce japo-naises, notamment parce que celles-ci ne fontpas de l’appui aux PME leur priorité. À titred’exemple, la CCI française au Japon compte550 membres alors que la CCI japonaise enFrance est un club de représentants de 150 gran-des entreprises environ ; par comparaison, lemontant annuel des exportations françaisesvers le Japon est de 5,5 milliards d’euros alorsque celui des exportations japonaises vers laFrance est d’environ le double.

La question des PMELe débat sur le commerce extérieur en France,crucial en ces temps de déficit croissant, estintimement lié, en matière de politique publique,à l’appui aux PME. Les politiques françaises en

Constituer dansles trois ans

une véritable« chaîne devaleur » auservice desentreprises

17

Une universalité théorique

Le service prodigué par le réseau français demeure

encore largement universel dans l’esprit : tous les

produits pour tous les clients dans tous les pays,

même si l’état des effectifs et des moyens rend

cette description théorique et justifie l’application

progressive du principe de réalité : Ubifrance

n’aura à terme des équipes dédiées que dans les

pays les plus pertinents pour y délivrer les services

les plus appropriés.

Un problème de croissance

Nombre d’études l’ont souligné, les entreprises

françaises ont un problème « génétique » de

croissance. Les PME françaises sont, par

comparaison avec leurs homologues allemandes

mais aussi japonaises, plus « petites » que

« moyennes ». Or l’exportation nécessite des

structures qui ne sont pas à la portée de tous,

surtout pour l’approche des marchés lointains

comme ceux d’Asie.

Les Japonais sont des maîtres en précision.

D.R.

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la matière ont donc toujours été des politiquesde volume, visant à emmener plus d’entrepri-ses à l’export (environ 100000 exportateurs àl’heure actuelle), et notamment plus de PME. Pourautant, deux arguments se sont fait jour cesderniers temps. D’une part, le chiffre du com-merce extérieur est fait principalement par unpetit nombre de grandes entreprises et sou-vent dans le cadre d’échanges intragroupes :plus de PME exportatrices voudra donc surtoutdire plus d’emplois, ce qui n’est pas négligea-ble, mais pas nécessairement une augmenta-tion significative des exportations.D’autre part, la comparaison avec l’Allemagnemontre que celle-ci dispose d’un «Mittelstand»d’entreprises moyennes, robustes, qui consti-tuent le fer de lance de l’exportation en biensd’équipement dont l’offre et la qualité répon-dent bien à la demande des pays émergents.C’est cette catégorie qui, a contrario, fait défautau tissu français.Côté japonais, la politique en faveur des PMEest plus conçue dans le sens de la revitalisa-tion des régions et des territoires que dans lesens du soutien aux exportations, sujet quin’est d’ailleurs pas un problème fondamen-tal puisque le Japon continue de réaliser desexcédents commerciaux confortables y com-pris avec la Chine. Le sujet des délocalisations

ne fait d’ailleurs guère débat au Japon. LeJetro est donc engagé dans des politiques plusqualitatives que quantitatives.

Un réseau de créditLe panorama français ne serait pas completsans évoquer l’autre « vaisseau amiral » del’appui à l’internationalisation des entrepri-ses qu’est la Coface. Leader français de l’as-surance-crédit, de la gestion de créances, del’information de la notation commerciale d’en-treprise, la Coface est une entité privée, filialede Natixis, mais qui continue d’exercer pourle compte de l’État la gestion d’un certain nom-bre de procédures comme l’assurance pros-pection ou l’assurance-crédit moyen termeregroupées au sein de la Direction des garan-ties publiques. Avec 93 bureaux en propre eten partenariat dans le monde, la Coface est àla tête d’un réseau Credit Alliance et d’un sys-tème mondial d’information, de notation @ratinget de mise en relation entre 60 millions d’en-treprises.Il ne fait pas de doute que le partenariat publicprivé construit autour de la Coface est de natureà constituer un relais d’avenir pour les entre-prises françaises qui veulent exporter et s’im-planter à l’étranger.

Des problèmes structurelsEn conclusion, le dispositif français d’appui audéveloppement international des entreprisesest actuellement engagé dans un grand nom-bre de réformes : meilleur ciblage des desti-nations et des services rendus, rationalisationde son organisation de réseau, meilleure arti-culation avec les chambres de commerce.Mais il demeure un certain nombre de problè-mes structurels à résoudre pour redonner savocation exportatrice à la France : difficultédes PME à croître en effectifs pour se doterde services exports dédiés, ajustement de l’of-fre de produits et de services pour répondre àla demande des pays émergents, existenced’opérateurs et d’intermédiaires de commerceprivés puissants pour venir en appui à ceuxqui sont moins armés dans la compétition mon-diale. Autant de problèmes aigus que la crisefinancière ne fait que renforcer.

1. www.missioneco.org

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Il existe enFrance uneconcurrencehistorique etlatente entrele réseau publicet celui deschambres decommerce

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

Les maisons de commerce

Un chaînon est manquant du côté français, celui

des maisons de commerce. Le développement

international des entreprises nécessite des relais

d’information, de contact, de lobbying, d’influence

et même les pays les plus libéraux (États-Unis,

Grande-Bretagne) ont des dispositifs publics

d’appui à l’international très importants. Le

gouvernement français exerce une pression sur sa

propre organisation pour pallier le problème de

taille critique des PME françaises et aider le plus

grand nombre dans un contexte de mondialisation

croissante et de déficits qui se creusent.

Le Japon a, quant à lui, su organiser un dispositif

public clair et cohérent, apparemment sans rivalité

avec les autres instances, consulaires notamment.

Mais il dispose aussi d’un atout important : ses

maisons de commerce. En sus du réseau du Jetro,

les ramifications très importantes de celles-ci

assurent autant de débouchés à un très grand

nombre de PME japonaises qui n’ont pas

nécessairement les moyens de prospecter par

elles-mêmes.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Le cyberespace, espace virtuel contenantdes sociétés artificielles, peut se définir commeun espace social d’interaction entre une tech-nologie – la numérisation de l’information et lesprocessus de communications de celle-ci – etun ensemble d’êtres humains interagissant avecces techniques. Il est la marque la plus écla-tante de la globalisation de l’économie mais aussile miroir parfois déformant des instabilités d’unmonde secoué de convulsions permanentes. Lessystèmes et réseaux informatiques sont devenusdes outils indispensables pour les tâches criti-ques de la vie professionnelle et parfois mêmede la vie privée.L’intelligence économique – pour certains laforme légale de l’intelligence, dans son accep-tion anglo-saxonne de renseignement ou d’es-pionnage – a trouvé, dans cette infosphère, unchamp d’action nouveau à la fois dans sa dimen-sion temporelle d’immédiateté, dans sa dimen-sion spatiale qui embrasse le monde et dans sadimension cognitive qui fait renaître l’esprit ency-clopédique.

L'arme du renseignement numériquestratégiqueLe renseignement qu’il soit étatique ou privé,qui joue des ambiguïtés et des faiblesses d’undroit international numérique largement àconstruire, a résolument investi le cybermonde.Au-delà des légitimes motivations de sécuriténationale, le renseignement numérique straté-gique est devenu une arme de la «guerre éco-nomique» qui provoque d’abord de la distorsionde concurrence quand il n’est pas parfois lemoteur principal d’un développement industrielfondé sur la contrefaçon.

L’intelligence économique numérique (IEN) pro-cède en premier de l’ensemble des technologiesinformatiques automatisant aussi loin que pos-sible la pyramide classique du renseignementqui va de la donnée brute à la synthèse intelli-gente. La maîtrise de ces technologies est unfacteur essentiel de compétitivité. L’innovationdans les techniques de fouille informationnelleou «data mining» est très active et féconde. Au-

Trois théorèmes pourcaractériser le cyberespaceÀ la fois monde nouveau et reflet du monde réel, le cyberespace constitue un champ privilégiépour l'exercice de l'intelligence économique. Comprendre cette infosphère est un préalable àla définition et mise en œuvre d'une vraie stratégie en la matière. Cette appréhension peuts'articuler autour de grands principes structurants qui ont une force comparable à celles desthéorèmes en mathématiques.

PAR PHILIPPE WOLF (78)

sous-directeur« Télécommunicationset Réseaux Sécurisés»

au sein du SGDN, ilenseigne l'intelligence

économique au seindu départementd'enseignementet de rechercheen humanités et

sciences sociales del'École polytechnique

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

19

La cryptographie

La cryptographie est la seule technique disponiblepour protéger l’information en confidentialité eten intégrité. Elle réalise une réduction d’entropiesur les données à protéger grâce à de multiplesclés (une clé = un usage) qu’il s’agit de gérercomme les seuls secrets du système d’information.La gestion de ces clés est un art difficile quinécessite une organisation rigoureuse qui sesatisfait mal d’une externalisation trop poussée oud’un recours à des solutions toutes faites.La cryptographie n’est pas la solution miracledécrite par certains car elle doit s’accompagnerd’une véritable politique de sécurisation enprofondeur des systèmes d’information.Ainsi, pour souligner les difficultés de toute natures’opposant à une utilisation maîtrisée de cettetechnique, l’usage de la signature électronique dite« qualifiée », huit ans après la directivecommunautaire, reste marginale en France.La cryptographie reste cependant au cœur desproblèmes de gouvernance d’Internet. La créationd’autorités européennes de certification pourl’ensemble des logiciels de communication(messagerie, navigateur…) commercialisés enEurope – une des mesures préconisées par laCommission européenne pour la libération de lacroissance française – est toujours différée.

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delà des outils, l’intelligence humaine et ses fail-les y occupent, bien sûr, une place centrale. Maiscet essor numérique s’est accompagné d’un déve-loppement des menaces liées à de nouvelles for-mes de criminalité allant des actions quotidien-nes du cybervandalisme ou du cybercrime auxmodes d’actions cachées de la cyberguerre oudu cyberterrorisme – s’il existe ailleurs que dansles romans ou dans les films – bien plus diffici-les à caractériser ou à reconnaître. La dimen-sion duale du recueil de renseignements consisteaussi à faire face à ces nouveaux risques.

Les caractéristiques du cyberespaceIl convient avant d’aborder, dans l’article sui-vant, le recueil et le traitement de l’informationnumérique et la protection de ses propres sys-tèmes d’information, de mieux comprendre lanature profonde du monde numérique et destechnologies qui l’animent. Car, sans capacitéde protéger son propre patrimoine information-nel, aucune action d’intelligence économiquenumérique ne peut être vraiment efficace.Trois «théorèmes» peuvent caractériser le cyber-monde.

Théorème 1 :toute information n’est pas bonne à numériserUn fichier numérique se clone parfaitement. Il s’agitlà d’une tautologie mais certains comportementsnumériques feignent de l’ignorer, même quandcela touche à l’intimité ou à l’affectif. Une infor-mation, dès sa numérisation achevée, peut êtredupliquée à l’infini. Sa publication sur Internetlui procure instantanément une diffusion glo-bale et une rémanence qu’il est impossible demesurer. Cela ne signifie pas que l’informationest éternelle et une bonne politique d’IEN sepréoccupe aussi, au-delà des problèmes de for-mats numériques retenus, des formats physi-ques de stockage de ces données numériqueset du problème de l’entretien de ces stocks numé-riques sur des supports qui subissent des dégra-dations et des altérations. Signalons d’ailleurs quela normalisation des formats numériques estaujourd’hui l’objet d’une bataille frontale entreles tenants des formats libres et ceux des for-mats propriétaires. Elle prolonge les débats hou-leux autour des brevetages logiciels. Ce clonagefavorise les fuites d’information organisées ou acci-dentelles qui prennent parfois un retentisse-ment que ne compense que la volatilité extrêmedes points d’intérêt. Toutes les manipulationssont possibles sur les réseaux numériques

ouverts. Le faux y côtoie le vrai sans que le recou-pement des sources ne permette, comme dansle renseignement traditionnel, une véritable qua-lification de la fiabilité de l’information. Enfin lesrumeurs, les «traficotages de listings» et autrescanulars peuplent le cybermonde avec des consé-quences parfois démesurées comme des mani-pulations de cours en Bourse ou des déstabili-sations de cadres d’entreprise.Notons d’ailleurs que l’underground de l’Internet(siège des échanges interpersonnels) recèle unemasse d’informations non visibles directementsur les navigateurs usuels mais accessibles pardes outils largement diffusés. Au-delà des échan-ges de fichiers sous droits d’auteur (musiques etfilms), ces logiciels permettent la diffusion d’unsavoir-faire autrefois couvert par le secret. Ontrouve par exemple sur Internet, pour qui saitfouiller, des recettes d’explosifs et des boîtes àoutils permettant de construire des pièges infor-matiques. On peut y acheter également, par desventes en ligne qui se jouent des frontières etparfois des lois locales, toute la panoplie des

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Toutes lesmanipulationssont possiblessur les réseauxnumériquesouverts

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

L’avance américaine

La politique «d’information dominance», prônéepar les États-Unis depuis les travaux fondateursdes années 1990, s’accomplit réellement dans lamaîtrise technologique des pièces logicielles etmatérielles constituant les systèmes numériquesd’aujourd’hui mais également par la mise en placed’une hypersurveillance dont l’emblème est leréseau Echelon. Ce terme désigne le systèmemondial d’interception des communications privéeset publiques, élaboré par les États-Unis, leRoyaume-Uni, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande dans le cadre du traité UKUSA «UKUSAAgreement». Depuis l’activation en janvier 1993du « National Industry Security Program » quiorganise avec le Département de la Défense et unevingtaine d’agences gouvernementales laprotection des entreprises, des universités et descentres de recherche américains, ces moyens ontété orientés également vers l’intelligenceéconomique. Bill Clinton confirma explicitementen 1994 le rôle du renseignement en la matière.Concrètement, c’est « l’Office of ExecutiveSupport» au sein du Département du Commercequi assume le lien entre les négociateurs du mondeéconomique et les agences de renseignements.Des rapports européens discutent sans fin surl’impact réel de ce système dont le fonctionnementrelève du secret de défense. Echelon restel’archétype des systèmes d’intelligence numériquestratégique dont sont dotées diverses agences derenseignements.

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matériels d’espionnage (ou de contrôle domes-tique, comme cela est présenté pudiquementoutre-Atlantique) que la miniaturisation de l’élec-tronique et la sophistication des technologiessans fil rendent difficilement détectables.

Théorème 2 dit de la confiance :pour pouvoir parler d’informatique deconfiance, il faut en maîtriser les techniquesDans un article célèbre publié en 1984 (Reflectionson Trusting Trust), Ken Thompson, pionnier dessystèmes d’exploitation et des logiciels de pro-grammation modernes, piège nativement le«login» (fonction d’identification d’un systèmed’exploitation) en créant une porte dérobée qua-siment indétectable *. Sa démonstration faitencore régulièrement l’objet de débats passion-nés, mais traduit une réalité indéniable.Au-delà du souhait de disposer de produits desécurité pour essayer de contrer ces dispositifs,il sera également primordial de bien apprécier,par un travail de veille active, les travaux futursallant vers l’Internet des objets (développementsautour de l’Internet chinois, etc.). Dans ces déli-cats problèmes de confiance, un exemple plus

insidieux est celui de certains produits du mar-ché qui savent séduire les décideurs par leurergonomie certes pratique, mais qui en font descibles de choix pour l’intelligence économique.Enfin, des développements matériels déjà réa-lisés autour de coprocesseurs de sécurité, quiéquipent les machines informatiques, font peserune lourde hypothèque sur les capacités futu-res de maîtrise partagée du cybermonde.

Théorème 3 dit «théorème du virus» :la détection d’un virus est indécidable à la foispar une analyse a priori ou par une analysedynamiqueCe théorème, exposé en 1984 par Fred Cohenqui a réalisé la première étude in vivo sur lesvirus informatiques au sein de la « NationalSecurity Agency», est une variante logique duthéorème de Rice qui démontre, en théorie dela calculabilité, que le problème de l’arrêt d’unprogramme informatique quelconque n’est pasdécidable. Au-delà de l’aspect mathématique, ilmanifeste une double réalité : les pièges infor-matiques nouveaux contournent régulièrementles barrières installées et la fortune des ven-deurs d’antivirus est assurée pour toujours.Quand les enjeux de sécurité sont importants,seule une isolation physique d’un système d’in-formation permet d'assurer une vraie protec-tion, le risque zéro existant ici moins qu’ailleurs.Pour citer un exemple, la France s’est ainsi dotéed’un intranet sécurisé interministériel pour lasynergie gouvernementale (ISIS) qui est le pre-mier système d’information sécurisé nationalpermettant l’échange et le partage de documentsclassifiés au titre du secret de défense entreacteurs gouvernementaux. Outil de travail quo-tidien pour le traitement des informations clas-sifiées, c’est aussi un outil de conduite de l’ac-tion gouvernementale lors d’une situation d’urgenceou d’une crise.

* The moral is obvious. You can’t trust code that youdid not totally create yourself (especially code fromcompanies that employ people like me).

Seule uneisolationphysique

permetd’assurer une

vraie protection

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La sécurité par l'obscurité

Les filtres anti-tout commercialisés par le marchéde la sécurité informatique (antivirus, antispyware,antiphishing, anti-rootkits, antispam, etc.) pas plusque la cryptographie ne sont les solutions miracleannoncées. Ils participent de la « sécurité parl’obscurité» qui n’a jamais démontré ses vertusdans la lutte effective contre la criminalitéinformatique dont le maître mot est : «pas vu, paspris». Le premier virus de l’histoire (ver Morris de1988) a paralysé l’embryon d’Internet ens’attaquant à une faille du service de messagerie.Le courriel reste aujourd’hui le vecteur privilégiédes attaques informatiques.

La puce Fritz

« Trusted Platform Module » (TPM) désigne lesspécifications détaillées et publiques d’un crypto-processeur sécurisé appelé souvent «puce Fritz»du nom de Fritz Hollings, sénateur de la Caroline duSud, qui travaille d’arrache-pied au congrès desÉtats-Unis pour rendre ce composant obligatoiredans toute l’électronique grand public.À l’image d’une carte à puce, ce circuit sert à enfuirdes clés cryptographiques dans les matérielsinformatiques en les marquant individuellement.À partir de ce coffre à clés peuvent être développéestout un ensemble de fonctions de sécurité commela gestion des droits numériques – les fameusesDRM si décriées –, et d’autres plus complexescomme l’isolation mémoire, la protectioninterapplications, les entrées-sorties sécurisées,le stockage scellé ou l’attestation à distance.Ces fonctions permettront, peut-être, de luttercontre la piraterie informatique mais verrouilleront,à coup sûr, un usage libre de l’informatique.La maîtrise de ces techniques sera un enjeuessentiel des «guerres de l’information» futures.Il est à craindre que les concentrations industriellessur les marchés du software et du hardware qui sefont majoritairement en dehors de l’Europe ne nouslaissent dans une situation de réelle défiance vis-à-vis de ces développements.

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Devenus un outil aussi indispensable que letéléphone, les moteurs de recherche présententbien des pièges : risques de manipulation,espionnage de brevets, atteinte à la vie privée.Au service de la recherche, les moteurs dedemain mettront en contact les internautes quipartagent les mêmes centres d’intérêt.

Les moteurs de recherche sont stratégi-ques à plus d’un titre. Ils sont devenus pourbeaucoup un outil aussi indispensable dans lavie quotidienne que le téléphone. Il est diffi-cile d’imaginer comment l’on faisait «avant»,tout comme il est difficile d’imaginer commentl’on faisait « avant » l’avènement de la télé-phonie mobile. Que ce soit pour faire ses achatsen ligne, organiser ses voyages, faire ses réser-vations, rechercher de l’information à usageprofessionnel, ou organiser une activité deveille, les moteurs de recherche sont le pointde passage obligé.

Le modèle d’affaires de l’économienumérique

Mais, l’autre raison qui fait des moteurs derecherche des acteurs stratégiques du mondeInternet c’est qu’ils sont les modèles d’affai-res de toute l’économie numérique. Les régiespublicitaires des géants Google, Yahoo, et plusrécemment, Microsoft, sont en effet indispen-sables pour «monétiser» les services Internet,c’est-à-dire permettre à ces services de gagnerde l’argent grâce à la publicité, exactementcomme la télévision privée se finance par lapublicité.

Le paiement à la performance voit les annon-ceurs se bousculer pour surenchérir pourl’achat de mots clefs pour afficher leur publi-cité de manière contextuelle. Par exemple,

Renault va vouloir à tout prix acheter le mot« voiture » pour que chaque fois qu’un utilisa-teur fait une recherche du genre « voiturerouge», une publicité pour les voitures Renaults’affiche.

Un moteur populaire vendra donc plus cher leclic sur chacun de ses liens commerciaux, etil sera affiché (et donc cliqué) plus souvent.De plus, un plus grand nombre d’annonceursimplique un plus grand nombre de mots diffé-rents achetés, et donc un pourcentage plusimportant des recherches qui donnent lieu àl’affichage de liens commerciaux (on appellecela le «taux de couverture» de la régie). Enfin,le nombre d’annonceurs est aussi directementlié à la pertinence des liens commerciaux, cequi augmente la probabilité qu’un utilisateurclique sur le lien (c’est le « taux de clics »), cequi génère là aussi plus de revenus.

Le revenu d’un moteur de recherche est doncfonction du produit de son trafic, du prix moyendu lien commercial, du taux de couverture, etdu taux de clics des utilisateurs sur les liens,ce qui fait que la rentabilité d’une bonne régiepeut facilement être plus de trois à cinq fois supé-rieure à celle d’une régie médiocre.

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Les moteurs de recherche,acteurs stratégiques

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR FRANÇOIS BOURDONCLE (84)

Après une carrièrede recherche auxÉtats-Unis, il a fondéen 2000 Exalead,moteur de recherchepour les entreprises,mais aussi pourle Web avecwww.exalead.com,moteur de recherchemondial qui comptehuit milliards depages référencées

22

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

REPÈRESLa performance des régies, qui commercialisent

à la fois des bannières (publicité sous forme

graphique) et des liens commerciaux (qui

apparaissent au-dessus, et parfois à droite des

résultats dits « organiques »), est étroitement

liée à la qualité et au trafic du moteur associé. Les

liens commerciaux sont, d’une part, achetés aux

enchères par les annonceurs, et d’autre part ne

rapportent de l’argent aux sites qui affichent la

publicité que si ces liens sont cliqués (c’est ce

qu’on appelle le « paiement à la performance »).

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Des risques de manipulation

Dans le contexte de la veille, les moteurs derecherche présentent bien des pièges dontpeu de professionnels semblent conscients.Au-delà du débat sur l’exhaustivité de l’indexa-tion des moteurs de recherche et sur la tailledu Web visible ou caché (voir plus loin), il n’estpas illégitime de se demander si les moteursde recherche indexent l’information de manièretotalement neutre, et si certaines informationssensibles y sont ou non référencées. De plus,le classement des résultats peut être mani-pulé de plusieurs manières, et des sociétésspécialisées, ou des particuliers particulière-ment doués, ont ainsi réussi, pendant un cer-tain temps, à faire apparaître le site officiel duprésident George W. Bush en tête des résul-tats du moteur Google sur la requête « mise-rable failure ».

Cette histoire, qui est une illustration de ceque l’on appelle le « Google bombing », a faitle tour de l’Internet, mais le classement desrésultats tient compte d’un nombre de para-mètres tellement important (popularité du site,texte de la page, texte du titre, texte des lienspointant sur la page, graphe des liens hyper-textes, descripteurs sémantiques, etc.), quele résultat de la formule est difficile à prévoir,et sa manipulation éventuelle quasi impossi-ble à prouver.

Brevets et vie privée

Enfin, un dernier point important dans uncontexte de veille mais aussi de respect de lavie privée est la traçabilité de plus en plusgrande de l’ensemble des activités en ligne :chaque recherche effectuée sur un moteur derecherche est archivée avec l’adresse IP del’ordinateur d’où est issue la recherche. Si cetordinateur est le pare-feu d’une grande entre-prise, alors il est possible de savoir qu’un sala-rié de cette entreprise a tel ou tel centre d’in-térêt, ce qui peut être grave si l’entreprise enquestion est en train de déposer des brevetssur ce sujet.

Au niveau de la vie privée, ce qui est préoccu-pant, c’est le croisement des bases de don-nées contenant des informations personnelles,et la facilité qu’il y a à faire des croisements entreces bases de données quand celles-ci appar-

tiennent à la même société (recherche d’in-formations, courrier électronique, paiementen ligne, blog, etc.), car l’utilisateur a le mêmeidentifiant, le même mot de passe, et la sociétédispose peut-être même de son identité réelles’il a donné à un moment donné son numérode carte bancaire pour le paiement d’une tran-saction. Il est donc important, pour le profes-sionnel comme pour le particulier, de ne pasmettre tous ses œufs dans le même panier etd’utiliser des services de plusieurs fournis-seurs différents. Il est également légitime pourl’Europe de se poser la question de son indé-pendance stratégique en matière d’accès àl’information, comme elle le fait par exemplepour le GPS avec Galileo.

Un principe commun

Tous les moteurs de recherche fonctionnentaujourd’hui fondamentalement sur le mêmeprincipe. Dans une première phase, ils recen-sent toutes les pages Web auxquelles ils ont

Les moteursde recherche

indexent-ilsl’information

de manièretotalement

neutre ?

23

La prime à la taille

La prime à la plus grosse régie (Google) est

considérable et tend mécaniquement à renforcer

encore plus son avantage concurrentiel, car les

sites et les annonceurs vont naturellement

préférer travailler avec elle. La tâche est donc

très dure pour le numéro deux (Yahoo), et a

fortiori, pour le numéro trois (Microsoft).

L’ironie de l’histoire est que le brevet sur les

liens commerciaux est détenu par Yahoo qui a

accordé une licence pour quelques centaines de

millions de dollars seulement juste avant l’entrée

en Bourse de Google, quand cette société n’était

pas encore aussi dominante qu’elle ne l’est

aujourd’hui. Mais Google ayant un moteur plus

performant que celui de Yahoo, sa régie

publicitaire s’est renforcée au point de devenir

incontournable. De ce point de vue, le rachat de

Yahoo par Microsoft, s’il était confirmé, serait

une excellente nouvelle pour tous les acteurs de

l’économie numérique car il permettrait à ces

derniers de mettre en concurrence, pour

monétiser leurs services, deux régies

publicitaires aux performances comparables.

