39
CHAPITRE II : MATERIAUX DE CONSTRUCTION DANS LESQUELS SONT MISES LES SCORIES 1. MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 34 1.1 RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES 34 1.1.1 HYDRATATION DES CIMENTS 35 1.1.2 CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES D' UNE MATRICE CIMENT 37 1.1.3 INTERACTIONS DÉCHETS MINÉRAUX/MATRICE CIMENT 39 1.1.4 CAPACITÉ À RÉSISTER À UNE AGRESSION EXTÉRIEURE D' UNE PÂTE DE CIMENT 42 1.2 ETUDE DU COMPORTEMENT DES SCORIES DANS LES CONTEXTES CHIMIQUES IMPOSÉS PAR LES MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 44 1.2.1 DÉTERMINATION DE LA COMPOSITION INITIALE DE LEAUX DES PORES DUN MATÉRIAU À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 44 1.2.2 ETUDE DE LALTÉRATION DES MATRICES VITREUSES DES SCORIES EN CONTACT AVEC DES EAUX DES PORES SYNTHÉTIQUES 45 1.2.3 ETUDE DU RELARGAGE DU PLOMB ET DU ZINC DES SCORIES AU CONTACT DEAUX DES PORES SYNTHÉTIQUES 46 1.3 LES MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE ÉTUDIÉS 48 1.3.1 LES BÉTONS 48 1.3.2 LES SABLES-CIMENTS 56 1.3.3 CONCLUSION 62 2. MATÉRIAUX À BASE DE LIANT BITUMINEUX 62 2.1 RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES 62 2.1.1 LES BITUMES 62 2.1.2 LES ENROBÉS BITUMINEUX 65 2.2 LES SABLES-BITUMES. 67 2.2.1 LES SCORIES : GRANULATS POUR SABLE-BITUME ? 67 2.2.2 COMPOSITION DES SABLES-BITUMES 68 2.2.3 ANALYSE ÉLÉMENTAIRE DES SABLES-BITUMES 68 2.2.4 CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES DES SABLES-BITUMES 69 2.2.5 COMPORTEMENT DES SABLES-BITUMES DANS DIFFÉRENTS CONTEXTES CHIMIQUES 70 2.3 CONCLUSION 71 3. CONCLUSION 71

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CHAPITRE II :

MATERIAUX DE CONSTRUCTION DANS

LESQUELS SONT MISES LES SCORIES

1. MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 34

1.1 RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES 341.1.1 HYDRATATION DES CIMENTS 351.1.2 CARACTÉRISTIQUES PHYSICO-CHIMIQUES D'UNE MATRICE CIMENT 371.1.3 INTERACTIONS DÉCHETS MINÉRAUX/MATRICE CIMENT 391.1.4 CAPACITÉ À RÉSISTER À UNE AGRESSION EXTÉRIEURE D'UNE PÂTE DE CIMENT 421.2 ETUDE DU COMPORTEMENT DES SCORIES DANS LES CONTEXTES CHIMIQUES IMPOSÉS PARLES MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 441.2.1 DÉTERMINATION DE LA COMPOSITION INITIALE DE L’EAUX DES PORES D’UN MATÉRIAU À

BASE DE LIANT HYDRAULIQUE 441.2.2 ETUDE DE L’ALTÉRATION DES MATRICES VITREUSES DES SCORIES EN CONTACT AVEC DES

EAUX DES PORES SYNTHÉTIQUES 451.2.3 ETUDE DU RELARGAGE DU PLOMB ET DU ZINC DES SCORIES AU CONTACT D’EAUX DES

PORES SYNTHÉTIQUES 461.3 LES MATÉRIAUX À BASE DE LIANT HYDRAULIQUE ÉTUDIÉS 481.3.1 LES BÉTONS 481.3.2 LES SABLES-CIMENTS 561.3.3 CONCLUSION 62

2. MATÉRIAUX À BASE DE LIANT BITUMINEUX 62

2.1 RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES 622.1.1 LES BITUMES 622.1.2 LES ENROBÉS BITUMINEUX 652.2 LES SABLES-BITUMES . 672.2.1 LES SCORIES : GRANULATS POUR SABLE-BITUME ? 672.2.2 COMPOSITION DES SABLES-BITUMES 682.2.3 ANALYSE ÉLÉMENTAIRE DES SABLES-BITUMES 682.2.4 CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES DES SABLES-BITUMES 692.2.5 COMPORTEMENT DES SABLES-BITUMES DANS DIFFÉRENTS CONTEXTES CHIMIQUES 702.3 CONCLUSION 71

3. CONCLUSION 71

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 34

CHAPITRE II :

MATERIAUX DE CONSTRUCTION DANS

LESQUELS SONT MISES LES SCORIES

L'utilisation des scories ISF ou LBF en substitut partiel au sable dans des matériaux de BTP a

été envisagée : trois voies matériaux ont été étudiées. Elles peuvent être regroupées en deux

catégories en fonction du liant :

♦Matériaux à base de liant hydraulique :

- béton,

- sable-ciment.

♦Matériaux à base de liant bitumineux :

- sable-bitume.

La première partie de ce chapitre est consacrée aux matériaux à base de liant hydraulique :

rappel bibliographique sur ce type de matériau, puis présentation des matériaux qui ont fait

l'objet de cette thèse (béton, sable-ciment) ; dans la seconde partie, dédiée aux matériaux à

base de liants bitumineux, nous ferons également un rappel bibliographique avant de présenter

les caractéristiques des sables-bitumes étudiés.

1. MATERIAUX A BASE DE LIANT HYDRAULIQUE

Les scories ISF et LBF ont été introduites en substitut partiel au sable dans des bétons et des

sables-ciments. Une courte bibliographie permet de rappeler l’origine des liants hydrauliques

et les propriétés physico-chimiques des liants hydratés. Ensuite sont présentées la composition

et les caractéristiques des matériaux étudiés.

1.1 Rappels bibliographiques

Un liant hydraulique est une poudre constituée de sels minéraux anhydres. En présence d'eau

ils forment une pâte qui fait prise et durcit progressivement par suite de réactions

d'hydratation. Le terme liant hydraulique désigne les ciments et la chaux.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 35

Le terme générique "ciment" désigne en fait différentes catégories de produits, répertoriés

dans la norme NF P 15-301, en fonction de leur composition et de leur classe de résistance.

Un ciment contient toujours du clinker, il peut être additionné de divers minéraux naturels ou

artificiels, dont le rôle principal est soit de participer aux réactions d'hydratation (laitiers et

produits pouzzolaniques) soit d'améliorer la compacité de la pâte (composants inertes comme

les fillers).

Le Ciment Portland Artificiel (CPA) est le plus courant. Il est constitué de 95 à 100 % de

clinker. Dans les ciments composés, le dosage en clinker est de l'ordre de 65 à 94 % pour les

classes CPJ (Ciment Portland Composé) et descend jusqu'à 5 % dans les CLK (Ciment au

laitier de haut–fourneau).

Le clinker est le résultat de la cuisson d'un mélange d'environ 80 % de calcaire et 20 %

d'argile dont les oxydes se combinent au cours de la cuisson pour former (Taylor, 1992) :

- le silicate tricalcique, 3CaO.SiO2, C3S1: 50-70 % ,

- le silicate bicalcique, 2CaO.SiO2, C2S : 15-30 %,

- l'aluminate tricalcique, 3CaO.Al2O3, C3A : 5-10 %,

- l'aluminoferrite de calcium, 4CaO.Al2O3.Fe2O3, C4AF : 5-15 %.

Le gypse (CaSO4, 2H2O) est ajouté au clinker pour régulariser la prise du ciment.

1.1.1 Hydratation des ciments

Mélangés à l'eau les minéraux du ciment s'hydratent. L'hydratation s'opère par dissolution des

phases anhydres suivie d'une précipitation des hydrates conduisant au durcissement de la pâte

de ciment et à la formation d'une structure solide. Les mécanismes d'hydratation sont

complexes.

Les mécanismes d’hydratation du CPA ont été les plus étudiés et sont rappelés ici. En

présence de gypse les aluminates forment des sulfo-aluminates de calcium hydratés (réactions

1 et 2) :

Réaction 1 :

3CaO.Al2O3 + 26 H2O + 3(CaSO4.2H2O) → 3CaO.Al2O3.3CaSO4.32H2O + Al2O3.3H2O

C3A Ettringite (C 3A.3CS.H32)

Réaction 2 :

2CaO(Al2O3.Fe2O3)0,5+25H2O+ 3(CaSO4.2H2O) + Ca(OH)2 → 3CaO. (Al2O3.Fe2O3)0,5 3CaSO4.32H2O

1 Notation cimentière A=Al2O3 ; C=CaO ; F=Fe2O3 ; H=H2O ; S=SiO2 ; S=SO3

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 36

La quantité de gypse généralement ajoutée au clinker étant insuffisante pour transformer tous

les aluminates en ettringite, d'autres hydrates sont formés par réaction avec l'hydroxyde de

calcium présent en solution (réactions 3 et 4).

Réaction 3 : 3CaO.Al2O3 + 12H2O + Ca(OH)2 → 3CaO.Al2O3.Ca(OH)2 .12H2O

Réaction 4 : 4CaO.Al2O3.Fe2O3 + 10H2O + Ca(OH)2 → 6CaO.Al2O3.Fe2O3 .12H2O

L'ettringite se transforme partiellement en monosulfo-aluminate de calcium hydraté

(monosulfate) selon la réaction 5.

Réaction 5 :

(C3A.3CS.H32) + 2(3CaO.Al2O3.Ca(OH)2 12H2O) → 3(3CaO.Al2O3.CaSO4 .12H2O) + 2Ca(OH)2 + 20H2O

Ettringite Monosulfate (C3A.3CS.H12)

L'hydratation des silicates de calcium s'effectue lentement et conduit à la formation de

Silicates de Calcium Hydratés notés C-S-H et d'hydroxyde de calcium Ca(OH)2 ou

portlandite (réactions 6 et 7). Le durcissement de la pâte de ciment Portland est

principalement dû à ces produits.

Réaction 6 : 2(3CaO.SiO2) + 6H2O → 3CaO.2SiO2.3H2O + 3Ca(OH)2

C3S C-S-H portlandite

Réaction 7 : 2(2CaO.SiO2) + 4H2O → 3CaO.2SiO2.3H2O + 3Ca(OH)2

C2S C-S-H portlandite

En fin d'hydratation les principaux produits d'hydratation sont (Glasser, 1993) :

➤ Les Silicates de Calcium Hydratés C-S-H : gel amorphe dont le ratio Ca/Si varie, il

constitue 60 à 70 % d'une pâte de ciment hydratée.

➤ L'hydroxyde de calcium Ca(OH)2 ou portlandite : il représente 20 à 30 % d'une

pâte de ciment hydratée et 90 % de son alcalinité (Bishop, 1988).

➤ Les sulfo-aluminates de calcium : l'ettringite et le monosulfate représentent 5 à 15 %

d'une pâte hydratée.

Suivant l'origine du ciment et aussi en jouant sur les ajouts de laitier, de cendres volantes, de

pouzzolanes ou de fumées de silice, il est possible de faire varier assez largement la

proportion de ces hydrates. Les ciments au laitier de haut fourneau (CLK et CHF) contiennent

moins de portlandite, plus de C-S-H et plus d'aluminates hydratés que les ciments Portland

purs. Pour un CPJ dont le constituant complémentaire est un matériau inerte tel le calcaire, les

produits de l’hydratation sont essentiellement identiques à ceux d’un CPA.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 37

Le mélange ciment et eau est appelé pâte pure ou pâte de ciment hydraté. Le mélange ciment,

eau et sable est nommé mortier . Le mélange ciment, eau, sable et granulats est un béton.

