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L’évolution psychiatrique 77 (2012) 201–212 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Article original Étude de l’impact de la grossesse sur les comportements alimentaires à travers l’utilisation du questionnaire SCOFF Study of the impact of pregnancy on eating behaviors and aspects of weight concern by using the SCOFF questionnaire Mylène Hubin-Gayte a,, Claire Squires b a Psychologue, Maître de Conférences à l’université de Picardie Jules-Verne, laboratoire CLEA, chemin du Thil, 80000 Amiens cedex, France b Psychiatre, Maître de Conférences à l’université Paris-VII, laboratoire CEPP, 26, rue de Paradis, 75010 Paris, France Rec ¸u le 2 evrier 2010 Résumé La maternité ravive certaines problématiques et notamment celle autour des conduites alimentaires. La grossesse est une période de remaniements psychiques, de régression, ce qui se traduit par une hypersensibilité de la sphère orale. Ces préoccupations sont bien évidemment exacerbées chez les femmes ayant présenté des Troubles des Conduites Alimentaires (TCA) avant leur grossesse ou pendant, mais elles sont aussi présentes chez les femmes enceintes tout-venant. Cet article propose tout d’abord une revue de la littérature relative aux changements alimentaires provoqués par la grossesse, et à la fac ¸on dont les femmes les ressentent. Notre objectif est d’évaluer l’impact de la grossesse sur les comportements alimentaires et sur les préoccupations que les femmes ont au sujet de leur poids, voire, de leur image corporelle. Pour cela, nous avons fait passer à 285 femmes enceintes acceptant la recherche, une version adaptée du questionnaire SCOFF composé de 5 items. Ce questionnaire qui, au départ, est un outil de dépistage des TCA, nous a permis d’avoir une vision globale des pratiques alimentaires des femmes enceintes. Les principaux résultats ont mis en évidence la préoccupation majeure des femmes enceintes pour leur alimentation. La grossesse Toute référence à cet article doit porter mention : Hubin-Gayte M, Squires C. Étude de l’impact de la grossesse sur les comportements alimentaires à travers l’utilisation du questionnaire SCOFF. Evol psychiatr 2012;77(2). Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Hubin-Gayte). 0014-3855/$ see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.evopsy.2012.01.002

Étude de l’impact de la grossesse sur les comportements alimentaires à travers l’utilisation du questionnaire SCOFF

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L’évolution psychiatrique 77 (2012) 201–212

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

Article original

Étude de l’impact de la grossesse sur les comportementsalimentaires à travers l’utilisation du questionnaire

SCOFF

Study of the impact of pregnancy on eating behaviors and aspects ofweight concern by using the SCOFF questionnaire

Mylène Hubin-Gayte a,∗, Claire Squires b

a Psychologue, Maître de Conférences à l’université de Picardie Jules-Verne, laboratoire CLEA, chemin du Thil, 80000Amiens cedex, France

b Psychiatre, Maître de Conférences à l’université Paris-VII, laboratoire CEPP, 26, rue de Paradis, 75010 Paris, France

Recu le 2 fevrier 2010

Résumé

La maternité ravive certaines problématiques et notamment celle autour des conduites alimentaires.La grossesse est une période de remaniements psychiques, de régression, ce qui se traduit par unehypersensibilité de la sphère orale. Ces préoccupations sont bien évidemment exacerbées chez les femmesayant présenté des Troubles des Conduites Alimentaires (TCA) avant leur grossesse ou pendant, mais ellessont aussi présentes chez les femmes enceintes tout-venant. Cet article propose tout d’abord une revue de lalittérature relative aux changements alimentaires provoqués par la grossesse, et à la facon dont les femmesles ressentent. Notre objectif est d’évaluer l’impact de la grossesse sur les comportements alimentaires etsur les préoccupations que les femmes ont au sujet de leur poids, voire, de leur image corporelle. Pour cela,nous avons fait passer à 285 femmes enceintes acceptant la recherche, une version adaptée du questionnaireSCOFF composé de 5 items. Ce questionnaire qui, au départ, est un outil de dépistage des TCA, nous apermis d’avoir une vision globale des pratiques alimentaires des femmes enceintes. Les principaux résultatsont mis en évidence la préoccupation majeure des femmes enceintes pour leur alimentation. La grossesse

� Toute référence à cet article doit porter mention : Hubin-Gayte M, Squires C. Étude de l’impact de la grossesse surles comportements alimentaires à travers l’utilisation du questionnaire SCOFF. Evol psychiatr 2012;77(2).

