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Extrait de la publication

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LE PRIX À PAYER

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DU MÊME AUTEUR

Douze, Denoël, 2004 ; J’ai lu, 2008.Le Troisième Frère, Denoël, 2006 ; J’ai lu, 2008.Guerre à Harvard, Flammarion, 2008 ; J’ai lu, 2011.Mission Accomplie, Flammarion, 2013.

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Nick MCDONELL

LE PRIX À PAYERTraduit de l’anglais (États-Unis)

par Jérôme Lambert

Flammarion

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En dépit de l’utilisation de certains noms réels, ceci est unroman. J’ai déformé les institutions, les tribus, les langueset la géographie.

Titre original : An Expensive EducationÉditeur original : Grove Press

© Nick McDonell, 2009Pour la traduction française :

© Flammarion, 2013ISBN : 978-2-0812-9 -6956

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Dédié à THCM

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« Et vous croyez ce qu’on vous dit ?— Pas tout. Ils ne nous ont pas laisségrand-chose en quoi l’on puisse croire,n’est-ce pas ?... fût-ce l’incroyance. Jene puis croire à rien qui dépasse lataille d’un foyer ou qui que ce soit plusvague qu’un être humain.— N’importe quel être humain ? »

Notre agent à La Havane,Graham Greene,

1958.

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PREMIÈRE PARTIE

Boston, Massachusetts, 200X

Le grand bâtiment victorien est sombre et frais,silencieux dans la nuit d’automne. Le professeur SusanLowell y pénètre et referme soigneusement la ported’entrée derrière elle. En montant à l’étage pour jeterun œil sur les enfants, elle salue en silence son refletdans le miroir du couloir. Elle fronce les sourcils. Mêmepas encore minuit et ils dorment déjà tous, sa fille, sonfils et même son mari. Elle sent monter en elle la colèreet le ressentiment, elle les sent l’envahir avant de dis-paraître.

Elle redescend, attrape la télécommande et tombe surune chaîne d’information en sourdine sur l’écranmural. Elle a détaché ses cheveux mais porte encore son

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costume et ses talons hauts. Certains visages à l’écranlui sont familiers, et sa large bouche se fend d’un sourirelorsqu’elle y voit sa propre image. Les moments de bon-heur à venir seront-ils aussi forts que celui qu’elle viten ce moment ? Elle vient de recevoir le prix Pulitzer,et son mari l’ignore encore.

Chaque chose en son temps.

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Elle va à la cuisine, s’ouvre une bouteille de vinrouge et sort un verre fin du placard. De retour dansle salon, elle s’écroule sur le canapé, regarde les infor-mations sans le son, boit. Arrivée à la moitié de labouteille, elle remonte, se déshabille, et son mari est àpeine réveillé qu’elle l’a déjà en elle. Après, elle lui ditpour le prix, et ils discutent un peu, mais pas long-temps. Quand le délassement et l’épuisement la gagnentenfin, elle se demande, au bord du sommeil : Pourquoiai-je peur ?

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Kenya, frontière somalienne, 200X

Ce matin-là, dans la brousse vallonnée, MichaelTeak, un jeune Américain en mission pour son gouver-nement, qui était à cette époque le plus puissant dumonde, faisait route vers le Nord. Un cerf-volantvoguait sur les vents de l’océan Indien et accompagnaitsur la piste isolée les rebonds chaotiques de son LandCruiser. Sous le soleil blanc écrasant de l’après-midi,Teak n’était pas pressé d’arriver au village. Il espéraitque la soirée serait plus fraîche. Plus calme aussi.

C’était une mission simple, vraiment. Livrer del’argent et un téléphone portable à un rebelle dunom d’Hatashil et jeter un œil dans les parages.Trop beau pour être vrai, avait-il tout de suite pensé

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à la fin de la lecture du dossier. Hatashil était uncombattant de la liberté, un guerrier orphelin et auto-didacte, un humanitaire et un chef. La formation deTeak l’avait préparé à se méfier de ce genre de mots,comme si les plus éclatantes promesses ne pouvaientjamais être tenues, seulement trahies. La lumière dujour sur les briques coloniales.

