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Du domaine de la sémiologie fonctionnelle Author(s): Jeanne Martinet Source: La Linguistique, Vol. 13, Fasc. 1 (1977), pp. 47-61 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/30248854 . Accessed: 15/06/2014 23:21 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to La Linguistique. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.2.32.58 on Sun, 15 Jun 2014 23:21:36 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Du domaine de la sémiologie fonctionnelle

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Du domaine de la sémiologie fonctionnelleAuthor(s): Jeanne MartinetSource: La Linguistique, Vol. 13, Fasc. 1 (1977), pp. 47-61Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/30248854 .

Accessed: 15/06/2014 23:21

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LA LINGUISTIQUE Vol. 13, Fasc. 1/1977

DU DOMAINE DE LA SEMIOLOGIE FONCTIONNELLE

par Jeanne MARTINET

De meme que l'on a pu, nagubre, s'interroger sur l'unite de la

linguistique, on pourrait aujourd'hui s'interroger sur celle de la

semiologie lorsqu'on se trouve confront6 ' une simiologie de la communication, une simiologie de la signification, une semiologie de la representation, une simiologie de la connotation, et j'en passe. La simiologie fonctionnelle est, je crois, capable de rdtablir, sinon l'unitd, du moins une certaine cohesion dans la discipline en montrant que ces simiologies ne sont pas radicalement anta-

gonistes et incompatibles, mais qu'elles se justifient par l'adoption de points de vue diffdrents qui donnent naissance a des pertinences diff6rentes et entrainent des ddlimitations diffirentes du champ de la discipline. La question, en particulier, est de savoir s'il est des objets ou des comportements proprement simiologiques dont

l'dtude constitue le seul domaine de la discipline, ou si tout objet, tout comportement, quels qu'ils soient, peuvent etre soumis 'a un traitement de type simiologique, auquel cas toute l'experience humaine dans sa diversite, sa multiplicite, constitue le champ illimitd ouvert a la recherche semiologique.

Comment done definir 1'Ftendue et les limites de notre domaine ?

Dans les Clefs', je m'dtais enfermie, de propos ddliberd, dans un territoire 6troitement circonscrit, me bornant, dans les termes de Georges Mounin, A l'dtude des systhmes de signes grace auxquels les hommes communiquent2. M'en tenant t l'opposition cardinale entre indices et signaux, mise en evidence par mes preddcesseurs,

I. Jeanne MARTINET, Clefs pour la simiologie, Paris, Seghers, 1973. 2. Georges MoutNN, Introduction a la simiologie, Paris, Editions de Minuit, 1970, p. Ii.

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Eric Buyssens, Luis Prieto, Georges Mounin, je n'accordais droit de cite qu'A ces derniers et rejetais catdgoriquement les premiers. Cette exclusion n'impliquait, en aucune fagon, que je les jugeais denuds d'interet : simplement, j'estimais que leur etude n'avait pas sa place en simiologie, mais qu'elle relevait des sciences et

disciplines particulieres. Or, je ne pouvais pr'tendre les embrasser toutes. Si je voulais dominer notre sujet, il fallait le maintenir dans un cadre bien defini grace A des critbres precis. Il tait imp6- ratif de s'en tenir aux signaux.

Depuis, j'ai ete, A plusieurs reprises, tentde et sollicitee d'dlargir ce domaine A certains faits qui, sans offrir les caractdristiques propres aux systhmes auxquels je m'etais attachie, n'en semblent

pas moins justiciables d'une analyse et d'une etude simiologiques. Il s'agit, en particulier, de certains indices, envisages non comme des faits isolds, mais dans leurs rapports les uns avec les autres et dans la fagon dont ils sont apprehendis - culturellement - dans le cadre d'activitis humaines. Ceci constitue donc une remise en cause du point de vue categorique que j'avais adoptd dans les Clefs : du coup, le domaine de la discipline doit &tre redefini.

Pour trouver les crithres qui vont nous permettre disormais d'integrer ces indices A notre champ d'etude, je suis repartie des fondements meme de la s6miologie fonctionnelle et, d'abord, du signe saussurien. En effet, une reflexion inspirde par celui-ci et enrichie des apports de la linguistique fonctionnelle permet : 10 d'inventorier les divers points de vue oh se situe la recherche

semiologique, 20 de definir le domaine de la discipline dans son ensemble et de le ddpartager dans ses parties, 30 en particulier d'dlucider, de clarifier les relations qu'elle entretient avec la

linguistique. Ce dernier point nous retiendra tout d'abord. La

question - abondamment debattue - est de savoir s'il convient de les considdrer comme deux disciplines distinctes ou dans un

rapport de dependance l'une A l'dgard de l'autre et, dans ce cas, s'il faut voir, dans la linguistique, une branche de la simiologie ou, dans celle-ci, un developpement, une ramification de la

linguistique. La reponse est dejA chez Saussure : << La linguistique >>, lit-on

dans le Cours3, << peut devenir le patron gendral de toute semiologie, bien que la langue ne soit qu'un systime particulier >>.

