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Académie d’Orléans –Tours Université François-Rabelais FACULTE DE MEDECINE DE TOURS Année 2014 Thèse pour le DOCTORAT EN MEDECINE Diplôme d’Etat Par GILIS-MENARD Romain Né le 02/03/1982 à Clamart (92) Présentée et soutenue publiquement le 17 janvier 2014 Profil d’accès aux soins de premier recours des personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours Jury Président de jury : Monsieur le Professeur Emmanuel RUSCH Membres du jury : Madame le Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWYCK Monsieur le Professeur Alain CHANTEPIE Madame le Docteur Vanessa MICHEL Monsieur le Docteur Jean ROBERT

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Académie d’Orléans –Tours Université François-Rabelais

FACULTE DE MEDECINE DE TOURS Année 2014

Thèse

pour le

DOCTORAT EN MEDECINE

Diplôme d’Etat

Par

GILIS-MENARD Romain Né le 02/03/1982 à Clamart (92)

Présentée et soutenue publiquement le 17 janvier 2014

Profil d’accès aux soins de premier recours des personnes en situation de grande exclusion de la vil le de Tours

Jury Président de jury : Monsieur le Professeur Emmanuel RUSCH Membres du jury : Madame le Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWYCK Monsieur le Professeur Alain CHANTEPIE Madame le Docteur Vanessa MICHEL Monsieur le Docteur Jean ROBERT

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Académie d’Orléans –Tours Université François-Rabelais

FACULTE DE MEDECINE DE TOURS Année 2014

Thèse

pour le

DOCTORAT EN MEDECINE

Diplôme d’Etat

Par

GILIS-MENARD Romain Né le 02/03/1982 à Clamart (92)

Présentée et soutenue publiquement le 17 janvier 2014

Profil d’accès aux soins de premier recours des personnes en situation de grande exclusion de la vi l le de Tours

Jury Président de jury : Monsieur le Professeur Emmanuel RUSCH Membres du jury : Madame le Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWYCK Monsieur le Professeur Alain CHANTEPIE Madame le Docteur Vanessa MICHEL Monsieur le Docteur Jean ROBERT

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Profil d’accès aux soins de premier recours des personnes en situation de grande exclusion de la vil le de Tours. CONTEXTE L'exclusion est un processus complexe économique, social et médical. Les sans-domicile font partie des patients ayant les plus mauvais indicateurs de santé parmi les précaires, notamment en terme de prévalence des pathologies psychiatriques. Les principaux freins identifiés pour consulter un médecin de premier recours sont l’obstacle linguistique et le coût du soin. Comment s’organise le recours aux soins primaires des personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours ne présentant pas de barrière de la langue et bénéficiant d’une couverture sociale ? METHODE Une étude qualitative inductive a été réalisée par la méthode des entretiens semi-structurés. Les entretiens individuels ont été réalisés dans des lieux de restauration, d’hygiène et d’accueil de la ville de Tours. RESULTATS Le recours aux soins des personnes en situation d’exclusion présentait des particularités. Bien qu’ils aient fait appel à un médecin généraliste, parfois régulièrement, leur parcours de soins était semé d’obstacles. Ces derniers pouvaient rapidement interrompre la prise en charge et amener à consulter dans le milieu associatif. Des tierces personnes, dont les travailleurs sociaux, jouaient un rôle clef d’aidants dans l’accès aux soins. Des structures de soins associatives spécifiques répondaient à la nécessaire prise en charge globale. CONCLUSION Les médecins généralistes ont un rôle clef pour améliorer le recours aux soins des personnes en situation d’exclusion. Ils doivent comprendre les obstacles spécifiques de cette population afin d’y répondre de manière adaptée et ainsi devenir des aidants. Cette prise en charge doit s’organiser grâce à un partenariat médico-psycho-social. Mots clés :

- Précarité - Exclusion sociale - Sans-domicile - Recours aux soins - Médecine générale

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Access profile to primary care for people in social exclusion in the city of Tours. CONTEXT Social exclusion is a complex economic, social and medical process. Homeless people are part of the patients with the worse health indicators among precarious people, particularly in terms of the prevalence of psychiatric disorders. Language and cost of care are the main obstacles to visit a primary care general practitioner. How is organized the access to primary care for people living in social exclusion in the city of Tours, having no language barrier and benefiting from social protection? METHOD An inductive qualitative study was conducted with the method of semi-structured interviews. Individual interviews were conducted on dining, hygiene and hospitality sites of the city of Tours. RESULT The access to care for people suffering from exclusion presented particularities. Although they visited a general practitioner, in some cases regularly, many obstacles stood in their way. For various reasons, they would turn to medical associations instead of continuing to follow up with their generalist practitioner. Some third parties, including social workers, played a key role in assisting access to care. Specific associative medical structures were a response to the necessary global care. CONCLUSION General practitioners have a key role in improving the access care for people in situation of social exclusion. They must understand the specific obstacles of this population in order to respond appropriately and become more helpful people. This care must be organized by a medico-psycho-social partnership. Keywords :

- Precarity - Social exclusion - Homeless - Access to care - General medicine

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Mes sincères remerciements s’adressent Au Professeur Emmanuel RUSCH, Vous me faites l’honneur de présider cette thèse. Veuillez trouver dans ce travail l’expression de mon profond respect. Au Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWYCZ, Sensible à l’honneur que vous m’accordez en acceptant de juger ce travail, veuillez trouver ici l’assurance de mes remerciements les plus sincères et l’expression de ma profonde reconnaissance. Au Professeur Alain CHANTEPIE, Vous avez accepté de juger ce travail, veuillez recevoir mes sincères remerciements et l’expression de toute ma reconnaissance.

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Au Docteur Vanessa MICHEL, Lors de mon stage ambulatoire au cabinet médical du CASOUS, j’ai eu la chance et le privilège de t’avoir comme maître de stage. Ton humanité, ton engagement, ta curiosité m’ont beaucoup touché. Je te remercie grandement d’avoir accepté de diriger ce travail de thèse, de m’avoir accompagné lors de cette étape marquante. Ce fut une joyeuse et laborieuse expérience. Ton exigence pour une médecine engagée et de qualité est pour moi un modèle. Au Docteur Jean ROBERT, Depuis les séminaires du DUMG à la co-direction de ce travail, en passant par les groupes de pratiques, tes conseils avisés, justes et précieux m’ont accompagné dans ma formation de médecine générale. Pour ton soutien, ta disponibilité et tes recommandations pour la réalisation de cette thèse, reçois mes remerciements les plus sincères et ma respectueuse considération.

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Un grand merci,

! A Manon, mon aimée, qui m’a aidé (et aussi supporté) tout au long de ce travail et partage ma vie.

! A mes parents, qui m’ont transmis (un peu) une rigueur scientifique, une recherche de pertinence sociale, une compréhension psychologique, mais aussi un regard critique politique.

! A ma sœur Mirabelle, dont le crin-crin magique s’affranchit des frontières terrestres et affectives.

! A ma sœur Dany, qui me faisait rêver enfant avec ses combats politiques et médicaux et a fait naître pour moi cette vocation du soin.

! A mes amis Toulousains ou d’ailleurs, chers à mon cœur : Macha qui seule connaît la masse volumique du Nutella, Manu qui m’a coaché tout au long de ce travail (ou a essayé), Isa dont les talents de réalisatrice n’attendent qu’à s’exprimer derechef, Jojelle arrosée au Jurançon qui niche au cœur de la ville rose, Marie parce que tout est si plus mieux en Suisse, So qui détient le secret de l’Aligot , Fred la marmotte qui sirote sur son cata imaginaire, Sarah jeune mariée, toujours souriante et pleine de sensibilité, Hao et Nannie qui se préparent au grand saut, Aurelien et son Kamoulox, Fabio qu’on attend toujours derechef au Printemps, Marion/Manon…

! A mes ex-colocs berruyers : AnneMa, l’âme de la coloc, nouvelle expatriée à Mehun, Damien pour ta traduction et la promesse de balades sauvages en forêt de Troncay, Amandine et Fabien (+ Titouan…) qui nous ont apporté un peu d’accent du Sud dans notre plat pays berruyer.

! Ainsi qu’à Thierry et Marie-Laure (des beaux-parents, finalement, c’est pas si pire) , Virginie, Ben, Maxime, Sandra, Gaby…

! A mes co-internes Nico « le Bigorno fotographe », Altéa et David, Delphine…

! A mes différents professeurs et maîtres de stage, dont Docteur Delcher, Docteur Steiger, Docteur Amos-Djoro, Docteur Baland, Docteur Riviere, Docteur Hubert, Docteur Jan…

! Et bien sûr au équipes du CASOUS, à Antoine, aux équipes des Haltes et de la Nuitée.

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9 Faculté de Médecine – 10, boulevard Tonnellé – BP 3223 – 37032 TOURS Cedex 1 – Tél : 02.47.36.66.00 – www.med.univ-tours.fr 1

25 février 2013

UNIVERSITE FRANCOIS RABELAIS FFAACCUULLTTEE DDEE MMEEDDEECCIINNEE DDEE TTOOUURRSS

DOYEN Professeur Dominique PERROTIN

VICE-DOYEN

Professeur Daniel ALISON

ASSESSEURS Professeur Daniel ALISON, Moyens

Professeur Christian ANDRES, Recherche Professeur Christian BINET, Formation Médicale Continue

Professeur Laurent BRUNEREAU, Pédagogie Professeur Patrice DIOT, Recherche clinique

SECRETAIRE GENERALE

Madame Fanny BOBLETER

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DOYENS HONORAIRES Professeur Emile ARON (†) – 1962-1966 Directeur de l’Ecole de Médecine - 1947-1962

Professeur Georges DESBUQUOIS (†)- 1966-1972 Professeur André GOUAZÉ - 1972-1994

Professeur Jean-Claude ROLLAND – 1994-2004

PROFESSEURS EMERITES

Professeur Alain AUTRET Professeur Jean-Claude BESNARD

Professeur Patrick CHOUTET Professeur Guy GINIES

Professeur Olivier LE FLOCH Professeur Chantal MAURAGE

Professeur Léandre POURCELOT Professeur Michel ROBERT

Professeur Jean-Claude ROLLAND

PROFESSEURS HONORAIRES

MM. Ph. ANTHONIOZ - A. AUDURIER – Ph. BAGROS - G. BALLON – P.BARDOS - J. BARSOTTI A. BENATRE - Ch. BERGER –J. BRIZON - Mme M. BROCHIER - Ph. BURDIN - L. CASTELLANI

J.P. FAUCHIER - B. GRENIER – A. GOUAZE – M. JAN –P. JOBARD - J.-P. LAMAGNERE - F. LAMISSE – J. LANSAC – J. LAUGIER - G. LELORD - G. LEROY - Y. LHUINTRE - M. MAILLET - Mlle C. MERCIER - E/H.

METMAN – J. MOLINE - Cl. MORAINE - H. MOURAY - J.P. MUH - J. MURAT - Mme T. PLANIOL - Ph. RAYNAUD – JC. ROLLAND – Ch. ROSSAZZA - Ph. ROULEAU - A. SAINDELLE - J.J. SANTINI - D.

SAUVAGE - M.J. THARANNE – J. THOUVENOT - B. TOUMIEUX - J. WEILL.

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Faculté de Médecine – 10, boulevard Tonnellé – BP 3223 – 37032 TOURS Cedex 1 – Tél : 02.47.36.66.00 – www.med.univ-tours.fr 2

PROFESSEURS DES UNIVERSITES - PRATICIENS HOSPITALIERS MM. ALISON Daniel Radiologie et Imagerie médicale ANDRES Christian Biochimie et Biologie moléculaire ANGOULVANT Denis Cardiologie ARBEILLE Philippe Biophysique et Médecine nucléaire AUPART Michel Chirurgie thoracique et cardiovasculaire BABUTY Dominique Cardiologie Mme BARILLOT Isabelle Cancérologie ; Radiothérapie M. BARON Christophe Immunologie Mme BARTHELEMY Catherine Pédopsychiatrie MM. BAULIEU Jean-Louis Biophysique et Médecine nucléaire BERNARD Louis Maladies infectieuses ; maladies tropicales BEUTTER Patrice Oto-Rhino-Laryngologie BINET Christian Hématologie ; Transfusion BODY Gilles Gynécologie et Obstétrique BONNARD Christian Chirurgie infantile BONNET Pierre Physiologie Mme BONNET-BRILHAULT Frédérique Physiologie MM. BOUGNOUX Philippe Cancérologie ; Radiothérapie BRILHAULT Jean Chirurgie orthopédique et traumatologique BRUNEREAU Laurent Radiologie et Imagerie médicale BRUYERE Franck Urologie BUCHLER Matthias Néphrologie CALAIS Gilles Cancérologie ; Radiothérapie CAMUS Vincent Psychiatrie d’adultes CHANDENIER Jacques Parasitologie et Mycologie CHANTEPIE Alain Pédiatrie COLOMBAT Philippe Hématologie ; Transfusion CONSTANS Thierry Médecine interne ; Gériatrie et Biologie du vieillissement CORCIA Philippe Neurologie COSNAY Pierre Cardiologie COTTIER Jean-Philippe Radiologie et Imagerie médicale COUET Charles Nutrition DANQUECHIN DORVAL Etienne Gastroentérologie ; Hépatologie DE LA LANDE DE CALAN Loïc Chirurgie digestive DE TOFFOL Bertrand Neurologie DEQUIN Pierre-François Thérapeutique ; médecine d’urgence DESTRIEUX Christophe Anatomie DIOT Patrice Pneumologie DU BOUEXIC de PINIEUX Gonzague Anatomie & Cytologie pathologiques DUMONT Pascal Chirurgie thoracique et cardiovasculaire FAUCHIER Laurent Cardiologie FAVARD Luc Chirurgie orthopédique et traumatologique FOUQUET Bernard Médecine physique et de Réadaptation FRANCOIS Patrick Neurochirurgie FUSCIARDI Jacques Anesthésiologie et Réanimation chirurgicale ; médecine d’urgence GAILLARD Philippe Psychiatrie d'Adultes GOGA Dominique Chirurgie maxillo-faciale et Stomatologie GOUDEAU Alain Bactériologie -Virologie ; Hygiène hospitalière GOUPILLE Philippe Rhumatologie GRUEL Yves Hématologie ; Transfusion GUILMOT Jean-Louis Chirurgie vasculaire ; Médecine vasculaire GUYETANT Serge Anatomie et Cytologie pathologiques HAILLOT Olivier Urologie HALIMI Jean-Michel Thérapeutique ; médecine d’urgence (Néphrologie et Immunologie clinique) HERAULT Olivier Hématologie ; transfusion HERBRETEAU Denis Radiologie et Imagerie médicale Mme HOMMET Caroline Médecine interne, Gériatrie et Biologie du vieillissement MM. HUTEN Noël Chirurgie générale LABARTHE François Pédiatrie LAFFON Marc Anesthésiologie et Réanimation chirurgicale ; médecine d’urgence LARDY Hubert Chirurgie infantile LASFARGUES Gérard Médecine et Santé au Travail LEBRANCHU Yvon Immunologie LECOMTE Thierry Gastroentérologie ; hépatologie ; addictologie

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11 Faculté de Médecine – 10, boulevard Tonnellé – BP 3223 – 37032 TOURS Cedex 1 – Tél : 02.47.36.66.00 – www.med.univ-tours.fr 3

LEMARIE Etienne Pneumologie LESCANNE Emmanuel Oto-Rhino-Laryngologie LINASSIER Claude Cancérologie ; Radiothérapie LORETTE Gérard Dermato-Vénéréologie MACHET Laurent Dermato-Vénéréologie MAILLOT François Médecine Interne MARCHAND Michel Chirurgie thoracique et cardiovasculaire MARCHAND-ADAM Sylvain Pneumologie MARRET Henri Gynécologie et Obstétrique MEREGHETTI Laurent Bactériologie-Virologie ; Hygiène hospitalière MORINIERE Sylvain O.R.L. MULLEMAN Denis Rhumatologie PAGES Jean-Christophe Biochimie et biologie moléculaire PAINTAUD Gilles Pharmacologie fondamentale, Pharmacologie clinique PATAT Frédéric Biophysique et Médecine nucléaire PERROTIN Dominique Réanimation médicale ; médecine d’urgence PERROTIN Franck Gynécologie et Obstétrique PISELLA Pierre-Jean Ophtalmologie QUENTIN Roland Bactériologie-Virologie ; Hygiène hospitalière ROBIER Alain Oto-Rhino-Laryngologie ROINGEARD Philippe Biologie cellulaire ROSSET Philippe Chirurgie orthopédique et traumatologique ROYERE Dominique Biologie et Médecine du développement et de la Reproduction RUSCH Emmanuel Epidémiologie, Economie de la Santé et Prévention SALAME Ephrem Chirurgie digestive SALIBA Elie Biologie et Médecine du développement et de la Reproduction Mme SANTIAGO-RIBEIRO Maria Biophysique et Médecine Nucléaire MM. SIRINELLI Dominique Radiologie et Imagerie médicale THOMAS-CASTELNAU Pierre Pédiatrie Mme TOUTAIN Annick Génétique MM. VAILLANT Loïc Dermato-Vénéréologie VELUT Stéphane Anatomie WATIER Hervé Immunologie. PROFESSEUR DES UNIVERSITES DE MEDECINE GENERALE Mme LEHR-DRYLEWICZ Anne-Marie Médecine Générale PROFESSEURS ASSOCIES MM. HUAS Dominique Médecine Générale LEBEAU Jean-Pierre Médecine Générale MALLET Donatien Soins palliatifs POTIER Alain Médecine Générale MAITRES DE CONFERENCES DES UNIVERSITES - PRATICIENS HOSPITALIERS Mmes ANGOULVANT Theodora Pharmacologie fondamentale ; pharmacologie clinique : addictologie BAULIEU Françoise Biophysique et Médecine nucléaire M. BERTRAND Philippe Biostatistiques, Informatique médical et Technologies de Communication Mme BLANCHARD Emmanuelle Biologie cellulaire BLASCO Hélène Biochimie et biologie moléculaire MM. BOISSINOT Eric Physiologie DESOUBEAUX Guillaume Parasitologie et mycologie Mme DUFOUR Diane Biophysique et Médecine nucléaire M. EHRMANN Stephan Réanimation médicale Mmes FOUQUET-BERGEMER Anne-Marie Anatomie et Cytologie pathologiques GAUDY-GRAFFIN Catherine Bactériologie - Virologie ; Hygiène hospitalière GOUILLEUX Valérie Immunologie MM. GUERIF Fabrice Biologie et Médecine du développement et de la reproduction GYAN Emmanuel Hématologie, transfusion HOARAU Cyrille Immunologie HOURIOUX Christophe Biologie cellulaire Mmes LARTIGUE Marie-Frédérique Bactériologie-Virologie ; Hygiène hospitalière

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12 Faculté de Médecine – 10, boulevard Tonnellé – BP 3223 – 37032 TOURS Cedex 1 – Tél : 02.47.36.66.00 – www.med.univ-tours.fr 4

LE GUELLEC Chantal Pharmacologie fondamentale ; Pharmacologie clinique MACHET Marie-Christine Anatomie et Cytologie pathologiques MARUANI Annabel Dermatologie MM. PIVER Eric Biochimie et biologie moléculaire ROUMY Jérôme Biophysique et médecine nucléaire in vitro Mme SAINT-MARTIN Pauline Médecine légale et Droit de la santé M. TERNANT David Pharmacologie – toxicologie Mme VALENTIN-DOMELIER Anne-Sophie Bactériologie – virologie ; hygiène hospitalière M. VOURC’H Patrick Biochimie et Biologie moléculaire MAITRES DE CONFERENCES Mmes BOIRON Michèle Sciences du Médicament ESNARD Annick Biologie cellulaire MM. GIRAUDEAU Bruno Biostatistiques, Informatique médicale et Technologies de Communication LEMOINE Maël Philosophie Mme MONJAUZE Cécile Sciences du langage - Orthophonie M. PATIENT Romuald Biologie cellulaire MAITRE DE CONFERENCES ASSOCIE Mmes HUAS Caroline Médecine Générale RENOUX-JACQUET Cécile Médecine Générale M. ROBERT Jean Médecine Générale CHERCHEURS C.N.R.S. – INSERM M. BOUAKAZ Ayache Chargé de Recherche INSERM – UMR CNRS-INSERM 930 Mmes BRUNEAU Nicole Chargée de Recherche INSERM – UMR CNRS-INSERM 930 CHALON Sylvie Directeur de Recherche INSERM – UMR CNRS-INSERM 930 MM. COURTY Yves Chargé de Recherche CNRS – U 618 GAUDRAY Patrick Directeur de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292 GOUILLEUX Fabrice Directeur de Recherche CNRS – UMR CNRS 7292 Mmes GOMOT Marie Chargée de Recherche INSERM – UMR CNRS-INSERM 930 HEUZE-VOURCH Nathalie Chargée de Recherche INSERM – U 618 MM. LAUMONNIER Frédéric Chargé de Recherche INSERM - UMR CNRS-INSERM 930 LE PAPE Alain Directeur de Recherche CNRS – U 618 Mmes MARTINEAU Joëlle Chargée de Recherche INSERM – UMR CNRS-INSERM 930 POULIN Ghislaine Chargée de Recherche CNRS – UMR CNRS-INSERM 930 CHARGES D’ENSEIGNEMENT Pour l’Ecole d’Orthophonie Mme DELORE Claire Orthophoniste MM. GOUIN Jean-Marie Praticien Hospitalier MONDON Karl Praticien Hospitalier Mme PERRIER Danièle Orthophoniste Pour l’Ecole d’Orthoptie Mme LALA Emmanuelle Praticien Hospitalier M. MAJZOUB Samuel Praticien Hospitalier Pour l’Ethique Médicale Mme BIRMELE Béatrice Praticien Hospitalier

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SERMENT D’HIPPOCRATE

En présence des Maîtres de cette Faculté,

de mes chers condisciples et selon la tradition d’Hippocrate,

je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’exercice de la Médecine.

Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent,

et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail.

Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira les secrets qui me seront confiés et mon état ne

servira pas à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime.

Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres,

je rendrai à leurs enfants l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.

Que les hommes m’accordent leur estime

si je suis fidèle à mes promesses. Que je sois couvert d’opprobre

et méprisé de mes confrères si j’y manque.

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Table des matières - A. Introduction …………………………………………………………………… - B. Matériel et méthode …………………………………………………………..

1. Définition de la population étudiée 2. Les lieux de réalisation de cette étude 3. Méthode utilisée 4. Guide d’entretien

- C. Résultats ………………………………………………………………………...

1. Structures de soins 2. Couverture sociale et bonne maîtrise des droits 3. Motifs de consultations, place du suivi régulier auprès des médecins généralistes 4. Difficultés perçues pour consulter dans un cabinet de médecine générale 5. Identification des aidants ou personnes orientant vers le soin 6. Avantage des structures dédiées aux populations précaires

- D. Discussion ………………………………………………………………………

1/ Justification de la méthode 1a - Choix de la méthode 1b - Choix de la population étudiée 1c – Echantillon représentatif de la population étudiée 1d - Choix des lieux de réalisation de l’étude 1e – Elaboration de la grille d’entretiens

2/ Limites de l’étude 2a - Conditions de réalisation de l’étude 2b - Biais de recrutement 2c – Limites d’interprétation 2d - Difficultés rencontrées lors des entretiens

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3/ Discussion des résultats obtenus

3a - Un recours aux soins primaires en médecine générale, mais… 3b - Des motifs de consultation au coup par coup 3c - Des obstacles préoccupants et des renoncements à l’accès aux soins. 3d - Le rôle important de l’aidant et ses limites 3e - Des structures spécifiques de médecine générale favorisant l’accès aux soins 3f - Place des médecins généralistes libéraux et autres médecins de premier recours 3g – Regard politique

- E. Conclusion ………………………………………………………………………

Annexe 1 : Abréviations utilisées

Annexe 2 : Trame d’entretien

Annexe 3 : Un exemple de retranscription des entretiens

Annexe 4 : Bibliographie

Annexe 5 : Fiche simplifiée explicative à l’intention des travailleurs sociaux

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A. INTRODUCTION Les personnes en situation de grande précarité et d’exclusion présentent souvent une série de ruptures sur le plan économique, social et médical. Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) en 1998 (1) puis l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale (ONPES) définissent les concepts de pauvreté, précarité et exclusion (2). La pauvreté correspond à une insuffisance de revenus qui restreint l’accès à un niveau de vie considéré comme un minimum acceptable (2). La précarité se définit comme un état de fragil isation, d’instabilité sociale. Elle est le résultat d’un enchaînement d’événements et d’expériences qui débouchent sur des situations de fragilisation économique, sociale et familiale (1). Le prêtre J. Wrezinski, fondateur d’ATD Quart Monde, la caractérise comme « l’absence d’une ou plusieurs des sécurités, notamment celle de l’emploi, permettant aux personnes et familles d’assumer leurs obligations professionnelles, familiales et sociales et de jouir de leurs droits fondamentaux. Elle conduit à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle devient persistante, qu’elle compromet les chances de réassumer ses responsabilités et de reconquérir ses droits par soi-même, dans un avenir prévisible » (3). L’analyse de la précarité est multifactorielle et par conséquent difficile (4). A cette fin, le score EPICES a été construit en France par le Centre Technique d’Appui et de Formation des Centres d’examens de santé (Cetaf) à Saint Etienne (4). La notion d’exclusion fait référence à l’ensemble des mécanismes de rupture, sur le plan des relations sociales mais également sur le plan symbolique, comme le décrit le sociologue Serge Paugam. Il définit la notion de "disqualification sociale" comme le processus par lequel un pauvre acquiert et intériorise le statut de pauvre (5). L'exclusion est à la fois un processus et un état, consacrant un défaut d’intégration, avec trois grandes dimensions : La sphère économique, insuffisance chronique ou répétée des ressources,

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La non reconnaissance, ou le non usage des droits sociaux, mais aussi des droits civiques et des droits politiques. Une forme aiguë de relégation sociale que la crise économique et les situations de non-droit engendrent chez les individus, familles ou groupes sociaux. (1, 2) Cette exclusion succède à la précarité lors d’une énième rupture. Alexandre Vexliard, psycho-sociologue, décrit déjà en 1950 les 4 phases de l’exclusion : phase d’agression (révolte, revendication), de dépression (le doute puis la dépréciation de soi s’installent), de fixation (conviction d’être un exclu à vie) et enfin d’abandon, souvent favorisé par une addiction (6). Une consommation abusive d’alcool est fréquemment retrouvée (7, 8, 9, 10). Dans la grande exclusion, l’individu ne dispose plus des quatre codes essentiels que sont le corps, le temps, l’espace et le rapport à autrui (8, 9) : - L’absence du corps se manifeste par l’incapacité d’intégrer, de comprendre la sensation de douleur et le danger dont elle est le signe ou l’alerte. Muette en l’absence de tout langage, cette souffrance participe de la dépression. - La personne exclue est emprisonnée dans un ensemble de séquences qui se répètent, comme expulsée du temps. Ils n’ont pas non plus de représentation spatiale du monde, de la ville. - La constitution d’un territoire est le dernier rempart contre l’abandon le plus total. Il se réduit finalement à un carton. - L’ouverture sur l’altérité ne peut être possible en l’absence de tout sentiment de soi. Les grands exclus sont sans-domicile, sans-abri ou parfois en hébergement amical. En rupture sociale, ils ne peuvent intégrer une démarche de réinsertion comme le proposent les Centres d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS). L’INSEE définit comme « Sans-domicile » les individus qui passent régulièrement la nuit dans un lieu non prévu pour l’habitation ou dans un service d’hébergement ; et « Sans-abri » ceux des sans-domicile qui dormaient habituellement dans un lieu non prévu pour l’habitation (11).

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« Quand serons-nous prêts à envisager les ombres de nos rues comme des blessés psychiques qu’il est du devoir de la société de soigner ? » s’interroge le Docteur Emmanuelli (8). Si la notion de précarité est en lien avec celle de fragil isation économique et sociale, la grande exclusion est indissociable du concept de rupture du lien social, avec une marginalisation (5) et une réversibil ité très difficile. La notion de grande exclusion est plus multifactorielle que celle de précarité, comprenant des notions économiques, sociales, juridiques, médicales, avec un plan symbolique très marqué (5, 7, 8, 9, 11, 12). L’état de santé des sans-domicile est très dégradé (7,12,13,14). Ils cumulent toutes les précarités et subissent l’influence du mal-logement ou du non-logement sur leur santé. I ls présentent des pathologies chroniques qui nécessitent une prise en charge régulière. Pourtant ils souffrent d’un déficit majeur de recours aux soins. Dans l’étude SAMENTA menée à Paris par l’Observatoire du Samu Social de Paris (7), plus d’une personne sur dix sans domicile (11,6%) considère son état de santé général comme mauvais ou très mauvais. Plus de la moitié (52,8%) de cette population déclare souffrir d’au moins une maladie chronique (15), et 75,3% nécessitent un suivi ou un traitement (15). Un tiers des patients sans-domicile de Paris (7) souffre de troubles psychiatriques sévères (troubles psychotiques, troubles de l’humeur, troubles anxieux). 3 hommes sur 10 souffrent d’une dépendance à l’alcool. Les personnes en situation d’exclusion renoncent souvent à se soigner (7, 12, 13, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22), surtout si les conditions de logement sont altérées (sans-domicile, sans-abri). Face à des problèmes de survie quotidienne, la santé n’est pas leur première préoccupation lorsqu’il faut trouver un endroit où dormir, où manger, où se laver (13). Le risque relatif de non-recours aux soins pour les personnes sans-domicile

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par rapport aux non-précaires est de 5,21 chez les hommes et 9,54 chez les femmes selon une étude publiée en 2005 dans les Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire (BEH), une des publications de l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) (12). Plus de 18 % des personnes interrogées par le Samu Social de Paris dans l’enquête SAMENTA (7) n’ont pas consulté de médecin depuis plus d’un an. Parmi elles, plus de la moitié n’a pas consulté depuis plus de deux ans. Les personnes consultent souvent lorsque la douleur est intense ou que le problème de santé devient handicapant (43% en 2012) (15). Devant la complexité des situations, les médecins ont peut-être tendance à traiter la première demande, ils n’explorent pas l’état de santé global de ces patients. Les causes identifiées de renoncement aux soins sont multiples car l'exclusion est un processus complexe qui s’accompagne d’un non usage des droits sanitaires et sociaux. Ce déni des droits entraîne un retard ou une absence d’accès aux soins et des difficultés à consulter un médecin de premier recours en cas de nécessité. 3 patients sur 4 (77%) consultant dans les dispensaires de Médecins du Monde relèvent d’un dispositif de couverture maladie, mais ils ne sont que 12,3 % à disposer de droits ouverts en 2012 (15). Les freins identifiés à l’ouverture des droits sont principalement la méconnaissance des droits (20), les difficultés administratives avec parfois des pratiques pouvant être considérées comme abusives (13, 15, 20, 23) ou l’obstacle financier représenté par le droit d’entrée à l’Aide Médicale d’Etat (AME) (22). Un obstacle persistant reste le coût des dépenses de santé, et pas seulement quand les patients ont un défaut de couverture sociale. Les dépassements d’honoraires, le déremboursement de médicaments, la prise en charge parfois incomplète de la part complémentaire par les mutuelles, le forfait hospitalier, les franchises médicales, l’avance de frais sont autant de freins pour des personnes disposant pourtant d’une couverture complète (18, 20, 24).

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La loi du 27 juillet 1999, portant création d’une couverture maladie universelle (CMU), a mis en place la CMU de base, la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et l’AME qui, sous certaines conditions, permet la prise en charge de la part obligatoire et la part complémentaire des dépenses individuelles de santé avec dispense d’avance des frais (25). Cette loi a été votée en vue de lutter contre l’obstacle financier d’accès aux soins. Cependant, malgré cette loi, de nombreux patients bénéficiaires de la CMU déclarent avoir déjà renoncés au soins pour des raisons financières (17, 21, 22, 23). Le Comité National de Lutte contre la pauvreté et l’Exclusion sociale (CNLE) dans son avis de juillet 2011 (22) rappelle que de nombreux professionnels de santé persistent dans le refus de soins (13, 18, 22). Pour les patients sans couverture sociale, l’accès aux soins est encore plus limité. La Permanence d’Accès aux Soins de Santé (PASS) (26, 27, 28) de l’hôpital public peut prendre en charge des soins urgents, mais souvent les patients se tournent vers des structures proposant des soins gratuits. Pourtant, celles-ci peuvent entretenir les mécanismes d’une exclusion « douce » (20). Il est donc primordial de privilégier la mise en place d’une couverture sociale dès que possible. L’aspect financier n’est pas le seul obstacle à la prise en charge médicale. L’amélioration de la couverture sociale (CMU, CMU-C, AME et ACS (Aide à la Complémentaire Santé)) n’a en effet pas permis de surmonter les obstacles de l’accès aux soins (17) et de nombreux patients disposant de la CMU-C renoncent encore à l’accès aux soins primaires. La barrière de la langue est également un obstacle majeur car les difficultés linguistiques se trouvent à toutes les étapes du parcours pour les exilés qui ne parlent ni français ni anglais. La barrière linguistique présentait un obstacle chez plus de 25% des patients consultant dans les dispensaires de Médecins du Monde en 2011(13). Lors d’une étude de l’INSEE (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques), sur 6 361 personnes sans-domicile interrogées, 12 % n’ont pu

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répondre du fait de problèmes de compréhension linguistique. (11) Les systèmes de traduction médicale sont peu développés ou coûteux et la barrière de la langue reste l’obstacle principal des personnes présentant des difficultés à s’exprimer couramment en français. Les autres freins à l’accès aux soins sont la peur d’une arrestation ou dénonciation pour les personnes en situations irrégulières (13), le manque de temps, les transports, les délais de rendez-vous trop importants, les soins jugés non-utiles, ou encore la peur du résultat (21). Parmi les patients disposant de la CMU, un tiers déclare renoncer aux soins pour des problèmes de relation avec le soignant (pas d’écoute, humiliation, manque de respect, non-compréhension) (19). Très souvent évoqués, les obstacles culturels à l’accès aux soins ne sont pas si importants pour les migrants ou les étrangers (20). Le non-recours aux droits renvoie ainsi fortement à l’isolement des personnes et à la faiblesse de leurs supports relationnels. Les principaux freins identifiés à l’accès aux soins des personnes en situation de grande exclusion sont la barrière de la langue et le coût des dépenses de santé. Pourtant certains de ces patients, sans difficulté de communication et bénéficiant d’une couverture sociale, ne consultent pas dans le système de soins primaires libéral habituel et se présentent dans des structures de soins associatives. Lors de mon internat, j'ai eu l’opportunité d'effectuer un stage au cabinet médical du CASOUS (Centre d'Accueil de Santé et d'Orientation pour l'Urgence Sociale), de l’Entraid'Ouvrière, association proposant des consultations de premier recours aux personnes en situation de grande exclusion. Certains patients consultant au CASOUS bénéficiaient d’une couverture sociale et, à ce titre, auraient pu consulter dans le droit commun, en médecine générale libérale. Cette problématique a suscité mon intérêt. Le droit commun est défini par le dictionnaire Larousse comme l’ensemble des règles juridiques qui s'appliquent à un rapport de droit donné en l'absence

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de dispositions législatives ou réglementaires impératives et de stipulations particulières des parties (29). Bien qu’elles aient un accès possible dans le « droit commun » grâce à une couverture sociale prenant en charge tout ou une grande partie des soins, les personnes ne présentant pas d’obstacle linguistique en situation de grande exclusion de la vil le de Tours ont un profil d’accès aux soins de premier recours présentant des particularités. . Comment s’organise le recours aux soins primaires des personnes en situation de grande exclusion de la vil le de Tours ne présentant pas de barrière de la langue et bénéficiant d’une couverture sociale ?

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B. Matériel et méthodes 1. Définition de la population étudiée La population étudiée était constituée par les personnes en situation de grande exclusion, comme personnes en hébergement d’urgence (foyer d’urgence) ou à la rue, les personnes en hébergement amical ou familial. Cette population présentait en effet de multiples fractures sur les plan économique, familial et social et ne comprenait ni ne savait utiliser que partiellement les codes qui constituent les interactions sociales ainsi que les droits dont elle aurait pu être bénéficiaire. Ainsi les personnes concernées avaient un rapport au corps et au soin difficile, ce qui se traduisait par de très mauvais indicateurs de santé (7, 12, 13, 14). L’étude portait sur une population de personnes majeures en situation de grande exclusion de la ville de Tours ne présentant pas d’obstacle linguistique et disposant d’une couverture sociale complète (CMU, AME ou RG et complémentaire santé). Cependant, l’usage des droits sociaux, et notamment l’affiliation à la CMU, faisait parfois défaut avec des périodes de rupture de droit. Ainsi, les personnes ayant eu une couverture sociale complète dans un passé récent pourront être incluses. L’interrogatoire s’est alors intéressé sur leur parcours de soins antérieur. 2. Les lieux de réalisation de cette étude Les lieux de restauration étaient les plus pertinents pour s’adresser aux personnes en situation de grande exclusion, dont les sans-domicile et sans-abri (30). Les lieux de vie et d’hébergement peuvent être une alternative (5, 30). A Tours, au moment de la réalisation de l’étude, les Haltes du matin et de jour proposaient un repas le matin et le midi, en plus d’activités sociales ou de vie quotidienne. Cependant l’existence d’une Halte pour femme tenue par le Secours Catholique expliquait une prédominance masculine dans les autres Haltes. La Nuitée était un foyer pour femmes, leur offrant la possibilité d’une

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restauration et d’un hébergement. Pour accéder à la population en situation de grande exclusion, les lieux de vie et de restauration qu’étaient les Haltes du matin et de jour et le foyer pour femmes « La Nuitée » paraissaient donc les plus pertinents. 3. Méthode utilisée La méthode qualitative semblait la plus appropriée (31) pour répondre à la problématique posée. L’étude a été réalisée par la méthode des entretiens semi-structurés, réalisés en juillet 2012. Les professionnels de ces lieux de vie, de restauration et d’hébergement ont été informés du projet par écrit, grâce à une fiche simplifiée explicative (cf. annexe 5) et par oral lors des rencontres individuelles ou des réunions d’équipe selon les structures. Leur accueil, leur disponibilité et leurs compétences ont permis et favorisé les entretiens, d’une part grâce à leur information auprès du public accueilli et, d’autre part, pour le recrutement des personnes interrogées selon les critères préétablis. Les entretiens ont été réalisés dans les bureaux des Haltes ou dans les chambres des résidantes du foyer pour femmes, pour conserver la discrétion et le secret médical. Les entretiens étaient individuels, enregistrés, puis retranscrits intégralement en respectant l’anonymat des personnes interrogées ou citées. Selon la méthode inductive pure, après retranscription des entretiens, les données obtenues ont été analysées selon un codage descriptif, puis thématique, et enfin matriciel. Les entretiens ont été réalisés jusqu’à saturation des données. Le codage a été multiple sur le premier entretien. 4. Guide d’entretien (cf. annexe 2) Le guide d'entretien a été élaboré à partir d'une revue de littérature sur l'accès aux soins de patients en situation d'exclusion. Les participants à ces

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entretiens ont été informés du sujet de l’étude, et de la confidentialité du recueil et du traitement des données. Les réponses à des questions fermées autour de leur genre, âge, hébergement habituel, couverture sociale, nationalité, maîtrise de la langue française, ont permis de cibler la population requise et vérifier si l’échantillon était raisonné. Puis, par des questions ouvertes avec des relances et reformulations, les thèmes suivants ont été abordés : - accès aux soins antérieurs, afin de retracer leur parcours médical, étudier rétrospectivement le mode de recours aux soins selon les étapes des différents parcours individuels… - leviers d’accès aux soins pour préciser si les personnes interrogées ont identifié un mode de recours aux soins en cas de nécessité, des personnes ressources… - freins et obstacles à l’accès aux soins identifiés, - connaissance de leur statut vis-à-vis de leur système de protection sociale, de leurs droits.

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C. Résultats 19 entretiens ont été réalisés dans les Haltes du matin et de jour, ainsi qu’au foyer pour femmes Dolbeau, avec des durées allant de 9 à 33 minutes (18 minutes en moyenne). La population étudiée était constituée de 13 hommes et 6 femmes, avec un âge moyen de 42 ans (18 à 64 ans), 14 personnes de nationalité française et 5 de nationalité étrangère. Concernant la couverture sociale : - 13 personnes bénéficiaient de la CMU et de la CMU-C, - Une qui venait de déménager était en attente de transfert du dossier CMU entre les deux CPAM, - Deux étaient sans couverture sociale (l’une avec une CMU antérieure et qui n’a pas fait la demande d’AME, l’autre en attente du renouvellement de sa CMU), - Deux autres avaient une couverture non complète (RG+ALD), dont l’une avait déjà bénéficiée de la CMU. - Une dernière était couverte par un régime spécial (SNCF). Leur mode d’hébergement était principalement constitué par les foyers d’accueil temporaire (14 personnes), mais aussi parfois un hébergement amical (2 personnes) ou la rue (2 personnes). 1. Structures de soins Pour comprendre comment les personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours organisaient leur recours aux soins primaires, il était essentiel d’examiner la connaissance qu’ils avaient des différentes structures et le rôle spécifique qu’ils pouvaient attribuer à chacune d’entre-elles. L’hôpital public était un lieu bien identifié, que ce soit pour les urgences, l’orthogénie ou certains services d’hospitalisation pour les pathologies chroniques (cardiologie, psychiatrie, addictologie, pneumologie, endocrinologie…). Dans l’agglomération tourangelle, le service d’accueil d’urgence ainsi que la majorité des services de chirurgie se trouvaient dans

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l’hôpital Trousseau, à l’extérieur de la ville de Tours, alors que les services de médecine ou de gynécologie se situaient à l’hôpital Bretonneau, proche du centre ville de Tours. L’hôpital représentait un recours en cas d’urgence « la dernière fois que j’ai été à l’hôpital, c’était pour ma jambe (E1)» racontait une personne qui avait été victime d’un accident de la route. Le Service d’Accueil d’Urgence (SAU) était parfois considéré comme un lieu de consultation en premier recours (« si je suis pas bien, après je vais aux Urgences. (E3)», « Non, moi j’y suis allée comme ça, pour des douleurs. (E6)») mais le recours aux Urgences était aussi motivé par la gravité de la situation « le mal de dos que j’avais, je l’avais déjà eu et il s’avère que j’ai dû aller en urgence à Trousseau (E11)», « si ils (SAU) me voient juste parce que j’ai un lumbago, ils vont me dire pourquoi vous n’êtes pas allé voir le médecin ? (E11) », voire en dernier recours après une longue période sans soins « si vraiment il m’arrivait malheur, et ben, je me retrouverais aux Urgences, et puis voilà… (E7)». Les Urgences étaient parfois utilisées comme lieu d’entrée dans les soins : « De manière globale, j’étais en burn out ou en ras le bol donc ras le bol général sur ma situation personnelle assez compliquée (…) donc je sentais que j’étais à deux doigts de craquer et j’ai dit stop quoi.(…) De mon propre chef je suis allé, j’ai été sur Trousseau, j’ai dit voilà il se passe ça, ça, ça, faut que je voie un médecin dans les…dans les…dans les heures qui suivent quoi.(…) J’ai pu dire help, help me, aidez moi.(…) J’ai tendu la perche quoi, j’en avais besoin et j’avais besoin aussi de faire un break, une rupture et de repartir à zéro et de me débarrasser de l’addiction à l’alcool que je pouvais avoir depuis de nombreuses années (…) Là je vais sur mon septième mois d’abstinence (E15)». Elles étaient critiquées pour le délai de prise en charge « les Urgences en ce moment dans les hôpitaux, délai d’attente super long (E15) », mais présentaient l’avantage d’être pluridisciplinaires avec un accueil spécialisé en psychiatrie ou addictologie « J’ai vu un addictologue, du fait, du fait d’un passage aux Urgences à Trousseau (E15) ». L’hôpital était considéré comme un lieu de permanence des soins (« si y a pas, si faut que j’attende, ben je vais à l’hôpital. (E3) », « (Comment vous allez faire pour trouver un médecin ?) Honnêtement je sais pas, au pif

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comme ça le hasard (Silence) (…) je sais pas peut-être j’irai à l’hôpital, peut être euh… (E17) »). Mais de nombreuses autres structures étaient identifiées, publiques ou associatives : Protection Maternelle et Infantile (PMI), Centres de Soins d'Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA), Service d’Aide aux Toxicomanes (SATO), UCSA dans les prisons (Unité de consultations et de Soins Ambulatoires), Institut interRégional pour le Santé (IRSA), Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit (CDAG). La PMI était présentée comme un lieu de proximité « Parce qu’il y en a une (PMI) chez moi, et qu’il y en a partout. (E6)». Certaines structures associatives dédiées aux populations précaires comme le cabinet médical du CASOUS ou le CPO (Centre de soins « Porte Ouverte ») pouvaient être sollicitées en premier recours « je vais au CPO demander à celui là que je vois quand j’y vais de me donner son avis. (E5)») ; Ces structures pouvaient également servir lors de l’absence du médecin régulier : « Parce que Mr L (MT) était en congé, donc ça m’est arrivé d’aller consulter au CASOUS (E7) ». « Dans un premier temps, je vais au CASOUS ; et si le CASOUS, c’est pas disponible, je vais voir un médecin généraliste. (E3) » racontait ce patient de 64 ans, qui avait pourtant l’habitude d’un suivi régulier en médecine générale mais qui avait déménagé récemment et avait identifié le CASOUS comme sa structure de référence, même s’il disposait à présent d’une couverture maladie. Le réseau de soins disponible pour ces patients était riche, connu et utilisé, pourtant certaines personnes présentaient une méconnaissance du fonctionnement de ces structures. « Je reviens au secrétariat (à Bretonneau) et puis je demande les Urgences. (E3)» racontait ce patient de 64 ans qui habitait à Tours en hébergement d’urgence et pensait que le SAU était à l’hôpital Bretonneau.

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Le médecin de premier recours identifié était un médecin généraliste connu et parfois régulier. C’est avec un ton d’évidence que de nombreux patients, comme cet homme de 53 ans, répondaient « Ah ben, mon médecin, voilà… (E2) ». C’était également un recours en cas d’urgence « Donc je vais l’appeler, si c’est urgent je vais aller chez lui. (E10)». Parfois le médecin de premier recours était un autre médecin généraliste non régulier, soit « n’importe quel médecin », ou bien « un généraliste ». « Je suis pas allé voir mon médecin traitant, du coup, vu que j’étais plus près ici… (E11)» relatait cette jeune fille de 18 ans qui avait pourtant l’habitude de consulter son médecin traitant. Les médecins n’étaient pas interchangeables mais certaines contraintes amenaient parfois à consulter un autre praticien. Le recours aux soins était tardif et les patients avaient recours à différents procédés comme l’automédication « je me guéris moi-même des fois, je cueille les fruits euh je cueille les remèdes, je les cueille vite fait (E16) », la temporisation de la consultation, pour voir si ça passe « Je prends des Nuroflens (…) Ouais, c’est efficace, c’est soit je prends ça, soit je me prends une cuite et puis le lendemain ça va mieux (E13)», ou encore la prière « D’abord je prie en Dieu (elle rit doucement). (…) Ce n’est pas bon mais si tu es malade, faut que tu pries aussi. (E12) ». En conclusion, les personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours avaient, pour la plupart, une connaissance et un usage du système de soins disponible. Ils identifiaient le médecin généraliste comme médecin habituel de premier recours, et parfois s’adressaient à une structure associative. Ils avaient recours à d’autres médecins, d’autres structures associatives ou hospitalières en cas de nécessité ou d’absence de leur soignant habituel. La diversité des structures de soins utilisée était peut-être déjà une spécificité de cette population, mais force était de constater que leur recours aux soins était proche du droit commun. Mais comment faisaient-ils pour organiser ce recours ?

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2. Couverture sociale et bonne maîtrise des droits Selon les critères d’inclusions de ce travail, les patients interrogés avaient (ou avaient eu) une couverture sociale complète (principale et complémentaire). Cette condition à l’accès remboursé aux soins était évidemment fondamentale lorsque l’on rencontre des difficultés financières. Quelles perceptions avaient-ils de cette couverture sociale, et cela conditionnait-t-il leur mode d’accès aux soins ? Concernant le mode de couverture sociale, une grande partie des patients rencontrés bénéficiaient de la Couverture Médicale Universelle (CMU) et de la complémentaire santé (CMU-C) : « la CMUc, c’est ce que la CMU ou la mutuelle normale ne couvre pas. Ça couvre plus. (E6) ». La CMU était un dispositif pour les personnes en difficultés financières (« depuis que j’ai la CMU, je paye pas, c’est, cette méthode. Parce que c’est fait pour les gens qui ont les minima sociaux. (E5) », financée par la société, par solidarité nationale (« ça évite aux gens qui ont pas trop les moyens de payer pouvoir avoir des soins étant pris en compte par la société. (E5) ») et renouvelée annuellement (« ça dure qu’un an, après c’est renouvelé. (E13) »). D’autres étaient dispensés du ticket modérateur au titre des Affections Longue Durée (ALD) : « le 100%, parce que on a une maladie à vie et j’ai mon cœur qui est très fatigué (E2) ». Ils étaient donc pris en charge à 100% mais uniquement sur certaines pathologies « les 100% ça marche seulement pour la maladie du cœur (E2) ». L’ALD concernait les personnes avec des pathologies chroniques (« moi je suis en ALD. Hein, donc… Je suis une dépressive chronique (E7) »), et était demandée par le médecin « donc elle m’a fait prendre en charge à 100% (E3) ». La couverture sociale pouvait être conditionnée par la profession exercée précédemment, comme dans les métiers du rail : « Ben moi j’ai la caisse de prévoyance à la SNCF (…) Et j’ai la mutuelle. (E14) », ce qui permettait de bénéficier d’une couverture complète « La mutuelle des cheminots elle couvre tout, hein, 100%. (E14) » et d’une dispense d’avance de frais à la condition d’aller voir un médecin conventionné : « je les paye pas à condition que ce soit prescrit par une personne… un médecin SNCF conventionné (E14) ».

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Certains patients interrogés n’avaient plus de couverture médicale complète, comme ce patient de 64 ans, retraité et bénéficiant d’une ALD mais sans couverture complémentaire « Alors, en ce moment, j’ai un petit problème, au niveau complémentaire, parce que euh, donc moi je suis retraité, euh… Le problème, c’est que, bon j’ai eu plusieurs employeurs mais, là je suis en train de voir avec euh… mon organisme de retraite est à, euh, est la CMSA… pour voir si j’ai droit à la complémentaire CMU. (E3) », ou cette femme de 60 ans bénéficiant également d’une ALD sans couverture complémentaire « Ben, la Sécurité Sociale (…) Par contre, j’ai pas de complémentaire, non ; parce que je peux pas la payer… donc j’en ai pas. (E7) ». Enfin quelques patients n’avaient plus de couverture sociale lors des entretiens : cette femme déboutée de sa demande d’asile et ne bénéficiant donc plus de la CMU depuis quelques mois (« moi je suis sortie du CADA (Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile), à partir de là, depuis le mois de janvier jusqu’à présent, y a rien. (E8) »), ou cet homme de 40 ans, vivant en errance depuis 2 ans suite à une rupture sociale complexe et en cours de démarches pour demander une CMU : « Euh, avant j’étais bien pff, j’avais une Sécurité Sociale, une assurance vie, mutuelle et tout ça, là j’ai plus rien. (…) Là je suis en train de faire faire la CMU. (…) oui, oui j’avais, un an ou deux ans (murmures), oui, oui j’avais la mutuelle et tout, j’avais une Sécurité Sociale. (E17) ». La couverture sociale était un système de protection (« Pour moi c’est une protection voilà. (E17) »), avec un financement public (« C’est pris en charge par l’état. (…) au lieu que cela soit moi qui paye, c’est la couverture, la mutuelle, la couverture sociale. (E5) »), permettant un accès aux soins en cas de nécessité (« je puisse me faire soigner quand j’en ai besoin (E15) »), gratuit (« moi je n’ai pas l’argent pour avancer les soins (…) j’ai des soins gratuits. (E18) ») ou remboursés « j’ai avancé, j’ai donné 20 euros et j’ai été remboursé après (E3) ». Ce système de protection sociale permettait l’accès aux médecins (« quand tu as les problèmes de santé, que tu puisses voir le docteur pour qu’il puisse te donner des médicaments (E4) », « ça me permettra d’avoir un accès direct pour voir un médecin. (E17) »), aux médicaments (« la CMU, c’est une mutuelle qui me rembourse les médicaments (E6) », même si certains

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n’étaient pas remboursés (« certains médicaments que cela ne sera pas remboursée par la Sécurité Sociale. (E4) », aux soins dentaires (« là je viens de me refaire toutes mes dents, là, il m’a fait le haut et le bas, j’en ai eu pour 2500 euros, et c’est la Caisse Primaire qui paye. (E2) », aux spécialistes, aux prothèses ou orthèses comme les corrections optiques (« Me faire soigner (…) soigner les yeux (E6) ») ou les appareillages auditifs (« ils m’ont mis un app…, un truc-là ; et puis j’entends mieux maintenant. Et l’année prochaine, je peux en avoir une autre, et elle est gratuite. (E2) »), à des soins réguliers (« avoir un suivi régulier (E15) ») ou d’urgence (Par exemple, il m’arrive un accident sur la route, je suis transporté à l’hôpital (E5) »), accès à l’hôpital public, que cela aie été pour les Urgences, une hospitalisation (« l’hospitalisation, l’ambulance, c’est un 100 % (E14) ») ou une opération chirurgicale (« si je devais me faire opérer, avec ce que je gagne, je ne pourrais pas payer le séjour à l’hôpital et puis l’opération. (E5) »), le transport « l’hospitalisation, l’ambulance, c’est un 100 %. (E14) » … Si la signification et les fonctionnements des différents régimes de protection sociale semblaient clairs pour de nombreux usagers, certaines personnes pouvaient être freinées dans leur accès aux soins par des difficultés de compréhension sur leurs droits en couverture sociale, comme cet homme de 45 ans qui consultait à la CPO par peur d’avoir à payer son médecin traitant depuis qu’il bénéficie de la CMU (« (la dernière fois que vous êtes allé voir un médecin, c’était votre médecin traitant, Docteur Y, c’est ça ?) Voilà. Mais ça fait longtemps que je l’ai pas vu, je vous dis, maintenant quand je vais voir un médecin c’est à la CPO (…) Et je vais là parce que depuis que j’ai la CMU, moi ça m’évite de payer un médecin en ville. (E5) ») ; ou cet homme de 19 ans dans la même situation : « Je sais pas, parce que depuis j’ai la CMU je suis pas allé au médecin. (…) Non je croyais qu’on payait et qu’après on était remboursé totalement. (E19) ». 3. Motifs de consultations, place du suivi régulier auprès des médecins généralistes Avant de s’intéresser aux critères de choix et au suivi en médecine de premier recours, il semblait pertinent de s’interroger sur les motifs de

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recours aux soins identifiés par ces personnes en situation de grande exclusion. Quand faire appel à un médecin ? Les occasions de se tourner vers un médecin étaient bien évidemment multiples. Il pouvait s’agir de soins réguliers en lien avec une pathologie chronique nécessitant un renouvellement d’ordonnance : « tous les 3 mois je dois aller voir le docteur pour un renouvellement d’ordonnance (E3)». C’était une situation fréquente qui facilitait un suivi régulier pour ces patients. Parfois cette consultation était dans un cadre de suivi spécialisé « Le dernier rendez-vous médecin traitant c’était dans le cadre de ma sortie de sevrage alcoolique. (E15) » Pour de nombreux autres, le motif de consultation était « un problème de santé » parfois mal identifié ou difficile à verbaliser : « Si je suis malade, je ne me sens pas bien, je vais là-bas… (silence) (E9)», « si j’ai un problème je peux le voir parce que c’est lui-même qui me l’a dit : si j’ai un problème je peux venir le voir. (E16)» avec une notion de nécessité : « si je vais le voir c’est vraiment que j’en ai besoin (E19) ». Parfois le motif était plus précis, qu’il ait été une douleur « moi j’y suis allée comme ça, pour des douleurs. (E6)», un problème gynécologique comme « une fausse couche (E6)», de la fièvre (E18), un certificat « j’ai fait une formation d’éducateur sportif, (…) et dans le dossier il fallait absolument avoir un certificat médical (E16) », un problème infectieux « j’ai été voir un médecin pour…ici là parce que ici c’était rouge la poitrine (…) Et il paraît que j’avais des champignons (E13)», ou une raison médico-sociale « j’avais besoin d’un certificat comme quoi j’étais enceinte, pas un certificat de grossesse, elle m’a juste fait un certificat pour le 115. (E6) ». Certains avaient fait des bilans de santé « C’était un check, euh comment on dit déjà (…) check up. (E17) », événement peu fréquent mais marquant de médecine préventive « J’ai mon médecin traitant, depuis 2007 ; j’ai fait tous les examens… (E12)». L’accès au logement dans un cadre associatif était parfois l’occasion de faire un point sur sa santé « quand on veut un foyer on va le voir le médecin pour consulter si on va bien tout ça (E16)». Une seule patiente a parlé d’un frottis cervico-vaginal réalisé au CASOUS (E6).

