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EXPÉRIENCES ET INNOVATIONS EN ÉDUCATION

Cette collection est publiée en anglais, en espagnol et en français.

Titres dans cette série:

1. Le cas TEVEC 2. U n e étude sur l'aptitude à la scolarité 3. L'innovation dans l'enseignement de la lecture en Angleterre 4. C o m m e n t s'opèrent les changements en éducation: contribution à l'étude

de l'innovation 5. Les changements dans l'enseignement secondaire et leurs implications pour

l'éducation permanente au Canada 6. U n e école communautaire en Yougoslavie 7. L'école secondaire de base à la campagne: une innovation éducative à Cuba 8. U n e expérience de ruralisation de l'enseignement: 1 T P A R et la réforme came­

rounaise 9. L'innovation éducative à Singapour

10. L'innovation éducative en Iran 11. L'innovation éducative en Inde 12. L'innovation éducative en République de Corée 13. L'innovation éducative en Indonésie 14. L a période expérimentale du baccalauréat international: objectifs et résultats 15. L'utilisation de la radio par les groupes d'étude en République-Unie de Tanzanie 16. L a réforme de l'éducation au Pérou 17. L a mise en place d'une institution d'enseignement par correspondance 18. L a participation de la jeunesse au processus de développement:

une étude de cas au Panama 19. L'innovation pédagogique au service de la réforme agraire: T I T A de Mosta-

ganem, Algérie 20. Formation postuniversitaire des enseignants: une expérience nouvelle au Nigeria 21. L'innovation en Haute-Volta: éducation rurale et enseignement primaire 22. Le modèle péruvien d'innovation: la réforme de l'éducation de base 23-28. L a réforme de l'éducation en République de Sri Lanka (en préparation) 29. Le Centre universitaire de Roskilde: une interprétation socio-économique

d'une innovation au Danemark 30. U n e nouvelle approche de l'éducation de base: Radio Santa Maria 31. L a réforme de l'éducation en Espagne et l'éducation permanente (en préparation) 32. Le projet d'enseignement des mathématiques aux Caraïbes (en préparation) 33. Innovations scolaires en Suisse: particularités et tendances 34. Réformes et innovations éducatives en Afrique 35. L T N C E et la formatiqn technique et professionnelle au Venezuela

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Expériences et innovations en éducation n° 34

Une série du Bureau international d'éducation

Réformes et innovations éducatives en Afrique

Etudes préparées pour la Conférence des ministres de l'éducation des Etats membres d'Afrique

Unesco - Paris 1977

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Les désignations employées et la présentation adoptée ici ne sauraient être S interprétées c o m m e exprimant une prise de position du Secrétariat de l'Unesco \ ; sur le statut juridique ou'le régime d'un pays ou d 'un territoire quelconque,

\ non plus que sur le tracé de ses frontières.

Publié en 1977 par l'Unesco 7, Place de Fontenoy, 75700 Paris, France

Edition française I S B N 92-3-201560-9

Edition anglaise ISBN 92-3-101560-5

Imprimé en Suisse par l'Imprimerie Courvoisier S .A . , La Chaux-de-Fonds

© Unesco 1977 [B]

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Préface

La présente publication contient neuf brèves études portant sur des réformes et des innovations éducatives effectuées dans quelques Etats africains. Elles ont déjà été diffusées dans le cadre d'un document de référence de la Conférence des ministres de l'éducation des Etats membres d'Afrique (Minedaf), qui s'est tenue à Lagos (Nigeria) du 27 janvier au 4 février 1976. Ce document de référence a été utilisé lors des discussions qui ont eu lieu au sein de la Commission I chargée de l'examen détaillé des problèmes que ren­contrent actuellement les pays africains dans leur effort pour transformer leur système d'éducation. Son principal but était de donner un bref aperçu de quelques expériences novatrices en matière d'éducation en Afrique.

Le choix des projets ou programmes a découlé de la formulation d'un point important inscrit à l'ordre du jour de la commission, à savoir : les problèmes relatifs à l'éducation de masse pour le dé­veloppement, plus particulièrement en ce qui concerne 1'"éducation de base", expression couramment employée pour désigner la phase initiale de l'éducation permanente pour tous.

Etant donné leur mode de présentation, ces études on fait l'objet d'une distribution limitée; nombre de décideurs, planifi­cateurs, administrateurs et chercheurs africains n'ont donc pu bé­néficier de l'expérience ainsi véhiculée.

Par ailleurs, vu la volonté de la plupart des Etats membres d'intensifier leurs efforts pour modifier fondamentalement leur système d'éducation et compte tenu de l'inestimable avantage que présente le fait de disposer d'un ou de plusieurs groupes de nova­teurs échangeant leurs expériences dans des domaines liés à l'édu­cation, les Etats membres réunis à Lagos ont demandé à 1'Unesco de constituer un réseau pour l'échange d'informations sur l'innovation en vue du développement de l'éducation en Afrique (NEIDA). Ce pro­gramme de coopération régionale sera lancé au début de 1978. L'Unesco vient d'en établir le Secrétariat au siège de son Bureau régional pour l'éducation en Afrique, Dakar (Sénégal).

Ce programme favorisera notamment l'échange d'informations et d'expériences entre les institutions nationales engagées dans le

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même type d'activités ainsi que les organismes chargés de la mise en oeuvre au plan national de projets multilatéraux. L'un des moyens retenus à cet effet est la publication et la diffusion régulières d'études plus approfondies d'expériences importantes. La présente publication est la premiere de cette série.

En résumé, cette réédition répond à deux objectifs : a) dif­fuser plus largement l'information contenue dans le document de ré­férence de Minedaf; b) lancer une nouvelle série d'études de cas sur des innovations et réformes éducatives en Afrique, qui seront publiées sour les auspices du réseau NEIDA avec la collaboration de l'IERS (Genève).

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Table des matières

Introduction p. 1

I. L'enseignement moyen pratique au Senegal, par Samba Dione, Directeur de l'enseignement moyen pratique, Secrétariat d'Etat à la promotion humaine, Dakar, p. 5

II. La réforme de l'éducation de base au Mali, par Issa Yena, Directeur général de l'Institut pédagogique national et de l'enseignement normal, Bamako, p. 13

III. L'éducation populaire liée au développement : l'expérience de la Tanzanie, par P.K. Mitande et R.Z. Mwajombé, Ministère de l'éducation nationale, Dar es-Salam. p. 19

IV. La réforme de l'éducation et de l'enseignement au Bénin : l'en­seignement de base, par Jean Pliya, Vice-recteur de l'Univer­sité du Bénin, chargé de l'exécution du Programme d'édifica­tion de l'Ecole nouvelle, Porto-Novo. p. 26

V. La réforme du système d'éducation au Togo, par Koffi Atignon, Secrétaire général du Ministère de l'éducation nationale, Lomé. p. 34

VI. Une réforme novatrice en Ethiopie, par Békêlê Getahun, Minis­tre adjoint, Ministère de l'éducation, Addis Ababa, p. 44

VII. Adoption d'un système d'écriture pour la langue Somalie, par Osman Jama Dakir et Muse Hussein Askar, Centre d'élaboration des programmes d'enseignement, Ministère de l'éducation, Mogadishu, p. 56

VIII. Télé-enseignement et éducation de masse au Kenya, par Peter E. Kinyanjui et Ben K. Gitan, Institut de l'éducation des adultes, Université de Nairobi, p. 64

IX. Echanges d'information sur l'éducation de base en Afrique orientale : mise en place d'un réseau de coopération sous-régionale, par Alex Tosh, Conseiller régional de 1'Unesco/ Unicef pour l'éducation de base, Nairobi (Kenya), p. 73

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Introduction

Depuis leur accession à l'indépendance politique, les pays d'Afrique déploient des efforts remarquables pour développer l'éducation. Ces efforts ont souvent eu pour résultat de les placer devant un nom­bre accru de tâches urgentes; en effet, à mesure que naissent des aspirations nouvelles, l'écart va grandissant entre les exigences de la société et les réalisations nationales. C'est pourquoi de nombreux pays ont pris et continuent de prendre des décisions fort importantes en matière de politique de l'éducation, et sont engagés avec détermination dans la voie de la rénovation de leurs systèmes éducatifs.

Si ces réformes et innovations en matière d'éducation visent plus ou moins à résoudre le même genre de problèmes dans la plupart des pays, leur nature, leurs modalités et leur portée ne sont pas nécessairement identiques, au moins dans le détail. De plus, leur conception et leur mise en oeuvre ont atteint des stades différents selon les pays. Il est enfin des pays qui, bien que pleinement cons­cients de la nécessité d'un changement, s'interrogent encore sur l'orientation à lui donner.

Le présent document rend compte, dans une série de monogra­phies, de diverses réformes et innovations éducatives importantes appliquées dans un certain nombre de pays d'Afrique; les autres pays du continent pourront ainsi en faire leur profit. Toute réfor­me ou innovation, de par son caractère largement expérimental, comporte des risques;"mais ceux-ci peuvent être réduits jusqu'à un certain point, voire éliminés, si l'on peut s'inspirer d'exemples précis de programmes et projets en cours et en tirer les leçons.

Ce document vise donc à faire connaître certaines innovations et réformes importantes, de façon que les planificateurs et les administrateurs puissent, en tirant parti des expériences faites à l'étranger, aider les dirigeants de leur pays à discerner les di­verses stratégies qu'il leur est possible d'appliquer pour atteindre leur objectifs. Il pourra aussi fournir les éléments d'études com­paratives sur les méthodes, les procédures et les résultats.

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Il est bien d'autres initiatives nationales qui pourraient apporter d'utiles enseignements quant à la façon d'entamer une ré­forme fondamentale du système d'éducation; mais le temps et l'espa­ce nous sont ici mesurés. Nous envisageons toutefois de publier et de diffuser prochainement d'autres ouvrages sur les réformes et les innovations éducatives en cours en Afrique. En outre, le Bureau international d'éducation a déjà procédé à un certain nombre d'étu­des concernant l'Afrique, lesquelles sont publiées dans la série "Expériences et innovations en éducation".

Résumé

Dans maints pays d'Afrique, nombre de jeunes terminent leur scolari­té primaire, mais beaucoup d'entre eux ne poursuivent pas leurs études et ne parviennent pas à trouver d'emploi parce qu'ils possè­dent en fait très peu ou pas de connaissances professionnelles. La tâche principale de nombreux gouvernements est donc de leur donner un bagage qui leur permette de s'intégrer aux structures de pro­duction sans dépeupler les zones rurales. Des initiatives hardies ont été prises à cet égard mais la plupart ne sont pas parvenues à résoudre les problèmes fondamentaux, et les ont même aggravés dans certains cas.

Le chapitre sur "L'enseignement moyen pratique au Sénégal" expose une nouvelle approche du problème des jeunes qui sortent de l'école primaire. Elle repose sur la prise de conscience du fait que, d'une part, pour s'insérer dans les structures de production, il faut souvent s'installer à son propre compte et que, d'autre part, part, le système de formation doit tenir compte des transformations sociales. Elle vise â établir un rapport nouveau entre la formation et la société en faisant participer activement les masses (jeunes et vieux, analphabètes ou non) au processus de formation. De plus et surtout, dans cette perspective, la formation est fondée sur les besoins des masses tels que celles-ci les perçoivent et tend à promouvoir des technologies simples reposant en grande partie sur les ressources locales.

La plupart des autres études de cas rendent compte d'efforts qui visent en partie à résoudre des problèmes analogues, mais dont les objectifs sont beaucoup plus vastes: ils comportent dans une certaine mesure la réforme du système scolaire tout entier et ne se limitent pas au domaine extrascolaire.

1. Voir au recto des couvertures : nos 8, 15, 17, 20 et 21.

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"La réforme de l'éducation de base au Mali" n'en est encore qu'au stade de la conception; elle vise à restructurer le système, d'enseignement de façon à donner aux masses une éducation de base générale leur permettant de participer de façon plus effective au développement national. Elle est intéressante du point de vue de la méthode à suivre pour mettre en route une réforme de l'éducation. Cette méthode consiste à faire d'abord une évaluation critique du système existant, à redéfinir ensuite les problèmes, puis à associer de nombreux secteurs de la société à la recherche d'une solution, celle-ci devant aboutir à une refonte complète de l'échelon infé­rieur du système.

L'étude sur la Tanzanie, qui décrit certains projets en cours d'exécution, fournit divers exemples de la façon dont l'éducation de masse pourrait être liée au développement national. Les projets en question s'inscrivent dans la réforme générale de l'éducation, qui va de pair avec la transformation globale de la société. Cette étude illustre notamment la manière dont les efforts de chacun ont été mobilisés au service d'une éducation fonctionnelle des masses axée essentiellement sur le développement rural. Cette réforme est remarquable en outre par la façon dont elle intègre l'éducation dans la vie du village.

Les études consacrées aux réformes entreprises au Togo, en Ethiopie et au Bénin sont, elles aussi, riches en enseignements quant à la façon de remodeler entièrement le système d'éducation pour donner naissance à un type d'homme nouveau et à une nation nouvelle. La priorité est donnée à l'éducation orientée vers le travail productif et, dans cette perspective, l'éducation est con­çue comme devant assurer son autofinancement. Dans le contexte d'une réforme globale du système, les études sur le Bénin et l'Ethiopie fournissent des exemples de développement de l'éducation de base pour l'ensemble des citoyens.

On retrouve dans la plupart des études de cas, et plus parti­culièrement dans celles sur le Mali, la Tanzanie, le Bénin, le Togo et l'Ethiopie, l'affirmation d'une idée maîtresse, à savoir que le changement social précède toute modification significative en ma­tière d'éducation, ou va de pair avec elle.

Un autre élément commun à la plupart des innovations décrites est l'emploi de la langue nationale ou de la langue maternelle com­me langue d'enseignement, au moins aux échelons inférieurs des sys­tèmes d'enseignement. Cet emploi répond notamment à la volonté de lier plus étroitement l'école à la société et de réhabiliter les valeurs culturelles nationales. De nombreux autres pays d'Afrique

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envisagent sérieusement en ce moment d'utiliser leurs langues natio­nales comme langues d'enseignement. L'étude somalienne rend compte à cet égard d'une expérience intéressante et précieuse.

Pour devenir une réalité, l'éducation de masse devra recourir à des méthodes autres que les méthodes classiques. L'étude sur le télé-enseignement et l'éducation de masse nous donne un aperçu de l'immense potentiel de cette forme d'enseignement-, rendu possible par l'application de certaines techniques pédagogiques modernes, en tant que moyen de promouvoir l'éducation de masse et l'avènement d'une société axée sur l'instruction.

Il convient enfin de bien souligner une fois de plus que les quelques études publiées dans le présent document ne prétendent pas brosser un tableau complet des innovations éducatives entreprises dans les pays intéressés, et bien moins encore dans l'ensemble du continent. Elles font apparaître toutefois le schéma général selon lequel s'organisent les efforts dans ce domaine. Certaines modifi­cations concernent essentiellement l'éducation extrascolaire, et sont d'ampleur et de portée limitées. D'autres sont plus générales dans leur ambition et visent ä repenser l'ensemble du système d'en­seignement. Certaines peuvent être à juste titre assimilées à une remise en cause fondamentale - dans laquelle s'engagent un nombre croissant de pays - des priorités, systèmes et schémas traditionnels.

Face à cette vague de changement, il convient toutefois de ré­examiner la nature et les stratégies de la coopération régionale et/ou sous-régionale afin que les expériences actuellement tentées dans divers pays profitent à tous. L'étude consacrée à l'échange d'informations sur l'éducation de base en Afrique orientale four­nit, au sujet de la création d'un réseau de coopération sous-ré­gionale, un certain nombre d'indications qui pourraient constituer d'utiles principes directeurs.

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I. L'enseignement moyen pratique au Sénégal

Depuis 1971, le Sénégal vit une période de réforme de l'éducation. Dans ce contexte, l'enseignement moyen pratique - filière toute nouvelle - cherche à absorber les 80% des jeunes scolarisés qui n'ont pas accédé à l'un des deux autres types parallèles d'ensei­gnement, les enseignements moyen général et moyen technique. L'en­seignement moyen pratique est né de la nécessité d'offrir des pos­sibilités d'éducation aux jeunes qui, à l'issue de l'enseignement primaire, ne pouvaient être pris en charge par le système existant. Il s'agit d'un système non conventionnel, axé sur les besoins, peu coûteux et administré par les collectivités elles-mêmes. Il forme les jeunes en vue d'assurer leur insertion dans les circuits de production et leur intégration dans le milieu social.

L'étude de la situation a démontré que le problème spécifique du maintien et de la rentabilisation de l'acquis scolaire ne peut être dissocié des problèmes plus complexes que sont l'exode rural, le chômage urbain, l'insertion des jeunes dans les circuits de pro­duction et leur réintégration dans leur milieu d'origine. Ainsi posé, ce problème dépasse largement le cadre de la réforme de l'édu­cation, d'où le besoin d'élaborer un nouveau système éducatif, le système conventionnel diffusant des valeurs et un savoir inadaptés aux conditions sociales.

Le développement d'un nouveau système à l'échelon national exigeait qu'on prenne en considération les facteurs économique et socioculturel.

Le taux de scolarisation au Sénégal est d'environ 40%.et seu­lement 20% des jeunes scolarisés accèdent éventuellement aux études secondaires. De ce fait, chaque année, de 35 à 40 000 jeunes (dont 15 000 ruraux environ) abandonnent les études sans avoir ni débou­chés, ni projets. Ils ne trouvent alors rien de mieux que d'aller dans les centres urbains où ils gonflent les rangs des jeunes sco­larisés sans emploi ainsi que des jeunes non scolarisés et anal­phabètes dont le nombre est encore plus impressionnant. Ce po­tentiel économique et social inexploité fait déjà l'objet d'impor­tants investissements de la part de l'Etat, lequel est conscient de

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la gravite des conséquences sociologiques et psychologiques de cet­te situation.

L'attrait qu'exerce la vie urbaine sur les scolarisés est d'autant plus grand que les fondements socioculturels des connais­sances scolaires, distinctes des connaissances pratiques, tendent à les couper psychologiquement de leur milieu d'origine; d'autre part, l'adoption d'un comportement "urbanisé", à défaut d'une assise éco­nomique (un emploi), ne permet pas à l'individu de satisfaire ses nouvelles aspirations. D'un point de vue sociologique, il en résul­te que l'ensemble de la société éprouve la sensation d'un conflit permanent entre les générations, chaque classe d'âge étant isolée dans un projet de vie qui lui est propre.

Sans emploi à l'issue de l'école primaire, les jeunes n'ont guère de perspectives d'avenir dans le cadre des structures écono­miques actuelles (outre les problèmes structurels, il faut signaler l'impossibilité pour l'Etat sénégalais de créer suffisamment d'em­plois pour occuper les jeunes chômeurs dont le nombre augmente cha­que année).

En milieu urbain, le processus d'industrialisation ne résout pas le problème; l'industrie, exigeant une main-d'oeuvre qualifiée et d'un niveau de formation plus élevé, n'offre pas de débouchés aux jeunes que l'enseignement moyen pratique veut prendre en charge. En milieu rural, les opérations de développement ne sont pas davan­tage une solution du fait qu'elles créent un nombre très limité d'emplois.

Une analyse systématique de l'économie rurale révèle l'exis­tence d'un système extraverti dont les principales caractéristiques sont les suivantes:

- une simplification excessive des structures de production et des séquences technologiques utilisées;

- une faible diversification des productions; - une hémorragie constante de ses ressources vers les marchés extérieurs;

- une rupture de certains équilibres écologiques que des pallia­tifs (engrais, etc.) n'arrivent pas à enrayer;

- une absence quasi totale d'activité économique pendant les deux tiers de l'année (une fois la période de travail saisonnier terminée);

- une dépendance complète vis-à-vis des technologies importées dont la logique obéit plus aux règles du profit qu'à celles d'un développement autonome susceptible d'engendrer de nou­veaux emplois.

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L'exode rural est la conséquence directe du déracinement socio­logique des jeunes scolarisés et de la situation économique dans les campagnes. Des lors, ces dernières se dépeuplent de leurs éléments dynamiques, ce qui rend encore plus difficile le renouvellement dé­mographique d'une société et la survie de ses valeurs propres. L'ab­sence de continuité et de releve met cette société en position de vulnérabilité par rapport au monde extérieur, ce qui entraîne la destruction des valeurs négro-africaines qui sous-tendent la "cultu­re du terroir".

Au plan psychologique, l'effort déployé pour résoudre le pro- . blême de la réintégration des jeunes scolarisés risque de se heurter au conflit entre parents et enfants, lequel est aggravé par les di­vergences et les antagonismes qui découlent de comportements diffé­rents. Or, le système scolaire actuel, loin d'atténuer ce conflit, l'a amplifié en véhiculant un modèle étranger qui transmet aux élè­ves des connaissances non directement rentabilisables ainsi que des comportements qui les coupent de leur milieu d'origine.

C'est là, au plan national, le dilemme de l'enseignement moyen pratique. C'est une donnée constante qui doit conditionner l'appro­che des autorités sénégalaises si elles ne veulent pas passer à côté du problême fondamental : la formation dispensée ne sera utile et valable que si elle contribue effectivement à résoudre le problê­me de la réintégration. En d'autres termes, une solution exclusive­ment pédagogique ne permettra pas de réaliser les objectifs de l'en­seignement moyen pratique.