3. Cours de linguistique ginirale, Paris, Payot, 1972, p. o10.

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On admet, en general, qu'une discipline se definit par sa

m'thodologie et par le champ des ph'nom'nes qu'elle 'tudie. Du point de vue methodologique, les principes qui nous gouvernent ne sont pas autres que ceux de la linguistique fonctionnelle : I'objet de notre etude ne reside pas dans les proprie'ts physiques des objets ou des phenombnes que nous examinons, mais dans lafonction qui est assumee par chacun, et dans les relations qu'ils entretiennent les uns avec les autres. Le principe fondamental de toute recherche fonctionnelle est le principe de pertinence. On s'attachera donc, dans chaque cas, at determiner ce qui est pertinent et ce qui ne l'est pas. Nous reconnaissons une pertinence commune at la simio- logie et a' la linguistique : la fonction de communication. Ceci

apparait explicitement dans la definition d'une langue par Andr' Martinet4 : << Une langue est un instrument de communication selon lequel l'experience humaine s'analyse difflremment dans

chaque communaute, en unites douses d'un contenu simantique et d'une expression phonique, les monemes. Cette expression phonique s'articule A son tour en unites distinctives et successives, les phonemes, en nombre determine dans chaque langue, dont la nature et les rapports mutuels different, eux aussi, d'une langue a une autre. >> Ceci se retrouve dans la definition de la semiologie donnee par Mounin, djit rappelke ci-dessus Science des systhmes de signes (ou de symboles) grace auxquels les hommes communiquent. > On notera que ni l'une ni I'autre ne se donne pour objet la communication dans sa totalitY, mais seulement les << instruments >> ou << systhmes >> qui servent 't la communication.

D'autres fonctions peuvent se greffer sur la fonction de commu- nication et, parfois, prendre le pas sur elle, mais il n'en reste pas moins que c'est du besoin de communiquer son experience que nait la ndcessite, pour I'homme, de crier des systhmes de signes. A partir de ces autres fonctions, pourraient etre degagces d'autres pertinences.

Lorsqu'on envisage les champs des phenomhnes tudids, il est possible de marquer l'individualit6 des deux disciplines. La linguis- tique << tude scientifique du langage humain >> s'etant donn6 pour champ les langues, la simiologie regoit en partage tous les systhmes autres que celles-ci. Aprbs Eric Buyssens, nous les designerons tous, y compris les langues, du nom de simie, de prefirence at code : si

4. Eliments de linguistique ginirale, Paris, Armand Colin, Ig60, u x-14.

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langues et codes sont des semies, les langues ne sont pas des codes et elles ont, parmi les simies, un statut trbs particulier qu'il conviendra de bien marquer. La simiologie devient alors l'etude scientifique des semies. Pour definir ce qu'est une semie, nous partirons de la definition d'une langue rappelde ci-dessus et nous essaierons de le faire par elimination des traits spdcifiques des langues. Il n'y a pas identite entre semie et langue et l'on ne doit pas chercher 'a retrouver tout prix, dans toute simie, tous les traits qui caracterisent une langue : une simie ne presente pas ndcessairement la double articulation en unites du type des mondmes et des phonemes. Le canal de transmission n'est pas necessairement phonique et il s'ensuit que le signifiant n'est pas necessairement lindaire. Enfin, une simie peut etre purement et simplement substitutive d'une autre, et, de ce fait, presenter, entre ses unites, les memes types de rapports que la premi6re. Reste qu'une simie offre une analyse de l'experience humaine, mais cette analyse lui est-elle propre ? ou toujours sous-tendue par I'analyse que propose une langue donnie ? Et sommes-nous en mesure de definir des communautis semiologiques en rapport avec les simies que nous identifions ?

La dcfinition de la simie se reduit << uinstrument de commu- nication u, c'est-a-dire, a peu de choses pros, << systhme de signes grace auxquels les hommes communiquent u (Mounin).