La position dominante de la régie de Google est

également l’une des raisons pour lesquelles le

Département de la justice américain enquête

actuellement sur l’utilisation de la régie

publicitaire de Google par Yahoo, en complément

de sa propre régie publicitaire, afin d’améliorer

la monétisation de son moteur de recherche.

p. 22 à 24 Bourdoncle 26/11/08 19:13 Page 23

accès, en démarrant par la page d’accueil desplus gros sites existants (des portails commeYahoo par exemple), et en suivant les lienshypertextes qui apparaissent dans les pages ren-contrées. Ils mettent ces liens dans une listed’attente (les nouveaux liens à la fin de la liste)et parcourent le Web un peu à la manière del’onde qui se propage à la surface d’un lacquand on laisse tomber une goutte d’eau enson centre. On appelle cela le parcours « enlargeur d’abord » du graphe constitué par lesliens hypertextes. Ce parcours essaie d’éviterde recenser trop de pages d’un site au détri-ment des autres. Le système s’arrête soitquand les pages n’existent pas, sont proté-gées, par exemple, par des mots de passe, soitencore si elles ne sont pas accessibles en sui-vant des liens, ce qui est par exemple le cas despages qui sont stockées dans une base de don-nées accessible par un formulaire que le moteurne peut pas remplir seul sans assistancehumaine (c’est ce que l’on appelle parfois le Webinvisible, ou le Web caché).

Une fois les pages recensées et numérotées,elles sont stockées, puis indexées de manièreà associer à chaque mot la liste ordonnée despages où ce mot apparaît, et les positions dece mot sur chacune des pages. Quand un uti-lisateur fait une recherche à plusieurs mots,par exemple « vache folle », le moteur met encorrespondance les deux listes des occurren-ces de vache et de folle et cherche tous lesdocuments dans lesquels vache et folle appa-raissent, et où, de plus, si vache apparaît à laposition n dans un document, alors folle appa-

raît à la position n + 1 dans le même docu-ment. Cet algorithme est linéaire dans la tailledes deux listes.

Une composante humaine

Mais le futur des moteurs de recherche estsans doute ailleurs encore. En effet, il y afondamentalement trois moyens de cherchersur Internet : sa mémoire (par exemple, lesfavoris de son navigateur), les moteurs derecherche (qu’ils soient généralistes ouspécialisés, comme ceux des sites de commerceélectronique), et enfin, il y a des amis à qui l’onpeut demander conseil. Or les moteurs derecherche ne prennent pas du tout en comptecette troisième composante, humaine, del’activité de recherche, qui est pourtantessentielle, notamment dans un processus deveille. Le service Baagz est le premier moteurde recherche permettant à l’utilisateur d’entrerautomatiquement en contact avec d’autresutilisateurs partageant les mêmes centresd’intérêt que lui et qui seront les mieux à mêmede l’aider à trouver des réponses à des questionscomplexes qu’il est difficile de poser à un moteurde recherche traditionnel.

Des dossiers intelligents

La manière de fonctionner d’un système commeBaagz consiste à permettre à l’utilisateur decréer et d’organiser ses favoris dans des «sacs»et de partager s’il le souhaite certains de sessacs avec d’autres utilisateurs. Ces sacs sonten réalité des dossiers intelligents qui utili-sent la description sémantique que le moteurExalead associe à chaque site Internet pourcomprendre les centres d’intérêt de l’utilisa-teur et associer automatiquement les sacs dece dernier aux communautés qui sont les plusà même de l’intéresser et de l’aider dans sesrecherches.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 200824

Le parcours« en largeurd’abord »évite derecenser tropde pagesd’un siteau détrimentdes autres

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

De fil en aiguille

De nombreuses améliorations des moteurs de

recherche sont possibles, notamment lorsqu’on

prend en compte la composante humaine de

l’activité de recherche, qui est essentielle,

notamment dans un processus de veille. Certains

moteurs comme Exalead proposent également de

naviguer dans les résultats grâce à une technique

brevetée appelée «recherche par sérendipité»

qui, à l’aide d’une sorte de table des matières

contextuelle, permet de rechercher un peu

comme on lit un dictionnaire ou une encyclopédie,

en commençant par un mot, et de fil en aiguille,

en trouvant le mot ou le concept le plus

intéressant que l’on n’avait pas forcément

présent à l’esprit en commençant la lecture.

BIBLIOGRAPHIE

« Recherche d’aiguilles dans une botte deliens», François Bourdoncle et Patrice Bertin,La Recherche, 328 (février 2000), page 66.

EN SAVOIR PLUS SUR INTERNET

www.exalead.comwww.baagz.com

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Pour toute grande entreprise en phase deréflexion sur un sujet stratégique, il est pri-mordial de détenir une information complète,pertinente, non biaisée et représentative desavis des différentes parties prenantes sur lesujet. Ce sont ces constatations qui formentles fondements de l’activité du cabinet deconseil en stratégie, spécialisé dans l’intelli-gence économique et la veille stratégique.Complètement hors du champ de l’espionnageindustriel, et fondés sur des bases parfaite-ment légales, les cabinets de conseil en intel-ligence économique apportent une aide réelle

aux dirigeants, très en amont dans leur pro-cessus de décision, mais aussi dans la miseen œuvre de leurs actions, en particulier entermes de diffusion des idées.

La valeur de l’information varieavec le temps

L’utilité de l’information, autrement dit sa valeur,est maximale à l’instant auquel elle se réalise.C’est-à-dire que c’est au moment où quelquechose se passe, se dit, ou s’échange, qu’il estle plus important de le savoir (cf. graphique 1).

Les cabinets de conseilspécialisés apportent unéclairage uniqueLa mondialisation et l’accélération des changements obligent les entreprises à mettre en placeune veille stratégique développée et efficace. Le recours à un cabinet de conseil spécialisé ouvrel’accès à des informations non diffusées, voire confidentielles, ce qui élargit le champ desperspectives et facilite l’anticipation d’évolutions encore mal perçues. De surcroît, il offre lapossibilité d’un accompagnement dans les actions de lobbying jugées utiles.

PAR BENOÎT DESFORGES (04)

consultant

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

25

GRAPHIQUE 1

Informationsur des événements

ou activitésjuste réalisés ou encours de réalisation

Informationsur des événementsou activités totalementréalisés

Informationsur des

événementsou activités en

préparation

Prospective

Passélointain

Passérécent

Courtterme

Longterme

Temps

Coût

d’obtention

de l’information

Intensité

du signal

Signalfort

Signalémergent

Signalfaible

Informationd’alerte

p. 25 à 27 Desforges 28/11/08 11:52 Page 25

Les informations déjà délivrées sont globalementconnues de tous, sont relatées dans les médias,et n’ont que peu de valeur. Plus l’information estrécente, plus elle devient intéressante. Évidem-ment, les premiers au courant bénéficient dela plus-value la plus importante.

Par ailleurs, les cabinets s’attachent à déli-vrer une information neutre et non biaisée, laplus complète possible, afin de réduire la partd’incertitude qui réside dans les décisions deleurs clients. Tout en étant soucieux du respectde la loi, le travail se concentre essentiel-lement sur les parties réservées et ferméesde l’information (cf. graphique 2).

Tout l’objet des cabinets de conseil est doncde se procurer au mieux, auprès des person-nes concernées, l’information la plus perti-nente et complète possible, quelle que soit sanature. Dans cet objectif, les cabinets spécia-lisés ont développé des méthodes permettantde répondre aux attentes de leurs clients de façonla plus précise possible, et de les accompa-gner, à la fois dans leur réflexion, et dans lesactions et opérations qui en découlent.

Réseau de relations, outils de collecteet traitement des informations,jeu d’interfaces et lobbying

Pour atteindre ces objectifs, les cabinets s’ap-puient sur un réseau de personnes très déve-loppé, qui touche toutes les sphères de déci-deurs, qu’ils soient industriels, politiques,économiques, financiers, médiatiques… Cetissu relationnel est une force du cabinet,puisqu’il permet à la fois d’adresser de nou-velles problématiques, mais aussi de parta-ger et récolter des opinions et des informa-tions sur les sujets de travail du cabinet. Eteffectivement, le niveau de ces interlocuteurspermet d’aborder des sujets que l’on pourraittrès souvent qualifier de « brûlants ».

Par ailleurs, le réseau, qui est en premier lieubasé sur les contacts professionnels des col-laborateurs du cabinet, a une dimension inter-nationale, puisqu’il rassemble une série decorrespondants à l’étranger, travaillant pourle compte du cabinet.

Une veille stratégique adaptée

Mais au-delà de l’important réseau auquel lecabinet a accès, le processus de récolte d’in-formation s’appuie sur une série d’outils, donten particulier la veille stratégique. Cette der-nière permet de récolter, très en amont, l’in-formation nécessaire à la prise de décision.Réalisée au sein des sphères économiques,politiques, juridiques, médiatiques, universitai-res ou sociales, elle est adaptée à la problé-matique du client. En premier lieu, l’équipe encharge d’un dossier établit une cartographiedes décideurs concernés par le sujet : il s’agitde faire une identification décisionnelle. Unefois les différents acteurs identifiés, et leurs rôlesrespectifs définis, l’équipe élabore un ques-tionnaire, destiné aux différentes cibles ainsidéfinies. Puis la veille, autrement dit les inter-views des personnes, est faite en aveugle. Lespersonnes interrogées n’ont ainsi jamaisconnaissance du commanditaire de ces veilles.L’information est récupérée sous forme deverbatims, qui sont une restitution brute desréponses des personnes interrogées. Enfin, àpartir de cette restitution, tous les élémentssont rassemblés pour permettre à l’équipe deproduire son analyse et de rendre sa synthèse,restituant à la fois les éléments importantsissus des veilles, synthétisant les idées majeu-res qui ressortent des entretiens, et appor-tant des recommandations adaptées.

Diversifier les sources

L’idée, dans ce processus, est bien de recouperau maximum les informations issues de diffé-

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 200826

Multiplierles sourceset diversifierles entretienspermetde dégagerune réponsepertinente

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

GRAPHIQUE 2

80 %INFORMATION PUBLIÉE

Information ouverte

Information directementet librement accessible

Information réservée

Banque de données profes-sionnelles, notes financièresdes banques et des analystes

Information fermée

Information non diffusée,à caractère stratégiqueet souvent confidentiel

5 %FERMÉE

15 %RÉSERVÉE

p. 25 à 27 Desforges 28/11/08 11:52 Page 26

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

rents milieux, de différents partis, de différentspoints de vue. Évidemment, chaque personneinterrogée, individuellement, a des choses qu’ellene peut pas dire. Elle trie l’information qu’elledonne, afin de faire passer ses messages. Maisle fait de multiplier les entretiens, et de diver-sifier les sources, permet globalement de déga-ger une réponse aussi pertinente que possibleà la problématique du client.

Une information neutre

En plus de permettre de récolter des informa-tions stratégiques, la méthode de veille « enaveugle » permet d’ajouter une interface sup-plémentaire dans le processus de quête de l’in-formation pertinente. Il est clair qu’un clientne pourrait faire lui-même le travail effectué,pour la simple raison qu’il représente son entre-prise, et que cette étiquette ne lui permet pasd’obtenir une information neutre. Les cabinets,en plus d’apporter leur savoir-faire en matièrede récolte d’information, sont une interfacepermettant de récupérer des éléments qui nesont pas sélectionnés en fonction du destinatairefinal qu’est le client. Cette interface permet, entemps réel, de récolter une information neu-tre qui reflète ce que chaque acteur souhaitecommuniquer individuellement, et le recoupe-ment de l’ensemble de ces informations sur latotalité des entretiens menés permet de réduireau minimum, et tend à supprimer le biais exis-tant dans chaque entretien.

Enfin, les cabinets disposent souvent d’unsavoir-faire complémentaire, qui peut être misà profit dans des phases d’accompagnementde la réalisation des recommandations : ils’agit du lobbying. En effet, si le savoir-fairemajeur est de récolter une information perti-nente en amont de grandes décisions, le réseaupermet tout autant de faire passer des mes-sages auprès de ces mêmes décideurs. Qu’ils’agisse de lobbying politique, juridique, par-lementaire ou financier, voire médiatique, lescabinets spécialistes disposent souvent desous-structures adaptées pour agir sur toutedécision ou réglementation à venir.

Un éclairage et une objectivitéirremplaçables

En résumé, les cabinets de conseil en straté-gie spécialisés en intelligence économique

jouent un rôle important dans le processus dedécision des dirigeants, en ce qu’ils apportentune information objective et complète sur lesujet en jeu. Si cette activité se développe, c’estparce que l’information, bien qu’a priori plusfacilement disponible via des moyens de com-munication de plus en plus efficaces, est néces-sairement de plus en plus protégée et donc,paradoxalement, plus difficile à obtenir. Ellegagne par conséquent en valeur, d’autant plusquand on peut la délester des biais dus à lasubjectivité de certains vecteurs de communi-cation.

Vers la mise en œuvre

Enfin, une fois les dirigeants éclairés sur lesproblématiques stratégiques, et leur décisionprise, c’est souvent à ce stade qu’intervien-nent les cabinets de conseil en stratégie anglo-saxons, qui aident à la mise en œuvre des stra-tégies adoptées. Les cabinets de conseilspécialistes de l’intelligence économique, eux,ne s’occupent que de la phase en amont de ladécision, sauf s’il s’agit de problématiques delobbying et de communication.

27

REPÈRESLe cabinet de conseil en stratégie spécialisé en

intelligence économique est ainsi nommé, parce

qu’il base son activité sur l’information. Très

souvent confidentielle, c’est une information de

premier niveau, directement issue d’un

ensemble de personnes concernées par un sujet,

qui est proposée au client. Elle est par ailleurs

analysée par le cabinet, qui, connaissant le

dossier et les attentes du client, donne ses

recommandations. Le niveau d’exposition du

client est quasi nul, les veilles étant menées en

aveugle, et l’information échangée dans une

confidentialité la plus stricte possible. Par

ailleurs, au-delà de la simple restitution de

l’information, le cabinet peut aider son client

dans sa communication, en particulier auprès

des décideurs. Quel que soit le type de lobbying,

l’objectif est de faire passer un message auprès

de personnes importantes sur le dossier en

question.

p. 25 à 27 Desforges 27/11/08 14:59 Page 27

L’intelligence économique consiste pour l’Étatà créer un environnement favorable à sesentreprises et à les mobiliser ; pour lesentreprises à connaître leur situation sur lemarché mondial, celle de leurs principalesconcurrentes, l’état de l’art dans leur domained’activité, les caractéristiques économiques,sociales, politiques et culturelles de leur champd’expansion.

L’État doit aider les entreprises à mieuxappréhender les multiples facteurs mondiauxqui conditionnent le développement scientifi-que, technologique, industriel et économique.Les agences du secteur de l’intelligence éco-nomique doivent contribuer à ce recensement.L’État doit en outre créer un environnementfavorable aux entreprises sans descendre dansl’arène au niveau microéconomique. Il lui appar-tient de mettre en œuvre des politiques enmatière de fiscalité, de soutien à la recher-che-développement, d’aménagement du ter-ritoire, d’infrastructures, d’éducation et de for-mation professionnelle, et d’encourager lesentreprises à porter haut les couleurs de laFrance dans la compétition économique.Les entreprises, petites, moyennes ou grandes,quant à elles, doivent apprendre à connaîtrepour chaque créneau d’activité leur part dumarché mondial et apprécier leur présencecommerciale industrielle, technologique etscientifique dans les grands espaces écono-miques d’aujourd’hui : Europe, Amérique duNord, Amérique latine, Asie du Sud-Est… qu’el-les doivent fréquenter assidûment.

L’information économique,une donnée marchande

Il leur est également indispensable de connaî-tre les données de la concurrence au niveaumondial, qu’il s’agisse de la place des concur-rents, de leur stratégie, de l’état de leur tech-

nologie, de leur recherche et de la santé desnombreux pays où elles doivent ambitionner des’implanter industriellement et même désor-mais scientifiquement.Et cela, en créant peut-être une fonction intel-ligence économique dans leur sein, en utili-sant tous les systèmes d’information disponi-bles, en suscitant une communauté del’intelligence économique avec le secteur publicpour mise en œuvre d’un dispositif nationalsimple et évolutif. Bref, les entreprises doi-vent considérer l’information économiquecomme une donnée marchande qu’il est essen-tiel de se procurer, afin de se doter d’une capa-cité d’anticipation.

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Le nouveau sangdes entreprises

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR BERNARD ESAMBERT (54)

ancien conseillerindustriel et scientifiquede Georges Pompidou ;ancien président duConseil d’administrationde l’École polytechnique;ancien présidentde l’Institut Pasteur

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INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

REPÈRESLes entreprises forment un corps social que

l’État peut chercher à mobiliser, comme il sut le

faire dans les années soixante et au début des

années soixante-dix, époque à laquelle la

production industrielle et le PNB de la France

augmentèrent plus rapidement que ceux de nos

voisins, d’un demi-point à un point et demi par an.

Un marché planétaire

Elle est loin, l’époque où de nombreux chefs

d’entreprise ignoraient leur part du marché

mondial dans leurs différents créneaux

d’activité. Grâce à quelques petites centaines de

sociétés commerciales d’intelligence

économique, qui se sont dotées récemment d’un

code éthique, ce marché planétaire est décliné

géographiquement avec ses sous-jacents

politiques, juridiques, culturels.

Certains de ces prestataires d’information

économique au sens large ont désormais pignon

sur rue. Tout ira bien le jour où les entreprises

accepteront de payer à leur juste prix les

informations qu'ils apportent.

p. 28 à 31 Esambert 2 27/11/08 14:18 Page 28

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Des informations publiques

La connaissance de la stratégie des concur-rents est, pour les sociétés cotées, facilitéepar le niveau d’informations qu’elles doiventrendre publiques : à leurs actionnaires lorsdes assemblées générales qui se multiplientet auxquelles il est très facile d’assister ; lorsde différentes réunions en présence d’analys-tes financiers notamment ; sous la pressiondes régulateurs financiers qui exigent d’ellesinformation et transparence.Point n’est donc besoin de truffer des cham-bres d’hôtel de micros ultrasensibles et l’in-formation ouverte est suffisamment massivepour limiter l’information « fermée » à un sta-tut quasiment marginal. En veut-on un exem-ple : Airbus et Boeing détaillent en permanence,urbi et orbi, leur stratégie s’agissant par exem-ple du A380, du « dreamliner », ou du A350.Enfin, sur l’état des sciences et des technolo-gies utilisées par les concurrents, le désir depublication des scientifiques, seule façon poureux de se faire connaître et apprécier de leurspairs, met à mal toute forme de secret tropabsolu. C’est toutefois moins vrai en matièrede technologie, et cela ne l’est plus du toutpour les tours de main et autres secrets defabrication. D’où plus généralement l’intérêtde la veille technologique qui mobilise desorganismes semi-publics ou privés, des conseil-lers d’ambassades militaires, scientifiques ouassimilés.

Un pour cent du chiffre d’affaires

Pourquoi les sociétés françaises ne se fixe-raient-elles pas l’objectif de consacrer ten-danciellement 1 % de leur chiffre d’affaires à

la collecte de toutes les informations néces-saires à l’élaboration de leur stratégie de déve-loppement dans un contexte à évolution mon-diale rapide, et cela afin de perdre toute myopieà l’égard d’un marché devenu irréversible-ment planétaire? Car la seule chose qui coûteplus cher que l’information est l’absence d’in-formation.Et pourquoi ne se mettraient-elles pas à niveauen ce qui concerne les technologies de l’infor-mation en en dominant l’usage et en en fré-quentant la production? La «mise en réseau»des cerveaux humains peut donner une nou-velle chance à nos chercheurs, cadres, sala-riés s’ils savent faire preuve d’ambition pournotre pays et pour l’Europe, notre terrain de redé-ploiement.

De la guerre à la consommation

La globalisation, résultat de la généralisationde la compétition économique, se traduit pourles êtres humains par du travail et des reve-nus, donc par un standing social et cela estimportant dans la conjoncture que nous connais-sons en termes de chômage et d’apparition depoches de misère. Plus concrètement et trivia-lement, la guerre économique (voir article page12) débouche sur la consommation de confortmatériel et d’images de toute nature.L’on doit peut-être cependant à la guerre éco-nomique, qui a canalisé les pulsions guerriè-res des peuples vers une forme de combatplus pacifique, une limitation des autres conflits.Bien sûr, elle n’a pas permis leur extinctionau Proche-Orient, en Asie du Sud-Est, enAfrique. Mais à tout le moins, peut-on consta-ter qu’il n’y a là rien de comparable aux grandsconflits du passé. Souhaitons donc longue vieà la guerre économique à condition qu’elles’assagisse un peu et qu’elle apporte aux com-battants d’autres satisfactions que celles pure-

Point n’estbesoin de

truffer leschambresd’hôtel de

microsultrasensibles

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Dix mille spécialistes au Japon

Les cas du Japon et des États-Unis sont

particulièrement éloquents. Plus de

10 000 spécialistes de la collecte organisée

d’informations industrielles travaillent dans le

premier pays, répartis entre des agences

privées de recherche et des agences publiques.

Cette nation a porté à un niveau exceptionnel la

veille économique et technologique dont les

dépenses représentent 1,5 % du chiffre

d’affaires des grandes entreprises industrielles

nippones.

Ne pas rester à l’écart

L’extrême richesse et l’extrême pauvreté se

regardent par écrans de télévision interposés.

Des milliards d’êtres humains ne pourront

rester durablement à l’écart du grand

mouvement qui entraîne la partie développée de

la planète. Car, dans les bas-fonds de la misère,

nombreux sont ceux qui sont prêts à suivre le

premier « guru » venu.

p. 28 à 31 Esambert 2 26/11/08 19:18 Page 29

ment matérielles sur lesquelles elle a débou-ché jusqu’à présent. Nous combattions égoïs-tement pour notre confort de nantis. Il nousfaudra désormais effectuer un douloureuxretour à la réalité, celle de la misère du Sud,de la démographie du tiers-monde et desmigrations irrésistibles qu’elle provoquera,des cauchemardesques agglomérations géan-tes et des nouveaux sauvages urbains qu’el-les engendreront, des menaces sur notre éco-système.Le combat économique s’est installé pour quel-ques décennies. Il nous faut fonder sur ceconstat une éthique du progrès et du bonheur.L’idéologie «molle» du libéralisme encourageles turbulences liées à la compétition indus-trielle internationale. L’histoire a pris le virageinstable de la guerre économique.

L’unité ne naît pas du multiple

La liste est longue des problèmes soulevéspar l’exacerbation de la compétition interna-tionale. Conflits sociaux, terrorisme, bulles etkrachs boursiers, toxicomanie, délinquancesont autant de signes du manque d’équilibrede la planète et de la vulnérabilité de nos socié-tés technicisées.Une minorité de la population mondiale pro-fite de la majorité des ressources de la pla-nète tandis que les masses du tiers-mondesubissent l’intrusion de technologies qu’ellesne dominent pas. Des milliards d’êtres humainsne pourront rester durablement à l’écart desgrands mouvements qui entraînent la partiedéveloppée de la planète. Adam Smith s’éton-nait des vertus de l’économie de marché quitransforme de mauvais sentiments en richesse.Mais ces richesses sont trop mal partagéespour ne pas troubler un jour le jeu du libéra-lisme. Beaucoup ont adopté la religion isla-

mique pour reconquérir leur dignité, actuali-sant la célèbre formule de Marx sur la reli-gion «opium du peuple». La modernité serait-elle un don vénéneux ?Quant au nationalisme, il renaît, tant la glo-balisation a fait naître le désir de recréer laspécificité. Pourtant, l’expérience de la tourde Babel nous apprend que l’unité ne naît pasforcément du multiple. La route de l’avenirn’est pas celle de 1900.

Un combat plus exigeant

Il faut relever le gant d’une croissance qui per-mette à toutes les populations de la planètede se sentir chacune égale aux autres, quiforme l’intelligence créatrice de la jeunesse,qui encourage le partage du travail et des reve-nus, la flexibilité du mode de vie, qui permetteà chacun la maîtrise de son évolution, de sonmodèle culturel et social. Il faut aider un déve-loppement du tiers-monde basé sur le libéra-lisme économique, la démocratie et l’accèsaux marchés des pays développés. Il s’agit,par une mutation copernicienne, d’ajouter àla dimension économique de l’homme, mesu-rée au travers du PNB, la dimension socialeet la dimension spirituelle et de doter le libé-ralisme d’un code moral et déontologique,faute de quoi il serait mis en accusation auprofit de nouvelles idéologies associant cynisme,anarchisme, nihilisme pouvant déboucher surde nouvelles formes de totalitarisme.

Ne pas se contenter de gérer l’histoire

En réalité, notre planète n’avait été, jusqu’à ily a peu, qu’effleurée par les hommes. Désormais,nous commençons à l’égratigner sérieuse-ment et donc à provoquer des réactions denotre écosystème. De nombreuses étudescomme celle concernant l’effet de serre ledémontrent maintenant. Mais il est égalementclair que l’on peut réagir et compenser à termeles dégâts que nous avons causés à notre envi-ronnement. Tel est déjà le cas, localement etrégionalement en ce qui concerne la pollutionde l’air et de l’eau. Tel sera peut-être le casen ce qui concerne le Green House Effect donton peut cependant craindre qu’il ne soit pasrapidement et aisément réversible. Bien sûr,comme toujours, dans l’activité humaine, lephénomène sera pendulaire. Nous corrige-rons avec retard nos dégradations. Il y faudra

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 200830

La seule chosequi coûte pluscher quel’informationest l’absenced’information

INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

Faire rattraper la sciencepar le politique

La partie du monde qui a fait le tour du

supermarché aux cent mille produits serait bien

inspirée de mettre en place un capitalisme

moins gaspilleur de ressources rares et de

génie créateur, d’anticiper un peu ce

mouvement en faisant rattraper la science par

le politique.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

un maximum de concentration et même decoercition au niveau planétaire.Comme la démocratie, le libéralisme est lemoins mauvais des systèmes mais il est loind’être parfait. La frilosité des politiques qui secontentent de gérer l’histoire telle qu’elle existeest dérisoire.

Un code moral

L’économie de marché et la démocratie libé-rale vont de pair. Consolider l’économie demarché en la dotant d’un code éthique univer-sellement reconnu, c’est aussi une façon deconsolider des jeunes démocraties un peu par-tout dans le monde. Si nous devons passerd’un système de guerre économique danslequel communient maintenant presque tou-tes les nations de la planète à une forme dedéveloppement, plus solidaire, plus respec-tueuse de l’homme et de la nature, un codemoral doit tempérer la compétition interna-tionale et corriger ses effets.Il est temps d’agir par un gigantesque effortd’éducation, principale source de valeur ajou-tée dans l’évolution du monde. Par la satis-faction d’une revendication de justice et d’éthi-que qui déborde des croyances religieusessans les négliger. Dans la mesure où l’huma-

nité a probablement tout expérimenté depuisles quelques milliers d’années que l’hommea commencé à penser, un code éthique nepourrait-il pas être bâti à partir des convergen-ces et des domaines communs que l’on peutobserver entre les différentes religions mono-théistes et les grands principes que l’huma-nité a adoptés sans toujours les appliquer,comme les droits de l’homme issus de laRévolution française ?La culture de la guerre économique se géné-ralise et se banalise après avoir propulsél’Atlantique, puis le Pacifique sur le devant dela scène. La quête d’une telle éthique permet-trait-elle à une civilisation de renaître quel-que part sur la planète pour la féconder à nou-veau, pourquoi pas en Europe où une pâtehumaine malléable, curieuse, diverse, adosséeà d’anciennes cultures crée un terreau parti-culièrement favorable ?