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (M. Hubin-Gayte).

0014-3855/$ – see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.evopsy.2012.01.002

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est à l’origine d’un sentiment de perte de contrôle des quantités ingérées, et même, de poids. Par contre,peu de changements sont relatifs à la satisfaction corporelle entre avant et pendant la grossesse.© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Grossesse ; Trouble du comportement alimentaire ; Maternité ; Prévention ; Alimentation ; Corps ; Satisfaction:Image du corps ; Questionnaire

Abstract

Pregnancy has often been considered as a period of profound changes (physical, psychological) in women.This is also a period during which previous psychological issues rise to surface and current issues have thepotential to get worse or better. Eating behaviors and attitude to body weight are very important in women’slife and in certain periods of life, like adolescence and pregnancy, a source of concern. It has been provedthat women with a prior history of dieting have been found to be more likely concerned during pregnancywhen previous ED can either improve or be revealed. Pregnancy is a time that precipitates or exacerbatesproblematic eating behaviors. This article aims at giving an overview of articles of the literature on this topic.Eating behavioral changes and bodily changes are presented as a result of pregnancy. Our aim is to evaluatethe impact of the pregnancy on pregnant women’s eating behaviors. In order to evaluate eating behavioralchanges, we used the SCOFF questionnaire which is composed of 5 questions. This questionnaire which,at first, is a tool of screening of the TCA, also allowed us to have a global vision of the eating behaviors ofthe pregnant women. Two hundred and eighty-five women, recruited at the obstetric unit, answered. Firstresults revealed a major concern for food among pregnant women. Pregancy and motherhood may be fearedfor negative consequences such as loss of control of their appetite, and weight. There are few changes whichconcern their body satisfaction, between before and during the pregancy.© 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Pregnancy; Eating disorders; Motherhood; Prevention; Eating behaviors; Body; Satisfaction; Questionnaire

1. S’intéresser aux comportements alimentaires des femmes enceintes ?

La maternité est un moment important dans la vie d’une femme, durant lequel elle va connaîtrede profonds changements physiques et psychiques. C’est une période de questionnements, deremaniements psychiques, parfois d’anxiété, qui peut exacerber la problématique autour desconduites alimentaires [1,2].

Ce qui intéresse les psychologues quand ils étudient les comportements alimentaires desfemmes enceintes, c’est tout d’abord la fonction affective et relationnelle qu’ils remplissent.On ne peut pas ignorer les changements hormonaux et physiologiques, de facon générale, quiinfluencent l’alimentation de la femme enceinte ; toutefois, c’est d’un point de vue psychody-namique qu’il faut nous situer pour comprendre la valeur des signes ou symptômes exprimésdans cette sphère, leur rôle dans le fonctionnement psychique de la femme enceinte ainsi qu’uneéventuelle transmission de troubles alimentaires de la mère à l’enfant [3,4]. L’alimentation ren-voie à un mode d’expression très archaïque qui est favorisé chez la femme en début de grossesse[5]. À cette période, l’accession à la maternité est peu visible, elle s’opère donc à travers unerégression qui se traduit par une hypersensibilité de la sphère orale [6]. On assiste ainsi à unesérie de signes qui se manifestent par des changements de conduites alimentaires. De plus, lafemme est dans un processus d’anticipation [7] de ce qui va se passer avec son bébé une foisné. De récentes recherches [8–10] ont montré que ses préoccupations autour de son alimentation,de son poids, l’insatisfaction corporelle qui peut être causée par ses transformations physiques,

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influencent la nature des échanges qu’elle aura avec son enfant lors des repas, et risquent de menerà des dysfonctionnements interactifs, puis ensuite à des troubles alimentaires chez l’enfant.

S’intéresser à l’alimentation des femmes enceintes tout-venant permet également de se poserla question de l’existence de troubles alimentaires se situant dans un continuum qui nous mènedu normal au pathologique. La littérature [11–14] existant sur la grossesse des femmes présentantdes Troubles des Conduites Alimentaires (TCA) insiste sur les sentiments négatifs éprouvés àl’égard de leur prise de poids et de leurs changements corporels, la peur de perdre le contrôle dece qu’elles mangent. Toutefois, les difficultés que les femmes avec TCA rencontrent durant leurgrossesse ne leur sont pas propres, elles peuvent être de même ordre chez des femmes tout venant.De mêmes pistes explicatives peuvent alors être envisagées pour rendre compte de changementsaussi bien normaux que pathologiques s’opérant dans la sphère alimentaire des femmes enceintes,ce qui justifie tout notre intérêt pour la mise en place de mesures de prévention.