1.1.2 Caractéristiques physico-chimiques d'une matrice ciment

La structure solide, issue de l'hydratation du ciment, est une matrice poreuse. Les pores de

cette matrice sont partiellement remplis d'une phase aqueuse ou "eau des pores" en équilibre

thermodynamique avec la matière solide.

1.1.2.1 Porosité

La porosité caractérise la texture d'une pâte de ciment et conditionne beaucoup des propriétés

(résistance mécanique, transfert hydraulique…). La porosité est une grandeur évolutive

d'abord parce que les réactions d'hydratation se poursuivent longtemps et ensuite parce que de

nombreuses réactions chimiques de dissolution et de précipitation se produisent dans le réseau

poreux.

La porosité totale représente le volume non occupé par les phases solides, c'est la somme de la

porosité fermée et ouverte. La porosité fermée est constituée de pores qui ne communiquent

pas avec l'extérieur. La porosité ouverte est constituée de pores interconnectés, ils forment

un espace continu dans le milieu poreux et participent au transfert de matière à travers le

matériau.

Un autre aspect de la structure poreuse est la distribution de la taille des pores ou répartition

porosimétrique.

- Les pores capillaires (supérieurs à 30 nm) : ils représentent les espaces initialement

existant entre les grains de ciment et incomplètement comblés par les hydrates. Leur

diamètre moyen varie avec le rapport eau/ciment (E/C) et le degré d'hydratation. Pour

une pâte entièrement hydratée, la continuité des pores capillaires est interrompue pour

des E/C inférieurs à 0,7 (Neuville,1963), cependant ils restent interconnectés par les

micropores.

- Les pores des C-S-H : parmi les produits de l'hydratation du ciment les C-S-H sont les

moins bien cristallisés et ont une structure de gel microporeux. D'après Powers (Powers,

1946) la porosité des C-S-H est indépendante du ratio E/C et du degré d'hydratation. La

porosité des C-S-H dans les pâtes ordinaires (E/C = 0,34) est de 28 % (Baroghel-Bouny,

1996). Leur taille est le plus souvent de quelques angström (Malier, 1992).

La distribution porosimétrique est également souvent décrite par trois classes de pores : la

microporosité de 0,006 µm à 0,1 µm, la mésoporosité de 0,1 µm à 0,6 µm et la macroporosité

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 38

au delà de 0,6 µm. Il n'existe pas de relation directe entre les types de pores décrits et la

classification en fonction de leur taille, certains types de pores ayant des classes de taille

étendues.

Dans le réseau poreux, les transferts de matière peuvent être classés en deux catégories (Buil,

1992) :

y Ecoulement de l'eau interstitielle. Ce type de transport intervient lorsque la pâte de

ciment est soumise à un gradient de pression hydraulique ou si elle est exposée, à l'état

saturé, à une dessiccation ou au contraire si, à l'état sec, elle subit une ascension

capillaire d'eau d'origine extérieure. La cinétique de transport par écoulement dépend de

l'état de division (taille des pores) du matériau. Dans les pores extrêmement petits (pores

des C-S-H) les molécules d'eau sont moins mobiles du fait de leur adsorption sur les

parois.

y Transport par diffusion. Le transport par diffusion peut intervenir en phase liquide ou

gazeuse. La diffusion désigne le processus de transport d'un constituant dans un milieu

donné sous l'effet des gradients de concentrations. La cinétique de diffusion ne dépend

pas de la répartition porosimétrique mais de l'état de connectivité des pores. En effet, la

"résistance" au transport par diffusion résulte des chocs entre les molécules qui

remplissent le capillaire ; pour qu'il en soit ainsi, il suffit que la taille du capillaire soit

suffisamment élevée pour que le nombre moyen de collisions intermoléculaires soit très

supérieur au nombre de collisions avec les parois du capillaires.

La porosité et la répartition porosimétrique sont des grandeurs évolutives, elles

contrôlent la durabilité d'une pâte de ciment. Une pâte de ciment hydratée faiblement

poreuse a une meilleure résistance mécanique et limite la pénétration des agents

extérieurs agressifs comme l’eau et le dioxyde de carbone.

1.1.2.2 Eau des pores

La solution aqueuse contenue dans les pores joue un rôle essentiel : c'est là qu'ont lieu les

phénomènes de mise en solution, de précipitation et de transport des espèces.

La solution aqueuse contenue dans les pores est en équilibre avec les différentes phases

solides, en particulier les hydrates du ciment. L'eau des pores est saturée par rapport à chacun

des hydrates. Compte tenu des équilibres de solubilité des hydrates, la solution est pauvre en

calcium (Vernet, 1992). En effet, au cours de l'hydratation, la portlandite réagit avec les

sulfates alcalins, toujours présents en quantité mineure dans le ciment, pour donner les

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 39

hydroxydes correspondants : KOH2CaSOSOK)OH(Ca 4422+→+

NaOH2CaSOSONa)OH(Ca 4422+→+

Le pH élevé est dû à la présence des ions OH- provenant des bases alcalines et de la

portlandite dont la solubilité, précisément, dépend de la concentration en ions OH-. Au bout

de quelques heures la solution s'enrichit progressivement en bases alcalines NaOH et surtout

KOH, alors que la concentration en calcium décroît et devient négligeable à long terme. Ces

équilibres expliquent que le pH de la solution interstitielle reste largement supérieur à 13 alors

que la solution saturée de chaux n'a qu'un pH de 12,5 (Duval, 1992).

De nombreuses études ont été réalisées pour déterminer la composition de l'eau des pores de

matériaux à base de liant hydraulique. Différentes méthodes ont été utilisées :

y Méthodes expérimentales :

- méthode d'extraction par compression de matrice de ciment hydratée (Longuet,

1973, Kindness, 1994, Diamond, 1981),

- méthode de mise en contact de matériaux finement broyés avec de l'eau

déminéralisée à de faibles ratios liquide/solide (L/S) : les concentrations en

alcalins (Na, K) et calcium mesurées sont extrapolées pour le ratio L/S existant au

sein du matériau (calculé à partir de la porosité) (Bae, 1998).

y Méthode par le calcul :

- développement de modèles thermodynamiques permettant de décrire la

solution des pores d'une pâte de ciment durcie (Schmidt, 1993),

Le tableau 1 donne quelques valeurs typiques de composition d'une solution d'eau des pores.

tableau 1: Composition et pH de l'eau des pores d'une pâte hydratée de CPA (Schmidt, 1993).Composition Na, mg/l K, mg/l CaOH+, mg/l Ca2+, mg/l Ca total, mg/l pH

1800 5400 90 40 130 13,4

L'eau des pores est une solution saturée en hydroxyde de calcium et de fortes

concentrations en alcalins (NaOH et KOH), ce qui lui confère un pH élevé (supérieur à

12,5).

1.1.3 Interactions déchets minéraux/matrice ciment

L'incorporation de déchets dans un matériau à base de ciment est source d'importantes

interactions pouvant exercer une action positive ou négative sur les produits obtenus. Depuis

quelques années, de nombreuses études de caractérisation de la stabilisation/solidification des

déchets minéraux avec du ciment ont été faites.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 40

1.1.3.1 Perturbation de la chimie du ciment

L'ajout de certains polluants à la pâte de ciment perturbe le processus d'hydratation (Hills,

1992 et 1993) et modifie les propriétés physiques du ciment hydraté (Bhatty, 1987, Hills 1992,

Taylor, 1992 et Diet, 1996,).

1.1.3.2 Mécanismes de rétention de polluants au sein d'une matrice ciment

Les polluants peuvent être fixés dans la matrice ciment selon différents mécanismes :

y Piégeage mécanique (Murat, 1990, Roy, 1992) : les polluants, dissous, sont piégés

dans des pores fermés et sous forme solide ils peuvent servir de centre de nucléation et

être piégés dans une gangue d'hydrates,

y Précipitation (Adaska, 1991, Mashni, 1994) : le milieu fortement alcalin et riche en

cations Ca2+ créé par l'hydratation de la pâte de ciment provoque la précipitation

d'hydroxydes métalliques (Conner, 1990) et de sels de calcium (Meric, 1979). Certains

métaux peuvent précipiter sous forme de carbonates métalliques par effet du dioxyde de

carbone de l'air (Conner, 1990). L’ensemble de ces composés sont peu solubles.

y Adsorption (Cocke, 1990, Adaska, 1991) : l'adsorption de composés exogènes à la

surface des hydrates dépend de la structure de leur surface. L'adsorption par les C-S-H

est importante en raison de leur grande surface spécifique et de charges négatives

superficielles non compensées.

y Insertion dans les hydrates : lors du gâchage les métaux en solution peuvent être

incorporés dans le réseau cristallin des hydrates par :

- Addition : intégration de l'ion métallique entre les couches structurelles de

l'hydrate. Seule la structure en feuillets du C-S-H permet ce processus (Bhatty,

1987).

- Substitution (Bensted, 1971, Bhatty, M.S.Y.,1987, Kumarthasan, 1990, Adaska,

1991, Mc Carthy, 1992, Richardson, 1993, Serclérat, 1996) : réaction d'échange

entre un atome de la structure cristalline de l'hydrate et un atome exogène. Tous

les hydrates peuvent intégrer des particules par substitution du calcium (cations

bivalents), de l'aluminium (cations trivalents). L'ettringite et les monosulfates

peuvent intégrer des sulfates (anions).

1.1.3.3 Interactions du plomb

Lors de son incorporation dans la pâte de ciment (pH>12,5) le plomb est solubilisé, ensuite,

soit il précipite soit il est incorporé dans les hydrates du ciment. Etant donné les conditions

imposées par la matrice ciment (pH > 12,6) de nombreux auteurs s'accordent pour dire que le

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 41

plomb précipite sous forme d'hydroxyde (Conner, 1990, Châtelet, 1995) sur la surface des

grains de ciment, retardant, le processus d'hydratation (Zhao,1992). Si le plomb est incorporé

dans les hydrates cela peut être par addition dans les C-S-H (Bhatty, J.I., 1993) ou par

substitution au calcium dans les C-S-H ou l'ettringite (Bishop, 1988, Komarneny, 1988). Dans

ce cas, le plomb est fortement fixé : Bishop a montré que même après une élimination totale

de l'alcalinité du matériau 75% du plomb est retenu.

Miyake (Miyake, 1988) a étudié l'immobilisation du plomb par la calcite et l'aragonite

(carbonates de calcium), en équilibrant ces deux carbonates de calcium avec des solutions

d'acétate de plomb. Il observe une très forte réactivité du plomb avec les carbonates. Pour des

temps d'immersion suffisamment longs, la calcite et l'aragonite sont complètement convertis

en cérusite (PbCO3). Les structures cristallines très différentes de la calcite, l'aragonite et la

cérusite suggèrent un processus de réaction par dissolution-cristallisation.

Les conditions rencontrées dans une matrice ciment sont a priori favorables à la fixation

du plomb majoritairement sous forme d’hydroxyde de plomb ou par incorporation dans

les hydrates.

