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Revue du rhumatisme 80 (2013) 299–303 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Fait clinique Efficacité et faisabilité de la cimentoplastie des vertèbres en galette : étude rétrospective de 12 cimentoplasties Johanna Sigaux a,, Sandra Guignard a , Titien Tuilier b , Claire Eymard a , André Gaston b , Xavier Chevalier a a Service de rhumatologie, hôpital Henri-Mondor, AP–HP, 51, avenue Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil, France b Service de neuroradiologie, hôpital Henri-Mondor, AP–HP, 51, avenue Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil, France info article Historique de l’article : Accepté le 19 septembre 2012 Disponible sur Internet le 11 janvier 2013 Mots clés : Vertèbre en galette Vertébroplastie Cimentoplastie Fracture vertébrale Tassement vertébral Ostéoporose résumé Les vertèbres en galette sont une contre-indication traditionnelle à la cimentoplastie. Cependant, le risque représenté par les fractures vertébrales symptomatiques chez certains patients nous a conduit, après décision multidisciplinaire, à traiter par cimentoplastie des vertèbres en galette. Il s’agit d’une étude rétrospective des cimentoplasties réalisées sur vertèbres en galette entre mai 2006 et janvier 2012 dans un service de rhumatologie. Douze vertèbres en galette ont été cimentées chez dix patients, neuf femmes et un homme, d’âge moyen 74,9 ± 10,7 ans. L’EVA douleur (/10) était de 9 ± 1,15 avant l’intervention et de 2,4 ± 2,0 après. L’amélioration jugée par le patient était de 80 %. La satisfaction du patient sur une échelle de 0 à 10 se situait à 7,0/10. Dans tous les cas les antalgiques ont été diminués ou arrêtés. Les complications étaient trois fuites de ciment asymptomatiques, un hématome au point de ponction, un passage en fibrillation auriculaire et une embolie pulmonaire classique. La cimentoplastie des vertèbres en galette est une procédure délicate, mais efficace pour soulager le patient. © 2012 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 1. Introduction La cimentoplastie est une technique de radiologie intervention- nelle consistant à injecter du ciment dans le corps d’une vertèbre pathologique. L’indication de ce geste, initialement réservé aux angiomes symptomatiques [1] a été ensuite étendue aux fractures vertébrales douloureuses ostéoporotiques malgré un traitement médical optimal, s’il persistait un œdème à l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Les contre-indications classiques sont la gros- sesse, les coagulopathies, la rupture du mur postérieur, l’allergie au ciment et les tassements en galette (ou grade III) [2–4]. Ces dernières sont des fractures sévères où le corps vertébral mesure moins d’un tiers de sa taille initiale. Cette contre-indication était justifiée par la difficulté technique à réaliser l’injection intracorpo- réale du ciment car l’utilisation de la voie d’abord transpédiculaire est plus délicate en cas de vertèbre en galette et le positionne- ment intra-somatique plus difficile. De plus, il existe un risque théorique plus important de fuite de ciment. Cependant, la prise en charge médicale simple de la fracture vertébrale hyperalgique, en particulier chez les personnes âgées, est un problème parfois délicat du fait du risque engendré par l’alitement prolongé. La DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jbspin.2012.12.004. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸ aise de cet article, mais la réfé- rence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J. Sigaux). cimentoplastie apporte souvent un soulagement immédiat et per- met de « verticaliser » rapidement les patients, avec un résultat parfois spectaculaire [5], diminuant ainsi la morbidité et la morta- lité liées aux fractures. Plusieurs patients présentant une fracture en galette ont donc bénéficié d’un tel traitement après décision pluridisciplinaire. 2. Méthodes Nous avons étudié de fac ¸ on rétrospective les dossiers des patients hospitalisés entre mai 2006 et janvier 2012 dans le service de rhumatologie du centre hospitalo universitaire Henri-Mondor chez qui une cimentoplastie sur vertèbre en galette avait été réalisée. La décision de la cimentoplastie avait été au préalable systématiquement discutée dans le cadre d’une réunion pluri- disciplinaire réunissant des rhumatologues, neurochirurgiens et chirurgiens du rachis. Les patients devaient présenter une ou plu- sieurs fractures vertébrales sévères, en hypersignal en pondération T2 à l’IRM et résistant à un traitement médical optimal depuis plus de trois mois. Ils ne devaient pas présenter de signes neurologiques ni aucune des contre-indications classiques à la vertébroplastie : coagulopathies, rupture du mur postérieur, allergie au ciment. Lors du geste, tous les patients avaient bénéficié d’une anesthé- sie générale afin de leur assurer un certain confort, notamment lors de la progression du trocart qui peut être douloureuse. Cela permet- tait également de traiter en une seule séance plusieurs vertèbres. La procédure de la cimentoplastie était standardisée et réalisée par 1169-8330/$ – see front matter © 2012 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2012.09.013