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Par contre, consulter en dehors d’un problème de santé n’avait parfois pas d’intérêt : « à quoi ça sert d’aller voir un médecin alors que je suis pas malade, je suis en pleine santé ? (E19)». Régulièrement, les patients évoquaient des problèmes psychologiques ou psychiatriques, soit dans le cadre d’un suivi psychologique « j’ai tout le temps les yeux tourmentés, tourmentés, la tête tourmentée (…) chaque mercredi, vu 2 fois, parler avec moi… (E8)» ou d’addictologie « moi je suis un traitement Méthadone donc j’en vois (des médecins) toutes les semaines… (E6)» ; soit pour une urgence « j’étais en burn out ou en ras le bol (…) je sentais que j’étais à deux doigts de craquer et j’ai dit stop quoi. (E15) ». La dépendance et son sevrage n’étaient pas considérés comme une problématique de santé « C’était pas …une mauvaise santé, c’était par rapport à une addiction à l’héroïne (E1) ». Parfois le recours aux soins était considéré comme facile et fréquent : « je suis tout le temps la première à me plaindre quand j’ai quelque chose (…) dire, faut que j’aille voir un médecin, (…) pour telle ou telle raison. (E11)» exprimait cette jeune femme de 18 ans. Mais cette situation de recours fréquent était rare et de nombreux patients évoquaient un recours tardif aux soins, soit parce qu’ils ne se considéraient pas comme nécessitant une consultation médicale « Mais moi tant que j’ai pas de problème de santé, j’évite de fréquenter ce milieu là, quoi… (E5)», soit parce qu’ils attendaient « que ça passe (E19) » ou que le problème soit plus sérieux « Euh, alors, en général déjà j’y allais quand c’était pas possible de faire autrement (…) moi le médecin j’y vais vraiment quand je suis aux portes de la mort (E6)» racontait cette femme de 26 ans hébergée en foyer d’urgence, avec passé de toxicomanie. Cet homme de 40 ans, vivant en foyer d’urgence, résumait la problématique médicale de l’exclusion pour des personnes en grande difficulté sociale : « Hier j’avais tout (maison, famille, assurances…) euh parce que y’a…voilà, fallait me protéger, protéger mon bien mais quand on perd tout on s’en fout même de la santé (…) voilà le médecin ça fait plus partie de mes priorités finalement, une fois dans la rue c’est, le plus important quand on se lève c’est…c’est de pouvoir manger, de pouvoir euh… trouver de l’argent pour se bourrer la gueule, oublier un petit peu (…)on se forge un personnalité (…)

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quand on traverse des moments difficiles et tout ça donc y’a des priorités et donc pour moi par exemple je suis dans la démarche de trouver un logement, euh un travail alimentaire dans l’urgence, après le médecin et tout ça, il viendra après mais aujourd’hui je m’en fous (E17) ». En conclusion, les motifs de recours aux soins pouvaient être un suivi dans le cadre d’une pathologie chronique ou un problème de santé récent, parfois en lien avec un problème psychiatrique primitif ou réactionnel à la vie en situation d’exclusion. Dans certains cas, ce recours était tardif, après une période plus ou moins longue d’observation ou d’automédication. Le recours aux soins n’était pas considéré comme une priorité. La notion de bilan de santé, et donc de médecine préventive, revenait parfois, mais rarement spontanément de la part du patient. « Tant que j’ai pas de problèmes de santé, j’évite de fréquenter ce milieu là (E5)». Même si le recours au médecin de premier recours était tardif, de nombreuses personnes en situation de grande exclusion avaient identifié un médecin généraliste régulier, et la plupart pouvaient donner son nom et son adresse, d’autres l’identifiant par un nom de rue (« Monsieur…euh je sais plus comment il s’appelle. (…) je cherchais la rue quand comme par hasard je suis tombé sur lui et c’était lui-même. (E16)») ou dans le cadre d’une structure de soins dédiée aux populations précaires« j’ai un docteur attitré au CASOUS (E3)». Parfois, les patients n’avaient pas de médecin régulier, suite à un ou plusieurs déménagements « Parce que quand on déménage, c’est pas facile de…(…) J’ai pas encore trouvé un médecin fixe… (E6)», ou parfois parce qu’ils préféraient l’automédication « Non, en principe je me soigne tout seul. (E13) » Le suivi régulier en médecine générale était souvent ancien, surtout pour les personnes avec des pathologies chroniques « moi, j’ai un médecin traitant, hein, que je vois depuis … 15 ans (…) c’est lui qui me suis (E7)», avec une notion de fidélité « j’y vais tout le temps, je l’ai toujours gardé. (E14) ». Les patients qui avaient déménagé ou qui ne se soignaient plus avaient pourtant eu un suivi régulier « avant, autrefois, j’avais un docteur. (E3)». Parfois, le

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suivi était spécialisé « là je suis enceinte, et moi je suis diabétique, donc souvent moi je vais à l’hôpital, souvent. (E9)». A côté de ces personnes, d’autres n’avaient aucun suivi : « non ça fait depuis euh 10 ans que j’ai pas vu de médecins. (E13) » disait ce patient qui se soignait aux anti-inflammatoires et attendait que ça passe. « Ouh ça fait longtemps. (…) je suis pas tout le temps fourré à aller voir le médecin traitant. (E15) » ou « ça fait 4 ans que je suis ici et c’est la première fois que j’ai un médecin pour la CMU (E16)»… Lorsqu’une situation se précarisait et que les personnes se trouvaient en situation d’exclusion, il arrivait qu’elles aient été contraintes de déménager, changer de ville, de région, parfois commencer une vie d’errance géographique en plus d’une errance sociale. Ces changements étaient parfois marqués par la fin d’un suivi médical régulier. Les patients qui étaient mobiles changeaient de médecin (« j’ai déjà vu plusieurs docteurs pour mon fils, parce que j’ai déménagé (E6)») ou les considéraient comme interchangeables (« pour moi je fais confiance et j’espère pas que j’aurai besoin dans l’immédiateté d’un médecin parce que sinon ça serait encore une galère, (…) mais après c’est des gens à qui je fais totalement confiance (…)je fais pas de choix jamais (…) le premier c’est le (n’a pas fini sa phrase) (E17)»). Cette nouvelle rupture, avec un suivi médical régulier, dans une situation qui en comportait déjà suffisamment, était parfois anticipée , par le précédent médecin régulier « le médecin traitant il m’a préparé tous les dossiers où ce qu’il a eu, lui, pour le prochain médecin (E2)», ou dans le cadre d’un suivi spécifique en addictologie « j’ai appelé du SATO, et après le médecin du SATO, dans l’Oise, m’a fait une fiche relais pour le CSAPA d’ici, justement ; pour que quand j’arrive j’ai mon traitement. (E6) ». Dans ce dernier exemple, le suivi médical régulier de la patiente avait repris précocement après le déménagement, mais pour son fils chaque fois avec des médecins différents. Qu’ils aient déménagé, ou non, de nombreux exclus avaient eu des périodes plus ou moins longues sans suivi médical, sans médecin régulier, sans prise en charge. Pourtant la plupart reconnaissaient de nombreux intérêts à avoir un médecin régulier.

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L’argument qui revenait était la connaissance qu’a le praticien de son patient, « comme ça au moins il nous connaît, il sait comment on est, voilà. (E13)», cela permettait d’éviter d’avoir à répéter les mêmes histoires difficiles « il connaît des choses qu’on a pas forcément envie de répéter tout le temps. (E6)», de trouver une écoute, une confiance « l’intérêt, c’est qu’il me connaît par cœur (…) en 15 ans, on discute beaucoup (E7)». Le médecin connaissait l’historique personnel et médical du patient « il sait un peu d’où je viens, il sait mes problématiques de santé (E15)». Cela permettait une prise en charge plus adaptée au patient « Parce que, vous avez 10 asthmatiques, c’est 10 cas différents (E3)». Connaître un médecin, c’était aussi être connu par son secrétariat « la secrétaire elle me connaît, elle a mon dossier et tout, c’est pour ça je vous dis j’ai toujours gardé mon médecin traitant. (E14)», ce qui était présenté comme positif. Autre élément récurrent était la possession par le médecin du dossier médical « ils nous connaissent, ils ont des dossiers, ils marquent à chaque fois qu’ils nous voient (E5)», ce dossier était un élément de constance dans la prise en charge « il suit ton dossier dès le début jusqu’à la fin, voilà. (E18) » et permettait aussi de consulter dans le même cabinet en cas d’absence du médecin traitant « de toute façon même quand il est pas là, c’est son collègue qui me prend et il connaît mon dossier aussi (E14) ». C’était un élément important. Aucun n’avait exprimé se sentir dépossédé d’informations le concernant ; au contraire, ils semblaient rassurés que ces informations médicales aient été stockées. « Il … a tous les dossiers là-bas sur son internet (E9) ». Parfois la notion de structure, et donc de dossier médical, supplantait celle du médecin : « Quand ça change, c’est pas grave, quoi. (E5) » disait ce patient qui consulte régulièrement au CPO. « Il y a des règles nationales qui euh… qui demandent à avoir un médecin attitré, sinon, on risque d’être pénalisé au niveau médical. (E3)». L’obligation légale d’avoir un médecin traitant était également un moyen pour entamer un suivi « On m’a demandé à la Sécu, il faut que je… cherche un médecin, j’ai pris lui… (E9)», et permettait de centraliser les informations sur un seul praticien : « chaque fois que je vais chez un généraliste en principe il me demande quel médecin me suit alors je suis obligé de dire mon médecin traitant. (E14)» me racontait ce patient qui faisait souvent de petits

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déménagements dans le département et avait conservé son médecin traitant. Mais cette obligation pouvait devenir un frein : « Moi à la base… Euh, je ne l’aime pas trop, ce médecin, mais… euh… vu que j’ai pas trop le choix, vu que c’est mon médecin traitant (E11) », ce patient n’ayant pu imaginer changer de médecin. Le respect de la confidentialité (« j’lui confie des trucs, et ça reste entre nous, hein, voilà… (E2)») permettait de parler librement, dans une relation de confiance qui n’était peut-être pas courante « je me sens en sécurité, je parle par rapport à ce que je peux lui dire (E15)», allant dans le transfert jusqu’à une parfaite connaissance du patient « moi mon médecin traitant sans lui dire ce que j’ai, il le sait déjà (…) moi je cache rien aux médecins, de toute façon ils le voient. (E14)». La notion de confiance était parfois liée au rôle même du médecin « pour moi un médecin c’est quelqu’un de digne de confiance (E17)», ou se tissait après des années « c’est un peu un je dirais mon confident, j’ai des choses à lui dire sérieuses (E15)», et présentait un élément de stabilité : « c’est comme si on avait un médecin de famille (…) mes parents avaient un médecin de famille (E14)». C’était important pour le patient de connaître son médecin « Je vais dans le cabinet parce que c’est le seul médecin que je connais (E16)». La confiance était primordiale dans la relation à l’esprit et la relation au corps : « surtout quand on est une femme, on est plus gênée quand c’est encore un médecin qu’on connaît pas (…) on est obligée un peu de se déshabiller, pas tout le temps mais y a des fois ça arrive, et c’est mieux que ce soit un médecin qui connaisse (E6)», « un médecin traitant c’est comme ta famille (E18) ». Elle passait aussi par le respect du patient « Et il respecte mes choix (E15)». Les patients recherchaient une écoute « on peut discuter avec eux (E5)», un accompagnement « il a essayé de…me soutenir dans cette démarche (E15)», et un rôle d’orientation « le médecin traitant généraliste, elle t’écoute et puis elle t’oriente (E18)», une disponibilité « Pour moi c’est plus pratique d’avoir un médecin traitant que je peux voir plus souvent (E11)», une compétence « c’était une dame âgée, elle a de l’expérience. (E18)» qui s’accroissait avec un suivi régulier « il est plus à même d’adapter le traitement, il connaît mieux la personne pour adapter le traitement. (E6)».

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Il apparaissait primordial que le patient connaisse son médecin « moi j’apprécie bien le médecin que j’ai là parce que je le connais bien (E16) » ou une structure de soins « je les connais, donc, moi ça m’embête de changer… (les médecins du CPO) / On se connaît mutuellement, moi je les connais, eux ils me connaissent (E5)». Cette relation se tissait avec le temps et une notion rassurante d’habitude « il est à Joué moi je suis ici, c’est loin. Mais je va sûrement, parce que je suis déjà habitué avec lui… (E9)» et de fidélité apparaissait « oui je suis intimement fidèle à ce médecin là (E15)». Le patient de 28 ans du premier entretien, vivant dans la rue et ayant pourtant eu jusqu’à récemment (déménagement) un suivi médical par un médecin généraliste dans le cadre d’un sevrage, ne voyait pas d’intérêt à avoir un médecin régulier. Il reconnaissait bien qu’il lui faudra remettre en place un suivi pour son traitement substitutif et sera contraint à déclarer un médecin traitant mais n’en exprimait ni l’intérêt, ni l’envie. La plupart des personnes interrogées dans le cadre de cette enquête reconnaissaient l’intérêt d’avoir un médecin généraliste régulier, surtout concernant la connaissance qu’avait le praticien de son patient, et la confiance mutuelle qui se formait progressivement. Cependant, de nombreux patients n’avaient pas de suivi médical et n’identifiaient pas de médecin régulier, principalement suite à des déménagements répétitifs ou un isolement social. A chaque fois, il fallait rechercher un nouveau lieu de soin. Pour les orienter, ces personnes en situation de grande exclusion étaient conseillées par l’entourage, un conseil non professionnel, que ce soit la famille « Ben j’ai ma famille là-bas, j’ai mon frère ; il va dire, tu vas là (E2)», des compagnons de galère « je demande à mes collègues, qui sont avec moi à … Albert Thomas. Ils m’ont dit, c’est un bon docteur, allez le voir. (E4)», des amis « Avant j’étais à Joué, chez un compatriote, c’était le médecin de ma compatriote là. (E9)», ou d’autres personnes plus éloignées « C’était une amie, heu, c’était une voisine de palier tout simplement. (E7)» Parfois le conseil était apporté avec conviction par cet entourage « il m’a dit, bon tu vas aller là-bas, parce que c’est mon médecin, parce que tu n’as pas de médecin pour le moment. (E9)» ou recherché par le patient «dès que moi

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j’ai trouvé une CMU, j’ai demandé à un ami, c’est lui qui m’a donné le Docteur B (E10)». Le conseil était également apporté par des professionnels du service social, dépendants du service public « c’était une personne qui travaille à la mairie, là bas. (E1)», ou d’une structure associative « je suis obligé d’aller voir l’assistante sociale (à la Halte), elle m’a appelé un médecin. (E16)». Parfois l’information était écrite sur des « dépliants (E6)» fournis dans les structures dédiées à ces populations. « On m’a donné une adresse ; parce qu’il y a des fascicules (E3)». Les critères de choix du médecin régulier étaient surtout la proximité géographique, le « médecin de quartier (E18) » ; « j’essaie de faire dans la proximité (E15)», la disponibilité « celui qui peut trouver le plus vite. (E19)» mais aussi une notion de spécificité d’exercice de certaines structures associatives « quand on est à Tours par exemple, il y a des structures sociales, donc vous avez la partie hébergement, la partie santé…, la partie repas (…) voilà. (E3)». Ces structures médico-sociales (CASOUS, CPO…) étaient clairement identifiées comme faisant partie d’un réseau (« c’est un circuit quand les gens sont… (en difficulté sociale) (E3)»), une sorte de passage obligé « quand on est en foyer d’urgence, pour avoir un médecin, ben on passe par le CASOUS. (E3)», un monde hors du droit commun, fait pour eux. En conclusion, les personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours présentaient des pathologies chroniques ou aigües, souvent proches de la population générale, mais avec une spécificité de retard d’accès aux soins. Cependant, ces personnes avaient conscience de l’intérêt d’avoir un suivi régulier en médecine générale. Ce suivi était parfois interrompu par une mobilité géographique ou psycho-sociale. Pour les conseiller afin de retrouver un nouveau médecin régulier à proximité, elles se tournaient vers l’entourage et des structures spécifiques (service public, associations) qui délivraient une information orale ou écrite.

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4. Difficultés perçues pour consulter dans un cabinet de médecine générale Pour les personnes ayant un suivi régulier, et donc à fortiori pour les autres également, il n’était pas toujours simple d’aller vers le soin en cas de besoin ressenti. De nombreux freins faisaient obstacle et retardaient (au mieux) le soin. Une des premières difficultés rencontrées restait l’obtention et la pérennisation d’une couverture sociale. Si certains usagers n’avaient pas besoin de renouveler annuellement leur système de protection sociale comme cet ancien cheminot à la retraite (« ça se renouvelle automatiquement (…) j’ai pas besoin de la renouveler, c’est pris jusqu’à la fin de ma vie. (E14) »), tous les patients bénéficiant de la CMU prenaient le risque d’une interruption temporaire de leurs droits s’ils ne renouvelaient pas à temps. « Une fois j’avais pris un rendez-vous, elle (ma mère) m’a dit : la CMU, y en a plus ; donc du coup j’ai dû annuler mon rendez-vous… (E11) ». La situation des personnes interrogées vis-à-vis de leur statut de protection sociale par la CMU au moment de l’entretien était variée. Certains patients avaient bien sûr une couverture complète « La CMU (…) je suis sous celle de ma mère, en fait. (E11) » et avaient fait le renouvellement récemment (« ca y est, elle est déjà renouvelée. (E1) »), parfois après une période de rupture des droits (« là on m’a dit que la CMU est jusque au mois … parce que c’était expiré, j’ai renouvelé. (E9) »); d’autres avaient déménagé récemment, leur dossier était entre les deux Caisses Primaires d’Assurance Maladie (CPAM) « j’ai la CMU et la CMUc. Mais ils font transférer mon dossier, donc il faut attendre. (E6) » ; parfois la demande de renouvellement était en cours, les patients n’avaient plus de couverture sociale et attendaient (« j’ai fait le renouvellement et je sais pas ce que ça a donné mais j’attends. (E16) » ; « CMU ? J’ai prolongé, je ne sais pas. J’attends (E12) »). En attendant un renouvellement, suite à un déménagement, ou par défaut des démarches administratives, de nombreux patients en situation de grande exclusion avaient connu des périodes de rupture de droits (E16, E18, E19), avec parfois un préjudice sanitaire (« Oui, après je faisais système D, système D, homéopathie etc. (…) Qui m’a un petit peu pénalisé pour continuer mes soins dentaires mais ça va c’est en cours. (E15) ».

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Pourtant la plupart des patients connaissaient bien les démarches à suivre pour renouveler sa CMU (« faut… à la CPAM, Caisse Primaire d’Allocation Maladie, rue Edouard Vaillant, c’est… faut prendre un ticket, et puis bon, y a un peu d’attente. Y a quelqu'un qui nous reçoit, et il nous donne un dossier à remplir, et puis après il nous dit : vous remplissez le dossier et vous rapportez les papiers et si c’est OK il vous dit le jour où vous les rapportez, le dossier rempli avec les papiers apportés, il vous dit si vous pouvez l’avoir. (E5) »), connaissaient le lieu du renouvellement (« J’ai envoyé, j’ai rempli et renvoyé un dossier à la Sécu… Quand on est déjà inscrit, ca va vite, quoi… (E1)), ou identifiaient des aidants pour faire ces démarches. La difficulté venait parfois d’un défaut de connaissance de la date d’échéance des droits : « c’est…un an ou six mois je crois, je sais pas. (E10) » mais les patients savaient en général où se renseigner « ils m’ont dit ca va se finir (il déplie son attestation CMU) le 31, troisième mois, en 2013. (E4) ». La protection sociale permettait l’accès aux soins réguliers ou en urgence, comme le racontait cet homme de 46 ans qui a demandé une CMU en urgence pour des problèmes dentaires (« j’ai demandé une CMU le jour que j’ai eu mal aux dents et là j’ai demandé une CMU et puis j’ai été obligé… et puis j’ai eu mal aux dents pendants trois semaines. (E13) »). Pourtant, malgré sa gratuité, cet homme ne souhaitait pas renouveler sa CMU à échéance car les soins étaient terminés et il ne présentait pas de problème de santé régulier (« je me suis dit « à quoi ça sert de l’avoir » comme je vais voir jamais un médecin (…) Ben parce que comme je vais jamais voir le médecin sauf pour un truc grave…je vais l’arrêter. (E13)»). Le jour où il aura besoin de soins urgents, il se rendra à l’hôpital mais n’était pas inquiet pour le coût des soins car il n’avait que peu de revenus et anticipait le fait que l’hôpital ne pourrait lui faire payer les soins « Non non je paye rien du tout moi, je suis (non) imposable et ils peuvent pas prendre sur mon RSA. (E13)». L’obstacle au renouvellement de la CMU était complexe, principalement articulé autour des difficultés à accomplir des démarches administratives, « Ah je les fais jamais les papiers, j’arrive pas à remplir les papiers. (E13)».

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Un second obstacle majeur était constitué par la prise de rendez-vous. Si de nombreux patients préféraient les consultations de soins primaires avec rendez-vous, surtout quand il n’y avait pas de notion d’urgence (« je préfère avec rendez-vous quand j’ai prévu, quand c’est pas un truc urgent (E6)»), et ne trouvaient pas de difficultés dans le fait de prendre le rendez-vous par téléphone (« Non, c’est très facile ; moi j’appelle la veille, je le vois le lendemain. (E7)», et avaient une bonne gestion des rendez-vous (« je préviens la secrétaire, et après je repousse mon rendez-vous. (E2)») ; d’autres n’étaient pas du même avis. Ils préféraient les consultations sans rendez-vous parce que le délai était raccourci, « c’est mieux sans rendez-vous quoi, parce que les rendez-vous c’est chiant, il faut attendre un ou deux jours. (E13)», ou parce que la situation était urgente « pour une urgence, sans rendez-vous, c’est pratique. (E6)», mais aussi pour éviter le téléphone, éviter d’appeler pour prendre rendez-vous « (la difficulté,) c’est d’appeler ; parce que moi j’aime pas prendre les rendez-vous. (E13)» et parfois c’était un frein puissant à la consultation : « ils me disent tout le temps de téléphoner mais moi je téléphone pas. (E16)». Parallèlement à cet obstacle psychologique ou social à la prise de rendez-vous téléphonique, survenait aussi une problématique matérielle par manque de téléphone (« ils vont peut être me laisser le téléphone mais ça va être à moi de prendre le rendez-vous(…) je peux le faire moi, faut qu’on me laisse le faire (E16)»), pécuniaire (« Si, pour appeler là-bas, j’ai pas de crédit, je peux aller chez… chez R (chrétiens migrants) pour appeler, ou bien parfois l’hôpital (E9)»), ou d’accès à l’information (« Si j’ai le numéro de téléphone, je peux prendre le rendez-vous. (E12)»). Certain reconnaissaient avoir (ou avoir eu) des difficultés à gérer les rendez-vous « avant je faisais ça quelqu’un me donne un rendez-vous et j’viens pas des fois (E16)», sollicitant la patience des professionnels de santé. Une autre problématique exprimée était le délai d’obtention d’un rendez-vous. Même si certains patients acceptaient des délais longs (« le délai, ça a jamais été plus de 24h ; donc je trouve ça plus que raisonnable. (E6) ») ou considéraient que le délai était suffisamment raccourci en cas d’urgence « tu

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es très malade, on peut t’appeler pour aller même le soir… (E9)», la plupart des autres patients fustigeaient des délais trop importants « ça fait un bon moment que je cours derrière ce certificat, je demande des rendez-vous (…) mais c’est tout le temps après le 20 juillet. (E16) », même en cas d’urgence ressentie « J’ai demandé d’abord à ma mère d’appeler mon médecin traitant, sauf qu’il avait pas de place (…) j’avais super mal limite à en pleurer (E11) ». Ces difficultés étaient expliquées parfois par des défauts d’organisation des médecins « ils prennent rendez-vous tous les quarts d’heure… Donc ils sont hyper-débordés. (E6) » avec des délais d’attente en salle d’attente trop longs « avec ou sans rendez-vous, on attend 2h… Parce que les médecins ils sont débordés, (…) oui, voilà, c’est trop long… (E6) ». Certains patients en situation de grande exclusion pouvaient présenter des difficultés dans l’attente, même brève, « attendre 10 minutes dans la salle d’attente ça me fait péter un plomb. (…) le seul truc compliqué c’est la salle d’attente. (E19) ». Parfois ces patients se tournaient alors vers des structures associatives, alors même qu’elles avaient un médecin régulier qui les suivait « pourquoi est-ce que vous êtes allé au CASOUS? c’était urgent et fallait que je fasse (…) parce que le Dr B (…) faut prendre rendez-vous (E14) ». En lien avec ces difficultés d’agenda, les patients évoquaient la désertification médicale en zone rurale « là bas à I (nom de ville) y’a pas de médecin, y’a rien, y’a plus de médecin, y’a plus rien. (E14) », avec la difficulté à trouver un médecin traitant. Ces refus n’étaient pas en lien avec leur situation d’exclusion mais compromettaient la mise en place d’un suivi médical, « les médecins sont obligés de refuser de nouveaux patients réguliers. (…) C’est pas qu’ils veulent pas, c’est que ils sont déjà débordés, alors… (E6) ». Les grands précaires qui souhaitaient dormir en hébergement d’urgence ou de stabilisation devaient se présenter tôt dans la soirée sur le lieu du foyer, parfois éloigné du cabinet de consultation. Ils avaient alors des difficultés à obtenir un rendez-vous suffisamment tôt dans la journée pour pouvoir se déplacer vers ce lieu ensuite, et avec des délais d’attente raisonnables « faut jongler avec les horaires en fonction pour garder sa place en centre d’hébergement. (E15) ». Entre se soigner et dormir au chaud, le choix se fait malheureusement rapidement.

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Le transport vers la consultation constitue également une grande difficulté, dépendant bien évidemment de la position géographique du praticien et du patient. Les moyens de transports collectifs par bus de ville ou autocars étaient considérés comme facilitants, surtout lors des longs trajets « le bus il part de là bas à 6h25 et j’arrive à Tours une heure après (E14)», mais présentaient plusieurs difficultés en terme de circuit (« c’est un peu la croix et la bannière pour se transporter d’un point à un autre de Tours à J à cause des travaux, de la grève des contrôleurs de bus. (E15) ») ou principalement en terme de coût du transport (« Faut que je prends le bus mais pour le moment je n’ai pas le ticket de bus. (E12)»). « Parce que… parfois tu n’as pas de carte de bus pour aller à l’hôpital, parfois… Je quitte la Nuitée, là, pour aller au Secours Catholique, je quitte le Secours Catholique pour aller à Bretonneau… Et puis, parfois, je ne me sens pas bien… C’était difficile, avant, j’avais des difficultés avec la carte de bus… Fallait marcher à pied pour aller à l’hôpital… (E9)» racontait cette femme de 34 ans. Dans ces situations, pas d’autre solution que d’utiliser une bicyclette ou ses jambes. Les déplacements à pied étaient fréquemment cités, surtout pour de petits trajets « comme c’était près de chez moi j’y suis allé à pied. (E16)», ou parfois un peu plus longs « en moins d’une heure c’est jouable, je peux y aller à pied. (E15)». Cela permettait aussi de s’orienter plus facilement : « souvent à pied… je trouve ça plus facile de trouver à pied. (E6)». La bicyclette était un moyen de transport individuel alternatif (E16). Une seule personne s’était remémorée une ancienne voiture personnelle « Ma voiture, je l’avais déjà plus, ma voiture. (…) J’ai mon permis mais j’ai pas de voiture… (rire jaune) (E6)». Cet homme de 64 ans, retraité et bénéficiant d’une ALD évoquait aussi un VSL pour aller aux urgences : « ah ben je prends un taxi (…) Il sera à mes frais. Ils m’enverront la note (il rigole doucement). (E3)». De nombreux autres obstacles ont été identifiés et listés lors des entretiens. Pour certains patients, il était difficile d’analyser clairement ces obstacles. Le frein était ressenti mais non exprimé clairement : « j’leur

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dit que j’aime pas trop les médecins (E16) ». Ils en reconnaissaient l’utilité et consultaient en cas de besoin mais exprimaient une défiance, parfois dans un déni assumé de problème de santé, par peur du diagnostic : « Simplement j’ose pas y aller. (…) Parce qu’il suffit qu’ils trouvent une mauvaise nouvelle et puis moi je préfère pas le savoir. (E13)». Le médecin touchait à l’ intime, dans une relation parfois vécue comme intrusive « j’aime pas trop les médecins aussi parce qu’ils vont me tripoter (E16) ». Cette intimité était également un frein quand il fallait la dévoiler sans cesse devant de nouveaux praticiens qui n’avaient pas connaissance de l’exclusion extrême dont souffraient les patients : « si je prendrai un médecin généraliste, faut quand même lui mettre la puce à l’oreille, lui expliquer pourquoi je viens et c’est pas si facile que ça. (E14)», les patients avaient peur d’être jugés « j’étais en situation difficile, j’étais à la rue et tout ça… et ça fait pour moi, je pensais mal aussi, je réfléchissais mal aussi (…) donc quand j’allais dans un médecin, pour moi c’est que les gens m’acceptent pas là-bas (E16) » Le frein pouvait être financier quand la couverture sociale n’était pas complète, comme l’exprimait ce patient de 64 ans bénéficiant d’une exonération du ticket modérateur au titre d’une affection longue durée mais n’ayant pas de couverture complémentaire : « Ben c’est à dire pour des raisons financières… (E3) ». Le médecin possédait un langage propre et n’adaptait pas toujours son discours, ce qui pénalisait certains patients qui pouvaient se sentir en décalage : « il va vous parler pendant 10 minutes avec des phrases, des mots que vous comprenez pas pour en fait vous dire en deux mots que vous êtes malade (E19) ». Ces difficultés de communication étaient parfois plus en lien avec une difficulté d’expression de la part du patient, ce qui pouvait être du fait d’un trouble de l’élocution « parce que je bégayais beaucoup (…) j’arrivais pas à m’exprimer (E2) ». Un autre obstacle était constitué par la mobilité et la fragilité qui l’accompagnait, qu’elle soit psychologique, comme l’expliquait ce patient « euh, je vais certainement me stabiliser ; mais là je suis dans une période transitoire. (E3) », ou géographique, suite à un ou des déménagements répétitifs : « Si je veux aller le voir, ce médecin là, j’suis obligé de… prendre

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le bus, aller jusqu’à chez lui… c’est plus loin, quoi… (E5) ». Le déménagement entrainait un éloignement du médecin habituel, ce qui pouvait amener à consulter d’autres praticiens et donc perdre la notion de médecin régulier (« je suis pas allé voir mon médecin traitant, du coup, vu que j’étais plus près ici…(E11) »). Entre les horaires des foyers et la difficulté de la vie à la rue, se soigner n’était pas une priorité « déjà on n’a pas de quoi manger et tout ça, faut se débrouiller donc on n’a pas le temps d’aller voir un médecin (E16) », passant derrière les démarches administratives considérées comme nombreuses « faut courir derrière les papiers et tout ça donc on n’a pas le temps d’aller voir un médecin (E16) ». Un autre frein pouvait être la perte des documents comme l’attestation de CMU ou la carte vitale, souvent en lien avec la vie d’errance peu propice à la conservation de ces précieux sésames : « c’était difficile pour moi de trouver un médecin parce que déjà premièrement je perdais tout le temps mes papiers (…) J’avais pas l’attestation et des fois quand je vais dans un endroit on me demande l’attestation mais on me demande pas la carte (E16) ». Même si ce n’était pas la caractéristique de cette population, une conduite délictueuse pouvait également être un frein à l’accès aux soins « je conduisais sans permis, donc quand y’a eu l’accident je me suis cassé quoi, et quand les flics ils m’ont trouvé quatre jours après, en fait j’avais l’os qui était tourné et je le sentais pas trop. (…) ils m’ont emmené aux Urgences (E19) ». Bien que de nombreux patients n’évoquaient ni difficulté ressentie à consulter, ni expérience négative avec un médecin de premier recours lors des expériences précédentes (« Non, non. Jusque là, je n’ai pas eu de problème avec un médecin. (E11) »), parfois justifié par le caractère souple du patient « moi, je suis très… maniable, je suis pas, je n’ai aucun problème au niveau –comment on appelle ça- au niveau relationnel. (E3) », d’autres patients listaient des expériences négatives qui constituaient également un frein aux futures consultations. Des difficultés de communication étaient évoquées, avec des praticiens directifs « ils m’ont parlé sec, et puis ca, je n’aime pas trop… (E2) », ou distants « c’était quelqu'un de très froid

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(…) Elle était très froide, très hautaine (…) elle serrait même pas la main à ses patients… (E6) », considérés comme « jugeant (E6)» : « C’est pas question que les médecins me jugent mais j’ai l’impression que il a toujours un truc derrière la tête (E16) », ne faisant pas confiance à leur patient, surtout en consultation d’addictologie « Elle me dit que non, c’est forcément que je consomme. (E6) ». Cette patiente avait l’impression que ce médecin du CSAPA où elle consultait n’avait pas eu les mêmes rapports avec ses autres patients de médecine libérale : « des fois elle recevait des coups de téléphone de ses patients à son cabinet – et elle était très agréable avec eux. (E6). ». De manière générale, les médecins n’étaient pas perçus comme à l’écoute et minimisaient les plaintes (« j’avais une grosse pointe au cœur, et il m’a dit que j’avais rien du tout ; alors que j’avais super mal… (E11) »), ou étaient moralisateurs « le Docteur B qui me faisait la morale pour le tabac (E6) » ou « quand on dit que cela fait très longtemps que l’on prend un certain nombre (…) de somnifères et tout ça… ils essayent toujours de dire oui, il faudra arrêter, patati et patata (E7) ». Ils n’avaient pas le temps durant la consultation : « c’était qu’il faisait trop rapidement ses visites (…) pour les adultes souvent, il faisait ça à la va-vite, parce qu’il était tellement débordé… (E6) », ou accumulaient du retard « il avait souvent 1h ou 2 de retard… donc… c’est lui dont je vous parlais, les rendez-vous 2h de retard (E6) » sans se préoccuper réellement de l’organisation des patients « chez tous les médecins, enfin ils prennent jamais à l’heure… Ça c’est vrai que c’est pénible quand on a un autre rendez-vous, ou autre chose à faire… (E11) ». Le retard était lié à la fréquence des consultations «tous les quarts d’heure», parfois considéré comme du fait du secrétariat « C’est les secrétaires qui mettent les rendez-vous… Donc lui il peut pas… (E6) ». Certaines structures associatives étaient mieux considérées car la consultation était plus longue « C'est-à-dire en ville (…) c’est qu’ils sont pressés, (…) on peut pas, on n’a pas le temps de dire ce qu’il faut dire. (…) (tandis) qu’au CASOUS j’ai eu le temps pendant trois quarts d’heures de m’expliquer sans priver l’autre. (E14) ».

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Dès le premier contact, ce patient se faisait un avis sur le médecin qu’il consultait : « je sais vite juger les gens s’ils sont bien ou pas. (E2) ». Cette impression pouvait se confirmer « avec lui j’ai pas une approche terrible… (remplaçant du médecin traitant) (E7) » et freiner l’accès aux soins dans certains cas « quand je vois qu’un toubib n’est pas agréable (…) je préfère aller voir ailleurs même au détriment de ma santé. (E15) » ou conduire à une errance médicale « J’ai fais plusieurs médecins, mais bon, ils me plaisaient pas trop. (E2) ». Parfois nécessité faisait loi et les mauvaises expériences devaient être oubliées « si vraiment j’ai besoin d’y aller à côté, j’irais quand même, quoi… (E11) » relatait cette patiente après avoir exposé ses difficultés avec ce praticien. Certaines pathologies étaient considérées comme mal comprises « la dépression, c’est pas très bien perçu je trouve, par certains médecins… (E7) ». Dans d’autres cas, les patients mettaient en doute les compétences du praticien pour un diagnostic « Ou des fois, quand j’ai vraiment un truc, il me dit « c’est viral, c’est viral… (…) je sais que j’ai quand même quelque chose, il me dit que c’est viral… (E11) », ou pour un acte technique « pour un vaccin et ce con en me piquant il a dérapé l’aiguille elle était ressortie par l’autre côté comme ça (E19) ». Un seul patient évoquait un refus de CMU en médecine générale, deux ans avant l’entretien : « Ben je me suis entendu dire au téléphone (prenant une voix de femme) « ah ben on n’accepte pas la CMU ». (E15) ». Ce refus l’avait marqué et il demandait à présent systématiquement si les médecins ou dentistes acceptaient la CMU lors de la prise de rendez-vous. En conclusion, si de nombreux freins à l’accès aux soins paraissaient communs avec ceux ressentis par la population générale (délai d’obtention d’un rendez-vous, notion de désertification médicale en milieu rural, anticipation anxieuse d’une annonce diagnostique, remise en doute des compétences médicales et parfois problématiques de transport, surtout en milieu rural), d’autres obstacles étaient plus spécifiques des populations en grande exclusion : prise du rendez-vous (accès au téléphone, crédit

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téléphonique, demande d’aide à un tiers pour téléphoner…), transport (onéreux en bus ou voiture, plus facile à pied ou en vélo), refus de la CMU, difficultés de communication, ou en lien avec la vie à la rue (organisation avec d’autres impératifs comme les horaires de fermeture des foyers, perte des documents, peur d’être jugé ou non compris…). Ces points prenaient ici un poids conséquent et freinaient considérablement l’accès aux soins. 5. Identification des aidants ou personnes orientant vers le soin En dépit des nombreux obstacles à l’accès à des soins de santé primaire listés précédemment, de nombreuses personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours décrivaient un suivi avec un médecin régulier. Comment ces patients contournaient-ils ces freins et étaient-ils aidés dans cette démarche ? Cet accès aux soins primaires était grandement facilité par l’intervention d’aidants professionnels ou non, qui accompagnaient le patient, le guidaient vers les soins, l’aidaient à la prise de rendez-vous, ou parfois le conduisaient même chez le médecin. Les aidants identifiés par les personnes interrogées ayant la possibilité de les guider dans leur démarche d’accès aux soins primaires étaient multiples. Certains étaient des travailleurs sociaux exerçant dans des structures spécifiquement dédiées aux grands précaires, comme les foyers d’hébergement (« par les surveillants (Veilleurs de nuit), tout ça, on a les dates…(E3) »), les Haltes du matin et de jour « Ben je viens voir ici ou je sais pas je vais… (…) à la Halte du matin je demande si on peut prendre un rendez-vous avec un médecin pour moi (E16) », le bar associatif La Barque, la Nuitée (« on peut demander à ce qu’il (TS) nous recherche quelque chose… (adresse de médecin) (sur internet) (E6) »), Chrétiens Migrants (« Si, pour appeler là-bas, j’ai pas de crédit, je peux aller chez… chez F pour appeler (E9) »), la PASS (« j’ai vu une assistante sociale qui était là (à la PASS), on a rempli ce qu’il fallait remplir et puis voilà. (E17) », « elle m’a dit si ça allait pas il fallait que j’aille la voir à Trousseau (E14) »), le CASOUS, le CPO (« J’étais allé voir les gens de CASOUS, Ils m’ont envoyé (à) une institution là-bas (CPO) (E4) »), un CADA « on m’a envoyé (voir le

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médecin), quand j’étais au CADA… (…) C’était … assistante sociale. (E12) »… D’autres aidants étaient médicaux ou paramédicaux dans des structures de droit commun comme l’accueil de l’hôpital public (« j’ai demandé à l’accueil, j’ai demandé un service (…) qui s’occupe uniquement des gens(…) en situation difficile, les défavorisés (...)sans ressources (E17) »), un médecin d’un centre de cure « le médecin du SATO, dans l’Oise, m’a fait une fiche relais pour le CSAPA d’ici (E6) », les infirmier(e)s hospitalier(e)s (« Après je suis allée voir une infirmière, dans le même service (E9) »), un secrétariat hospitalier (« comme si j’avais raté un rendez-vous, je suis allé chez un… à l’accueil là chez… comment s’appelle… le secrétaire (E9) »), les médecins généralistes libéraux «Si il arrive pas de me recevoir, peut être me donner une idée comment il faudrait faire. (E4) », le SAMU (« Si je suis malade ben je fais le 15, et puis le 15 ils vont m’envoyer un médecin d’urgence et puis voilà quoi. (E18) », ou les Urgences (« après réflexion je peux me tourner sur les services d’urgence (E15) ») ; les pharmacies (« parfois je me renseigne chez des pharmaciens (E18) ») ; la CPAM (« Là je suis allé directement demander les gens de la Sécurité Sociale (E4) ») ; pôle emploi (E16)… Certains aidants n’étaient pas des professionnels, mais des proches : amis (« j’ai des amis qui m’ont conseillé d’aller directement à Trousseau pour voir… (E11) »), famille (« J’ai demandé à ma mère d’appeler pour moi (E11) »), voisins (« j’demande à un voisin de… éventuellement, est-ce qu’il connaît le numéro, d’appeler à ma place. (E5) ») ; des inconnus sollicités pour un avis « j’ai demandé dans la rue ; on est habitué à se débrouiller… (E6) » ; ou des professionnels extérieurs « c’est moi qui ai demandé (à la bibliothèque). Ils m’ont dit « Samedi matin, y a un docteur qui consulte à … SPDC » donc j’y ai été. (E3) » ; L’information existait aussi sur un support papier ou informatique mis à disposition. C’était les annuaires papiers « Annuaire (…) En fonction du lieu où je me situais c'est-à-dire ici, j’ai pris le plus proche dans le secteur géographique (E15) », les fiches d’informations spécifiques aux précaires disponibles dans les lieux associatifs de prise en charge (« y’a un guide qui a

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été fait par…l’Entraide Ouvrière (…) ce qui serait bien c’est qu’il soit peut être mis à jour celui là, SOS guide. (E15) », les ordonnances médicales (« Je crois que le numéro de téléphone il est inscrit sur un bout de papier, je crois ouais. (l'ordonnance) (E16) »), les plaques murales (« j’vais en ville et je vois un médecin ben je rentre dans le bureau du médecin juste pour voir si je peux prendre un rendez-vous (E16) », « j’ai regardé, j’ai dit ah prise de sang, c’était écrit sur un panneau et puis je suis entré, je suis entré comme ça, c’est au hasard. (IRSA, CDAG?) (E18) » ; les renseignements téléphoniques « J’appelle les renseignements (E5) », ou internet « Soit je passe par internet (E6) » quand il était possible d’y avoir accès, comme dans certains foyers. Pour trouver un numéro de téléphone, aider à la prise de rendez-vous, ou faire la simple démarche de prendre l’initiative de voir un médecin, tout au long du parcours de soins intervenaient ces aidants. En marge de mes entretiens dans la Halte de jour, des personnes se plaignant de symptômes infectieux ou traumatiques évoluant depuis plusieurs jours discutaient avec les travailleurs sociaux qui les orientaient vers les soins, les enjoignant à consulter. Cette démarche ne paraissait pas être spontanée de la part de certains de ces usagers de la Halte. Le rôle d’orientation vers le soin était primordial dans la prise en charge de ces patients. Les aidants, qu’ils soient travailleurs sociaux, professionnels médicaux ou paramédicaux, ou encore non professionnels apportent un soutien majeur pour dépasser les obstacles à l’accès aux soins primaires, lever de nombreux freins. Il peut s’agir de démarches administratives visant à obtenir ou conserver une couverture sociale (« Ouais je leur demande, soit eux soit La Barque, il y a quelqu’un qui m’aide là-bas aussi. (…) je vais chercher un dossier et puis après je leur emmène à eux et puis ils me le remplissent. (E13) », « puis en général quand elle est expirée, c’est ma mère qui fait les papiers, donc… (E11) ». Parfois, l’accompagnement était long, ce n’était pas uniquement de

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l’aide à l’accès aux soins et à une protection sociale, mais bien une orientation vers ces démarches qui était nécessaire (E13). Afin de les aider à franchir l’obstacle constitué par la prise de rendez-vous, de nombreuses personnes intervenaient quotidiennement. C’étaient parfois les médecins eux-mêmes « Il m’a donné le rendez-vous, il a marqué… (…) et puis… voilà. (E12)», ou les lieux de soins (« il fallait qu’à l’hôpital une femme elle prend le téléphone pour prendre rendez-vous avec mon médecin (E9)») ou parfois l’entourage (« J’ai demandé à ma mère d’appeler pour moi (E11)») ; mais aussi des travailleurs sociaux des lieux d’hébergement ou des lieux de vie qui proposaient l’accès au téléphone (« je demande là où je suis si je peux pas téléphoner (…) par exemple, Haltes, foyer euh… (E15)» ou « Euh souvent, souvent y’a du crédit, souvent y’a pas de crédit. (…) Si c’est urgent, je vais à la Halte de jour … Et je vais l’appeler. (E10)»), ou même appelaient pour le patient (« C’est…A (TS de la Halte) je crois, ou une autre personne, qui m’a pris rendez-vous. (…) je préfère demander à quelqu’un, qu’il prenne le rendez-vous à ma place. (E13)»). Les travailleurs sociaux avaient un rôle essentiel dans la démarche de soins de ces patients, notamment en facilitant la prise de rendez-vous, contournant au cas par cas les obstacles identifiés… Tous ces acteurs cherchaient à éviter les ruptures de prise en charge, en dirigeant le patient vers le système de soin, ou bien en lui mettant à disposition des moyens facilitants (téléphone, crédit téléphonique, ticket de bus…), ou encore en l’accompagnant dans la démarche : prenant rendez-vous à sa place ou le conduisant même parfois physiquement au rendez-vous « Ils vous ont accompagné, ils sont venus avec vous ? Oui (…) C’était … assistante sociale. (E12) ». Plus proche du droit commun, cet accompagnement pouvait être fait par un proche « elle (ma femme) est venue avec moi la première fois (E2)» (E6, E9, E10), ou les forces de l’ordre dans le cas d’un accident de voie publique («quand les flics ils m’ont trouvé (…) ils m’ont emmené aux Urgences (E19) »). Dans d’autres cas, le patient se rendait seul à la consultation (E1, E3, E8, E13, E15).

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En conclusion, il existait de nombreux intervenants professionnels, spécifiques ou non de ces populations en situation d’exclusion, travaillant en réseau. Ils étaient bien identifiés par les usagers qui les sollicitaient pour faciliter leur accès aux soins primaires et lever les obstacles cités précédemment. Ces professionnels se regroupaient parfois dans des structures associatives comme le CASOUS ou le CPO afin d’offrir une prise en charge médico-sociale adaptée. Ces différents acteurs travaillaient en réseau, s’adressant les patients selon les motifs et moyens de prise en charge. Cela impliquait une bonne connaissance des différentes structures et rôles spécifiques. « En général vous allez dans une association, ils vous parlent des autres associations (E6) ». 6. Avantage des structures dédiées aux populations précaires Certaines structures médico-sociales, dont le fonctionnement était orienté vers les personnes en situation de grande exclusion, revenaient régulièrement dans le discours, lors des entretiens, soit parce qu’elles facilitaient l’accès aux soins (lieux d’hébergement ou lieux de vie, lieux médico-sociaux), soit parce qu’elles dispensaient des soins gratuits, parallèlement au système de droit commun (CASOUS, CPO, PASS…). Le rôle des travail leurs sociaux et autres personnes travail lant dans le monde associatif était fondamental dans l’orientation vers le soin, et dans l’aide à l’accès aux soins. Ces travailleurs sociaux pouvaient être des éducateurs spécialisés, des moniteurs éducateurs ou des assistants de service social. Les bénévoles ou les salariés (veilleurs de nuit…) tenaient également une place importante. Les lieux cités étaient des structures médico-sociales ou des lieux de vie et d’hébergement. Les lieux de soins médico-sociaux étaient représentés par le CASOUS (« Au CASOUS aussi on peut voir le médecin. (E12) »), le service PASS de l’hôpital public (« j’ai vu une assistante sociale qui était là (à la PASS), on a rempli ce qu’il fallait remplir et puis voilà. (E17) »), ou le CPO.

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Parmi les lieux d’hébergements étaient cités La Nuitée, Le Foyer Paul Bert, le CADA… Mais les lieux les plus fréquemment cités dans ce cadre de facilitation de l’accès aux soins étaient les lieux de vie ; comme les Haltes du matin ou de jour (même équipe sociale) (« j’ai demandé à A (travailleur social) du matin, qu’elle me cherche un médecin. (E13) »), ou le bar associatif La Barque, ou encore d’autres associations comme Chrétiens Migrants. Parmi les structures de soins dédiées aux populations précaires, apportant une aide humaine ou matérielle, le CASOUS ou le CPO étaient cités lors des entretiens. • Le CASOUS était une structure associative à caractère médico-social où l’on pouvait avoir un suivi médical de premier recours («Je vais au CASOUS parce que déjà je me suis inscrit au CASOUS et à chaque fois on me donnait des rendez-vous au CASOUS tout ça (E16) ») et déclarer un médecin traitant « j’ai un docteur attitré au CASOUS (E3) ». C’était une structure de soins primaires (« (Demain, vous avez besoin d’avoir une consultation médicale, comment faites vous ?) Ah bé, je vais… au CASOUS. (E3) »). Cette structure pouvait aussi être utilisée en dépannage en cas d’absence du médecin régulier « Parce que Mr L (MT) était en congé, donc ça m’est arrivé d’aller consulter au CASOUS (E7) ». Certains patients identifiaient un médecin en particulier au CASOUS (« j’ai un docteur attitré au CASOUS (E3) ») mais aucun n’avait pu donner le nom de son médecin régulier (« ça m’est arrivé d’aller consulter au CASOUS, mais alors je ne me rappelle plus de son nom, c’est une femme. (E7) »). Dans d’autres cas, c’est la structure plus que le médecin qui était identifiée pour le soin « j’allais les voir au CASOUS, pour moi c’était le moyen le plus facile pour moi. (E16) », jouant le rôle de structure référente, régulière : « dans un premier temps, je vais au CASOUS ; et si le CASOUS, c’est pas disponible, je vais voir un MG. (E3) ». En plus d’être une structure médicale, le CASOUS proposait un accompagnement social « J’ai plus été là bas pour un rendez-vous avec

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l’assistante sociale (E15) », qui parfois jouait un rôle d’orientation vers la consultation médicale « j’avais un rendez-vous avec une assistante sociale donc il m’a proposé (…) je peux voir un médecin (E17) ». Cet aspect pluridisciplinaire était bien compris (« si je veux je peux voir un médecin et même un psy (E17) »), et les usagers le percevait comme un moyen de centraliser une prise en charge (« tout au même endroit, ils essayent d’aider au maximum qu’ils peuvent. (E6) »), efficacement, dans l’intérêt des patients « des fois le CASOUS ça aide bien les gens. (E16) », même si parfois l’organisation était remise en question « ça a l’air assez bien – mal organisé – mais assez bien. (E6) ». C’était un lieu spécifique pour les personnes en grande exclusion : « quand on est en foyer d’urgence, pour avoir un médecin, ben on passe par le CASOUS. (…) c’est un circuit quand les gens sont… (sous-entendu "en difficulté sociale") (E3)». Cette caractéristique rassurait les patients qui se sentaient moins jugés qu’en médecine générale libérale « je réfléchissais mal (…) quand j’allais dans un médecin, quand je voyais la secrétaire, pour moi on dirait qu’on m’acceptait pas ici donc ça se fait que j’allais au CASOUS (…) les médecins généralistes extérieurs ils savaient pas trop ma situation alors que le CASOUS il connaissait bien la situation. (E16) ». Certains freins ou obstacles identifiés précédemment étaient moins présents au CASOUS, comme les transports en raison du caractère central du cabinet « comme je suis ici (en ville), je peux aller au CASOUS (E12) » ; la prise des rendez-vous en offrant la possibilité de consultations avec ou sans rendez-vous « je sais qu’y a des médecins qui peuvent consulter sur rendez-vous ou en libre. (E15) », avec l’inconvénient de ne pas pouvoir voir tout le monde « le CASOUS c’est sans rendez-vous, premier arrivé, premier servi. (E6) » mais avec des délais de rendez-vous relativement courts, tenant compte de la situation sociale précaire « quand on va au CASOUS on pouvait avoir des rendez-vous du jour au lendemain parce qu’on était dans des situations difficiles (E16) ». Il n’y avait pas de permanence des soins (« si faut que j’attende (si le CASOUS est fermé), ben je vais à l’hôpital. (E3)») mais une possibilité de consultation dans la semaine « y’a toujours un médecin à la disposition au moins un jour par semaine et c’est déjà pas mal. (E17) ».

