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Différents types d’examen de l’estomac T. Helbert Chapitre 13 Écho-endoscopie digestive Introduction L’ estomac est, avec l’œsophage, l’organe par lequel l’écho-endoscopiste débute très souvent son apprentissage mais, contrai- rement au corps œsophagien, son anatomie faite de courbes, d’angles et de plis complique souvent l’examen écho-endoscopique. La facilité apparente de cet examen gastrique nécessite néanmoins une bonne expérience et beaucoup d’attention de la part de l’opéra- teur si l’on veut retirer toutes les informations nécessaires au diagnostic. À notre sens, il s’agit toujours de l’organe le plus difficile à explorer. Principes généraux L’examen écho-endoscopique de la cavité gastrique se fait au mieux sous anesthésie géné- rale (propofol), le patient toujours installé en décubitus latéral gauche. Même en cas d’ins- tillation d’eau, nous y reviendrons, le risque de régurgitation est extrêmement faible. Lors de la descente de l’écho-endoscope, sauf conditions particulières (recherche d’une lésion sous-muqueuse a priori infracentimétrique, anomalie focale de la paroi décrite au préalable), il convient de ne pas trop insuffler la cavité gastrique car il sera ensuite extrêmement diffi- cile d’éliminer toute la quantité d’air insufflée. L’examen écho-endoscopique de la cavité gastrique doit être complet, quelle que soit l’indication et débutera de façon systématique au niveau de l’antre distal, l’endoscope étant plaqué contre le pylore. Le pylore est visualisé sous la forme d’un épaississement circulaire de la musculeuse. L’examen à ce niveau est délicat car le ballon gonflé de façon très modérée entre 5 et 10 mL d’eau s’applique immédiatement sur la paroi antrale, écrase les couches et lors du retrait de l’écho-endoscope, strippe vers le haut les plis gastriques, source de fausses images. Il faut s’attacher à visualiser la vésicule qui est, avec le foie, un des rares repères anatomiques à proximité. Lorsque l’écho-endoscope est en poussé dans l’antre vers le pylore, la vésicule biliaire apparaît souvent sur l’écran au-dessus du transducteur, la paroi gauche de l’antre correspondant dans ce cas à la petite courbure, la paroi droite à la grande courbure et la paroi inférieure à la face postérieure. Elle peut aussi apparaître contre la face gauche de l’antre, la face supérieure étant alors la grande courbure, la face droite étant la face postérieure et la face inférieure, la petite courbure. Lorsque l’examen est gêné par les contractions antro-pyloriques, l’utilisation d’un modificateur du comportement (glucagon si possible) est souhaitable. Afin d’obtenir sur l’ensemble de la circonférence, une étude des couches de manière à ce qu’elle soit perpendiculaire à l’axe de l’échographe, il faut s’attacher à gonfler et dégonfler le ballonnet, d’utiliser éventuellement l’instillation d’eau du robinet sachant qu’à ce niveau cette instillation est peu efficace car fugace. Même avec un appareil radial, il n’est pas indis- pensable d’obtenir une coupe de 360° mais il faut surtout avoir une bonne visibilité des couches L. Palazzo, Écho-endoscopie digestive © Springer-Verlag France 2012

Écho-endoscopie digestive || Différents types d’examen de l’estomac

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Différents types d’examen de l’estomac

T. Helbert

Chapitre 13

Écho-endoscopie digestive

Introduction

L’estomac est, avec l’œsophage, l’organe par lequel l’écho-endoscopiste débute très souvent son apprentissage mais, contrai-

rement au corps œsophagien, son anatomie faite de courbes, d’angles et de plis complique souvent l’examen écho-endoscopique.La facilité apparente de cet examen gastrique nécessite néanmoins une bonne expérience et beaucoup d’attention de la part de l’opéra-teur si l’on veut retirer toutes les informations nécessaires au diagnostic. À notre sens, il s’agit toujours de l’organe le plus difficile à explorer.

