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Constant, Alphonse-Louis (1810-1875). Dogme et rituel de la haute magie. 1930. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF.Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : *La réutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. *La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produits élaborés ou de fourniture de service. Cliquer ici pour accéder aux tarifs et à la licence 2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. 3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit : *des reproductions de documents protégés par un droit d'auteur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, sauf dans le cadre de la copie privée, sans l'autorisation préalable du titulaire des droits. *des reproductions de documents conservés dans les bibliothèques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque municipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer auprès de ces bibliothèques de leurs conditions de réutilisation. 4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. 5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas de réutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateur de vérifier la conformité de son projet avec le droit de ce pays. 6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière de propriété intellectuelle. En cas de non respect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978. 7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute définition, contacter [email protected].

Eliphas Lévi - Dogme Et Rituel de La Haute Magie, Tomo 1 (Ed. Chacornac, Paris, 1930)

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  • Constant, Alphonse-Louis (1810-1875). Dogme et rituel de la haute magie. 1930.

    1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numriques d'oeuvres tombes dans le domaine public provenant des collections de laBnF.Leur rutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n78-753 du 17 juillet 1978 : *La rutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la lgislation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. *La rutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par rutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produitslabors ou de fourniture de service.

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  • DOGMEET RITUEL

    DELA

    HAUTE MAGIE

    TOME PREMIER.

  • DU MME AUTEUR

    Histoire de la Magie. ()860)La Clef des Grands Mystres. ()86t)Fable s'et Symboles. ()662)La Science des Esprits. ()865)Le Livre des Splendeurs. (1894)Clefs Majeures et clavicules de Salomon. ()695)Le Catchisme de la Paix. ()896)Le Grand Arcane. (1898)Le Livre des Sages. ()9) 2)Les Mystres de ta Kabbale. ()92))

    Correspondance d'Eliphas Lvi avec le baron Spedatieri.()86) )874). Tome )~()930)

  • HAUTE MAGIE

    IJBRAtRtE GNRALH DES i-CtENC~S OCCUt.) ):s

    CHACORNAC FRRES

    DOGMEET RITUELDELA

    )'At(

    UPHAS LVI

    NOUVELLE Dt'HON

    AvecM Figures

    TOME PREMIER

    Bo~me

    PARIS

    Il, QUAI SAtNT-MtCHEL, ))

    )93

  • CLASSEMENTET EXPLICATIONDES FIGURES

    QUISETROUVENTDANS.LEt" VOLME(DOGM).

    PMMERE FIGURE, Le grand Symbole de Salomon. Frontispice

    Le double triangle de Salomon, figur par tes deux vieiUards de lacabale )e macroprosope et )e microprosope le Dieu de lumire et leDieu de renets le misricordieux et le vengeur le Jehovah blanc etle Jehovah noir.

    Les petites figures qui sont des deux cts sont analogues au sujetprincipal.

    2* HG. L'sotrisme sacerdotale formulant la rprobation. 103Une main sacerdotale faisant le signe de t'sotrisme et projetant

    dans son ombre ta figure du dmon. Au-dessus on voit l'as de deniersdu Tharot chinois et deux triangles superposs, un blanc et un noir.C'est une nouvelle allgorie expliquant les mmes mystres c'est t'ori-gino du bien et du mal c'est la cration du dmon par le mystre.

    3'' FtG. Le Triangle de Satomon. 127

    4 F)G. Les quatre grands noms cabalistiques. t5*

    5* FiG. Le Pentagramtne de Faust. 166

    6 Fie. Le Ttragramme de Sohar. 225

    il Fie. Les Pentacles d'zcMel et de Pythagore. 333

    Le chrubin quatre ttes de la prophtie d'Ezchiel, expliqu parle double triangle de Salomon.

    Au-dessous, la roue d'Etchiel, clef de tous les pantacles, et le pan-tacle de Pythagore.

    Le chrub d'Ezchiel est reprsente ici tel que le dcrit le prophte.Ses quatre ttes sont le quaternaire de Mercayah ses six ailes sont lesenaire de Bereschit. La figure humaine qui est au milieu reprsente laraison la tte d'aigle, c'est la croyance le boeuf, c'est la rsignationet le travail; le lion, c'est la lutte et la conqute. Ce symbole estanalogue celui du sphinx des gyptiens, mais il est plus appropri la cabale des tfbrou.

    8* FIG. Addha-Nari, grand Pantacle indien. 366

    Cette image panthistiqme reprsente la Religion ou la Vrit, terri-ble pour les profanes et doue pour les initis. Cette fleure a plus d'uneanalogie avec le cherub d'Ezchiel. La figure humaine est place entre'un veau brid et un tigre, ce qui forme le triangle de Kether, deGeburah et de Gedulah ou Chesed. Dans le symbole indien, on trouveles quatre signes magiques du Tarot dans tes quatre mains d'Addha

  • Yt CLASSEMENT ET KXPUCATtON t)ES.F)HUKES.

    .\tri du cote de t'initie et de la misricorde, le sceptre et la coupedu ct du prufane, reprsente par le tigre, t'epee et le cercle, quipeut devenir soit l'anneau d'une chaine, soif nn collier de fer. Du ctdo riniti, la desse est ~6tue seulement des dpunitles du ti~re duct du tigre, elle porte une longe ro)x' etoiiee, et "fs cheveux mmessont couverts d'un voile. Une source de lait jaillit de soit front, couWdu cot de l'initi, et formo autour d'Addha'~ah et de ses deux Hni-maux un cercle magique qui les enferme dans une ile, rcprceemat'ondu monde. La desse porte sun cou une chaine n):~iuuc furnjr''d'anneaux de ter du ct des profanes, et de tefe~ pensantes du ct''des initis; elle porte, sur ic frunt la figure du tingam, et de chaquccote trois lignes superposes qui reprsentent t'equitihrc dn ternan'cet rappellent les trip'ammes de, Fo-Hi.

    CLASSEMENT ET EXPLICATION DES FIGURES

    QUI SK TROUVENT DANS t-E Il' VOLUME (R)TUEL).

    i" Fu;. Bouc du Sabbat. Baphometei. Mendes. t'ront.ispicc.

    Figure psnthistique et magique de t'absotu. Le thmbcau plac entreles deux cornes reprsente i'inteHigenee quilibranle du ternaire; latte du houe, tte synthtique qui runit quelques caractres du chien,du taureau et de t'anc, reprsente la responsabilit de la matire seuleet t'expiation. dans tes corps, des pchs corporels. Les mains sont

    humaines, pour montrer la Mintete du travail, elles font le signe,del'sotrisme en haut et en bas, pour recommander le mystre aux

    initis, et elles montrent deux croissants lunaires, t'un Mancqui est en

    haut. l'autre noir, qui est en bas, pour exp)iquer tes rapports du bien

    et du mal, de la misricorde et de la justice. Lebas du corps est voil,

    image des mystres de la gnration universelle, exprime seulement

    par le symbote du caduce. Le ventre du houeest ecaitt, et doit trecolor en vert )e demi-cercle qui est au-dessus doit tre bleu; les

    plumes, qui montent jusqu' la poitrine, doivent tre de diverses cou-leurs. Le bonc a un sein de femme, et neporte ainsi de l'humanit queles signes de la maternit et ceux du travail, c'cst-6-dire tes signesrdempteurs. Sur !.nh front, entre ses cwnes et au-dessous du Oan)-

  • t;LASSEME!~T HT t!XPt.)CATtOK MES FIGURES. VII

    beau, on voit le signe du microcosme on le pentagrammc la pointe enhaut, symbole de l'intelligence humaine, qui, plac ainsi au-dessousdu flambeau, fait de la flamme de ce dernier une image de ta revh)-lion divine. Ce panthce doit avoir pour sige un cube, et pour marche-pied soit une boule seulc, soit une boule et un escabeau triangulaire.[tans notre dessin nous lui avons donn la boule seulement, pour n

  • VIII CLASSEMENTET EXPLICATION DES FIGURES.

    ou l'esprit, l'od ou )e mdiateurplastique, et le sel ou )amatirevisible.Nousavonsvouludonner part l'explicationde cette figure,parce

    qu'elleestdeiap)ushauteimportance,ctdonneiala mesureduplusgrand gnie dessciencesoccultes. On doit comprendreaprs cetteexplicationpourquoi,dans le courantdenotreouvrage,nousnousin-clinonstoujoursavec la vnration traditionnelledes vrais adeptesdevantledivin Paracelse.

    4'FtC.Pentagramme. t00S* FiG. Instruments magiques la Lampe, la Baguette,

    t'Epe,)aSerpe. 1036'FiG.CtefduThot. 1967~ Fie. Cercle gotique des vocations noires et des pactes. 208S' et 9* F)G. Divers caractres infernaux tirs d'Agrippa,

    d'Apono, de divers grimoires et des actes du procsd'Urbain Grandier. 231 et 232

    d0' F)G. Signes cabalistiques. d'Orion 259il* FiG. Caractres infernaux des douze signes du zodiaque. 26312* FtG. Chariot d'Herms, septime clef du Tarot. 33213'' F)G. Carrs magiques des gnies piantaires, suivant

    Paracelse. 342 34414'F)G. L'Arche. 35515~ Fie. Clef apocalyptique.-Les sept sceaux de saint Jean. 364

  • DISCOURSPRLIMINAIRE.

    DESTENDANCESRELIGIEUSES PHILOSOPHIQUESET MORALES

    DENOSLIVRESSURLAMAGIE.

    Depuisque la premire dition de ce livre a tpublie, de grands vnements se sont accomplisdans le monde, et d'autres plus grands peut-treencore sont la veillede s'accomplir.

    Ces vnements nous avaient t annoncscomme d'ordinaire p&r des prodiges les tablesavaient parl, des voix taient sorties des murs,des mainssans corps avaient crit des mots mystrieux, comme au festin de Btdthasar.

    T. t. 1

  • DOGME-ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.

    Le fanatisme, dans les dernires convulsionsdeson agonie, a donn le signal de cette dernireperscution des chrtiens annonce par tous les

    prophtes. Les martyrs de Damas ont demandaux morts de Prouse le nom de celui qui sauveet qui bnit; alors le ciel s'est voil et la terre estreste muette.Plus que jamais la scienceet la religion, le des-

    potisme et la libert, semblent selivrer une guerreacharne et se jurer une haine irrconciliable.N'en croyez cependant pas de sanglantesappa-rences elles sont la veill de s'unir et de s'em-brasser pour toujours.La dcouvertedes grands secrets de la religion

    et de la science primitive des Mages,en rvlantau monde l'unit du dogme universel, anantit lefanatisme en donnant la raison des prodiges. Leverbe humain le crateur des merveilles del'homme, s'unitpourjamais avec le verbe de Dieu,et fait cesser l'antinomie universelle en nousfaisant comprendre que l'harmonie rsulte de

    l'analogiedes contraires.Le plus grand gnie catholique des tempsmo-

    dernes, le comte Joseph de Maistre, avait prvuce grand vnement. Newton,disait-il,nous ra-

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 3

    mne Pythagore, l'analogie qui existe entre lascience et la foi doit tt ou tard les rapprocher.Lemonde est sans religion, mais cette monstruo-sit ne saurait exister longtemps; le dix-huitimesicle dure encore, mais il vafinir.