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Les patients mettaient aussi en avant la qualité de communication « La discussion, discuter avec les personnes qui nous reçoivent, ils se mettent à l’écoute de ce que vous avez (E3) » et la disponibilité des médecins avec des consultations parfois longues en cas de besoin, sans être préjudiciables aux autres patients « au CASOUS j’ai eu le temps pendant trois quart d’heures de m’expliquer sans priver l’autre. (E3) ». Enfin la gratuité de la consultation était très intéressante quand les patients n’ont pas de couverture sociale « c’est fait pour les gens qui n’ont ni de CMU, ni de revenus (E6) », mais également quand ils avaient des problèmes administratifs et ne pouvaient justifier de leur droits « faut courir derrière les papiers (…) ça se fait que le médecin je venais le voir au CASOUS, pour moi c’était le moyen le plus facile. (E16) ». Lors des présentations avant de commencer l’enregistrement, certains patients ont évoqué le prénom d’un infirmier du CASOUS, qui faisait des maraudes et passait régulièrement dans ces lieux de vie ou d’hébergement, mais personne ne l’a cité durant les entretiens. Le CASOUS était donc un lieu de consultation médicale de premier recours ou de dépannage, spécifique des populations en grande exclusion qui pouvaient bénéficier d’un suivi de médecine générale « dans un premier temps, je vais au CASOUS ; et si le CASOUS, c’est pas disponible, je vais voir un MG. (E3). » Les usagers pouvaient également rencontrer des travailleurs sociaux pour les aider dans leurs démarches ou les orienter vers le soin. Ce caractère pluridisciplinaire et médico-social semblait apprécié des patients, et les rassurer. • Le CPO (Centre Portes Ouvertes) était également cité par les patients. C’était un lieu de soins associatif pluridisciplinaire (« Et il y a des médecins, des dentistes et y a même un ophtalmo. (E5) »), gratuit (« c’est gratuit, ça évite de payer. (E5) »), et comportant également une permanence sociale, même si cette dernière n’a pas été évoquée lors des entretiens. Plusieurs médecins intervenaient dans la structure. Ils n’étaient pas présents tous les jours mais revenaient régulièrement, offrant une constante dans les intervenants médicaux « y en a 3, mais ils se relient, c’est les 3 mêmes. Ils font chacun leur tour. / je vois toujours à peu près les mêmes (E5) ».

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Le centre possédait également une pharmacie associative « ils donnent des médicaments, ils ont une pharmacie (E5) ». Le CPO était considéré comme fonctionnant spécifiquement pour les patients ne bénéficiant pas de couverture sociale (« C’est fait pour les gens qui n’ont ni de CMU, ni de revenus (E6) »), et les personnes avec des droits CMU ne se sentaient pas toujours légitimes (« Le CPO, il prennent pas la CMU par exemple (E15) »). Pourtant certains patients tenaient pour diverses raisons à consulter au CPO et dissimulaient leurs droits de couverture sociale « s’il faut mentir pour se faire soigner je trouve ça bas. (E15) » ou « je serais obligé de mentir, dire que j’ai pas de CMU, pour avoir des soins… (E6) ». Ce principe était parfois jugé durement par les patients qui se sentaient contraints à dissimuler la réalité de leurs droits CMU, mais permettait également de faciliter le retour vers le droit commun : « jusqu’au moment que j’ai eu la CMU. Oui, ils m’ont dit d’aller choisir un docteur… (E4) ». Certains patients en situation de grande exclusion mais bénéficiant d’une couverture sociale et s’exprimant sans difficulté en langue française consultaient au CASOUS et/ou au CPO, soit dans le cadre d’un suivi médical régulier, soit ponctuellement en deuxième recours en cas d’absence ou d’impossibilité de consulter leur médecin traitant. Ces structures spécifiques aux populations en grandes difficultés sociales présentaient une prise en charge multidisciplinaire médico-sociale, et essayaient de lever certains des nombreux obstacles d’accès aux soins que rencontraient ces patients. Le travail en réseau avec les lieux d’hébergement ou de vie et les autres associations permettait aux professionnels et bénévoles associatifs une meilleurs connaissance des acteurs et de l’offre médico-sociale disponible, ainsi les patients étaient orientés de manière adaptée.

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D. Discussion Cette étude qualitative sur le mode de recours aux soins des patients en situation de grande exclusion de la ville de Tours a été très informative. Mais avant de s’intéresser aux résultats et de les comparer à la littérature, il est pertinent de discuter de la méthode de l’étude. 1/ justification de la méthode 1a - choix de la méthode La méthode qualitative est pertinente pour étudier la complexité des situations rencontrées en soins primaires. C’est une démarche scientifique inductive, bien adaptée à l’exploration des phénomènes médico-sociaux, qui permet une démarche interprétative (31). Les différentes études qui s’intéressaient aux personnes en situation de grande exclusion pouvaient s’interroger sur les caractéristiques de cette population, comme les études INSEE (11, 32), ou sur leur état de santé et besoin de prise en charge curative (7, 12, 13, 18, 19, 20, 21). La plupart de ces études étaient quantitatives (7, 12, 13, 18, 19, 20, 21) et souvent réalisées sur les lieux de soins (12, 13, 18, 19, 20, 21). Il était donc légitime et intéressant de questionner les patients sur leur lieu de vie, afin de ne pas sélectionner les plus demandeurs de soins, et de réaliser une étude qualitative pour explorer la diversité des comportements de cette population. La méthode des entretiens semi-structurés était plus adaptée à cette population que les focus groupes, en raison des difficultés de verbalisation et de conceptualisation retrouvées chez ces patients. 1b – choix de la population étudiée Les personnes sans-domicile présentaient des particularités sanitaires par rapport au reste de la population des précaires : - dans l’état de santé (7, 12, 13, 14) : tabagisme, mauvaise santé perçue (Risque relatif RR=1,93 chez les hommes et RR=1,84 chez les femmes par rapport à une population non précaire (12)), pathologies dentaires, infections des voies respiratoires supérieures et inférieures, signes fonctionnels digestifs, angoisse/stress/troubles somatiques, traumatismes, parasitoses…

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avec des besoins prévisibles de prise en charge à court terme (13), forte prévalence des pathologies psychiatriques (7)… - dans le parcours de soins (7, 12, 13, 15, 17, 18, 19, 20, 21, 22) : renoncement aux soins (RR de non-recours aux soins=5,21 chez les hommes et RR=9,54 chez les femmes (12)); obstacles à l’accès aux soins ; obstacles à l’obtention d’une couverture maladie (CMU, CMU-C, ACS, AME). Dans la population en situation d’exclusion, les personnes dans le dispositif d’urgence sociale (à la rue, ou hébergement d’urgences (115)) étaient plus vulnérables car ils avaient un moins bon recours aux soins que les personnes en CHRS ou hôtels (7, 12). Les principaux obstacles identifiés étaient le coût des soins et la barrière linguistique. Une population comprenant le français bénéficiant d’une couverture sociale complète n’aurait pas dû présenter les deux freins majeurs à la consultation en soins primaires. La couverture sociale complète pouvait être la CMU et CMUc, ou bien un autre régime de Sécurité Sociale couvrant les parts obligatoire et complémentaire des dépenses de santé remboursées dans le cadre du Régime Général (régime spécial, régime général et mutuelle complémentaire, invalidité…). Cependant de nombreux frais restaient insuffisamment ou non remboursés, comme certains médicaments ou soins, le transport, la part complémentaire non remboursée entièrement par certaines mutuelles, des dépassements d’honoraires, les franchises médicales... Le frein financier n’était donc que partiellement levé par la couverture sociale (18, 20, 24). Pour les personnes mineures, un parcours administratif et judiciaire précisé par la loi du 5 mars 2007 (33) définit une prise en charge des situations d’urgence sociale. Ce cadre législatif permet, selon les cas, un accompagnement éducatif de la famille ou un placement en institution. La demande peut émaner de la famille, de l’enfant ou être ordonnée par un juge. Les mineurs de nationalité étrangère sans autorisation de séjour sur le territoire français sont pris en charges par l’Aide Sociale à l’Enfance jusqu’à leur majorité (34). A ce titre, ils bénéficient systématiquement d’une

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couverture CMU. Les mineurs ne devraient donc pas être en situation d’exclusion et n’étaient pas interrogés dans le cadre de l’étude car leur problématique d’exclusion et d’accès aux soins était spécifique. La population de cette étude était donc définie par les personnes majeures en situation de grande exclusion de la ville de Tours ne présentant pas d’obstacle linguistique et disposant d’une couverture sociale complète. 1c – Echantillon raisonné de la population étudiée Les personnes interrogées correspondaient bien à la population en situation de grande exclusion au regard de la littérature, avec une répartition par sexe, âge et nationalité (française ou étrangère) proche de celle retrouvée dans la population sans-domicile en 2012 (32). L’échantillon est donc raisonné. Toutes les personnes interrogées étaient sans domicile, souvent en foyer d’accueil temporaire (14 personnes), parfois en hébergement amical (2 personnes), ou vivant dans la rue (2 personnes). Sex-ratio : Une étude récente réalisée en France par l’INSEE (y) a recensé les personnes sans-domicile en 2012 ; parmi cette population, on retrouvait 38% de femmes et 35% d’étrangers francophones. Lors de l’étude réalisée dans ce travail de thèse, 6 femmes ont été interrogées lors de 19 entretiens (soit environ 31,5%), ainsi que 5 personnes de nationalité étrangère (soit environ 26,3%). Âge : La répartition par tranche d’âge des personnes interrogées correspond à celle retrouvée dans l’étude de l’INSEE. 4 personnes parmi les 19 avait entre 18 et 30 ans, soit 21,1% (INSEE : 26%), 10 avaient entre 30 et 49 ans, soit 52,6% (INSEE : 49%) et 5 avaient plus de 50 ans, soit 26,3% (INSEE : 25%). Couverture sociale : Une personne interrogée présentait des critères d’inclusion partiels. Elle avait une couverture sociale complète pour un motif de recours aux soins en rapport avec l’affection longue durée (RG+ALD). Elle bénéficiait de conditions d’accès aux soins dans le cadre de l’ALD et ne présentait pas de frein financier à l’accès aux soins.

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1d - Choix des lieux de réalisation de l’étude Pour accéder à la population en situation de grande exclusion, les lieux de restauration semblaient les plus pertinents, puis les lieux de vie et enfin les hébergements d’urgence. Selon l’étude EMSA2009 à Toulouse (30), seuls 40% des sans-abri avaient fréquenté les lieux d’accueil de jour durant la semaine précédant l’enquête. De plus, une enquête dans ces lieux s’intéressant aux personnes en situation de grande exclusion (sans-abri, sans-domicile) n’aurait atteint que 25 à 50% des populations concernées. Parmi les personnes sans abri fréquentant les services de Toulouse ou contactées par un service itinérant durant une semaine moyenne, 92% fréquentaient les repas de midi et du soir et 38% n’auraient pu être enquêtées ailleurs. (30) Dans un rapport du Samu Social de Paris en 2010 (5), 67,5% des personnes fréquentant ce lieu d’accueil de jour en 2010 étaient sans ressource, et 75% décrivaient une errance depuis plus de un mois. Les Pouvoirs Publics et les différentes associations de la ville de Tours proposaient un maillage complexe avec des lieux de restauration, d’hygiène ou encore d’accueil pour les populations en grande précarité. En effet, au moment de la réalisation de l’étude, ces personnes avaient accès à des lieux de restauration (Halte du matin, Halte de jour, Restaurant Social Voltaire, Restaurant Entraid’Ouvrière, Cherpa…), des lieux d’aide alimentaire sous forme de colis, des lieux d’hygiène, et des lieux d’accueil (CASOUS, Halte du matin, Halte du midi, Halte des femmes (Secours Catholique), La Barque …)… destinés aux personnes en situation d’exclusion. Les Haltes du Matin et de Jour étaient à la fois des lieux d’accueil, d’hygiène et de repas. Ces lieux présentaient donc un intérêt particulier pour s’adresser à une population en situation de grande exclusion car ils proposaient des activités diversifiées. Cependant, en raison de l’existence de la Halte des femmes, une particularité tourangelle, les Haltes de jour et du matin étaient à prédominance masculine. Les foyers d’hébergement d’urgence étaient également un lieu de restauration pour le diner. Le foyer pour femme La Nuitée semblait donc

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approprié pour interroger une population féminine en situation d’exclusion. 1e – Elaboration de la grille d’entretien La grille d’entretien réalisée au préalable a du être modifiée après les deux entretiens pré-test (non retranscrits et non codés dans l’étude). Les questions étaient trop générales. Il semblait difficile pour ces personnes en situation de grande exclusion de répondre à des questions ouvertes très larges, de conceptualiser leur parcours de soin. Par exemple, la question « comment faites-vous pour consulter un médecin généraliste ?» est mal comprise, car sans doute trop abstraite. Les personnes interrogées ne savaient alors comment répondre. En introduisant l’image et en le rattachant à leur quotidien, ces personnes ont ainsi été en capacité d’expliquer leur accès aux soins (par exemple : « si demain matin, en vous levant, vous ne vous sentez pas bien, vous ressentez le besoin de consulter un médecin, comment faîtes-vous ? Par quoi commencez-vous ? Concrètement ? »). Malgré tout, l’élaboration des réponses a été parfois assez difficile, nécessitant des relances pour ancrer le récit dans le réel, et favoriser la parole des personnes interrogées. Cependant ces reformulations pouvaient induire une dévalorisation. Ces sollicitations répétitives mettaient en avant la difficultés de démarches de soins de ces personnes, en précisant des obstacles qu’elles n’exprimaient pas spontanément. Parfois ces relances ont induit une défiance ou un repli et ont dû être interrompues. Les modes d’accès aux soins n’ont alors pas toujours été bien individuellement approfondis. Les questions concernant le parcours de soins s’intéressaient aux habitudes de recours à la médecine générale, puis à une éventuelle démarche de soin à court terme. Ces deux axes (vécu et anticipation) ont ensuite été codés séparément. L’anticipation faisait appel à une projection et les réponses pouvaient laisser apparaître un déni de leurs difficultés. Néanmoins, en raison des très fortes similitudes des réponses apportées, les codes de ces deux axes ont été traités ensemble.

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Certaines questions ou pistes de réflexion sont apparues au cours des entretiens, comme la prise en charge des pathologies dentaires ou le suivi gynécologique des femmes en situation d’exclusion. Cependant cette dernière question aurait nécessité un travail centré sur cette problématique comme l’a réalisé de manière quantitative le Samu Social de Paris en 2005 (35). L’obtention, l’usage et la conservation des droits sociaux sont problématiques mais essentiels pour les populations en situation d’exclusion. Ce questionnement n’est que rarement abordé spontanément et a donc été inclus dans la trame d’entretien. Certaines de ces données ont ensuite été intégrées lors du codage explicatif dans les chapitres concernant les difficultés à consulter un médecin de premier recours (rupture de droits, complexité des démarches administratives…) et celui définissant la place et le rôle des aidants professionnels ou non (orientation pour l’obtention de la CMU, renouvellement, aide aux démarches administratives…). 2/ Limites de l’étude 2a - Conditions de réalisation de l’étude 19 entretiens d’une durée de 9 à 33 minutes ont été réalisés. La durée de ces entretiens était relativement brève (18 minutes en moyenne), vraisemblablement en raison des difficultés d’élaboration et de verbalisation qui font partie des caractéristiques de la population des personnes en situation de grande exclusion. Le langage de la rue est bien particulier, souvent réduit au minimum, inexistant (9), la perte du rapport à soi et à l’autre induit une carence relationnelle majeure (8) et des difficultés à verbaliser, parler de soi. Cependant les entretiens ont été de bonne qualité, réalisés dans des bureaux mis à disposition, et de très nombreuses informations ont été évoquées ; les données sont arrivées à saturation. La retranscription et le codage des entretiens préalablement réalisés ont alors été interrompus. La validité du codage ouvert a été étayée par un codage multiple sur le premier entretien ; puis le travail a été étroitement supervisé par les directeur et co-directeur de thèse.

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Il est à noter que, si la plupart des discussions ont eu lieu au calme dans un bureau dédié, certains entretiens ont pu être écourtés ou dérangés par un tiers environnemental selon les structures (dans le bureau de la Halte du matin, se trouvait le téléphone et l’accès à la machine à laver ; le bureau de la Halte de jour était à l’écart mais vitré). La relative courte durée des discussions peut également être expliquée par les difficultés de mener un entretien avec des personnes en situation d’exclusion. Ces personnalités fragilisées, psychiquement et socialement marquées, nécessitent peut-être une approche différente. Une présentation en amont, une présence au sein de l’équipe sociale plusieurs jours avant les entretiens auraient peut-être diminué les réticences et méfiances, et favorisé une parole plus libre. Certaines personnes (trois ou quatre) ont en effet refusé de participer aux entretiens, peut-être pour les mêmes raisons qu’ils ont des difficultés à consulter (peur du jugement, difficultés de communication…). 2b - Biais de recrutement L’organisation de l’offre de soin à Tours induit un comportement vis-à-vis de l’accès aux soins et limite l’interprétation des résultats. La ville de Tours présente des particularités organisationnelles, associatives, structurelles. Les résultats de cette étude ne sont pas transposables à une autre ville, où, par exemple, il n’y aurait pas la même organisation des structures associatives de soins. Les travailleurs sociaux des lieux de vie et de restauration choisis ont été très facilitants pour informer et orienter les personnes vers les entretiens ; cependant ils ont également pu constituer un biais de recrutement malgré eux en sollicitant davantage les personnes avec une meilleure verbalisation. De plus, certaines personnes, peut-être les plus marginalisées, ou ayant des difficultés de communication, n’ont pas souhaité participer à ces entretiens. Les personnes interrogées étaient vraisemblablement celles qui ont le moins de difficultés à aller vers le soin. Les entretiens ont eu lieu pendant une semaine de juillet 2012. Certains

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grands exclus se déplacent en période estivale et n’ont donc pas été inclus dans cette étude. En comparaison avec les récits que font des médecins ou journalistes des personnes en situation de grande exclusion (8, 9, 10), il apparaît que la partie la plus marginale de ces grands exclus n’a pas été atteinte. Peut-être que le biais de sélection selon le lieu n’a pas permis d’interroger les patients vivant régulièrement dans la rue, sollicités par les maraudes des associations qui cherchent à leur rendre un peu d’humanité et leur apporter du soin, mais ne se rendant pas dans les lieux de vie ou de restauration. Cependant ces personnes pourraient relever d’une prise en charge médico-sociale bien spécifique (maraudes, Samu social (8)), et non des soins primaires proposés dans le cadre de la médecine générale. Une autre explication peut également être avancée. Ces patients n’avaient sans doute pas de couverture sociale et ne rentraient donc pas dans les critères d’inclusion de l’étude. Par ailleurs, les plus fragilisés ont pu refuser de participer aux entretiens, comme vu précédemment. Enfin, il existe de nombreux autres sites de restauration ou d’hébergement dans la ville de Tours. En raison de l’importance de la notion de territoire chez ces patients, les populations fréquentant ces lieux associatifs ne sont peut-être pas répartis de manière homogène entre ces différents lieux. Ces derniers sont peut-être des éléments constitutifs d’une certaine identité. Ainsi, en restreignant le nombre de sites de réalisation de cette étude, l’échantillonnage raisonné n’a peut-être pas été opéré sur toute la population étudiée. 2c - Limites d’interprétation L’interprétation de ces réponses était difficile car les obstacles évoqués étaient souvent sous-évalués, minimisés dans le discours. Les personnes exclues présentent des difficultés à conceptualiser leur parcours de soin, à expliquer ce qu’ils ont ou auraient pu faire dans une

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situation de demande de soins, à légitimer leurs actions, découper leur démarche. Ils restent dans du concret. Les réponses obtenues, courtes, relataient des événements de vie, parfois épars ou partiels, pas toujours représentatifs de leurs habitudes. Ils racontaient ce jour où ils ont consulté à tel endroit. Par les relances successives, l’entretien retraçait les différentes étapes, et faisait apparaître la complexité du parcours. 2d - Difficultés rencontrées lors des entretiens. Les entretiens ont bien sûr été très hétérogènes, à l’image du profil des personnes interrogées, certains élaborant plus facilement leurs réponses ou digressant, d’autres ayant des réponses courtes et nécessitant des relances et des demandes itératives de précisions. Pour ces derniers patients, certaines réponses ont pu être induites par les relances. Ces dernières ont parfois été l’origine de réactions, certains patients n’en comprenant pas l’utilité ni la finalité de cette étude. Quelques entretiens ont été écourtés, ou perturbés, soit pour une raison extérieure (téléphone, passage d’une personne…), soit par souhait du patient (fatigue…). Deux entretiens n’ont pas été retranscrits ni codés. L’un car la personne n’était pas dans les critères d’inclusion lors de l’entretien (n’avait jamais eu de CMU ou AME). Pour l’autre, l’entretien a été écourté car la personne s’est emportée, ne comprenant pas l’intérêt de ce travail (durée de l’entretien : 5 minutes).

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3/ Discussion des résultats obtenus 3a - Un recours aux soins primaires en médecine générale, mais… La bibliographie et mon expérience personnelle tendaient à soutenir que les personnes en situation d’exclusion n’avaient pas de suivi régulier en médecine générale. Cependant, cette étude a permis de démontrer que ce suivi existe, en partie. Il est hétérogène, mais articulé autour d’un médecin généraliste. Les patients identifient et valorisent le suivi avec un médecin traitant, montrant un attachement à cette prise en charge, même si les réalités du quotidien avaient occasionné des ruptures fréquentes (déménagement, difficultés de transport, soins dans l’urgence…). Ils retrouvent dans le suivi avec un médecin de premier recours des valeurs humaines comme la confiance, la communication, la connaissance de l’autre. C’est le médecin de famille, avec un rôle de stabilité, d’intimité assez surprenante dans la vie d’errance et d’exclusion. Ce suivi peut leur rappeler une vie antérieure à l’errance. Ils recherchent aussi des soins et un médecin de qualité, questionnant autour d’eux pour choisir leur praticien, celui ci n’est pas interchangeable. Cependant cette notion est à modérer selon l’urgence ressentie. Les patients se tournent alors vers les autres structures de soins comme le service des Urgences ou les structures associatives. A ce moment-là, un médecin est un médecin, tous se valent tant qu’ils ont accès aux soins rapidement et qu’ils n’ont pas besoin d’attendre un rendez-vous ou dans une salle d’attente. Un suivi régulier chez un médecin peut s’interrompre pendant les périodes de rupture de droits. Certains ne feront même la démarche de renouveler leur couverture sociale qu’en cas d’urgence absolue. Ce déni des droits est bien décrit dans la littérature (1, 2, 8, 13, 15, 20, 23), et se retrouve donc même chez des patients ayant eu un suivi régulier pendant une période de leur vie. Pour les personnes en situation de précarité, le lien avec la médecine libérale peut être remis en question rapidement dès qu’un obstacle de plus se présente et en particulier financier. C’est un lien fragile.

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Peut-être plus particulièrement pour les patients qui ont des situations plus complexes et qui ressentent plus d'obstacles, il existe une fracture avec le monde médical avec des propos qui peuvent être ambivalents. Ils valorisent le médecin généraliste mais se sentent loin de cette réalité du soin, considérant parfois qu’ils n’ont pas la légitimité d’y avoir accès, préférant les structures associatives qui sont des lieux spécifiques pour les patients en difficultés sociale. Ils sont dans un droit particulier, s’opposant à un droit commun, allant parfois jusqu’à mentir pour accéder sans trop de questions à ces structures, prétendant qu’ils n’ont pas de couverture sociale. L’errance, la répétition des mêmes schémas délétères, les échecs de la réinsertion sociale peuvent être analysés comme une « résistance thérapeutique négative » que décrit Freud. Un moyen de retomber dans l’exclusion qui anesthésie les corps et l’esprit, comme l’on peut le voir dans certaines conduites addictives. Sortir de la rue peut être anxiogène et peut faire remonter des souffrances bien antérieures. Selon la philosophe Catherine Malabou (8), le symptôme le plus frappant de la grande exclusion est l’indifférence affective et émotionnelle des patients, la rupture de tout lien, y compris du lien fondamental qui nous attache à nous-même, ce lien que Jean-Jacques Rousseau appelle l’amour de soi. Ces personnes sont repliées sur leurs défenses, qui se résument le plus souvent à l’indifférence, elles sont comme effondrées sur leurs archaïsmes, elles n’ont en général pas conscience de leur état de santé et du danger qu’il présente. 3b - Des motifs de consultation au coup par coup La situation des personnes en état de grande exclusion interrogées lors de cette étude retrouve la complexité mise en avant dans la littérature, tant sur le plan de l’hébergement (manque de disponibilité des places en hébergement d’urgence…), que des démarches administratives, ou de l’alimentation. Les soins ne sont donc pas toujours une priorité (15). La fréquence de consultation en soins primaires est également hétérogène, comme l’avait déjà mis en évidence dans l’étude SAMENTA (7) : certains patients consultant fréquemment alors que d’autres ont un accès tardif et rare, parfois temporisant avec une automédication.

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Les motifs de recours aux soins sont souvent une plainte fonctionnelle, parfois dans l’urgence, avec des motifs très variés, allant du traumatisme aiguë à la pathologie psychiatrique. Cette diversité est également citée dans la littérature. 3c - Des obstacles préoccupants et des renoncements à l’accès aux soins La littérature est fournie sur les différents obstacles à l’accès aux soins. Ils sont retrouvés dans cette étude. L’obstacle financier, bien qu’atténué par les critères d’inclusion, persiste, même avec couverture complète (17, 18, 20, 22, 23) : dépassements d’honoraires, déremboursement de médicaments, avance de frais, coût du transport... Les personnes en situation de grande exclusion ne bénéficiant pas de couverture sociale sont les plus nombreux à déclarer un renoncement aux soins. Néanmoins les bénéficiaires de la CMU-C présentent également des difficultés d’accès aux soins. Près d’un bénéficiaire de CMU-C sur cinq (19%) a déclaré avoir déjà renoncé à se soigner pour des raisons financières (17, 22), principalement pour les soins bucco-dentaires (63%), l’optique, l’accès aux consultations spécialisées (17) ou les consultations en médecine générale (21, 23). Dans une enquête de mars 2011 réalisée dans 20 centres de santés (21), parmi les patients bénéficiant d’une couverture complète CMU+CMU-C, 9,5% des patients qui avaient obtenu la CMU-C depuis moins d’un an déclaraient avoir renoncé pour raisons financières à des consultations avec un médecin généraliste (6,7% si la CMU-C avait été acquise depuis un an ou plus). Le Comité National de Lutte contre la pauvreté et l’Exclusion sociale (CNLE) dans son avis de juillet 2011 (22) rappelle que plus de 20 % des personnes bénéficiant de la CMU-C n’ont pas recours aux soins, et que de nombreux professionnels de santé persistent dans le refus de soins. Ce défaut de recours aux soins est expliqué par le déficit d’informations sur le dispositif, mais également par le coût restant à charge du patient (pour certains examens, médicaments) et la complexité du dispositif (18, 20, 22).

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La méconnaissance des droits et le défaut de couverture sociale sont également évoqués. Les patients décrivent des difficultés administratives. Renouveler à temps la couverture sociale ou encore être en mesure de présenter leur carte vitale à jour ou leur attestation de CMU n’est pas toujours évident et spontané. Nombreux décrivent des périodes de rupture de leur couverture sociale. Ils se tournent alors vers le milieu associatif. Les trois quarts des patients consultants dans les dispensaires de Médecins du Monde relèvent d’un dispositif de couverture maladie, mais ils ne sont que 24 % à disposer de droits ouverts (13). Une étude réalisée en 2011 à la PASS de Grenoble retrouve que le premier frein à l’accès aux soins est la méconnaissance des droits (30,5%) avec un défaut de couverture sociale (20). Les difficultés administratives constituent un second obstacle fréquemment décrit (20,7%), avec des pratiques pouvant être considérées comme abusives des administrations, parfois sous couvert de la lutte contre les abus et la fraude (13, 20, 23). Le droit d’entrée à l’AME est également un générateur de non recours aux soins : les personnes ne se sentant pas malades diffèrent la demande d’AME et sont donc sans couverture sociale alors qu’ils pourraient y avoir accès (22). La maîtrise de la langue n’empêche pas les difficultés de communication : manque d’écoute de la part du médecin, sentiment d’être jugé, discours moralisateur…

Parmi les patients disposant de la CMU, un tiers déclare renoncer aux soins pour des problèmes de relation avec le soignant (pas d’écoute, humiliation, manque de respect, non-compréhension) (19). Les autres freins évoqués dans la littérature (13, 20, 21) sont également retrouvés dans l’étude : transport, manque de temps, délais de rendez-vous, soins jugés non utiles, peur du résultat (21), refus de soins (13, 18, 23), obstacles culturels (20), la peur d’une arrestation (13).

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A noter que la problématique autour de la prise de rendez-vous et notamment par téléphone (accès au téléphone, difficultés et peur d’utiliser ce moyen de communication, modalité de contact uniquement par téléphone …), très présente dans l’étude, n’est pas retrouvée dans la littérature. Les personnes sans-domicile ont parfois des difficultés liées à leur mobilité. Elles se déplacent au sein même d’une ville ou changent de ville. Cette rupture géographique est responsable d'une cassure dans le suivi médical. Les personnes interrogées qui avaient déménagé récemment n’avaient pas encore réussi à retrouver le suivi médical antérieur au déménagement. Il faut à nouveau s'engager vers une nouvelle relation, ressentir le besoin ou la nécessite de consulter. Lors des déménagements au sein même de la ville de Tours, les difficultés majeures liées aux transports collectifs (connaissance, horaires, prix…) induisent l’abandon d’un médecin régulier, évoqué dans les entretiens. Cependant les interviewés essayent aussi de conserver ce lien avec leur médecin traitant, parcourant parfois des dizaines de kilomètres en bus pour le consulter. En dehors du recours aux aidants pour s’affranchir des obstacles à l’accès aux soins et des obstacles parfois spécifiques à cette population, cette étude n’a pas permis de mettre en avant un profil de recours au soins stéréotypé, monolithique. La vie à la rue est constituée de débrouille, chacun s’adapte à sa manière, certains frappent à une porte quand ils voient une plaque de médecin, d’autres oublient la douleur et attendent, ou encore traversent la ville pour demander une aide à la prise de rendez-vous… Or le système de soins français est très administratif (demande et renouvellement de droits d’Assurance Maladie, déclaration de médecin traitant, présentation de la carte vitale ou d’une attestation…) et organisé (respect des heures de rendez-vous, prise en charge courte et efficace, règles de bienséance, attente au cabinet du médecin, prise de rendez-vous par téléphone…). Ces caractéristiques sont des freins à l’accès aux soins pour des personnes qui vivent au jour le jour et n’ont pas beaucoup de considération d’eux-mêmes (13, 20).

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Malgré un suivi en médecine générale valorisé et présenté comme ayant de nombreux avantages, les patients en situation d’exclusion bénéficient difficilement d’une prise en charge inscrite dans le long terme. En raison des nombreux obstacles ou des difficultés sociales de ces patients, les situations sanitaires sont gérées dans l’urgence : difficulté d’anticiper un déplacement, temporisation jusqu’à une urgence ressentie, recherche d’un médecin dans la précipitation après un déménagement… Une pathologie aigüe et même un renouvellement de traitement peuvent être vécus comme une urgence. Le recours au médecin régulier est rendu ainsi plus difficile. Ces praticiens peuvent manquer de disponibilité et proposer un rendez-vous très tardif ; ou bien le patient peut se situer loin de son médecin et se tourner vers les associations, le service d’accueil d’urgence ou un autre médecin non régulier. Le Service d’Accueil d’Urgence (SAU) offre alors une possibilité d’accès aux soins. Une étude de 2011 dans le SAU du centre hospitalier d’Arras révèle que 48% des patients étaient en situation de précarité (évaluation avec le score EPICES) (4, 36). Mais le SAU n’est pas un lieu de suivi médical et la prise en charge sociale n’y est pas optimale (37). Les consultations sans rendez-vous des médecins généralistes sont également une alternative en cas d’urgence. Elles permettent une prise en charge rapide, souvent chez un médecin non habituel. Mais ces consultations ont pour fonction de se préoccuper d’un problème urgent ou ponctuel. Elles ne sont pas non plus le lieu d’un suivi médical bien établi. Les associations médicales ne sont pas présentes sur tout le territoire, sont limitées quant à leurs possibilités d’accueil et peuvent participer à renforcer l’exclusion en offrant un accès aux soins particulier (20). Dans ce contexte, les mesures préventives sont donc très laborieuses à mettre en place. L’observatoire du Samu Social, dans son étude sur les femmes et la précarité (35), décrit bien les difficultés d’une prise en charge préventive pour cette population, notamment sur le plan gynécologique.

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3d - Le rôle important de l'aidant et ses limites Un apport majeur de ce travail a été de mettre en évidence le rôle clef des aidants dans l’accès aux soins primaires des populations en situation de grande exclusion de la ville de Tours. En effet cette étude s’intéresse au parcours de soin en dehors des lieux de soins ; ainsi elle met en lumière l’accompagnement en amont réalisé par les différents aidants, travailleurs sociaux ou non, associatifs ou institutionnels. Les sans-domicile sont sur-adaptés à la vie à la rue. Ils n’écoutent plus leur corps, leur souffrance, ils sont perdus dans le temps et l’espace, ils ne communiquent plus (8). Ils ne sont pas demandeurs de soins, ou bien ne connaissent plus les codes sociaux pour y accéder. Si certains patients ont un recours assez régulier au médecin généraliste, celui-ci est accompagné. Pour les autres patients, ceux qui ont un accès aux soins difficile, avec souvent des périodes de rupture de soins, les travailleurs sociaux ont un rôle fondamental. Ils leurs permettent de retrouver une identité, prendre conscience de leur corps, afin d’être en mesure d’accéder aux soins. Le « désir de soin » évoqué dans les théories psychanalytiques étant partiellement ou totalement aboli chez ces patients, le désir de soin des aidants ou des soignants doit se substituer à celui des patients. Pour les patients les plus marginalisés, les infirmiers ou travailleurs sociaux des maraudes associatives permettent d’apporter un soin primaire de fortune à ceux qui sont hors de leur corps. Quand les sans-domicile ou les marginaux parviennent à se rendre dans des lieux de vie ou de restauration, ils retrouvent un peu de lien social. Les travailleurs sociaux ont alors un rôle de « tuteur » comme le décrit le Docteur Emmanuelli (8) et comme le retrouve ce travail de thèse : depuis le questionnement et l’encouragement à se prendre en charge, à l’accompagnement chez le médecin, en passant par la prise de rendez-vous ou l’aide au transport et surtout la mise en place et le maintien d’une couverture sociale. Ce tutorat, le plus individualisé possible, permet au patient de franchir les différents obstacles qui se présentent.

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Les patients évoquent à de multiples reprises l’intervention de différentes personnes pour les accompagner dans leur recours au soin. Cependant ceci peut également être un facteur de retard d’accès aux soins. En effet, ces personnes ne disposent pas des ressources matérielles et/ou psychiques pour entrer dans une démarche thérapeutique et se trouvent contraintes de s’adresser à un aidant. Ce dernier permet d’améliorer la prise en charge. Les patients qui sont les plus autonomes sont également ceux qui connaissent un médecin généraliste et le valorisent dans leurs propos. Toutefois, ils ne sont plus en mesure d’entamer seuls la démarche du soin. Le réflexe des personnes interrogées lors des entretiens est de se tourner en premier lieu vers les aidants. Ils peuvent en devenir tributaires, intégrant comme une norme incontournable de s’adresser aux travailleurs sociaux pour ces démarches. Il est donc important que ces derniers en aient conscience pour, progressivement, aider le patient à se réapproprier les outils et codes de communication, l’aider à se reconstruire sur le plan des relations à autrui. 3e - Des structures spécifiques de médecine générale favorisant l’accès aux soins La vie à la rue déconstruit le fonctionnement des individus. Les structures de soins associatives comme le cabinet médical du CASOUS ou le CPO, souvent retrouvées lors de l’étude, apportent une réponse, au moins partielle. Ils redonnent du sens et une reconnaissance à ces personnes exclues. Certes un monde à part dont il faudra sortir quand ils le pourront, vers une démarche de réinsertion, pas toujours réalisable, mais surtout un monde qui les comprend et leur est accessible sans trop de difficulté. Ces structures cherchent à s’affranchir de certains obstacles : géographique, administratif, organisationnels, mais également sociaux et relationnels. Les consultations sont plus longues, avec et sans rendez-vous et paraissent plus spécifiques à un type de population en errance ou en difficulté sociale. Cependant, ces consultations ne sont pas souvent le lieu d’un suivi médical à long terme, comme mon expérience semblait l’indiquer. Nombreux patients ont un suivi régulier en médecine générale libérale et peuvent avoir recours

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ponctuellement à ces structures associatives en particulier lorsqu’apparaissent ou se cumulent plusieurs obstacles à l’accès au soin. Les travailleurs sociaux orientent parfois vers ces lieux organisés autour de la précarité et l’exclusion, mais également souvent vers les soins primaires en médecine générale. 3f - Place des médecins généralistes libéraux et autres médecins de premier recours Les personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours ont recours aux médecins de premier recours, plus ou moins facilement, rarement spontanément. Elles présentent des spécificités psychiques voire psychiatriques (7, 8, 15), très fréquentes, souvent associées à une consommation abusive d’alcool. Quelles soient causes et/ou conséquence de la vie à la rue, ces troubles psychiques occasionnent un frein majeur à consulter ou entamer un suivi de médecine générale. Les pathologies somatiques, en lien ou non avec les caractéristiques sociales, s’aggravent par le retard ou le non-recours aux soins. En France, la prise en charge des personnes en situation d’exclusion vise la réinsertion, et non les soins (8). Un patient marginalisé, déstructuré, peut-il vraiment entamer une démarche de réinsertion sans une prise en charge médico-psycho-sociale adaptée ? Le médecin généraliste a un rôle dans la prévention des situations d’exclusion, en réalisant une orientation adaptée et une prise en charge des troubles psychiatriques. Ces derniers étant des facteurs de risque de marginalisation. Mais il a également un rôle curatif, en identifiant ces patients et en leur proposant un accompagnement adapté. Les patients en situation d’exclusion ou grande difficulté sociale ne se présentent pas toujours comme tels, il faut déjà arriver à les distinguer. De plus, ils ne sont pas toujours dans une démarche de soin, notamment sur le long terme, ni de prise en charge psychiatrique (addiction, dépression, thérapie de soutien…). Il est donc important de former les futurs et actuels praticiens généralistes à l’exclusion.

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Au delà de l’avis spécialisé, ils doivent participer à l’accompagnement spécifique de ces patients, comme cela est réalisé au cabinet médical du CASOUS, en jouant un véritable rôle d’aidant dans le parcours de soins (prise de rendez-vous téléphonique, délivrance de plans, réassurance…), en instituant un suivi et une prise en charge psychologique ou psychiatrique. Cela peut-être avant même de se pencher sur les pathologies somatiques. L’interrogatoire de ce type de patients, considérés comme difficiles, et l’examen des différents obstacles, notamment relationnels, que présentent les personnes interviewées dans le cadre de ce travail, permettent de comprendre la complexité de la prise en charge pour un médecin généraliste. La formation initiale dont j’ai bénéficié comprenait des notions de sociologie autour de la précarité en première année, un séminaire facultatif d’une journée sur les pathologies des migrants lors du troisième cycle et un stage en SASPAS de 6 mois lors duquel un de mes quatre maîtres de stage travaillait au cabinet médical du CASOUS. Cela montre bien à quel point cette prise en charge est encore déconsidérée lors de notre formation initiale. Une meilleure formation des médecins généralistes pourrait passer par une information sur les risques d’exclusion liées aux pathologies psychiatriques lors des enseignements de spécialité, un approfondissement autour des spécificités des précaires et exclus lors des formations initiale et continue. A noter qu’il existe déjà un enseignement en lien avec la précarité sous forme de diplômes universitaires à Paris, Bordeaux ou Montpellier… mais, au vu de l’importance de la précarité et de l’exclusion, ces formations devraient être répandue sur l’ensemble du territoire. Les patients bénéficiant de la CMU décrivent encore des refus de soins, alors que l’objectif se voulait d’inscrire chaque patient dans un parcours de soins. Le système actuel, avec une pénalisation financière du médecin lors des tiers-payants CMU si le patient n’a pas déclaré de médecin traitant, peut participer à l’exclusion et aux refus de soins. Un rapport d’évaluation de la Loi CMU en 2009 (38) cherchait des explications en interrogeant les médecins pour légitimer leurs refus de soins. Les éléments les plus cités étaient le non-respect du parcours de soins,

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l’irrespect des règles (heures de rendez-vous, mise à jour carte vitale…), et surtout la non-déclaration du Médecin Traitant. Ils décrivaient des « Patients ingérables ». Le rapport précisait que, en réalité, 86,5% des patients ayant la CMU avaient déclaré un médecin traitant, contre 84,6% des patients sans CMU. Cependant il omettait que pour les 13,5% restants les médecins consultés étaient financièrement pénalisés. Rappelons le Serment d’Hippocrate que prête tout médecin « Je donnerai mes soins à l'indigent et à quiconque me le demandera. (…) Que les hommes et mes confrères m'accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré et méprisé si j'y manque. ». Peut-être est-il de responsabilité ordinale de rappeler ces principes ? En conclusion, le médecin généraliste a un rôle primordial dans la prise en charge préventive et curative, ainsi que dans l’orientation des patients en situation de précarité ou d’exclusion. Cette prise en charge doit être pluridisciplinaire, en introduisant une véritable communication d’équipe entre les différents intervenants. L’intérêt du travail en réseau a été également souligné par cette étude. A Tours, une prise en charge spécialisée psychiatrique est proposée aux personnes sans domicile, à l’hôpital (PASS psychiatrique), ou dans certains lieux associatifs (Equipe Mobile de Psychiatrie et Précarité, unité hospitalière intervenant dans les Haltes), et même au cabinet médical du CASOUS (il existait des consultations avec un médecin psychiatre lors de la réalisation de l’étude). Ces différents intervenants permettent une prise en charge médico-psychiatrique. Mais qui mieux que ces patients rappellent la définition de la santé de l’Organisation Mondiale de la Santé incluant le champ social au côté du médical et du psychologique (39). Pour que la prise en charge soit complète, il est indispensable que les réseaux de soins intègrent comme cela se fait déjà les institutions en charges des problématiques sociales (Conseil général, Municipalités, Hôpital, CPAM…), les associations et travailleurs sociaux associatifs. Le médecin généraliste doit entrer dans ce réseau pour avoir les moyens du soin adapté.

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3g – Regard politique Patrick Declerck (10) rappelle qu’ «en plus d’être le produit d’une pathologie sociale, économique et culturelle, la clochardisation est aussi, profondément, un symptôme psycho-pathologique ». Il est donc primordial de le traiter ainsi, par un soutien humain, médical, associatif. La lutte contre les inégalités de santé est un sujet que les politiques nationales cherchent à réduire avec de belles avancées comme la mise en place des PASS hospitalières en 1998 (26, 27), puis la création de la CMU et l’AME en 1999 (25). Cependant ces avancées sont parfois insuffisantes ou saturées. Le Réseau Précarité d’Ivry sur Seine a rédigé une lettre d’alerte (40) suite à l’augmentation du nombre de personne en situation de grande précarité sans adéquation des moyens sanitaires. Les PASS, PMI, CMS, CSAPA, le centre de santé municipal et les différentes associations ne peuvent répondre correctement à cette demande croissante. La mise à l’abri seule ne peut suffire à permettre à ces personnes de retrouver la dignité dont ils ont besoin pour se reconstruire socialement, physiquement et psychiquement. Cette lettre liste laconiquement les conséquences à moyen et long terme que peuvent avoir ces défauts de prise en charge médico-psychologique : un risque épidémique (notamment tuberculeux), un risque de décompensation de maladies mentales suite aux ruptures de soins, une aggravation des troubles de comportement liés aux addictions non prises en charge, sans parler de la baisse de la couverture vaccinale et d’une insuffisance des dépistages des IST. C’est donc bien une question politique d’associer (ou même parfois de faire précéder) aux démarches sociales à une véritable prise en charge médico-psychologique indispensable. Pour lutter contre la persistance de certaines difficultés soulevées dans cette étude, le rapport au premier ministre de la sénatrice Archimbaud (23) propose une réflexion sur ce sujet. De nombreuses analyses et

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propositions de ce document visent à simplifier les démarches, améliorer le recours à la couverture sociale ou au soin, ou diminuer les obstacles bien identifiés du parcours de soin des patients en situation d’exclusion. Les conclusions de ce rapport proposent, entre autres, d’améliorer l’accès à la couverture sociale, qui est un des freins majeurs révélé par cette étude, en généralisant l’automatisation de la détection des situations de non recours, attribuant automatiquement la CMUc aux bénéficiaires du RSA socle, simplifiant les formulaires administratifs, rendant le traitement des dossiers opposable, espaçant ou automatisant les renouvellements… Elles appuient aussi sur la lutte contre les refus de soins et une généralisation du tiers payant pour l’ensemble de la médecine de ville. La sénatrice Aline Archimbaud met également en avant un système de tuteurs, d’aidants travaillant au plus proche des personnes en précarité ou en situation d’exclusion, - pour les CPAM : désignation d’interlocuteurs physiques et bien identifiés et création de services mobiles pour se rapprocher des populations les plus fragiles, - pour l’hôpital en proposant la mise en place de PASS de ville ou mobile, allant chercher dans la rue les personnes en situation d’exclusion. Mais en rappelant aussi le rôle de l’hôpital qui ne doit pas se décharger sur les « lits halte soins santé » pour permettre à ces derniers de fonctionner correctement. - en ville en pérennisant, dans les réseaux de santé, les dispositifs d’accompagnement des populations en situation de précarité, avec notamment l’augmentation du nombre de « lits halte soins santé » qui ne doivent plus être considérés à tort comme des lieux d’hospitalisation. Ces propositions semblent pertinentes au regard de l’étude réalisée dans cette thèse, mais il faudra également observer celles qui seront retenues pour une application concrète par les politiques dans ces temps de repli sur soi et stigmatisation.

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E. Conclusion

Il existe bien un profil d’accès aux soins des patients en situation de grande exclusion de la ville de Tours. Lorsqu’ils ont une couverture sociale complète et ne présentent pas d’obstacle linguistique, ces patients ont régulièrement recours à un médecin généraliste, parfois même avec un suivi à long terme. Cependant ils vivent des périodes de rupture dans leur droits, sont amenés à se déplacer, ne consultent que pour du curatif, ont un retard d’accès aux soins pour certains, ont souvent besoin de l’intervention d’une tierce personne pour obtenir le contact avec le professionnel de santé. Ils peuvent alors avoir une rupture dans leur suivi médical, se tourner vers un autre praticien, vers les Urgences ou une association médicale. Ces personnes sont déstructurées sur le plan social, sanitaire et psychique. La prise en charge sociale est indissociable de la mise en place d’un suivi médical pour les aider à se réapproprier leur corps. Cette étude a permis de mettre en lumière le rôle primordial des travailleurs sociaux, et autres aidants, qui accompagnent ces personnes vers une médecine de droit commun. C’est un des points commun majeur des différents profils de recours aux soins primaires des personnes interrogées. Elles sont attachées à leur médecin généraliste mais le recours à ces consultations requiert la présence d’aidants pour s’affranchir des nombreux obstacles qui se présentent à elles. Le défi suivant étant de mettre en place un suivi, une prise en charge inscrits dans le long terme. La prise en charge doit être pluridisciplinaire, médico-psycho-sociale. Des associations médicales comme le CPO ou le CASOUS remplissent leur rôle d’accès aux soins des personnes en grande difficulté.

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Les médecins généralistes ont un rôle clef pour améliorer le recours aux soins des personnes en situation d’exclusion. Ils doivent devenir des aidants, comprenant mieux les obstacles spécifiques de cette population afin d’y répondre de manière adaptée. Cette prise en charge doit s’organiser dans un réseau de soins multidisciplinaire médico-psycho-social.

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Annexe1 : Abréviations util isées ACS Aide à la Complémentaire Santé ALD Affections Longue Durée AME Aide Médicale d’Etat ATD Agir Tous pour la Dignité BEH Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire CADA Centres d'Accueil de Demandeurs d'Asile CASO Centres d'Accueil de soins et d'Orientation CASOUS Centre d'Accueil de Santé et d'Orientation pour l'Urgence Sociale CDAG Centre de Dépistage Anonyme et Gratuit CETAF Centre Technique d’Appui et de Formation des Centres d’examens de santé CHRS Centres d’Hébergement et de Réinsertion Sociale CMS Centre Médico-Social CMU Couverture Médicale Universelle CMU-C Couverture Médicale Universelle Complémentaire CNLE Comité National de Lutte contre la pauvreté et l’Exclusion sociale CPAM Caisse Primaire d'Assurance Maladie CSAPA Centres de Soins d'Accompagnement et de Prévention en Addictologie CPO Centre de soins « Porte Ouverte » E1 Entretien numéro 1 (exemple) EMSA Enquête Méthodologique sur les Sans Abri EPICES Evaluation de la Précarité et des Inégalités de santé dans les Centres d’Examens de Santé HCSP Haut Conseil de la Santé Publique INSEE Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques InVS l’Institut de Veille Sanitaire IRSA Institut interRégional pour le Santé JORF Journal Officiel de la République Française ONPES Observatoire Nationale de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale PASS Permanence d’Accès aux Soins de Santé

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PMI Protection Maternelle et Infantile RG Régime Général RSA Revenu de Solidarité Active SAMENTA SAnté MENTAle SAMU Service d'Aide Médicale Urgente SASPAS Stage en Soins Primaires en Autonomie Supervisé SATO Service d’Aide aux Toxicomanes SAU Service d’Accueil d’Urgence SNCF Société Nationale des Chemins de fer Français UCSA Unité de consultations et de Soins Ambulatoires VSL Véhicule Sanitaire Léger

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Annexe 2 : Guide d’entretien Information sur l’anonymat, l’enregistrement et la finalité de l’étude. Demande d’autorisation verbale d’enregistrement. Questions fermées :

- Quel est votre âge ? - Où dormez vous habituellement ? - Avez-vous une couverture sociale ? - Quelle est votre nationalité ? - Avez-vous des enfants ? - Votre niveau de français permet-il de tenir une conversation ?

Questions ouvertes :

1/ Accès aux soins antérieurs, afin de retracer leur parcours médical, étudier rétrospectivement le mode de recours aux soins selon les étapes des différents parcours individuels :

o La dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est-ce que vous avez consulté ?

o Relances : - Avez-vous un médecin qui vous suit ? - Avez-vous déjà eu un suivi régulier en médecine générale ? - Ce médecin régulier ou précédent, comment l’avez-vous

choisi ? Qui vous l’a conseillé ? Quel est son nom ? - Prend-il avec ou sans rendez-vous ? Comment faites-vous

pour prendre rdv ? - Cela a-t-il un intérêt pur vous d’avoir un médecin

habituel ? Qu’est-ce qui est positif pour vous dans ce lieu de soin ?

2/ Leviers d’accès aux soins pour préciser si les personnes interrogées ont identifié un mode de recours aux soins en cas de nécessité, des personnes ressources…

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o Si demain par exemple, vous estimez que vous avez besoin d’avoir un avis médical, qui est-ce que vous allez voir ? Et comment vous allez faire pour y aller ?

o Relances pour préciser le parcours jusqu’à la consultation : - horaires d’ouverture, prise de rendez-vous, transport

3/ Freins et obstacles à l’accès aux soins identifiés,

o Avez-vous déjà eu des expériences négatives avec un médecin généraliste ? Quelles sont les difficultés pour aller en cabinet de médecine générale ?

4/ Connaissance de leur statut vis-à-vis de leur système de protection sociale, de leurs droits.

o Quels sont vos droits de couverture maladie, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

o Relances : - Savez-vous quand votre couverture sociale va s’arrêter ?

Comment la renouveler ? Avez-vous quelque chose à rajouter ?