L'école primaire dispense des connaissances théoriques qui ne sont pas directement applicables sur le marché du travail; il s'agit d'une éducation de base à l'issue de laquelle les enfants sont orientés suivant leurs aptitudes. Dans l'éventualité où l'enseigne­ment moyen pratique se calquerait sur l'enseignement primaire, on parviendrait au mieux à effectuer un rattrapage scolaire sans que soit atteint l'objectif de l'insertion économique et culturelle.

Les deux objectifs essentiels de l'enseignement moyen pratique sont: a) de maintenir et rentabiliser l'acquis scolaire, et b) d'in­sérer les jeunes dans les circuits de production. Il apparaît que l'insertion est l'objectif prioritaire de l'enseignement moyen pra­tique alors que le maintien et la rentabilisation de l'acquis sco­laire ne viennent qu'en appoint.

La tentation est grande de réitérer les expériences postscolai­res qui ont été tentées au Sénégal (classes à vocation rurale, camps de jeunesse, etc.). De tels systèmes avaient privilégié la qualité de la formation et son adaptation aux problèmes techniques du milieu.

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Ils avaient postulé que la transformation des mentalités par la formation et la technicité acquises suffiraient pour donner aux jeunes la possibilité de trouver leur place dans la société. Dans la réalité, ces jeunes ont également fui la campagne car, faute de travail, ils n'ont pu s'insérer. Leur insertion économique et cultu­relle n'a pas été préparée par les populations qui ne pouvaient uti­liser cette main-d'oeuvre. Il apparaît des lors que la technicité n'est pas un tout, ni une fin en soi; elle doit toujours être un moyen au service d'un projet. L'enseignement moyen pratique rend la formation technique dépendante d'un projet social défini par la col­lectivité, un projet qui crée les conditions d'une insertion à la fois économique et culturelle.

La problématique de l'enseignement moyen pratique

Cette analyse de la situation fait apparaître d'une maniere claire que l'insertion économique étant l'objectif essentiel de l'enseigne­ment moyen pratique, l'efficacité du système sera proportionnelle à la capacité qu'auront les jeunes formés à participer activement au développement économique de leur terroir et du pays en général. Or, une formation rie créant pas par elle-même des débouchés, il convient de développer une réflexion approfondie sur la relation dialectique qui existe entre formation et débouchés. Créer chaque année des dé­bouchés pour 35 à 40 000 jeunes suppose donc une transformation des structures de production.

Dans le milieu rural sénégalais, ce sont ceux qui détiennent et maîtrisent les moyens de production qui peuvent le mieux effec­tuer de telles tranformations : ce sont les paysans.

L'intention de l'enseignement moyen pratique est de faire que les paysans s'engagent dans un processus de changement volontaire et maîtrisé par eux. Ce changement doit s'inscrire dans les options socialistes du Sénégal, c'est-à-dire aller dans le sens d'une con­quête de l'indépendance économique et culturelle par le biais d'une participation responsable des intéressés. Cela suppose que le milieu utilise mieux ses ressources et trouve lui-même les voies et moyens pour créer les conditions d'une insertion; donc, qu'il puise dans ces ressources et les valorise à partir du fameux principe qui est de "compter sur ses propres forces".

Le milieu fera alors appel à l'extérieur, à travers la média­tion du cadre de l'enseignement moyen pratique, pour toutes les in­terventions qui ne sont pas à sa portée. Ainsi se dessine un cadre de recherche contractuelle (Etat/populations) de laquelle surgit un

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projet social qui allie l'enracinement dans les pratiques et valeurs traditionnelles et l'ouverture à la modernité.

Cet objectif de changement sera donc de transformer suffisam­ment les structures de production pour créer un nombre suffisant et permanent d'occupations nécessaires pour le maintien des jeunes. Il s'agit de créer les conditions d'une multiplication des emplois, c'est-à-dire que de telles transformations doivent se concrétiser par une diversification des productions et une complexification des processus de production allant jusqu'à la séquence économique com­plete : production, consommation, transformation, conservation et commercialisation.

Cette complexification entraîne nécessairement un appel de main-d'oeuvre qualifiée dans le'sens d'une maîtrise des informa­tions, des techniques acquises et des modalités de ces opérations. La réalisation de ces transformations donne l'initiative au chef de famille qui redevient un modèle de force et d'autorité pour le jeune, et donc garant d'un projet social et culturel où jeunes com­me adultes reconnaissent leurs aspirations dans une vision à long terme.

Cependant les possibilités de planification et de prise en charge de leur propre avenir par les paysans présupposent, comme il a été dit, la possession des moyens de production; ce qui n'est pas le cas dans les zones urbaines où, hormis les aspects hétérogènes d'une population fluctuante, le citadin ne possède que sa force de travail et, par voie de conséquence, se trouve dépendant d'un em­ployeur.

Aussi l'enseignement moyen pratique urbain, tout en restant également un projet social dont l'enseignement n'est qu'un aspect, travaille à l'heure actuelle a) en collaboration avec les départe­ments et services régissant l'économie et les investissements na­tionaux, et b) avec les populations, dans la mesure ou celles-ci, une fois organisées, peuvent s'instituer en "employeur", c'est-à-dire peuvent se donner les moyens d'autogérer et de mettre en oeu­vre un nombre de travaux et de transformations du type rénovation, organisation de la consommation et de la production alimentaire, etc. C'est cette prise de responsabilité qui est sollicitée avant tout dans l'approche de l'enseignement moyen pratique.

La phase préalable à l'ouverture d'un foyer de l'enseignement moyen pratique

Cette prise de responsabilité ne peut pas être d'emblée obtenue sachant la situation de dépendance économique et parfois culturelle

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dans laquelle se trouvent les populations. Ce qui implique une pha­se préalable. Cette étape a pour but de créer les conditions d'une recherche et d'une expression, par les populations elles-mêmes, de solutions dont ils seraient les premiers responsables et qu'ils pourraient mettre en oeuvre pour résoudre le problème de formation des jeunes en vue de leur insertion.

Cette démarche n'est pas une enquête ni une étude du milieu, ni-même un dialogue par lequel les cadres de l'enseignement moyen pratique chercheraient à provoquer l'adhésion à des solutions qu'ils préconiseraient. Elle est faite de techniques et méthodes pédagogi­ques destinées à mettre les populations en situation de poser clai­rement le problême des jeunes, de l'analyser, de découvrir leur part de responsabilité dans la recherche-des solutions qu'elles devront elles-mêmes mettre en oeuvre. Les cadres de l'enseignement moyen pratique aident les populations par leurs attitudes, leurs inter­rogations et leurs clarifications (et non par un apport d'éléments de solutions) à définir elles-mêmes le système de formation et les conditions d'une insertion dont elles sont responsables.

Cette approche est loin d'être un luxe, si l'on se rappelle que l'enseignement moyen pratique doit absorber tous les enfants qui quittent le primaire, de 35 à 40 000 par an (sans compter les anal­phabètes de même âge) pour les amener, par une formation adaptée prise en charge, à trouver un insertion permanente, durable et effi­cace dans la production.

Ces exigences font de l'insertion et de la prise en charge par les populations les deux conditions de la réussite de l'enseigne­ment moyen pratique. Elles doivent donc être l'objet d'une interven­tion spécifique auprès des populations qui en sont le point de pas­sage obligatoire.

Cette phase s'achève par la création d'instances de décisions qui organisent la construction et le fonctionnement du foyer de for­mation. Ce foyer n'est pas un lieu de formation classique, mais un lieu d'échanges et d'informations qui a pour fonction précise d'être le volet éducatif du projet socio-économique de la zone d'interven­tion. Il ne cherche pas à dispenser un savoir universel et étranger au milieu, mais un savoir qui soit une réponse à des demandes préci­ses en vue de réaliser ce projet.

La formation des ¿eunes

La formation dispensée au niveau d'un foyer d'enseignement moyen pratique émerge progressivement de la démarche préalable, à l'issue de laquelle sont définis les intentions de cette formation, ses

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relations avec les transformations de l'environnement, ses structu­res, son contenu et ses modalités. Les objectifs de formation se déduisent de la finalité de l'enseignement moyen pratique (insertion dans le milieu et dans les circuits de production) et du profil que l'on souhaite pour les jeunes formés, à savoir : des producteurs ayant une connaissance critique et une compréhension globale et ac­tive du milieu physique, économique, social, politique et culturel dans lequel ils vivent; des producteurs conscients, maîtrisant les processus de production, de consommation, d'échange et de commercia­lisation, capables de promouvoir des activités productrices et leur assurant des sources de revenu.

La formation est ainsi définie comme le moyen privilégié de mettre en oeuvre "le projet d'avenir" défini et préparé par les po­pulations.

Aussi ses éléments sont-ils définis en fonction des problèmes ä résoudre, de la nécessité reconnue par les populations d'assurer des responsabilités majeures dans cette formation et de la relation dialectique imperative entre formation et transformation.

Si cette formation est définie comme étant à la fois une con­séquence des changements prévus et un moyen de les réaliser, c'est qu'elle n'est pas une fin en soi mais un outil de changement. Ainsi l'enseignement moyen pratique apparaît-il comme une véritable édu­cation au changement. Aussi, les transformations qui lui donnent un contenu et un objectif sont-elles décidées non en fonction d'une éducation et d'une formation aux conditions, aux moyens, aux consé­quences et à la logique des changements qu'elles introduisent. La formation devient dès lors une occasion privilégiée de développer des aptitudes à travers l'acquisition de connaissances et de savoir-faire; aptitude à s'interroger sur l'environnement, à critiquer, adapter et expérimenter les innovations et à créer.

Les résultats et les •perspectives

Trois années d'expérimentation ont permis l'ouverture de deux foyers. 1. Langomack (arrondissement de Fissel, département de M'Bour).

Ce foyer est un centre expérimental pour toutes les hypothèses de travail et d'approche, ainsi que pour les auxiliaires péda­gogiques; un centre d'application pratique pour les cadres en formation; un lieu d'expérimentation technologique et agrono­mique .

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2. Khassous (arrondissement de Tattaguine, département de Fatick). Ce foyer aura permis d'utiliser les auxiliaires pédagogiques et de mettre en oeuvre les hypotheses qui ont été l'objet d'une expérimentation dans le premier centre.

Le système d'enseignement moyen pratique entre à l'heure ac­tuelle dans sa phase d'extension. En effet, la couverture nationale par le système est prévue pour 1982 (800 foyers ruraux et 400 ur­bains). Toutefois, cette extension ne signifie pas une extrapolation pure et simple des résultats déjà acquis. Elle tiendra compte des spécificités de chaque région et de chaque zone.

Une autre perspective de l'enseignement moyen pratique est l'ouverture d'un débat national sur les conditions et les implica­tions de tous ordres d'un tel système. Ce débat devra aboutir à la mise en oeuvre, au niveau national, des dispositions nécessaires à une insertion totale et durable des jeunes issus de l'enseignement moyen pratique.

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II. La réforme de l'éducation de base au Mali

Les systèmes d'éducation des pays en développement et plus parti­culièrement du Mali, se caractérisent par leur inadaptation et l'ac­croissement trop rapide des coûts de fonctionnement. En ce qui con­cerne le système éducationnel malien, des inadaptations ont pu être temporairement corrigées grâce à certaines améliorations et innova­tions effectuées au cours de la dernière décennie; mais elles se sont aggravées par suite de l'expansion même de la scolarisation (demande sociale) et de la prise de conscience plus large des impé­ratifs de développement. La réforme de 1962 au Mali a jeté les bases d'une éducation adaptée aux réalités socio-économiques d'un jeune Etat indépendant et a permis, en l'espace de quelques années d'ap­plication, de mettre en place une infrastructure éducationnelle à la fois fonctionnelle et conforme aux options politiques, sociales et économiques axées sur le développement national.

En effet, cette réforme a été la première formulation importan­te d'une politique de l'éducation nationale en République du Mali : elle a fixé les grands objectifs du système d'éducation malien, donné des structures nouvelles à l'école malienne et orienté les efforts d'adaptation, d'extension et de recherche. Plusieurs fois depuis 1962, les "convictions" de base de cette réforme ont été réaffirmées par les responsables de la politique d'éducation; elles sous-tendent encore actuellement toutes les activités du Ministère de l'éducation nationale du Mali. Les principaux objectifs sont les suivants :

- dispenser un enseignement à la fois de masse et de qualité; - dispenser un enseignement qui, avec une économie maximum de temps et d'argent, dotera le pays des cadres dont il a besoin pour ses divers plans de développement;

- dispenser un enseignement qui décolonise les esprits et réha­bilite les valeurs culturelles africaines.

L'enseignement de masse et de qualité concerne :

- en premier lieu, le développement horizontal de l'éducation pour l'ensemble des populations afin de les rendre aptes à

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participer au processus de développement économique : cet en­seignement est dispensé par les écoles fondamentales (1er et 2e cycles); tout elêve de l'enseignement fondamental, par la pratique de travaux manuels dans les écoles, les champs, les pêcheries, les ateliers, etc., devrait être un "producteur" des la fin du second cycle de l'enseignement fondamental; cet enseignement a été dispensé aussi par l'éducation de base au profit des adultes et des jeunes non scolarisés (alphabétisa­tion fonctionnelle);

- en second lieu, le développement de l'éducation sur le plan vertical pour les meilleurs des élèves issus de l'enseignement fondamental; ces derniers devraient, eh poursuivant leurs étu­des secondaires générales et supérieures, assurer l'encadre­ment harmonieux des différents secteurs socio-économiques et socioculturels du pays.

Après dix années d'application de cette politique d'éducation, il ressort du diagnostic de la situation actuelle les données sui­vantes :

- une explosion spectaculaire des effectifs à tous les niveaux de l'enseignement;

- une insuffisance quantitative du rendement scolaire et du ren­dement social du système d'enseignement malgré les efforts fi­nanciers consentis par le gouvernment;

- une barrière psychopédagogique limitant et compromettant les performances des jeunes scolarisés (barrières de langue, rup­ture de l'équilibre socio-économique, etc.);

- une insuffisance qualitative du rendement social et économique révélant une certaine inadaptation des méthodes et une pression aliénante et déracinante des media utilisés.

Il y a donc un écart qui sépare les buts généraux de la réforme de 1962 et les résultats obtenus : une analyse des causes ayant mis en lumière plusieurs facteurs défavorables tels que ceux cités ci-des­sus, il semble que le système scolaire soit interdit à toutes amé­liorations fondamentales. La recherche d'une solution à ce problème semble donc urgente et le choix a porté sur l'éducation de base : celle-ci étant définie comme l'éducation pour l'ensemble de la po­pulation afin de faire participer cette dernière au développement économique du pays.

En effet, au cours de la dernière décennie, le Mali a entrepris une expérience éducationnelle originale, qui a pu produire des ré­sultats positifs eu égard aux principes de l'enseignement : il

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s'agit de l'alphabétisation fonctionnelle qui a atteint un triple but : alphabétiser sans risque de retour à l'analphabétisme, c'est-à-dire instruire en langues nationales; éduquer fonctionnellement, c'est-à-dire améliorer la formation des producteurs (alphabétiser sélectivement des populations données pour des objectifs de produc­tion déterminés); éviter l'aliénation et le déracinement tout en élevant le niveau culturel des producteurs.

L'alphabétisation fonctionnelle répond donc, en partie du moins, aux objectifs de l'éducation de masse et de l'éducation adaptée aux réalités et aux besoins économiques et sociaux. S'inspirant de l'alphabétisation fonctionnelle, la réforme de l'éducation de base projetée consiste à rechercher et expérimenter des voies appropriées permettant une adéquation et une extension de l'éducation de base à une plus grande partie de la population, scolaire et active, sans franchir le seuil imposé par les contraintes financières prévisibles et cela par la préparation et l'expérimentation concertée des tech­niques pédagogiques et des matériels d'enseignement. Le point de départ prévu est la méthodologie de l'alphabétisation fonctionnelle, l'utilisation des langues nationales, le recours à la radio, etc., le tout englobé dans de nouvelles formes d'organisation et de struc­tures fonctionnelles d'enseignement.

L'étude s'appuie sur la considération des besoins économiques et sociaux auxquels devra répondre l'éducation de base. C'>est-à-dire qu'il faut répondre aux questions suivantes :

- quelles sont les qualités et les connaissances minimales re­quises pour participer avec succès au développement économique (à moyen et à long terme) ?

- quelles sont les aspirations et les attitudes des différents groupes de populations à l'égard de l'instruction 1

De plus, l'étude doit explorer les ressources, les organisations, les structures, les méthodes et les moyens de diffusion actuels ou éventuels en matière de personnel de même que les systèmes d'ensei­gnement formel et les autres moyens existants en matière d'éducation non conventionnelle, cela pour mettre en oeuvre un nouveau système éducatif mieux adapté. En bref, cette étude sur la réforme de l'édu­cation de base a été définie comme "une activité de recherche édu-cationnelle en matière de structure ou de systèmes capables de per­mettre une généralisation de l'éducation de base à l'ensemble de la population active, compte tenu des contraintes financières prévisi­bles".

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Pour aider à la mise en route de l'étude, le gouvernement du Mali a demandé à 1'Unesco de bien vouloir assurer l'appui technique prévu au projet; ainsi, avec l'aide d'un consultant et en accord avec le directeur du projet BIRD Education, il a été crée des grou­pes de travail afin de mener à bien les recherches indispensables et l'exécution du programme de travail pour la première phase de l'étu­de (phase du diagnostic et des propositions). L'équipe chargée de l'étude est une équipe interdisciplinaire travaillant dans le cadre de l'Institut national d'alphabétisation fonctionnelle et de lin­guistique appliquée qui a été créé à cet effet.

Six groupes de travail ont été mis en place. Le premier groupe de travail axera ses efforts sur le premier

cycle de l'enseignement fondamental (de la 1ère à la 6e années). Pour mieux adapter l'actuel premier cycle de l'enseignement fonda­mental aux besoins du pays3 dans le respect des options retenues par la réforme de 1962, il a pour mandat de faire des propositions rela­tives aux questions suivantes :

- les problèmes que pose l'utilisation des langues nationales dans l'enseignement du premier cycle;

- les problèmes que pose l'apprentissage du français comme lan­gue étrangère;

- la relation entre l'école et le milieu de vie; - les problèmes que pose le calendrier scolaire : l'âge de re­crutement, la durée de scolarisation;

- la formation, des maîtres du premier cycle de l'enseignement fondamental dans les IPEG, etc.

Le deuxième groupe de travail fera des recherches sur la for­mation des adolescents ruraux. Ce groupe de travail a pour mission : a) d'étudier, à partir de l'expérience déjà acquise par l'alpha­

bétisation fonctionnelle des adultes, la possibilité de dis-, penser en langues nationales une éducation de base au plus grand nombre d'adolescents ruraux (14-17 ans) n'ayant pas été touchés par le système classique;

b) d'étudier les mesures à prendre pour assurer, dans les meilleu­res conditions, la réinsertion des ex-scolarisés ayant abandon­né en cours d'étude ou n'ayant pas eu accès au second cycle de l'enseignement fondamental; en particulier, il étudiera les problêmes du contenu de l'éducation de base, les structures de formation à mettre en place et les méthodes de formation.

La formation des adultes sera étudiée par le troisième groupe de travail. Il procédera à une évaluation approfondie des

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expériences actuellement en cours (alphabétisation fonctionnelle, centres d'animation rurale), proposera les améliorations jugées nécessaires et étudiera les problèmes que pose l'extension des for­mules actuelles.

Le quatrième groupe de travail examinera la définition de ce que devrait être une éducation de base de la femme malienne, en milieu rural et en milieu urbain et selon l'âge (filles scolarisées, adolescentes non scolarisées, femmes adultes): analyses et évalua­tion des actions de formation existantes, proposition pour une poli­tique de formation féminine.

Le cinquième groupe de travail mènera des recherches de lin­guistique appliquée et produira des matériaux en langues nationa­les : étude des problèmes posés par l'utilisation des langues na­tionales dans la formation à tous les niveaux (enfants scolarisés, adolescents, adultes), collecte des matériaux de base nécessaires et élaboration en liaison avec les organismes intéressés de docu­ments de formation.

Le sixième groupe de travail étudiera enfin les stratégies éducatives régionales : son objectif est de partir des recommenda­tions des groupes d'études sectoriels pour définir, région par ré­gion, une stratégie éducative globale adaptée aux conditions régio­nales (justification de l'approche régionale, méthodologie).

Comme on le constate, les objectifs de ce projet s'étendent nécessairement a. des domaines sociaux autres que ceux relatifs à l'éducation. En effet, pour mener à bien cette étude, la méthodolo­gie à suivre inclura nécessairement le recensement exhaustif de toutes les institutions de formation existantes (écoles de forma­tion générale, technique et professionnelle) et de tous les systè­mes d'exploitation possibles. Ici, il va sans dire, il faut une col­laboration étroite entre les ministères de l'éducation nationale, de la santé publique et des affaires sociales, ainsi que de la produc­tion, toutes les actions de recherche devant être menées au sein des structures de développement (agriculture, élevage, pêche...); elles doivent aussi s'insérer dans les structures socio-économiques existantes ou à créer (villages, associations de parents d'élèves, groupes linguistiques déterminés, pôles privilégiés de développe­ment communautaire, centres d'animation rurale, unités industrielles dans les villes, sociétés et entreprises d'Etat, etc.)

