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Economie du contrat - Les mécanismes du marché

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Page 1: Economie du contrat - Les mécanismes du marché

Cours : Economie du contrat

Auteur : Claude Crampes

Leçon n° 2 : Les mécanismes de marché

On suppose que Robinson n’est plus seul. Si on prend le cas littéraire où seul Vendredi arrive, ona un problème bilatéral. C’est une situation complexe qui sera traitée plus loin. On suppose doncici que c’est plutôt le Club Med qui débarque, c’est-à-dire, de nombreux agents anonymes quivendent et achètent des produits. La différence essentielle avec le cas autarcique est que ce n’estgénéralement pas le même agent qui supporte le coût de production d’un bien ou serviceparticulier et qui profite de sa consommation.

Section 1. Fonctions d’offre et de demande

La multiplicité des agents permet d’envisager de consommer des biens produits par d’autres etréciproquement de produire des biens que d’autres consommeront. Appelons p le prix unitaired’un bien, c’est-à-dire la quantité de numéraire que reçoit le producteur pour chaque unité qu’ilécoule et que cède le consommateur pour chaque unité qu’il acquiert. Un agent ne prend plus sadécision en comparant utilité et coût mais en comparant prix et coût pour le vendeur et utilité etprix pour l’acheteur. Considérons d’abord le cas du producteur. Reprenons la grille de coûtmarginal de l’exemple 1.

n 0 1 2 3 4 5 6 7

? 2 3 4 5 6 7 8

Si le prix p qui est proposé au vendeur est plus petit que 2 francs, il est clair qu’il n’a pas intérêt àproduire quoi que ce soit. Si le prix est 4 francs, il a intérêt à produire une première unité qui ne luicoûte que 2 francs, une seconde qui ne lui coûte que 3 francs et jusqu’à une troisième qui lui coûte

exactement 4 francs. Ainsi, il gagne : S’il produit une unité supplémentaire

au-delà de la troisième, il perd de l’argent car elle lui coûte plus que le prix qu’il encaisse. Règlede décision 7 : Le producteur produit jusqu’au point où son coût marginal de production est égal

au prix de vente. Cette politique rend maximum son profit d’exploitation puisque :

= = = recette - coût total =

bénéfice du producteur = R - C = B

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Compte tenu de la règle 7, la courbe de coût marginal a une interprétation particulière trèsimportante : elle représente la fonction d’offre du producteur individuel. En effet, elle permet desavoir quelle quantité il est disposé à produire pour chaque valeur possible du prix de vente.

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Comment passer de l’offre individuelle à l’offre totale ? Supposons deux producteurs : l’un a le coûtmarginal décrit précédemment, l’autre a un coût marginal plus élevé.

n 0 1 2 3 4 5 6 7

? 2 3 4 5 6 7 8

? 3 4 5 6 7 8 9

La courbe de l’offre totale s’obtient par somme horizontale des fonctions d’offre individuelle.

Exemple : En effet, à un prix donné, par exemple 6 francs, l’entrepreneur x veut produire 5 unités (

= 6 francs) et l’entrepreneur y veut produire 4 unités ( = 6 francs). Donc leur offre globale

est de 9 unités.

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Proposition 1 : L’offre globale est une fonction croissante du prix.

Remarque : Si certaines entreprises on un coût marginal décroissant mais sont noyées au milieud’un grand nombre d’entreprises dont le coût marginal est croissant, la proposition 1 reste vérifiée.En reprenant pas à pas cette démonstration pour le côté demande, on établit d’abord :Règle de décision 8 : Le consommateur achète jusqu’au point où son utilité marginale brute estégale au prix d’achat.

Cette politique rend maximum son utilité nette puisque :

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On en déduit que la courbe d’utilité marginale est la fonction de demande du consommateur

individuel (p) et qu’en additionnant horizontalement les fonctions de demande individuelle, on

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(p).

Proposition 2 : La demande globale est une fonction décroissante du prix.

Section 2. L’équilibre des transactions

L’allocation des ressources se fait au travers des mécanismes de marché qui poussent lescandidats acheteurs et les candidats vendeurs à s’entendre sur un taux d’échange, qu’on appellele prix d’équilibre.

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qui égalise les intentions d’offre et les intentions de demande. Le mécanisme à l’oeuvre est

représenté par les enchères à la baisse provoquées par une offre excédentaire et les enchères àla hausse provoquées par une demande excédentaire.

