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200 MILLIONS DE JEUNES TOUCHÉS PAR LE CHÔMAGE EN AFRIQUE Mensuel d’informations agricoles et rurales - 9 E ANNÉE - Issn 0850-8844 - NUMERO 80 - MARS 2015 - PRIX : 500 FRS CFA MARCHÉ DU TRAVAIL: CORAF : Le Coraf partage des systèmes d’innovations agricoles IAR4D COMMERCE : « L'APE est un accord équilibré », déclare Alioune Sarr, ministre du Commerce P2 APICULTURE : ‘’L’Etat n’a pas encore vu l’importance du métier d’apiculteur’’, selon Etienne Manga P3 Guest EditoRural PAR MARIÈME SOW, DIRECTRICE D’ENDA-PRONAT DAKAR A u Sénégal, on aurait bien pu immatriculer toutes les terres au nom de toutes les femmes du pays 65% de la population. Ces terres, on sait au moins, que ni l’Etat, ni les maris, ni les frères ne pourront jamais les vendre ou les revendre, comme ce fut le cas à Mbane en 2009, dans la Vallée du Fleuve Sénégal, où plus de 4 000 ha de terres avaient été octroyés à des investisseurs italiens. A l’occasion de la journée internationale de la Femme le 08 mars 2015 je veux que la terre revienne à toutes les femmes pour mettre fin à la lancinante question de l’ac- caparement des terres et dont une rencontre sur la Réforme foncière est prévue dasn quelques mois. Nous trouvons cela très juste. Sauf que cette ré- forme foncière doit tenir compte des aspirations des populations locales, surtout en ce qui concerne les 95% des terres du Domaine national. (suite P7) ‘’Toutes les terres à toutes les femmes…’’ P7 Le chômage des jeunes est un fléau mondial. En Afrique il touche près de 200 millions. Pourtant, les activités agricoles renferment un énorme potentiel d’emplois. Un plaidoyer a été fait pour soutenir les équipes de chercheurs de l’Initiative prospective agricole et rurale (IPAR), du CEDRES (Burkina-Faso) et de MISELI (Mali) qui ont fouillé dans le secteur agricole. Résultats : des projets de créat ions d’emplois-jeunes ont vu le jour. LIRE DOSSIER EN PAGES 4,5&6 AGRI INFOS_80 BAT.qxp_hggy 3/9/15 10:13 AM Page1

E MARCHÉ DU TRAVAIL: 200 MILLIONS DE JEUNES · 2015. 3. 11. · femmes du pays 65% de la population. Ces terres, on sait au moins, que ni l’Etat, ni les maris, ni les frères ne

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200 MILLIONS DE JEUNESTOUCHÉS PAR LE CHÔMAGE EN AFRIQUE

Mensuel d’informations agricoles et rurales - 9E ANNÉE - Issn 0850-8844 - NUMERO 80 - MARS 2015 - PRIX : 500 FRS CFA

MARCHÉ DU TRAVAIL:

cOrAf : Le Coraf partage des systèmesd’innovations agricoles IAR4D

cOMMerce : « l'Ape est un

accord équilibré »,déclare Alioune

Sarr, ministre ducommerce

P2

Apiculture :

‘’L’Etat n’a pas encorevu l’importance dumétier d’apiculteur’’,selon Etienne Manga

P3

Guest EditoRuralPAR MARIÈME SOW, DIRECTRICE D’ENDA-PRONAT DAKAR

Au Sénégal, on aurait bien pu immatriculertoutes les terres au nom de toutes lesfemmes du pays 65% de la population.

Ces terres, on sait au moins, que ni l’Etat, ni lesmaris, ni les frères ne pourront jamais les vendreou les revendre, comme ce fut le cas à Mbaneen 2009, dans la Vallée du Fleuve Sénégal, où plusde 4 000 ha de terres avaient été octroyés à desinvestisseurs italiens. A l’occasion de la journéeinternationale de la Femme le 08 mars 2015 jeveux que la terre revienne à toutes les femmespour mettre fin à la lancinante question de l’ac-caparement des terres et dont une rencontresur la Réforme foncière est prévue dasnquelques mois.Nous trouvons cela très juste. Sauf que cette ré-forme foncière doit tenir compte des aspirationsdes populations locales, surtout en ce qui concerneles 95% des terres du Domaine national. (suite P7)

‘’Toutes les terres àtoutes les femmes…’’

P7

Le chômage des jeunes est un fléau mondial. En Afrique il touche près de 200 millions. Pourtant, les activités agricolesrenferment un énorme potentiel d’emplois. Un plaidoyer a été fait pour soutenir les équipes de chercheurs de l’Initiativeprospective agricole et rurale (IPAR), du CEDRES (Burkina-Faso) et de MISELI (Mali) qui ont fouillé dans le secteur agricole.Résultats : des projets de créat ions d’emplois-jeunes ont vu le jour. LIRE DOSSIER EN PAGES 4,5&6

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AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 20152

Atteinte de l’AutOSuffiSAnce en riz à l’hOrizOn 2017 :le JApOn en phASe Avec le SénégAl pOur lA réAliSAtiOn du pSe (Jade/Syfia) - En collaboration avec le ministère de l’Agriculture et de l’Equipementrural (Maer), l’Agence Japonaise de Coopération Internationale (JICA), a procédé, mi-février 2015, au lancement du Projet d’Appui à la Production durable du riz pluvial,lors d’un atelier à Dakar. Ce projet de coopération technique bilatérale entreles gouvernements du Japon et du Sénégal sera mis en œuvre dans trois régions :Fatick, Kaolack et Kaffrine durant quatre ans à compter d’octobre 2014 à sep-tembre 2018. D’après Ryuichi Kato, le représentant résident de la Jica au Sénégal, ce nouvel appuidu japon, pour les quatre prochaine années, veut contribuer un défi majeur, celuide redynamiser la riziculture pluviale au Sénégal afin de contribuer à l’objectif deproduction 1 600 000 tonnes de riz de paddy à l’horizon 2017. Selonl e représen-tant résident de la Jica au Sénégal, ‘’Longtemps laissée en marge des schémas de dé-veloppement, la riziculture pluviale retrouve aujourd’hui toute sa pertinence dansle schéma d’atteindre des objectifs d’autosuffisance nationale’’, a souligné M. Kato.Pour ce dernier, à la faveur des potentialités considérables et des marges de pro-grès qu’offre ce type de riziculture, les autorités du Sénégal ont opéré une redé-finition de la contribution des zones de production rizicole avec une contributionde 40% dans le volet riz du programme d’accélération de la cadence de l’AgricultureSénégalaise (PRACAS). Quant à Amadou Ndiaye point focal à la Direction de l’Agriculture (DA) il a rappelédans sa présentation du PRIP que le Sénégal est un grand pays consommateur deriz avec 950 000 tonnes annuellement. Ainsi il a précisé que le projet est fi-nancé pour un montant global de deux milliards de F cfa dont un milliard huitmillions de F cfa de la JICA et deux cent millions de F cfa de contrepartie dugouvernement du Sénégal. Selon Amadou Ndiaye, ce projet permettra d’augmen-ter de façon durable la productivité des exploitations familiales, de résorber le dé-ficit de production de riz en vue, d’atteindre l’autosuffisance à l’horizon 2017 maiségalement de contribuer à l’atteinte des 40% de la production escomptée, qui sontassignés à la riziculture pluviale.

cOMMerce : ‘’l'Ape eSt un AccOrd équilibré’’, déclAre AliOuneSArr, MiniStre du cOMMerce (Jade/Syfia) - ‘’L'Accord de partenariat économique (APE) conclu avec l'Union eu-ropéenne peut être considéré comme un accord équilibré, mettant l'accent sur lerenforcement de l'intégration régionale, la priorisation du développement et l'amé-lioration du Programme Ape pour le développement (Paped), l'amélioration de lacompétitivité des entreprises et des exportateurs ouest-africains, l'intégrité du sec-teur agricole et l'inclusion d'une liste régionale pour les produits ouest-africainssensibles’’, a déclaré, début mars, le ministre du Commerce du Sénégal, M. AliouneSarr. M. Sarr a fait son intervention à l'ouverture de l'atelier d'information et de sensibi-lisation sur l'APE et le Tec (Tarif extérieur commun) Cedeao. L’accord vise à établirune zone de libre-échange basée fondamentalement sur l'asymétrie qui tient comp-te de la différence du niveau de développement des deux partenaires.

