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Réussir la mobilité électrique urbaine > Enjeu majeur des métropoles, la mobilité se forge aujourd’hui un nouveau destin. Il est électrique, connecté et partagé. Il doit garantir l’espoir d’une ville durable et solidaire, affirmer l’attractivité des territoires et répondre aux besoins croissants des usagers - habitants, visiteurs, professionnels. La mobilité ce sont des mobilités, une diversification des moyens de transport, des usages et des services, un système de plus en plus complexe. Face à cela, dans le Grand Paris comme ailleurs, l’électromobilité a une ambition : transformer l’expérience de la ville vers plus de simplicité et d’intuitivité. Dans les pages suivantes, vous lirez comment les grands donneurs d’ordre, les entreprises, collectivités et start-ups s’attachent à anticiper l’avenir de cette mobilité électrique, à l’organiser et à la coordonner, sous le regard éclairant de l’Histoire et de la prospective. Qu’il s’agisse d’infrastructures, de services urbains ou de nouvelles technologies, un mot d’ordre semble bel et bien lancé : la coopération. C’est aussi dans cet esprit que nous vous donnerons dorénavant rendez-vous à intervalles réguliers pour suivre de près l’évolution électrique du Grand Paris. n « Le futur ne se subit pas, il se construit » Guillaume Devauchelle Mercredi 3 juin 2015 RéINVENTER LES LUMIèRES DE LA MéTROPOLE brigitte.deyris-lumbroso @ edf.fr Paris, le 3 février 2015 2 Heurs et malheurs de la mobilité électrique Alain Beltran 3 Observer les tendances, anticiper leur retournement Thierry Gaudin 4 Des enjeux connus et des objectifs ambitieux pour le Grand Paris 5 Gestion de la ressource : anticiper les besoins 6 La mobilité se réinvente par ses usages 7 Pour un développement concerté des bornes de recharge 8 Un enjeu industriel 9 Des bornes de recharge forcément communicantes 10 Place à l’économie du partage 11 Voitures autonomes à l’horizon 12 De la diversification aux systèmes coopératifs Jean-Hubert Wilbrod Développer des modèles pour réussir la mobilité électrique Sylvie Moulet SYNTHèSE DES DéBATS PROCHAIN éVéNEMENT

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Réussir la mobilité électrique

urbaine

> E n j e u m a j e u r d e s métropoles, la mobilité se

forge aujourd’hui un nouveau dest i n. I l est élec t r ique, connecté et partagé. Il doit garantir l’espoir d’une ville durable et solidaire, affirmer l’attractivité des territoires et répondre aux besoins croissants des u sager s - habit a nt s, visiteurs, professionnels.

La mobil ité ce sont des mobilités, une diversification des moyens de transport, des usages et des services, un système de plus en plus complexe.

Face à cela, dans le Grand P a r i s c o m m e a i l l e u r s , l ’é l e c t r o m o b i l i t é a u n e a m b i t i o n : t r a n s f o r m e r l ’e x p é r i e n c e d e l a v i l l e vers plus de simplicité et d’intuitivité. Dans les pages

suivantes, vous lirez comment les grands donneurs d’ordre, les entreprises, collectivités et star t-ups s’at tachent à anticiper l’avenir de cette m o b i l i t é é l e c t r i q u e , à l’organiser et à la coordonner, sous le regard éclairant de l’Histoire et de la prospective. Qu’il s’agisse d’infrastructures,

de ser vices urbains ou de nouvelles technologies, un mot d’ordre semble bel et bien lancé : la coopération.

C’est aussi dans cet esprit que nous vous donnerons dorénavant rendez-vous à inter valles réguliers pour suiv re de près l’évolution électrique du Grand Paris. n

« Le futur ne se subit pas, il se construit »

Guillaume Devauchelle

Mercredi 3 juin 2015

RéinventeR les lumièRes de la métRopole

[email protected]

paris, le 3 février 2015 2 Heurs et malheurs de la mobilité électrique Alain Beltran

3 Observer les tendances, anticiper leur retournement Thierry Gaudin

4 Des enjeux connus et des objectifs ambitieux pour le Grand Paris

5 Gestion de la ressource : anticiper les besoins

6 La mobilité se réinvente par ses usages

7 Pour un développement concerté des bornes de recharge

8 Un enjeu industriel

9 Des bornes de recharge forcément communicantes

10 Place à l’économie du partage

11 Voitures autonomes à l’horizon

12 De la diversification aux systèmes coopératifs Jean-Hubert Wilbrod

Développer des modèles pour réussir la mobilité électrique Sylvie Moulet

SynthèSe DeS DébatS

prochain événement

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> Obser ver la mobil ité élect r ique au rega rd

de l’Histoire, replacer son présent dans une courbe, c’est c omprend re à quel point certains problèmes du passé sont toujours les nôtres ; mais aussi apprécier le fait que d’autres problèmes n’en sont plus. Pour en donner un aperçu, je me pencherai sur une certaine période – les débuts du 20e siècle – à travers trois exemples qui me semblent signif icat i fs et qui composent ensemble un motif  : un succès, une réussite mitigée et un échec momentané.

« vive le métRo ! Quand même. »

Un succès plein, centenaire et immédiat : le métropolitain. Pour autant, la décision de construire un métro dans la capitale fut longue à se concrétiser. Car, outre les problèmes f inanciers, un conflit opposait la municipalité et les compagnies de chemin de fer. Celles-ci souhaitaient,

à la ma n ière de « Gra nd Cent ra l Stat ion » à New-York, l’implantation d’une importante station au Châtelet, où toutes les voies auraient convergé ; projet dont la Ville de Paris, pour dif férentes raisons, ne voulait pas.

L o r s q u e l e m é t r o v i t finalement le jour en 1900, les Parisiens l’attendaient depuis près de 50 ans. Et cette attente est sans doute une raison majeure de sa réussite instantanée. Pour tant, le conf lit entre la Ville et les chemins de fer n’en est pas resté là : certes l’écartement des rails respectait celui des trains, mais la Ville avait fait faire des tunnels si bas que ces trains ne pouvaient pas y rouler…

U n e a u t r e r a i s o n d e son succès est qu’i l a été i m m é d i a t e m e n t p e r ç u c o m m e u n é l e m e n t d e l’identité parisienne. Pour cause : il ignorait la banlieue. Cette identification explique que ses lourds travaux aient été mieux perçus par l’opinion publique que lorsque l’on éventrait les trottoirs pour installer le gaz ou l’électricité. Les journaux de l’époque s’en font d’ailleurs l’écho. Ainsi, en 1903, plusieurs jours après u n accident g rave qu i f it plusieurs dizaines de morts à la station Couronnes, on pouvait lire dans un journal s a t i r i q u e d e l ’é p o q u e , L’assiette au beurre : « Vive le métro ! Quand même. »

des machines à boucheR les Rues

Mon deuxième exemple est un revenant. Le t ramway apparaît dans les rues de Paris à la faveur de l’exposition universelle de 1881, consacrée à l’électricité. Bien qu’il fût de modèle allemand – ce qui à l’époque pouvait être mal vu -, il connut lui aussi le succès. Pendant un temps.