Notre univers, a nous semiologues, est donc celui des signes. Le probl6me est maintenant de difinir les signes qui nous concer- nent. Or, en tant qu'objets ou ph6nombnes, les signes n'ont pas d'existence propre. Rien dans les caracteristiques physiques ou

chimiques d'un objet ou d'un phenombne ou d'un comportement n'en fait un signe. Ce qui fonde un signe en tant que signe, c'est

qu'il est reconnu comme tel du fait d'une investiture : l'objet ou le phenombne n'est pas apprdhende en lui-m me et pour lui-meme, mais en tant que manifestation d'autre chose. C'est cette inves- titure qui cree le signe. Il convient donc d'examiner en quoi elle consiste et qu'est-ce qui, de son fait, est manifestd au moyen de

quoi. De la definition qu'on se sera donnie du signe dependra la

ddlimitation du domaine ou des domaines de la semiologie. C'est dans l'enseignement de Ferdinand de Saussure que s'est

dlaboree la definition du signe ?i laquelle se sont rallies les princi- paux courants de la linguistique europdenne contemporaine. Mais, ici encore, le signe saussurien est avant tout un signe linguistique

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ct il nous appartient de tirer, des indications eparses dans le Cours, quels traits doit presenter un signe non linguistique pour avoir droit de cite en simiologie : Saussure lui-meme nous met sur la voie par << une remarque en passant : quand la semiologie sera organisee >>, dit-il5, << elle devra se demander si les modes d'expres- sion qui reposent sur des signes entibrement naturels - comme la pantomime - lui reviennent de droit. En supposant qu'elle les accueille, son principal objet n'en sera pas moins l'ensemble des systdmes fonds. sur l'artibraire du signe >> et, plus loin... << les signes entibrement arbitraires realisent mieux que les autres l'ideal du proc6de semiologique >>.

Si done Saussure pose comme un principe primordial l'arbi- traire du signe linguistique, il ouvre cependant la porte d la possibilite de traiter, en semiologie, de signes non arbitraires, mais il parle alors de << modes d'expression >> et non de communication. C'est en cernant le contenu et les implications du principe de l'arbitraire que l'on d6terminera si la simiologie doit traiter exclusivement des signes entierement arbitraires ou si l'on peut aussi envisager une semiologie des signes non arbitraires (< natu- rels >>) et une simiologie des signes partiellement arbitraires.

Partant de la definition saussurienne du signe linguistique comme une entite abstraite a deux faces : un < concept u> ou signifil et une << image acoustique u ou signifiant, unies indissolu- blement par un lien arbitraire, nous disons, de fagon plus gendrale et sans retenir la lettre des formulations < mentalistes u du Cours, que par arbitraire, nous entendons tout d'abord que la relation entre ce qui est manifeste : le signifiant (un objet, une suite de sons, un comportement) et ce qui est manifeste : le signifie (un << concept >>) n'est pas un donna naturel, mais le fait d'une convention sociale, variable d'une communaute a une autre. Pour reprendre l'exemple de Saussure : soit un animal a toison laineuse, le frangais offre A ses usagers la phonie /mut6/ mouton pour s'y r6f6rer, alors que l'anglais offre aux siens /fi:p/ sheep. Jusqu'ici l'arbitraire semble consister dans I'attribution, non motivee par la nature, h un signifid de tel ou tel signifiant. En fait, I'arbitraire ne s'arrete pas 1l car s'il s'agit d'une piece de viande presentee a table, le Franqais dit encore mouton, mais l'Anglais ne dit plus sheep, il dit mutton.

5. Cours, p. oo- o x ; la pantomime present6e par Saussure comme un mode d'expres- sion proc6dant par<< signes... naturels >>, sera, dans le cadre de ma classification des signes, class6e parmi les systemes A signifiants iconiques; cf. Clefs, p. 59-69.

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L'anglais dispose donc de deux unites, l~ o0i le frangais n'en a qu'une, il presente une opposition que le frangais ignore. C'est dire que chacune des unites ayant pour signifiant mouton d'un c6to, sheep de 1'autre se trouve dans un rapport different vis-a-vis des autres unites de la langue t laquelle elle appartient.

Andre Martinet a repris et explicite6 cet aspect de l'arbitraire linguistique. << En fait, dit-il, l'independance de la langue vis-h-vis de la realit6 non linguistique se manifeste plus encore que par le choix des signifiants, dans la fagon dont elle interprkte en ses propres termes cette realite, tablissant, en consultation avec elle, sans doute, mais souverainement, ce qu'on appelait ses concepts et que nous nommerions plut6t ses oppositions. >> Arbitraires donc le choix et la delimitation des signifies operas dans cette realite non linguistique, conque comme substance semantique.

Sur la lancee saussurienne, et nous appuyant sur la phonologie fonctionnelle qui permet d'aller au-deld de l'enseignement du Cours, nous dirons que les unites constitutives de la face signifiante du signe r6sultent aussi d'un d6coupage arbitraire, opere par chaque langue, dans la substance phonique.

