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Extrait de la publication…les ancêtres avaient reçu des Etres surnaturels les premières révélations culturelles. Et comme les sociétés traditionnelles n'ont pas, à propre-ment

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Tous droits de reproduction, d'adaptation et de traductionréservés pour tous pays y compris la Russie.

© 1959, Librairie Gallimard.

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AVANT-PROPOS

Ce petit Uvre rassemble les « Haskell Lec-tures» que j'ai eu le privilège de donner à l'Uni-versité de Chicago, en automne 1956, sous letitre de Patterns of Initiation. Avant de remettre

le texte pour l'impression, j'ai ajouté une intro-duction, quelques notes et des indications biblio-graphiques, mais j'ai conservé la présentationimposée par le style oral. Tel qu'il a été conçu,ce petit livre s'adresse à tout lecteur non spé-cialiste intéressé par l'histoire spirituelle del'humanité. C'est pourquoi je me suis borné àtracer les grandes lignes de ce phénomène com-plexe qu'est l'initiation; il eût fallu, autrement,un livre trois ou quatre fois plus volumineux.Certains aspects sont d'ailleurs examinés dansmes ouvrages précédents Le chamanisme et lestechniques archaïques de l'extase (Paris, 1951),Le Yoga. Immortalité et liberté (Paris, 1954),Forgerons et Alchimistes (Paris, 1956). Le pro-blème sera repris dans un livre en préparation,Mort et Initiation.

Je tiens à remercier, ici encore, le Recteurde l'Université de Chicago, le Comité des « Has-kell Lectures»et le Doyen de la Faculté deThéologie de l'Université de Chicago, pour l'hon-neur de m'avoir confié les Haskell Lectures 1956.

Le texte qu'on va lire présente quelquesmenues différences avec la version anglaise

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publiée par Harper sous le titre de Birth andRebirth (New York, 1958). Comme toujours,notre cher et savant ami, Dr Jean Gouillard,s'est chargé de lire et corriger le manuscrit fran-çais; qu'il reçoive ici l'expression de notre sin-cère gratitude.

Mircea ELIADE.

Paris-Chicago

1956-1957

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INTRODUCTION

On a souvent affirmé qu'une des caractéris-tiques du monde moderne est la disparition del'initiation. D'une importance capitale dans lessociétés traditionnelles, l'initiation est prati-quement inexistante dans la société occidentalede nos jours. Certes, les différentes confessionschrétiennes conservent, dans une mesure

variable, des traces d'un Mystère initiatique. Lebaptême est essentiellement un rite initiatique;le sacerdoce comporte une initiation. Mais ilne faut pas oublier que le christianisme n'ajustement triomphé et n'est devenu une reli-gion universelle que parce qu'il s'est détachédu climat des Mystères gréco-orientaux et s'estproclamé une religion de salut accessible à tous.D'autre part, a-t-on encore le droit d'appeler« chrétienle monde moderne en sa totalité?

S'il existe un « homme moderne », c'est bien dansla mesure où il refuse de se reconnaître dans

l'anthropologie chrétienne. L'originalité del' « homme moderne », sa nouveauté par rapportaux sociétés traditionnelles, c'est précisément savolonté de se considérer un être uniquement his- 1torique, son désir de vivre dans un Cosmosradicalement désacralisé. Dans quelle mesurel'homme moderne est-il parvenu à réaliser sonidéal, c'est un autre problème, que nous n'abor-derons pas ici. Mais le fait reste que cet idéal

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n'a plus rien de commun avec le message chré-tien et qu'il est, a fortiori, étranger à l'imageque l'homme des sociétés traditionnelles s'étaitfaite de lui-même.

Or, cette image, l'homme des sociétés tradi-tionnelles est amené à la connaître et à l'as-

sumer par le truchement de l'initiation. Il existe,évidemment, plusieurs types et d'innombrablesvariantes d'initiation, correspondant à des struc-tures sociales différentes et à des horizons cul-

turels variés. Mais l'important est dans le faitque toutes les sociétés pré-modernes c'est-à-dire, celles qui se sont perpétuées, en Occident,jusqu'au Moyen Age, et dans le reste du mondejusqu'à la première guerre mondiale accor-dent un rôle de premier ordre à l'idéologie etaux techniques de l'initiation.

