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Edition française - Décembre 2000 Tassa Riscossa - Taxe Perçue. TORINO CPM N° 51 Anno XVI n. 3 - Dicembre 2000 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Torino - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium - Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IN CASO DI MANCATA CONSEGNA SI PREGA DI RINVIARE AL MITTENTE CHE SI IMPEGNA A PAGARE LA RELATIVA TARIFFA PRESSO CMP Torino Nord NUMERO SPECIAL “Il est vrai que nos sentences remplacent les sentences de la Rote romaine” Monseigneur Tissier de Mallerais DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA FRATERNITE SAINT PIE X

DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

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Page 1: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

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“Il est vrai que nos sentencesremplacent les sentences de laRote romaine”

Monseigneur Tissier de Mallerais

DOSSIER SUR LA “COMMIS-SION CANONIQUE” DE LA

FRATERNITE SAINT PIE X

Page 2: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

EditorialEditorial

Dans le dernier numéro de Sodalitium, nous avions annoncé aux lec-teurs la publication d’un volumineux dossier sur les Tribunaux cano-niques de la Fraternité Saint Pie X, dossier dont la préparation était

en cours. C’est promesse tenue: le présent dossier se compose de deux par-ties. Dans la première sont publiés certains documents internes de laFraternité Saint Pie X (documents qui ne sont donc pas à la disposition dupublic, pas même à celle des fidèles de la Fraternité); ils concernent la créa-tion, dès 1991, d’une Commission canonique investie de vastes pouvoirs dejuridiction, la Commission canonique St Charles Borromée. Pour suppléer àl’autorité du Pape et du Saint-Siège, la Fraternité a institué - comme vousallez le lire - de véritables tribunaux ecclésiastiques autorisés - par les autori-tés mêmes de la Fraternité - à concéder des dispenses, à annuler des mariagesetc... La publication de ces documents sera peut-être considérée comme uneindiscrétion inacceptable; nous nous y sommes cependant sentis autorisésparce que d’une part les fidèles ont le droit de connaître l’existence de ces tri-bunaux auxquels ils doivent recourir et qui peuvent les juger, et que d’autrepart ils seront ainsi en mesure d’en évaluer les raisons en toute objectivité.

C’est donc aux autorités mêmes de la Fraternité que nous allons donner laparole, en publiant par exemple ce que Mgr Tissier de Mallerais a écrit pourdéfendre et justifier l’existence de ces tribunaux.

La seconde partie de ce dossier consiste en l’étude critique de ces docu-ments. Certains lecteurs proches de la Fraternité Saint Pie X nous ont légiti-mement manifesté leur déplaisir devant le ton considéré comme railleur ouagressif de notre dernier éditorial vis-à-vis de la Fraternité et de ses tribu-naux. Nous nous en excusons, et invitons nos contradicteurs à lire avec atten-tion et sans préjugé ce qui suit. Tout éclaircissement, toute critique de la cri-tique, toute objection seront considérés par nous avec le plus grand sérieux.Cette partie critique comporte, il est vrai, de graves accusations concernant laFraternité Saint Pie X, mais toujours prononcées, du moins nous semble-t-il,dans les limites de la correction, et preuves irréfutables à l’appui. Dans laconclusion nous nous adressons avec sincérité aux supérieurs ainsi qu’aux

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“Sodalitium” Périodiquen° 51, Anno XVI - n. 3 Dicembre 2000

SPEDITO: GENNAIO 2001Editore: Centro Librario Sodalitium

Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA TO ItalieTel.: +39.0161.839.335 Fax: +39.0161.839.334

INTERNET: www.plion.it/sodaliemail: [email protected]

Direttore responsabile: don Francesco Ricossa AutorisationAutorizzazione Tribunale di Ivrea n. 116 du 24-2-1984

Tipografia: Ages - Torino

Sur la couverture: Mgr Tissier de Mallerais, président de laCommission Canonique de la F.S.S.P.X. Le sceau de laSainte Rote Romaine.

Page 3: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

simples membres de la Fraternité Saint Pie X, pour les inviter à ouvrir unediscussion (interne seulement ou même ouverte aux autres) sur ce (oud’autres) point de doctrine de leur congrégation posant - à notre avis - de sé-rieuses difficultés. De ce réexamen sincère la Fraternité sortira renforcée, sielle a le courage de laisser de côté une institution comme la Commissioncanonique.

Ce numéro, entièrement consacré à cette thématique interne du monde“traditionaliste”, ne comporte pas les articles habituels. Il est donc possiblequ’il intéresse moins une partie de nos lecteurs, et nous nous en excusons : unnouveau numéro de Sodalitium comportant les rubriques habituelles est déjàen préparation.

Nous souhaitons que ce dossier ne soit pas vu comme une provocation oucomme une polémique stérile, mais comme une contribution à la vérité et àl’union de tous les catholiques qui s’opposent à l’hérésie moderniste.

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Editorial p. 2Introduction p. 4PREMIERE PARTIE: DOCUMENTS INTERNES DE LA FRATERNITE SAINT PIE X p. 4

I. “ORDONNANCES” concernant les pouvoirs et facultés dont disposent les membres de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X p. 5

II. Extrait de “Cor unum”, bulletin interne de la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, n° 61, octobre 1998 p. 12

Lettre de S.Exc. Mgr Lefebvre du 15 janvier 1991 sur la constitution de commissionscanoniques p. 12Légitimité et statut de nos tribunaux matrimoniaux (Mgr Tissier de Mallerais) p. 14

III. Formules de dispenses (abbé Pivert) p. 20SECONDE PARTIE: COMMENTAIRE DE SODALITIUM p. 24Notes p. 45APPENDICE p. 51

Editorial de “Roma felix” (abbé Simoulin) p. 52Réponse à l’éditorial de l’abbé Simoulin p. 52

✍ Sommaire

Note de la rédaction:Pour une meilleure compréhension, les textes de laFraternité Saint Pie X ont été imprimés en caractèresHelvetica.Les textes et commentaires de Sodalitium ont été im-primés avec le caractère habituel Times.

Saint Charles Borromée. Ce saint peut-il protéger lacommission qui porte son nom?

Page 4: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

Introduction

Voilà déjà un certain temps que nous rece-vons un petit bulletin péruvien intitulé

Resistencia catolica et dirigé par un fidèle de laFraternité Saint Pie X, M. Julio Vargas Prada.

C’est avec stupeur (1) que nous y avons lu(n. 187, nov.-déc. 1999) une dénonciation dela création, par la Fraternité Saint-Pie X, devéritables tribunaux canoniques. Le péru-vien Vargas Prada, et le brésilien OrlandoFedeli, qui, pourtant à l’époque, avaient sou-tenu Mgr Lefebvre dans la décision deconsacrer des évêques, voient maintenantdans ces tribunaux, dont ils ont connu l’exis-tence grâce à une allusion qu’y a fait larevue argentine de la Fraternité JesusChristus (n. 43, janvier-février 1996, p. 17),un danger concret de schisme.

Il était nécessaire de contrôler la véracitédu fait. Nous sommes finalement entrés enpossession de deux documents d’une gravitéexceptionnelle: les Ordonnances concernantles pouvoirs et facultés dont jouissent lesmembres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, de 1997, et certains documents de laFraternité prétendant justifier ces nouveau-tés publiés dans Cor unum, n. 61, octobre1998, pp. 33-46. Cor unum est le bulletin in-terne de la Fraternité Saint Pie X, il est ré-servé uniquement à ses membres, et la pu-blication de ces documents s’est faite sansaucune autorisation de la part de la revue.Mais il nous semble de notre devoir de pro-céder à cette publication. Selon les textes enquestion, les fidèles de la Fraternité SaintPie X, les religieux et les prêtres amis decette société, et même potentiellement tousles catholiques, sont des “sujets” de ces tri-bunaux, qui leur sont inconnus, et de leursjuges. Ces sujets qui s’ignorent ont le droitde connaître l’existence d’un tribunal de cegenre, de ses juges, de ses justifications doc-trinales: un tribunal mi-secret est, à notreavis, incompatible avec la morale catholique,sans parler de la morale naturelle.

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PREMIERE PARTIE:DEUX DOCUMENTS

INTERNES DE LA FRA-TERNITÉ SAINT PIE X

Le premier document en question est unpetit volume de 79 pages intitulé“Ordonnances concernant les pouvoirs

et facultés dont jouissent les membres de laFraternité Sacerdotale Saint Pie X”, promul-gué en 1997 par le Supérieur général de laFraternité, Mgr Bernard Fellay, pour rempla-cer un recueil analogue d’“Ordonnances” pu-blié sous l’autorité de Mgr Lefebvre en 1980.Les “Ordonnances” se composent de “préli-minaires”, suivis de huit chapitres: du jeûne etde l’abstinence (chap. I), des obligations desclercs (chap. II), de quelques obligations par-ticulières (chap. III), délégations de pouvoirset indulgences (chap. IV), empêchements demariage (chap. V et VI), des délits et despeines (chap. VII). Dans ce dossier nous pu-blions seulement ce qui regarde strictementnotre sujet, c’est-à-dire les préliminaires (quidonnent les principes généraux suivis par laFraternité), les chapitres V et VI concernantles empêchements au mariage, ainsi qu’unbref extrait du chapitre VII. Les interventionsrédactionnelles sont insérées dans les paren-thèses carrées: brefs commentaires, omissionsd’une partie du texte signalées par des pointsde suspension, ou encore la page des“Ordonnances” d’où le texte est extrait. Pourl’intelligence du texte, nous rappelons au lec-teur que l’Eglise énumère une série d’obs-tacles (dits “empêchements”) qui peuventrendre le mariage illicite (“empêchementsprohibants”) ou invalide (“empêchements di-rimants”). Là où l’empêchement n’est pas dedroit divin positif ou naturel, l’Eglise (c’est-à-dire le Pape, par l’intermédiaire desCongrégations romaines) a le pouvoir de dis-penser desdits empêchements. Dans les“Ordonnances” la Fraternité précise pour sesmembres quels sont les empêchements à

Doctrine

DOSSIER SUR LA “COMMISSION CANO-NIQUE DE LA FRATERNITE SAINT PIE X”

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considérer comme en vigueur (ceux de l’an-cien ou du nouveau code) et attribue aux au-torités de la Fraternité le pouvoir de dispenserappartenant en propre au Saint-Siège. L’im-portance de la question convaincra le lecteurde poursuivre une lecture rendue parfois diffi-cile par l’utilisation de termes canoniques etthéologiques pouvant sembler rebutants à quin’est pas expert en matière ecclésiastique.

I. PREMIER DOCUMENT:

ORDONNANCES concernant les pouvoirset facultés dont disposent les membres de la

FRATERNITE SACERDOTALE SAINT-PIE X

[p. 3]Chers confrères,Mgr Lefebvre, considérant les nécessi-

tés de notre apostolat, si semblables àcelles des missions d’Afrique, nous donna,en 1980, un recueil de facultés tellesqu’elles étaient en usage depuis plusieursdécennies en pays de mission.

Depuis 15 ans, certaines circonstancesont changé, comme la possibilité d’avoirune visite épiscopale plus fréquente, ou, aucontraire, la quasi impossibilité de recourirà Rome pour obtenir dispense ou jugementéquitable sur les mariages. Cela justifiecette édition réajustée des Ordonnances.

(...)Ces nouvelles ordonnances entrent en

vigueur le 18 mai 1997, en la fête de laPentecôte.

(...)En la fête de la Présentation de Jésus

au Temple, le 2 février 1997.† Bernard Fellay, Supérieur général

[p. 4]

PRELIMINAIRES

Objet de la loi- Le but et l’objet des lois ecclésias-

tiques, et par le fait même des pouvoirs etdes facultés, n’est autre que ce qui concer-ne le culte de Dieu et le salut des âmes (cf.Léon XIII, encyclique Immortale Dei, cf.Prümmer, T. I, n. 181).

- Le nouveau code de droit canon, pro-mulgué le 25 janvier 1983, imbu d’œcumé-

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nisme et de personnalisme, pèche grave-ment contre la finalité même de la loi. Aussisuivons-nous en principe le code de 1917(avec les modifications introduites posté-rieurement).

Cependant, dans la pratique et sur despoints précis, nous pouvons accepter dunouveau code ce qui correspond à un dé-veloppement homogène, à une meilleureadaptation aux circonstances, à une sim-plification utile; nous acceptons aussi engénéral ce que nous ne pouvons refusersans nous mettre en porte-à-faux avec lalégislation reçue officiellement, lorsque lavalidité des actes est en jeu. Et dans cedernier cas, nous renforçons notre discipli-ne pour la rapprocher de celle du code de1917 (cf. Cor unum, n. 41, pp. 11-13).

[p. 5]Juridiction de suppléance- Le droit prévoit certains cas où l’Eglise

supplée au défaut de juridiction du prêtre:“la raison pour laquelle l’Eglise supplée lajuridiction n’est pas un bien privé, mais le‘bonum animarum commune’” (Cappello, I,n. 252). L’Eglise supplée expressément à lajuridiction dans trois cas: le péril de mort(can. 882), l’erreur commune (can. 209) etle doute positif et probable de droit ou defait (can. 209) (cf. Noldin, III, n. 346-347;Cappello, I, n. 254-258).

Le frontispice des “Ordonnances” de 1980

Page 6: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

- Du fait que la hiérarchie (cf. can. 108 § 3)s’éloigne en grande partie de la foi catholique,les fidèles ne peuvent généralement recevoird’elle les secours spirituels sans péril dans lafoi; on ne peut douter qu’alors, l’Eglise n’éten-de largement en leur faveur ce qu’elle accordedans le péril de mort et en d’autres cas d’ur-gence, et qu’ainsi, en raison de l’analogia iuris(can. 20) et de l’æquitas canonica, elle ne sup-plée au défaut de juridiction des prêtres fidèles(cf. can. 209, 2261...) alors que ceux-ci sontinjustement dépourvus de la juridiction qu’ilsauraient en temps normal soit par le droit (p.ex. n. can. 967 § 2), soit par délégation.

[p. 6]- Caractéristiques de cette juridiction

supplééeElle est: 1° davantage de type personnel

que territorial; 2° elle n’est pas habituellemais s’exerce ‘per modum actus’ (cf.Cappello, I, n. 252); 3° elle dépend du besoindes fidèles, vue la situation de nécessité (cf.Conférence aux Cercles de la Tradition,Paris, 10 mars 1991), mais 4° elle existemême dans le cas où, de fait, il n’y a pas né-cessité; en effet il y a une présomption depéril commun et donc une analogie avec lecan. 21, permise pas le can. 20, et comme ily aura en général doute probable de foi, il yaura suppléance selon le can. 209.

- Ceux qui possèdent la juridiction desuppléance

Ce sont tous les évêques et tous lesprêtres fidèles à la tradition (même excom-muniés, cf. can. 2261, ceci dit comme ar-gument ‘ad hominem’), pour l’exercice lici-te ou valide des actes du ministère épisco-pal ou sacerdotal.

- Hiérarchie dans la juridiction supplééeEn soi, à l’égard des fidèles, les simples

prêtres n’ont pas moins de pouvoir [sic] desuppléance qu’un prieur ou qu’un supé-rieur de district. Mais par disposition pra-tique, afin de conserver le sens hiérar-chique qui appartient à l’esprit de l’Eglise,et de remettre les cas plus graves à uneinstance plus élevée, certains pouvoirssont réservés à l’autorité supérieure, selonune analogie avec la hiérarchie normale,d’après les règles suivantes:

* Les prieurs et prêtres responsables dechapelles sont équiparés à des curés per-sonnels, tels les aumôniers militaires.

* Les supérieurs de districts, séminaireset maisons autonomes ainsi que le supé-

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rieur général et ses Assistants, bien qu’ilsn’aient en principe de juridiction que surleurs sujets (prêtres, séminaristes, frères,oblats, familiers), sont équiparés à desOrdinaires militaires, par rapport aux fidèlesdont leurs prêtres ont la charge d’âme [sic].

* Les évêques de la Fraternité, dépour-vus de toute juridiction territoriale, ontnéanmoins la juridiction supplétoire néces-saire pour exercer les pouvoirs attachés àl’ordre épiscopal et certains actes de la ju-ridiction épiscopale ordinaire.

[p. 8]Commission canonique - évêque chargédes religieux

Ces deux instances ont été créées en1991 pour continuer après sa mort l’officeque Mgr Lefebvre a rempli de manière sup-plétoire, en ces matières de 1970 à 1991.C’est Monseigneur qui a prévu et précisé lerôle de ces instances, par sa lettre du 15janvier 1991 au supérieur général:

[nous omettons ici le texte de cette lettre,pour le reporter dans le document suivant].

[p. 9]Pouvoirs et facultés délégués

- Délégations accordées antérieurementpar le Saint-Siège.

Depuis longtemps, et dernièrement en1950 et en 1960, la S.C. de la Propagandea concédé aux ordinaires des lieux despays de missions de larges facultés appe-lées “facultés décennales”, en particulier lafaculté de déléguer plusieurs de leurs pou-voirs aux prêtres de leur territoire.

Mgr Lefebvre, alors archevêque deDakar, en promut l’application en 1961 parun petit livret portant déjà le titre d’“Or-donnances, etc.”. Le texte des facultés dé-cennales de 1950 et leur application setrouvent dans l’ouvrage Vingt-cinq ans depastorale missionnaire, du Père Gréco

Mgr Fellay (à gauche), actuel supérieur de la F.S.S.P.X.avec Mgr Lefebvre et l’abbé Laroche, l’un des membres

de la commission canonique

Page 7: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

(1958), préfacé par Monseigneur et spécia-lement recommandé par lui.

Le 30 novembre 1963, par sa lettreapostolique Pastorale munus, le Pape PaulVI, a concédé des facultés quelque peuanalogues à tous les évêques résidentiels.

[p. 10]- Mgr Lefebvre, comme évêque et comme

supérieur général de la Fraternité SacerdotaleSaint-Pie X, bien que n’étant plus Ordinaire dulieu comme il l’était à Dakar, estima disposerd’une suppléance lui permettant, en faveurdes fidèles, de concéder à ses prêtres des fa-cultés analogues. Il les promulgua par sesOrdonnances à l’usage de la Fraternité, le 1ermai 1980, en suivant la formula facultatumdecennalium de 1960.

- La présente édition des ordonnancesreprend le texte antérieur mais avec dessubdivisions plus développées et en tenantcompte de l’existence des évêques auxi-liaires de la Fraternité.

- On a rajouté en outre les pouvoirs etfacultés qui regardent les actes de mariage(cf. Cor Unum, n. 42, pp. 44-56), la dispen-se des vœux et l’absolution des censures,avec les précisions utiles concernant le casde péril de mort et le cas urgent.

- Les facultés concédées aux prêtres, lesont non seulement aux prêtres membresde la Fraternité, mais encore à tous lesprêtres qui résident d’une manière prolon-gée dans nos maisons. [...]

CHAPITRE IV - DELEGATIONS DE POU-VOIRS ET INDULGENCES

[pp. 23-33. Afin d’être plus brefs nousomettons ce chapitre de même que les trois pré-cédents. Signalons cependant qu’entre autres“facultés” concédées par les Ordonnances auxprêtres de la Fraternité se trouve encore celle deconférer le sacrement de Confirmation (I, 3, p.23; I, 4 et 5, p. 24; III, 36, p. 31), ce qui est parti-culièrement grave, car, comme l’a démontrél’abbé Hervé Belmont, dans ces circonstancesle sacrement est administré invalidement (2)]

CHAPITRE V - EMPECHEMENTS DEMARIAGE. Pouvoirs de dispense dansles cas ordinaires [pp. 34-60]

I - Principes [p. 34]I - Nous ne pouvons accepter du nou-

veau code les normes qui s’opposent plus

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ou moins au droit naturel ou au droit divinsurnaturel.

II - Quant aux autre normes, pour tout cequi engage la validité du mariage, nous sui-vons le nouveau code, pour ne pas avoir àdéclarer nul un mariage reconnu valide parle nouveau code, et inversement. Mais pource qui regarde la licéité, nous adoptons unediscipline propre; nous renforçons les exi-gences du nouveau code en les ramenant àcelles de l’ancien, dans le but d’assurer lemieux possible les trois biens du mariage.

III - Grosso modo, la commission cano-nique est compétente pour la plupart de ceque le droit réserve au Saint-Siège, et lessupérieurs de district pour ce qui est duressort de l’Ordinaire du lieu.

II - LISTE DES EMPECHEMENTS, POU-VOIRS DE DISPENSE, COMPETENCESRESPECTIVES, EN DETAIL. [p. 35]

1. Aetas [p. 35] [Il s’agit de l’âge au-dessous duquel il est interdit de se marier].

- Ad validitatem (can. 1067 § 1, n. can.1083 § 1): 16/14 ans, dispense très rare:commission canonique. Ad liceitatem (n.can. 1083 § 2): nous suivons l’âge mini-mum fixé par les conférences épiscopalesou, à défaut, 18/18 ans. Dispense: com-mission canonique.

- Can. 1034 (n. can. 1071, 6°): ne pasassister au mariage des mineurs n’ayantpas la permission de leurs parents, sanspermission de l’Ordinaire: permission dusupérieur de district. Par “mineurs” nousentendons dans ce cas les moins de 21ans et non pas 18 (majorité fixée par lenouveau code). Mais cela ne signifie pasque nous rejetions dans d’autres cas lamajorité [fixée] à 18

[p. 36]2. Impotentia (dirimant) [en cas d’im-

puissance il n’est pas possible de dispenser.Nous omettons ce qu’écrivent les “Ordon-nances” à ce propos]

3. Ligamen (dirimant) [c’est le casd’une personne déjà mariée]

Age:Commission canonique (dispense -

moins de 18/18 ans)Supérieur de district (permission -

moins de 21 ans, lorsque permissiondes parents manque)

Page 8: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

Can. 1069 (n. can. 1085).- Dans les cas de MARIAGES ÉVIDEMMENT

INVALIDES (par exemple le mariage purementcivil de deux catholiques) et de mariageévidemment valides, il n’y a pas à recourirà la commission canonique, mais il faut lenihil obstat du supérieur de district. [...]

[p. 37]- Tous les cas de premier mariage dou-

teusement valide, ou de déclaration de nul-lité de mariage, y compris les mariages dé-clarés nuls par les tribunaux officiels, sontdu ressort de la commission canonique.On observera la procédure suivante: ons’adressera au supérieur de district, quirassemblera le maximum de pièces et quipourra trancher en faveur de la validité dumariage précédent [avec appel possibleauprès de la commission canonique]; s’ilestime sérieuses les raisons en faveur de lanullité du mariage, il transmettra le dossierpour jugement à la commission canonique,à moins qu’il ne dispose d’un tribunal dedistrict pour la première instance.

- PRIVILEGE PAULIN

Can. 1122 § 1 (n. can. 1145 § 1): inter-pellations du conjoint resté infidèle: faitespar l’Ordinaire; pour nous, par le supérieurde district: - S’il y a une dispense des inter-pellations à accorder, le can. 1121 § 2 laréserve au Saint-Siège, le n. can. 1144 § 2à l’Ordinaire du lieu; pour nous, on s’adres-sera à la commission canonique.

[p. 38]- Autres cas de dispense d’un lien ma-

trimonial:* Privilege Pétrinien* Dispense sur “ratum non consum-

matum”Les pouvoirs codifiés (can. 1125, n. can.

1148-1149) demeurent, mais leur applica-tion sera soumise à la commission cano-nique pour contrôle, car ces cas sontgraves et mettent en jeu la validité.

Il reviendra à la commission canoniquede dispenser, s’il y a lieu, des interpella-tions.

La dispense des autres mariages depaïens, ainsi que la dispense “super ratumnon consummatum” ne peuvent être ac-cordées que par le Pape en personne. Ilfaudra alors passer par la voie officielle,mais non pas sans l’autorisation du supé-rieur de district qui contrôlera au préalablela légitimité de la dispense à demander.

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- MARIAGE NON CANONIQUE DES APOSTATS

Jusqu’à examen plus approfondi, noussuivons la norme du nouveau code quiconsidère valide le mariage non canonique(civil par exemple) des catholiques “qui ontquitté l’Eglise catholique par un acte for-mel”: Ils ne sont pas tenus à la forme cano-nique du mariage (n. can. 1117). [Noter queles mariages en question seraient par contreinvalides si l’on suivait le code de 1917, quipour la Fraternité est encore - en principe - laloi à laquelle il faut se référer. Comment lesfidèles pourront-ils ne pas avoir de doutes surla validité de leur union?]

[39]

[p. 40]4. Disparitas cultus (mariage entre

baptisé catholique et non baptisé)- C’est un empêchement dirimant de

droit ecclésiastique (c. 1060), et prohibantde droit divin s’il y a péril de perversion dela foi du conjoint catholique ou des enfants(can. 1060 in fine, n. can.: rien!).

La dispense appartient à la commissioncanonique, en raison de la gravité de ces cas.

- On notera que le nouveau code (n.can. 1086 § 1), contrairement à l’ancien(can. 1070 § 1) ne soumet plus à l’empê-chement ceux qui ont quitté l’Eglise catho-lique “par un acte formel”.

Nous avons déjà dit ce qu’il faut enpenser, à propos du défaut de forme cano-nique du mariage (n° 3). Notons simple-ment ici que, s’il s’agit d’un mariage àconclure entre un non baptisé catéchumè-

Privilège PaulinSupérieur de district (interpellation du

conjoint non catholique).Commission canonique (dispense des

interpellations).Privilège pétrinien et dispense

super ratum non consummatum:Saint-Siège (avec permission du su-

périeur du district et contrôle de la com-mission canonique).

Mariage non canonique des apostats:valide (nouvelle discipline).

Lien:Simple prêtre (cas évidents)Commission canonique (premier ma-

riage douteux, ou déclaré nul. A travers[sic] le supérieur de district).

Page 9: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

ne et un apostat de l’Eglise catholique, ons’adressera à la commission canonique.

- Les exigences du nouveau droit (n.can. 1086 § 2; 1125-1126) sont, par leurfaiblesse, plus ou moins contraires au droitdivin (protection de la foi, bonum prolis);nous retenons par conséquent celles del’ancien droit (can. 1071; 1060-1064).

- (...) [p. 41]- Etant donnée la particulière gravité des

cas de disparité de culte qui mettent en jeu lafoi, l’Eglise a toujours été très sévère. Lesconfrères feront donc spécialement attentionà ne jamais demander la dispense sans véri-fier auparavant sérieusement la réalité descauses alléguées et des garanties données(can. 1061). Une erreur en cela ou un manquede sincérité peuvent invalider la dispense etdonc le mariage (can. 1061, n. can. 90). Unprêtre prudent et averti ne devrait jamais ac-cepter l’union ni demander la dispense lors-qu’il s’agit d’un musulman ou d’un juif: c’étaitl’avis de Mgr Lefebvre, et Naz dit que l’Egliseaccordait rarement de telles dispenses.

[p. 42] 5. Ordo sacer (can. 1072, n. can. 1987)

(dirimant)Le droit en a toujours réservé la dispense

au Saint-Siège [...] et pour la prêtrise, mêmedans le cas de péril urgent de mort, [...]. “Ladispense proprement dite n’est accordéeque difficilement, à des sous-diacres etdiacres seulement” [...]. Mais il y a la possi-bilité d’obtenir l’indult de laïcisation.

- Pour nous, la dispense sera du ressortde la commission canonique, qui cependantsuivra la pratique du Saint-Siège, en sorteque l’empêchement provenant de la prêtrisedevra être considéré comme non suscep-tible de dispense, même en danger de mort.Quant au sous-diaconat et au diaconat, ladispense sera difficilement accordée, saufdans le cas de péril de mort, par le confes-seur ou le prêtre qui assiste au mariage [...].

[p. 43]

Ordre sacré:Commission canonique (dispense à

accorder à sous-diacres et diacres).

Disparité de culte:Commission canonique (dispense; ma-

riage des catéchumènes et des apostats).Supérieur de district (ad cautelam,

quand baptême douteusement valide).

9

6. Professio religiosa - Vota[…] [La Fraternité suit le nouveau code

pour les vœux publics perpétuels - tous diri-mants - et l’ancien pour le vœu privé de chas-teté et les vœux publics temporaires].[Discipline pour les cas ordinaires:]

[p. 44] […]* Vœux publics perpétuels (dirimants):

Leur dispense est annexée ipso jure à l’indultde sécularisation [...] qui est du ressort duSaint-Siège pour les instituts de droit pontifi-cal et de l’évêque du diocèse de la maisonpour les instituts de droit diocésain (n. can.691 § 2). Il semble plus pratique pour nousde ne pas faire cette distinction et de confiertous les cas à l’évêque chargé des Religieux.

[p. 45]* Vœux publics temporaires (prohibants

pour nous)[...] Pour nous, mise à part la Fraternité

Saint-Pie X que nous considérons équiparée àun institut de droit pontifical, ce sera l’évêquechargé des Religieux qui accordera l’indult(contenant ipso jure la dispense du vœu).

* Vœux privés réservés au Saint-Siègepar le code de 1917

Le nouveau code a supprimé la réservefaite par l’ancien (can. 1309) au Saint-Siègedes deux vœux privés spéciaux de chaste-té parfaite et perpétuelle et d’entrer dansun institut à vœux solennels; néanmoinsnous maintenons cette réserve qui sera duressort de la commission canonique.Cependant les supérieurs de districts etmaisons autonomes ont la faculté déléguéed’en dispenser ou opérer mutation (cf.nostre facoltà n. 35 et 41).

