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ENTOMOPH.'~GA, 19 (Z), I974, 85"95 t~TUDE DE L'ACTION DE BACILLUS THURINGIENSIS CHEZ LE SCORPION BUTHUS OCCITANUS PAH G. I~[O REL Laboratoire de Patholo~ie Compar@e et Laboratoire de Zoologie II Universit@ des Sciences et Techniques du Languedoc, 3~000 Montpellier, France Le scorpion Buthus occitanus (A,~oREuX) infect6 per os @limine Bacillus thur~n- gicnsis (BEnMNEn) dans ses d6jections d'une mani~re progressive et en relation avec la prise de nourriture: Apr~s inoculation dans l'h6mocoele les germes peuvent persister longtempa dans l'h6molymphe sans que les animaux pr@sentent des symptSmes patholo~ques. Seules les doses tr~s 61ev6es eonduiseut k une septic6mie. La DL 50, sup6rieure h 2,5 millions de bact6ries, montre la tr~s grande r6sistanee de r Arachnides h cette infection baet@rienne Peu de maladies d'origine mierobienne sont connues chez les Arachnides. Elles ont 6t6 signal6es pour la plupart chez les Acariens. Chez ceux-ci, quelques champignons dont Rhinotrychum dipauperatum (CHARLES, 1940), Hirsutella thompsoni (FlscHEH, 1950), Beauveria gIobuli/era (SAMsIN.~KOVA, 1957) et Botrytis cinerea (BoJczlEw ~.~ RlZWANOW, 1960) ainsi que deux virus isol6s par SMITH, HILLS, 3[UNGEH & GILMORE (1959) et par STEINHAUS (1959) rentrent dans la courte liste des agents pathog~nes. L'ordre des scorpions, montre encore moins de maladies caus@es par des micro-organismes. Seule l'existence de quelques mycoses dues principalement k des Aspergillus a @t6 signal@e par GYSlN t~5 LE COHROLLER (1969). KOWALEVSKY (1894 a, b; 1897) k la suite d'infections baet@riennes a remarqu6 un r61e de la glande lymphoide de ces arachnides dans la d@fense de l'organisme. Les scorpions sont des pr@dateurs qui s'attaquent s la plupart des arthropodes terrestres et surtout aux inseetes, ce qui nous a conduit k ehoisir une des baet@ries entomopathog~nes les plus fr@quentes: Bacillus thuringiensis BERLINER pour r@aliser des infections exp~ri- mentales chez Buthus occitanus A~OHEUX. Par des infections par vole buccale nous avons cherch6 k'connaitre la virulence naturelle de la bact@rie pour le scorpion et k suivre l'61imination des germes dans le tube digestif et dans les d6jections. Par inoculation dans l'h@mocoele, nous avons @tudi6 la virulence potenticlle des germes et les variations d'@volution de la maladie selon l'importance des doses inocul~es.

Étude de l'action de Bacillus thuringiensis chez le scorpion Buthus occitanus

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Page 1: Étude de l'action de  Bacillus thuringiensis  chez le scorpion  Buthus occitanus

ENTOMOPH.'~GA, 19 (Z), I974, 85"95

t~TUDE DE L'ACTION DE BACILLUS THURINGIENSIS CHEZ LE SCORPION BUTHUS OCCITANUS

PAH

G. I~[O REL

Laboratoire de Patholo~ie Compar@e et Laboratoire de Zoologie I I Universit@ des Sciences et Techniques du Languedoc, 3~000 Montpellier, France

Le scorpion Buthus occitanus (A,~oREuX) infect6 per os @limine Bacillus thur~n- gicnsis (BEnMNEn) dans ses d6jections d'une mani~re progressive et en relation avec la prise de nourriture:

Apr~s inoculation dans l'h6mocoele les germes peuvent persister longtempa dans l'h6molymphe sans que les animaux pr@sentent des symptSmes patholo~ques. Seules les doses tr~s 61ev6es eonduiseut k une septic6mie. La DL 50, sup6rieure h 2,5 millions de bact6ries, montre la tr~s grande r6sistanee de r Arachnides h cette infection baet@rienne