On comprend généralement par initiation unensemble de rites et d'enseignements oraux, quipoursuit la modification radicale du statut reli-gieux et social du sujet à initier. Philosophique-ment parlant, l'initiation équivaut à une muta-tion ontologique du régime existentiel. A la finde ses épreuves, le néophyte jouit d'une toutautre existence qu'avant l'initiation il est devenuun autre. Des diverses catégories d'initiation,l'initiation de puberté est particulièrement impor-tante pour comprendre l'homme pré-moderne.Là où ils existent, les rites de passage sont obli-gatoires pour tous les jeunes de la tribu. Pouravoir le droit d'être admis parmi les adultes,l'adolescent doit affronter une série d'épreuvesinitiatiques c'est grâce à ces rites, et aux révé-lations qu'ils comportent, qu'il sera reconnucomme un membre responsable de la société.L'initiation introduit le novice à la fois dans la

communauté humaine et dans le monde des

valeurs spirituelles. Il apprend les comporte-ments, les techniques et les institutions des

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adultes, mais aussi les mythes et les traditionssacrées de la tribu, les noms des dieux et l'his-

toire de leurs œuvres; il apprend surtout lesrapports mystiques entre la tribu et les Etressurnaturels tels qu'ils ont été établis à l'originedes temps.

Toute société primitive possède un ensemblecohérent de traditions mythiques, une « concep-tion du monde », et c'est cette conception quiest graduellement révélée au novice au cours deson initiation. Il ne s'agit pas uniquement d'uneinstruction dans le sens moderne du terme. Le

néophyte ne devient digne de l'enseignementsacré, qu'au terme d'une préparation spirituelle.Car tout ce qu'il apprend sur le monde et surl'existence humaine, ne constitue pas des « con-naissances» au sens que notre temps donne àce mot, des informations objectives, susceptiblesd'être indéfiniment rectifiées et enrichies. Le

Monde est l'œuvre d'un Etre surnaturel; œuvre

divine et, par conséquent, sacrée dans sa struc-ture même. L'homme vit dans un Univers qui,surnaturel d'origine, est également sacré dans sa« forme », parfois même dans sa substance. LeMonde a une « histoire » sa création par lesEtres surnaturels et tout ce qui a suivi, savoir,l'arrivée du Héros civilisateur ou de l'Ancêtre

mythique, leurs activités culturelles, leurs aven-tures démiurgiques, enfin leur disparition.

Cette histoire sacrée la mythologie estexemplaire elle raconte comment les chosessont venues à l'être, mais elle fonde aussi tous

les comportements humains et toutes les ins-titutions sociales et culturelles. Parce quel'homme a été créé et civilisé par les Etressurnaturels, la somme de ses conduites et de ses

activités appartient à l' « histoire sacrée »cette histoire, il importera de la conserver soi-gneusement et de la transmettre intacte aux nou-

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velles générations. Au fond, l'homme est tel qu'ilest parce que, à l'aurore des temps, il lui estarrivé les choses racontées par les mythes. Demême que l'homme moderne se proclame unêtre historique, issu de l'histoire tout entièrede l'humanité, l'homme des sociétés archaïquesse reconnaît l'aboutissement d'une histoire

mythique, d'une série d'événements qui ont lieuin illo tempore, au commencement du Temps.Mais alors que l'homme moderne voit dansl'histoire qui l'a précédé une œuvre purementhumaine, et, surtout, se croit maître de la conti-

nuer et de la perfectionner indéfiniment, pourl'homme des sociétés traditionnelles tout ce quis'est passé de significatif, c'est-à-dire de créateuret de puissant, est arrivé au commencement, dansle Temps mythique.

Dans un certain sens, on pourrait dire que,pour l'homme des sociétés archaïques, l'Histoireest «fermée», qu'elle s'est épuisée dans lesquelques événements grandioses du « commen-cement ». En révélant aux Polynésiens, in illotempore, les modalités de la pêche en haute mer,le héros mythique a épuisé d'un seul coup lesformes possibles de cette activité; depuis lors,chaque fois qu'ils vont à la pêche, les Polyné-siens répètent le geste exemplaire du hérosmythique ils imitent un modèle trans-humain.