1.1.3.4 Interactions du zinc

Le zinc, mis en solution lors de la préparation du mélange, peut précipiter sous forme

d'hydroxyde (Châtelet, 1995) retardant par le même processus que le plomb l’hydratation du

ciment (Arliguie, 1982). Etant donné les conditions imposées dans la matrice ciment (pH

élevé, concentration importante en ions calcium) de nombreux auteurs (Arliguie, 1982, Poon,

1985, Rossetti, 1995) s'accordent à dire que la seule phase hydratée contenant du zinc est

l'hydroxyzincate de calcium CaZn2 (OH)6.2H2O. Cependant Kantro (Kantro, 1975) note la

possibilité que le zinc soit inclu dans des cristaux de monosulfoaluminate de calcium et

Komarneny (Komarneny, 1988) pense que l'ion Zn2+ peut se substituer à Ca2+ dans les C-S-H.

Les conditions rencontrées dans une matrice ciment sont a priori favorables à la fixation

du zinc majoritairement sous forme d'hydroxyzincate de calcium : CaZn2 (OH)6.2H2O.

1.1.3.5 Pâte de ciment/Matrice vitreuse

La bibliographie, présentée au chapitre I, concernant l'altération de matériaux silicatés, tels

que les scories, indique que ces matériaux sont très sensibles à des solutions aqueuses dont le

pH est basique. Ainsi, le contact verre-pâte de ciment pourrait être très pénalisant en raison

d'une part du pH très basique imposé par ce milieu et d'autre part de la concentration en silice

maintenue faible par la formation de produits à base de silicium favorisant ainsi la poursuite

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 42

de l'altération. Dans ces conditions, les polluants (plomb et zinc), contenus dans les scories,

sont susceptibles d'être libérés (altération de la matrice silicatée) ou piégés dans le gel

(produit de l'altération).

1.1.4 Capacité à résister à une agression extérieure d'une pâte de ciment

Les différents hydrates de la pâte de ciment forment un milieu fortement basique, la solution

des pores est également très alcaline. Par conséquent, tous les milieux extérieurs (eau de pluie,

dioxyde de carbone) sont "acides". Le système chimique que représente la pâte est en

déséquilibre avec le milieu extérieur. Cependant, une pâte de ciment n'est pas un matériau

inerte et est capable de développer des « mécanismes de défense ».

Lorsque la pâte se trouve en contact avec un milieu différent de son "milieu naturel", les

équilibres chimiques des hydrates sont déplacés et le système tend vers un nouvel équilibre.

Pour cela la pâte de ciment met en œuvre deux types de mécanismes (Vernet, 1992) :

• Des mécanismes régulateurs internes permettent d'amortir et de stabiliser les variations

de concentration dans la phase aqueuse produites par des ions étrangers. Ces

mécanismes, liés aux équilibres chimiques des hydrates, constituent le pouvoir tampon

des matériaux à base de ciment et sont plus précisément présentés au paragraphe

suivant.

• Des mécanismes de construction de barrières d'hydrates : produits des réactions avec

le milieu extérieur. Ces barrières sont dues, comme l'avait observé Le Chatelier, à la

diffusion des ions agresseurs en sens inverse des ions fournis par le ciment. Cela

provoque une structuration particulière (en barrières) des produits de réactions qui

empêchent par la suite la progression des ions agresseurs vers le cœur du matériau. C’est

la meilleure possibilité de durabilité du matériau quand il doit faire face à un réservoir

quasi infini d’agents agressifs.

Le phénomène de carbonatation (réaction entre les hydrates du ciment (principalement

la portlandite) et le dioxyde de carbone de l'air) correspond à ce processus : on parle de

la « peau » du béton. La réaction de carbonatation est présentée au chapitre 3 § 3.3.

1.1.4.1 Mise en contact avec de l'eau : Lixiviation - Effet tampon

Lors de la mise en contact d’une pâte de ciment avec de l'eau, c'est à dire lors d'une lixiviation

"acide" (par comparaison avec la forte basicité de la pâte de ciment), l’équilibre existant entre

les phases liquides et solides du matériau est perturbé. Un processus de dissolution et de

transfert des espèces chimiques est enclenché pour atteindre un nouvel équilibre. La

concentration des espèces basiques dans la phase aqueuse des pores ainsi que son pH

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 43

s’abaissent. Ces variations sont régulées par la présence simultanée de nombreux hydrates du

ciment, c’est l’effet tampon. Il s’agit de réactions acido-basiques qui jouent un rôle important

vis-à-vis de la durabilité à long terme du matériau.

Ainsi, l’attaque d’une pâte de ciment par des eaux pures, faiblement agressives, provoque la

dissolution et le relargage des hydrates. Ce processus comprend plusieurs étapes (Neall, 1980)

et peut être décrit qualitativement :

- Dissolution et relargage rapide des hydroxydes NaOH et KOH, le pH de la solution

interstitielle, au départ souvent supérieur à 13,5, va baisser vers 12,5 au fur à mesure de

l'épuisement de ces espèces.

- Début de la dissolution de la portlandite. La portlandite, est le premier hydrate à jouer un

rôle dans les réactions de neutralisation. Cet hydrate peut se dissoudre, pour générer des

OH-, ou inversement précipiter pour consommer les OH- en excès. Une solution de

portlandite est donc capable de réguler son pH (pH ≈ 12,4). Ce pouvoir tampon constitue

un mécanisme régulateur important. Ensuite lorsqu’une partie de la portlandite a déjà été

lixiviée, les silicates et les aluminates, moins solubles, se décomposent progressivement.

A ce moment leur dissolution est incongruente (dissociation sélective non

stoechiométrique du calcium) ce qui provoque une diminution du rapport molaire

CaO/SiO2. Les C-S-H formés lors de l'hydratation d'un ciment ont un ratio CaO/SiO2 de

1,4 à 1,8 (Lea, 1970), quand le ratio atteint 0,8 le pH est proche de 11 (Berner, 1988). Le

système tampon Ca(OH)2/C-S-H régule la chute de pH de 12,5 à environ 11.

- Enfin, dissolution congruente des C-S-H. A long terme, lorsque la proportion d’acide

agresseur et le temps de contact sont très importants, le pH finit par baisser au-dessous de

9, domaine où aucun hydrate basique n’est stable. Du gypse et des hydroxydes de

silicium et d’aluminium précipitent et constituent un gel. Ce gel forme une barrière

diffusionnelle aux ions agresseurs (Duval, 1992).

Le mécanisme régulateur par effet tampon ne peut fonctionner que si la quantité d’hydrates est

suffisante. Il est également pris en défaut quand les produits des réactions acide-base sont

éliminés au fur et à mesure de leur formation. Cependant la matrice ciment a une grande

stabilité puisque par exemple une étude menée par Revertegat (Revertegat, 1992) sur une pâte

pure (échantillon de 4mm d'épaisseur et 70 mm de diamètre, Eau/Ciment (E/C) = 0,37) dans

des conditions très agressives (pH = 4 maintenu par bullage de dioxyde de carbone) montre

que la disparition totale de la portlandite n'est effective qu'après 2 ans de lixiviation.

La lixiviation « acide » conduit à des pertes de masses et d’alcalinité dues à la dissolution

de la portlandite et à la décalcification des autres hydrates. Cependant le mécanisme

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 44

auto-régulateur de la matrice ciment, lié au fort pouvoir basique (effet tampon) des

hydrates, lui donne une « résistance » qui assure la durabilité du matériau.

1.2 Etude du comportement des scories dans les contexteschimiques imposés par les matériaux à base de liant hydraulique

Les scories sont utilisées en substitut partiel au sable dans des bétons et des sables-ciments.

Les pores de ces matériaux sont partiellement saturés par une phase aqueuse fortement

basique.

Nous avons vu que l'altération des scories, matériaux silicatés, dépend notamment du contexte

physico-chimique. A priori le contact verre-pâte de ciment est très pénalisant en raison du pH

basique imposé par ce milieu. L’étude, dans un premier temps, du comportement des scories

mises au contact de solution très basique paraît donc importante.

Nous avons d’abord déterminé la composition des eaux des pores des bétons et des sables-

ciments ensuite nous avons étudié l’altération de la matrice vitreuse des scories et la

solubilisation des polluants dans ces différents contextes chimiques.

1.2.1 Détermination de la composition initiale de l’eaux des pores d’unmatériau à base de liant hydraulique

Pour déterminer la composition des eaux des pores du béton et du sable-ciment dans lesquels

sont mises les scories nous avons suivi le protocole développé par Bae (Bae, 1998). La

description du mode opératoire et les résultats obtenus sont présentés dans l'annexe 1.

Dans le tableau 2, sont présentées les compositions des eaux des pores synthétiques des deux

matériaux. Les deux solutions d'eaux des pores sont saturées en hydroxyde de calcium. Les

différences de concentrations en NaOH et KOH contrôlent les pH, très basiques. Afin de

s'assurer de la saturation des solutions en hydroxyde de calcium, on met 1 g de chaux lors de

la préparation des solutions qui sont ensuite filtrées avant utilisation. Les pH, présentés dans

le tableau 2, ont été mesurés sur des solutions synthétiques.

tableau 2 : Composition et pH des eaux des pores synthétiques.Concentration, en g/l

Matériaux Ca(OH)2 NaOH KOH pH

Béton 1 3,35 11,01 13,6

Sable-ciment 1 2,19 1,64 12,9

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 45

1.2.2 Etude de l’altération des matrices vitreuses des scories en contact avecdes eaux des pores synthétiques

La silice joue le rôle le plus important sur le contrôle de l'altération des matériaux silicatés.

Nous avons donc évalué de façon qualitative l’altération des matrices vitreuses des scories en

mesurant la concentration en solution de la silice lorsque les scories sont mises au contact des

eaux des pores.

Afin d’étudier l’influence de la composition des eaux des pores sur la solubilisation de la

silice, des scories en l'état ont été mises en contact avec des solutions d'eau des pores de béton

(EdPB) et de sable-ciment (EdPSC) ainsi qu’avec de l’eau déminéralisée pour avoir une

référence. Le ratio massique solution de lixiviation/scories est de 10. Le temps de contact est

de 3 jours avec une agitation par retournement.

Le pH des lixiviats, lors de la mise en contact des scories avec les eaux des pores de béton ou

de sable-ciment, est fortement basique. Si le lixiviant est de l'eau déminéralisée le pH des

solutions, au départ proche de 6,5, atteint, après 3 jours une valeur de 10,6 pour les scories

ISF et 9,9 pour les scories LBF. Nous observons, comme il a été relevé dans la bibliographie,

que l'altération de matériaux silicatés se traduit par une augmentation du pH, le système

évoluant vers un pH d'équilibre imposé par le matériau.

La figure 1 montre d'abord que l’altération de la matrice vitreuse (estimée en quantité

relarguée de Si) de la scorie LBF est plus importante que celle de la scorie ISF dans les

trois contextes chimiques étudiés.