Un supplément d’âme

Le spirituel, le politique et l’économique onttous les trois leur mot à dire dans l’évolutionhumaine. La guerre économique est un puis-sant stimulant en faveur du développementmais elle n’est supportable qu’à la conditionqu’un minimum de solidarité en humanise leseffets. Il nous faut probablement, partout dansle monde, des officiers de la guerre économi-que, voire peut-être même dans certains pays,un général de la guerre économique mobili-sant les entreprises en créant en leur faveurun environnement favorable. Mais il faut ajou-ter à cette mobilisation économique qui a sesmérites et qui doit se poursuivre ne serait-ceque pour éradiquer la lèpre de la misère làoù elle est encore flagrante (étant entenduque les exponentielles ne montent pas jusqu’auciel et que le commerce international devraun jour, comme on l’a vu, ralentir sa progres-sion), un supplément d’âme dont il faut espé-rer découvrir un jour prochain les prémicesquelque part dans le monde, pourquoi pas enEurope.La planète a pris la route des choses plutôtque celle de l’esprit. Quelques humanistes dela grande compétition des temps moderneslui apporteront-ils cet impondérable qui don-nerait au monde des marchands et des conqué-rants économiques un minimum de moraleet de grâce ?

Ajouter à ladimension

économique,la dimension

sociale etla dimension

spirituelle

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Le siècle de la coopération

Le XXe siècle a été celui des États souverains et

égaux entre eux, le XXIe siècle sera celui des

coopérations multinationales, de la cosouverai-

neté, de la toile tissée par les nations.

L’importance de plus en plus grande que

prennent l’Organisation des Nations unies et les

réunions des principaux chefs d’État nous

montre bien dans quelle direction nous nous

orientons. Cela n’ira pas sans heurt et sans

recul de la part de nations qui n’accepteront pas

de gaîté de cœur des disciplines qui pourraient

contrarier leur égoïste développement

économique, mais la direction est évidente et les

solidarités sont en voie de se nouer. Les États-

nations vont devoir abandonner du lest, car tout

pays est désormais responsable de la planète,

démographiquement, écologiquement et

financièrement comme la crise vient de le

montrer à l’évidence. Et la mondialisation

lancée au galop a devancé ses nécessaires

régulations.

p. 28 à 31 Esambert 2 26/11/08 19:18 Page 31

Les entreprises doivent se doter d’un cadreéthique dans un environnement concurrentieloù certaines dérives se sont installées, faites decontrefaçon, de lobbying outrancier, dedénigrement des rivaux ou de leur déstabili-sation. L’intelligence économique doit revenirà des bases saines, orientées vers la capacitéà bien s’informer et prendre de bonnesdécisions en respectant l’éthique.

Les commissions sur des grands contratsont existé de longue date, servant à rémuné-rer des intermédiaires étrangers jouant unrôle réel dans la conclusion des grands mar-chés internationaux. Ce phénomène avait tou-jours existé.

Lorsque j’étais en fonction, comme PDG deThomson, ma règle était de respecter la loi,qui à l’époque autorisait ces commissions, àcondition de les déclarer au ministère desFinances. Je me souviens que, tous les mois,j’avais une séance de travail avec les douanesoù j’indiquais les commissions versées à l’étran-ger, combien et à qui. Notre règle était de jouerla transparence vis-à-vis des pouvoirs publics.La plupart des pays, jusque dans les années 1970,autorisaient les commissions, chacun avecune réglementation qui lui était propre. LaFrance, avec son système de déclaration auxpouvoirs publics, passait plutôt pour un bonélève, évitant les dérives de pays où l’enca-drement était moindre.

Dans les années 1980 et 1990, un mouvementgénéral a interdit ces commissions dans ungrand nombre de pays. Il devenait important queces commissions soient alors interdites par-tout, que la compétition économique resteéquilibrée et en revienne à l’essentiel, c’est-à-dire le rapport qualité-prix des produits etdes services.

Les rétrocommissionsLes entreprises auraient dû s’aligner sur cesystème plus vertueux, dès lors qu’il était res-pecté par tous les compétiteurs. Mais estapparu dans les années 1980 le phénomènedes rétrocommissions, mécanisme permet-tant de rétrocéder une part à des tiers, souventdes intermédiaires du pays fournisseur, n’ayantrien à voir avec le contrat lui-même. L’affairedes frégates de Taïwan a été emblématiquede ce phénomène. Soulignons à nouveau queces rétrocommissions sont totalement endehors du commerce international, car ellesservent des bénéficiaires qui n’ont générale-ment rien à voir avec ces ventes. C’est uneperversion du rôle d’une entreprise, dont lafonction n’est pas de distribuer des subsides.Il y a eu un règne de laisser-aller, où l’on acouvert ces dérives.

Revenir à des bases sainesL’intelligence économique doit revenir à desbases saines, orientées vers la capacité à biens’informer et prendre de bonnes décisions.Dans l’industrie, l’essentiel repose sur la notionde produit. Une société vaut par les produitsqu’elle étudie ou vend, qu’il s’agisse de biensmatériels ou de services. Il faut qu’ils se ven-dent, donc qu’ils correspondent à des besoins.Ce qui implique une capacité d’être bien informédes attentes des clients potentiels.

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Bien s’informeren respectant l’éthique

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

PAR JEAN-PIERRE BOUYSSONNIE (39)

ancien président-directeur généralde Thomson-CSF(aujourd’hui Thales),ancien présidentde l’AX

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INTELLIGENCE ÉCONOMIQUE

REPÈRESJean-Pierre Bouyssonnie a dirigé une

société de taille internationale qui exportait

beaucoup dans des domaines d’État , du

militaire à la télévision. Il s’est trouvé

observateur de faits qu’il convient de

pointer, d’encadrer et de limiter autant que

possible.

La fonctiond’uneentreprisen’est pasde distribuerdes subsides

p. 32 à 33 Bouyssonnie 27/11/08 14:19 Page 32

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Chaque fois que j’avais une séance de travailavec une filiale ou une division, mes questionsprioritaires concernaient leurs produits. Ettout se déroulait autour de ce point : étude demarché, étude technique, etc. Les entrepri-ses oublient trop souvent aujourd’hui cettenotion.

Je retrouve cette dérive dans le managementdes financiers qui dirigent les entreprises enraisonnant fréquemment exclusivement surle court terme. Les financiers cherchent à avoirdes résultats rapides, alors que souvent il fautdix ans pour sortir un produit sophistiqué. Ungrand radar nécessite des années d’études etd’essai.

Lorsque je dirigeais Thomson, j’accordais unegrande importance au fait que chaque filialeou division ait un service technique qui regardele court terme et le moyen terme, avec en plusau niveau central un service technique géné-ral qui œuvre sur le long terme, et un directeurgénéral de la recherche pour piloter ce tra-vail. Dans ce cadre, la veille s’impose pouravoir au bon moment le bon produit.

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Le bon produit au bon moment

La veille technologique ne permet pas de toutprévoir, mais permet de réduire les aléas, et deretomber sur ses jambes lorsqu’uneopportunité se dégage enfin.À titre d’exemple, le laboratoire central derecherche de Thomson avait développé, dansles années 1970, une technologie de lecturelaser qui correspondait au marché alorspressenti du vidéodisque, qui n’a pas percé àl’époque, mais qui a été utilisée dix ans plus tardpour les disques musicaux.La veille des marchés et des consommateursn’avait pas pu situer l’arrivée lointaine des DVD,qui n’existaient pas encore, mais la veilletechnologique avait toutefois bien anticipé lepotentiel global du créneau des systèmes delecture laser.Depuis, les brevets correspondants ont rapportéplusieurs milliards de francs à Thomson.

Les réseaux de télécommunications, d'eau, de transport et plusgénéralement d'infrastructures lourdes, au même titre que l'ar-mement, font partie des «grands contrats » les plus exposés auxcommissions occultes et rétrocommissions, avec leur panoplie com-promettante de sociétés-écrans, fausses factures et relais par desparadis fiscaux.Il n’est pas rare que les sommes concernées sur ces appelsd’offres à l’étranger oscillent entre 5 et 10 % du montant du contrat.Pourcentage à considérer comme une moyenne dans les pays oùces pratiques sont courantes, qui constitue une moyenne plus hélasqu’un maximum, inexistant en la matière.

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Pour une entreprise ou une organisation,l’intelligence économique numérique (IEN) doitprocéder de deux pratiques complémentaireset inséparables. Tout d’abord la constitution, l’entretien et l’usaged’une base informationnelle irriguant l’ensem-ble de son savoir-faire : le développement decette base fait appel à des outils informatiquesen permanente évolution. Ensuite la protection de son propre systèmed’information combinée à la maîtrise de sacommunication numérique.

Un véritable arsenal d’armes logicielles

L’enregistrement et la diffusion de données deplus en plus nombreuses et variées ont permisde construire des outils de fouille information-nelle (« data mining ») dont la sophisticationdevient surprenante.De nouvelles techniques d’analyse de la parole,de traduction multilangue automatique ou demodélisation des processus cognitifs sans par-ler de la révolution de l’imagerie numériqueenrichissent la trousse à outils de cette révolu-tion du renseignement numérique qui touchedirectement quatre des six domaines édictéspar la Direction générale du renseignementextérieur (DGSE) à savoir : le renseignementd’origine électromagnétique (ROEM), le rensei-gnement d’origine image (ROIM), le renseigne-ment d’origine opérationnelle (ROOPS) et, biensûr, le renseignement de source ouverte (InfoSO). Dans le domaine du renseignement d’ori-gine humaine (ROHUM) on peut également pré-voir une intrusion croissante du numériquemarquée, par exemple, par les addictions tech-nologiques de l’homme moderne ou l’explosiondes réseaux sociaux virtuels.

La vitalité et la variété extraordinaire de cesrecherches algorithmiques commencent éga-lement à irriguer l’intelligence économique.Une technique essentielle est ici la fusion d’in-formations qui correspond à la volonté d’utili-ser simultanément plusieurs sources de don-nées, ou de grouper des informations hétérogènesafin d’obtenir une nouvelle information de meil-leure qualité pour une meilleure décision. Ils’agit souvent à partir de signaux faibles etd’une observation imparfaite de la situation deformer des hypothèses partielles.La gestion des crises (catastrophe naturelle,attaque terroriste, crise sanitaire, crise systé-mique…) aussi bien dans leur anticipation (pré-vention et alerte) que dans leur traitement béné-ficie de ces technologies qui permettent demieux comprendre et de partager une visioncommune aux acteurs économiques pour mieuxagir. Dans la gestion postcrise qui a pour objec-tif d’améliorer la résilience en restaurant l’ac-tivité, l’analyse des retours d’expérience per-met également d’enrichir la base d’IEN. L’entretiend’un patrimoine informationnel dynamique peutégalement être porteur de «sérendipité» quiest le fait de comprendre que l’on a trouvé ou

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Une dimension nouvelledans le monde virtuel

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PAR PHILIPPE WOLF (78)

sous-directeur« Télécommunicationset Réseaux sécurisés»au sein du SGDN, ilenseigne l'intelligenceéconomique au seindu départementd'enseignementet de rechercheen humanités etsciences sociales del'École polytechnique

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Le cyberespace nous fait entrer dans une dimension nouvelle des activités humaines. Un outillagede plus en plus sophistiqué permet un développement sans précédent de la collecte et del’analyse des données disponibles, permettant la constitution d’un authentique patrimoineinformationnel. Patrimoine qu’il est impératif de protéger par la mise en œuvre d’une politiquede sécurité en constante évolution, politique qui relève avant tout de l’intelligence humaine.

REPÈRESOn ne peut s’empêcher de penser àl’adaptation cinématographique de lanouvelle éponyme de Philip K. Dick,Minority Report, dont le cadre est leWashington de 2054 où des êtres humainsmutants, les Précogs, peuvent prédire lescrimes à venir grâce à leur don deprescience dans l’organisation appelée«Precrime».

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découvert par hasard, par chance ou par acci-dent, quelque chose d’important que l’on necherchait pas. On rejoint ici les techniquesmodernes de la guerre infocentrée. La créa-tion de « war rooms » numérisées au sein decertaines entreprises procède de ces nouveauxprocessus de management actif.Dans ces technologies de pointe, des pôles decompétitivité en France, coordonnant les tra-vaux de PME et de grandes entreprises, essaientde structurer l’innovation autour de thémati-ques en partie sécuritaires. Deux exemplespeuvent être cités. Infom@gic, qui relève del’ingénierie des connaissances, en exploretrois axes technologiques fondamentaux : lesmoteurs de recherche avancés, l’extractionde connaissances et la fusion d’informationsmultimédias, et ce sur tous les types de sour-ces. System@tic, dans sa thématique sécuritéet défense en particulier, traite des innova-tions significatives en matière de technologieslogicielles et d’architecture de grands systè-mes complexes.

Neuf principes pour bâtir une politiquede protection de ce patrimoine

L’autre dimension de l’IEN consiste pour uneentreprise, une administration ou un pays àsavoir sécuriser ses systèmes et réseaux d’in-formation selon les pratiques d’une sciencedésignée, en France, sous le sigle SSI (Sécuritédes systèmes d’information).Au-delà des problèmes classiques de vol ou depiégeage de matériel comme les portables oules supports amovibles, et du traitement systé-matique des traces électroniques, des formesnouvelles de menace sont apparues ou se sontdéveloppées. Des événements récents démon-trent clairement que les mafias, les officinesprivées d’intelligence économique et les servi-ces de renseignements étrangers savent pro-fiter des vulnérabilités non traitées des nou-velles technologies.L’OCDE a établi neuf principes qui permettentun examen rapide des défis à relever pour l’IENet la SSI (Sécurité des systèmes d’information)dans leur dimension défensive. L’OCDE plaide,bien évidemment, pour un point de vue globalet cohérent. Ces recommandations n’ont pasun caractère obligatoire.1 – Sensibilisation. Le référentiel des forma-tions en intelligence économique, élaboré dansle cadre de la mission du haut responsable en

charge de l’intelligence économique, liste, dansses quatre grands thèmes d’enseignement, l’éco-nomie de l’information et de la connaissance.Plus largement, des actions de sensibilisationdoivent être régulièrement organisées au seindes entreprises ou des organismes pour faireprendre conscience des risques numériques etdes enjeux des bonnes pratiques dans l’espacenumérisé. Une place doit y être consacrée dansles cursus scolaires à tous niveaux et cela passeobligatoirement par une formation des formateurs.2 – Responsabilité. «Chaque acteur des systè-mes d’information a une part de responsabilitédans la SSI.» Il s’agit aussi, concernant la baseIEN, de bien définir le besoin d’en connaître etde fixer les apports de chacun à un travail deveille qui ne peut être que collectif.3 – Réaction. «Ce principe évoque l’utilité d’agirde manière réactive et coopérative pour pré-venir, détecter et répondre aux incidents. »Une pratique régulière d’exercices à partir descénarios simples a démontré sa pertinence.

Certainsprédisent

une avancéedans

la manipulationmentale

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Une création orwellienne

Quelques semaines après les attaques du11 septembre 2001, l’amiral John Poindexter –connu pour avoir été mêlé au scandale del’Irangate – propose comme responsable du«Information Awareness Office», un desprincipaux programmes de renseignement duDARPA (Département de la recherche dedéfense aux USA) de réaliser un systèmed’information intitulé «Total InformationAwareness System» (TIA). Il s’agit de développer un système modulaire etautomatique apte à révéler des activitésprototerroristes.TIA recueille, pour tout individu identifié dans lesystème par ses marquants biométriques –photographie faciale, empreintes digitales, iris,déambulation, etc. –, l’ensemble de ses tracesnumériques dans une liste à la Prévert qu’iln’est pas utile de traduire : Financial, Education,Travel, Medical, Veterinary, Country/Entry,Place/Event Entry, Transportation, Housing,Critical Resources, Government, Communications. Toute une panoplie de logiciels d’analyse multi-agents, de recherches sémantiques deconnexions, de modélisation comportementaleet de reconnaissance de «patterns»caractéristiques fouille, en permanence, cettemétabase de données dynamique pour avertir,in fine, des analystes humains sur un événementclé en moins d’une heure. Après une bataille médiatique d’associations deprotection des libertés civiles, le programme aété rebaptisé «Terrorist Information AwarenessSystem». Depuis, peu d’informations ont filtrésur l’avancée de TIA (il est éliminé du budget dela Darpa dans les dépenses militairesapprouvées par le Sénat pour 2004) et, bien sûr,sur son efficacité réelle.

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4 – Éthique. « Les parties prenantes doiventadopter une conduite éthique afin de ne pas cau-ser de tort à autrui. Cela consiste notamment àadopter des pratiques exemplaires et promou-voir des comportements qui tiennent comptedes impératifs de sécurité et respectent les inté-rêts légitimes des autres parties prenantes.»Cette recommandation s’oppose souvent à l’im-punité qui règne dans le cyberespace.5 – Démocratie. « La SSI doit être compatibleavec les valeurs des sociétés démocratiques,notamment la liberté d’échanger des penséeset des idées, la libre circulation de l’informa-tion, la confidentialité de l’information et descommunications, la protection adéquate desinformations à caractère personnel, l’ouvertureet la transparence. » Les 30 pays membresactuels de l’OCDE ont une pratique numéri-que globalement compatible avec les contra-dictions apparentes de cette recommandation(transparence versus protection).6 – Évaluation des risques. « Évaluer les ris-ques SSI, particulièrement en termes d’impor-tance des informations à protéger, de menaces,de vulnérabilités et de préjudices possibles, per-met de déterminer un niveau acceptable de ris-que et des mesures de sécurité appropriées.»Sans travail méthodologique systématique detype «gestion du risque», il est illusoire de pré-tendre protéger, dans toute sa complexité, sonpatrimoine informationnel numérique.7 – Conception et mise en œuvre de la sécu-rité. « Ce principe rappelle qu’il est primor-dial de considérer la sécurité comme un élé-ment essentiel des systèmes d’information. »En particulier, les contractualisations en matièrede systèmes d’information et de communica-tion doivent comporter des clauses touchant àla sécurité dont l’impact soit estimable.8 – Gestion de la sécurité. « Il est nécessaired’adopter une approche globale et continuede la gestion de la sécurité, basée sur l’évalua-tion des risques SSI. » La sécurité se gère auquotidien par l’analyse pertinente des tracesinformatiques, par l’application des mises àjour de sécurité, par l’appel régulier à desaudits, par la mise en place d’indicateurs per-mettant de mesurer les progrès.9 – Réévaluation. «Le dernier principe prévoitde réévaluer régulièrement la SSI et de met-tre à jour les politiques, référentiels et mesu-res de sécurité afin de prendre en comptel’évolution naturelle des risques. »L’application de l’ensemble de ces recomman-

dations procède du concept raisonné de la«défense en profondeur» et non d’une solution«clé en main» car comme l’affirme le philoso-phe Clément Rosset dans Le réel et son dou-ble : «La fausse sécurité est plus que l’alliée del’illusion, elle en constitue la substance même.»

ConclusionLe cybermonde nous fait pénétrer dans unedimension nouvelle des activités humaines.L’intelligence économique numérique connaîtun développement sans précédent en s’appuyantsur un outillage de plus en plus sophistiqué.Son exploitation, qui nécessite la mise en placed’une véritable politique de SSI, relève cepen-dant d’abord de l’intelligence humaine.

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La faussesécuritéconstituela substancemêmede l’illusion

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BIBLIOGRAPHIE

• Edward WALTZ, Information Warfare : Principlesand Operations, Artech House, 1998.• James BAMFORD, The Shadow Factory, The Ultra-Secret NSA from 9/11 to the Eavesdropping onAmerica, Doubleday, 2008.• Jean-Louis DESVIGNES, Les enjeux de la sécuritédes systèmes d’information,http://www.sstic.org/SSTIC03/articles/SSTIC03-Desvignes-Les_enjeux_de_la_securite_des_SI.pdf• Ken THOMPSON, Reflections on Trusting Trust,http://www.ece.cmu.edu/~ganger/712.fall02/papers/p761-thompson.pdf• L’intranet sécurisé interministériel pour la synergiegouvernementale (ISIS) http://www.ssi.gouv.fr/isis/• La défense en profondeur appliquée aux systèmesd’information, http://www.ssi.gouv.fr/fr/confiance/documents/methodes/mementodep-v1.1.pdf• Lignes directrices de l’OCDE régissant la sécuritédes systèmes et réseaux d’information : vers uneculture de la sécurité,http://www.ssi.gouv.fr/fr/dcssi/OCDE-lignesdir.pdf• Portail de la sécurité informatique :http://www.securite-informatique.gouv.fr/• Total « Terrorism » Information Awareness,http://epic.org/privacy/profiling/tia/

Des logiciels malicieuxL’année 2007 a marqué une rupture dans lasophistication et l’ampleur des attaques surInternet. On citera, entre autres, lescyberattaques ciblées dites chinoises (originelargement inconnue), la saturation des réseauxestoniens par des attaques en déni de service(première cyberguerre pour certainscommentateurs), l’extension des réseaux demachines compromises (botnet Stormworm),etc. Vincent Cerf, parfois appelé le «père del’Internet», a annoncé à la conférence de Davos,en 2007, qu’une machine sur quatre recelait au moins un logiciel malicieux ou «malware».

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La double invention dela machine à vapeur

L’espionnage est une pratique qui a effi-cacement servi, des siècles durant, la causedu progrès technique en assurant la circula-tion et le rééquilibrage des connaissances« sensibles » et en stimulant des émulations.Au XVIIIe siècle, cette activité a connu un essorconsidérable grâce à l’avènement de la révo-lution industrielle et en particulier, à l’inven-tion par James Watt en 1784 du moteur univer-sel – la machine à vapeur à double effet. Desavantages économiques spectaculaires qu’of-frait cette invention britannique ont réveilléles convoitises de ses voisins continentaux.Une véritable campagne de chasse, enclen-chée pour en pénétrer le principe tenu secret,a abouti en seulement quelques années grâceà l’habileté du jeune ingénieur-mécanicienespagnol Augustin Betancourt.

Restituer le principeCommissionné par son gouvernement en Francedans le cadre d’une vaste mission éducative,Betancourt s’est rendu en Angleterre en 1788pour se renseigner sur la nouvelle inventionde Watt dans l’intérêt du Cabinet des machi-nes qu’il était en train de réaliser pour l’Espagne.Accueilli aimablement par Boulton et Watt àla manufacture de Soho à Birmingham, il anéanmoins été tenu à distance de l’engin recher-ché. De retour à Londres, il a trouvé le moyende visiter les Albion Mills en passant outrel’autorisation des propriétaires et a pu ainsiapprocher la fameuse machine dissimuléepartiellement par un pan de mur. Cependant,le peu de chose qu’il a vu, combiné à ses pro-pres considérations, lui a permis de restituerle principe du double effet. Betancourt a ainsi(ré)inventé la machine qu’il n’a pas tardé àrendre publique de retour à Paris, un modèleet le rapport académique à l’appui.

Rapidité d'abordSi l’Espagnol n’en a tiré aucun bénéfice, hor-mis un renom académique, c’est l’industrielfrançais Jacques-Constantin Périer qui a été

le premier exploitant de cette invention dès1790. Ce succès contraste avec la tentativeavortée du mécanicien Lev Sabakine qui a tentéd’introduire au même moment le principe dudouble effet en Russie. Contrairement à lalibre entreprise en France et en Angleterre,l’administration étatique de ce pays, trop lourdeet trop rigide, s’est avérée impuissante à assu-rer la mise en usage rapide de cette innovation.

L’aspect formel de cette histoire est clair : ils’agit bel et bien d'actes d’espionnage. Toutjugement moral semblera toutefois anachro-nique dans la mesure où à cette époque le sta-tut juridique de l’inventeur était encore insuf-fisamment protégé et la percée d’un secretétranger était considérée comme un acte patrio-tique. Quant à l’aspect moral de l’affaire, il metà l’épreuve deux mentalités opposées : celledes envoyés de l’État qui accomplissent unemission et celle des inventeurs-entrepreneursqui travaillent à leurs risques et périls.

Irina Gouzévitch,Centre Maurice Halbwachs, EHESS, Paris

et Maxime Gouzévitch (01)Laboratoire LLR, École polytechnique

Quelques exemples concrets

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La naissance dela thermodynamique

La même logique qui a poussé Betancourt às’intéresser au principe du double effet l’amotivé pour mener entre 1787 et 1790 avecRiche de Prony des études expérimentalessur la force expansive de la vapeur.Ses résultats remarquables, qui ontfortement influencé la naissance de lathermodynamique en particulier à traversles cours de Prony à l’École polytechnique,n’ont pas échappé à la surveillance attentivede Watt qui recherchait toute informationpouvant être utile à la vitalité de ses affaires.Avant même leur publication par Betancourt,Watt possédait déjà les données chiffréesreliant la pression de la vapeur à satempérature. Les deux ingénieurs sesurveillaient mutuellement.

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Les indiscrétions destransports en commun

Voici presque quinze ans. C’est ma pre-mière semaine dans l’entreprise de télécom-munications dans laquelle je viens d’arriver.Nous discutons d’une affaire dont le gain peutdéfinitivement asseoir la filiale en cours dedéveloppement en Suède. Le client potentiel aun équipement informatique peu répandu maisque je connais très bien par mon poste anté-rieur. Je me retrouve donc en vingt-quatre heu-res dans l’avion. Malgré le brouhaha, monattention est attirée par trois-quatre mots pro-noncés dans le siège devant moi : le nom del’équipement informatique, celui du client, etquelques données techniques. Piqué par lacoïncidence, j’écoute attentivement. Ce sontdeux commerciaux d’une société concurrenteen train de préparer leur stratégie pour leur ren-dez-vous en se croyant à l’abri dans le confortde la classe affaires. J’ai effectué un compterendu intégral à mon commercial à l’arrivée pouradapter notre proposition en conséquence.Nous avons gagné l’affaire.