* Tous les autre vœux privés contraires(ou non) au mariage sont, selon le nouveaucode

[p. 46](n. can. 1196) du ressort de l’Ordinaire

du lieu ou du curé. Nous leur équiparons lesupérieur de district et le prieur, ainsi quele prêtre, simple responsable de chapelle.(cf. nostra facoltà n. 35).

Profession religieuse:Vœux publics perpétuels: évêque

chargé des religieux (sécularisation)Vœux publics temporaires:- FSSPX: Supérieur général,- autres: évêque chargé des religieux.Vœux privés contraires au mariage:

fac. n° 35 et 41.

Page 10: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

7. Raptus (can. 1074, n. can. 1089,dirimant)

- La dispense n’est habituellement pasaccordée.

- Cela relève de la commission canonique.8. Crimen (dirimant)- Le n. can. 1090 supprime les deux

premières formes de l’empêchement decrime (can. 1075 § 1): adultère avec pro-messe de mariage et adultère avec maria-ge, même seulement civil [p. 47], attenté.Mgr Lefebvre disait que cette suppressionse justifie par l’évolution des mœurs [...]

- Les deux autres formes de crime [...]sont simplifiées [...]. Ces deux formes del’empêchement sont réservées au Saint-Siège [...]. Pour nous, ce sera la commis-sion canonique.

[p. 48].9. Consanguinité (can. 1076, n. can.

1091) (dirimant) [...] Le nouveau code a changé le mode

de comput et, dans le nouveau mode il ré-duit l’empêchement en ligne collatérale auquatrième degré de parenté. [...] La réduc-tion de l’empêchement par le nouveaucode se justifie donc, selon l’avis de MgrLefebvre. [...] [p. 50]

Toutes les dispenses sont du ressort dela commission canonique. [...]

[p. 51]10. Affinitas (avec consanguins du

conjoint décédé) [La Fraternité procède àune “harmonisation” des deux législations,l’ancienne et la nouvelle, selon l’expériencede Mgr Lefebvre. Nous donnons seulementle résumé encadré:]

[p. 52]

[p. 53]11. Honestas publica (dirimant)[Dans ce cas aussi la Fraternité procède

à une “harmonisation” des législations”.

Affinité:- Pas de dispense en ligne directe.- Supérieur de district (permission

pour contrôle, aux 1er et 2ème degréscollatéraux - Comput canonique ancien).

Crime:Supérieur de district (contrôle des

obligations envers les enfants du maria-ge précédent).

Commission canonique (dispense, siconjugicide).

10

Nous n’en donnons que le résumé enca-dré, à la p. 54:]

[p. 55]12. Cognatio spiritualis[Le nouveau code supprime l’empêche-

ment de parenté spirituelle; mais la Fraternitéécrit: “nous maintiendrons la nécessité d’unepermission du supérieur de district”]

[p. 56]13. Cognatio adoptiva[Pour la parenté adoptive, la Fraternité

suit le nouveau code]Dispense de l’empêchement: supérieur

de district (n. can. 1078 § 1: Ordinaire dulieu) [...].

[p. 57]14. Religio mixta (entre baptisé

catholique et baptisé non catholique)- La discipline du nouveau code est, par

faiblesse, plus ou moins contraire au droitdivin (protection de la foi catholique), nousla rejetons donc et retenons la disciplineantérieure.

- Can. 1060: prohibition très sévère, etde droit divin, s’il y a péril de perversion dela foi. A l’égard des apostats notoires oude membres de sectes, l’Eglise fait “détes-ter” le mariage avec eux, (can. 1065) et lecuré ne doit pas y assister, sauf permissionde l’Ordinaire.

Pour nous: nous étendrons l’empêche-ment prohibant proprement dit au mariageavec des apostats même simples ou avec lesmembres de sectes chrétiennes ou non; pourle mariage avec les catholiques conciliaires,nous exigeons la permission du supérieur dedistrict. Dans tous ces cas en effet il y a pré-somption de péril commun pour la foi duconjoint catholique et des enfants à naître.

- Conditions de la dispense: can. 1061:cautions (requises à la validité de la dis-pense) et certitude que les engagementsseront tenus.

[p. 58] Si après avoir obtenu la dispense, les

futurs veulent aller devant le ministre noncatholique, ce qui est gravement prohibé, ilfaut consulter l’Ordinaire (can. 1063), pournous, le supérieur de district.

Honnêteté publique:Commission canonique (dispense au

premier degré)Supérieur de district (permission au

2ème degré)

Page 11: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

- Autorité de dispense: la gravité descas suggèrerait le recours à la commissioncanonique, mais leur fréquence, parexemple dans les pays anglo-saxons, de-mande que le supérieur de district puisseaccorder la dispense. C’est donc à lui quela dispense sera réservée.

- Dispense ad cautelam de l’empêche-ment de disparité de culte: il est non seule-ment permis mais conseillé au supérieur dedistrict de l’adjoindre toujours à la dispen-se de l’empêchement de religion mixte. Elleest censée [sic] inexistante si elle n’est pasadjointe expressis verbis.

[p. 59]15. DÉSACCORD AVEC LES LOIS CIVILES[...] Tous ces cas seront soumis à l’au-

torisation du supérieur de district, plus aufait de la législation civile locale que lacommission canonique. [...]

[pp. 60-61]

III - Convalidation du mariage et sanatioin radice (cas ordinaires) [...]

[p. 62] c) Pouvoirs- Convalidation simple: Supérieur de

district pour contrôle. Mais si disparité deculte: commission canonique, et égalementsi autres empêchements relevant de cettedernière.

- Sanatio in radice. C’est une grâce ac-cordée par le Saint-Siège seul, selon lecode de 1917 (can. 1141). Mais comme lenouveau code communique ce pouvoir auxévêques diocésains (n. can. 1165 § 2),nous estimons que nos supérieurs de dis-trict et maisons autonomes jouissent sup-plétoirement de ce pouvoir, vu [sic] aussiles fac. 30 et 31 de la Form. facultatum de-cennalium.

[p. 63]

Convalidation et sanatio in radice;Convalidation simple: supérieur de

district (contrôle)Sanatio in radice: supérieur de dis-

trict (grâce)

religion mixte:Supérieur de district pour dispense

ou pour permission pour mariage aveccatholique conciliaire.

11

CHAPITRE VI.EMPECHEMENTS DE MARIAGE.Pouvoirs de dispense dans LE PERIL DEMORT ET LE CAS URGENT

Préliminaires 1. Le nouveau code, à côté de quelques

détails qui peuvent être avantageux, com-plique les choses et omet les conditionsnécessaires à la dispense selon la loi divi-ne. C’est pourquoi nous nous [sic] tenonsau code de 1917, avec les adaptations sui-vantes:

- Aux ordinaires des lieux sont équipa-rés les supérieurs de district et maisons au-tonomes, mais non les supérieurs de sémi-naires. Ils peuvent déléguer.

- Les pouvoirs concédés par le codeaux curés et prêtres assistants [sic] au ma-riage le sont, pour nous, concédés [sic] àtous les prêtres bénéficiaires des présentesordonnances.

[nous omettons les pages 64-67 qui appli-quent les “principes” susdits]

[p. 68]

CHAPITRE VII. - Des délits et des peines

I. PRINCIPES Norme généraleNous suivons les sages principes du

code de 1917 exposés dans les cann. 2195à 2313, mais pour les raisons indiquées p.3, nous nous en tenons aux peines latæsententiæ portées par le nouveau code.

[dans le chapitre II les “Ordonnances” ex-posent les “censures latæ sententiæ en vigueur”- à la p. 69 - c’est-à-dire les excommunicationslatæ sententiæ - aux pp. 69-70 - les interditslatæ sententiæ - à la p. 70 - les suspens latæ sen-tentiæ - à la p. 71, selon le nouveau code].

[p. 71]

III. RÉMISSION DES PEINES

1. Prænotamina[...][p. 72] […]3) Etant donné que de graves inconvé-

nients peuvent résulter du fait d’adresserles pénitents aux instances prévues par lecode (Sacrée Pénitencerie, évêque, cha-noine pénitencier), il est conseillé d’utiliserles facultés qui suivent au n° 2, concernantles cas ordinaires.

Page 12: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

2. CAS ORDINAIRES.1) Les peines RÉSERVÉES au Saint-Siège

peuvent être soumises au supérieur géné-ral de la Fraternité ou au président de lacommission canonique.

2) Une peine INFLIGÉE par un supérieurest soumise à celui-ci, mais s’il s’agit d’unsupérieur “novus ordo”, elle peut être sou-mise au supérieur de rang équivalent dansla Fraternité, à charge pour lui de consulterson confrère “novus ordo”, s’il le juge utile.

3) Toutes les AUTRES PEINES peuvent êtresoumises au supérieur de district, quiconsultera, le cas échéant, le supérieur dedistrict où le délit fut perpétré.

4) Quant à la censure encourue pourAVORTEMENT occulte, tout prêtre a faculté

[p. 73] d’en absoudre, sans obligation de re-

courir, en imposant une pénitence propor-tionnée et la réparation éventuelle.

[Les “Ordonnances” parlent enfin de l’ab-solution des peines dans les cas extraordi-naires, c’est-à-dire péril de mort (point 3, p.73), cas urgent (point 4, pp. 73-74), et recoursimpossible (point 5, pp. 74-75). C’est aveccette énumération que se concluent les“Ordonnances”].

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II. DEUXIEME DOCUMENT:

Extrait de “Cor unum”, bulletin interne dela Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, n° 61,

octobre 1998

Le second document est un extrait dubulletin ‘Cor unum’ d’octobre 1998.L’institution de la “Commission cano-

nique” par la Fraternité Saint Pie X ne pouvaitpas ne pas provoquer – à l’intérieur comme àl’extérieur de la Fraternité – des doutes, desperplexités et des critiques, du moins dans lamesure où l’activité de cette Commission étaitconnue. Les autorités de la Fraternité considé-rèrent donc comme opportun de justifier l’ins-titution de la “Commission canonique” et enparticulier les annulations de mariage pronon-cées par ses Tribunaux. C’est pourquoi ‘Corunum’ publia deux documents, reproduits iciintégralement: la lettre de Mgr Lefebvre du 5janvier 1991 au supérieur général de l’époque,Franz Schmidberger, sur la constitution d’une

12

Commission canonique, et le texte d’une inter-vention tenue à Ecône le 24 août 1998 par leprésident de la Commission canonique, MgrBernard Tissier de Mallerais, sur la légitimitéet le statut des tribunaux matrimoniaux de laFraternité. Nous rappelons que ces documents(lettre de Mgr Lefebvre et intervention de MgrTissier) sont des documents internes de laFraternité et qu’à notre connaissance, il n’ontencore jamais été publiés sur aucune revue dela Fraternité adressée au public. Enfin, pourune meilleure compréhension du texte, noussignalons que le sigle “FSSPX” indique laFraternité Sacerdotale Saint Pie X, que “n.can.” signifie “nouveau canon” et que “n.o.”remplace “novus ordo” (c’est-à-dire, tout cequi se réfère à Jean-Paul II).

[p. 33]

COMMISSION CANONIQUE

Lettre de S. Exc. Mgr Lefebvre du 15janvier 1991 sur la constitution de commissionscanoniques

Voici un extrait d’une des dernièreslettres de S. Exc. Mgr Lefebvre au supé-rieur général d’alors, M. l’abbéSchmidberger, dans laquelle notre vénéréfondateur conçoit clairement l’institution etle fonctionnement de notre actuelle‘Commission Canonique Saint CharlesBorromée’, ayant un président “autant quepossible évêque”, puisque cette instancesupplétoire exerce des pouvoirs qui appar-tiennent normalement à l’évêque, et qui se-rait chargée en particulier de:

1. concéder les dispenses d’empêche-ments de mariage,

2. juger des nullités de mariage,3. absoudre des censures.Nos ordonnances de 1997 ont précisé les

autorités supplétives respectives de laCommission, des divers supérieurs, et dessimples prêtres, ainsi que la discipline quenous avons adoptée face au nouveau code dedroit canon, concernant les points (1) et (3).

Quant au point (2), la Commission cano-nique, par divers tribunaux institués adcasum, a déjà jugé à ce jour de nom-breuses causes qui se sont terminéescomme suit:

Page 13: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

En 1ère instancenon constat de nullitate: nombreuses

causesconstat (procédure sommaire): quelques

causesEn 2ème instance

non constat: 0constat: quelques causes

En 3ème instance non constat: 0

constat: quelques causes[p. 34]Notre jurisprudence, qui s’inspire de la

jurisprudence traditionnelle de la Rote ro-maine et recueille ce qui peut être bond’une jurisprudence récente, s’élabore aufur et à mesure de l’exercice de notre pou-voir supplétoire, selon la prudence.

Les autres cas prévus par Mgr Lefebvrese répartissent de la manière suivante:

* Dispense des vœux de religion:l’évêque chargé des religieux, actuellementMgr de Galarreta (après Mgr Fellay)(ordonnances de 1997, p. 46).

* Autorisations d’exorcisme: Les supérieursde districts, séminaires et maisons autonomes(ordonnance de 1997, p. 33, faculté 46).

* Consultations: Le président ou lesmembres de la Commission canonique (ac-

13

tuellement Mgr Tissier de Mallerais, prési-dent, M. l’abbé Laroche et M. l’abbé Pivert,membres).

Les confrères pourront constater notrefidélité à la ligne que traçait Mgr Lefebvredans la lettre dont voici l’extrait choisi.

Ec ne,15 janvier 1991

Cher abb Schmidberger,Un grand merci pour vos

vˇux et vos pri res l occasionde la saint Marcel.

[...]Quant au probl me des Com-

missions, faisant dans une cer-taine mesure suppl ance la d -fection des Congr gations ro-maines dirig es par des pr latsimbus des principes r volution-naires du Concile, il me semblequ il faudrait commencer tr smodestement, suivant les n ces-sit s qui se pr sentent et of-frir cette institution comme unservice pour aider les pr tresdans leur minist re et les reli-gieuses pour les cas difficiles r soudre ou pour des autorisa-

tions qui r clament un pouvoirpiscopal de suppl ance.Rome fait non seulement d -

faut, mais juge selon de fauxprincipes, comme dans le cas desmariages mixtes, des nullit s demariage!...

[p. 35]Pour l instant, je conseille-

rai une premi re Commission sp -cialement canonique form e d unpr sident autant que possiblev que, de deux conseillers et

d un secr taire, laquelle onpourrait donner un nom d unsaint canoniste: CommissionSaint Pie V, ou saint Bellarmin,ou saint Charles Borrom e et laquelle seraient envoy es lesconsultations, les demandes.

Le secr taire d pouille, expo-se les cas et soumet au jugementou du moins l tude des 3juges, qui se r unissent tous

Frontispice d’un numéro de “Cor Unum”

Page 14: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

les 3 mois ou plus sur la deman-de du pr sident et tudient etr pondent aux cas.

Cette Commission est nomm epar le Conseil g n ral, mais quipeut faire appel un dominicainou un expert connu soit d unemani re permanente comme con-seiller, soit occasionnellement.

Ce serait un premier pas etl exp rience montrerait ce qu ilest opportun de faire dansl avenir.

La Commission rendrait comptede ses travaux au Conseil g n -ral une ou deux fois par an.

Cette Commission devrait treannonc e par une lettre communi-qu e tous les pr tres de la Tra-dition qui sont demeur s catho-liques et toutes les soci t s dela Tradition, hommes et femmes.

Il n y a pas d inconv nient ce que les fid les connaissentl existence de cette Commission.

Tant que les autorit s ro-maines actuelles sont imbuesd ˇcum nisme et de modernisme etque l ensemble de leurs d ci-sions et du nouveau droit sont

14

influenc es par ces faux prin-cipes, il faudra instituer desautorit s de suppl ance, gardantfid lement les principes catho-liques de la Tradition catho-lique et du droit catholique.C est le seul moyen de demeurerfid le Notre Seigneur J sus-Christ, aux Ap tres et au d p tde la foi transmis leurs suc-cesseurs demeur s fid lesjusqu Vatican II.

Quelques exemples de cas soumettre:

- mariages mixtes - dispenses- nullit s de mariage- lev e d excommunication au

for externe* pour tous ceux qui par-

ticipent l avortement soitphysiquement, soit l galement.

* ou pour d autres motifs.[p. 36]- dispenses des vˇux de reli-

gion- autorisations d exorcismes- consultations.Le choix du secr taire perma-

nent r sidant la Maison g n ra-lice est important, bien qu iln ait pas de pouvoir de d cision.

Esp rant vous tre encoreutile par ces r ponses, je vousprie de croire mon entier d -vouement en J sus et Marie.

Marcel Lefebvre

[p. 37]

LÉGITIMITÉ ET STATUT DE NOS TRIBU-NAUX MATRIMONIAUX

On trouvera ici le texte de l’interventionde Monseigneur Tissier de Mallerais, prési-dent de la Commission canonique, lors de lasession de procédure canonique, le 24 août1998 à Écône, revu et corrigé par ses soins.

Cet exposé pourra aider les confrères àmieux comprendre le bien fondé des tribu-naux matrimoniaux, qui sont l’une des “au-torités de suppléance” conçues par Mon-seigneur Lefebvre.

Mgr Lefebvre et son premier successeur, l’abbé Franz Schmidberger

Page 15: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

Status questionis [sic]

Les déclarations de nullité des tribunauxecclésiastiques “Novus Ordo” sont souventdouteuses. Avons-nous le droit d’y suppléerpar des tribunaux fonctionnant au sein de laFraternité Sacerdotale Saint Pie X?

Monseigneur Lefebvre (cf documentprécédent - ordonnances, éd. 1997 pp. 8-9) a prévu la création de la Commission ca-nonique, en particulier pour résoudre lescauses matrimoniales après un premier ju-gement porté par le supérieur de district.L’autorité de notre fondateur suffit pourque nous acceptions ces instances, demême que nous avons accepté les sacresépiscopaux de 1988.

Mais cela ne nous dispense pas de ten-ter de justifier doctrinalement l’existence etle fonctionnement de nos tribunaux matri-moniaux.

Nous allons voir que la raison centraleest, comme pour les sacres, la situation denécessité des fidèles de tradition.

I. La nouvelle législation matrimoniale

1. Nouvelle définition du mariage: a) Objet du consentement matrimonial: Il

n’est plus strictement défini comme “jus incorpus, perpetuum et exclusivum in ordine adactus per se aptos ad prolis generationem”(can. 1081, § 2), mais vaguement décrit com-me “mutua traditio et acceptatio viri et mulierisad constituendum matrimonium” (cf. n. can.1057 §2). L’objet du consentement se trouveainsi indûment étendu aux éléments secon-daires quoi qu’intégrants du mariage, à savoirle “totius vitæ consortium” (n. can. 1055).

b) Inversion des deux fins du mariage:Code de 1917: “finis primarius procreatioet educatio prolis; secundarius: mutuumadjutorium et

[p. 38] remedium concupiscentiæ” (can. 1013,

§1). Nouveau code: “...ad bonum conju-gum atque prolis generationem et educa-tionem” (n. can. 1055, §1).

Par conséquent la communauté de vieentre, selon la nouvelle législation, commepartie, et partie principale, de l’objet duconsentement matrimonial, et avec elle larelation inter-personnelle entre les époux,c’est-à-dire leur cohabitation, bonne en-tente, mutuel épanouissement.

15

Or ceci est, selon la conception tradition-nelle, hors de l’objet du pacte matrimonial,comme le réaffirme Pie XII contre les nova-teurs en 1944 en faisant insérer aux ActaApostolicæ Sedis une sentence de la SainteRote Romaine [AAS 36 (1944), 172-200], quirappelle la hiérarchie des deux fins du mariageet rappelle que “la communauté d’habitation,de chambre et de table n’appartient pas à lasubstance du mariage” même si elle relève del’intégrité de la vie conjugale. (Cf. Les Ensei-gnements Pontificaux, Le mariage, Solesmes,Desclée, 1960, appendice n. 24-29).

2. De nouveaux défauts de consente-ments rendent le mariage nul:

Il est clair que si le “bonum conjugum”et le “totius vitæ consortium” entrent dansl’objet du pacte matrimonial, les défautsqui, ab initio, rendent la communauté devie entre époux impossible - et non plusseulement la reddition du jus ad corpus -rendent nul le pacte matrimonial. D’où l’in-troduction dans la nouvelle législation, denouvelles inhabilités à contracter mariage.

Bien sûr, l’Eglise peut toujours ajouter,par des dispositions positives, de nou-veaux empêchements à mariage, mais cesont 1) des dispositions positives et non unchangement de la nature des choses, et enconséquence de la substance du mariage2) des dispositions déterminant de façontrès précise les inhabilités, de telle façonque le jugement sur la présence de telsempêchements soit facile à porter, sanscrainte d’abus. Or ce n’est précisémentpas le cas ici; on a un changement de lasubstance du mariage et la porte ouverte àtous les abus, comme on va le voir.

* n. can. 1095, n. 2 “Sunt incapacesmatrimonii contrahendi: (...) 2° qui laborantgravi defectu discretionis judicii circa juraet officia matrimonialia essentialia mutuotradenda et acceptanda”.

Traditionnellement seules rendent nul lemariage, du côté de l’intelligence:

- L’ignorance de ce que le mariage est“une société permanente entre un hommeet une femme pour procréer des enfants”(can. 1082 § 1); et cette ignorance n’estpas présumée après la puberté.

[p. 39]- L’erreur sur “l’unité ou l’indissolubilité

ou la dignité sacramentelle du mariage”, sielle détermine la volonté (n. can. 1099, co-difiant une jurisprudence traditionnelle).

Page 16: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

C’est tout et c’est clair, tandis que le “de-fectus discretionis judicii”, c’est-à-dire l’im-maturité du jugement, porte nécessairementsur la réalisation personnelle, voire inter-per-sonnelle, des obligations essentielles du ma-riage, laquelle est hors de l’objet traditionneldu pacte matrimonial, et concerne l’aspectsubjectif du lien matrimonial. Certes, l’imma-turité croissante des jeunes gens rend sou-vent les mariages peu viables et leur conclu-sion imprudente, mais établir une inhabilitépour immaturité, c’est invoquer une concep-tion personnaliste, subjective du pacte matri-monial et ouvrir la porte aux abus. Seul unempêchement d’âge plus sévère serait unremède objectif...

* n. can 1095, n. 3 “sunt incapaces (...)3° qui ob causas naturæ psychicæ obliga-tiones matrimonii essentiales assumerenon valent”.

Traditionnellement, l’Église ne reconnaîtque l’incapacité physique: impotentia(can.1068, § 1), qui rend impossible la red-dition du “jus in corpus in ordine ad actusper se aptos...”(can. 1081, § 2). La seule in-capacité mentale est amentia vel dementia,qui rend le sujet radicalement inhabile àcontracter (cf. can. 1081 §1 “inter personasjure habiles”).

Certes, les cas de déséquilibre, dus à ladestruction de la famille, sont maintenantfréquents, qui rendent aléatoire la perma-nence de l’union, mais qui détermineraquel degré de déséquilibre la rend radicale-ment impossible? Jean-Paul II lui-même adû rappeler aux canonistes que de telsdésordres psychiques doivent être “a se-rious form of anomaly which (...) must sub-stantially undermine the capacity of un-derstanding and/or willing of the contrac-ting party” (adresse à la Rote Romaine, 5fév. 1987, AAS 79 (1987), 1457).

Il reste que le canon 1095, n. 3, dans saformulation, est la porte ouverte aux abus.

* n. can 1098 “Qui matrimonium init de-ceptus dolo, ad obtinendum consensumpatrato, circa aliquam alterius partis quali-tatem, quæ suapte natura consortium vitæconjugalis graviter perturbare potest, invali-de contrahit”.

Jusqu’au nouveau code, le dol n’a ja-mais été admis comme cause de nullité demariage; et ce pour protéger le bien de lapermanence du lien conjugal.

[p. 40]

16

Mais les auteurs admettent que l’Églisepourrait l’introduire (par une disposition dedroit positif). Ce serait le moins illégitimequand l’erreur dolosive met en jeu la fin pri-maire du mariage, p. ex. dol sur la stérilitéd’un des conjoints; et c’est ce que fait lenouveau code: sterilitas, non dirimit, seddolus circa sterilitatem (cf. n. can. 1084 §3).Mais le n. can. 1098 est beaucoup troplarge: le dol cachant l’ivrognerie, l’addictionà la drogue, voire même le caractère iras-cible seraient cause de nullité! On voit icil’inspiration personnaliste conciliaire de cenouveau canon. Et le reformuler dans unsens catholique ne nous appartient pas.

3. Conséquences pratiquesa) 80% des nullités déclarées par les tri-

bunaux nouvel ordo reposent sur le n.canon 1095! donc sont des jugementsnuls, puisqu’ils reposent sur une règle in-capable de régler. Des commentateursparlent de “divorce catholique”, tellement ilest facile d’obtenir de tels jugements.

b) Et dans les cas où il y a un chef denullité sérieux mais difficile à prouver, le tri-bunal choisit le n. can. 1095 comme solu-tion de facilité.

On objecte alors: oui, mais justementdans ces cas, le mariage est réellementnul, alors pourquoi ne pas profiter de lasentence de nullité même si elle n’est pascorrecte? Il faut répondre: pour constaterl’état libre d’une personne (pour qu’ellepuisse se remarier) il faut un jugement vali-de, non l’appréciation privée plus un juge-ment invalide.

II - Situation des fidèles

1. Ils n’ont pas le droit d’aller aux tribu-naux nouvel ordo, car c’est courir grandrisque de recevoir une déclaration de nulli-té nulle et de se remarier à bon compte etde vivre ainsi dans le péché, en concubina-ge canonique!

2. Ils ne peuvent pas, pour pouvoir seremarier, juger eux-mêmes de la nullité deleur mariage, ou se contenter d’un avisprivé d’un prêtre ami: ce serait la porte ou-verte au subjectivisme et au désordre, ex-posant le lien matrimonial au mépris etaugmenter le mal.

[p. 41]3. Ils ont droit en justice à être sûrs de la

validité du sacrement reçu une seconde

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fois et donc de la validité de la sentence denullité, et à être protégés contre les erreurspersonnalistes qui invalident ces sen-tences. Qui donc leur fera droit?

4. Les prêtres et les évêques fidèles ontle devoir de défendre et protéger le lien ma-trimonial mis en péril par la nouvelle législa-tion. Comment rempliront-ils ce devoir?

En résumé les fidèles, ne trouvant pas àqui recourir, sont dans un état de nécessi-té, et d’autre part les prêtres et les évêquesfidèles ont le devoir de les secourir.

Dans cette situation, les évêques fidèles(Dom Licinio à Campos) et notre Com-mission canonique, fondés sur les prin-cipes généraux du droit qui régissent la viede l’Église, ont les pouvoirs de suppléancepour juger des causes matrimoniales.

III - Base doctrinale de nos pouvoirssupplétoires

1. Can. 20 (n. can. 19): S’il manque unedétermination du droit il faut résoudre lecas en prenant la norme “a legibus latis insimilibus; generalibus iuris principiis cumaequitate canonica servatis; jurisprudentiaet praxi Curiæ Romanæ; communiconstantique doctorum sententia”. (Wernz-Vidal: “ jus ergo suppletorium est jus appli-candum in particularibus casibus, cumcirca illud non habeatur in codice prescrip-tum quod peculiari illi casui sit applican-dum” n. 180).

2. Application - trois choses interviennent:a) Lieux parallèles, c’est-à-dire pratique

de l’analogia legalis (Wernz-Vidal, n. 181):

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“per quam juris dispositio pro aliis casi-bus applicatur in casu simili de quo lex nondisponit”.

Ici, le lieu parallèle est le cas du recoursimpossible à l’évêque pour dispenser d’unempêchement dirimant de droit ecclésias-tique: dans le “danger de mort” ou “quan-do omnia sunt parta ad nuptias”, le curé oule confesseur peuvent dispenser (can.1044-1045). Ce qui signifie que l’Eglise leurdonne, par suppléance, juridiction adcasum;

b) style (jurisprudence) de la Curie ro-maine: Une réponse de la Commission d’in-terprétation du code, du 29 juillet 1942(AAS, 34, 241) permet d’étendre la disposi-tion du can. 1045 au cas d’urgente nécessi-té où il y a “periculum in mora” (cf. can. 81).

c) épikie et opinion des docteurs à pro-pos des can. 1043 sq., mais qui vaut aussiailleurs:

Cappello, Tractatus, De Sacramentis,III, n. 199: “Si finis legis cesset contrariepro communitate, i.e. si damnum commu-ne inde sequatur, lex non urget, quia meri-to censetur suspendi ex benigna mentis le-gislatoris interpretatione”. Or c’est le casde l’obligation de recourir à des tribunauxmodernistes. Mais si cette obligationcesse, ne cesse pas l’obligation de recourirà quelque tribunal!

3. De la conjonction de ces éléments,nous inférons que notre commission cano-nique, dans le cas actuel du recours impos-sible aux tribunaux officiels, a le pouvoir dejuger des causes matrimoniales (on peutdire que le Saint-Siège, s’il n’était pas aussimoderniste que les tribunaux, nous donne-rait ce pouvoir par équité canonique).