2. Comportements alimentaires annonciateurs d’une grossesse

Certains signes sont très souvent rapportés et ont même servi, à une époque où l’échographien’existait pas encore, à attester d’une grossesse : envies irrépressibles de manger un aliment bienspécifique, dégoût vis-à-vis d’autres aliments, nausées ou encore vomissements. Selon Abrahamet al. [15] un peu plus de la moitié des femmes enceintes éprouvent des envies. Elles débutent enmoyenne à la 9e semaine de grossesse et se terminent moins de 15 jours après leur apparition. Ellessont variées et concernent beaucoup d’aliments qui, pour la plupart, étaient déjà très appréciéspar le sujet avant sa grossesse. Quant aux aversions, elles concernent une gamme d’alimentsmoins large que les envies. Fairburn et al. [16] rapportent qu’elles touchent environ 80 % desfemmes enceintes. Elles commencent vers la 7e semaine et finiraient vers la 11e. Ces aversionsseraient associées aux nausées et vomissements [17]. Dans la littérature [15,18], on retrouve uneincidence de 60 à 90 % de femmes enceintes qui seraient sujettes à des nausées légères à modérées.Elles peuvent débuter vers la 6e semaine, disparaissent généralement 15 jours plus tard, maisn’excédent jamais la 16e semaine et n’affectent ni le statut nutritionnel du bébé, ni le poids de laparturiente. Si ces nausées se transforment en vomissements, ce qui est vraisemblablement le caspour 50 % des femmes enceintes [16,19], ces derniers disparaissent également vers 10 semaines,dépassant rarement le 3e mois de grossesse. Ce symptôme peut être plus important dans les cas dehyperemesis gravidarum, ce qui concerne ce qu’on appelait autrefois les « vomisseuses » [20,21].Sa fréquence tend à diminuer au cours des dernières décennies. Les psychanalystes interprètentcette baisse de fréquence comme une « intériorisation » de l’ambivalence du désir d’enfant [6].

3. Changements alimentaires durant la grossesse

En plus de ces signes que l’on peut qualifier de « normaux », de par leur fréquence, d’autreschangements de conduites alimentaires sont observables. Les études de Clark et Ogden [22], deFairburn et al. [16] montrent que les femmes enceintes déclarent manger plus souvent qu’avant leurgrossesse, mais en plus petites quantités. Elles mangent de facon plus diversifiée en se préoccupantde la santé de leur enfant [23,24]. Soixante-quinze pour cent de celles qui consommaient del’alcool arrêtent. Plus de la moitié des femmes qui fumaient cessent également leur consommation,et les autres la réduisent. Notons qu’en France, actuellement, on estime que 37 % des femmessont fumeuses avant le début de leur grossesse et que 19,5 % des femmes enceintes continuentde fumer pendant toute ou partie de celle-ci (chiffres donnés par l’ANAES). Une autre étudepionnière dans ce domaine [15] qui a été faite sur des femmes enceintes tout-venant rapporte que

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41 % des femmes rencontrent des problèmes de contrôle de poids, et 20 % considèrent que leurspréoccupations autour de leur poids et de leur alimentation sont plus importantes qu’à n’importequelle autre période de leur vie. Dans la recherche de Fairburn et Welch [25], une majorité defemmes enceintes (46 %) disent ne pas être préoccupées par leur prise de poids, 30 % se sententpréoccupées mais moins qu’avant leur grossesse, par contre, 24 % se sentent très préoccupées parleur prise de poids. Un autre chiffre est également à noter : 70 % ont peur de ne pas retrouver leurpoids d’avant la grossesse.