Peu de maladies d'origine mierobienne sont connues chez les Arachnides. Elles ont 6t6 signal6es pour la plupart chez les Acariens. Chez ceux-ci, quelques champignons dont Rhinotrychum dipauperatum (CHARLES, 1940), Hirsutella thompsoni (FlscHEH, 1950), Beauveria g I o b u l i / e r a ( S A M s I N . ~ K O V A , 1957) et Botrytis cinerea (BoJczlEw ~.~ RlZWANOW, 1960) ainsi que deux virus isol6s par SMITH, HILLS, 3[UNGEH & GILMORE (1959) et par STEINHAUS (1959) rentrent dans la courte liste des agents pathog~nes. L'ordre des scorpions, montre encore moins de maladies caus@es par des micro-organismes. Seule l'existence de quelques mycoses dues principalement k des Aspergillus a @t6 signal@e par GYSlN t~5 LE COHROLLER (1969). KOWALEVSKY (1894 a, b; 1897) k la suite d'infections baet@riennes a remarqu6 un r61e de la glande lymphoide de ces arachnides dans la d@fense de l'organisme.

Les scorpions sont des pr@dateurs qui s'attaquent s la plupart des arthropodes terrestres et surtout aux inseetes, ce qui nous a conduit k ehoisir une des baet@ries entomopathog~nes les plus fr@quentes: Bacillus thuringiensis BERLINER pour r@aliser des infections exp~ri- mentales chez Buthus occitanus A~OHEUX. Par des infections par vole buccale nous avons cherch6 k 'connai t re la virulence naturelle de la bact@rie pour le scorpion et k suivre l'61imination des germes dans le tube digestif et dans les d6jections. Par inoculation dans l'h@mocoele, nous avons @tudi6 la virulence potenticlle des germes et les variations d'@volution de la maladie selon l ' importance des doses inocul~es.

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86 G..~o RJ~L

Mat6riel et m6thodes

R6colt~s dans l 'H6rault, les individus adultes de l'esp~ee Buthus occitanus AMOREUX s. sp. occitanus AMOREUX 1789 sont 61eves dans des boltel individuelles. ] ) u r a n t un tools, avant de constituer les lots servant aux essais, des examens de l 'h~molymphe et des excrdments sont rdalis~s afin de v~rifier l 'absence des bact~ries qui seront utitis~es lors des contaminations exp~rimentales.

La bactdrie utilis~e, Bacillus thuringiensis var. thuringiensis pro- vient de la Station de Recherches Cytopathologiques de Saint-Christol (souche 965). Cultiv~es sur gdlose nutri t ive Oxoid pour la conservation de la souche, les bact~ries sont repiqu~es en bouillon nutri t if avant les inoculations.

L e s bouillons de culture ~g~s de 18 heures qui consti tuent les suspensions m~res, sont dilu~s au dixi~me dans du liquide physiolo- glque stdrile avant d 'e t re inocul~s aux scorpions. Le titre des suspen- sions initiales est d~termin~ par utilisation de la m~thode des plaques de comptage, apr~s estimation du hombre approximatif des bact~ries

l 'h~matim~tre de Thoma. La concentration en germes de l 'hdmolymphe, ~ la suite des

infections est d~termin~e ~galement par la m~thode des plaques de comptage apr~s pr~l~vement au niveau des articulations des appen- dices et au niveau des pleurites du m~sosoma.

Lots de la recherche de B. thuringiensis dans les d~jections des scorpions, les excrdments sont recueillis t o u s l e s jours et servent l 'ensemencement d 'un bouillon nutritif. Apr~s 24 heures, les cultures sont repiqu~es sur milieux solides et purifi~es. B. thuringiensis est recherch~ au microscope sur les frottis des cultures pures agnes de 48 heures. L 'appari t ion des cristaux de (( toxine figurde >) lors de la sporulation indique la prdsence de la bact~rie recherch~e. Lors de l 'dtude de l 'h~molymphe ou du contenu intestinal, les dchantillons sont ensemencds directement sur g~lose nutritive.

CONTAMINATIONS

In/ectioqz per os. Les grillons Gryllus domesticus L., qui constituent la base de l'alimentation des scorpions, re~oivent par inoculation des quantit6s extr~mement 6lev6es de germes, les inoculums renfermant de 107 k 2.107 baet6ries.

Au eours des repas infectantg, les deux derniers segments du m6tasoma ainsi que la glande venimeuse des scorpions sont gliss6s dans un tube de verre afin d'6viter la contamination de la r6gion anale. Deux lots de 22 et un lot de 23 scorpions ont 6t6 eonstitu6s pour l'6tude de l'action des germes par voie bueeale. A la suite du

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B. thuringiensis suR Buthus occitanus 87

repas infectant, 45 de ces scorpions ont dtd nourris simultandment de grillons non contamin~s af in de voir quelle pouvait ~tre Faction de la prise de nourriture sur l'~limination des germes.