Ainsi paracheve grace . l'apport fonctionnel, le signe saus- surien repond bien A l'ideal simiologique de l'arbitraire total et ceci sur trois plans : arbitraire du signifid, arbitraire du signifiant, arbitraire du lien de signifiant ta signifie.

A cet arbitraire total on opposera une absence totale d'arbitraire. Il s'agit alors de signes << naturels >> : deux ph6nombnes, galement naturels, sont relies naturellement >> l'un h l'autre comme la fumde et le feu, par exemple, de sorte que la fum&e perceptible manifeste un feu cache, car < il n'y a pas de fumne sans feu >>. Ces signes naturels sont des indices, jusqu'at present exclus de la semiologie de la communication, au nom du critere 6tabli par Buyssens, repris par Prieto, Mounin, moi-meme; ils ne manifestent

pas, chez un emetteur, une intention de communiquer avec un

recepteur : la fumi e, indice du feu, imane du feu lui-meme. En revanche, la fumee qui, dans un conclave, annonce l'Clection d'un pape, est produite << artificiellement >> par I'homme pour manifester autre chose que le feu. Elle est alors le signifiant d'un sbme dont le signifie est << election du pape o. C'est done bien du

6. La linguistique synchronique, Paris, Presses Universitaires de France, 1965, p. 40o, dans un expos6 publi6 tout d'abord dans le volume 15 des Cahiers Ferdinand de Saussure, p. Io5-116.

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fait, dans l'interprdtation, de sa mise en relation, soit avec le feu, dont elle imane par nature, soit avec l'Flection du pape qu'elle signale par convention, qu'on reconnait t la fumCe le statut d'indice ou de signal, c'est-a-dire de signifiant d'un message. L'association du signal (Sa) et du message (S6) constitue un seme, entit6 simiologique fondamentale degagde par Buyssens. Une simie est un systeme de semes. Le terme de signe est alors

reserv6 a des unites minimales rdsultant de l'analyse des s~mes. Dans notre exemple ci-dessus de l'dlection papale, on a done affaire a un s6me et non un signe. Ici encore, I'enseignement saussurien est prolonge et depass6 : bien qu'en fait Saussure semble

opdrer le plus souvent avec des signes minimaux dans sa quote des unites linguistiques, il ne l'a pas explicite et il emploie signe aussi bien '

propos d'une phrase que d'un mot. L'analyse du s6me, en terme d'articulation, conformement aux

principes fonctionalistes dont l'application, en linguistique, nous vaut la thdorie de la double articulation, a permis l'identification de quatre types de semie du point de vue de l'articulation de leurs sbmes : 10 les semies a sbmes non articulks (semie des feux d'intersection offrant trois s6mes inarticulks : /vert/ = << passez >>, /orange/ = << attention! >>, /rouge/ = < stoppez >>); 20 les simies a semes articulds en signes sans articulation de ces derniers en

figures distinctives (semie des panneaux de circulation routikre offrant des sames du type /triangle a listel rouge/ = < danger >> + /bovin/ = < animaux domestiques >>); 30 les simies Ba s6mes sans articulation en signes, mais ' articulation en figures distinc- tives (semie des sonneries militaires offrant des sames du type Isol + do + mi + do + sol +- . ./= < levez-vous! >>); et 40 les semies permettant de construire des sames doublement articulks (semies linguistiques) 7.

On notera que le type d'articulation est en rapport avec le nombre de sames qu'offre la s6mie ou la possibilite qu'elle laisse a ses utilisateurs de construire leurs propres s6mes selon leurs besoins de communication.

Les numeros en g6nerals sont normalement analyses comme des sdmes articulks en figures (type 3, ci-dessus). Pour ce qui parait &tre, au public, des raisons mn6motechniques et de facilit6 de

7. Clefs, p. I13-115. 8. Cf. Jeanne MARTINET, De la semiologie du num&ro, La Linguistique, 10 (1974)-2,

p. 47-61

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reproduction orale, ils sont souvent scindes en segments successifs (702 65 24 pour un numero de t6l'phone, par exemple). Mais ceci n'implique, pas, pour eux, une articulation en signes. Ceci vaut pour un numero de Securit6 sociale comme 108047322100oo2 qu'il est plus commode de prononcer << un, zero, huit, etc. >> que << un billion, quatre-vingts milliards, etc. >>, ce qui serait, en tout cas, aberrant, puisque billion, milliards et million d6signent necessairement des quantit6s, ce qui n'est pas le cas d'un numero. Mais si, pour le titulaire du numero, qu'on peut designer comme l'Pmetteur de messages destines l'administration et comportant ce numero, il n'y a pas articulation en signes, il n'en va pas de meme pour le personnel de cette administration, recepteur des messages, qui pourra, si le besoin s'en fait sentir, interpreter /1-/ comme << homme >>, /-o8-/ comme << 1908 >>, /-04-/ comme << avril >, /-73-/ comme << Savoie o, etc.