Dans la capitale, le choi x fut fait d’une alimentation électrique par le sol, car on ne pouvait dévisager la plus bel le v i l le du monde pa r des fils aériens. Il en allait différement pour la banlieue, si bien qu’il fallut mettre en place des système mixtes. Malgré tout, le tramway a mauvaise réputation. Il est réputé dangereux, et cause d’accidents spectaculaires. Il est bruyant. Et il est gênant. Da n s u n a r t ic le du Pet it Parisien de 1929, on peut l ire : « I l paraîtra un jour invraisemblable et fou qu’on ait encore laissé circuler dans Paris ces machines à boucher les rues, ces mastodontes qui ne peuvent jamais s’écarter d’un pouce de la ligne qui leur a été tracée. » Une mauvaise image qui cause sa perte, un peu plus entraînée par la concurrence de l’autobus, dans les années 1930.

suR le modèle du fiacRe

E n f i n , l ’ a u t o m o b i l e é l e c t r i q u e . U n s u c c è s é p h é m è r e , c e l u i - c i . L e premier véhicule à dépasser les 100 k m/h fut, en 1899, éle c t r ique ; en for me de tor pi l le, i l s’appelait « La Jamais Contente ». Liées à la production d’électricité, les premières automobiles p o s s é d a i e n t u n a s p e c t a ssez lou rd. Ma i s, peu à peu, l’esthétique s’améliora,

s u r le mo dèle du f i ac re, et l’on const r u isit même de s f lot t e s de v é h ic u le s assez élégants. La voiture éle c t r ique e s t a lor s loi n d’être une excentricité. Paris compte un certain nombre de stat ions de cha rge, en particulier rue Cardinet ou près de la Poste du Louvre pour les véhicules postaux. À Aubervilliers, une usine offre aux utilisateurs la possibilité d e c h a n g e r r a p i d e m e n t leur accumulateur. Sur un étonnant circuit composé de faux obstacles représentants des piétons ou des vélos, e l l e e n t r a î n e m ê m e l e s cochers à devenir d’habiles conducteurs. En 1925, on denombre jusqu’à quinze poi nt s de cha rge da ns la capita le, ma is à la même époque le moteur à essence f a i t d ’é n o r m e s p r o g r è s et ca nton ne peu à peu le moteur électrique à des rôles subalternes. On l’instal le dorénavant surtout sur les bennes à ordure, ce qui a le mérite d’être plus silencieux.

De ces trois dest ins, on constate aujourd’hui que le réseau métropolitain n’a guère changé, que le tramway fait un retour fracassant et que l’automobile électrique a droit à une nouvelle chance. Reste l’avenir… n

Heurs et malheurs de la mobilité électrique

alain beltRan

Directeur de recherche au cnrS pour l’unité mixte irice (identités, relations internationales et civilisations de l’europe). président du comité de l’histoire de l’électricité et de l’énergie.

Le circuit d’aubervilliers et ses faux obstacles

enseignait aux cochers l’art de la conduite

automobile.

« Trois destins : un succès, une réussite mitigée, un échec contrarié »

paSSé / futurS ..2

Page 3: EDF_GPHF_Réussir La Mobilité Électrique Urbaine (1)

> L e t rav a i l que nou s effectuons en matière

de prospective se fonde autour de deux axes : le premier suit la révolution industrielle, autrement dit l’évolution des techniques ; le second, né au milieu du 20e siècle, est ce que l’on peut appeler un axe immatériel, qui va des systèmes vivants à la structuration du temps. Temps que l’on envisage aujourd’hui de manière bien différente qu’il y a un siècle lorsque sa mesure en était la seconde. De nos jours, les

instruments technologiques comptent en nanosecondes. Une vitesse prodigieuse compte tenu des capacités de notre cerveau. Il nous faut, en effet, un dixième de seconde pour reconnaître quelqu’un que l’on croise pas surprise dans la rue. Notre technologie va donc 100 millions de fois plus vite que les neurones. Cette donnée n’est pas innocente, elle change tout le système technique pris dans son ensemble.

electRification, automatisation, « down sizing »

Pour en venir à la mobilité, je ferai un détour par le début des années 1990. Après la chute du mur de Berlin, nous avons connu une vague de succès des véhicules tous terrains. Dorénavant, nous pouvions aller partout dans le monde, et les gens rêvaient de partir à l’autre bout de la planète en voiture. Depuis, il s’est passé beaucoup de choses. D’abord l a d é s a p p r o p r i a t i o n d u véhicule et son électrification, il lustrés par le succès que l’on connaît à Paris. Puis, très récemment, une autre évolut ion tech nolog ique est venue nous déf ier : la v o i t u r e s a n s c h a u f f e u r, popularisée par la Google Car. Ce véhicule d’un type nouveau

va-t-il vraiment venir rouler sur nos routes ? Comment cela va-t-il s’arranger avec le reste de la circulation ? Pourra-t-on bientôt appeler un taxi sans chauffeur ? À moins que l’on ne préfère une solution mobilitaire venue des pays émergents ? Comme le triporteur, qui peut être ? Le fameux problème du dernier kilomètre pourrait très bien s’accommoder de ce genre de véhicule. Bref, on sent un mouvement général qui comprend : l’électrification, l’automatisation et ce que les Anglo-saxons appellent « le down sizing ».

logiQue démogRaphiQue

Ma i s i l e x i s te u ne aut re donnée à prendre en compte pour diagnostiquer le futur, et ces petits véhicules issus des pays émergents la traduisent en partie. Il s’agit de l’évolution démog raphique. En nous projetant en 2050, nous nous aperc e von s en ef fet que l’Europe est le seul continent à décliner démographiquement. Les produits ou les outils que nous concevons aujourd’hui ont donc de fortes chances de se développer ailleurs. Les constructeurs automobiles le

savent déjà, et le cas de Dacia est tout à fait caractéristique d’un véhicule conçut pour des pays émergents qui s’est f inalement vendu partout dans le monde, y compris e n E u r o p e . L a l o g i q u e démographique nous impose donc de penser autrement.

la ville végétale

Enfin, j’insisterai sur l’autre extrémité de l’axe immatériel : notre relation à la nature. L’architecte belge Vincent Callebaut, dont le travail est fondé sur l’archibiotique, a imaginé il y a peu des villes entièrement végétalisées. Sa vision donne une toute autre apparence à Paris, par exemple. La présence de la nature en ville est aujourd’hui t rès en deça de ce qu’el le pourrait être, alors que l’on note une véritable appétence des citoyens. La question est certes d’ordre affectif – on aime avoir des f leurs à son balcon ou posséder un jardin – mais el le interroge plus fondamentalement la relation ville-campagne. Si celle-ci se distend, il y a fort à parier que la ville se végétalisera.

Il me paraît à-propos de sol l iciter la réf lex ion su r deux éléments structurants que sont d’une part la relation à la nature et d’autre part la communication généralisée. En matière de prospective, obser ver les tendances ne suffit pas, il faut en anticiper les retournements. n

observer les tendances, anticiper leur retournement

thieRRy gaudin

expert international en politique d’innovation et en propective. président de l’association prospective 2100.

tenir compte des « effondrements »« Depuis plusieurs années, la prospective est abondamment traversée par la problématique de l’effondrement. on ne saurait en tenir compte. parmi les auteurs les plus marquants, le plus connu est le biologiste Jared Diamond dont le livre-phare « effondrement » analyse la chute d’un certain nombre de civilisations du fait d’un déséquilibre grandissant entre l’espèce humaine et la nature.

paru avant le livre de Diamond, « L’effondrement des sociétés complexes » de Joseph tainter explique, lui, comment un grand nombre de sociétés se sont effondrées sous la marée des informations qu’elles créaient et qu’elles ne parvenaient plus à digérer.

enfin, très récemment, une fiction écrite par deux historiens des sciences, naomi oreskes et erik m.conway, et intitulée « L’effondrement de la civilisation occidentale », évoque notre inaction face à au risque majeur que constitue le changement climatique. »

L’architecte Vincent Callebaut a imaginé un Paris végétal en 2050.