4. Alimentation et image corporelle

Il est difficile d’évoquer les changements de conduites alimentaires sans aborder le sujet deschangements corporels. Quand une femme devient enceinte, cela entraîne d’importants change-ments de son apparence physique qu’elle ne peut contrôler [26]. Pendant longtemps, la grossessenous a été présentée comme une période de plénitude, durant laquelle la femme est épanouie dansce nouveau corps. Or, s’approprier un nouveau corps n’est pas facile, toute femme en a déjà faitl’expérience durant l’adolescence. La grossesse devient donc une période propice pour étudierl’adaptation de la femme à ses changements corporels et à l’appropriation de sa nouvelle image.En un temps réduit, elle doit faire l’expérience de ces changements morphologiques, endocrinienset psychologiques. La maternité apparaît à travers la grosseur du ventre de la femme, les autresmodifications corporelles sont minimes comparativement à cette transformation. Le ventre quicontenait de la nourriture responsable de la prise de poids contient maintenant un bébé [27]. Pourcertaines femmes, cela les rassure sur leur rapport à la nourriture, d’autres sont davantage angois-sées car elles ont l’impression de ne plus pouvoir aussi bien contrôler qu’avant ce qu’elles mangent[28,29]. Des travaux [30,31] montrent que les préoccupations des femmes par rapport à leur imagecorporelle sont à mettre en relation avec les signes que nous avons décrits (nausées, vomissements)comme évocateurs du début de grossesse. De plus, l’insatisfaction corporelle durant la grossessepeut conduire à la pratique de conduites alimentaires mal adaptées à cette période, voire à desconduites de restriction, ce qui aura des conséquences à la fois sur la santé de la mère et celle del’enfant [32,33].

Fairburn et Welch [25] nous donnent quelques chiffres relatifs, non plus au ressenti des femmesenceintes occasionné par la prise de poids, mais concernant leurs sentiments en réaction à leurschangements morphologiques : 66 % disent bien réagir face à leur ventre qui grossit. Leur attitudepar rapport à leur poitrine qui augmente, dépend de ce qu’elle pensait avant la grossesse : 20 %qui se sentent satisfaites de l’augmentation de leur poitrine la considéraient avant comme troppetite et les 18 % qui n’aiment pas leur poitrine depuis qu’elles sont enceintes se disent avoir étépeu soucieuses de leur taille auparavant.

Si l’on se questionne sur l’évolution de cette possible insatisfaction corporelle au cours desmois de grossesse, les résultats sont contradictoires et les explications divergent. Les recherchesles moins récentes montrent que l’insatisfaction augmente au cours des mois de grossesse, pro-portionnellement à la prise de poids et aux modifications de la silhouette [29,34,35]. D’autres,plus récentes [22,33,36,37], montrent que l’insatisfaction peut apparaître en début de grossesse,quand le ventre s’arrondit mais pas encore assez pour que l’on puisse penser que la femme estenceinte. Ensuite, vers le milieu de la grossesse, elle stagnerait. En effet, les standards véhi-culés par la société sont mis en suspens pendant ces mois de grossesse, où il est socialementaccepté et acceptable que la femme enceinte prenne du poids. C’est cette modification d’un regardsocial qui expliquerait que la satisfaction corporelle ne soit pas très influencée par la survenuede la grossesse malgré les nombreux changements occasionnés. Pour Larsson et Andersson [38],

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Matsuhashi-Yuko et Felice [39], Richardson [40], Skouteris et al. [33], la plupart des femmesseraient capables de s’adapter aux changements corporels qui ont lieu tout au long de leurgrossesse et modifieraient leurs idéaux en fonction de leur prise de poids et de leur silhouettechangeante. Seules quelques-unes sont insatisfaites de leur corps de femme enceinte, parmi les-quelles se trouvent le plus souvent les femmes ayant présenté ou présentant des TCA [1,2]. Maispour d’autres auteurs encore [25], c’est en fin de grossesse et à l’approche de l’accouchement queles préoccupations autour du poids et de la forme du corps réapparaissent car la femme craint dene pas perdre tout le poids gagné, de ne pas retrouver sa silhouette.

Ainsi, l’impact de la grossesse sur les conduites alimentaires n’est pas direct. Il dépend deplusieurs autres variables dont il faut tenir compte : poids, attente au niveau de l’image corporelle,sentiment d’efficacité, antécédents de TCA ou tout simplement existence de conduite de restriction[25,41–43].

Pour finir, rajoutons que la société est assez ambivalente quant à l’image qu’elle nous donne dela femme enceinte. Quand son corps est représenté dans les médias, on nous montre une femmeau gros ventre, épanouie et fière de pouvoir montrer sa maternité, mais dès l’instant d’après, ils’agit de montrer des images où la féminité de la femme se réduit très souvent à la minceur. Lediscours médical n’est pas exempt de cette ambiguïté. Le message du « manger pour deux » s’esttransformé en « manger sain ». Les limites de certaines politiques de prévention ont été atteintes.Sur les tablettes du corps médical, certaines lois ont été marquées « tu ne fumeras pas, tu neboiras pas, tu mangeras équilibré ». Mais où en est la femme enceinte par rapport à toutes cesrecommandations, souvent présentées sous forme d’interdictions, avec tout ce que cela amène surle plan de la culpabilité, à un moment de sa vie où son seul souci est d’être en bonne santé pouravoir un bébé sain. Comment considère-t-elle son nouveau corps ? De facon générale, commentvit-elle ces modifications inhérentes à sa grossesse ?