    Partageant la foi et les esprancesde ce grandhomme, nous avonsos fouiller les dcombresdesvieux sanctuaires de l'occultisme nous avonsdemand aux doctrines secrtes des Chaldens,des gyptienset des Hbreux, les secrets de la

    transfiguration des dogmes, et la vrit ternellenous a rpondu la vrit, qui est une et univer-selle comme l'tre; la vrit, qui appartient lasciencecomme la foi; la vrit, mre de la raisonet de la justice; la vrit vivantedans les forcesdela nature, les mystrieux Eloim qui refont le cielet la terre quand le chaos a repris pour un tempsla cration et ses merveilles, et quand l'esprit deDieuplane seul sur l'abme des eaux.La vrit est au-dessusde toutes les opinionset

    de tous les partis.La vrit est comme le soleil aveugle est celui

    qui ne la voit pas. Tel tait, nous n'en saurionsdouter, le sens d'une parole clbrede Bonaparte,prononce par lui une poque o le vainqueur

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.4de l'Italie, rsumant la rvolutionfranaise incar-neen luiseul,commenait comprendrecommentla rpublique pouvaittre une vrit.La vrit, c'est la vie, et la viese prouve par le

    mouvement.Par le mouvement aussi, par le mou-vement vouluet effectif,par l'action, en un mot,la viesedveloppeet revtdes formesnouvelles.Or,les dveloppementsde la vie par elle-mme, et sonenfantement desformesnouvelles,nous l'appelonscration. La puissance intelligente qui agit dansle mouvementuniversel, nousl'appelons leVERBE,d'une manire transcendentale et absolue. C'estl'initiative deDieu, qui jamais ne peut rester sanseffetni s'arrter sans avoir atteint son but. PourDieu, parler c'est faire et telle devrait tre tou-

    jours la porte de la parole, mme chez les hom-mes la vraie parole est la semence des actions.Une missiond'intelligence et de volontne peuttre strile sansqu'il y ait abus ou profanation desadignit originelle. Et c'est pour cela que le Sau-veur des hommes doit, non-seulementde toutesles penses gares et sans but lgitime, mais en-core et surtout des paroles oiseuses,nous deman-der un compte svre.Jsus, dit l'vangile, tait puissant en uvres

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 5

    et en paroles les uvres avant la parole c'estainsi que s'tablit et se prouve le droit de parler.Jsusse mit faire et parler, dit ailleurs un van-gliste, et souvent, dans le langage primitif del'criture sainte, une action est appele un verbe.Dans toutes les langues, d'ailleurs, on nommeVERBEce qui exprime la fois l'tre et l'action, etil n'est pas de verbe qui ne puissetre supplparle verbe faire, en diversifiantle rgime. Dans le

    principe tait le Verbe, dit l'yanglistesaint Jean,Dans quel principe? Dans le premier principe;dans le principe absolu qui est avant toute chose.Dansce principe donc tait le Verbe, c'est--direl'action. Cela est incontestable en philosophie,puisque le premier principe est ncessairement le

    premier moteur. Le Verbe n'est pas une abs-traction c'est le principe le plus positif qui soitau monde, puisqu'il se prouve sans cessepar desactes. La philosophiedu Verbeest essentiellementla philosophie de l'action et des faits accomplis,et c'est en cela mme qu'il faut distinguerun verbed'une parole. La parole peut tre quelquefoisstrile, comme dans la moissonil se rencontre des

    pisvides, mais leVerbene l'est jamais. LeVerbe,c'est la parole pleine et fconde; les hommes ne

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.6

    s'amusent pas l'couter et lui applaudir; ilsl'accomplissent toujours! souvent sans le com-prendre, presque jamais sans lui avoir rsist. Lesdoctrines qu'on rpte ne sont pas cellesqui rus-sissent. Le christianismetait encore un mystre,que dj les Csarsse sentaient dtrns par leVerbechrtien. Unsystmeque le monde admireet auquel la foule applaudit, peut n'tre qu'unassemblagebrillant de mots striles; un systmeque l'humanit subit pour ainsi dire malgr elle,c'est UNVERBE.Le pouvoirse prouvepar sesrsultats, et comme

    l'a crit, dit-on, un profond politique des tempsmodernes La responsabilitestquelquechosequandon ne reM~~M. Cette parole, que des esprits in-intelligents ont trouve immorale, est galementvraiesi on l'applique toutes les notionsspcialesqui distinguent la parole du Verbe, la volont defaction ou plutt l'acte, imparfait de l'acte par-fait. L'homme qui se damne, selon la thologiecatholique,c'est celuiqui ne russitpas se sauver.Pcher, c'est manquer le bonheur. L'homme quine russit pas a toujours tort soit en littrature,soit en morale, soit en politique. Le mauvais entout genre, c'est le beau et le boo mal russis.Et

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 7

    s'il faut remonter plus haut jusque dansle domaineterneldudogme, deuxespritsse trouvrent autre-fois, chacun desquelsvoulait la divinit pour luiseul l'un russit, et c'est lui qui est Dieu l'autrechoua, et devint le dmonRussir, c'est pouvoir; chouer toujours, c'est

    tenter ternellement ces deux mots rsument lesdeux destines opposes~del'esprit du bien et de

    l'esprit du mal.Qund une volontmodifie le monde, c'est un

    Verbequi parle, et toutes les voixse laissentdevantlui, commeledit le livredes Machabes, proposd'Alexandre maisAlexandremourutavecsonverbede puissance, parce qu'en lui il n'y avait pasd'avenir .moins que la grandeur romaine n'aitt la ralisationde son rve Or, de nos jours ilse passequelquechosede plustrange: un homme

    qui est mort dansl'exil au milieu de l'ocan At-lantique fait taire une secondefois l'Europedevantsonverbe, et tient encore lemondeentier suspendu la seulepuissancede son nomC'est que la mission de Napolona't grande

    et sainte; c'est qu'il y avait en lui un VERBEdevrit.Napolonloi seulpouvait,aprs larvolution

    franaise,releverles Is du catholicisme,et l'h-

  • EOGMb KT H1TU). UE LA HAUTE MAGtE.8

    ritier moral de Napolonavait seul le droit de ra-mener Pie IX Rome. Nousallons dire pourquoi.Il est dans la doctrine catholiquede l'Incarnation

    un dogme connu dans les colesthologiquessousle titre de Communicationdes idiomes.Ce dogmeaffirme que, dans l'union de la divinit et de l'hu-manit accomplieen Jsus-Christ, le rapproche-ment des deux natures a t si troit, qu'il en estrsult une identit et une trs simple unit de

    personne ce qui fait queMarie, mre de l'homme,peut et doit tre appele MREDEDiEu.(Lemondeentier s'est agit pour cette prrogativeau tempsdu concile d'phse.) Ce qui fait aussi qu'onpeut attribuer Dieu les souffrancesde l'hommeet l'homme les gloires de Dieu. En un mot, lacommunicationdesidiomes, c'est la solidarit desdeux natures divine et humaine en Jsus-Christsolidaritau nomde laquelleon peut dire que Dieuc'est l'homme, et que l'homme c'est Dieu.Lemagisme,en rvlantau mondela loi univer-

    selle de l'quilibre et l'harmonie rsultant de l'ana-

    logie des contraires, prend toutes les sciencesparla base, et prlude par la rformedes mathmati-ques une rvolution universelle dans toutes lesbranchesdu savoir humain au principe gnra-

  • DISCOURS l'RLtMtKAUt. 9

    teur desnombres il rattache le principe"gnrateurdesides, et par consquent le principe gnrateurrdes mondes, amenant ainsi la lumire de lascience le rsultat incertain des intuitions tropphysiquesde Pythagore; il oppose l'sotrisme

    thurgique de Dcote d'Alexandrie une formule

    claire, prcise, absolue, que toutes les sciences

    rgnres dmontrent et justifient: la raison

    premire et la fin dernire du mouvement univer-sel, soit dans les ides, soit dans les formes, sersument dnnitivement pour lui dans quelquessignes d'algbre sousla forme d'une quation.Les mathmatiques ainsi comprises nous ra-

    mnent la religion, parce qu'elles deviennent,soustoutes les formes, la dmonstrationde l'infini

    gnrateur de l'tendue et la preuve de l'absolu,d'o manent tous lescalculsde toutes les sciences.Cette sanction suprme des travaux de l'esprit hu-

    main, cette conqute de la divinit par l'intelli-

    gence et par l'tude doit consommerla rdemptionde l'me humaine et procurer l'mancipationdfinitive du ~er6e de l'humanit. Alors ce quenous appelons encore aujourd'hui loi.naturelleaura toute l'autorit et toute l'infaillibilit d'uneloi ru~e; alors aussi on comprendra que la loi

  • DOGME ET RITUEL UE LA HAUTE MAGIE:10

    positiveet divine est en mme temps une loi na-tnrelle, puisqueDieu est Fauteur de la nature, etne saurait se contredire dans ses crationset dansses lois.De cette rconciliationdu Verbe humainnatra

    la vraie morale, qui n'existe pas encore d'unemanire complte et dfinitive. Alors aussi uuenouvellecarrire s'ouvrira devant l'glise univer-selle. En effet, jusqu' prsent l'infaillibilit de

    l'Eglise n'a constituque le dogme, et pour celasans doute la Divinit ne voulait pas avoir besoindu concoursdes hommesappels plus tard com-

    prendre ce-qu'ils devaient croire d'abord. Mais,pour constituerla morale,iln'en,est.pas de mme,car la morale est humaine autant que divine; etcetui-!doit ncessairementconsentir au pacte quis'y oblige le plus. Savez-vous ce qui manque le

    plus au monde l'poque o nous arrivons? C'estla morale.Tout le monde le sent, tout le mondele dit, et pourtant des colesde morale sont ou-vertes de tous cts. Que faudrait-il ces coles?

    Unenseignement qui inspirt la confiance; uneautorit raisonnable, en un mot, au lieu d'uneraison sans autorit d'une part, et de l'autre d'uneautorit sans raison.

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. n

    Remarquons que la qaestion morale a t le

    prtexte de la grande dfection qui laisse en cemoment l'gliseveuve et dsole.C'est au nom del'humanit, cetteexpressionmatriellede la charit,qu'on a soulev les instincts populaires contre des

    dogmesfaussementaccussd'tre inhumains.La morale du catholicisme n'est pas inhumaine,

    mais elle est souventsurhumaine; aussi ne s'adres-sait-elle pas aux hommes du vieux monde, et serattachait-elle un dogme qui tablit commepos-sible la destruction du vieil homme et la crationd'un homme nouveau. Le Magismeaccueille ce

    dogmeavec enthousiasme, et promet cette renais-sance spirituelle l'humanit pour l'poque de larhabilitation du Verbe humain. Alors, dit-il,l'homme, devenuCRATEUR l'instar de Dieu, seral'ouvrier de son dveloppement moral et l'auteurde son immortalit glorieuse. Se crer soi-mme,telle est la sublime vocation de l'homme rtablidans tous ses droits par le baptme de l'esprit; etil se manifestera une telle connexion entre l'im-mortalit et la morale, que l'une sera le compl-ment et la consquencede l'autre.La lumire de la vrit est aussi la lumire de

    vie. Maisla vrit, pour tre fconde en immorta-

  • DOGME ET mTUEL DE LA HAUTE MAGIE.t2

    lit, veuttre reue dans des mes la fois libresetsoumises,c'est--direvolontairementobissantes.A la splendeurdecette clart, l'ordre s'tablit dansles formes comme dans les ides, tandis que le

    crpusculementeur de l'imagination n'enfante etne peut enfanter que desmonstres. Ainsi l'enferse peuple de cauchemars et de fantmes; ainsi la

    pagode des jongleurs se remplit de divinits af-freuses et difformes; ainsi les tnbreuses voca-tionsde la thurgiedonnent auxchimresdu sabbatune fantastique existence.Les imagessymboliqueset populaires de la tentation de saint Antoine

    reprsentent la foi pure et simple luttant, l'au-rore du christianisme, contre tous les spectres duvieux monde mais le Verbe humain, manifestet victorieux, a t prophtiquement figur parcet admirable saintMichel, qui Raphal donne

    vaincre, d'une simple menace, un tre infrieur

    portant aussi la figure humaine, mais avec lescaractres de la brute.Les mystiques religieux veulent qu'on fasse le

    bien uniquement pour obir Dieu. Dans l'ordrede la vraie morale, il faudra faire le bien pour lavolont de Dieu toujours, sans doute, mais aussi

    pour le bien lui-mme.Le bien est en Dieu le

  • DISCOURSPRLIMINAIRE. 3

    juste par essence, qui ne limite pas, mais qui d-termine sa libert. Dieu ne peut pas damner la

    majorit des hommes par caprice despotique.Ildoit exister une proportion exacte entre les actionsde l'homme et la cration dterminante de sa vo-lont qui en fait dfinitivement une puissance dubien ou un auxiliaire du mal, et c'est ce que d-montre la science exacte de la haute magie.Voici ce que nouscrivionsdans un livre publi

    en 18&5: Le temps de la foi aveugle est donc

    pass, et nousarrivons l'poque de la foi intelli-

    gente et de l'obissance raisonnable, le temps onous ne croirons plus seulement en Dieu, maiso nous le verrons dans ses uvres, qui sont lesformes extrieures de son tre.