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Annexe 3 : un exemple de retranscription d’entretien

Entretien N°3 (E3) Homme, 64 ans, Français, Foyer Paul Bert, RG retraité sans complémentaire, ALD, CMU antérieure. Nouvelle demande de CMU en attente. Lieu d’entretien : Halte de jour, le 02/07/2012, 18mn Particularité : plus âgé, voix douce, prend le temps. Q : Question R : Réponses Q : Quel est votre âge ? R : 64 Q : 64 ans, d’accord. Votre hébergement habituel ? Où est-ce que vous habitez ? R : Alors, c’est à dire que moi je suis actuellement à Paul Bert, à Tours, foyer Paul Bert. Q : D’accord ; en hébergement d’urgence ou en stabilisation ? R : C’est euh… foyer d’urgence. Q : Vous habitez là tous les soirs ? R : Tous les soirs… euh, je suis à Paul Bert, oui. Q : D’accord ; vous avez une couverture sociale ? R : Alors, en ce moment, j’ai un petit problème, au niveau complémentaire, parce que euh, donc moi je suis retraité, euh… Le problème, c’est que, bon j’ai eu plusieurs employeurs mais, là je suis en train de voir avec euh… mon Organisme de retraite est à, euh, c’est la MSA… pour voir si j’ai droit à la complémentaire CMU. Parce que, bon, j’ai des rappels de… comment on appelle ça… de complémentaire… C’est à dire que moi j’ai eu de petits employeurs ; et quand vous avez cotisé moins de tant d’années, quand vous êtes à la retraite, on vous verse tout d’un seul bloc. Alors ça fait que ça m’a empêché d’avoir la CMU. Et là je suis en train de calculer pour voir si j’ai droit… (rapidement) Donc actuellement je n’ai pas de CMU. Q : D’accord ; De toutes façons, pour la couverture sociale, on va en discuter après… Votre nationalité ? R : Française Q : D’accord ; et au niveau de la langue, il n’y a pas de souci particulier (il acquiesce). La dernière fois que vous avez eu un problème de santé… (il me coupe) R : C’est à dire que moi j’ai un problème récurrent avec l’asthme. Q : La dernière fois que vous avez eu un problème de santé… (il me coupe)

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R : C’est à dire que… euh… tous les 3 mois je dois aller voir le docteur pour un renouvellement d’ordonnance. Q : Qui c’est, votre médecin ? R : Alors, donc c’est un docteur au CASOUS, alors j’ai pas son nom en tête, c’est un docteur du CASOUS. Q : D’accord, au CASOUS. R : C’est une dame Q : Pourquoi avez-vous choisi le CASOUS ? R : Parce que quand on est en foyer d’urgence, pour avoir un médecin, ben on passe par le CASOUS. Q : D’accord ; vous avez déjà été voir un autre médecin ? R : Non non non ; j’ai un docteur attitré au CASOUS (silence). Q : D’accord ; est-ce que avant le CASOUS, par exemple, vous avez été voir un médecin généraliste en ville ? R : Euh.. ; Ben c’est à dire avant, autrefois, j’avais un docteur. Quand j’étais en Gironde. Et puis euh, donc, maintenant que… euh, ben je suis, euh… Parce que là je suis dans un circuit retraite, mais euh, je vais certainement me stabiliser ; mais là je suis dans une période transitoire. Q : Quand vous étiez en Gironde, vous travailliez à ce moment là ? R : Oui, j’ai travaillé dans la banque. Q : Ce qui est intéressant, c’est que vous aviez un médecin généraliste en Gironde, et quand vous êtes arrivés ici, vous êtes allé au CASOUS. R : Oui (silence). Q : Vous n’êtes jamais allé voir un médecin généraliste en ville R : Ben c’est à dire pour des raisons financières… Q : Pourquoi, (silence) parce qu’il fallait payer la consultation ? R : Voilà Q : Vous n’aviez pas la CMU à ce moment là… R : Ben je l’avais, la CMU. Q : D’accord ; et quand on a la CMU, il faut payer quand même ? R : Ben c’est à dire, que, comme au CASOUS c’était pratique, donc il y a des docteurs au CASOUS, donc euh… J’étais au CASOUS. (silence) Q : Pour vous, le CASOUS, c’est pratique. R : Ben c’est à dire ; que, bon, c’est un circuit quand les gens sont… (silence) Q : Parce que le CASOUS, c’est pas ouvert tous les jours, par exemple… R : Oui, mais bon ; Enfin, moi c’est pas grave, moi. C’est un problème d’asthme… Alors je sais les heures d’ouverture, et j’y vais quand c’est ouvert. Q : D’accord, et si on vous dit qu’il n’y a pas de place ? R : On m’a jamais dit ça, hé… On m’a dit il faut venir de bonne heure, c’est tout.

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Q : OK, qui vous a conseillé d’aller au CASOUS ? R : Ben c’est à dire ; quand on est à Tours par exemple, il y a des structures sociales, donc vous avez la partie hébergement, la partie santé…, la partie repas…, la partie habillement, voilà. Q : Et c’est quelqu’un de l’hébergement qui vous a dit d’aller au CASOUS ? R : Voilà. (silence) Q : Est-ce qu’il vous a accompagné ? R : Ah, non non… Q : La première fois ? R : Non, on m’a donné une adresse ; parce qu’il y a des fascicules, donc j’étais au CASOUS comme ça. (silence) Q : C’est intéressant pour vous d’avoir un médecin habituel ? R : Ben c’est à dire, euh, moi j’ai eu un grave problème de santé, en 2000, je me suis intoxiqué avec la Ventoline, j’ai perdu 12kg en 3 jours, et donc j’ai été hospitalisé en urgence, et depuis j’ai un traitement de fond, et matin et soir je dois prendre… donc je ne prend plus de Ventoline, parce que je me suis intoxiqué avec, j’ai trop pris de Ventoline, je pouvais plus respirer, j’étais bloqué, et donc j’ai un traitement de fond, matin et soir, je prend Pulmicort et … Pulmicort qui est anti-bronchique et euh… Foradil qui ouvre les bronches. Q : La question, c’était avoir toujours le même médecin, est-ce que c’est un point fort pour vous, est-ce que c’est important ? R : C’est à dire que maintenant il y a des règles nationales qui euh… qui demandent à avoir un médecin attitré, sinon, on risque d’être pénalisé au niveau médical. Q : Donc c’est une obligation. R : C’est une obligation par… euh… la réglementation, oui. Q : À part le côté obligatoire ; est-ce que c’est intéressant d’avoir le médecin qui vous connaît ; qui est tout le temps… R : C’est mieux ; parce que moi personnellement pour l’asthme, c’est mieux d’avoir quelqu’un qui me suis régulièrement. Q : Pourquoi c’est mieux ? R : Parce que, vous avez 10 asthmatiques, c’est 10 cas différents. Et puis, donc, moi j’ai de l’asthme depuis la naissance après avoir beaucoup d’eczéma qui a été… c’est à dire on m’a fait passer l’eczéma de manière trop énergique, et comme dans la famille, il y avait de l'asthme, donc j’ai attrapé de l’asthme. Donc c’est mieux d’avoir un médecin qui connaît la situation. Q : D’accord, qui vous connaît R : Voilà (silence) Q : Qui connaît votre histoire R : Voilà (silence) Q : Et que vous vous connaissez aussi, peut-être ? R : Oui, bon, moi je suis pas compliqué… bon

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Q : Mais par exemple, au CASOUS, c’est toujours le même médecin que vous voyez ? R : Ouais Q : Parce que là, les médecins ont changé par exemple R : Oui, mais… bon, c’est… moi je suis bien mon traitement, donc j’ai pas de difficulté… D’ailleurs la dernière fois, la dame, qui m’a ausculté, m’a dit, « bon, vu votre âge, vous savez maintenant qui vous pouvez être pris en charge à 100% », donc elle m’a fait prendre en charge à 100%. Voilà. Q : Là, on a vu ce que vous avez fait avant. Imaginons que demain, vous avez besoin d’avoir une consultation médicale, demain matin, vous n’allez pas bien, comment faites vous ? R : Ah bé, je vais… au CASOUS. Q : Vous y allez comment ? R : Ah bé j’y vais… en bus. Q : D’accord, vous savez quand est-ce qu’il faut y aller au CASOUS, par exemple ? R : Oui, non… mais enfin, par les surveillants (Note : Veilleurs de nuit), tout ça, on a les dates… c’est le lundi… Q : Donc vous demandez d’abord ici ? R : Ah non, mais c’est constamment, c’est des heures précises, c’est le lundi, le mardi, le mercredi, c’est le matin… Q : Par exemple, demain matin, vous sous levez, vous n’êtes pas bien, comment faites vous pour savoir si aujourd’hui c’est ouvert ? R : Ah ben je vais d’abord voir… parce que j’ai un papier, bon, si y a pas, si faut que j’attende, ben je vais à l’hôpital. Q : Déjà, le papier vous le trouvez où ? Vous l’avez avec vous ? R : Oui Q : Il est affiché ? R : Non, non, je l’ai dans mon portefeuille. Q : D’accord ; Donc vous regardez si le CASOUS et ouvert ou pas… R : Voilà Q : Si le CASOUS est ouvert, vous y allez… R : J’y vais ; et sinon je vais à l’hôpital. Q : Le CASOUS, vous savez à quelle heure il faut y aller, par exemple ? R : Oui, le matin, c’est à partir de 9h, il faut arriver avant 10h, parce que ils prennent… c’est un nombre limité, parce que ils s’arrêtent à midi, ou… Q : Et si le CASOUS est pas là aujourd’hui R : Après je vais à l’hôpital… Q : Comment vous faites pour aller à l’Hôpital? R : Je prends le bus. Q : Et vous allez à Trousseau ? R : Non, je vais plutôt à… je vais à… l’autre hôpital à Tours.

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Q : A quel hôpital ? R : Ben en face du… en face de… euh, attendez… c’est un jardin public Q : D’accord R : Je me rappelle plus ce que c’est comme… Q : Mais vous savez comment y aller ? R : Par le bus, on prend le… enfin moi, comme je suis à Paul Bert, je prends le 4. Q : Et une fois que vous êtes à l’hôpital, vous allez voir où ? R : Alors je vais au secrétariat et je demande, euh, le service pneumologie. Q : D’accord, ils vous attendent directement ; ils vous connaissent, quoi. R : Oui ils me connaissent parce que, j’y étais, j’y ai été. Q : Vous l’avez déjà fait, ca ? R : Ah, ils m’ont fait… comment on appelle ça… enfin ils m’ont dit que ça allait, quoi. Q : D’accord ; donc vous allez au service pneumo… enfin vous allez au secrétariat R : Je demande le service pneumologie. Q : Et ils vous donnent un rendez-vous le jour même ? R : Ah ben si je suis pas bien, après je vais aux Urgences. Q : Comment vous faites pour aller aux Urgences ? R : Ben, je reviens au secrétariat et puis je demande les Urgences. Q : Parce que les Urgences, euh… si elles ne sont pas là ? R : Ah non, mais c’est 24h sur 24 Q : Oui mais (silence) c’est pas à Bretonneau, les Urgences. R : ?? , Heu… (silence) Q : Vous y êtes déjà allé aux Urgences, ou pas ? R : Non, enfin en principe dans chaque hôpital, il y a des Urgences. Q : Ca vous est jamais arrivé, le moment où… R : Ah, dans ma vie j’ai été de nombreuses fois aux Urgences dans la nuit. Q : Mais là par exemple, depuis que vous êtes à Tours et suivi au CASOUS, à part le renouvellement d’asthme, vous n’avez jamais eu besoin d’un médecin et le CASOUS était fermé ? R : Ah non, non non. J’ai pas eu de problème. Q : Vous allez à l’hôpital et vous demandez les Urgences. R : Voilà. Q : Et si on vous dit qu’à Bretonneau il n’y a pas d’Urgences, qu’il faut aller à Trousseau ? R : Ah ben je prends un taxi et puis je vais à Bretonneau Q : Vous allez à Trousseau ? R : A Trousseau. Q : Mais le taxi, il sera à vos frais

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R : Il sera à mes frais. Ils m’enverront la note (il rigole doucement). Alors si je peux pas payer, je dis vous voyez à l’accueil, j’ai un problème. Q : Vous essayez de demander de l’aide au secrétariat R : Ah ben le taxi va voir le secrétariat ! Ou alors il faut appeler la police (il rigole). Q : Est-ce que c’est compliqué pour vous de voir un médecin généraliste en cabinet ? R : Ah non !!! Moi dans ma vie, j’ai peut-être vu 500 fois le docteur, alors ! Q : Mais là par exemple en ce moment, vous êtes au CASOUS (il acquiesce) et vous n’êtes pas allé voir un médecin généraliste en cabinet… C’est ça, ce que vous m’avez dit… R : Ah ben j’ai déjà été, par exemple, j’ai été… un jour j’ai été… euh… Ah oui, j’avais un problème de renouvellement, et j’étais en rupture, donc j’ai été voir un docteur généraliste à… samedi matin à… comment ça s’appelle, heu… à… Saint-Pierre-Des-Corps. Q : Quel généraliste vous… Qui est-ce qui vous a parlé de lui ? R : Ah ben parce que je savais qu’il y avait un généraliste à Saint-Pierre-Des-Corps, qui recevait le matin Q : Comment vous le saviez ? R : Ben parce que j’avais… Moi je suis bibliothèque, et je vais souvent à la bibliothèque de St Pierre, et alors, ben je connais un peu les horaires des docteurs à St Pierre. Q : En discutant avec les gens ? R : A la bibliothèque, tout ça… Q : C’est affiché ? R : Non, c’est moi qui ai demandé. Ils m’ont dit « Samedi matin, y a un docteur qui consulte à … Saint-Pierre-Des-Corps » donc j’y ai été. Q : Donc par exemple demain, si vous n’êtes pas bien, qu’on vous dit que les Urgences sont à Trousseau, est-ce que ça vous dirait d’aller voir un médecin généraliste par exemple ? R : Ah ben j’irais voir un médecin généraliste, oui, enfin le problème, c’est pour payer… parce que le problème, c’est payer, parce que actuellement je suis dans un état transitoire et je ne sais pas si j’ai droit à la CMU ou pas. Q : Actuellement, qu’avez vous comme Couverture ? R : Heu… C’est à dire je suis à 100% pour l’asthme depuis le mois dernier. Q : Mais sinon pour les autres médicaments qui sont pas liés à l’asthme, vous savez, en bas de l’ordonnance… R : Ah oui, eh bé, euh… Ca m’est pas arrivé… A chaud je prendrais une décision. Q : Là en ce moment vous n’avez pas de complémentaire ? R : En ce moment je n’ai pas de complémentaire, euh… non, je n’ai pas de complémentaire

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Q : Vous n’avez pas la CMU non plus R : Et j’ai pas la CMU Q : Vous avez la retraite R : Par contre, tout ce qui est trait à l’asthme, c’est à 100% ; moi je n’ai que des problèmes avec l’asthme, pour le moment. (silence). Q : Imaginons que vous avez la CMU, et que donc du coup, c’est pas un problème financier, est-ce que vous irez voir un médecin généraliste en ville ; ou sinon, qu’est-ce qui vous bloquerait pour le faire ? R : C’est à dire, dans un premier temps, je vais au CASOUS ; et si le CASOUS, c’est pas disponible, je vais voir un médecin généraliste. Q : Est-ce que dans le passé, vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin généraliste ? R : Ah non ! Moi j’ai toujours… de toutes façons, moi c’était toujours l’asthme, à peu près… Q : Est-ce que dans le relationnel ou d’autres problèmes, vous avez déjà eu de mauvaises expériences ? R : Non ! Non, et puis moi je suis quelqu'un, moi, je suis très… maniable, je suis pas, je n’ai aucun problème au niveau – comment on appelle ça – au niveau relationnel. Et heureusement au niveau santé, à part l’asthme, je n’ai aucun problème. Q : Donc pour vous, la seule difficulté à allez voir un généraliste, c’est l’avance des frais. R : C’est l’avance des frais, oui. Q : Et pourtant vous continueriez à aller au CASOUS, au moins au début… R : Oui parce que j’ai mon docteur au CASOUS Q : Parce qu'il vous connait… R : Parce qu’il me connaît. (silence) Q : Qu’est-ce que cela signifie pour vous d’avoir le 100% ? R : Eh bé, le 100%, c’est de ne pas être de sa poche (il sourit), de ne rien avoir à payer. Q : Ni la consultation… R : Ni la consultation… Ah ben la consultation, euh… attendez… au CASOUS, c’est gratuit, et au généraliste, euh… Ah bé, par exemple, quand j’étais à SPDC, il y a 3 mois, ben j’ai avancé, j’ai donné 20 euros et j’ai été remboursé après. Q : D’accord, c’est vous qui avez avancé ? R : Oui, j'avais de l’argent, j’ai avancé. Q : Mais ça reste difficile pour vous d’avancer… R : C’est à dire, à l’époque, ça a bien tombé, je pouvais avancer de l’argent, donc… Q : Vous savez comment faire les démarches pour la CMU, par exemple ?

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R : Oui, j’ai un DEUG de Droit, alors au niveau juridique et tout… Et puis bon, il faut être combinard un peu, bon… Quand on a un problème aigu, les gens sont… coopératifs. Après on s’arrange toujours, après. (il sourit). Q : Pour les démarches CMU, vous m’avez dit que vous étiez en train de faire la CMU ? R : Alors la CMU, là, je suis en contact avec ma mutuelle à Bordeaux, parce que, normalement j’ai pas droit à la CMU, parce que le problème, c’est que, j’ai eu 5 employeurs, et de petits employeurs, et quand, par exemple, vous avez travaillé moins de tant d’années, on vous verse la complémentaire d’un seul coup, donc, quand, en commission, ils se réunissent, bon ça vous met au dessus de… Q : ils ont l’impression que vous avez de gros revenus… en fait c’est juste au dessus de la barre. R : Voilà, ouais. Q : Est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter, là, sur notre discussion ? Vous trouvez intéressant de s’intéresser à l’accès aux soins, ou ça vous paraît évident ? R : Ah ben c’est à dire, pour moi, ça fait partie, vous savez, quand j’ai eu le bac, euh…, je suis rentré en médecine, bon malheureusement pour moi, euh…, bon j’ai pas… parce que c’était numérus clausus, comme toujours, donc j’ai pas… parce que on s’investit beaucoup en médecine ; et j’ai pas accepté l’échec, donc j’ai tourné la page en médecine, et après j’ai fait du Droit, j’ai la chance d’avoir le DEUG de Droit, et après j’ai travaillé dans la Banque. Donc pour moi, la médecine, à mes dépends, j’ai fait un trait dessus. J’avais des portes de sortie, je pouvais être kiné, je pouvais être visiteur médical, je pouvais travailler en laboratoire, heu, je pouvais… euh, rentrer en pharmacie, heu, j’avais des portes de sortie ; parce que les 2 dernières années, je dormais au Valium, hein… Moi, ce que je reproche aux premières années, c’est… on a trop de… pourtant j’ai joué…, j’ai beaucoup de mémoire, mais j’ai été trahi par l’asthme, parce que au moment des examens, j’avais ma crise d’asthme (rire) ; donc j’ai perdu mes moyens. Q : Bon, c’est bon, merci beaucoup… Toutes les retranscriptions d’entretien sont disponibles sous format informatique dans le CD joint.

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Annexe 4 : Bibliographie (1) RAINHORN J-D., GREMY F., ACKER D., et al. La progression de la précarité en France et ses effets sur la santé. Haut Comité de Santé Publique. Ed. ENSP, 1998, 368p. (2) LOISY C. Cahier 1, Pauvreté, Précarité et Exclusion : état des lieux. Les Travaux 2000 de l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale, 2000, p. 21-50 (3) WRESINSKI J. Grande pauvreté et précarité économique et sociale. Avis et Rapports du Conseil Economique et Social. Journal Officiel de la République Française (JORF), 1987, n°6, 105 p. (4) SASS C., MOULIN J-J., GUEGUEN R., et al., Le score Epices : un score individuel de précarité. Construction du score et mesure des relations avec des données de santé, dans une population de 197 389 personnes, BEH, 2006 Avr. 04, InVS, n° 14, p. 93-96 (5) PAUGAM S., La disqualification sociale, Ed. PUF-Sociologie ; 1991 (6) VEXLIARD A., Le clochard. Etude de psychologie sociale, Ed. Desclée de Brouwer, Coll. Bibliothèque neuro-psychiatrique de langue française, 1957, 319 p. (7) LAPORTE A, CHAUVIN P., et al. Rapport sur la santé mentale et les addictions chez les personnes sans logement personnel d’Ile de France (Enquête SAMENTA). Observatoire du Samu Social de Paris. INSERM, 2010, 227 p. (8) EMMANUELLI X., MALABOU C., La grande exclusion  : L’urgence sociale, symptôme et thérapeutique. Ed. Bayard ; 2009 (9) DECLERCK P., Les naufragés - Avec les clochards de Paris, Ed. Plon ; 2001 (10) PROLONGEAU H., Sans domicile fixe, Ed. Hachette, coll. Pluriel, 1997, n°878 (11) : BROUSSE C., GUIOT DE LA ROCHÈRE B., MASSÉ E., L’Enquête sans-domicile 2001, Insee, coll. INSEE-Méthodes, 2006, n° 116 (12) : MOULIN JJ, DAUPHINOT V, DUPRE C, et al. Inégalités de santé et comportements  : comparaison d’une population de une 704 128 personnes en situation de précarité à population de 516 607 personnes non précaires, France, 1995-2002. BEH, 2005 Oct.31, n°43, p213–215 (13) Equipe de l’Observatoire de l’accès aux soins de la mission France, FAHET G., GARDIES E., et al. Rapport 2011 de l’Observatoire de l’accès aux soins de la mission France de Médecins du Monde. Médecin du Monde, 2012, 218 p. (14) BECK F., LEGLEYE S., SPILKA S. L’alcoolisation des personnes sans domicile : remise en cause d’un stéréotype. Economie et statistiques. coll. Insee-Références, 2006, N°391-392, p. 131-149 (15) Conférence nationale de santé. Droits et accueil des usagers – Résoudre les refus de soins, Ministère de la Santé et des Sports ; 2010, 48p.

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(16) DOUAY C., TOMASINO A., FAHET G., et al. Rapport 2012 de l’Observatoire de l’accès aux soins de la mission France de Médecins du Monde. Médecin du Monde, 2013, 210 p. (17) : SAINTOYANT V., Bilan de 10 ans d’observation de la pauvreté et de l’exclusion sociale à l’heure de la crise, Rapport 2009-2010. Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale; Direction de l’information légale et administrative, 2010, 167p. (18) BOISSONNAT PELSY H., SIBUE DE CAIGNY C., BLANC C, et al., Stratégies de recours à « la médecine de proximité » dans les populations démunies, Mouvement ATD QUART MONDE, 2009, 36 p. (19) SASS C (CETAF), RUNFOLA S (Fond CMU). Renoncements aux soins des bénéficiaires de la CMU-C : Enquête dans les CES de l’Assurance maladie. Fond CMU et CETAF, 2011, 46 p. (20) COLLIN T. Parcours de soins des consultants de la permanence d'accès aux soins de santé - Evaluation du retour au droit commun. Thèse, Médecine, Grenoble; 2011 (21) AUBRY A. Prise en charge des patients précaires par les médecins généralistes de ville. Intérêt d’un réseau médecine de ville – PASS. Thèse, Médecine, Paris V; 2011 (22) Conseil National des politiques de Lutte contre la pauvreté et l’Exclusion sociale (CNLE), Accès aux soins des plus démunis : CMU, ACS, AME, dix ans après, revaloriser et simplifier les dispositifs pour réduire le non-recours à la couverture maladie et améliorer l’accès aux soins des plus démunis. Avis du CNLE, 2011 (23) ARCHIMBAUD A., L’accès aux soins des plus démunis – 40 propositions pour un choc de solidarité, Rapport au Premier ministre, 2013, 156p. (24) COMEDE, Migrants/étrangers en situation précaire – Soins et accompagnement. Guide pratique pour le professionnels 2013, Comité Médical pour le Exilés (COMEDE), 2013, 373 p. (25) LOI n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle, JORF, 1999, p. 11229 (26) LOI d’orientation n°98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, JORF, 1998, n°175, p. 11679, consolidée le 01 juin 2009, JORF 2009 (27) LOI n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. JORF, 2009, n°167, p. 12184 (28) Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins (DHOS). Enquête nationale 2008 sur la mise en œuvre du dispositif des permanences d’accès aux soins de santé PASS. DHOS, 2009, 59 p. (29) droit, expression : droit commun, Dictionnaire Larousse, http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/droit/26842/locution; 2013

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(30) MARPSAT M., QUAGLIA M., EMSA2009 : une enquête auprès des personnes fréquentant les services d’aide (hors hébergement) de la ville de Toulouse, Les Travaux de l’Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale – quatrième partie : Les publics et leurs conditions de vie ; ONPES ; 2010, p. 561-582 (31) AUBIN-AUGER I., MERCIER A., BAUMANN L., LEHR-DRYLEWICZ A-M., et al., Introduction à la recherche qualitative, Rev. Exercer, 2008, vol.19, n°84, p. 142-145 (32) : YAOUANCQ F., LEBRERE A., MARPSAT M., et al., L'hébergement des sans-domicile en 2012, INSEE Première, 2013, n°1455, 4p. (33) LOI n°2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection sociale de l’enfance, JORF 2007, p. 4215 (34) Article L111-2 du Code de l’action sociale et des familles, JORF 2000, modifiée par la loi n°2006-911 du 24 juillet 2006, JORF 2006 (35) BRUNET L., CARPENTIER S., LAPORTE A., et al., Féminité, accès aux soins, maternité, et risques vécus par les femmes en grande précarité. Une contribution à l’amélioration de leur santé gynécologique. Rapport à la direction générale de la santé par l’Observatoire du SAMU Social de Paris, 2005, 102 p. (36) CHEVELLE M., Patients en situation de précarité aux urgences : repérage selon ÉPICES et parcours de soins, Thèse, Médecine, Lille, 2011 (37) GROSSET P., Prise en charge de la grande précarité aux urgences du CHU d’AMIENS, Thèse Médecine, Amiens, 2010

(38) Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie, Evaluation de la loi CMU – Rapport n°IV, Fonds CMU, 2009, 132 p. (39) Préambule à la Constitution de l'Organisation mondiale de la Santé, tel qu'adopté par la Conférence internationale sur la Santé, New York, 19-22 juin 1946; signé le 22 juillet 1946 par les représentants de 61 Etats. 1946; (Actes officiels de l'Organisation mondiale de la Santé, n°. 2, p. 100) et entré en vigueur le 7 avril 1948 (40) Réseau Précarité d’Ivry-sur-Seine, Lettre d’alerte, objet : Alerte sur notre responsabilité médicale et sociale sur les conséquences de l’absence de cohérence entre la politique de l’hébergement social et celle du soin, courrier adressé à Madame la Ministre des affaires sociales et de la Santé, Madame la Ministre de l’Egalité des territoires et du logement, Monsieur le Ministre délégué chargé de la Ville… ; 2013 oct. ; 8p.

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Annexe 5 : fiche simplifiée explicative à l’ intention des travail leurs sociaux A l’intention des professionnels des Haltes et de la Nuitée

Thèse sur la grande précarité

Romain GILIS-MENARD Présentation : Thèse de médecine générale dans l’objectif de mieux comprendre le recours aux soins des personnes en situation de grande précarité, afin d'analyser les freins et les moteurs à la consultation (recours à une tierce personne, à une structure de soins, aux urgences...) Mode : Entretiens individuels avec des personnes fréquentant des lieux de halte et d'hébergement d'urgence. Critères d’inclusion: - être majeur, - fréquenter les lieux de vie, de restauration et d’hébergement choisis - posséder une couverture sociale complète (CMU, AME ou Régime Général + complémentaire santé) - estimer une maîtrise suffisante de la langue Afin de mener cette étude, je sollicite votre concours et votre connaissance des personnes accueillies au sein des structures, en m’orientant les personnes disposant d’une couverture sociale et acceptant de répondre à mon enquête. En effet les personnes participeront probablement plus facilement à des entretiens si ce sont les travailleurs sociaux qui leur relayent la proposition. Par une question simple fermée « Votre niveau de français vous semble-t-il suffisant pour tenir une conversation? », vous pourrez sélectionner les personnes répondant par l’affirmative. Ces entretiens seront réalisés auprès de personnes qui fréquentent la Halte du matin, la Halte de jour et la Nuitée, au cours du 2 au 13 juil let prochain.

Pour information, les grandes idées du guide d’entretien : Accès aux soins antérieurs Leviers d’accès aux soins Freins / Obstacles à l’accès aux soins Famille Couverture sociale

En vous remerciant de l’attention que vous porterez à mon étude.

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Vu, le Directeur de Thèse

Vu, le Doyen de la Faculté de médecine de TOURS

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Académie d’Orléans – Tours Université François-Rabelais

Faculté de Médecine de TOURS

GILIS-MENARD Romain Profil d’accès aux soins de premier recours des personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours. 102 p. Résumé : L'exclusion est un processus complexe économique, social et médical. Les sans-domicile font partie des patients ayant les plus mauvais indicateurs de santé parmi les précaires, notamment en terme de prévalence des pathologies psychiatriques. Les principaux freins identifiés pour consulter un médecin de premier recours sont l’obstacle linguistique et le coût du soin. Comment s’organise le recours aux soins primaires des personnes en situation de grande exclusion de la ville de Tours ne présentant pas de barrière de la langue et bénéficiant d’une couverture sociale ? Une étude qualitative inductive a été réalisée par la méthode des entretiens semi-structurés. Les entretiens individuels ont été réalisés dans des lieux de restauration, d’hygiène et d’accueil de la ville de Tours. Le recours aux soins des personnes en situation d’exclusion présentait des particularités. Bien qu’ils aient fait appel à un médecin généraliste, parfois régulièrement, leur parcours de soins était semé d’obstacles. Ces derniers pouvaient rapidement interrompre la prise en charge et amener à consulter dans le milieu associatif. Des tierces personnes, dont les travailleurs sociaux, jouaient un rôle clef d’aidants dans l’accès aux soins. Des structures de soins associatives spécifiques répondaient à la nécessaire prise en charge globale. Les médecins généralistes ont un rôle clef pour améliorer le recours aux soins des personnes en situation d’exclusion. Ils doivent comprendre les obstacles spécifiques de cette population afin d’y répondre de manière adaptée et ainsi devenir des aidants. Cette prise en charge doit s’organiser grâce à un partenariat médico-psycho-social. Mots clés : Précarité, Exclusion sociale, Sans-domicile, Recours aux soins, Médecine générale Jury : Président : Monsieur le Professeur Emmanuel RUSCH Membres : Madame le Professeur Anne-Marie LEHR-DRYLEWYCZ Monsieur le Professeur Alain CHANTEPIE Madame le Docteur Vanessa MICHEL Monsieur le Docteur Jean ROBERT

Date de la soutenance : Le 17 janvier 2014

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VERBATIMS DES ENTRETIENS

Entretien N°1 (E1) Homme, 28 ans, Français, vit à la rue, CMU + CMUc + ALD Lieu d’entretien : Halte du matin, le 02/07/2012, 9mn Particularité : ralentissement psychique et verbal, asthénie Q : question S : Sujet Q : Pouvez-vous me donner votre âge ? S : Où dormez vous habituellement ? S : Avant, j’étais sur Richelieu, puis je suis revenu Q : Richelieu ? S : J’avais un appartement là bas. Et… Q : Et là en ce moment, vous êtes dehors ? Dans les foyers ? S : Je suis dehors, ouais. Q : C’est pour ca que vous n’avez pas beaucoup dormi ? (il avait dit avant l’entretien qu’il était fatigué car il n’avait pas beaucoup dormi) S : Si, ca allait ; mais j’ai pas beaucoup dormi quand même. Q : Est-ce que vous avez une couverture sociale ? S : Oui, CMU et je suis couvert à 100% Q : Votre nationalité ? S : Français Q : Vous avez des enfants ? S : Ouais… Un seul Q : Il est avec vous en ce moment ? S : Nan, il a été placé… Parce que mon ex, elle a fait n’importe quoi, j’étais plus avec, et elle s’est fait enlevé… J’aurais été encore avec, ça serait pas arrivé, quoi ; c’est sûr. Q : J’aimerai bien comprendre un petit peu comment vous allez voir le médecin habituellement… D’accord ? Donc ma question, c’est, la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est-ce que vous avez consulté ? S : Un problème de santé ? Q : Ouais S : Ca fait bien 4 ans que j’en ai pas eu. Parce que la dernière fois que j’ai été à l’hôpital, c’était pour ma jambe. J’avais une fracture ouverte. Q : C’était quand, ca ? S : En 2006 Q : D’accord ; depuis, vous n’avez pas vu de médecin du tout ? S : Nan. (silence de 10 sec, il me montre sa cicatrice à la jambe). L’os il est ressorti ici. Q : D’accord. Donc depuis 2006, vous n’avez pas vu de médecin ? S : Non, mis à part pour un traitement. J’ai un traitement ; mais c’est tout, juste pour un traitement. Q : D’accord, donc vous êtes suivi avec un spécialiste… S : Non, pas spécialement, non. Q : C’est qui le médecin qui vous suis ?

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S : Qui me suivait ; c’était Y à Richelieu. Mais il faut que j’en trouve un autre. Je vais retourner voir le Dr D. Q : D’accord, donc la dernière fois que vous avez vu un médecin, c’était à Richelieu, c’est ça ? S : Ouais Q : Depuis Richelieu, vous n’en avez pas vu ? S : Non, c’est que depuis hier, hein, que je suis plus. Q : C’est tout récent S : Ouais. Q : Le médecin, comment est-ce que vous l’aviez choisi ? S : Le bouche à oreille, comme ca. On m’a dit : lui, il est pas mal, machin… Je suis allé voir… Q : Le bouche à oreille, qui est-ce qui vous avait conseillé ? S : C’était une personne qui travaille à la mairie, là bas. Q : Qui travaille à la mairie… Vous étiez allé la voir parce que vous aviez besoin de voir un médecin ? S : Ouais, j’avais besoin de voir un médecin et puis voilà… Q : Donc vous êtes allé à la mairie et on vous a donné le nom ? S : Oui, le nom et puis l’endroit. Q : On vous a accompagné ? Comment ca s’est passé ? S : Non, j’y étais tout seul. Q : C’est vous qui avez pris le rendez-vous? S : (silence) Q : Vous êtes allé au secrétariat ? Comment ca s’est passé concrètement ? S : J’y suis allé directement Q : D’accord. Quand vous avez un problème de santé ; donc là c’était à Richelieu, vous alliez où ? S : C’était pas… une… j’ai mangé le mot… C’était pas …une mauvaise santé, c’était par rapport à une addiction à l’héroïne, et puis… ouais… des anxi- des anxio des médicaments d’anxiété. Q : D’accord ; donc c’est un médecin que vous voyiez tous les mois… S : Je le verrais plus, il faut que j’en trouve un autre ici Q : Est-ce intéressant pour vous qu’il y a un médecin que vous voyez régulièrement ? S : Pas spécialement, non Q : Par exemple, là, votre médecin, vous l’avez vu tous les mois, est-ce que, au fur et à mesure des mois, vous arriviez à mieux parler, avoir une meilleure relation avec lui, est-ce que vous sentez une différence ? S : Pas spécialement, non. Q : Ok, alors là, on a essayé de préciser un peu ce que vous avez fait avant, maintenant on va essayer d’imaginer ce que vous allez faire maintenant, dans le futur. Si demain par exemple, vous estimez que vous avez besoin d’avoir un avis médical, qui est-ce que vous allez voir ? Et comment vous allez faire pour y aller ? S : Oh je sais pas, parce que j’en aurais pas besoin. Q : Imaginons que demain, vous êtes pas bien. Vous vous dites, il faut que je voie un médecin, ou après demain… S : J’irais voir le Dr D, qui est dans la rue piétonne, là… Q : Vous l’avez déjà vu, Dr D ? S : Ouais

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Q : Donc c’est quelqu’un que vous connaissez déjà ? S : Ouais Q : C’est vous qui prenez rendez-vous? Comment ça se passe ? S : Il prend sans rendez-vous ; Q : Donc c’est intéressant pour vous un médecin qui prend sans rendez-vous? S : Ouais Q : Vous connaissez les horaires ? Vous savez quand y aller ? S : Oh oui, les horaires… Nan, j’connais pas ses horaires, mais par exemple en milieu de matinée, ou en milieu d’après-midi, ouais… Q : D’accord, vous pouvez y aller comme ça… Q : Est-ce que vous avez déjà eu des difficultés à aller consulter un généraliste en cabinet ? S : Non, non Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives… est-ce que des fois ça s’est mal passé avec un médecin ? S : Non, non (Bruit parasite, passage d’un travailleur social dans le bureau pour la machine à laver, traverse la pièce, ouvre la fenêtre et sort…) Q : Vous n’avez pas l’impression S : Non, les médecins que je vois, ils sont sympas Q : Est-ce que vous avec déjà eu un médecin avec qui ca s’est mal passé, par exemple ? S : Pas d’après mes souvenirs, non. Q : Est-ce que vous connaissez vos droits en sécu ? Vous m’avez dit que vous aviez la CMU… S : En sécu, j’ai droit au 100%. Q : Vous avez un 100% S : Ouais. Q : Qu’est-ce que ca signifie pour vous, par exemple, avoir la CMU ou avoir un 100% ? S : C’est une facilité de pas payer les médicaments… Q : D’accord, donc surtout les médicaments… S : Ouais, et puis les consultations, quoi. (silence) Q : D’accord, vous pouvez faire tous les médicaments, les consultations, les prises de sang… (toujours passage et bruits extérieurs). Est-ce que vous savez comment renouveler vos droit, refaire la CMU ? Vous connaissez la date de fin de votre CMU par exemple ? S : Ca y est, elle est déjà renouvelée. Q : Comment avez vous fait pour la renouveler ? S : J’ai envoyé, j’ai rempli et renvoyé un dossier à la Sécu… Quand on est déjà inscrit, ça va vite, quoi… Q : Vous êtes allé à la Sécurité Sociale ? Ou c’est quelqu’un qui vous a donné le dossier ici ? S : Non, j’y suis… c’est quelqu’un qui m’a donné le dossier… Qui ? Je ne me rappelle plus, mais quelqu’un qui m’a donné le dossier, oui. Q : Vous savez quand il faudra renouveler la prochaine fois ? S : Ouais, mais j’ai pas en tête… Q : C’est quand S : Dans 1 mois Q : Dans un mois ?

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S : Ouais même pas 1 mois… Q : D’accord… est-ce que, sur la consultation de médecine générale et la facilité à aller vers le médecin, il y a d’autres choses que vous voulez rajouter ? S : Non, pas spécialement… Q : Est-ce que pour vous ca vous paraît simple d’aller consulter un médecin ? S : Ouais, plutôt, ouais… Q : Très bien, je vous remercie S : Ben de rien…

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Entretien N°2 (E2) Homme, 53 ans, Français, Hébergement amical, CMU + CMUc +ALD Lieu d’entretien : Halte de Jour, le 02/07/2012, 19mn Particularité : Bégaiement peu prononcé Q : question S : Sujet Q : Alors, j’ai des petites questions, quel est votre âge ? S : 53 ans Q : 53, d’accord, Où est-ce que vous dormez habituellement ? S : Ben j’dors, heu bon, j’vis avec une femme sur Amboise, … et ça fait 3 jours, là, que je suis revenu sur Tours et je dors chez un ami aux Sanitas ; Q : D’accord, S : Mais bon, mais euh, dans une deux semaines, heu, j’vais avoir les résultats pour que je touche la COTOREP, et j’ai une assistante sociale que je vois c’t’après-midi, là, et puis pour faire les, et j’ai un, pour remplir un dossier de surendettement à la Banque de France. Q : Est-ce que vous avez une tutelle, ou quelque chose comme ca ? S : Ah non, non, je sais gérer mes sous, hein… Q : Très bien… heu… Comme couverture sociale, vous m’avez dit que vous avez la CMU S : Ouais, ouais… Enfin je suis pris à 100%, plus j’ai une CMU. Q : D’accord, les 2. Votre nationalité ? S : Français, mais je suis d’origine de la Lorraine. Mais normalement, une fois que je touche le truc des handicapés, là, et après je pars dans l’Est, après. Q : D’accord : Une fois que vous avez la COTOREP… S : Ouais, ouais, Après je pars et je retourne dans ma famille après. Q : Alors votre niveau de français permet de tenir une conversation ? C’est une question un peu générale, enfin que je pose à chaque fois… S : Euh, ben Q : Vous parlez bien français… S : Ah ouais, bien sûr, ouais ; ben je suis français, hein… Mais je bégaie un petit peu Q : Aucun souci ; Alors on va d’abord parler des soins avant aujourd’hui, ce que vous avez fait, un peu votre parcours… La dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est-ce que vous avez consulté ? S : Ben c’est l’cœur, hein… C’est l’hôpital Trousseau Q : D’accord, vous avez été hospitalisé ? S : Ah oui, plusieurs fois, hein ! Q : La dernière fois, la toute dernière fois que vous avez vu un médecin, c’était qui ? S : Ah que j’ai vu un médecin ? Ben j’l’ai vu hier, le mien… Hier, et puis il m’a renouvelé mon ordonnance. Q : C’est un médecin généraliste ? S : Ouais, voilà. C’est le Dr X, à Chambray les Tours… Q : Il est en cabinet libéral, il est tout seul ? S : Ouais, voilà, voilà. Q : Pourquoi est-ce que vous avez choisi ce médecin-là ?

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S : Ben, ça fait des années que je l’ai… Q : D’accord, je pourquoi vous avez choisi ce médecin-là ? S : Bon, ben il est bien, il rigole avec moi, et puis il raconte des blagues, pour remonter le moral des fois… Q : D’accord, donc il y a un très bon contact S : Ah ouais, on s’entend très bien, hein ! Q : Qui est-ce qui vous a conseillé de le voir ce médecin ? S : Bon, hein, j’ai vécu avec une femme, bon, et ça fait 3 jours que je suis plus avec elle, là, parce qu’elle est sur Amboise, et puis avant ma femme elle a vécu à Chambray, c’était en face du médecin, et c’est comme ca que j’ai rencontré ce médecin Q : D’accord, c’est elle qui vous l’a conseillé ? S : Ouais, voilà… Q : OK ; est-ce que on vous a accompagné au début, vous y êtes allé seul ? Comment ça c’est passé ? S : Non, elle est venue avec moi la première fois Q : Et après vous alliez le voir… S : Ouais… Q : Il est sur rendez-vous ? Comment ca se passe ? S : Ah ben oui, hein, faut prendre des rendez-vous, hein… Q : C’est vous qui prenez le rendez-vous ? S : Ouais, ouais Q : Vous appelez au secrétariat… S : Ouais, et après ça, je viens… Q : D’accord. ça vous arrive de louper des rendez-vous ? S : Bon, ca m’arrive des fois, et puis après, je préviens la secrétaire, et après je repousse mon rendez-vous. Q : très bien S : Ben c’est le moindre des cas… parce que lui ça lui fait… et il perd un client après, ah ouais, hein… Q : Est-ce que ça a un intérêt pour vous d’avoir un médecin habituel S : Ah ben oui, oui, oui. Q : Lui c’est votre médecin traitant ? S : Oui mais bon, comme j’vais retourner chez moi dans ma famille-là, après faudra que je reprenne un autre médecin de là-bas ? Q : Quel est pour vous l’intérêt d’avoir toujours le même médecin S : Euh bon, j’lui confie des trucs, et ça reste entre nous, hein, voilà… Q : Donc la confidentialité, c’est important S : Ouais, voilà. Bon, euh… J’ai fais plusieurs médecins, mais bon, ils me plaisaient pas trop. Mais depuis que j’ai rencontré X, j’ai toujours gardé celui là… Q : D’accord S : Heu, je suis un employé de la mairie de Z (ville limitrophe de Tours), je suis fonctionnaire, et comme j’ai fait 1 an de maison d’arrêt, là, et puis la mairie, ils m’ont viré, voilà, et quand on fait de la prison… Et puis comme j’ai fait 2 arrêts cardiaques, et on m’a ouvert la gorge et j’avais la moitié d’un cancer, ils me l’ont enlevé, Q : Le 100% c’est pour ca ? S : Oui, et puis, normalement, j’ai droit à la COTOREP, là…

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Q : Là, pour l’instant, on a vu avant, maintenant je veux savoir dans le futur, par exemple, demain, si vous avez un problème de santé demain, qui est-ce que vous allez consulter ? S : Ah ben, l’hôpital, hein ! Ben si j’ai quelque chose (il montre son thorax)… Il y a des moments que je manque de souffle mais j’ai mes remèdes sur moi, hein… Q : Mais si, par exemple, vous avez de la fièvre, vous n’êtes pas bien demain matin, qui allez vous voir ? S : Ah ben, mon médecin, voilà… Q : Comment ça se passe, concrètement ? Vous vous levez, vous n’êtes pas bien… S : Bon, ben j’ai mes médicaments Q : Pour appeler votre médecin, pour prendre rendez-vous , comment vous faites ? S : Ben j’ai mon portable… Q : Vous avez son numéro ? S : Ouais, ouais Q : Vous appelez le secrétariat… S : Ouais, voilà… Ben ouais ! Q : Pour y aller, concrètement, S : Ben je prends le bus… et puis dans 1 mois je peux repasser mon code. Parce que j’avais bu et puis, ils m’ont, alors j’ai eu un retrait, et puis comme ils m’ont eu deux trois fois, alors ils m’ont, j’ai juste le code à refaire, là… Q : D’accord, mais là pour l’instant, vous êtes en bus… Vous savez comment faire pour y aller en bus ? S : Ben oui. Q : Très bien, Quelles sont les difficultés pour vous de voir un médecin généraliste en cabinet ? S : Euh, comment ça ?, vous voulez dire quoi ? Q : Alors, par exemple, vous m’avez dit qu’avant de trouver ce médecin-là, vous aviez vu plusieurs médecins, S : Ouais, ouais, Q : Qu’est-ce qui s’est passé avec eux qui n’allait pas ? S : Non, parce que, euh…, et puis moi je sais vite juger les gens s’ils sont bien ou pas. Q : Qu’est-ce qui vous avait déplu par exemple ? S : Non, parc ‘que, la façon dont il parle, et puis des fois, il y a des médecins ils m’ont parlé sec, et puis ca, je n’aime pas trop… Après moi, j’y retourne plus… Et c’est pour ça j’ai eu plusieurs médecins et c’était la façon dont ils me parlaient. Q : Est-ce qu’il y a d’autres choses ? S : Non, non Q : Par exemple sur la prise de rendez-vous, est-ce que c’est parfois difficile, ça a été difficile de prendre un rendez-vous , de se tenir à l’heure S : Ah non, non, c’était impeccable Q : Donc dans tous les médecins que vous avez fait avant de trouver celui-là, c’était surtout le relationnel qui n’allait pas… S : Oui, voilà. Q : Vous en avez vu beaucoup de médecins

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S : Non, j’en ai vu très peu, environ 5. Au moins, ça fait 36 ans que je suis sur la Touraine, et ça fait 36 ans que j’ai travaillé là. Q : Est-ce qu’il y a des médecins par exemple qui ont refusé de vous voir ? S : Ah non, non, jamais Q : Est-ce que vous avez des enfants ? S : Oui, j’ai un fils, il va, il est avec mon ex-femme. J’ai mon ex-femme, elle est fonctionnaire elle aussi, à Joué lés Tours, elle travaille à la maison de retraite, et mon fils, il va sur 34 ans, là ; il les a eus le 6 avril. Q : OK, alors après j’ai une question sur la couverture sociale. Donc vous avez donc à la fois le 100% et la CMU. Qu'est-ce que ça veut dire pour vous ? S : Bah, le 100%, parce que on a une maladie à vie et j’ai mon cœur qui est très fatigué, là… Q : 100%, ça veut dire que vous êtes très malade… S : Voilà et puis j’ai mon cœur il peut lâcher n’importe quand, je peux refaire un arrêt, un arrêt cardiaque et puis n’importe où, hein. Mais bon, j’ai un traitement lourd, moi. Q : Et la CMU, qu’est ce que ca signifie pour vous ? S : Bah heureusement que j’ai ça parce que les 100% ca marche seulement pour la maladie du cœur, voilà. Admettons je me coupe ou j’ai des soins à faire ailleurs, où ca n’a rien à voir à faire avec le cœur, là je viens de me refaire toutes mes dents, là, il m’a fait le haut et le bas, j’en ai eu pour 2500 euros, et c’est la Caisse Primaire qui paye. Q : Parce que sans la CMU, qu’est-ce qui se passe ? S : C’est à mes frais tout ça après, voilà. Q : Donc vous ne l’auriez pas fait… S : A bah non, hein. Au moins ça y est, ça a été refait. Q : Vous savez quand votre CMU va s’arrêter par exemple ? S : Elle finit fin juillet, là, mais ça va être renouvelé. J’ai été les voir, là… Q : Vous avez été où ? S : Bah, là, à la Caisse Primaire, à Giraudot, là, derrière, et puis j’ai rempli les feuilles, tout. Et comme je ne suis pas imposable, alors ils vont me la renouveler ; voilà ; Et après, et puis une fois que j’aurais la réponse de la COTOREP, après c’est à moi de payer ma complémentaire ; mais ça je suis au courant de ça, Q : La complémentaire, parce que la CMU ne va pas prendre la part complémentaire ? S : Bah non, parce que bon, en ce moment, je touche le RSA, là… Mais là dans une deux semaines je vais avoir la réponse ; après je vais avoir presque plus de 800 euros, après, mais, avec ces 800 euros, il faudra que je me prenne un CMU, une complémentaire après… Q : Oui, vous savez bien ; on vous a bien expliqué et vous avez bien mémorisé tout ce qu’il fallait faire… Que pensez vous de la facilité à aller voir un médecin généraliste ; ca vous paraît simple ? S : Ah ouais, ouais ! Bon, je ne sais pas lire, je ne sais pas écrire, mais je me démerde bien, hein. Q : Est-ce que vous demandez de l’aide ? S : Non, bon Q : Aux travailleurs sociaux, à quelqu'un ici (Halte de Jour) ?

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S : Si, bon, je suis sourd des 2 oreilles, là (il me montre son appareillage unilatéral à gauche), et puis ils m’ont mis un app…, un truc-là ; et puis j’entends mieux maintenant. Et l’année prochaine, je peux en avoir une autre, et elle est gratuite. Et puis là j’en ai eu pour 420 euros, mais c’est la CMU qui a pris ça en charge. Mais il faut que j’attende un an pour que je reçoive l’autre ; sinon je la paye de ma poche ; et comme bon, avec un appareil, là, j’entends bien. Mais avant j’étais sourd, hein ! Ah ouais, j’entendais rien ; là ça va. Q : Là j’ai l’impression que maintenant voir un médecin c’est facile ; vous avez un médecin traitant que vous suivez régulièrement, est-ce qu’il y a eu une période dans votre vie où c’était plus compliqué par exemple ? S : Ah oui, parce que je bégayais beaucoup, hein et j’avais (il se met à bégayer davantage), j’avais beaucoup du mal à m’exprimer et puis j’ai remarqué : plus je vieillis et mieux je parle… Et puis il y a aussi le temps et des fois quand il y a un changement de temps (il montre le ciel), je bégaye beaucoup. Q : Le fait de bégayer, ça vous gênait pour aller voir un médecin ? S : Ah ouais ! Bien sûr, j’arrivais pas à m’exprimer. Q : Et du coup, vous n’osiez pas y aller ? S : Ben si, mais j’ai mis mon temps pour que j’arrive à cracher le morceau. Q : Est-ce que le médecin vous a déjà proposé de vous aider pour le bégaiement par exemple ? S : Non, mais parce que que moi j’ai eu la polio à l’âge de 5 ans… et j’aurais pu être handicapé, j’aurais pu mourir, et ça m’a frappé sur la langue et puis à 5 ans, et puis ma mère elle m’a mis dans un centre pour que j’apprends à parler ; mais bon ça ça marchait pas, et puis le bègue, je l’ai toujours eu, ça. Q : D’accord. Bon j’ai fini un peu mes questions, est-ce que vous avez quelque chose à rajouter ? S : Ben non… Q : Est-ce que vous trouvez que c’est intéressant… S : Je voulais juste dire je suis enchanté que je vous ai rencontré Q : Bah moi de même S : Voilà et peut-être un jour on va peut-être se revoir Q : Ben j’espère bien ; moi de toute manière je suis là cette semaine… C’était intéressant. S : Je vais rester encore jusqu’à fin juillet, et après je pars après. Q : Et quand vous serez en Lorraine par exemple, quand vous allez y aller, vous savez comment faire pour euh… qui trouver comme médecin traitant ? S : Oh, ben oui, oui ; Ben j’ai ma famille là-bas, j’ai mon frère ; il va dire, tu vas là ; ou alors je vais prendre son médecin à lui et si je vois qu’il est bien, et bien je resterais chez lui, hein… Et puis déjà, le médecin traitant il m’a préparé tous les dossiers où ce qu’il a eu, lui, pour le prochain médecin… Q : D’accord, tout votre dossier S : Et je l’ai moi, déjà, celui là ; et quand je vais arriver dans l’est et que je vais trouver le médecin que je prendrais, je lui donnerai les, il aura du coup tous les documents de moi, voilà. Q : Très bien S : Ben je me démerde bien ! Q : Très très bien. Vous avez bien anticipé le déménagement, c’est parfait.