Dans l’étude présentée ici, nous voulons savoir si la grossesse est à l’origine de changementsde conduites alimentaires chez les femmes enceintes tout-venant et, si cela est le cas, étudier lanature de ces changements. Notre objectif est donc d’évaluer l’impact de la grossesse sur lescomportements alimentaires et sur les préoccupations que les femmes enceintes ont au sujet deleur poids, mais aussi de leur image corporelle.

5. Population

Notre groupe d’étude est constitué de 285 femmes enceintes, consultant à la maternité et ayantsigné un consentement éclairé. L’âge des femmes est compris entre 18 et 42 ans (âge moyen :32 ans). Parmi ces femmes, 53 % sont primipares, 47 % multipares. Concernant leur origineculturelle, plus de 80 % des femmes sont de France métropolitaine et toutes maîtrisent la languefrancaise, le reste des femmes appartient à des cultures étrangères.

6. Outil méthodologique

Le questionnaire SCOFF est un outil de dépistage des TCA qui est de plus en plus utilisé dansla recherche internationale [1,7,39,44,45] (Tableau 1). Il est composé de 5 items. Les mères yrépondent par oui ou par non. Un point correspond à chaque « oui ». Un score de 2 points ou plusindique une probabilité d’anorexie ou de boulimie avec une sensibilité de 100 % et une spécificitéde 87,5 % [46]. L’intérêt de ce questionnaire est justifié par sa passation rapide, ne nécessitantpas d’experts [46,47]. Il fait partie des « screening » comme le CAGE utilisé pour détecter lesconsommations excessives d’alcool. Dans leur étude portant sur des femmes tout venant, Luck

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Tableau 1Questionnaire SCOFF (version originale de Morgan et al., 1999).

Item 1Do you make yourself Sick because you feel uncomfortably full?

Item 2Do you worry you have lost Control over how much you eat?

Item 3Have you recently lost more than One stone in a 3-month period?

Item 4Do you believe yourself to be Fat when others say you are too thin?

Item 5Would you say that Food dominates your life?

et al. [44] rapportent que 96,2 % des TCA ont été détectés avec le SCOFF. Ce questionnaire a étéétalonné dans différents pays : Espagne [48], Japon [49]. Toutefois, en France, l’étalonnage esten cours.

La version francaise présentée ici (Tableau 2) a été élaborée en confrontant les traductionsde plusieurs chercheurs en psychologie de même langue native et maîtrisant l’anglais, elle a étérecorrigée par une traductrice. Une étude préalable [50] a consisté à adapter le SCOFF à unepopulation de femmes enceintes. Compte tenu d’un intérêt pour les changements de conduitesalimentaires durant la grossesse, il s’est posé la question de la nécessité de distinguer deuxpériodes (avant et depuis la grossesse). Les 5 questions de cette version adaptée sont donc relativesaux changements de conduites alimentaires que les femmes ressentent depuis le début de lagrossesse. Le mode de cotation est resté le même que celui utilisé par Morgan et al. [46], àsavoir que les femmes ayant donné des réponses positives au moins à 2 questions sont dépistéesà risques.

Tableau 2Adaptation du questionnaire SCOFF à une population de femmes francaises enceintes.

Avant lagrossesse

Depuis lagrossesse

Oui Non Oui Non

Item 1Diriez-vous que la nourriture est quelque chose qui occupe

une place dominante dans votre vie ?Item 2

Pensez-vous que vous êtes trop grosse alors que les autresvous considèrent comme trop mince ?Item 3

Avez-vous déjà perdu plus de 6 kilos en moins de 3 mois ?Item 4

Craignez-vous avoir perdu le contrôle des quantités que vousmangez ?Item 5

Vous arrive-t-il de vous rendre malade parce que vous avez lasensation inconfortable d’avoir trop mangé ?