Efficacité et faisabilité de la cimentoplastie des vertèbres en galette : étude rétrospective de 12 cimentoplasties

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Page 1: Efficacité et faisabilité de la cimentoplastie des vertèbres en galette : étude rétrospective de 12 cimentoplasties

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Revue du rhumatisme 80 (2013) 299–303

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ohanna Sigauxa,∗, Sandra Guignarda, Titien Tuilierb, Claire Eymarda, André Gastonb, Xavier Chevaliera

Service de rhumatologie, hôpital Henri-Mondor, AP–HP, 51, avenue Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil, FranceService de neuroradiologie, hôpital Henri-Mondor, AP–HP, 51, avenue Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil, France

i n f o a r t i c l e

istorique de l’article :ccepté le 19 septembre 2012isponible sur Internet le 11 janvier 2013

ots clés :ertèbre en galette

r é s u m é

Les vertèbres en galette sont une contre-indication traditionnelle à la cimentoplastie. Cependant, le risquereprésenté par les fractures vertébrales symptomatiques chez certains patients nous a conduit, aprèsdécision multidisciplinaire, à traiter par cimentoplastie des vertèbres en galette. Il s’agit d’une étuderétrospective des cimentoplasties réalisées sur vertèbres en galette entre mai 2006 et janvier 2012 dansun service de rhumatologie. Douze vertèbres en galette ont été cimentées chez dix patients, neuf femmes

ertébroplastieimentoplastieracture vertébraleassement vertébralstéoporose

et un homme, d’âge moyen 74,9 ± 10,7 ans. L’EVA douleur (/10) était de 9 ± 1,15 avant l’intervention etde 2,4 ± 2,0 après. L’amélioration jugée par le patient était de 80 %. La satisfaction du patient sur uneéchelle de 0 à 10 se situait à 7,0/10. Dans tous les cas les antalgiques ont été diminués ou arrêtés. Lescomplications étaient trois fuites de ciment asymptomatiques, un hématome au point de ponction, unpassage en fibrillation auriculaire et une embolie pulmonaire classique. La cimentoplastie des vertèbresen galette est une procédure délicate, mais efficace pour soulager le patient.

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© 2012 Société Fr

. Introduction

La cimentoplastie est une technique de radiologie intervention-elle consistant à injecter du ciment dans le corps d’une vertèbreathologique. L’indication de ce geste, initialement réservé auxngiomes symptomatiques [1] a été ensuite étendue aux fracturesertébrales douloureuses ostéoporotiques malgré un traitementédical optimal, s’il persistait un œdème à l’imagerie par résonanceagnétique (IRM). Les contre-indications classiques sont la gros-

esse, les coagulopathies, la rupture du mur postérieur, l’allergieu ciment et les tassements en galette (ou grade III) [2–4]. Cesernières sont des fractures sévères où le corps vertébral mesureoins d’un tiers de sa taille initiale. Cette contre-indication était

ustifiée par la difficulté technique à réaliser l’injection intracorpo-éale du ciment car l’utilisation de la voie d’abord transpédiculairest plus délicate en cas de vertèbre en galette et le positionne-ent intra-somatique plus difficile. De plus, il existe un risque

héorique plus important de fuite de ciment. Cependant, la prise

n charge médicale simple de la fracture vertébrale hyperalgique,n particulier chez les personnes âgées, est un problème parfoisélicat du fait du risque engendré par l’alitement prolongé. La

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jbspin.2012.12.004.� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais la réfé-ence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (J. Sigaux).