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> E x c e p t ion f a i t e d e l’aérien, le transport

(essentiellement routier) est reponsable d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre (GES) en Île-de-France. Il représente aussi plus de la moitié des émissions d’oxyde d’azote et plus d’un quart des émissions de particules fines. Il est source de nuisances sonores t rès prég na ntes dans une région urbaine particulièrement dense et provoque une congestion tojours plus intense. Paris demeure ainsi la ville la plus emboutei l lée de France, et une étude de la société d’info-t raf ic américaine Inrix dévoilait l’an passé qu’un Parisien passait en

moyen ne 55 heu res pa r an dans les bouchons. Cet ensemble de nuisances qui a des impacts en matière de santé publique, de qualité de vie, de sécurité, mais aussi des impacts environnementaux, économiques et d’autres effets induits représente un véritable défi pour la région capitale. La mobilité électrique est une réponse à ces défis.

un million de véhicules électRiQues en 2030

E l le n’est pas la seu le réponse. Pour Guillaume Devauchelle, même, « la question n’est pas tant de savoir s’il y aura 1 ou 2% de

vehicules électriques sur les routes en 2020 que de savoir s’il existera encore 98 ou 99% de véh ic u les thermiques. » Pour Valeo, aujourd’hui encore, l’un des axes prioritaires consiste donc à améliorer l’empreinte CO2 des véhicules thermiques. Et de le faire pour tous : « Pas seulement pour quelques véhicules premium dotés de moteurs ultra performants. »

Ceci étant, l’Île-de-France, à travers son Schéma régional de l’air et de l’énergie (SRCAE) élaboré conjointement par les services décentralisés de l’État et le Conseil régional, s’est doté d’objectifs ambitieux en matière de mobilité électrique. Dès 2020, i l est quest ion

d’i m mat r ic u ler 4 0 0  0 0 0 véhicules élect r iques ou hybrides rechargeables et d’en voir rouler 1 million sur les routes franciliennes en 2030. Pour Julien Assoun, il s’agit bel et bien d’un « volontarisme » qui « s’inscrit dans les objectifs de la transition énergétique. » Rappelons que celle-ci prévoit une réduction des émissions de GES de 20% en 2020, de 40% en 2030 et de 75% à l’horizon 2050. Plus que du volontarisme, on pourrait même parler de véritable saut quantique pour la mobilité élec t r ique, ca r même si la région francil ienne se positionne en tête des régions françaises sur le nombre de véhicules élect r iques

des enjeux connus et des objectifs ambitieux pour le grand paris

Julien assounchef du service énergie, climat, véhicules à la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie d’Île-de-france

« En tant que puissance publique, nous portons l’idée d’un déploiement réfléchi, anticipé et concerté des bornes de recharge sur le territoire francilien. »

sophie espiéresponsable des relations institutionnelles, projet BuS 2025, à la ratp

« Le passage à une flotte de bus 100% propre à Paris d’ici 2025 représente, pour la RATP, une révolution technologique majeure. »

alexandRe fRémiotchef de l’agence de la mobilité à la ville de paris

« Notre conviction est que, dans les centres urbains denses, nous nous dirigeons de plus en plus vers des véhicules serviciels, partagés et propres. »

chRistophe donizeauchef de mission Développement Durable Île-de-france d’erDf

« L’enjeu est de dimensionner le réseau de distribution pour que chaque Francilien ait accès à la mobilité électrique, et que la filière industrielle francilienne puisse répondre au pari du Grand Paris. »

henRi coRonBusiness development manager chez navya technology

« Le champ d’application de notre solution de véhicule autonome concerne aujourd’hui et déjà les circuits privés (aéroports, hôpitaux, campus…) »

SynthèSe DeS DéBatS ..4

immatriculés, celui-ci n’est que de 5 000 en 2014, contre 4 000 en 2013.

un nouveau contexte uRbain

L a mobi l ité élec t r ique s’apprécie néanmoins dans sa diversité. Elle concerne les véhicules particuliers, mais aussi l’auto-partage, les véhicules utilitaires, et, bien sûr, les transports en commun. À ce titre, la région francilienne s’est dotée d’un schéma de transport baptisé Nouveau Grand Paris, qui comprend notamment une grande rocade de banlieue à banlieue, le Grand Paris Express, mais développe aussi plusieurs lignes de tramway et de nouvelles tangentielles. Pour 2025, la RATP prévoit, de son côté, de transformer radica lement sa f lot te de bus qui passera, à 80%, à l’électrique. Tout ceci dans un contexte métropolitain en forte mutation qui, avoue Sophie Espié, « nous bouleverse p r o f o n d é m e n t e n t a n t qu’opérateur de transport. » Entendons par là l’évolution urbaine du Grand Paris, avec le développement de pôles économiques et scientifiques, de s opér at ion s d’i ntérêt national, et la construction inscrite au Schéma directeur régional d’Île-de-France de 70 000 logements par an. n

inte

rven

ants

Vue de projet de la gare noisy-Champs pour le Grand Paris express.

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400 000 le nombre de

véhicules électriques ou hybrides

progammés pour 2020 en

Île-de-France

5 000

le nombre de véhicules électriques

ou hybrides immatriculés

en 2014

4 000 MW la puissance

électrique supplémentaire nécessaire aux

besoins du Grand Paris d’ici 2030

16 000 MW la puissance

électrique actuelle nécessaire

en Île-de-France

> Le Gra nd Pa r is est d o n c « u n e v a s t e

dynamique économique et démographique », selon les mots de Julien Assoun. N o u v e l l e s a c t i v i t é s , nouveaux usages, nouveaux besoins. Le Grand Paris Express et ses 72 gares, la construction de logements et de bureaux, l’expansion é c o n o m i q u e , l a f o r t e croissance des data centers et la mobilité électrique vont impacter les réseaux électriques comme rarement en Île-de-France.

Avec le concou rs des opérateurs énergétiques, la Direction régionale et

interdépar tementale de l ’e n v i r on ne me nt e t de l’énergie d’Île-de-France (DRIEE) a conduit des études prévisionnelles pour évaluer ces impacts, sur un premier intervalle de temps qui court jusqu’en 2030. « Pourquoi é t a i t - i l s i i m p o r t a n t d’anticiper les nouveaux besoins  ? », quest ionne Ju l i e n A s s o u n . « P o u r s’assurer qu’on les conciliera bien avec les aménagements du Grand Paris. Pour savoir de quelle manière il faudra renforcer et dimensionner l’infrastructure électrique. E t p o u r p a r v e n i r à territorialiser la puissance électrique supplémentaire. »

besoin de puissance

Q u e n o u s d i s e n t aujourd’hui ces études ? Que la puissance électrique nécessaire aux usages devra aug menter de 25% d’ici 2030. Elle est aujourd’hui de 16 000 MW, elle devra croître de 4 000 MW, et l’on estime à 500 MW le besoin de puissance supplémentaire nécessaire aux véhicules électriques  ; estimations faites sur la base des besoins maximaux afin de couvrir les pointes de puissance électrique, tout en intégrant la dynamique de transition énergétique. Il s’agit bien évidemment de prévisions

qu’il convient de réactualiser régulièrement  : en 2011, elles estimaient à 1 000 MW supplémentaires les besoins en termes de data centers, aujourd’hui nous en sommes à 1 200 M W. El les nous disent aussi que plusieurs p ô l e s r é g i o n a u x s o n t particulièrement concernés par cette évolution, tels Saclay, Marne-la-Vallée, Roissy, le Pays mantois ou encore Plaine Commune. Elles nous disent enfin que si les usages se démultiplient et s’amplifient, la production d’électricité elle aussi se diversifie. Le SRCAE veut pour 2020 que la production d’électricité photovoltaïque

gestion de la ressource : anticiper les besoins

auRélien ouellettechargé d’affaires, chez SoDetreL

« Deux notions sont essentielles pour un opérateur de mobilité tel que SODETREL : l’intermodalité et l’interopérabilité. »

guillaume devauchelleDirecteur de l’innovation chez valeo

« L’automobile et les moyens de transport d’aujourd’hui sont exactement au même point que les téléphones il y a 15 ans. »

alain costaDirecteur du développement stratégique et commercial chez freshmile

« Cerveau central des objets connectés, le smartphone offrira une mobilité plus intelligente et plus de services à l’utilisateur. »

gilles beRnaRdprésident du conseil de Gireve

« Nous devons organiser un avenir de coopétition au sein d’un marché ouvert où les données puissent s’échanger librement. »

avec 1 200 MW, les data centers représenteront 25% de la puissance supplémentaire nécessaire au Grand Paris.