Principes généraux

L’examen écho-endoscopique de la cavité gastrique se fait au mieux sous anesthésie géné-rale (propofol), le patient toujours installé en décubitus latéral gauche. Même en cas d’ins-tillation d’eau, nous y reviendrons, le risque de régurgitation est extrêmement faible.Lors de la descente de l’écho-endoscope, sauf conditions particulières (recherche d’une lésion sous-muqueuse a priori infracentimétrique, anomalie focale de la paroi décrite au préalable), il convient de ne pas trop insuffler la cavité gastrique car il sera ensuite extrêmement diffi-cile d’éliminer toute la quantité d’air insufflée.L’examen écho-endoscopique de la cavité gastrique doit être complet, quelle que soit l’indication et débutera de façon systématique au niveau de l’antre distal, l’endoscope étant

plaqué contre le pylore. Le pylore est visualisé sous la forme d’un épaississement circulaire de la musculeuse.L’examen à ce niveau est délicat car le ballon gonflé de façon très modérée entre 5 et 10 mL d’eau s’applique immédiatement sur la paroi antrale, écrase les couches et lors du retrait de l’écho-endoscope, strippe vers le haut les plis gastriques, source de fausses images.Il faut s’attacher à visualiser la vésicule qui est, avec le foie, un des rares repères anatomiques à proximité. Lorsque l’écho-endoscope est en poussé dans l’antre vers le pylore, la vésicule biliaire apparaît souvent sur l’écran au-dessus du transducteur, la paroi gauche de l’antre correspondant dans ce cas à la petite courbure, la paroi droite à la grande courbure et la paroi inférieure à la face postérieure. Elle peut aussi apparaître contre la face gauche de l’antre, la face supérieure étant alors la grande courbure, la face droite étant la face postérieure et la face inférieure, la petite courbure.Lorsque l’examen est gêné par les contractions antro-pyloriques, l’utilisation d’un modificateur du comportement (glucagon si possible) est souhaitable.Afin d’obtenir sur l’ensemble de la circonférence, une étude des couches de manière à ce qu’elle soit perpendiculaire à l’axe de l’échographe, il faut s’attacher à gonfler et dégonfler le ballonnet, d’utiliser éventuellement l’instillation d’eau du robinet sachant qu’à ce niveau cette instillation est peu efficace car fugace.Même avec un appareil radial, il n’est pas indis-pensable d’obtenir une coupe de 360° mais il faut surtout avoir une bonne visibilité des couches

L. Palazzo, Écho-endoscopie digestive© Springer-Verlag France 2012

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et de leurs interfaces. L’étude de la paroi n’étant pas possible sur la totalité de la circonférence, il faut s’attacher à repérer l’anomalie pariétale gastrique, analyser de façon globale le reste de la paroi puis focaliser sur la lésion.Lorsqu’on retire l’écho-endoscope de l’antre par mouvements doux et rotatifs, la jonction corps-antre, surtout au niveau de la face postérieure de l’estomac et de la grande courbure, apparaît habituellement vers 60 cm des arcades dentaires. Cette zone est extrêmement difficile à analyser avec une sensation de ressaut bien perceptible, surtout si le ballonnet est un peu trop gonflé. L’examen doit se faire en remontant et en repoussant le transducteur à plusieurs reprises pour obtenir un balayage « maximal ».Ensuite, le retrait et la rotation progressive de l’écho-endoscope permettent d’explorer la petite courbure verticale qui se situe à environ 50 cm des arcades dentaires. Cette petite courbure est visualisée au niveau de la partie inférieure de l’écran, la grande courbure étant située à la partie supérieure, les faces postérieure, anté-rieure respectivement au niveau des cadrans droit et gauche. Néanmoins, en cas de situation anatomique atypique ou de difficulté du posi-tionnement du transducteur, la petite courbure verticale est repérée dans l’angle entre le foie à gauche de l’écran et le corps du pancréas, en dessous et à droite.L’examen se termine en remontant le transduc-teur vers la grosse tubérosité, zone extrêmement difficile à analyser car l’air est souvent captif à ce niveau. Il est donc absolument indispen-sable de veiller d’une part à ne pas trop insuffler l’estomac lors de la descente de l’endoscope et aspirer le maximum d’air à ce niveau puis en instillant de l’eau en veillant à ne pas dépasser 200 mL d’eau. En général, l’instillation de 50 mL à 75 mL d’eau est suffisante pour un examen ; à la fin de l’examen, ce d’autant que le patient est anesthésié, il est impératif de vider l’estomac de l’eau préalablement instillée pour éviter tout accident de régurgitation. En cas de volumineuse hernie hiatale (> 3 cm), il est recommandé de ne pas instiller plus de 50 cc d’eau et de surélever le thorax du patient.