169-8330/$ – see front matter © 2012 Société Française de Rhumatologie. Publié par Elsttp://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2012.09.013

se de Rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

cimentoplastie apporte souvent un soulagement immédiat et per-met de « verticaliser » rapidement les patients, avec un résultatparfois spectaculaire [5], diminuant ainsi la morbidité et la morta-lité liées aux fractures. Plusieurs patients présentant une fractureen galette ont donc bénéficié d’un tel traitement après décisionpluridisciplinaire.

2. Méthodes

Nous avons étudié de facon rétrospective les dossiers despatients hospitalisés entre mai 2006 et janvier 2012 dans le servicede rhumatologie du centre hospitalo universitaire Henri-Mondorchez qui une cimentoplastie sur vertèbre en galette avait étéréalisée. La décision de la cimentoplastie avait été au préalablesystématiquement discutée dans le cadre d’une réunion pluri-disciplinaire réunissant des rhumatologues, neurochirurgiens etchirurgiens du rachis. Les patients devaient présenter une ou plu-sieurs fractures vertébrales sévères, en hypersignal en pondérationT2 à l’IRM et résistant à un traitement médical optimal depuis plusde trois mois. Ils ne devaient pas présenter de signes neurologiquesni aucune des contre-indications classiques à la vertébroplastie :coagulopathies, rupture du mur postérieur, allergie au ciment.

Lors du geste, tous les patients avaient bénéficié d’une anesthé-

sie générale afin de leur assurer un certain confort, notamment lorsde la progression du trocart qui peut être douloureuse. Cela permet-tait également de traiter en une seule séance plusieurs vertèbres.La procédure de la cimentoplastie était standardisée et réalisée par

evier Masson SAS. Tous droits réservés.

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300 J. Sigaux et al. / Revue du rhumatisme 80 (2013) 299–303

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ig. 1. A. Scanner sans contraste en coupe sagittale et coronale : aspect virtuel de liguilles traduisant la pression négative dans le clivage fracturaire et au début d’inj

eux neuroradiologues expérimentés (AG et TT). La voie d’abordostéro-externe transpédiculaire oblique avait été utilisée pour lesractures lombaires et la voie intercosto-transversaire pour le rachisorsal. Un premier repérage était fait par scanner en décubitus dor-al puis un second cliché radiologique était réalisé en procubitusous anesthésie générale permettant de restaurer une partie dea hauteur vertébrale. L’injection du méthyl méthacrylate se fai-ait sous contrôle radioscopique permanent, de profil, pour vérifier’absence de passage postérieur du ciment vers le canal rachidienFig. 1). L’injection était lente, progressive et prudente pour rem-

lir la vertèbre. La procédure durait en moyenne une heure, leatient était transféré en salle de réveil puis dans sa chambre pourne surveillance clinique. Tous les patients ont été rétrospective-ent revus au cours d’une consultation par un rhumatologue (recul

èbre T12. B. Scopie avant injection du ciment : noter la présence d’air en avant desdu ciment entouré de l’air.

moyen de 28 mois). Un questionnaire leur a été donné afin d’évaluerl’efficacité de cette technique sur la douleur et leur satisfaction.

3. Resultats

3.1. Caractéristiques cliniques des patients

Dix patients, neuf femmes et un homme, âgés en moyenne de74,9 ± 10,7 ans et présentant tous au moins une vertèbre en galette,

ont bénéficié d’une cimentoplastie (Tableau 1). Toutes les fracturesétaient d’origine ostéoporotique. Les patients avaient entre zéro etquatre facteurs de risque d’ostéoporose : deux patients avaient unepolyarthrite rhumatoïde et avaient recu une corticothérapie au long
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J. Sigaux et al. / Revue du rhumatisme 80 (2013) 299–303 301

Tableau 1Caractéristiques cliniques des patients ayant bénéficié d’une cimentoplastie sur vertèbre en galette.