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7. Procédure

Le questionnaire SCOFF est administré par le gynécologue ou la sage-femme, lors dela première consultation prénatale des femmes enceintes à la maternité (vers 10 semainesd’aménorrhée). Après avoir posé les questions, le gynécologue ou la sage-femme demandentaux mères si elles acceptent que les réponses soient communiquées aux chercheurs. Les femmesayant donné leur accord signent une lettre de consentement les informant de cette première phasede la recherche.

8. Résultats

8.1. Résultats au SCOFF

Sur 285 femmes acceptant la recherche, 188 ont eu un score négatif et 97, un score positif.Notre population comprend donc 66 % de femmes à risques et 34 % sans risques. Notre intérêtse portant sur les femmes tout-venant, nous ne différencierons pas par la suite ces 2 groupes defemmes.

8.2. Répartition des réponses positives entre les différents items du SCOFF (toutes femmesconfondues)

Que cela concerne la période avant ou pendant la grossesse, l’item comportant le plus deréponses positives est l’item 1, relatif aux préoccupations autour de la nourriture (Tableau 3). Lepourcentage de « oui » à cette question passe alors de 42,5 à 51,4 % entre avant la grossesse etdepuis. Les femmes enceintes se déclarent particulièrement préoccupées parce qu’elles mangentplus depuis qu’elle sont enceintes, mais disent l’avoir déjà été avant.

Tableau 3Répartition (en pourcentages) des réponses positives entre les différents items du SCOFF (toutes femmes confondues).

Avant la grossesse (%) Depuis la grossesse (%)

Item 1Diriez-vous que la nourriture est quelque

chose qui occupe une place dominante dansvotre vie ?

42,5 51,4

Item 2Pensez-vous que vous êtes trop grosse alors

que les autres vous considèrent comme tropmince ?

14,5 15

Item 3Avez-vous déjà perdu plus de 6 kilos en

moins de 3 mois ?24,5 5

Item 4Craignez-vous avoir perdu le contrôle des

quantités que vous mangez ?6,5 17,3

Item 5Vous arrive-t-il de vous rendre malade

parce que vous avez la sensationinconfortable d’avoir trop mangé ?

12 11,3

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Tableau 4Nombre de femmes (en pourcentages) ayant changé de réponses entre avant et depuis la grossesse aux différents itemsdu questionnaire.

Nombre de femmes ayant changé deréponses aux items du questionnaire (%)

Item 1 19Item 2 9Item 3 23,5Item 4 14,7Item 5 11

De la même manière, peu de changements s’opèrent dans les réponses des mères entre avantet pendant la grossesse à l’item 2 (évaluant l’insatisfaction corporelle). Par contre, le pourcentagede « oui » est beaucoup plus faible qu’à l’item précédent, puisqu’il n’y a que 15 % de réponsespositives à cette question depuis la grossesse et 14,5 % avant.

Les 24,5 % de réponses positives à l’item 3 concernant la perte de poids, montrent la fréquencede conduites restrictives, de régimes, avant la grossesse, qui apparemment se soldent par une pertede poids non négligeable (plus de 6 kg en moins de 3 mois). Depuis la grossesse, ce pourcentagea considérablement baissé puisqu’il n’atteint que 5 %.

Concernant l’item 4, on peut remarquer que la grossesse est à l’origine d’un sentiment assezimportant de perte de contrôle des quantités ingérées, et peut-être même du poids. Le pourcentagepasse de 6,5 à 17,3 %. C’est le changement le plus important à noter.

Quant à l’item 5, il correspond à une question formulée de facon assez large pour être compriseau-delà des conduites de « se faire vomir ». La formulation de cet item aurait pu laisser la possibilitéaux femmes d’évoquer leurs nausées, dégoûts, provoqués par la grossesse, toutefois, le peu dechangements constatés entre avant et depuis la grossesse montre que cela n’est pas le cas.

8.3. Changements de réponses aux différents items entre avant et depuis la grossesse

La grossesse a un impact tout particulier sur les items 1 (préoccupations alimentaires) et 3(perte de poids) puisque les femmes qui ont le plus modifié la nature de leur réponse entre avantet depuis la grossesse l’ont fait à l’item 1 (pour 19 %) et l’item 3 (pour 23,5 %) (Tableau 4).