En résumé, un certain nombre de règles doit être respecté pour obtenir un examen performant et relativement rapide, quel que soit le type de pathologie étudié.Être toujours doux sans geste heurté et sans forcer.Éviter une insufflation excessive en privilégiant si cela est utile une gastroscopie préalable à l’examen écho-endoscopique avec une exsuffla-tion complète et attentive en fin d’examen.Savoir garder les yeux grands ouverts avec un champ large et une fréquence basse à 5, 6 ou 7,5 MHz.Repérer les organes périgastriques, vésicule, foie et pancréas pour mieux se situer.Savoir instiller de l’eau modérément et gonfler le ballonnet de façon minime.Penser à garder une distance idéale avec la paroi pour respecter la focale du transducteur et garder toujours le faisceau ultrasonore perpen-diculaire à la zone à analyser (en veillant à ce que la musculeuse soit d’épaisseur égale de part et d’autre de la lésion que l’on étudie).

Différents appareils

Sondes rotatives mécaniques ou électroniques

Fournissant des images circulaires sur 360° avec un plan de coupe perpendiculaire à l’endoscope, elles sont plus adaptées à l’apprentissage car elles permettent un bon repérage anatomique gastrique et une vision globale de la paroi dans toute sa circonférence.

Sondes linéaires électroniques

Ces appareils munis d’une sonde linéaire émettent dans l’axe du tube avec une vision longitudinale sur 120° à 180° couplée, là aussi, à un système Doppler.L’examen gastrique est donc plus difficile car il faut effectuer des mouvements de rotation horaire et anti-horaire pour faire le tour de

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Fig. 4 – Examen de la partie haute de l’estomac entre 40 et 45 cm. Les plis gastriques de la grande courbure fundique sont situés au niveau de la partie haute de la figure, le béquillage étant up et la poignée de l’endoscope étant à 45° entre la position ouverte et la position neutre. Si l’on veut se plaquer contre la grande courbure, il faut béquiller vers le bas et retirer doucement l’endoscope.

Fig. 1 – Examen de l’antre gastrique en poussée contre le pylore. Le béquillage est up. La vésicule (5) est au dessus du ballon. 1 : petite cour-bure, 2 : face antérieure, 3 : face postérieure, 4 : grande courbure, 6 : foie..

Fig. 2 – Examen de l’antre gastrique en poussée contre le pylore. Le béquillage est up. La vésicule (5) est à gauche du ballon. 1 : petite cour-bure, 2 : grande courbure, 3 : face antérieure, 4 : face postérieure, 6 : foie.

Fig. 3 – Étude de la circonférence de la paroi gastrique. Noter l’absence d’air dans la cavité gastrique. Le ballon est gonflé et maintenu par un béquillage adapté pour que la musculeuse et la sous-muqueuse soient analysables sur toute la coupe ce qui permet d’être sûr que l’on est bien perpendiculaire à la paroi et que l’on ne crée pas d’artefact oblique de superposition des couches. 50 cm des arcades dentaires. 1 : petite courbure, 2 : face postérieure, 3 : face antérieure, 4 : grande courbure, 5 : corps du pancréas, 6 : foie.

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l’estomac. L’examen est donc beaucoup plus opérateur-dépendant et la recherche de la zone lésionnelle doit être encore plus méthodique en s’aidant des différents repères anatomiques. La connaissance exacte de la position (cm par rapport aux arcades dentaires, face de l’estomac intéressée) de la lésion à étudier mais égale-ment sa taille et son aspect (surélevé, polypoïde, ulcéré, plan) sont indispensables avant un examen écho-endoscopique de l’estomac avec un appareil linéaire. L’endoscopie préalable est donc indispensable.

Minisondes endocanalaires (fig. 5)

L’aspect pratique des minisondes endocana-laires MSE du fait de leur portage par un vidéo endoscope standard ne doit pas faire oublier leur limite : sondes de très haute fréquence, en moyenne 20 MHz donnant des images très fines de la paroi permettant d’analyser entre sept et neuf couches mais avec une très faible profon-deur de champ.L’analyse fine de la paroi nécessite de baigner la lésion ou la paroi dans l’eau et de maintenir la sonde à distance idéale car le point focal est très strict. Ainsi, l’analyse de l’antre, de l’angulus, est extrêmement délicate et source de surévalua-

tion. L’examen du fundus est plus aisé, la grosse tubérosité étant extrêmement difficile à étudier et bien évidemment devant la fragilité certaine de ce genre de matériel, l’examen par minisonde en rétrovision est fortement déconseillé ; mais leur très haute résolution rend les MSE indis-pensables pour l’étude des lésions superficielles de l’estomac, notamment avant de décider d’un geste de résection endoscopique.

Fig. 5 – Minisonde endocanalaire de 20 MHz. Cancer superficiel IIa de la classification de Paris, face antérieure du corps gastrique : ce cancer respecte la musculaire muqueuse (flèches blanches).