Agriculture/AliMentAtiOn : lA fArM étudie leS enJeux AgricOleS en Afrique SubSAhA-rienne(Jade/Syfia) - La Fondation pour l’agriculture et la ruralité dans le monde

(FARM) a commandé à Bruno Dorin, chercheur du Cirad détaché au Centre deSciences Humaines de New Delhi (Inde), une étude visant à éclairer les enjeux agri-coles et alimentaires de la transformation structurelle des économies africaines,désormais engagées dans une croissance soutenue, apprend, début mars, dans uncommuniqué parvenu à la rédaction de Jade/Syfia.L’étude de Bruno Dorin porte sur ‘’Quelles perspectives pour l’agriculture et

l’alimentation en Afrique subsaharienne?’’ Les défis de la transformation structurelle: sécurité alimentaire, pauvreté, emploi. Cette s’appuie sur des projections qui fontréférence à celles de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agri-

COMITÉ DE RÉDACTION : Madieng SECK - Ndèye SÈNE - Ababacar GUÈYE, DIARRA BADJI (STAG)ADMINISTRATION : Ababacar GUÈYESECRÉTARIAT DE RÉDACTION ET INFOGRAPHIE : Cheikh TOURÉ (Tel : 77 605 3072)IMPRESSION : AMD GRAPHICDISTRIBUTION : ADPNINEA : 00284430 CO

Hlm Grand-Yoff - Villa n° 1122Bp : 17130 Dakar – LibertéEmail : [email protected]

AGRI INFOSDIRECTEUR DE PUBLICATIONMadieng SECK - TEL : 77 537 96 96

culture (FAO). ‘’La conversion et l’agrégation des données en équivalent caloriesalimentaires, explicitées dans un rapport rédigé pour Pluriagri, permettent de ré-véler et de situer la place de l’Afrique subsaharienne dans les perspectives de laFAO à l’horizon 2050. Cette approche est complétée par une analyse des tendan-ces projetées de la population active agricole qui rend possible une estimation dela productivité moyenne du travail agricole, dimension absente des travaux de laFAO’’, lit-on dans ce communiqué de FARM. La particularité de l’étude est qu’ellefait ressortir trois aspects à savoir : asseoir la sécurité alimentaire, l’Afrique subsa-harienne augmenterait fortement sa production agricole et importerait davantagede denrées ; malgré les progrès de la productivité du travail, les inégalités de revenurisquent de se creuser entre l’agriculture et les autres secteurs. Enfin la capacitéde l’agriculture à offrir des emplois décents et en nombre croissant est limitée parplusieurs facteurs, dont les incertitudes sur la création d’emplois dans les autressecteurs et l’expansion démographique dans les zones rurales.

frAnce-MAli : 25 MilliArdS f cfA pOur le dévelOppeMent lOcAl etSOciAl (Jade/Syfia)- La France, à travers l’Agence française de développement (AFD) etle gouvernement Malien ont signé deux accords de financement d’une valeur glo-bale de 40 millions d’euros, soit environ 25,5 milliards F cfa, apprend-on, à la mi-fé-vrier, de source proche de la commission européenne. Le premier accord de financement, d’une valeur 13 millions d’euros, soit 8,5milliards F cfa, est consacré à la deuxième phase du programme d’appui au déve-loppement sanitaire de la région de Mopti. Le second accord de financement, de27 millions d’euros, soit 17 milliards F cfa, est destiné au développement des ter-ritoires ruraux des régions de Ségou et de Tombouctou. Ces financements permet-tront de donner aux collectivités territoriales les moyens de structurer et de dy-namiser les filières agricoles et pastorales de la région de Ségou et de Tombouc-tou.

vélingArA : leS MenuiSierS MArchent cOntre lA cOupe de bOiS (APS) - L’Association départementale des menuisiers de Vélingara (sud) a organiséjeudi, fin février une marche pacifique, pour protester contre la coupe abusive desarbres et le gaspillage des ressources forestières dans leur département. En sillonnant les artères principales de la ville, les menuisiers ont alerté le servicedes Eaux et Forêts et les autorités locales sur ce phénomène et ses probablesconséquences. ‘’C’est la nature qui nourrit l’homme, le soigne, l’habille. La naturenous donne son bois. Mais si celle-ci n’existe plus, c’est la catastrophe’’, a averti Ti-diane Baldé, président de l’Association des menuisiers du département de Vélingara.‘’Dans cette contrée sud du pays qui partage ses frontières avec trois pays (la Répu-blique de Guinée, la Gambie et la Guinée Bissau), la forêt fait l’objet d’une dégrada-tion par l’abattage anarchique et abusif d’arbres le long des frontières par des en-treprises étrangères basées à Banjul, en Gambie’’, a-t-il dénoncé. En plus d’attirerl’attention des autorités et du service des Eaux et Forêts sur ce ‘’fléau’’, les menui-siers ont invité tous les acteurs du développement, notamment ceux qui protègentla nature, à prendre toutes les dispositions idoines, afin de guérir le mal par la racine.L’adjoint au préfet de Vélingara, El Hadji Ousmane Diédhiou, qui a reçu le mémoran-dum des manifestants, invitent les organisations qui exploitent les ressources fores-

tières à se plier à la loi sénégalaise en vigueur.

Mille JArdinS de SlOW fOOd : un bOn trAvAil de terrAin Au MAli(Jade/Syfia) -Au Mali, ‘’Akadi de Tanima 2000", une Communauté de la nourritureSLOW FOOD", a réussi un bon travail de terrain, en mettant en place, et partenariatavec Terre et Humanisme, le Caproset, l’Uaves, ainsi que le CSFRA de Oumar Dia-baté, un jardin potager, apprend mi- février, l’agence de presse Jade/Syfia de sourcebien informée.La réussite de ces équipes du projet ‘’Mille Jardins’’ au Mali est le fruit de formations enAgro écologie et en production de semences, au profit des femmes de 24 villages ac-compagnées par quatre animateurs. Il y a eu aussi de la mise en place d’infrastructuresappropriées. Sur la dynamique de ce projet ‘’Mille jardins’’ au Mali, on apprend qu’en2014, les animateurs Akadi avaient formé 30 femmes et deux animatrices en productionde semences de pommes de terre. Selon les informations reçues, dans 12 villages la pro-duction de semences de pommes de terre été encourageante. ‘’Ces résultats nousconfortent dans l’idée de poursuivre notre action vers la souveraineté alimentaire’’, es-time madame Fanny Bréchard, la présidente de Tanima 2000. ’’Cependant, devant la com-plexité de la production des semences reproductibles, nous devons redoubler d’effortset nous appuyer sur les compétences de nos partenaires techniques’’, ajoute Fanny Bré-chard. Parlant des banques de céréales, elle indique que 10 villages en ont créé, soit 16T 400 de riz engrangées pour un bénéfice de 1 640 000 F cfa. Ce qui correspond à unesomme de 2500 euros. S’agissant du micro-crédits, Fanny signale que 906 productricesdans 13 villages en ont bénéficié et le fonds est actuellement de 3 442 950 F cfa, soit5399 euros. En conclusion, souligne la présidente de Tanima 2000, ‘’le prévisionnel et lesactivités 2015, s'ils sont tenus, nous laissent entrevoir la couverture des activités de laparcelle école et le salaire du jardinier ainsi qu’une partie des frais de fonctionnement’’ Pour rappel, deux personnes du projet AKADI participeront aux rencontres d’Agroé-cologie qui auront lieu du 16 au 19 Février 2015 au Burkina Faso, en présence de PierreRabhi.

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ACTUALITE

AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015

La rencontre a été présidée par leconseiller technique du ministre de l’A-griculture de l’Equipement rural (Maer)M. Mboup. Il avait à ses côtés le directeurexécutif du Conseil Ouest et Centreafricain pour la recherche et le dévelop-pement agricoles (Coraf/Wecard), DrHarold Roy Macauley, la représentantede l’Ambassade d’Australie au Ghana, dela Banque mondiale à Dakar.

Chercheurs, professeurs, Docteurs,universitaires, Bailleurs de fonds, étu-diants venus un peu partout d’Afrique etd’Europe ont pris part à cette conféren-

ce internationale. Thème de cette rencontre : Faciliter

les changements dans les systèmes agri-coles en Afrique de l’Ouest et du Cent-re, à travers l’application de la Rechercheagricole intégrée pour le développement(IAR4D). L’approche ‘’IAR4D’’ qui consis-te à faciliter les changements, les métho-des de pratique dans les systèmes agri-coles a fait l’objet d’échanges de cetteconférence organisée par le Coraf/We-card en partenariat avec Convergencesdes sciences (Cos) et des organismesaustraliens d’aide au développement

exemple Australian Aid, le Csiro et leDfat. ‘’Nous attendons à ce que toutesles expériences que nous avons acquisesdans la mise en œuvre des plateformesd’innovations, dans le contexte du projetde recherche et de développement coor-donné par le Coraf/Wecard, soient par-tagées’’, a expliqué Dr Harold Roy Ma-cauley à la presse.