    Or, voicile grand problmede notre poque Tracer, complteret fermer le cercle descon-

    naissanceshumaines, puis, par la convergencedes

    rayons, trouver un centre qui est Dieu. Trouver une chelle de proportion entre les

    effets, lesvouloirset les causes, pour remonter del la cause et la volontpremire.

    Constituer la science des analogiesentre lesideset leur source premire. Rendre toute vrit religieuse aussi certaine

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGtE.

    et aussiclairement dmontreque la solutiond'un

    problme de gomtrie. Voici maintenant ce que dit un homme-qui a

    t assezheureux pour retrouver avant nous la d-monstration de l'absolu suivant les anciens sages,maisassezmalheureux aussipour ne voirdans cettedcouvertequ'un' instrumentde fortune et un pr-texte de cupidit.

    Il-nous suffira ici de dire, par anticipation surta doctrine duMessianisme,d'une part, que l'ap-plication de la raison absolue notre facult psy-chologiquede la cognition produit en nous la fa-cult suprieure de la cration des principes et ladduction des consquences, laquelle est le grandobjet de la philosophie; et de l'autre part, quel'application de la raison absolue notre facult

    psychologiquedu sentimentproduit en nous la fa-cult suprieure du sentiment moral et du senti-ment religieux., laquelle est l'grand objet de,la

    religion. Onpourra ainsi entrevoir comment leMessianismeparviendra l'union finale de la phi-losophieet de la religion,en lesdgageant l'une etl'autre de leurs entraves physiqueset terrestres, eten les ramenant, au del de ces conditions tem-

    porelles, la raison absolue qui est leur source

  • DISCOURS P&L!M!NAtRE.

    commune. On pourra de plus reconnatre djcomment, par l'influence de ces conditionstem-

    porellesou de ces entraves physiques, deviennent

    possibles,d'une part, l'ERREURdansle domainedela philosophie, et de l'autre, le pCHdans le do-maine de la religion; surtout lorsquecesconditions

    physiquessont communes cellesde l'hrditaire

    dpravation morale de l'espce humaine, qui fait

    partie de sa nature terrestre. Et l'on comprendraalors comment la raison absolue, qui est au-dessusde cesconditions physiques, de cette souillureter-restre, et qui, dans le Messianisme, doit dtruire

    jusqu' la source de l'erreur et du pch, forme,sous l'expressionallgorique de la VIERGEQUIDorrCRASERLATTEDUSHRpENT,l'accomplissementdecette prdiction sacre. C'est donc cette Viergeauguste que le Messianismeintroduit aujourd'huidans le sanctuairede l'humanit.

    Croyez, et vouscomprendrez, disait le Sauveurdumonde;tudiez, et vouscroirez, peuventdiremaintenant les aptresdu Magisme.Croire, c'est savoir sur parole. Or, cette parole

    divine, qui devanaitet supplait pour un tempsla science chrtienne, ou devait la comprendreplus tard, suivant la promesse du Matre. Voil

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.i6

    donc l'accord de la scienceet de la foi prouv parla foi elle-mme.

    Mais, pour tablir par la science la ncessitde cet accord, il faut reconnatre et tablir un

    grand principe: c'est que l'absolu ne se trouve aucune des deux extrmitsde l'antinomie, et queles hommesde' parti, qui tirent toujours vers lesextrmes opposs,craignent en mme temps d'ar-river ces extrmes, regardent comme des fousdangereux ceux qui avouent nettement leurs ten-dances, et dans leur propre systme redoutentinstinctivement le fantme de l'absolu comme !enant ou la mort. C'est ainsi que le pieux arche-

    vque de Paris dsapprouve formellement les for-fanteries inquisitoriales de l'Univers, et que toutle parti rvolutionnaires'est indign des brutalitsde Proudhon.La force de cette preuve ngative consiste en

    cette simple observation qu'un lien central doitrunir deux tendances opposesen apparence, quisont dans l'impossibilitde faire un pas sans quel'une entranel'autre reculons;cequi ncessiteraensuite une raction toute pareille. Et voilce quiarrive depuis deux sicles: enchanes ainsi l'une l'autre leur insu et par derrire, ces deux

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 17

    puissances sont condamnes un travail de Si-

    sypheet se font mutuellement obstacle.Retournez-les en les dirigeant vers le point central,' qui est

    l'absolu, alors elles se rencontreront de face, et,s'appuyant l'une sur l'autre, ellesproduiront unestabilit gale la puissancede leurs efforts con-traires, multiplis les uns par lesautres.Pour retourner ainsi les forces humaines, ce

    qui semble au premier abord un travail d'Hercule,il suffit de dtromper les intelligences et de leurmontrer le but o ellescroyaient trouver l'obstacle.

    LARELIGIONESTRAISONNABLE.Voilce qu'il fautdire la philosophie, et par la simultanit et la

    correspondancedes lois gnratrices du dogmeetde la scienceon peut le prouver radicalement. LARAISONESTSAINTE.Voilcequ'il faut dire l'Eglise,et on le lui prouvera en appliquant au triomphede sa doctrine de charit toutes les conqutes de

    l'mancipationet toutes les gloires du progrs,Or, Jsus-Christ tant le type de l'humanit

    rgnre, la divinit rendue humaine avait pouruvre de rendre l'humanit divine le Verbe faitchair permettait la chair de devenir Verbe, etc'est ce que les docteurs de l'Eglise officiellen'ont

    pas compris d'abord; leur mysticisme a vouluT. t. 2

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.i8

    absorber l'human-itdans la divinit. Ils ont ni ledroit humain au nom du droit divin; ils ont cruque la foi devait anantir la raison, sans se souve-nir de cette parole profonde du plus grand deshirophantes chrtiens Tout esprit qui divisele Christ est un esprit de l'Antechrist. aLa rvolte de l'esprit humain contre l'glise,

    rvolte qui a t sanctionne par un effrayantsuccs ngatif, aurait donc t, ce point de vue,une protestation en faveur du dogme intgra!, etla rvolution,qui dure depuistrois sicleset demi,D'aurait eu pour cause qu'un immense malen-tendu 1

    En effet, l'glise catholique n'a jamais ni ni

    pu nier la divinit humaine, le Verbe fait chair,le Verbe humain Jamais elle n'a consenti cesdoctrines absorbanteset nervantes qui anantis-sent la libert humainedans un quitismeinsens.Bossuet a eu le courage de perscuter madame

    Guyon, dont il admirait pourtant et dont nousavons admiraprs lui la consciencieusefolie maisBossuet n'a vcu, malheureusement, qu'aprs leconcilede Trente. Il fallait que l'exprience divineet son cours.Oui, nousappelons la rvolution franaise une

  • DISCOURSP&UMMAtRE. i9

    expriencedivine, parce queDieu, cette poque,permit au gnie humain de se mesurer contre lui;lutte trange qui devait finir par un troit embras-sement dbauche de l'enfant prodigue qui avaitpour unique avenir un retour dcisif et une ftesolennelledans la maison du pre de famille.Le Verbe divin et le Verbe humain, conus

    sparment, mais sousune notion de solidaritquiles rendait insparables, avaient ds le commence-ment fond la papaut et l'empire les luttes dela papaut pour prvaloir seule avaient t l'affir-mation absolue du Verbe divin; cette affirma-tion, pour rtablir l'quilibre du dogme de l'In-carnation, devait correspondre dans l'empire uneaffirmation absolue du Verbe humain. Telle futl'origine de la Rforme, qui aboutit AUXDuorrsDEL'HOMME.

    LESDROITSDEL'HOMMENapolon les prouva parla gloire dont il environna son pe. Incarne etrsume dans Napolon, la rvolution cessa d'treun dsordre, et produisit par un clatant succsla preuve irrfragable de son Verbe. C'est alors

    qu'onvit, chose inouedansles fastesdes religions1l'homme tendre sontour la main Dieu, comme

    pour le relever de sa chute. Un pape, dont la pit

  • DOGMEET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.20

    et l'orthodoxie n'ont jamais t contestes, vint

    sanctionner, de l'autorit de tous les sicles chr-tiens, la sainte usurpationdu nouveau Csar, et larvolution incarne fut sacre, c'est--dire reutl'onction qui fait les CHRisrsde la main mmedu

    plusvnrable successeurdes pres de l'autorit 1C'est sur de pareils faits, aussi universels, aussi

    incontestables et aussi -brillants de clart que lalumire du soleil, c'est sur de pareils faits, disons-nous, que le Messianismea pos sa base dans l'his-toire.L'affirmation du Verbe divin par le Verbe

    humain, poussepar ce dernier jusqu'au suicide, force d'abngation et d'enthousiasme, voill'histoire de l'glise depuisConstantinjusqu' laRforme.L'immortalit du Verbe humain prouve par

    des convulsionsterribles, par une rvolte qui atenu du dlire, par des combats gigantesques etpar des douleurssemblables cellesde Promthe,jusqu' la venue d'un hommeassezfort pour rat-tacher l'humanit Dieu voil l'histoire de larvolution tout entireFoi et raison deux termes qu'on croit opposs

    et qui sont identiques.

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 21

    Autorit et libert, deux contraires qui sont aufond la mme chose, puisqu'ils ne peuvent existerl'un sans l'autre.

    Religion et science, deux contradictions qui sedtruisent mutuellement en tant que contradic-tions, et s'affirment rciproquement si on les con-sidre comme deux affirmations fraternelles.

    Voil le problme pos et dj rsolu parl'histoire. Voil l'nigme du sphinx explique parl'OEdipedes tempsmodernes, le gniedeNapolon.C'est assurment un spectacle digne de toutes

    les sympathies du gnie humain, et nous dirons

    plus, digne de l'admiration des esprits mme les

    plus froids, que ce mouvement pareil, ce progrssimultan, ces tendancesgales,ces chutes prvueset ces rejaillissementsgalement infaillibles, de la

    sagesse divine,d'une part, panchedans l'huma-nit, et de la sagessehumaine, de l'autre, conduite

    par la divinit Fleuves chapps d'une mmesource, ilsne se sparent que pourmieuxembrasser!e monde, et quand ils se runiront, ils entrane-ront tout avec eux. Cette synthse, ce triomphe,cet entranement, ce salut dfinitif du monde,toutes les mes levesles pressentaient maisquidonc, avant ces grands vnements qui rvlent

  • DOGMEET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.22

    et font parler si haut la puissance de la magiehumaine et l'intervention de Dieu dans lesuvresde la raison, qui donc et os les pressentir?Nousavonsdit que la rvlationavait eu pour

    objet l'afBrmation du Verbe divin, et quel'affir-mation du Verbe humain avait t le fait trans-cendant et providentiel de la rvolution euro-penne commenceau xvi*sicle.