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soit de 500 GWh/an et que l’éolien passe à 800 GWh/an. Sachant que la production d’électricité renouvelable est décentralisée, il est nécessaire que les réseaux soient de plus en plus intelligents pour l’intégrer.

besoin d’intelligence

« À l’horizon 2030, avec 1   m i l l i o n d e v é h i c u l e s élect r iques – si on est en charge normale pour tous ces véhicules électriques - on va se retrouver avec une puissance appelée de l’ordre de 2 5 % de la pu i s s a nc e francilienne. » Christophe Donizeau pointe ici du doigt un « enjeu significatif pour

les réseaux ». Mais il poursuit e n d é v oi l a n t l ’a v a n t a g e que pro c u re le véh ic u le élect r ique : sa capacité à fonc t ion ner de m a n ièr e intelligente. « Si on intègre l’autopartage et l’évolution des comportements, on peut descendre à 10 % de l’appel de puissance à la pointe. Si on met de l’intelligence dans le réseau - donc un système qui permet de planifier l’appel de puissance, d’optimiser la charge ou d’avoir des appels à des heures décalées - on peut tendre vers un chiffre de l’ordre de 4 %.  » I l est même env i s a ge able que l’usager concourt à piloter l e r é s e a u é l e c t r i q u e d e

manière vertueuse, via son smartphone. Des applications comme celles développées par Freshmile sont capables de mesurer nos déplacements et de prédire la recha rge nécessaire pour le type de véhicule qui y est enregistré. « Q u i plu s e s t , e x pl ique Alain Costa, puisque je suis géolocalisé, je peux prévoir quand je devrai me recharger et fournir ces informations au distributeur pour qu’il anticipe un pic de puissance. » Cer tains n’hésitent pas à imaginer, même, que l’on puisse se servir de l’agenda du smartphone pour prévoir les déplacements futurs de l’usager et ses besoins en

recha rge. Une hy pot hèse qu’Alain Costa qualifie tout de même « d’intrusive par rapport aux libertés individuelles, et de peu fiable. »

besoin de R&d

L e d é p l o i e m e n t d e l a mobilité électrique ne sera possible sans une sécurisation du réseau. Or ce déploiement ne s’organise pas de manière linéaire, mais au sein d’un vér it able m ael st rom qu i fait intervenir, entre autres, mutations technologiques, nouveaux comportements et usages, et enjeu x de la t r a n s i t i o n é n e r g é t i q u e . Autrement dit, il nécessite

une recherche permanente e t l e d é v e lop p e m e n t d e nouveaux modèles. La R&D d’EDF (voir aussi page 12) travaille sur la mise en place d’algorythmes pour mieux gérer la puissance du point d e v u e d u d i s t r i b u t e u r, mais aussi sur des modèles pour les entreprises visant à gérer la puissance non pas uniquement en fonction de contraintes réseaux mais selon leurs métiers, comme ceux imaginés pour appréhender le s b e s oi n s en r e c h a r ge d’une flotte de camions. Elle cherche, par ai l leurs, des solutions visant à prendre en compte l’intermittence de la production d’énergie

> Et s i le s mo y en s de t ra nspor t act uels en

étaient au même point que les téléphones il y a quinze ans ? C’est ce que suggère Gu i l lau me Devauchel le  : « I l y q u i n z e a n s , v ot r e téléphone por t able vou s ser va it essent iel lement à téléphoner. Aujourd’hui, il vous sert de GPS, de moyen

d’information, de billet pour prendre un avion ou de lecteur de MP3. Il s’est converti à d’autres usages. L’automobile aujourd’hui passe 93% de son temps à l’arrêt et effectue 90% de ses trajets avec une seule personne à bord quand quatre p er s on ne s au m i n i mu m sont prévues, son usage ne correspond plus aux besoins. »

la voituRe seRvicielle

Une révolution des usages est à l’œuvre. Déjà, note Sophie Espié, « les voyageurs des transports en commun ont acquis plus d’agilité dans leurs déplacements, dans la maîtrise de leur temps, ce qui les rend capables de s’adapter, d’arbitrer

et d’aménager leur emploi du temps pour opt imiser leur quotidien. » Du côté du véhicule individuel, l’autorité publique constate une forte demande des habitants en ce qui concerne l’automobile servicielle. « Les usagers ne sont plus dans un rapport de possession, mais dans un rapport d’usage, de simplicité

la mobilité se réinvente par ses usages

d’u s a g e e t de s ouple s s e d’utilisation », pense Alexandre Fremiot. Cela veut dire ne plus s’encombrer de l’entretien de son véhicule et ne plus payer de stationnement (dont le coût ne cesse d’augmenter). Cela veut dire aussi profiter des services que permettent les nouvelles technologies tel les que la réservation de son véhicule ou la possibilité de trouver une place de stationnement rapidement et simplement. Cela veut d i re en f i n u ne sorte d’effet retour vertueux sur la mobilité puisque les c itoyens qu i se tou r nent vers l’automobile servicielle semblent plus enclins à utiliser le vélo ou les transports en commun.

plus de mobilités, moins de mobilité

L a m o b i l i t é q u i é t a i t vécue « comme une tranche de vie bien particulière se dessine aujourd’hui dans un continuum beaucoup moins net », sig na le Gu i l lau me Devauchelle. L’offre mobilitaire, sa diversification (voir page 12) et sa ramification refondent

Lire, travailler, manger à son volant : le projet européen SaRtRe transforme les voitures en «wagons»…

SynthèSe DeS DéBatS ..6

« Tous les transporteurs ont en tête qu’il ne sera bientôt plus envisageable de faire ses tournées de livraison avec des véhicules thermiques polluants d’ancienne génération. Nous avons donc commencé à développer des espaces logistiques qui permettent de dégrouper les camions dans les centres urbains denses

et de les répartir dans des petits véhicules urbains propres. Notre idée est d’élargir cette réflexion à tous les professionnels qui font vivre la ville, commerçants ou petits artisans, et qui ont un besoin occasionnel de se déplacer ou

de livrer. Nous allons, dans les prochaines années, faire en sorte de leur offrir des services d’autopartage adaptés, qui leur permettent d’exercer sans s’encombrer de la détention d’un véhicule. » Alexandre Fremiot

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> 1 million de véhicules électriques en 2030.