En effet, les systèmes agricoles pré-dominants en Afrique de l’Ouest et duCentre sont de petites exploitationsagricoles avec des systèmes mixtes agri-culture-élevage. L’intensification durablede ces systèmes est ‘’une voie qui ré-pond à la fois aux objectifs de subsistan-ce des petits agriculteurs et aux oppor-

tunités de marchés engendrées par lacroissance démographique’’. De ce fait,l’approche IAR4D qui est inclusive pour-rait contribuer à l’application de ces ré-sultats par les paysans. ‘’Avec les platefor-mes d’innovation, c’est la façon de tra-vailler qu’on est en train de changer. Faceà une problématique de semences, defoncier ou autres, on interpelle tous lesacteurs pour trouver des solutions. C’estimportant. Tant qu’on n’a pas fait cetteapproche, on pointe toujours un doigtaccusateur aux chercheurs’’, avance DrMacauley.

l’approche iAr4d améliorede 30% les rendements

Auparavant, à l’ouverture, les nomb-reux orateurs avaient salué la tenue decette conférence. Le représentant du mi-nistre de l’Agriculture, M. Mboup a saluéla collaboration entre son départementet le Coraf/Wecard. Il a également ma-gnifié l’apport de l’Australie qui a traver-sé Steppe, Savane pour venir apporterson appui à la recherche agricole enAfrique de l’Ouest et du Centre.

De son côté, Mme Gisèle Lopèsd’Almeida, la représentante du PCA duCoraf, a salué le gouvernement austra-lien qui a financé 100 millions de dollarsaustralien (plus de 46 milliards de F cfa)pour la sécurité alimentaire, à traversson programme ‘’Initiative pour la sécuri-té alimentaire en Afrique’’. Elle s’est ré-jouie de l’acceptation des six projetsagricoles exécutés dans 10 pays d’A-frique de l’Ouest et du Centre dont le fi-nancement tourne autour de 10 millionsde dollars Us, soit environ six milliardsde F cfa. ‘’La particularité de ces projets,se caractérise par la participation de 14chercheurs du CSIRO*, dans les équipes

de recherche. Ils ont contribué dans lesdomaines d’analyses des systèmes, la mo-délisation, l’amélioration des techniquesd’expérimentation, le système de suivi-évaluation et l’apprentissage. Ils ont putisser des relations solides avec les mem-bres des équipes. Cette expérienceconstitue un bel exemple de coopérationréussie’’, a témoigné Gisèle d’Almeida.

Dans la même lancée, elle a rappeléque les projets – Dfat ont été exécutéssuivant l’approche de l’IAR4D en confor-mité avec le plan stratégique du Coraf.Cela a permis l’établissement de 60 pla-teformes d’innovation multi-acteurs. Se-lon Mme d’Almeida, cette approche estla plus grande expérience dans la sous-région, parce qu’elle permet une rapideadoption et diffusion des technologies.Effet immédiat. Les résultats ont suivi.Les rendements du sorgho, de mil et demaïs ont été améliorés d’au moins 30%.La production animale a connu des amé-liorations significatives, grâce au dévelop-pement de rations alimentaires. Pareillepour la production de lait, qui a doublédans certaines régions. La collecte et lacommercialisation ont aussi été amélio-rées. ‘’Les cas de succès et les change-ments induits par les femmes, leur ontpermis de bénéficier de ces innovations.C’est dire, que le genre a effectivementété pris en compte par les équipes de re-cherche’’, s’est réjouie Mme D’Almeida.

Cependant, dit-elle, avec ces expé-riences une réflexion profonde s’imposeen vue de son amélioration. Cela est ca-pital pour le Coraf, car elle permettra auPlan Opérationnel 2 de capitaliser les le-çons apprises.

Csiro = Commonwealth Scientific And Industrial Research OrganisationDfat = Département des affaires Etran-gères et du Commerce de l’Australie.

RECHERCHE AGRICOLE :

Le Coraf partage des systèmes d’innovations agricoles

(Jade/Syfia) – Les participants à la conférence internationale sur les systèmes d’inno-vation agricoles en Afrique de l’Ouest et du Centre, organisée par le Coraf/Wecard, finfévrier à Saly (100 km de Dakar), ont été imprégnés de l’Approche ‘’IARD4D’’ ainsique son impact dans les systèmes agricoles.

zPAR ABABACAR GUÈYE

(Jade/Syfia)- A la Conférence interna-tionale sur les systèmes d’innovation enAfrique de l’Ouest et du Centre or-ganisé par le Coraf/Wecard du 25 au27 février à Mbour (100 km de Dakar),Ouedraogo Souleymane, chercheur àl’Inera (Institut national de l’Environne-ment et de la recherche agricoles) auBurkina Faso et Coordonnateur régio-nal du Projet ‘’Options d’intensificationDurable’’ (OID) revient sur l’approche‘’IAR4D’’. Le projet a permis aux pro-ducteurs et éleveurs d’améliorer leursproductions.

Options d’intensification Durable (OID), dequoi s’agit-il ?

‘’Options d’intensification Durable (OID) est unprojet sous-régional qui implique quatre pays : Séné-gal, Niger, Mali et Burkina Faso pour la coordinationrégionale. Il est financé par la Dfad (départementdes Affaires étrangères du Commerce de l’Austra-lie). L’OID se fonde sur : Comment les exploitationsagricoles familiales peuvent développer des optionsqui peuvent être durables, productifs et qui peuventégalement les permettre d’avoir des revenus sub-stantiels. En ce sens, le projet s’articule autour del’Approche IAR4D (l’Application de la Recherche

agricole intégrée pour le développement) qui partd’un diagnostic. Nous avons fait un diagnostic avecles producteurs.’’

Quels sont les problèmes identifiés ? Nous avons identifié deux problèmes majeurs :

la faiblesse de la production des céréales, de lait-viande, ainsi que l’accès au marché. Pour résoudre

ces contraintes, nous avons ensemble décidé demettre une plateforme d’innovation.

Expliquez-nous cette plateforme d’innova-tion ?

L’objectif de cette plateforme d’innovation, c’estd’abord d’apprendre à résoudre les problèmes etensuite faire la relation entre la production et lemarché. C’est deux objectifs vont de paire. Une pla-teforme qui traite uniquement du marché ne va pasêtre durable, parce qu’une fois ce problème réglé, laproduction reste un autre cas. L’idée pour nousc’est vraiment de développer des technologies avecles producteurs dans un apprentissage collectif pournous convaincre que nous avons des possibilités d’a-méliorer la productivité au sein de l’unité d’exploi-tation agricole. Et ensuite, si on améliore la produc-tion, nous devons aller au marché parce que la mo-tivation par essence c’est le revenu. Donc, nousavons travaillé au sein de notre projet à apprendreensemble comment améliorer la production etcomment lier la production au marché en gardanten vue la plateforme d’innovation.

Quelles sont les difficultés que les acteurs rencon-trent dans la plateforme d’innovation ?

L’une des difficultés est que c’est un système agri-cole pluvial. Il y a la question de la fertilité des sols quise pose de manière cruciale, celle de l’alimentationdes animaux, ainsi que la question de la commerciali-sation des produits. L’objectif de ce projet est d’atta-quer à toutes ces questions pour qu’on puisse trou-ver des solutions qui permettent, à la fois d’augmen-ter la productivité et de trouver des marchés. Et les

résultats s’en suivent comme je l’ai expliqué tantôt. Quelles solutions ont été apportées ?

Nous avons pu montrer qu’on peut améliorer laproductivité agricole. Pour le cas du maïs, nousavons, dans les exploitations familiales, augmenté laproduction qui était de 1 t/ha. Ce rendement nousl’avons accru de 30 à 40%. Pour y arriver, nous avonseu des expérimentations relativement simples avecles producteurs dans leurs champs. Cela consistait àrespecter le cycle cultural, à suivre les conseils destechniciens. Les résultats ont suivi et les produc-teurs étaient convaincus que c’est possible. Côtéproduction animale, nous avons développé des racespour faire de l’embouche bovine, ovine avec des res-sources qui sont produites dans ces mêmes exploi-tations familiales. Dans l’agriculture et l’élevage, lesacteurs ne rencontreront plus des difficultés d’ali-ment de bétail, de fumier pour la fertilité des sols.Ainsi, ils peuvent valoriser intensément leurs activi-tés et d’avoir des revenus.

Quel mécanisme, à travers la plateformed’innovation, vous avez adopté pour nouerdes partenariats ?

Nous avons, à travers la plateforme, fait travaillerles acteurs du marché. Nous sommes allés même jus-qu’à signer des contrats de production. Les agrobusi-ness ont financé les intrants, en contrepartie ils ontreçu du maïs en fonction des besoins de leur marché.Ce qui est un enseignement très important… A tra-vers cette démarche, les acteurs de la chaîne de va-leur peuvent évaluer leur contribution au développe-ment. On voit qu’en mettant les acteurs du marchédans le système, on réalise un impact tout de suiteparce qu’ils trouveront rapidement leur compte.

