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Med Pal 2004; 3: 268-271 © Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés À LIRE, VOIR, ÉCOUTER Médecine palliative 268 N° 5 – Octobre 2004 Sous la direction de Marcel-Louis Viallard Tout ce qui présente un intérêt dans la réflexion sur les soins continus, palliatifs, sur la souffrance et la mort dans la littérature – notamment roman, essai, biographie, théâtre –, dans la musique, la peinture, le cinéma… jusqu’aux nouveaux médias trouve ici sa place. Vous pouvez adresser vos textes à Marcel-Louis Viallard : [email protected] Livres médicaux ou paramédicaux Le médecin, le malade et la douleur Collectif sous la direction de Patrice Queneau et Gérard Ostermann Éditions Masson, 2004, ISBN 2.294.01427.8 (51 ) Il s’agit de la quatrième édition de l’excel- lent ouvrage initié par Patrice Queneau et destiné aussi bien aux étudiants en méde- cine ou des instituts de soins infirmiers qu’aux praticiens ou infirmiers qui s’inté- ressent à la prise en charge de la douleur des patients qui leur font confiance. Au-delà de l’expression physiopathologi- que et clinique des différentes douleurs, on bénéficie dans cet ouvrage d’une partie consacrée à l’approche du patient. Une autre partie est consacrée aux moyens thérapeutiques ainsi qu’à la mise en œu- vre de ces moyens. Au-delà des expressions physiques de la douleur, les auteurs nous montrent que celle-ci peut s’exprimer comme elle peut s’enraciner non seulement dans le corps mais aussi dans l’esprit. Cet ouvrage est une référence à posséder absolument. Éthique – Philosophie Regarder la mort en face. Réflexions sur le don d’organe pour la recherche Danielle Seilhean L’Harmattan, 2003, ISBN 2-7475-3993-8 (22 ) Ce livre reprend la réflexion menée par une médecin chercheuse sur la question du don d’organe pour la recherche. Il ne s’agit pas d’un essai philosophique en tant que tel. Cet ouvrage a le mérite de nous montrer comment un chercheur mène sa réflexion éthique. Ce travail est à lire car il est d’une qualité indéniable. Une nouvelle preuve que la science ne s’épanouit qu’avec conscience. L’auteur a été lauréate 2002 du prix d’Ethique Médicale Maurice Rapin. Conseils spirituels Maître Eckhart. Traduit par Wolfgang Wackernagel Éditions Rivages poche (Seuil). Collection petite bibliothèque, 2003, ISBN 2-7436-1064-6 (6,85 ) Voici le premier ouvrage de Maître Ec- khart, une référence de l’Humanisme. Il a rédigé ce texte du temps où il était dans son couvent d’origine entre 1294 et 1298. L’éditeur présente, à raison, ce texte comme une bonne introduction à la pen- sée de Maître Eckhart. Ce penseur a connu le procès en hérésie car il osait penser au- delà de ce qu’il était permis, parce qu’il croyait aussi en l’homme, en la pensée, en la sagesse. Ceux qui connaissent une cer- taine pensée bouddhiste se diront qu’il y a comme une parenté avec la pensée de Maître Eckhart. Audacieux pour son épo- que, convaincu que du savoir et de la ré- flexion venait la sagesse et découlait l’hu- manité, cet auteur fondamental est encore trop méconnu. À ne pas manquer. Justice sans limites. Le défi de l’éthique dans une économie mondialisée Serge Latouche Éditions Fayard, 2003, ISBN 2-213-61499-7 (20 ) L’intérêt de cet ouvrage est de nous mon- trer comment déconstruire (donc accéder à son sens plein) le discours économique. Cette déconstruction permet, elle, de met- tre en évidence l’amoralité du discours purement économique, voire même son immoralité. Le juste ne semble pas une valeur de l’économique, du moins tel qu’il est énoncé dans la fameuse société mon- dialisée. La globalisation aurait fait perdre l’essentiel. Le global aurait absorbé l’es- sence même des valeurs. La valeur du glo- bal, de la globalité peut-elle être encore pensée autrement que comme nulle, dés- humanisée, hors du souci de l’autre. En- core une excellente réflexion sur le lien entre le superficiel et l’essentiel, entre l’être et le paraître. Ce travail mérite toute notre attention. L’auteur est un spécialiste de l’épistémo- logie des sciences sociales. Nietzsche et la vie spirituelle Ivan Broisson Éditions L’Harmattan, Collection Ouverture philosophique, 2003, ISBN 2-7475-4449-4 (16,80 ) Le pari de l’auteur est de nous démontrer que Nietzsche n’était pas seulement néga- tiviste. Sa pensée avait un versant positif. Nietzsche revisité comme un mystique, un ascète nous proposant un nouveau mode de vie au sens repensé, avec une autre symbolique. Il est si rare que l’on nous présente ce penseur comme un spiritualiste. Cet ouvrage est aisé à lire grâce à une écriture fluide et sans fioriture. L’auteur nous amène non seulement à redécouvrir mais aussi à repenser l’œuvre et le destin d’un de ses personnages mythiques qui ont marqué la philosophie occidentale.