L e s i m p a c t s d ’u n t e l d é p l o i e m e n t p e u v e n t s’avérer catastrophiques pour le réseau électrique, ou, au contraire, tout à fait modérés si ce déploiement est suffisamment anticipé et réfléchi. Ce qui est visé plus particulièrement ici, ce sont les bornes de recharge. Choisir leur implantation et leur modalité s’avère stratégique.

cooRdination

« Évidemment, il existe un besoin de réassurance - pour stimuler le décollage du ma rché - de poi nt s de rec ha r ge ac c élérée e t r a p i d e , m a i s l e u r implantation pourrrait, si elle se déployait de manière non maîtrisée, renchérir la poi nte élect r ique et a v o i r d e s i n c i d e n c e s é c o n o m i q u e s   », n o u s

dit Julien Assoun. A f in d’év iter le r isque d’une déstabilisation du réseau, « ce qui serait préjudiciable pour le développement de la mobilité électrique », il est préférable d’opter pour des recharges standards, moi ns gou r ma ndes en énergie, et de réfléchir en amont à l’implantat ion territoriale des recharges r apide s : où en a-t-on v raiment besoin  ? Cela suppose, pour la DRIEE, d’agir sur deux leviers : une volonté politique née des territoires métropolitains et une concertation avec les opérateurs énergétiques.

D’autant que le maillage de ces points de charge doit se coordonner avec celui des points d’avitaillement des autres mobilités. On pense, notamment, au gaz naturel. Pour Alexandre Fremiot, « l’enjeu de la mobi l i t é propre ne s e résume pas à l’électrique.

Chez les professionnels, l’of f re gaz est d’ores et déjà bien plus avancée. » Il existe donc une réflexion à mener pour articuler ces besoins complémentaires, au risque de générer des investissements redondants et contre-productifs.

un million ? deux millions ?

De combien de bornes a u r a - t - o n b e s o i n ? ERDF estime le chiffre à 2  mil l ions. Soient deu x bornes par véhicule. Un ratio contesté par Gilles Furet, à la direct ion de l a St r at é g ie v éh ic u le s électriques d’EDF pour qui « l’expérience montre que l’on fonctionne très bien avec quelque chose d ’u n p e u s u p é r i e u r à un point de charge par véhicule. » Un peu plus d’1 million de bornes serait donc suffisant. Mais pour

Christophe Donizeau, la question ne se pose pas vraiment en ces termes : «   L e c o m p o r t e m e n t d e s u s a g e r s n’e s t p a s forcément optimal. Nous devons prévoir le cas où ils n’anticipent pas leur besoin de charge. Quelque soit leur trajet ou leur destination, les automobilistes voudront pouvoir recharger aisément leur véhicule : chez eux, à leu r t r av a i l , da n s la r u e , p r è s d e s c e n t r e s commerciaux… D’où ce volume de 2 millions. »

E R D F e s t i m e , p a r a i l le u r s , que 9 0 % de s b o r n e s d e r e c h a r g e dev ront êt re insta l lées hors voies publiques. Un dispositif qui concerne les maisons individuelles, les immeubles collectifs, les immeubles de bureaux, les stations-services, les centres commerciaux, les parkings d’entreprises…

pour un développement concerté des bornes de recharge

les déplacements. En Île-de-France, le développement d’infrastructures lourdes au sein du schéma Nouveau Grand Paris mettront, à moyen terme, 90% des Franciliens à moins de 2 km d’une gare. Cette donnée, à elle seule, va reprogrammer les mobilités, renforcer certaines polarités territoriales et, sans doute, faire tâche d’huile auprès de territoires plus éloignés qui devront inventer de nouvelles solut ions de mobil ité. En cela, la mobilité est partout. N’est plus définie comme un simple déplacement, mais com me u n c adencement intégré du quotidien. À tel point que s’esquisse une autre tendance  : la démobil ité. « Même un développement massif des infrastructures de transport ne saura répondre à la surcharge du réseau », pour Sophie Espié. La voie est ouverte pour le développement des tiers-lieux qui offrent à certains territoires une nouvelle chance économique, mais aussi pour expérimenter les horaires décalés, à l’instar de ce qui se fait à Plaine Commune. Tout concourt à réclamer une mobilité désirée et non subie.  n

solaire au sein d’une maison et, a insi, à fa ire jouer un rôle à la batterie du véhicule électrique.

E n f i n, la gest ion de la ressource peut se penser au sein des f utures gares du Grand Paris Express qui, selon Sophie Espié, « sont appelées à devenir non seulement des hubs de t ranspor ts, mais aussi des hubs énergétiques. » L’institut Efficacity imagine donc une gare où l’énergie p r o d u i t e (f r e i n a g e d e s trains, chaleur des locaux techniques...) pourra être mut ua l isée avec d’aut res équipements. Ou comment l ’é l e c t r o - m o b i l i t é p e u t concourir à approvisionner le réseau. n

Les bornes de recharge sur la voie publique ne représenteront que 10% du volume installé en 2030.

« La RATP a annoncé à l’horizon 2025 le passage à une flotte 100 % propre avec 80% de bus électriques et 20 % de bus bioGNV.

On ne mesure pas à quel point il s’agit d’une révolution technologique. Certes, quelques constructeurs fabriquent déjà des bus électriques, mais ces bus de taille standard (12 m) ne possèdent pas une autonomie de batterie suffisante

pour une exploitation classique (donc de parcourir 200 km par jour). D’autant que le choix fait par la RATP est celui de bus qui se rechargent la nuit dans nos centres bus à l’aide de charges lentes, ce qui aura un impact non négligeable sur

l’appel de puissance. Dès la fin 2015 ces Blue Bus (filiale du groupe Bolloré qui a obtenu le marché) pourraient être expérimentés sur plusieurs lignes de notre

réseau, avant un développement massif prévu pour 2019. » Sophie Espié

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pRioRité aux logements

P o u r G i l l e s F u r e t , « au regard de la densité francilienne, le vrai sujet est celui de l’implantation des points de charge dans les immeubles collectifs. » Un point de vue partagé par Elodie Montain, à la direction générale de la communauté d’ag g lomérat ion Pla i ne C o m m u n e , m a i s p o u r d’autres raisons : « Notre posit ion est de disposer d’un panel d’outils pour faire en sorte que l’espace public soit moins utilisé par les véhicules particuliers. Or, nous savons que dès qu’un salarié peut se garer su r son l ieu de t rava i l, i l a tendance à venir en voiture. L’enjeu ne consiste donc pas à favor iser le déploiement des bornes près des bureaux, mais bien près des logements. » Une bonne option ? Pas forcément pour cet intervenant qui considère « qu’avec les bât iments à énerg ie posit ive, u ne certaine quantité d’énergie (souvent d’origine solaire) va devoir être utilisée. C’est tout un système qui va changer et qu’il faut construire avec souplesse, car on ne sait pas très bien quelles seront les opportunités d’avenir. »

l’œuf et la poule

Un avenir qui dépend en partie de ces bornes. Pour certains, leur déploiement est trop frileux en France, alors qu’il doit permettre de lancer le «  process » de la mobilité électrique. A u r é l i e n O u e l l e t t e e n c o n v i e n t : o r g a n i s e r u n v a s t e d é p l o i e m e n t d e l ’ i n f r a s t r u c t u r e d e recha rge, «  c’est br iser cette logique de l’œuf et de la poule consistant à dire : les utilisateurs attendent des bornes pour acheter des voitures électriques et les collectivités attendent qu’il y ait suffisamment de voitures en service pour i n st a l ler de s bor ne s.   » I l faut bien commencer quelque part. Mais l’heure n’e s t p a s n o n p l u s a u surinvestissement. « Il s’agit avant tout d’accompagner cette transformation, tout e n s u i v a n t l ’é v ol u t ion des ventes de véhicules é l e c t r i q u e s », c o n c l u t Aurélien Ouellette. n