M. Ouedraogo Souleymane, coordonnateur régional duProjet ‘’Options d’intensification Durable’’ (OID)

PROPOS RECUEILLIS PAR ABABACAR GUÈYE

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D O S S I E R : E M P L O I D E S J E U N E S

4 AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015

Si Cheikh Oumar Bâ, DirecteurExécutif de l’Ipar (Initiative pro-spective agricole et rurale) s’est

dit ‘’satisfait de la forte présence’’ d’ex-perts, de chercheurs, de gens de la socié-té civile, de représentants d’Op et d’en-trepreneurs ruraux, à l’Atelier organisémi février à Dakar sur : ‘’Emploi des jeu-nes et migration en Afrique de l’Ouest’’(EJMAO), des vérités ont été discutéessans fards à cette rencontre.

L’Acte 1 de la cérémonie d’ouvertu-re officielle fut jouée par le ministre del’Agriculture et de l’Equipement rural(MAER). Le Dr Pape Abdoulaye Secks’est félicité du travail de l’Ipar qui, dit-il,‘’doit être appuyé’’, parce que les cher-cheurs qui y font ces études, sont des‘’architectes’’ et des ‘’bâtisseurs’’, souli-gnant sa forte conviction qu’en Afrique‘’on doit penser par nous mêmes et pournous mêmes’’. Le ministre de l’Agricultu-re a appelé, en effet, ‘’à créer les condi-tions d’un exode urbain massif anéantis-sant l’exode rural’’. Pour ce faire, il avan-ce comme préalable : ‘’la constitutiond’une agriculture forte qui puisse tirerprofit de la mondialisation avec des acti-vités génératrices de revenus pour fixerles jeunes et les femmes ; l’élaboration etla mise en œuvre d’une politique finan-cière ; l’assainissement de la productionet de la commercialisation’’. En somme,dit le ministre de l’Agriculture, il s’agit derenforcer la capacité du Sénégal à traversle PSE et le PRACAS* pour construire‘’une agriculture compétitive, rentable etdurable’’. Pape Abdoulaye Seck a souli-gné, à ce propos, l’importance particuliè-re que son Département attache à la re-cherche, relevant qu’ ‘’il ne peut pas yavoir une agriculture forte, sans une re-cherche forte’’.

Comme lui, auparavant, l’ambassa-

deur du Canada avait soutenu que ce tra-vail de recherche de l’Ipar, en partenariatavec le CRDI, ‘’a été bien fait’’, parce quetenant compte des préoccupations desjeunes du Sénégal, du Mali et du Burkina-Faso. Et le diplomate de suggérer auMAER d’appuyer cette Etude EJMAO, ain-si que les chercheurs qui l’ont réalisée.

Au cours de cette cérémonie, les re-présentants de l’AFD et de l’UEMOAont aussi pris la parole pour plaider l’ap-pui de ce projet de l’Ipar, insistant sur laformation professionnelle des jeunes,ainsi que l’érection d’un Observatoirecommun sous-régional pour l’emploi desjeunes dans la zone UEMOA (Union éco-nomique et monétaire Ouest africaine)

• L’Agriculture,un énorme po-tentiel de créa-tion d’emplois

Le second Acte de cette rencontre aété marqué par des débats non officiels.C’est ainsi que des voix ont fait entendred’autres sons de cloches. Des voix quiont permis de dessiller les yeux de bonnombre de participants sur l’ampleur dumarché du travail en Afrique où, selon lesorganisateurs, sur près de 200 millionsd’habitants, les 60% sont des de jeuneschômeurs de 15 à 24 ans. Des jeunes qui,selon certains participants, devisent à lon-gueur de journée autour du thé, à l’omb-re des perrons de la baraque familiale.

Sur les résultats de recherche EJ-MAO au Mali et au Sénégal IbrahimaAthie, directeur de recherche à l’Ipar(lire encadré) indique, qu’en 2011 au Sé-négal, la population jeune (15-35 ans) aaugmenté de 8% et a atteint 4,5 millions

d’individus. ‘’En milieu urbain, indique MAthie, le taux d’emploi est de 31% à Da-kar et 27% dans les autres régions. En mi-lieu rural, il se situe à près de 45%’’. Mais,si le secteur agricole possède un poten-tiel de création d’emplois, le manqued’informations des jeunes et des déci-deurs politiques sur le fonctionnementde ce marché du travail constitue un sé-rieux handicap.

Le modérateur du jour de cet Acte IIde la scène, le Dr Cheikh par O Bâ del’Ipar, a joué de la démocratie participati-ve en donnant la parole aux participants.

Mais qui est jeune ? Du coup cettequestion était plusieurs fois revenue dansla bouche des intervenants qui ont aussiplaidé pour l’auto-entreprenariat rural,soulignant que dans ’’une étude de cetype, on ne peut pas tout prévoir et qu’ilfaut donner une suite et aller vers à l’autoentreprenariat’’, ont souligné certainsintervenants. Autres interrogations. Com-ment faire pour fixer les jeunes ? ‘’Il fautprendre en compte la dimension politiquede la question et juguler la carence d’in-formations sur le marché de l’emploi dansun environnement mondialisé’’, a suggérél’expert Mbaye Sarr bien au fait des ques-tions macroéconomiques du continent etdes négociations sur les Ape (Accords departenariat économique). Puis d’ajouteravec une belle formule : ‘’Toute croissancen’est pas initiatrice d’emplois’’

• Anida : 60 000emplois jeunescréées en 2014

Pour fixer les jeunes, rappelle le re-présentant l’Anida (Agence nationaled’insertion et de développement agrico-le), ‘’il faut changer les règles d’attribu-tion des terres à ces jeunes qui n’en pos-sèdent pas toujours’’, rappelle l’expert,

affirmant que près de 60 000 emplois ontété crées par Anida en 2014. Sur quoi s’a-joutent ‘’les 76 fermes agricoles ouvertesla même année’’, avance M Fall de Anidaqui plaide aussi pour la maîtrise de l’eau.

Mme Gisèle Lopez d’Almeida, entre-preneure rurale à Interface, par ailleursmembre du Conseil d’Administration del’Ipar, a beaucoup titillé la salle, lançantparfois des volées de bois vert à l’endroitde l’administration sénégalaise qui, dit-elle, ‘’n’encourage pas l’entreprenariatrural privé, pourtant présent dans toutela chaîne de valeur agricole’’. Un secteurprivé dans lequel investissent paysans etdirigeants de PME/PMI locales qui ‘’sebattent seuls parce qu’ils croient en eux-mêmes et comptent sur leur propre for-ce’’ pour développer leur pays. Puis Mmed’Almeida de se demander : Est ce quedans ces conditions l’agriculture peut at-tirer les jeunes et les encourager versentreprenariat rural ? Elle souligne ainsila nécessité de travailler ‘’sur des modè-les qui marchent.’’, rallumant du coup l’i-dée que ‘’le monde s’urbanise, suivi par larévolution de Ntic’’. D’où sa propositionde mettre des écoles, de l’eau et de l’é-lectricité dans les villages.

Bref, le coup de gueule de cette capi-taine d’industrie rurale qui ‘’raconte’’ sonexpérience difficile (taxes, impôts, etc.) apréféré alerter les futurs jeunes entrepre-neurs. Auparavant elle s’était beaucoup of-fusquée de la suite des négociations surles Ape (lire encadre) au sujet desquels,elle dira cru : ‘’les décideurs politiques afri-cains ont manqué de vision…’’

Sur cette question très controverséedes Ape, le représentant du Roppa (Ré-seau des organisations paysannes et desproducteurs de l’Afrique de l’Ouest) Lio-nel Lokassou (Bénin) a dit aussi sa désola-tion face au désaccord des Etats membresde l’Uemoa et de la Cedeao. ’’Où va-t-onavec la signature des Ape ? Est ce que lesjeunes africains vont avoir le courage de selancer dans l’agriculture ?’’, s’interroge M

Lokassou. Dans ces négociations qui res-semblent à un ‘’affrontement entre Davidet Goliath’’ le patron du Roppa se de-mande : ‘’Est ce qu’avec l’avènement desApe, l’agriculture pourra nourrir sonhomme.