    Le divin fondateur du christianisme a t leMessie de la rvlation, parce que le Verbe divintait incarn en lui, et nousconsidronsl'empereurcomme te Messiede ta rvolution, parce qu'en luile Verbe humain s'tait rsum et se manifestaitdans toute sa puissance.Le Messiedivin avait t envoy au secoursde

    l'humanit, qui prissait pmse par la tyranniedes sens et les orgies de la chair.Le Messiehumain est venu en quelque sorte

    au secours de Dieu qu'outrageait le culte obscnede la raison, et au secours de t'gtisc menace

    par les rvoltes de l'esprit humain et par les sa-turnales de la fausse philosophie.Depuisque la rforme et la rvolution sa suite

    avaientbranl en Europe la base de tous lespou-voirs depuis que la ngation du droit divin trans-

  • DISCOURS PRLUMtNAiR. 23

    formait en usurpateurs presque tous les matresdu monde et livrait l'univers politique l'athismeou au ftichismedes partis, un seul peuple, con-servateur des doctrines d'unit et d'autorit, taitdevenu le peuple de Dieu en politique. Aussi, ce

    peuple s'agrandissait-il dans sa force d'une ma-nire formidable, inspir d'une pense qui pouvaitse transformer en VERBE,c'est--dire en paroled'action ce peuple c'tait la race vigoureusedesSlaves, et cette pense, c'tait celle de Pierre leGrand.Donner uneralisation humaine' l'empire uni-

    versel et spirituel' du Messie, donner au christia-nisme son accomplissementtemporel, en unissanttous les peuples en un seul corps, tel devait tredsormais le rve du gnie politique transformpar l'ide chrtienne en gnie social. Mais oserait la tte de ce colossalempire ? Rome avaiteu ce sujet sa pense, Pierre le Grand avait lasienne, et Napolonseul pouvait en concevoiruneautre.La fortune des descendants de Pierre trouvait

    en eC'et cette poque une digue infranchissabledans les ruines du sanctuaire des papes, ruinesvivantes o semblait dormir le catholicisme im-

  • DOGME ET RITUEL H LA HAUTE MAGIE.2~

    mortel comme le Christ dans son tombeau. Si laRussieet t catholique aprs la rforme, la r-volution franaise tait touSe dans son germe.L'empire temporel devait appartenir celui qui'relverait l'autorit spirituelle dans son expres-sionla plus simpleet la plus absolue, parce queles faits suiventtoujours les ides. L'autoritdivinede Pierre l'aptre manquait aux projets du czarPierre. C'tait une belle chanceque la Russielais-sait la France. Napolon le comprit; il relevales autels, il se fit sacrer par le successeurd'Hil-debrand et d'Innocent III, et il crut ds lors sontoile, parce que l'autorit qui vient de Dieu ue

    manquait plus sa puissance.Les hommesavaient cruciBle Messiedivin le

    Messiehumain fut abandonn au malheur par laProvidence; car du supplicede Jsus-Christaccus

    par les prtres devait natre un sacerdocenouveau,et du martyre de l'empereur trahi par les rois de-vait natre une royaut nouvelle.Qu'est-ce, en effet, que l'empire de Napolon?2

    C'est une synthse rvolutionnaire rsumant ledroit de tous dans celui d'un seul. C'est la libert

    justifie par la puissanceet par la gloire; c'estl'autorit prouvepar des actes; c'est ledespotisme

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 25

    de l'honneur substitu celui de la crainte. Aussi,dans la tristesse de sa solitude Sainte-Hlne,Napolon, ayant conscience de son gnie et com-

    prenant que tout l'avenir du monde tait l, eut-ildes tentations de dsespoir, et ne voyait-il plusd'autre alternative pour l'Europe que d'tre rpu-blicaine ou cosaqueavant cinquante ans.

    NouveauPromthe, crivait-ilquelque tempsavant de mourir, je suis clou un roc et un vau-tour me ronge.

    Oui, j'avais droble feu du ciel pour en doterla France le feu est remont sa source, et mevoil

    La gloire tait pour moi ce pont que Lucifera lanc sur le chaos pour escalader le ciel; ellerunissait au pass l'avenir, qui en est spar parun abme. Rien mon fils quemon nom aJamais rien de si grand que ces quelques lignes

    n'est sorti de la pense humaine et toutes lesposiesinspires par la destine trange de l'Em-

    pereur sont bien ples et bien faibles auprs decelle-l RIENA MONFILSQUE.MONNOMtait-ceseulementun hritage de gloire qu'il croyaittrans-mettre, ou plutt, dans l'intuition prophtique desmourants, comprenait-il que son nom, insparable

  • DOGME ET RITUEL U LA HAUTE MAGIH.26

    de sa pense, contenait lui seul toute sa fortuneavec les destinesdu monde?2Prtendre que l'humanit s'est trompe dans ses

    mouvements, qu'elle s'est fourvoyedans sesvo-

    lutions, c'est blasphmer la Providence. Et pour-tant ces mouvements et ces volutions semblent

    parfois contradictoires; mais les paradoxesoppo-ssse rfutent l'un par l'autre, et, semblablesauxoscillationsdu pendule, qui tendent toujours, en se

    resserrant, vers le centre de gravit, les mouve-ments contraires ne sontqu'apparents, et les vri-tables tendancesde l'humanit se retrouvent tou-

    jours surla ligne droiteduprogrs. Ainsi,quand lesabusdupouvoirontproduitla rvolte,le monde,quine peut se fixer ni dans l'esclavageni dans l'anar-

    chie, attend l'instauration d'un nouveau pouvoirqui tiendra compte la libert de sesprotestationset rgnera pour elle.Ce pouvoir nouveau, Paracelse nousle fait con-

    natre dans les admirables prdictionsqui semble-raieut faitesaprs coup, si un assezgrand nombrede pages encore ne se rapportaient l'avenir.On n'lude pas plus l'avenir qu'on ne ressuscite

    le pass, mais on s'en tient toujours il ce qui est

    durable; or, cela seul est durable qui est fond

  • DISCOURS PRLUMNAtRK. 27sur la nature mme des choses. L'instinct despeu-ples se conforme en cela mme la logique desides, et deux foisle suffrageuniversel,plac entrel'obscurantisme et l'anarchie, a devin la conci-liation de l'ordre avec le progrs, et a nommNapolon.

    On a dit que l'empereur lui-mme n'avait puconcilier la libert et l'ordre, et que, pour fondersa puissance, il avait d interdire aux Franaisl'usage de leurs droits. On a dit qu'il nous avaitfait oublier la libert forcede gloire, et l'on nes'aperoit pas que l'on tombe dans une videntecontradiction. Pourquoi sa gloire est-elle la ntre,si nous n'tions que ses esclaves?Cemot de gloirea-t-il mme une signification pour d'autres quepour des hommes libres? Nous avions consenti sa discipline, et il nous menait la victoire l'as-cendant de son gnie tait le nerf de sa puissance,et s'il ne permettait a personne de le contredire,il tait pleinement dans son droit, puisqu'il avaitraison. L'iltat, c'estmoi! avaitdit LouisXIVenrsumantainsi d'un mottout l'esprit des institutionsmonarchiques. Lepeuple souverain, c'est7not/ Hpouvait dire l'empereur en rsumant son tourtoute la. force rpublicaine et il est vident que

  • UUGM ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.28plus son chef avait d'autorit, plus le peuple fran-

    aistait libre.Cequi a rendu si affreusel'agonie de Napolon,

    ce n'tait pas le regret dupass, on ne regrette pasla gloire qui ne saurait mourir; mais c'tait l'-

    pouvante d'emporter avec lui l'avenir du monde.

    Oh!cen'est pasla. mort,murmurait-il, c'est la vie

    qui me tue! Puis, portant la main sa poitrine Ils ont enfoncl un couteaude boucheret ils ontbris le fer dans la plaie MPuis un moment aprs, cet instant suprme

    o la vie chappe, et o l'homme, illumin djintrieurement de la lumired'un autre monde, abesoin de laisser son dernier mot aux vivantscomme un enseignementet un hritage, Napolonrpta deux foisces parolesnigmatiques nLa ttedecanne HEtait-ce un dernier dfi jet au fan-tme de Pierre le Grand, un cri suprme de ds-

    espoir ouune prophtiedesdestinesde la France?L'humanit tout entire apparaissait-ellealors

    l'empereur harmonieuse et discipline, marchant la conquteduprogrs, et voulait-ilrsumerd'unseul mot le problme des temps modernesqui doittre prochainement rsolu entre la Russie et la

    LA TTE DE L'ABME I

  • DISCOURSPRLIMINAIRE. 29

    Ce qui donne en ce moment plus de chances la France, c'est son catholicisme et son allianceavecla papaut, cette puissanceque les anarchistesnomment dchue, et que Napolon estimait plusforte encore qu'une arme de trois cent millehommes. Si la France, comme le voulaient desanarchistes imbciles, se ft ligue, en 18/)9, avec

    l'ingratitude romaine, ou avait seulement laissrestaurer le trne pontifical par l'Autriche et parla Russie, les destinesde la France finissaient, etle Gnie indign de l'empereur, passant au Nord,accomplissait au profit des Slaves le beau rve dePierre le Grand.

    Pour les hommes qui s'imaginent l'absolu dansles extrmes, la raison et la foi, la libert et l'au-torit, le droit et le devoir, le travail et le capitalsont inconciliables. Mais l'absolu n'est pas plusadmissible dans chacune des opinions sparesquel'entier n'est concevable dans chacune de sesfractions. Foi raisonnable, libert autorise, droitmrit par le devoir accompli, capital fils et predu travail voil, comme nous l'avons dj dit end'autres termes, les formulesde l'absolu. Et si l'onnous demande quel est le centre de l'antinomie,quel est le point fixe de l'quilibre, nous avons

  • IXXmE Et BtTML M L HAUTEMAGIE.30

    dj rpondu que c'est Fesseneemme d'un Dieu l fbis souverainement -libre et inSniment n-cessaire.