Patients 1 2 3 4 5

Sexe F F M F F

Âge (ans) 68 76 68 76 83

Traitement anti ostéoporotique Oui Non Non Non Non

Traitement vitamino-calcique Oui Oui Non Non Non

Facteurs de risque d’ostéoporose PR, corticoïdes, ATCD familial PR, corticoïdes, tabac Hormonothérapie Hyperthyroïdie 0

EPP Normale Normale Hypogamma Normale Normale

Calcémie/phosphorémie (mmol/L) 2,19/0,85 2,23/1,27 2,53/1,15 2,25/1,04 2,25/1,12

25 (OH) vit D (ng/mL) 47 NC NC 22 NC

DMO (T-score lombaire) −2,2 NC NC −4,2 NC

DMO T-score col fémoral −4 NC NC −3,1 NC

Patients 6 7 8 9 10

Sexe F F F F F

Âge (ans) 87 55 85 86 65

Traitement anti ostéoporotique Oui Oui Oui Non Oui

Traitement vitamino-calcique Oui Oui Oui Oui Oui

Facteurs de risque d’ostéoporose ATCD familial 0 Tabac, ATCD familial Tabac, ménopause précoce 0

EPP Normale Normale Normale Normale Normale

Calcémie/phosphorémie (mmol/L) 2,39/1,11 NC 2,40/1,03 2,13/0,90 2,18/0,80

25 (OH) vit D (ng/mL) 105,9 NC 94,1 90,2 88,2

DMO (T-score lombaire) −2,8 NC −2,9 −3,2 −2,7

DMO T-score col fémoral −3,2 NC −2,4 −3,5 −3

F A : h( étrie

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3c

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: femme ; H : homme ; NC : non connu ; PR : polyarthrite rhumatoïde ; HT2,1 > N > 2,65 mmol/L) ; Ph : phosphorémie (0,8 > N > 1,35 mmol/L) ; DMO : densitom

ours, un patient avait un cancer de prostate traité par hormono-hérapie, trois patients des antécédents familiaux de fracture du colhez un parent du premier degré, et une patiente une ménopauserécoce. Cinq patients étaient traités par bisphosphonates avant laracture et sept recevaient une supplémentation vitamino-calcique.

.2. Caractéristiques des fractures vertébrales et résultats de laimentoplastie

Le nombre total de fractures vertébrales quel qu’en soit le gradetait de 27 : 15 vertèbres thoraciques (T6 à T12) et 12 lombairesL1 à L5) (Tableau 2). Douze vertèbres, majoritairement situéesu niveau de la charnière dorsolombaire (T7 à L3), présentaientne fracture de grade III. Deux patients avaient deux vertèbresn galette. Au total, 24 vertèbres ont été cimentées, dont les2 vertèbres en galette, soit une à cinq vertèbres par malade.

Toutes les fractures vertébrales sévères cimentées étaient enypersignal T2 sur les IRM disponibles excepté la vertèbre T10 duatient 9. Toutes les vertèbres fracturées en hypersignal étaientgalement cimentées sauf une du fait du grand nombre deimentoplasties réalisées simultanément chez cette patiente. Troisertèbres non fracturées de la charnière dorsolombaire ont étéimentées à visée préventive pour éviter une accentuation de laordose et prévenir le risque de fracture secondaire.

La durée des symptômes avant la procédure était en moyennee 6 ± 3,57 mois.

L’EVA douleur (/10) moyenne était de 9 ± 1,15 avant

’intervention et de 2,4 ± 2,06 après avec un recul moyen de8,6 mois ± 22,3, soit une diminution significative de 6,6 ± 2,63p < 0,001, test de Wilcoxon). Le pourcentage moyen d’améliorationugé par le patient était de 80 %. La satisfaction du patient sur une

ypertension artérielle ; hypogamma : hypogammaglobulinémie ; Ca : calcémieosseuse.