Pour les deux scories, la silice est plus solubilisée lorsque le lixiviant est l'eau des pores de

béton. Par contre, elle est moins solubilisée lorsque le lixiviant est l'eau des pores de sable-

ciment que quand il s’agit d’eau déminéralisée. Or, le contexte chimique de l’eau des pores de

sable-ciment est plus proche de celui de l’eau des pores de béton que de celui de l’eau

déminéralisée. Une partie de la silice dissoute a donc pu être consommée par la formation

d’une phase solide. Nous avons vérifié cette hypothèse en mettant en œuvre le même test mais

cette fois avec une eau

des pores de sable-ciment

modifiée : sans Ca(OH)2.

figure 1 : solubilisation dela Si. 0

0,5

1

1,5

2

2,5

EdPB EdPSC eau déminéralisée

Si,

mg/

l

isf, essai 1

isf, essai 2

lbf, essai 1

lbf, essai 2

1 essai

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 46

Les résultats présentés dans la figure 2 montrent que la solubilisation de la silice est

apparemment nettement plus importante dans une eau des pores de sable-ciment modifiée

(sans Ca(OH)2). Cependant, les deux solutions (avec ou sans Ca(OH)2) ont le même pH, il

s'agit donc d'un artefact. En effet, dans le cas d'une eau des pores non modifiée, la silice

dissoute a pu réagir avec le calcium en solution pour former par exemple des silicates de

calcium hydratés (C-S-H). Cette réaction réduit la quantité de silice en solution mais est

l'indice d'une altération plus importante de la matrice vitreuse puisque la silice est

consommée (pour former des C-S-H) au fur et à mesure de sa mise en solution.

figure 2 : Solubilisation de laSi.

0

0,5

1

1,5

2

2,5

isf, essai 1 lbf, essai 1

Si,

mg/

l

EdPSC

EdP SC sans Ca(OH)2

Dans le contexte chimique des eaux des pores des matériaux à base de liant hydraulique

la silice, constitutive des matrices vitreuses des scories, est solubilisée en raison d’abord

du pH basique de ces solutions et ensuite de la présence de Ca2+ en solution qui en

favorisant la précipitation de C-S-H intensifie la solubilisation de la silice.

1.2.3 Etude du relargage du plomb et du zinc des scories au contact d’eauxdes pores synthétiques

L’objectif de ce test est d’étudier, parallèlement à l'altération de la matrice vitreuse, le

relargage du plomb et du zinc. Les scories sont mises en contact avec les eaux des pores de

béton (EdPB) et de sable-ciment (EdPSC) et de l'eau déminéralisée.

Les concentrations en plomb et en zinc dans les lixiviats, obtenus lors de l'essai présenté au

paragraphe précédent, ont été mesurées. La concentration en zinc dans les lixiviats des scories

mises en contact avec de l'eau déminéralisée est inférieure à la limite de quantification de

l'appareil d'analyses utilisé (10 µg/l) ; la concentration en plomb est au maximum de 50 µg/l.

Ces résultats coïncident avec les résultats obtenus, pour ces niveaux de pH (10,6 pour les

scories ISF et 9,9 pour les scories LBF), par les tests de solubilisation réalisés sur scories

broyées (315µm). Ils ont été présentés au chapitre I §3.2.

Les résultats obtenus avec les eaux des pores sont présentés dans la figure 3 et la figure 4.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 47

La figure 3 montre que le plomb des scories ISF est plus solubilisable que le plomb des

scories LBF. Cela concorde avec les résultats obtenus sur scories broyées présentés au

chapitre 1 § 3.2.1. Cependant on peut remarquer que pour les scories ISF, le niveau de

solubilisation mesuré sur scories en l’état et scories broyées est identique. Par contre, pour les

scories LBF le niveau de solubilisation est moins important quand il est mesuré sur les scories

en l’état. Cela peut être dû à la forme sous laquelle se trouve le plomb et sa localisation

dans les scories. En effet, dans les scories ISF, 80 % du plomb est sous forme de billes de

métal, parfois situées en périphérie des grains de scories. Au contraire, dans les scories LBF,

le plomb n'existe qu'à 23 % sous forme de billes de métal et celles-ci sont insérées dans la

matrice vitreuse, 77 % du plomb est porté par la phase vitreuse.

figure 3: Concentrations en Pb des lixiviats. figure 4 : Concentrations en Zn des lixiviats.

0

100

200

300

400

EdPB EdPSC

plom

b, m

g/l

ISF, essai 1 ISF, essai 2

LBF, essai 1 LBF, essai 2

0

510

1520

25

EdPB EdPSC

Zin

c, m

g/l

ISF, essai 1 ISF, essai 2

LBF, essai 1 LBF, essai 2

La figure 4 indique que le zinc des scories ISF est plus solubilisé que le zinc des scories LBF.

Ces résultats concordent avec les résultats des tests de solubilisation sur matériaux broyés : les

scories LBF contiennent deux fois plus de zinc que les scories ISF et pourtant c'est le zinc des

scories ISF qui est le plus solubilisé. Les informations minéralogiques dont nous disposons ne

permettent pas de mettre en évidence si cette différence est due à la forme sous laquelle se

trouve le zinc.

Par ailleurs, pour le même type de scories, une quantité de zinc plus importante est solubilisée

quand les scories sont au contact d’eau des pores de béton. Ce résultat correspond aux

solubilités mesurées sur scories broyées, présentées au chapitre I§ 3.2.1.

Ces résultats, mis en perspective avec ceux concernant le relargage de la silice présentés au

paragraphe précédent, montrent qu’il n’y a pas de relation directe entre l’altération de la

matrice vitreuse (évaluée par la solubilisation de la silice) et la solubilisation du plomb

et du zinc. En effet, c’est pour les scories LBF que la silice est la plus solubilisée (au contact

d’eaux des pores) alors que c’est pour les mêmes scories que le plomb et le zinc le sont le

moins. Par contre il apparaît, notamment pour le plomb, que c'est la forme sous laquelle il se

trouve et sa "localisation" dans les grains de scories qui contrôlent son relargage.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 48

Le plomb et le zinc solubilisé, dans les contextes chimiques des eaux des pores, ne

résultent pas directement de l'altération de la matrice silicatée des scories. Leur mise en

solution dépend d’abord, dans ces conditions et comme nous l’avions vu au chapitre I,

de la forme sous laquelle sont présents les deux polluants dans le matériau.

1.3 Les matériaux à base de liant hydraulique étudiés

Les matériaux ont été fabriqués, par CTG (béton) et Colas (sable-ciment). L’objectif n’était

pas de mettre au point de nouvelles formulations mais d’étudier la faisabilité d’intégration des

scories en l’état dans des matériaux de compositions standards.

Le taux de substitution du sable par les scories a été décidé à l'issue de la vérification par

Colas et CTG que les matériaux respectaient les spécifications (propriétés mécaniques,

physiques) qui contrôlent habituellement la qualité de ces produits et d'une étude préliminaire

de validation environnementale mise en œuvre par Polden (seulement pour les bétons).

Celle-ci n’avait pas pour objectif de représenter des conditions réelles d’utilisation mais des

conditions extrêmes (échantillon broyé, lixivié à pH contrôlé 5 et 12,5) afin de faire une

présélection des matériaux. Le taux de substitution du sable par les scories est de 13 % dans

les bétons et de 50 % dans les sables-ciments.

Nous présentons ici, pour chaque type de matériau les critères mécaniques et chimiques que

devraient satisfaire les scories pour être substituées au sable d’après les normes en vigueur,

ensuite la composition des matériaux et enfin leurs caractéristiques physico-chimiques.

1.3.1 Les bétons

1.3.1.1 Les scories : granulats pour béton?

Des normes spécifient les caractéristiques physico-chimiques auxquelles doivent répondre

chaque constituant d'un béton. Les spécifications concernant les granulats utilisés dans la

préparation d'un béton, sont stipulées dans la norme NF P 18-541 (1994) qui vient d'être

récemment remplacée par la norme NF P 18-540 (1997). Cette norme permet de classer les

granulats pour bétons hydrauliques en 4 classes (A, B, C, D) en fonction de caractéristiques

intrinsèques (masse volumique réelle, absorption d'eau, friabilité des sables…) et de

caractéristiques de fabrication (granularité, aplatissement, angularité, propreté superficielle,

teneur en chlore, en sulfate…). Nous avons pris cette norme comme référence

puisqu'actuellement aucune norme n'envisage l'utilisation des scories comme granulats pour

béton.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 49

Les scories satisfont à la plupart des caractéristiques requises à l’exception des points

suivants:

• La granulométrie : les scories ISF et LBF dont la granulométrie est comprise entre 0 et

4 mm appartiennent à la catégorie des sables. Cependant la distribution granulométrique

des scories est différente de celle d'un sable (telle qu'elle est requise dans la norme), les

scories contiennent trop peu de fines. Cette perturbation de la distribution

granulométrique a une influence négative sur la résistance mécanique du matériau mais

peut être compensée par l’ajout de fines.

• La densité : il n'y a pas de limite de densité des granulats dans la norme NFP 18-541

mais elle est sous-entendue par le type de matériau concerné. Des granulats calcaires ou

siliceux ont une densité d'environ 2,6 alors que la densité des scories est de 3,6 à 3,9.

Cependant, la densité du ciment utilisé pour préparer les bétons était de 3,15 ainsi le

contraste de densité n’était pas suffisamment important pour provoquer une ségrégation

granulats/pâte.

• La teneur en soufre : la teneur en soufre total admise, exprimée en pourcentage de

soufre, varie de 0,4 % à 1,5 % en fonction de la catégorie de granulats et dans le cas des

laitiers de hauts fourneaux elle peut être de 2 %. Les deux scories ont des teneurs en

soufre inférieures à celle du laitier : les scories ISF en contiennent 1,58 % et les scories

LBF 0,7 %.

D'autres critères, comme la teneur en plomb et en zinc, ne sont pas spécifiés dans la norme

P 18-541. Ces métaux ont, en dehors de leur caractère polluant, un effet de retardateur voir

d'inhibiteur de prise comme nous l'avons vu dans la bibliographie. Une étude préliminaire sur

un mortier, mise en œuvre par CTG, a montré que pour un taux de substitution de 50 % du

sable par les scories il n'y a pas prise mais que pour un taux de 30 % la prise est normale.

1.3.1.2 Compositions des bétons

Trois bétons ont été préparés par CTG. Le béton témoin, noté Bt, ne contient pas de scories.

Deux bétons contenant des scories en substitut partiel au sable : le béton avec les scories ISF,

noté Bisf et le béton avec les scories LBF, noté Blbf. Le taux de substitution au sable est de

13 % soit 3,5 % du matériau.

La formulation utilisée pour préparer les trois bétons est celle du béton B22 à 320 kg/m3 de

ciment. Ce type de béton est vendu prêt à l'emploi pour des usages courants : fondation, dalle,

mur....

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 50

Les formulations des trois bétons sont indiquées dans le tableau 3. Le choix de CTG a été de

ne pas compenser la perturbation de la distribution granulométrique due à l’introduction des

scories.

tableau 3 : Compositions des bétons.Constituants Composition, en kg/m3

Bt Bisf BlbfCIMENT CPJ CEM II 320SABLE 0/4 mm 792 732 736GRAVILLON 4/20 mm 1010 1010 1010SCORIES ISF ou LBF 81,4 81,7EAU 200

Le sable et les granulats utilisés sont siliceux.

Le ciment utilisé est un ciment Portland composé, CPJ CEM II/B, c'est à dire à 65-79 % en

masse de clinker, le complément est un filler calcaire (21-35 %). L’analyse élémentaire du

CPJ CEMII/B utilisé est présentée dans le tableau 4.

tableau 4 : Analyse élémentaire (en %) du ciment CPJ CEMII/B.teneur % SiO2 Al2O3 Fe2O3 TiO2 MnO CaO MgO SO3 K2O Na2O

CPJCEMII/B 17,6 3,58 2,65 0,17 0,02 60,3 3,15 2,63 0,53 0,16

Les trois bétons ont été fabriqués avec le même lot de ciment. Les teneurs en plomb et en zinc

du ciment, présentées tableau 5, ont été déterminées afin d’évaluer le bruit de fond est

imputable au ciment. Celui-ci est négligeable.

tableau 5 : Teneurs en Pb et en Zn du ciment CPJ CEMII/B.Eléments, mg/kg Pb Zn

CPJ CEMII/B 14 40

Les bétons ont été moulés en blocs de 10*10*40 cm et stockés dans un atmosphère humide

pendant 28 jours.