    Que la force centripte et la force centrifugesoient deux forces contraires, cela n'est pas mettre en question; mais que de ces deux forcescombinesrsulte l'quilibre de la terre, c'est ce

    qu'il serait galement absurde et inutile de nier.L'accord de la Raisonavec la Foi, de la Science

    avec~aReligion, de la Libert avec l'Autorit, duVerbe humain, en un mot, avec le Verbe dh'in,n'est pasmoins vident, et nousen avonssuffisam-ment indiqules preuves. Maisles hommesne con-sidrent jamais comme prouves les vrits qu'ilsrefusentd'entendre, parcequ'ellescontrarientteurspassions.aveugles. A la dmonstration la plus ri-goureuse, ils vous rpondent toujours par ta diN-clt mme que vousvenez de rsoudre. Recom-mencezvos preuves, ils s'impatienteront, et dirontque vousvousrptez.Le Sauveurdu monde avait dit que le vin nou-

    veaune doit pastre enfermdans lesoutresuses,et qu'il nefaut pas coudre une pice neuve unvieux manteau. Les hommesne sont que les repr-sentants des ides, et il ne faut pas s'tonner si les

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 31

    erreurs incarnes repoussentla vrit avec ddainou mme avec colre. Maisle Verbe est essentiel-lement crateur, et, chaque nouvellemissiondesa chaleur et de sa lumire,, il fait clore dans lemondeune humanitnouvelle.L'poquedu dogmeobscuret dela ccit intellectuelleestpasse, pour-tant ne parlez pas du jeune soleil aux vieuxaveugles; appelez-en au tmoignage des yeux quis'ouvrent, et attendez les clairvoyants pour ex-pliquer les phnomnes du jour.Dieua cr l'humanit; mais, dans l'humanit,

    chaque individu est appel se crer lui-mmecomme tre moral et par consquent immortel.Hevivredans l'humanit, telleestl'esprancevaguequele panthisme et le mysticismervolutionnairelaissent leurs adeptes; ne jamais mourir dans sonindividualitintelligenteet morale, telle est la pr-rogative que la rvlation assure chacun de sesenfants Laquellede cesdeux idesest la plus con-solante et la plus librale? Laquelledes deux sur-tout donne une base plus certaine et un but plussublime la moralit humaine?Toute puissance qui ne rend pas raison d'elle-

    mme et qui pse sur les liberts sans leur don-ner de garanties, n'est qu'un pouvoir aveugle et

  • DOGMEET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.32

    transitoire; l'autorit vraie et durable est celle

    qui s'appuie sur la libert, tout en lui donnantune rgle et un frein. Ceci exprime l'absolu en

    politique.Toute foi qui n'claire pas et n'agrandit pas la

    raison, tout dogme qui nie la vie de l'intelligenceet la spontanit du libre arbitre, constituent unesuperstition la vraie religionestcellequise prouvepar l'intelligence et se justifie par la raison, touten lessoumettant une obissancencessaire.Ceciest l'indication de l'absolu en religion et en philo-sophie.De l'ide que les hommesse sont faite de Dieu

    ont toujours procdles notionsde puissance, soitau spirituel, soit au temporel, et le mot qui ex-

    prime la Divinitayant t de tout temps la for-mulede l'absolu, soitenrvlation, soit enintuitionnaturelle, le sens qu'on attache a ce mot a tou-

    jours t l'ide dominante de toute religion et detoute philosophie,comme de toute politiqueet detoutemorale.Concevoiren Dieu la libertsans ncessit;c'est

    rver une toute-puissancesansraisonet sans frein,c'est faire trner dans le ciel l'idal de la tyrannie.Telle a t, dans beaucoup d'esprits enthousiastes

  • DISCOURS PRELIMINAIRE. 33

    et mystiques, la plus dangereuseerreur du moyenge.

    Concevoiren Dieu la ncessitsanslibert, c'esten faire une machine infinie, dont nous sommes,malheureusement pour nous, les rouages intelli-

    gents. Obir ou tre briss, telle serait notredestine ternelle; et nous obirions sciemment quelque chose qui commanderait sans savoir

    pourquoi tristes voyageursque nous serions, en-ferms dans leswaggonsqu'une formidable loco-motive entranerait toute vapeur sur le grandchemin de l'abme. Cette doctrine panthistique,matrialiste et fatale, est la fois l'absurdit et lacalamit de notre sicle.

    Cette loi suprmede la libert et de la ncessitrgies et tempres l'une par l'autre se retrouve

    partout et domine tous les faits o se rvle unevertu, une juste puissance ou une autorit quel-conque. Dans le monde, qu'avait tir des tnbresde la dcadence, et que soutenait sur le chaos dela barbarie la main providentielle de Charle-

    magne, il y avait la papaut et l'empire., deux

    pouvoirs soutenus et limits l'un par l'autre. La

    papaut alors, dpositaire du dogme initiateur etcivilisateur, reprsentait la librt, qui tient les

  • DOGME ET MTUEL DE LA HAUTE MAGIE.34

    clefs de l'avenir et l'empereur, arm du glaive,tendait sur les troupeaux que poussait en avantla houlette des pontifes le bras de fer de la nces-

    sit, qui assurait et rglait la march de l'huma-nit dans les voiesdu progrs.Qu'on ne s'y trompe pas, le mouvement reli-

    gieux de notre poque, commencpar Chateau-briand, continu par Lamennaiset Lacordaire, cemouvement n'est pas rtrograde et ne donne pastort l'mancipation de la conscience humaine.L'humanit s'tait rvoltecontre lesexcsdumys-ticisme, qui, en affirmant la libert absolue deDieusans admettre en luiaucune ncessit,anan-tissait la justice ternelle et absorbait la person-nalit de l'homme dans l'obissance passive leVerbe humain, en effet, n pouvait pas se laisserdvorerainsi maisles passionsaveuglesessayrentde pousser la protestation dans l'extrmit con-traire, en lui faisant proclamer la souverainet

    uniqueet absoluede l'individualismehumain. Onse souvientdu cultede la Raison inaugur Notre-Dame, et des hommes de septembre maudissantla Saint-Barthlemy. Ces excs produisirent vitela lassitude et le dgot; mais l'humanit ne re-

    nona pas pour cela ce qui avait rendu sa pro-

  • DISCOURS fRL!MtNA!M. 35

    testation ncessaire. Chateaubriand vint alors ds-abuser les esprits qu'on avait garsen calomniant

    l'glise. U' fit aimer la religion en la montranthumaine et raisonnable; le monde avait besoinde se rconcilier avec son Sauveur, mais c'est enle reconnaissant pour tre vritablement homme,qu'on se disposait'l'adorer de nouveau comme levrai Dieu.

    Ceque l'on demande aujourd'hui au prtre, c'estsurtout la charit, cette sublime expression del'humanitdivine. La religion ne se contente plusd'offrir l'me les consolationsde l'autre vie, ellesesent appele secourir danscelle-ci lesdouleursdu pauvre, l'instruire, le protger et le diri-

    ger dans son travail. La science conomiquevientau-devant d'elle dans cette uvre de rgnration.Tout cela peut-tre se fait lentement, mais enfinle mouvements'opre, et l'glise, secondepar le

    pouvoirtemporel, ne saurait manquer de retrouverbientt toute son influence d'autrefois pour pr-cher au monde le christianisme accompli dans la

    synthsemessianique. Si l'glise avait rellementni le Verbe humain, si elle tait l'ennemie natu-relle, par consquent, de toute libert et de pro-grs, nous la regarderions comme morte, et nous

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.36

    penserionsqu'il en sera d'elle comme de la syna-goguejudaque mais, encore une fois, celan'est

    pas et ne saurait tre. L'glise, qui, dans sa con-stitution, rflchit l'image de Dieu, porte en elleaussi la double loi de libert et d'autorit con-tenues, rgleset tempres l'une par l'autre. Eneffet, l'glise, tout en maintenant l'intgrit et lastabilitdu dogme, lui a donn, de concileen con-

    cile, de superbesdveloppements.Aussi,parmileshrtiques et les dissidents, pendant que les unsaccusaientl'orthodoxied'immobilisme,d'autres lui

    reprochaient sans cesse des innovations; tous lessectaires, pour se sparer de la commune eccl-

    siastique, ont prtext le dsir de retourner aux

    croyanceset aux pratiques de l'Eg~se primitive.Si l'on et parl aux catholiques du xv" sicle

    ou aux philosophes du xvm" d'un accord n-cessaire entre la libert de conscience et l'au-torit religieuse, entre la raison et la foi, on et

    indign les uns et fait rire amrement les autres.Parler de paix etd'allianceau milieud'unebataille,c'est, en effet, prendre assezmalson temps et vou-loir perdre sesparoles.Lesdoctrinesdontnousnousfaisonsl'interprte,

    parce que nousles considronscommel'expression

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 37

    la plus avance des tendances de l'intelligencehumaine l'poque o nousvivons, ces doctrines,pressenties depuis quelques annes par un petitnombre d'esprits d'lite, peuvent tre mises au-

    jourd'hui avec espoir de les voir accueillies; mais,il y a quelquesmois peine, ellesn'eussent trouvnulle part ni une attention complaisante, ni unetribune ni un cho.

    C'est qu'alors les partis extrmes n'avaient pasencore t contraints d'abdiquer leurs prtentionsdevant la toute-puissance des vnements provi-dentiels, et l'on pouvait difficilemeutrester neutreau milieude leurguerre acharne toute concessionde l'un l'autre tait alors considrecomme unevritable trahison et les hommesqui n'abandon-nent jamais la justice, tant contraints de la cher-cher sparment et successivementdans les deuxcauses spares, devenaient suspects tout lemonde, comme des rengats ou des transfuges.Avoir des convictions assez nergiques pour pr-frer alors son indpendance consciencieuse aux

    encouragementsdes coteries, c'tait se condamner une solitudequi n'tait pas sans apprhensionsetsans angoisses.Demeurer isolentre deux armes

    qui s'attaquent, n'est-ce pas tre expos tous les

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.38

    coups? Passer de l'une l'autre, n'est-ce pas vou-loir se faire proscrire dans toutes les deux? Enchoisir une au hasard, n'est-ce pas trahir l'autre?Ce sont ces alternatives cruelles qui ont pouss

    des hommes commeM.de Lamennais de l'ultra-montanismeau jacobinisme, sans leur laisser trou-ver nulle part ni certitude ni repos. L'illustre au-teur des Paroles d'un croyant, pouvant de voirse dresser devant lui l'anarchie et le nant sousle

    masque du socialisme, et ne trouvant dans son

    gnie irrit aucune justification de l'antinomie quile blessait, n'a-t-il pas recul jusqu' Zoroastre,et n'a-t-il pas cherch dans les dogmes dsolantsdu manichismeune explicationquelconquede la

    guerre ternelle des Amchaspandset desDarvands?Maisles quatre annes qui viennent de s'couler

    ont t pleines, pour le monde, d'enseignementset de rvlationsimmenses. La rvolutions'est ex-

    plique etjustiue une secondefoisparla crationd'une autorit absolue, et nous comprenonsmain-tenant que le dualismeconstitutionneln'tait autrechoseque le manichismeen politique.Pour con-cilier la libert et le pouvoir, il faut en effet les

    appuyer l'un sur l'autre, et non les opposerl'un l'autre.

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 39

    La souverainet absolue fonde sur le suffrageuniversel, telle est dsormais la notion unique del'autorit vritable,en religioncommeen politique.Ainsi seront constitus les gouvernementsde droit'humain, seconde forme du droit divin; qui est

    imprescriptible dans l'humanit.C'est par l'intelligence du vrai et la pratique

    raisonne du bien que s'affranchissent non-seu-lement les individus, mais les peuples. Sur deshommesdont l'me est libre, la tyrannie matrielleest impraticable; mais aussi la libert extrieuredes hommes et des multitudes, qui sont intrieure-ment asservis des prjugs ou des vices, n'estqu'une multiplication et une complication de ty-rannie. Quand la majorit des hommes inintelli-

    gents est matresse, la minorit des sages estesclave.

    Aussi faut-il soigneusement distinguer le droitdu fait et le principe de ses applications dans lapolitique de l'glise.Son travail a toujours t de soumettre les fata-

    lits de la chair la providence de l'esprit; c'estau nom de la libert morale qu'elle oppose unedigue la spontanit aveugle des tendances phy-siques et si, de.nos jours, elle ne s'est pas montre

  • DOGME'ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.&0

    sympathiqueau mouvementrvolutionnaire, c'est

    qu'elle sentait d'une manire surminente et in-faillible que l n'tait pas la vritable libert.