Éthique – Philosophie

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Med Pal 2004; 3: 268-271

© Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés

À L I R E , V O I R , É C O U T E R

Médecine palliative

268

N° 5 – Octobre 2004

Sous la direction de Marcel-Louis Viallard

Tout ce qui présente un intérêt dans la réflexion sur les soins continus, palliatifs, sur la souffrance et la mort dans la littérature – notamment roman, essai, biographie, théâtre –, dans la musique, la peinture, le cinéma… jusqu’aux nouveaux médias trouve ici sa place.Vous pouvez adresser vos textes à Marcel-Louis Viallard : [email protected]

Livres médicaux ou paramédicaux

L

e médecin, le malade et la douleur

Collectif sous la direction de Patrice Queneau

et Gérard Ostermann

Éditions Masson, 2004, ISBN 2.294.01427.8

(51

)

Il s’agit de la quatrième édition de l’excel-lent ouvrage initié par Patrice Queneau et destiné aussi bien aux étudiants en méde-cine ou des instituts de soins infirmiers qu’aux praticiens ou infirmiers qui s’inté-ressent à la prise en charge de la douleur des patients qui leur font confiance.Au-delà de l’expression physiopathologi-que et clinique des différentes douleurs, on bénéficie dans cet ouvrage d’une partie consacrée à l’approche du patient. Une autre partie est consacrée aux moyens thérapeutiques ainsi qu’à la mise en œu-vre de ces moyens.Au-delà des expressions physiques de la douleur, les auteurs nous montrent que celle-ci peut s’exprimer comme elle peut s’enraciner non seulement dans le corps mais aussi dans l’esprit.Cet ouvrage est une référence à posséder absolument.

Éthique – Philosophie

R

egarder la mort en face. Réflexions sur le don d’organe pour la recherche

Danielle Seilhean

L’Harmattan, 2003, ISBN 2-7475-3993-8

(22

)

Ce livre reprend la réflexion menée par une médecin chercheuse sur la question du don d’organe pour la recherche. Il ne s’agit pas d’un essai philosophique en tant que tel. Cet ouvrage a le mérite de nous montrer comment un chercheur mène sa réflexion éthique.

Ce travail est à lire car il est d’une qualité indéniable. Une nouvelle preuve que la science ne s’épanouit qu’avec conscience. L’auteur a été lauréate 2002 du prix d’Ethique Médicale Maurice Rapin.

C

onseils spirituels

Maître Eckhart. Traduit par Wolfgang

Wackernagel

Éditions Rivages poche (Seuil). Collection petite

bibliothèque, 2003, ISBN 2-7436-1064-6

(6,85

)

Voici le premier ouvrage de Maître Ec-khart, une référence de l’Humanisme. Il a rédigé ce texte du temps où il était dans son couvent d’origine entre 1294 et 1298.