Une réforme aussi fondamentale ne peut être généralisée que si l'on a maîtrisé les différents paramètres clés, garants de l'opéra­tion. Il s'agira, par exemple, de changer profondément la mentalité, les attitudes et le comportement notamment des parents d'élèves,

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de la jeunesse rurale, des enfants scolarisés et des populations rurales.

La réforme de l'éducation de base.au Mali est un projet pilote expérimental; elle sera l'oeuvre de l'Institut national d'alphabé­tisation et de linguistique appliquée; y travailleront des péda­gogues, des linguistes, des sociologues, des économistes. Un nou­veau comité interministériel a eu la responsabilité de la constitu­tion des groupes de travail et des groupes consultatifs qui leur sont rattachés. Il a proposé un plan détaillé de recherche et un calen­drier de réalisation; c'est lui qui veillera à ce que les expérien­ces retenues soient réalisées dans les meilleures conditions et il sera procédé à une évaluation scientifique de leurs résultats avant qu'elles ne soient étendues.

Les responsables de la politique d'éducation au Mali fondent un grand espoir sur la réalisation de ce projet, et l'on pense que ce serait là, en effet, la solution au difficile problème de l'in­tégration harmonieuse de l'école malienne au développement écono­mique du pays.

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III. L'éducation populaire liée au développement: l'expérience de la Tanzanie

Nature et caractéristiques d'une réforme historique

Comme beaucoup d'autres pays d'Afrique, la Tanzanie a vécu pendant des décennies sous un régime colonial. Après cette longue période de domination étrangère, elle a accédé à l'indépendance en 1961. La domination étrangère et l'indépendance ont vu s'opérer dans le pays de nombreux changements, dans trois domaines en particulier : l'édu­cation, l'économie et le bien-être social.

Avant le colonialisme, les Tanzaniens avaient un système d'édu­cation de type essentiellement "périscolaire". Les enfants rece­vaient une éducation qui les préparait à la vie au village, et les villages étaient en eux-mêmes, à vrai dire, des écoles. Le type d'éducation reçu aidait les enfants à comprendre le véritable sens de l,"ujamaa", idéal reposant sur l'acceptation, en tant qu'arti­cle de foi, de l'égalité des hommes et impliquant le respect, l'ef­fort collectif et la répartition équitable des richesses.

Vinrent les colonialistes, qui apportèrent avec eux les reli­gions étrangères et ouvrirent des écoles où était dispensée aux en­fants une éducation de forme institutionnelle. Si cette éducation a contribué à l'alphabétisation des Tanzaniens, elle visait aussi à façonner un "Noir africain" copiant les genres de vie étrangers.

L'objet de la déclaration d'Arusha était de mettre notre pays en mesure de devenir le pays "ujamaa", dont tous les habitants seront des travailleurs et où l'exploitation de l'homme sera com­battue avec vigueur. Une grande réforme s'inscrivait ainsi dans notre histoire. La déclaration d'Arusha visait à contrôler et dé­velopper notre économie et, par là, à procurer à notre peuple un mieux-être social.

L'origine de la réforme

L'indépendance et la naissance de la jeune nation tanzanienne sont à l'origine de toutes les grandes réformes qui ont eu lieu dans notre pays. Le peuple comprit que le gouvernement colonial n'était

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pas parvenu a protéger la Tanzanie de ses principaux ennemis : la pauvreté, l'ignorance et la maladie. L'indépendance acquise, il prit conscience de ce que le moment était venu de se libérer de nos en­nemis communs. De premières mesures furent prises : nationalisation des banques, des écoles, etc. Etant donné la nature des institutions qu'ils concernent, certains changements doivent s'opérer lentement. La réforme de l'éducation, par exemple, doit être progressive, pour la principale raison qu'elle implique un changement des valeurs et des attitudes de la société, dont l'éducation est une composante. Pour qu'elle donne des résultats satisfaisants, une réforme de l'éducation, sous quelque forme que ce soit, doit donc s'opérer concurremment avec la réforme de la société.

Dans son livre intitulé Education for self-reliance (L'éduca­tion, clé de l'indépendance), écrit en 1967, le président Nyerere définissait une politique visant à instituer une forme entièrement nouvelle d'éducation, afin de réaliser les objectifs socialistes. Ce document a marqué un tournant dans notre système éducatif et est à l'origine de notre réforme de l'éducation. La réforme préconisée par le Président n'intéressait pas seulement les enseignants et les éducateurs, mais faisait appel au concours de l'ensemble de la po­pulation. Plusieurs changements furent introduits dans l'enseigne­ment : les écoles furent réorganisées; les programmes, les méthodes d'enseignement et l'âge d'entrée à l'école furent modifiés.

Dans ses messages de Nouvel An pour 1969 et 1970, le prési­dent Nyerere a invité tous les Tanzaniens à participer, au program­me d'alphabétisation fonctionnelle et insisté sur la nécessité de triompher de l'ignorance. Son appel a été appuyé par le parti diri­geant, à sa conférence biennale de 1971, tenue à Dar es-Salam. La conférence a, en outre, invité le parti et le gouvernement à faire tout ce qui était en leur pouvoir pour venir à bout de l'ignorance avant la fin de l'année de 1975, grâce à une campagne qui se pour­suit activement dans tout le pays. La population a été mobilisée pour répondre à cet appel, et les moyens d'information apportent à la campagne une importante contribution.

Avec le concours de 1'Unesco, le ministère de l'éducation na­tionale a mis en oeuvre, dans les régions du lac Victoria, un pro­jet visant à éliminer l'ignorance des populations, grâce à l'alpha­bétisation fonctionnelle. De nombreux livres de.lecture consacrés à l'agriculture, à la puériculture, etc., ont été publiés et sont lus par des milliers de personnes dans les régions riveraines du lac. Le Ministère de l'éducation nationale a adopté certaines des

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méthodes appliquées dans ces régions, et plusieurs livres sont pu­bliés pour aider les cultivateurs et les ouvriers dans différentes parties du pays.

L'effort de changement

Le ministère de l'éducation nationale n'est pas le seul engagé dans l'effort d'éducation populaire. Les Ministères de la santé et de l'agriculture, et le Cabinet du Premier ministre, notamment, y prennent une part active. En 1972, le Ministère de l'agriculture a lancé une campagne, "Siasa ni Kilimo", à l'effet d'encourager les paysans ä augmenter la production des denrées alimentaires et à produire des récoltes marchandes pour aider le pays à accroître ses réserves en devises. On insistait particulièrement sur les mé­thodes modernes d'agriculture, sur l'emploi de fumiers et d'engrais, et sur l'application d'insecticides pour protéger les récoltes. L'année suivante, en 1973, le Ministère de la santé a mis en oeuvre une campagne, "Mtu ni Afya", ayant pour objet d'aider les Tanzaniens à améliorer leur santé grâce à une hygiène plus rigoureuse et à la lutte contre les moustiques et autres insectes vecteurs de maladies contagieuses. Cette année, le même ministère a lancé une autre cam­pagne, "Chakula ni Uhai", visant à encourager la pratique d'une alimentation équilibrée et à dissuader certaines personnes d'entre­tenir des croyances et d'observer des tabous en matière alimentaire au détriment de leur santé. Le Cabinet du Premier ministre finance des séminaires et des cours de brève durée organisés pour les agri­culteurs dans divers centres du pays. La Radiodiffusion nationale travaille en étroite collaboration avec tous les ministères qui par­ticipent aux programmes d'éducation populaire.

Où ont lieu les changements ?

Les changements s'opèrent en tous lieux et en permanence. De grands changements gagnent tout le pays comme des feux de brousse. Il en est ainsi, par exemple, de la campagne d'alphabétisation massive, dont les activités ont été accélérées par le président Julius Nyerere en 1969-1970.

Il est, cependant, d'autres changements qui sont limités à certaines régions, mais dont les résultats sont ressentis dans une grande partie du pays. Quelques exemples en témoignent, parmi les­quels on peut citer le centre de Kibaha. En tant qu'établissement

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d'enseignement, Kibaha concentre tous ses efforts sur le type d'édu­cation qui prépare les citoyens tanzaniens à la lutte contre l'igno­rance, la maladie et la pauvreté. Pour atteindre ses objectifs, le centre comprend les sections suivantes : a) l'école primaire et se­condaire de Tumbi; b) la section d'enseignement sanitaire; c) la section d'enseignement agricole; d) la section de développement ru­ral; e) la bibliothèque (dont le bibliobus). Ces sections sont elles-mêmes divisées en plusieurs unités : ferme laitière, élevage avicole, nutrition, économie domestique, etc.

Des cours de brève et de longue durée dans des domaines spé­cialisés sont organisés au profit de la communauté avoisinante.. Kibaha est, en fait, un projet au service du développement rural. Son objectif est la transformation de la vie au village, afin que les villageois puissent vivre mieux et améliorer leur environnement.

Dans le cadre de la réforme de l'éducation, la Tanzanie pro­cède à plusieurs expériences. L'une des plus intéressantes et des plus novatrices consiste à rechercher comment la vie scolaire et les programmes d'enseignement pourraient être mieux intégrés à la vie du village.

Ce programme a été mis en oeuvre en tant que projet pilote à Kwamsisi, près de Korogwe, dans la région de Tanga. L'école est suf­fisamment proche du Collège de l'éducation nationale pour que le directeur, le personnel enseignant et les élèves de cet établisse­ment puissent venir au village. C'est en 1971 qu'a été préparé le terrain pour cette entreprise inédite. Le Ministère de l'éducation nationale fixa à l'expérience un certain nombre d'objectifs spéci­fiques et prescrivit que toutes les activités de l'école soient orientées sur la réalisation de ces objectifs. Des réunions de fonctionnaires du développement régional, d'administrateurs de l'en­seignement, de dirigeants politiques et de professeurs du collège précédèrent des consultations de la plus Jiaute importance avec les comités de village.et les parents d'élèves. Le projet proposé fut accepté sans difficultés, sans qu'aucune pression ait été exercée, mais, vu son mérite intrinsèque et le respect dont le directeur et les professeurs du collège témoignèrent à l'égard de l'opinion et des désirs des villageois, en passant de longues heures à gagner leur confiance et à s'assurer leur participation aux travaux de planification.

Le programme d'enseignement de l'école fut défini dans les quatre domaines suivants : a) lecture, écriture et calcul; b) ins­truction civique ou éducation politique; c) effort personnel et

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activités culturelles; d) etude de l'environnement. Le nouveau pro­gramme fut alors mis en application par l'école. Le village est di­rigé par un comité principal, assisté de plusieurs comités secon­daires : le comité de village, le sous-comité scolaire et le sous-comité d'initiative.

D'intéressantes activités ou manifestations ont été organisées par l'intermédiaire de ces organismes et d'autres sous-comités moins importants. En définitive, les villageois ont fait passer dans la pratique la théorie du programme d'enseignement.

Au village, chacun éprouve pour son voisin un sentiment de so­lidarité, et il n'est pas rare de voir des villageois et des enfants prendre plaisir à accomplir côte à côte des tâches collectives de développement, ou des travaux artisanaux traditionnels, ou encore se divertir ensemble en chantant, en dansant ou en jouant au foot­ball. Du point de vue matériel, on constate un changement marqué. Les enfants sont mieux vêtus (aux frais du village) et jouissent d'une meilleure santé, et l'école est bien entretenue et se dévelop­pe grâce à l'initiative locale.

Avant l'expérience, l'école avait un programme par matières du type classique, qui ne tenait guère compte de la vie du village alentour. Les villageois la considéraient comme une institution fonctionnant simplement pour le plaisir d'éduquer. Il y avait donc intégration minimale de l'école à la société environnante. Adminis­trât ivement, l'école et le village formaient des entités séparées, qui coexistaient en réaction logique aux conditions de la vie, sans plus.

A l'heure actuelle, on s'attache à intégrer complètement la vie scolaire à celle des habitants de Kwamsisi. Le résultat en est un sentiment général de solidarité, et, par.voie de conséquence, une mise en commun de toutes les ressources et de tous les efforts en vue du succès de la communauté dans son ensemble. Désormais, l'école fait partie de cette communauté, ce que confirme le fait que, du point de vue administratif, le président du village dirige l'ensemble du village, y compris l'école.

L'idée de développer ce projet est renforcée par le sentiment général des personnes qui, après une visite à Kwamsisi, estiment que ce type d'éducation devrait être étendu à d'autres écoles. Le Ministère de l'éducation nationale a prescrit aux onze collèges de la catégorie "A" de mettre en oeuvre, à titre expérimental, une réplique du projet de Kwamsisi.

Outre les projets précités, d'autres sont en cours, qu'il con­vient de mentionner. Le Projet de développement rural intégré de

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Lushoto (LIDEP) est une opération conjointe du Fonds de développe­ment communautaire de la Tanzanie et de la Fondation Kuebel de la République fédérale d'Allemagne. Il s'agit d'un projet de formation pratique dont toutes les activités, tant sociales qu'économiques, tendent à cette fin. Il a été lancé en 1969 en tant que projet pi­lote devant s'étendre sur quatre années et visant à favoriser le développement rural par une approche intégrée, sur la base des be­soins ressentis par la population du district de Lushoto, dans les domaines social, économique et de l'éducation.

Les centres postprimaires ont pour objet : a) par des cours s'étendant sur deux années au moins, de com­

pléter les connaissances techniques des élèves qui ont ache­vé leurs études primaires;

b) d'utiliser au maximum les moyens matériels (atelier, biblio­thèque, salle de réunions, etc.) et les ressources humaines (enseignants, personnel administratif, etc.) pour élever le niveau d'instruction et améliorer, dans divers domaines, les connaissances pratiques de tous ceux qui vivent près des centres.

Des bibliothèques rurales sont créées, dans chaque district pour commencer, et leur nombre sera augmenté jusqu'à ce qu'il en existe dans chaque village. Des collèges populaires pour le développement, ayant comme en­seignants des spécialistes de l'éducation des adultes, seront chargés de l'éducation fonctionnelle, orientée sur le travail, de la masse de la population, dont ils élèveront le niveau d'instruction. L'Institut d''éducation des adultes dispense un enseignement par correspondance dans divers domaines. Les journaux locaux contribuent largement à empêcher le retour à l'analphabétisme et jouent un rôle utile à plusieurs autres égards. l'Education des travailleurs touche un grand nombre de person­nes.

Le succès de la plupart de ces créations nationales est dû avant tout à la conscience politique des Tanzaniens et à l'unité qui existe sous l'égide du parti unique tanzanien, TANU.

Prétendre que l'exécution de ces projets ne se heurte à aucun problême serait manquer de réalisme. Un des principaux problèmes rencontrés consistait à changer l'état d'esprit de certains

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Tanzaniens, en particulier de ceux qui ont reçu une éducation colo­niale. Il a été difficile de faire prévaloir les idées nouvelles en matière d'éducation, notamment le principe de la participation des villageois aux affaires scolaires. Cette difficulté a été aplanie grâce à des séminaires et à des cours d'éducation politique qui ont été suivis par de nombreux Tanzaniens.

Des conditions météorologiques imprévisibles ont, d'autre part, contrarié certains projets. Dans certaines régions, les paysans ont travaillé inlassablement à mettre en pratique ce qui leur avait été enseigné; mais il est arrivé, à leur vive déception, que les capri­ces du temps provoquent, de manière ou d'autre, des pertes de récol­tes ou d'autres dommages.

Comme beaucoup d'autres pays, la Tanzanie subit les effets de la crise économique. Des plans et des idées riches de promesses ne peuvent être mis en oeuvre, faute de moyens financiers suffisants.

Gardant un moral élevé malgré ces nombreux problèmes, les Tanzaniens sont déterminés à développer leur pays et sont persuadés qué l'éducation est la clé du développement qu'ils veulent mener à bien.

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IV. L a réforme de l'éducation et de l'enseignement au Bénin: l'enseignement de base

LES PRINCIPES DE LA REFORME

En mai 1973, dans le contexte des changements fondamentaux amorcés par le Gouvernement militaire révolutionnaire, s'est réunie à Porto-Novo une importante Commission nationale, émanation de toutes les couches sociales, pour élaborer la réforme de l'éducation et de l'enseignement maintenant en cours au Bénin. Il s'agit d'une réfor­me globale qui concerne tous les ordres et les niveaux d'enseigne­ment, ainsi que les diverses étapes de l'éducation du citoyen pa­triote.

Tirant les leçons d'un passé marqué par la domination étrangè­re, l'aliénation culturelle, l'exploitation économique, la forma­tion d'un type d'homme au "col blanc" acquis à la cause coloniale, plein de mépris pour son peuple et ses valeurs de civilisation et imbu du mythe stérile des diplômes, la réforme a posé, comme princi­pe directeur de l'Ecole nouvelle, la préparation ä la vie et l'inté­gration de l'enfant à la société en tant que membre productif et discipliné. "Car il n'y a pas de problème scolaire à résoudre iso­lément, il y a un problème de développement dont le problême scolai­re est un élément important" 1. A ce titre, "l'Ecole nouvelle cons­titue un centre promoteur du développement économique et social et un moyen de salut collectif qui favorise la participation de tous à la production"^. Elle veut établir un système d'éducation démo­cratique et patriotique, qui permette l'enseignement d'une science, d'une technique moderne au service des intérêts du peuple.

L'Ecole nouvelle, laïque, démocratique et populaire sera prise en charge par l'Etat, et l'enseignement assuré dans les langues na­tionales avec un contenu voulu, défini par le peuple lui-même con­formément ä ses aspirations profondes. Obligatoire et gratuite, l'Ecole nouvelle est destinée à tous les enfants et l'enseignement

1. Programme national d'édification de l'Ecole nouvelle, p. 27. 2. Ordonnance no 7530 du 23 juin 1975, article 2.

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sera débarrasse de tous les cloisonnements et barrages sélectifs, ce qui implique la décolonialisation des structures, des méthodes d'enseignement et leur organisation, conformément à l'idéologie nationale.

La réforme scolaire suppose et nécessite la réforme simultanée de tous les secteurs sociaux et économiques dont la transformation conditionne le développement général et l'affirmation de l'indépen­dance nationale. C'est ainsi que, très tôt, la collaboration du Ministère de l'éducation nationale avec, en particulier, les Minis­tères du développement rural et de la santé publique a été amorcée pour permettre vraiment au milieu, à différents niveaux, d'être le moteur du développement.

Conditions préalables et caractéristiques

Pour atteindre ses objectifs spécifiques, la réforme qui a engendré l'Ecole nouvelle du Bénin a dû bouleverser les structures, les mé­thodes et les programmes d'éducation et d'enseignement hérités du système colonial. Puisqu'il s'agit d'une école pour le développe­ment de l'homme et de la nation, on comprend que l'un de ses traits les plus originaux soit sa liaison fondamentale avec le milieu, la vie et la production.

"Priorité à la production

Rejetant le système éducatif colonial et néocolonial qui déversait sur le marché du travail des diplômés inaptes ou improductifs, re­fusant un enseignement à caractère malthusien qui produisait un grand nombre de déchets, c'est-à-dire des élèves non préparés à exercer un métier, et ne favorisait que l'ascension d'une minorité de privilégiés, liquidant donc les vieilles structures sélectives, onéreuses et improductives, l'Ecole nouvelle s'identifie avec l'idée d'unités de production.

L'objectif principal des unités de production est l'initiation des élèves au travail productif ainsi que l'obtention d'un certain rendement destiné à l'auto-financement ou au moins à un financement partiel des dépenses de fonctionnement des écoles.

En tous cas, désormais, l'enfant qui entre à l'école ne pourra en sortir qu'avec un métier¡ c'est dire qu'on ne saurait fixer ni l'âge ni le niveau oü s'arrête l'école obligatoire : selon une con­ception unitaire du système éducatif, les examens de type classique seront remplacés par des examens de type nouveau basés sur le

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controle continu des connaissances, à l'aide de fiches individuel­les, une orientation progressive, la spécialisation à tous les ni­veaux, introduite très tôt pour rendre 1'école plus efficace, moins coûteuse et liée au besoins réels du pays.

LA STRUCTURE D'ENSEMBLE DE L'ECOLE NOUVELLE

Sur la base de ces principes, la réforme établit un nouvel organi­gramme du système scolaire et éducatif dans lequel on distingue deux degrés et une structure para, péri et postscolaire. Le premier de­gré se subdivise en enseignement maternel, enseignement de base, enseignement moyen et complexe polytechnique. Le second degré dis­pense l'enseignement supérieur. Le Centre populaire d'éducation, de perfectionnement et d'initiation à la production, où sont regroupées toutes les activités d'éducation pour ceux qui sont dans la vie ac­tive, s'occupe essentiellement d'alphabétisation, de cours par cor­respondance, de cours de perfectionnement, d'initiation à la produc­tion, de loisirs éducatifs et de sport.

Les nouvelles structures ne sauraient avoir un caractère figé et immuable; elles doivent pouvoir s'améliorer par des réajustements successifs, au contact de la pratique.

Les nouveaux programmes

Ces programmes viseront à dispenser un savoir, un savoir-faire et un savoir-être adaptés et équilibrés en aidant à la matérialisation du principe de la liaison de l'école avec la vie par l'étude et la transformation du milieu et en préparant à des tâches de conception et d'invention pour un développement économique et social harmor, nieux.