    Ce sont les abus possiblesde la libert qui ren*dent l'autorit ncessaire; et l'autorit n'a d'autremission dans l'glise et dans l'tat que de pro-tger la libert rgle de tous contre la libert

    drgle de quelques-uns. Plus l'autorit est forte,plus sa protection. est puissante. Voil pourquoil'infaillibilita t ncessaire l'glise voilpour-quoi aussi toujours, dans un tat bien gouvern,force doit rester la loi. L'ide de libert etcelle d'autorit sont donc indissolublementunieset s'appuient uniquement l'une sur l'autre.La tyrannie dans l'ancien monde n'tait que

    la libert absolue de quelques-uns au prjudicede la libertde tous., L'vangile, en imposant desdevoirs aux rois comme aux peuples a rendu, auxuns l'autorit qui leur manquait, et a garanti auxautres une libert fonde sur des droits nouveaux,avec la certitude d'un progrs rel et d'un perfec-tionnement possible tous.Si l'intelligence humaine n'tait pas perfectible,

    quoi servirait, je vousprie, l'enseignement per-manent de la Providence, et pourquoi larvlation

  • DtSCOURS PRLIMINAIRE. l

    se serait-ellemanifestesousdes formessuccessiveset successivementplus parfaites? La nature nousmontre le progrs dans la?constitutionde tous lestres et n'accomplit que lentement ses chefs-d'u-vre. Le mouvement est partout le signe de la vie,et mme lorsqu'il parait s'accomplir en parcourantun cercle, dans ce cercle, du moins, il va toujoursen avant, et ne donne jamais, en revenant sur lui-mme, un dmenti la main qui l'imprime.La loi du mouvement, si elle n'tait point rgle

    par la Providence dans le ciel et par l'autorit surla terre, serait une loi de destruction et de mort,parce que ce serait une loi de dsordre; mais,d'un autre ct, si la rsistance qui rgle le mou-vement arrive le paralyser et vouloir l'arrter,de deux choses l'une ou le mouvement briserala rsistance et dtruira l'autorit, ou l'autoritanantira le mouvement et se suicidera ainsi endtruisant sa propre force et sa propre vie.

    C'est ainsi que le judasme s'est renvers lui-mme en voulant s'opposer l'closiondu chris-

    tianisme, qui tait la consquence naturelle et le

    dveloppementncessaire des dogmes deMoseetdes promessesdes prophtes.

    La catholicisme n'imitera pas le judasme et ne

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.42

    s'opposera pas la grande synthse messianique,parce que l'glise catholique porte dans son nommme une promesse d'universalit, qui assigned'avance son vrai nom l'glise de l'avenir. Rome

    et Constantinoplene se'disputerontpasune secondefois l'empire du monde o se manifestera leVerbe, l sera le pontife du Verbe. Le sige quereconnatra l'obissance du monde sera celui dusuccesseurde Jsus-Christ; et tout chef d'un petitnombre de dissidents, quels que puissent tred'ailleurs ses prtextes et ses prtendus titres, nesera plus devant le suffrage universel des nations

    qu'un antipape et un sectaire.La runion des deuxglise3grecque et romaine

    est donc la grande rvolution tout la fois reli-

    gieuse et civile qui doit tt ou tard changer la facedu monde; et cette rvolutionne saurait manquerd'tre le rsultat du dveloppement et de la pro-pagation des doctrines kabbalistiquesdans l'gliseet dans la socit.En vain nousdirait-on que l'glise se croit par-

    faite, et affecterait-onde craindre qu'elle ne refused'admettre la loi du progrs. Nous avons dj r-

    pondu cette crainte par un passage dcisif deVincent de Lrins; mais la question est assez im-

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. &3

    portante pour que nous ajoutions ici encore quel-ques fortes autorits.

    Un savant pasteur anglais, rcemment convertiau catholicisme,le docteur JohnNewman,a publidans ces derniers temps un ouvrage qui a obtenula haute approbation de l'autorit ecclsiastique,et dans lequel il prouve que le dveloppementdu dogme,et par consquent celuide l'intelligencehumaine, a t l'oeuvre spciale du catholicisme,considr comme principe initiateur et conserva-teur, dans l'explicationet l'applicationdcs thormes divins qui sontla lettre du dogme. Avantde

    prouver sa thse, il tablit victorieusementl'exis-tence du progrs naturel en toutes choses, mais

    plus particulirement dans la rvlation. Voici en

    quels termes il s'exprimeD'aprs l'histoire de toutes lessecteset de tous

    les partis en religion; et d'aprs l'analogie et

    l'exemple de l'criture nous pouvons conclureraisonnablement que la doctrine chrtienne admetdes dveloppementsformels, lgitimes, rels, des

    dveloppementsprvus par son divin auteur. L'analogie gnrale du monde physique et

    moral confirme cette conclusion Tcut le monde naturel, et son gouvernement, dit Batler, est un

  • DOGMEM' RtTUELDELA HAUTEMAG]E.4ft

    plan ou un systme, non un systme fixe, maisprogressif, un plan dans lequel l'essai de diversmoyens a lieu longtemps avant que les fins.pro-posespuissenttre atteintes.Lechangementdessaisons,la culturedes fruits de la terre, l'histoiremme d'une fleur en est une preuve; et il en estainsi de la viehumaine. Ainsilesvgtaux et lesanimaux, quoiqueformsncessairementen unefois, grandissent cependant par degrs pourarriver la maturit. Et ainsi les agents raison-nablesqui animent les corps sont naturellementports vers le caractre qui leur est propre parl'acquisitiongraduelle de connaissanceset d'ex-prience, et par une longue suite d'actions. H Notreexistencen'est pas seulementsuccessive,

    comme elle doit l'tre de toute ncessit, mais untat de notre tre est dsignpar le Crateur pourservir de prparation un autre tat et de transi-tion celui qui lui succde. Ainsi l'adolescencevient aprs l'enfance, la jeunesse aprs l'adoles-cence et l'ge mr aprs la jeunesse. Leshommes,dans leur impatience, veulent tout prcipiter. Maisl'auteur de la nature semble n'oprer que d'aprsune longue dlibration, et arrive ses fins pardes progrs successivementet lentement accom-

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. &5

    plis. Dieuopre de la mmemaniredanslecoursde sa providencenaturelle et dans la manifestation

    religieuse, faisant succder une chose uneautre,puis une autre encore celle-ci, et continuant

    toujours, par une srie progressive de moyensqui s'tendent au del et en de.de notre vueborne. La loi nouvelledu christianisme nous est

    reprsente dans celle de' la nature. HDansunede sesparaboles remarque ailleurs

    le docteur Newman, Notre-Seigneurcompare le

    royaumedu ciel ungrain de snevqu'un homme

    prend et sme dans son champ. Cette graine est, la vrit, la plus petite de toutes les graines;mais, quand elle a cr, elle est la plus grande des

    plantes et devient un arbre; et, commele dit saint

    Marc, cet arbre pousse des branches sur les-

    quelles les oiseauxdu ciel viennent se reposer. Et ensuite, dans le mme chapitre de saint Marc'

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.~6

    extrieure; et il est observer que, selon l'espritdu texte, le caractre ~poM

  • DISCOURS PRLIMINAIRE.
  • DOGMEET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.48

    pour rgnrer l'Eglise, veulent la rendre tout

    humaine, de divine qu'elle est dans son autorit etdans son principe.Donccequele jugecondamne, ce n'est pas l'a~r-

    mationditVe~e humain, mais la neya

  • DISCOURSPRUMINARE. &9

    n'est qu'une protestation divine en faveur duvritable progrs.

    Tout ce qui s'accomplithors de l'autorit s'ac-

    complit hors de la nature, qui est la loi positive del'autorit ternelle.L'idalhumain peut doncsuivredeux voiesopposes ou dvancer la scienceparl'intuition qu'elle doit justifier plus tard, ou s'car-ter de la science par l'hallucination qu'elle con-damne. Les amis du dsordre, les mes captivesdel'goisme brutal, craignant le joug de la scienceet la discipline de la raison, prennent toujoursl'hallucination pour guide. Le paganisme a eu sesfaux mystiques,et c'est ainsi que le dogmephiloso-phique des anciensHellness'est chang en idol-trie le christianisme a t aussi amig sontour de la mme plaie, et un asctisme inhumain,entranant aprs lui comme raction le quitismele plus immoral, a fait calomnier la pitvritableet a loign bien des mes des pratiques de lareligion.Un des plus remarquables fantaisistesde notre

    temps, le paradoxalP.-J. Proudhon, ayant un jour contrarier M. de Lamartine qui tait alors aupouvoir, lana contre les potes une de cescyni-queset loquentes diatribes qu'il sait si bien faire.

    T.t.

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.50

    Nousn'avonspas sous les yeux cette page empor-te comme tant d'autres par le tourbillon rvolu-tionnaire, mais nous nous rappelons avec quelleverve le trop clbre rveur dclamait contrela posie et contre les rves il tait effrayant devrit lorsqu'il reprsentait l'tat chancelant et

    dvoy, prt trbucher dans le sang la suite de

    quelque joueur de guitare que l'extase de sa pro-pre musique empchera d'entendre les imprca-tions, les sanglots et les rles Voil, s'criait-il, ce

    que c'est que le gouvernement des potes! Puis,s'chauffantpourson ide, comme'c'estl'ordinaire,il arrivait conclure que Nron tait l'incarnationla plus complte de la posie leve sur le trnedu monde. Brler Romeaux sonsde la lyre et dra-matiser ainsi la grande posiedeVirgile, n'tait-ce

    pas une colossaleet impriale et potique fantai-sie?Ala villedesCsarsqu'il sacrifiaitainsicommeun dcor lamise enscnede sesvers, Nronvou-lait substituer une Rome nouvelle, toute doreet construite d'-unseulpalais Oh si la grandeurde l'audace et la tmritdesrves font le sublimeen posie, Nron tait, en effet, un grand pote!Maiscen'estni M.Proudhon, ni aucun des chefsdusocialismemoderne, quiont le droit de l'en blmer..

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 51

    Nron reprsente pour nous la personnificationla plus complte de l'idalisme sans autorit et dela licencedu pouvoir: c'est l'anarchie de M.Prou-dhon rsume en un seul hommeet place sur letrne de l'univers; c'est l'absolu des matrialistesen volupts, en audace, en nergie et en puis-sance. Jamais nature plus dsordonne n'eSrayale monde de ses carts; et voil ce que les rvo-lutionnaires de l'cole de M. Proudhon entendent

    par de la posie;mais nous ne pensonspas commeeux.tre pote, c'est crer; ce n'est pas rver ni

    mentir. Dieu a t potelorsqu'il a fait le monde,etson immortelle pope est crite avec des toiles.Les sciencesont reu de lui les secretsde la posie,parce que les clefs de l'harmonie ont t remisesentre leurs mains. Les nombres sont potes, carils chantent aveccesnotes toujours justes, qui don-naient des ravissementsau gnie de Pythagore. La

    posiequi n'accepte pas le monde tel que Dieul'a

    fait, et qui cherche en inventer un autre, n'est

    que le dlire des esprits des tnbres c'est celle-l

    qui aime le mystre et qui nie les progrs de l'in-

    telligencehumaine. A celle-l donc les enchante-ments de l'ignorance et les faux miracies de la

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.52

    thurgie A celle-l le despotismede la matire etles caprices des passions A la posie anarchi-

    que, en un mot, les tentatives toujours vaines, les

    "esprancestoujours dues, le vautour et la rageimpuissante de Promthe, tandis que la posiesoumise l'ordre, qui lui garantit une libert invio-

    lable, cueillera les fleurs de la science, traduiral'harmonie des nombres, interprtera la prireuni-verselle et marchera tantt devantla science, tanttsur ses traces, mais toujours prs d'elle, dans lalumire vivante du Verbe et dans la voie assuredu progrs!

    Cet avenir prochain du christianisme retremp la source de toute rvlation, c'est--dire dans

    les fortes vrits du magisme et de la cabale, a

    t pressenti par un grand pote polonais, Adam

    Mickiewisch, qui a cr pour cette doctrine un

    nom nouveau, et l'a nomme le Messianisme.