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S : J’ai tout fait, là. Et là j’ai encore juste à régler le dossier ; j’fais un dossier de surendettement, là pour la Banque de France, avec l’assistante sociale ; et elle m’a dit peut-être la Banque de France ils vont effacer les dettes, alors je touche du bois (il cherche du bois sur le bureau en PVC et touche finalement un carton à côté) Ca c’est fait avec du bois ! Q : Bon ben merci beaucoup, très intéressant S : Merci

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Entretien N°3 (E3) Homme, 64 ans, Français, Foyer Paul Bert, RG retraité sans complémentaire, ALD, CMU en attente. Lieu d’entretien : Halte de jour, le 02/07/2012, 18mn Particularité : plus âgé, voix douce, prend le temps. Q : question S : Sujet Q : Quel est votre âge ? S : 64 Q : 64 ans, d’accord. Votre hébergement habituel ? Où est-ce que vous habitez ? S : Alors, c’est à dire que moi je suis actuellement à Paul Bert, à Tours, foyer Paul Bert. Q : D’accord ; en hébergement d’urgence ou en stabilisation ? S : C’est euh… foyer d’urgence. Q : Vous habitez là tous les soirs ? S : Tous les soirs… euh, je suis à Paul Bert, oui. Q : D’accord ; vous avez une couverture sociale ? S : Alors, en ce moment, j’ai un petit problème, au niveau complémentaire, parce que euh, donc moi je suis retraité, euh… Le problème, c’est que, bon j’ai eu plusieurs employeurs mais, là je suis en train de voir avec euh… mon Organisme de retraite est à, euh, c’est la MSA… pour voir si j’ai droit à la complémentaire CMU. Parce que, bon, j’ai des rappels de… comment on appelle ça… de complémentaire… C’est à dire que moi j’ai eu de petits employeurs ; et quand vous avez cotisé moins de tant d’années, quand vous êtes à la retraite, on vous verse tout d’un seul bloc. Alors ça fait que ça m’a empêché d’avoir la CMU. Et là je suis en train de calculer pour voir si j’ai droit… (rapidement) Donc actuellement je n’ai pas de CMU. Q : D’accord ; De toutes façons, pour la couverture sociale, on va en discuter après… Votre nationalité ? S : Française Q : D’accord ; et au niveau de la langue, il n’y a pas de souci particulier (il acquiesce). La dernière fois que vous avez eu un problème de santé… (il me coupe) S : C’est à dire que moi j’ai un problème récurrent avec l’asthme. Q : La dernière fois que vous avez eu un problème de santé… (il me coupe) S : C’est à dire que… euh… tous les 3 mois je dois aller voir le docteur pour un renouvellement d’ordonnance. Q : Qui c’est, votre médecin ? S : Alors, donc c’est un docteur au CASOUS, alors j’ai pas son nom en tête, c’est un docteur du CASOUS. Q : D’accord, au CASOUS. S : C’est une dame Q : Pourquoi avez-vous choisi le CASOUS ? S : Parce que quand on est en foyer d’urgence, pour avoir un médecin, ben on passe par le CASOUS. Q : D’accord ; vous avez déjà été voir un autre médecin ?

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S : Non non non ; j’ai un docteur attitré au CASOUS. Q : D’accord ; est-ce que avant le CASOUS, par exemple, vous avez été voir un médecin généraliste en ville ? S : Euh.. ; Ben c’est à dire avant, autrefois, j’avais un docteur. Quand j’étais en Gironde. Et puis euh, donc, maintenant que… euh, ben je suis, euh… Parce que là je suis dans un circuit retraite, mais euh, je vais certainement me stabiliser ; mais là je suis dans une période transitoire. Q : Quand vous étiez en Gironde, vous travailliez à ce moment là ? S : Oui, j’ai travaillé dans la banque. Q : Ce qui est intéressant, c’est que vous aviez un médecin généraliste en Gironde, et quand vous êtes arrivés ici, vous êtes allé au CASOUS. S : Oui Q : Vous n’êtes jamais allé voir un médecin généraliste en ville S : Ben c’est à dire pour des raisons financières… Q : Pourquoi, parce qu’il fallait payer la consultation ? S : Voilà Q : Vous n’aviez pas la CMU à ce moment là… S : Ben je l’avais, la CMU. Q : D’accord ; et quand on a la CMU, il faut payer quand même ? S : Ben c’est à dire, que, comme au CASOUS c’était pratique, donc il y a des docteurs au CASOUS, donc euh… J’étais au CASOUS. Q : Pour vous, le CASOUS, c’est pratique. S : Ben c’est à dire ; que, bon, c’est un circuit quand les gens sont… Q : Parce que le CASOUS, c’est pas ouvert tous les jours, par exemple… S : Oui, mais bon ; Enfin, moi c’est pas grave, moi. C’est un problème d’asthme… Alors je sais les heures d’ouverture, et j’y vais quand c’est ouvert. Q : D’accord, et si on vous dit qu’il n’y a pas de place ? S : On m’a jamais dit ça, hé… On m’a dit il faut venir de bonne heure, c’est tout. Q : OK, qui vous a conseillé d’aller au CASOUS ? S : Ben c’est à dire ; quand on est à Tours par exemple, il y a des structures sociales, donc vous avez la partie hébergement, la partie santé…, la partie repas…, la partie habillement, voilà. Q : Et c’est quelqu’un de l’hébergement qui vous a dit d’aller au CASOUS ? S : Voilà. Q : Est-ce qu’il vous a accompagné ? S : Ah, non non… Q : La première fois ? S : Non, on m’a donné une adresse ; parce qu’il y a des fascicules, donc j’étais au CASOUS comme ça. (silence) Q : C’est intéressant pour vous d’avoir un médecin habituel ? S : Ben c’est à dire, euh, moi j’ai eu un grave problème de santé, en 2000, je me suis intoxiqué avec la Ventoline, j’ai perdu 12kg en 3 jours, et donc j’ai été hospitalisé en urgence, et depuis j’ai un traitement de fond, et matin et soir je dois prendre… donc je ne prend plus de Ventoline, parce que je me suis intoxiqué avec, j’ai trop pris de Ventoline, je pouvais plus respirer, j’étais bloqué, et donc j’ai un traitement de fond, matin et soir, je prend Pulmicort et … Pulmicort qui est anti-bronchique et euh… Foradil qui ouvre les bronches.

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Q : La question, c’était avoir toujours le même médecin, est-ce que c’est un point fort pour vous, est-ce que c’est important ? S : C’est à dire que maintenant il y a des règles nationales qui euh… qui demandent à avoir un médecin attitré, sinon, on risque d’être pénalisé au niveau médical. Q : Donc c’est une obligation. S : C’est une obligation par… euh… la réglementation, oui. Q : À part le côté obligatoire ; est-ce que c’est intéressant d’avoir le médecin qui vous connaît ; qui est tout le temps… S : C’est mieux ; parce que moi personnellement pour l’asthme, c’est mieux d’avoir quelqu’un qui me suis régulièrement. Q : Pourquoi c’est mieux ? S : Parce que, vous avez 10 asthmatiques, c’est 10 cas différents. Et puis, donc, moi j’ai de l’asthme depuis la naissance après avoir beaucoup d’eczéma qui a été… c’est à dire on m’a fait passer l’eczéma de manière trop énergique, et comme dans la famille, il y avait de l'asthme, donc j’ai attrapé de l’asthme. Donc c’est mieux d’avoir un médecin qui connaît la situation. Q : D’accord, qui vous connaît S : Voilà Q : Qui connaît votre histoire S : Voilà Q : Et que vous vous connaissez aussi, peut-être ? S : Oui, bon, moi je suis pas compliqué… bon Q : Mais par exemple, au CASOUS, c’est toujours le même médecin que vous voyez ? S : Ouais Q : Parce que là, les médecins ont changé par exemple S : Oui, mais… bon, c’est… moi je suis bien mon traitement, donc j’ai pas de difficulté… D’ailleurs la dernière fois, la dame, qui m’a ausculté, m’a dit, « bon, vu votre âge, vous savez maintenant qui vous pouvez être pris en charge à 100% », donc elle m’a fait prendre en charge à 100%. Voilà. Q : Là, on a vu ce que vous avez fait avant. Imaginons que demain, vous avez besoin d’avoir une consultation médicale, demain matin, vous n’allez pas bien, comment faites vous ? S : Ah bé, je vais… au CASOUS. Q : Vous y allez comment ? S : Ah bé j’y vais… en bus. Q : D’accord, vous savez quand est-ce qu’il faut y aller au CASOUS, par exemple ? S : Oui, non… mais enfin, par les surveillants (Note : Veilleurs de nuit), tout ça, on a les dates… c’est le lundi… Q : Donc vous demandez d’abord ici ? S : Ah non, mais c’est constamment, c’est des heures précises, c’est le lundi, le mardi, le mercredi, c’est le matin… Q : Par exemple, demain matin, vous sous levez, vous n’êtes pas bien, comment faites vous pour savoir si aujourd’hui c’est ouvert ? S : Ah ben je vais d’abord voir… parce que j’ai un papier, bon, si y a pas, si faut que j’attende, ben je vais à l’hôpital. Q : Déjà, le papier vous le trouvez où ? Vous l’avez avec vous ? S : Oui

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Q : Il est affiché ? S : Non, non, je l’ai dans mon portefeuille. Q : D’accord ; Donc vous regardez si le CASOUS et ouvert ou pas… S : Voilà Q : Si le CASOUS est ouvert, vous y allez… S : J’y vais ; et sinon je vais à l’hôpital. Q : Le CASOUS, vous savez à quelle heure il faut y aller, par exemple ? S : Oui, le matin, c’est à partir de 9h, il faut arriver avant 10h, parce que ils prennent… c’est un nombre limité, parce que ils s’arrêtent à midi, ou… Q : Et si le CASOUS est pas là aujourd’hui S : Après je vais à l’hôpital… Q : Comment vous faites pour aller à l’Hôpital? S : Je prends le bus. Q : Et vous allez à Trousseau ? S : Non, je vais plutôt à… je vais à… l’autre hôpital à Tours. Q : A quel hôpital ? S : Ben en face du… en face de… euh, attendez… c’est un jardin public Q : D’accord S : Je me rappelle plus ce que c’est comme… Q : Mais vous savez comment y aller ? S : Par le bus, on prend le… enfin moi, comme je suis à Paul Bert, je prend le 4. Q : Et une fois que vous êtes à l’hôpital, vous allez voir où ? S : Alors je vais au secrétariat et je demande, euh, le service pneumologie. Q : D’accord, ils vous attendent directement ; ils vous connaissent, quoi. S : Oui ils me connaissent parce que, j’y étais, j’y ai été. Q : Vous l’avez déjà fait, ca ? S : Ah, ils m’ont fait… comment on appelle ça… enfin ils m’ont dit que ça allait, quoi. Q : D’accord ; donc vous allez au service pneumo… enfin vous allez au secrétariat S : Je demande le service pneumologie. Q : Et ils vous donnent un rendez-vous le jour même ? S : Ah ben si je suis pas bien, après je vais aux Urgences. Q : Comment vous faites pour aller aux Urgences ? S : Ben, je reviens au secrétariat et puis je demande les Urgences. Q : Parce que les Urgences, euh… si elles ne sont pas là ? S : Ah non, mais c’est 24h sur 24 Q : Oui mais c’est pas à Bretonneau, les Urgences. S : ?? , Heu… Q : Vous y êtes déjà allé aux Urgences, ou pas ? S : Non, enfin en principe dans chaque hôpital, il y a des Urgences. Q : Ca vous est jamais arrivé, le moment où… S : Ah, dans ma vie j’ai été de nombreuses fois aux Urgences dans la nuit. Q : Mais là par exemple, depuis que vous êtes à Tours et suivi au CASOUS, à part le renouvellement d’asthme, vous n’avez jamais eu besoin d’un médecin et le CASOUS était fermé ? S : Ah non, non non. J’ai pas eu de problème. Q : Vous allez à l’hôpital et vous demandez les Urgences. S : Voilà.

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Q : Et si on vous dit qu’à Bretonneau il n’y a pas d’Urgences, qu’il faut aller à Trousseau ? S : Ah ben je prends un taxi et puis je vais à Bretonneau Q : Vous allez à Trousseau ? S : A Trousseau. Q : Mais le taxi, il sera à vos frais S : Il sera à mes frais. Ils m’enverront la note (il rigole doucement). Alors si je peux pas payer, je dis vous voyez à l’accueil, j’ai un problème. Q : Vous essayez de demander de l’aide au secrétariat S : Ah ben le taxi va voir le secrétariat ! Ou alors il faut appeler la police (il rigole). Q : Est-ce que c’est compliqué pour vous de voir un médecin généraliste en cabinet ? S : Ah non !!! Moi dans ma vie, j’ai peut-être vu 500 fois le docteur, alors ! Q : Mais là par exemple en ce moment, vous êtes au CASOUS (il acquiesce) et vous n’êtes pas allé voir un médecin généraliste en cabinet… C’est ça, ce que vous m’avez dit… S : Ah ben j’ai déjà été, par exemple, j’ai été… un jour j’ai été… euh… Ah oui, j’avais un problème de renouvellement, et j’étais en rupture, donc j’ai été voir un docteur généraliste à… samedi matin à… comment ça s’appelle, heu… à… Saint Pierre- Des- Corps. Q : Quel généraliste vous… Qui est-ce qui vous a parlé de lui ? S : Ah ben parce que je savais qu’il y avait un généraliste à SPDC, qui recevait le matin Q : Comment vous le saviez ? S : Ben parce que j’avais… Moi je suis bibliothèque, et je vais souvent à la bibliothèque de St Pierre, et alors, ben je connais un peu les horaires des docteurs à St Pierre. Q : En discutant avec les gens ? S : A la bibliothèque, tout ça… Q : C’est affiché ? S : Non, c’est moi qui ai demandé. Ils m’ont dit « Samedi matin, y a un docteur qui consulte à … SPDC » donc j’y ai été. Q : Donc par exemple demain, si vous n’êtes pas bien, qu’on vous dit que les Urgences sont à Trousseau, est-ce que ça vous dirait d’aller voir un médecin généraliste par exemple ? S : Ah ben j’irais voir un médecin généraliste, oui, enfin le problème, c’est pour payer… parce que le problème, c’est payer, parce que actuellement je suis dans un état transitoire et je ne sais pas si j’ai droit à la CMU ou pas. Q : Actuellement, qu’avez vous comme Couverture ? S : Heu… C’est à dire je suis à 100% pour l’asthme depuis le mois dernier. Q : Mais sinon pour les autres médicaments qui sont pas liés à l’asthme, vous savez, en bas de l’ordonnance… S : Ah oui, eh bé, euh… Ca m’est pas arrivé… A chaud je prendrais une décision. Q : Là en ce moment vous n’avez pas de complémentaire ? S : En ce moment je n’ai pas de complémentaire, euh… non, je n’ai pas de complémentaire Q : Vous n’avez pas la CMU non plus S : Et j’ai pas la CMU

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Q : Vous avez la retraite S : Par contre, tout ce qui est trait à l’asthme, c’est à 100% ; moi je n’ai que des problèmes avec l’asthme, pour le moment. (silence). Q : Imaginons que vous avez la CMU, et que donc du coup, c’est pas un problème financier, est-ce que vous irez voir un médecin généraliste en ville ; ou sinon, qu’est-ce qui vous bloquerait pour le faire ? S : C’est à dire, dans un premier temps, je vais au CASOUS ; et si le CASOUS, c’est pas disponible, je vais voir un médecin généraliste. Q : Est-ce que dans le passé, vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin généraliste ? S : Ah non ! Moi j’ai toujours… de toutes façons, moi c’était toujours l’asthme, à peu près… Q : Est-ce que dans le relationnel ou d’autres problèmes, vous avez déjà eu de mauvaises expériences ? S : Non ! Non, et puis moi je suis quelqu'un, moi, je suis très… maniable, je suis pas, je n’ai aucun problème au niveau – comment on appelle ça – au niveau relationnel. Et heureusement au niveau santé, à part l’asthme, je n’ai aucun problème. Q : Donc pour vous, la seule difficulté à allez voir un généraliste, c’est l’avance des frais. S : C’est l’avance des frais, oui. Q : Et pourtant vous continueriez à aller au CASOUS, au moins au début… S : Oui parce que j’ai mon docteur au CASOUS Q : Parce qu'il vous connait… S : Parce qu’il me connaît. (silence) Q : Qu’est-ce que cela signifie pour vous d’avoir le 100% ? S : Eh bé, le 100%, c’est de ne pas être de sa poche (il sourit), de ne rien avoir à payer. Q : Ni la consultation… S : Ni la consultation… Ah ben la consultation, euh… attendez… au CASOUS, c’est gratuit, et au généraliste, euh… Ah bé, par exemple, quand j’étais à SPDC, il y a 3 mois, ben j’ai avancé, j’ai donné 20 euros et j’ai été remboursé après. Q : D’accord, c’est vous qui avez avancé ? S : Oui, j'avais de l’argent, j’ai avancé. Q : Mais ça reste difficile pour vous d’avancer… S : C’est à dire, à l’époque, ça a bien tombé, je pouvais avancer de l’argent, donc… Q : Vous savez comment faire les démarches pour la CMU, par exemple ? S : Oui, j’ai un DEUG de Droit, alors au niveau juridique et tout… Et puis bon, il faut être combinard un peu, bon… Quand on a un problème aigu, les gens sont… coopératifs. Après on s’arrange toujours, après. (il sourit). Q : Pour les démarches CMU, vous m’avez dit que vous étiez en train de faire la CMU ? S : Alors la CMU, là, je suis en contact avec ma mutuelle à Bordeaux, parce que, normalement j’ai pas droit à la CMU, parce que le problème, c’est que, j’ai eu 5 employeurs, et de petits employeurs, et quand, par exemple, vous avez travaillé moins de tant d’années, on vous verse la complémentaire d’un seul coup, donc, quand, en commission, ils se réunissent, bon ça vous met au dessus de…

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Q : ils ont l’impression que vous avez de gros revenus… en fait c’est juste au dessus de la barre. S : Voilà, ouais. Q : Est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter, là, sur notre discussion ? Vous trouvez intéressant de s’intéresser à l’accès aux soins, ou ça vous paraît évident ? S : Ah ben c’est à dire, pour moi, ça fait partie, vous savez, quand j’ai eu le bac, euh…, je suis rentré en médecine, bon malheureusement pour moi, euh…, bon j’ai pas… parce que c’était numérus clausus, comme toujours, donc j’ai pas… parce que on s’investit beaucoup en médecine ; et j’ai pas accepté l’échec, donc j’ai tourné la page en médecine, et après j’ai fait du Droit, j’ai la chance d’avoir le DEUG de Droit, et après j’ai travaillé dans la Banque. Donc pour moi, la médecine, à mes dépends, j’ai fait un trait dessus. J’avais des portes de sortie, je pouvais être kiné, je pouvais être visiteur médical, je pouvais travailler en laboratoire, heu, je pouvais… euh, rentrer en pharmacie, heu, j’avais des portes de sortie ; parce que les 2 dernières années, je dormais au Valium, hein… Moi, ce que je reproche aux premières années, c’est… on a trop de… pourtant j’ai joué…, j’ai beaucoup de mémoire, mais j’ai été trahi par l’asthme, parce que au moment des examens, j’avais ma crise d’asthme (rire) ; donc j’ai perdu mes moyens. S : Bon, c’est bon, merci beaucoup…

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Entretien N°4 (E4) Homme, 48 ans, Guinéen, Demandeur d’Asile, Foyer Albert Thomas, CMU et CMUc Lieu d’entretien : Halte de jour, le 02/07/2012, 18mn Particularité : CMU obtenue récemment Q : question S : Sujet Q : Quel est votre âge ? S : J’ai… 48 ans maintenant Q : 48 ans S : J’ai le 3, onzième mois, 1954 Q : Où habitez- vous en ce moment ? S : A Albert Thomas Q : Au Foyer A Thomas. C’est en place de stabilisation, ou en place d’urgence ? Vous êtes là tous les jours ? S : Oui, on est là-bas tous les jours, les demandeurs d’asile. On reste là-bas. Q : Quelle est votre couverture sociale ? (hésitation) Assurance maladie ? S : Heu, je n’ai pas, euh… Q : C’est juste pour savoir, vous avez la CMU ? S : Oui, j’ai eu la CMU le mois passé. Q : Quelle est votre nationalité ? S : Je suis de Guinée-Conakry Q : J’ai une question, mais c’est juste pour la forme : votre niveau de français vous paraît suffisant pour avoir une conversation ? S : Ca veut dire ? Q : Vous avez l’impression que vous pouvez facilement avoir une conversation ? S : C’est facile, oui (il rigole). Mais c’est un peu difficile parce que je n’ai jamais fait l’école ; j’ai appris le français, sur la route, comme ca. Q : d’accord ; Est-ce que vous avez des enfants ? S : Oui Q : Ici, en France ? S : Non, Q : Non ? Ils sont au Pays ? S : Oui. Q : La dernière fois… euh… en fait, mes premières questions, ça va être sur les problèmes de santé et la matière de voir le médecin, avant. Donc depuis que vous êtes en France, la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui êtes vous allé voir ? S : J’étais allé voir les gens de CASOUS, Ils m’ont envoyé... ; Y-avait… je ne sais pas comment on dit ça, sur place de Liberté, ici ; Y avait une institution là bas ; c’est là bas que je me soignais. Dès que je suis arrivé là-bas, je me suis présenté à eux, ils m’ont demandé si j’étais inscrit là bas, j’ai dit non, bon, ils m’ont demandé les pièces d’identité, j’avais des récépissés, je les ai montré, j’ai été reçu par le médecin, il m’a donné des médicaments ; et c’est là bas que j’ai continué à venir jusqu’au moment que j’ai eu la CMU. Oui, ils m’ont dit d’aller choisir un docteur…

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Q : D’accord ; donc la première fois, vous êtes allé au CASOUS… S : Oui Q : Qui vous avait dit d’aller au CASOUS ? S : Le CASOUS m’a dit d’aller à la place… Q : Mais qui vous a dit à vous d’aller au CASOUS, comment vous connaissez le CASOUS ? S : Oh, c’est Mlle A (Prénom féminin), l’assistante sociale (il montre le bureau d’à côté), elle m’avait dit d’aller à la consultation. Q : C’est l’assistante sociale de la Halte qui vous a dit d’aller consulter au CASOUS. Au CASOUS vous êtes allé à l’accueil, et c’est eux qui vous ont donné l’adresse d’ici ? S : Oui, ils m’ont donné l’adresse de la place du docteur, là bas. J’y suis allé… Q : Ils vous ont juste donné l’adresse… Et vous aviez un plan, vous aviez quelque chose ? Comment vous saviez où aller ? S : Un plan, oui, le plan de… chose Q : Au CASOUS, ils vous ont donné un plan, c’est ça ? Ou vous aviez un plan, vous, déjà avant ? S : Non, non, non Q : C’est le CASOUS qui vous a donné le plan S : CASOUS qui m’ont donné le plan. Q : Et après vous y êtes allé S : Je suis là-bas et je trouve que c’est fermé, mais c’était écrit sur la porte à quelle heure ils vont ouvrir. Ils travaillent de 14h à…, de 14h, ils ouvrent. J’ai attendu jusqu’à 14h. Q : Vous connaissez le nom de ce médecin ? S : Non Q : Vous ne vous souvenez plus ? S : (Hésitation) Non Q : C’est toujours le même médecin que vous voyez ? S : Non, non, depuis que j’ai eu les papiers maintenant, ils m’ont dit de choisir un docteur, j’ai choisi un docteur… qui est au côté de Marcel Higel. J’ai même son adresse ici. (il cherche dans ses papiers). Q : Donc ça c’est depuis que vous avez la CMU ? S : Oui, Oui (Il me tend l’attestation CMU) Q : Donc ça c’est l’attestation CMU (Il me sort une ordonnance avec le nom et l’adresse de son médecin). Qui vous a dit d’aller voir ce médecin-là ? S : C’est… l’assistante sociale, le nouveau là ; celle qui remplace Mlle A. Q : Donc quand vous avez eu votre CMU, Vous êtes venu ici… S : J’ai montré ; elle m’a dit il faut choisir un docteur, c’est à partir de là-bas qu’il peut te soigner. Là je demande à mes collègues, qui sont avec moi à … Albert Thomas. Ils m’ont dit, c’est un bon docteur, allez le voir. Q : Donc en fait, c’est vos collègues, qui sont avec vous à A Thomas, qui vous ont conseillé ce médecin là. S : C’est ça, justement. Q : Ils vous ont accompagné ? Pour y aller ? Ou ils vous ont juste donné l’adresse ? S : Justement, ils m’ont indiqué le lieu, ils m’ont dit que c’est le premier étage, le dernier bâtiment qui est là, et je me suis rendu directement là-bas… J’ai trouvé la femme, j’ai montré mon document. Elle m’a dit d’attendre de voir le docteur.

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Q : Le jour même. S : Le jour même. Et là, Docteur a demandé mes papiers, il a tout enregistré. Q : Alors depuis, vous le voyez régulièrement ? S : Oui, oui Q : C’est votre médecin traitant S : C’est mon médecin, oui Q : Est-ce que cela a un intérêt pour vous d’avoir toujours le même médecin ? S : Pour moi, je pense que c’est bien. Q : Qu’est-ce qui est intéressant ? S : (silence) Je pense que c’est mieux parce que ici, on dit chaque personne doit avoir son médecin, c’est ce que l’assistance maladie. Et je demandais, si par exemple, demain on va vers un autre lieu, il m’a dit que je peux me retourner à la Caisse de Sécurité Sociale pour l’informer ; ils vont me donner un autre papier, là où ils vont m’envoyer ; et je vais chercher un autre docteur là-bas. Q : Mais, donc, il y a le côté obligation légale, c’est avoir le médecin traitant, mais, est-ce qu’il y a d’autres intérêts, à part la loi qui dit qu’il faut avoir un médecin traitant, est-ce qu’il y a d’autres intérêts à avoir toujours le même médecin, le médecin qui est régulier ? S : Je pense que, l’intérêt de cette personne même, parce que c’est lui qui a l’habitude de te soigner, c’est lui qui sait quel médicament il faut te donner, je pense que c’est très important, pour la personne même, et que c’est très important pour… je sais pas. Q : Donc c’est intéressant parce que le médecin, il vous connait… S : Oui, il me connaît, il connaît… Il a l’habitude de vous donner de quel médicament… Q : Il connaît le dossier S : Voilà… Q : Il connaît tout ça, d’accord. Est-ce que c’est intéressant pour vous de le connaître aussi, du coup ? S : Connaître le ? Q : Le médecin. De savoir comment il est, où il est, est-ce que c’est quelque chose qui vous rassure ? S : Oui, bien sûr ! Bien sûr. (Silence) Q : Là on a discuté un petit peu sur ce qui c’est passé avant, imaginons que demain matin, vous n’êtes pas bien, vous avez besoin d’avoir un avis médical. Comment est-ce que vous faites ? S : (petite voix) Je pense que je vais essayer de téléphoner au Docteur. Q : Vous avez son numéro de téléphone S : Oui, c’est dans les papiers (il me montre son ordonnance) S : je vais essayer de lui téléphoner Q : Vous avez un téléphone, vous ? S : Oui, et là si il arrive de me recevoir, je vais aller le voir… Si il arrive pas de me recevoir, peut être me donner une idée comment il faudrait faire. Q : Donc s’il vous donne un rendez-vous avec une heure etc., il n’y a pas de difficultés pour vous rendre au rendez-vous. S : Non Q : Même si c’est le soir, par exemple, c’est difficile avec le foyer qui ferme S : Oui, c’est difficile avec le foyer qui ferme, mais (rire) on est obligé.

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Q : de toutes façons, après, c’est une discussion à avoir avec… avec le secrétariat. S : Oui. Q : Donc pour vous, ça vous semble facile, si vous avez besoin de voir un médecin, c’est facile ? S : oui pour le moment, oui, je savais comment il fallait faire Q : Et même pour après, vous m’avez dit que si vous déménagez vous savez qu’il faut refaire une nouvelle déclaration de médecin traitant, tout ça… S : Voilà ; c’est ce que j’ai demandé à la … chose… comment dirais-je, lorsqu’ils m’ont dit d’aller choisir un docteur, j’ai dit, bon, comment ça. Demain ils peuvent te dire d’aller vers Orléans, ou, comme on entend toujours le foyer là, ça va se fermer ou quoi, ils peuvent me dire d’aller vers Orléans ou de l’autre côté… Et si mon docteur se trouve à Tours, ici, comment il faut faire… Là je suis allé directement demander les gens de Sécurité Sociale, ils m’ont dit, bon, vous vous êtes demandeur d’asile, c’est d’accord, mais le jour qu’on vous envoie quelque part, vous pouvez venir avec ce papier présenté et là on vous donnera un papier là où vous êtes le jour que vous êtes ; et vous aller trouver un nouveau docteur là-bas. Q : Donc vous êtes allé vous-même à la Sécurité Sociale pour demander… S : Pour demander, oui. Q : Donc l’assistante sociale d’ici vous avait dit qu’il fallait avoir un médecin traitant (il acquiesce), vous, vous êtes allé à la Sécurité Sociale pour savoir en cas de déménagement… S : Voilà, justement… Q : Bon, et bien très bien… Est-ce que pour vous c’est difficile d’aller voir un médecin généraliste en cabinet ? S : Des fois c’est difficile, parce que chaque fois que tu vas, il te donne des rendez-vous; par exemple, j’ai des problèmes de… de… voir. Je suis allé voir mon docteur, il m’a dit il faut aller à l’hôpital Bretonneau. Je suis allé là-bas, la dame… je tirais le chose ; la femme m’a dit, il faut téléphoner sur ce numéro ; alors j’ai essayé de téléphoner à ce numéro, ça ne passait pas, ils m’ont dit de laisser des messages. Un jour, j’ai demandé Mohamed de m’aider. Alors on a téléphoné, ils m’ont dit que là-bas ils ne reçoivent pas des gens pour faire des examens de yeux, maintenant, c’est les gens qui devaient faire l’opération qui vont les recevoir là-bas. Là j’ai consulté mon docteur, il m’a dit d’aller en ville, de trouver un cabinet de… comment on appelle, ceux qui soignent les yeux… Q : Ophtalmo S : Là j’ai téléphoné. Il a cherché dans l’internet, il a trouvé… Q : Votre médecin traitant ? S : Oui ! Il a trouvé quelqu’un. Mais lui il m’a donné des rendez-vous… je crois… il m’a donné le rendez-vous de (il cherche dans ses papiers et me tend une fiche de rendez-vous où il est marqué la date du 22 août 2012) Q : D’accord, 22 août S : Le 22 août. Donc ça fait que si c’est quelqu'un qui est en train de souffrir, je crois que le rendez-vous là est très loin… Oui (il sourit) Q : Et puis pour vous qui avez du mal à voir… S : Voilà, justement. Q : Ca c’est le problème des ophtalmos, faut toujours beaucoup de temps… (silence)

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Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin ? S : Expériences négatives ? Q : Est-ce que des fois ça c’est mal passé avec un médecin généraliste ? S : Pour moi, pour le moment, non. Je n’ai pas eu. Q : Au niveau de la relation… au niveau du téléphone… de la prise de rendez-vous par exemple… S : Non… (silence) Q : Bon, c’est bien. Est-ce que vous avez les enfants ; vous m’avez dit, pas ici, malheureusement ; et… j’avais une dernière question sur la Sécurité Sociale : là vous avez la CMU ; vous savez quand elle s’arrête ? S : Oui, c’est… ils m’ont dit ça va se finir (il déplie son attestation CMU) le 31, troisième mois, en 2013. Q : Qu’est-ce que ça veut dire, pour vous, avoir la CMU ? S : Je pense que, avoir la CMU, c’est d’être accès aux soins… Q : Les soins, c’est quoi ? S : Les soins quand tu es malade… quand tu as les problèmes de santé, que tu puisses voir le docteur pour qu’il puisse te donner des médicaments… Q : Donc ca permet d’aller voir le médecin…? S : Voilà, justement. Q : Ca permet aussi d’avoir des médicaments…? S : Voilà, justement… je pense. Q : Tous les médicaments ? S : Non, le docteur m’a dit, ce n’est pas tous les médicaments ; y certains médicaments que cela ne sera pas remboursé par la sécurité sociale. Q : Et autre chose ? S : Autre chose ? Là je ne suis pas au courant… Q : Les prises de sang… (regard étonné) La radio par exemple, vous n’avez pas fait… S : Non. Il m’a dit qu’ils vont m’envoyer une lettre que je dois faire des analyses complètes, c’est à dire des prises de sang, des selles et tout. Mais jusqu’à présent je n’ai pas eu… ces lettres là. Q : OK, est-ce que vous savez comment renouveler la CMU ? S : Non, Q : Vous êtes en demande d’asile… Vous savez comment ça va se passer, par exemple, après ; si l’asile aboutit, par exemple, si on vous donne l’asile, est-ce que vous savez comment faire ? S : Non. Là, il faut à ce moment là demander à mon assistante sociale si elle a quelque chose… Q : Si vous avez une question, par rapport à la CMU, est-ce que vous savez vers qui aller ? A qui poser la question ? S : Je crois bien que, c’est tout juste à notre assistante sociale. Parce que si elle ne connait pas, elle va nous diriger… Q : Donc l’assistante sociale d’ici ? S : Oui. Q : De la Halte du foyer… elle est où, l’assistante sociale ? S : Halte. Halte de jour. C’était Mlle A, mais maintenant, tous les demandeurs d’asiles doivent être transférés dans une autre assistante sociale, qui s’occupe seulement des gens qui sont avec les familles, ici. Alors on tente de voir avec celle-ci, là.

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Q : Et quand… la dernière fois, vous m’avez dit que vous étiez à la CPAM, à l’assurance maladie, comment vous aviez fait pour aller… S : Dans tout cela, c’est Mlle A qui nous aidait. Chaque fois qu’on reçoit une lettre, ou on a des problèmes, on vient l’expliquer, elle nous dit : fait cela… Des fois elle-même, elle fasse ce travail. C’était une femme (sourire) très… active (rire). Q : Et quand vous avez voulu poser la question, vous savez, vous m’avez expliqué sur le médecin traitant, vous m’avez dit que vous étiez allé à l’assurance maladie, c’est ça ? Vous aviez rencontré qui à l’assurance maladie, vous savez ? S : Hum… non, je ne sais pas son nom. Mais, lorsque j’arrive à la réception, si ça s’agit de rentrer là dedans, ils me donnent le ticket, là j’attend sur les tableaux ; et je rentre voir cette dernière ; par exemple me demander à quelle date que je suis arrivé ici, me demander combien des enfants, l’âge, l’extrait de naissance, il me dit d’envoyer les photos, tout ça… Je les déposais là-bas. (silence) Q : Pour moi, c’était très intéressant.. ; Est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter ? Sur ce qui est d’aller vers le soin, d’aller vers le médecin généraliste, est-ce qu’il y a quelque chose que vous voulez rajouter encore ? S : Non, je ne pense pas, non. Nous vivons dans une situation… un peu difficile. Rencontres avec beaucoup de gens, au foyer, qui sont propres, qui sont sales, faut accepter… jusqu’à ces temps là, ça passe. Tu es en train de dormir, l’un commence de crier, ou tu vas à la toilette, y a certains qui vont à la toilette sans même tirer l’eau pour nettoyer là où…, c’est difficile… Faut… Faut accepter. Faire ton effort. Q : Ca c’est par rapport à la vie quotidienne… S : Ah oui. Q : Et par rapport au médecin ? S : Par rapport au médecin ? Pour moi, je … Q : A la santé… S : Dieu merci, depuis que je suis venu ici, je n’ai pas tellement de problème avec la santé. Q : Très bien, merci beaucoup…

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Entretien N°5 (E5) Homme, 46 ans, Français, vit en appartement, CMU et CMUc Lieu d’entretien : Halte de jour, le 02/07/2012, 19mn Particularité : Méfiant, demande à voir les résultats à la fin, demande pour quoi c’est faire, méfiant sur enregistrement mais accepte quand je lui dis que c’est anonyme… Q : question S : Sujet Q : Donc à partir de maintenant ça enregistre. Je ne vous demande pas votre nom, c’est juste pour avoir une trace et avoir ce que vous dites… au plus vrai de ce que vous m’avez dit. S : D’accord. Q : Alors, quel âge avez-vous ? S : Je vais sur 47 ans. Q : Vous allez sur vos 47 ; donc pour l’instant vous avez 46 ½ S : Ouais. Q : Où vous habitez, de manière habituelle ? S : A Tours. Q : Comment vous logez-vous ? ; Vous logez au foyer… ou… vous logez… S : Pour l’instant en appartement, mais plutôt l’hiver dans un foyer parce que mon appartement n’est pas confortable. Je ne peux pas me chauffer, j’ai de très gros ennuis financiers. Q : Donc la nuit dernière, vous étiez dans votre appartement. S : En hiver, j’étais plutôt en foyer, après quand il a fait beau, j’ai adopté l’appartement. Q : D’accord, c’est à cause du chauffage, surtout… S : Oui, et puis des ennuis financiers. Parce que là j’ai un travail précaire et mon salaire ne me suffit pas pour pouvoir chauffer un appartement, ça coûte trop cher. Faut savoir qu’en travail précaire, on a un salaire qui est inférieur à moins de 1000 euros par mois, donc il est quasiment impossible d’entretenir un appartement entièrement avec un salaire comme ça… D’un autre côté, je suis tributaire du RSA mais quand je travaille, la CAF elle m’en enlève…Donc j’arrive pas à faire face à toutes mes factures, quoi. J’arrive à peine à payer mon loyer… mais vous savez, quand j’ai fait ça, après il y a peu la possibilité de faire autre chose. Quand j’avais un travail avant, j’avais les moyens de pouvoir faire ce genre de chose, et je pouvais partir en vacances, au moins une fois par an, mais maintenant… Et là, avec le coût de l’euro, je peux plus le faire, voilà. Q : En ce moment, vous avez une couverture sociale ? S : la CMU Q : Votre nationalité ? S : Française Q : Niveau de langue, donc, pas de soucis. Est-ce que vous avez des enfants ? S : Célibataire.. Q : Et pas d’enfant… S : Euh, non.

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Q : D’accord. La dernière fois que fois êtes allé voir un médecin… Alors je vais vous poser des questions beaucoup plus larges… La dernière fois que vous êtes allé voir un médecin, comment ça c’est passé, comment vous avez fait ? S : Euh… Et ben, il m’a pris la tension, il m’a pesé… Q : C’était qui le médecin que vous avez vu ? S : Moi j’ai un médecin, c’est un généraliste, c’est Y (nom de famille du médecin, comme je ne comprend pas très bien il me l’épelle.) Q : Il travaille où ? S : A (il me donne le numéro et le nom de la rue). Q : Comment vous l’avez connu, ce médecin ? S : Oh parce que avant j’habitais par là-bas mais sinon, moi je vais pas tellement là-bas, je vais plutôt au CPO, à Molière, là-bas. Parce que, comme j’ai la MSA, comme je disais, là-bas ils prennent les gens qui ont… pas la MSA, la CMU. La couverture CMU, parce que comme ça, ça nous évite de pas payer un médecin en ville. Q : Quand vous allez en ville, vous payez ? S : Euh, parce que j’avais pas la CMU, mais là, depuis que j’ai la CMU, je paye pas, c’est, cette méthode. Parce que c’est fait pour les gens qui ont les minima sociaux. Q : Donc la dernière fois que vous êtes allé voir un médecin, c’était votre médecin traitant, Docteur Y, c’est ça ? S : Voilà. Mais ça fait longtemps que je l’ai pas vu, je vous dis, maintenant quand je vais voir un médecin c’est à la CPO, ils ont déménagé, ils habitent à côté de… dans un nouveau local, avenue Anne de Bretagne. Et je vais là parce que depuis que j’ai la CMU, moi ça m’évite de payer un médecin en ville. Q : Quand avez vous vu le CPO la dernière fois ? S : Ca fait plus de 2 mois, j’avais été pour un suivi de tension, tout ça… Q : Vous savez comment… c’est ouvert tous les jours ? S : Oui, c’est ouvert du lundi au vendredi, de 14h à 16h. Et il y a des médecins, des dentistes et y a même un ophtalmo. Les personnes qui veulent voir ces médecins- là, les ophtalmos et les dentistes, il faut qu’ils prennent un rendez-vous, on leur fixe un rendez-vous et il y a la possibilité de faire soigner des dents, des yeux… gratuitement avec la CMU. Q : Et le Docteur Y, qui vous l’avait conseillé ? S : C’est moi qui l’avait vu… parce que j’en avais besoin d’un et là maintenant je vais voir la CPO. Q : Le docteur Y, vous l’avez vu quand la dernière fois ? S : Oh, ça fait plus de 2 ans… Q : Donc c’est plus lui qui vous suit, c’est vraiment le CPO. Le CPO, c’est des médecins différents ou toujours le même médecin ? S : Oh, y en a 3, mais ils se relient, c’est les 3 mêmes. Ils font chacun leur tour. C’est des médecins…, à eux, quoi. Q : Ce qui est important pour vous, c’est la structure. Même si il y a des médecins qui changent, l’important, c’est d’être toujours au même endroit. S : Ben, ouais, parce que c’est un machin que je connais, et puis euh… c’est un centre… quand on va, on peut discuter avec eux et puis à force de les voir ils nous connaissent. Q : C’est ça qui est intéressant pour vous dans la structure ?

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S : Ouais, ouais, parce que ils nous connaissent, ils ont des dossiers, ils marquent à chaque fois qu’ils nous voient, ils marquent pour quelle raison on vient les voir… Et puis là on peut faire un suivi, voir si ça s’est amélioré la prochaine fois qu’on y retourne. Ils voient les personnes au fur et à mesure. Ils voient lesquelles qui vient les plus souvent ; moi ça va faire plus de 3 mois que j’y suis pas allé… Q : Qu’est-ce qui est difficile pour vous dans le CPO, par exemple. Est-ce qu’il y a des choses difficiles ? S : (silence)… Et bien, c’est pas très difficile ; mais moi j’aime pas tellement les médecins. Moi j’y vais pour me faire prendre ma tension, pour tout ça ; mais j’évite d’y aller, quoi… Q : Vous n’aimez pas les médecins en général ou alors les médecins du CPO en particulier ? S : Non, non, les médecins en général… J’ai une très bonne santé, quand il me prend la tension j’ai 14, euh, non, je me tiens entre 11 et12, c’est bien… Mais moi tant que j’ai pas de problème de santé, j’évite de fréquenter ce milieu là, quoi… Q : D’accord. Est-ce que c’est intéressant pour vous d’avoir un médecin habituel ? Un médecin régulier, de voir toujours le même ? S : Ouais mais si j’y vais pas souvent, au CPO ça fait 3 mois que j’y suis pas allé, j’y vais vraiment quand j’me sens… Q : Est-ce que vous préfèreriez avoir toujours le même médecin au CPO, ou est-ce que quand ça change, c’est pas grave… S : Quand ça change, c’est pas grave, quoi. (silence) Q : D’accord ; c’est pas important pour vous d’avoir toujours le même médecin. S : … Q : Tant que l’information passe, en fait ; ils communiquent entre eux. S : Si, c’est un peu important quand même. Q : D’accord. Parce que, par exemple, si vous avez un médecin généraliste en ville, ça sera toujours le même médecin. S : Ah ouais ! Moi j’ai commencé à travailler avec le docteur Y, ça fait plus de 2 ans, hein. Parce que avant j’habitais à Tours Nord, alors c’est pour ça que j’allais chez lui, parce que c’était plus près de chez moi. Maintenant j’habite plus à Tours Nord, alors… Si je veux aller le voir, ce médecin là, j’suis obligé de… prendre le bus, aller jusqu’à chez lui… c’est plus loin, quoi… Q : Alors là, on a discuté sur les consultations d’avant ; maintenant imaginons que demain matin, vous n’êtes pas bien. Et vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment vous faites ? S : Ben, je demande à mon médecin traitant. (silence) Q : C’est qui votre médecin traitant ? S : Le docteur Y ; ou je vais au CPO demander à celui là que je vois quand j’y vais de me donner son avis. Q : Concrètement, vous êtes le matin, il est 9h, vous n’êtes vraiment pas bien, comment vous faites ? Vous attendez 14h, ou… euh ? Vous appelez ? S : Non, j’appelle ! Si vraiment ça va pas, j’appelle un médecin, je fais… les Urgences, là ; j’téléphone à Bretonneau, supposons, puis… Q : Comment vous faites pour appeler Bretonneau, vous connaissez le numéro de l’hôpital ?

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S : J’appelle les renseignements, ou j’demande à un voisin de… éventuellement, est-ce qu’il connaît le numéro, d’appeler à ma place. Q : D'accord, vous ne connaissez pas de médecin autour de vous… ou… S : A la Halte, je sais… j’sais pas si il vous a dit le monsieur, y a un médecin qui vient, c’est une femme, D (Prénom Féminin), mais je ne passe pas par elle, parce que elle, elle fait de la psychiatrie, c’est un peu spécialité, c’est pas vraiment un généraliste, c’est… elle s’occupe de psychiatrie d’enfants, elle. A Bretonneau. Mais un médecin généraliste, comme vous disiez, et ben c’est le CPO, là. Q : D'accord. Donc si vous n’allez pas bien, si vous avez mal quelque part etc., vous allez plutôt appeler l’hôpital. S : Euh, ouais. J’pense que… Q : Vous l’avez fait un jour, ou pas ? S : Non, non. Ça m’est jamais arrivé, je suis en très bonne santé. Q : D'accord. Donc si ça va pas bien, mais que vous pouvez attendre un peu, vous allez plutôt attendre 14h pour aller au CPO. S : Voilà. Q : Vous y allez de but en blanc, comme ça ? Pas besoin de rendez-vous ? S : Non, sauf si c’est pour les yeux, ou besoin de voir un dentiste… Mais le CPO, y a des médecins généralistes, on va les voir, quand on a besoin, si c’est pour prendre la tension, ausculter… ils le font. Le médecin généraliste, il fait ça, y a pas besoin… Q : D'accord. Pourquoi le CPO, qu’est-ce qui vous plait dans la structure CPO ? S : Parce que c’est gratuit, ça évite de payer. Et puis, en plus ils donnent des médicaments, ils ont une pharmacie, donc si on a besoin de Doliprane ou de tel médicament selon la douleur… ils ont ce genre de chose pour nous donner. Ça évite de payer une boite de Doliprane, je sais pas combien ça doit coûter, mais… ça coûte pas cher, mais… Q : Avec la CMU, vous le payez votre Doliprane ? S : Euh, non. Q : Parce que ce que vous me dites ; n’importe quel médecin avec la CMU c’est gratuit et les médicaments, c’est gratuit aussi. S : Ouais, mais non ; je fais le CPO, parce que j’ai commencé au CPO, comme je vois toujours à peu près les mêmes ; ils me connaissent, je les connais, donc, moi ça m’embête de changer… Q : D'accord, c’est ça qui est important pour vous, c’est de les connaître ? S : Voilà. On se connaît mutuellement, moi je les connais, eux ils me connaissent. Q : Est-ce que vous avez déjà eu des problèmes dans une consultation de médecine générale ? Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin généraliste ? S : Euh, non ; j’vois, le Docteur Y, là, dont je vous disais tout à l’heure, j’m’entends très bien avec lui, je lui avais demandé de faire des choses ; il les a faites. Je le connais, ça fait pas mal de temps ; et en plus, lui maintenant, il est spécialisé dans la… il n’est pas que médecin généraliste ; il est médecin généraliste mais il fait de l’ostéopathie… Il est ostéopathe. (silence). Q : Avant, avec le docteur Y ou avec d’autres médecins généralistes, est-ce qu’il y a eu des moments où vous avez eu des problèmes… relationnels, où ça

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s’est mal passé, vous êtes sorti de la consultation en vous disant, ça s’est mal passé. S : Euh, non je pense pas. Avant j’avais un médecin… non je pense pas que ça me soit arrivé, non, non, non. Q : D'accord. Vous n’avez jamais eu de difficulté en vous disant : ça s’est pas bien passé, ou, il m’a mal parlé… Il y a eu un problème. Vous avez l’impression de n’avoir jamais eu de difficulté avec un médecin généraliste… S : Non, jamais, non Q : C’est une bonne chose, hein… D'accord. Donc là, vous m’avez dit que vous avez la CMU ; qu’est ce que ça veut dire, pour vous, avoir la CMU ? S : Euh, Couverture, euh… Couverture Universelle. Q : A quoi ça correspond, qu’est-ce que cela vous donne comme droits. S : Bah de pas payer les consultations, les médicaments… Parce que moi, j’ai le RSA, et puis bon, moi si devais me faire opérer, avec ce que je gagne, je ne pourrais pas payer le séjour à l’hôpital et puis l’opération. Mes revenus ne me permettent pas de faire ça, donc… Y a une couverture, qui a été faite… Q : Donc ça permet d’aller voir le médecin… S : C’est ça Q : Ça permet d’avoir des médicaments… S : C’est ça Q : Ca permet d’être opéré, c’est ce que vous me disiez S : Ouais Q : Qu’est-ce que ça permet d’autre? S : Et puis rien payer. Par exemple, il m’arrive un accident sur la route, je suis transporté à l’hôpital, et bien le séjour que je vais passer là-bas, si c’est 4 ou 5 jours, ou plus, cette couverture là, c’est pas moi qui paye ; c’est le, c’est l’Etat. C’est pris en charge par l’Etat. Ils se font payer, mais au lieu que cela soit moi qui paye, c’est la couverture, la mutuelle, la couverture sociale. Q : Donc c’est l’Etat qui va payer pour vos soins. S : Voilà. Et ça, ça fait pas longtemps que ça existe. Et je pense que c’est bien parce que ça évite aux gens qui ont pas trop les moyens de payer de pouvoir avoir des soins étant pris en compte par la société. Il faut bien que ce soit quelqu'un qui paye, hein ? Q : D'accord. Est-ce que vous savez quand ça va s’arrêter, la CMU et comment faire après, pour renouveler par exemple ? S : Eh bien, il s’agit de retourner à la… à la… Caisse Primaire d’Assurance Maladie… Q : Là aujourd’hui, vous savez quand ça va s’arrêter, votre CMU ? S : Il faut que je le refasse le dossier, là. Parce qu’ils m’envoient un courrier quand ça s’arrête, c’est de date à date. Et après avec le courrier ils me redemandent si je veux renouveler ; parce que c’est un an. Alors moi je retourne les voir, je dis oui, je suis intéressé ou pas intéressé. Si je suis intéressé, j’ai des papiers à fournir, un dossier à remplir… et puis ça m’est accordé, quoi. Q : Vous allez les voir sans rendez-vous, ou vous prenez rendez-vous ? S : Ah non, faut… à la CPAM, Caisse Primaire d’Allocation Maladie, rue Edouard Vaillant, c’est… faut prendre un ticket, et puis bon, y a un peu d’attente. Y a quelqu'un qui nous reçoit, et il nous donne un dossier à remplir, et puis après il nous dit : vous remplissez le dossier et vous rapportez les

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papiers et si c’est OK il vous dit le jour où vous les rapportez, le dossier rempli avec les papiers apportés, il vous dit si vous pouvez l’avoir. Q : D'accord. S : À la CPAM, c’est des professionnels de la … santé. C’est eux qui s’occupent de faire des remboursements de médicaments, d’établir des dossiers pour les gens qui ont besoin de la CMU, comme moi, y en a plein, hein, en France on est… je sais pas combien de personnes à avoir la CMU, mais tous les RMIstes que je connais, pratiquement, ils l’ont, hein. C’est une couverture qui donne beaucoup d’avantages sociaux ; ça évite de payer quand on n’a pas d’argent des choses chères. C’est vrai qu’une hospitalisation à l’hôpital, c’est pas donné. Je sais pas combien de, ça doit chiffrer parce que moi, j’y ai jamais été, mais, si, supposons que je devais y aller, je sais que ma situation elle ne me permettrait pas de pouvoir payer… donc euh… il faut bien que ça soit une couverture sociale qui paye. Q : Je trouve qu’on a pas mal avancé. Est-ce que vous avez quelque chose à rajouter ? S : Euh, non. Et là c’est pour une thèse, vous allez faire une thèse ? Q : Oui, je suis en train de travailler dessus… Toutes ces questions, en fait, je pose les mêmes questions à tout le monde, et je regarde les réponses et j’essaye de voir en globalité si il y a un courant et comment on peut faire pour favoriser l’accès aux soins, comment faire… Alors vous, vous allez au CPO, d’autres n’y vont pas ; pourquoi vous y allez, pourquoi d’autres y vont pas ? Pourquoi… Voilà, essayer de comprendre un peu tout ça pour… S : Au CPO, à chaque fois que j’y vais il y a beaucoup de monde, il y a même des gens qui sont mariés, qui ont des enfants, ils donnent même des couches, ils ont un stock de couches pour les gens qui sont mariés qui ont des bébés, des gens qui ont pas les moyens de s’acheter des couches ; ils ont des problèmes financiers ; ils vont là-bas, au CPO, ils leurs donnent des couches pour les bébés pour qu’ils puissent les changer, des couches gratuites, ils leurs donnent un paquet ou 2 paquets de couches, suivant ce qu’ils ont besoin, quoi. Ils leurs donnent des médicaments gratuits, à moi aussi, hein. Et puis il y a plusieurs médecins ; il y a généralistes et il y a dentiste et ophtalmo pour les yeux. Ça, par contre, c’est sur rendez-vous. Q : Vous avez déjà vu un dentiste là-bas ? S : Ouais, c’est la deuxième fois que j’en ai vu un parce que j’ai sujet à faire des abcès dentaires et quand ça me prend, je suis obligé d’y aller, quoi. Parce que ça fait mal. Q : OK, bon merci beaucoup. S : Vous me tiendrez au courant…

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Entretien N°6 (E6) Femme, 26 ans, Française, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, CMU et CMUc Lieu d’entretien : La Nuitée, le 02/07/2012, 25mn Particularité : Un enfant de 7 ans, déménagement récent, Changement de caisse CMU en cours. Q : question S : Sujet S : Moi ça fait 3 semaines que je suis dans la région. Q : Ah oui, donc c’est tout récent. S : Je suis de l’Oise, moi. Je sais pas si vous connaissez ? Q : Non, Amboise ? S : Non, ah non ! Je suis du Nord, moi. En Picardie. Picardie c’est la région, Oise c’est le département. Q : Au Nord de Paris ? S : C’est pas Paris, au dessus de Paris. Ça fait pas partie de Paris, j’y tiens… (elle rigole). Q : Très bien. Quel âge vous avez ? Vous m’avez dit 26 ? S : 26 ans, oui, c’est ça. Q : Là actuellement, vous habitez à la Nuitée. Depuis que vous êtes ici vous habitez à la Nuitée ? S : Non, J’ai été en camping, au début ; du 7, je suis arrivée le 17, euh, le 18, ici. Le lundi 18. Q : Vous avez une couverture sociale ? S : Normalement oui, j’ai la CMU et la CMUc. Mais ils font transférer mon dossier, donc il faut attendre. Q : Votre nationalité ? S : Française Q : Est-ce que vous avez des enfants ? S : Oui, un petit garçon, de 7 ans bientôt, qui vit chez son papa, en Picardie, vu ma situation. Q : Bon alors j’ai plusieurs questions. Au début on va essayer de parler des soins avant… La dernière fois que vous avez eu un problème de santé ; que ce soit ici ou en Picardie… S : … Cette semaine. Q : D'accord ; qui est-ce que vous avez vu ? S : Une fausse couche Q : Vous avez vu qui comme médecin ? S : Euh… Ben au début j’ai vu que des internes à l’hôpital Bretonneau Q : Vous êtes allée à l’hôpital ? S : Ouais, et - parce que j’étais suivie parce que j’avais eu quelques soucis ; mon taux d’hCG ne doublait pas - et donc j’ai vu des internes et après ils m’ont donné…, la grossesse était arrêtée donc ils m’ont donné du Cytotec, c’est un cachet abortif, et après je suis allé à la PMI les chercher parce que vu que j’ai pas encore ma CMU, ben 18 euros la boite, je peux pas. Et le PMI m’a envoyé en Orthogénie parce que pour elle j’avais pas à prendre les cachets… Q : Comment vous avez fait pour aller à l’hôpital ?