Il est même plus grave de dispenserd’un empêchement dirimant (ce qui changela condition de la personne, laquelle d’in-habile, devient habile à contracter), que dedéclarer nul un mariage (ce qui ne changepas l’état de la personne, mais constate unétat déjà existant ab initio); c’est un pouvoirde juridiction déclaratif seulement. Si doncla suppléance nous donne pouvoir de dis-penser, elle nous donne a fortiori pouvoirde juger.

4. L’institution de tribunaux matrimo-niaux dans l’orbe de la tradition est spécia-lement justifiée du fait:

a) que leur autorité sera plus facilementacceptée que celle d’un avis privé,

Mgr A. de Galaretta, évêque chargé actuellement des reli-gieux, après Mgr Fellay. C’est lui qui dispense

des vœux de religion

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b) qu’ainsi il ne sera pas nécessaire dedirimer des avis privés douteux ou diver-gents,

c) qu’il est nécessaire d’avoir plusieursjuges et plusieurs instances pour procéderprudemment selon l’esprit et la lettre dudroit,

d) qu’en la situation de nécessité ac-tuelle, le prêtre singulier reçoit suppléancepour ce qu’un prêtre peut normalementfaire lui-même et non pour ce qu’il ne peutpas normalement faire. Or juger ces causesmatrimoniales n’est pas normalement lefait d’un seul prêtre, mais de l’évêque oudes autorités qu’il délègue.

En tout cela vaut la règle “autant que,pas plus que”: L’Église supplée en faveurdes fidèles la juridiction qui manque auxinstances supplétoires, autant que cela estnécessaire et pas plus que ce n’est néces-saire.

[p. 43]

IV - Exercice du droit de juger descauses matrimoniales (par notreCommission canonique et des prêtresdésignés par elle)

Notre juridiction, dans ces cas, est, onl’a dit, une juridiction suppléée. Voici sespropriétés:

1. Elle n’est pas habituelle, mais s’exer-ce ad casum, per modum actus. Parconséquent nos tribunaux ne siègent pashabituellement, leurs membres ne sont pasnommés ad universas causas, mais aucontraire chaque fois ad hoc , par laCommission canonique; même si pour desraisons de commodité, ce sont toujours lesmêmes juges, les mêmes défenseurs dulien qui interviennent; car il faut des per-sonnes compétentes.

2. Elle n’est pas territoriale, mais per-sonnelle.

3. Elle dépend de la nécessité des fi-dèles, c’est-à-dire qu’elle vaut tant quedure l’état de nécessité commune, etmême si par impossible, on pouvait trouvertel ou tel tribunal officiel qui jugeât descauses de mariage selon les normes tradi-tionnelles.

4. C’est une vraie juridiction et non uneexemption du droit et de l’obligation que lesfidèles ont de recevoir une sentence. Doncnous avons pouvoir et devoir de porter de

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vraies sentences, ayant potestatem ligandivel solvendi. Elles ont donc valeur obligatoi-re. La raison prochaine en est que nous de-vons pouvoir dire aux fidèles ce qu’ils doi-vent suivre, quod debent “servare”.

Nos sentences ne sont pas de simplesavis privés, car un tel avis ne suffit pas là oùle bien public est engagé; or le bien publicest engagé dans chaque cause où le lien ma-trimonial est discuté. Pour trancher le doute,il faut un pouvoir au for externe public.

5. Cette juridiction n’usurpe aucun pou-voir de droit divin du pape.

Il est vrai que nos sentences en troisiè-me instance remplacent les sentences dela Rote romaine, qui juge au nom du papecomme tribunal de troisième instance.Mais ce n’est pas une usurpation de pou-voir de droit divin du pape, car la réservede cette troisième instance au pape estseulement de droit ecclésiastique!

6. Enfin, nos sentences, comme tousnos actes de juridiction supplétoire, etcomme les sacres épiscopaux eux-mêmesde 1988, 1991, etc., devront être confir-mées ultérieurement par le Saint-Siège.

[p. 44]

REGLES PRATIQUES CONCERNANTLES DÉCLARATIONS DE NULLITÉ DEMARIAGE

La charité pastorale vise à la sanctifica-tion des âmes: prima lex salus animarum;mais la prudence pastorale évite d’imposeraux âmes des fardeaux insupportables (cf.Mt 23,4).

Par conséquent le pasteur cherche àmettre les âmes dans le vrai par rapport àla loi de Dieu et à la validité du mariage,mais il préfère parfois laisser les âmes dansla bonne foi si elles errent de bonne foi surleur situation matrimoniale, lorsqu’il est àcraindre qu’elles n’accepteraient pas de larégulariser et vivraient dans la mauvaise foi.

D’autre part les sentences de nullité demariage portées par des tribunaux officiels(sentences “novus ordo”, peut-on dire) nepeuvent être considérées comme nullesipso facto ni comme valides sans examen.D’où découlent les règles suivantes.

1. Une sentence novus ordo ne peutêtre ni admise ni rejetée a priori. Sa validitédépend des critères utilisés. Elle doit doncêtre examinée in jure.

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2. Le prêtre ne conseille jamais à per-sonne d’aller à un tribunal n.o., de crainteque la sentence ne soit nulle, pour être fon-dée in jure sur des critères erronés ou dou-teux du nouveau code.

3. Si la personne n’est pas remariée, maisdoute ou dénonce la validité d’un premiermariage, ou annonce que la cause de nullitéest introduite devant un tribunal n.o., ou quece dernier a déjà porté une sentence exécu-toire de nullité, le prêtre l’avertit qu’une sen-tence n.o. n’est pas une preuve suffisante dela nullité du mariage et qu’elle ne peut se re-marier sans avoir soumis sa cause à l’exa-men de notre Commission canonique.

4. Si la personne, après une sentencede nullité n.o., s’est déjà remariée, le prêtrela laisse dans la bonne foi, si elle y est.Dans ce but:

1) il ne parle jamais publiquement dessentences n.o.,

2) il n’interroge jamais les fidèles à cepropos,

3) interrogé par une personne qui a seu-lement un doute négatif, il la rassure.

5. Si la personne, remariée après unesentence de nullité n.o. a un doute positif,le prêtre doit l’aider à résoudre son doute.Pour cela il:

1) avertit la personne de la possibilité denullité de la sentence n.o.;

[p. 45]2) explique que, pour cette raison et

selon notre pratique, la cause doit êtresoumise à la Commission canonique.

6. Afin de présenter toute cause à l’exa-men du bureau canonique, le prêtre

1) se fait expliquer sommairement le cas;2) se fait communiquer, si c’est le cas,

la sentence n.o. ou au moins un documentdu tribunal indiquant le caput nullitatis;

3) communique l’exposé du cas (et lasentence n.o. éventuelle) au bureau cano-nique, qui envoie au prêtre le questionnairedestiné à établir le libelle introductif de lacause;

4) mais il ne prend aucunement parti, nidans un sens ni dans l’autre.

7. La cause ne peut être introduite quesi la partie concernée accepte d’être mora-lement liée par la décision. C’est pourquoile prêtre lui fait jurer et signer la promessesuivante:

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8. Tant que le tribunal désigné par lebureau canonique n’a pas porté de senten-ce exécutoire de “constat de nullitate ma-trimonii”, le mariage contracté après unesentence de nullité n.o. (si c’est le cas) estprésumé valide et en conséquence, lesconjoints en la seconde union peuvent

[p. 46]demander et rendre le dû conjugal et

les sacrements ne peuvent leur être refu-sés.

9. Mais si une procédure en nullité estengagée chez nous et que, avertie de nepas se remarier avant une sentence denotre part qui le lui permette, une partie seremarie ou contracte une simple union civi-le, les sacrements lui sont refusés et la pro-cédure peut être suspendue au jugementdu supérieur qui a constitué le tribunal.

Je soussigné... au moment de sou-mettre la cause de mon mariage avec... àla Commission canonique de la FSSPXpromets:

1) (si c’est le cas) de n’attenter aucunmariage ni même aucune union civileavant la sentence définitive.

2) de me conformer à la sentence dutribunal et par conséquent, si elle est né-gative, de ne pas me remarier, ou (si c’estle cas) ne plus considérer mon secondconjoint comme mon conjoint.

3) de ne pas approcher un tribunal ec-clésiastique officiel pour lui faire examinerou juger ma cause.

Tout ceci, je le promets et je le jure surles saints Évangiles que je touche de mamain.

Le... à....Signature

[rayer les mentions inutiles]

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III. FORMULAIRES DE DISPENSES (abbé Pivert)

Formulaire pour obtenir l’autorisation d’épouser un catholique non croyant, non pratiquant ou “adhérant au modernisme”

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Formulaire pour obtenir la dispense de l’empêchement de “religion mixte”. La dispense est accordée par l’abbé Pivert“considérant qu’il n’est pas possible de recourir à l’Ordinaire du lieu ou à Rome”

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Formulaire pour obtenir la dispense de l’empêchement de “crime” (adultère). Dans ce cas aussi, c’est l’abbé Pivert quidispense au nom du supérieur de district

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Formulaire pour l’autorisation au mariage qui doit être signé par l’abbé Pivert. Les règles suivies sont les “prescrip-tions propres à la Fraternité Saint Pie X”

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DEUXIEME PARTIE:COMMENTAIRE DE

SODALITIUM

par M. l’abbé Francesco Ricossa

C’est à un problème réel qu’avec les do-cuments ci-dessus, la Fraternité SaintPie X tente d’apporter une solution;

mais la solution proposée est pire que la diffi-culté à laquelle on voulait porter remède.

Un problème réel: exercer le ministère sansavoir la juridiction.Brève histoire des difficultés et des solutionsproposées

Le drame que nous vivons a débuté avecle Concile Vatican II, lorsque la doctrine del’Eglise catholique a été abandonnée - surplusieurs points - en faveur d’une nouvelledoctrine. Ont suivi des réformes discipli-naires mettant en application les principesde Vatican II: rappelons en particulier la ré-forme liturgique avec son point culminantque fut la promulgation d’un nouveau misselen 1969, et la réforme canonique, réaliséeavec le nouveau code de 1983.

La question de l’Autorité

Très rapidement, les opposants à VaticanII se sont trouvés confrontés à des problèmesthéoriques et pratiques d’importance. D’uncôté le refus d’un Concile et de ses réformespose le problème de la légitimité del’Autorité qui a voulu ce Concile et ces ré-formes. C’est le problème de l’Autorité ou -comme on dit - du Pape. Lui est connexe parvoie de conséquence le problème - plus pra-tique - de l’obéissance que tout catholiquedoit à la hiérarchie et particulièrement auPape (3). Notre position est la suivante: PaulVI et Jean-Paul II ne jouissent pas del’Autorité pontificale divinement assistée (ilsne sont pas formellement papes), aussi - ence qui concerne l’obéissance - le problème nese pose-t-il pas puisque ce n’est qu’à l’autori-té légitime que l’on est tenu d’obéir. Parcontre Mgr Lefebvre et sa Fraternité recon-naissent la légitimité de ceux qui ont promul-gué le Concile et les réformes ultérieures(“mauvais Pape, mais Pape”), ce pour quoiils furent rapidement contraints à théoriser la

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licéité de la désobéissance (habituelle) auPape, tant pour ce qui concerne l’accueil deson enseignement que pour les questions dis-ciplinaires. La règle pratique adoptée futalors: “Nous acceptons les nouveautés intime-ment conformes à la Tradition et à la Foi.Nous ne nous sentons pas liés par l’obéissanceà des nouveautés qui vont contre la Traditionet menacent notre Foi” (4). Je rappelle ceprincipe parce qu’il sera appliqué dans le casprésent par les successeurs de Mgr Lefebvre,spécialement pour ce qui regarde la récep-tion du nouveau code de droit canon.

La question de la juridiction

L’autre problème - celui qui nous inté-resse directement - est celui de la juridictionnécessaire dans l’exercice du ministère sa-cerdotal. Par droit et institution divine ilexiste dans l’Eglise deux pouvoirs, celuid’ordre et celui de juridiction. “Le pouvoirecclésiastique se divise en pouvoir d’ordre etpouvoir de juridiction. Le pouvoir d’ordreest immédiatement destiné à la sanctificationdes âmes par l’offrande du sacrifice de laMesse et l’administration des sacrements. Lepouvoir de juridiction, lui, est immédiatementdestiné au gouvernement des fidèles en vuede la vie éternelle. Il s’exerce soit par l’ensei-gnement autorisé des vérités révélées (magis-tère sacré), soit par la promulgation des lois(pouvoir législatif), par l’authentique déci-sion des causes surgies entre sujets (pouvoirjudiciaire), par l’application de sanctions pé-nales contre les transgresseurs des lois (pou-voir coercitif)” (5). Les deux pouvoirs (etleurs hiérarchies relatives) “sont réellementdistincts” mais “étroitement liés par une rela-tion mutuelle”: “ils se différencient par leurorigine: en effet l’ordre est conféré avec unsacrement approprié tandis que la juridictionest donnée par mission canonique; et ils [sedifférencient] par leur propriété, car l’usagevalide de l’ordre, dans la majeure partie descas, ne peut être enlevé, alors que la juridic-tion peut être révoquée. Ils sont cependant enrapport mutuel, car la juridiction supposel’ordre et vice-versa l’exercice de l’ordre estréglé par la juridiction” (5).

La publication du nouveau missel (1969)soulève pour les opposants à Vatican II lapremière difficulté pratique: ou bien conti-nuer et organiser partout - avec de “vieux”livres liturgiques - l’exercice du pouvoir

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d’ordre (Messe, sacrements...) même sans lajouissance du pouvoir de juridiction; ou biens’abstenir des actes du ministère en cas de pri-vation de la mission canonique venant de la“hiérarchie”. En pratique, (et non sans denombreux accrocs à la règle) l’abbé de Nantesfut seul à choisir la seconde voie, tandis quetous les autres empruntaient la première.

La position de la Fraternité de 1975-76 à1980. Critique de cette position

Pour Ecône, si le problème ne se posaitpas entre 1970 et 1974, période durant la-quelle la Fraternité Saint Pie X fut canoni-quement approuvée, avec la suppression dela Fraternité le 6 mai 1975, le retrait deslettres dimissoriales requises pour ordonnerles séminaristes (27 octobre 1975), et la sus-pense de l’autorisation de conférer lesordres sacrés pour Mgr Lefebvre (12 juin1976), il se posa alors de la façon la plus dra-matique: à partir de 1976, les prêtres ordon-nés dans la Fraternité seraient donc suspensa divinis (interdiction de célébrer la Messeet d’administrer les sacrements), exactementcomme l’avait été leur fondateur (22 juillet1976). Une fois la décision prise d’adminis-trer les sacrements sans les juridictions re-quises - et ce furent les ordinations du 29juin 1976 - on se trouva face à une nouvelledifficulté: dans cette situation, si certains sa-crements sont de toutes façons administrésvalidement en vertu du pouvoir d’ordre, quiest inamissible, d’autres sacrements(Pénitence et Mariage) requièrent justement- sous peine d’être administrés invalidement- cette juridiction qui faisait défaut. Si pourle sacrement de mariage la solution est rela-tivement facile (le canon 1098 prévoit, danscertains cas, la dispense de la forme cano-nique), le sacrement de pénitence présentaitet présente de plus grandes difficultés: la né-cessité de la juridiction du confesseur sur lepénitent est en effet requise par la naturemême du sacrement tel qu’il a été instituépar le Christ et ne relève donc pas seule-ment du droit ecclésiastique (Concile deFlorence, DS 1323; Concile de Trente, DS1686; Pie VI, Auctorem fidei, DS 2637; SaintThomas, Suppl. q. 8, a. 4.). Le droit prévoit,il est vrai, des cas dans lesquels l’Eglise sup-plée à la juridiction (‘Ecclesia supplet’) man-quante du prêtre: en cas de danger de mortpar exemple, tout prêtre peut absoudre vali-

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dement (can. 882), de même qu’il peut lefaire, selon la prescription du canon 209 (6),en cas de doute positif et probable (de pos-séder ou non la juridiction) ou bien d’erreurcommune (les pénitents pensent de façon er-ronée que le prêtre a la juridiction) (7). Ilétait cependant évident que les canons invo-qués ne suffisaient pas à justifier la pratiquede confesser habituellement et constammentsans juridiction, ce pour quoi Mgr Lefebvreétendait le cas de danger de mort physiquedu pénitent - prévu par le code - à celui depéril de mort spirituelle dans lequel se trou-vent tous les catholiques vue la situation ac-tuelle de l’Eglise. N’était-ce pas raisonner“comme si” on ne reconnaissait plus de faitla légitimité de la hiérarchie et la validité desnouveaux sacrements? Et en effet MgrLefebvre hésita - au cours de l’été 76 - sur lalégitimité de Paul VI; mais après avoir étéreçu en audience (11 septembre) il optapour la légitimité, décision devenue officiel-le avec la fameuse déclaration du 8 no-vembre 1979 intitulée: ‘Position de MgrLefebvre sur la nouvelle messe et sur le Pape’(Cor Unum, n. 4, pp. 1-9), qui prit forme elleaussi dans le climat qui suivit l’audience ac-cordée par Jean-Paul II à Mgr Lefebvre le18 novembre 1978. Cette position (recon-naissance théorique de la légitimité de PaulVI et de Jean-Paul II, mais action pratiquecomme si cette reconnaissance n’existaitpas) devint l’un des points faibles de sonmouvement. Voyons comment, à l’époque,le cardinal Seper, délégué de Paul VI et deJean-Paul II à l’examen de la cause traditio-naliste, exposait le problème: “Et votre‘praxis’ - objectait le cardinal Seper à MgrLefebvre dans la lettre du 28 janvier 1978 -ne corrige point les choses. En effet, vous or-donnez des prêtres contre la volonté formelledu Pape et sans les ‘litteræ dimissoriæ’ re-quises par le Droit Canonique: vous envoyezdes prêtres ordonnés par vous dans des prieu-rés où ils exercent leur ministère sans l’autori-sation de l’Ordinaire du lieu: vous faites desdiscours propres à répandre vos idées dansdes diocèses dont l’évêque vous refuse sonconsentement: avec des prêtres que vous avezordonnés et qui ne dépendent en fait que devous, vous commencez, que vous le vouliezou non, à former un groupement propre à de-venir une communauté ecclésiale dissidente.A ce propos il faut relever l’étonnante décla-ration que vous avez faite (Conférence de

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presse du 15/9/1976, dans Itinéraires, déc.1976, pp. 126-127) au sujet de l’administra-tion du sacrement de pénitence par les prêtresque vous avez illicitement ordonnés et qui nesont pas pourvus de la faculté d’entendre lesconfessions. Vous estimiez que ces prêtresavaient la juridiction prévue par le Droit ca-nonique pour les cas de nécessité: ‘Je pense -disiez-vous - que nous nous trouvons dansdes circonstances non pas physiques, maismorales extraordinaires.’ N’était-ce pas rai-sonner comme si la hiérarchie légitimeavait cessé d’exister dans les régions où cesprêtres se trouvaient?” (8). La réponse deMgr Lefebvre, tout à fait pertinente sur lesquestions doctrinales, ne le fut pas parcontre sur celles qui l’auraient amené - logi-quement - à nier de droit (et pas seulementde fait) la légitimité du “Pape” et des“évêques” (9). Dans sa réponse du 26 février1978, Mgr Lefebvre resta dans le vague (10)aussi la question fut-elle reposée par le car-dinal Seper, en termes presque identiques, le16 mars (11), puis - de façon plus diffuse -dans l’interrogatoire des 11-12 janvier 1979(12). A la fin de l’interrogatoire, Seper revintencore une fois sur la question: “un évêque, -c’est ainsi qu’il résume la position de MgrLefebvre - jugeant en conscience que le Papeet l’Episcopat n’exercent plus en général leurautorité en vue d’assurer la transmission fidè-le et exacte de la foi, peut légitimement, pourmaintenir la foi catholique, ordonner lesprêtres sans être évêque diocésain, sans avoirreçu de lettres dimissoires et contre la prohi-bition formelle et expresse du Pape, et attri-buer à ces prêtres la charge du ministère ec-clésiastique dans les divers diocèses. (…)Cette thèse est-elle conforme à la doctrine tra-ditionnelle de l’Eglise à laquelle vous enten-dez vous tenir?”. La réaction de MgrLefebvre fut immédiate: “Vous me tendez unpiège !”. La réponse plus méditée ne fut pasmeilleure. D’abord le pragmatisme: “Non.Je n’ai pas agi en partant d’un principecomme celui-là. Ce sont les faits, les circons-tances où je me suis trouvé qui m’ontcontraint à prendre certaines positions (...)”.Puis un argument qui l’autocondamnait: “Jepense que l’histoire peut fournir des exemplesd’actes semblables posés, en certaines cir-constances, non pas ‘contra’, mais ‘præter vo-luntatem Papæ’” [mais justement MgrLefebvre agissait ‘contre’ et pas ‘au-delà’ dela volonté du “pape”]. Enfin la reddition lo-

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gique définitive: “Toutefois, cette questionest trop grave et trop importante pour que jepuisse répondre immédiatement. Je préfèredonc suspendre ma réponse” (13). Les col-loques avec le “Saint-Office” en restèrent là,et il n’y eut aucune réponse ultérieure...

Jusqu’alors la position de la FraternitéSaint Pie X était contradictoire - du fait de laposition sur l’autorité du Pape - mais se limi-tait à postuler une “suppléance” de l’Eglisepour la seule administration des sacrements.De fait, nous aussi invoquons dans ce butune suppléance (pas tant de l’Eglise que duChrist, comme nous allons le voir par lasuite), pour l’exercice licite et valide du pou-voir d’ordre (et exclusivement du pouvoird’ordre). La position correcte sur le problè-me et la critique à cette première déviationde la Fraternité est parfaitement expriméepar l’abbé Belmont dans le passage suivantpublié dans les Cahiers de Cassiciacum:

“Nous admettons parfaitement que dansla situation d’anarchie (au sens propre) (14) oùnous nous trouvons, il y a suppléance divineen faveur des fidèles en ce qui concerne lepouvoir de sanctification de l’Eglise (15). Mais,semble-t-il, trois facteurs sont nécessaires

L’abbé François Pivert, membre et inspirateur de lacommission canonique

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pour l’existence d’une telle suppléance (hor-mis celles expressément prévues par le Droit):

- la nécessité générale et non un cas parti-culier;

- l’impossibilité du recours à l’Autorité.C’est l’Autorité qui est juge des actes sacra-mentels que nous devons accomplir; une dé-faillance accidentelle de l’Autorité ne peutdonner place à une suppléance. Si la défaillan-ce est essentielle et habituelle, c’est l’existencemême de l’autorité qui est en cause (16);

- un fondement réel dans celui qui doitagir en vertu d’une suppléance. Un tel fonde-ment ne peut être que le Caractère imprimépar le Sacrement de l’Ordre.

C’est parce que le prêtre catholique possè-de ce Caractère sacerdotal que NotreSeigneur Jésus-Christ et l’Eglise suppléentpour la mise en œuvre de ce Caractère dontl’exercice normal est empêché pour le plusgrand dommage des âmes.

Sont donc exclus les actes de pure juridic-tion (dispenser d’un empêchement de mariage,accorder une indulgence) qui ne sont pas lamise en œuvre du Caractère sacramentel, et lesactes dont le prêtre n’est que le ministre extraor-dinaire (confirmer, donner les ordres mineurs).

Dans le cas du Sacrement de Pénitence, lasuppléance ne donne pas de juridiction, maisle Christ et l’Eglise suppléent au défaut de ju-ridiction dans chaque absolution, parce quele prêtre est, par son Caractère sacerdotal,métaphysiquement ordonné à donner unetelle absolution. La juridiction normalementnécessaire ne donne pas au prêtre le pouvoirde confesser, elle lui donne un sujet sur lequelexercer son pouvoir” (17).

La position défendue par l’abbé Belmontdans le dernier numéro des Cahiers deCassiciacum (1981) est aussi la nôtre, et sedistingue autant de celle qui nie absolumentla licéité d’un ministère privé de juridiction(abbé de Nantes, certains sédévacantistes...)que de celle qui considère comme licite ceministère “contre” la volonté même du“Pape”, position qui - de fait - fut celle de laFraternité Saint Pie X de 1976 à 1980.

Les “Ordonnances” de 1980: première usur-pation des pouvoirs de juridiction réservésau Pape

Ce n’est pas un hasard si j’écris: jusqu’en1980. Car à cette date survint un fait qui aggra-va considérablement la position de la

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Fraternité Saint Pie X, fait contre lequel ré-agissait précisément l’article cité de l’abbéBelmont. “Dans un acte daté du premier mai1980, Mgr Lefebvre accorde à ses prêtresnombre de pouvoirs et facilités canoniques ouliturgiques. Il justifie ainsi cette délégation:

‘En vertu des facultés accordées auxOrdinaires par la Lettre ApostoliquePastorale Munus du 30 novembre 1963, fa-cultés accordées à tous les Evêques desMissions et étendues désormais à toutel’Eglise, nous déléguons les pouvoirs sui-vants…’ ” (18).

Il s’agissait de la première édition des“Ordonnances concernant les pouvoirs et fa-cultés des membres de la FraternitéSacerdotale Saint Pie X” (19).

Laissant de côté toute considération surles questions de la légitimité de Paul VI(promulgateur de la Lettre ApostoliquePastorale Munus) et l’existence canoniquede la Fraternité Saint Pie X (pp. 2 et 3),l’abbé Belmont notait d’abord deux choses:

1) En 1980, Mgr Lefebvre n’était pas unOrdinaire, et encore moins un Ordinaire dulieu: les “facultés” éventuellement concé-dées par Paul VI aux Ordinaires du lieu nelui étaient donc pas destinées. La chose étaitévidente, mais maintenant - dans la nouvelleédition des “Ordonnances”, celle de 1997que nous publions partiellement - MgrFellay, lui aussi, admet candidement: “MgrLefebvre, comme évêque et comme supérieurgénéral de la Fraternité Sacerdotale Saint PieX, bien que n’étant plus Ordinaire du lieucomme il l’était à Dakar, estima jouir d’unesuppléance lui permettant, en faveur des fi-dèles, de concéder à ses prêtres des facultésanalogues. Il les promulgua par sesOrdonnances à l’usage de la Fraternité, le 1ermai 1980, en suivant la formula facultatumdecennalium de 1960” (p. 10). La Fraternitéchange donc ses propres arguments: en 1980Mgr Lefebvre, se basant sur un acte de PaulVI, pensait pouvoir “déléguer” des facultésqui lui revenaient en tant qu’Ordinaire. En1997 Mgr Fellay affirme que ces pouvoirs neconcernaient pas Mgr Lefebvre qui n’étaitplus Ordinaire, mais qu’il les avait reçus par“suppléance”.

2) Des 51 pouvoirs “délégués” par MgrLefebvre, 36 ne se trouvent pas dansPastorale Munus, 4 ont été étendus par rap-port à la concession de Paul VI, et 3n’étaient pas délégables (cf. Belmont, p. 4).

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L’abbé Belmont en concluait que “quoi-qu’il en soit de l’Autorité de Paul VI, cette délé-gation de pouvoirs aux prêtres de la FraternitéSaint Pie X est nulle et sans valeur propre. Il n’ya là-dessus aucun doute possible. On ne peut al-léguer le fait que Mgr Lefebvre utilise les pou-voirs très étendus dont il jouissait commeEvêque missionnaire, car (…) Mgr Lefebvren’est plus Ordinaire des Lieux de Mission; et leserait-il encore, il ne pourrait déléguer que dansles limites géographiques de sa juridiction” (p.5). Un prêtre de la Fraternité qui avait lu,avant la publication, les observations de l’abbéBelmont, admit que Mgr Lefebvre ne pouvaitpas déléguer ces pouvoirs en tant qu’Ordinaire(“ce serait un peu fort en effet”, écrivait-il),mais sur la base de la suppléance de l’Eglise(p. 8). L’abbé Belmont répondait par le texteque nous venons de citer, rappelant qu’unesuppléance de l’“Eglise” (en l’occurrence duChrist), en dehors des cas prévus par le Droit,n’est concevable qu’en faveur du pouvoir deSanctification, et non pour exercer le pouvoirde gouvernement des âmes.

Sur la base de ce principe, l’abbéBelmont dénonçait en particulier deux facul-tés accordées invalidement par MgrLefebvre à la Fraternité et à ses prêtres: lafaculté de Confirmer et celle de dispenserdes empêchements matrimoniaux. Ces facul-

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tés ont été maintenues dans les Ordon-nances de 1997 et, en ce qui concerne les dis-penses matrimoniales, sont devenues le“fondement” d’un développement ultérieurdes “pouvoirs” de la Fraternité: pouvoir desTribunaux canoniques en ce qui concerneles annulations de mariages (Cf. le docu-ment de Mgr Tissier que nous publions dansce numéro, repris de Cor Unum, n. 61, III, 3p. 42,) (20). Nous reviendrons sur cette “fa-culté”; notons toutefois que depuis 1980déjà, la Fraternité Saint Pie X s’était arrogédes pouvoirs purement juridictionnels quisont le privilège du Pape et de ses délégués...

Voilà quelle était la situation de laFraternité - pour ce qui regarde notre sujet -de 1980 à 1988, date à laquelle MgrLefebvre - après l’échec des pourparlersavec le Vatican - consacra quatre évêques“auxiliaires” avec Mgr de Castro Mayer.

Les consécrations de 1988. Evêques sansjuridiction?