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Installé confortablement sur le terrain depuis unan et demi, Teak se dit que les choses devraientpeut-être changer. Ou du moins que lui pourraitchanger, que c’était peut-être ça, son problème. Et,à mesure qu’il s’enfonçait dans le vert et le marrondu paysage, il se sentit détaché progressivement detout ce qui l’entourait, de sa voiture, de son flingue.Il se fit soudain la réflexion que, si la mission étaitla bonne, lui n’était peut-être pas la personne adé-quate. Il se ressaisit et se concentra de nouveau surla route. À vingt-cinq ans, il avait appris à se com-porter en professionnel.

Il y avait cinq valises sur la banquette arrière. Desbagages en plastique, de mauvaise qualité, sans aucuneélégance, des bagages de voyageur sans le sou. C’étaitla deuxième couverture de Teak. Il arrêta le véhicule,consulta son portable et vérifia sa position par rap-port aux coordonnées du village. Au bon endroit, aubon moment.

En redémarrant, il aperçut du mouvement àl’horizon. Un nuage de poussière derrière un buissond’acacias, tout au bout de la piste. C’était la pre-mière fois depuis plus de cent cinquante kilomètresqu’il voyait de la poussière et il accéléra. Il perdit le

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nuage de vue, puis le rattrapa alors qu’il passait au-dessus des arbres. Au mieux, des dingues en pleinsafari, au pire… Il eut la vision soudaine des torturesqu’avait subies un de ses prédécesseurs, les orbitesévidées, l’abdomen lacéré à coups de lames rouillées.Attaché à un arbre et laissé pour mort. Pas de quoigaspiller une balle.

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Trois véhicules. Ils s’arrêtèrent les uns derrière lesautres. Teak s’arrêta à son tour à deux kilomètres dedistance et les observa aux jumelles. Un minivanblanc, du genre que les touristes japonais utilisentpour leurs safaris, et deux pick-up rouillés. Leshommes installés à l’arrière des pick-up descendirentpour prendre une barrière en métal attachée sur letoit du van. Ils étaient tous armés.

Teak se raidit. Des shifta. En amharique, ça vou-lait dire bandits sociaux. Toute une histoire résuméeen un seul mot. Malfaiteurs. Il fit route dans leurdirection.

Les shifta attendaient Teak, il en dénombra vingt-deux. Ils étaient plus jeunes qu’il ne l’avait imaginéet suffisamment riches pour se payer un van et ins-taller un barrage. Une équipe avisée, pensa Teak.

Deux hommes se tenaient debout devant la barrière.L’un d’eux portait un pantalon de camouflage et unT-shirt orné du logo antidrogue D.A.R.E. L’autre por-tait un short en nylon et un T-shirt de safari kaki. Unekalachnikov chacun. Le type au short portait aussi unétui de revolver en cuir à l’épaule.

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Teak ralentit.« Salut », lança-t-il en passant la tête par la vitre.

Mieux valait utiliser l’anglais, la lingua idiota.« Checkpoint », répondit le type au T-shirt anti-

drogue.Teak s’arrêta et laissa le moteur tourner. Il observa

les bords de la piste. Il aurait pu les contourner, mais

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ils l’auraient pris en chasse et lui auraient tiré dansles pneus, ils l’auraient raté peut-être mais luiauraient sûrement pété ses vitres. Ou pire. Mieuxvaut leur parler. Un garçon assis en tailleur et arméd’une machette fixait Teak. Étrange. Pas d’enfantsavec les shifta d’habitude. Teak lui lança un clind’œil, mais le garçon ne répondit pas.

« Checkpoint ? répéta Teak de son plus bel aird’abruti colonial. Sous l’autorité de… ? »

Les deux hommes de devant se regardèrent. D’ungeste théâtral, Short-En-Nylon sortit un vieux .38de son étui.

« Sous l’autorité du général Hatashil, répondit-ilen heurtant la porte arrière de la voiture avec sonflingue. Il y a quoi à l’intérieur ? »

À la grande joie de tous, Teak plongea la têteentre ses mains :

« Et merde. »Ils ouvrirent les portières, balancèrent les valises

dans la poussière et en éventrèrent une.« Vous auriez pu utiliser la fermeture Éclair », pré-

cisa Teak.Une clameur s’éleva parmi les hommes quand ils

virent le khat verdâtre qui remplissait la valise.

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Teak secoua la tête.« Un problème ? demanda le chef à l’étui de revolver.— Non, répondit Teak en tendant une main par

la vitre d’un air soudainement enjoué. Je m’appelleTeak.