Remarque : Dans les mécanismes d’allocation concurrentielle, aucun agent individuel (offreur oudemandeur) ne contrôle le prix. C’est l’ensemble des interactions qui détermine le prix d’équilibre.Chaque agent prend ses décisions sur la base de ses préférences et qualifications d’une part et duprix d’autre part.

Un système aussi décentralisé semble propice à un gaspillage important. Pour juger de cettegabegie probable, il nous faut une norme, un critère d’évaluation . On en parlera dans la section 3.Le kit « fonction d’offre - fonction de demande - équilibre » fournit un très bon instrument depremière analyse (comme on parle de premiers secours).

Exemple : Quelques exemples : 1) l’Etat fixe simultanément le nombre de titres offerts au publicet le prix de vente lors d’une privatisation.

Comme il propose un prix bas par « souci de justice sociale », il s’expose à une demandeexcédentaire ( ? rationnement) et à des recettes plus faibles que ce qui serait possible. 2) l’Etatcrée une allocation de logement social (pour les étudiants) : leur disposition à payer augmente ? lafonction de demande se déplace vers le haut. A offre inchangée (à court terme), c’est une pressionà la hausse sur les loyers.

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3) l’Etat fixe un salaire minimum

4) l’Etat impose une durée de 35 heures de travail

- le CNPF dit : ça accroît les coûts ça restreint l’activité et ça augmente le chômage.

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- les syndicats et le gouvernement disent : ça accroît les salaires, donc la disposition à payer,donc l’activité, donc l’emploi.

- l’effet global sur l’activité est difficile à prévoir mais on peut penser qu’il y aura pression à lahausse sur les prix.

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Section 1. Equilibre et efficience

Le critère utilisé par les économistes pour juger une allocation est le critère d’efficience(approximation de l’optimum de Pareto). Il s’agit de savoir si l’allocation observée des ressourcespermet de générer l’utilité nette totale (le surplus) maximum. Prenons le cas élémentaire de larépartition de 100 unités d’un bien entre deux agents.

Utilité de l'agent a

allocation I 0allocation II 45allocation III 48allocation III 48Si aucun transfert ex post n’est possible, on peut simplement dire que :

• I est efficiente (mais probablement inéquitable),

• IV domine II et III puisque au moins un agent a plus et l’autre n’a pas moins. Mais les troissont inefficientes.

• I , II et III sont inclassables.

Si des transferts sont réalisables ex post sans pertes, alors III domine II mais I domine l’ensemble.Sans « utilité transférable », seul un critère d’unanimité permet de trancher du point de vueéconomique. Alternative : définir des principes « d’égalité » dans des systèmes démocratiques.Comment définir des procédures d’allocation démocratiques ? Le théorème d’impossibilité deArrow énonce qu’on ne peut pas trouver de procédures de prise de décision collective respectantquelques principes minima. Le paradoxe de Condorcet

électeur 1 a b célecteur 2 b c aélecteur 3 c a b

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a l’emporte sur b b l’emporte sur c c l’emporte sur a

Remarque : Pour pouvoir appliquer des règles de décision simples, on présuppose en général desprincipes de transférabilités.

Exemple : dédommagement des personnes expropriées.L’avantage de la transférabilité est que ce ne sont pas les surplus individuels qui comptent mais lesurplus total. Alors dans l’exemple précédent, l’allocation I domine IV qui domine III qui domine II.Règle de décision 9 : Une allocation est optimale (ou socialement efficiente) s’il n’est paspossible par réallocations de générer un surplus total plus grand.

Remarque : La règle de Pareto est plus contraignante.Etant donné ce critère d’efficacité, nous pouvons maintenant écrire la proposition remarquablesuivante :Proposition 4 : Une allocation concurrentielle est une allocation efficiente1

La démonstration est « triviale » :

• il y a équilibre concurrentiel quand offre = demande

• il y a allocation efficiente quand utilité marginale = coût marginal

• (offre ~ coût marginal) et (demande ~ utilité marginale)

Donc allocation d’équilibre = allocation efficiente.