Prévues depuis 1983 au moins, annoncéesen 1987, finalement les consécrations épisco-pales, d’abord fixées en accord avec Ratzinger,eurent lieu en 1988 sans mandat romain (aucours de la cérémonie, lecture fut faite cepen-dant d’un grotesque “mandat apostolique”écrit, non par le Pape, mais par la Fraternité etdans lequel il était prétendu qu’un mandat del’“Eglise Romaine” - mise en opposition “auxautorités de l’Eglise Romaine” - avait été reçupour les consécrations) (21).

Par le Motu proprio Ecclesia Dei adflicta,Jean-Paul II déclara Mgr Lefebvre excom-munié et son mouvement schismatique. MgrLefebvre, par contre, continua à reconnaîtrel’autorité de Jean-Paul II, ce qui - à notreavis - rend illégitimes les consécrations épis-copales de 1988, étant donné qu’elles furentaccomplies non “præter” mais “contra” la vo-lonté du “Pape” (non pas au-delà, maiscontre la volonté du “pape”), pour reprendrel’expression déjà citée de Mgr Lefebvre.

Mais pour suivre le thème que nous noussommes fixé, il faut voir si les consécrationsde 1988 furent accomplies selon la logique -quoiqu’erronée sur l’autorité de Jean-PaulII - de la première période de la Fraternité(1975-1980) ou de la seconde (à partir de1980), à savoir si Mgr Lefebvre attribuait àses “évêques” une suppléance exclusivementpour exercer le pouvoir d’ordre en faveur de

Mgr Tissier de Mallerais

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la sanctification des âmes, ou bien s’il leurattribuait aussi une véritable juridiction -quoique de suppléance - pour le gouverne-ment des âmes. Il faut en effet distinguerdans l’épiscopat le pouvoir d’ordre (quidonne à l’évêque le pouvoir par exempled’ordonner des prêtres et de confirmer) et lepouvoir de juridiction: le premier provientdu rite de la consération épiscopale, le se-cond par contre vient du Pape (normale-ment par l’intermédiaire du mandat pontifi-cal). Les évêques consacrés sans approba-tion pontificale ont donc le pouvoir d’ordremais pas celui de juridiction. Consacrer desévêques - dans la situation actuelle - est lici-te, à condition de ne pas attribuer à cesévêques un pouvoir de juridiction qu’ils nepeuvent recevoir que du Pape, mais seule-ment un pouvoir d’ordre. C’est, brièvement,la ligne suivie par Mgr M.L. Guérard desLauriers et par nous-mêmes à sa suite (22).

Mgr Lefebvre semblait avoir adopté luiaussi - dans un premier temps - cette posi-tion: non seulement il donnait comme but dela consécration l’exercice du pouvoir d’ordre[“Le but principal de cette transmission est deconférer la grâce de l’ordre sacerdotal pour lacontinuation du vrai Sacrifice de la SainteMesse, et pour conférer la grâce du sacrementde confirmation aux enfants et aux fidèles quivous la demandent”] (23) mais il excluait ex-plicitement pour ses évêques un pouvoir dejuridiction: “S’il fallait un jour consacrer desévêques - écrivait-il le 27 avril 1987 - ceux-cin’auraient pour fonction épiscopale qued’exercer leur pouvoir d’ordre et n’auraientpas de pouvoir de juridiction, n’ayant pas demission canonique” (24).

Cependant avant même les consécrationsépiscopales, on avait commençé à appliqueraussi à ce cas la théorie de la “juridiction sup-pléée”, invoquée précédemment uniquementpour l’administration des sacrements. Lesévêques éventuellement consacrés par MgrLefebvre devaient jouir d’une véritable juri-diction, reçue non du Pape mais de l’Eglise,laquelle pourrait agir sans (et même contre)le Pape qui en est le chef visible (25). Dans unopuscule sur les futures consécrations ap-prouvé par Mgr Lefebvre, l’un des membresactuels de la Commission canonique, l’abbéPivert, invoquait déjà, sans aucun fondement,le can. 20 pour justifier les consécrations épis-copales et l’exercice par ces évêques d’unevraie juridiction (de suppléance) (26).

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Dans ce texte de l’abbé Pivert (qui est,cela ne fait aucun doute, l’un des “théolo-giens” inspirateurs des Commissions cano-niques) on ne comprend pas si cette “juridic-tion” qu’il attribue aux évêques lefebvristessubsiste uniquement pour administrer licite-ment les sacrements d’Ordre et de Con-firmation, ou bien si, en janvier 1988 il théo-risait déjà une autorité de ces évêques sur lesfidèles. C’est cette seconde hypothèse qui estdevenue petit à petit la position de laFraternité et de Mgr Lefebvre lui-même,comme nous l’avons déjà dénoncé dans aumoins trois articles de Sodalitium (27). Deuxlettres de Mgr Lefebvre (4 décembre 1990 et20 février 1991) en vue de la consécrationépiscopale de Mgr Rangel attribuaient aufutur évêque le caractère de successeur deMgr de Castro Mayer comme évêque deCampos en tant que désigné par les prêtresfidèles et par le peuple, desquels il auraitmême reçu une véritable juridiction. Pour sapart, l’abbé Laguérie n’hésitait pas à seconsidérer comme curé de Saint-Nicolas-du -Chardonnet... En public, c’est dans le dis-cours sur Juridiction de suppléance et senshiérarchique qu’il tint à Paris le 10 mars 1991(Mgr Lefebvre était encore en vie) auxCercles de la Tradition catholique (28) queMgr Tissier de Mallerais exprima publique-ment - pour la première fois je crois - l’opi-nion de la Fraternité Saint Pie X sur la ques-tion. Cette thèse défendue par l’évêque le-febvriste, voici comment lui-même la résu-me: “Vos prêtres - ce sont vos prêtres - vosévêques, vos paroisses de tradition, n’ont pasd’autorité ordinaire, mais une autorité extra-ordinaire, une autorité de suppléance” (p. 94)qui constitue une hiérarchie, elle aussi desuppléance, définie par lui comme “la hiérar-chie de la Tradition” (p. 106). La juridiction -de suppléance - que Mgr Tissier attribue à lahiérarchie de la Fraternité - la hiérarchie dela Tradition - ne se limite pas à rendre liciteset valides les actes sacramentaux: elle s’étendau pouvoir d’enseigner avec autorité le trou-peau des fidèles qui le requièrent (pp. 96-98).De là à créer de véritables Tribunaux “deTradition”, le pas est vite franchi, et il étaitmême déjà franchi, à l’insu de tous et parMgr Lefebvre en personne... Les documentsauthentiques de la Fraternité que nous avonspubliés et que nous commentons ici sont ladémonstration sans discussion possible de ceque nous venons d’écrire.

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Les Tribunaux canoniques de la Fraternités’attribuent un véritable pouvoir de juridic-tion pour gouverner les fidèles

Il n’est certes pas difficile de démontrercette assertion, car le fait est admis sponta-nément par Mgr Tissier de Mallerais lui-même: “c’est une vraie juridiction et non uneexemption du droit et de l’obligation que lesfidèles ont de recevoir une sentence. Doncnous avons pouvoir et devoir de porter devraies sentences, ayant potestatem ligandi velsolvendi [de lier et de délier]. Elles ont doncvaleur obligatoire. (…) Nos sentences ne sontpas de simples avis privés (...)” car “il faut unpouvoir au for externe public” (Cor unum, n.61, IV, 4, p. 43).

La Fraternité s’attribue donc - même s’ils’agit de suppléance - le pouvoir de juridic-tion, et plus exactement le pouvoir de juridic-tion au for externe, pouvoir qui a “des effetsjuridiques publics” (29). Nous rappelons quecette juridiction “est immédiatement destinéeà gouverner les fidèles en vue de l’obtention dela vie éternelle” et non destinée “à sanctifierles âmes à travers l’offrande du sacrifice de laMesse et de l’administration des sacrements”,ce qui est propre au pouvoir d’ordre (29). Lajuridiction ainsi définie “s’exerce tant par l’en-seignement autorisé des vérités révélées (ma-gistère sacré) tant par la promulgation des lois(pouvoir législatif), par l’authentique décisiondes causes nées entre les sujets (pouvoir judi-ciaire), par l’application de sanctions pénalescontre les transgresseurs de la loi (pouvoircoercitif). Ce sont ces trois dernières fonctionsqui font de l’Eglise une société parfaite [toutcomme l’Etat]” (ibidem).

La Fraternité, en s’attribuant ce pouvoirde juridiction, s’arroge en fait le pouvoir degouverner les fidèles (potestas regiminis),pouvoir qui est propre à l’Eglise. Elle ne s’estpas privée de s’attribuer les divers pouvoirsdans lesquels s’exerce la susdite juridiction.

La Fraternité s’attribue le pouvoir deMagistère propre à l’Autorité ecclésiastique

Dans la conférence tenue à Paris en 1991que nous avons déjà citée, Mgr Tissier deMallerais attribuait aux prêtres et auxévêques de la Fraternité une juridiction desuppléance. Or, lui-même par pouvoir de ju-ridiction, entend surtout pouvoir d’enseigner:“On distingue, vous le savez certainement,

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dans l’Eglise, le pouvoir d’ordre et le pouvoirde juridiction; ‘allez dans le monde entier prê-cher l’Evangile’ docete omnes gentes ‘ensei-gnez à toutes les nations’, cela, c’est le pouvoirde juridiction. ‘Enseignez’ ou encore ‘ensei-gnez-leur à respecter tout ce que je vous aicommandé’, à garder les commandements deDieu: dirigez le troupeau, c’est le pouvoir dejuridiction” (l. c., pp. 96-97). Ces paroles dansleur sens évident signifient que la Fraternités’attribue - bien que par suppléance - le pou-voir d’enseigner avec autorité, ce qui dépenddu pouvoir de juridiction, et pas seulement lacapacité d’exhorter au bien, ce qui peut dé-couler du pouvoir d’ordre. Cette interpréta-tion est absolument certaine pour ce quiconcerne la personne de Mgr Lefebvre,puisque dans un article publié en 1989 dans larevue Fideliter (n. 72, p. 10) Mgr BernardTissier de Mallerais considère Mgr Lefebvrenon seulement comme une voix du magistèremais comme étant le magistère lui-même, enoubliant que n’étant plus évêque résidentiel,Mgr Lefebvre n’était même plus membre dela hiérarchie de juridiction ni un organe dumagistère ecclésiastique. “Que reste-t-il dumagistère dans l’Eglise? - écrivait Mgr Tissier- Il est de foi que le Seigneur a doté son Eglised’un Magistère vivant et perpétuel, c’est-à-direde voix pontificale et épiscopales qui, à chaqueépoque et dans le présent, se font l’écho de larévélation divine, le relais de la tradition. Ehbien, ce magistère, au moins quant aux véritésniées par les conciliaires, c’est en MgrLefebvre que nous le trouvons de manièresûre. C’est lui, le véritable écho de la tradition,le témoin fidèle, le bon pasteur, que les brebissimples ont su discerner au milieu des loupscouverts de peaux de brebis. Oui, l’Eglise a unmagistère vivant et perpétuel et Mgr Lefebvreen est le sauveur. L’indéfectibilité de l’Eglise,c’est l’Archevêque inflexible (…)”.

S’il en est ainsi, où trouver donc le ma-gistère vivant et perpétuel ainsi que l’indé-fectibilité de l’Eglise après le décès de MgrLefebvre? Serait-ce chez les évêques consa-crés par lui? Un théologien de la FraternitéSaint Pie X, l’abbé Arnaud Sélégny, quiétait alors professeur au séminaire Saint-Curé-d’Ars de Flavigny, l’a soutenu dans larevue Le Sel de la terre (n. 1, pp. 39-50 et n.3, pp. 51-61). Nous reprenons ce que nousavions déjà publié à ce propos dansSodalitium (n° 33, oct. 1993, p. 52). A notreavis, “on attribue à la Fraternité et à ses

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évêques les caractères propres à la seuleEglise catholique et aux évêques dotés d’au-torité par le Pape. Pour Sélégny, les consécra-tions du 30 juin 1988 sont ‘une preuve de l’in-défectibilité de l’Eglise’ (Le Sel de la terre, n.1, p. 38), et qui plus est: ‘cela montre (…) lanécessité des sacres du 30 juin 1988; car, pourque l’on puisse parler de l’indéfectibilité del’Eglise, il faut qu’à toutes les époques et àtous les moments de son histoire, il y ait unmagistère qui prêche infailliblement et des fi-dèles qui adhèrent de même à cet enseigne-ment, quel que soit le nombre effectif de cesEvêques et de ces fidèles. Mgr Lefebvre (…)ne pouvait pas ne pas donner à l’Eglise lemoyen de sauvegarder son indéfectibilité.Tradidi quod et accepi: c’est maintenant ànous, sous la direction du magistère, de gar-der ce dépôt’ (Le Sel de la terre, n. 3, p. 66).Le professeur des jeunes séminaristes dela Fraternité (!), l’abbé Sélégny, affirmepourtant explicitement:

a) que seuls les Evêques de la Fraternitéassurent l’indéfectibilité de l’Eglise;

b) qu’ils sont les seuls à exercer le magis-tère infaillible.

Positions absurdes, puisque c’est exclusi-vement par l’intermédiaire du SouverainPontife que le pouvoir magistériel est trans-mis aux Evêques. Or le Souverain Pontife n’ajamais accordé un tel pouvoir à ceux de laFraternité (…)”.

Mgr Lefebvre, nous l’avons rappelé,ayant renoncé aux diocèses de Dakar et deTulle n’était plus un organe du magistère ec-clésiastique; toutefois, pendant de longuesannées, il exerça - avec Pierre et sous Pierre- cette tâche. Par contre, les évêques qu’il aconsacrés (de même que ceux qui ont étéconsacrés par Mgr Thuc) n’ont jamais reçudu Pape un tel office, et ne peuvent exerceren aucune façon, et n’ont jamais exercé, lepouvoir d’enseigner dans l’Eglise en tantque docteurs authentiques (et encore moins,infaillibles!).

Il nous semble avoir démontré la thèsede ce chapitre: “La Fraternité s’attribue lepouvoir de Magistère propre à l’Autorité ec-clésiastique ”. Il nous semble avoir prouvéque cette prétention est infondée. Le problè-me de l’indéfectibilité de l’Eglise (et parconséquent aussi celui de l’indéfectibilité deson pouvoir de magistère) demeure: il s’agitd’une question vitale mais qui est en dehorsde notre sujet (29 bis); en tous cas, les consé-

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crations du 30 juin 1988 ne sont pas suffi-santes - c’est le moins que l’on puisse dire -pour assurer cette nécessaire indéfectibilité.

La Fraternité s’attribue le pouvoir législatifpropre à l’Autorité ecclésiastique

Faire des lois est le propre de l’Autorité(cf. Sodalitium n° 48, pp. 6-7). Or la Fra-ternité s’attribue la faculté de légiférer enmatière ecclésiastique. Elle s’attribue doncl’Autorité ecclésiastique.

La mineure du raisonnement n’est pasdifficile à prouver.

D’abord, il s’agit d’une conséquence im-plicite du pouvoir de juridiction au for exter-ne que s’attribue la Fraternité, comme nousl’avons déjà démontré. Or, dans ce pouvoirest compris le pouvoir législatif. Ergo.

Ensuite dans les faits la Fraternité s’attri-bue ce pouvoir, au moins dans deux cas:créer une nouvelle législation canonique, ets’attribuer le pouvoir de dispenser.

Examinons le premier cas. Il fut un temps,et peut-être en est-il encore de même au-jourd’hui, où les candidats au sacerdoce de laFraternité devaient jurer - entre autres - d’ac-cepter la position qui serait prise par les supé-rieurs vis-à-vis du nouveau code de droitcanon. Aujourd’hui ces décisions ont étéprises, comme on peut le déduire des“Ordonnances...” de 1997, en appliquant audroit de l’Eglise le principe lefebvriste du“filtre”, de la “passoire” ou du “tamis” (30)déjà évoqué, principe déjà appliqué précé-demment au magistère et à la discipline:“nous acceptons les nouveautés conformes àla Tradition et à la Foi. Nous ne nous sentonspas liés par l’obéissance à des nouveautés quivont contre la Tradition et menacent notreFoi” (31). Autrement dit les autorités de laFraternité s’attribuent le pouvoir de choisir(“hérésie”, en grec signifie justement“choix”) dans le magistère et dans la législa-tion de Jean-Paul II ce qui est considérécomme “traditionnel”, et d’écarter le reste.Voici comment les “Ordonnances” de 1997 (àla p. 4) appliquent le principe susdit au nou-veau code de droit canon promulgué parJean-Paul II: “le nouveau code de droit canon,promulgué le 25 janvier 1983, imbu d’œcumé-nisme et de personnalisme, pèche gravementcontre la finalité même de la loi... (32). Aussisuivons-nous en principe le code de 1917 (avecles modifications introduites postérieurement).

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Cependant, dans la pratique et sur des pointsprécis, nous pouvons accepter du nouveaucode ce qui correspond à un développementhomogène, à une meilleure adaptation aux cir-constances, à une simplification utile; nous ac-ceptons aussi en général ce que nous ne pou-vons refuser sans nous mettre en porte-à-fauxavec la législation reçue officiellement, lorsquela validité des actes est en jeu. Et dans ce der-nier cas, nous renforçons notre discipline pourla rapprocher de celle du code de 1917 (cf. CorUnum, n. 41, pp. 11-13)”. Etant donné que lecode de 1983 remplace celui de 1917, com-ment deux législations qui s’excluent peu-vent-elles subsister dans l’Eglise? Si Jean-Paul II est Pape, l’unique législation en vi-gueur est celle de 1983. S’il ne l’est pas, cellede 1983 n’existe pas, et celle de 1917 subsiste.Pour la Fraternité Saint Pie X par contre lesdeux codes de lois sont en vigueur; tous lesdeux. Ou plutôt: un troisième code est en vi-gueur, dont l’auteur n’est ni Benoît XV (quipromulgua celui de 1917) ni Jean-Paul II (au-teur de celui de 1983) mais Mgr Fellay, supé-rieur général de la Fraternité, et ses collabo-rateurs: un code composé “en principe” deslois de 1917, et composé “en pratique”, danscertains cas, de celles de 1983, toujours par unhybride de ces deux législations avec l’ad-jonction de nouveautés créées ex novo par laFraternité (par exemple - à la p. 57 desOrdonnances - les extensions des empêche-ments prohibants de mariage pour religionmixte, jusqu’à inclure, au moins dans la pra-tique, les “catholiques conciliaires”!). Il meparaît donc prouvé que la Fraternité, de faitsinon de droit, s’attribue le pouvoir législatif,créant une nouvelle législation canonique quin’est ni la législation pré-conciliaire ni la lé-gislation post-conciliaire.

Mais la Fraternité s’attribue également lepouvoir législatif dans les dispenses des em-pêchements, irrégularités et vœux, et ce, de-puis 1980.

Le pouvoir de dispenser de la loi est eneffet de la compétence exclusive de celui quipeut faire la loi.

Or la Fraternité s’attribue le pouvoir dedispenser de la loi.

Par conséquent la Fraternité s’attribue lepouvoir législatif dans l’Eglise, ce qui, endernière analyse, est l’apanage de l’AutoritéSuprême.

La “majeure” de notre raisonnement estclairement exprimée par le canon 80: “la dis-

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pense, autrement dit l’exonération de l’obser-vance d’une loi dans un cas spécial, peut êtreconcédée par le législateur, par son successurou supérieur, ou par celui auquel ceux-ci ontconcédé la faculté de dispenser” (31 bis). Les ca-nons suivants (81-82-83) précisent que lepouvoir ordinaire de dispenser est l’apanagedu Pape pour les lois générales de l’Eglise,et de l’Ordinaire (et non du Curé) pour leslois particulières.

En particulier, les dispenses aux empê-chements matrimoniaux sont du ressort duPape (canon 1040) par l’intermédiaire desCongrégations romaines; les dispenses auxirrégularités pour recevoir l’Ordre sacrésont du ressort de l’Ordinaire du lieu (can.990), et les dispenses des vœux réservés re-viennent encore au Pape (can. 1309). Quelsque soient les cas, je souligne pour le lecteurle principe général en ce qui concerne lesdispenses: c’est que la dispense est toujoursun acte de juridiction - et par conséquentd’autorité - qui revient au législateur (ou àson délégué).

La “mineure” de notre raisonnement (laFraternité s’attribue le pouvoir de dispenserde la loi) est incontestable, et est largementdémontrée par les documents que nous pu-blions. Est attribué, en particulier, aux “au-torités” de la Fraternité le pouvoir de dis-penser des empêchements matrimoniaux(Ordonnances de 1980, pp. 17 et 18,Ordonnances de 1997, chap. V et VI, et p. 8:institution, depuis 1991, de la Commissioncanonique), et des vœux religieux (dans laFraternité c’est Mgr de Galarreta qui estchargé du travail, avec juridiction non seule-ment sur les membres de la Fraternité, maisaussi sur les ressortissants à d’autres sociétésreligieuses: Ordonnances, pp. 43-46; Corunum, n. 61, p. 34).

La Fraternité s’attribue le pouvoir judiciairepropre à l’Autorité ecclésiastique

Outre le pouvoir de faire les lois, laFraternité s’attribue-t-elle aussi le pouvoirde juger sur la base de ces lois? La réponsesera positive si nous constatons l’existencedans la Fraternité de véritables Tribunaux,de procès, de juges et de sentences. Or lapreuve est très facile à fournir: en effet, nousl’avons vu, la Fraternité a institué desTribunaux pour “juger des nullités de maria-ge” “par divers tribunaux institués ad casum

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(Cor unum, I): toute l’étude de Mgr Tissierde Mallerais que nous avons publiée vise àla défense de la”légitimité de nos tribunauxmatrimoniaux”. On pourrait nous objecterqu’il ne s’agit pas de vraies sentences, maisseulement de conseils ou d’opinions expri-mées par des théologiens de la Fraternitépour tutéler la conscience des ses fidèles.Mais il n’en est pas ainsi. Mgr Tissier deMallerais précise explicitement que “nousavons pouvoir et devoir de porter de vraiessentences, ayant potestatem ligandi vel sol-vendi (...). Nos sentences ne sont pas desimples avis privés...” (IV, 4, p. 43). Il est parconséquent évident et indéniable que laFraternité s’attribue le pouvoir judiciaire.

La Fraternité s’attribue le pouvoir de coerci-tion propre à l’Autorité ecclésiastique

Cette dernière thèse est un corollaire desprécédentes; en effet le Code de droit canonrappelle que “ceux qui jouissent du pouvoirde faire des lois ou d’imposer des préceptespeuvent également ajouter des peines à la loiou au précepte...” (can. 2220 § 1). Etantdonné que la Fraternité s’attribue, nousl’avons vu, le pouvoir législatif, pourquoi nejouirait-elle pas aussi du pouvoir coercitif? Lechapitre VII des “Ordonnances” traite juste-ment “des délits et des peines”, là où il se dé-clare suivre les peines établies par le nouveaucode. Les “Ordonnances” insistent surtoutsur le “pouvoir” attribué aux prêtres de laFraternité d’absoudre des peines et de la cen-sure (pp. 71-75), présentant le cas vraimentparadoxal de prêtres “excommuniés” qui ab-solvent des excommunications! Au lieu d’en-voyer les coupables aux organes compétentstels que la Sacrée Pénitencerie ou l’Evêquediocésain (nous rappelons que la Fraternitéreconnaît l’autorité de Jean-Paul II) les“Ordonnances” (p. 72) établissent le principegénéral que l’on doit s’adresser aux autoritésde la Fraternité, supérieur général ou prési-dent de la commission canonique, mêmepour les cas réservés au Saint-Siège!

Mais la Fraternité ne prévoit pas seule-ment la possibilité d’absoudre elle-même descensures et des peines, y compris celles réser-vées au Pape, elle prévoit aussi la possibilitéd’infliger elle-même des peines! “Outre lescensures latæ sententiæ, il y a les censures fe-rendæ sententiæ, les peines vindicatives, les re-mèdes pénaux et les pénitences, dont on peut

user pour punir un délit” (p. 68). Ce “onpeut”, à quelles autorités se réfère-t-il? àcelles de l’Eglise ou à celles de la Fraternité?Bien sûr également à celles de la Fraternité,comme il est prévu plus loin pour l’absolu-tion de la peine (p. 72): “une peine infligéepar un supérieur est soumise à celui-ci, maiss’il s’agit d’un supérieur ‘novus ordo’ [il y adonc aussi le cas du supérieur ‘traditionalis-te’, n.d.r.] elle peut être soumise au supérieurde rang équivalent dans la Fraternité, à chargepour lui de consulter son confrère ‘novusordo’ s’il le juge utile. Toutes les autres peinespeuvent être soumises au supérieur de district(…) où le délit fut perpétré”.

En s’attribuant les pouvoirs législatif, judi-ciaire et coercitif indépendamment de toutpouvoir supérieur, la Fraternité s’institue defait Eglise autonome

Nous avons vu antérieurement commentl’Eglise possède les trois pouvoirs - législatif,judiciaire et coercitif - en tant que société par-faite, c’est-à-dire indépendante, dans la pour-suite de sa fin, de toute autre société. Or laFraternité s’attribue de fait ces trois pouvoirs(sans parler du pouvoir magistériel). LaFraternité s’institue donc société parfaite,Eglise autonome (même s’il s’agit de sup-pléance). Et c’est d’autant plus vrai que laFraternité, tout en reconnaissant un pouvoirsupérieur, celui de Jean-Paul II, le vide detoute efficacité et réalité en s’attribuant d’un

L’abbé Schmidberger, premier successeurde Mgr Lefebvre

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côté des pouvoirs papaux et en interdisant del’autre à ses propres fidèles le recours au Pape.

Ce dépouillement des pouvoirs du Pape enfaveur de l’autorité de la Fraternité est uneconstante dans les documents que noussommes en train d’examiner (33). Mgr Tissierlui-même admet, à propos des Tribunaux de laFraternité: “il est vrai que nos sentences en troi-sième instance remplacent les sentences de laRote romaine, qui juge au nom du pape commetribunal de troisième instance” (Cor unum, IV,5, p. 43). Mgr Lefebvre lui-même attribuaitaux Commissions canoniques de la Fraternitéla tâche de faire “dans une certaine mesuresuppléance à la défection des Congrégations ro-maines”. Or les Congrégations romainesconstituent avec les Tribunaux la Curie romai-ne (can. 242) et leurs actes sont actes du Saint-Siège (can. 7 et 9) (34). Par conséquent la pré-tention de la Fraternité et de Mgr Lefebvre desuppléer aux Congrégations romaines équi-vaut à prétendre, de leur part, suppléer à rienmoins que le Saint-Siège.

Mais non seulement la Fraternité supplan-te ainsi le Saint-Siège, mais elle interdit à sesfidèles - sous serment - d’y recourir, alorsqu’elle en reconnaît l’autorité, rappelons-le!Qui désire par exemple recevoir de laFraternité l’annulation de mariage doit jurer“de ne pas approcher un tribunal ecclésiastiqueofficiel pour lui faire examiner ou juger macause” (Cor unum, p. 45), car le principe estque les fidèles “n’ont pas le droit d’aller aux tri-bunaux nouvel ordo” (Cor unum, II, 1, p. 40)“même si par impossible on pouvait trouver telou tel tribunal officiel qui jugeât des causes demariage selon les normes traditionnelles” (Corunum, IV, 3, p. 43) (35). Or recourir au Saint-Siège est un droit qu’a tout fidèle du fait duprimat du Souverain Pontife (can. 1569): inter-dire ce recours est une négation pratique duprimat et une déclaration nette de schisme.

Une confirmation de ce que je viens dedémontrer nous est donnée par l’institutionpar la Fraternité d’une hiérarchie parallèlequi supplée et supplante la hiérarchie offi-cielle de l’Eglise, pourtant reconnue commetelle par Ecône...

Confirmation de la thèse qui précède: la Frater-nité a - de fait - institué une hiérarchie parallèle

L’occupation de l’église paroissiale deSaint-Nicolas-du-Chardonnet à Paris avaitoffert aux membres de la Fraternité l’occa-

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sion d’attribuer au prêtre qui officie dans la-dite église le titre de “curé”. L’abbéLaguérie prit tellement au sérieux cette pré-tention que dans une lettre au Président dela république, Mitterand, il s’adressa à luicomme à son paroissien! (36). Il ne suffit pasd’occuper une paroisse pour être curé: voilàune évidence qui n’échappe à personne;pour être investi de cette charge il faut êtrenommé par l’évêque local; l’occupation de laBasilique Saint-Pierre ou de la Basilique duLatran ne donnerait pas à l’occupant lespouvoirs du Vicaire du Christ... Mais MgrLefebvre ne s’en tint pas au cas de Saint-Nicolas dans sa prétention d’instituer de“vraies paroisses”. Le 27 octobre 1985, àGenève, dans l’homélie de la Messe duChrist-Roi, il prononçait ces paroles: “Jepense que nous devons désormais considérernos lieux de culte comme de véritables pa-roisses. Ce sont nos paroisses, où nous fai-sons baptiser nos enfants, où nous assistonsau Saint Sacrifice de la Messe, où les enfantsreçoivent le véritable sacrement de Con-firmation, où l’on peut se confesser (…).Nous devons aussi recevoir dans nos cha-pelles tous les sacrements, y compris le sacre-ment de mariage” (Fideliter, n° 49, janvier-février 1986, pp. 20-21). Par la suite, aprèsles consécrations épiscopales, l’idée d’une“hiérarchie de la Tradition” a fait son che-min, hiérarchie qui devait suppléer, et sup-plante réellement, la “hiérarchie officielle”.