La prdsence des bactdries dans ]e tube digestif a ~td recherch~e apr~s dissection et ensemencement du contenu intestinal sur milieu nutritif. Les prdlbvements ont dt~ faits ~ 4 niveaux : dans le thora- cent~ron, dans le chylent~ron antdrieur, le chylentdron postdrieur et dans l ' intestinum, ~ 2 heures, 12 heures, 24 heures apr~s le repas infectant et au bout de 30 jours. A chaque fois dix scorpions ont ~t~ diss~quds.

In/ection par inoculation. Les suspensions bactdriennes sont ino- cul~es sous le 5 e tergite du m~sosoma ~ l'aide d 'un micro-inoculateur constitug par une seringue ~ insuline dont le piston est ddplacd par le mouvement d 'un palmer. Un volume de 50 -4- 1 ~1 des suspensions infectantes est inocul~ ~ chacun des 10 individus qui constituent chacun des lots. Trois lots de 20 scorpions recevant 50 -~- 1 ~zl de liquide physiologique sterile constituent les lots t~moins.

Pour la recherche de la dose l~thale 50, des doses ddcimales des suspensions t i t rant respectivement 50. 107, 32. 107 et 16. 10 s bact~ries par millilitre ont dt~ utilisdes.

L'~volution de la bact~rdmie a dtd suivie sur 5 lots de 10 scorpions : lots I, II , I I I , IV, V, qui regoivent respectivement 8.104, 8.105, 1,6.10 ~, 8.10 ~ et 16. l0 s bact~ries. Un volume d'h~molymphe de l'ordre d 'une dizaine de microlitres est pr~levd ~ chaque individu aprbs 1, 12, 48 et 72 heures et apr~s 4, 8, 16, 32 et 64 jours. La bact~r~mie est calcut~e aprbs comptage sur plaques.

R~sultats

INFECTION PAR VOIE ]3UCCAL:E

L'ingestion d'une nourriture fortement contaminde (10 ~ 20 mil- lions de germes) ne d~clenche aucun trouble chez les scorpions. A la suite du repas leur activit6 est normale et aucun arr~t de la prise de nourriture ne peut ~tre not~.

L'ensemencement des contenus intestinaux permet de retrouver tr~s rapidement les germes dans l'ensemble du tube digestif. Au bout de 2 heures les bactdries son~: prdsentes dans la totalit~ des pr~lbve- ments fairs aux cliff'rents niveaux. Apr~s 12 heures, on note la dis- parition des bact~ries du thoracent~ron et de la r~gion antdrieure du chylent~ron chez 40 % des individus dissdqu~s, et, ~ partir de 24 heures, les bact~ries ne sont retrouv~es que dans la r~gion post~rieure du

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8 8 G. M O R E L

chylentdron et dans l ' intestinum. Les pr~lhvements effectu~s apr~s 4 semaines pour reehereher B. thuringiensis donnent toujours des r~sultats n~gatifs.

Chez un certain nombre d'individus, les baet~ries, survivant au transit intestinal, ont pu ~tre isotdes A partir des excrements. 54 ~ des scorpions (35 sur 67) ont montr~, ou laiss~ passer au moins une fois, les batteries dans leurs ddjections. Les p~riodes individuelles d'exerdtion de ~5 scorpions s o n t report~es sur la figure 1. Le nombre des d~jections eontamin~es dfierolt progressivement; il passe de 24 au eours de la premihre semaine s 8 au eours de la deuxi~me, puis A 2 et devient nul A partir de la quatri~me. D'autre part, eette ~limination n'est pas continue, une s~rie d'exer~ments stdriles ou ne renfermant pas la baetdrie ing~rde pouvant preceder une d6jection contamin~e.

Si l 'on eonsid~re les scorpions qui laisseront passer au moins une fois B. thuringiensis, 50 ~ d'entre eux le font au tours de la premiere excr6tion qui suit le repas infeetant. Le nombre de ces scorpions poten- tiellement diss~minateurs de baet~ries d~erolt rapidement en fonetion du temps. La prise de nourriture d~elenehe une excretion importante (fig. 2) et sembte favoriser l 'dlimination des germes. En effet, le nombre des scorpions diss~minateurs de germes passe de 26 A 18 dans les trois jours qui suivent le repas I, de 18 A 9 au eours des 3 jours qui suivent le repas 2 et de 7 ~ 2 A la suite de la 3 e prise de nourriture.