L'int6ret de ces remarques est de mettre en evidence le fait qu'une meme rdalite peut 8tre apprehendee et analysde diffirem- ment, non seulement selon la fonction qu'elle assume, mais, par rapport a une meme fonction - celle de communication en ce qui nous concerne - selon que l'on adopte le point de vue de tel ou tel des participants au procts de communication (acte semique).

Ceci attire notre attention sur un aspect des relations simio- logiques qui merite d'etre signale et approfondi : la dissyme'trie des r6les d'6metteur et de recepteur. Dans la presentation saussurienne du circuit de la parole, les r6les de l'auditeur et du sujet parlant sont interchangeables. A et B sont tour tour tour l'un et l'autre 6metteur et recepteur. A et B se comprennent parce qu'ils sont

capables, en face des memes experiences, de produire des signaux identiques, si bien que B identifie et comprend sans erreur le mes- sage porte par tout signal de A et r6ciproquement. Plus recemment, dans les travaux inspires de la theorie de la communication, on sti- pule que, pour que la transmission de l'information s'opere de fagon satisfaisante, il est essentiel qu'encodeur et d6codeur disposent du meme code. Mais on doit prendre garde qu'il s'agit en realite du codage des seuls signifiants, au moyen d'un code substitutif, de sorte que soit restitud e l'arrivie un signifiant identique A celui qui a et6 donne au depart et il se produit des catastrophes quand les codeurs - l'amission ou a la reception - se melent de << comprendre >>, c'est-&-dire d'interpreter ce qu'on leur a confid.

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La belle symitrie saussurienne du circuit de la parole dans laquelle A et B se font pendant ivoque une relation d'egalite; elle est utile & poser comme hypoth6se pour la clartd de l'expose, mais en fait exceptionnellement realisde. Les linguistes ont deji releve le fait que, lorsque deux sujets sont en presence, meme s'ils sont membres trbs proches d'une meme communaute, ils ne presentent jamais des systhmes linguistiques rigoureusement identiques; l'observation livre des idiolectes trbs distincts les uns des autres et l'on a pu lancer la boutade : << Bilingualism begins at home. >> Or, lorsqu'on observe les comportements simiologiques, comme les linguistes etudient les comportements linguistiques pour atteindre non seulement la structure mais aussi le fonctionnement des langues, on constate que, loin d'etre la rbgle, la symetrie et la reciprocit6 des r61es emetteur-ricepteur sont plut6t l'exception, et ceci, de fagon tout a fait institutionnelle pour bien des systhmes : tel est le cas pour la signalisation routiere par exemple. De meme, dans la communication litteraire et artistique, il y a disequilibre des r1les entre l'artiste emetteur et le public recepteur. Si donc nous insistions pour retenir comme trait definitoire necessaire d'une semie la reciprocit6 des r6les imetteur-recepteur, nous nous exposerions

' rayer du champ de la simiologie un grand nombre

des systemes que nous y accueillons. Si nous renongons a ce trait, nous sommes amene's a priviligier,

dans notre etude, le point de vue du recepteur. Privilkgier le point de vue du recepteur, c'est se disintiresser momentanement de la production du signal pour s'attacher aux processus qui en per- mettent l'identification et l'interpretation.

Deux questions se posent donc : comment le recepteur reconnait-il qu'il a affaire ' un signal ? De quels moyens dispose-t-il pour attribuer un sens au signal ?

Est recepteur potentiel tout sujet livre aux assauts d'un univers dans lequel il lui appartient de demeler dans quelle mesure

phinombnes, objets, comportements, manifestent autre chose que ce qui lui tombe directement sous le sens. Cet << autre chose >> est important pour lui d'un point de vue pragmatique, car c'est l'information qui lui permet d'anticiper 1'Cvenement et, par suite, d'adapter son comportement, ou encore de prendre une decision, c'est-4-dire de choisir, parmi les comportements possibles, le plus approprie. De ce point de vue pragmatique, signal et indice ont meme fonction, ils sont, l'un comme l'autre, porteurs d'infor-