Un budget en publicBeaucoup plus récemment, l’an dernier, TGVParis-Bordeaux, compartiment de première,je suis seul contre la fenêtre. Après avoir finimon journal, je m’ennuie un peu, j’écoute. Deuxcadres commerciaux se font face et préparentleur réunion. En très peu de temps, j’identifieleur lieu de destination : un établissement mili-taire du Sud-Ouest. Pire, je devine de quel sys-tème d’information ils sont en charge. Je com-prends que la réalisation souffre de quelquesdifficultés et qu’il faut y faire face tout en pré-servant et la marge de l’entreprise et la consom-mation des ressources tout en ne perturbantpas les autres affaires. L’ordinateur portablefait des demi-tours sur la tablette pour que

les deux interlocuteurs soient bien d’accordsur le contenu de la feuille Excel. Au bout d’unmoment, quelque chose a dû les frapper : l’und’eux a rabattu l’écran avec un regard dansma direction. Ils sont alors partis vers la voi-ture-bar en laissant l’ordinateur dans le com-partiment. Nous approchions de ma destina-tion. Je pouvais relever l’écran et consulter lebudget ou plus simplement dérober l’objetpour étude approfondie au calme.

Préparation le matin, bilan le soirQuelle moralité pour ces deux anecdotes ?Les transports en commun ne sont pas desbureaux. Même si cela peut représenter uneperte de temps pour l’employeur, il faut sélec-tionner le type de travail possible (un travailindividuel sans caractère de confidentialité).Il faut éviter de parler avec des collègues (iné-vitablement le ton monte imperceptiblementavec le temps).Il ne faut pas se croire protégé par l’origina-lité éventuelle de l’horaire ou du moyen detransport. Les cadres ont les mêmes horai-res et les mêmes contraintes. Pire, vous pou-vez profiter de la préparation de la réunion lematin et de son bilan au retour le soir.

Patrick Gerlier (72),directeur adjoint de l'ENSTA

Aspirer le contenudes ordinateurs

Que c’est beau ces jouets pour cadremoderne : assistant électronique, téléphone,ordinateur portable! Mais quelle indiscrétion!Avez-vous déjà essayé dans un lieu public(conférence, salle de réunion, transport,voire votre propre bureau) de vous mettre àl’écoute de radio-gadget?Faites l’expérience avec votre ordinateur.Vous découvrirez les téléphones ou PC devos voisins et vous pourrez parfois vousconnecter et aspirer le contenu durépertoire, de l’agenda ou autre.L’espionnage électronique qui était duressort des États est maintenant à la portéedu premier venu.Pour éviter des conséquences fâcheuses,désactivez tout ce qui rayonne, Bluetooth,WiFi…, vous gagnerez en sécurité et enautonomie de batterie.

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Se limiter àun travailindividuel sanscaractère deconfidentialité

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À ma sortie de l’X, il y a près de vingt ans,jamais je n’aurais imaginé entrer à la DGSE. J’yai pourtant fait mes premières armes en sor-tie d’école d’application. Puis j’y ai occupédivers postes aussi passionnants les uns queles autres. Aujourd’hui, j’y dirige un service unpeu « spécial », qui emploie des agents surplus de 50 métiers différents : chimistes, élec-troniciens, cartographes, juristes d’affaires,informaticiens, spécialistes en plasturgie, etc.La DGSE, par l’intermédiaire de sa grandedirection technique, est polytechnicienne ausens propre du terme : elle s‘efforce de faireconcourir simultanément tous les savoirs tech-niques et scientifiques à la production de valeur,le « renseignement », au profit de la nation.Qu’y font donc la vingtaine de camarades poly-techniciens dont les rangs sont régulièrementrenouvelés ? Certains, attirés par des problè-mes concrets d’algorithmique appliquée, ten-tent – souvent avec succès – de percer lesmystères de codes cryptographiques réputésdifficiles. D’autres mettent à profit leurs com-

pétences en télécommunications pour per-mettre à la DGSE d’intercepter les systèmesd’aujourd’hui et de demain.Les polytechniciens de la DGSE sont aussi desspécialistes du traitement de l’image, de l’in-formatique au sens large, de la sécurité dessystèmes d’information, ou de l’électroniqueappliquée. Lorsque des synergies nouvellesentre ces savoirs doivent être inventées, nuldoute que l’appartenance à une même commu-nauté d’esprit est un atout.C’est encore plus vrai pour ceux d’entre nousqui exercent un rôle de management techni-que ou stratégique au sein du « Service ».Une seule vraie contrainte pour nous qui avonsdécidé de servir l’État au sein d’un service derenseignements : l’indispensable discrétionqui entoure nos activités, et les techniques quenous développons.

Les polytechniciens de la DGSE ne sont pasprès de publier leurs mémoires ni de signerleurs articles.

Ancien responsable de valorisation de bre-vets chez Thomson, je suis passé expert indé-pendant pour innovateurs (inventeurs, PME,scientifiques).Très tard un soir de 2000, pénétrant dans unepièce de mon domicile servant de bureau, monregard a été attiré par le voyant lumineux demon modem. Au téléphone s’entendait le signalcaractéristique d’un flux de données. Mon ordi-nateur émettait à mon insu.Un relevé obtenu de l’opérateur téléphoniqueconfirma cet appel à un numéro (quatre pre-miers chiffres) à Saint-Quentin-en-Yvelines,inconnu de moi. Mon ordinateur était l’appe-lant, sans que je l’aie programmé à cette fin.17 appels avaient joint ce numéro, sur deuxsemaines. Quatre heures de communicationtotale. Sans ce voyant détecté, la «visite» n’au-rait laissé aucune trace sur mon disque dur, nidétruit de fichier.Aucun appel n’était passé au même momentd’un jour au suivant, sans être toutefois aléa-toires ; ils survenaient la nuit, lorsque je nesuis plus dans ce bureau, ou en journée quandtoute la famille s’absente. Certains horaires

correspondaient à des absences inhabituel-les de ma part ; l’une résultait de ma partici-pation à un colloque, sans lequel j’aurais étéà mon domicile. Reste à comprendre si l’au-teur de cette vague d’appels disposait de moyensde savoir quand mon épouse et moi étionsabsents. Cela n’est pas écartable car j’avaisen dossiers plusieurs inventeurs en procèsavec des multinationales sur des brevets, avecd’importants dommages et intérêts deman-dés. Il s’agissait d’innovations fortes, ayantsuscité des articles de presse.L’hypothèse n’est pas exclue, d’un acteur éco-nomique désireux de collecter de l’informa-tion chez les experts de ces inventeurs. Auquelcas leur action les aura déçus car ils ont inves-tigué mon ordinateur personnel (ma cave à vin– mise à jour sur logiciel – n’a plus de secret !)et non le professionnel, jamais connecté horsutilisation.Plainte a été déposée. L’affaire est en cours…à son rythme.

Bernard Dias (80),Conseil en innovation, PDG Optima SA

Ma cave à vin n‘a plus de secret

Des X à la DGSE : pour quoi faire?

L'appartenanceà une même

communautéd'esprit est

un atout

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L‘affaire FarewellL’affaire Farewell, de contre-espionnagescientifique et industriel, se place au rang des pluscélèbres. Depuis Moscou, Vladimir Vetrov – aliasFarewell – colonel du KGB, proposa aux Françaisde leur révéler les documents collectés par sonunité dédiée à l’espionnage technologique del’Ouest. Démasqué par ses collègues, Vetrov serajugé, condamné pour haute trahison en 1984 etfusillé. Son premier «passeur de documents» futun X43, et son épouse, alors en poste commercialdans la capitale soviétique.

Cette affaire d’espionnage a débuté enmars 1981, sous la présidence de MonsieurValéry Giscard d’Estaing.Me trouvant à Moscou pour des raisons profes-sionnelles depuis le mois de décembre 1978,j’ai été contacté par la DST (Direction de lasurveillance du territoire) pour rencontrer unofficier du KGB soviétique qui avait appelé ausecours par deux lettres successives adres-sées à la DST. Cet officier avait séjourné à Parissous couvert de la mission commerciale del’ambassade de l’URSS à Paris ; la DST leconnaissait et prudente a préféré que le pre-mier contact avec lui soit effectué par une per-sonne « neuve ».Avec beaucoup de précautions j’ai pu rencontrercette personne qui a été très étonnée quand jelui ai dit que je ne faisais pas partie de la DST,mais néanmoins m’a remis un papier écrit enfrançais contenant des renseignements scien-tifiques d’ordre général. J’ai eu l’audace delui dire qu’ils ne m’apprenaient rien, et vexé,il m’a promis qu’au prochain rendez-vous les

nouvelles seraient très intéressantes. En fait,il ne voulait pas quitter le pays, et seulementtravailler avec la DST pendant trois ans.Au cours des deux mois et demi suivants, jele rencontrais en principe le vendredi soir, il meremettait quelques documents que je photo-copiais le samedi et le dimanche, le bureauétant fermé. Je lui rendais les documents lelundi suivant.Ma présence au bureau le week-end n’étonnaitnullement le gardien de l’immeuble car depuisle début de mon séjour, j’avais pris l’habitudede venir travailler le samedi et le dimanche.Devant l’ampleur de la tâche j’ai mis monépouse au courant, elle a accepté de m’aideren particulier quand il a fallu photocopier ungros volume de deux cents pages signées parMonsieur Andropof, directeur du KGB.

La valise diplomatiquePour faire passer les documents en France, ily avait plusieurs méthodes :a) si l’envoi était une lettre de vingt grammes,nous utilisions la valise diplomatique car tousles Français résidant en URSS avaient ce droit,b) pour les autres envois nous utilisions lesmissions techniques françaises importantescar elles bénéficiaient du statut de VIP, c’est-à-dire ne passant pas la douane,c) pour les gros volumes de deux cents pages,j’ai fait croire à la mission commerciale del’ambassade de France qu’il s’agissait d’unappel d’offres très important avec réponseurgente et le paquet a pu prendre la valisediplomatique,d) fin avril 1981, un dernier paquet d’une ving-taine de pages était urgent à faire parvenir etil n’y avait pas de mission en vue. En outre,nous avions décidé ma femme et moi de visi-ter les républiques musulmanes de l’URSSpendant quelques jours. J’ai conservé sur moi,nuit et jour, ce document pendant tout le voyage.À mon retour à Moscou, j’ai pris l’avion pour Paris(voyage habituel de travail) et passé la douaneavec le paquet sous le bras gauche et la peurau ventre.Je remets ce document à la DST le 11 mai1981, lendemain de l’élection de MonsieurFrançois Mitterrand. Devant les risques encou-rus par cette mission, la DST décide de meremplacer par un militaire bénéficiant de laprotection diplomatique.

Xavier Ameil (43)Dessin de Maurice Tournade.

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PAR PASCALE SEVAULT-DESNOS

Pandore et la modernité

Par nature, la recherche avanceplus vite que son cadre éthique. Quefaire alors ?

Jacques Testart se trouve au cœurd’une tourmente de ce type lorsquequ’il invente la « vache porteuse »puis Amandine, le premier bébé-éprouvette français ; il est alorsconfronté à des «récupérations» ha-sardeuses, nourries par des appé-tits individuels de médiatisations. Ildécide alors de faire une pause. Ca-talogué comme « celui qui refuse larecherche», il continue le métier dechercheur tout au long de sa vie pro-fessionnelle. D’où de multiples ques-tions : « qu’est-ce que le métier dechercheur?», «quel doit être le rap-port entre recherche et société » ?Face à la demande du tri des em-bryons dans l’œuf, il a réclamé un« droit à la non-recherche ».

Aujourd’hui, les chercheurs sont de-venus des spécialistes. On les ap-pelle aussi des experts. Ils sont à lafois indispensables et dangereux. In-dispensables car ils ont un savoirphénoménal sur un sujet précis ;dangereux car ils perdent la vued’ensemble. Et s’ils l’ont, ils ne sontpas autorisés à faire-valoir des ar-guments qui n’appartiennent pas àleur champ d’expertise.

Il y a trente ans environ, un philoso-phe des sciences nommé GilbertHottois propose un nouveau motpour décrire l’activité moderne derecherche : la technoscience. Elleévoque le cercle vertueux de la re-lation constante entre le laboratoire

et les technologies ; l’un alimentel’autre et vice-versa. Cette définitionévoque également la prédominancede la maîtrise sur la connaissance.La finalité devient plus importanteque la découverte et la course auxbrevets et aux produits, la finalitésuprême.

Coût du savoir ou coûtde la maîtrise ?La recherche fondamentale coûtecher et n’est plus valorisante. Lestechnologies ne résolvent pas tousles problèmes, mais, dans la recher-che publique, il faut démontrer quel’on a été capable d’intéresser un in-dustriel qui accepte de participer audéveloppement. Commence alors lacourse aux enjeux contradictoires.Le plan cancer, lancé il y a cinq ans,n’a produit aucun résultat. Pourtant,on sait que 50 % des cancers decampagne sont issus de problèmesenvironnementaux (pollution agri-cole) et domestiques. Aujourd’hui,personne ne travaille sur cet aspect.Il est probablement difficile de trou-ver les industriels intéressés.

La recherche… par l’absurdeOr, qu’est-ce qui est important? Re-chercher le gène qui provoque uncancer et ne pas savoir quoi enfaire? Ou, rechercher dans l’environ-nement ce qui provoque le cancer ?Pourquoi pas les recherches danstoutes les directions, si on en a les

moyens ? Mais on n’en a pas lesmoyens. Le choix est donc un vraisujet de discernement.

[email protected]

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

L’Association Rencontre avec des hommes remarquables (RADHR)proposait récemment un débat avec Jacques Testart, docteurès sciences, sur le thème de la mise des sciences en démocratie.

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RENCONTRES

Le chercheur est une taupe

monomaniaque

EINSTEIN

Les utopiesqui emballentUne autre démarche pour tenterl’aventure du financement consisteà la mise en place « tactique »d’utopies qui emballent. L’utopiedu moment est celle de la« mystique génétique ». Elle vientd’une idée répandue depuis moinsde cinquante ans qui a dit que legène, c’est la vie et que l’ADN estune molécule-clé qui contient toutle programme de développement.Non. L’ADN n’est pas une moléculevivante.Ce n’est donc pas la « vie ».C’est une molécule importantedans laquelle il y a des gènes (quel’on connaît encore très mal) quidonnent des informations maispas de programme ! Une preuvesimple à observer : les feuillesd’un arbre. Elles sont différentesen taille ou en couleur, selon leurpositionnement dans l’arbre.Elles ont pourtant le même ADN.

Invité de l’Association, JacquesTestart s’est demandé en quoi ilpouvait être remarquable ?On est toujours remarquable parrapport à un groupe ; quelledifférence peut-il avoir avec lesauditeurs ? Docteur ès sciences,ordre du Mérite, Prix scientifiquede la Ville de Paris, prix Moron(philosophie) de l’Académiefrançaise, il est le seul à ne pasavoir eu son bac, mais un CAP dejardinier. Il pense qu’il a été« remarqué », probablement dufait de ce qu’il n’a pas fait.

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008 45

Une grande école,pourquoi pas moi ?

Des élèves polytechniciensaccompagnent les lycéens des éta-blissements partenaires pendanttrois ans, par des séances de tuto-rat – qui ne sont pas du soutienscolaire – pour développer laméthodologie, les outils et l’infor-mation nécessaires à la poursuitede ces études. Ces séances ont lieules mercredis après-midi pour24 lycéens de seconde, 22 de pre-mière et 17 de terminale.

« Notre objectif, explique IsabelleBapteste, responsable de ce pro-gramme, est surtout de dévelop-per le capital socioculturel, trans-mis dans les milieux favorisés parla famille. »

En parallèle, des ateliers plus spé-cifiques sont animés par des inter-venants extérieurs, selon trois thè-mes : l’orientation, animée par desconseillers d’orientation du minis-tère de l’Éducation nationale ; l’ex-pression, par deux comédiens, etles codes sociaux, par trois socio-logues.

Renouveler les équipesÀ cela s’ajoutent des sorties cultu-relles et des modules de décou-verte des filières et des métiers (vi-sites d’entreprises, de laboratoires,d’écoles, etc.). 24 élèves de la pro-motion 2006 se sont investis l’andernier dans ce programme, ainsique trois X 2007 revenus de leurstage de première année avecGEPPM. Une équipe de tuteurs2007 prend la relève.

Avec la fin de la première pro-motion PPM, qui a passé son bacen juin dernier, le programmepostbac a été lancé. Il consiste enun suivi financier – par des parte-nariats avec les entreprises – etpsychologique – par des parraina-ges d’étudiants – des futurs étu-diants, pour les deux prochainesannées.

Valérie et David, X 2006 et tuteursdu programme GEPPM, commen-tent leur engagement.

« Nous avons effectué notre stagecivil de première année en lycéeavec ce programme et nous avonscontinué à notre arrivée sur lecampus. C’est très intéressant detravailler avec des plus jeunes pourles pousser vers l’avant, un peuplus qu’au lycée.

«Les lycéens choisissent un projetet doivent le mener à bien enéquipe. Notre groupe a entreprisde créer un magazine sur les mé-dias préférés des jeunes : Médiado.Ils font la maquette du magazineavec des interviews de journalis-tes, des sondages, des articles surles médias, un quizz, etc. Ils l’im-priment au Centre Poly-Média puis

présentent leur projet devant unpublic composé de leurs cama-rades, de leurs parents et d’élèvesde seconde.

« Nous ne faisons pas de soutienscolaire. L’objectif du programmeest de les faire s’exprimer et écrirepour qu’ils se sentent plus à l’aise,qu’ils soient plus assurés. Lesséances s’organisent donc autourde l’actualité, de l’anglais, de l’ex-pression orale et écrite, de l’orien-tation, etc. Ce n’est pas scolaire.Par ailleurs, les responsables duprogramme organisent des acti-vités régulières, comme des sor-ties au théâtre, des visites d’éco-les ou d’entreprises. »

Le programme «Une grande école pourquoi pas moi ?» (GEPPM),établi en partenariat avec trois lycées ZEP de l’Essonne, vise à faire lapromotion d’études supérieures ambitieuses auprès de lycéens issusde milieux modestes.

S’ouvrir sur l’avenir« Depuis que nous suivons leprogramme PPM, nous avons plusde facilité à nous exprimer. Noussommes plus pertinents en courset nous avons l’impression desavoir plus de choses. Les séancesde tutorat nous donnent beaucoupde culture générale, et leprogramme PPM nous apporte desexpériences très enrichissantes,comme les visites de grandesécoles, de laboratoires. Il nousaide aussi à nous projeter dansl’avenir. Nous connaissons lesétudes supérieures qu’il nous estpossible d’entreprendre et ça nousdonne une plus grande ouverturesur l’avenir. »

Kamel, Wendy et Maryline,en classe de première au lycée de

Sainte-Geneviève-des-Bois

Développer le capital

socioculturel qui, dans

les milieux favorisés, est

transmis par la famille

VIE DE L'ÉCOLEPAR PAULINE SERRAZ

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PAR PAULINE SERRAZ

Transmettre le goût de la science

La nuit des chercheurs

Apprendre la science en s’amusant,savoir à quoi servent les maths, toutconnaître du mur antibruit, assis-ter à une performance artistico-scientifique, etc. «La nuit des cher-cheurs», événement européen, s’estdéroulée le 26 septembre dernier.Les chercheurs étaient là pour fairecomprendre leurs recherches auxgrands comme aux petits. Ils étaientaccompagnés des élèves de l’Asso-ciation La Main à la Pâte – appren-dre la science en s’amusant – ainsique d’autres acteurs du plateau deSaclay – ELI (Extreme Light Infra-structure), C-Nano ou le Synchro-tron Soleil. Des expositions retra-çant la physique d’hier à aujourd’huiet des portraits de chercheurs de

l’École côtoyaient les stands dansle grand hall. Comprendre la sciencepasse aussi par le jeu, c’est notam-ment l’esprit de La Main à la Pâte.Des expériences ludiques, accessi-bles et instructives étaient propo-sées pour toute la famille. Les en-fants pouvaient ainsi s’improviserchercheurs. Une pièce de théâtrescientifique et burlesque intituléeJack l’électron participait aussi decet esprit.

Mais La nuit des chercheurs, c’étaitaussi plein d’autres surprises, uneperformance «Waves» Art et Scien-ces, un mur d’images, des exposi-tions, un tir lidar.

http://www.polytechnique.fr/dcom/nuitdeschercheurs/

La science en fête

Après le succès de la Fête de laScience l’année passée, l’École réi-tère sa participation mais elle mu-tualise cette fois-ci l’événement avecd’autres acteurs du plateau de Sa-clay. En 2007, un public nombreux,notamment composé des famillesde la promotion 2006 qui était pré-sentée au drapeau le même jour,était invité à découvrir les coulissesde la recherche à l’École. Les cher-cheurs leur avaient ouvert les por-tes des laboratoires afin de parta-ger avec eux leurs découvertes,leurs projets en cours et tout ce quifait le quotidien d’un chercheur enFrance.

L’édition 2008 est coordonnée pourle plateau de Saclay par Île descience. La Fête de la Science s’estdéroulée les 22 et 23 novembre dansle gymnase de Supélec, avec la par-

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Outre les colloques et les salons, généralement réservés à un publicaverti, l’École s’investit dans de nombreux événements nationaux,voire européens, à l’occasion en partenariat avec d’autres grandsacteurs du plateau de Saclay.

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VIE DE L’ÉCOLE

La science au service de l’émotionLa musique pilote en direct la production d’ondes sur trois lames d’eau de3 mètres de long. Ces ondes sont projetées par un système optique, qui lesamplifie, sur des grands écrans. Vous êtes ainsi plongés à l’intérieur desvagues ; vous vous déplacez dans un environnement fluide où des ondes etdes lumières se déploient au même rythme dans l’espace devenu unemémoire du temps. Jean-Marc Chomaz, chercheur au LadHyX encollaboration avec Antoine Garcia, son alter ego, Laurent Karst, graphiste, etFrançois-Eudes Chanfrault, compositeur, sont à l’origine de cette création –exclusive pour La nuit des chercheurs : une performance artistique etscientifique, où la science se fait matière au service de l’émotion.Après la « tornade apprivoisée » de la précédente Nuit des chercheurs (unecollaboration de Tonio, Jean-Marc et Laurent) et la performance Infraespace– anneaux de fumée générés par 12 percussions – présentée à la Nuitblanche 2005 et dans divers festivals, le Trio a réitéré sa collaboration le26 septembre dernier.

La nuit des chercheurs.

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ticipation du CEA, du Synchrotron,de l’université Paris-Sud, de Supé-lec, du Bus des sciences.

Par ailleurs, les laboratoires del’École ont ouvert leurs portes le18 octobre, à l’issue de la cérémo-nie de Présentation au drapeau dela promotion 2007.

www.fetedelascience.fr

Une ville européennedes sciences

Dans le cadre de la présidence fran-çaise à l’Union européenne, le mi-nistère de l’Enseignement et de laRecherche a pris l’initiative de met-tre la science à l’honneur en orga-nisant une ville européenne dessciences au Grand Palais, en intro-duction à la Fête de la Science.

Du 14 au 16 novembre, plusieursprojets européens ont été exposésau sein d’une ville fictive dans la-quelle ils s’insèrent comme une partde la vie de cette cité. Les projetsont été sélectionnés au préalable parle Ministère. L’École polytechnique ya tenu sa place grâce à plusieursprojets d’envergure.

Le projet européen Extreme LightInfrastructure (ELI), porté par Gé-rard Mourou, directeur du Labora-toire d’optique appliquée (LOA) – etrécemment élu à l’Académie russe– a retracé l’histoire du laser et sonavenir à travers différentes piècesd’un «appartement». Le second pro-jet s’articule autour des nanotech-

nologies appliquées aux grands sys-tèmes, en coopération avec la Fon-dation de coopération scientifique(FCS). Un «garage» abritait un sys-tème automobile : une borne instal-lée près d’une voiture permettait aupublic de plonger au cœur du sys-tème du moteur.

La Main à la PâteLa méthode de l’AssociationLa Main à la Pâte laisse les élèvesse confronter à un problème ettrouver la solution par eux-mêmes.Guillermo, X 2007, explique que« C’est un enseignement parl’expérimentation et le défi.Nous devons susciter l’intérêt del’enfant pour l’amener à se poserdes questions, à formuler deshypothèses, et les tester jusqu’àétablir sa conclusion.Par exemple : pourquoi leschâteaux d’eau sont-ils enhauteur ? Le bricolage et laréalisation de la solutionmarquent les esprits.C’est une vraie démarchescientifique, qui est aussi lemoyen de proposer autre chose àl’élève en difficulté, en échecscolaire, à celui qui s’adapte malau système scolaire, en le laissantessayer sans le juger. Il trouveenfin un intérêt à l’école ! »

Expliquer les résultatsDenis Grebenkov, chercheur au Laboratoire de physique de la matièrecondensée, estime « qu’il est indispensable pour les chercheurs de ne passe limiter aux centres de recherche mais d’expliquer les résultats de leursrecherches au grand public, d’étendre les savoirs.Nous devons ainsi expliquer pourquoi la recherche est importante etdemande des financements, à quoi elle sert et quels en sont lesapplications. La nuit des chercheurs est pour cela une excellente occasionet je suis ravi que l’École polytechnique organise de telles manifestationssur le campus ! »

Fête de la Science.

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PAR HUBERT JACQUET (64)

Un colloque sur l’envers du décor

Lutter contre l’exclusionpar le système éducatif : un défi

Dans un monde où la compéti-tion est omniprésente, l’accès auxmeilleurs diplômes est un enjeu dontles familles aisées et celles d’ensei-gnants ont bien compris l’impor-tance, ce qui leur permet d’utiliserles atouts dont elles disposent pouraider efficacement leurs enfants.Elles réalisent ainsi une forme d’ap-propriation des meilleures placesalors que, plus ou moins consciem-ment, les autres familles semblentavoir intériorisé le handicap qui lesexclut. Un tel fonctionnement heurteles idéaux démocratiques de l’éga-lité des chances, il va à l’encontred’une valorisation optimale des res-sources humaines et à terme il me-nace la cohésion sociale du pays.

Exclusion sociale et exclusionscolaire vont de pair

Dans les quartiers dits sensibles, laculture de la rue pèse d’un poidscroissant sur les jeunes, ce qui lesconduit à valoriser des conduites quiles opposent aux institutions. Parexemple en traitant de « bouffons »les bons élèves, ils les obligent à

choisir l’appartenance au groupe auxdépens de l’assiduité scolaire. La po-pulation des collèges tend à s’homo-généiser autour des populationsd’origine immigrée car la constitu-tion de classes indifférenciées a tuéla dynamique collective et les élèves,seulement préoccupés de « bonnesnotes», ont perdu toute motivation àacquérir des savoirs.