Les méthodes de l'Ecole nouvelle doivent viser à une transfor­mation profonde des attitudes du maître qui doit cesser de se consi­dérer comme le seul détenteur du savoir pour devenir un animateur du milieu social, un conseiller et un ëveilleur de conscience.

L'organisation des horaires doit tenir compte des possibilités physiologiques et psychologiques des élèves, réaliser une liaison organique de l'école avec la vie , assurer l'équilibre entre les activités pratiques et les activités intellectuelles, prévoir de grandes masses temporelles dont l'utilisation sera laissée à l'ini­tiative des maîtres et de l'encadrement. Il est nécessaire de modi­fier le calendrier scolaire en tenant compte des saisons au Bénin et de la liaison entre l'enseignement et la vie pratique.

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Chaque ordre d'enseignement a son originalité ordonnée à la réa­lisation des objectifs généraux. C'est à travers l'organisation de l'enseignement de base que nous montrerons concrètement l'innovation de l'Ecole nouvelle du Bénin, sa mise en place, et les résultats déjà acquis.

LA STRUCTURE DE L'ENSEIGNEMENT DE BASE

Ce niveau d'enseignement, d'une durée de cinq ans, reçoit en princi­pe les enfants âgés de 5 à 6 ans, venant de l'enseignement maternel. Il comporte l'étude d'une langue nationale.

Le programme des cours s'organisera autour de trois groupes d'activités :

a) les disciplines instrumentales : mathématiques, langue de travail, étude du milieu (histoire, géographie, sciences naturelles);

b) tes activités pratiques qui débouchent sur une action trans­formatrice du milieu : culture, élevage, artisanat, jardi­nage, cuisine, travaux manuels et technologiques adaptés au milieu rural et urbain;

c) l'initiation à l'éducation politique, civique, militaire, artistique, physique et sportive, sans oublier des notions d'économie domestique qui s'adresse indifféremment aux gar­çons et aux filles, des notions de secourisme, d'hygiène, de nutrition, d'éducation sexuelle, ainsi que l'étude du co­de de la route.

Dans l'enseignement de base, 40 % des horaires seront consa­crés à l'enseignement théorique et 30 % à l'enseignement pratique, y compris l'initiation professionnelle et artistique.

Coopérative scolaire et unité de production

Chaque établissement scolaire doit s'organiser en coopérative sco­laire et se doubler d'une unité de production.

La création de la coopérative scolaire vise à la centralisation de toutes les activités politiques culturelles et productives de l'école. Il s'agit d'une société d'élèves, gérée par eux-mêmes avec l'aide d'un adulte et le concours des enseignants en vue d'activi­tés communes qui s'exercent selon trois axes :

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- l'éducation patriotique, la revalorisation de la culture tra­ditionnelle et l'animation,culturelle en général;

- l'éducation physique et sportive; - la production agricole, artisanale et culturelle.

L'unité de production sera intégrée à l'ensemble des programmes d'enseignement de manière à éviter la dualité de la production sco­laire et des autres activités éducatives à l'école. Les unités de production auront une vocation agricole (dans 80 à 90 % des cas) ou bien une vocation artisanale.

A la fin de l'enseignement de base, les études ne seront pas sanctionnées par un diplôme. Grâce à un contrôle continu des con­naissances, les résultats seront consignés sur une fiche individuel­le et combinés avec des tests adaptés. Ainsi l'élève sera suivi pendant toute sa scolarité.

L'orientation de l'enfant à la fin du cycle (entre 10 et 11 ans) se fera, par les soins d'un conseil d'orientation, soit vers le complexe polytechnique niveau 1 où on apprend un métier corres­pondant aux besoins de l'Etat, aux aptitudes et aux désirs de l'élè­ve, soit vers l'enseignement moyen I.

L'APPLICATION DE LA REFORME

Ainsi se présente le contenu essentiel de la réforme quant à l'en­seignement de base. Depuis deux ans que cette réforme a été élabo­rée et depuis un an qu'elle a été adoptée par le gouvernement, le Ministère de l'éducation nationale est ä l'oeuvre pour la faire entrer dans les faits.

Les organismes d'exécution. D'abord la réforme a dû être dotée d'une armature de textes juridiques pour déterminer ses diverses instances d'exécution. Ainsi a été créé le Conseil national de l'éducation et de la recherche qui centralise toutes les initiati­ves en matière d'enseignement et d'éducation, de formation perma­nente et" de recherche scientifique, coordonne les différentes struc­tures d'enseignement, d'éducation et de formation, et contrôle l'exécution de la politique définie par la loi d'orientation.

Diverses commissions à caractère technique ont été créées. Ainsi, par exemple, il existe une Commission technique de 15 mem­bres chargée de l'élaboration des programmes des enseignements ma­ternel et de base.

A l'Institut national de formation et de recherche en éduca­tion a été confiée la responsabilité de la réforme de l'éducation

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au Bénin pour la recherche pédagogique, la formation des maîtres, la production expérimentale des programmes et autres matériels pé­dagogiques.

Objectifs de l'année scolaire 1975-1976 pour l'enseignement de base

Pour l'année scolaire 1975-1976, différents objectifs ont été défi­nis, d'abord pour populariser la réforme auprès des couches socia­les.

Sur le plan de l'application, des études préalables ont été réalisées relatives à la connaissance de l'enfant dans son milieu et à l'utilisation des langues nationales.

Au cours de l'année 1974-1975, les programmes d'histoire et de géographie de l'enseignement de base ont été débarrassés de leurs contenus aliénants; les nouveaux programmes ont été étudiés au ni­veau de chaque école, de chaque district, de chaque circonscription scolaire et de chaque province. Les programmes de la plupart des matières d'enseignement ont été récemment arrêtés par des commis­sions réunies à cet effet.

La réduction de la scolarité de 6 à 5 ans exige la mise au point d'une méthode d'enseignement du français, langue étrangère et seconde, qui sera utilisée provisoirement comme langue d'acquisi­tion du savoir. Des instructions et directives pédagogiques permet­tront d'enseigner le français en 1ère année de l'Ecole nouvelle sur la base des horaires déjà retenus. Dans les cours élémentaires et moyens de l'école actuelle, un recueil de nouveaux textes de lectu­re conformes aux options politiques nationales et à l'éducation lit­téraire et esthétique a été étudié et son édition est prévue pour cette année.

En attendant l'application des nouveaux modes de contrôle des connaissances, l'examen du certificat d'études primaires élémentai­res et celui d'entrée en classe de 6e seront fondus en un seul exa­men.

Presque toutes les écoles existantes deviennent déjà des uni­tés de production et la généralisation de cette action est prévue.

L'éducation sanitaire et nutritionnelle sera dispensée dans quelques écoles expérimentales, et l'équipement sera fourni par le Centre international de l'enfance et l'Unicef.

Les inspecteurs et les conseillers pédagogiques ont été recy­clés.

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Dès cette rentrée scolaire tous les cours d'initiation de l'Ecole nouvelle du Bénin vont appliquer les nouveaux programmes. L'expérience débute donc dans ce secteur, à l'échelon national.

Avec le concours des autorités administratives, des associa­tions de parents d'élevés, des groupements villageois et des instan­ces locales de la révolution, les établissement scolaires seront do­tés du minimum requis de matériel pour le démarrage effectif de l'école - unité de production. Ainsi, pour l'enseignement de base en milieu rural, cinq hectares de terres seront affectés à chaque école. Ces terres seront utilisées pour implanter, par exemple, un verger, des forêts de tecks, de filaos, d'anacardiers, des plantes médicinales, des cultures annuelles ou encore les infrastructures scolaires et sportives. En milieu urbain, il est envisagé d'intro­duire d'autres activités productives (activités artisanales et in­dustrielles, élevage, etc.).

La création des coopératives scolaires est devenue une réalité dans l'enseignement de base : au 28 mai 1975, 764 coopératives sur 1 300 établissements ayant un rendement moyen de 10 à 20 000 F CFA et, dans l'enseignement moyen, 18 coopératives sur 70 établissements avec un rendement moyen d'environ 200 000 F CFA.

APPRECIATION DES RESULTATS ET DES DIFFICULTES

Ainsi donc, la réforme de l'école du Bénin conçue comme un projet global de développement est déjà passée dans les faits, parce qu'il s'agit d'un projet national organisé par les représen­tants des masses populaires et laborieuses, stimulé par le gouver­nement militaire révolutionnaire et les instances politiques natio­nales oü tous les responsables politiques du développement se ren­contrent et se concertent.

La naissance de l'Ecole nouvelle a été la première initiative; mais elle a été suivie d'autres dans différents secteurs nationaux comme celui du développement rural et de la coopération et celui des affaires économiques et financières, car il s'agit de mener de façon harmonieuse et réaliste la bataille de l'éducation, de la production et du développement.

Etablir un bilan précis d'actions concrètes alors que l'entre­prise vient à peine de naître est une tâche malaisée. Certes, on possède déjà des programmes, mais il faut attendre de les appliquer pour connaître les problêmes particuliers qu'ils poseront; certes, les anciens maîtres sont recyclés, et de nouveaux enseignants sont

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recrutés et formés, mais c'est à l'oeuvre qu'on jugera de leur ef­ficacité ou de leur insuffisance.

Cependant, le démarrage de l'Ecole nouvelle a permis au gou­vernement du Bénin de constater que toute action révolutionnaire rencontre inévitablement des difficultés et des obstacles. En l'oc­currence, il s'agit des difficultés liées à la popularisation du programme d'édification, a l'impréparation idéologique ou technique de certains maîtres encore attachés aux conceptions périmées de l'école coloniale et ä un certain manque de confiance dû à l'ampleur de la tâche ou à l'importance des moyens exigés.

Mais, dans le contexte mobilisateur d'une politique d'indépen­dance nationale, il a fallu planifier les diverses étapes de la réa­lisation de la réforme et ne pas attendre que tous les moyens soient disponibles avant de passer à l'action.

C'est l'action basée d'abord sur la confiance en nos propres forces, et sur les immenses possibilités d'un peuple décidé à vain­cre et à se développer, qui permet de corriger les erreurs et de continuer à marcher. Edifier à tout prix l'Ecole nouvelle du Bénin est une mission nationale, l'affaire du peuple et de l'Etat, une tâche exaltante car elle sous-tend un projet de création d'un type nouveau d'homme et d'une société nouvelle où, pour tous, il fera bon vivre.

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V . L a réforme du système d'éducation au Togo

NATURE DE LA REFORME

L'éducation est un facteur de développement socio-économique. L'éco­le constitue la première industrie de base qui fournit les cadres nécessaires à tous les secteurs d'activité politique, culturelle, économique et sociale.

L'école au Togo, comme partout ailleurs dans le monde, traver­se une crise. Plusieurs tentatives de réformes ont été faites au Togo depuis son accession à l'indépendance. Elle concerne tantôt l'enseignement du premier degré comme en 1959 ou en 1967, tantôt l'enseignement du second degré comme en 1965, l'enseignement tech­nique en 1967 ou l'enseignement supérieur en 1971.

Toutes ces réformes consistaient en de légères retouches aux programmes en vigueur dans l'école coloniale et qui n'étaient qu'une copie fidèle des programmes français.

Aujourd'hui, il ne s'agit plus de réforme de l'enseignement mais de tout le système d'éducation. Cette réforme concerne non seulement l'école mais toute la société. Elle intéresse non pas le seul Ministère de l'éducation nationale, mais tous les ministères, toute la nation. Cette réforme intégrale touche les structures, les programmes et les méthodes, les conditions d'installation et de financement, ainsi que les conditions de réussite. Réforme du sys­tème de formation de l'homme, l'homme dans sa totalité, elle est une oeuvre collective à laquelle toutes les couches sociales ont col­laboré.

Pour apporter aux problèmes de l'éducation des solutions adap­tées aux réalités nationales, le gouvernement togolais a institué en 1970 un Conseil supérieur de l'éducation nationale.

Ce conseil interministériel regroupe les responsables du Mi­nistère de l'éducation nationale, ceux des autres ministères (com­me le Ministère du Plan, le Ministère de la santé publique et des affaires sociales, le Ministère de la jeunesse, des sports, de la culture et de la recherche scientifique, etc.), les représentants de l'enseignement confessionnel, ainsi que les représentants des

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syndicats, de l'Association des parents d'élèves et de l'Union na­tionale des femmes au Togo.

Le Conseil a défini les principes de base de l'Ecole nouvelle et a organisé un sondage national pour recueillir les avis de toutes les couches sociales du pays. A partir d'un échantillon de 10 000 personnes pour une population de 2 000 000-d'habitants, cette en­quête s'est déroulée, sur toute l'étendue du territoire, de mars à mai 1972.

Elle a porté sur quatre catégories de couches sociales qui de­vaient donner leurs avis sur les grandes options de l'Ecole nouvelle en répondant à des questionnaires élaborés par le Conseil supérieur de l'éducation nationale.

La première catégorie regroupe les élèves de 2e année des cours moyens de l'enseignement du premier degré, les lycéens et collégiens des classes de troisième, première et terminale et les élèves des écoles spécialisées. Elle comprend également les étudiants togolais immatriculés à l'Université de Lomé et dans les universités étran­gères d'Afrique, d'Europe, d'Amérique et d'Asie.

La deuxième catégorie comprend les enseignants de tous ordres d'enseignement, depuis les moniteurs jusqu'aux professeurs d'uni­versité, qu'ils appartiennent à l'enseignement public ou à l'ensei­gnement privé confessionnel ou laïque.

La troisième catégorie regroupe les autres citoyens lettrés en français, parce que les questionnaires ont été rédigés dans cette langue.

La quatrième catégorie comprend les analphabètes qui se trou­vent surtout dans le monde rural et qui constituent la majeure par­tie de la population togolaise. Une équipe d'enseignants et d'ani­mateurs ruraux les ont aidé ä remplir les questionnaires.

Les 10 000 questionnaires remplis ont été dépouillés et les résultats ont permis au Conseil supérieur de l'éducation nationale de faire des propositions concrètes en vue de la réforme de notre système d'éducation.

OBJECTIFS DE L'ECOLE NOUVELLE

L'Ecole nouvelle qui doit résulter de la réforme de notre système d'éducation sera démocratique. Jusqu'à l'âge de 15 ans, elle sera obligatoire et gratuite pour les enfants des deux sexes.

En 1975, le taux de scolarisation était de 60 %. Le 40 7= des enfants étaient donc contraints de rejoindre le lot déjà important des analphabètes.

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L'Ecole nouvelle doit remédier également aux disparités régio­nales dans le domaine de la scolarisation car, de nos jours, au Togo, le taux de scolarisation varie, suivant les circonscriptions administratives, de 95 % a 22 %.

Elle doit remédier aussi à l'inégalité des chances offertes à la jeune fille et au garçon en matière d'éducation. On compte actuel­lement : une fille pour deux garçons dans l'enseignement du premier degré et dans l'enseignement technique, une pour trois dans le premier cycle du secondaire, une pour cinq dans le second cycle du secondaire et une pour 10 à l'université.

De plus, l'Ecole nouvelle sera mixte : filles et garçons rece­vront la même éducation.

i Plus rentable, elle cherchera à éviter au maximum la déperdi­tion scolaire qui se chiffre à 33 % au niveau de l'enseignement du premier degré, c'est-à-dire, qu'un élève sur trois ne passe pas dans une classe supérieure en fin d'année scolaire. L'Ecole nouvelle ne connaîtra pas de "déchets", c'est-à-dire de déperdition scolaire, grâce à l'institution de l'orientation des élèves par les ensei­gnants et les psychopédagogues. Cette orientation sera basée sur les aptitudes de chacun.

Il faudra pour cela résoudre plusieurs problèmes tels que ceux . du personnel enseignant, du matériel didactique, de l'évaluation, etc.

La fille-mère ne sera plus systématiquement renvoyée de l'éco­le comme autrefois. Elle pourra réintégrer l'école après avis du chef d'établissement qui devra consulter les enseignants, les pa­rents, l'assistante sociale, cela afin que les intérêts de l'enfant soient sauvegardés.

Des établissements spéciaux seront créés pour les enfants han­dicapés.

L'Ecole nouvelle sera adaptée au milieu en développement. Cet­te adaptation à nos réalités nationales et africaines sera marquée par la réhabilitation de nos valeurs culturelles et de nos langues africaines.

Elle mettra l'accent sur l'étude du milieu et sur l'enseigne­ment intégré pour que l'école puisse jouer dans la localité le rô­le d'animateur qui doit être le sien. Elle doit y être le levain du développement économique et social. L'Ecole nouvelle doit former le futur citoyen suivant un profil bien défini : il s'agit, en effet, de former un citoyen complet, équilibré, ouvert d'esprit, plein d'initiative et apte à agir sur le milieu en vue de sa transforma­tion. Elle doit viser l'insertion du citoyen scolarisé dans la vie

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active et mettre fin à la formation de chômeurs, comme c'est le cas actuellement. Il faudra donc adapter les structures scolaires aux besoins en main-d'oeuvre et créer des centres d'apprentissage et des établissements professionnels à toutes les charnières de l'édi­fice scolaire.

Le nouveau système d'éducation doit donc s'intégrer dans la po­litique de développement économique et sociale définie par l'Etat.

STRUCTURE DE L'ECOLE NOUVELLE

L'école qui résultera de la réforme de notre système d'éducation comprendra quatre degrés d'enseignement :

- le premier degré, à savoir les jardins d'enfants (3 années) et l'école primaire (6 années);

- le deuxième degré, qui correspond au premier cycle du secon­daire actuel (4 années);

- le troisième degré, qui correspond au second cycle du secon­daire actuel (3 années);

- le quatrième degré, qui correspond à l'enseignement supérieur actuel (4 a 7 années).

Enseignement du premier degré

Les jardins d'enfants. Les enfants y accèdent à l'âge de deux ans révolus pour une période de trois ans. L'éducation s'y donne dans la langue nationale de la localité pour ne pas arracher brusquement le jeune élève de son milieu linguistique.

L'école primaire. Les enfants y entrent à l'âge de cinq ans pour une période de six ans. Elle comprend trois paliers de deux ans chacun.

Enseignement du deuxième degré

Il comprend deux cycles de deux ans chacun. Le cycle d'observation constitue un tronc commun : tous les élèves ayant terminé l'ensei­gnement du premier degré y accèdent automatiquement. Le cycle d'orientation. A la suite d'une orientation qui tient compte des aptitudes de l'élève et des besoins du développement national, les élèves sont répartis dans les différents types d'établissement : Collèges d'enseignement général (CEG), Collèges d'enseignement tech­nique (CET), Collèges d'enseignement agricole (CEA), Collèges d'en­seignement artisanal et artistique (CEAA), etc. A la fin de

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l'enseignement du deuxième degré, l'école cesse d'être obligatoire. Après le cycle d'orientation, les élèves peuvent poursuivre

leur formation dans l'enseignement du troisième degré ou rentrer directement dans la vie active pour y exercer la profession à la­quelle ils ont été préparés. Ceux qui, à la sortie, seraient trop jeunes du point de vue de la législation du travail en vigueur suivront des cours de perfectionnement de deux ans dans un centre de formation permanente.

Enseignement du troisième degré

Les élèves y sont admis sur concours pour une période de trois ans. Il comprend, d'une part, les lycées d'enseignement général, les ly­cées techniques, les lycées d'enseignement agricole, les écoles des arts et métiers et, d'autre part, les écoles spécialisées (Ecole nationale des sages-femmes, Ecole nationale des auxiliaires médi­caux, Centre national de formation sociale, Ecole normale des insti­tuteurs, Institut national de la jeunesse et des sports - cycle B).

A l'issue de l'enseignement du troisième degré, les élèves peuvent accéder à l'enseignement du quatrième degré ou rentrer dans la vie active.

Enseignement du quatrième degré

Il comporte un système de grandes écoles et de facultés. Tous les établissements d'enseignement et de formation professionnelle sont placés sous la tutelle du Ministère de l'éducation nationale. La politique de formation dans les écoles spécialisées est définie en collaboration avec les ministères intéressés.

Chaque degré d'enseignement a sa direction générale et regrou­pe des départements spécialisés. La coordination des activités de toutes les directions est assurée par le Secrétariat général du Mi­nistère de l'éducation nationale.

METHODES ET PROGRAMMES DES COURS

Ils doivent viser à la formation d'un citoyen capable d'assurer la promotion politique, culturelle, économique et sociale du pays; il s'agit d'un citoyen décomplexé, désaliéné et authentiquement africain.

L'enseignement est concret, basé sur l'étude du milieu pour aboutir par approche à une ouverture sur le reste du monde.

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Programmes

L'adaptation des programmes aux réalités nationales implique trois démarches :

- Suppression de tout ce qui n'est que livresque et de tout ce qui n'est pas immédiatement efficace.

- Allégement des programmes. - Introduction de nouvelles disciplines.