L’éditeur présente, à raison, ce texte comme une bonne introduction à la pen-sée de Maître Eckhart. Ce penseur a connu le procès en hérésie car il osait penser au-delà de ce qu’il était permis, parce qu’il croyait aussi en l’homme, en la pensée, en la sagesse. Ceux qui connaissent une cer-taine pensée bouddhiste se diront qu’il y a comme une parenté avec la pensée de Maître Eckhart. Audacieux pour son épo-que, convaincu que du savoir et de la ré-flexion venait la sagesse et découlait l’hu-

manité, cet auteur fondamental est encore trop méconnu.

À ne pas manquer.

J

ustice sans limites. Le défi de l’éthique dans une économie mondialisée

Serge Latouche

Éditions Fayard, 2003, ISBN 2-213-61499-7

(20

)

L’intérêt de cet ouvrage est de nous mon-trer comment déconstruire (donc accéder à son sens plein) le discours économique. Cette déconstruction permet, elle, de met-tre en évidence l’amoralité du discours purement économique, voire même son immoralité. Le juste ne semble pas une valeur de l’économique, du moins tel qu’il est énoncé dans la fameuse société mon-dialisée. La globalisation aurait fait perdre l’essentiel. Le global aurait absorbé l’es-sence même des valeurs. La valeur du glo-bal, de la globalité peut-elle être encore pensée autrement que comme nulle, dés-humanisée, hors du souci de l’autre. En-core une excellente réflexion sur le lien entre le superficiel et l’essentiel, entre l’être et le paraître.

Ce travail mérite toute notre attention. L’auteur est un spécialiste de l’épistémo-logie des sciences sociales.

N

ietzsche et la vie spirituelle

Ivan Broisson

Éditions L’Harmattan, Collection Ouverture

philosophique, 2003, ISBN 2-7475-4449-4

(16,80

)

Le pari de l’auteur est de nous démontrer que Nietzsche n’était pas seulement néga-tiviste. Sa pensée avait un versant positif. Nietzsche revisité comme un mystique, un ascète nous proposant un nouveau mode de vie au sens repensé, avec une autre symbolique.

Il est si rare que l’on nous présente ce penseur comme un spiritualiste. Cet ouvrage est aisé à lire grâce à une écriture fluide et sans fioriture. L’auteur nous amène non seulement à redécouvrir mais aussi à repenser l’œuvre et le destin d’un de ses personnages mythiques qui ont marqué la philosophie occidentale.

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À L I R E , V O I R , É C O U T E R

Med Pal 2004; 3: 268-271

© Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés

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www.e2med.com/mp

Cet ouvrage s’adresse aussi bien aux con-naisseurs de Nietzsche qu’aux néophytes.

L

e métier d’homme

Alexandre Jollien

Éditions Seuil, 2004, ISBN 2.02.052606.9 (9

)

Un homme, touché par les séquelles d’une souffrance néonatale nous prouve, avec une intelligence, une sensibilité et une érudition exceptionnelles, que, malgré un handicap lourd et difficile parfois à sur-monter au quotidien, la pensée, la pensée de soi tel que je suis (et non tel que je parais) rendent accessible tous les possi-bles.L’auteur est un homme accompli malgré les difficultés qu’il a fallu surmonter. Sa pensée est celle d’un grand philosophe. L’auteur est maître. Maître de lui, maître de son sens, en nous amenant à relire autrement un Nietzsche dont la pensée n’est pas, pour lui, brutalité, immoralité et inhumanité mais douceur, morale et hu-manité. De son expérience traversée à la fois par la souffrance, la douleur et la douceur d’un espoir indéfectible, d’une volonté et d’une liberté sans complexe, il nous offre l’objectivité d’une nouvelle lecture d’un philosophe résumé trop sou-vent à ce que le prisme de notre « bien al-ler », de notre « banale normalité » et de peut-être notre refus à plonger trop pro-fondément dans l’abîme de la différence. La lecture du texte est captivante car le style est aussi fluide que précis. Alexan-dre Jollien nous permet aussi d’appréhen-der autrement notre rapport à autrui. Ce magnifique essai sur l’être homme en tout lieu comme en toutes circonstances est à lire absolument et à relire comme à médi-ter.Le lecteur pourra aussi se plonger dans l’autre livre d’Alexandre Jollien « Eloge de la faiblesse » (éditions du cerf) pour bé-néficier d’un autre grand moment de phi-losophie accessible à tous.Quand on a lu ces textes, que l’on ait ren-contré l’auteur ou non, notre regard sur l’autre bénéficie d’une large ouverture lu-mineuse sur les relations de soi à l’étran-ger (l’étranger comme totalement autre que soi mais de même essence). Une con-fiance en l’homme, libre, construisant à

chaque instant son sens comme sa vie, nous est ainsi accessible à penser comme à vivre.