échelle de 0 à 10 se situait en moyenne à 7/10. Avant la cimento-plastie, sept patients prenaient des antalgiques de palier II et troisdes antalgiques de palier III. Après l’intervention, les antalgiquesont pu être diminués dans sept cas et arrêtés dans trois cas.Les complications ont été trois fuites de ciment de petite taille,asymptomatiques, repérées par la scopie ; un hématome au pointde ponction ; un passage en fibrillation auriculaire et une emboliepulmonaire. Deux patients ont fracturé une nouvelle vertèbre aprèsla cimentoplastie dont une adjacente à une vertèbre cimentée.

4. Discussion

Les résultats de cette étude rétrospective sont en faveur del’efficacité prolongée de la cimentoplastie des vertèbres en galettepuisqu’on observe une amélioration significative de l’EVA douleurqui passe de 9/10 avant le geste à 2,4/10 après, soit une diminutionde 73,3 %. Par ailleurs, aucune fuite responsable de complicationsévère n’a été répertoriée.

La cimentoplastie est une technique très souvent utilisée chezles patients ayant des fractures vertébrales résistantes au traite-ment médical. L’efficacité de cette technique a été mise en évidencedans de nombreux essais [6–8] et notamment celui de Klazenet al. [5]. Dans cette étude ouverte, prospective et randomisée, letraitement par cimentoplastie a été comparé au traitement conser-vateur chez 202 patients ayant une fracture vertébrale datant demoins de six semaines. La différence d’EVA à un mois et un anétait significativement en faveur du groupe cimentoplastie (−5,2 et

−5,7 versus −2,7 et −3,7). L’usage d’antalgiques était égalementmoins important dans le groupe cimentoplastie dès le premier jour(p < 0,0001). Malgré ces bons résultats, les fractures sévères ont tou-jours été considérées comme une contre-indication compte tenu
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302 J. Sigaux et al. / Revue du rhumatisme 80 (2013) 299–303

Tableau 2Caractéristiques des cimentoplasties et évaluation après la procédure.

Patients 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Vertèbres tassées (nombre) 3 2 1 3 2 1 1 2 5 7

T (thoracique) T12 T11, T12 0 T6, T11 T10, T11 T7 T12 0 T9, T10, T11, T12 T10, T12

L (lombaire) L1, L2 0 L2 L1 0 0 0 L1, L2 L1 L1, L2, L3, L4, L5

Tassement grade III L1 T12 L2 T11 T11 T7 T12 L1 T10, T12 T12, L3

Vertèbres en hypersignal à l’IRM NC T11, T12 L2 NC T11 T7 T12 L1, L2 T12, L2, L3, L4, L5 T10, T12

Vertèbres cimentées T12, L1, L2 T11, T12, L1 L2 L1, T11, T12 T10, T11, T12 T7 T12 L1, L2 T10, T12 T12, L2, L3, L4, L5

Durée des symptômes avantprocédure (mois)

5 5 11 9 6 6 NC 6 6 10

EVA avant vertébroplastie (0–10) 9 7 8 8 8 10 10 10 10 10

EVA post-vertébroplastie (0–10) 2 2 5 6 0 0 4 1 1 3

Impression globale (0–10) 10 8 8 7 5 5 NC 7 7 6

Amélioration jugée par lepatient (%)

80 20 NC NC 100 100 80 90 90 80

Traitement antalgique avantcimentoplastie (palier)

2 2 3 2 2 2 2 2 3 3

Traitement antalgique aprèscimentoplastie (palier)

1 0 2 1 0 1 1 1 1 0

Existence de fuite 0 0 1 0 0 0 0 0 0 2

Fracture post-vertébroplastie T8 0 0 0 L1 0 0 0 0 0

Complications à court et moyenterme

a Non Non Non Non ACFA Non Non Non EP

Recul (mois) 42 16 11 13 43 2 67 2 2 8

N lète pm

ddtsce(Lrsn(tartlh

gep(dipfm

ofpcad

C : non connu ; EVA : échelle visuelle analogique douleur ; ACFA : arythmie compagnétique.a Hématome au point de ponction.