Chaque discipline sera conçue dans le sens de la lutte contre le sous-développement. En géographie, par exemple, l'accent sera mis sur la connaissance de nos ressources et de nos potentialités réelles. L'histoire sera vue d'Afrique, par des yeux africains. En sciences naturelles, il s'agira de connaître notre milieu et les possibilités d'utilisation qu'il offre. Les activités économiques à l'école auront une place de choix : champs et jardins scolaires, petit élevage, artisanat, etc. Les langues nationales et les lan­gues africaines seront enseignées à l'école. A l'école primaire, deux langues seront simultanément enseignées sur toute l'étendue du Togo : l'evé dans le sud et le kabyë dans le nord. Dans l'ensei­gnement du deuxième degré, l'élève du sud, en plus de l'evé, appren­dra le kabyë comme deuxième langue tandis que l'élève du nord, en plus du kabyè, apprendra l'evé comme deuxième langue. Nos langues nationales seront étudiées jusqu'à l'université. Un Institut natior nal de linguistique sera créé pour leur étude scientifique. Les langues nationales sont introduites dans le programme comme disci­pline et le français reste la langue d'enseignement. A un stade ul­térieur, on pourra envisager l'enseignement dans nos langues et le français aura le statut de langue étrangère. A partir du troisième degré seront enseignées les langues africaines déterminées au ni­veau de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) ou des groupements politico-économiques régionaux.

Dès l'enseignement du premier degré, on introduira également la littérature africaine, l'initiation à la vie pratique, qui doit amener les élèves à une connaissance parfaite des objets techniques du milieu, l'instruction civique, le code de la route, le secou­risme, l'éducation sexuelle, et l'économie familiale (pour les élèves des deux sexes : couture, puériculture, hygiène maternelle et infantile, éducation sanitaire et nutritionnelle, etc.).

En art culinaire, on insistera d'abord sur les repas togolais en utilisant des produits et ustensiles togolais. Champs et jardins scolaires serviront d'appui à cet enseignement.

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A partir de l'enseignement du deuxième degré, on introduira l'anglais des la première année et la physique-chimie dès la troi­sième année.

Dans l'enseignement du troisième degré, on introduira dès la 1ère année la philosophie et la préparation militaire. L'allemand et l'espagnol, comme les langues africaines, seront des matières à option.

Dans l'enseignement du quatrième degré, l'université sera une université authentiquement togolaise et africaine, formant des cadres qualifiés pour les besoins du pays. Elle délivrera des di­plômes togolais et travaillera en étroite collaboration avec les autres universités africaines.

Méthodes

La réforme de notre système d'éducation préconise de nouvelles mé­thodes pédagogiques. Elle recommande de nouvelles relations maîtres-élèves pour mettre fin à l'enseignement académique et dogmatique que nous connaissons maintenant et dans lequel l'élève "ne fait qu'enregistrer la voix de son maître".

Le maître de l'Ecole nouvelle est avant tout un animateur. Dans un souci de promotion collective, il veille à une organisation ra­tionnelle et efficace du travail en groupe. Il donne un enseignement intégré : l'élève formé doit avoir une vue globale des programmes et non plus une vue des détails de programmes isolés.

L'Ecole nouvelle fera appel à d'autres spécialistes suivant leur compétence. Même les paysans illettrés, qui ont quelque chose à enseigner aux élèves sur le plan de la pharmacopée, des traditions et coutumes, de la musique et de la danse africaines, viendront à l'école tout comme les élèves iront à eux. L'école ne sera plus limitée à sa concession mais va s'ouvrir sur toute la localité, sur toute la région.

L'étude du milieu sera conçue comme le support pédagogique de tout enseignement et comme un moyen de formation des élèves en vue de la transformation du milieu.

A l'Ecole nouvelle, l'autodiscipline sera appliquée. Discipli­ne librement consentie, ce sera un contrat élaboré, approuvé et res­pecté par tous. Toutes les sanctions doivent tendre à encourager ou à corriger l'élève.

A l'Ecole nouvelle, on appliquera l'évaluation continue : une évaluation permanente en vue du contrôle des connaissances acquises par l'élève, de ses comportements et de ses aptitudes parti­culières. Cette évaluation continue sera consignée dans un

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livret scolaire qui suivra l'élève tout au long de sa scolarité. Elle permettra, à l'école primaire par exemple, le passage automa­tique de la 1ère à la 2e année, de la 3e à la 4e année et de la 5e année à la 6e année. Les redoublements, exceptionnels, ne pourront avoir lieu qu'en 2e, 4e ou 6e année.

Avec le concours de psychopédagogues, l'Ecole nouvelle prati­quera l'orientation permanente des élèves. A l'issue de l'enseigne­ment du premier degré, les élèves seront orientés vers les établis­sements du deuxième degré en fonction des résultats de l'évaluation continue. Il n'y aura pas de déperdition à ce niveau : un élève qui est bon en agriculture peut ne pas l'être en mathématique ou en physique; un élève qui est faible en histoire et géographie peut être compétent en sport.

A l'école, on instituera l'émulation comme moyen de stimula­tion pour maintenir les intelligences en éveil et motiver les élè­ves en vue d'une meilleure participation à leur propre formation. L'émulation sera instituée entre les élèves d'une même classe, entre les classes d'une même école et entre les établissements scolaires d'une même localité.

Au cours de la Semaine de l'établissement, il y aura la pro­clamation des résultats scolaires ainsi que des performances spor­tives, des représentations théâtrales, des expositions de pièces d'art ou d'artisanat réalisés par les élèves et la visite des champs et jardins scolaires. Les récompenses seront attribuées au groupe, et non à l'individu, afin d'encourager et de développer l'esprit d'équipe.

L'éducation des enfants au sein de l'Ecole nouvelle implique une étroite collaboration entre l'école, la famille et d'autres organismes. L'Association des parents d'élèves donnera son avis sur l'organisation des mutuelles, des cantines scolaires, du service médical et participera aux travaux de construction scolaire.

Les comités scolaires examineront tous les problèmes relatifs aux installations scolaires et aux modalités de participation des parents à la vie de l'école.

LES CONDITIONS DE REUSSITE DE L'ECOLE NOUVELLE

La réforme de notre système d'éducation est une entreprise nationa­le. Cela implique une politique d'information intense de la masse portant sur la nature et les buts de l'Ecole nouvelle afin que la population se sente concernée par le succès de cette entreprise commune.

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L'Ecole nouvelle sera obligatoire et gratuite. Dans les enseignements du premier et du deuxième degré, le fi­

nancement sera assure par l'Etat et les organismes nationaux. Les parents apporteront leur contribution. Tout en comptant avant tout sur lui-même, l'Etat pourra recourir à l'aide extérieure, bilatérale et multilatérale.

La politique culturelle doit viser la revalorisation de nos traditions et coutumes afin que nous cessions de n'apprécier que les valeurs étrangères à l'Afrique.

Les conditions économiques et sociales sont la clé du succès de l'Ecole nouvelle. En effet, des relations très étroites doivent exister entre l'école et les autres secteurs d'activité, afin de faciliter la réinsertion du citoyen scolarisé dans la vie active. Sans la valorisation de l'agriculture par exemple, l'exode rural continuera, avec toutes ses conséquences économiques et sociales. Il faut que la terre nourrisse son homme et que les produits agri­coles soient revalorisés pour que l'élève issu de Collège d'ensei­gnement agricole puisse retourner à la terre.

L'Ecole nouvelle devra bénéficier de meilleures conditions ma­térielles. Le matériel d'enseignement sera adapté et, dans la me­sure du possible, conçu et fabriqué sur place. Tout ce qu'on ne peut se procurer sur place pourra être acheté dans les pays voisins car, dès l'école, doit commencer la coopération horizontale entre Etats africains.

Les effectifs des élèves par classe seront réduits à 50 au grand maximum dès le primaire; suivant les localités, un effectif de 15 enfants suffira pour l'implantation d'une école.

Les cantines scolaires permettront aux élèves qui le veulent de prendre leur repas à des prix modiques.

Pour les étudiants, l'Etat prendra en charge collective les besoins obligatoires : équipements culturels et pédagogiques, res­taurants universitaires, cités universitaires, soins médicaux, transport. Une aide uniforme sera accordée aux étudiants dans le besoin.

Le personnel enseignant devra bénéficier de conditions maté­rielles satisfaisantes afin que l'école ne soit plus une salle d'at­tente pour l'accès à d'autres fonctions plus lucratives. Le recru­tement des enseignants doit tenir compte non seulement de leur cul­ture générale mais aussi de leur aptitude à enseigner. L'Ecole nou­velle n'engagera que des instituteurs formés dans des écoles nor­males; les instituteurs adjoints disparaîtront progressivement.

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Tous les enseignants recevront une formation permanente lors de sta­ges de recyclage ou grâce à des cours par correspondance.

La mise en place de l'Ecole nouvelle, qui a commence en septembre 1975, sera progressive; elle s'effectuera sur une période de 10 a. 15 ans, compte tenu des moyens en personnel, capitaux et infrastructure d'accueil dont le Togo disposera.

' Quelques projets pilotes ont déjà vu le jour, notamment avec l'ouverture du lycée du 2 février ä Lomé, le premier lycée de l'en­seignement du troisième degré.

Pendant toute la période de mise en place de l'Ecole nouvelle, le Conseil supérieur de l'éducation nationale adaptera constamment les prévisions aux réalités afin d'éviter les heurts, les retours en arrière et les remises en cause.

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V I . U n e réforme novatrice en Ethiopie

INTRODUCTION

Depuis longtemps, les Ethiopiens n'étaient pas satisfaits de leur système éducatif, jugé trop académique. Dans l'ensemble, les eleves ayant achevé six, huit ou douze années d'études ne possédaient pas de connaissances directement utilisables dans l'exercice d'une pro­fession. La grande majorité des enfants d'âge scolaire n'avaient pas la possibilité de fréquenter l'école. En d'autres termes, le système était coûteux, élitiste, et ne contribuait pas au dévelop­pement économique et social du pays. Les préoccupations que cette situation causait aux éducateurs éthiopiens ont conduit à un cer­tain nombre de tentatives de réforme, ainsi que le résument perti-nement les lignes suivantes extraites de l'Education sector review: "Le développement du système éducatif éthiopien a été marqué par un esprit de critique constructive et par la recherche d'amélio­rations renouvelées, et non par la satisfaction devant les pro­grès successivement réalisés. C'est au début des années 50 qu'ont été exprimées les premières préoccupations au sujet de l'organi­sation de l'éducation. Formulées avant tout par les éducateurs et par les fontionnaires responsables de l'enseignement, elles ont conduit à la constitution de plusieurs groupes d'études. Un comi­té de planification à long terme a été créé en 1955 pour évaluer le système éducatif et a présenté un rapport intitulé A Ten-Year Plan for the Controlled Expansion of Ethiopian Education. En 1966, un comité a été constitué par le Conseil des ministres pour faire rapport sur le fonctionnement du système éducatif. Par la suite, divers autres comités ont été formés pour étudier des problèmes spécifiques."

L'enseignement, cependant, continuait de susciter des méconten­tements, qui se portaient avant tout sur son inaptitude à satisfaire les aspirations de la majorité des individus et sur l'inadéquation de la formation de ceux qui passaient par ses filières.

Les dernières années en particulier ont été marquées par un âpre débat critique entre éducateurs, parents et fonctionnaires,

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alimente de surcroît par des demandes pressantes formulées par les élèves et souvent appuyées par les parents. Le gouvernement a réagi positivement en prenant deux mesures significatives qui témoignaient de sa disposition favorable à l'égard de changements fondamentaux et de sa volonté réformatrice. Ces mesures ont consisté dans la création d'une Commission nationale de l'éducation et dans le lan­cement de l'Education sector review3 qui allaient jouer tous deux le rôle de tribune où culmina le débat national.

Bien que l'Education sector review ait formulé des recommanda­tions empreintes d'une grande clairvoyance et répondant aux besoins du pays, son étude fur repoussée tant par les enseignants que par les parents. Elle ne le fut pas en raison de son contenu et de ses conclusions, mais parce que le pays n'était pas, à l'époque, prêt pour le changement radical qu'elle envisageait. Des réformes dans d'autres secteurs auraient dû accompagner la mise en oeuvre des re­commandations relatives au secteur de l'éducation.

Depuis lors, de profonds changements ont eu lieu dans les do­maines social et politique :

a) événement d'une grande portée historique, la Révolution éthio­pienne de février 1974, dont les Forces armées ont été le fer de lance, a chassé l'ancien régime bureaucratique et féodal qui faisait gravement obstacle au progrès national;

b) l'ancien gouvernement a été remplacé par le Conseil adminis­tratif militaire provisoire, qui a banni la recherche de l'in­térêt personnel et la corruption, sous la devise Ethiopia Tikdem "Hibretsebawinett", c'est-à-dire le socialisme;

c) le nouveau gouvernement a promulgé quatre actes politiques es­sentiels qui ont guidé les réformes de structure fondamentales pouvant servir de base à un développement rapide et à 1'ins­tauration de la justice sociale.

Déclaration sur le socialisme éthiopien

Le premier de ces actes, la Déclaration du 20 décembre 197'4, a pro­clamé 1'"hibretsebawinett" (socialisme éthiopien), exprimé dans le document en ces termes : "égalité, indépendance, dignité du travail, suprématie du bien commun et indivisibilité de l'unité éthiopienne". Cinq principes fondamentaux étaient formulés :

a) tous les Ethiopiens, quels que soient leur religion, leur lan­gue, leur sexe ou leur affinité locale, vivront ensemble dans l'égalité, la fraternité, l'harmonie et l'unité sous la protec­tion de leur patrie; l'Ethiopie sera un pays où régneront la justice, l'égalité et la liberté;

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b) l'idolâtrie sans bornes vouée au profit personnel, qui a en­chaîné notre peuple à la pauvreté et a tant humilié notre pays aux yeux du monde, sera éliminée; dorénavant, la primauté sera donnée aux intérêts de la collectivité;

c) les droits d'autonomie que notre peuple avait exercés au ni­veau du village, du district et de la région, et qui avaient été usurpés, seront restaurés; le gouvernement central sera responsable des affaires d'Etat revêtant une importance natio­nale ou fondamentale et apportera aide et assistance aux com­munautés qui s'administreront elles-mêmes;

d) l'homme doit travailler pour subvenir à ses besoins et a ceux de sa communauté; une place respectée sera donc accordée au travail humain dans notre édifice social; à l'inverse, les mo­des de vie reposant sur l'exploitation et le parasitisme se­ront condamnés;

e) par-dessus tout, l'unité de l'Ethiopie sera pour tout notre peuple un article de foi sacré.

Déclaration sur la politique économique

La politique économique fondamentale en vertu de laquelle "le bien commun prime la recherche du profit personnel" a été élaborée et définie dans le deuxième acte politique, publié le 7 février 1975. La Déclaration sur la politique économique de l'Ethiopie socialiste a placé sous le contrôle de l'Etat ou déclaré propriété nationale, dans l'intérêt de la masse de la population, une série de biens ou de moyens économiques essentiels. Outre les banques et les compa­gnies d'assurances, nationalisées antérieurement, toutes les grandes entreprises industrielles furent placées sous le contrôle de l'Etat. Certaines entreprises, telles que les exploitations minières et l'industrie des métaux précieux, furent transformées en entreprises semi-publiques.

Nationalisation des terres

Le 4 mars 1975, la troisième réforme de structure fondamentale fut mise en route avec la Proclamation sur la nationalisation des ter­res. Cette réforme abolissait le système féodal et remettait aux mains des masses rurales le facteur essentiel de production : la terre. La domesticité et le fermage étaient abolis. Des dispositions non moins importantes de la proclamation stipulaient la formation d'associations de paysans groupant les cultivateurs par unités de

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superficie de 80 hectares et les pasteurs par superficies de pâtu­rages appropriées aux besoins du développement. Individuellement ou en groupe, ces associations fournissent un cadre essentiel pour diverses activités de développement, notamment pour l'éducation, et les bases d'une participation populaire à ces activités.

Ainsi, la nationalisation des propriétés foncières rurales a éliminé le dernier instrument d'exploitation féodale avec lequel les propriétaires urbains (qui investissaient souvent en ville le produit de la mise en valeur des terres rurales) exploitaient les travailleurs des villes. Comme dans les localités rurales, il a été créé dans les villes des associations communautaires pour l'appli­cation de la proclamation relative à la propriété foncière urbaine. Ces associations communautaires (Kebeles) constitueront des foyers pour les activités de développement et la participation populaire.

La "Zemeoha"

On s'est particulièrement attaché à la mobilisation de la popula­tion active pour l'exécution des programmes de développement dans les zones tant rurales qu'urbaines. Une importante innovation à cet égard a été la participation de la jeunesse aux activités de déve­loppement par l'intermédiaire de la Campagne pour le développement par la coopération, connue sous le nom de "Zemecha" et lancée en novembre 1974. Quelque 60 000 élèves du deuxième cycle secondaire ou étudiants de l'université, accompagnés de leurs professeurs, ont été envoyés dans les zones rurales pour faire profiter les habi­tants de leurs connaissances, leur faire connaître les principes et les politiques de la révolution, les aider à mener à bien des programmes leur permettant de gagner rapidement le combat contre la pauvreté, la maladie et l'ignorance, collaborer avec eux ä la for­mation d'associations de paysans et, surtout, pour recueillir leurs désirs et faire connaître leurs aspirations;.tout cela constituant une expérience dans des conditions réelles destinée à compenser le côté abstrait des programmes d'études de type classique et les ef­fets négatifs de la vie urbaine.

Ainsi, en l'espace d'un an, le cadre politique, économique et social dans lequel s'insère le système éducatif a radicalement chan­gé. On trouvera dans les pages suivantes un aperçu de quelques ap­proches novatrices de l'éducation en Ethiopie, celles-ci étant con­ditionnées par les éléments suivants :

a) formation des maîtres : a titre expérimental, il est prévu d'inclure la formation des instituteurs dans les options offer­tes aux élèves de toutes les classes de l'enseignement secon­daire (trois ou quatre années), ce qui signifie que les élèves

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titulaires du diplôme de fin d'études secondaires seront admis directement comme instituteurs; des cours de perfectionnement seront donnés aux instituteurs en exercice par des professeurs itinérants;

b) utilisation des langues vernaculaires dans l'enseignement pri­maire ;

c) fonctionnement de l'école comme unité de production : selon le lieu ou se trouve l'école, celle-ci sera utilisée comme entre­prise productive et pourra, le cas échéant, devenir indépen­dante et subvenir à ses propres besoins; dans les zones agri­coles, il est prévu que chaque école possédera au moins 10 hec­tares de terrain; dans les zones urbaines, les écoles seront rattachées à des garages, à des entreprises industrielles ou à d'autres unités de production;

d) responsabilité directe des parents dans l'administration des écoles;

e) utilisation des moyens d'information de masse pour suppléer les maîtres;

f) cours par correspondance dans l'enseignement secondaire; g) utilisation de groupes d'experts pour la recherche et la pro­

duction en série de matériels d'enseignement et l'évaluation; h) recherche sur la réduction du temps d'enseignement; i) production de modules éducatifs.

APPROCHES POSSIBLES DE L'EDUCATION DE BASE

Proposition de programme national d'éducation de base pour 1'Ethiopie

Les principes qui sont à la base des changements qui s'opèrent ac­tuellement dans l'éducation en Ethiopie ont été exposés dans un certain nombre de documents publiés par le Conseil administratif militaire provisoire. Il est indiqué dans ces documents que le gou­vernement s'est engagé à éliminer l'ignorance et la maladie et à donner une éducation de base gratuite ä tous les citoyens éthiopiens.

Le gouvernement a défini sa politique générale relative à l'éducation et s'est engagé à réaliser un programme de démocratisa­tion, de décentralisation et de rénovation. Il a en outre accepté le principe de l'éducation permanente pour tous. La priorité est donc donnée à un programme d'éducation populaire qui vise à doter tous les citoyens d'un bagage minimal de connaissances et qui met

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particulièrement l'accent sur la satisfaction des besoins, si né­gligés dans le passé, des 90 % d'analphabètes (principalement des ruraux) que compte la population. L'éducation, est-il également indiqué, doit être axée sur le milieu rural et développée non pas uniquement pour elle-même, mais en tant qu'instrument essentiel du progrès économique et social. Un type d'éducation académique et théorique a été considéré comme ne convenant pas au pays dans son ensemble. C'est pourquoi on veillera désormais a. ce que l'enseigne­ment soit orienté sur le travail, ait un caractère pratique, et soit adapté aux besoins et à la situation de l'Ethiopie. L'éducation doit également avoir pour effet de créer un esprit d'initiative et d'in­dépendance.

Objectifs du programme d'éducation de base

Les objectifs du programme d'éducation de base sont les suivants :

a) établir un programme d'éducation de base pour tous les citoyens éthiopiens conformément à la politique du gouvernement définie dans des documents tels que La philosophie de 1 'Ethiopia Tikdem3 Les origines et 1'orientation future du mouvement3 La proclamation de la réforme agraire du 4 mars 1975.

b) aider à la création d'un système d'éducation décentralisé qui serait plus démocratique et donnerait une plus grande part de responsabilité aux associations locales, aux enseignants, aux parents, etc.;

c) former de nombreux enseignants capables de mettre en oeuvre le nouveau système d'éducation fondé sur les associations d'agri­culteurs et destiné à atteindre toute la population que concer­ne l'éducation de base;

d) donner aux enseignants en exercice des cours de recyclage pour leur permettre de coopérer à la mise en oeuvre du nouveau sys­tème éducatif.