L’

homme et la vérité

Xavier Zubiri

Éditions L’Harmattan, Collection « Ouverture

philosophique, 2004,

ISBN 2-7475-4891-0 (15,25

)

Xavier Zubiri, philosophe espagnol peu connu dans le monde francophone, nous est enfin accessible grâce à l’effort des éditions L’Harmattan qui met à notre dis-position dans le même ouvrage le texte de Zubiri sur la relation de l’homme à la vé-rité et un texte de Juan A Nicolas qui est une synthèse de la théorie zubirienne de la vérité.L’ouvrage, bien que technique, est parfai-tement accessible à un large public. Le thème traité dans cet excellent ouvrage intéressera sans doute tous ceux d’entre nous qui se font un devoir d’être dans une relation de vérité avec celui qui souffre ou qui meure comme avec son entourage.La question de la difficile concordance entre vérité et réalité, entre la vérité de soi et celle du non-soi se pose régulièrement. Selon Zubiri «

le problème de l’ancrage de l’homme et de la vérité se trouve dans quelque chose de plus radical et de pre-mier qui est précisément la réalité »

. Voilà qui pose parfaitement la problématique.L’auteur nous propose trois étapes : 1) nous mettre d’accord sur ce qu’il en est de la vérité, 2) voir quelles sont les dimen-sions ou les formes dans lesquelles la réa-lité est possédée par l’homme, sous forme de vérité, 3) discerner quelles sont les structures humaines (strictement humai-nes) qui dans l’homme sont déterminées par la possession de la vérité. La réflexion est fort érudite et passe par une interro-gation des penseurs classiques de Parmé-nide à Heidegger.Le texte de Zubiri date des années soixante et la post-face de Nicolas date de 2001.À lire absolument.

Littérature

L

a Mire

Alexandre Lacroix

Éditions Flammarion, 2003, ISBN 2-08-

068345-4 (17

)

L’auteur nous narre l’aventure de Ma-thieu, leader d’un groupe de jeunes révo-lutionnaires qui se sont regroupés dans un réseau appelé la Mire. Leurs motiva-tions sont à la hauteur de leurs actions. Leur but ? Se libérer de la fascisation du culte de l’image. Ils cassent de l’image comme certains cassent d’autres minori-tés, d’autres différences ou d’autres choses qui dérangent leur minable petit confort bourgeois bohème.Une belle écriture, un roman engagé comme on en voit trop peu ces temps-ci. À ne pas manquer.

L’

alchimiste assassiné. Petits meurtres londoniens

Fidelis Morgan

Éditions JC Lattès, 2003, ISBN 2-7096-2242-4

(18

)

Londres, fin du

XVII

e

siècle, Anastasia tra-verse une période difficile. Elle est la maî-tresse du roi Charles. Malgré tout cela, malgré son appartenance à l’aristocratie, elle se retrouve en prison et se retrouve contrainte à devenir journaliste dans une gazette à scandales. Voilà pour le décor initial. L’intrigue, il faut absolument que le lecteur la découvre, tant elle est origi-nale et fort bien écrite.Ce texte est une comédie audacieuse, amusante et passionnante. Comme quoi on peut concilier l’intrigue policière et la vraie littérature. À découvrir pour se dis-traire.

C

e sourire-là

Alain Jessua

Éditions JC Lattès, 2003, ISBN 2-7096-2456-7

(15

)

C’est le roman de la quête de sérénité mo-derne. Une écriture légère et agréable, une intrigue bien construite qui évoque un scénario de film possible dès le début. De quoi rêver un peu sans perdre ni son temps ni son souci de perpétuer une envie de toujours donner sens.