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mation : tel p&cheur qui a consulte l' tat du ciel et tel autre qui a ecout6 le bulletin metiorologique se decideront de m&me fagon a prendre la mer ou a rester au port. Si c'est I'information seule qui compte, peu importe, somme toute, qu'elle mane d'un signal ou d'un indice. Les choses se compliquent lorsqu'une meme realite est susceptible de fournir des informations autres selon qu'elle est consideree comme indice ou signal, ou meme comme un simple objet, denu6 de toute signification. Luis Prieto se demande9 : << comment le signal s'arrange-t-il pour permettre au ricepteur de se rendre compte que l'imetteur se propose de lui transmettre un message ? > et il continue : << La reponse est bien simple : le signal, du fait meme qu'il est produit, indique au r6cepteur le propos de l'6metteur. >> Or, le signal peut fort bien &tre apprehend6 comme un objet vide de sens : ainsi le panneau d'interdiction a tout v6hicule, prdsente 5a de jeunes enfants, est d6sign6 par eux comme un ballon. De meme, pour produire le signal indiquant son intention de deboiter pour depasser un autre v6hicule ou pour tourner a gauche, un conducteur passe son bras a la portiere. Un timoin non initie peut ne voir li que le simple geste d'un fumeur qui laisse tomber sa cendre ou celui d'un homme qui prend le frais ou veut savoir s'il pleut.

La r6alit6 observee peut &tre apprehendee, a juste titre, comme ayant une signification, mais cette signification n'est pas la meme selon que cette realite est classee du c6to des indices ou des signaux. Ainsi, dans une toux, on reconnaitra le sympt6me d'une affection respiratoire si l'on y voit un indice naturel spontane10, mais on pourra y voir encore, soit un indice faussement spontand, destine a simuler un 'tat morbide, par exemple pour Achapper & une corvee, soit un indice intentionnel fonctionnant comme un signal porteur de

n'importe quel message : << C'est le moment de partir >> ou << la personne qui entre dans la salle est X... >, en vertu d'une conven- tion preetablie. II appartient au r6cepteur de choisir entre ces trois possibilitbs en s'aidant, soit de sa perspicacit6 & deceler des

diff6rences entre ces trois toux, soit de toutes les informations fournies par les circonstances et de tout ce qu'il peut savoir de l'metteur de la toux et de la situation d'ensemble.

Le signal etant bien reconnu comme un signal, c'est-a-dire

9. Messages et signaux, Paris, Presses Universitaires de France, 1966. I o. Cf. Luis PRIETO, Etudes de linguistique et de simiologie g~inrales, Geneve-Paris, Droz,

1975, P. 126-128.

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comme resultant d'une demarche simiologique, son interpretation ndcessite encore qu'il soit bien integre a la simie A laquelle il

appartient et non A une autre : au cours d'expiriences mences dans le cadre d'une campagne de sensibilisation A la securite routibre, on a prdsentd a de jeunes enfants le panneau d'autoroute /couverts croisis/ << restaurant >> et obtenu la reaction suivante : <<d a, c'est dans un grand magasin, ga veut dire qu'on vend des fourchettes et des couteaux. >> Ici, donc, il y a bien identification de l'objet comme un signal, mais il n'est pas intigre a sa simie.

Dans la meme campagne, on a prdsente l'emblame des maga- sins Codec, representant deux petits personnages qui se donnent la main, et obtenu la rdaction : < Ca veut dire que c'est difendu aux enfants. >> Dans ce dernier cas, I'enfant integre L tort le signal a une semie dont il a connaissance et l'interprbte dans le cadre de cette semie telle qu'il I'apprdhende, c'est-A-dire avec gendra- lisation du sens interdiction pour tous les s6mes de la simie.

Enfin, si un bilingue frangais-anglais voit la succession de lettres S A L E, avant de l'interprdter, de lui donner un sens, il la replacera, selon les circonstances, dans la simie franqais, si ces lettres sont tracees du doigt sur les vitres poussidreuses d'une voiture A immatriculation frangaise, d'oh le sens << sale >>, ou dans la semie anglais, s'il s'agit d'une affiche collee sur les vitrines d'un magasin londonien, d'oh le sens << vente >>.

L'identification d'un signal et son classement dans la simie a laquelle il appartient s'effectuent donc soit sur la base d'une initiation antdrieure, par apprentissage, soit ta partir d'une hypo- th6se, en faisant appel "I l'analogie entre le signal (inconnu) regu et d'autres signaux antdrieurement appris. Dans la mesure ou initiation et apprentissage sont part de l'experience, on peut dire qu'il y a toujours retour, refirence a une experience anterieure.

En va-t-il autrement des indices ? DeJi, a propos du mecanisme de l'indication, Prieto" remarque < que les deux univers qui sont en rapport lors de l'indication (celui de l'indiquant et celui de I'indiqud), ainsi que les correspondances entre chaque division de I'un et chaque division de l'autre, doivent etre connus d'avance par celui qui reqoit l'indication >>. En d'autres termes, toute identification et interpretation passent par la reconnaissance; or, pour re-connaitre, il faut connaltre pr'alablement, soit par

i i. Messages et signaux,, i .8.