Formation des maîtres pour 1'éducation de base généralisée

L'éducation pour tous étant l'objectif de cette politique, il con­vient d'estimer le nombre d'enseignants qu'elle nécessitera. Le groupe d'experts en matière de formation d'enseignants a procédé à cette estimation sur la base du nombre prévu d'associations d'agriculteurs. A supposer qu'il soit constitué environ 30 000 asso­ciations j il faudra employer un très grand nombre d'enseignants. On a bon espoir que, si l'on fait appel pour l'exécution du program­me à des techniques nouvelles et aux moyens de grande information, il sera possible de satisfaire aisément ces importants besoins.

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Les participants ä la "Zemecha" (Campagne de développement par la coopération) joueront un rôle de premier plan dans la phase ini­tiale du programme d'éducation de base. Le nombre estimé de partici­pants est actuellement de 60 000 et l'on peut prévoir que la "Zeme­cha" se poursuivra pendant au moins 5 ans. Cela donnerait un nombre total de participants de 250 000 à 300 000. Si chaque participant enseigne effectivement à 25 personnes, le nombre d'Ethiopiens ayant reçu une instruction sera d'environ 7 millions après 5 ans.

Matériels d'enseignement et installations

Ne serait-ce que pour des raisons financières, on ne peut compter que tous les enfants appelés à fréquenter les nouvelles écoles qui seront ouvertes dans tout le pays disposeront de manuels en nombre suffisant. Le coût du papier et les problêmes soulevés par la rédac­tion et la publication de nouveaux manuels rendent improbable, dans un proche avenir, une répartition généralisée de grandes quantités de livres de classe. On ne pense pas, cependant, que ce soit là un obstacle au déroulement du programme, car on considère que la prio­rité doit être donnée aux matériels d'enseignement à l'usage des maîtres, plutôt qu'aux livres à l'usage des enfants. Pour plusieurs raisons, on estime qu'il convient de concentrer les efforts sur la production de matériels d'enseignement qui permettront aux maîtres d'adopter à l'égard de l'éducation une attitude plus créatrice et plus imaginative.

Etant donné la nécessité de créer des milliers de nouvelles écoles, on devra produire des matériels utilisables par les maîtres qui seront obligés de travailler avec un minimum de moyens et d'équipements. Les associations d'agriculteurs ne pourraient pas, du moins dans les premiers temps, consacrer beaucoup d'argent ä la construction d'écoles. A mesure que les conditions s'amélioreront et que les associations disposeront de capitaux plus importants, elles pourront améliorer leurs bâtiments scolaires, éventuellement avec l'aide du gouvernement. Mais, au début, il faut s'attendre ä ce que les maîtres soient contraints d'exercer leur ingéniosité, leur imagination et leurs facultés créatrices pour vaincre les dif­ficultés qu'ils rencontreront dans les zones rurales éloignées. Là encore, on ne pense pas que cette obligation fasse obstacle à la réalisation du programme. Au contraire, elle sera pour les écoles le stimulant nécessaire qui leur fera inculquer les notions d'ini­tiative individuelle et d'indépendance au grand nombre d'élèves qui bénéficieront du nouveau système éducatif.

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Le projet

Un plan de formation accélérée des maîtres devra être appliqué pour ce programme. Il comportera le recrutement et une brève initiation de formateurs de personnel enseignant (la plupart déjà disponibles), qui seront chargés de la préparation d'un grand nombre de maîtres dans des centres de formation fonctionnant dans tout le pays.

La formation des maîtres sur le terrain comprendra, comme élé­ment essentiel, l'initiation à l'utilisation et au développement de séries complètes de leçons fondées sur les ressources du milieu lo­cal. Des émissions radiophoniques ayant trait à ces cours seront diffusées régulièrement par le Centre d'information afin d'orienter ultérieurement les maîtres en exercice, sous la surveillance des formateurs du personnel enseignant.

Afin d'axer les écoles sur le développement économique et so­cial plutôt que sur le perfectionnement de connaissances théoriques individuelles, l'accent sera mis sur les objectifs suivants :

a) attitudes positives - notamment volonté de coopération et d'en­traide - de l'élève à l'égard de sa famille et de ses compa­gnons, du travail, de la communauté et du développement natio­nal;

b) enseignement fonctionnel de la lecture, de l'écriture et du calcul;

c) conception scientifique des choses et notions élémentaires sur les lois de la nature;

d) connaissances fondamentales, théoriques et pratiques, nécessai­res pour élever une famille et gérer un ménage;

e) connaissances fonctionnelles, théoriques et pratiques, nécessai­res pour gagner de quoi vivre ;

f) connaissances fonctionnelles, théoriques et pratiques, pour la participation à la vie civique.

Education de base pour les masses

L'objectif final de tout le programme est de rendre l'éducation de base accessible à tous les Ethiopiens sans distinction d'origine ethnique, de religion ou de sexe, cela dans un délai raisonnable.

Les groupes visés sont : a) les enfants d'âge scolaire; b) les jeunes qui n'ont reçu que fort peu ou pas du tout d'instruction; c) les travailleurs adultes.

L'éducation de base pour tous est un droit de l'homme essen­tiel, dont la majorité des Ethiopiens a été privé dans le passé. S'il est évidemment nécessaire que le programme soit exécuté très

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rapidement afin de remédier dans le plus bref délai possible aux déficiences du passé, cela ne signifie pas que le type d'éducation offert constituera un pis-aller ou sera de qualité inférieure. En outre, il est important de remarquer que, si cette sorte d'éducation convient tout particulièrement à l'Ethiopie, au stade de dévelop­pement où en est ce pays, elle suscite aussi à l'heure actuelle un intérêt dans le monde entier en tant que moyen de répondre aux be­soins en matière d'éducation des pays en développement comme des pays industrialisés.

L'éducation des adultes orientée sur le travail : élément prépondé­rant de l'éducation de base

L'objectif global du programme d'éducation de base est de faire des Ethiopiens des citoyens indépendants, capables de subvenir à leurs propres besoins, alphabétisés, habiles et bien portants, qui parti­ciperont et contribueront activement au développement politique, économique et social de l'Ethiopie.

Sur le plan pratique, l'éducation de base a été définie de la manière suivante :

a) une éducation qui fera acquérir à un adulte, un adolescent ou un enfant les connaissances pratiques nécessaires pour gagner sa vie, cette éducation s'adressant aux deux sexes et indépen­damment de l'âge;

b) une éducation comprenant l'enseignement, orienté sur le tra­vail, de la lecture, de l'écriture et du calcul, et visant à aider les participants à améliorer leurs connaissances prati­ques, à en acquérir de nouvelles et à les appliquer;

c) une éducation qui jettera les bases d'un développement futur des ressources nécessaires, notamment humaines.

Le programme comprendra, comme principaux sujets d'études, l'instruction civique, l'agriculture, l'industrie artisanale, les coopératives, la lecture, l'écriture et le calcul, l'enseignement familial et ménager, l'éducation sanitaire et l'éducation physique. Les détails du programme seront indiqués dans le "plan d'études" et

, dans les matériels pédagogiques. Bien que le programme soit conçu pour les adultes, les adolescents et les enfants, le niveau de son contenu et sa durée seront fonction de la majorité et des aptitudes des participants.

Diverses méthodes seront appliquées pour dispenser l'enseigne­ment : emploi des langues locales, radio, télévision, classe tradi­tionnelle, démonstrations, journaux ruraux, correspondance, etc. Il

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convient de noter que toutes ces méthodes peuvent ne pas être tou­jours applicables dans un environnement donné.

Plus de 500 centres communautaires d'éducation et de formation pratique seront créés en cinq ans (1968-1972 EC). Les emplois du temps seront organisés de manière à permettre l'utilisation de ces centres pour l'éducation des adultes, des adolescents et des en­fants. En outre, les établissements d'enseignement primaire et d'en­seignement secondaire des premier et second cycles, les écoles nor­males, les centres sanitaires et d'autres institutions seront utilisés aux mêmes fins. Ces 500 centres serviront aussi de bureaux d'associations de paysans au niveau des sous-districts (Wereda).

Pour faciliter le déroulement sans heurts du programme, des comités interministériels de coordination seront créés au niveau national, provincial, des district (Awraja), des sous-district (Wereda) et local. Les associations d'agriculteurs ou les sociétés coopératives de citadins auront, au niveau local, la responsabilité des programmes, qu'elles exerceront conformément aux directives et avec l'assistance technique des comités interministériels de coor­dination.

L'évaluation du travail des participants portera sur les nou­velles connaissances acquises : aptitude à lire, écrire et calculer, attitude positive à l'égard du travail manuel, participation active et compétente aux associations d'agriculteurs et aux sociétés coo­pératives de citadins, etc.

LA TECHNOLOGIE PEDAGOGIQUE, ELEMENT NOVATEUR DU SYSTEME EDUCATIF

Au cours des dernières années, l'utilisation et le développement des techniques pédagogiques ont dépassé le stade expérimental. La création du Centre national a permis au Ministère de l'éducation na­tionale de développer les capacités techniques et les effectifs de personnel qualifié, de produire, de diffuser et d'évaluer des pro­grammes radiophoniques et des matériels à l'appui et, surtout, de résumer toutes ses conclusions dans une étude technique détaillée, destinée à servir de plan d'action.

De toutes les techniques pédagogiques constituant un élément novateur du système éducatif, c'est la radio qui occupe la première place. L'utilisation dans le nord, le centre et le sud du pays de trois émetteurs ä ondes moyennes d'une puissance d'un kilowatt suivie d'une série d'évaluations, a permis de constater que ce moyen d'information joue un rôle très particulier de catalyseur dans le processus éducatif. La routine quotidienne est mise en

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question; la leçon du maître et les manuels prescrits ne sont plus les seules sources de savoir. Les émissions radio diffusées et les matériels à l'appui, spécialement conçus, ont servi à combler le fossé entre l'enseignement et la réalité extérieure. Maîtres et élèves se livrent souvent à la critique et ne sont jamais passifs.

La radio a également été utilisée dans des expériences de moin­dre envergure pour l'éducation des adultes. Les résultats obtenus montrent qu'elle offre dans ce domaine des possibilités encore plus grandes. L'utilisation de la radio comme moyen d'information pour soutenir le projet PSC (Project Support Communication) assurera la participation du public et établira le dialogue, remédiant ainsi aux insuffisances traditionnelles dé la communication à sens unique.

Le plan d'utilisation de la radio, prioritaire dans le projet d'éducation, s'appuie sur 11 stations de radiodiffusion situées en des lieux choisis avec soin. Ses caractéristiques sont les sui­vantes :

a) il vise, par principe, à desservir les régions rurales et, en particulier, les plus lointaines qui n'ont pu être atteintes jusqu'ici, faute d'une infrastructure et de services suffi­sants;

b) il est adapté à la topographie de l'Ethiopie : les fréquences des ondes moyennes offrent une bonne réception dans des zones limitées (les montagnes et les vallées du pays sont parmi les facteurs qui rendent difficile la réception des émissions des stations puissantes et des ondes courtes);

c) il fera de la technologie une partie intégrante du système éducatif (comprenant l'éducation extrascolaire et les cours par correspondance) et aura des effets secondaires qui se fe­ront sentir sur la technologie régionale (rurale) et la "révo­lution du transistor";

d) il conviendra parfaitement à l'emploi des langues locales pour l'éducation des adultes, à la participation populaire au niveau local, et comme tribune régionale de développement utilisable par les agents de la vulgarisation agricole, les associations d'agriculteurs, etc.

L'INNOVATION DANS LE DOMAINE DE LA CONSTRUCTION SCOLAIRE

Dans le passé, les matériaux nécessaires à la construction des bâ­timents scolaires étaient en grande partie importés. Le coût de la construction d'une école était, en conséquence, très élevé. Ces

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dernières années, on a pris pour règle d'employer un minimum de ma­tériaux importés et de plus en plus de matériaux locaux.

Le besoin de multiplier rapidement le nombre des écoles pri­maires, la construction de celles-ci dans des régions plus éloi­gnées, et le lien qui doit unir, dans un sens pratique, les écoles à d'autres activités de développement entraînent l'application d'une technologie et d'une stratégie nouvelles dans les programmes de construction d'écoles rurales. Cette obligation est encore accentuée par l'objectif d'autonomie des communautés. Il a donc fal­lu mettre en oeuvre une technologie appropriée ä l'élévation du ni­veau des connaissances pratiques dans la communauté et aux maté­riaux de construction trouvés sur place. La construction de bâti­ments scolaires sera donc liée à la transmission de connaissances théoriques et pratiques et d'une technologie appropriée permettant le progrès culturel des communautés et préparant celles-ci à l'en­tretien des écoles et â la construction d'autres bâtiments scolai­res similaires de coût modéré.

Environ 200 écoles ont été construites en application de cette réforme et le coût de la construction a été réduit d'un quart ou davantage.

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V I L Adoption d'un système d'écriture pour la langue Somalie

C'est le 1er juillet 1960 qu'a eu lieu l'unification de la Somalie placée jusqu'alors sous protectorat britannique et de celle qui avait été placée pour administration italienne. Pour le peuple somali, ce fut là un événement historique; mais la nouvelle répu­blique, du fait de son héritage colonial, se trouvait en face de problèmes énormes. L'un d'eux était d'ordre linguistique : l'exis­tence de deux langues officielles d'origine étrangère: l'anglais et l'italien. Au début, pour des raisons pratiques et politiques, il fallut s'accommoder de ces deux langues. Non seulement elles étaient les langues officielles de l'administration, mais de plus on était obligé de les employer dans les écoles pour y dispenser l'enseigne­ment, en anglais dans les écoles du nord et en italien dans celles du sud du pays.

Dans l'administration, l'emploi de ces deux langues posait de nombreux problèmes. Ainsi, deux personnes travaillant dans un même bureau pouvaient communiquer oralement, mais ne pouvaient se com­prendre par écrit. Cela entraînait aussi un double travail, puisqu'à chaque poste il fallait préposer deux personnes pour pou­voir répondre dans l'une ou l'autre langue, selon les correspon­dants. Pour remédier à cette situation, le gouvernement essaya d'imposer le bilinguisme à tous les employés de l'administration; il essaya aussi de recourir ä des traducteurs et à des interprètes. Mais toutes ces tentatives échouèrent, et le problème restait entier.

Le système d'enseignement se heurtait à des difficultés du même ordre : outre les discordances structurelles et pédagogiques fondamentales entre les deux systèmes, l'enseignement se faisait dans deux langues différentes. Dans ces conditions, il était impos­sible de muter un enseignant d'une région à l'autre; d'autres fonc­tionnaires refusaient aussi leur mutation, parce qu'ailleurs ils n'auraient pas trouvé d'école pour leurs enfants; il n'y avait pas de programmes communs et encore moins de manuels scolaires communs. Dans ce domaine, l'unification était donc restée lettre morte.

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En 1962, pour tenter de fondre les deux systèmes en un seul, on choisit l'arabe comme véhicule de l'enseignement dans les écoles primaires, et l'anglais aux niveaux moyen et secondaire. On procé­da également à la modification et à l'unification des structures. Comme plus de la moitié du corps enseignant était de langue italienne, le recyclage d'un si grand nombre d'enseignants était difficile. On leur fit suivre des cours d'anglais brefs et inten­sifs. Cela ne résolut pas le problème non plus, car la moitié de la population ne savait pas l'anglais.

Certes, on ne perdait pas de vue la nécessité de trouver un système d'écriture pour la langue Somalie. Nombreux étaient même les partisans de cette innovation, et intenses les recherches en vue du choix d'une écriture convenable. Des chercheurs indépendants avaient déjà proposé trois systèmes d'écriture différents. Mais quel que fut le type envisagé, c'est sur l'orthographe qu'on n'arri­vait pas à se mettre d'accord. Le Parlement lui-même était partagé sur cette question et ne savait quelle écriture choisir, craignant de provoquer une crise politique. Avant la révolution, aucun gouver­nement n'aurait pris le risque de trancher ce grave problème natio­nal, si bien que le somali était demeuré une langue non écrite et que le problème linguistique continuait à entraver le fonctionnement des appareils administratifs et éducatifs.

Adoption d'un système d'écriture pour la tangue Somalie

La révolution du 21 octobre 1969 a mis fin à la dispute sur le choix d'un système d'écriture. Dans sa première charte, le nouveau régi­me promettait de prendre les mesures nécessaires pour faire du somali une langue écrite. Cela montre qu'il avait tout de suite com­pris le rôle important que pouvait jouer le somali écrit dans le processus du développement national. Quatorze mois plus tard, en janvier 1971, fut créée une Commission de la langue nationale, com­posée de linguistes, d'enseignants, de poètes, etc., parmi lesquels un petit nombre seulement avait fait des recherches relatives à la langue Somalie, ces dernières s'étant d'ailleurs bornées à la littérature (recueils de poèmes, de nouvelles, etc.)- La Commission avait pour objectif primordial de rédiger : a) des manuels scolai­res pour l'enseignement primaire; b) des manuels de grammaire Somalie; c) un dictionnaire du somali fondamental.

Comme le choix d'un alphabet allait forcément revêtir une si­gnification politique, le gouvernement, ayant engagé la Commission à se servir de celui qui lui plairait, se réserva le droit de

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prendre la decision finale. Au bout de six mois, la Commission s'était acquittée de sa mission : elle avait rédigé plusieurs ou­vrages destinés aux écoles primaires, une grammaire et un diction­naire d'environ 5 000 mots.

Le 21 octobre 1972, jour du troisième anniversaire de la Révo­lution d'octobre, le Président du Conseil suprême de la Révolution annonça que désormais le somali s'écrirait en caractères latins modifiés. Et ainsi la question si longtemps débattue du choix d'une écriture pour la langue Somalie se trouvait réglée une fois pour toutes.

Encore fallait-il, en toute logique, procurer à l'écriture choisie un terrain solide où elle put s'implanter pour de bon et d'où elle pût se propager dans l'ensemble de la société, conformé­ment à la politique officielle qui cherchait à instaurer un dialo­gue aussi profond que possible entre les masses et les diverses institutions de l'Etat. A cet égard, c'était le système scolaire et l'appareil administratif qui offraient le terrain naturellement le plus favorable.

Dès que l'alphabet latin eut été adopté, il fut décidé d'en­seigner la nouvelle écriture à tous les fonctionnaires dans les trois mois suivants, puis de leur faire passer un examen écrit. Celui-ci eut lieu le 21 janvier 1973 et, à dater de ce jour, le somali écrit devint la langue officielle de l'administration. En même temps, il devenait le véhicule de l'enseignement primaire. Le gouvernement révolutionnaire prit des mesures pour empêcher l'action de tous les facteurs de nature à retarder l'application de la réfor­me. La nouvelle langue écrite devait se substituer à toutes les langues étrangères dans toutes les correspondances et archives of­ficielles. Personne n'avait le droit de recevoir ni d'envoyer de lettre ni de document qui ne fut écrit en somali.

Les conséquences de cette adoption immédiate du somali ont été positives. Fonctionnaires et enseignants, désormais obligés de ré­diger ou d'enseigner en somali, se mirent à faire preuve d'ingénio­sité pour se forger une langue de travail. Les premiers, après avoir constaté que l'imitation des modèles étrangers pour la rédaction des textes administratifs ne répondait pas à leurs besoins, durent élaborer leurs propres formules. Ainsi se constitua un language ad­ministratif somali, qui n'a pas encore fini de se développer. C'est l'Institut somali du développement, de l'administration et de la gestion qui supervise ce travail de mise au point d'un nouveau lan­guage administratif. On lui doit déjà plusieurs manuels sur la fa­çon de rédiger lettres et rapports et de sténographier en somali, ainsi qu'un lexique somali-anglais-italien.

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De son côté, le Centre d'élaboration des programmes d'ensei­gnement, relevant du Ministère de l'éducation, a rédigé en toute hâte un manuel de terminologie concernant toutes les matières susceptibles de traduction enseignées dans les écoles primaires. On est en train d'accomplir le même travail pour les niveaux moyen et secondaire.

Conscient des succès remportés grâce aux moyens radicaux mis en oeuvre afin d'imposer le somali comme langue écrite, le prési­dent Siyaad a déclaré : "Certains croyaient que, pendant quelque temps, l'anglais et l'italien seraient utilisés concurremment avec le somali. Mais sous la pression de notre politique pragmatique vi­sant à éliminer de la pratique officielle toute correspondance en langue étrangère, tout le monde s'est vu obligé d'employer le somali écrit. Les résultats ne se sont pas fait attendre. En con­tinuant à employer les langues étrangères, nombre de pays d'Afrique se sont mis dans l'impossibilité d'utiliser pleinement leurs pro­pres langues."

La Campagne d'alphabétisation urbaine

Encouragé par les progrès de la somalisation du véhicule de l'ins­truction et du language administratif, le gouvernement révolution­naire a inauguré, le 8 mars 1973, une Campagne nationale d'alphabé­tisation. La même stratégie radicale a été appliquée. Tous les Somalis instruits, ont été promus enseignants et tous les analphabè­tes sont devenus étudiants. La devise était : "Si tu sais, ensei­gnes! Si tu ne sais pas, apprends !". Il était prévu que la Campa­gne s'étendrait sur deux années, la première dans les zones urbai­nes, la seconde dans les zones rurales.