INFECTION PAR I N O C U L A T I O N

Apr~s inoculation de 15 millions de bact~ries, les animaux montrent imm~diatement un refus de s 'alimenter et au bout de quelques heurcs prdsentent une forte baisse d'activit~. Vers la 24 e heure, les scorpions les plus atteints se d~placent difficilement et ne montrent plus la posture caract~ristique de repos. Le m~tasoma repose dans le prolon- gement du m~soma au lieu d'etre dirig~ vers l 'avant de l 'animal. Dans les heures qui suivent, la paralysie est totale, il n 'y a plus de r@onse aux excitations. Le seul signe de vie est le l~ger tremblement qui anime l'extr~mit~ des pattes. La totalit~ des individus pr~sente ces sympt6mes et meurt dans les 60 heures qui suivent l'injection. 3 meurent entre 18 et 24 heures, 5 entre 24 et 36 heures et les deux autres entre 48 et 60 heures. L'emploi de doses ldg~rement plus faibles permet de porter A 96 heures la dur~e maximum d'~volution de la maladie.

I1 est impossible de relever des sympt6mes ext~rieurs de maladie chez les animaux qui survivent aux inoculations; les sympt6mes n'appa- raissent qu'apr~s inoculation de plusieurs millions de bactdries et precedent toujours la mort.

Nous avons cherch~ A calculer la dose l~thale 50 de B. thuringiensis pour cet arachnide en utilisant les doses d~cimales de suspensions t i t rant respectivement 50. 107, 32. 107 et 16. l0 s bactdries par millilitre.

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B. thuringiensis s u ~ Buthus occitanus

S C O R P I O N S N ~

89

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Fic . 1. P6riodes individuelles d'exer6tion de 45 scorpions au cours des 3 semaines qui suivent le repas infectant (R 1); R 2 -- R 3 : repas sains; -k d6jections contenant B. thuringiensis; --d6jections st6riles ou ne contenant pas la bact6rie ing~r~e (seuls sont num6rot~s les scorpions chez qui la recherche de B. thuringiensis a donn6 une r~ponse positive.

L e s r 6 s u l t a t s o b t e n u s s o n t r e p o r t 6 s s u r le t a b l e a u 1 e t p e r m e t t e n t d e e o n s t a t e r u n e a b s e n c e de doses p o u r l e sque l l e s la m o r t a l i t 6 se s i t u e e n t r e 0 e t 100 %. L a D L 50 p e u t s e u l e m e n t ~ t re s i tu6e e n t r e 2 500 000 e t 8 m i l l i o n s de b a e t 6 r i e s .

A f i n de e o m p a r e r e e t t e v a l e u r a u x DL 50 o b t e n u e s ehez les i n see t e s , n o u s a v o n s d o n e ea l eu l6 l a D L 50 p o u r le L 6 p i d o p t ~ r e Bombyx mori L.. E l l e e s t de 0,5 b a e t 6 r i e p o u r des l a r v e s d u t r o i s i ~ m e s t a d e d e p o i d s m o y e n 0,98 g.

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90 @. ~OREL

TABLEAU 1

Mortalitd de B. occitanus selon la dose de B. thuringiensls

N o m b r e m o y e n de bact6ries inocul6es par scorpion

N o m b r e d ' ind iv idus Pourcen tage de inocul6s mortal i t6

80 000000 10 1 0 0 % 25 000 000 10 1 0 0 % 16 000 000 1 0 + 10" 1 0 0 % -- 1 0 0 % *

8 0 0 0 0 0 0 1 0 + 1 0 " 8 0 % - - 9 0 % * 2 500 000 10 0 1 600 000 1 0 + 1 0 " 0 - - 0*

800000 1 0 + 1 0 " 0 - - 0* 250 000 10 0 160 000 10 0

80000 1 0 + 1 0 " 0 - - 0*

* Ind iv idus chez qui a 6t6 suivie l '6volut ion de la bactdr6mie.

L'dvolution de la maladie a dtd suivie en recherchant dans l'hdmo- lymphe la bactdrie apr~s inoculation. La figure 3, r@alisde en por tant les moyennes des concentrations trouv@es en fonction du temps, permet de suivre les divers types d'dvolution de la maladie.