Mais, à bien y regarder, cette histoire conser-vée dans les mythes n'est « ferméequ'en appa-rence. Si l'homme des sociétés primitives s'étaitcontenté d'imiter ad infinitum les quelques gestesexemplaires révélés par les mythes, on ne pour-rait expliquer les innombrables innovations qu'ila accueillies au cours du temps. Il n'existe pasde société primitive absolument fermée. On n'enconnaît pas une seule qui n'ait emprunté deséléments culturels étrangers; qui, à la suite deces emprunts, n'ait changé au moins certains

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aspects de ses institutions; qui, en somme, n'aitune « histoire t> Seulement, à la différence de lasociété moderne, toutes les innovations ont été

acceptées comme autant de « révélationst> d'ori-gine sur-humaine. Les objets ou les armes qu'onempruntait, les comportements et les institutionsqu'on imitait, les mythes ou les croyances qu'onassimilait étaient considérés comme chargésde puissance magico-religieuse c'était d'ail-leurs pourquoi on les avait remarqués et ons'était donné la peine de se les approprier. Mieuxencore on adoptait tous ces éléments parce queles ancêtres avaient reçu des Etres surnaturelsles premières révélations culturelles. Et commeles sociétés traditionnelles n'ont pas, à propre-ment parler, de mémoire « historique », il suf-fisait de quelques générations, parfois moins,pour qu'une innovation récente fût investie duprestige des révélations primordiales. En fin decompte, on pourrait dire que, tout en étant « ou-vertes» à l'histoire, les sociétés traditionnelles

ont tendance à projeter toute acquisition nou-velle dans le temps primordial, à télescoper tousles événements dans le même horizon atemporeldes « commencements» mystiques. Les sociétésprimitives sont, elles aussi, modifiées par l'his-toire, bien que dans une mesure parfois infime;mais ce qui les différencie radicalement de lasociété moderne, c'est l'absence de la conscience

historique. Absence d'ailleurs inévitable, comptetenu de la conception du Temps et de l'anthro-pologie particulières à toute l'humanité pré-ju-daïque.

C'est donc à cette science traditionnelle qu'ob-tiennent accès les novices. Ils sont longuementinstruits par des tuteurs; ils assistent à des céré-monies secrètes, subissent une série d'épreuves,et ce sont surtout celles-ci qui constituent l'expé-rience de l'initiation la rencontre avec le sacré.

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La majorité des épreuves initiatiques impliquent,d'une façon plus ou moins transparente, unemort rituelle suivie d'une résurrection ou d'une

nouvelle naissance. Le moment central de toute

initiation est représenté par la cérémonie quisymbolise la mort du néophyte et son retourparmi les vivants. Mais il revient à la vie unhomme nouveau, assumant un autre mode d'être.La mort initiatique signifie à la fois la fin del'enfance, de l'ignorance et de la condition pro-fane.

Pour la pensée archaïque, rien n'exprime mieuxque la mort l'idée d'une « fin », de l'achève-ment définitif de quelque chose tout commerien ne signifie mieux que la cosmogonie, l'idéede « création », de <: faire:)-, de « construire ».

Le mythe cosmogonique sert de modèle exem-plaire pour toute espèce de « faire ». Rien n'as-sure mieux la réussite d'une « créationquel-conque (un village, une maison, un enfant) quede la copier sur la création par excellence, lacosmogonie. Mieux parce que la cosmogoniereprésente avant tout, aux yeux des primitifs,la manifestation de la puissance créatrice desdieux et, par conséquent, une prodigieuse irrup-tion du sacré, elle est périodiquement réitéréeafin de régénérer le monde et la société humaine.Car la répétition symbolique de la création im-

plique une réactualisation de l'événement pri-mordial, donc la présence des dieux et de leursénergies créatrices. Le retour au commencementse traduit par une réactivation des forces sacréesqui s'étaient manifestées alors pour la premièrefois. En restaurant le Monde tel qu'il étaitau moment où il venait de naître, en repro-duisant les gestes que les dieux avaient faitspour la première fois in illo tempore lasociété humaine et le cosmos tout entier rede-

venaient ce qu'ils avaient été alors purs, puis-

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sants, efficients, avec leurs virtualités intactes.