1.3.1.3 Analyse élémentaire des bétons

Nous avons déterminé les teneurs en sodium, potassium, calcium, plomb et zinc des trois

bétons. Les premiers renseignent sur "l'alcalinité" des matériaux et son origine. Par ailleurs,

cet essai permet de s’assurer de l’homogénéité des matériaux produits en comparant le

contenu total en plomb et zinc mesuré expérimentalement et calculé (à partir des quantités de

scories introduites dans le mélange et de leur teneur en plomb et zinc) et ainsi d'estimer le

bruit de fond en plomb et zinc dû aux composants autres que les scories puisque l'essai est

également mené sur le matériau témoin.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 51

1.3.1.3.1 Mode opératoire

Il s'agit d'une mise en solution par attaque d'un mélange d'acide chlorhydrique et d'acide

nitrique (méthode dite à l'eau régale) selon la norme NF X 31-151 suivie d'un dosage du

plomb, du zinc, des alcalins et du calcium par spectrométrie d'Emission Atomique à plasma

d'Induction ICP-AES.

1.3.1.3.2 Résultats de l'analyse élémentaire

Les résultats de l'analyse élémentaire en calcium, sodium, potassium des trois bétons sont

présentés dans le tableau 6. Les différences de teneur en potassium et sodium sont dues aux

caractéristiques des scories. Les bétons contenant des scories ISF contiennent le plus de

sodium et de potassium. La forte teneur en calcium est liée à la nature du constituant

complémentaire du clinker qui est du filler calcaire et représente 21-35 % en poids du ciment.

tableau 6 : Analyse élémentaire en Ca, Na et K des trois bétons.Matériaux Ca, g/kg Na, mg/kg K, mg/kg

B t 63,3 400 920

B isf 55,5 650 1 000

B lbf 57,3 400 860

Dans le tableau 7, le contenu total, mesuré expérimentalement, en plomb et zinc des deux

bétons contenant des scories est comparé à celui calculé à partir des pourcentages de scories

introduits dans les matériaux. Il y a une bonne correspondance entre les résultats

expérimentaux et calculés. Dans le cas du béton témoin les teneurs en plomb et zinc sont

imputables aux autres constituants (ciment, granulats...) et sont relativement importantes.

tableau 7 : Analyse élémentaire en Pb et Zn des trois bétons.Matériaux Pb, mg/kg Zn, mg/kg

eau régale calculé eau régale calculé

B t 80 - 350 -

B isf 310 240 2 510 2 400

B lbf 1 170 1 220 3 610 3 900

1.3.1.4 Caractéristique physique : la porosité

La porosité du béton a été mesurée par la méthode de porosimétrie au mercure au laboratoire

de CTG à Bergamo (Italie).

Cette méthode permet de mesurer le facteur de porosité, exprimé en pourcentage volumique

représentant le volume des pores ouverts, et la répartition porosimétrique .

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 52

1.3.1.4.1 Principe de la mesure de porosité par porosimétrie au mercure

Le principe de la porosimétrie au mercure est basé sur le fait que le mercure se comporte

comme un liquide non mouillant avec la plupart des substances. En conséquence, il ne pénètre

dans les ouvertures et les fissures des matériaux que si une pression est appliquée.

Les mesures sont effectuées sur des échantillons prélevés au cœur des éprouvettes. Les

échantillons sont préalablement séchés puis dégazés dans la cellule de porosimétrie.

Les mesures sont effectuées lors de la montée en pression (intrusion du mercure). On obtient

une courbe porosimétrique représentant pour chaque palier de pression exercée le volume de

mercure pénétré dans les pores. Le volume total de mercure pénétré dans les pores, rapporté

au volume apparent de l'échantillon, permet de connaître la valeur du facteur de porosité.

Les calculs de porosité reposent sur l'équation de Washburn et Jurin qui exprime qu'un liquide

non mouillant (le mercure) peut pénétrer dans les pores d'un matériau si on exerce une

pression p sur ce liquide. Plus le rayon d'accès du pore (r) est petit, plus la pression (p) est

forte :

r

cos2p

θγ−=

γ : tension superficielle du liquide (mercure : 484 dynes/cm ; 1 dyne = 10-5N),

θ : angle de mouillage du liquide sur le matériau (mercure : 130°).

1.3.1.4.2 Avantages et inconvénients de la porosimétrie au mercure

Cette méthode permet une mesure rapide, avec une préparation simple de l'échantillon

(Charpin, 1987). La gamme de mesure des rayons d'accès aux pores est très large (2 à

106 nm). Elle est reproductible d'un appareil à l'autre (van Brakel, 1981). Elle permet d'établir

un histogramme des diamètres d'accès des pores.

Certains auteurs restent très critiques vis-à-vis de cette méthode destructive (Feldman, 1984) :

les fortes pressions peuvent endommager la structure poreuse (écrasement, déformation…).

De plus, certaines erreurs peuvent intervenir lors de la préparation de l'échantillon (séchage,

dégazage, fissuration).

1.3.1.4.3 Porosité des bétons

Le facteur de porosité et la distribution porosimétrique ont été déterminé par porosimétrie au

mercure sur trois échantillons de béton témoin afin de vérifier la reproductibilité des résultats.

Le facteur de porosité est de 10,5 %.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 53

Le volume poreux cumulé est de 0,046 cm3/g. Si on considère la répartition des rayons d'accès

aux pores il y a essentiellement des micropores (< 100 nm) et des mésopores (de 100 à 600

nm) les macropores (> 600 nm) représentent un faible pourcentage. Les graphiques

représentant le volume poreux cumulé et la distribution porosimétrique sont présentés dans

l’annexe 2.

1.3.1.5 Comportement des bétons dans différents contextes chimiques

Le caractère dangereux d'un matériau pour l'environnement dépend du comportement du

matériau lorsqu’il est exposé au milieu extérieur. Le comportement des bétons a été étudié

dans des contextes chimiques plus ou moins agressifs à l’aide du test de Capacité de

Neutralisation Acide et du test de solubilisation en fonction du pH.

1.3.1.5.1 Résultats de Capacité de Neutralisation Acide des bétons (CNA)

Ce test, mis en œuvre selon le protocole présenté au Chapitre I - § 3.1.1, a été répété deux fois

afin de s'assurer de la reproductibilité. La figure 5 représente la Capacité de Neutralisation

Acide (CNA) des trois bétons.

Le pH "naturel" des bétons est très basique (supérieur à pH 13). Les courbes de Capacité de

Neutralisation Acide des trois bétons ont la même allure. La CNA, comme le montre la

comparaison de la figure 5 et la figure 6, est fortement influencée par la nature calcaire du

constituant complémentaire au clinker dans le ciment qui représente 21 % du ciment. En effet,

de 0 à 2 moles d’acide/kg de béton, la CNA est due au pouvoir tampon des alcalins, de la

portlandite, des C-S-H et aussi des carbonates. Le point d'équivalence carbonate/bicarbonate

se situe autour de pH 8,3. Ensuite le palier intermédiaire à pH 7 est dû aux bicarbonates. Le

point d'équivalence bicarbonate/acide carbonique se situe autour de pH 4,5.

figure 5: CNA des trois bétons. figure 6 : Courbe de titration d'un mélangehydroxydes-carbonates d'après Sawyer, 1994.

0

2

4

6

8

10

12

14

0 1 2 3 4 5

mol acide/kg de matériau

pH

Bt B isf B lbf

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 54

L’influence d’une substitution partielle du sable par des scories est notable au-delà de 2 moles

d’acide/kg de matériau. En effet, les zones de chute de pH (de pH 10 à 7 puis de pH 7 à 4)

sont décalées pour les trois matériaux. La CNA du Bisf est inférieure à celle du Blbf qui elle

même est légèrement inférieure à celle du Bt. Le fait que la CNA du Bisf soit inférieure à celle

du Blbf coïncide avec les résultats de CNA obtenus sur scories broyées, présentés au

chapitre 1§3.1.2, qui montraient que les scories ISF ont, dans la gamme de pH 7 à 4, une CNA

inférieure à celle des scories LBF.

1.3.1.5.2 Solubilisation du plomb et du zinc dans les trois bétons

Le test de solubilisation est mis en œuvre selon le protocole présenté au Chapitre 1 - § 3.1.1.

La figure 7 et la figure 8 représentent la solubilisation du plomb et du zinc, contenus dans les

trois bétons, en fonction du pH. Cet essai a été mis en œuvre deux fois et nous avons observé

une bonne reproductibilité.

Le plomb et le zinc ont un caractère amphotère avec un minimum de solubilisation pour des

pH voisin de 10.

A pH très acide, la solubilisation du plomb et du zinc des bétons contenant des scories est

limitée par le contenu total. Par contre, pour le béton témoin, tout le plomb et le zinc présents

ne sont pas « disponibles ». Cette différence peut être due au niveau d'intégration du plomb et

du zinc dans les bétons. Dans le béton témoin le plomb et le zinc sont plus fortement intégrés

dans le réseau silicate de la pâte hydratée. Dans les bétons avec scories, le plomb et le zinc

sont contenus dans la matrice vitreuse des scories or nous avons vu au Chapitre 1 - § 3.2 que

celle-ci n'a aucun pouvoir de fixation des métaux (plomb et zinc) à pH acide.

En milieu très alcalin (pH> 13), la solubilisation du plomb et du zinc n'est pas limitée par le

contenu total. La figure 7 et la figure 8 montrent également qu'à pH basique, pour les bétons

contenant des scories, le plomb est plus soluble que le zinc.

figure 7 : Solubilisation du Pb des bétons. figure 8 : Solubilisation du Zn des bétons.

0,01

0,10

1,00

10,00

100,00

1 000,00

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb

mg/

l

B t B isf B lbf

CT Bt CT Bisf CT Blbf

0,01

0,10

1,00

10,00

100,00

1 000,00

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn

mg/

l

B t B isf B lbf

CT Bt CT Bisf CT Blbf

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 55

Afin d’évaluer l’influence de l’incorporation des scories dans les bétons sur la solubilisation

du plomb et du zinc des scories sont comparées, dans la figure 9 et la figure 10, les

solubilisations du plomb et du zinc, ramenées en kilogramme de scories, des scories seules et

des bétons contenant des scories.

La figure 9 montre qu’à pH acide la solubilisation du plomb est du même niveau, dans les

deux cas, voir légèrement supérieure. En effet, dans ce domaine de pH, les hydrates,

complètement dissous, ne peuvent pas fixer le plomb.

A pH basique la solubilisation du plomb est diminuée pour les scories ISF et LBF lorsqu’elles

sont dans les bétons. La diminution de la solubilisation du plomb à pH basique montre qu’il

est retenu peut-être par insertion dans les hydrates du ciment. Cette réaction peut intervenir

lors de la prise ou lors de la maturation du béton mais on ne peut pas exclure que cette

réaction ait lieu pendant le test lui même. En effet le broyage du matériau libère le plomb

(notamment le plomb sous forme de sphérolithes de métal) qui peut, pendant la durée du test,

être fixé par les hydrates.

figure 9 : Comparaison de la solubilisation du Pb, ramenée en kilogramme de scories, des bétonscontenant des scories et des scories seules.