Le volume sanguin d 'un Buthidae (Buthus quinquestriatus I-I. E.) reprdsente de 10 & 20 % du volume total du scorpion (~L~H~ous & SAID, 1960). Sur cette base, le volume sanguin des scorpions inocul6s (poids moyen : 2 g) varie entre 180 et 360 ~1. Les inoculums utilisds correspondent donc& des titres initiaux (bact6ries/~l) de 200 k 350 pour les scorpions du lot I, de 2. 103 k 3,5. 103 pour le lot II, de 4. 103 7. 103 pour le lot I I I , de 20. 103 k 35. 103 pour le lot IV et de 40. 103

70.103 pour ceux du lot V.

Dans t ous l e s cas, on constate, 1 heure apr~s l'inoculation, une bact@rdmie beaucoup plus faible que la bact6rdmie th@orique (de l0 s ~ 10 bactdries/~l selon les lots). La ddcroissance du hombre des germes est r6guli~re dans les lots I e t I I et conduit ~ la disparition des bactdries, respectivement entre 24 et 48 heures et entre 8 et 16 jours (types A et B).

Apr~s l'emploi des doses ldthales (lots IV et V), apr~s une premi&re phase de disparition des bactdries, on assiste ~ un accroissement du nombre des germes qui conduit, lors de la paralysie des scorpions, l 'apparition d 'un dtat septicdmique (plus de 10 000 bactdries par ~1).

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B. thuringiensis su~ Buthus occitanus 91

La phase de d~eroissanee dure de 12 s 2r heures selon les individus et la phase de multiplication apparente des bactdries de 2~ heures (type D) ~ ~8 heures (type E). Seul un individu du lot IV survit, la teneur en germe de l 'hdmolymphe devient faible h partir de 2~ heures ( ~ 20) et diminue peu ~ peu pour devenir nulle au cours du 2 e mois (type C).

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20:

10_

\,n

R1 ~o f ~s ~o f :~s R3 R4

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30

20

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FIG. 2. Re la t ions en t re la prise de nourr i ture , l ' excrdt ion et la d isseminat ion des germes. N ---- N o m b r e to t a l d ' exc r6ments recueillis ~ pa r t i r de 4o5 scorp ions ; n = N o m b r e de scorpions po ten t i e l l ement d iss~minateurs de B. thuringiensis ( . . . . . . ); R I = Repus in fec tan t ; R 2-3-4 = Repas sains.

Chez les individus recevant la dose 16ghrement subl6thale (lot III) , le nombre de germes est d'une vingtaine de bactdries par ~xl d~s la premiere heure et diminue trhs lentement pour devenir nul au cours du 2 e mois (type C). Dans ce groupe, il faut at tendre la fin du premier mois pour que les bact6ries disparaissent chez l 'un des scorpions.

On ne constate pas de diff6rence notable selon le niveau du pr~- l~vement des dchantillons d 'hdmolymphe; que ce soit aux articulations des appendices ou au niveau des pleurites du m~sosoma, le hombre des germes retrouv~s reste identique.

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92 G. MOREL

Discussion et conclusion

Les bact~ries ing~r~es paraissent incapables de se multiplier dans le tube digestif et semblent ~tre ddtruites rapidement dans la r~gion antdrieure de l'intestin. La survle des germes au transit intestinal chez un certain nombre d'individus, permet cependant de supposer une certaine r~sistance de cette bactdrie, sans doute li~e aux formes sporul~es. La survie de B. thuringiensis est, chez quelques individus, beaucoup plus importante que celle constatde lors de l 'dtude du passage des bact~ries chez les insectes d~tritivores (BEaaOI.~-, 1966; CLOT & V~GO, 1970). Le passage des bact~ries dans les excrements est irr~gu- lier. Les prises de nourriture doivent, d 'une par t favoriser l '~vacuation des bact~ries dans les excrements et, d 'autre par t entralner par cette nouvelle s~cr~tion des sucs digestifs, une destruction des bact6ries survivantes.

Par inoculation, les doses 16thales sont tr~s 6levdes, la septic6mie ne se d6clarant qu'apr~s un apport de plus de 2. 106 germes. La DL 50, sup6rieure /~ 2,5. 108, contraste fortement avec la DL 50 de 0,5 bac- t6ries que nous avons obtenue chez B. mori L. ou celle de 27 ~ 30 spores trouv6e par IG~OFFO (1962) chez Pectinophora gossypiella (S.~uNDERS).