Toute répétition rituelle de la cosmogonie estprécédée par une régression symbolique au« Chaos ». Afin de pouvoir être créé de nouveau,le vieux monde doit être préalablement anéanti.Les divers rites mis en œuvre à l'occasion du

Nouvel An se laissent classer en deux catégoriesprincipales 1) ceux qui signifient le retour auChaos (extinction des feux, l'expulsion du « mal»et des péchés, le renversement des comporte-ments habituels, les orgies, le retour des morts,etc.); 2) ceux qui symbolisent la cosmogonie(l'allumage de nouveaux feux, le départ desmorts, la répétition des actes par lesquels lesdieux ont créé le Monde, la prédiction solennelledu temps qu'il fera pendant l'année à venir, etc.).Dans le scénario des rites initiatiques, la « mort»correspond au retour provisoire au « Chaos »elle est donc l'expression exemplaire de la find'un mode d'être celui de l'ignorance et del'irresponsabilité enfantine. La mort initiatiquerend possible la tabula rasa sur laquelle vien-dront s'inscrire les révélations successives, des-

tinées à former un homme nouveau. On lira plusloin les différentes modalités de la naissance

à la nouvelle vie, spirituelle. Disons dès mainte-nant que cette vie nouvelle est conçue comme lavéritable existence humaine, car elle est ouverte

aux valeurs de l'esprit. Ce que l'on comprendsous le terme générique de« culture », englo-bant toutes les activités de l'esprit, est acces-sible uniquement aux initiés. Bref, la participa-tion à la vie spirituelle est rendue possible grâceaux expériences religieuses déclenchées pendantl'initiation.

Tous les rites de re-naissance ou de résurrec-

tion, et les symboles qu'ils impliquent, indiquentque le novice a accédé à un autre mode d'exis-

tence, inaccessible à ceux qui n'ont pas affronté

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les épreuves initiatiques, qui n'ont pas connu lamort. Retenons cette particularité de la menta-lité archaïque la croyance qu'on ne peut pasmodifier un état sans l'abolir au préalable; enl'occurrence, sans que l'enfant meure à l'enfance.On ne saurait trop souligner l'importance de cetteobsession du « commencement », en somme

l'obsession du commencement absolu la cosmo-

gonie. Pour qu'une chose soit bien faite, il fautprocéder comme on a procédé la première fois;or, « la première fois », cette chose cetteclasse d'objets, cet animal, ce comportementn'existait pas lorsque, in illo tempore, cet objet,cet animal, cette institution sont venus à l'exis-

tence, c'était comme si, par le pouvoir des dieux,l'être surgissait du non-être.

La mort initiatique est indispensable au « com-mencement» de la vie spirituelle. Sa fonctiondoit être comprise par rapport à ce qu'elle pré-pare la naissance à un mode d'être supérieur.Comme nous le verrons plus loin, la mort initia-tique est souvent symbolisée par les ténèbres,par la Nuit cosmique, par la matrice tellurique,la cabane, le ventre d'un monstre, etc. Toutes

ces images expriment plutôt la régression à unétat pré-formel, à une modalité latente (complé-mentaire du « chaos» pré-cosmogonique), quel'anéantissement total (au sens où, par exemple,un membre des sociétés modernes conçoit lamort). Ces images et symboles de la mort rituellesont solidaires de la germination, de l'embryo-logie ils indiquent déjà qu'une nouvelle vie esten train de se préparer. Evidemment, commenous le montrerons, il existe aussi d'autres valo-

risations de la mort initiatique par exemple,entrer dans la compagnie des morts et desancêtres. Mais, ici encore, on peut déceler lemême symbolisme du commencement le com-mencement de la vie spirituelle, rendu possible

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dans ce cas par la rencontre avec les esprits.Pour la pensée archaïque l'homme est donc

fait il ne se fait pas tout seul. Ce sont les vieuxinitiés, les maîtres spirituels qui le « font ». Maisceux-ci appliquent ce qui leur a été révélé aucommencement des temps par les Etres surna-turels. Ils ne sont que leurs représentants; en denombreux cas d'ailleurs, ils les incarnent. Ceci

revient à dire que pour devenir effectivementhomme, il faut ressembler à un modèle mythique.L'homme se reconnaît tel dans la mesure où il

n'est plus un « homme naturel », où il est « fait»une deuxième fois, selon un canon exemplaireet trans-humain. La « nouvelle naissance» ini-

tiatique n'est pas « naturelle », bien qu'elle s'ex-prime parfois par des symboles obstétriques.Cette « naissance» comporte des rites instituéspar des Etres surnaturels elle est donc œuvredivine, créée par la puissance et la volonté desEtres surhumains; elle n'appartient pas à la « Na-ture» (dans le sens moderne, sécularisé du

terme), mais à l'Histoire sacrée. La seconde nais-

sance, initiatique, ne répète pas la première, bio-logique. Pour parvenir au mode d'être de l'initié,il faut connaître des réalités qui n'appartiennentplus à la « Nature », mais à la biographie desEtres surnaturels, donc à l'Histoire sacrée conser-

vée par les mythes.Alors même qu'ils semblent parler uniquement

des phénomènes naturels de la course duSoleil, par exemple les mythes se réfèrent àune réalité qui n'est plus celle de la « Nature»telle que la connaît aujourd'hui l'homme mo-derne. Pour le primitif, la Nature n'est pas sim-plement « naturelle » elle est en même tempsSur-Nature, c'est-à-dire manifestation de forcessacrées et chiffre de réalités transcendantales.