0,1

1

10

100

1000

10000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories ISF Bisf CT Pb - ISF

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories LBF Blbf CT Pb - LBF

La figure 10 montre qu’à pH acide (entre pH 4 et 7) la solubilisation du zinc est plus

importante pour les scories ISF et LBF lorsqu’elles sont dans les bétons ; par contre à pH

basique la solubilisation du zinc est du même niveau.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 56

figure 10 : Comparaison de la solubilisation du Zn, ramenée en kilogramme de scories, des bétonscontenant des scories et des scories seules.

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories ISF Bisf CT Zn - ISF

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

1000000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories LBF Blbf CT Zn - LBF

L’incorporation des scories ISF ou LBF dans un béton de formulation standard (B22)

diminue la solubilisation du plomb à pH basique et augmente la solubilisation du plomb

et surtout du zinc pour des pH compris entre 7 et 4.

1.3.2 Les sables-ciments

Les sables-ciments constituent la couche de base dans une structure routière telle que celle

schématisée dans la figure 11.

figure 11 : Schéma d'une structure de route.

1.3.2.1 Les scories : des granulats pour les sables-ciments?

Les sables utilisés dans la fabrication de sable-ciment n’ont pas de caractéristiques physico-

chimiques spécifiques à respecter, ce sont les performances du matériau fini qui sont

considérées.

Notons toutefois que si la densité relativement élevée des scories ne constitue pas un

problème technique elle a un coût économique puisque le sable-ciment est vendu « au

kilomètre » et non pas au poids, or une densité plus élevée augmente les coûts de transport….

1.3.2.2 Compositions des sables-ciments

Trois sables-ciments ont été préparés par Colas. Le sable-ciment témoin, noté SCt, ne contient

pas de scories. Deux sables-ciments contenant des scories : le sable-ciment avec les scories

Couche de roulement : béton bitumineux

Couche de base : sable ciment

couche de fondation

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 57

ISF, noté SCisf et le sable-ciment avec les scories LBF, noté SClbf. Le taux de substitution au

sable est de 50 %, soit 47 % du matériau.

La formulation utilisée pour préparer les trois sables-ciments est couramment utilisée par les

constructeurs routiers. La composition des sables-ciments est présentée dans le tableau 8.

tableau 8 : Composition des sables-ciments.Composants Composition, en %

SCt SCisf SClbf

calcaire du Boulonnais 0/6 94,5 46,5 46,5

scories ISF ou LBF - 47 47

liant routier Ligex 2 R 5,5

Le liant utilisé est adapté par les cimentiers aux contraintes de la mise en œuvre de ce

matériau. C'est donc un liant qui présente une courbe de durcissement progressive. La

composition du Ligex 2 R utilisé est présentée dans le tableau 9.

tableau 9 : Composition du ligex 2 R.Elément, % SiO2 Al 2O3 Fe2O3 TiO2 MnO CaO MgO SO3 K2O Na2O P2O5 SrO

Ligex 2R 30,4 8,4 1,6 0,5 0,2 46,5 6,14 - 0,37 0,36 0,08 0,07

1.3.2.3 Analyse élémentaire des sables-ciments

Pour les mêmes raisons que pour les bétons, les teneurs en sodium, potassium, calcium,

plomb et zinc des trois sables-ciments ont été déterminées. La minéralisation a été mise en

œuvre selon le protocole présenté au § 1.3.1.3.

Les résultats de l'analyse élémentaire en calcium, sodium, potassium des trois sables-ciments

sont présentés dans le tableau 10. La forte teneur en calcium est liée à la nature calcaire des

granulats alors que les variations de teneurs en alcalins sont dues aux caractéristiques des

scories.

tableau 10 : Analyse élémentaire en Ca, Na et K des sables-ciments.Matériaux Ca, g/kg Na, mg/kg K, mg/kg

SC t 342 410 520

SC isf 241 3 100 3630

SC lbf 208 1 600 1 160

La comparaison, tableau 11, du contenu total, en plomb et zinc des deux sables-ciments

contenant des scories, mesuré expérimentalement et de celui calculé, à partir des pourcentages

de scories introduits dans les matériaux, montre que les matériaux sont homogènes.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 58

Concernant le sable-ciment témoin les teneurs en plomb et zinc constituent un bruit de fond

faible.

tableau 11 : Analyse élémentaire en Pb et Zn des sables-ciments.Matériaux Pb, mg/kg Zn, mg/kg

eau régale calculé eau régale calculé

SC t 20 - 50 -

SC isf 4 500 3 275 34 700 32 850

SC lbf 10 700 16 600 44940 53 160

1.3.2.4 Caractéristiques physiques des sables-ciments

La porosité et la perméabilité des sables-ciments ont été mesurées. Ces mesures ont été faites

sur le sable-ciment témoin.

1.3.2.4.1 Porosité

Le facteur de porosité et la distribution porosimétrique du sable-ciment témoin ont été

mesurés par porosimétrie au mercure. Cet essai, réalisé selon la méthode décrite au § 1.3.1.4,

a été mis en œuvre par CTG.

Le facteur de porosité du sable-ciment est 11,75 %. Le volume poreux cumulé est de

0,05 cm3/g. La porosité du sable-ciment est essentiellement constituée de micropores (< 100

nm). Les graphiques représentant le volume poreux et la distribution porosimétrique sont dans

l’annexe 2.

1.3.2.4.2 PerméabilitéDans un milieu poreux, la perméabilité est influencée par l'importance de l'interconnexion des

vides, des discontinuités de la structure et du réseau poreux.

1.3.2.4.2.1 Définition de la perméabilité à l'eau

La perméabilité K d'un matériau caractérise son aptitude à se laisser traverser par un fluide

soumis à un gradient de pression. K est défini par la relation de Darcy qui exprime le débit

volumique Q d'un fluide de viscosité µ, traversant une épaisseur e de matériau, de section

apparente A, sous la différence de pression dP :

( ) e/dPAµ/KQ **−=

Cette relation suppose un régime d'écoulement laminaire dans les pores du matériau saturé. K,

homogène à une aire, s'exprime en m2. La perméabilité est une caractéristique intrinsèque du

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 59

matériau ; elle est donc indépendante de la nature du fluide utilisée pour sa mesure. Si le

fluide est l'eau alors le coefficient de perméabilité Kw , exprimé en m/s, est :

µe/weKKw *=

we : poids volumique de l'eau en Nm-3

µe : viscocité e l'eau en Nm -2.s

D'après cette équation une perméabilité de 1m2 correspond à un coefficient de perméabilité de

10+7 m/s.Un des problèmes de la mesure de la perméabilité à l’eau d’un matériau à base de

liant hydraulique est qu’une fraction du matériau se trouve solubilisé lors du contact avec

l’eau modifiant ainsi la structure poreuse et par conséquent la perméabilité.

1.3.2.4.2.2 Protocole et résultats de mesures de perméabilité à l'eau

La perméabilité à l'eau du sable-ciment témoin a été mesurée par le laboratoire de Génie Civil

et Urbanisme de l'INSA de Lyon. L'échantillon de 3,9 cm de hauteur et 8 cm de diamètre est

placé dans une bague en PVC de diamètre intérieur de 9 cm. L'espace vide entre la bague et

l'échantillon est rempli par un polymère. La bague est ensuite placée dans la cellule de

perméabilité. L'essai se fait à charge hydraulique constante en utilisant une bouteille de

Mariotte ou un réservoir mis sous pression.

Le coefficient de perméabilité du sable-ciment témoin est important : 4.10-6 m/s. L’eau

peut facilement percoler au travers de ce matériau.

1.3.2.5 Comportement des sables-ciments dans différents contexteschimiques

Comme pour les bétons le comportement des sables-ciments dans des contextes chimiques

plus ou moins agressifs a été évalué à l'aide d'un test de Capacité de Neutralisation Acide et

d'un test de solubilisation des polluants en fonction du pH.

1.3.2.5.1 Résultats de Capacité de Neutralisation Acide des sables-ciments

Ce test est mis en œuvre selon le

protocole présenté au chapitre I - § 3.1. 1.

L'essai a été mis en œuvre deux fois. La

figure 12 représente la CNA des trois

sables-ciments.

figure 12 : Capacité de Neutralisation Acidedes trois sables-ciments.

1

3

5

7

9

11

13

0 5 10 15 20 25

mol acide/kg de matériau

pH

SC t SC isf SC lbf

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 60

Le pH naturel des sables-ciments est basique (> 11,5). Tant que le nombre de moles

d'acide /kg de matériau est inférieur à 6, les trois matériaux ont le même comportement. La

zone de chute de pH est décalée pour le matériau témoin et ceux contenant des scories. Les

courbes se rejoignent à l'asymptote (point à 22 moles d'acide/kg de matériau).

Le pouvoir basique des sables-ciments est faible de pH 11,7 à 7. C'est dans cette gamme de

pH que l'on voit le pouvoir basique des hydrates du liant mais le sable-ciment ne contient que

5 % de liant.

Par rapport aux observations faites pour les bétons c'est le matériau témoin qui a la plus forte

CNA pour des pH inférieurs à 6. La contribution des scories est "négative". Cela est dû à la

nature des granulats auxquels les scories sont substituées : il s'agit de granulats calcaires et

non de sables siliceux. Il est évident que ce type de granulats a une CNA supérieure à celle des

scories.

1.3.2.5.2 Solubilisation du plomb et du zinc dans les sables-ciments

Ce test est mis en œuvre selon le protocole présenté au chapitre I - § 3.2. L'essai a été répété

deux fois. La figure 13 et la figure 14 représentent la solubilisation du plomb et du zinc,

contenus dans les trois bétons, en fonction du pH.

Le plomb et le zinc ont un caractère amphotère avec un minimum de solubilité pour des pH

entre 7 et 11 pour le plomb et 8 et 11 pour le zinc.

A pH très acide, la solubilisation du plomb et du zinc des sables-ciments contenant des scories

est limitée par le contenu total.

En milieu alcalin, et même pour les valeurs extrêmes de pH (> 13) la solubilisation du plomb

et du zinc n'est pas liée au contenu total.

figure 13 : Solubilisation du Pb des sables-ciments.figure 14 : Solubilisation du Zn des sables-ciments.

0,01

0,10

1,00

10,00

100,00

1 000,00

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb

mg/

l

B t B isf B lbf

CT Bt CT Bisf CT Blbf

0,01

0,10

1,00

10,00

100,00

1 000,00

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn

mg/

l

B t B isf B lbf

CT Bt CT Bisf CT Blbf

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 61

La comparaison, figure 15 et la figure 16 de la solubilisation du plomb et du zinc, ramenée en

kilogramme de scories, des scories seules et des sables-ciments contenant des scories, permet

d’évaluer l’influence de l’incorporation des scories dans les sables-ciments sur la

solubilisation des polluants.

La figure 15 montre qu’à pH basique la solubilisation du plomb est légèrement inférieure pour

les scories ISF et LBF lorsqu’elles sont dans les sables-ciments ; il en est de même dans la

zone autour de pH 7 ; à pH très acide le niveau de solubilisation est identique dans les deux

cas.

figure 15 : Comparaison de la solubilisation du Pb, ramenée en kilogramme de scories, des sables-ciments préparés avec des scories et des scories seules.