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S : A pied Q : Vous y êtes allée toute seule ? S : Ouais, ouais, aux Urgences, ouais. Q : Quelqu'un vous a dit où il était ? S : Euh, non ; mon copain a très bon sens de l'orientation, on a appris à se débrouiller. Q : Donc vous êtes allée aux Urgences Bretonneau de votre propre avis, sans téléphoner avant… S : (elle acquiesce) Non, moi j’y suis allée comme ça, pour des douleurs. Q : Alors, en Picardie… Parce que là du coup c’est un peu particulier car vous n’avez pas encore votre CMU, comme vous avez déménagé. Quand vous étiez en Picardie, la dernière fois que vous avez vu un médecin ? S : Hum (elle soupire), alors… hors soins… parce que sinon moi je suis un traitement Méthadone donc j’en vois toutes les semaines… Q : Ben justement qui est-ce que vous voyez pour le traitement Méthadone ? S : Ah, alors, c’est le Docteur S (Nom de famille) Q : Ici à Tours ? S : Non, là-bas, c’est Docteur S, c’est à C (Nom de ville), c’est dans l’Oise. Et ici… Q : C’est un médecin généraliste ou un médecin addicto ? S : Non généraliste. Et ici au CSAPA, à Port-Bretagne – C’est un service de Bretonneau, d’ailleurs – c’est des médecins psychiatres. Q : Qui vous a orienté vers le CSAPA ? S : C’est moi, avec le SATO, en fait, on a cherché… Q : C’est quoi le SATO ? S : Service d’Aide aux Toxicomanes de l’Oise. Ça équivaut au CSAPA ici. Q : D'accord. En fait, quand vous étiez encore là bas, vous avez posé la question de où est-ce que vous allez venir quand vous serez ici ? S : Voilà, et j’ai appelé ici pour savoir si ils pouvaient me prendre ; ils appellent ça un relais. Q : Donc c’est le SATO qui vous a donné le numéro d’ici ? S : Voilà ; et j’ai appelé du SATO, et après le médecin du SATO, dans l’Oise, m’a fait une fiche relais pour le CSAPA d’ici, justement ; pour que quand j’arrive j’ai mon traitement. Q : D'accord ; c’est vous qui avez pris le rendez-vous, pour le CSAPA ? S : Non, c’était sans rendez-vous, je me suis présentée, et après ils ont eu la fiche relais par mon médecin, le Docteur S, et après ils ont mis ça en place, en fait. C’est assez simple, ils facilitent pour ce genre de chose. Q : Quand vous étiez avant là haut en Picardie, c’était un médecin généraliste qui vous donnait votre Méthadone, c’est ça ? S : Voilà. Q : Il vous suivait pour autre chose aussi ? Si vous aviez de la fièvre, si vous n’étiez pas bien… S : non, non. Suivi pour les problèmes psychologiques surtout, insomnies ou quoi. Q : Parce que lui, il était dans le SATO ? S : Voilà, il était au SATO Q : C’était pas un généraliste de ville.

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S : Non, celui de D (autre nom de ville), qui est aussi dans l’Oise, elle, elle était généraliste et elle venait faire des heures de permanence au SATO. Mais je crois que le docteur S était exclusivement… rattaché au SATO. Q : D’accord. Et en dehors des problèmes de méthadone, quand vous aviez besoin de voir un médecin, comment vous faisiez, avant ? S : Euh, alors, en général déjà j’y allais quand c’était pas possible de faire autrement ; la dernière fois que j’y suis allée c’était il y a 4 mois pour l’abcès (je ne suis pas sûre de ce mot), oui il y a 3-4 mois, ouais. Q : Vous êtes allée où ? S : A C (même nom de ville qu’au début), juste derrière là où j’habitais. Q : Chez un généraliste ? S : Ouais, un généraliste. Q : Vous aviez son nom comment ? Vous le connaissiez déjà ? S : Heu, mon copain avait déjà été le voir, ouais. Q : C’est lui qui vous a dit l’adresse ? S : Euh ouais, c’est lui qui m’y a emmenée. Q : C’est lui qui a pris rendez-vous ou c’est vous qui avez pris rendez-vous? S : C’est lui Q : Et c’est lui qui vous a accompagnée en voiture pour… S : A pied. C’était juste derrière. Ma voiture, je l’avais déjà plus, ma voiture. (elle rit… jaune). (silence) Q : Est-ce que ça a un intérêt pour vous d’avoir un médecin habituel ? S : Ouais, parce qu’on le connait, surtout quand on est une femme, on est plus gênée quand c’est encore un médecin qu’on connaît pas, et puis il connaît des choses qu’on a pas forcément envie de répéter tout le temps. Et puis, je pense qu’il est plus à même d’adapter le traitement, il connaît mieux la personne pour adapter le traitement. Q : Donc il vous connaît, donc il est plus compétent ; mais en même temps, il y a aussi le fait de ne pas avoir à répéter S : Voilà Q : Ça c’est important pour vous… S : Puis, même, pour écouter le cœur ou quoi, on est obligé un peu de se déshabiller, pas tout le temps mais y a des fois ça arrive, et c’est mieux que ce soit un médecin qui connaisse, parce que toujours voir un médecin différent… C’est mieux, moi je trouve que c’est mieux. C’est sûr que… on est plus à l’aise, on ose plus lui parler des choses, aussi. Q : Est-ce que vous avez un médecin gynécologue ? S : Non Q : Est-ce que vous avez fait des frottis, par exemple ? S : Le dernier, je l’ai fait au CASOUS Q : Donc vous êtes venue au CASOUS depuis que vous êtes à Tours ? S : Ben, ouais, pour ma grossesse Q : Comment ça s’est passé à ce moment là, quand vous êtes venue au CASOUS ? S : Ben je suis venue à la permanence parce que c’est de 10h à je sais plus trop quelle heure, j’y suis allée, j’ai vu Docteur V (nom de famille), et c’est elle qui m’a examinée et j’avais besoin d’un certificat comme quoi j’étais enceinte, pas un certificat de grossesse, elle m’a juste fait un certificat pour le 115.

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Q : Comment vous avez su… qu’il fallait aller au CASOUS, qui est-ce qui vous avait parlé du CASOUS S : La PMI, la PMI et Port-Bretagne. Q : Alors, Port-Bretagne, c’est le CSAPA, donc ça c’est le relais qui a été fait directement, la PMI, comment vous connaissiez la PMI ? S : Parce qu’il y en a une chez moi, et qu’il y en a partout. Q : Et comment vous avez trouvé celle là ? Comment vous saviez où aller ? S : J’ai demandé aux gens… Q : Dans la rue… ou ici ? S : Ouais, j’ai demandé dans la rue ; on est habitué à se débrouiller… Q : Justement, moi ce qui m’intéresse, c’est comment vous faites pour vous débrouiller ? S : Ben, en général, on demande aux gens, c’est ce qui marche le mieux… Q : Donc vous avez demandé aux gens la PMI. Et une fois que vous étiez à la PMI, ils vous ont dit nous on peut pas vous prendre ? S : Non, c’est pas ça ; c’est pas par rapport à ça en fait, c’est qu’il y a pas de médecin à la PMI, ce jour-là, et vu mon traitement Méthadone, déjà, je ne pouvais pas être suivie à la PMI. C’était le CSAPA. Le CASOUS j’y suis allée parce que le CSAPA, ils ont que des médecins psychiatres, que les rendez-vous sont… Q : C’était que pour la méthadone. S : Voilà. Q : Donc du coup c’est la PMI qui vous a donné le rendez-vous au CASOUS ? S : Non, c’est sans rendez-vous, ils m’ont donné l’adresse. Non, mais le CASOUS c’est sans rendez-vous, premier arrivé, premier servi. Q : Vous y êtes déjà allée plusieurs fois ? S : 2 fois, au CASOUS, mais la 2ème fois, c’était pour voir l’assistante sociale. Q : Qu’est-ce que vous trouvez d’intéressant dans cette structure ? S : Ben, il y a tout au même endroit, ils essayent d’aider au maximum qu’ils peuvent. Q : Tout est spécifique pour vous aider… S : Ouais, voilà ; de toutes façons, c’est l’Entraid’Ouvrière, en général, ils font ce qu’ils peuvent pour aider, quoi. Comme ils peuvent. Enfin moi, j’ai pas été déçue, mais en même temps, par l’assistante sociale que j’ai vue pas très longtemps, Docteur V, je l’ai trouvée très bien, mais après l’assistante sociale je l’ai vue que… quoi, un quart d’heure. En un quart d’heure, on peut pas trop se faire une idée. J’ai rendez-vous vendredi avec elle. J’en saurais peut-être plus, mais… ça a l’air assez bien – mal organisé – mais assez bien. Q : Là en même temps, vous êtes là depuis 3 semaines, vous avez déjà quelqu'un qui vous suit pour la méthadone… S : Mais ça j’ai organisé avant, ça. Q : Bien sûr ! … quelqu'un qui vous suit pour les consultations de tous les jours, Docteur V ; plus vous êtes passée aux Urgences parce que vous en aviez besoin… S : Oui, le système de santé est très bien… Q : Non, ma question c’est pas ça, ma question c’est comment vous faites pour y aller… S : Ben je me renseigne, en général vous allez dans une association, ils vous parlent des autres associations, y a des dépliants, je sais pas si vous connaissez au CASOUS il y a plein de dépliants… on trouve toujours ; et puis

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il y a des associations qui sont d’une région à une autre, par exemple la Protection Maternelle et Infantile, ça, ça y est partout. Moi, de là où je viens, y en a une dans chaque ville. Et… si, je me renseigne en général. Et… ou on me dit, à Port-Bretagne, aussi. Dans toutes les associations il y a moyen de savoir… Q : C’est ça qui est intéressant pour moi. Par les associations, on vous donne les relais… S : Oui, souvent Q : Parce que quand on déménage, c’est pas facile de… S : Trouver tout… Q : ..Retrouver. S : Non, non, c’est sûr. J’ai pas encore trouvé un médecin fixe… Q : Alors, là on a vu les consultations d’avant, maintenant on va essayer d’imaginer… Par exemple, demain on vous dit c’est bon, vous avez votre CMU, vous avez votre attestation, vous avez besoin de voir un médecin pour un problème de santé quelconque – hors Méthadone – qui est-ce que vous allez voir, vers qui vous allez vous tourner ? S : Alors, soit le CPO, ce que j’ai déjà fait ; mais ça c’est pour ceux qui ont pas la CMU, donc… sinon je pense que j’irais voir un généraliste. Q : Alors vous êtes allée déjà aussi au CPO ? S : Ouais. Mais ils ont pas de dentiste avant septembre. Non, je pense que j’irais voir un médecin généraliste, c’est le premier truc qui me passe par la tête, c’est le médecin généraliste. Q : Très bien, comment vous allez faire pour y aller ? Pour trouver le médecin autour de vous ? S : Soit je passe par internet, soit je demande à quelqu'un si il a pas un médecin à me recommander… Q : Par internet, c’est les pages jaunes ? S : Ouais, je vais chercher : Médecins sur Tours. Q : Ici il y a internet ? S : Ouais, on peut demander à ce qu’il nous recherche quelque chose… Q : Ou alors vous demandez si quelqu'un connaît un médecin ? S : Voilà, après c’est selon les appréciations de chacun, en général, alors soit on se le fait recommander soit on se renseigne… Q : Et après, c’est vous qui vous déplacez… Avec ou sans rendez-vous, par exemple, est-ce que ça change quelque chose ? S : Ben, ici, je sais pas, parce que chez moi, avec ou sans rendez-vous, on attend 2h… Parce que les médecins ils sont débordés, et ils prennent rendez-vous tous les quarts d’heure… Donc ils sont hyper-débordés. Mais à choisir je préfère avec rendez-vous, parce que moi, c’est plus ça. Mais en même temps pour une urgence, sans rendez-vous, c’est pratique. Donc l’un dans l’autre… En fait, je préfère avec rendez-vous quand j’ai prévu, quand c’est pas un truc urgent ; je préfère sans rendez-vous quand c’est quelque chose d’urgent… Q : Vous avez l’impression que, quand c’est urgent, il faut pas de rendez-vous ? S : Ah, si le médecin il est plein, ouais Q : S’il vous dit, venez ce soir à… S : Ah, moi ça ne me dérange pas. Q : C’est juste le délai… S : Oui, voilà, c’est trop long…

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Q : D'accord. Après pour vous déplacer à Tours, vous vous déplacez à pied, ou… S : A pied, pas de sous pour prendre le bus, pour l’instant, j’ai pas de voiture… J’ai mon permis mais j’ai pas de voiture… (rire jaune) Sinon en bus, quand je peux, mais souvent à pied… je trouve ça plus facile de trouver à pied. Q : D'accord. (silence). Est-ce que pour vous il y a des difficultés à aller voir un médecin généraliste en cabinet ? S : …Non Q : D’après ce que vous me dites, ça se fait assez facilement. S : Ouais, et puis il y en a beaucoup, ouais. Q : Est-ce que vous avez déjà eu des refus… ou… des délais par exemple S : Heu, moi personnellement non. J’ai jamais eu de refus, le délai, ça a jamais été plus de 24h ; donc je trouve ça plus que raisonnable. Mon copain a déjà eu des refus, par contre. Parce que c’était soit pour des anxiolytique ou quoi, parce qu’il avait un traitement… et il voulait pas. Q : Il voulait pas… une fois sur place ? Ou il voulait pas prendre le rendez-vous ? S : Ah non ! Une fois sur place. Il voulait pas parce qu’il voulait ça, alors il voulait pas… Mais sinon, moi non, j’ai jamais eu de refus Q : Jamais de consultation qui s’est mal passée ? S : Avec le médecin du SATO. Et ce qui n’avait rien à voir avec la Méthadone ; mais c’était quelqu'un de très froid et qui considérait que ses patients pouvaient pas s’en sortir, quoi… Q : Du désespoir… S : Ben, je parle du SATO de T (Ville de l’Oise), celui de C (Toujours la même ville de l’Oise) il est très bien. Par exemple, je demande au docteur H (Nom de famille) pourquoi, et si mon retard de règle peut être dû au stress… Elle me dit que non, c’est forcément que je consomme. Et que cela ne peut pas être dû à la Méthadone ni au stress ; alors que j’ai demandé à d’autres médecins, ils m’ont dit que le stress, la méthadone, l’alimentation, plein de choses pouvaient jouer… Vous voyez un peu les idées préconçues ? Alors que ça fait 2 ans que je consomme plus rien du tout, alors… Q : Donc avec lui, c’était les manques de confiance… S : Elle. C’était une dame. Q : C’était le manque de confiance qu’elle avait en vous, en fait… Elle ne vous croyait pas. S : Voilà, elle ne me croyait pas. Q : Elle vous jugeait, quoi… S : Voilà, et elle serrait même pas la main à ses patients… ce que je trouvais un peu… Q : D’accord. S : Elle était très froide, très hautaine. Pourtant – parce que des fois elle recevait des coups de téléphone de ses patients à son cabinet – et elle était très agréable avec eux. Donc peut-être, je sais pas, elle nous considérait peut-être… Q : Parce qu’elle ne travaillait pas tout le temps… S : Non, elle avait son cabinet, elle, Docteur H, elle avait son cabinet. Elle était là, je crois, heu… 2 jours par semaine. Et puis pas toute la journée, hein…

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Q : A part ça ; soit avec elle, soit avec d’autres médecins ; a part le côté jugeant – parce que c’est ça un peu ce que vous décrivez – donc, vous m’avez dit que le délai, non, ça allait… Est-ce qu’il y avait d’autres choses ? Est-ce que un jour il s’est passé quelque chose, la communication est mal passée ou autre chose ? S : Euh, non. A part le Docteur B (un autre nom de famille) qui me faisait la morale pour le tabac, mais ça c’était pas pour mon mal… et puis il a été très correct… non, non, j’ai jamais eu de problème avec les médecins, moi, ça s’est toujours très bien passé… Non, vraiment, quand j’y réfléchis… Y-en-a même qui m’ont fait des consultations gratuites… Qui m’ont jamais demandé de rembourser… Donc non, j’ai pas de soucis, ça a toujours été très correct… Donc, non… Q : J’avais une question relative aux enfants… Est-ce que ça vous dérange qu’on en parle ou pas ? S : Non Q : C’est un peu compliqué parce que comme votre fils n’est pas avec vous, c’est un peu compliqué, peut-être, d’en parler pour vous… émotionnellement ? S : Non, ça va, je suis habituée… Ça fait 4 ans que je vis pas avec… donc on finit par se faire une raison… Mais allez- y, hein… Si je veux pas répondre, je répondrais pas… Q : Non, c’est juste pour savoir qui le soigne… mais comme ça fait 4 ans… S : C’est le docteur, euh, docteur C (autre nom de famille), dans un petit…, c’est un médecin de campagne. Q : Ça vous arrive de l’accompagner ? S : Ah je l’ai déjà vu, oui ; c’est un très bon médecin, il s’y prend très bien avec mon fils, mon fils il l’aime bien, donc euh… Les premières fois, il pleurait, il hurlait… mais c’est un enfant, hein… En plus il le suit depuis qu’il a 1 an et demi, alors… Ça fait 5 ans qu’il le suit, donc tout va très bien… Non, non ; même le… j’ai déjà vu plusieurs docteurs pour mon fils, parce que j’ai déménagé, et toujours ça s’est toujours très bien passé avec les enfants c’est… Je suis même tombée sur un médecin, Docteur B (autre nom de famille), qui lui expliquait ce qu’il allait lui faire avant de lui faire… Il lui expliquait que ça c’était pour regarder dans ses oreilles ; ça c’est pour regarder dans sa gorge… et ça j’ai trouvé ça super… parce que les gamins, ça les met en confiance… Q : Et puis ils savent ce qu’il va se passer, ils comprennent beaucoup… S : Non, mais les médecins, non, j’ai jamais eu de soucis avec un petit. J’ai beau réfléchir… Non. Q : Est-ce que la PMI, est-ce que votre fils a été suivi à la PMI un temps ? S : Au début, ouais, pour ses vaccins… Mais ça s’est toujours bien passé. C’était le docteur X (autre nom de famille), c’était dans l’Oise, hein, pas ici, et vraiment très bien aussi, franchement. Vraiment tous les médecins que j’ai rencontré, à chaque fois, ça se passait plutôt bien, quoi… Toujours agréables… bons médecins… je pense, hein. Parce que oui j’ai pas de compétence en médecine, donc, je peux pas juger… Non, ça s’est toujours bien passé… Q : Vous avez votre expérience de patient, donc c’est toujours important… S : Oui, voilà… Mais non, non, sauf peut être un truc à reprocher au docteur S (nom du début), c’était qu’il faisait trop rapidement ses visites… il était

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trop… Pour les enfants, non, il prenait le temps, y a pas de problème, mais pour les adultes souvent, il faisait ça à la va-vite, parce qu’il était tellement débordé… Q : Sur les consultations ? S : Ouais… Q : Trop rapidement… c’était en temps, ou en ressenti ? S : Ah, les 2, hein. Déjà il avait pas beaucoup de temps et puis il faisait le principal, quoi. Ça dépendait… mais bon. Q : Y avait un temps… Ça manquait de discussion, d’échange ? S : Ouais… Parce qu’il était tellement pressé aussi… Déjà il avait souvent 1h ou 2 de retard… donc… c’est lui dont je vous parlais, les rendez-vous 2h de retard… Mais il était tellement débordé. C’est les secrétaires qui mettent les rendez-vous… Donc lui il peut pas… Au début – je pense, parce que moi j’y allais toujours en fin de journée – je pense qu’au début de la journée il prenait un peu son temps, et puis… chemin faisant il avait du retard, il était obligé… Sinon après il a jamais fait de diagnostic à côté de la plaque, hein… Non, moi j’ai pas à me plaindre vraiment des médecins. Après ceux d’ici je les connais pas trop, donc. Q : Mon but, c’est pas les médecins de Tours ou d’ailleurs, c’est en général… S : Ouais, en général… Non, moi j’ai pas eu de mauvais ressenti avec les médecins, c’est toujours bien passé. Q : D'accord. Après j’avais un dernier petit groupe de questions sur la sécu, sur votre couverture sociale… Vous m’avez dit que vous aviez la CMU. S : Oui, CMU et CMUc (céhému cé) ; Q : Est-ce que vous savez à qui ça correspond ; et qu’est-ce que ça signifie pour vous ? S : Ben, la CMU, c’est une mutuelle qui me rembourse les médicaments, les frais de médecin ; et la CMUc, c’est ce que la CMU ou la mutuelle normale ne couvre pas. Ça couvre plus. Q : Qu’est-ce que ça vous donne comme possibilité par exemple ? S : Me faire soigner les dents, soigner les yeux, d’aller… éviter de rester malade pendant 3 semaines parce que j’ai pas une tune pour aller chez le médecin… Ça aide à plein de choses… Q : Ça vous aide à aller chez le médecin parce que vous n’avez pas à payer… S : Voilà… Et puis moi le médecin j’y vais vraiment quand je suis aux portes de la mort, donc… Q : Là vous avez votre Sécu qui va revenir, est-ce que vous savez la CMU quand est-ce qu’il va falloir la renouveler la prochaine fois ? S : Heu… 31 décembre. 2012. Q : D'accord. Est-ce que vous savez comment faire pour la renouveler ? S : Je crois qu’il faut que j’aille chercher le dossier, que je renouvelle… je sais plus trop tout ça. Q : Est-ce que vous savez à quel endroit chercher le dossier ? S : a la Sécurité Sociale. Q : D'accord. S : Ouais ; ça, les papiers, ça va… Ouais normalement c’est ça, là. Faut que je refasse ma carte vitale, aussi. Celle avec les photos, là. Je devais déjà la faire mais j’avais pas les sous pour payer les photos… Ah, y a des fois, ça tient pas à grand chose, hein… (elle rit). Non, la CMU, c’est bien, mais… je m’en sers pas beaucoup en fait… Parce que j’ai pris des rendez-vous pour les

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dentistes, mais il y avait un délai de 6 mois, d’attente. Alors, je sais pas ici… Non, la CMU, je sais à peu près comment il faut faire… Q : Parce que là vous avez consulté plusieurs fois… en même temps vous aviez des problèmes, donc c’est normal, vous êtes allé au CPO, au CASOUS etc. Et vous me dites que quand vous aurez la CMU, vous n’allez pas forcément retourner dans ces structures-là, vous allez… S : Bah, non ! C’est fait pour les gens qui n’ont ni de CMU, ni de revenus, donc… Si j’ai une CMU, j’ai pas à y aller… Faut laisser les gens qui ont besoin d’y aller… Q : C’est totalement vrai… C’est juste pour en discuter… S : Non, j’irais pas quand j’aurais les moyens, j’ai une CMU, autant aller voir un médecin… Je vais pas aller… et puis je serais obligée de mentir, dire que j’ai pas de CMU, pour avoir des soins… donc ça vaut pas le coup… je trouve… donc, non, je pense que… j’irais voir un médecin, je sais pas lequel encore, parce que il faut que je me renseigne, justement, je pense que j’irais voir un généraliste. Je préfère. Bah, si, les dentistes aussi, c’est… Je demande aux pharmacies aussi, pour les médecins – vous m’aviez demandé tout à l’heure… Q : Les pharmacies, c’est un relais aussi ? S : Ouais, aux pharmacies, on peut savoir plein, plein de choses : les médecins, PMI, CASOUS et tout ça, ils vous aident… en général… (silence) Vous avez encore des questions ? Q : Moi j’ai fini… Après la question c’est est-ce que vous, vous avez encore quelque chose à rajouter ? Quelque chose que vous avez envie de… sur les questions que j’ai posées ou sur d’autres, est-ce que, quelque chose de plus qui vous vient à l’idée ? S : Non, pas grand chose de plus, non. Non, non. Je suis bien contente qu’il y ait autant de médecins. Il y a pas assez de médecins à la campagne, par contre, je viens de la campagne, il y a pas assez de médecins, ça c’est… Et là où je viens, sur C, les médecins généralistes, y a 30 ou 50 000 habitants, même 60 000 en comptant les petites villes rattachées autour, il y a 9 médecins dont 5 qui partent à la retraite… Q : Désertification… S : Voilà ; donc les médecins sont obligés de refuser de nouveaux patients réguliers… Tellement il y a... Q : Ça vous est arrivé, déjà, avoir un refus ? S : Non, en fait parce que c’était juste pour 1 fois. Q : En fait c’est pas des refus de consultation, c’est des refus de suivi… S : Voilà, de médecin traitant, quoi, ils peuvent pas. C’est pas qu’ils veulent pas, c’est que ils sont déjà débordés, alors… Q : Ça arrive ici aussi… S : Ah ouais ? (Elle ouvre des blisters médicamenteux) Vous voyez, ça, j’ai eu ça au CPO. Q : C’est des antibios ? S : Ouais, pour mes dents… Vous voyez, la méthadone, c’est ça… Q : Merci beaucoup pour cet entretien…

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Entretien N°7 (E7) Femme, 60 ans, Française, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, RG sans complémentaire, ALD Lieu d’entretien : La Nuitée, le 02/07/2012, 12mn Particularité : couverture sociale non complète. Q : question S : Sujet Q : Alors, quel est votre âge, s'il vous plait ? S : J’ai 60 ans. Q : 60 ans, d'accord. Donc là, vous êtes actuellement ici à la Nuitée. Ça fait combien de temps ? S : Ça fait… 3 mois. Q : 3 mois, d'accord. Est-ce que vous avez une couverture sociale ? S : Ouais, tout à fait, oui. Q : Qu’est-ce que vous avez comme couverture ? S : Ben, la Sécurité Sociale. Q : Le régime général ? S : Oui. Q : Pas la CMU ? S : Non. Q : Vous avez une complémentaire aussi, à côté ? S : Par contre, j’ai pas de complémentaire, non ; parce que je peux pas la payer… donc j’en ai pas. Q : D'accord. Votre nationalité ? S : Française (elle rit doucement). Q : Vous avez des enfants ? S : J’ai 2 enfants, un de 30 ans et une de 18 ans. Q : D'accord. Ils sont grands. La dernière fois que vous avez eu un problème de santé… S : En fait moi je suis en ALD. Hein, donc… Je suis une dépressive chronique, si on peut dire entre guillemets, donc j’ai un traitement continuel. Q : Donc vous êtes prise en charge… S : … à 100%. Q : A 100% pour cette pathologie, là. S : Ouais. Q : Qui est-ce que vous avez consulté… La dernière fois que vous avez vu un médecin, c’était qui ? S : Alors moi, j’ai un médecin traitant, hein, que je vois depuis … 15 ans, donc, voilà. Donc, c’est lui qui me suit ; mais ça m’est arrivé d’aller au CASOUS, voir… Parce que Mr L (Nom de famille) était en congé, donc ça m’est arrivé d’aller consulter au CASOUS, mais alors je ne me rappelle plus de son nom, c’est une femme. Donc en fait c’est vrai que je trouve que c’est… Q : Votre médecin traitant il s’appelle… S : L. Q : D'accord. Donc c’est lui qui vous suit régulièrement ; il habite où, il est ici, à Tours ? S : Il est à Tours Nord.

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Q : Comment vous faites pour vous y rendre ? S : En bus (l’air d'évidence). Parce que moi j’ai la chance, bon non seulement d’être française, là je suis aux ASSEDIC, bon, comme j’ai 60 ans, là je vais aller jusqu’au bout de l’année avec les ASSEDIC donc j’ai une couverture sociale… Q : Ce docteur, qui est-ce qui vous l’a fait rencontrer ? Vous vous souvenez comment vous l’avez trouvé ? Qui est-ce qui vous l’a recommandé ? S : C’était une amie, heu, c’était une voisine de palier, tout simplement. Q : D'accord. Elle vous en a parlé, et vous êtes allée le voir… S : Oui, ça s’est fait par hasard… Q : Et ça a bien accroché. S : Hum (elle confirme). Q : Là c’est vous qui prenez vos rendez-vous ? S : Oui, j’appelle, j’ai mon rendez-vous. Q : Il est avec ou sans rendez-vous ? S : Heu, avec rendez-vous. Q : D'accord. Il n’y a pas de consultation sans rendez-vous… S : Non. Non, non. (silence) Q : Est-ce que pour vous c’est compliqué d’aller aux rendez-vous ?... S : Non Q : … Avec le bus… tout ça ? S : Non, non. C’est pas compliqué. Q : Est-ce que ça a un intérêt pour vous d’avoir un médecin régulier, habituel ? S : Ben, moi, l’intérêt, c’est qu’il me connaît par cœur, parce que bon, en 15 ans, on discute beaucoup, alors donc… donc, voilà, quoi… Q : C’est de pas avoir à répéter les choses, ou c’est… S : Exactement ; après, parfois, je lui dis… parfois on est obligé de changer d’antidépresseur parce que je m’habitue trop à certaines molécules ; après je suis insomniaque, donc on essaye de changer… Mais heu… par contre on a jamais réussi à me sevrer, quoi. Q : Et quand il est en vacances, vous me disiez, et que du coup il ferme, il a pas de remplaçant ? S : Heu, il, il a un collègue ; mais moi je m’arrange toujours pour le voir avant qu’il parte en vacances… Q : Mais vous m’avez dit que quelque fois apparemment… S : Oui, un week-end, heu, pas un week-end, une semaine au mois de, je crois que c’est avril, il était en vacances et… moi je voulais pas voir monsieur M (autre nom de famille), parce que je le connaissais pas trop, son…, et je suis allé au CASOUS. Q : D'accord. Et CASOUS vous ne connaissiez pas trop non plus… S : Ben… non. Q : Et vous aviez plus confiance d’aller au CASOUS que de voir son collègue, en fait… S : Oui ! Q : Vous aviez une idée négative sur le collègue ; ou c’était que le CASOUS… S : Ben, monsieur M, c'est à dire que j’ai pas, heu, avec lui j’ai pas une approche terrible… donc heu… Q : Vous étiez déjà allée ?

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S : Ouais, une fois… Et en fait, je me suis dit, autant allez voir un inconnu – ou une inconnue – et puis voilà, quoi. Q : Qu’est ce qui s’est passé avec ce médecin… pourquoi ça a pas collé ? S : Heu… je sais pas trop… Je vous dis, ça fait très très longtemps, donc heu… je sais pas… Ça avait pas accroché. Q : Au niveau relationnel, en fait… S : Ouais. (silence) Q : Vous avez trouvé qu’il était jugeant, ou distant… S : Peut-être jugeant… assez jugeant parce que quand on dit que cela fait très longtemps que l’on prend un certain traitement, un certain nb de somnifères et tout ça… ils essayent toujours de dire oui, il faudra arrêter, patati et patata, c’est… la dépression, c’est pas très bien perçu, je trouve, par certains médecins… (silence) En tous cas c’est mon avis, hein… Q : D'accord. Donc c’est pour ça que, au lieu d’avoir lui parce que vous n’en avez pas une bonne idée, vous préférez aller au CASOUS à ce moment là… S : Oui… Q : Du coup, au CASOUS, vous y êtes allée plusieurs fois ? S : Une fois, une seule fois… Q : Ça s’était bien passé ? S : Très très bien passé. Et… même elle m’a fait un rappel Polio… enfin franchement, très abordable, très agréable… Q : Et le lieu aussi, la structure ? Comment c’est organisé… parce que il n’y a pas de médecin tous les jours… Y a pas de rendez-vous etc… S : Non, mais ça m’a pas gênée… du tout. Q : Est-ce que si votre médecin faisait des consultations sans rendez-vous, ça vous intéresserait aussi ? S : Non, Pas spécialement, non, non. Q : Vous, les rendez-vous, ça vous va bien. S : Ça me va. Q : C’est pas compliqué, pour vous, d’aller… S : Non, pas du tout, non. Q : Alors imaginons que demain, vous n’êtes pas bien et vous avez besoin de voir un médecin, qui est-ce que vous allez voir ? S : Ah ben, je vais voir monsieur L. Q : Vous l’appelez ; vous tombez sur le secrétariat ? S : Non, je tombe sur le secrétariat… Alors si je ne peux pas me déplacer, il vient ici, euh… Q : Il fait des visites jusqu’ici ? S : Ouais. Q : D'accord. Et donc si vous pouvez vous déplacer, on vous donne un rendez-vous… S : Et j’y vais. Q : Et vous y allez toute seule… Et si il est pas là ; si ce jour là le secrétariat vous dit, lui il est pas là mais il y a son collègue qui est là… S : Non, non, j’y vais pas (elle sourit). J’attends qu’il revienne, ou… je me débrouille autrement. Q : Qu’est-ce que vous faites autrement, alors ? S : Ben, alors je vais au CASOUS… ou… Après ça dépend de la gravité de la chose, mais…

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Q : Imaginons, si vous avez besoin d’un avis le jour même ? … Vous allez au CASOUS et vous allez voir… S : Ouais… (silence) Q : C’est très bien. OK. Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives ; est-ce que des fois ça s’est mal passé avec un médecin généraliste… Alors vous m’avez déjà parlé du collègue de votre médecin traitant… S : Euh non, en général, j’ai pas… (silence) Q : Est-ce que, par exemple, la difficulté de relation que vous avez eue avec le collègue de votre médecin traitant, celui que vous avez vu et que vous n’avez pas forcément envie de revoir, est-ce que vous avez déjà rencontré ce même type de réaction chez d’autres médecins ? S : (silence) Q : Non, c’était un cas isolé S : (elle rit) Non, j’ai pas… Non, non et puis depuis que je sais… enfin, depuis que je suis malade, je vois toujours le même, donc heu… Q : Est-ce qu’il y a des freins à aller voir un médecin ? Est-ce que c’est compliqué, est-ce qu’il y a des choses compliquées à voir, votre docteur L. par exemple ? S : (silence) Q : Sur… le délai de rendez-vous par exemple ? S : Non, c’est très facile ; moi j’appelle la veille, je le vois le lendemain. Q : … Sur le délai d’attente en salle d’attente ? S : Non, jamais. Non. Q : D'accord. Au niveau relationnel… S : Non, non. C’est assez rare – enfin je sais pas – mais c’est vrai que j’ai aucun problème pour me faire soigner. Voilà. Q : D'accord. Bon très bien, c’est une bonne chose. Est-ce que vous connaissez vos droits en Sécurité Sociale ? Alors vous m’avez dit que vous aviez le RG, pas de complémentaire et la prise en charge 100%... C’est ça ? S : Oui Q : Qu’est ce que cela veut dire pour vous ? Est-ce que vous savez à quoi vous avez droit, à quoi vous n’avez pas droit, par exemple ? S : Ah, bah, j’ai pas droit à plein de choses, mais… heu… Q : Qu’est-ce qui est pris en charge, qu’est-ce qui n’est pas pris en charge ? (silence) Quand vous allez voir votre médecin, est-ce que vous payez ou pas, comment ça se passe ? S : Non, non, je paye pas. Il prend ma carte vitale, il la passe dans sa machine, et voilà. Q : D'accord. Parce qu’il le prend sur le 100%. (silence). Quand vous allez en pharmacie, est-ce que vous payez vos médicaments. ? S : Non. Q : Aucun ? S : Non plus… Q : Parce qu’il y a des fois des médicaments… vous savez il y a en haut de l’ordonnance et en bas de l’ordonnance… S : Oui mais c’est vraiment rare quand j’ai quelque chose à payer… Q : D'accord. C’est la part complémentaire, parce que vous avez la part RG. C’est quelque chose que vous allez faire ou pas, prendre un complémentaire ?

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S : Je sais pas, j’ai d’autres problèmes en ce moment… Q : Vous vous êtes déjà renseignée, vous avez vu une assistante sociale ? Ou quelqu'un ? S : Non Q : Parce que le 100%... (silence) Bon moi, j’ai fait à peu près mon tour, je vois que vous avez un médecin qui est très bien… S : Oui ! Oui ! C’est un très très bon médecin, donc voilà. Q : Est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter sur notre entretien… S : Non, non, je pense que je suis une privilégiée, donc non. Q : Vous pensez que vous êtes une privilégiée ? S : Bah non, pas dans l’état actuel de… enfin de… Mais euh, au niveau prise en charge, soins, ça va. Q : Oui, vous avez trouvé le médecin qu’il vous fallait… S : Tout à fait. Q : Bon c’est une bonne chose. S : Et puis si vraiment il m’arrivait malheur, et ben, je me retrouverais aux Urgences, et puis voilà… Q : Est-ce que vous savez comment appeler les Urgences, par exemple ? S : … Euh… Q : Si vous n’êtes pas bien, vous êtes dans la rue, vous faites un malaise, vous savez comment faire pour appeler les Urgences ? S : Non, pas vraiment… je… Faut passer par le 15, c’est ça ? Q : Oui, c’est ça. Le numéro tout bête… S : Justement, j’avais un doute… Q : Le 15, y a des médecins au bout du fil, et... Ben merci beaucoup pour ses questions, c’est très gentil… S : Mais… pour moi ça va, au niveau…, y a d’autres personnes, je pense, qui ont plus de problème que moi… Q : Oui, mais moi l’intérêt, c’est aussi de voir ceux pour qui ça réussit et qui ont réussi à avoir un fonctionnement… S : Mais j’ai travaillé pour, aussi, faut dire.. Q : Bien sûr… ça se fait pas comme ça, hein… S : Bah non, hein… Q : Bon, merci beaucoup S : Je vous en prie, au revoir…

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Entretien N°8 (E8) Femme, 40 ans, RD Congo, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, pas de couverture sociale, avait CMU + CMUc Lieu d’entretien : La Nuitée, le 02/07/2012, 12mn Particularité : première demande d’asile refusée, n’a plus CMU, mais en train de refaire demande, en attente de CMU ou AME. Q : question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : Je suis née en 1972, peut-être 40 ans, maintenant. Q : Peut-être… c’est ça, 40 ans… Vous habitez ici, en ce moment ? Votre hébergement, c’est la Nuitée ? S : La Nuitée, je ne sais pas, je fais contrat à 1 semaine, 1 semaine après… Q : Avant, vous habitiez où ? S : J’ai habité au Congo ; après j’ai habité à Lyon Q : Congo… Kinshasa ? S : Kinshasa, oui. Q : D'accord. Dans quel côté du Congo ? S : Au bas Congo… Q : Vous parlez le swahili alors ? S : Non, moi je parle de Ki-Congo. Q : Ah, Ki-Congo, d'accord. Ahuna sema kiswahili… S : Non, Ki-Congo. Q : Est-ce que vous avez… euh, avant… Vous venez d’arriver en France, ça fait combien de temps que vous êtes en France ? S : Ça va faire une année ; 2011, euh 2012, mois de février Q : Février 2012 S : 2011, je ne sais pas 2011 ou 2010… 2010. 2011 je suis, 2012 je suis. (elle compte sur ses doigts) Q : Vous êtes à Tours depuis que vous êtes en France ? S : Non, en foyer à Kiloze Q : Vous étiez à Toulouse ? S : Non, Kiloze, kiloze. Q : C’est quoi, Kiloze ? S : Notre préfecture à Lyon, après Bourg-en-Bresse, et après Kiloze. Q : D'accord. Est-ce que vous avez une couverture sociale, maintenant, une CMU, ou AME… S : CMU, pas encore, je souffre des pieds, ici (elle me montre ses pieds), je fais comme ça ; je ne sais pas… Je te demandais. Le problème que j’ai, cette maladie, vient comment ? Q : Je sais pas. Ce qui m’intéresse, c’est de savoir si vous pouvez aller voir un médecin… comment vous faites pour aller voir un médecin ? S : Je ne sais pas. Q : Est-ce que vous avez l’AME par exemple, vous connaissez ? l’Aide Médicale d’Etat ? S : Non. Q : Vous avez déjà vu une assistante sociale ici ou pas ?

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S : Non, assistante sociale ? Moi, je suis au communauté, heu, comité… ici, comment ça s’appelle comment ? Tu connais F? F (prénom féminin)? Q : Non, ça ne me dit rien… S : Association. Q : Normalement, quand on est en France depuis 3 mois, on a droit à l’assurance maladie, l’AME… S : Moi je suis là, à Kiloze, je suis à l’assurance de maladie. Depuis moi je suis sortie au CADA ; à partir de là, depuis mois de janvier jusqu’à présent, y a rien. Q : D'accord. Quand vous aviez l’assurance maladie, où est-ce que vous alliez pour les soins ? S : Moi je ne sais pas. Q : Avant, quand vous aviez l’assurance… S : Là-bas au Bélé… Q : C’est quoi Bélé S : Là-bas au Bélé, à Kiloze… C’est un grand hôpital, là-bas… Q : Kiloze ; je vois pas où c’est, moi… S : Kiloze, tu connais pas Kiloze ? Q : Non S : Lyon, Maribelle, le train, il passe là. Q : C’est après Lyon. S : Oui, après Lyon. Q : Et là-bas, vous aviez un médecin généraliste ? S : Oui Q : Qui est-ce que vous alliez voir, là-bas ? S : Le problème est que dans notre pays, là-bas, il n’y a pas de soins médicaux… Q : En France, non, en France ; vous m’aviez dit que vous aviez une assurance maladie… S : Je suis malade des yeux, du ventre… oui Q : Et est-ce que vous avez vu un médecin en France ? S : Oui, oui Q : Qui est-ce que vous avez vu comme médecin ? S : Il m’a dit… il m’a donné des médicaments, il m’a fait la visite. Q : C’est qui le médecin, c’était un médecin généraliste ? S : Non ; mon médecin il s’appelle P (nom de famille), je ne sais pas il est généraliste ou quoi. Q : Il habite où ? S : A Kiloze. Q : D'accord. Donc lui c’est votre médecin. Qui vous avait conseillé d’aller le voir ? S : Quand je suis malade, je pars là-bas. Quand je suis pas malade, je pars pas. Q : Qui est-ce qui vous amenait le voir, par exemple ? S : … Q : Qui vous a accompagnée ? Qui vous a conseillé ce médecin, qui vous a dit : lui il est bien ? S : Ben, personne. Q : Vous avez trouvé au hasard ? S : Non, mon assistante m’a dit : partez là bas. Elle m’a donné un papier.

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Q : Une assistante sociale ? S : Oui, mon assistante là-bas, au Kiloze, au CADA. Q : Au CADA S : Oui Q : Donc ; c’est un travailleur social du CADA qui vous a donné le nom… (elle acquiesce). Est-ce qu’il a pris le rendez-vous ? S : Il a pris le rendez-vous. Q : Il vous a donné le rendez-vous. Comment vous y êtes allée, en bus ? S : Non, à pied. Q : A pied. Il vous avait fait un plan ? S : Oui, il m’a fait ça. Q : Donc vous êtes allée voir ce médecin là. S : Oui Q : Ca s’est bien passé avec lui ? S : Ah, je suis partie là-bas comme j’ai des problèmes, il m’a dit je suis sujette… il m’a fait des ordonnances et au pharmacie, je prends les médicaments, fini. Q : D'accord. Vous êtes allée le voir plusieurs fois ? S : Pas tout a fait Q : Combien de fois ? S : J’ai parti là-bas au moins 2 fois ; 2 (elle montre 2 doigts) ? Non, 3 fois. Q : C’était facile, pour vous, d’aller le voir ? Ou compliqué ? S : Non, non, non. Pas compliqué. (silence) Q : Est-ce que c’était intéressant pour vous d’avoir un médecin qui vous suit, d’avoir toujours le même médecin ? S : Je ne sais pas, je ne connais pas les médecins, ici. Je suis malade, je ne connais pas les médecins. Q : Là vous n’avez plus d’assurance maladie. S : Non, il n’y en a pas… Q : Donc si demain vous avez besoin d’un avis, est-ce que vous savez où aller ? S : Je ne sais pas Q : Est-ce que vous savez à qui demander ? S : Je ne sais pas… Q : Ici, aux travailleurs sociaux, par exemple, vous avez déjà demandé ? S : J’ai parlé déjà, F (même prénom féminin, personne travaillant à l’association Chrétiens Migrants), elle a envoyé une lettre, là-bas, on attend la réponse… Elle est association d’accueil… Q : Est-ce que vous avez déjà eu de mauvaises expériences avec des médecins généralistes ? S : Non ; tout le temps, ma tête… Par exemple l’autre jour je suis tourmentée, chaque fois. Qu’est-ce que je dois faire ? Là-bas je suis à Kiloze, j’ai le médecin, j’ai même vu un gynécologue… J’ai parlé avec lui… Q : En France, vous avez déjà fait un frottis ? S : Non, il va venir me voir pourquoi j’ai tout le temps les yeux tourmentés, tourmentés, la tête tourmentée… Il m’a donné le papier… comment ça s’appelle, chaque mercredi, vu 2 fois, parler avec moi… Q : Un psychologue ?

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S : Oui, il m’a conseillé tout le temps, ne restez pas comme ça, comme ça… Le temps moi que je apercevoir la police, je peux pas voir la police comme ça. Maintenant, ça va. Q : Maintenant que vous êtes ici, ça va mieux. Là vous avez des médicaments ? S : Oui, Je sais pas maintenant c’est quel médicament. (elle ouvre un sac de pharmacie) Q : Qui vous a donné ça ? S : Docteur, Docteur P (nom de famille). Q : C’était quand ? S : Depuis le mois de novembre. Q : Il vous a fait une ordonnance pour 1 an ? S : Non, Novembre, décembre, janvier, février… ce médicament il a fini… Q : Là vous n’en avez plus ? S : Oui. (Conseil de voir assistante sociale, CPO et/ou CASOUS)

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Entretien N°9 (E9) Femme, 34 ans, Congo Brazza, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, CMU + CMUc Lieu d’entretien : La Nuitée, le 02/07/2012, 20mn Particularité : Diabétique et enceinte lors de l’entretien, a déménagé mais continue suivi avec ancien médecin traitant. Q : question S : Sujet Q : Quel âge avez-vous ? S : J’ai 34 ans Q : 34 ? Là, vous habitez ici… c’est en stabilisation ? Vous êtes là pour une semaine et vous renouvelez à chaque fois… S : Oui Q : Qu’est-ce que vous avez comme couverture sociale, assurance maladie ? S : Heu… le… CMU Q : Vous avez la CMU. Complète ? S : Oui, 100%. Q : D'accord. Vous êtes de quelle nationalité ? S : Congolaise, Congo Brazza. Q : Congo Brazzaville, d'accord. Est-ce que vous avez des enfants ? S : J’en ai une. Elle est au pays. Q : OK ; donc je vais vous poser des questions… après je vous laisse parler, autant de temps que vous voulez… heu… les premières questions, c’est sur les consultations avant. Depuis que vous êtes en France, depuis que vous avez la couverture maladie. Savoir un peu comment vous faites pour aller voir le médecin. Donc ma question, c’est : la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui vous avez consulté ? S : La dernière fois… Q : Oui S : La dernière fois que j’ai eu un problème de santé, oh… La première fois ou la dernière fois ? Q : La dernière fois… et après on va discuter des autres fois… S : La dernière fois… (elle réfléchit) Parce que là je suis enceinte, et moi je suis diabétique, donc souvent moi je vais à l’hôpital, souvent. Q : Vous êtes suivie à l’hôpital ? S : Oui à l’hôpital… Puis je vais aussi chez un, mon médecin ; parfois je peux aller chez un médecin traitant, mais souvent je suis à l’hôpital… Bretonneau, souvent. La dernière, enfin, c’était le… le 25 euh… juin. Q : Depuis le 25 juin vous n’avez pas vu de médecin ? S : Non Q : Le 25 juin, c’était à l’hôpital, c’est ça ? S : Oui, c’était à l’hôpital. Q : Dans quel service ? S : En gynécologie. Q : D’accord. OK. Ils vous connaissent… parce que c’était en consultation ou en hospitalisation ?

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S : Non, parce que j’avais rendez-vous, à chaque fois ils me voient en consultation. Q : ils vous donnent des rendez-vous à chaque fois… Comment vous faites pour y aller ? S : Je prends le bus Q : D'accord. Vous connaissez le bus, c’est à Bretonneau, c’est ça ? S : Oui, je prends le bus 4, il va à Bretonneau. Q : … Et vous allez au rendez-vous, c’est pas difficile d’aller tout le temps aux rendez-vous ? S : Non… Avant, c’était un peu difficile pour aller, souvent, à l’hôpital. Mais là, j’ai l’habitude. Parce que par rapport à ma santé, faut que je dois… parce que si je vais rater le rendez-vous, c’est pas bien pour moi… (silence) Q : D'accord. Et quand vous dites qu’avant c’est difficile ; qu’est-ce qui était difficile ? S : Parce que… parfois tu n’as pas de carte de bus pour aller à l’hôpital, parfois… Je quitte la Nuitée, là, pour aller au Secours Catholique, je quitte le Secours Catholique pour aller à Bretonneau… Et puis, parfois, je ne me sens pas bien… C’était difficile, avant, j’avais des difficultés avec la carte de bus… Fallait marcher à pied pour aller à l’hôpital… Q : D'accord. Vous avez un médecin qui vous suit… un médecin généraliste qui vous suit également ? S : oui. Q : C’est qui votre médecin ? S : Pas mon médecin traitant ? Q : Si, votre médecin traitant, par exemple, enfin, un médecin qui n’est pas à l’hôpital. S : Oui j’ai le médecin traitant… C’est heu… C. S. (Nom de famille puis Prénom). Il est à Joué les Tours. Q : Il est à Joué. Vous allez jusqu’à Joué les Tours pour le voir ? S : Oui si j’en ai besoin je vais jusqu’à… Si je suis malade, je ne me sens pas bien, je vais là-bas… (silence) Q : D'accord. Comment vous l’avez trouvé, ce médecin traitant ? S : Avant j’étais à Joué, chez un compatriote, c’était le médecin de ma compatriote là. Euh… Moi aussi je… je… Parce que je ne me sens pas bien, souvent malade. Parce que avant, pour prendre contact avec le médecin, c’était ma compatriote qui m’avait emmenée là bas, il m’a dit, bon tu vas aller là-bas, parce que c’est mon médecin, parce que tu n’as pas de médecin pour le moment. On va aller là-bas et je vais payer la consultation, après… Je suis allée là-bas la première fois, je… j’avais vu avec le docteur, il a tout fait pour moi, je… du moment que je suis rentrée là-bas, il est gentil, alors moi j’ai pris là mon médecin traitant. On m’a demandé à la Sécu, il faut que je… cherche un médecin, j’ai pris lui… Q : Vous avez vu d’autres médecins ? Ou… S : Non, lui. Q : D'accord. Qu’est-ce que cela a comme intérêt pour vous d’avoir un médecin régulier, un médecin traitant, quelqu'un que vous voyez régulièrement ? S : L’intérêt c’est… il connaît ma situation, il connaît que moi je suis malade, que je suis comme ça, comme ça… Au lieu que pour aller chez un autre médecin, il faut expliquer ; non, il est déjà là, il connaît tout, je suis comme

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ça, je suis comme ça, parce que il … a tous les dossiers là-bas sur son internet, il voit sur moi si je suis venue, parce que j’ai déjà habituée là-bas, donc je peux pas changer pour aller… chez un autre. Parce que pour le moment il est à Joué moi je suis ici, c’est loin. Mais je va sûrement, parce que je suis déjà habitué avec lui… Q : D'accord. Et pour aller le voir, vous faites comment ? S : J’appelle, je prends le téléphone. Q : Vous avez un téléphone ici ? S : Moi j’ai mon téléphone Q : D’accord, S : Si, pour appeler là-bas, j’ai pas de crédit, je peux aller chez… chez F (même prénom féminin que E8, personne travaillant à l’association Chrétiens Migrants), pour appeler, ou bien parfois l’hôpital qui m’appelle là-bas ; moi j’ai besoin, quand j’ai soucis, est-ce que vous pouvez appeler ou me laisser parce que la fois passée j’avais raté mon rendez-vous avec le spécialiste de diabétologie à l’hôpital, on m’avait reporté un nouveau mais comme il y avait besoin de médicaments, on m’avait appelé mon médecin ; j’étais allée là-bas pour prendre l’ordonnance… Q : Qu’est-ce qui s’était passé, pourquoi vous aviez loupé votre rendez-vous ? S : Parce que le rendez-vous c’était à 17h, le temps que moi je prends le bus, parce que pour quitter le Secours là-bas je viendrais à pied, le temps que moi je suis arrivée à l’hôpital, j’étais un peu en retard, le docteur il était déjà parti, donc j’ai raté mon rendez-vous. Donc j’avais un souci de médicaments parce que tous les jours moi je prends l’insuline, donc… il fallait qu’à l’hôpital une femme elle prend le téléphone pour prendre rendez-vous avec mon médecin. Le même jour je suis passée, et je suis allée là-bas à Joué. Q : D’accord. Donc là actuellement avec votre médecin traitant, quand vous prenez rendez-vous, après vous y allez en bus et ça pose pas de soucis. S : Oui. Je prends le bus pour aller. (silence) Q : D’accord…(silence) Au niveau du suivi gynécologique ; donc là vous m’avez dit, vous êtes enceinte, c’est ça ? Est-ce que vous avez déjà eu un frottis par exemple, un frottis vaginal, vous en avez déjà eu un ? S : Oui, parce que avant j’étais suivie sur… mon médecin, il m’envoyait chez un … gynécologue, parce que j’avais un problème de conception, je cherchais un enfant, avant, je trouvais pas. Donc il m’a envoyé vers un gynécologue, c’était aussi à Joué là-bas, c’est lui qui avait fait le frottis. Q : D’accord. Vous avez vu un gynécologue à ce moment là… Qu’est-ce qui est positif pour vous d’avoir ce médecin là ? (regard interrogateur) Qu’est-ce qui est bien dans la relation que vous avez avec ce médecin là, par exemple ? S : Mon médecin traitant ? Q : Ouais. Est-ce que par exemple il a des rendez-vous ou des consultations libres ? Il prend tout sur rendez-vous ? S : Si, par exemple, tu vas appeler … les secrétaires, moi je peux même prendre le rendez-vous avec le docteur, si y a pas de place… Bah souvent si tu appelles aujourd'hui même après demain tu vas avoir la place, mais si tu…. C’est un peu difficile, tu es très malade, on peut t’appeler pour aller même le soir… Mais j’ai déjà habitué avec le docteur là parce que il est gentil… oui… il est gentil quand je viens là, il va t’accueillir bien… il est gentil, quoi ; le docteur il est gentil. Quand tu es malade… parce que il y a l’autre docteur, là,

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quand j’entre de chez lui, j’entends d’écouter avec mes collègues là ils sont en train de partir là-bas parfois, c’est un peu compliqué, bon… moi je vois que le monsieur il est gentil. Moi je pourrais changer mon médecin, même si je vais même à Tours, à Tours Nord, je vais sûrement aller là-bas, je vais chez lui. Q : Bah c’est très bien, vous avez trouvé un médecin… avec qui ça se passe bien… Alors là pour l’instant on a vu déjà comment vous allez chez le médecin avant. Ça va sans doute ressembler, mais on va essayer de voir par exemple si demain vous avez besoin d’avoir un avis médical. Le matin, vous vous levez, vous n’êtes pas bien. Comment vous faites, qu’est-ce que vous faites à ce moment là ? … concrètement, dans les étapes ? S : Bon pour le moment, j’ai les infirmières qui viennent matin et soir. C’est une habitude. Q : Donc vous voyez avec les infirmières ? S : Là elles viennent là chaque jour, le matin et le soir, donc si je me sens pas bien… si je ne me sens pas bien, le matin, on va voir si c’est quoi… si c’est, je vois que c’est, c’est un peu grave, j’appelle une ambulance… Parce que… Y avait un jour on était… C’est là… Je me sens pas bien la nuit – c’était la nuit – on a appelé l’ambulance… J’étais allée à l’hôpital. Q : Qui avait appelé l’ambulance ? S : C’était euh… A l’accueil, là… Q : Le veilleur de nuit ? Le travailleur social ? D’accord. S : Si je ne me sens pas bien, je vois que, je me sens pas bien… Parfois il y a beaucoup de douleurs, beaucoup de malaises, si je vois que le malaise là je ne le supporte pas, je vais appeler l’ambulance ; on va aller. Si je vois je peux supporter, je vais voir, où je peux appeler mon médecin, pour aller là-bas, si je peux pas supporter j’appelle l’ambulance. Q : D'accord. OK. Alors, est-ce que vous avez déjà eu des difficultés pour voir un médecin généraliste en cabinet ? S : (silence) Un généraliste, en cabinet…? Q C'est à dire là vous avez votre médecin, vous n’avez jamais vu d’autres médecins ? S : Non, parfois mon médecin, il m’envoie faire des examens ailleurs, comme le cardiologue… ou pour les yeux, on dit quoi, l’ortho, pour les yeux, là… Q : Ophtalmo S : Voilà, mais si je l’appelle ; le rendez-vous c’est un peu loin, hein ! Même 3 mois avant, 4 mois, bah oui… Mais l’autre médecin, celui que j’appelle… Souvent si c’est un généraliste, le rendez-vous c’est trop loin. Q : Est-ce que vous avez déjà vu d’autres généralistes que votre médecin ? S : bah Oui Q : Avant ? S : Non ; c’est mon médecin qui m’avait envoyé chez un… Q : Mais ça c’est les spécialistes… mais est-ce que des médecins généralistes, comme le médecin traitant, est-ce que vous en avez vu d’autres, avant ou après ? S : Comme le généraliste… Mon médecin de diabète, il est généraliste, non ? Q : A l’hôpital ? S : Ouais, à l’hôpital. Q : Non… (silence) En ville, vous n’avez pas vu d’autre médecin généraliste ?