Le 10 mars 1991, Mgr Tissier de Mal-lerais résumait ainsi cette thèse: “vos prêtres- ce sont vos prêtres - vos évêques, vos pa-roisses de tradition n’ont pas d’autorité ordi-naire, mais une autorité extraordinaire, uneautorité de suppléance” (op. cit., p. 94).Après avoir défini la juridiction comme “unpouvoir du supérieur sur son troupeau, dupasteur sur ses brebis” (p. 96), Mgr Tissier at-tribue aux prêtres de la Fraternité un trou-peau qui ne lui serait confié ni par lesévêques ni par le Pape, mais par l’“Eglise”:“dans la situation de crise - disait-il aux fi-dèles qui l’écoutaient - il est clair que vosprêtres ne peuvent pas recevoir de leurs supé-rieurs dans l’Eglise officielle, des évêques dio-césains, ni même du pape, un troupeau, parcequ’on le leur refuse. Donc cette autorité surun troupeau va leur être donnée d’une autremanière: par suppléance. C’est l’Eglise qui vadonner aux prêtres un pouvoir, comme lepouvoir du pasteur sur son troupeau” (p. 97).

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Ce texte de Mgr Tissier comporte déjàquelques contradictions. D’abord et avanttout il oppose les évêques diocésains et lePape (c’est-à-dire l’Eglise hiérarchique) àl’Eglise (en tant que Corps Mystique deJésus-Christ, p. 99): l’Eglise pourrait concé-der ce que le Pape refuse. Ensuite il sembleignorer ou nier que celui qui donne la juri-diction de suppléance est justement le Pape:étant donné que Mgr Tissier admet que lePape refuse la juridiction aux prêtres de laFraternité, on ne voit pas comment ce mêmePape pourrait dans le même temps la concé-der. Enfin il attribue à la juridiction de sup-pléance la capacité de confier au prêtre untroupeau à gouverner: ce qui implique unepluralité de personnes confiées de façon du-rable à un pasteur. Or Mgr Tissier lui-mêmeexplique peu après comment la juridictionde suppléance s’exerce au contraire cas parcas sur de simples individus (p. 99) (37).Comment parler en ce cas de troupeau?

* - L’ambiguïté de la thèse de MgrTissier de Mallerais - telle qu’il l’exposait en1991 - se vérifie également quand il parle -pour la première fois, à ma connaissance -d’une “hiérarchie de la Fraternité” ou “hié-rarchie de la Tradition” (p. 106). Ce n’est pasla hiérarchie de l’Eglise (p. 104) même si elle“lui ressemble” (p. 105. La Fraternité - nousle savons - n’accepte pas le sédévacantisme,elle se considère comme étant toujours encommunion avec la hiérarchie de ce qu’ellenomme “Eglise conciliaire” ou “Eglise offi-cielle ”: Pape et évêques diocésains (p. 104).Elle flanque cette hiérarchie d’une hiérar-chie “de suppléance”, la “hiérarchie de laTradition”. Mais dans les faits le fidèle nedevra pas s’adresser à la hiérarchie “officiel-le”, mais toujours et seulement à celle de la“Tradition”. Etant donné que “la hiérarchie(cf. can. 108 § 3) s’éloigne en grande partiede la foi catholique, les fidèles ne peuvent gé-néralement recevoir d’elle les secours spiri-tuels sans péril dans la foi” (Ordonnances p.5). C’est pourquoi, “même dans le cas où, defait, il n’y a pas de nécessité” (ibidem p. 6),les fidèles devront recourir à la “hiérarchiede la Tradition”, qui par ailleurs dans la pra-tique n’est pas constituée de tous les prêtresfidèles à cette tradition, mais de ceux de laFraternité. Et la Fraternité comportant déjàune hiérarchie structurée (simple prêtre,prieur, supérieur de district, supérieur géné-ral) la hiérarchie de la Tradition sera struc-

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turée sur le même modèle. “En soi, à l’égarddes fidèles, les simples prêtres n’ont pasmoins de pouvoirs de suppléance qu’unprieur ou un supérieur de district. Mais pardisposition pratique, afin de conserver le senshiérarchique qui appartient à l’esprit del’Eglise, et de remettre les cas plus graves àune instance plus élevée, certains pouvoirssont réservés à l’autorité supérieure, selonune analogie avec la hiérarchie normale,d’après les règles suivantes:

* - Les prieurs et les prêtres responsablesdes chapelles sont équiparés à des curés person-nels, tels les aumôniers militaires [il ne s’agitdonc pas d’une vraie juridiction de suppléance,cas par cas, mais d’une prélature personnelle,qui est une juridiction ordinaire, n.d.r.].

* - Les supérieurs de districts, séminaires etmaisons autonomes, ainsi que le supérieur géné-ral et ses assistants, bien qu’ils n’aient en princi-pe de juridiction que sur leurs sujets (prêtres, sé-minaristes, frères, oblates, familiers) sont équi-parés à des Ordinaires personnels, tels lesOrdinaires militaires, par rapport aux fidèlesdont leurs prêtres ont la charge d’âme [sic][même observation que précédemment, n.d.r.].

* - Les évêques de la Fraternité, dépour-vus de toute juridiction territoriale, ont néan-moins la juridiction supplétoire nécessairepour exercer les pouvoirs attachés à l’ordreépiscopal et certains actes de la juridictionépiscopale ordinaire [ce pour quoi ils reven-diquent la juridiction non seulement pour lasanctification des âmes grâce au pouvoird’ordre, mais aussi pour le gouvernementdes âmes, n.d.r.]” (Ordonnances, p. 7).

Outre ces structures hiérarchiques paral-lèles, la Fraternité a créé également en 1991la “Commission canonique” et un “évêquechargé des religieux” “pour continuer aprèssa mort l’office que Mgr Lefebvre a rempli demanière supplétoire en ces matières de 1970 à1991” (Ordonnances, p. 8), afin de suppléerà la défection des Congrégations romaines(et là en particulier les dispenses et les sen-tences des tribunaux de la Fraternité rem-placent - et usurpent - les pouvoirs du Saint-Office, de la Sacrée Pénitencerie, de laPropagande de la Foi, des Congrégationspour les Religieux, des Sacrements et desEglises Orientales).

La Fraternité a donc créé de fait, sinon dedroit et en principe, une structure hiérarchiquestable qui, pour le fidèle, remplace le curé,l’évêque diocésain et le Saint-Siège (Con-

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grégations et Tribunaux). Il ne manque à lahiérarchie de la Fraternité que le Pape; Jean-Paul II - reconnu en paroles comme tel - neremplit pas pour si peu cette fonction, puisquenormalement il est interdit de recourir à lui.

Notons enfin que les pouvoirs de cettehiérarchie “de la tradition” ne s’exercent passeulement sur les membres de la Fraternitéet sur ses fidèles; ils s’exercent égalementsur les autres réalités “traditionnelles” exis-tant à l’extérieur de la Fraternité. Si une ju-ridiction de suppléance telle que la conçoitla Fraternité devait exister, elle devrait logi-quement concerner - au même titre - “tousles évêques et tous les prêtres fidèles à la tra-dition”, comme le reconnaissent lesOrdonnances (p. 6). On ne voit donc paspourquoi tous devraient se soumettre auxTribunaux de la Fraternité et non à ceux quepourraient créer - avec la même autorité -d’autres Instituts traditionalistes (38), et, quiplus est, pourquoi des “religieux” étrangersà la Fraternité devraient être soumis - pourla dispense des vœux, par exemple - àl’“évêque pour les religieux” institué par laFraternité elle-même, alors que les membresde la Fraternité doivent s’adresser au supé-rieur général (Ordonnances, p. 45). En vertude quoi - peut-on se demander - l’évêquepour les religieux, Mgr De Galarreta, aurait-il davantage de pouvoirs que le supérieurdes dominicains d’Avrillé ou que celui descapucins de Morgon, par exemple, pour ac-corder un “indult de sécularisation” auxfrères desdits couvents (en réalité aucund’entre eux n’a le pouvoir d’accorder cet in-dult). L’unique réponse possible est que laFraternité Saint-Pie X, tout en le niant enparole et en principe (39), considère de fait sapropre hiérarchie interne comme la véri-table hiérarchie de l’Eglise.

La Fraternité tente de justifier sa propreposition par l’autorité de Mgr Lefebvre, enprésupposant à tort son infaillibilité

Nous avons vu comment cette institutiond’une hiérarchie parallèle et de véritables tri-bunaux ecclésiastiques par la Fraternité sontdes choses d’une extrême gravité: certainsont parlé, à raison, de schisme. Or, face à unequestion aussi grave, quel est le premier ar-gument proposé par Mgr Tissier de Malleraisdans Cor unum pour démontrer la légitimitédes tribunaux de la Fraternité? “Mgr

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Lefebvre (...) - écrit-il - a prévu la création dela Commission canonique, en particulier pourrésoudre les causes matrimoniales après unpremier jugement porté par le supérieur dedistrict. L’autorité de notre fondateur suffitpour que nous acceptions ces instances, demême que nous avons accepté les sacres épis-copaux de 1988” (Cor unum, p. 37, Statusquæstionis). Ce n’est pas la première fois queMgr Tissier fait des déclarations de ce genre,et justement à propos des consécrations épis-copales. Nous avons déjà dit dans Sodalitiumce qu’il faut penser de ces “aveux candides”(40) de Mgr Tissier ou autres représentants dela Fraternité (41). Ils restreignent à l’extrêmel’infaillibilité du Pape alors qu’ils ne mettentaucune limite à celle de Mgr Lefebvre. C’estainsi que Mgr Tissier - comme nous l’avonsdéjà écrit - “substitue comme critère de catho-licité un évêque au Pape. (...). De cette maniè-re Mgr Tissier révolutionne totalement laconstitution divine de l’Eglise, en opposant lecharisme d’une (présumée) sainteté à celui del’autorité papale”. Le texte de Mgr Tissierque nous commentons - contemporain decelui que nous dénoncions en son temps: ilssont tous les deux de 1998 - confirme hélas ladérive “charismatique” de la Fraternité, maisn’apporte certainement pas un argument suf-fisant à la légitimité de ses tribunaux, malgréle respect et l’estime que l’on peut avoir pourMgr Lefebvre.

La Fraternité tente de justifier sa propreposition en niant usurper le pouvoir duPape. En réalité elle s’oppose au primat dejuridiction du Pape

Dans son article publié dans Cor unum,Mgr Tissier tente de justifier la “légitimité(...) de nos tribunaux matrimoniaux”. Alorscomment ne pas s’étonner du peu de lignesconsacrées à cette première difficulté pour-tant apparemment insurmontable: ce faisant,la Fraternité n’usurpe-t-elle pas un pouvoirqui revient au Pape par droit divin? MgrTissier se contente de répondre: “il est vraique nos sentences en troisième instance rem-placent les sentences de la Rote romaine, quijuge au nom du pape comme tribunal de troi-sième instance. Mais ce n’est pas une usurpa-tion de pouvoir de droit divin du pape, car laréserve de cette troisième instance au pape estseulement de droit ecclésiastique!” (Corunum, IV, 5, p. 43).

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L’enthousiasme du point d’exclamationne peut masquer la faiblesse de la réponsedu président de la Commission canoniquede la Fraternité. Il se peut, historiquement,que le Saint-Siège ne se soit réservé le der-nier degré de jugement des procès matrimo-niaux que tardivement, et donc par droit ec-clésiastique, exactement comme il imposapeu à peu l’obligation du mandat romainpour les consécrations épiscopales; transea-mus. Le point en question est plutôt le sui-vant: en s’attribuant des pouvoirs purementjuridictionnels et de gouvernement en de-hors du Pape (et même contre lui, en suppo-sant la légitimité de Jean-Paul II) laFraternité ne viole-t-elle pas le primat de ju-ridiction du Pape qui est de droit divin? Laréponse ne peut être qu’affirmative.

Je rappelle d’abord ce qui a déjà été dit àpropos du canon 1569 § 1, demeuré tel queldans le nouveau code (canon 1417§1). Il yest dit:

“En vertu du primat du Pontife Romain,tout fidèle a le droit de déférer au jugementdu Saint-Siège sa propre cause, tant conten-tieuse que pénale, à n’importe quel degré dejugement et à n’importe quel stade du procès,ou bien de l’introduire devant le mêmeSaint-Siège” (cf. Concile Vatican I, Const.dogmatique Pastor æternus, Denz. Sch. 3063).

Or, dans les causes matrimoniales, le ju-gement en troisième instance (42) de la RoteRomaine (c’est-à-dire le tribunal du Saint-Siège) étant remplacé par les sentences dutribunal de la Fraternité, les fidèles sont em-

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pêchés de déférer leur cause au jugement duSaint-Siège.

Par conséquent l’institution des tribunauxde la Commission canonique de la Fraternitépour remplacer ceux du Saint-Siège attententau primat du Souverain Pontife.

Or c’est de droit divin que le primat dejuridiction revient au Souverain Pontife(Denz. Sch. 3059).

L’institution des tribunaux de laFraternité est donc contraire au droit divinet pas seulement au droit ecclésiastique, etc’est pour quoi elle ne peut être justifiéemême en cas de nécessité.

Il est possible de parvenir à la mêmeconclusion par un raisonnement encore plusradical, c’est-à-dire en faisant abstraction dela question de l’appel au Saint-Siège. LaFraternité pourrait en effet renoncer à sesubstituer à la Rote et se limiter à remplacerles tribunaux diocésains: serait-il possible dele faire sans nier de fait le primat de juridic-tion du Souverain Pontife (que le siège soitvacant ou, à plus forte raison, occupé)?Nous ne le pensons pas.

En effet, “le Pontife Romain, Successeurde Saint Pierre dans le primat, possède nonseulement un primat d’honneur, mais aussiun suprême et plein pouvoir de juridictionsur toute l’Eglise, tant dans ce qui concernela foi et la morale que dans ce qui concernela discipline et le gouvernement de l’Eglisedispersée dans le monde entier. Ce pouvoirest vraiment épiscopal, ordinaire et immé-diat tant sur toutes les églises et chacuned’elles, que sur tous les pasteurs et fidèles etchacun en particulier, (pouvoir) indépen-dant de toute autorité humaine quellequ’elle soit” (can. 218; cf. Vatican I, Const.dogmatique Pastor æternus, Denz. S. 3059-3064). Par voie de conséquence, il est “jugesuprême dans tout le monde catholique”(can. 1597; cf. Denz. Sch. 3063).

Or les juges de la Fraternité prétendentavoir une juridiction - quoique de suppléan-ce - en dehors et même contre qui détient leplein pouvoir de juridiction sur toutel’Eglise et de juger en faisant abstraction dujuge suprême et qui plus est à l’encontre deson jugement. Par conséquent les tribunauxde la Fraternité, ses juges, ses sentences ren-dent vain et réduisent à une vaine parole leprimat de juridiction du Pape.

Pour mieux faire comprendre cet argu-ment, je fais remarquer que si les évêques dio-

Mgr Fellay, l’actuel supérieur général de la Fraternité Saint Pie X

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césains ou métropolitains sont juges dansl’Eglise c’est parce qu’ils ont reçu du Pape undiocèse ou archidiocèse à gouverner. Instituerdes tribunaux qui se substituent aux tribunauxdiocésains indépendamment d’une autorisa-tion du juge suprême, le Pape, équivaut à s’at-tribuer l’autorité de l’évêque diocésain: “dansl’Eglise (c’est un dogme de foi) le Pape a laplénitude de la juridiction: il n’existe pas de ju-ridiction autre que la sienne; tout acte juridic-tionnel, à quelque niveau que ce soit, n’estqu’une partie du tout qui est exercé en son nomet, en dernière analyse, au nom de Jésus-Christqui l’a [la juridiction] lui a donnée (au Pape);elle [cette partie] doit s’exercer en harmonieavec le tout et de la façon établie. C’est de Dieuque vient l’autorité du Pape et par l’intermé-diaire de celui-ci, celle des évêques et, par cesderniers, celle des juges; ce pour quoi en der-nière analyse toute juridiction est papale” (O.Fedeli). Analogiquement, c’est au nom del’autorité publique que le juge porte les sen-tences civiles. Un tribunal et des sentencesportées par des privés - individuellement ouassociés entre eux - sont inconcevables et in-admissibles. Or c’est justement ce que fait laFraternité dans l’Eglise, comme le souligneOrlando Fedeli: “ni l’Ecriture ni le Magistèren’ont enseigné que des personnes privées peu-vent instituer une justice ad hoc...”.

Une instance. La Fraternité tente de justifiersa position en affirmant que la juridiction nevient pas du Pape (mais de la consécrationépiscopale). Pie XII réfute cette erreur

Les théologiens de la Fraternité pour-raient objecter à notre raisonnement que,bien que jouissant du primat de juridiction,ce pour quoi tous doivent être soumis auPape, il est possible de recevoir la juridictionsans passer par le Pape. C’est ce que sou-tient par exemple celui qui est à la fois l’ins-pirateur de la Commission canonique et l’unde ses trois membres (avec Mgr Tissier etl’abbé Laroche): l’abbé François Pivert. Il aen effet écrit: “plutôt que de dire que dansl’Eglise tout pouvoir dérive du pape, il se-rait plus vrai de dire que, dans l’Eglise,tout pouvoir doit être soumis au pape” (43).L’auteur de cette affirmation ne semble pas- du moins dans son article - se rendre biencompte de ce qu’il écrit, ni ne semble justi-fier sa position. Je me contenterai de prou-ver qu’elle est fausse.

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Les Pères du Concile de Trente discutè-rent longuement pour décider si le pouvoirde juridiction de l’évêque lui venait directe-ment de Dieu (par la consécration épiscopa-le) ou bien par l’intermédiaire du Pape.Dans le premier cas c’est l’abbé Pivert quiaurait raison (dans l’Eglise tout pouvoir dejuridiction ne dérive pas du Pape, même s’ildoit lui être soumis); dans le second aucontraire il aurait tort. Dans ma réponse àl’abbé Belmont j’ai déjà amplement traité dela question; j’y renvoie donc le lecteur (44).Pour qui se contente de cette étude, deux ci-tations suffiront, l’une en faveur de la thèsede Pivert, l’autre contre. En faveur, et à lasuite des gallicans en tous genres, il y a cequ’enseigne le Concile Vatican II (Lumengentium, n° 21): “La consécration épiscopale,en même temps que la charge de sanctifica-tion, confère aussi des charges d’enseigner etde gouverner, lesquelles cependant, de parleur nature, ne peuvent s’exercer que dans lacommunion hiérarchique avec le chef du col-lège et ses membres” (cf. aussi le can. 375 § 2du nouveau code). Le pouvoir de juridiction,malgré le primat, ne viendrait donc pas duPape, exactement comme le soutient l’abbéPivert! Mais contre sa position (et celle deVatican II) il existe de nombreux textes dumagistère ordinaire. Je n’en citerai qu’un,l’Encyclique Ad apostolorum principis, duPape Pie XII (29 juin 1958): “Car la juridic-tion ne parvient aux évêques que par l’in-termédiaire du Pontife Romain, commenous le disions dans Notre Encyclique‘Mystici Corporis’: ‘Les évêques... en ce quiconcerne leur propre diocèse, chacun en vraipasteur, fait paître et gouverne au nom duChrist le troupeau qui lui est assigné.Pourtant, dans leur gouvernement, ils ne sontpas pleinement indépendants, mais ils sontsoumis à l’autorité légitime du PontifeRomain, et s’ils jouissent du pouvoir ordi-naire de juridiction, ce pouvoir leur est im-médiatement communiqué par le SouverainPontife’. Nous avons rappelé cet enseigne-ment dans la Lettre encyclique à vous desti-née; ‘Ad Sinarum Gentem’: ‘Le pouvoir dejuridiction qui est conféré directement auSouverain Pontife par le droit divin, lesévêques le reçoivent du même droit, mais seu-lement à travers le successeur de saintPierre’...”. Par conséquent le Pape n’a passeulement le primat de juridiction dans lesens que personne ne peut user de la juridic-

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tion sans son consentement, mais il a le pri-mat de juridiction aussi dans le sens que toutpouvoir de juridiction dérive de lui. Car lePape (toute question de légitimité de Jean-Paul II mise à part) n’a jamais donné juridic-tion aux Evêques consacrés par MgrLefebvre, et puisque la juridiction del’Evêque ne peut passer que par le Pape, ils’ensuit que ces Evêques n’ont pas de juri-diction et encore moins, alors, la Com-mission canonique de la Fraternité Saint PieX. Aussi, s’attribuer une juridiction - commele fait la Commission canonique en question- équivaut à nier dans les faits le Primat et àaccomplir un acte schismatique.

Une autre instance. La Fraternité tente dejustifier sa position en affirmant que la juri-diction ne vient pas du Pape, mais de l’Eglise,par suppléance. Réfutation de cette thèse

Nous venons de démontrer que “lePontife Romain est la source de tout pouvoirde juridiction dans l’Eglise” (45). Mais ne pou-vons-nous pas trouver dans la doctrine de lajuridiction de suppléance une exception à ceprincipe? Toute juridiction - ordinaire ou dé-léguée - vient du Pontife Romain, d’accord;mais non la juridiction de suppléance quivient de l’Eglise: Ecclesia supplet! Et c’estjustement à la juridiction de suppléance quese réfère la Fraternité pour justifier ce pou-voir de juridiction qu’elle s’attribue.

Nous avons vu dans quelles limites etdans quel sens on peut faire appel à la juri-diction de suppléance dans la situation ac-tuelle de l’Eglise, en reprenant un excellentarticle de l’abbé Belmont. Dans le can. 209(nouveau code, can. 144), le code de droitcanon prévoit explicitement la suppléancede juridiction dans les cas où sont probablesl’erreur commune et le doute positif, aux-quels on peut ajouter celui du danger demort (can. 882; nouveau code, can 976).“Ainsi, dans tout le code de droit canonique,deux canons seulement traitent de la juridic-tion de suppléance” – comme le reconnaît unprêtre de la Fraternité; “la juridiction desuppléance nous place dans une situation trèsparticulière: le prêtre auquel le fidèle s’adres-se ne jouit pas de la juridiction ordinaire[dans notre cas il n’y a même pas le doutepositif et probable qu’il y ait cette juridic-tion, n.d.r.]. L’acte sacramentel alors posé estpourtant licite, soit parce que le fidèle ne

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connaît pas la situation du ministre: c’est l’er-reur commune; soit parce qu’il a un besoinurgent et impérieux du sacrement: c’est lepéril de mort” En admettant que l’erreurcommune ne subsiste pas normalement dansnotre cas (“les gens qui s’adressent habituel-lement à nous savent que les évêques nous re-fusent tout pouvoir”) il ne nous reste alorsque le danger de mort (46). Mais aucunprêtre traditionaliste ne limite son ministèreaux salles de réanimation! Mgr Lefebvre in-voquait alors, nous l’avons vu, le danger demort spirituelle dans lequel se trouvent tousles fidèles du fait du modernisme. Que la si-tuation actuelle justifie le ministère sacerdo-tal sans juridiction, nous sommes parfaite-ment d’accord; mais que l’on puisse se basersur le droit canonique pour légitimer ce mi-nistère, que ce soit en extrapolant totale-ment le can. 882 (danger de mort... spirituel-le) ou que ce soit en invoquant le can. 20 (47),nous semble absolument infondé! Et puisque dire lorsque la suppléance est invoquéenon plus pour rendre licites (ou même va-lides) des actes sacramentaux mais pourremplacer le pouvoir législatif ou judiciairede l’Eglise, considéré comme non fiable?C’est à raison que Fedeli (op. cit.) objecte:“si l’on applique le critère mis en avant pourcréer les commissions, il n’y aurait en pra-tique aucun organisme de gouvernementdans l’Eglise qui soit légitime et qui ne doiveêtre suppléé, il faudrait aller jusqu’à rempla-cer l’Eglise elle-même. Où va-t-on?”; “si cela[l’état de nécessité dans lequel se trouventles fidèles] nous donne le droit de se consti-tuer comme alternative d’un juge valide enassumant une autorité supplétoire, je ne voispas comment nous ne pourrions pas égale-ment, et à plus forte raison, assumer tous lesorganes de gouvernement, spécialement litur-giques et doctrinaux, puisque dans ce cas lanécessité et le droit en justice à être sûrs inclutnon seulement les personnes qui ont des pro-blèmes matrimoniaux, mais toute l’Eglise etl’humanité qui a le droit de connaître la vraiedoctrine catholique, doctrine qui n’est pasprofessée par cette autorité que nous recon-naissons cependant comme telle. Les nullités[de mariage] ne sont qu’un aspect partiel duproblème. Quantité de droits en justice etpour de nombreuses personnes demandent àêtre protégés de l’erreur, non seulement per-sonnalistes, mais dans tous les domaines;mais de là à se sentir appelé et investi d’un

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pouvoir judiciaire pour satisfaire et résoudrece vide réel” il s’en faut!

Mais cette critique de la possibilité d’ap-pliquer la juridiction de suppléance pour lé-gitimer la Commission canonique de laFraternité peut être soutenue par un argu-ment plus radical. Quel est en effet la véri-table signification du terme Ecclesia supplet,l’Eglise supplée? Voici comment Mgr Tissierde Mallerais explique cet adage juridiquedans sa conférence du 10 mars 1991: “il s’agitde suppléer au défaut de juridiction du prêtreou de l’évêque, Ecclesia supplet. Ce ne serani le pape, ni la hiérarchie diocésaine quidonnera le troupeau, mais ce sera l’Église,Notre Seigneur Jésus-Christ, comme tête deson corps mystique qui va sanctionner, qui vadéclarer en somme le cas de nécessité des fi-dèles” (op. cit., p. 100). Et encore “c’est lecas où l’Église va directement conférer la ju-ridiction au prêtre, sans passer par les diffé-rents degrés de la hiérarchie; ce sera le corpsmystique de Notre Seigneur, Notre Seigneurlui-même en tant que chef de son Église, quiva donner dans des cas particuliers juridic-tion aux prêtres”; et après avoir cité les troiscas prévus par le code (erreur commune,doute positif et danger de mort) l’évêque dela Fraternité reprend: “dans ce cas l’Égliseouvre toutes grandes les portes de sa miséri-corde et donne juridiction au prêtre. C’estl’Église elle-même, sans passer par la hiérar-chie” (op. cit., p. 95). Selon le président de laCommission canonique l’“Eglise”, qui danscertains cas particuliers accorde la juridic-tion au prêtre qui en est dépourvu, est tota-lement distincte de la Hiérarchie en tant quetelle, et doit être identifiée et avec le Corpsmystique du Christ (Notre Seigneur uni àtous les fidèles) et avec le Christ Chef del’Eglise. Cette interprétation du terme“Eglise” employé par le code de droit canonest complètement fausse (48).

A propos de la juridiction de suppléance,le cardinal Staffa écrit, par exemple, dansl’Enciclopedia Cattolica: le canon 209 élimi-ne en effet toute incertitude [sur la possibilitéd’une suppléance], en déclarant que l’Eglise(c’est-à-dire le Législateur Suprême) sup-plée la juridiction, tant pour le for externeque pour le for interne: a) dans le cas d’er-reur commune; b) dans le doute positif etprobable tant de droit que de fait” (49). Lecardinal Palazzini ne s’exprime pas différem-ment: la juridiction de suppléance, écrit-il,

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“est la juridiction que l’on possède non pasen revêtant une charge, ni n’est conférée pardélégation du Supérieur, mais est donnéepar le droit même, c’est-à-dire par l’Egliseet, par elle, par le Législateur ecclésiastiqueSuprême au moment même où elle s’exerce(ad modus actus) pour le bien des âmes, quiautrement, sans qu’il y aille de leur faute, ensubiraient un préjudice” (50). Aussi lorsque lecode attribue la juridiction in abstracto [dansl’abstrait] à l’Eglise, in concreto [concrète-ment] il l’attribue au Législateur ecclésias-tique Suprême, c’est-à-dire au Pape. Et ceciest logique, étant donné que les dispositionsdu code (du moins celui du droit ecclésias-tique) n’ont de valeur qu’en tant que pro-mulguées justement par le LégislateurSuprême, le Pape! La juridiction de sup-pléance dont parle le code n’a par consé-quent rien à voir avec la “suppléance” ima-ginée et décrite par Mgr Tissier deMallerais, lequel lui donne comme caracté-ristique particulière le fait d’opérer “sanspasser par la hiérarchie”, et donc pas nonplus par le Pape. La raison pour laquelleMgr Tissier s’obstine à vouloir nier au Paped’être la source de la juridiction de sup-pléance revendiquée par la Fraternité estévidente: c’est que Jean-Paul II, reconnucomme Pape par Ecône, leur refuse toute ju-ridiction, comme l’admet Mgr Tissier lui-même. Si par conséquent c’est le Pape quiconcède la juridiction de suppléance, mêmesi pour ce faire il utilise le droit par lui-même promulgué, on ne peut certainementpas prétendre que Jean-Paul II concède à laFraternité Saint Pie X excommuniée par sespropres soins, les pouvoirs aussi exhorbi-tants qu’il leur refuse explicitement parailleurs (51). Voilà donc réfutée aussi cetteinstance de la Fraternité: les prêtres de laFraternité ne jouissent pas de cette juridic-tion de suppléance que leur attribuent MgrTissier de Mallerais et l’abbé Pivert (52).

Une dernière possibilité: la juridiction pour-rait-elle venir des fidèles?