9. Discussion et conclusion

L’alimentation durant la grossesse est un sujet peu abordé par les obstétriciens et les diversintervenants du champ de la périnatalité. Pourtant, nombreuses sont les femmes qui présententdes troubles des conduites alimentaires et qui se perdent dans la cohorte des femmes tout-venantqui consultent dans le cadre d’un suivi régulier de leur grossesse. Abraham et Llewelyn-Jones[26] soulignent le fait que seulement 18 % de 67 obstétriciens interrogés disent poser des ques-tions relatives aux troubles alimentaires durant leur consultation prénatale. Aucune politique dedépistage n’est mise en place de facon systématique. Or, la nécessité de s’intéresser à l’influenceréciproque entre conduites alimentaires et grossesse s’impose quand on connaît les risques sur ledevenir du fœtus, sa naissance [51,52], et sur l’apparition d’éventuels TCA chez l’enfant [10] oude tout autre désordre alimentaire [32].

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Les résultats de cette recherche montrent que la grossesse est une période de changements.Les préoccupations autour de l’alimentation augmentent avec la grossesse. Abraham et al. [15]ont posé dans leur étude une question similaire : « est-ce que vous êtes préoccupées par despensées relatives à votre poids ou à votre alimentation ? » Les pourcentages de réponses sontsemblables à nos résultats obtenus puisque 42 % des femmes répondent « oui » avant la grossesseet 52 %, depuis la grossesse. Il est à noter que dans notre étude, un grand nombre de femmesjustifient leur réponse positive et leur changement de préoccupation par rapport à cette sphèrealimentaire par le fait qu’elles doivent surveiller de facon assez draconienne leur alimentation,n’ayant pas été immunisées contre la toxoplasmose. De facon générale, les femmes exprimentun désir de contrôler ce qu’elles mangent, à la fois afin de ne pas atteindre un poids excessif,difficile à perdre après l’accouchement, mais aussi, afin de tenir compte des besoins nutritionnelsdu bébé. Pour beaucoup, il s’agit de maintenir un équilibre entre leurs propres besoins et ceuxdu bébé à venir.

Le pourcentage de « oui » à la question 2 va dans le sens de ce que la littérature [33,37] soulignecomme étant une certaine stabilité de la satisfaction corporelle et le peu d’impact de la grossessesur cette dimension [32,33,39]. Une question similaire a été posée à des femmes non enceintesâgées de 18 à 25 ans par Rozin et al. [53], ils rapportent un pourcentage de réponses positivessemblable au nôtre puisque plus de 18 % aimeraient bien être un peu plus minces alors qu’ellesreconnaissent que leur entourage les trouve très bien comme elles sont. On peut penser que lesrésultats auraient été différents si le terme de grossesse des femmes interrogées avait été plusavancé. De plus, l’utilisation d’outils plus spécifiques tels que le Body Shape Questionnaire deCooper et al. (1987) [54] ou encore le Pictural Body Image Scale Test des silhouettes de Stunkardet al. (1983) [55] nous permettraient d’avoir des données plus fines relatives à cette dimen-sion. Nous tenons à préciser que nous poursuivons actuellement cette recherche en utilisant unoutil supplémentaire, il s’agit de l’Eating Disorders Questionnaire de Fairburn [56] qui comprend4 échelles dont l’une est relative aux préoccupations concernant l’apparence corporelle. Ces résul-tats analysés nous permettront de mieux comprendre les préoccupations corporelles des femmesenceintes.

Le faible pourcentage de réponses positives à l’item 3, particulièrement concernant la périodedepuis la grossesse, est facilement explicable par le fait que ces pratiques de perte de poidsne peuvent s’avouer pendant cette période. Selon, Abraham et al. [20], 73 % des femmes quiutilisaient des méthodes pour contrôler leur poids avant la grossesse continuent à les utiliser.Toutefois, il faut être prudent avec ces chiffres et il est difficile de les mettre en rapport avec nosdonnées car on peut utiliser des méthodes de contrôle, sans qu’il y ait de perte de poids qui s’ensuive, comme c’est le plus souvent le cas. Dans la question 3 posée, il s’agit de mettre en évidencel’utilisation de méthodes efficaces. Certaines femmes multipares ont également souligné que cetteperte de poids envisagée dans la question était consécutive à la naissance d’un premier enfant.Il n’est pas anodin que ce type de réponse soit donnée et que la perte de poids soit directementassociée à ce vide laissé dans le ventre par le bébé.