    Cenom nous plat et nous l'adoptons avecplai-sir, pourvuqu'il ne reprsentepas l'ide d'une secte

    nouvelle. Le monde est lasde morcellementset de

    divisions,et tend de toutes ses forces l'unit. Aussi

    ne sommes-nouspas de ceux qui se disent catholi-

    queset non romains; ce quiconstitueun contre-sens

    des plus ridicules. Catholiqueveut dire universel,

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 53or l'universalit n'est-elle donc pas ncessairementromainp, puisque Rome est dans l'univers?Le XVIIIesiclea vu les abus de la religion,mais

    ila mconnula force de cettemmereligion, parcequ'il n'en devinait pas le secret. La haute magiechappe l'incrdulit et l'ignorance parcequ'elle s'appuie galement et sur la science et surla foi.L'homme est le thaumaturge de la terre, et par

    son verbe, c'est--dire par sa parole intelligente,il dispose des forces fatales. Il rayonne et attirecomme les astres; il peut gurir par un attouche-ment, par un signe, par un acte de' sa volont.Voilce que Mesmer, avant nous, tait venu rv-ler au monde; voil ce secret terrible qu'onenfouissait avec tant de soin dans les ombres desancienssanctuaires. Que peuvent prouver mainte-nant les prtendus miracles de l'homme, sinon

    l'nergie lie sa volont et la puissance de son

    magntisme?C'est doncmaintenant qu'on peut direavec vritque Dieu seul est Dieu, car les hommesde prestige ne se feront plus adorer. D'ailleurs, la

    synthsede tous les dogmesnous ramne un seul

    symbolisme, qui -est celui de la cabale et des

    mages. Les trois mystres et les quatre vertus

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE5&ralisent le triangle et le carr magique. Lessept sacrements manifestentlespuissancesdes septgnies nu des sept anges, qui, suivant le texte del'Apocalypse, se tiennent toujours devant le trnede Dieu. Nouscomprenons maintenant les math-matiques sacres qui multiplient soixanteet douzefois le divin ttragramme pour former les em-

    preintes des trente-six talismans de Salomonramens par des tudesprofondes l'antique tho-

    logie d'Isral, nous nous inclinons devant leshautes vrits de la cabale, et nous esprons queles sagesIsralites, leur tour, reconnatront qu'ilsn'taient spars de nous que par des mots malentendus. Isral a emport d'Egypte les secretsdu

    sphinx; mais il a mconnu la croix qui, dans les

    symbolesprimitifs de l'Egypte magique, tait djla clef du ciel. Il ne tardera pas la comprendre,car dj il a ouvert son cur la charit. Le cri

    d'angoissedes chrtiens de Syrie a mu les enfantsde Mose, et pendant qu'Abd-el-Kader protgeaitnos malheureux frres en Orient et les dfendaitau pril de sa vie, une souscriptions'ouvrait Paris

    par les soins de l'avocat isralite Crmieux.La grande nigme des siclesanciens, le sphinx,

    aprs avoir fait le tour du monde sans trouver de

  • 56' DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.

    fantmaudit qu'un crime originel fait exposer lamort sur le Cythron le pre est venu expier son tour le supplicede son fils; l'ombre de Laus a

    gmi des tourments d'OEdipe; le ciel a expliquau mondemon nigmesur cette croix. C'est pour-quoi je me tais en attendant qu'elle-mme s'ex-plique au monde repose-toi, Aaswrus, car c'estici le terme de ton douloureuxvoyage.

    Je suis la clef de la sagesse venir, dira lacroix; je suisle signeglorieuxdu staurosque Dieua fix aux quatre points cardinaux du ciel, pourservir de doublepivot l'univers.J'ai expliqu sur la terre l'nigme du sphinx,

    en donnant aux hommes la raison de la douleur;j'ai consommle symbolismereligieux en ralisantle sacrifice. Je suis l'chelle sanglantepar o l'hu-manit monte vers Dieu et par o Dieu descendvers les hommes. Je suis l'arbre du sang, et mesracines le boivent par toute la terre. afin qu'il nesoit pas perdu, mais qu'il forme sur mesbranchesdes fruits de dvouement et d'amour. Je suis le

    signe de la gloire, parce que j'ai rvll'honneur;et les princesde la terre m'attachent sur la poitrinedes braves. Un d'entre eux m'a donn une cin-

    quime branche pour faire de moiune toile; mais

  • DISCOURSPRLIMINAIRE. 57

    je m'appelle toujours la croix. Peut-tre celui quifut le martyr de la gloire prvoyait-ilson sacrifice,et voulait-il, en ajoutant une branche la croix,prparer un chevet sa propre tte ct de celledu Christ. J'tends mes bras galement droite et gauche, et j'ai galement rpandu les bndic-tions de Dieu sur Madeleineet sur Marie; j'offrele salut aux pcheurs, et aux justes la grce nou-

    velle j'attends Can et Abel pour les rconcilier etles unir. Je dois servir de point de ralliement aux

    peuples, et je dois prsider au dernier jugementdes rois; je suisl'abrg de la loi, car je porte critsur mes branches Foi, esprance et charit. Jesuis le rsum de la science, parce que j'expliquela vie humaine et la pense de Dieu. Ne tremblepas, Aaswrus,et ne redoute plus mon ombre; lecrime de ton peuple est devenucelui de l'univers,car les chrtiens aussi ont crucifi leur Sauveur;ils l'ont crucifi en foulant aux piedssadoctrine decommunion, ils l'ont crucifi en la personne despauvres, ils l'ont crucifi en te maudissant toi-mme et en proscrivant ton exil; mais le crimede tous les hommes les enveloppe tous dans lemme pardon; et toi, le Can humanitaire, toi,l'an de ceux que doit racheter la croix, viens te

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.58

    reposer sous l'un de ses bras encore teint du sangrdempteur! Aprs toi viendra le fils de la seconde

    synagogue, le pontife de la loi nouvelle, le succes-seur de Pierre; lorsque les nations l'auront proscritcomme toi, lorsqu'il n'y aura plus d'autre cou-ronne que celle du martyre, et lorsquela perscu-tion l'aura rendu soumis et doux comme le justeAbel, alors reviendra Marie, la femme rgnre,la mre de Dieu et des hommes; et elle rconciliera le Juif errant avec le dernier des papes, puiselle recommencera la conqute du monde pour lerendre ses deux enfants. L'amour rgnra les

    sciences, la raison justifiera la foi. Alors je re-deviendrai l'arbre du paradis terrestre, l'arbre dela sciencedu bien et du mal, l'arbre de la liberthumaine. Mes immenses rameaux ombragerontle monde entier, et les populations fatigues sedlasseront sous mon ombre; mes fruits seront lanourriture des forts et le lait des petits enfants; etles oiseaux du ciel, c'est--dire ceux qui passenten chantant, ports sur les ailes de l'inspirationsacre, ceux-l se reposeront sur mes branches

    toujours vertes et charges de fruits. Repose-toidonc, Aaswrus,dans l'esprance de ce bel avenir;car c'est ici le terme de ton douloureux voyage.

  • DISCOURS FRUMINAtRE. 59

    Alorsle Juif errant, secouant la poussirede sespieds endoloris, dira au sphinx Je te connaisdepuis longtemps! Ezchil te voyait autrefoisattel ce chariot mystrieuxqui reprsente l'uni-vers et dont les roues toiles tournent les unesdans les autres; j'ai accompli une seconde fois lesdestines errantes de l'orphelin du Cythron;comme lui, j'ai tu mon pre sans le connatrelorsque le dicide s'est accompli, et lorsque j'aiappel sur moi la vengeance de son sang, je mesuis condamn moi-mme l'aveuglement et l'exil. Je te.fuyais et je te cherchais toujours, cartu tais l premire cause de mesdouleurs. Maistu

    voyageaispniblement commemoi, et par des che-mins diffrents, nous devions arriver ensemble;bni sois-tu, gnie des anciensges de m'avoirramen au pied de la croixfPuis, s'adressant la croix elle mme, Aaswrus

    dira en essuyant sa dernire larme Depuis dix-huit sicles, je te connais, car je t'ai vue portepar le Christ qui succombait sous ce fardeau. J'aibranl la tte et je t'ai blasphmealors, parce queje n'avais pas encore t initi la maldiction ilfallait ma religionl'anatbme du mondepour luifaire comprendre la divinit du maudit; c'est

  • DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.60

    pourquoi j'ai souffert avec courage mes dix-huitsiclesd'expiation, vivant et souffrant toujours aumilieu des gnrations qui mouraient autour de

    moi, assistant l'agonie des empires, et traversanttoutes lesruines en regardant toujours avec anxitsi tu n'tais pas renverse; et aprs toutes les con-vulsionsdu monde, je te voyais toujours debout!Maisje ne m'approchais pas de toi, parce que les

    grands du monde t'avaient profane encore, etavaient fait de toi le gibet de la Libert sainte! Jene m'approchais pas de toi, parce que l'inquisitionavait livr mes frres au bcher en prsence deton image; je ne m'approchais pas de toi, parceque tu ne parlais pas, tandisque les faux ministresdu ciel parlaient, en ton nom, de damnation et de

    vengeances; et moi, je ne pouvaisentendre quedes paroles de misricorde et d'union! Aussi, ds

    que ta voix est parvenue mon oreille, j'ai sentimon cur chang et ma consciences'est calmeBniesoit l'heure salutaire quim'a ramen au piedde la croixAlorsune porte s'ouvrira dans le ciel et la mon-

    tagne du Golgothaen sera le seuil, et devant cette

    porte, l'humanit verra avec tonnement la croix

    rayonnante garde par le Juif errant qui aura

  • DISCOURS PRLIMINAIRE. 61

    dpos ses pieds son bton de voyage, et par le

    sphinx qui tendra ses ailes et aura les yeux bril-lants d'esprance commes'il allait prendreun nou-vel essor et se transfigurer!Et le sphinx rpondra la question de la croix

    en disant Dieu est celui qui triomphe du mal parl'preuve de ses enfants, celui qui permet la dou-leur, parce qu'il en possde en lui le remde ter-nel Dieu est celui qui est, et devant qui le maln'est pas.

    Et la croix rpondra l'nigme du sphinxL'homme est le fils de Dieu qui s'immortalise enmourant, et qui s'affranchit, par un amour intelli-

    gent et victorieux,du tempset dela mort; l'hommeest celui qui doit aimer pour vivre, et qui ne peutaimer sans tre libre; l'homme est le fils de Dieuet de la Libert!1Rsumonsici notre pense. L'homme, sorti des

    mains de Dieu, est esclavede ses besoins et de son

    ignorance; il doit s'affranchir par l'tude et letravail. La toute-puissance relative de la volont,connrme par le Verbe, rend seule les hommesvraiment libres, et c'est la science des anciens

    magesqu'il faut demander lessecrets de l'manci-

    pation et des forces vives de la volont.

  • 62 DOGME ET RITUEL DE LA HAUTE MAGIE.Nous rapportons aux pieds de l'enfant de Beth-

    lem l'or, l'encenset la myrrhe des anciensmages,maintenant que les rois de la terre semblent le

    renvoyer dans la crche. Que les pontifes soient

    pauvres, maisqu'ils prennent d'unemain le sceptrede la science, le sceptre royal de Salomon, et del'autre la houlette de la charit, la houlette dubon Pasteur; et ils commenceront seulementalors tre vraiment rois dans ce monde et dansl'autre

  • A travers le vuilede toutes les allgorieshira-

    tiques et mystiquesdes anciensdogmes, traversles tnbres et les preuves bizarres de toutes lesinitiations, sous le sceau de toutes les crituressacres, dansles ruinesdeNiniveoudeThbes, surles pierres ronges des anciens temples et sur laface noirciedes.sphinxde l'Assyrieoude l'Egypte,dans les peintures monstrueuseso merveilleuses

    qui traduisent pour les croyants de l'Inde lespagessacres desVdas, dans les emblmestrangesdenos vieux livres d'alchimie, dans les crmoniesde rception pratiques par toutes les socits

    mystrieuses,onretrouve les traces d'une doctrinepartout la mme et partout soigneusementcache.La philosophieocculte sembleavoirt la nourriceou la marraine de toutes les religions, le leviersecret de toutes les forces intellectuelles,la clef de

    INTRODUCTION.