— Je suis le commandant Moalana », réponditl’homme au short en nylon. Surpris, il échangea avec

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Teak une furtive poignée de main. Teak sourit, etMoalana se caressa le menton. Il jubilait presque,trop heureux d’avoir croisé sur son chemin ce typeavec ses valises remplies de drogue. Il jouait avecTeak et l’offrait en pâture à ses hommes.

Ceux-ci étaient frustrés depuis le matin. De toutefaçon, pensa Moalana, ils étaient frustrés en perma-nence. Il pourrait aussi lui prendre la voiture, maisles ordres étaient les ordres. Hatashil avait parlé demodération. Le meurtre de l’espion l’avait rendu din-gue. On ne laisse pas nos alliés attachés à un arbre !Puis il s’était rapidement calmé et leur avait tenu unpetit discours. Tout le monde peut se méprendre,avait-il conclu, mais modérez-vous le plus possible.Moalana était très reconnaissant à Hatashil pour sacompréhension après une telle gaffe.

Teak accepta le morceau de khat que le comman-dant lui offrit et le mâcha. Il n’aimait pas ce goûtamer, on aurait dit du chou.

« Je peux en garder un ? demanda-t-il.— Un sac ? (Moalana éclata de rire, et ses hommes

exultèrent.) Tu espères garder un sac ? »Moalana coupa Teak avant qu’il puisse répliquer :

« Pas un seul », asséna-t-il, et ses hommes commen-

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cèrent le chargement des valises dans les pick-up.Teak remarqua que le garçon assis en tailleur nes’intéressait pas au butin, il dessinait des formes dansla poussière du bout de sa machette. Un autre gar-çon plus âgé l’appela pendant que le reste des shiftarangeaient la barrière sur le van et l’y arrimaient soli-dement.

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Moalana fit signe à Teak par la fenêtre de sonpick-up quand il passa devant lui.

Teak cracha le khat par la vitre et les regarda dis-paraître au bout de la piste. La rencontre avait duréen tout et pour tout moins de cinq minutes. Le coupdes valises de khat avait marché. Il était encore dansles temps.

Des kilomètres plus loin, des heures plus tard, surune piste hors de la piste, les broussailles faisaientplace à une plaine rocailleuse. Mais, juste avant, lemiracle d’un ruisseau. Au bord, un dattier biscornu,une douzaine de huttes, des chèvres, des enfants nuscomme des anges gardiens miniatures. Teak aimaitce tableau. Il se gara à une centaine de mètres duvillage pour ne pas déranger davantage le bétail.Quelques chèvres efflanquées bêlèrent au passage duLand Cruiser.

De sa poche, il tira une clé avec laquelle il ouvritla boîte à gants pour y prendre une enveloppe FedExscellée. Il sortit de la voiture, se dégourdit les jambeset jaugea la température en enfilant la veste froisséede son ensemble kaki. Il portait tout le temps les

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mêmes vêtements, mais il commençait à faire plusfrais. Il ne craignait pas la chaleur. Sa peau claireétait brûlée en permanence, et il s’en accommodaitbien. Une courte période de sa vie au cœur deshivers de la Nouvelle-Angleterre lui avait suffi. Ilvérifia le SIG P220 à sa ceinture, cala l’enveloppeFedEx sous son bras et se dirigea vers les enfants qui

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venaient à lui en faisant craquer sous leurs pasl’herbe brûlée. Derrière eux, les mères affichaientleur mépris.

Le plus curieux des enfants s’approcha. Il lui arri-vait aux genoux et l’observa par en dessous. Teakl’accueillit dans le dialecte local, mais le garçon étaittrop jeune pour s’en étonner.

« Devinette ! » dit Teak théâtralement en mon-trant un sourire aux dents plus blanches que l’enfantn’en avait jamais vues sur un adulte.

« Oui ! Devinette !, répondit l’enfant.— Ma maison n’a pas de porte. »C’était une devinette connue et facile sur un œuf,

mais Teak se doutait que le gamin était trop jeunepour la connaître, et il avait raison. Le garçon fitdemi-tour et courut vers ses camarades pour se faireconsoler.

Tout le monde dévisagea Teak quand il entradans le village. Deux adolescents lui firent signe dubout de leurs vieilles mitraillettes Enfield, et l’und’eux lui demanda en anglais ce qu’il faisait là.

« Je viens voir Hatashil », répondit-il dans leurlangue, content de son effet de surprise.