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S : Non… Q : Dans un moment particulier, au CASOUS ou ailleurs… S : Non, non. Q : D'accord. Est-ce que vous avez déjà eu… avec votre médecin traitant par exemple, est-ce qu’il y a des fois où ça s’est mal passé ? Vous avez eu une expérience négative ? S : … Q : Non ? S : Avec mon médecin ; ça se passe toujours bien. Q : D'accord. S : Ça se passe bien avec mon médecin. Je vais toujours là-bas. Je suis malade. Il me traite bien, il m’accueille bien. Donc ; avec lui là vraiment c’est bon. Q : D’accord, vous m’avez dit tout à l’heure que le délai, des fois, était long ? Quand vous voulez prendre un rendez-vous, des fois c’est un peu loin ? Non ? S : C’est avec le docteur de diabétologie qui est à l’hôpital… comme si j’avais raté un rendez-vous, je suis allé chez un… à l’accueil là chez… comment s’appelle… le secrétaire. Elle m’a dit il faut que je prends le rendez-vous, mais elle m’a donné le rendez-vous février 2013, février 2013 alors que moi je suis malade ? Pour le moment, par rapport à ma santé, faut que je vois le médecin souvent ; je ne peux pas supporter jusqu’à février, et puis moi je suis enceinte aussi… je suis enceinte, je suis diabétique, je suis aussi… avec le diabète il faut que souvent je prends le médicament… « Madame ça ne me regarde pas, voilà, c’est pas, c’est pas mon problème, ben, il faut attendre… » « Dans ce cas, je ne prends pas le RDV avec toi » ; je suis partie. Après je suis allée voir une infirmière, dans le même service, parce que j’ai été à l’hôpital, j’ai déjà fait 4 jours à l’hôpital, on m’avait envoyée chez le… cette femme, là, le… le chose du diabète… Puis je suis allée là-bas, j’ai expliqué que hier moi j’avais raté mon rendez-vous, donc là je suis allée chez les secrétaires pour prendre le rendez-vous, elle m’a dit oui… elle m’a donné le rendez-vous en 2013 ; moi je peux pas y aller comme ça… Elle m’a dit bon, je vais appeler le docteur lui-même. La sage-femme elle prend le téléphone et a appelé le docteur pour expliquer que… mademoiselle elle avait raté son rendez-vous, comment on va faire ; le docteur a donné le rendez-vous, il a dit moi je viens le 25… Et c’était le mois passé, là, alors vous voyez… mais la secrétaire, là, elle m’a dit que je viens en 2013, février 2013… J’étais fâchée contre lui ; moi j’ai expliqué mon problème, elle me dit ça me regarde pas, je dis moi aussi je ne prends pas de rendez-vous avec toi, je suis partie. Q : Là, vous m’avez dit qu’actuellement vous avez la CMU ? S : Oui… Q : Qu’est-ce que cela veut dire pour vous avoir la CMU S : Qu’est ce que cela veut dire ? Q : Oui… Avoir la CMU, pour vous, c’est quoi ?... A quoi ça sert ? S : Parce que je vais aller me traiter, pour prendre le soin… pour prendre le soin gratuit… Q : C’est le soin qui est gratuit, c’est ça ?

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S : Mais pour aller à l’hôpital, pour prendre le médicament, c’est gratuit… Si tu n’as pas la CMU tu n’as pas le droit pour aller à l’hôpital… Mois je vois, enfin, je ne sais pas si il y a une autre explication… Q : Non, c’est très bien… mais est-ce qu’il y a d’autres choses, par exemple ? Est-ce que la CMU, ça veut dire d’autres choses ? S : Là, je sais pas… Pour moi, moi je sais que la CMU… Si tu n’as pas la CMU, tu n’as pas le droit pour aller à l’hôpital, si tu as la CMU tu peux aller parce que là-bas tu peux… à travers la CMU, on va te soigner. Gratuit. Q : D’accord. Et quand vous allez voir votre médecin traitant, comment ça se passe ? S : Je lui donne la carte vitale, parce que moi j’ai la CMU, je donne la carte vitale et après, je prends… Il va me regarder… Si je suis malade, je vais lui expliquer, comme ça, comme ça, après il donne l’ordonnance et je vais à la pharmacie… prendre les médicaments. Avec la CMU moi je prends gratuit, si tu n’as pas la CMU tu n’as pas le droit de prendre… Q : Est-ce que vous savez quand votre CMU va s’arrêter ? S : ? Q : Vous connaissez la date limite ? S : C’est… là on m’a dit que la CMU est jusque au mois … parce que c’était expiré, j’ai renouvelé. Q : Quand vous avez renouvelé, est-ce qu’il y avait un trou entre les 2 ? Est-ce qu’il y avait un moment où vous n’aviez plus de CMU… S : Non, non… C’était automatique. Je suis allée là-bas ; parce que avant de renouveler… Tu vas renouveler après 2 mois, si tu sais que ta CMU commence à finir, avant que ça finit, avant 2 mois, avant que cela va aller jusqu’à la fin, tu peux aller pour renouveler, automatique, avant que les 2 mois ça va finir, quoi, après, on va t’envoyer un courrier, un autre courrier… Si tu attends que ça va te finir, on va couper, hein… Parce que moi je sais, je suis malade, parce que moi je suis là souvent, je manque de médicaments, je vais à la pharmacie… Q : Et la CMU, pour la faire refaire, vous savez où il faut aller ? S : Oui, à l’assurance maladie… Je suis allée là-bas à l’assurance maladie, on m’a demandé les pièces à fournir, les documents pour fournir, moi je suis là-bas pour déposer… Q : D'accord. Et donc quand les droits s’arrêtent, vous savez où c’est marqué, la fin des droits, par exemple ? S : Oui je sais, c’est marqué (elle montre l’attestation CMU). On peut te dire tu as une année… Lorsqu’on m’en a envoyé une autre, on m’a dit tu as jusqu’à… Moi je vais accoucher… Jusqu’à… (elle déplie l’attestation) Là, on m’a envoyé ça, là… Jusqu’à le jour que mois je vais aller à l’hôpital. Parce que moi je vais accoucher au mois d’octobre. Alors après peut-être on va me renouveler automatiquement, je sais pas… Q : Vous recevez un courrier ? S : Non. Toi tu regardes la date ici (elle montre l’attestation), tu sais même. La CMU là, tu sais dans quel mois… ça c’était au… septième mois 2011. Et jusqu’à 6° mois 2012. Moi je sais que la fin-là… je vais regarder… c’est jusqu’à 6° mois 2012. Mais avant le 6° mois-là, je suis allée pour renouveler moi-même. Après on m’a donné toute neuve. Pour renouveler. Après on m’a envoyé un courrier.

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Q : D'accord. Bon, ben très bien. Est-ce que ça vous a paru clair, est-ce que vous avez des choses à rajouter ? Par rapport au médecin généraliste et à l’accès aux soins ? S : Là, il faut que le médecin. Il faut bien accueillir les gens. Si tu viens là… Parfois tu peux aller chez un médecin. Tu dis, là… Il faut bien expliquer que moi je suis comme ça, je suis comme ça, je suis comme ça, là. Si tu dis, il faut expliquer, moi je ne me sens pas bien, c’est comme ça, comme ça, je vais faire même une prise de sang, parfois le médecin il peut dire non, tu donnes seulement le médicament, tu vas le voir, parfois tu prends le médicament… Ça c’est une autre personne que toi de lui expliquer parce que le médecin ça se passe pas. Moi je suis malade. Parce que il connaît que moi je suis malade, mon état, il connaît. Moi si je ne me sens pas bien, je suis là-bas. Par rapport à mon médecin, il est bien. Q : D'accord. Très bien. Bon, merci beaucoup. Merci. S : De rien.

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Entretien N°21 (E10) Homme, 31 ans, Tchadien, Foyer Albert Thomas, CMU+CMUc Lieu d’entretien : Halte de jour, 04/07/2012, 11 mn Particularité : Q : Question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : J’ai 31 ans. Q : 31 ans d’accord. Là vous habitez où en ce moment ? S : En ce moment je suis au…Albert Thomas. Q : D’accord, ça fait longtemps que vous y êtes ? S : Oui. Ça fait longtemps, ça fait six mois. Q : Six mois que vous êtes à Albert Thomas. D’accord, c’est un CHRS ou c’est non c’est un foyer d’urgence ? S : C’est un foyer je crois c’est un foyer. Q : D’accord, vous êtes demandeur d’asile ? S : Oui, demandeur d’asile. Q : Donc là vous avez la CMU c’est ce que vous me disiez ? S : Oui. Q : Quelle nationalité vous avez ? S : Je suis Tchadien. Q : Tchadien ? S : Ouais. Q : D’accord. S : Je viens de N'Ndjamena la capitale Q : A…où ça ? S : N'Ndjamena Q : N'Ndjamena, euh qu’est-ce que je voulais dire, vous avez des enfants ? S : Non. Q : Non en France non. S : En France non, même au pays non. Q : Même au pays ? S : Non. Q : D’accord, la dernière fois que vous avez eu un problème de santé en France, qui est-ce que vous avez vu ? S : En France, donc euh dès que je (… ?), je suis venu là souvent avec des maux de tête et tout ça. Q : Vous avez vu qui ? S : Avec mon Docteur vous savez ici, il habite au S (nom d’un quartier), il s’appelle B (nom de famille du médecin). Q : Docteur B (nom de famille du médecin) ? S : Hum. Q : C’est un médecin que vous avez vu plusieurs fois ? S : Oui. Q : C’est lui qui vous suit ? S : Oui c’est lui. Q : Comment vous l’avez rencontré ce médecin ?

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S : Donc dès que moi j’ai trouvé une CMU, j’ai demandé à un ami, c’est lui qui m’a donné le Docteur B (nom de famille du médecin). Q : D’accord, un ami euh… S : Lui aussi il habite au…Albert Thomas. Q : D’accord, et donc vous avez cherché un médecin ? S : Oui. Q : On vous a dit qu’il fallait voir un médecin ? S : On m’a dit ça oui. Q : Et donc votre ami il vous a amené, qui a pris le rendez-vous, comment ça s’est passé la première fois ? S : La première fois, dès que moi j’ai été là bas, je lui ai demandé des trucs comme ça et après moi j’ai pris le rendez-vous. Q : C’est vous qui avez appelé ? S : Oui. Q : Vous avez un téléphone ? S : Oui. Q : D’accord, donc on vous a donné un horaire de rendez-vous, vous avez fait comment pour y aller ? S : Donc souvent je veux lui appeler et je prends le rendez-vous et. Q : Et après vous y allez comment ? S : Donc…Tu dis quoi ? Q : Vous y allez, comment vous faites pour aller voir le médecin après, vous y allez à pied, vous prenez le bus ? S : Oui souvent à pied, comme… pas loin des haltes de jour. Q : D’accord. S : Je monte dans les (… ?) et je descends et je vais par là. Q : D’accord. S : Et je fais examen de, des (… ?). Q : Le dernier médecin que vous avez vu c’est le Docteur… S : Oui c’est toujours le B (nom de famille du médecin). Q : Est-ce que depuis que vous êtes là vous avez vu d’autres médecins ? S : Oui j’ai été au IRSA. Q : IRSA ? S : J’ai fait une demande… Q : Pour le CLAT ? … Ouais, est-ce que vous avez vu d’autres médecins ? S : Non. Q : Est-ce que vous êtes allé au CASOUS ou au CPO ? S : Euh non. Q : Non pas du tout S : Non CASOUS non. Q : D’accord. S : Je vais voir le B (nom de famille du médecin). Q : Qu’est-ce qui est bien avec ce médecin…ou pas bien, mais comment est-ce que vous trouvez, comment ça se passe avec ce médecin là ? S : Il est, en ce moment c’est bien. Q : Au début c’était difficile ? S : Oui, au début c’était difficile. Q : Qu’est-ce qui s’est passé ? S : Donc au début, dès que tu n’as même pas de CMU des trucs comme ça c’est difficile.

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Q : D’accord. S : Mais maintenant c’est bon. Q : D’accord, donc c’est surtout l’aspect financier qui était difficile ? S : Oui. Q : Au niveau du contact avec le médecin, la relation tout ça, ça se passe bien, comment ça se passe ? S : Oui ça passe bien. Q : Ouais ? S : ça passe bien. Avant je parle pas bien français un peu, comme maintenant je fais le cours et j’ai été pris je parle en français ou des trucs comme ça. Q : D’accord. Est-ce que vous avez eu des difficultés avec ce médecin ? S : Ah non. Q : Est-ce que avant ou avec lui ou avec d’autres, est-ce vous avez déjà eu des expériences négatives ? Est-ce que déjà ça s’est mal passé avec un médecin ? S : (silence) Y’a un jour que moi j’étais là-bas donc j’ai mal à mon ventre et je lui demandais je fais échographie, il m’a consulté après il m’avait donné des comprimés des trucs comme ça et, pour moi si je fais échographie c’est bien, donc souvent la nuit mon ventre ça chauffe. Q : Hum. Lui il vous a pas fait d’échographie ? S : Non il a pas fait. Q : Alors que vous vous vouliez une échographie c’est ça ? S : Echographie oui. Ça c’est très important, souvent parce que dès que moi j’ai faim aussi, mon ventre ça chauffe mais je sais pas. Q : D’accord. S : (silence) Q : D’accord. Ok. Est-ce qu’y a des choses qui sont difficiles pour prendre rendez-vous, ou pour y aller, est-ce qu’y a des choses qui rendent difficiles le soin ? S : Non c’est pas difficile, parce que moi dès que moi je l’appelais et je prends rendez-vous. Si c’est urgent, il prend rendez-vous même jour, dès que le matin moi je lui appelé, je prends rendez-vous vers 10h ou vers 11h. Q : D’accord. S : Si c’est pas urgent c’est demain. Il me prendre demain. Q : Demain matin par exemple, on imagine une situation, demain matin vous vous réveillez et vous êtes vraiment pas bien, vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment est-ce que vous faites ? (Silence) S : Donc… Q : Concrètement les étapes en fait ? S : Donc je vais l’appeler, si c’est urgent je vais aller chez lui. Q : Vous avez du crédit là sur votre téléphone ? S : Euh souvent, souvent y’a du crédit, souvent y’a pas de crédit. Q : Comment vous faites pour appeler alors ? S : Si c’est urgent, je vais à la Halte de jour. Q : Ouais. S : Et je vais l’appeler. Q : Et vous appelez de la Halte de jour c’est ça ? S : Oui.

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Q : C’est vous qui appelez toujours ou ça peut être les travailleurs sociaux ou les…? S : Oui c’est toujours c’est moi qui appelle. Q : C’est vous qui appelez. D’accord. Vous avez toujours le numéro avec vous ? S : Oui toujours son numéro. Q : Et après donc pour y aller vous y allez surtout à pied c’est ce que vous disiez ? S : Oui à pied. Comme ici c’est pas loin je prends ici je descends en bas par là et je vais jusqu’à là comme il habite au S (nom d’un quartier). Q : D’accord. Vous avez commencé à aller voir un médecin avant d’avoir la CMU c’est ça, quand vous êtes arrivé, la première fois que vous l’avez vu vous n’aviez pas encore la CMU ? S : Non, dès que moi j’ai trouvé ma CMU d’abord. Q : D’accord, y’a quelqu’un qui vous a dit d’aller voir un médecin ou c’est vous qui avez eu la… S : Non c’est un ami il m’avait dit. Q : Qui le connaît aussi ? S : Oui. Q : D’accord…Donc là vous avez la CMU, qu’est-ce que ça veut dire pour vous avoir la CMU ? S : La CMU… Q : Qu’est ce que ça signifie pour vous ? S : Comme ça veut dire quoi la CMU ? Q : A quoi ça sert ? S : C’est très important. Comme en Afrique y’en a pas, en Afrique tu payes comme nous on a même pas encore de papier mais dès qu’on est venu ici c’est bien. Q : Hum-hum, qu’est-ce qui est bien ? S : Comme on me soigne gratuit, on est ici on est tranquille, le problème de tout ça dès que l’on a laissé famille et tout ça mais à part ça c’est bien, on est tranquille, voilà. Q : D’accord, vous savez la date de fin de votre CMU, vous savez quand est-ce que ça s’arrête ? S : Donc…les jours que moi je change, une CMUc c’est…un an ou six mois je crois, je sais pas. Q : Et après vous savez comment faire pour la suite ? S : Pour la suite, ah ça oui je sais pas, comment pour renouveler, je sais pas. Q : Comment est-ce que vous avez fait la CMU, vous êtes allé voir qui ? S : La CMU, dès que moi je fais mon courrier j’ai reçu. Q : Avec la demande d’asile ? S : Oui avec la demande d’asile. Q : Et vous avez reçu automatiquement le papier ? S : Le papier. Q : Est-ce que vous avez vu une assistante sociale ou quelqu’un pour vous aider à faire le courrier ? S : Oui avant j’ai vu une assistante sociale, avant mon assistante sociale c’est R (prénom de l’AS). Q : Oui, c’était à quel endroit que vous l’avez vu ?

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S : R (prénom de l’AS), donc dès que moi je suis venu comme la (…) que moi j’ai commencé mon papier. Q : R (prénom de l’AS) elle est aux Haltes ou au CPO, elle est à quel endroit ? S : R (prénom de l’AS) c’est catholique. Q : Secours catholique ? S : Pas secours catholique mais catholique immigrant. Q : D’accord. Donc c’est avec eux que vous avez fait la demande d’asile. S : Oui. Q : C’est ça, ok. Bon, moi j’ai fini les questions que j’avais préparé, est-ce que vous avez envie de dire d’autres choses sur la médecine générale, est-ce que pour vous c’est compliqué ou pas d’aller voir un médecin ? S : Non maintenant que c’est bien, j’aime bien comment (… ?), si je suis malade… Q : Est-ce que vous allez facilement voir un médecin ou est-ce qu’il y a toujours un peu d’appréhension ou de difficulté ? S : Non c’est facile. Q : C’est facile ? S : Oui c’est facile. Q : D’accord, bon ben très bien, ben merci beaucoup. S : Ok merci à vous. Q : C’est très gentil. S : Ok merci au revoir.

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Entretien N°11 (E11) Femme, 18 ans, Française, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, CMU + CMUc Lieu d’entretien : La Nuitée, le 03/07/2012, 15mn Particularité : 18 ans, Hébergement 115, consultations fréquentes en médecine générale Q : question S : Sujet Q : Quel âge avez-vous ? S : Moi, j’ai 18. Q : D'accord. Là vous êtes en 115 ici ? S : Ben, pour le moment, oui. Enfin, c’est prévu pour 4 nuits. Après je sais pas… Q : Vous avec une couverture médicale ? S : Oui. Q : Qu’est-ce que vous avez ? S : La CMU. Q : Avec le complémentaire ? S : Oui, je suis sous celle de ma mère, en fait. Q : D’accord. Votre nationalité ? S : Française. Q : Vous avez des enfants ? S : (elle rit) Non, du tout. Q : Je vais vous poser quelques petites questions autour de l’accès vers les médecins. D’abord ce que vous avez fait avant. La dernière fois que vous êtes allée voir un médecin, vous vous souvenez ? S : Ben oui, c’était mardi… Q : Vous pouvez me raconter un peu… S : En fait, la veille, si vous voulez, j’avais super mal en bas du dos, donc du coup, j’ai pris… J’ai demandé à ma mère d’appeler pour moi. Et j’ai été au rendez-vous, j’ai expliqué ce que j’avais… Là il m’a trouvé un lumbago aigu… j’étais en arrêt après… Q : D'accord. Donc c’est votre maman qui a appelé… S : Oui, parce que j’avais pas le moyen d’appeler, du coup… ma mère elle qui pouvait, elle a pris rendez-vous. Q : Et après, pour y aller, vous saviez où c’était ? S : Oui, oui. Q : C’est quelqu'un que vous connaissiez ? S : Heu, non, parce que je suis pas allée voir mon médecin traitant, du coup, vu que j’étais plus près ici… J’étais place St Agne, enfin pas très loin place St Agne… Q : Vous avez eu le rendez-vous rapidement ? S : Oui Q : Vous y êtes allée à pied ? S : Oui, c’était juste à côté. Q : Vous avez un médecin que vous voyez régulièrement ? S : Oui…

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Q : C’est votre médecin traitant, vous disiez, il habite où ? S : Le cabinet, il est aux Fontaines. Q : Comment il s’appelle ? S : Docteur J (nom de famille). Q : C’est un médecin qui vous suit depuis longtemps ? S : Heu… avant que ce soit lui, c’était un autre, c’était Docteur D, mais vu que Docteur D est parti à la retraite, c’est lui qui a pris la relève. Q : Vous l’avez rencontré comment ? S : En fait, un jour quand j’étais malade, on m’a dit que c’était plus Docteur D, c’était Docteur J, et qu’il prenait la relève. Ça s’est fait comme ça. Et depuis c’est resté mon médecin traitant. Q : Qu’est-ce qui est bien pour vous dans ce lieu de soins? Il est en cabinet libéral, il est tout seul ? S : Non non, il est avec d’autres médecins. Moi à la base… Euh, je ne l’aime pas trop, ce médecin, mais… euh… vu que j’ai pas trop le choix, vu que c’est mon médecin traitant, je vais le voir lui quand j’ai besoin de… Q : Pourquoi vous ne l’aimez pas trop ? S : Ben en fait, souvent… Une fois, j’ai mon ami, sans faire exprès, il m’a tapé sur le poignet, il m’a pas fait… enfin il m’a fait mal sur le coup mais le lendemain il a quand même réussi à me trouver une entorse… alors que moi je pouvais bouger normal mon poignet. Enfin je sais pas… Ou des fois, quand j’ai vraiment un truc, il me dit « c’est viral, c’est viral… », je sais que j’ai quand même quelque chose, il me dit que c’est viral… Donc… Q : Est-ce qu’il y a d’autres choses qui se sont mal passées, avec lui ou avec d’autres médecins ? S : Non, après, le reste, ça va. Il n'y a pas à se plaindre, c’est juste que… la plupart du temps… enfin la plupart des médecins, c’est tout le temps viral (elle hausse le ton) ; on a beau avoir une angine ou quelque chose comme ça, ils arrivent à trouver que c’est viral… Q : Pour vous, viral, ça veut dire qu’il y a rien… S : Ouais… Ben mardi, quand j’y étais aussi – enfin pas voir mon médecin traitant mais un autre – j’avais … quand je suis arrivée dans le cabinet j’avais une grosse pointe au cœur, et il m’a dit que j’avais rien du tout ; alors que j’avais super mal… et je suis ressortie j’avais encore super mal. Des fois ça m’arrive encore… Il me dit qu’il y a rien. Enfin moi je veux pas aller faire des analyses plus profondes ; mais si ça continue comme ça, c’est pas lui que je vais aller voir, mais j’vais en voir un autre. Peut-être mon médecin traitant, je sais pas. Q : Pourquoi vous n’êtes pas allé voir votre médecin traitant la dernière fois ? S : Ben en fait parce que je devais aller voir ma mère ce jour-là, parce qu’on avait des trucs de prévu, et du coup, c’était plus près, vu qu’elle est juste dans les chambres d’en dessous (Foyer Dolbeau). Ben elle m’a dit, vu que normalement elle le connaissait parce que c’était son médecin traitant à elle, sauf que, ben j’ai pas eu son médecin traitant car il ne prend pas les nouveaux patients, donc du coup c’était un de ses collègues… Vu que c’était plus près pour moi, j’y étais juste après. Q : Votre médecin traitant, Votre médecin habituel, il prend avec ou sans rendez-vous ? S : Avec rendez-vous.

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Q : Ça vous va ? S : Ben, euh… des fois oui comme des fois non… Je sais que … enfin si j’avais été mardi voir mon médecin traitant, il aurait pas eu de place, donc il aurait fallu que j’attende le lendemain, donc enfin j’ai préféré aller au plus vite parce que le mal de dos que j’avais, je l’avais déjà eu et il s’avère que j’ai du aller en urgence à Trousseau, donc… Du coup j’ai préféré prendre comme médecin… parce que j’avais appelé… J’ai demandé d’abord à ma mère d’appeler mon médecin traitant, sauf qu’il avait pas de place, donc du coup, vu comment j’avais super mal limite à en pleurer, j’ai dit à ma mère de téléphoner là où elle a l’habitude d’aller… et c’est là qu’il y avait la place le plus rapide. Même si c’était super tard, moi c’était plus rapide. Q : Donc chez votre médecin traitant, le problème c’est que les délais sont un peu long, quoi. S : Ouais, voilà. Donc quand j’ai super mal comme ça… Je sais que je ne peux pas rester comme ça parce que sinon, moi déjà je pète un câble (elle sourit) et après le lendemain c’est encore pire, j’ai super mal, limite je peux pas bouger. Déjà le jour même j’avais du mal à bouger, j’étais limite bloquée du dos, donc il fallait absolument que je voie un médecin. On m’a même conseillé ; j’ai des amis qui m’ont conseillée d’aller directement à Trousseau pour voir… mais si j’ai pas la même chose, ça sert à rien, si ils me voient juste parce que j’ai un lumbago, ils vont me dire pourquoi vous n’êtes pas allé voir le médecin ? Donc de coup… Après ça c’est pas passé, alors du coup… Q : D'accord. Vous avez déjà vu un gynéco, vous avez déjà fait un frottis ? S : Non, rien que quand on me dit comment ça se passe, j’ai pas envie d’y aller. Je devais voir un gynéco mais… Q : On vous avait donné un courrier ? S : Non, même pas, on m’a dit qu’il faudrait y aller, vu ton âge, tu devrais consulter un gynécologue, mais euh… pour moi c’est pas pressant en fait ; après je sais pas si… ça le devrait… mais pour moi c’est pas pressant d’aller voir un gynécologue, dans l’immédiat… Q : Il faut voir ça avec votre médecin. S : Mon médecin ne m’a jamais conseillé de voir un gynécologue. Q : Vous lui poserez la question… Est-ce que ça a un intérêt pour vous d’avoir un médecin habituel ? Un médecin traitant ou un médecin que vous voyez régulièrement ? S : Ben oui, parce que quand on y est habitué, c’est vrai que c’est plus pratique… Q : Qu’est ce qui est pratique ? S : Ben… sur des choses qu’on a déjà eu, on peut… ou qu’on a même pas eu… enfin je sais c’est mon médecin traitant, donc je peux lui en parler ; j’aurais pas de mal à lui en parler comme je pourrais en parler à un autre médecin. Sachant que… ben je suis très réservée, donc euh… Pour moi c’est plus pratique d’avoir un médecin traitant que je peux voir plus souvent, que d’aller voir un autre médecin. Q : D'accord. Donc le fait que vous le connaissiez, ça vous rassure, quoi. S : Heu… Oui, voilà. Q : D'accord. Est-ce qu’il y a d’autres choses importantes pour vous d’avoir un médecin régulier ? S : Euh, ben non. (silence). Déjà ça c’est pas mal. Donc après non… Q : Ok, très bien.

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Donc là on a vu comment vous faisiez avant, donc là – enfin ça va rebondir un peu – mais par exemple demain matin vous n’êtes pas bien, vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment vous allez faire ? S : Ben je vais appeler le médecin pour avoir un rendez-vous le plus tôt possible… Q : C’est vous qui appelez ? S : Ben si je peux, oui Q : Si vous pouvez… si vous avez du crédit ? S : Oui Q : Vous avez le numéro ? S : Toujours. Q : Donc vous l’appelez… et vous tombez sur qui ? S : Ben sur la secrétaire, je lui demande si je peux avoir un rendez-vous avec le médecin traitant ? De là, c’est elle qui me dit si il a de la place ou pas… Q : Donc si il peut vous prendre, vous faites comment pour y aller ? S : Vu que mon médecin traitant il est aux Fontaines ; j’y vais en bus. Si vraiment il n’y a pas de place, qu’il faut vraiment que je voie un médecin, je vais à côté. Et j’y vais à pied parce que c’est juste à côté… Q : À côté, c’est là où vous êtes allé mardi ? S : Ouais… Q : Quelles sont les difficultés pour vous à aller voir un médecin généraliste en cabinet ? Est-ce qu’il y a des blocages, des difficultés ? S : Non… non parce que je suis tout le temps la première à me plaindre quand j’ai quelque chose… et que tout le temps en train de dire, faut que j’aille voir un médecin, faut que j’aille voir… après pour telle ou telle raison. Q : D'accord. Donc pour vous ça ne vous semble pas difficile d’aller voir un médecin. S : Non, du tout. Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin généraliste ? S : Non, non. Jusque là, je n’ai pas eu de problème avec un médecin. Q : Vous m’avez dit qu’avec votre médecin traitant, des fois, vous avez l’impression qu’il ne vous prend pas au sérieux, un peu… S : Juste quand il me dit c’est viral, alors qu’au fond de moi, je sais que j’ai quand même quelque chose… Parce que, enfin, j’aurais une petite toux de rien du tout comme ça, j’irais pas au médecin… je laisserais passer ou je prendrais… du sirop… voilà. Donc quand je vais chez le médecin, c’est vraiment pour quelque chose, et quand il me dit c’est viral, là je me dit c’est pas possible, quoi. Je suis pas venue ici pour qu’il me dise, c’est viral… Q : A part ça, est-ce qu’il y a d’autres fois où ça s’est mal passé ; où il y a quelque chose qui vous a énervée… ou… S : Non… Q : Par exemple sur le temps en salle d’attente, ou le délai pour avoir un rendez-vous… S : Ben ça, après, c’est chez tous les médecins, enfin ils prennent jamais à l’heure… Ça c’est vrai que c’est pénible quand on a un autre rendez-vous, ou autre chose à faire… Mais bon, enfin chez tous les médecins, enfin chez les médecins chez qui j’allais auparavant, ça a toujours été comme ça. Après…

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Q : Est-ce qu’il y a un médecin avec qui ça s’est mal passé ? Vous y êtes allé une fois et vous vous êtes dit j’y retournerais jamais plus… S : Non, non. A part peut-être celui d’à côté (elle rit)… parce que quand je lui ai demandé du paracétamol effervescent et qu’il ma mis en comprimés… c’est que c’est pas… parce que moi et les comprimés, on est pas copains… Donc eux… Bon après, si vraiment j’ai besoin d’y aller à côté, j’irais quand même, quoi… Parce que je les ai même pas pris, du coup, mes médicaments, parce que c’était en comprimés et j’arrive pas à les avaler… Mais sinon j’ai aucun problème avec les médecins… Q : Bon… Après, c’était plutôt sur les droits de sécu… Donc vous m’avez dit que vous avez la CMU, c’est ça ? Est-ce que vous savez quand elle va se terminer, votre CMU ? S : Je sais plus… Je savais mais je sais plus du tout… Je sais qu’elle a été renouvelée en décembre 2011… ou janvier, je sais même plus… et puis je sais même plus ; je peux pas vous dire, là. Q : D'accord. Est-ce que vous savez comment faire pour la renouveler ? S : Euh, oui ; à la pharmacie. Quand je veux la mettre à jour… et puis en général quand elle est expirée, c’est ma mère qui fait les papiers, donc… J’ai mon numéro, mais je suis sur la même Sécu que ma mère, sous de régime de… je sais pas comment dire… Q : Oui, c’est ça… D’accord. Est-ce que vous savez, quand vous avez un problème de CMU, à qui vous adresser par exemple ? S : Euh… non. Jusque là, j’en ai jamais eu, donc… Juste une fois j’avais pris un rendez-vous, elle m’a dit la CMU, y en a plus, donc du coup j’ai dû annuler mon rendez-vous… C’est elle qui s’en est chargé… Q : C’est elle qui a fait le renouvellement ? S : Hum. Donc bon… Q : C’est à la CPAM… S : Oui, voilà. Q : OK, bon… ça me semble plutôt bien, vous avez l’habitude de voir le médecin et ça se passe bien… Est-ce que vous avez quelque chose à rajouter sur tout ce dont on a discuté aujourd’hui, ou autre chose ? S : Non… Non, ça m’a l’air pas mal, déjà… Ça. Non j’ai rien d’autre à rajouter. Q : Merci beaucoup.

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Entretien N°12 (E12) Femme, 65 ans, Angolaise, Foyer d’hébergement d’urgence La Nuitée, CMU + CMUc Lieu d’entretien : La Nuitée, le 03/07/2012, 15mn Particularité : Fin de journée, patiente fatiguée, lassée par mes questions… Q : question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : J’ai 65 ans. Q : Là vous habitez ici en ce moment (Nuitée) S : Oui Q : Vous m’avez dit que vous avez la CMU, c’est ça ? S : Oui Q : Vous êtes de quelle nationalité ? S : Angolaise Q : Angola, d'accord. Est-ce que vous avez des enfants ? S : Ici en France ? Oui J’étais chez ma fille pendant quatre ans… Q : D'accord. S : Alors… Pendant cinq ans… Q : Elle est grande… S : Alors ma fille elle a déménagé à Saint Pierre des Corps ; Elle a acheté une maison ; je suis restée comme ça. Là-bas, on s’entend pas bien avec les… Et puis là, il n’y a pas d’église, y a pas d’église, je suis restée comme ça. C’est pour cela que je suis ici. Q : D’accord. Alors moi je vais vous poser des questions par rapport à la médecine… La dernière fois que vous avez vu un médecin, c’était quand ? S : Au moins… J’ai mon médecin traitant, depuis 2007 ; j’ai fait tous les examens… Q : Quand est-ce que vous l’avez vu la dernière fois ? S : Mais pour le moment, je ne sais pas… Je ne sais pas. Q : C’est un médecin que vous voyez régulièrement ? S : Oui. On a fait les examens… Parce que j’ai mal à la tête… Hier j’y ai été, hier. Le médecin. Il m’a donné les médicaments. Q : Comment il s’appelle, votre médecin traitant ? S : Mon médecin traitant, c’est B (nom de famille). Q : Docteur B ? S : Oui, à Joué-Lès-Tours. Q : Quand vous avez besoin d’un rendez-vous, vous savez comment faire ? Pour l’appeler ? S : Oui… Q : comment vous l’avez choisi, ce médecin ? S : Parce que moi j’étais… euh… quand je suis venue, comme ça, j’étais au CADA. Q : D’accord, et c’est au CADA qu’on vous a dit ; comment vous avez choisi ce médecin là ? Qui vous en a parlé ? S : Non, on m’a envoyé, quand j’étais au CADA… Q : C’est eux qui vous ont donné le nom ?

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S : Oui, c’est eux… Q : Ils vous ont accompagnée, ils sont venus avec vous ? S ; Oui… Q : Qui est-ce qui est venu avec vous ? S : C’était … assistante sociale. Q : D’accord ; donc l’assistante sociale est venue avec vous, chez le médecin, la première fois. S : Oui. Q : C’est ça ? S : Oui… Q : C’est elle qui vous a présenté ??? Qui a pris le rendez-vous ? Comment ça s’est passé la première fois, vous vous souvenez ? S : Il m’a donné le rendez-vous, il a marqué… Il a donné le rendez-vous… et puis… voilà. (silence). Q : D'accord. Et donc maintenant c’est votre médecin traitant, et vous le voyez régulièrement… C’est ça ? S : Oui. Q : D’accord. Qu’est-ce qui est intéressant pour vous, chez ce médecin-là ? Dans ce… Qu’est-ce qui vous intéresse chez ce médecin là ? S : (silence) Quand j’ai mal… quand je n’ai pas bien… je prends toujours les… rendez-vous. Il me soigne bien… Q : Il vous soigne bien ? S : Oui. (silence) Q : D’accord (silence). Est-ce que c’est important pour vous d’avoir un médecin habituel, un médecin traitant ? S : Si c’est bien ? Q : Est-ce que c’est bien, et pourquoi ? Pourquoi c’est bien et pourquoi c’est pas bien ? S : Je suis… je suis une personne qui des fois est malade. C’est tout pour voir le médecin. Q : Mais est-ce que c’est bien d’avoir toujours le même médecin ? Est-ce que c’est important d’avoir toujours le même médecin ? S : C’est important. Bon moi je prie. Ce n’est pas bon. Ce n’est pas bon mais si tu es malade, faut que tu pries aussi. Q : D'accord. (silence). Et donc avec ce médecin-là, ça se passe bien ? S : Pardon ? Q : Avec le médecin, ça se passe bien ? Quand vous avez le rendez-vous… la consultation. C’est un médecin qui vous plait ? Ça se passe bien ? S : Non, c’est bon. Si je suis malade, je vais. Q : Ce qui m’intéresse c’est la relation entre vous et le médecin. S : (silence) Je sais pas… Je suis venue, c’était… Il faut pas voir le médecin, seulement… (doute sur la retranscription de cette phrase) Q : D'accord. Par exemple demain, vous vous levez, demain matin, vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment vous faites ? S : D’abord je prie en Dieu (elle rit doucement). Q : D’abord vous priez… S : (silence) Q : Quel médecin vous allez voir, par exemple ? Si vous avez besoin de voir un médecin demain matin ? S : (silence) Voir mon médecin. Prendre un rendez-vous.

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Q : C’est vous qui le prenez ou qui le prend le rendez-vous ? S : Qui prend le rendez-vous ? S : Par téléphone. Q : Oui mais, c’est vous qui appelez ? Vous avez… S : Ben, j’ai les cours de français… oui je peux appeler… Q : La dernière fois que vous êtes allée le voir, qui a pris le rendez-vous ? S : Avant ? Quand j’étais au CADA, c’était par l’assistante sociale. Q : Mais ici. Ici par exemple, demain vous avez envie de voir le médecin. Qu’est-ce que vous faites pour avoir le rendez-vous ? S : Pour le moment… Q : Est-ce que vous avez un téléphone ? S : Oui. Q : Est-ce que c’est vous qui appelez ou est-ce que vous demandez à quelqu'un d’appeler ? S : Ben. Comme il y a beaucoup comme ça, comme ça, comme ça. Je n’ai pas la rajouter. Toujours appeler. Q : Est-ce que vous demandez de l’aide à quelqu'un pour appeler ? Est-ce que vous voyez ça avec le veilleur de nuit par exemple ? S : Pour demander.. ? Q : Pour demander le rendez-vous, comment est-ce que vous prenez le rendez-vous ? S : Je peux demander le numéro, le numéro de téléphone. Q : Depuis que vous êtes ici. S : Ici ? à la Nuitée ? Q : À la Nuitée ou… depuis que vous n’êtes plus au CADA, est-ce que vous avez déjà revu votre médecin ? S : Oui, Oui j’ai vu le médecin pour la tête, mais… Q : Le médecin pour la tête… S : Oui, Oui… Q : C’est quel médecin que vous avez vu pour la tête ? S : A (prénom) B (nom de famille) Q : Docteur A B ? S : Oui… Q : C’est pas le même que votre médecin traitant. S : Non, ce n’est pas le même, lui c’est pour la tête. Q : D’accord. Et le médecin traitant, vous l’avez vu quand la dernière fois ? S : Depuis… quelques jours, quelque temps… Q : Vous étiez ici, déjà ? S : Ici ? Q : Oui, vous étiez encore au CADA quand vous avez vu votre médecin traitant la dernière fois ? Vous étiez déjà à la Nuitée ou pas ? S : Non Q : Non ?? S : J’étais chez ma fille. Q : Vous étiez chez votre fille. C’est elle qui prenait le rendez-vous peut-être ? S : Oui Q : Comment ça se passait pour prendre le rendez-vous ? C’était elle, ou c’était vous ? S : On appelle

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Q : Qui est-ce qui appelait ? S : Moi aussi je peux appeler, si j’ai le numéro. Q : D'accord. Et pour avoir le numéro, donc… vous demandez pour avoir le numéro ? C’est ça ? S : Oui. Q : Et après, pour aller le voir, vous faites comment ? S : Faut que je prends le bus mais pour le moment je n’ai pas le ticket de bus. Q : Pour l’instant vous n’avez pas le ticket de bus. Si demain vous avez besoin de voir le médecin ; comment vous faites si vous n’avez pas le ticket de bus ? S : Demain ? (elle rit) Q : C’est un exemple, hein… Mais demain matin, vous avez besoin de voir un médecin, comment est-ce que vous faites ? S : (silence) Il faut que je prie à Dieu, pour ne pas avoir la maladie. Jusque là, c’est bon. Q : Est-ce que vous allez voir un autre médecin ? Vous savez comment vous faites ou pas ? S : Pour ? Q : Demain matin, si vous avez besoin de voir un médecin, et que… vous priez Dieu… mais vous attendez une heure ou deux et si vous n’êtes toujours pas bien… comment vous faites après pour voir un médecin ? A qui vous demandez ? S : Je n’ai pas le ticket de bus. Q : En général, vous n’avez pas le ticket… A qui vous demandez et comment vous faites ? Si par ex vous allez demander à Y (prénom masculin) à l’accueil, il vous donne le numéro de téléphone de votre médecin. Vous appelez à ce moment là, c’est ça ? S : Oui, j’appelle. Q : Et si il vous dit « venez à 14h », comment vous faites pour y aller par exemple ? S : (silence) Comme je n’ai pas le ticket de bus, pour le moment que je suis ici. Q : Pour demain S : Pour demain, comme je suis ici, je peux allez au CASOUS, parce que l’assistante sociale m’a dit que au CASOUS aussi on peut voir le médecin. Q : D’accord. Vous y êtes déjà allée au CASOUS ou pas ? S : Non Q : Vous savez où c’est ? S : Le médecin ? Q : Le CASOUS S : Oui, je peux, je sais Q : Donc demain si vous avez besoin et que vous n’avez pas le ticket de bus, vous allez aller au CASOUS. S : Je peux aller demander. Q : Pour voir un médecin. S : Je peux Q : Vous pouvez. D’accord. Est-ce que le médecin… Vous savez, il y en a qui prennent avec rendez-vous et d’autre sans rendez-vous, qu’est-ce que vous préférez ?

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S : Pardon ? Q : Vous savez il y a des médecins qui prennent sur rendez-vous et d’autre où il y a des consultations sans rendez-vous ? Est-ce que cela change quelque chose pour vous ? S : Il y a des médecins sans rendez-vous ? Q : Il y en a, oui. S : Je ne sais pas. Q : Vous ne savez pas, d’accord. Est-ce que pour vous c’est difficile d’aller voir un médecin généraliste ? En cabinet ? S : (silence) Je peux. Q : Est-ce que c’est difficile. Est-ce que vous trouvez que c’est difficile ou est-ce que vous trouvez que c’est facile ? S : Si j’ai le numéro de téléphone, je peux prendre le rendez-vous. Q : D'accord. Et après pour y aller… C’est plus difficile. Là vous avez la CMU, est-ce que vous savez quand elle s’arrête la CMU ? S : (silence) CMU ? J’ai prolongé, je ne sais pas. J’attends. Q : Comment vous faites pour prolonger ? S : J’étais à la Sécurité Sociale. Q : D’accord. Pour vous avoir la CMU, qu’est-ce que ça veut dire ? S : Avoir la CMU ? Q : Avoir la CMU… S : AH ! mon fils, ah ! Q : C’est ma dernière question. S : Ah ! Q : Vous êtes fatiguée. Bon, c’est gentil d’avoir répondu à mes questions. J’arrête là. Merci.

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Entretien N°13 (E13) Homme, 46 ans, Français, ADOMA, CMU + CMUc Lieu d’entretien : Halte du matin, le 04/07/2012, 12mn Particularité : comprend pas l’utilité de ses droits, recours tardif aux soins Q : question S : Sujet Q : Alors quel âge vous avez ? S : Là je vais sur mes 46. Q : 46, d’accord, donc là vous êtes plutôt à 45 aujourd’hui. S : Là j’ai 45. Q : D’accord, euh, votre hébergement, où est-ce que vous êtes en ce moment ? S : Euh, à A…Adoma. Q : C’est un foyer ? S : Non non c’est l’ancien Sonacotra. Q : Adoma ? D’accord c’est un foyer ? Non c’est un truc de travailleurs ? S : C’est des trucs pour ceux qui n’ont pas de logement, n’importe qui peut rentrer dedans. Q : D’accord, ok, vous êtes là depuis longtemps ? S : Euh ça va faire presque trois ans. Q : D’accord, ok, bon, vous avez une couverture sociale ? S : Ouais Q : Qu’est-ce que vous avez ? S : J’ai la Sécu plus la CMU. Q : D’accord. S : Mais je m’en sers jamais. Q : Votre nationalité ? S : Française. Q : D’accord, est-ce que vous avez des enfants ? S : Deux. Q : Ouais et ils ont quel âge, ils sont petits ou ils sont déjà grands maintenant ? S : Non non il y’en a un qui va avoir 18 ans au mois de juillet puis l’autre elle a 11 ans je crois. Q : D’accord, ok. Donc du coup je vais vous poser une question par rapport à l’accès vers le médecin et je vous laisse parler vous me dites ce que vous voulez. S : Ah ouais. Q : Donc la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est ce que vous avez vu ? S : Ah j’ai (silence), ah si ! J’ai été voir un médecin pour…ici là parce que ici c’était rouge la poitrine Q : Ouais S : Et il paraît que j’avais des champignons alors j’ai été le voir pour ça. Q : D’accord, c’était qui ce médecin ? S : Ah ça je sais pas, je serai pas le dire, c’est pas un nom français. Q : Comment vous avez fait pour le trouver, pour aller le voir ?

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S : Ah, j’ai demandé à D (travailleuse sociale) du matin, qu’elle me cherche un médecin. Q : D’accord, et après elle vous a donné le nom ? S : Ouais c’était juste à côté de chez moi. Q : D’accord, qui est ce qui a pris rendez-vous, qui est ce qui a appelé ? S : C’est…D je crois, ou une autre personne, qui m’a pris rendez-vous. Q : Et après donc elle vous a donné une heure et un… S : Un rendez-vous oui. Q : D’accord, et c’est vous qui y êtes allé ? S : Ouais, ouais. Q : Donc vous y êtes allé seul ? S : Ouais seul. Q : Oui, comment vous y êtes allé ? S : Bah à pied, comme c’est juste à côté de chez moi là. Q : D’accord, elle vous avait fait un plan ou elle vous avait juste donné l’adresse ? S : Non, non, juste le nom de la rue. Q : D’accord. S : Voilà. Q : Ok, est ce que vous avez un médecin que vous voyez régulièrement ? S : Non. Q : Non ? Est-ce que vous avez un médecin traitant ? S : Ben c’est celui là. Q : Celui là ? S : Ouais, ouais. Q : Vous avez fait la déclaration de médecin traitant ? S : Ouais, ouais, ouais, ça y est je l’ai fait. Q : D’accord, vous l’aviez fait avant, ou vous l’avez fait la dernière fois ? S : Non, non a…après Q : D’accord, ok, vous l’avez revu en fait après ? S : Non. Q : Non ? S : Non, en principe je me soigne tout seul. Q : D’accord. S : Je prends des Nuroflens. Q : Du Nurofen ? S : Ouais, c’est efficace, c’est soit je prends ça, soit je me prends une cuite et puis le lendemain ça va mieux. (Rires) Q : D’accord, est-ce que vous avez…est-ce que vous trouvez que c’est intéressant d’avoir toujours le même médecin qui vous suit ? S : Ouais, ouais comme ça au moins il nous connaît, il sait comment on est, voilà. Q : Ouais, d’accord, mais là vous m’avez dit que le médecin, c’était un nouveau médecin que vous avez vu ? S : Ouais parce que je viens de de l’Isère. Q : D’accord, et vous êtes arrivé ici il y a combien de temps ? S : Y a quatre ans. Q : D’accord et donc en quatre ans, vous avez vu une seule fois le médecin ?

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S : Ouais, non ça fait et puis euh 10 ans que j’ai pas vu de médecins. Q : D’accord, quand vous êtes malade etc. vous préférez attendre un peu et… S : Ouais et puis je m’achète une boîte de Nuroflen et j’en prends. Q : D’accord. S : J’en prends au moins, minimum c’est quatre. Q : D’accord. S : Et puis c’est des 400. (Silence) Q : Bon, qu’est-ce qui était positif chez vous dans le médecin que vous avez vu ou dans le lieu ou dans…? S : Bof, rien, c’est simplement j’avais pas le choix parce que ça me gênait trop, je me grattais tous les jours du matin au soir. Q : Vous aviez pas le choix parce qu’il fallait y aller maintenant quoi ? S : Ouais et puis c’est pas le Nuroflen qui allait me soigner ça. Q : D’accord. S : Quand c’est comme ça, là je vais voir un médecin mais sinon j’y vais jamais. Q : D’accord, vos enfants, parce que vous dites que vous avez des enfants qui sont petits enfin 11 et 18 ans. S : Ouais. Q : Euh, ils sont où eux, ils sont en Isère ? S : Ah non, ils sont avec leur mère à Tours. Q : A Tours ? S : Ouais. Q : D’accord, et ils vont voir quel médecin eux ? S : Ah ça j’en sais rien moi, ça fait…deux ans que je les ai pas vus. Q : D’accord, ok. S : Et puis ben ça me dérange pas. Q : Bon, imaginons demain matin, vous vous levez, vous êtes pas bien, vous avez besoin de voir un médecin, comment est-ce que vous allez faire ? S : Euh (silence), j’en sais rien, je viens ici pour appeler. Q : Vous venez ici. S : Ouais, pour appeler. Q : C’est vous qui appelez ? S : Euh non je préfère demander à quelqu’un, qu’il prenne le rendez-vous à ma place. Q : D’accord, et vous vous rappelez plus du nom du médecin ? S : Ah non (rire ironique). Q : Non ? S : Non c’est rue X (nom de rue). Q : Donc vous essayez de voir avec le numéro de rue pour retrouver le nom du médecin ? S : Voilà. Q : Vous allez voir celui là ou vous allez en voir un autre ? S : Ah non, c’est mieux de voir celui-là. Q : D’accord, vous l’avez déjà vu donc vous dites…? S : Ouais. Q : D’accord (silence), ok, bon et après pour vous accompagner, c’est loin d’ici là par exemple ?