> La mobilité électrique, ce sont des mobilités

électriques. Il s’agit du véhicule particulier, mais aussi du transport de marchandises, de la livraison du dernier kilomètre, des transports en commun ferrés ou routiers, de l’autopartage, du deux-roues motorisé, du vélo assistance électrique, voire bientôt du téléphérique. Cela nécessite, au-delà de l’infrastructure, de bâtir ce que Julien Assoun

nomme un « écosystème », de l’anticiper et de le déployer à la faveur du Grand Paris. Cette opportunité existe maintenant et appelle une réponse à la hauteur des enjeux.

plus de 130 000 boRnes paR an

« Les enjeux sont grands, nous ne sommes pas dans de l’approximatif ni du pionnier. Les v i l les s’engagent, les

opérateurs s’engagent. Le sujet est devenu industriel », dit Christophe Donizeau. Sur les 2 millions de bornes de recha rge nécessa ires à l’horizon 2030, selon les estimations d’ERDF, 200 000 devront être installées sur sur la voie publique. Soient 6   0 0 0 r a c c or de me nt s à p r é v oi r c h a q u e a n n é e . Sachant qu’ERDF procède déjà à 60 000 raccordements par an en Île-de-France, le

d ist r ibuteu r dev ra donc c on s ac rer 10 % de c et t e activité aux seules bornes de la voie publ ique. Ce n’est pas tout  : « Si l’on con sidère les 1 8 0 0 0 0 0 bor nes du secteu r pr ivé (logements, ent reprises, centres commerciaux…), les maîtres d’ouvrage doivent déjà pré voi r d’i n st a l ler 125 000 bornes par an », note Christophe Donizeau. L’enjeu électrique, on le voit, ne s’apprécie pas qu’en termes de dimensionnement des réseaux mais aussi en termes de filières industrielles. Un chiffre, à lui seul, en donne u n au t r e a p e r ç u  : d’ic i 2030, ERDF devra investir 7 Md s  € pou r fa i re fac e au besoi n de pu issa nce électrique supplémentaire du Grand Paris. Comparés aux 23 Mds € que suppose la construction du métro Gra nd Pa r is E x press, le coût n’en est donc pas moins significatif. n

> « En tant qu’opérateur de services, la première

question que je pose à mes clients est la suivante : “Que vou le z-vou s pou r vot re mobilité urbaine ?“ Leur réponse – et nous devons être assez humbles pour l’entendre – est généralement : “Je veux aller d’un point A à un point B, et que ce soit le plus simple possible.“ » Pour Aurélien Ouellette, cette seule réponse implique deux éléments fondamentaux : l’intermodalité et, surtout, l’interopérabilité.

stationnement = RechaRge

S u r l e p r i n c i p e d e simplicité, Gilles Bernard fait le même constat : « Si le véhicule électrique doit se déployer massivement, i l

est nécessaire d’en faciliter l’usage. » Concrètement, un conducteur qui a besoin de se ga rer doit pouvoir trouver à l’endroit de son stationnement un moyen de recharger son véhicule. L’ép o que de l a s t at ion-ser v ice est révolue. Une inversion va s’opérer : plutôt que d’attendre l’opportunité de r empl i r le r é s er v oi r d e l a v o i t u r e , l ’u s a g e r trouvera cette opportunité à disposition, quel que soit son parcours. Et puisqu’un véhicule passe l’essentiel de son temps à l’arrêt, c’est à ce moment précis qu’il doit pouvoir se recharger. « Plus tard, note Gilles Bernard, il ne sera même plus question de branchement puisque la recharge se fera par induction : il suffira de stationner pour retrouver de l’autonomie. »

s’inspiReR des télécommunications

Mais, selon les mots de Gui l laume Devauchel le, « faire simple est extrêmement compl iqué. » Com me le souligne Alain Costa, « un nouveau monde va s’ouvrir, un monde concurrentiel avec des opérateurs qui, à l’image des stat ions de ser v ice à essence, vont se faire une forte compétition. » Or, cette facilité d’usage recherchée implique que chacun puisse accéder, de par son opérateur de mobilité, à n’importe quelle borne de recharge de n’importe quel opérateur. « Je suis un habitué de Bruxelles, raconte Aurélien Ouellette, et, lorsque je descends du Thalys, il me paraît naturel d’ouvrir mon smartphone et de constater que je suis passé sur le réseau

belge 3G. En revanche, il ne m’est absolument pas naturel de pouvoir utiliser les transports en commun belges avec une carte de transport d’Amsterdam ou de Paris. Chacun appréciera l a c o m p l e x i t é e n t r e différences d’interopérabilité pour les transports et les télécommunications… »

tout connecteR

L’interopérabilité est un cha nt ier tech n ique. Les services liés à la mobilité électrique, qu’il s’agisse de trouver une borne de recharge ou de la payer, doivent pouvoir être proposés dans tous les cas de figure, que l’on soit abonné à un opérateur ou pas. Cela met en jeu la connectivité. Un seul exemple en donne la mesure : le paiement. «

un enjeu industriel

des bornes de recharge forcément communicantes

SynthèSe DeS DéBatS ..8

D’ici 2030, 200 000 bornes de recharge devront être installées sur la voie publique, soient 6 000 par an.

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un enjeu industriel

« Cette illustration qui date de 1957 nous renseigne sur ce dont on rêvait à l’époque : une mobilité propre, connectée et sécure. Tout était donc déjà là. Mais elle nous dit aussi autre chose. Elle nous montre un joli ciel orangé qui sent bon le souffre, ce qui indique que les problématiques environnementales n’étaient pas

à l’ordre du jour. Elle nous montre de magnifiques barres d’immeubles qui étaient censées répondre à la crise du logement, ces mêmes barres qui nous font horreur aujourd’hui. Enfin, elle nous montre des voitures américaines calquées sur l’idéologie du moment. En fait, elle nous montre que l’on a bien du mal à s’extraire

de la réalité dans laquelle on baigne. Même si elle projette un certain futur, elle le fait sans pouvoir faire fi des problèmes du moment. » Guillaume Devauchelle

Si l‘on veut éviter que nos clients aient un sac à la place du portefeuille pour ranger l’intégralité de leurs cartes d’accès, il va falloir réunir le plus possible tous ces services », dit Aurélien Ouellette. D’où la solution de Freshmile qui intègre « l’ensemble de ces cartes à un seul portefeuille client », répond Alain Costa. Mais pour ce dernier, l’enjeu de la connectivité passe avant tout par la mise en place d’un système intelligent où véhicules et bornes de recharge font figure d’objets connectés, avec pou r « cer veau » le smartphone et ses applications. Plus tard, éventuellement, t ou t e s l e s i n f or m a t ion s remonteront du véhicule lui-même. SODETREL y travaille déjà avec un constructeur automobile : « L’idée est de con nec ter nos d i f férent s

data centers afin d’indiquer à l’ordinateur de bord de la voiture la disponibilité en bornes de recharge, d’avoir la capacité depuis la voiture d e r é s e r v e r l e p o i n t d e charge et, dans un futur plus lointain peut-être, de faire en sorte, grâce à une approche smar tg rid, que la voiture devienne spontanément un appui au réseau électrique. »

ouveRtuRe des données

Da n s c e foi son nement d e c o m m u n i c a t i o n , l’interopérabilité est aussi un chantier politique. « Si l’on veut que les opérateurs de mobi l ité proposent à leurs clients des solutions intégrées pour les l ibérer du souci de l’autonomie, de trouver des bornes et de gérer

éventuellement les problèmes énergétiques de la recharge, il faut que toutes les bornes soient com mu nica ntes  », ex pl ique Gi l les Ber na rd. « Mais de manière ouverte », ajoute-t-il. Car les opérateurs devront forcément s’échanger d e s don né e s . S i c e l a s e déroule dans un contexte d e m o n o p o l e f e r m é , l a mobilité électrique risque fort de perdre en simplicité. Son destin s’annonçant tout autant pourvoyeur de services que vecteur de transport, l’ouverture des données que comportent les bornes de recharge fait figure de sésame. « Et en premier lieu, les données des bornes publiques », conclut Gilles Bernard. n

borne Freshmile compatible aux autres types de borne pour simplifier l’expérience de la mobilité électrique.