0,1

1

10

100

1000

10000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories ISF SCisf CT Pb - ISF

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories LBF SClbf CT Pb - LBF

La figure 16 montre que la solubilisation du zinc contenu dans les scories ISF et LBF est, à pH

acide et basique, identique pour les scories seules et pour le sable-ciment ; dans la zone de pH

8-12 elle est plus faible lorsque les scories sont dans le sable-ciment.

figure 16 : Comparaison de la solubilisation du Zn, ramenée en kilogramme de scories, des sables-ciments contenant des scories et des scories seules.

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories ISF SCisf CT Zn - ISF

0,1

1

10

100

1000

10000

100000

1000000

0 2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn,

mg/

kg d

e sc

orie

s

scories LBF SClbf CT Zn - LBF

L’incorporation des scories dans les sables-ciments diminue la solubilisation du plomb

pour les pH basiques et neutre. La solubilisation du zinc des scories ISF et LBF dans les

sables-ciments est diminuée dans la zone de pH 8-12.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 62

1.3.3 Conclusion

Le pouvoir basique des bétons est dû aux hydrates du ciment et à la nature calcaire du

constituant complémentaire au clinker. Le pouvoir basique des sables-ciments, plus faible, est

dû à la nature calcaire des granulats. La contribution des scories au pouvoir basique de ces

matériaux est significative pour des pH proches de 4 (palier).

L’incorporation des scories ISF et LBF dans ces matériaux se traduit par :

• Une grande cohérence du niveau de disponibilité du plomb et du zinc aux différents

pH étudiés pour tous les matériaux et les scories seules. Cela signifie que le relargage en

plomb et en zinc est directement dépendant du contexte chimique qui est le résultat du

couple matériau/scénario.

• En milieu très acide, quelque soit le matériau contenant les scories, la totalité du

plomb et du zinc est disponible et leur solubilisation est proportionnelle au contenu

total dans les matériaux.

• En milieu alcalin, on observe des relargages importants en plomb et en zinc

conformément au caractère amphotère de ces métaux.

2. MATERIAUX A BASE DE LIANT BITUMINEUX

Les scories ISF et LBF ont été introduites en substitut partiel au sable dans des sables-

bitumes. Une courte bibliographique permet de rappeler l’origine et les propriétés physico-

chimiques des liants bitumineux. Ensuite sont présentés les caractéristiques physico-

chimiques des sables-bitumes étudiés dans cette thèse.

2.1 Rappels bibliographiques

2.1.1 Les bitumes

Aujourd'hui les bitumes proviennent presque exclusivement du traitement des pétroles bruts

dont ils constituent la fraction la plus lourde. Un bitume est constitué, en moyenne de

80-85 %, de carbone, 10-15 % d’hydrogène, 2-3 % d’oxygène.

Les bitumes sont un mélange, complexe, de composés hydrocarbonés de masses molaires

importantes et de structures chimiques variées. Des méthodes de séparation successives ont

permis de regrouper les molécules en différentes familles, auxquelles les propriétés

rhéologiques des bitumes ont été reliées. Les bitumes sont ainsi fractionnés en asphaltènes,

résines, huiles, carboïdes, et carbènes. Les deux derniers composés sont présents en très faible

quantité. Les asphaltènes consituent 20 à 40 % d'un bitume, celui-ci sera d'autant plus dur que

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 63

le pourcentage d'asphaltène sera important. Les maltènes correspondent à l'association des

huiles et des résines, et constituent 60 à 77 % d’un bitume (Bitume actualité, 1990).

Pour chaque application (travaux routiers, étanchéité, agglomération de particules) les

procédés de fabrication et l'ajout d'additifs sont adaptés pour obtenir un bitume dont les

caractéristiques satisfont aux propriétés requises (élasticité, viscosité, adhésion…) et au

maintien de celles-ci dans le temps. Les bitumes sont en général utilisés « à chaud », c’est à

dire en abaissant leur viscosité par chauffage.

Les spécifications officielles classent les bitumes en différentes catégories. La pénétrabilité à

l'aiguille définit la qualité du bitume. Ce test, normalisé (NF T 66-004), consiste à mesurer la

dureté d'un bitume par la pénétration verticale, dans un échantillon, d'une aiguille standard

dans des conditions déterminées : le liant est maintenu à 25°C, l'aiguille est appliquée pendant

5 secondes, sous une charge de 100 grammes. La pénétration s'exprime en 1/10e de millimètre,

elle est d'autant plus grande que le bitume est mou. Les spécifications officielles prévoient

cinq qualités: 20/30 la plus dure, 40/50, 60/70, 80/100, 180/220 (Bitume actualité, 1990). Un

bitume dont le résultat est 24/10e de millimètres est dans la classe de qualité 20-30.

2.1.1.1 Propriétés des liants bitumineux

Les bitumes sont des substances colloïdales hydrocarbonées, ce qui leur confère des propriétés

physiques et rhéologiques : les bitumes sont décrits comme des matériaux viscoélastiques

présentant un fort pouvoir d'adhérence et une bonne imperméabilité.

L'adhésion : L'adhésion est la force par unité de surface reliant les molécules d'un corps aux

molécules d'un autre corps.

La perméabilité : La perméabilité est une propriété intrinsèque au matériau. Le bitume est un

matériau hydrophobe, sa perméabilité à l'eau est faible. En ce qui concerne les gaz, les

bitumes sont moins perméables à l'oxygène qu'à la vapeur d'eau. Quant aux ions, aucune

diffusion à travers une membrane de bitume n'a été observée pour les ions étudiés (Hoiberg,

1965, Sing, 1998).

L'absorption en eau : L'absorption d'eau dans le bitume pur se produit à l'état gazeux. La

solubilité de l'eau dans le bitume pur est de l'ordre de 0,001 % à 0,01 %.

2.1.1.2 Réactivité et vieillissement

De manière générale, le bitume fait preuve d'une grande inertie chimique. Toutefois dans des

conditions particulières, il montre une certaine réactivité, modifiant l'équilibre colloïdal du

bitume, et donc ses propriétés (Bitumes actualités, 1990) :

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 64

• L'oxygène (Hoiberg, 1964 et 1965): Il pénétre dans le bitume par diffusion. A

température ambiante l'oxygène est chimiquement lié au bitume. L'oxydation se

manifeste par la formation d'un film dur protecteur (les résines se polymérisent en

asphaltènes) qui réduit la diffusion de l'oxygène. La profondeur de pénétration ne

dépasse pas 2,5 mm, même après de nombreuses années.

• La lumière : l'exposition d'un bitume à la lumière induit des réactions de

photooxydation dont les effets sont les mêmes que ceux induits par oxydation.

Cependant les radiations lumineuses ne pénètrent le bitume que sur quelques

micromètres d'épaisseur.

• L'eau : l'eau à l'état liquide ou gazeux favorise la dégradation du bitume. L'eau peut

entraîner les produits de dégradation solubles dans l'eau. Cependant la solubilité de l'eau

dans le bitume pur est très faible.

• Les acides : La résistance du bitume aux acides dépend de l'acide considéré et de sa

concentration. En général, les acides concentrés attaquent les bitumes. Considérons le

cas des acides les plus fréquents :

- H2SO4 : Concentré (96-100 %) il attaque les composants aromatiques. Dilué il

n’attaque pas le bitume,

- HCl : HCl gazeux réagit avec le bitume et forme des asphaltènes. Le bitume

résiste bien aux solutions concentrées d’acide chlorhydrique à température

ambiante. Un contact de plusieurs années avec du HCl à 30 % a changé les

propriétés rhéologiques sans détruire le bitume,

- HNO3 : Le bitume ne résiste pas à cet acide, même dilué, qui agit sur les

asphaltènes et les résines.

• Les bases : les bases diluées attaquent certains bitumes probablement par réaction avec

les acides de type gras contenus dans le bitume. Dans des solutions concentrées de

soude (20 %) on ne note aucune attaque, après de nombreuses années, à température

ambiante.

• Les micro-organismes : la biodégradation d’un bitume dépend notamment du type de

micro-organismes, des conditions du milieu (pH, température, aérobie ou anaérobie) et

de la composition du bitume. Des expériences, réalisées dans les conditions les plus

favorables au développement des micro-organismes, mentionnent des taux de

dégradation de 20-50 g bitume/m2.an en milieu aérobie et de 0,2-0,6 g bitume/m2.an en

milieu anaérobie (Roffey, 1991).

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 65

2.1.1.3 Interactions des composants du déchet avec la matrice bitumineuse

La littérature concernant l’interaction déchets/liants bitumineux est beaucoup moins

abondante que celle consacrée à l’interaction déchets/liants hydrauliques. Il est généralement

reconnu, si l’on considère la relative inertie chimique des bitumes, que peu de déchets,

notamment minéraux, modifient les propriétés des bitumes.

Les polluants ne peuvent être que physiquement fixés par encapsulation ou enrobage,

aucune réaction chimique positive (de fixation) n'est engagée entre les deux composés.

Cependant pour avoir un bon enrobage le rapport liant/déchet doit être assez élevé, de 1/1 ou

1/2 selon US EPA (1980) et Sing (1998).

2.1.2 Les enrobés bitumineux

Dans un enrobé bitumineux, le bitume est utilisé pour enduire les granulats dans l’intention

d’assurer une étanchéité ou une adhésion de l’ensemble. L’enrobé bitumineux doit consister

en une structure homogène et compacte dans laquelle les granulats sont fixés dans un

continuum de bitume. En fonction de la teneur en bitume les matériaux à base de liant

bitumineux présentent des propriétés différentes dues à des variations importantes de distance

entre les granulats, de la surface d'enrobage, du volume des vides.

2.1.2.1 Structure des enrobés

Le bitume est généralement bien fixé et retenu par les agrégats dans des enrobés denses où le

bitume a été mélangé aux agrégats à température élevée. Cependant il existe toujours des

hétérogénéités, elles peuvent être dues à la ségrégation, à la sédimentation et au

gonflement.

S’il y a une différence de densité trop importante entre les granulats et le bitume ou si la

viscosité du bitume est trop faible, les granulats s’accumulent dans les couches inférieures de

l’enrobé diminuant ainsi l’épaisseur de bitume entourant chaque granulat. Pour la viscosité

des bitumes habituellement utilisés, ce phénomène a lieu dans les premières minutes de la

fabrication. En effet, à température ordinaire la sédimentation est trop lente pour avoir une

signification à l’échelle de la centaine d’années.

Le gonflement d’un enrobé est lié au rapport bitume/agrégats et surtout à la nature des

agrégats (Hoiberg, 1964). En effet, certains agrégats ont tendance à absorber de l’eau ce qui

par gonflement endommage la structure de l’enrobé.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 66

2.1.2.2 Liaison bitume- agrégat

L'adhésion du bitume à un granulat est d'autant plus importante que le bitume le mouille

parfaitement. L'effet mouillant est le signe visible de l'existence de forces attractives d'un

liquide par un autre composé.

La figure 17 illustre le contact d'un élément solide avec un liquide. Le cas (A) schématise une

bonne adhésivité entre ces deux matériaux, l'angle de mouillage β est grand, alors que le cas

(B) représente une mauvaise adhésivité, β est petit.

figure 17 : Angle de mouillage à l’interface liquide-solide (Varlan, 1964).