• L’exemple dePape Bakary Coly

Un bémol cependant. Lionel Lokassouévoque le Pnia qui est une bonne politiqueagricole. Selon lui dans ‘’ce programme in-itié par la Cedeao, tout est prévu… Il fautaller vers la chaîne de valeur et suivre leprocédé de la contractualisation entreproducteur et privé. Réponse de M Sarr :‘’Les Ape c’est une bataille perdue ! Il fauts’adapter’’ Pour inverser la tendance del’exode rural et créer des emplois chez lesjeunes, le Directeur de cabinet du ministrede la Jeunesse, de l’Emploi et de la Cons-truction citoyenne, Demba Diop appellequant à lui à donner une meilleure imagede l’agriculture sénégalaise. ‘’Notre agricul-ture n’a rien d’attractif’’, affirme-t-il. Ce-pendant, M Diop estime que l’expériencedu Programme des domaines agricolescommunautaires (Prodac) n’est plus à dé-montrer car selon lui ‘’le Prodac a mêmeinspiré certaines initiatives de la FAO, et adans le Prodac, il y a des domaines nonagricoles couverts par l’ANPEJ (Agencenationale pour l’emploi des jeunes). Il lestitille l’assistance en disant que ‘’le travailne se trouve pas sous l’arbre à palabre…’’

Cette réalité de l’arbre à palabre, PapeBakary Coly (35 ans) du Collège des jeu-nes du Cncr (Conseil national de concer-tation et de coopération des ruraux duSénégal) ne la vit pas. Loin s’en faut. Cetagro-aviculteur de Sangalkam (lire troisquestions à..), mise sur la formation desjeunes en leur facilitant l’accès à la terre etau financement. ‘’Le meilleur investisse-ment, dit-il, c’est d’investir sur nous-mê-mes. Pour que les jeunes s’engagent dansl’agriculture ; mettez à l’aise ceux qui ysont déjà’’, allusion faite aux lancinantesinterrogations évoquées par Mme d’Al-meida pour son option du non formeldans ses activités. Bref, Coly parle de troisF qui sont : la Formation, le Foncier et leFinancement.

MARCHÉ DU TRAVAIL :200 millions de jeunes touchés par le chô-

mage en Afrique

zPAR MADIENG SECK

(Jade/Syfia)-Le chômage des jeunes est un fléau mondial. En Afrique il touche près de 200

millions de jeunes. Pourtant, les activités agricoles renferment un énorme potentiel d’em-

plois. Un plaidoyer a été fait pour soutenir les équipes de chercheurs de l’Ipar (Initiative pro-

spective agricole et rurale), du CEDRES (Burkina-Faso) et de MISELI (Mali) qui ont fouillé

dans le secteur agricole. Résultats : des projets de créations d’emplois-jeunes ont vu le jour.

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D O S S I E R : E M P L O I D E S J E U N E S

AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015

Jade/Syfia/Comment êtesvous venus à l’aviculture ?Papa Bakary Coly ‘’L'aviculture

a toujours été une passion pourmoi depuis mon enfance. A l’école,je faisais de l'aviculture pendant lesgrandes vacances et c'est avec cet-te activité que j'ai appris à être trèsmatinal. J'allais à l'école juste pouravoir certaines connaissances, unebonne instruction pour vivre di-gnement. L'aviculture c'est mondestin. Aujourd’hui, j’ai une produc-tion d’environ 24 000 poulets dechair/an et 7500 pondeuses en ac-tivité’’

Jade/Syfia/ Votre exploitationavicole nourrit-elle-son hom-me ou son jeune homme ?P.B.C ‘’La réponse est sans nul

doute oui. Il suffit de lui donner ‘’tavie’’ et ‘’elle te rendra tout’’. Com-

me ont dit pour la Terre, l'avicultu-re ne ment pas et elle fait plus que‘’nourrir son homme’’. Mon exploi-tation avicole nourrit plus de huit(8) chefs de familles qui y tra-vaillent et indirectement près d’u-ne centaine de personnes. Je mèneune vie comme tous les jeunes demon âge. Je suis un jeune à part en-tière et non entièrement à part.Avec mes revenus, je gagne bien mavie d’aviculteur et je n’envie pasmes congénères jeunes’’

Jade/Syfia/ Le Cncr vous ap-puie-t-il ? ou bien ce sont lesprogrammes l’Etat qui voussoutiennent? P.B.C ‘’Pour moi, ce que fait le

Cncr, c’est plus qu'un appui. Le pre-mier appui, c'est la prise de cons-cience. Avec le CNCR j'ai compris,

en tant que jeune, que j'avais le mé-tier le plus noble. Etre un paysan-agro aviculteur. Cela veut dire, faireparti de ceux qui nourrissent lemonde…avec de bonnes dizainesde cuisses de poulets locaux parsemaine. Rire ! Autre chose que leCNCR m’a fait comprendre : C'estcette symbiose qui existe entre lesjeunes producteurs et qui fait duCollège des jeunes du CNCR unCadre de concertation pour la pri-se en compte des préoccupationsdes jeunes qui sont dans les activi-tés agro sylvo pastorales et halieu-tiques et qui nous permet aussi dediversifier nos activités. La forma-tion, le plaidoyer et le lobbying fontpartis des soutiens du CNCR. Dela part de l'État j'espère que celaviendra un jour…’’

pape bacary colyCollège des jeunes du Cncr

‘’Avec une production d’environ 24 000 pouletsde chair par an, l’aviculture nourrit son homme’’

PROPOS RECUEILLIS PAR MADIENG SECK

Quelles sont les grandes étapesde votre enquête sur l’emploides jeunes ?

L’IPAR a conduit des enquêtesauprès de 1500 ménages ruraux ré-parties dans deux zones: Dans le Bas-sin arachidier, une région dominéepar l’agriculture pluviale et caractéri-sée par une pression démographiqueet foncière, ainsi qu’une dégradationprononcée des ressources naturel-les. C’est aussi une zone de départen termes de migration interne dufait de la faiblesse de la demande detravail. Il y a aussi les Niayes et le Del-ta du Fleuve Sénégal qui offrent d’im-portantes potentialités en termes demaitrise de l’eau et des possibilitésde mener des activités agricoles tou-te l’année. Les enquêtes ménages ontété complétées par des entretiensindividuels et des focus groups avecune diversité d’acteurs, y comprisdes jeunes des deux sexes. Afin demieux saisir les caractéristiques de la

migration interne des jeunes, les mi-grants en provenance de la zone duBassin arachidier et installés à Dakaront été ciblés. Sur la base des profilsde métiers des migrants pré-identi-fiés lors des enquêtes ménages, 500jeunes migrants furent interrogés enmilieu urbain. Toutes ces donnéesont été traitées et analysées. Les ré-sultats ont été restitués aussi bien auplan national que sous régional.

On dit qu’il y a environ 200millions de jeunes sans emploien Afrique de l’Ouest, qu’elle estla part du Sénégal dans cettefourchette ?

‘’La population jeune âgée entre15-24 ans en Afrique de l’Ouest estestimée à environ 200 millions. Si l’onconsidère que le taux de chômagedans la sous région est de 12%, alorsil y a 24 millions de chômeurs danscette classe d’âge 15-24 ans. Au-delàdes normes du BIT (Bureau interna-

tional du travail), il faudra certaine-ment faire un exercice similaire pourla tranche 15-34 ans, plus pertinenteen Afrique Subsaharienne. Néan-moins, le chômage des jeunes est unproblème réel, notamment en milieuurbain et en particulier parmi les di-plômés. Mais le problème est beau-coup plus pernicieux car les taux dechômage (selon la définition du BIT)ne reflètent pas le désarroi des jeu-nes, le plus souvent victimes du sous-emploi. Les couches rurales souffrentd’ailleurs plus de ce problème. Lesactivités non agricoles, y compris lesecteur informel urbain, restent leprincipal réceptacle de tous ces jeu-nes mais ne leur offrent pas demeilleures alternatives.

Au Sénégal, on voit qu’il y a deplus en plus de projets sur l’em-ploi des jeunes, est ce la suite devos recherches au niveau de l’I-par ?

Les nombreux projets initiés parle Gouvernement constituent uneréponse à la lancinante question del’emploi des jeunes. En initiant le pro-jet de recherche sur l’emploi des jeu-nes en milieu rural, l’ambition de l’I-PAR est de contribuer à une meilleu-re connaissance de la structure et dufonctionnement des marchés de tra-vail, afin d’éclairer les politiques pu-bliques en matière d’emploi. En tantque Think Tank, notre rôle consiste à

fournir des preuves à travers la re-cherche, et à contribuer à enclen-cher le dialogue politique nécessaireentre acteurs dans le processus d’é-laboration, de mise en œuvre et d’é-valuation des politiques. La complexi-té des problèmes d’emploi nécessiteune approche holistique et une veillede tous les instants pour faciliter lacapitalisation des expériences et lamise à l’échelle des ilots de succès.

ibrahima Athie,directeur de recherche à l’Ipar

(Jade/Syfia)-Des enquêtes ont été menées en 2014 auprès de 1500 ménages rurauxréparties dans deux zones: le Bassin arachidier, les Niayes et le Delta du Fleuve. Cesenquêtes ont été complétées par des entretiens individuels. Le chômage des jeunesest apparu comme un problème réel. Les couches rurales souffrent d’ailleurs plusde ce problème. Entretien !

PROPOS RECUEILLIS PAR MADIENG SECK

‘’Les jeunes ruraux souffrent beaucoup du chômage’’

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A P I C U L T U R E

AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015

Agri Infos : Comment se porte l’a-piculture en Casamance avec sesénormes potentialités ?