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> « 8,5% des kilomètres parcourus en voiture

en Î le-de-Fra nc e le sont p a r l ’a u t o p a r t a g e o u l e covoiturage. » Ce chiffre, cité par Sophie Espié, montre la montée en puissance de l’économie collaborative qui intègre dorénavant l’espace des mobilités. La valeur d’usage tend à remplacer la valeur du bien, particulièrement dans les centres urbains denses. Le succès d’Autolib est aussi là pour en attester : 60 000 abonnés en trois ans, une progression bien plus rapide que ce qu’imaginait Vincent Bollloré lors du lancement de ce service d’autopartage électrique.

paRtage de l’espace, paRtage du temps

Pou r u ne c ol le c t i v i t é , c om me c e l le de l a V i l le de Pa r i s , l ’i nt ér ê t p or t e é v i d e m m e n t s u r l e désencombrement de l’espace public : « Le véhicule partagé permet de diminuer de 7 à 15 le nombre de véhicules en détent ion, soit moi ns d e p l a c e i m m o b i l i s é e sur la voierie et moins de véhicu les en détent ion  », note Alexandre Fremiot. Ceci étant, « la diversification des mobil ités » constatée par Jean-Hubert Wilbrod (voir page 12) vient tracer d’autres défis. L’infrastructure viaire,

peu modif iable, va devoir s e r é i n v e n t e r. D e f a ç on stat ique en réaf fectant la voierie, comme ce qui se met en place sur les autoroutes franciliennes menant aux aéroports, au bénéfice des bus et des ta x is. De façon dynamique par l’utilisation des nouvelles technologies. Mais aussi, en élargissant les fenêtres de déplacements pendulaires, pour un partage du temps mobilitaire. Jean-Hubert Wilbrod cite ainsi l’initiative prise à Rotterdam consistant « à payer les usagers de la route s’ils décident de reporter leurs déplacements ou s’ils décident de ne pas se déplacer. »

> « Notre credo, c’est que le véhicule sera connecté. Et

pour qu’il le soit de manière sûre, il doit devenir autonome, ou partiellement autonome. » Pour Guillaume Devauchelle et Valeo, la cause est donc entendue. La mobilité, électrique sera de plus en plus intuitive, avec, au bout de la route, un destin : la voiture autonome, aujourd’hui popularisée par la Google Car qui, selon Guil laume Devauchelle, « procède à quelque chose d’extrêmement important : elle prépare les esprits. »

histoiRe d’un bip-bip

« Le futur ne se subit pas, il se construit. » Fort de cet adage, Valeo s’est bâti une vision qui trouve ses racines quinze ans en arrière lorsque l’équipementier parie sur l’encombrement des centre-villes et propose une assistance au parking. « Il s’agit du fameux bip-bip à l’arrière du véhicule dont nous sommes les pionniers et les leaders mondiaux. » À partir de ce bip-bip, Valeo s’est doté d’une feuille

de route plaçant à intervalles réguliers une innovation et son expérimentation, car « au final, c’est l’usage qui décide. » Il a donc été question d’abord d’enrichir le bip-bip, « puisque nous savions que nous allions être copiés » : ce fut en 2003 la mise sur le marché du premier véhicule à se garer semi-automatiquement. Puis, il y a 18 mois, Valeo a annoncé un système de manœuvres de park ing complètement automatiques qui dev rait équiper des véhicules dès 2016. Enfin, récemment, il a proposé sur son site Internet u n e d é m o n s t r a t i o n d e manœuvre de parking à partir d’un smartphone. Et imagine déjà la prochaine étape : « une fonct ion de voiturier automatique où le véhicule cherche sa place de parking dans un environnement qu’il connaît déjà. »

en ciRcuit feRmé

Sur ce marché, Valeo n’est pas seul. La RATP s’est dotée d’un programme de recherche et investissement sur la question.

Avec la société Ligier, elle entend ainsi expérimenter des navettes de petites capacités sur certains territoires. Mais elle y voit surtout un gain de productivité sur le temps de garage de ses bus dans ses centres de maintenance.

De son côté, la société Nav y a possède déjà u ne f lotte de quatorze navettes autonomes dans le monde. Son terrain de jeu ? Les circuits fermés : campus, hôpitaux, sites industriels, aéroports… Les seuls possibles puisque la Convention de Vienne de 1968 interdit encore la mise en circulat ion de ce t y pe de véhicule sur les routes européennes. « Nous sommes su r le même c onc ept de navigation et de technologie que la Google Car, explique Henri Coron. Une solution sans inf rast r ucture, avec technologie embarquée dans un véhicule électrique à deux roues motrices. » Navya y voit notamment un déploiement à Si ngapou r, con f ronté à une obligation de réguler et de limiter l’utilisation des transports personnels. « Avec

la croissance démographique, la voiture personnelle y est devenue un produit de luxe, explique Henri Coron, et les autorités sont à l’affût de toutes les solutions pour acheminer les populations du centre-ville vers la périphérie. »

ceRcle veRtueux

La voit ure autonome et électrique est aussi, pour Gu i l lau me De v auc hel le, u n e s o l u t i o n a u x d é f i s métropolitains. « La vitesse moyenne diurne à Paris est

place à l’économie du partage

voitures autonomes à l’horizon

Partage de l’infrastructure viaire sur l’autoroute a1 qui mène à Roissy.

SynthèSe DeS DéBatS ..10

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un monde de coopétition

M a i s l ’é c o n o m i e d u partage vient aussi heurter des systèmes bien en place. L a c r é a t i o n r é c e n t e d e l’Institut Védécom montre que « l’industrie automobile, traditionnellement fermée sur elle-même », dixit Guillaume Devauchelle, s’ouv re vers une nouvelle logique. Les

inter férences dev iennent nombreuses entre des secteurs qui s’ignoraient (recherche, t é l é c o m s , c o l l e c t i v i t é s , infrastructures, opérateurs, etc) et les barrières sont en train de d’effondrer. « On doit arrêter d’opposer véhicule thermique à v é h i c u l e é l e c t r i q u e , individuel à collectif, pour essayer d’imaginer ensemble le s s olut ion s qu i s e r ont gagnantes demain », demande

Gu i l lau me De v auc hel le. Même son de cloche du côté de Gilles Bernard pour qui « l’avenir doit se construire sous un mode de coopétition. Nous passons d’un âge de juxtaposition des monopoles fermés à un monde ouvert, fait de transversalité. Les acteurs mis en concurrence devront échanger pour construire un monde plus efficace et plus créatif. » n

d’env iron 12 k m/h. Si on réglait le pilotage automatique de la voiture à 30 km/h, on garantirait non seulement à la collectivité une baisse d e s a c c i d e n t s , m a i s o n supprimerait le phénomène d ’ a c c o r d é o n d û a u x

accélérations et aux freinages brusques, réduisant du coup la conosmmation d’énergie. Avec l’École des Mines, nous avons condu it u ne ét ude tendant à montrer que cet effet d’accordéon supprimé, il en résulte un débit automobile

multiplié par trois à cinq. Avec le véhicule autonome, vous obtenez donc une disparition des embouteillages, moins d’accidents et une baisse de la consommation d’énergie. Vo i l à t o u t c e q u e l ’o n cherche. » n

Déjà en service : une navette autonome de la société navya, sur des voieries privées.