Sitôt après l'annonce de la Campagne, un Comité national d'al­phabétisation fut créé. Composé des trois vice-présidents et des trois secrétaires d'Etat, il avait pour mission de définir la stra­tégie générale de la Campagne. On avait également constitué un Co­mité national d'exécution, présidé par le Secrétaire d'Etat à l'édu­cation et chargé.de coordonner la Campagne au niveau national. Des comités analogues furent mis en place dans les districts. Comités de district et comités locaux devaient, en utilisant les divisions politico-administratives des villes, trouver le personnel et les locaux nécessaires au déroulement de la Campagne. A Mogadishu par exemple, ce furent les 14 centres d'orientation politique et leurs filiales qui, sous l'autorité du gouvernement central, eurent pour mission de rassembler toutes les ressources humaines et matérielles

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nécessaires à l'opération. Celle-ci est ainsi devenue "l'oeuvre de tous".

A la fin de l'année, le ministre de l'éducation a estimé que la Campagne avait permis d'alphabétiser 400 000 personnes. Il faut cependant préciser que ce chiffre, tiré de statistiques sérieuses, n'est pas à nos yeux le seul mérite de cette campagne, car l'alpha­bétisation des adultes n'est pas une oeuvre purement technique. C'est un processus culturel qui doit aider les hommes à mieux se comprendre les uns les autres et à s'orienter correctement dans le monde ou ils vivent. Il n'en est pas moins rassurant de pouvoir compter 400 000 personnes alphabétisées de plus, au moins capables de lire un quotidien et de se faire ainsi une idée de ce que fait le gouvernement et de ce qui se passe dans le pays.

Les succès remportés par la Campagne d'alphabétisation urbaine ont suscité de nouvelles idées et un regain d'élan créateur. On s'en est bien rendu compte lors de la seconde phase de la Campagne, qui visait à la modernisation générale du secteur rural.

La Campagne de développement rural

Lancée le 1er août 1974, la Campagne de développement rural était le prolongement de la Campagne nationale d'alphabétisation mise sur pied par le gouvernement révolutionnaire. Outre sa tâche ini­tiale d'extirper l'analphabétisme, elle s'était assigné celles ce promouvoir l'hygiène tant pour la population humaine que pour le cheptel, et de procéder à un recensement des deux.

Un comité technique fut préalablement constitué. Il était char­gé d'élaborer des stratégies et de donner son avis sur les métho­des à employer pour mener la Campagne à bien. Tâche difficile, étant donné que : a) sur une population totale de 5 millions d'ha­bitants, plus de 70 % sont des nomades dispersés sur une surface de 650 000 km2, et qu'en zone rurale les moyens de transport sont très rudimentaires; b) qu'il était difficile de recruter un nombre suf­fisant d'enseignants pour toute cette population; c) que la mise en oeuvre de la Campagne exigeait un énorme appareil administratif; d) qu'il fallait trouver les moyens financiers et matériels néces­saires.

Après avoir longuement délibéré sur ces problèmes, le Comité proposa de mener la Campagne à bien en une année, comme il en avait été convenu à l'origine. Il en vint aussi à la conclusion que la seule façon de trouver les 20 000 enseignants nécessaires était de faire appel aux élèves des écoles moyennes et des établissements

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secondaires et à leurs professeurs. Cette proposition entraîna par la suite la décision historique de fermer toutes les écoles du pays pour une année. Et alors la Campagne s'ouvrit sur cette déclaration du président Siyaad : "Conformément à la promesse faite l'an der­nier, nous allons lancer une campagne massive d'alphabétisation... Aujourd'hui, comme par le passé, c'est sur nous-mêmes que nous.de­vons compter, en mettant en pratique notre principe d'Iskaa-Wax-u~ qasbo (se tirer d'affaire soi-même). Le moindre recoin nous servira d'école; nous ferons classe à l'ombre des arbres, devant les tentes des nomades et autour des puits".

Au-delà de ses objectifs immédiats, cette Campagne promet d'autres retombées : la consolidation de l'unité nationale, une fois renversée la barrière entre les étudiants/enseignants et les noma­des; une meilleure prise de conscience des problèmes qui se posent aux masses rurales et de la nécessité de les résoudre. Au début de la Campagne, il y avait 1 257 779 élèves inscrits, mais il n'en restait plus que 912 797 le jour de l'examen final, auquel 785 093 ont réussi.

Maintenant la Campagne est terminée, les buts assignés ayant été atteints. Afin de poursuivre l'oeuvre ainsi entreprise, le gou­vernement a l'intention d'implanter dix centres dans des villages de nomades, des marchés et autres lieux fréquentés par eux. Ce se­ront des institutions pilotes qui, si les résultats sont satisfai­sants, serviront de base à un véritable système scolaire destiné aux nomades. De plus, divers comités viennent d'être nommés avec, pour mission, de lancer un programme complémentaire. Il s'agira d'un vaste programme auquel presque tous les organes du gouverne­ment sont appelés à participer. Certaines activités battent déjà leur plein.

Jusqu'à présent, nous n'avons parlé que des succès et des avan­tages de la Campagne, mais n'oublions pas qu'une si vaste entrepri­se pose des problèmes et n'est pas exempte d'imperfections, que l'on peut résumer comme suit :

1. Une enquête effectuée par l'Institut somali du développement, de l'administration et de la gestion a révêlé que 41 % des en­seignants avaient entre 15 et 19 ans, 44 % entre 20 et 29 ans, et 14 % seulement 30 ans ou plus. Cette moyenne d'âge si peu élevée a été la source de difficultés pendant la dernière phase de la Campagne, parce que les jeunes enseignants n'étaient pas préparés aux difficiles conditions de vie qui les attendaient dans les zones rurales. Aussi certains d'entre eux

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ont-ils fait défection, s'en retournant en ville auprès de leurs parents.

2. Les locaux et le matériel nécessaires à l'enseignement n'étaient disponibles ni de manière, ni en quantité adéquates, ce qui obligeait ä utiliser toutes les salles de classe et tous les endroits possibles; or la plupart de ces derniers n'étaient pas appropriés à l'enseignement.

3. Le manque de manuels scolaires ou le caractère inadéquat de ceux qui étaient utilisés dans les classes a posé un grave pro­blème; l'ouvrage qui devait servir de premier livre de lecture s'est révélé bien trop difficile pour des débutants.

4. Autre problème : le nombre insuffisant d'inspecteurs ou d'en­seignants qualifiés.

5. • Le manque de documentation adéquate s'est fait sentir; les ren­seignements recueillis étaient insuffisants et parfois contra­dictoires.

La rédaction des manuels

Au cours de la même année, parallèlement à la Campagne d'alphabé­tisation, s'en déroulait une autre : celle de la rédaction des ma­nuels. La douzaine de fonctionnaires du Centre d'élaboration des programmes d'enseignement et plus de 250 enseignants du second de­gré avaient reçu pour mission de rédiger 150 ouvrages de tous les niveaux, dans toutes les disciplines requises (économie domestique, manuels pour adultes, livres du maître, etc.). La rédaction et l'im­pression de ces ouvrages devaient prendre une année, celle pendant laquelle les écoles étaient fermées.

Comme l'Etat, déjà engagé dans la Campagne de développement rural, n'était pas en mesure de financer un programme aussi énorme, l'Unicef a offert de payer une partie des honoraires des auteurs (3 000 shillings somalis par ouvrage) plus les fournitures nécessai­res et une indemnité journalière de 5 shillings par personne. L'Etat prenait à sa charge, à raison de 7 shillings la pièce, les frais d'impression de 8 millions d'exemplaires, étalés sur quatre ans. Actuellement, tous ces ouvrages sont rédigés et un tiers d'entre eux environ déjà imprimés, tandis que les autres en sont à divers stades du processus d'impression.

Cette Campagne s'est elle aussi heurtée à divers obstacles : d'abord, et préalablement à toute autre chose, il a fallu que cha­que comité se mette d'accord sur une terminologie. Ensuite, il a fallu confronter chacune des terminologies ainsi élaborées avec

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celles des autres comités, qui pouvaient avoir utilisé les mêmes termes. L'accomplissement de cette tâche a demandé beaucoup de pei­ne et de temps, car le somali, langue de nomades essentiellement, ne possédait pas de termes pour désigner les concepts scientifiques, de sorte que dans ce domaine il a fallu partir de zéro. De même, il a fallu récrire et traduire tous les programmes d'études. Mainte­nant que les manuels sont composés, le Centre d'élaboration des programmes d'enseignement se prépare à procéder au recyclage des en­seignants. Il a déjà fait parvenir les terminologies convenues aux centres de formation pédagogique, mais il se.peut que le processus de recyclage ne démarre pas avant le milieu de l'année 1976.

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VIII. Télé-enseignement et éducation de masse au Kenya

On trouvera ici une description de l'usage .qui est fait du télé-enseignement, en particulier dans les pays en développement. L'exem­ple choisi est celui du Kenya. Il illustre certaines applications, tant actuelles que possibles, de la technologie éducative moderne à la solution de certains problèmes urgents qui se posent dans le domaine de l'éducation.

Les problèmes d'éducation dans les pays en développement

Les problèmes majeurs qu'ont à résoudre les pays en développement dans le domaine de l'enseignement sont bien connus : taux élevé de l'analphabétisme chez les adultes, augmentation des effectifs sco­laires résultant de la demande croissante d'éducation, augmentation du nombre des jeunes qui, au sortir de l'école, ne peuvent pas s'in­sérer dans le système économique, pénurie d'enseignants et de moni­teurs qualifiés, etc. L'une des tâches les plus urgentes de ce pays est de développer les moyens d'instruction et de formation des jeunes et des adultes. Mais une chose est certaine : c'est que les ressources financières et humaines disponibles ne permettent pas d'envisager une telle expansion par les méthodes traditionnelles (construction d'écoles et de salles de classe ou formation d'ensei­gnants appliquant les méthodes pédagogiques classiques). Pour at­teindre un public beaucoup plus large avec ces ressources, il faut recourir à des méthodes nouvelles et à des techniques modernes. Il faudra perfectionner et recycler les enseignants, ainsi que d'autres travailleurs, sans lès arracher à leur lieu de travail de manière prolongée. Il faudra tirer un meilleur parti des locaux et équipe­ments disponibles et assurer un partage plus équitable des installa­tions, des compétences et des matériaux, si l'on veut maintenir le coût de l'éducation à un niveau ä peu près stable par rapport aux autres dépenses qu'exige le développement national. Il semble que le télé-eñseignement, grâce aux mass media, soit l'un des moyens de résoudre ces problèmes et de répondre aux besoins de l'éducation.

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Les outils du tété-enseignement

Les mass media (journaux, brochures, revues, livres, radio, télévi­sion, cinéma, cours par correspondance, etc.) peuvent, par défini­tion, transmettre les idées et l'information détenues par quelques-uns (les enseignants) à la multitude (les élèves), et ce sur de grandes distances. L'information ainsi transmise peut être facile­ment mise à jour. Certains de ces outils de transmission (radio, télévision et cinéma) ont propriété de pouvoir franchir l'obstacle de l'analphabétisme : ils n'exigent donc aucune instruction, au sens classique du terme, pour être efficaces. De plus, par rapport au coût de revient de l'enseignement traditionnel en classe, néces­sitant des locaux et du personnel, celui des mass media est peu éle­vé. Grâce à eux, par exemple, l'action d'un bon enseignant ou d'une équipe de bons enseignants peut être multipliée à l'infini. Et puis, ces media ont l'avantage d'être souples, permettant aux usagers d'étudier aux heures qui leur conviennent, à leur domicile ou sur le lieu de travail.

Néanmoins, en soi, ils ne suffisent pas à assurer la bonne qua­lité d'un enseignement. Dans presque tous les cas, la communication se fait à sens unique et le décalage spatiotemporel coupe les ensei­gnants de leur public. Les émissions ont tendance à être imperson­nelles et ne permettent en aucune façon aux enseignants de répondre spontanément aux besoins et aux problèmes particuliers de leurs élè­ves. Ce serait donc, semble-t-il, en complétant par un enseignement face à face différents mass media, souvent incapables de satis­faire le besoin de communication et la sensibilité des individus, qu'on pourrait obtenir les meilleurs résultats.

L'enseignement par correspondance, forme de mass media permet­tant la communication réciproque, est à la portée de la plupart des pays en développement; mais employé seul avec des élèves isolés, il se révèle souvent moins efficace que renforcé, par exemple, d'émissions radiophoniques et d'occasionnelles leçons face à face. On lui a récemment ouvert un champ d'application plus large dans nombre de pays qui s'efforcent d'amalgamer diverses méthodes d'en­seignement et d'apprentissage. Cette approche multimedia est deve­nue possible du fait du développement des moyens de communication de masse d'une part et des fondements méthodologiques du télé-ensei­gnement d'autre part. Le concept de "technologie éducative" ne se limite pas à telle machine, tel medium ou tel procédé. Il désigne une manière systématique de concevoir, d'exécuter et d'évaluer l'ensemble du processus d'apprentissage et d'enseignement en vue

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d'objectifs éducatifs particuliers. Il implique l'emploi combiné de moyens humains et matériels permettant un enseignement plus effica­ce. Tout système tirant parti de ces propriétés caractéristiques des mass media et de la technologie éducative relève de ce qu'on appelle, en général, le "télé-enseignement".

Nombre de pays utilisent des systèmes de télé-enseignement pour tenter de résoudre les problèmes éducatifs qui leur sont pro­pres. L'Université ouverte (Open University), en Grande-Bretagne, en est peut-être l'exemple le plus connu; mais le télé-enseignement, tant dans les pays développés que dans les pays en développement, peut revêtir maintes formes adaptées aux conditions particulières de chacun.

L'exemple du Kenya

En 1968, le gouvernement du Kenya a créé un Service de cours par correspondance (CCU) au sein de l'Institut de l'éducation des adul­tes de l'Université de Nairobi. La priorité a été accordée aux cours destinés aux adultes, notamment aux instituteurs ayant besoin de se perfectionner. Le premier groupe inscrit à ces cours était com­posé d'instituteurs de l'échelon le plus bas (P3), selon la nomen­clature en vigueur. Normalement l'enseignant P3 doit avoir suivi sept (parfois huit) années d'enseignement primaire et deux années d'école normale. Pour être promu à l'échelon suivant (P2), il doit passer un examen national, le Kenya junior secondary examination (KJSE) qui sanctionne deux années d'études secondaires. C'est pour préparer ces enseignants, ainsi que d'autres adultes ayant terminé leurs études primaires, qu'ont été créés les premiers cours par cor­respondance du CCU. Outre les enseignants, qui représentaient quel­que 90 % du total des élèves, il y avait parmi ces derniers des adultes exerçant diverses professions (employés de bureau, agricul­teurs, ménagères, militaires, policiers, employés de coopératives) et vivant dans diverses régions du pays.

Au début, les cours, dont le niveau correspondait à celui des deux premières années de l'enseignement secondaire, portaient sur les matières suivantes : anglais, swahili, histoire, géographie, mathématiques modernes, biologie et physique. A ce jour, 3 000 élè­ves se sont inscrits, prenant chacun, en moyenne, quatre matières.

En 1969, le CCU a lancé, parallèlement aux cours de préparation au KJSE, un deuxième programme visant au perfectionnement pédagogi­que des enseignants non qualifiés. Il comprenait des cours par cor­respondance, des émissions de radio et des stages de courte durée

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pendant les périodes de vacances. Jusqu'à présent, plus de 10 000 enseignants non qualifiés ont suivi avec succès ces cours de per­fectionnement, à l'issue desquels on leur a décerne le Certificat d'aptitude à l'enseignement primaire.

Le travail du CCU consiste à choisir la matière des cours par correspondance (et des divers auxiliaires pédagogiques), à l'orga­niser de façon systématique et à la mettre en forme, puis a. vérifier et à évaluer l'acquis des élèves. Le programme proposé par le CCU est une combinaison des quatre séries d'éléments suivants : guides des études par correspondance, manuels, auxiliaires pédagogiques et petits nécessaires d'expérimentation; émissions radiophoniques d'appoint, correspondant à la matière d'une ou de plusieurs leçons du guide; correction et notation des devoirs par des enseignants qualifiés du secondaire et du supérieur; enseignement face à face à l'occasion de stages de courte durée.

L'efficacité du processus didactique est assurée par un méca­nisme qui établit et maintient le contact entre l'élève, l'ensei­gnant et le service, dans le cadre de tout un système de recrute­ment, d'inscriptions, de distribution du matériel éducatif, de trai­tement des leçons et de correction des devoirs. Le service possède ses propres installations d'imprimerie, photocopie et reliure, com­porte des sections chargées des inscriptions-, des envois, des dos­siers et de la comptabilité, et est doté d'un studio autonome d'en­registrement et de production radiophoniques, ainsi que d'un petit laboratoire d'essais.

Le personnel enseignant du CCU comprend 12 personnes employées à plein temps. Engagées dans les mêmes conditions que les universi­taires, elles sont assistées d'une équipe de dactylographes, secré­taires, imprimeurs, préposés au courrier et aux dossiers et compta­bles, soit en tout une trentaine de personnes. D'autre part, le CCU recourt aux services d'une cinquantaine d'enseignants extérieurs qui travaillent pour lui à temps partiel comme correcteurs et ré­dacteurs de cours. Ses bureaux et autres installations occupent un millier de mètres carrés. Actuellement, il est en mesure.de suivre quelque 10 000 élèves par an, la seule augmentation importante étant celle du nombre des enseignants à temps partiel.

Le CCU s'est aperçu qu'en plus de ses élèves inscrits, d'autres personnes font usage de ses programmes éducatifs. Il n'est pas faci­le d'évaluer le nombre d'enseignants et d'adultes qui, sans être inscrits au CCU, se servent de ses guides et de ses manuels pour leurs études personnelles. Il est cependant permis de supposer que cette utilisation secondaire est considérable et a des retombées

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sociales bénéfiques. De même, les émissions radiophoniques ont cap­té l'intérêt de très nombreux auditeurs en dehors des élèves ins­crits. Une enquête effectuée par la Voix du Kenya en 1969 avait ré­vélé qu'il y avait environ un demi-million d'auditeurs adultes qui écoutaient régulièrement les émissions du CCU.

Le personnel du CCU a procédé à des évaluations et à des re­cherches qui ont révélé quelques faits intéressants au sujet de ses élèves par correspondance et de l'efficacité de ses programmes. On a pris un certain nombre de mesures pour améliorer le fonctionne­ment du CCU, en réponse aux observations, critiques et suggestions des élèves.

Les résultats obtenus par ceux-ci aux examens ont fait l'objet d'un certain nombre d'analyses, d'où il ressort que les candidats préparés par le CCU ont obtenu aux épreuves communes des résultats aussi bons que ceux qui avaient fréquenté l'école, et meilleurs que ceux qui avaient étudié tous seuls. Parmi les élèves du CCU, le taux d'abandon se situe entre 15 et 25 %. Il est bien certain que la plupart d'entre eux sont puissamment motivés par la perspective d'avantages immédiats (promotion dans l'emploi et augmentation de salaire). Nombre d'entre eux ont compris, devant la concurrence accrue qui caractérise le marché du travail, qu'ils avaient intérêt à se perfectionner le plus vite possible dans leur spécialité.

Le CCU a pu se rendre compte, au cours de ses quelques années d'existence, des avantages que présente l'emploi des techniques de télé-enseignement, et aussi de ses inconvénients. Leur premier avantage, ainsi que leur nom même l'indique, c'est qu'elles permet­tent de franchir de grandes distances, et ainsi d'atteindre des po­pulations très dispersées.. Elle sont donc un moyen de faire parve­nir le savoir à ceux qui, pour des raisons géographiques, n'ont pas accès aux écoles ou universités normales. Leur deuxième avantage est leur souplesse : les personnes qui occupent déjà un emploi peu­vent s'adonner à l'étude aux moments qui leur conviennent, chez eux ou sur leur lieu de travail. Le télé-enseignement offre donc un recours à ceux qui ont besoin d'améliorer leurs connaissances et leur aptitudes professionnelles, mais que leurs obligations fami­liales ou professionnelles empêchent d'étudier à plein temps. Les enseignants et les fonctionnaires des services de vulgarisation sont les représentants les plus typiques de cette catégorie. Le télé­enseignement semble être pour eux le seul moyen commode d'améliorer leurs connaissances et leurs aptitudes, et ainsi de s'élever.

La souplesse du télé-enseignement se manifeste encore à un autre niveau. En effet, une fois le système mis en place, avec tout

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son réseau opérationnel, il est relativement aisé de modifier le contenu des cours en fonction des besoins. C'est ainsi que le CCU, qui au début offrait des cours du premier cycle du second degré, a progressivement ouvert son éventail pour englober les niveaux su­périeurs et aussi la formation professionnelle adaptée aux besoins du pays. Le nombre des étudiants s'est, lui aussi, considérablement accru, sans qu'il ait pour autant fallu augmenter les effectifs du personnel employé à plein temps, ni les investissements en locaux et équipements. On touche ici à un troisième avantage du télé-en­seignement qui, à long terme, se révèle économique et dont le rap­port coût/efficacité est excellent. Le CCU a pu remarquer qu'à me­sure que la multiplication des programmes faisait augmenter le nom­bre des inscriptions, le coût unitaire diminuait progressivement. Le télé-enseignement permet donc de réaliser des économies d'échel­le, de tirer tout le parti possible des équipements et des services fournis par d'autres établissements, ainsi que du temps et de la compétence d'éducateurs et de formateurs qui sont en nombre à peine suffisant. Quant aux enseignants qui se soumettent à ce type de for­mation, ils continuent à toucher leur salaire et, loin de tomber à la charge de l'économie nationale, y contribuent. D'autre part, ils peuvent mettre aussitôt en pratique certaines connaissances qu'ils viennent d'acquérir, les classes dont ils ont la charge cons­tituant pour eux un banc d'essai immédiat et permanent.