BUCHER (1960) fixe s 10 000 la limite supdrieure des DL 50, limite au-dessus de laquelle les bact6ries ne peuvent plus ~tre consi- d6r6es comme pathog~nes potentielles. B. thuringiensis n'est donc pas pathog~ne pour le scorpion Buthus occitanus.

La chute brusque de la bactdr6mie indique un blocage des bact6ries dans certaines r6gions du corps de l'animal. Apr~s emploi de doses 16thales, un 6tat septic6mique apparal t au bout de 24 ~ 48 heures selon les individus et fait suite ~ une p6riode oh les rdactions de d6fense l 'emportent sur Faction pathog~ne des bact6ries.

L'emploi des doses proches des doses 16thales 50 montre l 'existence d 'une saturation des r6actions de ddfense du scorpion chez qui l 'on rencontre des bactdries viables pendant plus d 'un mois. Une r6gula- tion semble intervenir pour maintenir le nombre de germes viables /~ une vingtaine par ~l tout au long de ce temps. Cette tol6rance s la pr6sence darts l 'hdmolymphe de B. thuringiensis ainsi que les r6actions cellulaires (KoWALEVSKY, 1894 a, b; 1897) et humorales (GYsIN & BRAHMI, 1971) importantes, conf~ren.t s cet animal sa rdsistance excep- tionnelle aux infections bact6riennes.

Dans le domaine des agressions de type biologique, le scorpion montre donc une r6sistance extr~mement 61ev6e qui rejoint l 'absence de sensibilit6 pr6sent6e par cet arachnide ~ d'autres agressions de

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B. thuringiensis s u ~ Buthus occitanus 93

RE ~ J

0- 17. ~ " 24' 48' 721 96' h e u r e s Iog.C

TYPE B 0 (411 JbUR$) L_

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]og.C J

2.

1. TYPE- E i

0 11= 12 j 241 481 72 I' 961 heures

FIG. 3. Types d '6volut ion de la malad ie caus6e par l ' inoeulat ion de B. thurin- giensis au scorpion B. occitanus. Types A-B-C. -- Bact6r~mie moyenne de 10 scorpions apr~s inoculat ion de 80 000 bact~ries ( type A), 800 000 bact6ries ( type B) et I 600 000 germcs ( type C). Bact~r~mie d 'un scorpion a y a n t requ 8 millions de germes ( type C . . . . . . ). Type D. --=Bact~r~mie moyenne des 8 scorpions morts entre 48 et 72 heures. 6 a y a n t regu 8 millions de germes et 2, 16 millions. Type E. Bact~r~mie moyenne des 11 scorpions mor ts entre 24 et 48 heures. 3 apr~s inoculat ion de 8 mill ions de germes et 8 apr~s inoculat ion de 16 millions. + Mort des scorpion s. 0 P~riode de dispari t ion des bact~ries. log. C Loga r i t hme de la bact6r~mie en bact@ries pa r ~zl.

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94 C. ~OREL

type physique, teltes que les variations de temp6rature (Vac~oN, 1953) et Faction des radiations ionisantes (V~cHON et al., 1963; NIAUSS.~T et al., 1963; V~CHON et al., 1964) ou de type physiologique, telle que l 'asphyxie (I~ILLOT & PAULIAN, 1943; VACHON, 1953; ~/[AZZOTTI, 1963) et le je~ne (V.<cHON, 1953).

SUMNLARu

S t u d y on t h e ac t ion of Baci l lus thuvingiens is BERLINER ill t h e scorp ion B u t h u s occitanus A ~ o ~ E u x

T h e scorp ion B u t h u s occitanus e l imina tes Baci l lus lhur ingiens is in de jec t ions b y progress ive s tages in re la t ion w i t h t h e food in t ake .

Af t e r t h e i nocu l a t i on in t h e haemoce l , ge rms c a n pers i s t a long t i m e in t h e h a e m o l y m p h w i t h o u t pa tho log ica l s y m p t o m s occur ing in an imals . On ly v e r y h i g h doses i nvo lve a sep t icemia . LDs0, super io r to 2.5 mil l ions b a c t e r i a shows t h e h igh re s i s t ance of th i s a r a c h n i d t o th i s b a c t e r i a l infect ion.

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