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experience directe, soit par apprentissage substitutif de I'exp&- rience directe.

Du point de vue pragmatique que nous avons envisag : anticiper l'evenement en vue de l'action, le sujet ne semble pas procider de fafon foncierement difflrente pour atteindre A l'indi- cation donnie par l'indice ou a la signification donnee par le signal. Soit un medecin - ou, mieux, un viterinaire -, les sympt6mes observes par lui constituent les indices dont l'interpr&- tation aboutit a un diagnostic a partir duquel est prescrit un traitement, c'est-W-dire une action ayant pour objectif d'enrayer la maladie, evenement anticipe. L'evenement anticipe est done une maladie possible, les sympt6mes, releves par l'observation ou grace aux declarations du malade, constituent les indices dont chacun doit contribuer a lever une partie de l'incertitude relative A la presence et l'identite de la maladie. Lorsque ont 6te recueillis tous les indices nicessaires, il ne subsiste plus d'incertitude; le praticien peut prononcer un diagnostic et prescrire un traitement, c'est-a-dire passer a l'action permettant de combattre la maladie. Or, prononcer le diagnostic c'est, selon une saisie syntagmatique, reconnaltre dans l'ensemble des sympt6mes manifestos, soit simul- tanement, soit selon une successivite pertinente, une certaine structure, un certain schema identique A un schema deja connu (par la pratique medicale ou la formation scientifique) et diffdrent d'autres schemas igalement connus. C'est done proceder de faqon paradigmatique puisque, dans l'Ftablissement d'un schema de diagnostic, chaque sympt6me est traite comme une unite discrkte susceptible de commuter avec un certain nombre d'autres et avec son absence. Si la confrontation paradigmatique laisse le praticien insatisfait, du fait que le schema manifeste semble incomplet et ne permet de digager aucun sens, il s'efforce de le completer en faisant apparaitre, sur la base d'une hypothbse, tel ou tel autre sympt6me, de fagon a retrouver un schema connu. Pour cela, il interroge le patient, soit verbalement, par une ques- tion precise du type : << Avez-vous constat6 une enflure du ganglion du bras ? >>, soit activement, en tatant l'emplacement dudit ganglion. Or, poser une question, c'est utiliser le langage articule, done recourir a des signifies linguistiques. Est-ce a dire, avec Barthes, qu' < il n'est de signifie que linguistique >> et que les sympt6mes inventories n'ont de << valeur >> que dans la mesure ou ils ont requ des d6nominations ? Nullement. Il suffit de penser

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DU DOMAINE DE LA SiMIOLOGIE FONCTIONNELLE 59

au pediatre des nourrissons et au veterinaire qui ne disposent que de l'interrogation active, telle une pression exercee sur un point precis du corps de faqon a` obtenir une reaction observable, cri

inarticuld, mouvement de douleur. Or, cet examen par interro- gation active fait appel B un systtme d'entitis discrktes qui sont utilisees comme des signifies en l'absence meme de toute denomi- nation, de tout signifiant linguistique.

Du fait qu'on semble passer directement l'action l'action curative, sans explicitation en langage articuld de ce qui l'a determinee, certains sont tentes d'invoquer ici une intuition, plus ou moins

aurdol'e de magie, alors qu'en realite sont mises A contribution des structurations se'miologiques de 1'expirience.

Dans la plupart des domaines, on peut voir a l'oeuvre de veritables grilles d'apprehension du reel qui retiennent comme

pertinents, d'un point de vue pragmatique, certains faits extraits du continuum perceptible et parmi lesquels s'opbrent des choix

qui debouchent sur des actions diversifides. On est done autoris6 a considerer que sont ainsi constitues des systhmes paradigma- tiques. C'est ce qu'on observe en confiserie, par exemple, pour la cuisson du sucre. Au cours de celle-ci, on assiste a une evolution continue de la solidification du sirop. On apprend, par la pratique, h identifier, dans ce processus, des stades discrets, correspondant A l'utilisation du sirop pour des operations particulibres : confec- tion de marrons glaces, conserves de fraises, etc. Ces stades forment un syst6me de choix possibles parmi lesquels on s'arrete A l'un, a l'exclusion des autres, en vue d'une opiration donnee. Sans doute est-il possible de les nommer : sirop << la nappe )> pour la confiture de fraises, << au souffle >> pour des marrons glacis, etc. La cuisinitre provenfale12 propose une douzaine d'echelons. Mais si les nommer permet d'en parler, cela n'aide gubre 't les identifier. Ce qui importe c'est de savoir par quelles epreuves on peut reperer que le moment est venu de jeter les fruits dans le sirop ou de retirer le chaudron du feu. Pour rdaliser ces epreuves, on

apprend h accomplir certains gestes : souffier sur le sirop repandu sur une assiette, etirer entre le pouce et l'index un filet de sirop plus epais, laisser se former, a l'extremit6 du doigt, une perle. Ce sont ces habitudes motrices, en relation avec ce qu'elles permettent d'observer, et non les mots au moyen desquels on les