L'angle de mouillage d'un bitume sur un solide, généralement élevé, dépend de la nature du

solide considéré (Varlan, 1964). Lorsqu'un agrégat est sec, sa charge électrique est

globalement neutre, des ions adsorbés neutralisant les charges de surface. Les expressions

d'agrégats électronégatifs ou électropositifs sont malgré cela utilisées par référence à leur état

de surface en présence d'eau. En effet, au contact de l'eau, les ions adsorbés sont dissous, il en

résulte une charge électrique à la surface de l'agrégat. Les matériaux à base de silice sont

ainsi classés parmi les agrégats électronégatifs alors que ceux à base de calcaire le sont

parmi les agrégats électropositifs (Hoiberg, 1964).

HSiOAgrégatSiOHAgrégat +− +→ ≡≡

HCOCaAgrégatHCaCOAgrégat 33

−+ +→ ≡≡

Les bitumes par la présence de certains groupements phénoliques et de certains acides, sont

en général électronégatifs. Ils ont donc plus d'affinité pour les agrégats électropositifs. D'un

point de vue thermodynamique, l'adhésion d'un bitume à un agrégat est surtout déterminée par

la présence de cations en surface de l'agrégat autorisant l'adsorption des composés acides et

phénoliques du bitume. Des agrégats à haute teneur en silice et présentant peu de cations en

surface ne permettent pas une bonne adhésion du bitume (Hoiberg, 1964). Pour palier à cet

inconvénient il est possible d'utiliser un bitume de viscosité plus élevée ou de doper le

mélange par des éléments destinés à améliorer le mouillage (Varlan, 1964).

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 67

2.1.2.3 L’eau et les enrobés

Le transport de l’eau dans un enrobé bitumineux dépend de l’homogénéité de l’enrobé

(présence ou non de pores et de fissures) et du rapport bitume/agrégat. Si ce rapport est faible

un réseau d’agrégats jointifs peut se former. Le transport de l’eau par ces chemins

préférentiels correspond à un phénomène de percolation. Par contre si le rapport

bitume/agrégats est élevé alors chaque granulat est enrobé d’une couche de bitume et le

transport de l’eau est décrit par un processus de diffusion.

2.1.2.4 Conclusion

Le bitume est un matériau imperméable, relativement inerte chimiquement, capable de fixer

des éléments exogènes par encapsulation.

Associés à des granulats il forme un enrobé bitumineux. Le rapport bitume/granulats fixe les

conditions de transport de l’eau dans ces matériaux. La qualité des granulats détermine en

partie la durabilité de l’enrobé.

2.2 Les sables-bitumes.

Les sables-bitumes ont été préparés par Colas, selon une formulation standard. Le taux de

substitution retenu, après contrôle du respect des spécifications physiques et mécaniques du

matériau, est de 50 %.

Le sable-bitume est défini dans le dictionnaire de l'industrie routière (AFIR, 1994) comme un

sable additionné de filler et/ou de sable correcteur, enrobé à chaud avec 3 à 5 % de bitume très

dur (pénétration 20/30). Dans ce cas, le rôle du bitume est d’assurer la cohésion de

l’ensemble.

Les sables-bitumes, de la même façon que les sables-ciments, constituent la couche de base

dans le type de structure routière étudié.

2.2.1 Les scories : granulats pour sable-bitume ?

Les sables utilisés dans la fabrication d’un sable-bitume n’ont de caractéristiques physico-

chimiques spécifiques à respecter, ce sont les performances du matériau fini qui sont

considérées.

Notons toutefois deux caractéristiques physiques des scories qui doivent être prises en

compte :

• La granulométrie : les scories ISF et LBF ont une distribution granulométrique

différente d'un sable et notamment elles contiennent trop peu de fines. Le rôle des fines

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 68

est d’une part d’augmenter la compacité du produit fini, la compacité étant un des

paramètres qui contrôlent la résistance mécanique des sables-bitumes, et d’autre part de

retenir le bitume en augmentant la surface spécifique des granulats. Cette perturbation

de la distribution granulométrique peut être compensée par l’ajout de filler.

• La densité : la densité relativement élevée des scories ne constitue pas un problème

technique mais à un coût économique puisque le sable-bitume est vendu au kilomètre et

non au poids.

• La nature siliceuse de scories constituent un handicap, d'après la bibliographie, à

l'adhésion du bitume sur les scories puisqu'elles ont une surface a priori électronégatives

(§ 2.1.2.2).

2.2.2 Composition des sables-bitumes

Trois sables-bitumes ont été préparés. Le sable-bitume témoin, noté SBt, ne contient pas de

scories. Deux sables-bitumes contenant des scories : le sable-ciment avec les scories ISF, noté

SBisf et le sable-ciment avec les scories LBF, noté SBlbf.

Pour les matériaux bitumineux la composition est donnée pour 100 % des granulats auquel est

ajouté le pourcentage de bitume. La composition des sables-bitumes est présentée dans le

tableau 12. Pour compenser la perturbation granulométrique due aux scories (trop peu de

fines), du filler est ajouté dans les sables-bitumes contenant des scories.

tableau 12 : Composition des sables-bitumes.Composants Composition en %

SBt SBisf SBlbf

calcaire du Boulonnais 1/3 mm 30 - -

calcaire du Boulonnais 0/4 mm 70 47 47

scories ISF ou LBF 50 50

filler calcaire 3 3

bitume 20/30 4,5

2.2.3 Analyse élémentaire des sables-bitumes

La détermination des teneurs en plomb et zinc des trois sables-bitumes permet de s’assurer de

l’homogénéité des matériaux produits en comparant le contenu total en plomb et zinc mesuré

et calculé.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 69

L’analyse, faite par Métaleurop Recherche, consiste en une mise en solution, par fusion, de

l'échantillon dans un verre organique suivie par une analyse au moyen d'un spectrophotomètre

de fluorescence X.

Dans le tableau 13, le contenu total, mesuré expérimentalement, en plomb et zinc des deux

sables-bitumes contenant des scories est comparé à celui calculé à partir des pourcentages de

scories introduits dans les matériaux. La bonne correspondance entre les résultats

expérimentaux et calculés montrent que les matériaux sont homogènes.

tableau 13 : Analyse élémentaire en Pb et Zn des sables-ciments.Matériaux Pb, mg/kg Zn, mg/kg

fluorescence X calculé fluorescence X calculé

SB t <1 000 - <1 000 -

SB isf 3 700 3 300 31 800 33 100

SB lbf 14 600 16 700 52 900 53 580

2.2.4 Caractéristiques physiques des sables-bitumes

La porosité et à la perméabilité des sables-bitumes ont été déterminées.

2.2.4.1.1 Porosité

La porosité et la distribution porosimétrique sont mesurées sur le sable-bitume témoin par

porosimétrie au mercure par CTG. Le protocole utilisé est présenté au § 1.3.1.4. L'essai a été

mis en œuvre trois fois pour s'assurer de la reproductibilité de la mesure.

Le facteur de porosité du sable-bitume est faible : 1,8 %. Si on considère la distribution

porosimétrique, il semble que l’importance relative des macropores est due sûrement à un

effet de surface (anfractuosités). Le volume poreux cumulé est de 0,007 cm3/g. Les graphiques

représentant le volume poreux et la distribution porosimétrique sont dans l’annexe 2.

2.2.4.1.2 Perméabilité à l'eau

Le coefficient de perméabilité à l'eau du sable-bitume témoin a été mesuré par le laboratoire

de Génie Civil et Urbanisme de l'INSA de Lyon. Le protocole utilisé est présenté au

§ 1.3.2.4.2.1. Le coefficient de perméabilité mesuré est de 7.10-8 m/s. La perméabilité du

sable-bitume est 100 fois inférieure à celle du sable ciment. Le niveau de percolation de l’eau

au travers de ce matériau est limité.

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 70

2.2.5 Comportement des sables-bitumes dans différents contextes chimiques

L’approche que nous avons eu dans le cas des matériaux à base de liant hydraulique (étude sur

matériaux broyés afin de séparer les mécanismes chimiques des mécanismes physiques de

réactivité et de rétention des polluants) n'est pas adaptée dans le cas des sables-bitumes. En

effet, le bitume est un matériau relativement inerte chimiquement et il ne fixe que

physiquement les polluants. Ainsi, la solubilisation des polluants est a priori identique pour

les scories seules et les sables-bitumes contenant des scories. Afin de nous assurer de cette

hypothèse nous avons mis en œuvre un essai de CNA et un test de solubilisation sur un

échantillon de sable-bitume préparé avec des scories ISF.

Il faut, de plus, souligner qu'il est difficile de broyer un sable-bitume puisque par

échauffement le bitume ramollit et le matériau devient pâteux. Afin de palier à ce problème,

l'échantillon a été préalablement congelé.

2.2.5.1 Capacité de Neutralisation Acido-Basique du sable-bitume préparéavec les scories ISF

Le test de CNAB est mis en œuvre selon le protocole présenté au chapitre 1 § 3.1. Dans la

figure 18 sont comparés les CNAB des scories ISF et du sable-bitume préparé avec les scories

ISF.

Le pH naturel du sable-bitume contenant des scories ISF est identique au pH naturel des

scories ISF (10,5). Dans les deux cas, le pouvoir basique est faible. Les paliers (zone

tampon) ne sont pas au même niveau de pH. Pour le sable-bitume, le palier à pH 7 est dû au

granulats calcaire qui constituent 50% du mélange (ce palier est également visible dans le cas

des sables-ciments).

figure 18 : CNAB du Sbisf et desscories ISF

2

4

6

8

10

12

14

-4 -2 0 2 4

pH

SBisf

scories ISF

plateau dû aux granulats calcaire

mol base/kg de matériau mol acide/kg de matériau

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Chapitre II : Matériaux de construction dans lesquels sont mises les scories 71

2.2.5.2 Solubilisation du plomb et du zinc du sable-bitume préparé avec lesscories ISF

L'essai de solubilisation est mis en œuvre selon le protocole présenté au chapitre I - § 1.3.1.1.

La comparaison, figure 19 et figure 20, des solubilisations du plomb et du zinc des scories ISF

et du sable-bitume préparé avec des scories ISF montre que l'incorporation des scories dans

le sable-bitume influe peu sur les niveaux de solubilisation.

figure 19 : Solubilisation du Pb du SBisf figure 20 : Solubilisation du Zn du SBisf

0,01

0,1

1

10

100

1000

2 4 6 8 10 12 14

pH

Pb,

mg/

l

SBisf

scories ISF

0,01

0,1

1

10

100

1000

10000

2 4 6 8 10 12 14

pH

Zn,

mg/

l

SBisf

scories ISF

2.3 Conclusion

La substitution de 50 % du sable par les scories ISF ou LBF dans un sable-bitume de

formulation standard produit des matériaux dont les caractéristiques physiques et mécaniques

satisfont aux critères d’usage.

Les sables-bitumes sont des matériaux chimiquement relativement inertes. Leur capacité de

rétention des polluants n’est que physique (enrobage).

3. CONCLUSION

Ce chapitre a été consacré à la présentation générale des matériaux étudiés. Le type de liant

(hydraulique ou bitumineux) conditionne les propriétés des matériaux préparés avec ces liants.

L’étude dans différents contextes chimiques de la réponse chimique (étude sur matériaux

broyés) a montré que les matériaux à base de liants hydrauliques ont un pouvoir de réactivité

(pouvoir basique, fixation chimique du plomb à pH basique) alors que les matériaux à base de

liant bitumineux sont chimiquement inertes.

Ces propriétés intrinsèques aux matériaux ont été prises en compte dans l’étude du

comportement environnemental des matériaux présentée dans les chapitres 3, 4, 5 et 6.