Les garçons se regardèrent comme s’ils étudiaient

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son cas. Tirant une bouffée, ils ordonnèrent à Teakde les suivre. Ils longèrent le ruisseau. Sous le pal-mier, trois hommes étaient assis sur un tapis épaismais usé, sirotant du lait de chamelle fermenté dansdes petits bols. Deux étaient en tenue de camou-flage, l’autre, que Teak reconnut immédiatementcomme étant Hatashil, portait une djellaba blanche.

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Ils se levèrent quand Teak approcha. Hatashil, leplus petit des trois, était costaud, presque gros. Sapeau était aussi légèrement plus claire, remarquaTeak, et ses traits plus anguleux. Teak n’identifia pasle crâne qui surmontait sa canne. Ses yeux profondé-ment enfoncés dans leur orbite scrutèrent Teak, et ilcongédia ses associés qui partirent le long du ruis-seau, accompagnés des deux garçons aux mitraillettes.Quand ils furent suffisamment loin pour ne pasentendre, Hatashil invita Teak à s’approcher.

Ils se saluèrent à nouveau et s’assirent. Teak féli-cita Hatashil pour l’anglais des deux gamins.

« Si seulement le mien était meilleur, répondit-il,mais merci. Ce sont de bons garçons. Au camp, onen a d’encore meilleurs. »

Une femme souriante et fine comme une sauterelleapporta un plateau de dattes, du fromage de chèvreet deux canettes de Fanta. Des canettes au lieu de bou-teilles, pensa Teak. C’est nouveau. Elle se pencha pourdéposer le plateau sur le tapis, entre les deux hommes.Le chef lui sourit, et Teak crut la voir rougir.

Par politesse, Teak mangea un morceau de fro-mage. Après ça, aucun des deux ne toucha à la nour-riture. Hatashil lui passa en revue les hommes, les

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armes, le nombre de chevaux et de véhicules dont ildisposait dans un camp proche. Il désigna unendroit par-delà le ruisseau, où était garé son proprevéhicule, un pick-up Toyota avec une mitrailleuse12.7 montée à l’arrière.

Teak ouvrit l’enveloppe avec un couteau de pocheet la passa à Hatashil par-dessus le plateau. Celui-ci

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Teak dit à Toma de monter sur un cheval et delui amener l’autre. Tandis que Toma se levait, Teakdit à la bande dans leur langue de rester tranquilleet de poser leurs armes. L’un d’eux refusa, maisavant qu’il ait pu pointer son arme sur Toma,l’homme aux petits yeux lui cria un ordre d’une voixhaut perchée et pleurnicharde. Il leur dit de faire ceque l’homme blanc disait.

Toma se hissa difficilement sur le cheval, couvrantla selle du sang provenant de sa blessure à la jambe.Teak remit son otage sur pied et, toujours avecl’arme sur sa nuque, le fit monter sur l’autre chevalet sauta derrière lui. Les hommes en tenue decamouflage criaient tandis qu’ils partaient au trot surles petits chemins.

« Vous êtes avec Hatashil ? grogna Teak dansl’oreille de l’homme, en lui pressant le pistoletcontre les côtes.

— Plus maintenant, répondit-il. Pitié… »Deux kilomètres plus tard, Teak poussa l’homme

sur le côté, et malgré la douleur, Toma le regardal’air satisfait dégringoler le long de la crête.

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« Merci de ne pas être parti sans moi », lui ditToma, plus tard dans la soirée. Ils étaient dans lachambre où Toma avait réveillé Teak le matinmême. Toma s’était soûlé au whisky. Ils ne pou-vaient pas aller à l’hôpital aujourd’hui, et Toma étaitallongé sur le lit de Teak avec un garrot à la jambe.Teak était sobre, accoudé à la fenêtre, et regardait

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les containers dans l’obscurité et l’océan Indien auloin, en repensant aux milans qu’il avait vus dansl’après-midi. Un combat ou un jeu.

« Hé, dit Toma depuis le lit. Teak se retourna.— The times, they are a-changing. »Chaque fois que Toma utilisait des paroles de

chansons rock, ses sourcils, longs et fins comme lereste de son corps, bougeaient de haut en bas. Teakse dit tout à coup que Toma se moquait de lui,quelque part, avec ses paroles de chanson. Il seretourna vers la fenêtre.

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