Etienne Manga ‘’Le mot Apicultureest composé du préfixe latin APIS(abeille) et du suffixe colere (cultiver). Latraduction littéraire définit donc l’apicul-teur comme étant le fait de cultiver desabeilles de manière générale. En Casa-mance, la production reste encore faible,bien que la région regorge d’un potentieltrès important. Il y a de cela 10 ans quedes initiatives ont été prises pour mo-derniser les techniques de production,de transformation et de conditionne-ment des ruchers et équipements mo-dernes dans la région avec des apicul-teurs connus comme Ababacar Diedhiouà Birassou, Djibril Diatta à Kafountine,Etienne Manga à Ziguinchor. Au mêmemoment, nous assistons à l’implantationdes premiers ruchers avec une Unité detraitement et de conditionnement dumiel qui respectent les normes agro-ali-mentaire dans la région. On ne peut pasdonc dire que l’apiculture se porte àmerveille en Casamance.’’

Agri Infos : Les apiculteurs sont-ilsdans un cadre interprofessionnelleur permettant d’améliorer leurmétier?

E M ‘’Aujourd’hui, la technique estmaitrisée par des apiculteurs profession-nels qu’on peut retrouver à Bassirou, Ka-fountine et Ziguinchor. Ils tentent de seregrouper pour améliorer leur conditionde travail. Les potentiels du secteur sontplus importants dans la Basse Casaman-ce où on garde encore de grands espacesforestiers communément appelés Boissacré ou Forêt royale. Dans ces espaceslà, nous y trouvons des centaines et descentaines de colonies sauvages signe visi-

ble de la présence d’abeilles et de la res-source apicole. Dans ces espaces, il y aaussi des dizaines et des dizaines de ‘’bo-longs’’ (Chenal d’eau salée, caractéris-tiques des zones côtières du Sénégal etde la Gambie Ndlr : ) entourés d’impor-tantes forêts de mangroves composéesde milliers et de milliers de palétuviers.Ces espaces sont très propices à la pro-duction du miel’’.

Quels sont les problèmes dansle secteur ?

E M ‘’Dans le secteur, on observel’absence d’un Centre de formation et derecherche dans la région. Cela, même siles jeunes comprennent que le métierd’apiculteur peut être une solution dura-ble pour lutter contre la pauvreté et lechômage. L’Etat doit s’intéresser davan-

tage à la filière apicole, développer unestratégie décentralisée soutenue. Parceque l’apiculture est un secteur qui peutabsorber beaucoup de jeunes en situa-tion de chômage et de pauvreté.

Aussi, la non maitrise de certainestechniques dans la production apicole etde la transformation (pour faire gagneren valeur ajoutée à notre miel de Casa-mance : Ndlr) est due aux voyages limitésà l’étranger et au manque d’échangesd’expériences professionnelles auprès degrandes exploitations de référencesmondiales. Ces obstacles freinent lacroissance de l’apiculture moderne enCasamance.

Nous déplorons aussi le manque destations de démultiplications des colonieset de fécondation des reines, ainsi quedes boutiques d’équipements. Tous cesmanquements ne peuvent se réaliser sansla volonté de l’Etat. Enfin, on note l’absen-ce d’organisation des acteurs autour d’u-ne structure interprofessionnelle pourtrouver des solutions aux problèmes.

La Casamance, me disait une ex-perte française en apiculture, re-gorge d’énormes potentialités pasdu tout bien exploitées de manièredurable. Qu’en pensez-vous ?

‘’Oui ! En 2001 nous avions eu la vi-site d’une experte française en Apicultu-re, en l’occurrence madame Sylvie Rancequi a visité la Casamance pendant unmois. Durant son séjour nous avions faitle tour de la Basse, moyenne et hauteCasamance. Après avoir répertorié lesdifférentes flores qui composent la ré-gion naturelle du Sud, nous avions identi-fié les espèces mellifères qui pourraientdonner du miel en qualité et en quantitéimportante pour la Casamance. Danscette zone, la flore est très diversifiéeavec une courbe de floraison observéesept à huit mois dans l’année avec desfleurs saines. En effet, en Casamance, la

production d’une ruche moderne parsaison se situe entre 15 à 20 kg de miel(soit entre 20 et 30 litres de miel vendusà 2500 F cfa/litre : Ndlr), alors que, avecla méthode de transhumance des ru-ches, il est possible de faire deux récol-tes dans l’année. Cependant, à côté decette richesse fabuleuse, Sylvie avaitconstaté l’existence de très peu de ru-ches. Elle y avait noté aussi que l’apicul-ture était encore traditionnelle.

Les apiculteurs sont-ils dans un ca-dre interprofessionnel leur per-mettant d’améliorer leur métier ?

E M ‘’Comme je l’ai évoqué un peuplus haut, en Casamance nous n’avonspas un Centre de formation pour lesjeunes dans ce secteur. Les Ong et pro-grammes existants, comme le Program-me d’appui au développement écono-mique de la Casamance (PADEC), for-

ment des apiculteurs. Nous pensons queces apiculteurs qui ont bénéficié de l’ap-pui du PADEC sont en mesure de volerde leurs propres ailes. Car, ils ont été suf-fisamment suivis pendant trois ans. Desformateurs ont eu à leur faire tous lesexercices nécessaires leur permettant depouvoir gérer une exploitation apicole.

Nous avons aussi eu ce que nous ap-pelons la formation des formateurs. Cesont des volontaires Européens quiétaient venus nous dispenser des courspratiques en apiculture accompagnésd’une riche documentation. Durant cesformations, les apiculteurs locaux pren-nent eux mêmes en charge le formateur.Ces formations ont débouché, la plupart,sur la création d’exploitations profes-sionnelles apicoles. C’est ainsi que desapiculteurs de la Casamance en partena-riat avec l’Association des Apiculteurs dela Guadeloupe (APIGUA) composée de10 professionnels dont le président del’Association ont organisé, en octobre2014, la première édition de la journéede dégustation des miels suivie d’échan-ges en apiculture entre des exploitants laCasamance (Ziguinchor Kamobeul) et dela Guadeloupe.’’

Quel rôle joue l’Etat, en partenariatavec des Projets et ou avec desOngs. Autrement, est ce que les api-culteurs de Casamance reçoiventdes formations?

E M ‘’Pour ce qui est de l’implica-tion, nous pensons que l’Etat n’a pas en-core vu l’importance de ce métier d’api-culteur. Un métier qui peut fortementcontribuer à la protection des forêts, àl’amélioration de nos fruits en qualité eten quantité, afin de lutter contre l’exoderural et la pauvreté… ‘’L’état doit menerune vraie politique de développement del’Apiculture. Depuis 2007, je suis dans cesecteur, je vois des directions régionalesde développement de l’Agriculture, sans

un programme sur l’apiculture. Seul lePadec a compris que l’apiculture est unsecteur qui peut être un levier de déve-loppement.

‘’Le miel est un produit naturelconnu dans tous les pays du monde. Par-mi les produits de la ruche, le miel est leplus connu. Mais il y en a d’autres commela cire, la propolis, le pollen, la gelé roya-le…. Tous ces produits sont considéréscomme des alicaments, c'est-à-dire ali-ment doué de propriétés thérapeutiques.Cela montre que la présence massive desabeilles joue un rôle capital dans l’envi-ronnement. A ce propos, j’interpelle lechef de l’Etat, son Excellence Macky Sall,qui nous a rendus visite le week-end der-nier (du 20 au 23 février : Ndlr) de bienprendre en compte le secteur apicole etd’en faire un programme concret dansson Plan Sénégal Emergent (PSE)’’.

Rencontre avec… etienne Manga, jeune apiculteur de Casamance

‘’L’Etat n’a pas encore vu l’importance du métier d’apiculteur’’Jeune et dynamique, Etienne Manga est un apiculteur établi en Casamance, dans lacommune d’Enamport, village de Kameubeul (Ziguinchor). Dans cet entretien, il passeen revue les opportunités de ce secteur. Un secteur qui peut absorber beaucoup dejeunes en situation de chômage et de pauvreté. Toutefois, Etienne ne manque pas designaler les difficultés liées au manque de centre de formation des apiculteurs.

‘’En Casamance, il y a une courbe de floraison de 7 à 8 moisdans l’année. Une ruche moderne peut produire jusqu’à 20 kgde miel par saison, alors qu’il est possible, avec la méthode de latranshumance des ruches, de procéder à deux récoltes dans

l’année’’

Même si les jeunes comprennent que le métier d’apiculteurpeut être une solution durable pour lutter contre la pauvre-té et le chômage. L’Etat doit s’intéresser à la filière et déve-lopper une stratégie décentralisée. Parce que l’apiculturepeut régler un pourcentage important de jeunes en situa-

tion de chômage et de pauvreté.