12. J.-B. REBOUL, Marseille, Tacussel, 22e d., p. 400.

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d6crit qui definissent les unites entre lesquelles vont s'oprer des choix. Peut-on, ici, parler d'un champ de signifies ? Mais alors, en l'absence de designation linguistique, quels en sont les signifiants ? L'6tat meme du stade considere ? Les gestes qui permettent de l'identifier ?

Si un signal est, selon Prieto, aprbs Buyssens, un indice arti- ficiel, les indications donnees par un thermombtre ou un pbse-sirop sont des signaux. Et il est beaucoup plus facile, pour l'homme moderne, de lire ces indications que d'identifier avec certitude, dans une progression continue comme la solidification du sucre, qu'on n'est plus au < perl u>> mais trbs precisement au < file > et pas encore au << soufflf >. Si donc le << perl u>> correspond

' 33 OC,

ii y a equivalence entre I'identification du perld et la lecture 33 OC. Indice et signal sont donc interchangeables, et si nous reconnais- sons un signifie a l'un, pourquoi pas

" I'autre ? En fait, ne nous

sommes-nous pas laisse pieger par la notion d'indice artificiel ? Si le pese-sirop et le thermombtre apparaissent comme des appareils producteurs de signaux, il faut bien prendre garde que c'est le sirop lui-meme, la fievre elle-meme qui provoquent ces pretendus signaux. En fait, les indications donnees par ces instruments devraient etre definies comme des << indices artificiels provoques naturellement >. Dans une optique saussurienne &troite, ils n'auraient donc pas leur place en simiologie.

Il nous semble toutefois que provoquer la manifestation d'indices, meme naturels, pour atteindre ce qu'ils manifestent, participe des comportements simiologiques, au meme titre que les

operations de classement et d'interpretation qui permettent de retrouver l'indique sous l'indiquant et le message sous le signal. Mais ceci n'est qu'une face de la semiologie et l'on voit comment, a privilkgier le point de vue du ricepteur, on s'expose au danger d'estomper, jusqu'd l'abolir, la distinction indice-signal.

Or, la question qui se pose a la simiologie, definie ci-dessus comme l'etude scientifique des semies, est de savoir si des indices prelev's dans l'experience humaine globale, au nom d'une perti- nence de type culturel peuvent constituer, du fait de leur regroupe- ment en ensembles syntagmatiques et systhmes paradigmatiques, un champ de signifies suffisant fonder fonder une semie en l'absence du champ de signifiants correspondant. Il suffira qu'on crde un tel champ de signifiants pour que la semie prenne forme.

Ce decoupage en champs de signifies qui nous livre des

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candidats a un statut simiologique complet nous parait la premiere etape fondamentale, qu'il prenne appui sur un decoupage linguis- tique ou, mieux, qu'il s'en libbre, . l' tablissement de semies bien construites et adaptees aux besoins de leurs utilisateurs.

L'objet central de la recherche semiologique demeure 1'6tude des relations entre messages et signaux. Mais, partant de la et se situant rigoureusement par rapport g l'arbitraire saussurien, le simiologue pourra envisager l'dtude de signes iconiques, comme la pantomime, symboliques ou meme << naturels >>, comme les indices. II pourra egalement s'attacher, selon sa prifirence, 'a tout aspect du circuit semiologique et a toute relation entre les facteurs en jeu, " condition de bien preciser son point de vue et ses options, en un mot, ses pertinences. C'est ainsi que, dans un champ desormais largement ouvert B la discipline - puisque en tout domaine d'activitd, sciences, techniques, arts, s'observent des faits et des comportements simiologiques -, pourront se ddfinir et se delimiter des domaines particuliers.

La semiologie generale ne pretendra pas b l'dtude comprehen- sive de toutes les manifestations semiologiques, mais B l'identi- fication, dans ces manifestations innombrables, de processus selon lesquels s'ophre la mise en relation, totalement ou partiellement arbitraire, d'un champ de signifiants avec un champ de signifies.

Ecole pratique des Hautes Etudes.

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