La trop forte concentration d’élèvesen difficulté produit une sorte d’en-fermement social dans une institu-tion scolaire que les parents perçoi-vent avec une certaine méfiance, carils n’ont de relations avec elle quepour entendre des reproches ou sevoir notifier des sanctions. Pour euxl’image de l’école comme point dedépart du progrès social a disparu.Cette situation est à mettre en rela-tion avec l’absence de mixité sociale :20 % des établissements scolaires

regroupent 80 % des enfants issusde l’immigration. À cela s’ajoute unepédagogie conformiste qui ne favo-rise pas l’implication des élèves.L’absence de voies de rattrapage no-tamment par la formation continuerend l’échec définitif. Enfin aucunerègle n’oblige les établissements àétablir des liens avec leur territoire,ni à y rechercher des appuis et desressources qui leur permettraientune meilleure insertion de l’ensei-gnement dans l’environnement éco-nomique.

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Dans les quartiers difficiles, la fonction d’intégration sociale rempliepar l’école est très loin d’être satisfaisante. Exclusion sociale,ségrégation scolaire, perte des idéaux républicains concourent àrendre l’accès aux meilleurs diplômes hors de portée des enfantsissus de ces zones. La nécessité d’un changement est unanimementreconnue. Pour les uns, il suffirait d’aménagements au systèmeactuel et certains ont fait le choix d’intervenir sur le terrain pouraméliorer les conditions d’accès aux études supérieures. D’autrespréconisent un changement du système en appelant une nouvellevision du rôle de l’école et du cursus scolaire.

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FORUM SOCIAL

Un débat prometteurVoir au Collège de France le thèmede l’exclusion scolaire traité pardes anciens élèves de l’Écolepolytechnique fut un événementsymbolique fort. Il s’agissait derépondre à la demande du Conseilde l’AX qui, dans le contexte de laréforme de l’enseignementsupérieur, souhaitait un débat surles conditions dans lesquelles lefonctionnement actuel du systèmeéducatif ouvrait l’accès aux grandesécoles. Mais au-delà du symbole,le colloque, qui a été organisé parJacques Denantes (49), JacquesGallois (45) et Dominique Moyen(57) dans le prolongement del’Assemblée générale de l’AX du16 juin 2008, a permis un débatriche de promesses sur lesconditions dans lesquelles lesystème éducatif pourrait donnerun accès plus ouvert aux grandesécoles. Un compte rendu détailléest disponible sur le site Web de larevue (www.lajauneetlarouge.org)et un dossier sera publié début2009.

L’image de l’école

comme point de départ

du progrès social

a disparu

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Une implication collectiveest nécessaire

Il revient à la politique de la ville depromouvoir un désenclavement desquartiers sensibles en favorisantl’implantation d’équipements deprestige et en développant des clas-ses qui soient hétérogènes en mi-lieux sociaux mais homogènes enniveau scolaire. La finalité seraitd’organiser un brassage d’élèvesavec ceux des autres quartiers. Ilfaudrait également un plus grandengagement des enseignants dansla relation éducative et une meilleurecoordination entre les établisse-ments et les familles, de façon quechaque établissement devienne unlieu familier aux parents. Cela sup-pose des chefs d’établissement mo-tivés et responsables.

Enfin l’organisation en périscolaired’activités non seulement sportivesmais aussi et surtout culturellespourrait mobiliser les enseignantsqui, dans leur grande majorité, ontun fort engagement dans leur mé-tier d’éducateur. Cette ouverture per-mettrait aussi d’agir sur l’état d’es-prit des familles en leur donnant uneautre image de l’école et du collège.

Pour Christian Jeanbrau, ces amé-nagements seront insuffisants s’ilsne s’inscrivent pas dans une reconfi-guration complète de notre systèmeéducatif, qui serait basée sur une or-ganisation de la vie scolaire autourde deux mi-temps. Le matin seraitconsacré au « parcours de citoyen-neté », dont la fonction serait d’ap-prendre aux enfants à vivre avecd’autres, si différents soient-ils :l’enseignement porterait sur desconnaissances élémentaires néces-saires à la vie en société, lire, cal-culer, s’exprimer oralement…L’après-midi serait consacré au« parcours individuel d’excellence »propre à chaque enfant qui choisi-rait selon ses goûts parmi des mo-dules d’enseignement général, tech-nologique ou professionnel.

Aménager l’accèsaux grandes écoles et soutenirles moins favorisés

Pour ouvrir aux jeunes des banlieuesla perspective de débouchés sociale-ment valorisés, il faut leur rendre lesgrandes écoles accessibles. L’optionretenue par Sciences Po est une di-versification des modes de recrute-ment, avec des filières adaptées auxélèves des quartiers difficiles : aubout de cinq années, le succès estau rendez-vous car il n’apparaît pasde différences significatives suivantles voies d’accès. Dans le cadre duprogramme « Une Grande École,Pourquoi Pas Moi ? », l’École poly-technique, en partenariat avec l’ES-SEC, a développé un système de par-rainage avec un binômage d’élèveset de lycéens. Dans le cadre de l’As-

sociation Tremplin, d’autres élèvesde l’École assurent des soutiens sco-laires d’élèves de classes termina-les. L’Institut Paul Delouvrier rem-plit la même fonction avec desjeunes retraités. Autant d’initiativesqui concourent à corriger la perver-sion du système de sélection des éli-tes et à valoriser les ressources hu-maines des zones défavorisées. Pourl’École polytechnique ces expérien-ces et les perspectives qu’elles ou-vrent sont complémentaires. Le gé-néral Xavier Michel, commandantl’École, estime nécessaire que lesélèves prennent conscience de la si-tuation et que cela les incite à s’en-gager. Il fera en sorte que tous sansexception soient confrontés à cesquestions au cours des stages deformation humaine de premièreannée à l’école.

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Un panel exceptionnel

Le colloque animé par Michel Berry (63), directeur de l’École de Parisdu Management, a réuni Jean-Marie Petitclerc (71), prêtre salésien etanimateur d’une association de travail social, François Gaudel (66),professeur de mathématiques enseignant depuis trente ans à Bobigny,Nicole Moretti, qui a dirigé successivement deux collèges en quartiersensible, Christian Jeanbrau (63), inspecteur de l’Éducation nationale,Richard Descoings, directeur de Sciences Po, Mathilde Sion (06) et HubertChaperon (06), qui font du soutien scolaire respectivement dans le cadrde « Une Grande École Pourquoi Pas Moi ? » et de l’Association « Tremplin »,

Jacques Bouttes (52), de l’Institut Paul Delouvrier, Yves Lichtenberger,président de l’université Paris-Est, et Xavier Michel (72), directeur de l’École polytechnique.

Donner aux familles

une autre image

de l’école et du collège

Le Collège de France, un lieu symbolique pour la tenue du colloque.

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PAR ANDRÉ DANZIN (39) ET GUY KEMLIN (39)

Henri Lerognon (39) et Jacques Aubry (46),pionniers de la microélectronique française

Henri Lerognon vivait pour les au-tres et pour les grandes causes na-tionales. Ses activités lui permirenten 1943 de faciliter le passage enEspagne et en Angleterre de quel-ques camarades. Arrêté avec Geor-ges d’Argenlieu (39), le 11 janvier1944, il partit de Compiègne pourAuschwitz. Après quelques jours àBuchenwald, il parvint le 24 mai aucamp de Flossenbürg. Il trouva làdes polytechniciens et des méde-cins qui lui apportèrent une aidemorale précieuse. Il fut libéré le23 avril 1945 par un détachementde l’armée Patton.

Fréquences

et semi-conducteurs

Après différentes missions au titredu corps des télécommunications,il participa aux négociations sur lesattributions internationales des fré-quences pour les émetteurs radio,puis reçut d’importantes responsa-bilités pour la téléphonie de Mada-gascar où il eut comme adjoint Jac-ques Aubry. En 1957, Henri a rejointla CSF. Il lui est demandé de pren-dre la direction générale d’une fi-liale, la Compagnie des semi-conducteurs Cosem, en création,qui connaîtra plus tard une impor-tante promotion européenne lors dela fondation de la S.T. Microélectro-nics qui est aujourd’hui l’une despremières sociétés mondiales.

Henri Lerognon avait appelé auprèsde lui Jacques Aubry en qualité dedirecteur commercial de la Cosem.

Entre l’enclume et le marteau

Ces hommes en acceptant leursresponsabilités savaient les diffi-cultés de leur tâche. Ils interve-naient en qualité de dirigeantsd’une entreprise exposée entrel’enclume et le marteau; l’enclumedes pays à bas salaires (Japon,Corée du Sud, Hongkong et Singa-pour) et le marteau américain dessubventions accordées à ce do-maine considéré comme critiquedans la concurrence de la guerrefroide. Henri Lerognon, libre detoutes attaches de droits de pro-priété industrielle, fut en mesured’exporter dans le monde entier. Ilsavait pardonner, il créa en Alle-magne une filiale commune avecun industriel bavarois, acceptantainsi d’être un acteur de la réconci-liation franco-allemande.

Tenir bon

Au plein milieu de la tourmenteconcurrentielle, Henri Lerognon etJacques Aubry surent garder latête froide, l’imagination et l’espritd’entreprise. À eux, et à leurs suc-cesseurs, nous devons la recon-naissance d’avoir tenu bon pourdonner ses racines à ce qui est au-jourd’hui une société européennespécialisée dans les techniques lesplus avancées en électronique.Après un passage au bureau descarrières de notre École, Henri Le-rognon s’était consacré à la prési-dence des anciens de Flossenbürgqu’il assuma de juin 1974 à dé-cembre 1996, admirablement aidédans son engagement de mémoireet dans le soutien moral à ses an-ciens collaborateurs par sonépouse Marie-José. Il était officierde la Légion d’honneur et com-mandeur de l’ordre national duMérite.Quant à Jacques Aubry, il réalisalors de sa retraite le rêve qu’entre-tenaient beaucoup de polytechni-ciens : connaître l’homme dans sesprofondeurs au-delà de la techni-que. Il s’inscrivit comme étudiantà la Sorbonne en philosophie,passa sa maîtrise et acquit un DEAen 1991. Il avait fait l’effort d’étu-dier les documents anciens dansleur langue d’origine, grec et latin,et les publications des philosophesallemands. Il rayonnait autour delui ces acquis culturels. Il disparutle 9 juillet 2008, nous laissant sonexemple à suivre.

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 200850

IN MEMORIAM

L’été 2008 a vu disparaître ces

hommes qui ont tant apporté à

la microélectronique française :

Henri Lerognon, Abel Farnoux,

Jacques Aubry auxquels il faut

ajouter le souvenir de deux

de leurs collaborateurs,

Jean Brunat et Pierre Schouler

Henri Lerognon nous a quittés le 2 juillet 2008, quelques joursavant Jacques Aubry. Ils font partie de ces rares hommes dontla stature morale l’emporte sur toutes les autres qualités, provoquel’admiration et fonde l’amitié.

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L’argent est un excellent ser-viteur, mais c’est un maître catas-trophique car il fabrique sa crois-sance en cultivant les catastrophes.La croissance d’un PIB se fabriquepar la croissance des destructions.Guerres, destructions militaires,civiles, sociales, sanitaires, écologi-ques, disparition des espèces,transformations climatiques, dé-sertification, raréfaction des res-sources, tout augmente nos mar-chés et nos emplois.

L’explosion démographique est lalocomotive de ce système. La filièredes dégâts sociaux finance la sur-natalité des populations les plusdéfavorisées pour fabriquer lesproblèmes qui protègent nos em-plois (travailleurs sociaux, crèches,éducateurs spécialisés, policiers,gardiens de prison, juges ou avo-cats, logements).

Le gratuit n’est pas le don

Cultiver le gratuit n’est pas culti-ver le don, ce n’est pas prendre auxriches pour donner aux pauvres.C’est cultiver la facilité d’accès auxressources.

Un travail en moins ce sont deuxbras en plus disponibles pour d’au-

tres tâches. Frédéric Bastiat l’écri-vait dès 1850. Pour illustrer ce quesignifie « protéger les emplois dujour en freinant la productivité », ilproposait d’interdire d’affûter leshaches pour tripler les emplois debûcherons.

Les emplois de caissières dans nossupermarchés vont disparaître engrand nombre par la productivitéqu’apportera la lecture des articlessans vider nos chariots. Mais il n’ya aucune raison pour que les nou-velles tâches proposées à ces deuxbras en plus créent instantanémentautant de valeur ajoutée financièreque dans leur emploi précédent.

Par ces temps de reconversion ilimporte pour le travailleur que sesressources restent viables. La pro-ductivité c’est de rendre moinscher ce qui est payant. Le préventifc’est de le rendre gratuit. Notresystème de répartition est la clépour transformer le travail ensource de revenu complémentaireet non de revenu vital.

Le système de répartition pèse déjàla moitié du PIB, et il fournit déjàla majorité de leurs revenus à lamajorité des foyers français. Au-jourd’hui, seuls nos problèmes mé-ritent ses aides (chômeur, surnata-liste, parent isolé, handicapé, vieux,malade, incompétent, pauvre).

Faire disparaître les emplois n’im-plique pas davantage de chômeurs.Retraités, bénévoles, stagiaires,étudiants, il y a tant d’autres possi-bilités.

Témoigner et déranger

l’ordre établi

Au lieu de ne rien voir, nous taire,ne rien témoigner, manifester pourla protection de nos emplois ou lacroissance de notre PIB, il faut déve-lopper le gratuit. Pour ce faire, notre«travail médiatique» est autrementplus important et productif de ri-chesses que notre travail profes-sionnel. Il consiste à s’interroger surnos propres comportements (mé-tier, secteur, pays), et à témoigner,en voulant l’intérêt de tous.

La puissance augmente en accep-tant de voir ce qui dérange l’ordreétabli. Nos révolutions scientifiquessont nées d’avoir eu le droit d’ob-server ce qui ne collait pas avec lesévidences du jour. Le gratuit est unchemin économique pacifique etpuissant pour la révolution socialemondiale en cours.

LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008 51

Un travail en moins

ce sont deux bras en plus,

disponibles pour

d'autres tâches

PAR BRUNO MARTIN-VALLAS (68)

LIBRES PROPOS

La puissance par le gratuit

Cultiver le gratuit n’est pas cultiver le don, ce n’est pas prendreaux riches pour donner aux pauvres. C’est cultiver la facilitéd’accès aux ressources par le système de répartition.Le gratuit est un chemin économique pacifique et puissant pourla révolution sociale mondiale en cours.

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FOCUS

« L’Afrique, un lien qui vientdu cœur »

Parodiant à rebours les fameuxMousquetaires, les quatre respon-sables du groupe X-Afriquen’étaient que trois, ce jour-là, dansla boîte à claque, pour vanter avecferveur les actions du groupe X-Afrique. C’est que, « l’Afrique, onaime ou on n’aime pas. Si l’onaime, la relation devient de ce faitviscérale» comme l’a montré l’en-gouement qu’a suscité l’élection deBarak Obama.

Africains eux-mêmes, travaillanten Afrique ou amoureux de l’Afri-que, les 250 membres du groupe,dont le quart réside en Afrique,agissent dans quatre domainesprincipaux (sans compter quelquesopérations ponctuelles d’entraide) :la promotion de l’École, l’aide à lavenue d’élèves africains, l’insertionprofessionnelle des élèves en Afri-que et des réflexions et échangessur l’Afrique.

Promouvoir l’École

La promotion de l’École s’effectuepar l’existence même du groupe X-Afrique et sa participation officielleà de nombreux événements, dontla fête de l’élection de M. BarakObama, précise Alain Ducass. « Jeme souviens du Consumer electro-nic show à Las Vegas où j’ai parléde l’Afrique dans la société de l’in-formation si bien que le sénateurde Philadelphie est venu me saluer

et nous avons pu échanger d’inté-ressantes impressions sur l’impli-

cation des diasporas africainesdans la vie économique. »

Le groupe X-Afrique est né en 2003 par fusion de deux initiatives parallèles. Il compte aujourd’hui250 membres et s’efforce de renforcer les liens entre les polytechniciens en Afrique.

PORTRAIT DE GROUPE

De gauche à droite, Kinapara Coulibaly (98), Alain Ducass (73) et

Jean-François Sorro (72).

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Favoriser la venue d’élèvesafricains à l’École

Le problème est d’abord d’ordre fi-nancier. Il faut trouver des boursespour les étudiants africains. «Nousétudions, avec la Fondation, un sys-tème de bourses remboursables encas de non-retour de l’élève dansson pays d’origine, tirant leçon del’exemple des Marocains dont lamoitié ne retourne pas au Maroc. »Reste, en amont, le problème des

classes préparatoires, encore trèsrares en Afrique (où l’on peut citeren exemple le lycée Mohammed Vde Casablanca).

Aider à l’insertionprofessionnelle

« Il faut, comme le rappelle Jean-François Sorro, que les anciensélèves soient attirés par un retourdans leur pays et puissent accéderà des emplois de bon niveau

lorsqu’ils y rentrent. Un des voletsde la solution semble être d’impli-quer le plus possible les élèves etanciens élèves dans la création decentres de profit en Afrique pen-dant le déroulement de leurs étu-des en France. »

Cela a amené à la création du pro-jet « Marcottage » (voir article enpage suivante), animé par des bé-névoles X-Afrique ou non. L’analysede ce projet lancé en 2005 dépassetrès largement celle du groupe X-Afrique.

Réfléchir sur l’Afrique

« Nous plaçons beaucoup d’espoirdans l’avenir, explique KinaparaCoulibaly. La crise actuelle a dé-montré la gestion déplorable del’Occident et va conduire à un nou-vel équilibre Nord-Sud. »

Le groupe travaille beaucoup parcourriel et diffuse une lettre sur In-ternet. Il organise des réunions,dont la dernière s’est tenue le 4 dé-cembre avec notre camarade Sté-phane Cieniewiski (95), responsabledu Bureau de l’Afrique à Bercy(DGTPF). Il négocie des conventionsde partenariat avec les pouvoirspublics. Il est surtout très actifdans le cadre des « diasporas »africaines (voir article en page sui-vante), et multiplie les échangesavec des groupes internationaux(Maroc Entrepreneurs, Africagora,Réseau des étudiants algériens desgrandes écoles, «African businessclub »), avec les différentes écolesafricaines portant le nom de poly-technique.

Propos recueillis parJean-Marc Chabanas (58)

Deux initiatives parallèlesL’éphémère groupe « X-Afrique subsaharienne », créé en septembre 2002par Abdourahmane Cissé (2001), et Oueyssinou Nakoulima (96),s’adressait surtout aux polytechniciens africains. Le groupe X-Sud, lancédeux mois plus tard par Alain Ducass (73), s’intéressait plusparticulièrement au codéveloppement avec l’Afrique. Les deux ontrapidement fusionné en mars 2003, sous le nom d’X-Afrique. Rappelonsqu’il existe des groupes plus spécifiques, X-Maroc et X-Tunisie, dont unepartie significative des membres adhère à X-Afrique.

X-AFRIQUEc/o AX5, rue Descartes,75005 Paris

Kinapara Coulibaly (98), coprésident Afrique subsaharienne,originaire de Côte-d’Ivoire, marié, sans enfant, ingénieur chezSchlumberger.

« J’ai travaillé quelques années en Angleterre. De retour en France, j’aitenu à m’impliquer dans les activités des anciens élèves et dans un groupecomme X-Afrique. »

Hatim Araki (90), coprésident Magreb,originaire du Maroc, diplômé de l’ENSAE, marié, jeune papa, directeurtechnique de Come & Stay, entreprise agissant dans le domaine de lavente par Internet.

Alain Ducass (73), coprésident Europe,ingénieur des Mines, marié, 6 enfants.

« Je suis tombé dans la marmite africaine quand j’étais jeune ingénieurpassionné par le développement économique. J’y compte beaucoupd’amis. Le drame, ce sont les gens qui veulent travailler et ne le peuventpas. Il faut lutter contre cette injustice fondamentale. Mon métier, c’est decréer du boulot. »

Jean-François Sorro (72), secrétaire général,ingénieur des Mines, marié, 3 enfants.

« J’ai dirigé une entreprise au Maroc durant cinq ans et la directionrégionale Maghreb d’un groupe durant trois ans. J’en ai gardé unattachement fort pour l’Afrique du Nord et toute l’Afrique. L’Afrique etl’Europe doivent resserrer fortement et rapidement leurs liens culturels,économiques et politiques. La France a un rôle clé à jouer et les X africainset français peuvent apporter un concours précieux. »

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«Quatre signaux forts, commequatre cavaliers de l’Apocalypse,annoncent des mois et des annéesde sueur, de sang et de larmespour les entreprises grandes et pe-tites : l’effondrement des indicesboursiers ; l’envolée des matièrespremières, avec, au premier rangd’entre elles, le pétrole ; l’envoléede l’or qui ne rapporte rien et necrée pas de valeur ; l’effondrementdu dollar » – tels sont les proposd’Henri Dessertine, l’IHFI, qui es-time que : «cette crise a deux origi-nes principales : la redistributiondes rôles entre Nord et Sud ; lagestion catastrophique de cettemutation par les pays riches ».

Nous voilà au cœur d’une problé-matique qui concerne directementX-Afrique. Nous sommes peu nom-breux. Nous sommes plus présentsen Europe qu’en Afrique.

Nous ne brillons pas par la fré-quence de nos réunions, plusqu’épisodiques, ni par les débatsde nos forums plus que légers encomparaison de ceux de nos collè-gues d’HEC avec leur dispositif CAP

Afrique soutenu par le groupe AXA,ni même par nos actions en faveurde la création d’activités en Afri-que où nos collègues de Sup de Coou de l’Essec organisent des fo-rums impressionnants en s’ap-puyant sur les élèves étrangersdans le cadre de projets d’étudiantsou de leurs jeunes anciens.

N’empêche !La crise actuelle montre les limi-tes de la spéculation financière etramène aux valeurs de l’économieréelle avec des produits et des ser-vices adaptés au marché dans tou-tes les gammes de prix. Elle ra-mène aussi aux valeurs de créationet de développement durable del’industrie plutôt que celles ducommerce et de la finance.

Les X originaires d’Afrique subsa-harienne ou d’Afrique du Nordcomme tous les X qui croient àl’Afrique sont bien placés pours’épanouir au plan professionnelet, pour certains, faire fortune.

Le groupe X-Afrique est un des pe-tits éléments qui souhaite appor-ter une contribution la plus efficacepossible sur les projets de codéve-loppement ou de développementdurable en Afrique, en liaison avecles institutionnels, les entrepriseset les diasporas qui nous accueil-lent très favorablement à cause dela grande notoriété de l’École.

Alain Ducass (73)

TÉMOIGNAGES

Nationalité Nombre

Maroc 210

Tunisie 143

Maghreb, Mashrek, autre 17

Afrique subsaharienne 56

Résidence Nombre

Maroc 62

Tunisie 53

Maghreb, Mashrek, autre 7

Afrique subsaharienne 13

Répartition par nationalité et résidence.

Avec la récession qui seconfirme pour les principales éco-nomies mondiales, les investisse-ments extérieurs directs et l’aideaux pays en voie de développementrisquent de se tarir significative-ment compte tenu des sommesenglouties dans les différents plansde sauvetage du système financier.Pourtant nous pouvons reconnaî-tre, tout comme le patron de laCommission économique de l’Afri-que, que «les développements né-gatifs dans l’arène globale repré-

sentent un défi particulier pourl’Afrique ». Les États africains doi-vent en effet mettre tout en œuvrepour préserver les progrès effec-tués au cours des dernières an-nées, malgré la crise actuelle.Ainsi, toute mesure visant à favo-riser le développement des petiteset moyennes entreprises ne pourraque renforcer ces progrès.

Au sein de la structure Marcottage,nous aidons des porteurs de pro-jets de création d’entreprises à

concrétiser leur projet. Mais mêmesi des initiatives de ce type permet-tent d’encourager la création d’en-treprises en Afrique, la pérennitéde ces entreprises ne sera vérita-blement assurée que s’il existe uneréelle volonté politique de donneraux entreprises africaines lesmoyens de se développer. Espéronsque cette crise financière ne ser-vira pas de prétexte pour arrêterles efforts des États africains.

Carole Ramella (MBA ENSAE)

Aider les porteurs de projets

Quels enjeux pour X-Afrique ?

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Les X d’origine africaine ont dumal à trouver du travail dans leurpays. Il convient de préparer leurretour en créant dès la scolarité unprojet professionnel en relationavec une entreprise intéressée parl’Afrique.

La faisabilité de ce projet a été va-lidée par les entreprises enaoût 2004 et par les porteurs deprojets en janvier 2005 au salondes entrepreneurs, sous réservede s’ouvrir à d’autres projets queceux d’X-Afrique. Il en résulte lesite Web qui fait l’objet d’une crois-sance régulière avec 1 411 mem-bres inscrits ; 378 projets déposéset 880 contacts proposés par lesmembres aux porteurs de projets.

Un soutien industriel réelmais modeste

Pourtant la réaction en chaîne n’apas démarré pour les raisons sui-vantes : manque de bonnes volon-tés pour animer Marcottage, parexemple en recherchant des pro-jets, en les qualifiant sous l’angletechnique, commercial, humain, fi-nancier, ou en animant en ligne unecommunauté de créateurs d’entre-

prises (ex. sur l’environnement, surle Maroc, sur le capital investisse-ment) ; absence totale de soutienpublic malgré des dizaines de pro-messes; manque de clarté du siteavec un trop grand mélange destypes de projets (innovant, micro-crédit) qui ne facilite pas la mise enrelation; soutien industriel réel (parexemple au Medef et Télé médiacommunication), mais modeste.

Une réelle attente

D’ores et déjà, et a fortiori lorsqueces problèmes seront résolus, leproduit Marcottage répond à une

réelle attente quand on sait que leconcours D-Made de la Banquemondiale pour la création d‘entre-prises en Afrique a recueilli plusde 500 projets dont près de 90 %sont restés dans les placards et nesont pas portés à la connaissancedes investisseurs ou que les Afri-cains échangent beaucoup d’expé-riences au sein d’une même fa-mille mais peu entre les ethnies sibien qu’un projet réussi dans unpays se transmet peu dans unautre.