Manifestement, les femmes enceintes semblent manquer de confiance quant à leur capacité decontrôler leur prise de poids [24]. Non seulement, un certain nombre de conduites de restrictionne sont plus possibles car elles mettent en danger la santé du bébé, mais de plus, l’augmentationdu tissu adipeux qui modifie la silhouette n’est plus la preuve d’une prise de poids excessive, maisdevient consécutive aux transformations du corps inhérentes à la grossesse, et tant attendues. Ilest difficile pour elles de faire la part des choses entre ce qui relève de la grossesse et ce qui relèved’une augmentation de leur adiposité et cela peut-être à l’origine d’une certaine ambivalencequant à la facon de considérer leur corps. C’est souvent cette peur de perdre le contrôle de leur

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comportement alimentaire qui explique que certaines femmes soit baissent les bras et se donnentle droit de grossir, soit se fixent sur la composition de leur alimentation dans un souci de diététiquepoussé à l’extrême.

Pour finir, nous sommes conscients que la question 5 est formulée de facon non explicite et peutêtre à l’origine de différentes interprétations de la part des mères qui comprennent différemmentla question. Cette ambiguïté dans la formulation nous montre qu’elles ont d’elles-mêmes orientéleur réponse par rapport à des conduites davantage pathologiques que normales et inhérentesà la grossesse (dégoûts, envies, nausées), et explique leur taux relativement faible de réponsespositives. Le questionnaire SCOFF ne nous en a pas donné la possibilité mais il serait intéressantd’interroger les femmes enceintes sur la présence de ces conduites de nausées, dégoûts, vomisse-ments et envies durant leur grossesse et leur persistance dans le temps. Nous devons faire attentionà une certaine banalisation de ces conduites de début de grossesse et nous pensons qu’elles peuventservir de clignotants aux professionnels de la santé, pour repérer la présence de TCA passés etles amener vers la mise en place de mesures préventives.

La grossesse semble avoir un impact tout particulier sur les items 3 (perte de poids) et 1(préoccupations autour de la nourriture) puisque ce sont les items sur lesquels se sont opérésle plus de changements de réponses entre avant et pendant la grossesse (Tableau 4). En ce quiconcerne l’item 1, nous tenons à souligner que de nombreuses femmes émettent un changementde réponse allant dans le sens d’une réponse négative concernant la période avant grossesse à uneréponse positive pour depuis la grossesse.

Cela est-il le reflet d’un phénomène de société qui permet aux femmes enceintes à la fois dene plus avoir de régime à faire, voire plus, qui leur demande de prendre des kilos en plus, deconsidérer davantage leur alimentation ? Cela appuie l’idée selon laquelle la grossesse est unepériode particulière pendant laquelle les standards de beauté érigés selon une exigence de minceurdisparaissent temporairement.

Si cette recherche porte sur les préoccupations des parturientes autour de leurs conduitesalimentaires et de leur image du corps, n’oublions pas que leur principale préoccupation est lebébé et elles l’expriment très souvent. Elles veulent manger sainement pour la bonne santé dubébé. Il existe un consensus consistant à montrer que la grossesse est à l’origine de l’améliorationdes troubles alimentaires et que la période du post-partum signe la reprise des symptômes. Àpartir de là, certains chercheurs s’intéressant aux TCA ont pu préconiser une intervention sesituant plutôt en fin de grossesse ou juste après la naissance de l’enfant. Nous ne partageons pasce point de vue, c’est dès le début de cette période singulière constituée par la grossesse qu’ilfaut profiter de cette préoccupation maternelle primaire [57], de cette transparence psychique[58], pour sensibiliser la mère à cette question et faire un véritable travail de prévention, suivi sinécessaire d’une prise en charge adéquate. C’est à ce moment qu’elles sont le plus motivées pourchanger leurs comportements [19].

Cette étude porte sur un nombre de femmes plus important que dans une étude préliminaireque nous avons menée [50] et nos premiers résultats se confirment. Toutefois, nous voulonsparticulièrement insister sur la nécessité pour les consultants de s’entretenir avec les femmesnon seulement au sujet de leurs pratiques alimentaires mais aussi de leurs transformations cor-porelles et de leurs nouveaux sentiments à l’égard de leur corps. L’insatisfaction corporellepourrait constituer un facteur de vulnérabilité qui pourrait également mener certaines femmesenceintes vers des troubles des conduites alimentaires. Nous savons aujourd’hui que la gros-sesse peut être le déclencheur de TCA ou d’obésité [59–61]. Cela renforce d’autant plus notreconviction de l’intérêt de l’utilisation d’un outil simple comme le SCOFF en tant qu’outilde dépistage.

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Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Remerciements

Tous nos remerciements au service du Pr Cabrol, chef de service de la maternité Port-Royal.

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