Le télé-enseignement présente néanmoins certains inconvénients. Il est plus difficile d'instruire un élève à distance que face à face. La préparation et la production des leçons exigent beaucoup de travail de la part des enseignants et des administrateurs. L'iso­lement physique risque de décourager l'élève. Il lui manque l'aide • et l'encouragement immédiats du maître ainsi que le caractère struc­turé des classes données à intervalles réguliers (quotidiens ou heb­domadaires) qui est commun à presque tous les types d'enseignement scolaire. Les bibliothèques et autres instruments d'études disponi­bles se sont révélés insuffisants. On a pourtant réussi dans une certaine mesure à atténuer toutes ces carences en combinant diver­ses techniques de télé-enseignement et en donnant aux élèves la possibilité d'entrer en contact personnel, à intervalles réguliers, avec leurs maîtres.

C'est sans doute pour enseigner à distance les matières scien­tifiques que le CCU a dû faire le plus grand effort d'imagination. Outre le matériel pédagogique et les programmes radiophoniques déjà mentionnés, il a conçu un nécessaire d'expérimentation simple, à utiliser dans le cadre des cours de sciences. L'ensemble contient

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les accessoires et produits chimiques de base, accompagnés d'indi­cations précises qui permettent à l'élève de les utiliser, en plus de ce qu'il peut trouver sur place, pour se livrer à quelques expé­riences fondamentales, utiles à la compréhension de certains con­cepts scientifiques. L'enseignement de la biologie est plus facile et moins onéreux, parce que l'élève peut lui-même se procurer un grand nombre des spécimens nécessaires, tels que fleurs, feuilles, insectes et denrées. Pour mesurer ses progrès, on lui pose une fois sur deux, en fin de leçon, une série de questions qui ont pour but de vérifier non seulement s'il a bien compris de quoi il s'agissait, mais aussi s'il est capable de mettre ses connaissances en prati­que. Certains de ces travaux pratiques ne sont possibles qu'à l'ai­de d'un équipement assez complexe; c'est le cas des cultures de bac­téries, qui ne peuvent se faire que dans un four à thermostat. C'est pourquoi le CCU organise à l'intention de ses élèves des stages de courte durée au cours desquels ils ont l'occasion soit de procéder eux-mêmes à des expériences, soit d'observer celles que des maîtres réalisent devant eux. Le CCU espère étendre ses activités à d'autres domaines où les disciplines scolaires ne font pas forcément l'objet d'un enseignement spécifique : il s'agirait alors d'essayer d'éclai­rer les masses rurales en matière de nutrition, de puériculture, de santé et d'hygiène. Le CCU a prévu l'entrée en service d'un labo­ratoire mobile aménagé dans un petit véhicule et contenant produits chimiques, appareils, films, diapositives, bandes magnétiques et au­tres accessoires scientifiques. Ces efforts feront comprendre -c'est du moins ce qu'on espère - que le meilleur laboratoire est peut-être celui qu'offre notre propre milieu, et non point l'espa­ce compris entre quatre murs et coupé par eux du quotidien et de la réalité.

Autres exemples africains

Les établissements patronnés par l'Etat qui utilisent le télé-ensei­gnement - que ce soit par correspondance ou par d'autres moyens -ont connu un essor rapide, au cours de la dernière décennie, dans d'autres régions d'Afrique. Il en existe aujourd'hui plus de 40 en Afrique, mais on n'en citera ici que quelques exemples.

Depuis 1971, l'International Extension College, de Cambridge, fait l'essai de diverses techniques de télé-enseignement dans un certain nombre de pays d'Afrique, de celles, notamment, qui combi­nent les cours par correspondance, les émissions radiophoniques et l'enseignement direct. Il a contribué à la fondation des trois éta­blissements suivants :

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le "College of the Air" de l'île Maurice, qui pratique l'ensei­gnement par correspondance, radiophonique, télévisé et direct, dans le cadre scolaire et non scolaire; I '"Extension College" du Botswana^ qui utilise les mêmes métho­des que le précédent, sauf la télévision, pour dispenser un enseignement destiné aux écoles et aux populations rurales; le "Distance Teaching Centre" du Lesotho, qui utilise les cours par correspondance, la radio et l'enseignement direct, à l'in­tention des écoliers et des adultes.

D'autres pays d'Afrique ont créé leurs propres établissements d'en­seignement, de formation et de perfectionnement : ces établissements assurent le développement des compétences professionnelles de base et dispensent un enseignement de type scolaire à plusieurs niveaux, à l'intention d'un public divers. Citons à titre d'exemples : les cours de niveau universitaire de l'Université de la Zambie, de l'Université de Lagos et du Centre d'enseignement supérieur de Brazzaville; les cours de niveau secondaire du Malawi, de l'Ouganda, etc.; les cours de perfectionnement pédagogique dispensés au Kenya et (depuis peu) au Nigeria; le Gabon et le Mali ont leur Institut pédagogique national, l'Algérie, son Centre national d'enseignement généralisé, etc. En ce qui concerne l'enseignement rural et la mo­dernisation des campagnes, les exemples ne manquent pas non plus : l'INADES, en Côte d'Ivoire, qui compte à présent des annexes ou relais en Ethiopie, au Burundi, au Cameroun, au Zaïre et au Togo; le "Cooperative Education Centre" de Moshi et le "National Corre­spondence Institute" de Dar es-Salam en Tanzanie; les "Rural Forums" du Ghana, les "Radio-Clubs" du Niger, "Films et Radio" au Rwanda, etc.

En 1973, la création de l'Association africaine pour l'ensei­gnement par correspondance, composée d'établissements à but non lu­cratif, a été un événement important. Entre autres buts principaux, l'Association se propose de répandre toute information relative à l'enseignement par correspondance au sens le plus large, et d'encou­rager son emploi et son perfectionnement dans toutes les branches de l'éducation en Afrique; de stimuler les échanges de renseigne­ments, d'expériences et de matériels pédagogiques entre ses membres; d'encourager la recherche sur l'utilisation et l'efficacité de l'en­seignement par correspondance et d'autres méthodes d'instruction; enfin, d'aider à la formation du personnel nécessaire. Parmi ses adhérents à part entière, l'Association compte nombre d'établisse­ments des pays anglophones, francophones et arabophones d'Afrique; à ceux des autres pays, elle offre la possibilité de s'affilier.

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Conclusion

L'une des caractéristiques communes à la plupart des systèmes de télé-enseignement, c'est de s'adresser surtout aux adultes. Souvent jeunes, ces derniers ont suivi l'enseignement scolaire normal, qu'ils ont ou non terminé. Le télé-enseignement sert aussi au per­fectionnement professionnel sur les lieux mêmes de l'emploi. On dé­bouche ainsi sur le concept d'éducation permanentes fondé sur le fait que dans le domaine de l'éducation on ne peut tirer un profit maximal des investissements humains et financiers qu'en intégrant les divers degrés de l'enseignement et en faisant parvenir celui-ci jusqu'aux intéressés - d'où le "télé-enseignement". Un usage; accru des moyens de communication et de la technologie modernes s'impose si l'on veut répandre l'instruction parmi un nombre toujours plus grand de personnes et suppléer aux installations existantes qui se sont révélées inadéquates. Car, en fin de compte, les méthodes tra­ditionnelles n'ont même pas permis d'éduquer la moitié de la popula­tion mondiale.

Pour conclure, il convient de formuler ici deux mises en garde. Premièrement, on a eu trop tendance par le passé, pour résoudre les problèmes éducatifs de certains pays en développement, à préférer les media les plus prestigieux et les plus coûteux. Or l'expérience prouve désormais que le choix du medium compte moins que la manière de s'en servir et que la substance transmise. Deuxièmement, les techniques de télé-enseignement ne sauraient résoudre à elles seules les problèmes éducatifs d'un pays. Mais, si on leur en donne la pos­sibilité, elles peuvent être un instrument efficace de plus au ser­vice du développement.

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IX. Echanges d'information sur l'éducation de base en Afrique orientale: mise en place d'un réseau de coopération sous-régionale

Le long des côtes de l'Afrique orientale, de même que sur ses grands lacs, les pêcheurs, lorsqu'ils s'aventurent loin du rivage, s'in­terpellent la nuit, par-dessus l'immensité des eaux. Ils tissent entre eux comme un réseau de cris aigus qui relient leurs fragiles canots à balancier les uns aux autres et aussi aux lointains vil-labes de pêcheurs d'où ils sont partis.

Ces échanges vocaux ont pour effet de créer le sentiment ras­surant d'un effort collectif et d'une sécurité commune au milieu de vastes étendues d'eau solitaires et souvent périlleuses. Ils trans­mettent divers renseignements sur le poisson, les prises, le temps, la mer elle-même. Et ceux qui sont restés à terre peuvent, s'ils le désirent, suivre ainsi le travail des pêcheurs, ce qui leur don­ne le sentiment réconfortant d'y participer eux aussi.

Dans le domaine de l'éducation, les innovations, les recherches et les réformes ressemblent, par certains côtés, à la pêche nocturne en eaux profondes. Cela peut être un travail ardu; on hésite à s'y lancer tout seul; il arrive que les résultats soient décevants; les chances de réussite sont d'autant plus grandes que les équipes de novateurs font porter leurs efforts sur une zone plus vaste et s'en­tendent pour échanger leurs connaissances et leurs expériences. Les bénéfices tirés d'une planification concertée et d'un travail coopé­ratif organisé pour le bien général peuvent être considérables.

C'est en août 1974 que, pénétrés de cette vérité, les planifi­cateurs de l'enseignement d'Afrique orientale, ont formulé, entre autres, les recommandations suivantes :

a) "... de petits réseaux sous-régionaux de pays, dont les plans semblent s'orienter dans des directions analogues, devraient entreprendre des études sur l'éducation de base et la manière de la dispenser; ces études pourraient être réalisées au moyen d'échanges de correspondance et de données, de monographies, et de réunions régulières des planificateurs (avec l'aide de 1'Unesco/Unicef";

b) "... il faudrait mettre au point un mécanisme destiné à facili­ter les échanges d'informations sur les innovations en Afrique

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oriéntale; on pourrait notamment, avec l'aide de l'Unesco/ Unicef, rédiger un ouvrage qui ferait le bilan de ces innova­tions; on pourrait également organiser à intervalles réguliers, à l'initiative éventuelle de certains pays et avec l'aide de 1'Unesco/Unicef, des conférences sous-régionales réunissant non seulement des planificateurs et des administrateurs, mais aussi des exécutants de tous les niveaux et rendre possible un échange régulier d'informations et d'expériences sur l'éduca­tion de base au moyen d'un bulletin...".

Pour donner suite aux recommandations ci-dessus, et avec la convic­tion que la communication est depuis toujours l'une des conditions essentielles du développement humain, diverses mesures ont été prises en 1975, en vue d'implanter un réseau régional d'échanges.

Par communication, il ne faut pas entendre seulement le fait pour un agent "supérieur" de transmettre un message utile à des destinataires dont l'entendement ou la compétence se situeraient à un niveau inférieur. Globalement, la communication est un échange et sert a. stimuler et à inspirer; la communication à sens unique suppose un rapport de supérieur à inférieur, ce qui peut être cause de ressentiment et souvent de lassitude.

Il existe de nombreux moyens de communication, et la technolo­gie moderne nous en offre de nouveaux, dont la portée rétrécit notre planète. Toute une gamme de media sonores,visuels et audiovisuels s'offre à nous et nous pouvons y choisir l'instrument le plus ap­proprié à notre objectif, qu'il s'agisse de renforcer ou bien de remplacer le contact personnel immédiat par une communication média­tisée d'individu à individu, d'individu à collectivité ou de collec­tivité à individu. Mais le recours accru à la technologie entraîne la nécessité d'une gestion centralisée et institutionnalisée du ma­tériel requis; et c'est là ce qui manque encore au réseau de com­munications consacré ä l'éducation de base.

Cependant, en septembre 1975, avec l'accord du Conseil du Col­lège universitaire Kenyatta (Kenya), a été créé, au sein de la Fa­culté de pédagogie, un Centre d'information sur l'éducation de base (BERC) qui, en un premier temps, pourrait devenir une espèce de gare de triage régionale de l'information relative à l'éducation de base et qui pourrait proposer aux éducateurs de la région des cours de brève durée qu'ils suivraient tout en continuant à exercer. Le Centre publiera périodiquement un bulletin qui contiendra des arti­cles de fond sur l'éducation de base et des nouvelles en provenan­ce des divers pays d'Afrique orientale. Ce bulletin sera largement diffusé.

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Le succès du BERC et son développement ultérieur vont dépendre de la réaction qu'il suscitera chez ceux qui, dans les pays d'Afri­que orientale, s'intéressent à l'étude de l'éducation de base sous tous ses aspects. On étudiera la possibilité de l'utiliser comme centre d'entretien et de distribution de matériels audiovisuels. Qu'il remplisse ces deux fonctions ou une seule, il pourra être un important "point nodal" du réseau régional.

En 1976, le Collège universitaire kenyatta offrira, dans le cadre de son programme de licence, un cours facultatif sur l'éduca­tion de base, et le BERC organisera un séminaire inaugural sur le développement du jeune enfant, entièrement centré sur l'Afrique.

De même, comme suite aux recommandations du Séminaire sur l'éducation de base d'août 1974, trois pays/ de la région (Botswana, Swaziland et Tanzanie) ont invité des éducateurs à participer à des groupes de travail et à des séminaires consacrés à des sujets d'in­térêt commun.

En juin 1975, le Botswana a invité l'Ethiopie, le Kenya, le Malawi, la Somalie et la Tanzanie à participer à un séminaire sur le développement de l'enfant et la formation des maîtres. A l'Ecole normale d'Etat de Lobatsé, 21 journées ont été consacrées à des études portant sur la théorie et la pratique. L'un des participants, répondant à la question posée à la fin des travaux du séminaire : "Quels avantages peut-on retirer de ce type d'échanges entre pays ?", a écrit ceci :

"Quelle riche expérience pour nous de voir que d'autres éduca­teurs, dans les pays voisins du nôtre, essaient de résoudre les mêmes problèmes que nous! Il est évident que le fait d'en dis­cuter ensemble nous rapproche et nous permet de nous instruire au contact les uns des autres. Aujourd'hui, à l'époque du pana­fricanisme, il faut que l'éducation soit l'un des objectifs prioritaires de l'entente interafricaine."

Cette déclaration résume assez bien les sentiments exprimés par l'ensemble des participants.

Toujours en juin 1975, le gouvernement du Swaziland a accueilli un groupe de spécialistes des programmes scolaires venus du Botswana, de l'Ethiopie, du Lesotho et de la Tanzanie. Ils dési­raient tout spécialement prendre connaissance des travaux de la Section des programmes d'enseignement primaire du Swaziland, qui est en train de mettre au point un programme axé sur les "résultats". Ce séminaire a eu pour conséquence remarquable de susciter :

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l'intérêt, à l'échelle régionale, pour une technique pédagogique no­vatrice; un vif intérêt à l'échelon local; l'active participation d'éducateurs chevronnés de tous les niveaux, depuis le ministre et le secrétaire permanent jusqu'aux agents locaux. Un haut fonction­naire a estimé que ce séminaire était "l'un des événements les plus stimulants qu'ait connus notre région en ce qui concerne l'édu­cation".

En novembre et décembre 1975, des professeurs d'école normale d'Ethiopie,du Kenya, du Lesotho, d'Ouganda, du Malawi, de Somalie, du Swaziland et de Zambie se sont réunis en Tanzanie pour examiner les problèmes que pose la formation des instituteurs. Ils ont par­couru les zones rurales en étudiant les divers aspects du dévelop­pement rural intégré, de la décentralisation, et de l'intégration des services éducatifs dans les zones rurales. Après quoi ils se sont réunis à Dar es-Salam en un séminaire où un groupe d'éducateurs et d'observateurs tanzaniens représentant de nombreux organismes s'est joint à eux.

Il importe de noter que les trois conférences dont il a été rendu compte ci-dessus, ont été conçues, organisées et menées à bien par les gouvernements intéressés. Le rôle de 1'Unesco/Unicef a été d'y participer sur invitation et de fournir une aide finan­cière. Cette participation s'est traduite, notamment, par la présen­tation de documents émanant du Sous-directeur général pour l'éduca­tion de 1'Unesco, du Secrétariat et de membres du personnel hors Siège de 1'Unesco, ainsi que du bureau régional de l'Unicef. En outre, ce sont les agents régionaux et locaux de l'Unicef qui se sont occupés des aspects matériels du voyage et du séjour des parti­cipants .

Toujours en 1975, des fonctionnaires de divers niveaux se sont rendus d'un pays de la région à l'autre, afin d'échanger leurs vues et observations sur un large éventail de sujets se rapportant à l'éducation de base. L'Unicef avait pris à sa charge les frais de voyage, mais l'organisation au niveau local, les invitations, etc., incombaient aux gouvernements.

De hauts fonctionnaires du Swaziland sont allés étudier en Somalie et en Tanzanie les moyens d'utiliser les langues nationales comme véhicules de l'enseignement. Ces visites ont renforcé la con­viction formulée en ces termes au Séminaire sur l'éducation de base de Nairobi : "Tout le monde s'accorde à penser que, dans tous les cas où s'en présente la possibilité, il faut utiliser la langue na­tionale comme véhicule de l'éducation de base". D'autres personnali­tés se sont rendues en Zambie, au Kenya et en Tanzanie poury

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étudier la conception et l'administration des centres d'élaboration des programmes scolaires, et les techniques mêmes de définition des programmes.

Le Swaziland et la Tanzanie ont invité un professeur d'école normale éthiopien à venir faire une tournée d'observation de l'édu­cation de base, des centres d'éducation communautaire et la réforme de la formation pédagogique.

Le Swaziland et la Zambie ont invité un haut fonctionnaire tanzanien à visiter leurs services chargés de concevoir et d'évaluer les nouveaux programmes d'éducation de base et de formation pédago­gique.

De son côté, la Tanzanie a reçu quatre éducateurs du Mozambique, qui sont venus étudier sur place le système d'éducation de base.

Tous ces échanges ont servi à attirer l'attention sur le fait que, dans la prochaine décennie, l'éducation de base constituera un objectif prioritaire. Ils ont créé des liens au moins spirituels et intellectuels entre tous ceux qui s'intéressent à la question. Ils ont également révélé que dans la région il y a maintenant des autochtones qui jouissent d'une très haute estime auprès de leurs collègues des pays voisins, et que se développe la mise en commun des compétences intéressant les divers aspects de l'éducation de base. Certains de ces autochtones sont en train de devenir les "experts" et les "spécialistes" qui seront bientôt appelés à rem­plir, dans la région, les fonctions de consultants et de conseil­lers.

En 1975, le gouvernement du Mozambique a invité deux hauts fonctionnaires tanzaniens à venir participer à ses travaux de pla­nification. Les frais étaient, en l'occurrence, financés par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Pour .ces consultants, c'était l'occasion unique d'échanger leurs idées avec des éducateurs mozambicains. Il en est résulté une série de recom­mandations des plus constructives qui ont été vivement appréciées.

En 1975, les bourses de voyage ont surtout été attribuées à des planificateurs et à des administrateurs de haut rang s'occupant d'éducation de base, mais on espère pouvoir en faire bénéficier, en 1976, d'autres catégories d'éducateurs, de manière que le réseau qui a été mis en place favorise le développement professionnel à tous les niveaux.

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Page 85: EXPÉRIENCES ET INNOVATIONS EN ÉDUCATIONunesdoc.unesco.org/images/0016/001613/161342fo.pdf · seignement de base, par Jean Pliya, Vice-recteur de l'Univer

DBEDnTÂ Les publications de la série I B E D A T A sont des ouvrages de référence regroupés dans les catégories suivantes:

B I B L I O G R A P H I E : bibliographies thématiques sur l'éducation;

R É P E R T O I R E : répertoires de centres et sources nationaux, régionaux et internationaux de documentation, d'information et de recherche en éducation;

S T A T I S T I Q U E S : études statistiques sur les différents aspects de l'éducation ; S Y S T È M E S E T P O L I T I Q U E : études sur les systèmes et les politiques d'éducation, catalogues de documents issus d'importantes conférences internationales et résumés analytiques de publications récentes relatives aux politiques de l'éducation;

T E R M I N O L O G I E : glossaires bilingues, trilingues et quadrilingues de termes ayant trait à l'éducation.

Cette série a été conçue pour les centres de documentation et d'information pédagogiques, les établissements d'enseignement, les éducateurs, les adminis­trateurs, les chercheurs, les documentalistes et tous ceux que l'éducation concerne. Pour de plus amples renseignements, s'adresser à I B E D A T A , Bureau international d'éducation, Palais Wilson, 1211 Genève 14, Suisse.