A. D.

Un potentiel pour la planète

Exemples

X-Afrique a permis à un jeune de créer son entreprise en Côte-d’Ivoire.X-Afrique et une ONG d’étudiants africains ont récolté en trois mois35 projets de création d’activités au Gabon, et ont monté un colloque àBordeaux avec leurs porteurs.Une chambre de commerce a réuni vingt entreprises de son territoiredésireuses de nouer un partenariat en Afrique de l’Est dans le domainedes TIC.Un consultant a trouvé plusieurs entreprises sur Marcottage pour lesamener dans une rencontre d’affaires en Afrique.Des centaines de projets technologiques sont disponibles.

http://x-afrique.polytechnique.orghttp://www.marcottage.fr

Créer des activités avec Marcottage

L’Afrique reste le continent glo-balement le plus pauvre de la pla-nète et le plus à l’écart des déve-loppements technologiques. Lamisère, la famine, les maladies, lesguerres sont très présentes, plusqu’ailleurs. Des rapports fontmême état de dégradations de si-tuations. Pourtant les raisons d’es-pérer ne manquent pas. Le formi-dable essor des technologies del’information et de communicationtouche l’Afrique comme le reste dumonde avec un décalage dans le

temps de moins en moins percep-tible. Le savoir, l’information sontdistribués en Afrique, ou depuis etvers l’Afrique, au même rythmequ’ailleurs. Les conditions de tra-vail et de vie vont évoluer rapide-ment dès que la production et ladistribution de l’électricité et del’énergie seront plus larges, plusrégulières.

Une terre d'accueilet de grands travauxLe potentiel de l’Afrique à une

époque de rareté en ressourcesminérales et naturelles intéressela planète. Et plus conjoncturelle-ment, alors que la dépressiongagne, que la crise financièremondiale annonce la crise écono-mique, comment ne pas penser àl’Afrique comme terre d’accueil etdes grands travaux du « New Deal2008 et + » ?

Jean-François Sorro (72)

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Cet été à Paris, au Pré Catelanpour être précis, on jouait les same-dis et dimanches après-midi des clas-siques français. Cela dans le JardinShakespeare, un ravissant théâtrede verdure, en plein air bien sûr. Nousy avons vu Les Plaideurs, interpré-tés par une exquise petite troupe «LeThéâtre baroque», dans une mise enscène de Michel Dury.

On prenait son billet à l’entrée, enarrivant, et c’était Chicanneau enpersonne, établi dans une guérite,qui vous les vendait. Ce retour à l’an-cienne ne manquait point de charme,d’autant que, ce jour-là, le Pré Catelanresplendissait de fleurs et de gazonsensoleillés. De surcroît, voir jouerLes Plaideurs n’est pas si fréquent.Bien qu’inscrits au répertoire duThéâtre-Français, on ne les y donnequasi jamais. Vous me direz que, parles temps qui courent et vu les pré-sents usages de cette scène natio-nale, ce n’est peut-être pas plus malpour la mémoire de Racine. Maisc’est hélas la même rareté ailleurs.

On ne peut que le regretter, car ils’agit d’une fort divertissante pochade,conçue par un garçon de vingt-neuf ans, qui ne fut donc pas tou-jours l’emperruqué aligneur d’alexan-drins en «galimatias pompeux», pourreprendre les termes mêmes de l’ir-révérencieux Montherlant. Au contrairede ses tragédies à la constructiondramatique toujours d’une grandehabileté dans le crescendo du conflit,Racine n’a rien mis de tout cela dansLes Plaideurs : on n’y trouve prati-quement pas de construction, et seu-lement de burlesques dialogues,autour d’une situation plus que sim-plette et, de plus, quasi invraisem-blable. Un fils veut empêcher sonpère juge de passer son temps au

tribunal. Il le persuade, bien vite faitd’ailleurs, de rendre la justice à lamaison, à propos des plus menusincidents de la vie quotidienne : lechien vient de voler et de manger unchapon qui ne lui était point destiné.On plaide. En outre, ce fils est amou-reux fou de la fille d’un pilier de pro-cès. Il l’embobine si bien que l’autresigne, les yeux fermés, un contrat demariage qu’on lui fait prendre pourun exploit d’huissier.

C’est tout. Mais autour de ce tout,une sarabande endiablée de person-nages parfaitement saugrenus, vire-voltant de la cave aux gouttières. AuPré Catelan à dire vrai, il s’agissaitplutôt de bondir parmi les massifset les rocailles qui constituent l’ar-rière-plan du plateau. Quant à la cavede Dandin, la fosse d’orchestre auxparois de lierre en tenait lieu, fortbien d’ailleurs. Ces Plaideurs furentune fête de l’œil et de l’oreille.

L’histoire du théâtre nous apprendque, l’année même où Molière pro-duisait l’Avare en son Palais-Royal,

Les Plaideurs furent créés, en 1668donc, à l’hôtel de Bourgogne. L’affairese solda par un four pour le pauvreRacine. Peut-être le public, l’ayantétiqueté tragique – il avait déjà faitjouer La Thébaïde, Alexandre et sur-tout Andromaque qui connut unimmense succès – fut-il déconcertépar cette farce sans queue ni tête. Ilconvient de dire aussi que la bour-geoisie parisienne, c’est-à-dire legros de ce public, comptait quantitéde gens de robe. Ils n’apprécièrentsans doute pas cette hilarante miseen boîte de leurs pratiques. En outre,le monde de la justice se trouvaitalors en pleine effervescence :l’Ordonnance d’avril 1667, impliquantnombre de remises en cause et sim-plifications, était toute fraîche et avaitété plutôt mal reçue par les intéres-sés. Vous savez comme moi, au vud’exemples très récents, que la gentdes prétoires n’aime pas bien lescoups de pied dans sa fourmilière.

ARTS, LETTRES ET SCIENCES

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THÉÂTRELES PLAIDEURSde Jean Racine, par le Théâtre baroque, dans une mise en scènede Michel Dury qui jouait Chicanneauau Théâtre de Verdure du Pré Catelan à Paris, porte Maillot, bus 244

RÉCRÉATIONSSCIENTIFIQUES

Jean Moreau de Saint-Martin (56)[email protected]

1) ICI VÉCUT PYTHAGORE

Au musée d'une ville où a séjournéPythagore, Pierre Leca-Nonnier esttombé en arrêt devant un pavage anti-que, dont le motif (ci-dessous) estformé de deux carrés de taille diffé-rente.

« À n'en pas douter,il y a là une preuve ducélèbre théorème ! »s'exclame-t-il.Voyez-vous comment ?

2) ENCORE UN DÉ OCTAÉDRIQUE

Dans un dé à jouer cubique, dont lesfaces sont marquées de points en nom-bre de 1 à 6, chaque paire de facesopposées totalise 7 points. Avec cettecontrainte il n'existe que 2 dés, imagesl'un de l'autre dans un miroir (la dispo-sition des points sur les faces n'est pasconsidérée comme un facteur de diffé-rence).Je considère maintenant un dé octaé-drique, où les points marqués sur lesfaces vont de 1 à 8, des faces opposéestotalisant 9 points. Combien peut-ilexister de dés octaédriques différents ?

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Toujours est-il que, quelque tempsaprès l’échec à l’hôtel de Bourgogne,la pièce était jouée devant la Cour, àSaint-Germain-en-Laye, pour la plusgrande joie d’un Louis XIV detrente ans, qui en pleura de rire. Deplus, le thème allait dans le sens desréformes qu’il souhaitait. Les cour-tisans s’alignèrent. Les comédiensde l’hôtel de Bourgogne remirent LesPlaideurs à l’affiche. Le public accou-rut. Ainsi vont les choses, allez savoirpourquoi.

Philippe Oblin (46)

Certains appellent «grande musi-que» la musique dite classique, nonsans dérision, bien sûr ; mais celan’incite guère à la fréquenter ceux –amateurs de rap ou autres funk – quis’en méfient. Il est plus courant dedistinguer, au sein de la musiqueclassique même, les « grands »,comme Bach, Brahms ou Stravinski,des autres, qualifiés parfois de «petitsmaîtres ». Cette distinction, fondéesur la tradition – et peu évolutive,même si certains « grands » d’hier,comme Saint-Saëns, ne sont plusaujourd’hui considérés comme tels –est moins évidente et discriminantequ’il n’y paraît : dans quelle catégo-rie classer Telemann, Satie, Gershwin?En réalité, il existe des compositeurspeu joués parce que peu connus, etpeu connus car peu joués, auxquelsles organisateurs de concerts seraientavisés de s’intéresser, au moins autantqu’à la musique contemporaine.

Fumet et contemporainsde Van DyckÀ l’occasion de l’exposition Van Dyck,un disque regroupe sous le nom deVan Dyck, portraits musicaux 1 unedouzaine de pièces où Purcell (uneSonate en trio) côtoie des contem-porains moins connus commeDowland, Byrd, Zanetti, Holborne,Fontana. Au-delà du prétexte – VanDyck, artiste européen, a peut-êtrecôtoyé ces musiciens – l’idée est inté-ressante car elle place une œuvrepicturale dans un contexte sociocul-turel plus large. Mais, surtout, ellepermet de connaître des musiciensfins, subtils, créatifs, émouvantsmême, qui méritent d’être placés aumême niveau que les Purcell ouHaendel.La musique de chambre de RaphaëlFumet a été évoquée dans ces colon-nes (avril 2008). Les Fumet sont unedynastie, et la musique de son pèreDynam-Victor Fumet est aussi inex-plicablement peu connue que la

sienne. On peut la découvrir dans undisque récent d’œuvres chorales (lesQuatre saisons, Messe des oiseaux,Messe mariale, notamment) par leChœur des Nouvelles Voix de Saint-Pétersbourg2. C’est, pesons nos mots,de la grande, de la belle musique,aux polyphonies complexes, aux har-monies recherchées où l’on sent lesinfluences de Franck et Fauré maisoriginale, une musique exquise etqui procure ce plaisir sensuel quel’on attend si souvent en vain de lamusique contemporaine.

Pergolèse, Scarlatti, Ravel,Debussy, FauréLe Concerto Italiano vient d’enregis-trer deux messes : la Messa romanade Pergolèse, la Messa per il santis-simo natale de Scarlatti (Alessandro)3.Il s’agit de musiques non seulementsavantes, bien construites et qui ontdu souffle, mais aussi proprementjubilatoires, et que l’on peut à bondroit préférer à la musique de Vivaldi,dont elles se distinguent par uneinvention sans cesse renouvelée :rien moins que de la petite musique.En enregistrant les Quatuors deDebussy et Ravel 4, pièces majeuresdu répertoire, le Quatuor Ébène, jeunequatuor français qui se donne volon-tiers l’allure extérieure d’un groupede rock, prenait un risque : tous lesgrands les ont enregistrés, duQuartetto Italiano au Quatuor AlbanBerg : allaient-ils soutenir la com-paraison ? Eh bien, le résultat estproprement fascinant : une finessed’exécution, une palette infinie denuances, en même temps qu’uneabsolue rigueur – d’ailleurs ces deuxœuvres sont des révélateurs de laqualité d’un ensemble : technique-ment difficiles, elles ne supportentni la décontraction ni l’à-peu-près –et une totale homogénéité, inhabi-tuelles pour des musiciens de cetâge. En fait, cela nous rappelle fortopportunément que Debussy avait

DISCOGRAPHIEMUSIQUES GRANDES ET PETITES ?

BRIDGEGaston Méjane (62)

ÉNONCÉS

D’abord des nouvelles du cham-pionnat de Pékin, notre équipe aété battue en 1/8e de finale d’unpoint par l’Égypte mais les jeunesFrançais de moins de 21 ans sontchampions du monde !Je vous adresse une donne de lafinale seniors entre le Japon etles États-Unis.Vous jouez 3SA en Sud avec :

Les enchères :

Ouest entame la dame de pique« duquée » et rejoue petit piquepour le 10 du mort et le valetd’Est qui rejoue dame de trèflepour le roi de Sud, Ouest défausseun petit carreau, Sud joue carreaupour la dame d’Ouest qui rejouele roi de pique pris de l’as. Vousjouez A et R de cœur, Est fournitle 10 et le 9. Comment terminer ?

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♠ A 10 7 2♥ A R D 6 3♦ 10 5♣ A 7

E S O N3♣ – – x

–– 3SA – –– 3♦ – 3♥

NORD

♠ 8 4 3♥ 8 7♦ A V 8 3 2♣ R 6 2

SUD

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31 ans quand il a écrit son Quatuoret Ravel 28. Mais les Ébène se sontattaqués aussi, sur le même disque,au Quatuor de Fauré, beaucoup plusrarement joué et enregistré, dernièreœuvre d’un homme de 78 ans termi-née quelques jours avant sa mort,empreinte de mélancolie et mêmede désespoir, et musicalement com-plexe, à la limite de l’atonalité. Làaussi, c’est parfait, profond, à vousmettre au bord des larmes. Prenez un

verre d’un très bon pomerol, asseyez-vous dans un fauteuil confortable :vous allez passer quatre-vingts minu-tes intenses, inoubliables. L’écouteterminée, reprenez tout de mêmevos esprits : ce n’était, au fond, quede la musique.

Jean Salmona (56)

1. 1 CD ARION – 2. 1 CD Musique et Esprit3. 1 CD NAIVE – 4. 1 CD VIRGIN.

Les deux pièces de Beaumarchaisont fourni le livret des plus impor-tants opéras de deux magiciens del’art lyrique, Mozart et Rossini. Chacuneest d’ailleurs parfaitement adaptée aucompositeur qui l’a mise en musi-que et les opéras en soulignent encoredavantage les différences. Le Barbierde Séville, pleine de légèreté et par-fois de bouffonnerie, succession desituations invraisemblables et d’épi-sodes burlesques, avec un Figarosouvent pataud et toujours vantard,a bien naturellement séduit Rossini.Le Mariage de Figaro, bien plus finet plus construit, véritable pièce desLumières, avec ses six personnagesbeaucoup plus complexes et subtils,et un Figaro plus malin et plus agile,était bien sûr adapté à Mozart.

Ces deux productions sont probable-ment parmi les meilleures de cesdernières années, avec des décorset une mise en scène d’exception.

Le Barbier de Séville de l’OpéraBastille, mis en scène par ColineSerreau en 2002 et repris cette année

à Paris, est magnifique. Les décorsrappellent que Séville a été occupéequatre cents ans par les musulmansqui y ont laissé une forte empreinte.Ce sont les plus beaux décors vusdepuis longtemps, les différentesscènes nous montrant patios et exté-rieurs aux couleurs de l’Andalousiemusulmane (azulejos…). La mise enscène est simple et efficace, avec devrais moments forts comme cet Airde la calomnie chanté par un Basiliode plus de deux mètres, véritable-ment impressionnant et intégrale-ment cocasse. En fait la mise en scènefait preuve d’équilibre entre comi-que, voire burlesque (comme ce Figarorecouvert de téléphones portables),et classicisme (comme ces ensem-bles un rien statiques, aux antipo-des des effervescences et agitationsqu’on a pu voir dans d’autres pro-ductions). Le comte Almaviva magni-fiquement chanté par Roberto Saccàest en fait le vrai héros de l’opéra.L’air assez long où il converse avec seshommes de main est, avec l’Air dela calomnie déjà cité, un des momentsforts du DVD. Ajoutons que l’image

de grande qualité rend justice auxcostumes et aux superbes décors,et que l’opéra est très bien enregis-tré ce qui donne un plaisir peut-êtresupérieur à ce que l’on peut enten-dre dans l’acoustique parfois diffi-cile et ingrate de l’Opéra Bastille.

La production des Noces de Figaro àl’Opéra londonien de Covent Gardenmérite également d’être conservée.Ici il n’y a plus de comique, seul par-fois un humour fin dans une atmos-phère et des lumières à la Watteauou Fragonard. Les grandes caracté-ristiques de cette production sont unjeu d’acteur digne du théâtre, descostumes et des décors somptueux,décors changeant à vue entre lesactes de façon impressionnante etefficace et un ensemble musical de toutpremier plan. Le chef Antonio Pappano, qui tientaussi le clavecin lors des récitatifs,dirige un ensemble d’une très haute

MUSIQUE EN IMAGESG. ROSSINI : LE BARBIER DE SÉVILLEOpéra Bastille, mise en scène Coline Serreau1 DVD TDK DVWW-OPBARB

W. A. MOZART : LES NOCES DE FIGAROCovent Garden, mise en scène David McVicar1 DVD Opus Arte 0990D

Le coup est très joli, on tire l’asde trèfle et on remet en mainOuest avec le 4e pique, il apportele reste soit à Nord (à cœur) soità Sud (à carreau).3SA juste fait.

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musicalité : le Figaro d’E. Schrott aune présence phénoménale, le comtede G. Finley joue bien les différentsétats d’esprit du personnage (amou-reux et égrillard, puis menaçant etméchant, puis perdu et pénitent), leBasilio de P. Langridge semblant le seulpersonnage issu du Barbier de Sévillelance le fameux cosi fan tutte qui faitle lien avec l’opéra suivant de Mozart.Les chanteuses sont encore plusexceptionnelles : le voi che sapete deChérubin (où l’on voit comme au théâ-tre la comtesse se laisser peu à peuséduire, et Suzanne accompagner lepage à la guitare) est un enchante-ment, le porgi amor de la comtessede D. Röschmann, le dove sono de laSuzanne pétillante de Miah Perssonsont de grands moments de l’opéra.Vraiment, ces Noces de Figaro sontpeut-être le DVD à posséder en prio-rité pour se convaincre de l’intérêt del’opéra en image.

Marc Darmon (83)

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1) ICI VÉCUT PYTHAGORE

Dans ce morceau de pavage, repérons quelques points (a, b, c, d, e, e', f, f').

Les mêmes translations (de vecteur ab = dcou bc = ad) permettent de paver le plansans lacune ni recouvrement, que ce soitavec le motif aefce'f' formé de deux carrés,ou avec le quadrilatère abcd qui est uncarré. On en conclut que leurs aires sontégales : |ab|2 = |ae|2 + |eb|2.

2) ENCORE UN DÉ OCTAÉDRIQUE

La face de l'octaèdre qui porte un seul point (« face 1 ») est bordée de troisfaces : une prise dans la paire {2,7}, une de la paire {3,6} et une de la paire {4,5}.Chaque paire offre deux possibilités pour le choix de la face bordant la face 1, etil y a aussi deux possibilités pour le sens dans lequel les trois paires sesuccèdent autour de la face 1. Il existe donc 16 modèles distincts de déoctaédrique.

SIGNES MANQUANTS

(PROBLÈME 2 DE NOVEMBRE 2008)

PROPOSÉ PAR JEAN-PAUL PASSELAIGUE (56)

Dans les premiers membres des neuf égalités ci-contre, une tornade blanche a effacé les signesmathématiques, n'épargnant que les chiffres.Rétablissez ces égalités.Réponse (d'autres réponses sont naturellementpossibles).

SOLUTIONS DES RÉCRÉATIONS SCIENTIFIQUES

Enrichie par plusieurs nouveaux cas,cette deuxième édition décrit les mul-tiples priorités, les pratiques et lestypes d’organisations liés à l’intelli-gence économique dans des gran-des entreprises, des entreprises detaille moyenne, des PME et des syn-dicats professionnels.Persuadées, au niveau le plus élevé,que la gestion stratégique de l’in-formation est nécessaire à leur déve-loppement durable, ces entreprisesexpérimentent, mobilisent leurssalariés, étudient le présent commel’avenir prévisible de leur champd’action, travaillent en réseaux pourmultiplier les informations recueil-lies et les transformer en connais-sance partagée.

Car pour ces entreprises, la connais-sance partagée est indissociable duprocessus de décision à tous lesniveaux et dans tous les domaines.Autour d’une philosophie unique l’ex-trême diversité de ces témoignagesfait la richesse et l’intérêt de cetouvrage.La contribution de Serge Catoire (75)est un de ces témoignages : aujourd’huiprésident de Reims Aerospace, il décritson action*, dans ce domaine, commedirecteur technique et industriel duGroupe Aérospatiale. Elle a poursuivitrois objectifs.Pour satisfaire le client final :• la documentation technique (équi-valent à une tonne de papier…), basede données unique, a été partagée

par les fournisseurs, le Groupe etses clients ;• l’ingénierie linguistique et docu-mentaire a été généralisée. Un lan-gage commun, simplified English, aété choisi. Cela a facilité et renduplus fiable l’entretien des avions pardes opérateurs de multiples natio-nalités, la sécurité a été améliorée.Pour partager les intelligences del’entreprise :

LIVRESLES PRATIQUES DE L’INTELLIGENCE ÉCONOMIQUEDix cas d’entreprisesSous la direction de Jean-Louis LevetParis – Éditions Economica 1 – 2008

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

• la circulation de l’information entrespécialistes travaillant au mêmemoment sur des domaines similairesa été améliorée ;• l’expérience des développementspassés et présents a été mieux capi-talisée pour servir les développe-ments futurs.Pour tirer parti des informationsexternes accessibles :• la coopération avec les centres derecherche français a été développée;• le recueil et la mise à disposition del’information documentaire ont étéaméliorés ;• la mise en réseau des analysesd’informations techniques et la col-lecte d’informations indirectes ontété renforcées.Le sujet, les exemples décrits, leurdiversité et la qualité des rédacteursvalent que l’on s’y attarde.

Nicolas Zarpas (58)

* Dans la ligne du « rapport Martre (47) » repre-nant les conclusions du groupe de travail« Intelligence économique et stratégie des entre-prises » du Commissariat général au Plan.1. 49, rue Héricart, 75015 Paris.Tél. : 01.45.78.12.92. www.economica.fr

À LA RECHERCHEDE L’INTÉRÊT EUROPÉENUn ouvrage collectif dirigé par PhilippeHerzog (59)

Contributions de Jérôme Vignon (64),Michel Aglietta (59), Jean Pisani-Ferry,Fernando Vasquez, Olivier Guersent,Odile Quintin, Nicolas Théry, Benoît LeBret, Nicolas Véron (89), Édouard Bourcieuet Gaspar Frontini, Emmanuelle Butaud,Mauro Petriccione, Jean-Joseph Boillot,Jean-François Trogrlic, Jakob von Weizsäcker,Nick Butler, Jean-Marie AurandParis – Éditions Le Manuscrit 2 – 2008

Confrontations Europe, Associationfondée par Philippe Herzog et ClaudeFischer en 1992 avec le soutien d’ungrand nombre de leaders économi-ques, politiques et syndicaux, occupeactuellement une place importante etoriginale parmi les think tanks (cer-cles de réflexion et d’influence) euro-péens. Cela tient bien sûr au rôle très

actif de parlementaire européen jouépar Philippe Herzog entre 1989 et 2004mais aussi à l’accent mis sur la sociétécivile et l’économie en Europe plu-tôt que sur les questions proprementpolitiques qui ont si souvent la prio-rité dans le débat sur l’Europe, aumoins en France.Parmi les nombreuses publicationsde l’Association, l’ouvrage d’aujourd’huise distingue par son ampleur et saprofondeur ( www.confrontations.org).Il réunit 18 contributions d’expertsincontestables venant d’horizons trèsdivers à propos d’une question fon-damentale, malheureusement tropnégligée : l’Union européenne a-t-elledes intérêts communs qui surplom-bent les intérêts de ses composan-tes et en particulier des pays mem-bres ? Comment définir l’intérêteuropéen? Que cette question ne soitpas prioritaire en ces temps de mon-dialisation accélérée est un témoi-gnage ironique de l’introversion duprocessus et des acteurs de laconstruction européenne.Confrontations y a consacré une annéed’efforts dans des réunions où cha-cun des contributeurs (et quelquesautres) vinrent présenter leurs vueset débattre avec les membres del’Association. Je n’ai pu participerpersonnellement qu’à un petit nom-bre de ses réunions mais garde unvif souvenir des conclusions vigou-reuses d’Aglietta sur le retard decroissance de l’Europe aujourd’huiet à venir, la « grande misère des

politiques économiques en Europe»et l’incohérence entre, par exemple,la gouvernance du FMI et l’existencede l’euro. Et aussi la conférence deNick Butler, président du Centre forEuropean Reform et du Centre d’étu-des sur l’énergie de Cambridge, affir-mant la nécessité et la possibilitéd’une politique européenne de l’éner-gie considérant comme un acteurunique dans ce domaine l’ensemblede l’économie des Vingt-sept.Le livre contient d’autres pépites dece genre. Au risque d’être injustecitons seulement quelques-unes d’en-tre elles, avec une citation qui vousdonne envie de les lire. Jean Pisani-Ferry dans « Portrait de l’Union enacteur global» : «Réinventer l’Unioncomme acteur de la mondialisationest à la fois inévitable, pertinent ethasardeux.» Nicolas Véron dans «Versun nouvel agenda européen pour larégulation financière », thème d’ac-tualité s’il en est : «Dans les 24 lignesdirectrices de la stratégie de Lisbonnepas une seule n’est spécifiquementconsacrée aux services financiers. »Pour Jérôme Vignon dans « AprèsLisbonne, encore Lisbonne ? » : « Uncomité stratégique européen seraitinstauré dans chaque État membre»pour éviter de cantonner à des cer-cles trop limités la conception et lesuivi de la stratégie européenne post-Lisbonne. Philippe Herzog introduitla réflexion d’ensemble en proposant,sur le modèle de l’Acte unique qui,en 1986, lança le chantier du marchéunique, un nouvel Acte unique quispécifie les domaines et les modali-tés d’un repositionnement de l’Unioncomme acteur global.

Hervé Gourio (59)

2. 20, rue des Petits Champs, 75002 Paris.Tél. : 08.90.71.10.18. www.manuscrit.com

NEUROMANAGEMENTPour tirer parti desinconscients de l’entrepriseRobert Branche (74)Paris – Éditions du Palio 3 – 2008

Il y a les livres de consultants quel’on feuillette et il y a ceux qu’on lit.