Si la juridiction que la Fraternité prétendposséder ne vient pas d’en haut (Christ, Eglise,Pape), on pourrait émettre l’hypothèse qu’elletire son origine du bas, c’est-à-dire des fidèles.Si la Fraternité ne l’affirme pas explicitement,les phrases malheureuses le laissant croire nemanquent pas, comme le reconnaît honnête-

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ment un prêtre de cette même Fraternité:“dans sa lettre circulaire du 30 juin 1994 (53)l’abbé Berger mettait justement le doigt sur cetteimpossibilité: ‘la thèse qui fait autorité dans laFraternité Sacerdotale Saint Pie X est celle deMgr Tissier, exprimée dans sa conférence àParis en mars 1991… Juridiction de suppléan-ce, où, finalement, c’est la demande des fidèlesqui nous donnent (sic) juridiction, au cas parcas… Très gênante par son côté démocratique,je vois mal comment la concilier avec la structu-re hiérarchique de l’Église, où l’apostolat est né-cessairement fondé sur la mission qui ne peutvenir que d’en haut’. Ce rappel n’est pas inutile.(…) Il est clair que la juridiction de suppléancene tire pas son origine du fidèle. Dans l’allocu-tion mentionnée par notre ancien confrère [au-trement dit l’abbé Berger, qui a quitté laFraternité Saint Pie X et accepté Vatican II,n.d.r.] Mgr Tissier de Mallerais usait donc d’ex-pressions impropres lorsqu’il affirmait: ‘elle estune juridiction qui dépend essentiellement desfidèles et non pas du prêtre’ et ‘on peut dire quevous ‘donnez’ au prêtre la juridiction nécessai-re” (54). Sodalitium (n° 26, déc. 1991) avait luiaussi déjà dénoncé ces “expressions im-propres” dans un article (que j’ai déjà signalé)au titre significatif, “L’autorité de l’évêque:vient-elle par la médiation du Pape ou par celledes fidèles?” Il me semble opportun de repor-ter telle quelle une partie de cet article qui rap-portait des expressions de Mgr Lefebvre enco-re plus impropres que celles de Mgr Tissier:“lorsqu’en juin 1988 Mgr Lefebvre consacraquatre évêques sans mandat romain, il viola lapremière condition de licéité (déclarer queJean-Paul II n’est pas véritablement Pape) maisnon la seconde: il n’attribua aucune juridictionordinaire à ses Evêques.

“Pourtant la lecture de trois documentsposthumes de Mgr Lefebvre publiés dans‘Fideliter’ (n° 82, juillet-août 1991, pp. 13-17)nous a laissés stupéfaits et effrayés.

“Il s’agit d’une lettre à de Mgr CastroMayer du 4 décembre 1990 et d’une autre auPère Rifan du 20 février 1991, avec une ‘Noteà propos du nouvel évêque futur successeurde Mgr de Castro Mayer’.

Mgr Lefebvre y précise les pouvoirs dontjouira le futur consacré (Mgr Licinio Rangel,effectivement consacré à Campos le 28 juillet1991).

“Voici ce qu’écrit Mgr Lefebvre: ‘...le casdu diocèse de Campos est plus simple, car ils’agit de la majorité des prêtres diocésains et

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des fidèles qui, avec le conseil de l’ancienévêque, désignent le successeur et demandentà des évêques catholiques de le consacrer...C’est bien de cette manière que la successiondes évêques s’est réalisée pendant les pre-miers siècles, en union avec Rome, commenous le sommes nous aussi, en union avec laRome catholique et non avec la Rome mo-derniste’ (pp. 13-14).

“Peuple et clergé désignent l’Evêque ettout va pour le mieux. Mais lui donnent-ilsaussi autorité et juridiction?

“Un soupçon nous vient: ‘C’est le clergé etle peuple fidèle de Campos qui se donnent unsuccesseur des Apôtres, un évêque catholiqueet romain, puisqu’ils ne peuvent plus en avoirpar la Rome moderniste’ (p. 14). Il y a déjà àCampos un ‘évêque’ nommé par le ‘pape’ etintronisé, à l’époque, par Mgr de CastroMayer. Le nouveau ‘successeur des Apôtres’reçoit-il seulement le pouvoir d’ordre (pourordonner des prêtres, confirmer, etc...) ou re-çoit-il aussi le pouvoir de juridiction? Lepouvoir d’ordre, ce sont les Evêques qui ledonnent: que donne alors ‘le clergé et les fi-dèles de Campos’? L’autorité?

“Eh bien! oui, l’autorité. Mgr Lefebvreparle ‘d’autorité épiscopale’ (p. 15). Le nou-vel évêque n’est pas évêque résidentiel (p. 16)mais il a une juridiction qui vient... du clergéet des fidèles: ‘il n’a pas d’autre titre de juri-diction [il en a donc un! n.d.r.] que celui qui

Mgr Licinio Rangel: à Campos, c’est lui qui annule les mariages

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lui vient de l’appel des prêtres et des fidèles...qui lui ont demandé d’accepter l’épiscopat’(p. 16). S’agit-il d’une simple autorité de fait,du simple pouvoir de donner les sacrementset de guider les âmes, inclus dans le pouvoird’ordre? On peut en douter devant l’insistan-ce de Mgr Lefebvre (p. 17) à parler ‘d’autori-té juridictionnelle de l’Evêque ne lui venantpas d’une nomination romaine, mais de lanécessité du salut des âmes’. A ce “successeurdes Apôtres, fidèles et prêtres doivent “facili-ter l’exercice de l’autorité par une généreuseobéissance” (p. 17).

“Enfin vient une affirmation plus explici-te: ‘La juridiction de l’évêque n’étant pas ter-ritoriale, mais personnelle, et ayant poursource le devoir pour les fidèles de sauverleur âme, si un groupe de fidèles dans les dio-cèses voisins fait appel à l’évêque pour avoirun prêtre, ce groupe donne par le fait mêmepouvoir à l’évêque de veiller à la transmissionde la foi et de la grâce dans ce groupe, parl’intermédiaire du prêtre qu’il envoie’ (p. 17).

“Un groupe de fidèles donne donc pou-voir, autorité, juridiction à l’Evêque. Faireune distinction entre juridiction territoriale etpersonnelle n’enlève rien à la gravité de l’af-firmation: un ordinaire militaire, parexemple, (c’est-à-dire un évêque ayant juri-diction personnelle sur tous les militairesd’une nation), et un évêque résidentiel avecjuridiction sur les résidents du diocèse setrouvent dans le même rapport, en ce quiconcerne leur juridiction, vis à vis du Papequi la leur donne.” (Sodalitium n° 26, pp. 5-6-7-) A cette thèse (la juridiction vient dupeuple) je ne peux que répondre par cet ar-gument utilisé déjà il y a neuf ans: “Nul nepeut donner ce qu’il n’a pas: si le peuple (oul’Eglise distincte du Pape) donne le pouvoir,c’est parce que le peuple ou l’Eglise est l’au-torité. C’est là la thèse janséniste duConciliabule de Pitoïe, thèse selon laquelle lepouvoir est donné par Dieu à l’Eglise (oucommunauté des fidèles) et donné par elleaux Pasteurs qui sont ministres de l’Eglisepour le salut des âmes. Cette thèse a étécondamnée comme hérétique par Pie VI(DS 2603)” (ibidem p. 6).

La solution “juridiction par les fidèles”s’avère donc encore pire que les solutionsprécédentes; je ne crois pas qu’elle soit réel-lement soutenue par la Fraternité: ce qui estécrit dans ce paragraphe suffit à faire éviterla tentation de suivre cette route dangereuse.

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Conséquences pratiques: de nombreuxfidèles de la Fraternité vivront dans unecontinuelle incertitude sur l’état de leur âme

Ce que nous avons écrit jusqu’ici suffitdéjà amplement pour justifier la thèse de ceparagraphe: de nombreux fidèles de laFraternité vivront dans une continuelle incer-titude sur l’état - et sur le salut - de leur âme.Nous l’avons démontré en effet, la Fra-ternité s’est déjà structurée et continue tou-jours davantage à se structurer, de fait,comme une Eglise indépendante qui doitsuppléer et supplanter l’Eglise “officielle”(reconnue toutefois comme Eglise catho-lique authentique). Dans la conscience desfidèles qui sont fiers - à juste titre - de dé-fendre le dogme “hors de l’Eglise point desalut”, la crainte d’adhérer à une structureschismatique ne peut que provoquer untrouble continuel. Et de fait certains, scan-dalisés par la découverte de l’existence deces Tribunaux sinon secrets du moins réser-vés, ont retiré leur confiance à la Fraternitépour suivre, hélas, les “autorités” fidèles àVatican II. Le problème de conscience quece développement de la position de laFraternité pose aux fidèles de Mgr Lefebvreest aggravé du fait que le trouble ne dérivepas seulement ni tant d’une doctrine pure-ment abstraite, peut-être au-delà de la capa-cité de compréhension des fidèles, mais pri-vée de conséquences pratiques, que d’uneprise de position qui implique jusqu’à la va-lidité des sacrements.

Si un simple prêtre de la Fraternité admi-nistre la Confirmation en se basant sur les“pouvoirs” concédés par les “Ordonnances”,par exemple, le sacrement est-il valide? Leconfirmé et sa famille peuvent légitimementse le demander. Il y a plus. Un religieux, unereligieuse, un sous-diacre, “sécularisés” et dis-pensés de leurs vœux par un “décret” del’évêque pour les religieux de la Fraternité, oupar Mgr Fellay, sont-ils vraiment dégagés deleurs vœux devant Dieu? Par la suite un éven-tuel mariage par exemple serait-il bénit par leSeigneur ou s’agirait-il d’un concubinage sa-crilège? Mais le cas le plus grave et le pluscourant est certainement celui des annulationsde mariage “décrétées” par la Commission ca-nonique de la Fraternité Saint Pie X...

Il s’agit, nous l’admettons, d’un problè-me pastoral extrêmement grave qui ne nouslaisse pas indifférents et dont la solution est

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difficile - sinon impossible. Les critiques queformule Mgr Tissier de Mallerais aux nou-veaux principes théologiques et canoniquesaccueillis suite à Vatican II, nous les faisonsnôtres, nous les partageons pleinement.Notre position théologique ne fait qu’aggra-ver, s’il était possible, les conséquences dé-duites par Mgr Tissier de son analyse (cf.tout le premier chapitre de l’étude publiéedans Cor unum) de la nouvelle doctrine ma-trimoniale personnaliste condamnée sousPie XII et devenue doctrine “officielle” sousJean-Paul II (55). Selon Mgr Tissier, qui re-connaît Jean-Paul II, les sentences de sesTribunaux “ne peuvent être considéréescomme nulles ipso facto ni comme validessans examen”, et sur le plan pratique les fi-dèles sont empêchés “d’aller à un tribunalnovus ordo de crainte que la sentence ne soitnulle” (Cor unum, cit. p. 44, règles pratiques1 et 2). Pour nous qui ne reconnaissons pasl’autorité de Jean-Paul II, l’impossibilité derecourir à ses tribunaux n’est pas seulementpratique, elle est aussi une question de prin-cipe: non seulement leurs sentences sont cer-tainement nulles, mais le recours à ces tribu-naux comporterait une reconnaissance defait de l’autorité en question, reconnaissancequ’à la lumière de la foi nous considéronscomme inadmissible (56). Nous nous rendonsbien compte de toutes les graves difficultéspastorales qu’implique notre position pourles fidèles dont le mariage est effectivementou douteusement nul, et qui n’ont pas lesmoyens de le démontrer légalement (57),mais la solution adoptée à partir d’une cer-taine période (58) par la Fraternité Saint PieX pour obvier à ce grave inconvénient noussemble - comme nous venons de le démon-trer - absolument infondée et illusoire.

Ce que nous venons d’affirmer peut sem-bler dur au lecteur: mais les citations qui sui-vent l’aideront à accepter la triste réalité,car, sans s’en rendre compte, les autoritésmêmes de la Fraternité confirment notreconclusion.

Mgr Tissier de Mallerais pense, en effet,démontrer la licéité de ses tribunaux en par-tant du droit qu’ont les fidèles de savoir aveccertitude si leur propre mariage est, oui ounon, validement célébré: les fidèles, écrit-il,“ont droit en justice à être sûrs de la validitédu sacrement reçu une seconde fois et donc dela validité de la sentence de nullité… (…)donc (...), dans cette situation, les évêques fi-

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dèles (Dom Lininio à Campos) et notreCommission canonique (…) ont les pouvoirsde suppléance pour juger des causes matrimo-niales” (Cor unum, cit. II, 4, p. 41). Si ces pa-roles ont un sens, les sentences des “tribu-naux traditionalistes” sont valides parce qu’iln’y a que cette façon pour les fidèles d’avoirla certitude de la nullité de leur premier ma-riage. Or Mgr Tissier se dément lui-même,enlevant aux sentences en question toutecertitude, et faisant ainsi retomber le fidèleplein de doute dans les plus grandes an-goisses et perplexités sur l’état de son âme:“enfin - écrit le président de la commissioncanonique - nos sentences, comme tous nosactes de juridiction supplétoire, et comme lessacres épiscopaux eux-mêmes de 1988, 1991,etc. (59) devront être confirmés ultérieure-ment par le Saint-Siège” (Cor unum, IV, 6, p.43). Si le Saint-Siège (60), ne confirme pasdans le futur les sentences portées par laFraternité, qu’adviendra-t-il? Il adviendraque toutes ces sentences seront à considérercomme nulles et non avenues, et ce, dès ledébut. Aussi le premier mariage étant tou-jours demeuré valide, les noces éventuelle-ment célébrées ensuite seront nulles et nonavenues dès le début ! Or étant donné quecette hypothèse ne peut être exclue, puisqueMgr Tissier lui-même l’envisage, et parconséquent la croit possible, on peut en dé-duire que jusqu’ici tous les fidèles qui ontreçu l’annulation de mariage par les tribu-naux de la Fraternité ignorent - la Fraternitéelle-même l’admet - si cette annulation estvalide ou non. Ils ignorent donc si ce sont lespremières ou les secondes noces qui sont va-lides, et si la personne avec laquelle ils viventest leur conjoint légitime ou un amant, et s’ilssont donc en règle ou pas devant Dieu. Il y aplus. Puisque Mgr Tissier lui-même soutientque si la juridiction est accordée aux tribu-naux de la Fraternité c’est parce qu’eux seulsdonneraient aux fidèles cette certitude à la-quelle le fidèle a droit, et ayant constaté,selon l’aveu même de Mgr Tissier, qu’iln’existe aucune certitude jusqu’à déclarationultérieure du Saint-Siège, il faut en déduirequ’en aucun cas, les tribunaux de laFraternité n’ont de juridiction, et que leurssentences ne sont pas seulement douteuses,mais nulles. Aussi les fidèles ayant contractéun nouveau mariage en se basant sur la vali-dité de ces sentences seraient en réalitéconcubins, et non conjoints légitimes.

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Conséquences pratiques: quel est le devoir desfidèles et des membres de la Fraternité? Unappel de Sodalitium à l’unité dans la vérité

La grave conclusion du chapitre précé-dent ainsi que de tout notre écrit devraitposer à nos lecteurs, fidèles ou membres dela Fraternité, un autre cas de conscience:puis-je encore soutenir la Fraternité SaintPie X si vraiment elle continue à se consti-tuer comme une Eglise indépendante et sielle arrive au point d’administrer à sespropres fidèles des sacrements (comme lemariage) qui peuvent être invalides et doncsacrilèges? Un fidèle peut-il encore suivreavec confiance des guides qui errent defaçon aussi grave? Des prêtres - même endésaccord avec leurs propres supérieurs -peuvent-ils être complices, ne serait-ce quepar leur silence, d’une doctrine et d’unepraxis aux conséquences si importantes?

Si déjà en 1985 les membres de l’InstitutMater Boni Consilii quittaient la FraternitéSaint Pie X, c’est qu’ils considéraient que l’onne pouvait en conscience, soutenir plus loinl’œuvre de Mgr Lefebvre. Cette décision noussembla alors valide et nous le semble encore,abstraction faite de la question que nous ve-nons de traiter dans ce dossier. Mais la créa-tion de la “Commission canonique SaintCharles Borromée” en 1991 est chose telle-ment grave que ce problème est à posermême à qui ne considéra pas opportun denous suivre en 1985. Et en effet nombreuxsont les prêtres à avoir abandonné laFraternité Saint Pie X ne serait-ce que pourne pas avaliser le schisme de fait, réalisé avecla création de cette Commission, véritableembryon d’une nouvelle Eglise. Nous savons -il est vrai - que de nombreux fidèles ignorenttout de l’institution ou de la nature de ces tri-bunaux; que beaucoup de prêtres et demembres de la Fraternité ne sont pas d’accordavec cette institution; que de fait, dans cer-tains districts, parmi lesquels probablementl’Italie, les “tribunaux” sont ignorés et demeu-rent inutilisés. Il demeure cependant que cestribunaux, et la doctrine qui prétend les justi-fier, ne sont pas une initiative personnelle etl’opinion privée de quelques membres de laFraternité, mais sont respectivement un orga-ne (tout ignoré et peu connu du public qu’ilsoit) et un point de doctrine officiel de laFraternité. Il nous semble donc pouvoirconclure que ne plus soutenir la Fraternité

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Saint Pie X est objectivement une obligationen conscience pour ceux du moins qui sont aucourant de cette triste question (sauf bonnefoi des individus connue de Dieu seul).

Toutefois, n’y aurait-il pas un moyend’éviter une conclusion aussi amère et quisemble ne pas tenir compte du bien indé-niable que ladite Fraternité - qui rassemblela quasi totalité des catholiques demeurés fi-dèles à la Tradition - réalise un peu partoutsur la terre? Devons-nous vraiment aban-donner la Fraternité à son destin?

Il me semble que, pour pouvoir continuerà accorder son soutien à la Fraternité SaintPie X à cause du bien qu’elle peut encorefaire dans le futur, il est nécessaire d’obtenirde ses responsables une remise en questionde sa position doctrinale. C’est-à-dire que laFraternité Saint Pie X devrait, tout d’abord,réexaminer et revoir sa position sur la juri-diction supléée et - après un sérieux examende la question- en arriver à la suppression dela Commission canonique Saint CharlesBorromée, ou du moins à sa transformationde tribunal ecclésiastique en simple organeconsultatif sur les questions morales et cano-niques, ainsi qu’à la révision des “Ordon-nances” de 1997 (et de 1980). Mais il seraitillusoire de corriger des effets erronés sansrevoir simultanément la cause de ces effets.La longue introduction historique dont nousavons fait précéder l’examen de la doctrinediffusée dans la Fraternité Saint Pie X depuis1991, et qui exposait l’évolution de la posi-tion de la Fraternité sur le problème de la ju-ridiction, avait justement pour but de fairecomprendre au lecteur comment les dévia-tions que l’on rencontre actuellement dansladite Fraternité ont leurs racines dans la po-sition que Mgr Lefebvre a pensé devoiradopter face au “problème de l’autorité” (ou“du Pape”) du moins depuis 1979. Seule uneposition claire et théologiquement correctesur l’autorité du Concile, de Paul VI et deJean-Paul II peut permettre ensuite toutesces applications aux cas particuliers que lacrise actuelle pose aux catholiques fidèles.

Mgr Lefebvre, il est vrai, a toujours refu-sé la solution sédévacantiste, et bien sûrnous ne pouvons pas soutenir que dans cerefus ne soit inclus également le refus de lathèse de Cassiciacum élaborée par le PèreGuérard des Lauriers o.p., le théologien leplus prestigieux qui ait pris - et dès le début -la défense de la Tradition catholique. La

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marginalisation, puis la “diabolisation”,enfin l’effacement même de la mémoire duPère Guérard des Lauriers, auteur du Brefexamen critique du novus ordo Missæ attri-bué aux Cardinaux Ottaviani et Baci qui ysouscrivirent, priva Mgr Lefebvre et saFraternité d’un guide, sûr et faisant autorité,pour les choix doctrinaux et théologiquesqui s’imposaient inéluctablement.

Hélas, la position du Père Guérard fut re-fusée pratiquement sans examen, et assimi-lée au sédévacantisme complet duquel aucontraire le Père Guérard s’est toujours dis-tingué. Certains des motifs pour lesquels laFraternité et Mgr Lefebvre ont refusé le sé-dévacantisme, sont pleinement partagés parnotre position: absence de preuve sur l’héré-sie formelle de Jean-Paul II, impraticabilitédes “voies” classiques de l’hypothèse duPape hérétique et de la Bulle de Paul IVpour démontrer la vacance du Siège, nécessi-té d’une continuité de l’Eglise, de la hiérar-chie et des électeurs d’un conclave (les cardi-naux), refus des “conclaves” convoqués pardes personnes privées… D’autre part laThèse de Cassiciacum partage avec le sédé-vacantisme ses positions essentielles: Jean-Paul II ne peut jouir de l’autorité pontificale,il n’est pas divinement assisté, on ne peutêtre en communion avec lui (entre autres aucanon de la Messe), vis-à-vis de lui le problè-me de l’obéissance et de l’infaillibilité duPape ne se pose pas (vérité de foi toutesdeux vigoureusement défendues dans laThèse et généralement aussi dans le sédéva-cantisme, au contraire de la Fraternité). Sinous avons embrassé la Thèse, ce n’est pasparce que ce serait plus commode ou parcequ’elle pourrait être un point d’union de tousles anti-modernistes; c’est seulement parcequ’elle est vraie. Toutefois, à notre avis, cettethèse a souvent été considérée comme unfacteur de division (nous sommes accusés de“sédévacantisme” par les adeptes de MgrLefebvre et de “lefebvrisme” par les “sédé-vacantistes”!) alors qu’au contraire, commel’ont fait remarquer quelques rares observa-teurs (61) elle pourrait devenir un facteurpuissant d’unité entre nous, mettant fin àd’interminables et dangereuses divisions quine profitent qu’à nos ennemis, et affaiblis-sent nos forces en scandalisant les fidèles.

Nous invitons donc les personnes à lafois les plus compétentes et les mieux inten-tionnées des deux camps (sédévacantistes et

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disciples de Mgr Lefebvre) à prendre sérieu-sement en considération la Thèse dite deCassiciacum: c’est l’unique thèse sédévacan-tiste qui, d’une part, tienne devant les cri-tiques des adversaires, et de l’autre n’éludepas les objections soulevées par MgrLefebvre et les siens au sédévacantisme, enprésentant une solution satisfaisante etpropre à calmer leurs perplexités et leurscraintes. Pour les adeptes des deux positionsqui nous sont adverses, la Thèse serait aussiun puissant antidote à la tentation de créer,explicitement ou implicitement, une “petiteEglise” traditionaliste, car elle refuse toutaussi bien et pour les mêmes motivations les“conclaves” sédévacantistes que les “hiérar-chies de la Tradition” soutenues par laFraternité Saint Pie X. Une position intran-sigeante, donc, mais équilibrée, qui, seule,rend compte en même temps de l’incroyablesituation que nous vivons et des dogmes defoi (infaillibilité, primat, indéfectibilité,apostolicité, etc.) auquels nous devons croirepour rester catholiques. Puisse se réaliserenfin, du moins entre tous ceux qui ont pourpoint commun la lutte contre l’hérésie mo-derniste, l’unité dans la vérité et la charité!

Notes

1) Une stupeur toute relative. Des bruits couraientdéjà depuis un certain temps sur l’existence et l’activitéd’une Commission canonique de la Fraternité Saint PieX. En 1995 nous avions publié dans Sodalitium une Lettrecirculaire aux prêtres de la Fraternité Saint Pie X dans la-quelle l’abbé Berger, un prêtre qui quittait la Fraternité,dénonçait “le fait d’avoir établi un bureau parallèle pourles questions de mariage” jugeant “très grave” cette insti-tution: “la Fraternité Saint Pie X - écrivait-il - ne se consti-tue-t-elle pas là en Eglise parallèle? Autocéphale?” (n° 38,p. 71) Mais ni l’abbé Berger ni d’autres prêtres ayant quit-té la Fraternité pour des raisons analogues, n’avaient ja-mais fourni une documentation à l’appui, documentationqui puisse prouver la nature “légale”, et pas seulementconsultative de la Commission.

2) ABBÉ H. BELMONT, Les confirmations donnéespar des prêtres de la Fraternité Saint Pie X sont-elles va-lides? in Cahiers de Cassiciacum, n° 6, 1981, pp. 1-11.

3) Sur la question de l’autorité voir, par ex.: B.LUCIEN, La situation actuelle de l’autorité dans l’Eglise.La Thèse de Cassiciacum, Documents de catholicité,1985. L’auteur souligne, contre le volontarisme, que laquestion de l’obéissance est une conséquence de laquestion de l’autorité, mais n’en constitue pas l’essence(p. 37).

4) MGR LEFEBVRE, Lettre aux amis et bienfaiteurs,n° 9, oct. 1975.

5) P. PARENTE- A. PIOLANTI, Dizionario di teologiadommatica per i laici, Studium, Roma, 1943, p. 95, ru-brique ‘gerarchia’ [hiérarchie].

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6) “In errore communi aut in dubio positivo et pro-babili sive iuris sive facti, iurisdictionem supplet Ecclesiapro foro tum externo tum interno” (can. 209). Le nou-veau code a maintenu à la lettre la canon 209: “dansl’erreur commune de fait ou de droit, et pareillementdans le doute positif et probable de droit comme de fait,l’Eglise supplée au for externe comme au for interne lepouvoir de gouvernement exécutif” (can. 144 § 1) en ap-pliquant aussi le principe (§2) à l’administration des sa-crements de la confirmation (can. 883), de la pénitence(can. 966) et du mariage (can. 1111§1).

7) Pour cette argumentation, cf. M. LEFEBVRE, Lecoup de maître de Satan, Il Falco, Milano, 1978, pp. 107-108 (il s’agit d’un texte du 24 février 1977); et encore:Le Ministère Sacerdotal en période extraordinaire decrise grave, par un groupe de prêtres du Diocèse deCampos, dans Cor Unum, n. 16, octobre 1983, pp. 9-26.

8) Mgr Lefebvre et le Saint-Office, Itinéraires, mai1979, pp. 21-22.

9) Voir par exemple la demande plus que pertinen-te du cardinal Seper (“un fidèle peut-il mettre en doutela conformité avec la doctrine de la foi d’un rite sacra-mentel promulgué par le pasteur suprême”? - ibidem p.111) à laquelle Mgr Lefebvre initialement ne réponditpas. Devant l’insistance du Cardinal (“soutenez-vousqu’un fidèle catholique peut penser et affirmer qu’un ritesacramentel en particulier celui de la Messe, approuvé etpromulgué par le Souverain Pontife, puisse ne pas êtreconforme à la foi catholique ou ‘favens hæresim’?”, ibi-dem, p. 146) Mgr Lefebvre répondit de façon évasive:“ce rite en soi et par soi ne professe pas la foi catholiqueavec la même clarté que celui de l’ancien Ordo Missæ, ilpeut donc favoriser l’hérésie. Mais je ne sais pas à quil’attribuer, et je ne sais pas même si le Pape en est res-ponsable” (p. 146). Mgr Lefebvre, sachant que pour lafoi catholique un Pape ne peut promulguer un sacre-ment ou un rite de la messe ‘mauvais’, et pensant juste-ment cela du nouveau missel, fut contraint d’affirmer -frôlant le ridicule - ignorer si Paul VI était le respon-sable du nouveau missel, et ce, pour ne pas avoir logi-quement à soutenir ou que le nouveau missel est bon ouque Paul VI n’était pas Pape (tertium non datur)...

10) “Pour ce qui concerne la juridiction nous en ap-pelons aux circonstances extraordinaires prévues par leDroit et aux conditions d’extrême nécessité dans les-quelles se trouvent les âmes des fidèles” (ibidem, p. 121).

11) Ibidem, p. 112. Pour Seper la praxis de MgrLefebvre “induit à se demander si l’on ne se trouve pasdevant un mouvement schismatique”.

12) Ibidem, p. 144-163.13) Ibidem, pp. 159-160.14) C’est à dire de privation du Chef de l’Eglise.15) Et donc en ce qui regarde le pouvoir d’Ordre,

et non de Juridiction au for externe, pour les pouvoirslégislatif et judiciaire.

16) ...comme le soutenait le cardinal Seper! Lapraxis (à cette époque) de Mgr Lefebvre présupposait,pour être justifiée, la privation de l’Autorité...

17) H. BELMONT, op. cit., p. 9. 18) Ibidem, p. 1. 19) En 1980 nous faisions encore partie de la

Fraternité et nous reçumes, comme tous les autresmembres de cette société, le petit volume des“Ordonnances”...

20) Je rappelle ce qu’écrit Mgr Tissier:“Il est mêmeplus grave de dispenser d’un empêchement dirimant (cequi change la condition de la personne, laquelle d’inha-

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bile, devient habile à contracter), que de déclarer nul unmariage (ce qui ne change pas l’état de la personne, maisconstate un état déjà existant ab initio); c’est un pouvoirde juridiction déclaratif seulement. Si donc la suppléancenous donne pouvoir de dispenser, elle nous donne a for-tiori pouvoir de juger)”. L’argument est facile à renver-ser: s’il est évident que les annulations de mariage déci-dées par les “tribunaux” de la Fraternité sont invalides,à plus forte raison (a fortiori) seront invalides les dis-penses, bien plus graves, des empêchements dirimantsau mariage, dispenses considérées au contraire commelégitimes par Mgr Lefebvre depuis 1980.