  • DOGMEDE LA HAUTE MAGIE.64

    toutes les obscurits divines, et la reine absoluede la socit, dans les ges o elle tait exclusi-vement rserve l'ducation des prtres et desrois.

    Elle avait rgn en Perse avec les mages, quiprirent un jour, comme prissent les matres dumonde, pour avoir abus de leur puissance elleavait dot l'Inde des plus merveilleusestraditionset d'un luxe incroyable de posie, de grce et deterreur dans ses emblmes; elle avait civilis laGrce aux sons de la lyre d'Orphe; elle cachaitles principes de toutes les sciences et de tous les

    progrs de l'esprit humain dans les calculsauda-cieux de Pythagore la fable tait pleine de sesmiracles, et l'histoire, lorsqu'elle entreprenait de

    juger cette puissanceinconnue, se confondaitavecla fable elle branlait ou affermissaitles empirespar sesoracles, faisaitplir lestyrans sur leur trneet dominait tous les esprits par la curiosit ou parla crainte: Acette science, disaitla foule, rien n'es).impossible: elle commande aux lments, sait Ilangage des astres et dirige la marche des toilesla lune, sa voix, tombe toute sanglantedu ciellesmorts sedressent dans leur tombe et articulenten parolesfatales le vent de la nuit qui siffledans

  • tNTRODUCTtDN. 65

    leur crne. Matresse de l'amour ou de la haine,la science peut donner son gr aux curshumains le paradis ou l'enfer; elle dispose loisirde toutes les formes et distribue comme il lui platsoit la beaut, soit la laideur; elle change tour tour, avec la baguette de Circ, les hommes enbrutes et les animaux en hommes; elle disposemme de la vie ou de la mort, et peut confrer ses adeptes la richesse par la transmutation desmtaux, et l'immortalit par sa quintescenceet sonelixir composd'or et de lumire Voilce qu'avaitt la magiedepuisZoroastrejusqu' Mans,depuisOrphe jusqu' Apollonius de Thyane, lorsquele christianisme positif, triomphant enfin desbeaux rves et des gigantesques aspirations del'cole d'Alexandrie, osa foudroyer publiquementcette philosophie de ses anathmes, et la rduisitainsi tre plus occulte et plus mystrieuse quejamais.

    D'ailleurs, il courait sur le compte des initis oudes adeptes des bruits tranges et alarmants ceshommes taient partout environnsd'une influencefatale ils tuaient ou rendaient fous ceux qui selaissaient entraner par leur doucereuse loquenceou par le prestigede leur savoir. Les femmes qu'ils

    T. t. 5

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    aimaient devenaient des Stryges,leurs enfants dis-paraissaient dans leurs conventiculesnocturnes, etl'on parlait tout bas en frissonnant de sanglantesorgies et d'abominables festins. On avait trouvdes ossements dans les souterrains des ancienstemples, on avait entendu des hurlementspendantla nuit; les moissonsdprissaientet les troupeauxdevenaient languissants quand le magicien avait

    pass. Desmaladiesqui.dSaient l'art de la mde-cine faisaientparfois leur apparitiondanslemonde,et c'tait toujours, disait-on, sous les regardsveni-meux des adeptes. Enfin, un cri universel de

    rprobation s'leva contre la magie, dont le nomseul devint un crime, et la haine du vulgaire seformula par cet arrt Lesmagiciensau feu acomme on avait dit quelquessiclesplus tt Leschrtiens aux lions!

    Or, la multitude ne conspirejamais que contreles puissancesrelles elle n'a pas la sciencedece qui est vrai, mais elle a l'instinct de ce quiiest fort.Il tait rserv au xviu* sicle de rire la fois

    des chrtiens et de la magie, tout en s'engouantdes homlies de Jean-Jacques et des prestigesde Cagliostro.

  • INTRODUCTION. 67

    Cependant, au fond de lamagie il ya la science,commeau fonddu christianismeily a l'amour; et,dans les symboles vangiiques, nous voyons leVerbe incarn ador dans son enfance par troismages que conduit une toile (le ternaire et lesignedu microcosme),et recevant d'eux l'or, l'en-cens et la myrrhe autre ternaire mystrieux sousl'emblme duquel sont contenus allgoriquementles plus hauts secrets de la cabale.Le christianisme ne devait donc pas sa haine

    la magie; mais l'ignorance humaine a toujourspeur de l'inconnu. La science fut oblige de secacher pour se drober aux agressionspassionnesd'un amour aveugle elle s'enveloppadans de nou-veauxhiroglyphes, dissimulases efforts, dguisases esprances.Alorsfut cr )e jargon de l'alchi-mie, continuelle dceptionpour le vulgairealtrd'or et langue vivante seulement pour les vraisdisciplesd'Herms.Chose singulire il existe parmi les livres

    sacrs des chrtiens deux ouvrages que l'Egliseinfailliblen'a pas la prtention de comprendre etn'essayejamais d'expliquer la prophtie d'Ez-chiel et l'Apocalypse deuxclaviculescabalistiquesrserves sans doute dans le ciel aux commen-

  • DOGME DE LA HAUTE MAGIE.68

    taires des rois mages; livres ferms de sept sceaux

    pour les croyants fidles, et parfaitement clairs

    pour l'infidle initi aux sciencesoccultes.Unautre livre existeencore mais celui-l,bien

    qu'il soiten quelquesorte populaireet qu'on puissele trouver partout, est le plus occulte et le plusinconnude tous, parce qu'il contient la clefde tousles autres; il est dans la publicit sans tre connudu public; on ne s'avisepas de le trouver o il est,et l'on perdrait mille fois son temps le cherchero il n'est pas sil'on en souponnaitl'existence. Celivre, plus ancien peut-tre que celui d'Hnoc, n'a

    jamais t traduit, et il estcrit encore tout entieren caractres primitifs et sur des pages dtachescomme les tablettes des anciens. Un savant dis-

    tingu en a rvl, sansqu'on l'ait remarqu, nonpas prcisment le secret, mais l'antiquit et laconservationsingulire; un autre savant, maisd'unesprit plusfantastiqueque judicieux, a passtrenteans tudierce livre, et en a seulementsouponntoute l'importance. C'est, en effet, un ouvragemonumental et singulier, simple et fort commel'architecture des pyramides, durable par cons-

    quent comme elles; livre qui rsume toutes lessciences,et dont lescombinaisonsinfiniespeuvent

  • INTRODUCTION. 69

    rsoudre tous les problmes livre qui parle enfaisant penser; inspirateur et rgulateur de toutesles conceptions possibles; le chef-d'uvre peut-tre de l'esprit humain, t coup sr l'une desplus belles chosesque nousait laissesl'antiquit;claviculeuniverselle,dont le nom n'a t compriset expliqu que par le savant illuminGuillaumePostel; texte unique, dont les premiers caractresseulement ont ravi en extase l'esprit religieux desaint Martin, et eussent rendu la raisonau sublimeet infortun Swedenborg.Ce livre, nousen parle-rons plus tard, et son explicationmathmatiqueetrigoureuse sera le complment et la couronne denotre consciencieuxtravail.L'alliance originelle du christianisme et de la

    sciencedesmages, si elle est une foisbien dmon-tre, ne sera pas une dcouverte d'une mdiocreimportance, et nous ne doutons pas que le r-sultat d'une tude srieuse de la magie et de lacabale n'amne les esprits srieux la, conci-liation, regarde jusqu' prsent comme impossi-ble, de la science et du dogme, de la raison etde la foi.Nousavonsdit que l'glise, dont l'attribut sp-

    cial est le dpt des clefs, ne prtend pas avoir

  • DOGME DE LA HAUTE MAGIE.70celles de l'Apocalypseou des visions d'Ezcbiel.Pour les chrtiens et dans leur opinion, les clavi-cules scientifiqueset magiques de Salomon sont

    perdues. Il est cependant certain que, dans le do-maine de l'intelligencegouvern par le VERBE,riende ce qui est crit ne se perd. Seulement leschosesdont les hommes cessent d'avoir l'intelli-gence n'existent plus pour eux, du moinscommeverbe; elles rentrent alors dans le domaine des

    nigmes et du mystre.D'ailleurs; l'antipathie t mme la guerre ou-

    verte de l'Eglise omcie)lccontre tout ce qui rentredansle domainede la magie, qui est une sorte desacerdoce personnel et mancip, tient des cau-ses ncessaires et inhrentes mme la constitu-tion socialeet hirarchique du sacerdocechrtien.

    L'Egliseignorelamagie,parcequ'elle doitl'ignorerou prir, comme nous le prouverons plus tard;elle n'en reconnat pas moins que son mystrieuxfondateur a t satudans son berceaupar les trois

    mages, c'est--dire par les ambassadeurs hirati-

    quesdes trois parties du mondeconnu, et des troismondesanalogiquesde la philosophieocculte.

    Dans l'cole d'Alexandrie, la magie et le.chris-tianismese donnent presque la main sous les aus-

  • INTRODUCTION. 71

    pices d'AmmoniusSaccas et dePlaton. Le dogmed'Herms se trouve presque tout entier dans lescrits attribus Denis l'Aropagite. Synsiustrace le plan d'un trait des songes, qui devaitplus tard tre comment par Cardan, et composd'hymnes qui pourraient servir la liturgie de

    l'glise de Swedenborg, si une glise d'illuminspouvaitavoir une liturgie. C'est aussi cette po-que d'abstractions ardentes et de logomachiespas-sionnes qu'il faut rattacher le rgne philosophi-que de.Julien, nomm l'Apostat, parce que, danssa jeunesse, il avait fait, contre-coeur,professiondu christianisme. Tout le monde sait que Julieneut le tort d'tre un hros de Plutarque hors de

    saison, et fut, sil'on peut parler ainsi, le DonQui-chotte de la chevalerie romaine mais ceque toutle monde ne sait pas,c'est que Julien tait'un illu-min et un initi de premier ordre; c'est qu'ilcroyait l'unit deDieuet au dogme universel dela Trinit; c'est en un mot, qu'il ne regrettait duvieuxmonde que ses magnifiques symboleset sestrop gracieuses images.Julien n'tait pas un paen,c'tait un gnostiqueentich des allgoriesdu poly-thisme grec et qui avait le malheur de trouver lenom de Jsus-Christmoins sonore que celuid'Or-

  • DOGME DE LA HAUTE MAGIE.72

    phe. L'empereur en lui paya pour les gots decollge du philosopheet du rhteur; et aprs qu'ilse fut donn lui-mme le spectacle et le plaisird'expirer comme paminondas avec des phrasesde Caton, il eut dans l'opinion publique, djtoute chrtienne, des anathmes pour oraison fu-nbre et une pithte fltrissante pour dernireclbrit.

    Enjambonsles petites choseset les petitshommesdu Bas-Empire et arrivons au moyenge. Tenez,prenez ce livre lisez a la septime page, puis as-

    seyez-voussur le manteau que je vais tendre etdont nous ramnerons un pan sur nos yeux. Latte voustourne, n'est-ce pas, et il voussemblequela terre fuit sousvospieds?Tenez-vousferme et neregardez pas. Le vertige cesse: nous y sommes.Levez-vouset ouvrez les yeux. mais gardez-vousbien de faire aucunsigne ni de prononcer aucuneparolede christianisme. Noussommesdans un pay-sagede SalvatorRosa.C'estun dsert tourmentquisemblesereposeraprsta tempte. La1uiineparatplus au ciel; mais ne voyez-vouspasdanser despetites toilesdansla bruyre?N'entendez-vouspasvoler autour de vous des oiseauxgigantesques quisembtentenpassantmurmurer des paroles tranges"Z

  • (NTRODUCTtON. /3

    Approchons en silence de