PROPOS RECUEILLIS PAR MADIENG SECK

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AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015 7

PECHE

Selon la FAO, le poisson fumé estune source vitale d'alimentation et de re-venus pour de nombreuses communau-tés côtières du continent. En Côte d'Ivoi-re, par exemple, on estime à 20 - 30% lesprises locales marines et d'eau douce quisont consommées sous forme de pois-son fumé.

Le poisson fumé est préféré par lespopulations locales à d'autres sources deprotéines telles que le lait, la viande et lesœufs, en raison de sa saveur, de ses bien-faits nutritionnels, de son prix compétitifet de sa durée de conservation qui oscilleentre trois et six mois. Toutefois, les fourstraditionnels généralement utilisés pourpréparer cet aliment de choix compor-tent certains problèmes. ‘’Avec les tech-niques traditionnelles de fumage, on estappelé à brûler de grosses quantités debois, d'où, d'une part, la production d'unénorme volume de CO2 responsable d'u-ne augmentation des émissions de gaz à

effet de serre. Et d'autre part, le fumagetraditionnel émet des polluants notam-ment les HAP (hydrocarbures aroma-tiques polycycliques), cancérigènes et dan-gereux pour le système respiratoire de l'-homme’’, explique Yvette Diei Ouadi, ex-perte des industries de la pêche à la FAO.

Les techniques traditionnelles lais-sent des résidus de goudron sur le pro-duit final, ce qui nuit à son goût et à saqualité et le rend beaucoup plus difficile àvendre. La technique FTT (fourneau àdouble fonction de cuisson et de séchagemécanique, pouvant également servir austockage) est spécialement conçue pouraider les petites transformatrices de pois-son à préparer et à commercialiser desaliments sûrs et de bonne qualité.

La technologie FTT, fruit de cinq ansde perfectionnements successifs, permetd'améliorer facilement les fours tradi-tionnels et réduit sensiblement les pro-duits cancérogènes issus du fumage. En

même temps, elle diminue la quantité decombustible nécessaire et a une capacitéde charge cinq fois plus grande que lesfours barils traditionnels ou deux foisplus grande que le four Chorkor.

un vrai boom’’C'est un système conçu pour affron-

ter divers aspects des opérations de fuma-ge du poisson’’, déclare Ndiaye Oumoulkhaïry, qui a travaillé à la conception duFTT. ‘’Au premier plan, des questions desécurité pour garantir la santé desconsommateurs et se conformer aux nor-mes alimentaires internationales. Et ensui-te, il s'agit de réduire les pertes après cap-ture et d'alléger le dur labeur des transfor-matrices qui sont désormais moins expo-sées à la chaleur et à la fumée’’.

Par exemple, à Abobodoumé, unvillage de Côte d'Ivoire, les nouvelles

composantes du FTT rencontrent unfranc succès auprès des femmes s'occu-pant de la transformation du poisson.Parmi leurs préférées, une plaque de col-lecte de la graisse du poisson qui leurpermet de la réutiliser comme huile decuisson ou pour la fabrication de savon.Et elles se réjouissent de respirer un airbeaucoup moins pollué. D'autres variétésde matériel végétal peuvent égalementremplacer le bois et le charbon tradi-tionnel pour la combustion. Les coqueset fibres de noix de coco, les épis de maïsou même de mil sont tout aussi efficacespour fumer le poisson et ont moins d'im-pact sur l'environnement.

les femmes au cœur du projet‘’Nous sommes si heureuses car

désormais, grâce à la technique FTT, nosconditions de travail ont vraiment chan-gé, s'exclame Deborah Oulou, une Ivoi-rienne. ‘’Nous travaillons désormais dansdes conditions d'hygiène’’, confirme Mi-cheline Dion Somplehi, une autre femmequi transforme du poisson à Abobodou-mé. ‘’Le FTT-Thiaroye réduit l'expositionà la chaleur, aux brûlures et à la fumée.Les opérations de fumage ne constituent

plus un risque pour la santé de nos yeux,ni de notre système respiratoire’’. La ré-duction des temps de fumage et desrisques sanitaires permet également auxfemmes de consacrer davantage detemps à leurs fonctions de mère et degardienne du foyer.

Mme Dion Somplehi affirme: ‘’Nousavons constaté le gain de temps dans lapratique du fumage: c'est particulière-ment important au sein de nos commu-nautés où les femmes s'occupent à la foisdes tâches ménagères, des enfants, de lacuisine et de la transformation du pois-son. Nous pouvons même fumer le pois-son en cas de mauvais temps’’.

tremplin La nouvelle technique rencontre

également du succès dans d'autres paysafricains pratiquant la pêche, dont le Sé-négal, la Côte d'Ivoire, la Tanzanie et leGhana. Des organismes de développe-ment tels que SNV basé aux Pays-Bas en-couragent le recours à la technique FTTau Ghana pour faciliter l'accès des petitsexploitants à des marchés internationauxlucratifs.

Guest EditoRural‘’Toutes les terres à toutes les femmes……’’

Lutter contre la pauvreté qui affecte plus de la moitié de femmesvivant en Afrique, dont 70 % de femmes rurales au Sénégal, reste etrestera encore notre combat. Cette lutte contre la pauvreté -dontc’est la mission d’Enda-Pronat- est notre praxis quotidienne et cellede bons nombres de femmes, notamment celles qui cheminent avecnotre Ong depuis fort longtemps. De ce point de vue, une appro-che village pourrait aider les communautés de base à penser auxfemmes, particulièrement, celles qui sont responsables des ména-ges, pour voir comment elles pourraient accéder à la ressourcefoncière pour nourrir leur famille.

Notre combat, ce n’est pas avec des armes que nous le menons.Mais c’est plutôt d’y arriver par la réflexion, le dialogue et laconcertation pour enrayer tous les mécanismes qui créent la pau-vreté ou à les rendre visibles aux yeux de l’Etat.

Au Sénégal, depuis plus d’un quart de siècle à Enda, on y pense eton se bat ensemble avec les femmes rurales. Parce qu’il y a des pos-sibilités et des capacités à mettre en place des politiques qui peu-vent lutter contre ce fléau. Notre constitution doit permettre l’ac-cès à la terre à tout le monde. Certes, la loi sur le Domaine nationalreconnaît ce droit aux femmes. Mais cela ne règle pas pour autantle problème. Loin s’en faut. Pour les femmes, ce problème d’accèsau foncier, n’est pas une question de Loi, c’est plutôt une questionde communauté, de coutume et de tradition. Donc, cela doit se ré-gler au niveau des populations locales, mais cela peut se régler aussiavec des politiques agricoles porté par l’Etat.

Réfléchir sur les mécanismes qui créent la pauvreté, c’est aussi dé-velopper des expérimentations et des initiatives innovantes. C’estvers cela qu’il faut aller. Après il appartient à l’Etat de prendre…etde mettre en place des politiques et des pratiques qui enrayent lapauvreté. Car, c’est seul l’Etat et les populations locales qui peuventarriver à mettre en pratiques des politiques qui ne dégradent pasl’environnement, la santé humaine et animale.

A Enda-Pronat, c’est dans cela que nous nous sommes engagés de-puis très longtemps pour lutter contre des modèles de productionsqui amènent l’appauvrissement de la terre ou la dégradation del’environnement : utilisation de pesticides, d’engrais chimiques oud’OGM. Dans notre approche, nous avons essayé aussi de monterdes expérimentions en commençant par la sensibilisation, l’informa-tion et la formation. Quand on a dit non, on a dit aussi essayons sic’est possible de faire, avec les populations locales, de l’agriculturesans engrais chimique.

Dans cette longue marche contre la pauvreté et l’accaparement desterres, les femmes ont été les premières à venir vers nous. Quandnous avons démarré ces réflexions et ces expérimentations, on aconstaté qu’elles n’avaient pas réussi à accéder à la bonne terre.Nous avons compris qu’en réalité, elles avaient des problèmes pouraccéder à la terre, contrôler la bonne terre et développer des ac-tivités qui rapportent des revenus substantiels.

Tout ce que l’Etat peut faire c’est décider de donner une bonne vi-sion politique à l’agriculture sénégalaise qui part de l’agriculture fa-miliale. Celle-ci doit être améliorée dans sa forme et dans le sys-tème de production en termes d’emblavement, de maîtrise de l’eau,de politique foncière, d’investissement et de financement, de for-mation, de transformation et de commercialisation.

Avec l’approche village ou communautaire participative, l’Etat, on lesait, ne va jamais lâcher ces femmes qui ont besoin de terre, de cul-tiver, de nourrir leurs enfants au même titre que les hommes.

Besoin de terre oui ! Pour satisfaire le besoin des agriculteurs, deséleveurs, des pécheurs et même des artisans, et engager une réfor-me. Ce plaidoyer a été porté pas seulement par nous, mais aussi pard’autres Organisations (Association villageoise, Organisation pay-sanne, etc.). C’est ça aussi qui justifie notre engagement auprès duCNCR pour les aider à produire des principes, des règles de jeu surlesquelles la CNRF (Commission nationale de réforme foncière)pourrait se baser pour que cela ne soit pas une question entre in-tellectuels ou bien une question d’investisseurs qui ont besoin desterres. Mais que cela soit d’abord une question pour régler les pré-occupations des populations vivant dans les communautés ruraleset les communes urbaines.