21) Pour le texte du faux “mandat apostolique” luavant les consécrations épiscopales du 30 juin, cf.Fideliter, sept.-oct. 1988, n. 65, p. 11. Le canon 953(1013 du nouveau code) interdit une consécration épis-copale accomplie sans “mandat pontifical” ou “aposto-lique”, c’est à dire sans l’autorisation du Pape. Que le“mandat apostolique” - c’est-à-dire du Pape - ait étéécrit par Mgr Lefebvre en dit long sur l’identificationpratique que fait la Fraternité entre Mgr Lefebvre et lePape... Quelle idée se fait donc la Fraternité de l’Egliseromaine” (qui aurait autorisé les consécrations), une“Eglise romaine” qui serait opposée aux “autorités del’Eglise romaine” (qui interdisaient ces mêmes consé-crations sous peine d’excommunication)?

22) Cf. Sodalitium n° 16, et aussi F. RICOSSA, Lesconsécrations épiscopales dans la situation actuelle del’Eglise, in Sodalitium n° 44, juillet 1997, numéro spécial.

23) Lettre de Mgr Lefebvre “aux futurs évêques”du 29 août 1987, dans Fideliter, n. hors série des 29-30juin 1988.

24) Cité dans F. PIVERT, Des Sacres par MgrLefebvre... Un schisme?, Fideliter, avril 1988, p. 59.

25) “L’Eglise n’est pas le pape, et réciproquement”(F. Pivert, op. cit., p. 47). Bien sûr, l’Eglise n’est pas lePape, mais le Pape est le Chef visible de l’Eglise! Enparticulier, l’abbé Pivert, l’un des membres des Com-missions canoniques de la Fraternité, dans l’applicationdu principe canonique “Ecclesia supplet”, oublie quepar “Ecclesia” on entend le Législateur ecclésiastiqueSuprême, c’est-à-dire le Pape, qui peut accorder la juri-diction “a jure”, c’est-à-dire par une décision inscritedans le droit qu’il a promulgué. Par conséquent le prin-cipe “Ecclesia supplet” ne peut être invoqué s’il n’y apas de Pape ou lorsque le Pape refuse explicitementcette suppléance. Nous en reparlerons.

26) F. PIVERT, op. cit., pp. 28-30, 37-42 (sur le canon20), pp. 46-47 (sur la juridiction suppléée qui s’ensuit).

27) Sodalitium n° 26, déc. 1991, pp. 4-6: L’autoritéde l’évêque vient-elle du Pape ou des fidèles?; n° 33, oct.1993, pp. 51-52: Petite note sur la Fraternité Saint Pie X;n° 41, avril-mai 1996, pp. 58-59: Débat: Qui est l’évêquede Campos?

28) Les Actes ont été publiés aux EditionsFideliter. L’allocution de Mgr Tissier s’y trouve auxpages 93-114.

29) P. PARENTE, A. PIOLANTI, Dizionario di teolo-gia dommatica per i laici, Studium, Roma, 1943, p. 95,rubrique ‘Gerarchia’ [hiérarchie].

29 bis) Après le Concile Vatican II et les réformesqui ont suivi, le problème de l’indéfectibilité de l’Egliseest certainement le plus terrible qui se soit posé auxâmes des fidèles. Etant donné son importance, noustraiterons la question à part, nous réservant de l’abor-der prochainement. Pour le moment je soumets au lec-teur ce qu’écrivait très à propos sur ce sujet l’abbé

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Lucien (op. cit., p. 203): “même dans la crise, le Christdemeure avec son Eglise, et continue à la faire subsisterconformément à la nature qu’il lui a donnée en l’insti-tuant; cela, nous le croyons de Foi: c’est l’indéfectibilitéde l’Eglise. Cette affirmation, pour n’être pas purementverbale, doit avoir une portée concrète: comment, de fait,Jésus est-il encore actuellement avec son Eglise? Si l’onconsidère l’Eglise comme Corps Mystique, Jésus demeu-re aujourd’hui avec elle en maintenant vivant leTémoignage de la Foi et la sanctification par lesSacrements authentiques, ainsi que l’Oblation du véri-table Sacrifice. C’est ce que prouve l’existence de ceuxque l’on nomme ‘traditionalistes’. Mais comment,concrètement, Jésus est-il encore avec son Eglise considé-rée comme société humaine? A cette question, qui doitavoir une réponse, nous répondons: en maintenant enplace la structure hiérarchique visible pendant qu’il per-met la grande épreuve que constitue l’éclipse de l’autoritéet de ses fonctions surnaturelles. Cette permanence de lastructure hiérarchique constitue la pierre d’attente divine-ment posée du renouveau de l’Autorité; et elle assure lacontinuité matérielle de la succession hiérarchique, conti-nuité absolument requise par la note d’Apostolicité”.

30) Cf. l’article de l’abbé Sanborn in Sodalitium n.39, p. 35.

31) Voir la note 4. Il s’agit d’une idée qui revientsouvent chez Mgr Lefebvre: “nous sommes avec PaulVI, successeur de Pierre, remplissant son rôle; nous refu-sons de suivre Paul VI, successeur de Luther, Rousseau,Lamennais, etc.” (MGR LEFEBVRE, Le coup de maître deSatan, éd. Saint-Gabriel, Martigny, 1977, le texte cité,Réponses à diverses questions d’actualité, date du 24 fé-vrier 1977, pp. 43-44).

32) Sodalitium partage pleinement le jugementporté par les Ordonnances sur le nouveau code. Mais cejugement devrait avoir - comme conséquence logique etinéluctable - l’invalidité totale du nouveau code et laconstatation absolument certaine que Jean-Paul II n’apas l’autorité divinement assistée (il n’est pas Pape for-maliter). En effet, d’un côté, un code de lois qui “pèchegravement contre la finalité même de la loi” (qui est lebien commun) ne peut être valide et, d’autre part, une“autorité” qui n’assure pas le bien commun ne peut êtrelégitime: Mgr Tissier lui-même reconnaît, avec le PèreGuérard, que celui qui ne veut pas habituellement lebien de l’Eglise ne peut pas être Pape (Fideliter, n. 72,nov. déc., 1989, p. 7). En effet il est impossible qu’uneautorité authentique promulgue un code de droit canonqui pèche gravement contre la finalité même de la loi(Mgr Tissier) (sur l’infaillibilité des lois universelles del’Eglise, voir par exemple ABBÉ FRANCESCO PALADINO,Petrus es tu? Delacroix, 1999, pp. 143-148, un livre quenous avons abondamment critiqué - cf. ABBÉ FRAN-CESCO RICOSSA, L’Abbé Paladino et la Thèse de Cas-siciacum. Réponse au livre Petrus es tu? Centro LibrarioSodalitium, Verrua Savoia 1999 - mais qui, sur ce pointparticulier, se fondant sur des citations pertinentes, estabsolument irréfutable. Nous y renvoyons le lecteur).

32 bis) “La dispense est un acte de l’autorité compéten-te qui relève le sujet de l’obligation d’observer la loi dansdes cas particuliers. L’autorité compétente pour la dispenseest la même que celle qui a promulgué la loi, ou une autori-té supérieure” (F. ROBERTI ET P. PALAZZINI, Dizionario diTeologia morale, Studium, 1968, rubrique “dispensa”).

33) Sont réservés au Saint-Siège par exemple lesempêchements marimoniaux (can. 1040), la sanatio inradice (can.1141, Ordonnances, pp. 60-62), diverses dis-

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penses (Ordonnances, p. 37, p. 42: dispenses des OrdresSacrés, p. 44; l’indult de sécularisation pour les reli-gieux, réservé à un évêque de la Fraternité, p. 45, p. 47,etc.), l’absolution de nombreuses censures, touteschoses que la Fraternité attribue à ses propres autorités.

34) “Nomine Sedis Apostolicæ vel Sanctæ Sedis inhoc Codice veniunt non solum Romanus Pontifex, sedetiam (...) Congregationes, Tribunalia, Officia per quæidem Romanus Pontifex negotia Ecclesiæ expedire solet”canon 7 (voir les canons 360-361 du nouveau code).

35) Ce principe (de ne pas recourir à Rome) nevaut pas seulement pour les causes matrimoniales, maisest appliqué constamment par la Fraternité. Sont laissésau Pape - il est vrai - le privilège pétrinien et la dispensesur le mariage ratifié mais non consommé, mais avecpermission préalable du supérieur de district et contrôlede la commission canonique (Ordonnances, p. 38).

36) En contradiction avec ce qu’affirme Mgr Tissier:“Monsieur l’abbé Laguérie, curé – par suppléance – deSaint-Nicolas-du-Chardonnet, n’a pas de pouvoir de juri-diction sur les habitants du quartier, sur les habitants duVe arrondissement. Il a pouvoir sur les personnes, préci-sons: les familles et les fidèles qui fréquentent son église etqui lui demandent le secours de son ministère sacerdotal”(allocution du 10 mars 1991, op. cit., p. 101).

37) Cette contradiction a été signalée aussi parquelques membres de la Fraternité: “la juridiction desuppléance – écrit par exemple l’abbé Mercury – définiecomme un pouvoir accordé au cas par cas, a été qualifiéetrès justement de ‘personnelle’. Mgr Tissier de Malleraisa expliqué dans son allocution que ‘c’est une juridictionpersonnelle et non pas territoriale. Et cela est très impor-tant à saisir: vos prêtres ont juridiction sur vos personneset non pas sur un territoire. Les prêtres de tradition ontjuridiction sur chacun de leurs fidèles qui fréquententleur chapelle, leur église de tradition, leur prieuré ou leurcouvent de tradition et non pas sur un territoire détermi-né comme l’est par exemple le territoire d’une paroissse’[pp. 100-101]. Probablement abusés par les mots, cer-tains ont assimilé la juridiction de suppléance à celled’une prélature personnelle qui est évidemment de typeordinaire. (…) Cette restriction imposée par la définitionmême de la juridiction de suppléance pose évidemmentune grave difficulté sur le plan social. Car le pouvoir desprêtres de la Tradition qui concerne les personnes indivi-duellement prises ne semble pas s’étendre aux personnesmorales, comme une communauté par exemple.Concrètement, cela signifie que notre juridiction nes’exerce pas sur nos communautés comme sur un trou-peau. (…) Quand Mgr Lefebvre dit: ‘vos églises sont vosparoisses’ il faut l’entendre dans un sens analogique, etnon à strictement parler, comme si la juridiction de sup-pléance nous permettait de constituer des entités cano-niques à part entière. La création de structures de droitecclésiatique (…) appartient en propre à l’exercice dupouvoir ordinaire. Revendiquer un tel pouvoir, c’ests’exposer à l’accusation de schisme plus ou moins latent,parce que c’est s’arroger des prérogatives qui dépassentles limites d’un pouvoir extraordinaire accordé pour unepériode de crise” (H. MERCURY, L’œuvre de MgrLefebvre: une théologie de l’exception”, Edition de lapetite croix, août 1999, pp. 59-61). Remarquons que cesont les Ordonnances qui confondent juridiction de sup-pléance et prélature personnelle, en équiparant la “hié-rarchie de la Fraternité” à un ordinariat militaire (p. 7).

38) Voici comment cette objection est exposée parOrlando Fedeli: “une question: pourquoi ce prêtre, si

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c’est un prêtre fidèle, n’aurait-il pas la même autorité desuppléance que le prêtre supérieur de district? Les condi-tions seraient les mêmes; ce prêtre y aurait même davan-tage droit, s’il était un expert en questions canoniques ous’il s’était mieux renseigné. Si l’on admet l’argumentationet si l’on est conséquent, certains prêtres pourraient éga-lement se constituer pour suppléer l’autorité de la Rotequi dépend directement du Pape. Quelle autorité l’en em-pêchera? On a déjà peut-être, sans s’en rendre compte,ouvert la porte au subjectivisme; quand de sa propre ini-tiative, on a établi les nouvelles autorités de suppléance,la voie fut ouverte afin que tous ceux qui se considèrentcomme fidèles puissent organiser leur propre tribunalsupplétoire en suivant cet exemple et en s’appuyant surles mêmes arguments”. Et encore: “Enfin, pourquoiseule la Fraternité aurait-elle maintenant le droit d’insti-tuer un tribunal avec les pouvoirs de la Rote? Et celuiqui aurait donné à la Fraternité ce droit et ce pouvoir nele confèrerait-il pas aussi à d’autres? Qui a nommé lesmembres de la Commission canonique Saint CharlesBorromée leur donnant un droit et un pouvoir que seulun Pape peut donner? Les juges ecclésiastiques étant vi-caires du Pape, nous l’avons vu, ils parlent au nom duPape et émettent des sentences au nom du Pape; au nomde qui les juges de la Commission canonique SaintCharles Borromée profèrent-ils leurs sentences?”

39) Il faut reconnaître que Mgr Tissier refuse enprincipe cette thèse: “l’erreur par excès – déclara-t-ildans l’allocution du 10 mars 1991 – c’est dire: tous lesévêques ou presque ont apostasié la foi catholique, dumoins ils ne la prêchent plus, donc il n’y a plus de hiérar-chie légitime; il n’y a plus ni pape, ni évêques légitimesdans l’Église. Et donc la vraie hiérachie catholique, laseule, c’est Mgr Lefebvre, les quatres évêques, les supé-rieurs de district, les prieurs et leurs vicaires. Voilà! C’estla hiérarchie de l’Église!

C’est le clergé de Tradition dans cette organisationhiérarchique apparente. Il faudrait du reste qu’un desévêques soit élu pape, cela complèterait l’apparence hié-rarchique! C’est ce que certaines sectes n’ont pas hésité àfaire; elles se sont brisées sur cet écueil. C’est faux, biensûr, nous récusons cette analyse, ses conséquences” (p.104). Cependant, si la Fraternité Saint Pie X a toujoursrefusé le sédévacantisme (et a fortiori le conclavisme) enthéorie, dans la pratique elle s’est comportée non seule-ment comme si la hiérarchie de l’Eglise n’existait plus,mais aussi comme si elle avait le pouvoir de la rempla-cer. En ce sens la Fraternité Saint Pierre a raison d’écri-re: “Cette attitude présuppose un sédévacantisme pra-tique. (…) Il faudra bien que les autorités de la FraternitéSaint Pie X reconnaissent tout haut ce que d’aucuns (etnon des moindres!) reconnaissent tout bas – en cercleschoisis évidemment” (Du sacre épiscopal contre la volon-té du Pape, avec application aux sacres conférés le 30 juinpar Mgr Lefebvre, essai théologique collectif de membresde la Fraternité Saint Pierre sous la direction de M. l’abbéBisig, texte polycopié p. 23. Cité par Mercury, p. 39).C’est ce que disait Mgr Guérard des Lauriers quand ildéfinissait le Pape tel qu’il est reconnu par la Fraternitécomme un “mannequin de Pape” (Sodalitium n° 13).

40) Sodalitium n° 47, décembre 1998, p. 83. Voiraussi ce que Mgr Tissier écrivait à l’abbé Berger le 25septembre 1993, in Sodalitium n° 38, p. 70.

41) Sodalitium n° 50, juin-juillet 2000, pp. 40-41.42) Le jugement en première instance revient à

l’ordinaire du lieu (normalement l’évêque diocésain:can. 1572, can. 1419 n.c.). Le jugement en seconde ins-

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tance revient normalement au métropolite (can. 1594;can. 1438 n.c.) dont l’évêque est suffragant. Le juge-ment en troisième et dernière instance revient au Pape(can. 1597; can. 1442 n.c.): “le Souverain Pontife estjuge suprême dans toute l’orbe catholique, et il juge oupersonnellement ou par l’intermédiaire des tribunauxordinaires du Siège Apostolique ou bien par l’intermé-diaire de juges délégués par lui-même”.

43) F. PIVERT, Des évêques d’adoption dans Fi-deliter, n. 123, mai-juin 1998, pp. 13-17; la phrase citéese trouve à la pag. 16 de ce numéro de Fideliter dédié audixième anniversaire des consécrations épiscopalesfaites par Mgr Lefebvre et Mgr de Castro Mayer.”L’au-teur de cet article – écrit Fideliter- M. l’abbé FrançoisPivert, juriste, est membre de la Commission canoniquede la Fraternité Internationale (sic) Saint-Pie X”. La po-sition de l’abbé Pivert semble être celle de la FraternitéSaint Pie X, même si certains de ses membres ne l’ac-ceptent pas (cf. abbé Mercury, op. cit., pp. 32-32, 35-38).

44) F. RICOSSA, Les Consécrations épiscopales dansla situation actuelle de l’Eglise. Réponse à l’article del’abbé H. Belmont (Sodalitium n° 44, Centro LibrarioSodalitium, Verrua Savoia). L’abbé Belmont soutenaitinitialement la même thèse que l’abbé Pivert mais en dé-duisait une conclusion tout à fait opposée: si la juridic-tion vient à l’évêque de la consécration épiscopale, uneconsécration sans le consentement du Pape impliquealors l’attribution d’une juridiction sans soumission auPape, et par conséquent schisme. Par la suite l’abbéBelmont a abandonné cette position, tout en demeurantopposé encore doctrinalement aux consécrations.

45) Enciclopedia Cattolica, Cité du Vatican, 1953,vol. X, col. 18, rubrique Primato di San Pietro e delRomano Pontefice, par Mgr Antonio Piolanti.

46) H. MERCURY, op. cit., pp. 41-42.47) L’abbé Pivert, suivi par Mgr Tissier de Mallerais

(point III de son article publié par Cor unum) invoquentle can. 20 (nouveau code, can. 19) comme “base doctri-nale de nos pouvoirs supplétoires”. Le can. 20 servirait,en fait à étendre presque à l’infini les cas bien limités dejuridiction suppléée prévus par le code: “si sur une ma-tière déterminée manque une disposition de loi expressetant universelle que particulière ou une coutume, la cause,si elle n’est pas pénale, est à trancher en tenant compte deslois données pour des cas semblables, des principes géné-raux du droit appliqués avec une équité canonique de lajurisprudence et de la praxis de la Curie romaine, del’avis commun et constant des juristes” (n. can. 19). Peut-on s’appuyer sur ce canon pour instituer des tribunauxecclésiastiques non reconnus par Rome? C’est ce queprétend Mgr Tissier (Cor unum, p. 41, point III) en s’ap-

Le blason de MgrTissier de Mallerais,président de la com-

mission SaintCharles Borromée

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puyant a) sur les lieux parallèles et l’analogie légale, b)sur la jurisprudence de la Curie romaine, c) sur l’épikieet l’opinion des juristes. Pour ce qui est des “lieux paral-lèles” et de “l’analogie légale” Mgr Tissier invoque “lecas du recours impossible à l’évêque pour dispenser d’unempêchement dirimant de droit ecclésiastique: dans le‘danger de mort’ ou ‘quando omnia sunt parata ad nup-tias’, le curé ou le confesseur peuvent dispenser (can.1044-1045). Ce qui signifie que l’Eglise leur donne, parsuppléance, juridiction ad casum” (Cor unum, p. 41, III,2, a). Orlando Fedeli lui répond: “pour pouvoir appli-quer l’analogie légale, et pour que les cas soient réelle-ment parallèles, il faut qu’il y ait similitude de matière(…) entre la norme que l’on suppose contenue implicite-ment dans le Code et celle à laquelle on fait référence.Dans les canons 1044 et 1045 la dispense donnée parl’évêque est ordonnée directement et immédiatement àl’exercice de la ‘potestas sacra’ (dans le cas d’urgencepour recevoir la grâce sacramentelle et mourir en état degrâce ou contracter validement le sacrement, lorsqu’il estimpossible d’attendre sans grand inconvénient le retardcausé par le recours à l’autorité: ‘ad casum’, le législateur,usant de son pouvoir, donne la faculté nécessaire pouragir validement). Au contraire dans le cas des tribunaux,il s’agit d’un acte judiciaire de la ‘potestas regiminis’, dupouvoir de gouvernement dans lequel n’est pas impliquéedirectement et immédiatement la réception de la grâce sa-cramentelle ou l’exercice de la ‘potestas sacra’. Les per-sonnes impliquées dans un jugement canonique peuventêtre et demeurer en état de péché mortel, elles peuventmême rester célibataires ou changer d’état, et le juge peutêtre un laïc. Le procès dans un tribunal est un acte juri-dique sans connexion nécessaire avec le fait pour uneâme de recevoir la grâce de façon urgente pour la sauver,ou avec un sacrement; le code établit une suppléance or-donnée aux actes sacramentels: ‘potestas sacra’; suppléan-ce qui permet en faveur d’autrui, de mettre en acte unepuissance que le titulaire possédait déjà du moins radica-lement. Les actes propres de la ‘potestas regiminis’, degouvernement, sont très différents: ils ne sont pas directe-ment liés à l’exercice sacramentel, pas plus que ce pouvoirne s’acquiert sans qu’on ait été désigné comme capabled’agir au nom du Juge suprême; être ministre sacré n’ha-bilite pas à l’exercice du pouvoir judiciaire. L’exercice va-lide de ce pouvoir non sacramentel requiert, selon ledroit, une désignation par le seul qui le possède ipso jureen plénitude; de fait il y a des juges laïcs et leur pouvoir,par le fait qu’ils sont nommés juges, est exercé ipso jureau nom de celui qui les a nommés et dans les limites éta-blies par le droit (…). En agissant en juge, on ne met pasen acte une puissance que l’on possède habituellement,mais [on agit] par désignation, et seulement pas désigna-tion de celui qui est le seul à posséder la plénitude dupouvoir dans l’Eglise (...). Pour savoir si dans les actesd’un tribunal canonique on peut trouver une analogieavec cette suppléance que l’Eglise exerce dans les actesdont parlent les canons 1044-1045, il faut se faire guiderpar un véritable lieu parallèle: ce lieu parallèle, on le trou-ve dans ce qui est stipulé au canon 144 qui règle la sup-pléance dans l’exercice de la juridiction et qui ne prévoitaucune suppléance possible pour exercer le pouvoir légis-latif ou judiciaire. (...) En résumé: pas de lieu parallèle,légalement parlant, puisqu’il n’y a pas similitude de ma-tière (...); ainsi ce présumé lieu parallèle pour pouvoiragir en tant que tribunaux canoniques de suppléance estinapplicable, puisqu’on passe d’une suppléance pourl’exercice d’un pouvoir (potestas sacra) au for interne que

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l’on possède radicalement à une suppléance par analogiede l’exercice de la potestas regimini de gouvernement aufor externe laquelle ne peut se posséder d’aucune façonsans une désignation (...)” M. Fedeli oppose le même ar-gument à celui qui est tiré de la jurisprudence de laCurie Romaine (entre autres Cor unum se trompe dedate quand il cite un document d’interprétation ducode). Le dernier argument est celui qui se fonde surl’épikie et l’opinion des docteurs. L’inconséquence duraisonnement de Mgr Tissier saute aux yeux du premierlecteur venu: après avoir démontré en citant le PèreCappello que dans la situation actuelle, nous ne sommespas tenus à recourir “à des tribunaux modernistes” MgrTissier conclut abusivement “mais si cette obligationcesse, ne cesse pas l’obligation de recourir à quelque tri-bunal! (Cor unum, III, 2, c, p. 42). A condition, ajou-tons-nous, que cet autre tribunal existe réellement! Sansquoi nous ne sommes pas autorisés à créer des tribunauxillégaux n’en ayant pas l’autorité...

48) L’abbé Mercury, de la Fraternité Saint Pie X(op. cit., p. 44) le reconnaît lui aussi.

49) DINO STAFFA, rubrique Giurisdizione dans Enci-clopedia Cattolica, Cité du Vatican, 1951, vol. VI, col. 786.

50) F. ROBERTI ET P. PALAZZINI, Dizionario di teo-logia morale, Ed. Studium, Roma, 1968, vol. 1, p. 740.

51) Selon l’abbé Mercury le pouvoir de juridictionsuppléée “est donné tacitement par l’autorité légitime del’Église” (p. 49), même s’il nie qu’elle soit accordéedans le cas des “commissions canoniques”. Il n’ignorepas l’objection que l’on pourrait lui faire: il ne manque-ra pas de personnes pour objecter que l’actuel possesseurdu Siège Apostolique pourrait, en conséquence, nousôter cette juridiction, puisqu’elle dépend de lui”. L’abbéMercury répond à cette objection - qui est aussi la nôtre- de façon discutable: “le Saint-Esprit assiste l’autoritépour éviter toute décision tyrannique opposée à l’obliga-tion pour chacun de prendre les moyens indispensables àson salut” (op. cit., p. 46). Ce n’est pas le principe affir-mé ici qui est contestable, mais son application à Jean-Paul II, lequel, de fait, non seulement refuse cette juri-diction à la Fraternité, mais refuse aux fidèles lesmoyens de salut (et ce, selon le jugement même de laFraternité qu’ici nous partageons: c’est justement cerefus objectif de réaliser le bien/fin de l’Eglise, le salutdes âmes, qui est le motif pour lequel Jean-Paul II n’apas l’autorité).

52) Le lecteur pourrait se demander quelle estnotre position ce sujet. En effet non seulement lesprêtres de la Fraternité Saint Pie X, mais aussi tousceux qui s’opposent à Vatican II, sont privés de juridic-tion ordinaire et déléguée. Si nous ne pouvons mêmepas invoquer la juridiction suppléée - qui vient du Pape- comment défendre la licéité de notre ministère? LePère Guérard des Lauriers a fait plusieurs fois l’examende ce problème, particulièrement dans Consacrer desévêques? (supplément à Sous la bannière, n. 3, janvier-février 1986, repris par Sodalitium (n° 16, pp. 16 et ss.).Nous pouvons résumer cette position en quelquespoints qui sont les suivants:

a) il existe dans l’Eglise le pouvoir d’ordre et lepouvoir de juridiction.

b) ces deux pouvoirs, qui sont intimement liés parune relation mutuelle et normalement doivent être exer-cés conjointement, sont cependant réellement distinctset peuvent exceptionnellement être exercés séparément.

c) le Siège apostolique est actuellement formelle-ment (mais non matériellement) vacant.

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d) Du fait que le Siège est formellement vacant, ilen découle que, puisqu’il n’y a pas en acte le Pape quiest la source de la juridiction ecclésiastique (et aussi lereste de la hiérarchie, qui jouit de la juridiction ordinai-re ou déléguée) il n’y a actuellement personne qui soitdépositaire d’une juridiction, ordinaire, déléguée ousuppléée par le droit, non seulement parmi les fidèlesde Vatican II, mais aussi parmi ses opposants. La hié-rarchie selon la juridiction subsiste encore cependantpotentiellement et matériellement, ce qui assure lacontinuité de l’Eglise.

e) Le pouvoir d’ordre (pour la gloire de Dieu avecl’offrande du Sacrifice, et le salut des âmes, avec l’admi-nistration des sacrements, l’évangélisation, etc. ) ne peutet ne doit pas disparaître; il peut donc être licitementexercé même par des prêtres privés du pouvoir de juri-diction, selon le rite (traditionnel) de l’Eglise. Nier cepoint amène à nier la continuité de l’Eglise telle qu’ellea été voulue par le Christ. Les évêques consacrés dansce but ne jouissent pas cependant du pouvoir de juridic-tion, ils jouissent seulement du pouvoir d’ordre.

f) On peut admettre que les évêques et les prêtresqui exercent de cette façon le pouvoir d’ordre reçoiventdu Christ - per modum actus, c’est-à-dire de manièretransitoire et pour chaque acte sacramentel exercé sin-gulièrement - un pouvoir de juridiction de suppléance.Ceci vaut surtout pour le sacrement de pénitence, pourlequel la juridiction est nécessaire non seulement dedroit ecclésiastique, mais aussi de droit divin, de par lanature même du sacrement.

g) mais cette juridiction suppléée est supposée ac-cordée uniquement pour ces actes qui ont un fonde-ment dans le pouvoir d’ordre (ou pour ce qui est abso-lument indispensable à la continuité de l’Eglise cf.Sodalitium n° 48 pp. 14-15-16, note 7, où sont cités lesthéologiens Billuart et Zapelena) et non pour des actesde juridiction pure chez ceux qui n’ont par ailleursaucun fondement à recevoir cette juridiction.

Comme le lecteur peut le constater, notre point f)ne diffère pas beaucoup de la position de Mgr Tissier: ilest donc possible d’admettre une suppléance de la partdu Christ. Mais nous nions cependant qu’il soit possibled’admettre une telle suppléance si l’on reconnaît enacte l’autorité de Jean-Paul II (le Christ agirait alorstoujours par l’intermédiaire de son Vicaire et jamaissans lui) et nous nions, même dans l’hypothèse de va-cance du Siège apostolique, que le Christ puisse donnerautorité à des organismes juridictionnels composés depersonnes privées et dépourvues de toute autorité,même matérielle (comme les Commissions canoniquesde la Fraternité ou les conclaves des sédévacantistes: encela sédévacantistes et lefebvristes sont mus par lamême logique et par les mêmes arguments).

53) Ce document a été publié in Sodalitium n° 38,pp. 68-76 sous le titre de Lettre circulaire aux prêtres dela Fraternité Saint Pie X.

54) H. MERCURY, OP. CIT., p. 43.55) Voir à ce propos F. RICOSSA, 1994, Année de la fa-

mille ou de l’Androgyne primitif? publiée in Sodalitium n°36, pp. 63-66; n° 37, pp. 55-64; n° 38, pp. 42-56.