e la difficulté technique et du risque théorique plus importante fuite du ciment [2,3,5]. Les fuites sont en effet une complica-ion fréquente de cette technique bien qu’elles soient rarementymptomatiques. Dans l’étude de Weill et al. [3], des fuites deiment dans la graisse épidurale, les tissus mous paravertébrauxt les veines épidurales ont été observées chez 20 des 52 patients38,4 %). Parmi ces 20 cas, cinq seulement étaient symptomatiques.es fuites asymptomatiques ne devraient donc pas être considé-ées comme des complications. Les complications graves des fuitesont exceptionnelles : compression médullaire, embolie pulmo-aire (fuite dans la veine périvertébrale), douleurs radiculairesfuite dans la veine foraminale). Deux cas d’ostéites non infec-ieuses adjacentes au site de kyphoplastie [9] et une ostéonecroseprès cimentoplastie [10] ont également été rapportées. Afin deéduire le risque de fuite, il est conseillé de placer l’aiguille par voieranspédiculaire et de l’introduire latéralement jusqu’au corps dea vertèbre [11]. La procédure peut également être facilitée par uneyperlordose ou une traction afin d’augmenter l’espace virtuel.

La cimentoplastie a déjà été réalisée dans le cas de vertèbres enalette et s’est révélée sûre et efficace. Ainsi, dans l’étude de Peht al. [11], 48 cimentoplasties ont été réalisées chez 37 patientsrésentant des fractures vertébrales ostéoporotiques sévères65 % Gibbus, 27 % Plana, 8 % H shape). Quarante-sept pour centes patients avaient un soulagement complet dans les suites

mmédiates du geste, 50 % un soulagement partiel et 3 % n’avaientas de modification de la symptomatologie. Il a été noté 35 % deuite de ciment dans le disque adjacent, 8 % de fuite dans les tissus

ous adjacents.Les complications survenues dans cette étude sont de deux

rdres : des complications mineures liées au geste lui-même (troisuites de ciment asymptomatiques et un hématome au point de

onction) et deux complications plus sévères (une fibrillation auri-ulaire et une embolie pulmonaire classique) a priori sans rapportvec le grade de la fracture vertébrale et qui auraient pu survenirans les suites d’une cimentoplastie simple sur fracture vertébrale

ar fibrillation auriculaire ; EP : embolie pulmonaire ; IRM : imagerie par résonance

de grade I ou II. Il est difficile de dire si ces complications ont étéfavorisées par l’anesthésie générale, les comorbidités du patient âgéou l’alitement induit par les fractures vertébrales elles-mêmes. Lestrois fuites de ciment minimes sont survenues sur les 12 vertèbresen galette cimentées soit 25 %. Il n’y a pas eu de fuite sur les frac-tures grade I ou II. On peut se demander si la difficulté techniquedu geste liée à la sévérité de l’atteinte vertébrale ne favorise pas lasurvenue de fuite sur les vertèbres en galette.

Les limitations de cette étude sont le faible nombre de maladeset de vertèbres cimentées et son caractère rétrospectif. Pour autant,elle donne une indication quant à la faisabilité de la cimentoplas-tie en cas de vertèbres en galette et de son bénéfice potentiel. Àl’échelon individuel, la possibilité d’une vertébroplastie dans cecas de figure, nécessite une discussion pluridisciplinaire entre lesrhumatologues et les radiologues réalisant le geste. Des étudesprospectives à plus grande échelle sont nécessaires.

La cimentoplastie des vertèbres en galette reste une procéduredélicate, nécessitant une bonne connaissance de la technique parl’opérateur, un bon positionnement du patient et une vigilanceredoublée. Cela permet un déroulement correct de la procédureet le soulagement rapide, prolongé et efficace du malade. Descomplications liées à la cimentoplastie ou au terrain du maladepeuvent survenir, cependant elles ne semblent pas liées au gradede la fracture vertébrale. La cimentoplastie sur les vertèbres engalette est donc une arme thérapeutique qui ne doit pas êtreécartée en particulier pour les patients en échec du traitementmédical bien conduit, et en cas de risque trop élevé engendrépar l’alitement prolongé. Cependant, des études prospectives àplus grande échelle sont nécessaires avant de pouvoir retirer lesvertèbres en galette des contre-indications de la cimentoplastie.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-tion avec cet article.

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J. Sigaux et al. / Revue du r

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