J’en viens à l’acte 3 de la décentralisation dont je ne suis pas contre.Car, si j’ai bien compris, sa finalité est d’arriver à développer lescommunes à partir de leurs propres ressources. C’est là que jecrois que c’est important. C’est intéressant aussi si la gouvernancefoncière est régulée comme le demande les populations locales sielles ont un droit réel sur le foncier.

Si la responsabilité leur revient, il n’y a pas de raison que l’acte 3 neleur profite. Maintenant, le seul danger est que la Communauté ru-rale devienne Commune, sans le contrôle juridique qui y sied. Celafait peur. Ce qui nous fait peur également c’est le fait de penser quel’agriculture sénégalaise ne donne pas ce qu’il faut, au lieu de s’amé-liorer. On dit que d’autres vont venir avec leurs moyens et qu’ilsvont produire. A ce moment les populations deviendront ainsi des

ouvriers agricoles dans leur propre terroir. Ceux qui vont veniravec leur argent pour investir sur ces terres cherchent aussi des de-vises et ce n’est pas évident que ces populations auront ce qu’il fautsurtout dans un Sénégal qui se veut émergent. Car, l’émergencec’est créer des richesses qui permettent aux Sénégalais d’améliorerleurs conditions de vie, de se nourrir avec une alimentation localesaine et équilibrée. Alors, haro sur la malnutrition… et que les po-pulations rurales puissent envoyer leurs enfants à l’école, les soi-gner quand ils tombent malades. Que les jeunes femmes aient deterres et arrivent à s’épanouir, à faire leur loisir. C’est çà qui fait quele Sénégal va émerger.

Emerger veut dire réapparaître. Donc, il faut que les populations debase arrivent à s’en sortir véritablement. J’ai des difficultés à com-prendre le PIB en termes de chiffres. Mais je comprends beaucoupplus le PIB, quand je constate que si dans les 45 Départements duSénégal, au moins sur les 2/3, on constate un changement significatifdans leur vie quotidienne. C’est en ce moment que nous dirons quele Sénégal émerge.

Si on part avec cette idée d’émergence et un accompagnement trèsclair de l’Etat pour développer la production, la transformation, l’a-gro industrie rurale, un marché local qui consomme ce que nousproduisons, pas seulement le riz, parce qu’avec cette céréale seule-ment, on va mourir de diabète ou de colopathie. Mais arriver plutôtà une production très diversifiée et une alimentation locale, saineet équilibrée.

De ce point de vue l’agriculture est le berceau de l’emploi. Donc,que les terres ne soient pas ‘’marchandisées’’, mais qu’elles restentpour toutes les femmes et les générations futures. Aujourd’hui, desmilliers de jeunes qui cherchent des emplois, 60% ou 70% de cesemplois ne peuvent se développer que dans l’agriculture. Faute deterres. Cette richesse fondamentale qu’est la terre ne doit paséchapper aux femmes. C’est pour cela que les femmes rurales sou-haitent que les terres restent aux mains de la communauté. Cesfemmes pensent à leurs fils et filles qui doivent cultiver, à ceux quisont partis, ceux qui vont à l’école aujourd’hui, si ces gens vontchercher à revenir et que chacun puisse retrouver chez soi, avoirses richesses pour développer leur pays.

C’est pour cette raison que nous pensons que s’il y avait la possi-bilité aujourd’hui d’immatriculer toutes les terres au nom des fem-mes sénégalaises, celles-ci le feront parce qu’on sait qu’elles ne lesvendront jamais.

PAR MARIÈME SOW, DIRECTRICE D’ENDA-PRONAT DAKAR

NOUVELLE TECHNIQUE DE SÉCHAGE DU POISSON :

Le four FTT réduit les risques et simplifie le fumage(Jade/Syfia avec Fao) - Une nouvelle technologie de séchage du poisson facile à monteret lancée par la FAO peut contribuer à réduire les risques pour la santé, accroître lasécurité sanitaire et la qualité des aliments, améliorer les conditions de travail et di-minuer les pertes alimentaires dans les villages de pêcheurs d'Afrique de l'Ouest, ap-prend fin février de l’organisation onusienne.

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ACTUALITE

8 AGRIINFOS MENSUEL D’INFORMATIONS AGRICOLES ET RURALES - 9E ANNÉE - N° 80 - MARS 2015

Des exposants sénégalais affirment que leSIA est un baromètre fiable pour mesurer le ni-veau de qualité des produits locaux. Avec lesmoyens du bord, ils tentent de donner un coupde pouce au ‘’Made in Senegal’’. Mais le combatest loin d’être gagné face à une rude concurrencesur le marché européen. ‘’C’est très difficile. Il y a

toujours cette problématique liée à l’emballage.Nous sommes en train de faire du chemin certes,mais c’est très loin de ce qui se fait ailleurs entermes de présentabilité, d’attraction et de quali-té’’, reconnait Ibrahima Dème, responsable d’unestructure spécialisée dans la transformation desproduits à valeur médicinale. Trouvé dans un

stand, visiblement secoué par le froid parisien,malgré un habillement très lourd, M. Dème note,dans un registre, les visiteurs qui passent chez lui.A défaut d’un emballage attrayant, il se contented'un long discours sur les vertus des produitsqu’il expose. ‘’Le problème est qu’on ne commu-nique pas bien sur nos produits avant de venir ici.Il n’y a pas un travail préalable qui puisse nouspermettre de supporter la concurrence avecd’autres structures qui ont les moyens de donnerun petit carnet à l’entrée à des milliers de visi-teurs. Il faut travailler davantage sur la communi-cation’’, dit Ibrahima Dème dont les propos ontété interrompus par le passage de clients euro-péens qui ont emporté des sachets en échangesde quelques billets. Avec une quarantaine d’entre-prises exposantes, le stand sénégalais est biengarni par des sachets de pain de singe, de bissap,d’arachide, des étals de melon, de poissons fu-més, de piment, entre autres produits. Au quatriè-me jour du SIA, certains commencent à se fairedes affaires et gardent l’espoir d’écouler leurstock. ‘’Nous avons beaucoup de visiteurs fran-çais et européens en général. Il y en a qui achè-tent, d’autres essaient de prendre contact avecnous. Nous sommes en train de montrer au mon-de de ce dont le Sénégal est capable de faire’’,confie Salamba Diène qui propose des produitsde la bio-essence. ‘’Nous avons des visiteurs trèscurieux qui demandent, qui posent des questionset qui goutent avant d’acheter. Mais il nous fautun travail plus hardi sur l’emballage, le packaging,la qualité pour être au niveau des autres’’, recon-

nait Salamba Diène. Cette fille assez d'une tren-taine d'années invite les producteurs africains ‘’àtout faire pour s’imposer au niveau internatio-nal’’.

Le directeur général de l’Agence sénégalaisede promotion des exportations (ASEPEX), MalickDiop, dont la structure encadre beaucoup d’ex-posants au SIA 2015 reconnait les défis à releverdans le domaine de la qualité avec une nécessitéd’insister sur la problématique de l’emballage.‘’Beaucoup d’efforts sont en train d’être faits,mais ce n’est pas facile. Le problème lié à l’embal-lage est toujours là. Nous avons une structurequi s’active dans ce domaine, mais sa capacité deproduction ne couvre pas tous les besoins. Il fauttravailler davantage pour arriver aux normesinternationales’’, dit-il, après une visite au standdu Sénégal. Le plat national, le Thiébou Djeunn,est très visible dans les alentours du stand quiabrite la délégation sénégalaise. Les femmes quis’y activent confient avoir faire de bonnes affairesavec des plats vendus à 10 euros (plus de 6.500FCFA).

‘’Les choses marchent bien et nous faisonsde très bonnes affaires depuis le début du salon.Nous sommes là pour honorer notre pays en fai-sant une promotion de nos différents plats au-près d’autres communautés. La plupart desclients sont des européens. Lundi le ministre gui-néen de l’agriculture est venu pour commanderun plat sénégalais pour son déjeuner’’, raconte, lamine joyeuse, une restauratrice sénégalaise habi-tuée du SIA.

SALON INTERNATIONAL DE L’AGRICULTURE (SIA) À PARIS:

Le ‘’Made in Sénégal’’ bute sur l'emballage

ENVOYÉ SPÉCIAL À PARIS MOUHAMED TIDIANE NDIAYE

(APS) - Les produits sénégalais étalés au parc des expositions de Ver-sailles qui abrite le Salon international de l’agriculture (SIA), à Paris,tentent de s’imposer au niveau d’un marché européen inondé de pro-duits de qualité avec des emballages et des certifications bien aux nor-mes.

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