Section 4. Les obstacles à l’efficience dans les mécanismes de marché

Plusieurs types de raisons militent en faveur d’une intervention de l’Etat dans les mécanismes demarché. D’abord, il peut y avoir des raisons sociales, ou de « justice distributive », lorsquel’allocation réalisée est jugée insupportable par les gouvernements. Mais l’interventionnisme peutaussi être mené au nom de l’efficacité économique. En effet, dès l’instant où un agent ou grouped’agents peut manipuler le prix, il se produit une perte d’efficacité qui est dommageable par lacollectivité. Le cas le plus simple est celui du monopole.

n 1 2 3 4 5 6 7

6 5 4 3 2 1 0

1/ On suppose que, soit parce qu’il existe un stock pléthorique, soit parce qu’il faut simplementpayer un coût fixe, le coût marginal est identiquement nul. Il est donc évident que la productionoptimale est de 7 unités. On comprend bien aussi que si plusieurs vendeurs se font concurrence,ils feront chuter le prix à 0, ce qui confirme que la concurrence débouche sur l’optimum.

Remarque : Cependant on peut juger « anormal » que l’équilibre génère un profit nul pour lesvendeurs !2/ Maintenant supposons que la demande soit totalement servie par une entreprise unique, unmonopole. En l’absence de coût, son profit se confond avec son chiffre d’affaires. A partir de lafonction d’utilité marginale, qui représente la fonction de demande inverse (C'est-à-dire la

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disposition à payer des acheteurs pour chaque unité.), on peut construire les fonctions de recettetotale et de recette marginale de l’entreprise.

n 1 2 3 4 5 6 7

6 5 4 3 2 1 0

R 6 10 12 12 10 6 0

6 4 2 0 -2 -4 -6

On voit que la recette est maximale pour 4 unités : en ce point c’est la recette marginale et non leprix qui est égal au coût marginal (qui ici est nul). Le résultat est que la production choisie estinefficace :

Par rapport à l’optimum, le monopole réalise un bénéfice positif B > 0, le surplus net des acheteursS est réduit, et il y a une Perte Nette : tout le surplus n’est pas généré. La raison en est que lemonopole a un certain pouvoir de contrôle sur le prix de vente, contrairement aux entreprisespurement concurrentielles : chaque fois qu’il vend une unité additionnelle, le prix auquel il vendtoutes les unités baisse. Il est donc incité à ne pas trop produire. Le juriste (ou le politicien) etl’économiste sont d’accord sur un point : il faut intervenir. Mais comment ? Pour remédier àcette inefficacité, l’économiste cherchera surtout à obtenir que l’output se rapproche de l’optimumc’est-à-dire, dans l’exemple, 7 unités. La façon d’y arriver, en particulier l’allocation des richessesqui en découle, l’intéresse peu.

Exemple : Par exemple, il est prêt à suggérer une discrimination tarifaire.En fixant un prix différent pour chaque unité vendue (ou, plus simplement, par bloc) le vendeur necraint plus la baisse du prix associée à l’accroissement de la production. L’inconvénient de cettepolitique discriminante et qu’elle donne toutes les rentes au monopole. Les cas demanipulation des prix (et donc d’inefficacité) sont nombreux et les pouvoirs publics ont denombreuses occasions d’intervenir pour rétablir l’efficacité : droit de la concurrence national etcommunautaire pour réprimer les abus de position dominante ou les prédations.

Remarque : Enfin, il faut noter que l’intervention publique est souhaitable quand il s’agit de

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produire des biens publics et lorsqu’il y a production d’effets externes.

Les effets externes altèrent ou améliorent les performances d’autres agents économiques. Parrapport à l’optimum, les mécanismes de marché produisent trop d’effets externes négatifs(exemple : pollution) et trop peu d’effets externes positifs (exemple : R&D).

L’Etat doit alors intervenir soit pour réguler, soit pour définir des droits de propriété : permisd’émission de polluants, brevets. Si ces droits sont bien définis, par le théorème de COASE, laproduction d’effets externes devient optimale. Les biens publics sont l’occasion de comportementsopportunistes de la part des « passagers clandestins » potentiels. Sans intervention publique, sepose un sérieux problème de financement de ces biens.Proposition 5 : L’intervention des pouvoirs publics est souhaitable pour corriger les imperfectionsdes mécanismes du marché, en particulier pour contrôler l’inefficacité des grandes entreprises, laproduction des effets externes et la production des biens publics.

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