Connaître les mythes, ce n'est pas comme onl'avait pensé au siècle dernier prendre connais-

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sance de la régularité de certains phénomènescosmiques (la course du Soleil, le cycle lunaire,le rythme de la végétation, etc.); c'est, avanttout, connaître ce qui s'est réellement passé dansle Monde, ce que les Dieux et les Héros civilisa-teurs ont fait leurs œuvres, leurs aventures,leurs drames. C'est, donc, connaître une histoire

divine qui ne reste pas moins une « histoire »,c'est-à-dire une série d'événements imprévisibles,bien que cohérents, et significatifs.

En termes modernes, on pourrait dire que l'ini-tiation met fin à l' « homme naturel» et intro-

duit le novice à la culture. Mais, pour les sociétésarchaïques, la « culture» n'est pas oeuvrehumaine, elle est d'origine surnaturelle. Plusencore c'est par le truchement de la « culture»que l'homme rétablit le contact avec le mondedes Dieux et des autres Etres surnaturels, et par-ticipe à leur énergie créatrice. Le monde desEtres surnaturels est le monde où les choses se

sont passées pour la première fois. Le monde oùsont venus à l'être le premier arbre et le premieranimal, où un geste depuis lors religieuse-ment répété a été pour la première fois accom-pli (marcher dans une certaine position, déterrerune certaine racine alimentaire, aller à la chasse

à une certaine période de l'année, etc.); où lesDieux et les Héros ont fait telle ou telle ren-

contre, ont subi telle mésaventure, ont prononcécertaines paroles, proclamé certaines normes, etc.Les mythes nous introduisent dans un mondequi ne peut pas être « décrit », mais seulement« narré », puisqu'il est constitué par l'histoiredes actions librement entreprises, des décisionsimprévisibles, des transformations fabuleuses,etc. En un mot, l'histoire de tout ce qui s'estpassé de significatif depuis la Création du monde,de tous les événements qui ont contribué à fairel'homme tel qu'il est aujourd'hui. Le novice qui,

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INTRODUCTION

par l'initiation, est introduit aux traditions my-thologiques de la tribu, est introduit à l'histoiresacrée du Monde et de l'humanité.

Voilà pourquoi l'initiation importe tant à laconnaissance de l'homme pré-moderne. Elle nousrévèle la gravité, confinant à la terreur, aveclaquelle l'homme des sociétés archaïques assu-mait la responsabilité de recevoir et de trans-mettre les valeurs spirituelles.

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CHAPITRE PREMIER

RITES DE PUBERTE

ET INITIATIONS TRIBALES

DANS LES RELIGIONS PRIMITIVES

REMARQUES PRÉLIMINAIRES.

Dans ce petit livre nous voudrions, présenterles types les plus importants de l'initiation, encherchant surtout à déchiffrer leur sens profond,qui est toujours religieux car le changement durégime existentiel s'opère par une expérience reli-gieuse. L'initié devient un autre homme parcequ'il a eu une révélation religieuse du Mondeet de l'existence. C'est dire que nous entendonstraiter cet important et difficile problème dansla perspective de l'histoire des religions, et nonpas, comme on le fait habituellement, dans laperspective de l'anthropologie culturelle ou dela sociologie. Il existe d'excellents travaux écritsdans cette optique il suffit de rappeler Alters-klassen und Mânnerbünde (Berlin, 1902) deHeinrich Schurtz et Primitive Secret Societies

(New-York, 1908) de Hutton Webster. L'histo-rien des religions utilisera toujours, et avec leplus grand profit, les résultats obtenus par l'eth-nologue et le sociologue, mais il est obligé decompléter ces résultats et de les intégrer dansune autre perspective, plus vaste. L'ethnologues'occupe uniquement des sociétés qu'on appelle« primitivestandis que l'historien des religions

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