56) Jean-Paul II, écrivait l’abbé Belmont en 1990,“n’ayant pas rompu avec l’état de schisme” inauguré parPaul VI, “demeure cependant privé de l’autorité pontifi-cale. En conséquence, le témoignage de la foi exigequ’on évite tout acte qui soit une reconnaissance quel-conque de son autorité: le nommer au Canon de laMesse ou dans les oraisons liturgiques prévues pour le

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Souverain Pontife, profiter de ses lois ou leur reconnaîtreune valeur juridique, recourir aux tribunaux de curieetc.” (Abbé H. BELMONT, L’exercice quotidien de la foi,in Brimborions. Contribution à la vigilance de la foi.Grâce et vérité, Bordeaux, 1990, p. 68). Nous parta-geons tout à fait cette position.

57) Il ne s’agit pas de cas purement théoriques,hélas… Du fait de cette difficulté, bon nombre de prêtreset de fidèles, même sédévacantistes, reconnaissent (encontradiction avec leurs propres principes) la validité dessentences des tribunaux de Jean-Paul II ou bien admet-tent la possibilité de concéder de nouvelles noces aprèsque des prêtres “traditionalistes” ont examiné le dossieret conclu, par un avis privé, que le précédent mariageétait effectivement nul. A cette seconde hypothèse MgrTissier, se basant sur la nature sociale du mariage, ré-pond correctement lorsqu’il écrit qu’“un tel avis [privé]ne suffit pas là où le bien public est engagé; or le bien pu-blic est engagé dans chaque cause où le lien matrimonialest discuté. Pour trancher le doute, il faut un pouvoir aufor externe public” (Cor unum, cit., IV, 4, p. 43; MgrTissier a écrit ailleurs: en cas aussi de “mariage réelle-ment nul” “pour constater l’état libre d’une personne -pour qu’elle puisse se remarier - il faut un jugement valide,non l’appréciation privée plus un jugement invalide!”,Cor unum ibidem, I, 3, b, p. 40): cette façon de procéderserait admissible, peut-être et seulement, pour les casévidents (nullité du mariage pour lien précédent, consan-guinité du premier degré, ordre sacré, etc.). On pourraitinvoquer une suppléance non de l’Eglise mais de Dieuqui rendrait valides des sentences de nullité en elles-mêmes invalides prononcées au nom de l’occupant maté-riel du Siège apostolique. Mais cette suppléance n’estprévue par les théologiens - pour qui possède quelquetitre au nom duquel la recevoir - que pour les cas oùl’existence même de l’Eglise serait en jeu, ce qui n’estpas le cas. Salvo meliori judicio, nous ne voyons doncpresque pas de solution à ces cas de conscience épineuxet douloureux qui touchent certains fidèles, sinon celled’éliminer les causes de nullité du premier mariage, lerendant ainsi valide ou, si c’était impossible, d’accepter ladifficile mais non impossible situation de celui qui vit sé-paré sans se remarier (quant aux fidèles non mariés, il y al’obligation - pour tous ceux qui sont conscients de ceproblème - de ne pas contracter de mariage avec des per-sonnes qui ont été précédemment mariées et qui ont bé-néficié par la suite d’une déclaration de nullité).

58) Une évolution a eu lieu en effet, dans la positionde la Fraternité à ce propos. En 1983, neuf prêtres appar-tenant au district des Etats-Unis de la Fraternité SaintPie X abandonnèrent cette société, entre autres parcequ’elle reconnaissait les sentences de nullité matrimonia-le émanant de la Rote Romaine et même des tribunauxdiocésains des Etats-Unis notoirement laxistes.

59) Mgr Tissier ne se rend pas compte que les deuxcas - consécrations épiscopales et sentences d’un tribu-nal - ne peuvent être mis sur le même plan. “Un acte va-lide en soi comme les consécrations - observe OrlandoFedeli - est chose bien distincte de l’exercice du pouvoirde gouvernement, qui nécessite de la juridiction pouravoir une existence légale, comme le sont les sentencesd’un juge. Si un jour les consécrations devaient êtreconfirmées par le Saint-Siège, ce ne sera pas pour lesrendre valides (validité que personne ne met en doute); ils’agissait d’un acte de transmission du pouvoir d’ordre,le seul pouvoir que puisse transmettre Mgr Lefebvre, etnon du pouvoir de juridiction, que le Pape est seul à pos-

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séder de droit propre et donc à pouvoir communiquer”.Pour nous mieux expliquer: si dans l’avenir - une fois lanormalité revenue dans l’Eglise - le Saint-Siège déclareillégitimes les consécrations épiscopales accomplies parMgr Lefebvre et par ses successeurs, les évêques consa-crés, les prêtres ordonnés, les fidèles confirmés, seronttoujours validement consacrés, ordonnés, et confirmés,quoiqu’illicitement. Au contraire, si le Saint-Siège neconfirme pas les sentences des tribunaux de laFraternité (et l’on ne voit vraiment pas comment ilpourrait les confirmer) les mariages contractés sur labase de ces sentences auraient été, dès le début, com-

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Ce dossier sur la“Commission canoniqueSaint Charles Borromée” était déjàfermé et parti à la rédaction lorsque

nous avons reçu d’un lecteur une copie del’éditorial que l’abbé Michel Simoulin, supé-rieur du District d’Italie de la FraternitéSacerdotale Saint Pie X a publié dans le nu-méro de novembre 2000 de “Roma Felix”.

C’est la première fois depuis 1991, date à la-quelle fut instituée la “Commission canoniqueSaint Charles Borromée”, que la FraternitéSaint Pie X parle aux fidèles italiens de cet or-ganisme (sans en révéler le nom toutefois),après seulement, et comme par hasard, quedans son éditorial de juillet (n° 50),“Sodalitium” ait annoncé la publication d’undossier “sur les ‘tribunaux canoniques’ de laFraternité Saint Pie X”. “Depuis 1991, - du vi-vant de Mgr Lefebvre - la Fraternité Saint Pie Xs’est arrogé sur ses fidèles (et potentiellementsur tous les catholiques) le ‘pouvoir de lier et dedélier’, usurpant les pouvoirs exclusifs du Saint-Siège. Un tribunal qui siège dans la Maison gé-néralice de la Fraternité en Suisse accorde lesdispenses aux empêchements de mariage (quirendraient le lien invalide), annulle les ma-riages, dispense des vœux religieux, lève les cen-sures ecclésiastiques, y compris les excommuni-cations…” Voilà ce que nous écrivions à la p. 4du dernier numéro de Sodalitium. Dans sonéditorial de novembre, l’abbé Simoulin, tout ense gardant bien de citer notre revue, réagit à ceque nous avions écrit à ce sujet, ou, plutôt, il ré-pond aux réactions de ses fidèles, perplexes etinquiets de ce que nous avons révélé.

A la place de l’abbé Simoulin, nous au-rions pris de vitesse Sodalitium en publianttous les documents sur la “Commission cano-

APPENDICE

plètement invalides, et les présumés époux découvri-raient à l’improviste qu’ils sont des concubins.

60) Noter que Jean-Paul II étant pour Mgr Tissierle Pape légitime, on ne voit pas pourquoi il ne lui re-viendrait pas de juger de la validité des sentencesémises par la Fraternité, et pourquoi l’on doit attendreau contraire le jugement d’un Pape ultérieur. Le fait estque la reconnaissance de Jean-Paul II par la Fraternitéest plus verbale que réelle.

61) L’ont signalé avant nous deux sédévacantistespassés à la Thèse de Cassiciacum, Mgr McKenna et lePère Barbara.

nique” pour en justifier et défendre canoni-quement l’existence: tous n’auraient pas étéd’accord avec cette position, mais tous au-raient apprécié l’honnêteté intellectuelle desautorités de la Fraternité en Italie. Aussi ledossier de “Sodalitium” aurait-il perdu unegrande partie de son intérêt.

L’abbé Simoulin (ou ses supérieurs) a choisiune route contraire: nier la vérité: c’est ce que dé-montre de façon évidente la confrontation entreson éditorial - que nous publions ci-dessous - etles documents authentiques mais réservés de laFraternité que vous venez de lire. Sodalitium secontentera de souligner, en un bref commentaire,le contraste entre l’éditorial de “Roma Felix” etl’article de Mgr Tissier extrait de “Cor unum”.

A la Fraternité nous ne demandons qu’unechose - le demandent surtout les fidèles qui onteu jusqu’alors pleine confiance en elle - dire lavérité, parce que Dieu est Vérité.

Sodalitium

L’abbé Simoulin

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REPONSE A L’EDITORIAL DEL’ABBE SIMOULIN

Un éditorial de Roma felix

Ce que vous venez de lire est l’éditorialdu numéro de novembre de Roma felix.

L’auteur en est l’abbé Michel Simoulin, an-cien recteur de l’Institut universitaire Saint

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Pie X à Paris, ancien directeur du séminaired’Ecône, et actuellement supérieur du dis-trict italien de la Fraternité Saint Pie X.Roma felix en est la “lettre mensuelle d’infor-mations”: une revue officielle.

L’éditorial a pour motif les questions que“plusieurs amis de la Fraternité” posent àl’abbé Simoulin sur des “soi-disant ‘tribunaux’constitués par la Fraternité pour dissoudre ma-

Editorialde l’abbé Michel Simoulin

Chers fidèles,

Je ne sais pas ce qui se passe, mais depuis uncertain temps plusieurs amis de la Fraternité meposent des questions sur de soi-disant “tribu-naux” constitués par la Fraternité pour dis-soudre mariages, vœux religieux, etc.. Il semblequ’il y ait des gens pour semer doutes et zizanieen faisant croire que la Fraternité a ainsi usurpéles pouvoirs du Pape et de la Curie romaine: ceque faisant la Fraternité confesserait ne pascroire que le Pape possède encore le Primat dejuridiction, se comportant de fait comme si leSiège était vacant.

Et pourtant, Mgr Fellay l’a répété avecforce à la basilique Saint-Pierre, le 8 août der-nier, en nous invitant à prier pour le Vicaire duChrist, successeur de Pierre. Ce pèlerinage aproclamé à tous notre fidélité au Siège dePierre, et je ne comprends pas qu’on puisse endouter.

Lorsqu’on parle de “tribunaux” instituéspar la Fraternité, je suis désolé de dire qu’ilssont le fruit d’une imagination plutôt désordon-née. Mgr Lefebvre avait en effet demandé quesoient instituées des commissions, composées deprêtres doctes et experts en théologie morale eten droit canon, pour répondre aux demandesdes prêtres, des religieux et des fidèles. Etantdonné que souvent on ne peut se fier aux ré-ponses données par les tribunaux diocésains,tous peuvent soumettre leurs problèmes et leurs

cas de conscience à ces commissions, dont lesmembres, une fois examiné le cas, donnent uneréponse qui n’est rien de plus qu’un avis ou unconseil, jamais une sentence déclaratoire ayantforce de loi! Les commissions ne sont pas dutout un organisme permanent, mais elles se ré-unissent de temps en temps quand sont faitesdes requêtes par qui ne se considère pascomme satisfait des réponses données par lesdiocèses. Un point c’est tout.

On peut dire tout ce que l’on veut, mais ilest hors de doute que la Fraternité reconnaîtl’autorité de Rome, qu’elle ne veut rien usur-per de la suprême juridiction de Rome et nefait qu’user de cette faculté de suppléance pré-vue par le droit canon pour le bien des âmes,comme elle le fait, par ailleurs, pour les confes-sions et pour les mariages.

Il est vrai que - comme dans toute sociétéhumaine - il peut arriver que l’un dise une pa-role erronée, qu’un autre fasse une erreur,qu’un autre encore écrive une parole dépla-cée… Mais il ne serait pas honnête de fondersur ces erreurs un discours pour prouver que“la Fraternité” erre gravement. Voilà qui estfaire l’œuvre du diable.

Que tous demeurent donc en paix. Malgréses ennemis et ses faux amis, la Fraternité seporte bien, et même toujours mieux! Ce n’estpas le moment de permettre au diable de dé-truire notre confiance mutuelle.

Ensemble nous vaincrons, avec la SainteVierge et tous les Saints.

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riages, vœux religieux, etc.”. L’abbé Simoulins’adresse directement aux amis de la Fra-ternité qui sont dans le doute, mais il répondaussi indirectement à qui sème “doutes et zi-zanie” en faisant courir ces bruits…

Une accusation contre Sodalitium?

L’abbé Simoulin ferait-il par hasard allu-sion à l’éditorial du n° 50 de Sodalitium (juin-juillet 2000)? Il est bien difficile de ne pas lepenser. En effet, la Fraternité, du moins enItalie, s’est toujours tue sur l’existence de la“Commission canonique Saint CharlesBorromée”, instituée en 1991; et il est biensingulier qu’elle ne se mette à en parler quesuite à la publication de cet éditorial, dans le-quel était annoncée la publication imminentedu présent dossier (nous n’excluons pas natu-rellement que l’éditorial de Roma felixs’adresse également à d’autres personnes quenous ne connaissons pas). Les accusations del’abbé Simoulin sont graves: être semeurs dedoutes et de zizanie, avoir un imaginationplutôt désordonnée, manquer d’honnêteté, etenfin faire l’œuvre du diable! Comme chacunsait, le diable est le “père du mensonge”. Enécrivant que des “tribunaux” ont été “consti-tués par la Fraternité pour dissoudre [sic! Lire:pour annuler] mariages, vœux religieux, etc.”,Sodalitium a-t-il menti ou dit la vérité? Et sinous n’avons pas menti, qui ment?

Ce qu’admet Roma felix en disant la vérité

L’éditorial en question doit admettre que“Mgr Lefebvre avait demandé que fussentinstituées des commissions (…) qui ne sontpas du tout un organisme permanent, maisqui se réunissent de temps en temps…”. Ences quelques lignes se trouve tout ce queRoma felix admet (9 ans après) à propos desCommissions, en disant la vérité.

Ce que nie Roma felix

Mais le but de l’éditorial n’est pas tantd’admettre que de nier. Or voici ce que nieen particulier Roma felix:

1) que la Fraternité ait constitué des“soi-disant tribunaux”

2) que les commissions instituées par laFraternité donnent une réponse qui soit“une sentence déclaratoire ayant force deloi”. Il s’agirait seulement d’organes consul-

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tatifs qui donnent “rien de plus qu’un avis ouun conseil”.

3) que ces commissions aient “usurpéainsi les pouvoirs du Pape et de la Curie ro-maine”.

Ces trois négations sont des mensonges,trois mensonges que Roma felix raconte àses propres lecteurs et la Fraternité italienneà ses propres fidèles.

Roma felix ne dit pas la vérité. Les preuves

Pour le premier point, Roma felix écrit:“quand on parle de tribunaux institués par laFraternité, je suis désolé de dire qu’ils sont lefruit d’une imagination plutôt désordonnée”.Chaque fois que l’abbé Simoulin parle destribunaux de la Fraternité pour en nierl’existence, il écrit “tribunaux” entre guille-mets, et il leur attribue le qualificatif de “soi-disant” en tant que fruits de notre fantaisie.

Mgr Bernard Tissier de Mallerais, l’un desquatre évêques de la Fraternité, Président dela Commission canonique, a par contre lui-même employé au moins douze fois les motstribunal et tribunaux dans Cor unum (larevue officielle de la Fraternité), sans ymettre les guillemets, en référence à laCommission qu’il préside, et ce par opposi-tion à ceux de Jean-Paul II, définis tribunaux“novus ordo”, tribunaux “modernistes”, tri-bunaux “officiels”. Le titre même de l’articlede Mgr Tissier est “légitimité et statut de nostribunaux matrimoniaux”. Le but de l’articlede Mgr Tissier est de “justifier doctrinale-ment l’existence et le fonctionnement de nostribunaux matrimoniaux”. Pour Mgr Tissier“l’institution des tribunaux matrimoniauxdans l’orbe de la tradition est spécifiquementjustifiée” par quatre arguments, qu’il cite aupoint III, 4, p. 42. Le fidèle de la Fraternitéqui recourt à la Commission canonique sous-crit une “promesse” jurée dans laquelle ils’engage à se conformer “à la sentence du tri-bunal” de la Fraternité. Ces citations suffi-sent à démontrer que, pour ce qui est du pre-mier point, Roma felix ne dit pas la vérité.

Quant au second point, l’éditorial de Romafelix affirme: “Etant donné que souvent on nepeut se fier aux réponses données par les tribu-naux diocésains, tous peuvent soumettre leursproblèmes et leurs cas de conscience à ces com-missions, dont les membres, une fois examiné lecas, donnent une réponse qui n’est rien de plusqu’un avis ou un conseil, jamais une sentence

Page 54: DOSSIER SUR LA “COMMIS- SION CANONIQUE” DE LA …

déclaratoire ayant force de loi!” A part le faitqu’une sentence n’est jamais une loi, mais l’ap-plication d’une loi, voyons ce qu’écrit MgrTissier toujours dans Cor unum. “C’est unevraie juridiction, et non une exemption du droitet de l’obligation que les fidèles ont de recevoirune sentence. Donc nous avons pouvoir et de-voir de porter de vraies sentences, ayant potes-tatem ligandi vel solvendi. Elles ont donc va-leur obligatoire. La raison prochaine en est quenous devons pouvoir dire aux fidèles ce qu’ilsdoivent suivre, quod debent ‘servare’. Nos sen-tences ne sont pas de simples avis privés…”(IV, 4, p. 43). En effet, nous l’avons vu, le fidèlede la Fraternité qui recourt à la Commissioncanonique souscrit une “promesse” jurée danslaquelle il s’engage à se conformer “à la sen-tence du tribunal” de la Fraternité (Mgr Tissieremploie huit fois le terme sentence en se réfé-rant aux jugements de sa Commission, mis enopposition aux sentences “novus ordo”).

Ces citations suffisent à démontrer que,même en ce qui concerne le second point,Roma felix ne dit pas la vérité.

Pour ce qui est du troisième point, Romafelix écrit: “Il semble qu’il y ait des gens poursemer doutes et zizanie en faisant croire que laFraternité a ainsi usurpé les pouvoirs du Papeet de la Curie romaine” alors que “On peutdire tout ce qu’on veut, mais il est hors de douteque la Fraternité reconnaît l’autorité de Rome,qu’elle ne veut rien usurper de la suprême juri-diction de Rome et ne fait qu’user de cette facul-té de suppléance prévue par le droit canon pourle bien des âmes, comme elle le fait, par ailleurs,pour les confessions et pour les mariages”.Enfin Roma felix admet que “souvent on nepeut se fier aux réponses données [les tribunauxdiocésains, eux aussi, ne donnent-ils que desréponses, pas des sentences? n.d.r.] par les tri-bunaux diocésains”, comme si l’autorité miseen doute par la Fraternité concernait unique-ment les tribunaux diocésains, et pas ceux duSaint-Siège (la Rote Romaine par exemple).

Bien sûr que la Fraternité reconnaît (hélas)- du moins en paroles - l’autorité de Jean-PaulII; jamais non plus nous n’avons dit le contrai-re. Bien sûr que la Fraternité n’admet pasd’usurper les pouvoirs du Saint-Siège, car leterme “usurper” implique déjà un abus.

Mais la Fraternité prétend remplacer etsuppléer “les pouvoirs du Pape et de la Curieromaine” (et pas seulement ceux desévêques diocésains) dans les matières enquestion.

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Mgr Lefebvre lui-même écrivait, dans salettre du 15 janvier, que les Commissions de-vaient suppléer “en un certain sens à la dé-fection des Congrégations romaines” et MgrTissier admet: “il est vrai que nos sentencesen troisième instance remplacent les sen-tences de la Rote romaine, qui juge au nomdu Pape comme tribunal de troisième instan-ce. Mais ce n’est pas une usurpation de pou-voir de droit divin du pape, car la réserve decette troisième instance au pape est seulementde droit ecclésiastique”! (IV, 5, p. 43). Nousavons démontré que l’interdiction de recou-rir au Pape (le fidèle de la Fraternité s’enga-ge à ne pas s’adresser “à un tribunal ecclé-siastique officiel pour lui faire examiner oujuger” sa cause) implique la négation du pri-mat de juridiction du Pape, qui lui revient dedroit divin. De toute façon, Mgr Tissieradmet que la Fraternité, si elle n’usurpe pasun pouvoir de droit divin du Pape, usurpe aumoins un pouvoir qui lui revient de droit ec-clésiastique!

Ces citations suffisent à démontrer quemême en ce qui concerne le troisième point,Roma felix ne dit pas la vérité.

Une échappatoire inutile

Au terme de son éditorial, l’abbéSimoulin admet que “comme dans toute so-ciété humaine” et même dans la Fraternité, ilpeut arriver que “l’un dise une parole erro-née, qu’un autre fasse une erreur, qu’un autreencore écrive une parole déplacée… Mais ilne serait pas honnête de fonder sur ces er-reurs un discours pour prouver que ‘laFraternité’ erre gravement. Voilà qui est fairel’œuvre du diable”.

A part le fait qu’on ne comprend pas pour-quoi la Fraternité - comme d’ailleurs l’InstitutMater Boni Consilii et toute autre institutionnon directement fondée par Dieu ni dotée parlui de l’infaillibilité, comme l’Eglise - ne pour-rait pas gravement errer, ces lignes laissenttransparaître une tentative extrême de défen-se: d’éventuelles erreurs relevées dans lesécrits de prêtres de la Fraternité n’implique-raient pas la Fraternité elle-même…

Cet argument - en l’espèce - est vain. Lesdocuments que nous avons cités sont eneffet des documents officiels de la Fra-ternité: les Ordonnances, promulguéesd’abord par Mgr Lefebvre puis par MgrFellay, une exposition doctrinale sur les

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Commissions canoniques de la Fraternité ré-digée par son Président Mgr Tissier, et pu-bliée par le bulletin officiel Cor unum, enfinune lettre du fondateur même de laFraternité, Mgr Lefebvre, au supérieur gé-néral de l’époque, l’abbé Schmidberger.

Attribuer ces documents officiels à laFraternité et non à leurs auteurs matérielsn’est pas faire l’œuvre du diable, c’est faireœuvre de vérité.

Pourquoi cette attitude?

Nous sommes très chagrinés d’avoir dûdémontrer que les affirmations de Romafelix ne sont pas vraies, d’autant plus quel’auteur de cet éditorial est un prêtre zélémais qui par ailleurs ne pouvait pas ne pasêtre au courant, et ce d’autant plus qu’entant que supérieur de district il devrait êtrejuge en seconde instance de ces tribunauxdont il nie l’existence!

Nous ne sommes pas seulement affligés etincrédules, mais aussi étonnés. Roma felixn’ignorait certes pas - car nous l’avions an-noncé - que Sodalitium préparait un “volu-mineux dossier” sur les Commissions cano-niques. Roma felix devait donc supposer queparmi les nombreux prêtres à avoir quitté laFraternité il s’en était probablement trouvéun pour nous transmettre les documents ré-servés que nous avons publiés. Or Romafelix ne pouvait ignorer que ces documentsallaient révéler de façon incontestable quel’éditorial en question ne disait pas vrai.

Non seulement on a menti, mais on amenti inutilement: pourquoi? Ce n’est pas ànous qu’il revient de juger même si, proba-

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blement, l’amour pour sa congrégation reli-gieuse a entraîné la main de Roma felix; toutnoble que soit le sentiment, le moyen utiliséne peut pas être approuvé...Les silences, les réticences, les omissions etmalheureusement aussi les falsifications dé-montrent cependant au moins une chose:que sur ce point, le supérieur du district ita-lien de la Fraternité Saint Pie X doute de ladoctrine de la Fraternité. S’il était aussi cer-tain des “statut et légitimité” des tribunauxcanoniques, pourquoi en nier l’existence etla nature, alors que Mgr Lefebvre a écrit aucontraire qu’“il n’y a pas d’inconvénients àce que les fidèles connaissent l’existence decette Commission”? Nous invitons doncRoma felix à suivre cette directive du fonda-teur de la Fraternité, en disant finalementtoute la vérité à ses propres lecteurs. Errarehumanum est, perseverare diabolicum.

P.S.: A vrai dire, Mgr Tissier, par contre, se montraplus sincère dans une circonstance analogue. C’était en1996, lorsque - par une note de la revue de la Fraternitéargentine Jesus Christus - Orlando Fedeli apprit l’exis-tence de la Commission canonique et s’adressa pouréclaircissements, aux prêtres de Campos (Brésil) qui,selon ses dires, lui donnèrent des réponses “évasives oucontradictoires”: “parfois ils nous dirent que les tribu-naux n’existaient pas, parfois qu’il n’existait qu’un bureaupour les causes matrimoniales (…). Plus tard ils nous di-rent et garantirent qu’il n’y avait pas de tribunaux. Puis ilsnous confessèrent qu’ils existaient, mais qu’ils n’étaientconnus que des prêtres dont des fidèles avaient eu un pro-blème juridique matrimonial. Dom Licinio [l’évêqueLicinio Rangel, consacré par Mgr Tissier] nous écrivitque le bureau de Campos donnait seulement des avisd’experts (…) et non des sentences. (…) Les choses étantainsi, j’écrivis à Mgr Fellay, l’actuel supérieur de laFraternité Saint Pie X, à propos de l’existence de ces tri-bunaux. Nous reçûmes de Mgr Tissier de Mallerais, prési-dent de la Commission canonique Saint CharlesBorromée, une réponse qui, au lieu de calmer nos doutes,les aggrava. Dans cette lettre datée du 9 octobre 1996, SonExcellence nous informait que, outre les tribunaux ecclé-siastiques de première et de seconde instance, la FraternitéSaint Pie X avait institué un tribunal avec les pouvoirs dela Rote romaine: ‘pour les sentences que nous pronon-çons en troisième instance, nous appliquons, par analo-gie, à notre Commission canonique les pouvoirs du tribu-nal de la Sainte Rote Romaine, pour les mêmes raisons dela situation de nécessité, puisque la Rote elle-même estimbue des faux principes personnalistes. Là encore, vautle principe: Ecclesia supplet!’”. Mgr Tissier ne convain-quit pas plus Orlando Fedeli, qu’il ne nous convaincnous-mêmes. Mais il a été sincère, et il a défendu la légi-timité de la Commission qu’il préside. Roma felix nes’est pas comportée de la même manière.

Les quatre évêques de la Fraternité à Saint-Pierre deRome, à l’occasion du Jubilé 2000 (photo Fideliter)

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FRANCE: Mouchy Raveau 58400 - La Charité-sur-Loire. Pour toute information, télé-phoner au 03.86.70.11.14.

Tours: auprès de l’association Forts dans laFoi. Chapelle St Michel, 29 rue d’Amboise.Ste Messe le dimanche à 10h30. Tél.:02.47.64.14.30. ou 02.47.39.52.73. (R. P.Barbara).

BELGIQUE: Dendermonde. Abbé GeertStuyver: Kapel O.L.V. van Goede Raad,(chapelle N.-D. du Bon Conseil) KoningAlbertstraat 146 - 9200 Sint-Gillis Dender-monde: Ste Messe le dimanche à 9h30.Messe en semaine: Sint-Christianastraat 7.Tél.: (0032) (0) 52/21 79 28.

AUTRES CENTRES DE MESSESFRANCE

Annecy: 11 avenue de la Mavéria. Tél.:04.56.72.44.85. Ste Messe le 2ème et 4ème di-manche du mois à 10 h. Confessions à 9 h.

Cannes: Chapelle N.-D. des Victoires. 4 rueFellegara. Tél.: 04.93.68.10.85. Ste Messe le2ème et 4ème dimanche du mois à 18h.

Lyon: 17, cours Suchet. Tél.: 04.77.33.11.24.Ste Messe le 2ème et 4ème dimanche dumois à 17h. Confessions à partir de 16h30.

ITALIEFerrare: Chiesa S. Luigi, Via Pacchenia 47

Albarea. Ste Messe tous les dimanches à 17h30.Le 1er dimanche du mois à 11h30. Pour touteinformation, téléphoner à Verrua Savoia.

Loro Ciuffenna (AR): Fattoria del Colom-baio, str. dei 7 ponti. Ste Messe le 1er di-manche du mois à 17h30. Pour toute infor-mation, téléphoner à Verrua Savoia.

Maranello (Modène): Villa Senni. Strada perFogliano. Tél. de l'Italie: (0536) 94.12.52.Ste Messe tous les dimanches à 11h. Le 1erdimanche du mois Ste Messe à 9h.

Milan: Oratoire St Ambroise. Via Vivarini 3.Ste Messe tous les dimanches à 10h30.Confessions à 10h.

Rome: Oratoire St Grégoire VII. Via Pietrodella Valle, 13/b. Ste Messe le 1er, 3èmeet 5ème dimanche du mois à 11h.

Turin: Oratoire du Sacré-Cœur, via Thesauro3/D. Dimanches: Confessions à 8h30. Messechantée à 9h. Messe basse à 11h15. Tous lespremiers vendredis du mois: Messe à 18h15.Confessions à 17h30.

Valmadrera (Lecco): via Concordia, 21. Tél.de l’Italie (0341) 58.04.86. Ste Messe le 1eret 3ème dimanche du mois à 17h30, confes-sions à 17h.

EN CAS DE NON-LIVRAISON,VEUILLEZ RENVOYER A L’EXPE-DITEUR QUI S’ENGAGE A PAYERLE RETOUR A L’ENVOYEUR:

SODALITIUM PERIODICOLoc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) presso CMP TORINO NORDTel. +39. 161.839.335 - Fax +39. 161.839.334

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