ARTS, LETTRES ET SCIENCES

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ARTS, LE

TTRES E

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LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Dans les premiers, schémas savants,idées convenues, propos définitifs :ils se ressemblent, on en fait sou-vent l’économie. Quand, en revan-che, on les approfondit, c’est qu’ilsrelèvent d’un autre genre, celui dela maïeutique. Lorsque RobertBranche est venu me proposerNeuromanagement, je savais paravance que son travail serait dudeuxième type.Je me souviens en effet avoir inter-rogé Robert il y a vingt ans – il étaitchez Bossard, j’étais déjà dans l’édi-tion – sur la meilleure façon de pré-senter un business plan. J’ai encoreen mémoire sa réponse : « Avant dete demander comment présenter tesidées, as-tu vérifié qu’elles étaientexactes? Tu affirmes des choses, lesas-tu justifiées ? » Rappel à l’ordreélémentaire mais combien utile :comme beaucoup, je vivais dans l’il-lusion de croyances jamais validées.C’est cette même philosophie qu’af-fiche aujourd’hui Neuromanagement,ou Comment tirer parti des incons-cients de l’entreprise. On y retrouvele principe qui anime Robert Brancheet vise à ne jamais tenir pour vrai cequi n’a été démontré. Et c’est préci-sément cette règle cartésienne impla-cable que s’impose l’auteur, qui éviteà l’ouvrage le risque d’anthropomor-phisme où chacun l’attend.Pourquoi Neuromanagement ? Parallusion, bien sûr, aux neuroscien-ces, mais moins pour s’inspirer deleurs modèles que pour leur emprun-ter leur posture. Sous l’angle épis-

témologique en effet, la grande contri-bution récente des neurosciences estsans doute de montrer, grâce en par-ticulier à l’imagerie, que nos com-portements psychologiques ont desbases organiques. La neurochimieexplique ainsi bien souvent des atti-tudes qui passaient antérieurementpour erratiques. Si Robert Branchea retenu le titre Neuromanagement,c’est parce que sa démarche est lamême, mutatis mutandis, que celledes neurosciences. Il donne unedimension scientifique à des phéno-mènes auparavant vécus comme irra-tionnels. Il y a longtemps qu’on parlede mémoire et d’inconscient d’en-treprise : avec Neuromanagement,ils progressent du stade de formu-les molles vers le statut de conceptsrigoureux.Pourtant Neuromanagement n’estpas le livre d’un observateur : c’estle regard d’un homme d’action.Robert Branche n’a pas attendu lesneurosciences pour pratiquer avecefficacité les principes de manage-ment qu’il propose dans son livre.Alternativement consultant et mana-ger, dans l’administration commedans le privé, il connaît bien les orga-nisations françaises et internatio-nales. Mais les avancées récentesdes neurosciences lui permettentaujourd’hui de formaliser sa prati-que. Et de la faire partager à seslecteurs.

Jean-Jacques Salomon (74)

P.-S. : Robert Branche anime un blog très actifconsacré au neuromanagement :http://robertbranche.blogspot.com/3. 7 bis, rue Fabre d’Églantine, 75012 Paris.www.editionsdupalio.com

ESCARBILLESDE BONHEURUne vie de passionsGeorges Maire (40)Marseille – Éditions Sillages 4 – 2008

Livre très intéressant et très éton-nant, car dans la grande diversitédes situations, et même dans les casles plus graves, où la décision doitêtre immédiate, on admire le sang-

froid de l’auteur et la vitesse de juge-ment qui dictent une réponse logi-que seule capable d’éviter une catas-trophe immédiate, sans altérer lespossibilités d’avenir.Ces qualités de caractère ont été biendéveloppées pendant l’Occupationoù les situations rocambolesquessurgissaient sans parvenir, et ont étédéjà très utiles dans les annéesd’après-guerre où la France était trèsdésorganisée.À la fin de la guerre, et avant d’avoirle temps de finir une thèse en coursà l’École normale supérieure, il estappelé au laboratoire des Poudres,comme adjoint au directeur, pour desrecherches sur les produits moteursde fusées ; il réussit notamment àdévelopper de nouvelles composi-tions solides pour les grosses fuséesà poudre, et ces produits intéressentvite des industriels pour d’autresusages.Après onze ans dans les recherchesmilitaires, il est appelé à des postesde recherche et à des directions tech-niques chez Péchiney puis aux socié-tés communes avec Saint-Gobain etRhône-Poulenc où il continue à sui-vre la maxime de Lyautey, qu’il cite :« La joie de vivre est dans l’action. »

Henri Renard (40)

4. 12, boulevard Arthur Michaud,13015 Marseille. Tél. : 04.91.37.80.40.www.sillages.net

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ARTICLE 1OBJET DU CONTRAT

Le présent contrat souscrit parl’Association des anciens élèves etdiplômés de l’École polytechnique (AX)a pour objet de garantir aux adhérents– les assurés – le versement d’un capi-tal par la CNP – l’assureur – en cas dedécès ou d’invalidité permanente etabsolue de 3e catégorie Sécurité sociale(IPA). Il est régi par le Code desAssurances.

ARTICLE 2POPULATION ASSURÉE

Peuvent être assurés par adhésion aucontrat les anciens élèves de l’Écolepolytechnique et leur conjoint ainsi queles élèves et leur conjoint.Peuvent aussi être assurés les veuvesou veufs non remariés ayant une per-sonne à charge, dont le conjoint décédéétait adhérent au contrat; la demandedoit être présentée dans un délai decinq ans après le décès du conjoint.Peuvent également être assurés lesveuves ou veufs non remariés ayantune personne à charge, dont le conjointdécédé n’était pas adhérent au contrat;

la demande doit être présentée dansun délai de deux ans après le décès duconjoint.Peuvent continuer à être assurés lesveuves ou veufs non remariés person-nellement adhérents au contrat anté-rieurement à leur veuvage.Enfin peuvent continuer à être assu-rés les conjoints divorcés non rema-riés ayant une personne à charge, etpersonnellement adhérents au contratantérieurement au divorce.

ARTICLE 3CONDITIONS D’ADHÉSION

La demande d’adhésion peut être for-mulée jusqu’au 31 décembre de l’exer-cice au cours duquel le candidat atteint66 (soixante-six) ans.L’adhésion prend effet dans les condi-tions fixées à l’article 8. Elle se poursuitjusqu’au 31 décembre suivant sa prised’effet. Elle se renouvelle par tacitereconduction à chaque 1er janvier jus-qu’à l’année incluse où l’adhérent atteint70 (soixante-dix) ans, sauf modificationpar l’adhérent dans les conditions del’article 5 ou résiliation par l’adhérentpar lettre recommandée adressée à l’AXau moins un mois avant cette date.

Des dispositions particulières s’ap-pliquent au-delà de cette année butoiret la reconduction doit être demandéed’année en année.Le droit à garantie cesse de pleindroit :• au 31 décembre de l’année civileau cours de laquelle l’adhérent neremplit plus les conditions définiesà l’article 2 ;• au 31 décembre de l’exercice aucours duquel l’adhérent atteint 75(soixante-quinze) ans pour le risquedécès, 70 (soixante-dix) ans pour lerisque accident de la circulation et66 (soixante-six) ans pour le risqueIPA ;• en cas de non-paiement des coti-sations dans les conditions de l’ar-ticle 7 ;• à la date d’effet de la résiliation parl’adhérent dans les conditions dudeuxième alinéa du présent article.L’adhésion est subordonnée au résul-tat favorable d’un contrôle médicalexercé sous forme de questionnaireet éventuellement d’une visite pas-sée auprès d’un médecin désigné etrétribué par la CNP; la CNP se réservede n’accepter certaines adhésionsqu’avec restrictions.

65LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

L’AX a passé il y a près de trente ans avec la Caisse Nationale de Prévoyance un contrat d’assurance décès collectiveauquel peuvent adhérer les camarades et leurs conjoints, les veuves ou veufs de camarades et, sous certaines conditions,les conjoints divorcés. On trouvera ci-dessous ce contrat, avec les montants 2009 des capitaux garantis et des primes.Sa rédaction ne diffère de celle du contrat de 2008 que par les montants des classes de capital garanti et des primes. Desréductions significatives du montant des primes ont pu être apportées par l’AX sur les taux du barème ces dernièresannées du fait du peu de sinistres survenus.

CONTRAT N° 1586 Z

Assurance décès AX-CNP 2009

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ARTICLE 4PRESTATIONS GARANTIES

EN CAS DE DÉCÈS OU D’INVALIDITÉPERMANENTE OU ABSOLUE (IPA)

Sous réserve des dispositions de l’arti-cle 3 limitant le droit à garantie, la CNPgarantit en cas de décès ou d’invaliditépermanente et absolue de 3e catégorieSécurité sociale (IPA) telle qu’elle estau surplus définie ci-dessous le paie-ment d’un capital pris dans l’une des8 classes attribuées aux adhérents jus-qu’à 69 (soixante-neuf) ans (cf. tableau I)et des 5 classes attribuées à partir de70 (soixante-dix) ans (cf. tableau II).L’invalidité permanente et absolue doit,pour entraîner le versement du capitalgaranti, répondre aux conditions sui-vantes :• mettre définitivement l’invalide dansl’incapacité de se livrer au moindre tra-vail pouvant lui procurer un revenu;• l’obliger à recourir, pendant touteson existence, à l’aide permanented’une tierce personne pour accomplirles actes de la vie ordinaire;• se produire après douze mois inin-terrompus d’assurance si ladite inva-lidité n’est pas consécutive à un acci-dent corporel survenu au cours del’année d’assurance.

Le capital de la première classe estrévisé chaque année en fonction notam-ment de l’évolution de l’indice 100 dela Fonction publique. Les capitaux garan-tis pour les autres classes II à VIII sontégaux à 1 fois et demie, 2 fois, 3 fois,4 fois, 5 fois, 7 fois et 9 fois le montantdu capital de la première classe.Les capitaux garantis des classes IX àXIII n’ont pas de lien avec les précé-dents et peuvent ne pas être réviséschaque année.En outre, si le décès ou l’invalidité per-manente et absolue sont consécutifsà un accident l’assurance garantit ledoublement du capital, ou s’il s’agitd’un accident de la circulation le tri-plement du capital, à l’adhérent ayantsouscrit à ces dispositions.L’accident s’entend d’une façon géné-rale de toute atteinte ou lésion corpo-relles non intentionnelles de la part del’adhérent, provenant exclusivement del’action soudaine d’une cause extérieure.L’accident de la circulation est celuidont l’adhérent est victime :• au cours d’un trajet à pied sur unevoie publique ou privée du fait de la cir-culation d’un véhicule, d’un animal oud’un autre piéton;• à l’occasion d’un parcours effectuépar voie de terre, de fer, d’air ou d’eau

lorsque l’accident affecte un moyen detransport public ou privé utilisé et sousréserve des dispositions de l’article 6.

ARTICLE 5CHANGEMENT DU CHOIXDES CAPITAUX GARANTIS

Tout changement de classe et toutchangement d’option relatif à la garan-tie accident doivent être demandés parl’adhérent à l’occasion d’un renouvel-lement annuel de l’adhésion et avantle 1er décembre précédant le renou-vellement.Les changements de classe correspon-dant à une diminution de capital garantise font sans autre formalité. Ils sontautomatiques pour les adhérents de 70(soixante-dix) ans et plus ayant opté pourla classe la plus élevée.Tout changement de classe correspon-dant à une augmentation de capitalgaranti ne peut être accepté que s’ilporte au plus tard sur l’année au coursde laquelle l’adhérent atteint 66 (soixante-six) ans et sous réserve du résultat favo-rable d’un contrôle médical exercé dansles conditions prévues à l’article 3.Le changement de classe n’entre enapplication qu’après notification de l’ac-

Vie de l’Association

66 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

CAPITAUX ET PRIMES 2009 DU CONTRAT

TABLEAU I – PRIMES 2009, TAXE COMPRISE

CAPITAL

GARANTI

(EN EUROS)

I56 300 €

II84 500 €

III112 600 €

IV168 900 €

V225 200 €

VI281 500 €

VII394 100 €

VIII506 700 €

GARANTIE SIMPLE (SP)

TRANCHE D’ÂGE

– 42 42 à 47 à 52 à 57 à 62 à 67 àans 46 ans 51 ans 56 ans 61 ans 66 ans 70 ans

CAPITAL GARANTI DOUBLE OU TRIPLE (DT)

TRANCHE D’ÂGE

– 42 42 à 47 à 52 à 57 à 62 à 67 àans 46 ans 51 ans 56 ans 61 ans 66 ans 70 ans

73 € 124 € 163 € 304 € 332 € 642 € 1 419 €

110 € 186 € 245 € 456 € 499 € 963 € 2 129 €

146 € 248 € 327 € 608 € 664 € 1 284 € 2 838 €

220 € 372 € 490 € 912 € 997 € 1 925 € 4 256 €

293 € 495 € 653 € 1 216 € 1 329 € 2 567 € 5 675 €

366 € 619 € 816 € 1 520 € 1 661 € 3 209 € 7 094 €

512 € 867 € 1 143 € 2 128 € 2 325 € 4 493 € 9 931 €

659 € 1 115 € 1 469 € 2 736 € 2 990 € 5 776 € 12 769 €

147 € 198 € 237 € 378 € 406 € 715 € 1 492 €

220 € 296 € 356 € 567 € 609 € 1 074 € 2 240 €

294 € 395 € 474 € 755 € 812 € 1 431 € 2 985 €

440 € 593 € 711 € 1 133 € 1 217 € 2 146 € 4 477 €

587 € 790 € 948 € 1 511 € 1 623 € 2 862 € 5 970 €

734 € 988 € 1 185 € 1 888 € 2 029 € 3 577 € 7 462 €

1 028 € 1 383 € 1 658 € 2 644 € 2 841 € 5 008 € 10 447 €

1 321 € 1 778 € 2 132 € 3 399 € 3 652€ 6 439 € 13 432 €

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ceptation de la CNP. En cas de refus dela CNP du passage à une classe supé-rieure, l’adhérent est maintenu dans laclasse de garantie qu’il voulait quitter.En cas d’acceptation avec restrictionsnouvelles, ces nouvelles conditions sesubstituent aux précédentes qui devien-nent caduques; en revanche l’adhérentpeut décider de ne pas donner suite etde rester dans la classe de garantie qu’ilvoulait quitter.Le passage d’une classe à la classeimmédiatement supérieure s’effectuesans contrôle médical en cas de mariagede l’adhérent ou de survenance d’en-fant, naissance ou adoption, sous réserveque cette augmentation de capital soitdemandée à l’occasion du premier renou-vellement qui suit l’événement familialconsidéré et que l’adhérent soit couvertdepuis au moins un an pour le mêmerisque. L’adhérent indique alors à l’AXla nature et la date de cet événement,pièce justificative à l’appui.Le passage de la garantie simple à lagarantie accident s’effectue sans contrôlemédical quand il se fait sans passageà une classe supérieure.

ARTICLE 6RISQUES EXCLUS

Ne sont pas garanties6.1 – Au titre des risques décès et IPAtoutes causes, les conséquences :• du suicide conscient ou inconscientde l’assuré dans les deux premièresannées d’assurance,• du meurtre commis par l’un des béné-

ficiaires sur la personne de l’assuré,dès lors que ce bénéficiaire a étécondamné,• de faits de guerres étrangères lorsquela France est partie belligérante, sousréserve des conditions qui seraientdéterminées par la législation à inter-venir concernant les assurances surla vie en temps de guerre.6.2 – Au titre des risques IPA et décèsaccidentels, les conséquences :• de guerre civile ou étrangère, d’émeute,d’insurrection, quel que soit le lieu oùse déroulent ces événements et quelsqu’en soient les protagonistes, dès lorsque l’assuré y prend une part active;• du fait intentionnellement causé ouprovoqué par l’assuré ou le bénéficiaire;• de démonstrations, raids, acrobaties,compétitions, nécessitant l’utilisationd’un engin moteur;• de vols sur appareils non munis d’uncertificat de navigabilité valide ou pourlesquels le pilote ne possède pas unbrevet ou une licence valide;• de vols sur ailes volantes, ULM;• de sauts effectués avec des para-chutes non homologués.

ARTICLE 7MONTANT, EXIGIBILITÉ,PAIEMENT DE LA PRIME

L’assurance est consentie moyennantle versement d’une prime annuelle cal-culée en pourcentage du capital garanti,établie par tranche d’âge jusqu’à 69(soixante-neuf) ans et par année d’âgeau-delà et payable d’avance en une

seule fois (cf. barème tableaux I et II).L’âge à prendre en compte est celui au1er janvier pour les renouvellementsannuels. Pour les adhérents admis encours d’année c’est celui à la date deleur entrée dans l’assurance, la primeétant calculée prorata temporis sur labase d’un nombre entier de mois entenant compte de la prise d’effet desgaranties fixée à l’article 8.Le tarif est communiqué annuellementaux adhérents. Dans les tableauxannexés, les tranches d’âge et les âgessont définis par différence des millésimesdes années d’assurance et de nais-sance.La première quittance de prime et lesquittances annuelles valent justifica-tion de l’adhésion.À défaut de paiement d’une échéancede prime et après mise en demeurepar lettre recommandée, l’adhérentest exclu du bénéfice de l’assurance.

ARTICLE 8PRISE D’EFFET DES GARANTIES

Après contrôle médical reconnu favo-rable dans les conditions définies àl’article 3, les garanties prennent effetau plus tard au premier jour du troi-sième mois qui suit, soit la date à laquellele questionnaire médical a été reçu parla CNP, soit la date de la visite médicalesi l’entrée a été subordonnée à cetteformalité. Cette prise d’effet n’inter-vient toutefois qu’après réception parl’AX du paiement de la prime corres-pondante.

Vie de l’Association

67LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

TABLEAU II – PRIMES 2009, TAXE COMPRISE

CAPITAL

GARANTI

(EN EUROS)

IX34 700 €

X43 200 €

XI51 900 €

XII60 600 €

XIII69 000 €

GARANTIE SIMPLE (SP)

ÂGE

71 72 73 74 75

CAPITAL GARANTI DOUBLE (DT)

ÂGE

1 350 €

1 680 € 1 680 € 1 680 € 1 680 €

2 019 €

2 357 €

2 684 €

71 72 73 74 75

1 395 €

1 737 € 1 737 € 1 737 € 1 737 €

2 087 €

2 437 €

2 774 €

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ARTICLE 9DEMANDE DE PRESTATIONS

En vue du règlement du capital prévuà l’article 4, il doit être adressé à l’AXun dossier comprenant :a) en cas de décès :• une demande de paiement présentéepar le (ou les) bénéficiaire(s) visé(s) àl’article 10;• un extrait de l’acte de décès de l’ad-hérent ;• un certificat médical attestant que lacause du décès est étrangère aux risquesexclus par le contrat et indiquant l’ori-gine accidentelle ou non du décès.

b) en cas d’invalidité permanente etabsolue (IPA) :• une demande formulée au plus tarddans un délai de six mois à compter dela date de constatation de l’invaliditételle qu’elle est définie à l’article 4;• une fiche d’état civil de l’adhérent;• un certificat médical attestant quel’IPA met l’adhérent dans l’impossibi-lité d’exercer une activité rémunéra-trice, qu’elle le contraint à recourir àl’aide permanente d’une tierce per-sonne pour les actes de la vie ordinaireet qu’elle présente un caractère défi-nitif. Le certificat devra, en outre, pré-ciser la nature de la maladie ou de l’ac-cident d’où résulte l’invalidité, le pointde départ de cette maladie ou la datede cet accident, et la date depuis laquellel’adhérent se trouve en état d’invali-dité permanente et absolue;• la notification de la décision de laSécurité sociale classant l’adhérent en3e catégorie d’invalidité ou en invali-dité à 100% en cas d’accident du tra-vail, ou si l’assuré relève d’un autrerégime obligatoire de la décision équi-valente de l’organisme compétent.Au reçu de la demande, la CNP fait pro-céder à l’examen de l’adhérent par unmédecin désigné et rétribué par elle. Surle vu des conclusions du rapport auqueldonne lieu cette expertise médicale, laCNP statue sur l’acceptation ou le rejetde la demande et notifie sa décision àl’intéressé par l’intermédiaire de l’AX.En cas de contestation, la CNP invite lemédecin désigné par elle et celui de l’ad-hérent à désigner un troisième médecinchargé de procéder à un nouvel exa-men. À défaut d’entente à ce sujet, ladésignation est faite à la demande de la

CNP par le président du Tribunal degrande instance dans le ressort duquelse trouve la résidence de l’adhérent. Lesconclusions du troisième médecin s’im-posent aux parties, sous réserve desrecours qui pourraient être exercés parles voies de droit.Chaque partie supporte les honorairesde son médecin ; ceux du troisième,ainsi que les frais que comporte l’exer-cice de sa mission, sont à la charge dela partie perdante.Au cas où un contrôle révélerait uneantériorité de la maladie cause de l’IPAet non déclarée lors de l’adhésion, celle-ci est résiliée sans aucune prise encharge et sans aucun remboursement.Lorsque le capital a été réglé au titrede l’IPA, la garantie décès ne peut plusêtre mise en jeu.

c) en cas de décès ou IPA accidentels :• la preuve de la relation directe decause à effet entre l’accident et le décèsou l’IPA, ainsi que la preuve de la naturede l’accident ; l’une et l’autre incom-bent au bénéficiaire et la demande deprestation doit être à cet effet accom-pagnée de toute pièce médicale et admi-nistrative prouvant le lien de cause àeffet entre l’accident et le décès oul’IPA.

ARTICLE 10PAIEMENT DES PRESTATIONS

Les sommes dues en application ducontrat sont réglées par la CNP à l’AXet reversées par l’AX sous sa respon-sabilité :• en cas de décès, au (x) bénéficiaire(s)que l’adhérent aura désigné(s) par écrit,à défaut au conjoint survivant non divorcéni séparé de corps judiciairement, àdéfaut aux enfants de l’adhérent à partségales, à défaut à ses père et mère àparts égales, à défaut à ses ayants droità parts égales, enfin à défaut à la Caissede secours de l’AX;• en cas d’invalidité permanente etabsolue, à l’adhérent lui-même;• lorsque le bénéficiaire est mineur oumajeur protégé, à son représentantlégal.

ARTICLE 11

Le présent contrat d’adhésion fera l’ob-jet d’une publication annuelle dans LaJaune et la Rouge.

Vie de l’Association

68 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

En partenariat avec

est nommédirecteur du Musée océanographique deMonaco.

est nommé présidentdu conseil d’administration de l’Agencefoncière et technique de la régionparisienne (AFTRP).

est nommé directeurgénéral délégué, en charge des opérationsdu Groupe Renault.

est nommé directeurrégional Midi-Pyrénées de Réseau ferré deFrance (RFF).

est nomméadministrateur d’Aerospace and DefenceIndustries Association of Europe (ASD).

est nommé directeur de laformation et de la recherche de l’ENSTAParisTech à l’École nationale supérieure detechniques avancées (ENSTA).

est nommédélégué général de la Fédération françaisedes sociétés d’assurances (FFSA).

est nommé directeurd’investissements au sein de l’équipe deco-investissement direct de CDCEntreprises (Groupe Caisse des dépôts etconsignations).

est nomméresponsable mondial du secteur del’électronique et des hautes technologiesd’Accenture.

est nommé MarketingVice President Home Lab du GroupeFrance Telecom.

est nommé présidentde Pace France.

est nommé directeurgénéral exécutif de Hub Telecom.

est nommée directeurinternational de RATP Développement(Groupe RATP).

est nommé directeurmarketing et innovation de Hub Telecom.

est nommé vice-présidentBroadland Cable & Connected Devices deThomson.

est nommé directeurgénéral d’Adminext.

est nommé directeurdes opérations financières et desparticipations d’Aéroports de Paris (ADP).

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CARNET PROFESSIONNEL

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La séance du Conseil est ouverte à18h30, après la clôture de la deuxièmepartie de l’Assemblée générale.Bernard ESAMBERT (54), doyen d’âge,prend la présidence de la séance. Ilconstate que le quorum du tiers desmembres est atteint.

ÉLECTION DU PRÉSIDENT

Bernard ESAMBERT invite ceux desmembres du Conseil qui le souhaitentà déclarer leur candidature pour leposte de président.Daniel DEWAVRIN (58) annonce qu’ilest candidat pour le poste de président.Il est procédé au vote. Sur 23 votants,Daniel DEWAVRIN recueille 20 voix. Ily a 1 abstention et 2 bulletins blancs.Daniel DEWAVRIN est déclaré élu pré-sident de l’AX.L’ensemble du Conseil félicite DanielDEWAVRIN pour son élection.Daniel DEWAVRIN remercie lesmembres du Conseil de la confiancequi lui a été manifestée et reprend la pré-sidence de la séance.

ÉLECTIONSDES MEMBRES DU BUREAU

Le Président invite tout d’abord lesmembres du Conseil qui le souhaitentà poser leur candidature pour le postede vice-président, président de la Caissede Secours.Yves PÉLIER (58) se porte candidat. Ilest alors procédé au vote. Sur 25 votants,Yves PÉLIER obtient 24 voix. Il y a unbulletin blanc. Yves PÉLIER est déclaré

élu vice-président, président de laCaisse de Secours.Le Président invite les membres duConseil qui le souhaitent à poser leurcandidature pour les trois autres postesde vice-président.Se portent candidats :– Jean-Michel YOLIN (65),– Laurent BILLÈS-GARABÉDIAN (83),– Nathalie CHARLES (84).Il est alors procédé au vote. Sur26 votants :– Jean-Michel YOLIN obtient 21 voix,– Laurent BILLÈS-GARABÉDIAN obtient24 voix,– Nathalie CHARLES obtient 24 voix.Jean-Michel YOLIN, Laurent BILLÈS-GARABÉDIAN et Nathalie CHARLESsont déclarés élus vice-présidents.

Le Président invite ensuite les membresdu Conseil qui le souhaitent à poserleur candidature pour le poste de secré-taire général.Jacques BONGRAND se porte candi-dat. Il est alors procédé au vote. Sur26 votants, Jacques BONGRAND obtient26 voix. Il est déclaré élu secrétairegénéral.Le Président invite ensuite les membresdu Conseil qui le souhaitent à poserleur candidature pour le poste de secré-taire général adjoint.Stanislas LANDRY (01) se porte candi-dat. Il est alors procédé au vote. Sur26 votants, Stanislas LANDRY obtient26 voix. Il est déclaré élu secrétairegénéral adjoint.

Le Président invite ensuite les membresdu Conseil qui le souhaitent à poserleur candidature pour le poste de tré-sorier.Jean-Marie LEVAUX (64) se porte can-didat. Il est alors procédé au vote. Sur26 votants, Jean-Marie LEVAUX obtient23 voix. Il est déclaré élu trésorier.Le Président invite enfin les membresdu Conseil qui le souhaitent à poserleur candidature pour le poste de tré-sorier adjoint.Martin VOLATIER (91) se porte candi-dat. Il est alors procédé au vote. Sur26 votants, Martin VOLATIER obtient26 voix. Il est déclaré élu trésorier adjoint.

RENOUVELLEMENT DES MEMBRESDU COMITÉ DE GESTION

DE LA CAISSE DE SECOURS

Martin VOLATIER remplace ès quali-tés (trésorier adjoint) Jean-Michel YOLINau Comité de gestion de la Caisse deSecours. Jean BLONDEAU (55) et PatrickDUVERGER (58) sont nommés membresdudit Comité. Les autres membres sontrenouvelés dans leur mandat.

NOMINATIONDES PRÉSIDENTS DE COMMISSIONS,

DU DÉLÉGUÉ GÉNÉRALET DES RÉDACTEURS EN CHEF

DE LA JAUNE ET LA ROUGE

Le Conseil a procédé à la nominationou à confirmation de nomination desprésidents des commissions perma-nentes, du délégué général et des rédac-teurs en chef de La Jaune et la Rouge.