Utilib : le service d’autopartage public dédié aux professionnels, à Paris.

concLuSion

E n guise de clôture des débats, je reviendrai tout d’abord sur deux aspects qui ont été évoqués et

qui touchent à la fois à l’internatio-nalisation et à l’interopérabilité. Cela a été dit : la “banlieue“ de Paris, ce n’est plus simplement Aubervilliers, c’est aujourd’hui Bruxelles. L’inte-ropérabilité est donc aujourd’hui au moins européenne. Demain, elle sera mondiale. Des problèmatiques vont en émerger, en particulier celle de la normalisation. La question des bornes de recharge pose, inévitablement, celle de la norme, et ce, compte tenu de la grande quantité d’opérateurs concernés. Cette norme devra être internationale, et acceptée par l’ISO.

Quelque chose m’a aussi interpellé lorsque M. Devauchelle a mentionné le grand nombre de connexions au site Internet de Valeo dès qu’ils ont mis en ligne une expérimentation pour garer son véhicule à l’aide d’un smartphone. Car cela souligne l’ex-trême sensibilité du grand public au progrès technique. Ce n’était pas le cas autrefois, et cela implique que les ingénieurs ont la possibilité de toucher directement le public, faisant fi, si besoin, de leur hiérarchie.

Cela me rappelle une conversa-tion entendue il y a quelques mois entre d’anciens dirigeants de grands groupes qui en étaient venus à la conclusion suivante : « Mais enfin, comment se fait il qu’il n’y ait pas en-core de bus électriques ? » Après le premier choc pétrolier de 1973, nous avions fait paraître un numéro des annales des Mines dans lequel on évo-quait déjà les véhicules électriques et hybrides pour remédier à la crise énergétique. Et quarante ans plus tard, on se demande pourquoi il n’y a pas encore de bus électriques… Si je peux me permettre une recomman-dation, ce sera donc la suivante : que les opérateurs du concret s’unissent, qu’ils communiquent entre eux, qu’ils n’intériorisent pas les différences d’intérêts entre leurs organismes mais qu’ils coopèrent, afin de pro-poser des solutions pour l’avenir. thierry Gaudin - Prospective 2100

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recherche & DéveLoppement ..12

> Il semble promis à la mobi l ité u rba i ne de

suivre les voies toutes tracées de l’élec t r i f ic at ion et de l’automatisation des véhicules. Nous pensons, chez Mov’eo, q ue d’au t r e s é v olu t ion s l’impacteront à l’avenir.

La première d’entre elles est la formidable diversification en c ou r s de s moyen s de transport. Il y a trente ans, une v i l le comme Paris ne concentrait que la moitié des types de véhicules que l’on y rencontre aujourd’hui.

Cet te d iver si f ic at ion a et aura des incidences en m at ière d’a mén a gement urbain. Elle concerne aussi bien les motos et les scooters que le téléphérique dont de grandes villes commencent à s’équiper. Elle concerne l a log i s t ique du der n ier kilomètre avec l’apparition de véhicules telle que MooVille pou r lequel Mov ’eo s’est impliqué, mais aussi le vélo électrique : il y a quelques années la Chine produisait plus de 20 millions de vélos

électriques par an contre 9 millions de voitures. Voilà un ordre de grandeur qui fait réfléchir.

C e t t e d i v e r s i f i c a t i o n s ’ a c c o m p a g n e d ’ u n e plu r a l i t é d’u s a g e s e t de ser v ices. On obser ve déjà la for m id able perc é e du covoiturage, la mise en place de l’autopartage, demain il pourra être question d’utiliser les parkings des hôtels pour fournir du stat ionnement supplémentaire… Nous allons devoir partager l’espace d’une

infrastructure viaire qui, en termes d’emprise au sol, varie peu. Et de statique, ce partage d e v i e n d r a d y n a m i q u e . I l i mpl iquer a, c er t e s , l a connectiv ité du véhicule, mais surtout il fera naître, par le biais des applications smartphone, tout un ensemble de systèmes coopératifs.

Demain, des communautés d ’ u t i l i s a t e u r s v o n t s e développer, échangeant des informations, de piétons à véhicu les, de véhicu les à infrastructures, de transports publics à vélos… Demain, un carrefour sera un objet c o n n e c t é , p e r m e t t a n t d’allouer dynamiquement le traf ic en fonction de la typologie des véhicules, de leurs or ig ines et de leurs destinations, ou du nombre de leurs occupants. Demain, l’interconnex ion entre les objets mobiles connectés et les smartphones sera un élément déterminant de notre mobilité, et le champ de leurs applications est infini. n

> La R&D d’EDF a axé sa politique de recherche

autour de quatre thèmes  : c i rc u ler plu s l ibrement , circuler autrement, rouler plus loin, le tout dans des conditions de sécurité pour le réseau et pour l’utilisateur qui nous permettent d’envisager sereinement le développement de la mobilité électrique.

circuler plus librement se traduit par l’expérimentation de modèles permettant de posit ionner les bornes de recharge au bon endroit, au bon moment, à des coûts compatibles avec les finances publiques. Mais, sachant que la recharge d’un véhicule

électrique s’opère à 90% sur le lieu de travail ou au domicile, cela consiste aussi à évaluer les besoins des entreprises et ceux des particuliers. Enfin, nous devons faire face au phénomène émergent de l’itinérance. Dans ce sens, à l’instar du projet Oasis, nous développons des modèles de cartographie prévoyant l’emplacement de bornes de recharge tri-standard sur les autoroutes.

circuler autrement revient à insérer la mobilité électrique dans la diversité des véhicules. Un seul exemple est pour nou s p or t e u r de g r a nd s enjeux : la décision prise par

la RATP de faire rouler 4 500 bus électriques à l’horizon 2025. Dans ce cadre, nous avons lancé un programme de recherche visant à faire é mer ger de s c h a î ne s de traction bus répondant aux critères de qualité de service exigés par le concessionnaire.

Rouler plus loin ou comment augmenter l’autonomie des véhicules électriques tout en faisant en sorte qu’elle coûte moins cher. En l’occurrence, notre object if est de faire émerger à l’horizon 2020/2025, suivant les technologies des autonomies très supérieures à 2 0 0   k m p ou r d e s p r i x inférieurs à 150 $ le KWh.

Enfin, la sécurité du réseau. Avec ERDF, nous développons des algorithmes censés mieux gérer la puissance. Du point de vue des entreprises, nous mettons en place de modèles p e r m e t t a n t d e g é r e r l a charge des véhicules non pas uniquement en fonction des contraintes réseaux mais aussi en fonction de leurs métiers. Enfin, chez les particuliers, nous travaillons à l’intégration du véhicule électrique à son environnement, en y intégrant la complexité de la production d’énerg ies renouvelables décentralisées. n

Jean-hubeRt wilbRod

président Île-de-france du pôle de compétitivité mov’eo, dédié à la r&D automobile des transports publics.

sylvie moulet

Directrice déléguée pour l’ensemble des activités aval à la direction de la r&D d’eDf.

développer des modèles pour réussir la mobilité électrique

De la diversification aux systèmes coopératifs

Le vélo à assistance électrique connaît une progression spectaculaire.

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