Vie de l’Association

69LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Procès-verbal de la réunion du Conseild’administration de l’AX du 19 juin 2008

Étaient présents : ESAMBERT B. (54) • DEWAVRIN D. (58) • PÉLIER Y. (58) • CASTILLON P. (62) • BERRY M. (63) • MARTIN F. X.(63) • DUBOIS B. (64) •LEVAUX J.-M. (64) • YOLIN J.-M. (65) • BONGRAND J. (68) • MIZRAHI R. (70) • VILAIN D. (72) • BONNE-VIE E. (73) • BOUQUOT B. (76) • CHARON B. (76) • DAILLANCE J.-M. (77) • MARTIN O. (77) • HERZ O. (79) • NEUMANN F. (81)• SEREY B. (81) • DEMIGNÉ P. (82) • BEUNARDEAU J. (83) • BILLÈS-GARABÉDIAN L. (83) • DUVERNEUIL B. (83) • SCHIMEL S.(84) • VOLATIER M. (91) • de SINGLY B. (95) • PANIÉ G. (95) • LANDRY S. (01) • BÉGON-LOURS J.-P. (62) • DUJARDIN T. (65)• MARTRE H. (47) • BOUTTES J. (52).

Étaient excusés : GOURGEON P.-H. (65) • SÉGUIN P. (73) • NICOLAS D. (81) • CHARLES N. (84) • DELEVILLE S. (89) • LOGAK P.(89) • CHAUMEL F. (00) • BOUYSSONNIE J.-P. (39) • PACHE B. (54) • ROULET M. (54) • AILLERET F. (56).

Assistaient également à la réunion : P. MARY (60), délégué général • Y. STIERLÉ (65), délégué général adjoint.

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Ainsi sont désignés ou reconduits res-pectivement :– président de la commission «Publi-cations » : Daniel DEWAVRIN (58) àl’unanimité,– président de la commission « Car-rières» : Philippe DEMIGNÉ (82) à l’una-nimité,– président de la commission «Évolu-tion de l’École» : Henri MARTRE (47)à l’unanimité,– président de la commission «Commu-nication : François Xavier MARTIN (63)à l’unanimité,– président de la commission «Inter-national » : Laurent BILLÈS-GARA-BÉDIAN (83) à l’unanimité,– président de la commission du Bal del’X : Alain BORIES (76), à l’unanimité,– délégué général : Pierre MARY (60),à l’unanimité.Par ailleurs le Conseil confirme Jean-Michel YOLIN (65) dans sa fonction dechef de la délégation de l’AX à la com-mission mixte AX-polytechnique.org,et Rodolphe DAUTRICHE (87) commechargé des relations de l’AX avec leCNISF, le CNGE et la CGE.Le Conseil confirme la nomination de

Jean-Marc CHABANAS (58) commerédacteur en chef de La Jaune et laRouge et d’Hubert JACQUET (64) entant que rédacteur en chef adjoint.

NOMINATIONDE REPRÉSENTANTS DE L’AX

À DES CONSEILS D’ADMINISTRATION

Le Conseil d’administration de l’AXdésigne Jean-Marie LEVAUX (64) commereprésentant de l’AX au Conseil d’ad-ministration de la Maison des X à comp-ter du 1er janvier 2009 en remplacementd’Étienne CRESPEL (56).Le Conseil d’administration de l’AXconfirme Jean-Pierre BÉGON-LOURS(62) dans sa fonction de représentantde l’AX avec voix consultative au Conseild’administration de l’APERF (Associationnationale pour l’épargne retraite desfonctionnaires).

APPROBATION DU PROCÈS-VERBALDE LA RÉUNION DU 10 AVRIL 2008

Le projet de procès-verbal de la réuniondu Conseil du 10 avril 2008 transmisaux membres du Conseil préalable-

ment à la présente réunion est approuvésous réserve de remplacer à la fin dudeuxième alinéa du paragraphe 2 «Sursa proposition, Alain BORIES est nomméà l’unanimité vice-président d’hon-neur. » par « Il propose de nommerAlain BORIES vice-président d’hon-neur. Le Conseil approuve cette pro-position par 23 voix pour et 1 voix contreet nomme Alain BORIES vice-présidentd’honneur de l’AX.»

COMMISSION« ÉVOLUTION DE L’ÉCOLE »

Henri MARTRE (47), président de la com-mission «Évolution de l’École», fait lepoint des travaux de ladite commission.Après une première étape qui s’estconcrétisée par un rapport publié surle site Internet de l’Association et dansle numéro d’avril de La Jaune et laRouge, la commission a entamé unedeuxième étape dans les quatredomaines suivants : la gouvernance del’École, son financement, les orienta-tions de quatrième année et le lienenseignement supérieur-recherche etinnovation-postformation.

Vie de l’Association

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Dans l’immédiat il est indispensablequ’elle se penche sur le document«Projet» soumis à la réunion du Conseilde l’École polytechnique du 26 juin pro-chain et formule son avis. Henri MARTREdemandera aux membres de la com-mission de lui communiquer par mes-sagerie leurs observations sur ce docu-ment. Il en effectuera une synthèse qu’ilcommuniquera au Président pour sonintervention sur ce sujet au Conseil del’École. De même seront fournies auPrésident des fiches sur différents sujetssur lesquels l’AX devrait faire valoir sonpoint de vue, notamment sur le rôlesocial de l’X, la suppression des stageshumanitaires, la qualité des masters.

COMMISSION« MARKETING ET ANIMATION »

À l’initiative de Robert MIZRAHI (70)le Conseil décide de créer une com-mission « Marketing et animation ».Le mandat de cette commission seraitde proposer des actions pour mieuxanimer l’Association, améliorer lerecrutement de nouveaux membres,mieux répondre aux aspirations desjeunes promotions, imaginer de nou-veaux services. L’objectif serait de«relooker» l’AX et lui donner plus devisibilité.Le Conseil nomme Robert MIZRAHIprésident de cette nouvelle com-mission, à charge pour lui d’en pré-ciser le mandat et d’en choisir lesmembres (article 21 du règlementintérieur). Le projet de mandat et laliste proposée des membres de lacommission seront soumis à l’ap-probation du Conseil du mois d’oc-tobre prochain.

CALENDRIER DES RÉUNIONSDU CONSEIL, DU BUREAU

ET DE LA CAISSE DE SECOURS

La délégation générale propose uncalendrier des réunions 2008-2009 duBureau, du Conseil, de l’Assembléegénérale et de la Caisse de Secours.Le Conseil approuve ce calendrier.

AGRÉMENT DU GROUPEX-AUTOMOBILE

Le Conseil donne, à l’unanimité desmembres présents, son agrément àla création du groupe X-Automobile.

L’objet de ce groupe est d’être un lieude discussion et d’information sur lesdifférents thèmes publics touchantau monde de l’automobile : les solu-tions technologiques, le monde indus-triel, le marketing, l’impact sociétal,le sport automobile. Pour ce faire legroupe X-Automobile rassemble prin-cipalement des X intéressés par lesquestions liées à l’automobile, quecela constitue le cœur de leur acti-vité professionnelle ou non.Cet agrément sera soumis à la rati-fication de l’Assemblée générale dejuin 2009.

Personne ne demandant plus la parole,la séance est levée à 20h30.

Vie despromotions

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Les camarades, épouses et veuves sontcordialement conviés au prochainmagnan, au restaurant Le Vauban, 7,place Vauban, 75007 Paris, le jeudi

15 janvier 2009, à 12h30. Ce sera l’oc-casion de tenir l’Assemblée de notreAssociation, le présent communiquévalant convocation.

S’inscrire pour le 10 janvier au plustard auprès de Françoise Guillemin(tél. : 01.47.51.69.73 ou 06.75.98.06.53).

Groupes XSABIX

COLLOQUE INTERNATIONAL

GABRIEL LAMÉ

Le Centre François Viète d’Histoire dessciences et des techniques de l’uni-versité de Nantes et la Maison dessciences de l’homme Ange Guépin deNantes organisent, en collaborationnotamment avec la Sabix, le Colloqueinternational Gabriel Lamé sur «Lespérégrinations d’un ingénieur duXIXe siècle».

Il se déroulera les 15, 16 et 17 janvier

2009 à la Maison des sciences del’homme de Nantes, allée JacquesBergue (à côté de la gare, sortie sud).Gabriel Lamé (1795-1870), ingénieur,professeur, mathématicien et physicien,appelait à « l’avènement futur d’unescience rationnelle unique».

Programme et inscription :http://www.sciences.univ-nantes.fr/cfv/

ARPLASTIX

EXPOSITION ANNUELLE

DU GROUPE ARPLASTIX

Le groupe Arplastix a été fondé il y aune trentaine d’années par des poly-techniciens épris d’arts plastiques,sous le patronage de Louis Leprince-Ringuet, physicien, académicien etpeintre. Les œuvres réalisées (peinturesou sculptures de techniques et destyles très divers) montrent que larigueur scientifique des ingénieursn’exclut pas, bien au contraire, la créa-tivité artistique…

L’exposition annuelle aura lieu du 2au 14 février 2009 dans l’Orangeriede la propriété Caillebotte (Mairied’Yerres, 91335).Tous les polytechniciens intéresséspar l’art sont invités à y participer, soiten tant qu’exposants, soit en tant quevisiteurs. Les élèves de l’École sontparticulièrement bienvenus : s’ils sou-haitent exposer leurs œuvres, ils n’au-ront pas à payer de frais d’inscription.Les camarades intéressés sont priésde prendre contact avec le respon-sable de l'exposition, Joël LAVAL (54),tél. : 01.46.26.29.36, le plus rapide-ment possible.

En attendant de vous voir à l'exposition,nous vous invitons à découvrir le groupeArplastix en visitant son site Internet : http://arplastix.polytechnique.org

X-ENVIRONNEMENT

Le groupe X-Environnement vous convieà une conférence-débat «Le solaire àconcentration» le mercredi 7 janvier

à la Maison des X de 18h30 à 20h30.www.x-environnement.org

Vie de l’Association

71LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

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Vie de l’Association

72 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

AU PROGRAMME DES ACTIVITÉS DU GPX

• Parties libres (ou tournois officieux)tous les mercredis à 14h30 à la Maisondes X.• Cours de bridge 1er niveau les jeu-dis matin : 18 décembre, 15 et 29 jan-vier, 12 février.• Cours de bridge perfectionnement

les jeudis après-midi des mêmesjours.

Les cours ont lieu à la Maison des X :– les lundis matin de 10 h à 12 h,– les jeudis en fin de journée de 17h30à 19 h 30.Compte tenu du succès de cette acti-vité, un troisième groupe pourrait êtreenvisagé.

Le voyage en CHINE DU SUD (du25 mars au 2 avril 2009) est complet.S’il y a encore des personnes intéres-sées, elles seront sur liste d’attente.

LA GRÈCE avec les Météores

Circuit de 10 jours en mai 2009.Classique, comme la Grèce antique.Mycènes et son acropole.Le théâtre d’Épidaure.La citadelle de Mystra.Le musée archéologique d’Olympie.Delphes et son amphithéâtre.Fantastique, comme les Météores.

Le massif du Pélion ou la presqu’îledes Centaures.Visite de deux des monastères classésau Patrimoine mondial de l’Unesco.Le petit train du Pélion «le Moutzouris» :un train pittoresque à vapeur qui ser-pente à flanc de montagne jusqu’àMiliès.Magique, comme la croisière dans legolfe Saronique.Découverte des îles du golfe. Escale àÉgine, la plus grande des îles, puis àPoros, « l’île aux citronniers », enfinHydra, joyau des îles du golfe.Pour terminer :Visite d’Athènes et de son acropole.Excursion au cap Sounion.

Dimanche 14 décembre 2008 avecJacques GÉNIN (64).Boucle autour du parc et du châteaude Versailles, parcours sans difficultéde 16 km par le bois de Satory, le fonddu Grand Parc et le domaine de Marie-Antoinette.Départ : de Saint-Michel-Notre-Dame9h19 RER C.Arrivée à Versailles-Rive-Gauche 9h57.Retour : de Versailles-Rive-Gauche17h06 RER C.Arrivée à Saint-Michel-Notre-Dame17h43.Vérifier les horaires des trains.Jacques GÉNIN, tél. : [email protected]

La randonnée de janvier aura lieu ledimanche 18 janvier 2009, en com-mun avec le groupe de randonnée deSciences Po.

12, rue de Poitiers, 75007 Paris.Téléphone : 01.45.48.52.04.Télécopie : 01.45.48.64.50.Courriel : [email protected]

Site Internet : gpx.polytechnique.org

Pour plus de détails sur toutes les activités du GPX

consultez notre site.

• Mercredi 17 décembre à 18 h 30« AGLAÉ, vingt ans au Louvre » parPhilippe WALTER, directeur derecherche au CNRS, codirecteur duLaboratoire du Centre de rechercheet de restauration des musées deFrance.

• Le musée des années trente àBoulogne-Billancourt.• Raoul Dufy au musée d’Art moderne.

• Le marché de Rungis.

• Le Diable rouge au Théâtre Montpar-nasse.24 heures de la vie d’une femme au

Théâtre Petit-Montparnasse.• Secret de famille au Théâtre desVariétés.

Les cours ont repris. Des places sontencore disponibles.

• Tournois officiels, homologués parla FFB, tous les lundis à 14 h 30 à laMaison des X sous l’égide du GBX.

et adresse ci-joint un chèque de ........................ eurosau GPX, 12, rue de Poitiers, 75007 Paris.

BULLETIN D'ADHÉSION AU GPX (saison 2008-2009)

Nom, Prénom : .............................................................................. Promo : ................

Adresse : ........................................................................................................................

........................................................................................................................................

Courriel : ...................................................................... Tél. : ........................................

* 33 euros pour les promos 95 et postérieures et pour les veuves.

désire adhérer comme :Membre Sociétaire (avec droit de priorité) 66 euros *Membre Associé 31 euros

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1929

Décès d’André Juzau le 16.11.2008.

1933

Décès de Jean Chéreau le 18.10.2008.

1934

Décès de Jean Fouchier le 1.10.2008.Décès de Michel Pascal le 10.11.2008.

1936

Théodore Kaas fait part du décès de sonfils, Philippe Kaas (71), le 20.10.2008.

1937

Décès de Paul Chaudron le 4.11.2008.Décès de Louis Perret le 10.11.2008.

1938

Décès de Claude Brisson, fils de JeanBrisson (1905), le 6.11.2008.Décès de Jean Rateau le 19.11.2008.

1939

Décès de Jean Tellier le 22.10.2008.

1940

Décès d’Henry Wiart le 17.10.2008.Décès de Jacques Gaborit le 20.10.2008.

1941

Décès de Jean Laballery le 31.10.2008.Décès d’Hervé Escudié le 16.11.2008.

1943

Décès de Michel Van Boxsom le18.10.2008.

1947

Décès de Michel Brisac, le 24.11.2008,frère de Pierre Brisac (52) et d’AlainBrisac (58).

1950

Décès de Joseph Creissel le 11.11.2008.Bernard Marty fait part de la naissance,le 29.10.2008, de son 3e arrière-petit-enfant, Eloan, arrière-arrière-petit-enfant de Marty (1921), chez Marine etLouis Nguyen.

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Pierre Brisac fait part du décès de sonfrère Michel Brisac (47), le 24.11.2008.

1953

Hubert Lévy-Lambert fait part du décès,dans sa cent neuvième année, de samère Odette, veuve de guerre, belle-mère d’André Scheimann (53, décédé)et de Samuel Attia (56, décédé).

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Emmanuel Bouis fait part de lanaissance de son cinquième petit-enfant, Aiken, le 19.10.2008, chezLaurent et Maria.

1955

Décès de Charles Katz le 22.10.2008.

1957

Dominique Cyrot fait part de la naissancede son douzième petit-enfant, Rafaël,deuxième fils de Martin Cyrot (93) et deVeronica.

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Alain Brisac fait part du décès de sonfrère Michel Brisac (47), le 24.11.2008.

1959

Décès de Jean-Luc Lesage le 21.11.2008.

1965

Décès de Didier Quint le 27.5.2008.

1966

Décès d’Olivier Dorbec, père de LoïcDorbec (94), le 12.10.2008.

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Décès de Philippe Kaas, fils de ThéodoreKaas (36), le 20.10.2008.

1972

Christian Blondin fait part du décès deson père Pierre Blondin, le 6.11.2008.

1974

Didier Hallépée et Isabelle Bonte fontpart de la naissance de leur fille, Leia,le 17.10.2008.

1987

Marie-Hélène Tusseau fait part de lanaissance d’Audrey, le 1.9.2008.Yvette et Étienne Béatrix font part de lanaissance de Paul, le 3.11.2008, petit-fils de Philippe Béatrix (54).

1992

Marie-Alix et Christophe Martin font partde la naissance de Faustine, le7.11.2008.

1994

Loïc Dorbec fait part du décès de sonpère, Olivier Dorbec (66), le 12.10.2008.

1995

Béatrice et Cyril Allouche font part de lanaissance de Claire, le 2.11.2008.

1996

Gwenaëlle et Éric Gillette font part de lanaissance de Grégoire, le 17.10.2008.

1997

Vincent Blateau fait part de son mariageavec Odile Rouschmeyer, petite-fille deRobert Leclercq (39), le 24.5.2008.

1998

Romain Launay fait part de son mariageavec Elvire, le 5.7.2008.

1999

Samy Lahbabi fait part de son mariageavec Anne-Claire Clipet, le 23.8.2008.Aurélie-Anne et Mikaël Le Mouëllic fontpart de la naissance de Roxane, le13.9.2008.

2000

Songhui et Pascal Gerbert-Gaillard fontpart de la naissance d’Angelina, le18.11.2008.

2002

Florence Brie fait part de son mariageavec François Helg, le 11.10.2008.

2004

Paul Toulouse fait part de son mariageavec Céline Ernst, le 21.2.2009.

Vie de l’Association

75LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Carnet polytechnicien

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Vie de l’Association

76 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Le Bureau des Carrières peut t’aider à piloter ta carrière professionnelle au mieuxde tes intérêts dans les périodes agitées que nous traversons actuellement :évolution, réorientation, changement de secteur, de métier…

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Pour cela, nous te proposons les services suivants :

ENTRETIENS PERSONNALISÉS

Il est de ton intérêt de prendre conseil le plus tôt possible, dès que certains signesavant-coureurs se manifestent : ambition contrariée, envie de changer, ennui,impasse, climat difficile, retrait des responsabilités, incompréhension, mutationnon désirée…

Nicolas ZARPAS (58) et Michel PRUDHOMME (64) sont à ta disposition pour enparler. Ils ont l’habitude, et peuvent t’éviter des réactions trop hâtives ou inefficaces.

Nicolas, ancien cadre supérieur de Péchiney, est responsable du Bureau desCarrières depuis 2002. Il a déjà conseillé près de 1 000 camarades à ce titre.

Michel, quant à lui, professionnel du Conseil en transition de carrière, a accompagnéplus de 250 cadres et dirigeants dans des Cabinets internationaux, puis dans sonpropre Cabinet.

SÉMINAIRES & ATELIERS

En fonction de ton cas, il te sera proposé un ou plusieurs séminaires organiséspar le Bureau des Carrières, afin de t’aider à préparer ton plan d’action. Cesséminaires peuvent intéresser aussi bien les camarades en poste que ceux quine le sont plus.

Les appréciations des camarades nous ont montré que ces séminaires étaientbien appréciés, et qu’ils se sont souvent révélés très utiles.

RÉSEAUX

Une fois ton projet finalisé, tu pourras accéder à divers réseaux polytechniciens :• correspondants et contacts du Bureau des Carrières en entreprise,• parrains et mentors,• le groupe X-Évolution professionnelle, formé de camarades en recherche quise retrouvent périodiquement au 5, rue Descartes pour y échanger sur leursexpériences.

LOGISTIQUE

Les moyens suivants te seront aussi accessibles :• le site de petites annonces www.manageurs.com• des listes de chasseurs de têtes, conseils en évolution professionnelle, avocats…• la documentation disponible à l’AX, à Palaiseau et sur Internet• un bureau équipé situé 5, rue Descartes.

En conclusion, si tu ne t’occupes pas de ta carrière, personne d’autre ne s’enoccupera, si ce n’est pour prendre des décisions te concernant à ta place. Il vautmieux prévenir que guérir.Le Bureau des Carrières est là pour t’aider dans cette démarche proactive.

Contacte Nadine MÉLISSE qui s’occupe de toute la logistique du Bureau desCarrières au 01.56.81.11.14.

AX - BUREAU DES CARRIÈRES

5, rue Descartes, 75005 ParisTél. : 01 56 81 11 14Fax : 01 56 81 11 03

[email protected] Web : www.abcdx.com

TARIFS 2008

annonce permanente :

9 euros la ligne par mois

Les annonces à publierdans le numérode janvier 2009

devront nous parvenir au plus tardle jeudi 18 décembre 2008

Seules les annonces reçuespar courrier, fax ou courriel

seront traitées(aucune annonce par téléphone).

Le règlement s’effectueen fin d’année.

OFFRESDE SITUATIONElles sont sur le site Web:

www.abcdx.com

ANNONCE PERMANENTE

3523 - Bertin Technologies, Groupeleader en expertises et en réalisationstechnologiques pluridisciplinaires(430 personnes dont 350 ingénieurs enmécanique, électronique, optique, logi-ciel, biologie…), recherche pour sou-tenir sa croissance des ingénieursexperts, des chefs de projets et desresponsables d’activités à haut poten-tiel (management d’équipes, conduited’études et de développement d’équi-pements à forte valeur ajoutée).Esprit d’entreprise, innovation tech-nologique, professionnalisme dans lasatisfaction des clients et la conduite deprojets sont nos valeurs. Venez les par-tager avec nous et nos partenaires.Contact : Philippe Demigné X82,président. Tél. : [email protected] — www.bertin.fr

DEMANDESDE SITUATIONElles sont sur le site Web:

www.abcdx.com

3468 - X72, MBA INSEAD 80, 21 ansde DG de sociétés opérant dans le biend’équipement, recherche poste de DG(avec idéalement participation au capi-tal ou transmission si possible) ou mis-sion de management de crise ou detransition ou d’amélioration de per-formances ou de projets complexes.

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DEMANDEDE LOCATION

DL272 - La Caisse de secours del’AX recherche pour camarades en dif-ficulté, studios à louer. Contacter YvesStierlé (65), délégué général adjoint,au 01.56.81.11.18 ou Véronique Mary-Lavergne, assistante sociale, au01.56.81.11.16. [email protected] [email protected]

OFFRESDE LOCATIONS

PROVINCELB818 - VALMOREL (Savoie), appt

pied pistes, tt cft, 3 p. indépendantes,58 m2, 8 lits, 2 salles de bains. Terrasse.Tél. : 01.45.20.10.54.

LB819 - MÉRIBEL-MOTTARET, 2 p.sud, tt cft, 4 pers. Tél. : 01.39.54.69.67.

ÉTRANGERLC69 - X52 - Médina de Marrakech.

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VENTESD'APPARTEMENTSET PROPRIÉTÉS

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D530 - Mme Abastado (veuve X81)recommande les VISITES DE MUSÉESde Mme [email protected]

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Vie de l’Association

77LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

3471 - X74, DGA d’une société pape-tière, cherche direction générale, direc-tion de business unit ou direction decentre de profit dans industrie.Expérience essentiellement produc-tion, logistique et commerciale. Manager.

3472 - Formation X 84 ENSTACEDEP. 20 ans d’expérience majo-ritairement dans l’équipement auto-mobile en France et en Tunisie,cherche position de direction géné-rale en France ou à l’étranger de

préférence dans le domaine de l’équi-pement automobile ou de la méca-nique.CV sur manageurs. comContacter Ismail Kamounau +21620528698.

AUTRES ANNONCES5, rue Descartes, 75005 Paris

Tél. : 01 56 81 11 11 — Fax : 01 56 81 11 01Courriel : [email protected]

TARIFS 2009 (la ligne)

Demandes de situation: 7 euros

Offres d’emploi: 10 euros

Immobilier: 14 euros

Divers: 16 euros

Les annonces à publier dans le numéro de février 2009

devront nous parvenir au plus tardjeudi 15 janvier 2009

Les annonces sont publiéesà titre de service rendu aux camarades

et n’engagent pas la responsabilité de l’AX.

Elles sont publiées sur le site Internetwww.polytechniciens.com

dès le tout début du mois de parutiondans la revue.

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Vie de l’Association

78 LA JAUNE ET LA ROUGE • DÉCEMBRE 2008

Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Adresse : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Code postal – Ville : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Courriel : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Téléphone : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Abonnement à La Jaune et la RougeVous n’êtes pas polytechnicien

Vous avez la possibilité de vous abonner à notre revue enrenvoyant le bulletin ci-dessous, accompagné d’un chèquede 40 euros à l’ordre de Amicale AX, à l’adresse suivante :AX - Service de l'Annuaire5, rue Descartes, 75005 Paris. Tél. : 01 56 81 11 15Courriel : [email protected]

Vous êtes polytechnicien

Des tarifs préférentiels d’abonnement sont consentis en fonctionde votre promotion.Consultez l’Association des anciens élèves.AX - Service de l'Annuaire5, rue Descartes, 75005 Paris. Tél. : 01 56 81 11 05Courriel : [email protected]

La Jaune et la Rouge, 5, rue Descartes, 75005 ParisCourriel : [email protected]

Désire être abonné à La Jaune et la RougeTarif 2009 : 40 euros, 10 numéros.

RÉUNION DES ADHÉRENTS

Exceptionnellement ouverte à tous les camaradesqui s’intéressent à la création ou à la reprise d’entreprises

LE LUNDI 26 JANVIER 2009

à la Maison des X, 12, rue de Poitiers, 75007 Paris

Deux entrepreneurs parlent de leur expérience

et répondent à vos questions.

18 HEURES

Présentation de Pierre BONTEMPS (X 73), fondateur et PDG de Coriolis,« Comment j’ai créé un nouveau groupe de télécoms ».

18 H 45

Présentation de Jorge BOUCAS (X 94), fondateur et PDG de NextEnergies,« Je ne savais pas que c’était impossible, alors je l’ai fait ».

Cette réunion sera suivie d'un pot.

POUR VOUS INSCRIRE

Merci d'envoyer un courriel à l'adresse suivante : [email protected]

en précisant : vos noms, prénoms, école et promotion.

DATES DES RÉUNIONS SUIVANTES

• Le 9 mars 2009, le 4 mai 2009, le 22 juin 2009.

XMP-ENTREPRENEURSite : xmp-entrepreneur.org

XMP-Entrepreneur

12, rue de Poitiers, 75007 Paris – Tél. : 01.42.22.86.49Courriel : [email protected] – Site : xmp-entrepreneur.org

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