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S : Euh non non c’est dans le quartier Y (nom de quartier). Q : D’accord, donc vous savez y aller d’ici à pied ? S : Ah ouais ouais, c’est juste à côté de ma rue. Q : D’accord. S : Y’a ma rue qui est là et le médecin il est juste dans le coin. Q : Donc ça veut dire que vous êtes chez vous, vous allez venir jusqu’ici pour prendre le rendez-vous ? S : Ouais maintenant c’est sur rendez-vous. Q : Ouais. S : Alors pour ça il faut téléphoner. Q : Et vous préférez avec rendez-vous ou sans rendez-vous ? S : Bah c’est mieux sans rendez-vous quoi, parce que les rendez-vous c’est chiant, il faut attendre un ou deux jours. Q : D’accord, et sans rendez-vous ? S : Alors moi j‘y aurai été directement à la place d’appeler. Q : D’accord, qu’est-ce qui est compliqué pour vous, est-ce qu’il y a des choses qui sont compliquées pour vous d’aller voir un médecin généraliste en ville ? S : Euh non (soupir) rien, euh simplement j’ose pas y aller. Q : Vous osez pas ? S : Non. Q : Pourquoi, qu’est ce qui vous…? S : Euh j’en sais rien, c’est pas mon truc les médecins moi, comme je me soigne tout le temps tout seul, alors. Q : Hum Hum, mais c’est intéressant que vous disiez que vous n’osez pas y aller ? Et qu’est ce qui…? S : C’est que je suis très timide. Q : D’accord. S : Et puis je suis quelqu’un qui n’ose pas aller voir un médecin comme ça. Q : D’accord, et vous avez peur de quoi, qu’est-ce qui vous…? S : Oh rien, je sais pas, je suis comme ça, c’est l’habitude de jamais aller voir le médecin puis se soigner tout seul. Q : Vous avez pas l’habitude et donc ça vous fait peur, entre guillemets ? S : Ouais j’aime pas trop les médecins moi. Q : D’accord. S : Parce qu’il suffit qu’ils trouvent une mauvaise nouvelle et puis moi je préfère pas le savoir. Q : Donc c’est plutôt ce qu’il peut vous dire qui vous fait peur ou c’est la relation ? S : Non non la relation ça je m’en fous, c’est un truc qui est grave que j’aime pas entendre. (Sonnerie de téléphone) Q : Téléphone. S : Non je vais le couper, voilà. Q : Parfait, d’accord, est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin ? S : Non. Q : Dans toute votre vie avant, est-ce qu’il y a une fois où ça c’est mal passé ? S ; Non non jamais non.

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Q : Une fois ou vous vous êtes dit celui-là je retournerai pas le voir ? (Silence) S : Non non, non à chaque fois ça a été. Q : D’accord, bon donc c’était plutôt bien. S : Ouais mais avant… ça fait déjà…ben ça fait depuis que je suis majeur je vais plus voir de médecin, je me soigne tout seul. Q : D’accord donc vous dites que c’est pas difficile d’aller voir un médecin mais donc vous en voyez pas quoi ? S : Ouais, sinon pour un dentiste ça va. Q : Vous préférez les dentistes ? S : Non, même pas, ça j’ai horreur. Q : Mais par exemple s’il y avait un médecin sans rendez-vous juste à côté de chez vous ? S : Ah ben j’irai peut-être. Q : Est-ce que vous iriez plus souvent ? S : J’irai peut être souvent ouais. Q : D’accord, donc le rendez-vous pour vous c’est compliqué ? S : C’est d’appeler ; parce que moi j’aime pas prendre les rendez-vous. Q : D’accord. S : C’est pour ça à chaque fois j’ai besoin d’un rendez-vous avec quelqu’un, je leur demande s’il peut faire à ma place. Q : D’accord, pour vous c’est compliqué de prendre le rendez-vous ? S : Ouais. Q : D’accord. (Silence) Q : Est-ce que vous connaissez vos droits en Assurance Maladie ? Vous m’avez dit tout à l’heure, S : Bah, je suis à 100%. Q : Vous avez un 100% en plus ou non ? S : Ouais avec la CMU c’est un complément ça fait 100%. Q : D’accord. S : Ouais j’ai rien à payer. Q : D’accord, qu’est ce que ça veut dire pour vous avoir la CMU ? S : Euh ben que j’ai rien à payer, que pour moi c’est gratuit quoi. Q : Qu’est ce qui est gratuit ? S : Ben tout, le médecin, les comprimés, tout. Q : D’accord. S : Même pour le dentiste. Q : Même pour le dentiste ? S : Ouais j’ai été obligé de me faire un appareil y’a pas longtemps. Q : Est-ce que ça veut…est-ce que d’avoir la CMU ça a d’autres effets, d’autres avantages, d’autres inconvénients ? S : Ah ben l’avantage oui, parce que moi comme je touche le RSA et puis c’est pas énorme, n’empêche le dentiste c’est pas donné, déjà un appareil dentaire, ça coûte dans les 400 à 600 euros, foutre des sous dedans… Q : Donc c’est un intérêt financier aussi ? S : Ouais. Q : D’accord. S : Ouais même pour ceux qui cherchent du boulot tout ça, c’est bon pour eux et pour ceux qui s’en foutent de tout, là c’est pas bon.

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Q : C’est pas bon pour ceux qui se foutent de tout ? Pourquoi ? S : Ouais ouais pour ceux qui bossent pas ni rien, ils croient que l’argent tombe du ciel, là c’est non c’est pas intéressant… Q : D’accord, est-ce que vous savez quand va s’arrêter votre CMU par exemple ? S : Euh ça dure qu’un an, après c’est renouvelé. Q : Est-ce que vous savez quand c’est la prochaine fois ? S : Euh…janvier ou février non euh fin décembre je crois. Ouais Q : D’accord, est-ce que ça vous est déjà arrivé d’avoir un trou entre deux CMU ? D’oublier de la renouveler ou…? S : Oui ah oui parce que comme j’étais jamais malade je me suis dit « à quoi ça sert de l’avoir » comme je vais voir jamais un médecin, là j’ai demandé une CMU le jour que j’ai eu mal aux dents et là j’ai demandé une CMU et puis j’ai été obligé…et puis j’ai eu mal aux dents pendants trois semaines. Q : Hum hum S : Le temps d’avoir la CMU. Q : Donc la CMU c’est intéressant dans l’urgence ? S : Oui. Q : D’accord. S : Et puis là maintenant comme je vais plus voir les dentistes, c’est fini, terminé. Q : D’accord et votre CMU vous allez l’arrêter ou vous allez la renouveler ? S : Non non je vais l’arrêter. Q : Vous allez l’arrêter ? S : Ben ouais ça va me servir à rien. Q : Pourquoi est-ce que vous allez l’arrêter ? S : Ben parce que comme je vais jamais voir le médecin sauf pour un truc grave…je vais l’arrêter. Q : D’accord, ça veut dire que si vous avez un truc grave, vous n’aurez pas de couverture ? S : Ben ouais mais c’est pas grave. Q : Ca veut dire que si vous allez à l’hôpital il faudra que vous payiez tout de votre poche ? S : Non non je paye rien du tout moi, je suis imposable et ils peuvent pas prendre sur mon RSA. Q : C’est compliqué pour vous de renouveler la CMU ? S : Ah je les fais jamais les papiers, j’arrive pas à remplir les papiers. Q : Comment est-ce que vous faites par exemple quand vous devez renouveler ? S : Ben je viens les voir eux ici. Q : Vous venez ici ? S : Ouais je leur demande, soit eux soit La Barque (bar associatif), il y a quelqu’un qui m’aide là-bas aussi. Q : D’accord. S : Je leur demande de remplir le dossier. Q : D’accord, c’est eux qui vont chercher le dossier ou c’est vous ? S : Non non je vais chercher un dossier et puis après je leur emmène à eux et puis ils me le remplissent. Q : Vous savez où allez chercher le dossier ? S : Bah à la CMU, à la Sécu.

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(téléphone dans le bureau, ce qui écourte la conversation) Q : D’accord, bon ben merci, est-ce que vous avez des choses à rajouter ? S : Non rien. Q : Non ? Je vous remercie. S : De rien. Q : Merci beaucoup.

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Entretien N°14 (E14) Homme, 64 ans, Français, né en Tunisie, de parents Italiens, hébergement amical, bus de nuit, Régime spécial Caisse de Prévoyance SNCF + Mutuelle Lieu d’entretien : Halte du matin, le 04/07/2012, 25mn Particularité : bon suivi par médecin traitant mais va aussi au CASOUS, habite à la campagne Q : question S : Sujet S : J’ai eu pas mal de problèmes familiaux. Q : Ouais. S : J’ai une grande maison que j’arrive pas à vendre, alors bon ça je rentrerai pas dans les détails parce que… Q : D’accord. S : C’est parce que c’est personnel, mais enfin. Q : Vous avez quel âge là actuellement ? S : Ah 64 ans. Q : 64 ans, d’accord, vous habitez où ? S : J’habite à X (nom d’une ville) et justement j’y habite plus parce que j’ai acheté une maison là bas et elle est en vente. Q : Là… S : J’ai tout vendu mes meubles, j’ai plus rien, j’ai tout donné à ma fille. Q : Ouais. S : Parce que j’ai ma fille qui habite à B (nom d’une ville), elle a fait construire et je lui ai donné tous mes meubles, moi j’habite pas, j’attends que la maison soit vendue pour partir parce que j’ai pas l’intention de rester ici. Q : Et là en ce moment, la nuit dernière par exemple vous étiez où ? S : Ben la nuit dernière, j’ai dormi chez un copain à Tours-Nord. Q : D’accord, et là ça fait quelques jours que vous êtes là bas ou vous êtes des fois dehors… S : Non non ça fait…j’y vais de temps en temps parce que je suis obligé d’aller le voir enfin obligé c’est un collègue avec qui…j’ai travaillé avec lui. Q : Ouais. S : Et…c’est un gars il s’est fait renvoyer du travail et…il s’est mis à boire bon, faut le surveiller derrière, quoi ; mais c’est un copain de longue date, je connais toute sa famille et j’ai été à l’enterrement de son père et de sa mère y’a pas longtemps, alors je le connais ça fait des années, ça fait plus de 30 ans, alors on a travaillé ensemble et tout, et dans l’entreprise où il travaillait je l’aimais bien, j’étais à la SNCF, il s’est fait renvoyer de la SNCF et pourtant j’étais délégué syndical pour essayer de le conserver, mais toutes les conneries qu’il a fait, il est passé au tapis vert, pas moyen de le sauver. Q : Hum-hum. S : Alors il a fait que 15 ans de service, au bout de 15 ans il a presque rien, il touche…moi j’en ai 64 et lui il en a 60, il touche presque rien de sa retraite. Q : Là vous, vous habitez chez lui depuis quelques jours ? S : Oui. Q : Est-ce qu’il vous est arrivé d’habiter, là dans les jours derniers est-ce que vous êtes allé en foyer ?

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S : Ca m’est arrivé, vers le mois de février/mars, quand il y avait le camion, vous savez le… Q : Oui-oui le bus. S : Le bus, ben je suis resté un mois et demi au bus, bon après chez mon collègue, j’ai déjà dormi l’année dernière à Albert Thomas et Paul Bert (foyers). Q : D’accord. S : C’était très bien mais l’ambiance dans les foyers je suis pas tellement, je suis pas raciste hein, moi j’accepte tout le monde, d’abord je suis né dans un pays, la Tunisie, je vais pas vous le cacher et je suis d’origine italienne, je sais parler l’arabe, je comprends très bien et je suis tout le temps avec eux et je ne fais pas de politique, la politique moins je la vois, mieux je me porte, vous savez ça là-dessus, je côtoie tout le monde… Je m’entends avec tout le monde. Q : Qu’est ce que vous avez comme couverture maladie ? S : Ben moi j’ai la caisse de prévoyance à la SNCF. Q : Ouais ? S : Et j’ai la mutuelle. Q : Vous avez une mutuelle ? S : Ah oui. Q : D’accord. S : La mutuelle des cheminots. Q : D’accord, ok. S : Mais j’ai pas d’autre assurance. Q : Non mais c’est très bien. S : La mutuelle des cheminots elle couvre tout, hein, 100%. Q : Votre nationalité ? S : Moi je suis né en Tunisie mais je suis français, mes parents sont italiens, d’origine italienne, ils sont nés en Tunisie, moi je suis né à Tunis, mes parents sont nés à Sousse, c’est pas loin, je sais pas si vous connaissez la Tunisie ? Q : Un petit peu oui. S : Mon père était Sicilien, ma mère italienne. Q : D’accord. S : Et quand ils sont arrivés en Tunisie, nous on est né en Tunisie parce qu’à l’époque, moi je suis né en 48 et la Tunisie était française. Q : Ouais-ouais, donc vous avez la nationalité française. (Sonnerie de téléphone) Q : D’accord, ah. … coupure de l’enregistrement pendant la conversation téléphonique… Q : Donc on était sur la nationalité, vous avez des enfants ? S : Ouais, de mon premier mariage oui, une fille qui a … ben elle a… elle a 35 ans, elle a 3 enfants, elle habite, elle a fait construire a T (nom d’une ville), elle est assistante maternelle. (Interruption par une personne : coupure de l’enregistrement et suspension d’entretien) (Reprise de l’enregistrement) S : Il travaillait. Parce qu’on était 8 dans la famille. Q : Alors on va rentrer dans le vif du sujet.

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S : Allez-y. Q : La dernière fois que vous avez eu un problème de santé qui est-ce que vous avez consulté ? S : Euh pour un problème de santé, oui, j’ai été voir mon médecin…traitant, Mr B (nom de famille du médecin), c’est…il est…comment ça s’appelle ça…c’est pas la rue A (nom de rue) c’est euh je sais pas si vous connaissez…Place D (nom) ? Q : D’accord, S : Y’a le bureau de tabac qui fait l’angle, le PMU, ben c’est la rue qui…je sais pas si c’est la rue qui... Q : Ce médecin, vous le connaissez depuis longtemps ? S : Oui, j’ai un médecin traitant, je l’ai eu quand je travaillais à la SNCF. Q : Comment ça c’est passé la dernière fois que vous avez eu besoin de le voir ? S : Ben je suis allé le voir parce que j’avais des problèmes, c’est pas des problèmes de dormir mais le problème c’est que…de dos et j’ai été le voir, il m’a dit bon ben…et c’est souvent que je suis obligé de dormir par terre et quand je dors par terre je dors, et je mets rien du tout, qu’une couverture. Q : Comment vous avez fait pour aller le voir ? S : Ben parce que j’y vais tout le temps, je l’ai toujours gardé. Q : Mais qui est-ce qui a pris rendez-vous, est-ce…? S : Ah non, non c’est moi qui ai pris rendez-vous parce que… Q : C’est vous qui avez appelé ? S : Ouais, c’est moi qui ai appelé. Q : Appelé d’ici ou appelé de chez vous ? S : Non, non, non, non appelé de chez moi. Q : D’accord. S : J’ai appelé, j’ai dit bon ben est-ce que je pourrais avoir un rendez-vous parce qu’il est en consultation que l’après midi parce que le matin il est pris par les gamins et tout ça, j’ai demandé l’après midi, il m’a dit oui. Et j’ai des problèmes urinaires en plus donc ça a pas arrangé les choses, c’est de famille parce que mon pauvre père…alors bon comme médicaments : doliprane c’est tout ce que je prends. Q : Mais il vous a vu donc l’après midi ? S : Oui et j’ai passé une radio. Q : Comment vous avez fait pour y aller chez votre médecin ? S : Ben en téléphonant pour prendre un rendez-vous. Q : Ouais mais après c’est à côté de chez vous ? S : Non, non, j’ai pris rendez-vous c’était à 10 heures et à 10 heures y’a pas beaucoup de bus, y’en a un qui est le mardi, le jeudi et le samedi, donc j’ai donné un rendez-vous un samedi. Q : D’accord. S : Parce que le bus il part de là bas à 6h25 et j’arrive à Tours une heure après et lui c’est une ouverture vers le nord je crois. Q : D’accord, donc vous êtes venu en bus ? S : Ben sur rendez-vous de toute façon, ouais par bus. Q : Comment est-ce que vous le connaissez ce médecin ? S : Ce médecin, je l’avais comme médecin traitant à la SNCF. Q : D’accord.

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S : Et je l’ai toujours gardé, parce que quand je suis parti retraité, la SNCF m’a envoyé une feuille avec la caisse de prévoyance, ils m’ont envoyé une feuille avec quel médecin je devais prendre. Q : Hum-hum. S : Alors moi j’ai dit mon médecin traitant ça a toujours été le Dr B (nom de famille du médecin) et je l’ai pas changé alors la caisse de prévoyance m’a envoyé une feuille que j’ai signé, je leur ai envoyé à eux et j’ai envoyé le double au médecin traitant, j’ai toujours gardé mon médecin traitant. Q : Donc lui c’est… S : Même si je suis à I (nom de ville) que j’ai un problème, euh là bas à I (nom de ville) y’a pas de médecin, y’a rien, y’a plus de médecin, y’a plus rien. Q : Donc ce médecin c’est parce que c’est un médecin SNCF ? S : Non, non il fait tout lui, il fait SNCF, autre aussi, il fait autre ; parce qu’ils sont deux, ils sont deux médecins. Q : Mais quand vous m’avez dit… S : Mais lui c’est plus la SNCF. Q : Quand vous cherchiez, quand vous travailliez… S : Quand je travaillais c’est lui qui venait, tout ça il me donnait deux ou trois jours, une semaine, il avait une convention avec la caisse de prévoyance. Q : D’accord, parce que vous l’avez choisi sur une liste ? S : Ah oui je l’ai choisi, parce que la caisse de prévoyance m’a envoyé un papier comme quoi, est ce que je gardais toujours le même médecin, et moi j’ai toujours gardé mon médecin traitant. Q : D’accord. S : Ca fait plus de 30 ans. Q : Donc pour vous c’est important d’avoir toujours un médecin…? S : Oui, oui, toujours un médecin, il sait ce que j’ai, il a mon dossier, tiens d’ailleurs, y’a pas si longtemps de que ça, y’a deux ou trois mois, j’ai passé un problème urinaire là euh à l’hôpital, pas l’hôpital …l’hôpital Bretonneau pour passer une radio, y’a pas, c’est pas si grave que ça mais enfin faut faire attention, ils m’ont dit d’éviter de boire trop de café et tout ça. Q : Pourquoi c’est important pour vous d’avoir un médecin qui vous suit régulièrement ? S : Parce que c’est comme si on avait un médecin de famille, parce que à l’époque, moi je vous dis je suis né en Tunisie, mes parents avaient un médecin de famille et ça m’a toujours mis à l’oreille de garder toujours le même médecin. J’aime pas changer de médecin parce que si vous gardez toujours le même médecin, il vous connait au fur et à mesure, il sait ce que vous avez, il sait les problèmes que vous avez, bon j’ai toujours été suivi par ce médecin et d’ailleurs j’ai toujours gardé le même médecin. Q : Est-ce que ça vous est arrivé de temps en temps par exception de voir un autre médecin ? S : Oui ça m’est arrivé l’année dernière je crois, en septembre, octobre, j’ai dû aller à C (nom d’une ville hors département), j’ai été faire une prise de sang en urgence. Q : D’accord. S : Et ils m’ont rien trouvé. Q : Et pourquoi vous avez pas vu votre médecin traitant ce jour là ? S : Parce que je pouvais pas, je pouvais pas descendre à Tours. Q : Niveau géographique c’était trop loin ?

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S : Ah ouais, j’habite I (nom d’une ville), I-Tours y’a quand même, I-C (nom d’une ville hors département) j’ai 35, c’est quand même rapproché, I-Tours, j’en ai quand même 80 à peu près hein, en gros j’ai 80 km, y’a pas beaucoup de bus. Q : Et donc comment vous l’avez trouvé le médecin que vous avez vu rapidement alors ? S : Euh c’est en téléphonant…au Samu. Q : Vous avez fait le 15 ? S : Voilà, et c’est eux qui m’ont donné, ils m’ont dit « vous habitez où ? », j’ai dit j’habite I (nom d’une ville), et ils m’ont dit « qu’est ce que vous avez ? », j’ai dit j’ai des étouffements, j’arrive pas et puis comme je vous dit à I y’a pas de médecin et à P (nom d’une ville) y’a pas de médecins non plus, alors j’ai dû, ils m’ont donné cette adresse là et directement j’ai été à C (nom d’une ville hors département), ils m’ont fait faire des prises de sang, des analyses, ils ont rien trouvé. Q : D’accord. S : Mais mon médecin traitant il est à Tours, j’ai gardé celui-là, ailleurs y’en a pas alors après faut que j’aille à J (ville hors département) mais à J ça m’intéresse pas, c’est pas ma zone, J. Q : Imaginons demain matin vous vous levez et vous avez besoin de voir un médecin, comment vous faites ? S : Ben si je suis à Tours j’appelle directement… le SAMU ou le et puis…je sais pas, je vais voir mon médecin traitant si je suis à Tours, le problème se pose pas. Q : Si vous êtes avec votre ami… S : Ah ben oui je vais directement…parce qu’il se déplace aussi, je peux le faire venir directement. Q : Ouais S : Y’a pas de problème. Q : Vous avez son numéro de téléphone ? S : Ah oui j’ai tout, j’ai ses coordonnées, j’ai tout. Q : Et vous avez l’habitude de l’appeler ? S : Ah oui, la secrétaire elle me connait, elle a mon dossier et tout, c’est pour ça je vous dis j’ai toujours gardé mon médecin traitant. Q : D’accord, donc lui vous m’avez dit qu’il était sur rendez-vous ? S : Oui. Q : Est-ce que pour vous le rendez-vous c’est compliqué ou est-ce que vous préférez… S : Non, non, c’est pas compliqué parce que si c’est pas lui qui me prend, c’est son collègue. Q : Hum-hum. S : Parce qu’ils se connaissent tous les deux, ils font ça en alternance le matin, une fois l’après midi et de toute façon même quand il est pas là, c’est son collègue qui me prend et il connait mon dossier aussi, là-dessus j’ai pas à me plaindre. Q : D’accord, son collègue vous l’avez déjà vu plusieurs fois ? S : Ouais je l’ai vu deux ou trois fois, c’est un petit jeune, il est très très gentil et il en a dans la tête, il travaille bien, je crois que c’est lui qui va le remplacer après. Q : Ok.

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S : Parce que bon je le connais, belle gueule, il a plus de trente ans. Q : Est-ce que ça vous semble compliqué d’aller voir un médecin généraliste en cabinet? S : Pas spécialement puisque j’ai été en voir un la dernière fois à Bretonneau pour mes problèmes urinaires. Q : Alors pas à l’hôpital, en ville ? S : En ville, ici ? Q : Partout S : Bon chez moi de toute façon y’en a pas, faut aller ou à C (nom d’une ville hors département) ou à Tours et y’a rien autour. Q : Donc déjà l’éloignement des fois… S : Et ben oui, c’est pour ça que j’ai mis en vente la maison, pour essayer de me rapprocher d’ici mais comme j’ai pas l’intention de rester ici et j’ai l’intention de retourner chez mes parents là bas à S (nom d’une ville hors département dans le Sud de la France) parce que j’ai toute ma famille à S et j’ai bien l’intention d’acheter là bas, si je vend la maison ici, j’en donne une partie à ma fille et puis moi je pars là bas. Q : Donc, une des difficultés à aller voir un médecin c’est… S : Le déplacement, voilà. Q : Est-ce qu’y a d’autres, alors le déplacement c'est-à-dire le moyen de se déplacer. S : Si vous voulez le problème c’est d’habiter à I (nom d’une ville), à 35 km de C (nom d’une ville hors département), le problème c’est qu’y a pas de bus. Q : D’accord. S : Et pour venir à Tours, je vous dis y’a des bus deux fois par semaine. Q : Donc c’est le moyen de transport ? S : Voilà c’est le moyen de transport que j’ai d’I (nom d’une ville) à Tours. Q : Hum-hum. S : Pour aller à C, pour les 35 km, je peux prendre le vélo, j’ai un vélo, je peux le faire les 35 km et prendre le train après à C jusqu’à Tours comme je paye pas de train. Q : Hum-hum. S : J’ai déjà fait hein en vélo. Q : Est-ce qu’y a d’autres difficultés à voir un généraliste ? (Silence) S : Si il connait le dossier oui mais si il connait pas le dossier, vous êtes obligés, parce que lui il va se renseigner, à chaque fois que je vais chez un généraliste en principe il me demande quel médecin me suit alors je suis obligé de dire mon médecin traitant. Q : Hum-hum. S : En sachant que j’ai le papier du médecin traitant, il m’a suivi constamment, même au boulot, chaque fois que je me faisais arrêter c’est lui qui me faisait arrêter, donc bon il sait ce que j’ai exactement donc je préfère me confier à un médecin traitant que j’ai eu déjà depuis plusieurs années, même si je prendrais un médecin maintenant, c’est très difficile de dire, de dire…à un médecin traitant que vous l’avez depuis quelques temps qu’à un nouveau médecin, c’est pas si facile que ça. Q : Qu’est ce qui est difficile ? S : Je sais pas, le dialogue peut-être. Q : Ouais ?

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S : C’est ça. Q : Est-ce qu’il vous est déjà arrivé d’avoir des difficultés relationnelles ou des difficultés avec un médecin ? S : Non pas spécialement, non mais…moi mon médecin traitant sans lui dire ce que j’ai, il le sait déjà et si je prendrai un médecin généraliste, faut quand même lui mettre la puce à l’oreille, lui expliquer pourquoi je viens et c’est pas si facile que ça. Q : D’accord S : C’est pour ça que j’ai toujours gardé mon médecin traitant, mais pas parce que ça m’empêche d’aller voir un autre médecin, ah non, le problème ne se pose pas. Q : Est-ce que vous avez déjà eu une expérience négative avec un médecin ? S : Euh sur quoi exactement ? Q : Sur tout, c'est-à-dire est-ce que vous êtes déjà sorti de consultation en vous disant ça s’est mal passé ? S : Ah non, non pas de problèmes Q : Ou un truc qui n’allait pas ? S : Non, non, j’ai jamais eu ce problème là. Q : Jamais, ni avec lui ni avec un autre ? S : Ah non, non personne, parce que moi quand je vais voir un médecin en général, j’y vais pas pour me dire, de me plaindre ou tout ça mais c’est pour vraiment que j’ai quelque chose. Q : Bien sur. S : Parce que moi vous savez…j’ai travaillé 37 ans à la SNCF voire 40 ans et vous savez en 40 ans je me suis fait arrêter peut-être 10 fois. En 40 ans ça fait pas beaucoup. Enfin là je me suis arrêté parce que travail de nuit, on commence le matin, on commence à 22h le soir on fini à 7h le matin et après rembauche à 22h et refaire une semaine comme ça et puis après rembauche à 3h du matin pour finir à 13h, ben oui y’avait le roulement et toutes les semaines ça changeait alors les nuits, c’est à cause de ça que j’ai divorcé hein, j’ai pas vu grandir ma fille parce que j’ai tra…avant de venir à Tours, j’ai travaillé dans la Région Parisienne à la Gare St Lazare, je sais pas si vous connaissez la gare St Lazare, alors j’ai jamais vu ma fille grandir et pourtant ma fille elle est née à Paris, elle est née à Nanterre alors euh c’est à cause de ça que j’ai divorcé. Q : D’accord S : Parce qu’on pouvait pas…les horaires décalés ça fonctionnait pas, voilà (Silence) Q : D’accord, mais avec les médecins en soi… S : Non, non, non, les médecins moi j’ai pas de problèmes, moi je cache rien aux médecins, de toute façon ils le voient. Q : Oui mais je veux dire des fois ça a pu mal se passer avec un des deux. S : Oui mais non, moi non, non, non même avec n’importe quel médecin même au CASOUS, j’ai été voir un médecin… Q : Vous avez été au CASOUS ? S : Oui, une ou deux fois parce que j’avais des problèmes de dos et tout ça. Q : Qu’est ce que vous trouvez intéressant dans le lieu de soin, dans le CASOUS ?

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S : La discussion, discuter avec les personnes qui nous reçoivent, ils se mettent à l’écoute de ce que vous avez. Q : Ca c’est quelque chose que vous trouvez pas, vous trouvez pas ça en ville ? S : C'est-à-dire en ville c’est pas l’histoire de… qu’ils vous écoutent ou pas, c’est qu’ils sont pressés, ils ont…comment vous dire, c’est pas des horaires décalés si vous voulez (rires), je sais pas comment vous dire ça, on peut pas, on n’a pas le temps de dire ce qu’il faut dire. Q : D’accord. S : Tandis qu’au CASOUS j’ai eu le temps pendant trois quarts d’heures de m’expliquer sans priver l’autre. Q : Hum-hum. S : J’ai tout raconté mes problèmes, moi je cache rien vous savez et puis j’ai jamais rien caché donc ça va pas changer, ça sert à rien de cacher. Q : Et pourquoi vous êtes allé au CASOUS à ce moment là ? S : Ben parce que j’avais demandé à une assistante sociale ici, une qui vient le mercredi là une grande, elle travaille à l’hôpital, je sais plus comment elle s’appelle. Q : L (prénom d’une femme) ? S : Voilà c’est ça, c’est celle qui m’a donné l’occasion d’aller là bas, elle m’a dit si ça allait pas il fallait que j’aille la voir à Trousseau, je crois qu’elle travaille à Trousseau ou je sais pas où, et je suis allé là bas et bon ça s’est bien passé. Ils m’ont demandé « qu’est ce que vous prenez comme médicaments ? », j’ai dit « moi, mon médecin traitant, il m’a toujours donné des… Q : Et donc c’est l’assistante sociale qui vous a recommandé d’aller au CASOUS ? S : Oui, à voir comment ça s’est passé, ils m’ont fait passer une radio et tout ça… Q : Non mais au CASOUS ? S : Oui. Q : Parce que c’est vrai que au CASOUS vous avez pas fait de radio ? S : Non, ils m’ont envoyé à Bretonneau ou je sais pas où pour me faire passer une radio, pour ce que j’avais exactement, j’ai rien, la radio est bonne, euh pas de calcaire. Q : Et à ce moment là quand vous avez eu cette douleur pourquoi est-ce que vous êtes allé au CASOUS et pourquoi vous êtes pas allé voir votre médecin ? S : Parce que, l’occasion se présentait pas c’était urgent et fallait que je fasse…parce que même…parce que le Dr B (nom de famille du médecin) c’est la rue…; faut prendre rendez-vous, c’est que là l’occasion se présentait, il m’a pris tout de suite. Q : Et dans prendre le rendez-vous qu’est-ce qui est gênant ? (Silence) S : C’est que les horaires ne concordent pas. Q : D’accord. S : Voilà c’est ça le problème. Q : C’est le délai ? S : Voilà c’est le délai, ce laps de temps, parce qu’il peut vous prendre le matin ou l’après midi, et tout dépend quelle personne, quelle personne, tout

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dépend les personnes qu’ils ont. C’est ça le problème, et c’est souvent quand je téléphone à mon médecin traitant, il faut que je lui téléphone pour qu’il me donne la date. Q : Et si demain matin vous avez besoin de voir un médecin et il vous dit je peux pas vous prendre maintenant, comment vous allez faire ? S : Ben je sais pas vous, je me démerderai d’aller voir n’importe quel médecin et je fais une avance, je paye, j’m’en fous et je me fais rembourser parce que moi j’ai la Caisse de prévoyance alors je paye et je me fais rembourser. Q : N’importe quel médecin ? S : Ouais y’a pas de problème Q : Comment vous faites pour trouver un médecin ? S : Ben…euh où je suis là bas (rires) dans le patelin y’en a pas. Q : Non mais ici ? S : Ah ici, ben je…par exemple là, si y’a pas B (nom de famille du médecin traitant) ici y’en a un autre y’a son consultant y’a le jeune alors ils connaissent mon dossier y’a pas de problème, ben admettons même si ils y sont pas de toute façon y’en a un des deux. Q : Oui mais est-ce que vous savez par exemple si y’en a aucun des deux qui sont la, comment faire pour trouver un médecin ? S : Ah et ben j’irai directement à Bretonneau, y’a pas de problème ou à Trousseau, y’a pas de problème, je sais pas si vous connaissez, y’a une dame qui travaille à Trousseau ici, assez grande, ah je sais plus son nom, comment elle s’appelle, elle le sait les médicaments, elle sait ce que je prends comme médicaments, elle m’a dit un jour « si ça va pas, venez me voir ». Q : Là vous m’aviez dit que vous avez le régime prévoyance S : Oui la caisse de prévoyance, elle est à R (ville hors département) nous. Q : Qu’est ce que ça veut dire pour vous ? Qu’est ce que ça signifie pour vous d’avoir le régime SNCF ? S : Ben rien, ça signifie rien, nous c’est pris à 95 %, bon le reste les 5 % c’est à nous, bon comme j’ai la mutuelle, c’est la mutuelle qui compense les 5 %. Q : D’accord. S : J’ai la mutuelle des cheminots, ça me, ça me compense les 5 %. Q : Donc avec les deux… S : C'est-à-dire si je prends un médecin hors, par exemple si je prends un médecin à C (ville hors département), je suis obligé de payer la totalité (silence) et ce qu’il fait le médecin il me fait un papier pour me faire rembourser à la Caisse, à ma Caisse à moi. Q : D’accord. S : Mais je suis obligé d’avancer. Q : Alors que chez lui… S : Chez lui, chez B (nom du médecin traitant) non, lui il prend ses honoraires, sa feuille, il me donne un double et j’envoie le double à ma Caisse de prévoyance, moi si il me donne des médicaments ben avec ma mutuelle je prends mes médicaments et je les paye pas, bon mais j’envoie quand même la feuille à la Caisse de prévoyance, pas pour l’histoire de me faire rembourser parce que euh le médecin, lui il est obligé d’envoyer toujours un double à la caisse. Q : Donc les médicaments vous les payez pas ?

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S : Ah non, je les paye pas à condition que ce soit prescrit par un person…un médecin SNCF conventionné, si je prends un autre médecin je suis obligé de les payer. Q : Est-ce qu’il y a d’autres choses qui sont pris en charge ? S : Ben…autre chose quoi ? oui l’hospitalisation, l’ambulance, c’est un 100 %, ben les dents, là j’ai un dentier on me l’a volé, j’ai demandé, on m’a volé mon dentier avec mon sac et tout, mon carnet de chèque et tout, carte bancaire, je roulais en train de nuit de H (ville hors France) et puis je me suis assoupi à la gare, vous savez dehors en face du jardin là ou y’a les arrêts de bus, je me suis assoupi et deux manouches sont venus, ils m’ont arraché mon sac et, j’avais tous mes papiers, tout dedans, j’ai du tout refaire mes papiers ça m’a demandé un mois, y’avait mon passeport, ma carte d’identité, carte SNCF et tout, un mois et demi ça m’a demandé et ils m’ont piqué le dentier alors. Q : Et ça le dentiste… S : Ah je les paye, c'est-à-dire que les dents c’est moitié-moitié Q : D’accord S : C’est ma charge à moitié et ils se font rembourser après. Q : D’accord, là la Sécu que vous avez c’est à vie, c’est tout le temps ? S : La…la sécu nous on n’a pas de sé… Q : Enfin la prévoyance ? S : Ah oui, oui jusqu’à l’éternité, jusqu’à la fin. Q : D’accord S : Voilà Q : Ok donc pas besoin de le renouveler, pas besoin… S : Non-non, non-non, ça se renouvelle automatiquement et y’a une date jusqu’à la fin de ma vie, je peux…y’a pas de renouvellement, et puis quand, quand je travaillais tous les ans on était obligé de la faire renouveler mais là à la retraite non, c’est…y’a pas besoin c’est comme la carte SNCF, j’ai pas besoin de la renouveler, c’est pris jusqu’à la fin de ma vie. Q : D’accord, bon ben moi j’ai fait un peu le tour, est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter sur la médecine générale, sur l’accès vers la médecine générale et… S : Des fois c’est trop long. Q : Ouais, ça c’est vraiment quelque chose qui vous marque ? S : Voilà, voilà, voilà, c’est l’histoire d’être, l’urgence si vous voulez mais…surtout à Bretonneau c’est…long, faut passer d’un côté… Q : Alors Bretonneau c’est l’hôpital. S : Oui. Q : Moi je vous parle vraiment des médecins de ville. S : Ah, les médecins de ville non, moi j’ai fait C (nom d’une ville hors département), les médecins ça a été très très vite, non, moi je parle plutôt des hôpitaux, les médecins de ville non, bon je vois quand je prends un rendez-vous chez le Dr B (nom du médecin traitant) là ou le Dr G (nom du médecin collaborateur), il me donne une heure, bon j’arrive par exemple il est 10h, à 10h il me prend, j’attends même pas 5 minutes, la secrétaire la dernière fois elle m’a dit « oui 10h, il va vous prendre tout de suite » et il me prend tout de suite. Q : Et aller au rendez-vous à l’heure ? S : A l’heure…

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Q : Pour vous y’a pas de difficultés ? S : Ah oui, non-non, y’as pas de difficultés, ah non-non. Moi je, quand un médecin me dit à 10h, c’est pas 10h01 c’est pas 10h moins cinq, c’est 10h pile. Q : D’accord. S : Jamais, c’est comme au boulot, vous savez moi je suis pas plus expert qu’un autre mais moi au boulot, je préférai arriver 1h avant que 1h après, parce que la SNCF l’heure c’est l’heure, euh moi j’embauchai tout le temps à 4h du matin, je sais pas si vous connaissez R (nom d’une gare) ? Q : Un petit peu, oui, oui. S : La tenue du matériel, vous connaissez ? Q : Un peu ouais. S : Ben j’ai travaillé là et j’étais contrôleur de route à Tours, à Paris puis j’ai été muté quand je me suis marié et j’ai roulé pendant une dizaine d’année et puis après j’ai été muté à la tenue de matériel. Q : Ouais, là votre tatouage… S : Ah je l’ai fait y’a longtemps, à l’armée ça (rires). Q : D’accord, donc ça représente quoi ? S : Oh c’est… Q : Parce qu’on dirait un peu un caducée ? S : Oui, oui, oui, c’est un serpent enroulé sur un pieu mais j’ai fait ça comme ça. Q : Vous aviez envie de faire ça. S : Voilà Q : D’accord, pas de significations particulières ? S : Non, non pas de (…) j’aime pas ça Q : Non non mais comme ça ressemble aussi à un caducée… S : Voilà, oui c’est ça, c’est vrai, c’est vrai, non non mais j’ai pas voulu en faire d’autre. Q : Ok S : J’ai voulu le retirer mais je trouve aucun moyen pour l’enlever, je voulais, j’ai essayé de me piquer mais ça m’a fait une croûte mais bon ça a rien fait du tout alors. Q : Bon ben merci beaucoup. S : Ben de rien, c’set moi qui vous remercie, souvent ça me fait du bien de discuter. Q : Ouais, ouais et puis moi j’ai trouvé ça très intéressant comme expérience. S : Ben je vous remercie beaucoup…je vous remercie beaucoup.

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Entretien N°15 (E15) Homme, 39 ans, Français, Foyer Colbert, CMU et CMUc Lieu d’entretien : Halte, le 04/07/2012, 33mn Particularité : Suivi régulier avec son médecin traitant mais consulte aussi aux Urgences, CPO, CASOUS. Q : question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : 39 ans Q : D’accord, vous habitez où là actuellement ? S : Colbert Q : Au foyer Colbert ? En stable ? S : En stabilisé. Q : D’accord, depuis combien de temps vous êtes là bas ? S : De…puis 27 jours. Q : Donc ça fait un mois à peu près ? S : Ca va faire un mois dans deux jours oui. Q : D’accord, vous avez une couverture santé ? S : J’ai la couverture maladie universelle, CMU. Q : La CMU ? S : Oui la CMU et CMUC Q : La CMU et la complémentaire, d’accord. S : Et en ALD sur certains…sur certains soucis. Q : D’accord, vous me parliez tout à l’heure de l’alcool (abordé en amont de l’entretien enregistré), l’ALD c’est pour ça ou pas ? S : Non. Q : Non ? S : Non c’est pour plus soucis orthopédiques. Q : Ouais S : Et suivi psy si je suis amené à faire la démarche d’aller voir un médecin psy, si je vois que je commence à craquer. Q : D’accord et dans ce cas c’est plus facile pour vous ? S : Ben c'est-à-dire je viens de cure de désintoxication pour l’alcool et j’ai gardé des numéros de personnes qui peuvent me donner un petit coup de main si j’ai besoin. Q : D’accord. S : Je me suis fait mon réseau. Q : D’accord. Votre nationalité ? S : Bourguignonne. Q : D’accord, de quel coin ? S : Morvan. Q : D’accord. J’y ai été l’an dernier. Vous avez des enfants ? S : Non. Q : Donc là on va commencer, là c’était juste quelques questions pour essayer de comprendre un petit peu qui vous êtes. Euh, la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, où est-ce que vous êtes allé ? La toute dernière fois ?

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S : Voir le dentiste. Q : Ouais ? S : Hier. Après le dernier médecin que j’ai vu c’était 2012 dans le cadre de mon suivi de mon centre de cure. Q : D’accord, c’était un généraliste ou pas ? (Interruption par un homme…Silence). S : Le dernier rendez-vous médecin traitant c’était dans le cadre de ma sortie de sevrage alcoolique. Q : D’accord. C’est la dernière fois que vous l’avez vu ? S : Oui. Q : Comment ça s’est passé la prise de rendez-vous tout ça, comment vous avez fait ? S : J’ai été en entretien, c’était planifié…c’était planifié la semaine, quand elle voulait me voir pour faire le bilan un peu au fur et à mesure elle me convoquait. Q : Votre médecin traitant ? S : Non la médecin…la médecin du Centre de soins alcooliques. Q : D’accord. S : C’était pas mon médecin traitant, mon médecin est à J (nom d’une ville). Q : D’accord S : Mon médecin est à J (nom d’une ville) et en ce moment c’est un peu la panique pour le voir parce qu’avec les travaux du tramway, c’est un petit peu…c’est un petit peu la panique pour se transporter en bus jusqu’à J (nom d’une ville). Q : Quand est-ce que vous l’avez vu la dernière fois ? S : Ouh ça fait longtemps. Q : Ca fait longtemps ? S : Peut être 2011. Q : D’accord. S : Dans ces eaux là, je suis pas tout le temps fourré à aller voir le médecin traitant. Q : Oui bien sur. S : Je vais le voir quand j’ai besoin d’une prescription pour les 6 mois. Q : Comment vous faites pour aller le voir ? S : Transport en commun ou à pied. Q : Ouais, vous avez son numéro ? S : Oui. Q : C’est vous qui appelez ? S : Oui. Q : D’accord et après il est sur rendez-vous, il est en consultation libre ? S : Les deux, consultations sans rendez-vous et avec rendez-vous. Q : D’accord, qu’est-ce que vous préférez vous ? S : (Silence) Les deux c’est bien, les deux c’est bien, après bon faut jongler avec les horaires en fonction pour garder sa place en centre d’hébergement. Q : Hum-hum. S : Voilà, voilà. Q : Donc ça s’est un peu compliqué pour vous, il faut que vous soyez revenu pour le centre d’hébergement ? S : C’est ça, s’il me met un rendez-vous à 17h30, vu que c’est un peu éloigné, faut que je puisse être dans les cordes pour pouvoir rentrer à l’heure.

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Q : Comment vous l’avez rencontré ce médecin généraliste ? S : Il avait son cabinet juste à côté de là ou je résidais et…c’est un docteur qui a été interne à l’hôpital Necker à Paris et j’ai été me faire soigner là bas quand j’étais petit parce que j’en avais besoin. Q : D’accord et vous l’avez rencontré par hasard parce qu’il y avait sa plaque, vous avez demandé à quelqu’un, ou comment ça s’est fait ? S : Non, j’ai été au pif. Q : D’accord et du coup ça a accroché avec lui ? S : Ca…c’est un toubib qui est gentil. Q : Là vous me parliez du CASOUS parce que vous êtes allé récemment au CASOUS ? S : Non pas pour des…pas pour des…pas pour des soins médicaux on va dire. Q : D’accord. S : J’ai plus été là bas pour un rendez-vous avec l’assistante sociale mais je sais qu’y a des médecins qui peuvent consulter sur rendez-vous ou en libre. Q : Ca vous est déjà arrivé d’aller au CASOUS ? S : Juste voir le travailleur social mais pas la médecin. Q : D’accord. S : Du fait que j’ai une prescription et je sais pas si sur la prescription que j’ai, elle est autorisée à la délivrance. Q : Qui est-ce qui vous renouvelle la prescription ? S : Mon médecin traitant enfin j’espère que ça va être lui. Q : Parce que là pour le moment vous n’avez pas eu à la renouveler depuis la sortie ? S : Si j’aurai besoin de la renouveler mais comme je disais tout à l’heure c’est un peu la croix et la bannière pour se transporter d’un point à un autre de Tours à J (nom d’une ville) à cause des travaux, de la grève des contrôleurs de bus. Q : Donc pour vous ce qui est compliqué c’est le transport beaucoup ? S : Ouais sinon j’aurai déjà été le voir, il m’aurait fait le renouvellement peut-être même adapté, disons une prescription différente de celle que j’ai actuellement. Q : Est-ce que c’est intéressant pour vous d’avoir toujours le même médecin ? Un médecin qui vous suit ? S : Ah oui, oui, oui, oui, oui je suis intimement fidèle à ce médecin là et c’est un confident à qui…un médecin traitant c’est un peu un je dirai mon confident, j’ai des choses à lui dire sérieuses euh, lui je peux lui en parler, je me sens en sécurité, je parle par rapport à ce que je peux lui dire. Q : Hum-hum. S : Et il respecte mes choix et voilà…tout ce que je lui demande et il me prescrit des choses qui soient adaptés en fonction de ce que je peux avoir. Q : Qu’est-ce que vous trouvez intéressant dans ce médecin là, qu’est ce qui vous accroche ? (Silence) S : Déjà c’est qu’il me connait bien, parce que…18 ans qu’il me suit, et je reste fidèle à ce médecin là, il sait un peu d’où je viens, il sait mes problématiques de santé, il sait aussi les soucis que j’ai par rapport à la constitution d’un dossier d’AAH, il est au courant du dossier, il a essayé

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de…me soutenir dans cette démarche et il a été très surpris de la décision du refus qui a été fait quoi. Q : Hum (Silence) S : D’ailleurs il faut que je le revoie aussi pour voir si il peut pas faire accélérer le dossier et changer…changer la décision rendue par la MDPH parce que si je me retrouve malade en ce moment je peux dire merci à la MDPH qui n’a pas reconnu mon handicap de naissance depuis 39 ans, déformation congénitale bilatérale des deux hanches, dysplasie des hanches. Q : Hum-hum S : Arthrose, et ça ils veulent rien savoir. Q : Comme vous disiez, vous étiez sous patch ? S : Durogésique, analgésique, antalgique, morphinique, là j’en ai plus en ce moment, ça va j’arrive je prends un peu la douleur sur moi, la douleur la plus, la plus douloureuse en ce moment c’est les dents mais sinon ça va, ça commence a… Q : Imaginons demain… S : A phagocyter Q : Demain matin vous vous levez, vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment vous faites demain matin ? S : Ben…je demande dans la rue s’il y a pas une jolie docteur…non Q : Concrètement ? S : Concrètement, à chaud je ne sais pas, après réflexion je peux me tourner sur les services d’urgence, mais les Urgences en ce moment dans les hôpitaux délai d’attente super long, la dernière fois que j’ai été à l’hôpital c’était janvier 2012, euh…je suis allé à 14h aux Urgences, je suis passé il été pfff 19h-20h…gros délai d’attente et… Q : Si vous allez aux urgences, vous y allez par vous-même ? S : Oui. Q : Par vos propres moyens ? S : Oui à moins qu’il m’arrive un accident dans la rue, je tombe... Q : Mais si c’est un problème médical, vous avez de la fièvre par exemple, vous êtes pas bien S : Ouais. Q : Qui est-ce que vous allez voir et comment vous faites ? S : Euh ben je peux aussi choisir de me soigner moi-même. Q : Hum-hum. S : Aller dans une pharmacie, acheter une boîte d’aspirine et puis éventuellement acheter de l’homéopathie en parallèle d’un médecin traitant si je peux pas le voir, je peux aussi me soigner par moi-même, via l’homéopathie. Q : Vous attendez un petit peu et malgré tout ça continue et vous avez vraiment besoin de voir un médecin ? S : Ben là je demande à consulter. Q : Auprès de qui ? S : Médecin traitant s’il est disponible, sinon je peux toujours, je peux avoir la possibilité de me rabattre sur un autre médecin qui sera peut être pas forcément au courant de mes problématiques de santé. Q : Votre médecin traitant, donc c’est vous qui prenez rendez-vous c’est ce que vous me disiez, vous avez son numéro, vous avez un téléphone.

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S : Hum-hum Q : Vous avez du crédit dessus ? S : Oui ou sinon je demande, je demande là ou je suis si je peux pas téléphoner. Q : Par exemple dans les Haltes ? S : Oui par exemple, Haltes, foyer euh… là ou je peux trouver un endroit pour téléphoner ou je peux appeler. Q : C’est vous qui appelez où c’est les travailleurs sociaux ? S : Non c’est moi qui appelle. Q : C’est vous qui appelez. D’accord, et votre médecin traitant là vu qu’il est loin vous savez comment faire pour y aller ? S : Ah oui je connais le chemin, oui je connais l’endroit. Q : Ouais, mais là avec les travaux, vous me dites que c’est compliqué d’y aller ? S : Oui mais bon ça doit pouvoir être jouable, c’est pas…Tours/J (nom d’une ville), y’a quoi trois kilomètres, en moins d’une heure c’est jouable, je peux y aller à pied. Q : Hum. S : À moins de plus pouvoir marcher. Q : Et si le médecin il peut pas vous prendre rapidement ou s’il y a un souci, comment, est-ce que vous savez ? S : Ben soit je suis patient et j’attends la date qu’il m’a fixée au niveau du rendez-vous, soit j’ai la possibilité de prendre rendez-vous avec un médecin qui serai plus…plus disponible en terme de date de rendez-vous. Q : Est-ce que vous savez comment trouver ce médecin là ? (Silence) S : Au pif, comme hier avec le dentiste. Q : D’accord. S : J’ai téléphoné à trois dentistes et au bout du troisième appel, j’avais un rendez-vous. Q : Vous avez appelé d’où ? S : J’ai appelé d’ici. Q : Où est-ce que vous avez trouvé le numéro du dentiste ? S : Annuaire. Q : Annuaire ? S : En fonction du lieu où je me situais c'est-à-dire ici, j’ai pris le plus proche dans le secteur géographique, là où je me situe et j’ai pris rendez-vous dans ce périmètre là, pour me permettre de gagner du temps et…d’avoir une distance de marche pas très, très élevée quoi. On est à Tours centre, je vais pas prendre rendez-vous avec un médecin à F (nom d’une ville) ou à B (nom d’une ville) etc. quoi j’essaie de faire dans la proximité. Q : D’accord, et pour vous entre consultation libre ou consultation sur rendez-vous y’a pas vraiment de différence, vous m’avez dit que c’était un peu pareil ? S : Ben non du moment que je rencontre quelqu’un du monde médical. Q : Respecter un horaire de rendez-vous par exemple avec les transports, avec tout ça est-ce que c’est compliqué ? S : Pfff (Silence), à voir en fonction du planning et puis à planifier quand la date de rendez-vous est là.

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Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin, dans tous les médecins que vous avez fait jusqu’à présent ? S : Oui, oui. Q : Est-ce que des fois ça s’est mal passé ? S : Oui une fois. Q : Qu’est-ce qui s’est passé ? S : Euh c’était un toubib qui était chargé de me faire des infiltrations, j’arrive à 8 heures et demi, 9h dans ce cabinet là et ce docteur…fait la réflexion, faisant sous entendre que je m’étais pas lavé, j’étais un petit peu en sueur parce que je venais de faire 30-45 minutes de bus, j’étais en sueur alors que je m’étais douché le matin, c’est le Docteur, Docteur je me rappelle pas son nom, c’est un docteur manquant d’empathie et…pas agréable quand je vois qu’un toubib n’est pas agréable euh (siffle) je préfère aller voir ailleurs même au détriment de ma santé. Q : Hum-hum, pour vous c’est très important… S : Je pense pas être un cobaye et…je veux aussi être dans une relation saine avec ce…la personne soignante quoi. Q : C’est intéressant, pourquoi vous parlez de cobaye ? (Silence) S : Dans sa manière de me parler c’est ce que j’ai ressenti, et j’ai pas apprécié qu’il dise que je suis quelqu’un de crado quoi alors que j’étais douché le matin à 7h30 et partant de mon ex domicile à 8h…15, 8h20 et…45 minutes de transport en commun, y’avait un maximum de personnes dans le bus car c’était en période hivernale. Q : Forcément, est-ce qu’avec d’autres médecins… S : Irrespectueux je dirai. Q : Ouais ça c’est important. S : Irrespectueux ce genre de personnage, après y’a peut être autre chose qui m’intéressait pas c’est que dans…certains cas, certains médecins, tous corps…tous corps de médecins, on se heurte de temps à autre à un refus de CMU. Q : Vous, vous l’avez déjà vécu ? S : Oui une fois. Q : Qu’est-ce qui s’est passé concrètement ? S : Ben je me suis entendu dire au téléphone (prenant une vois de femme) « ah ben on n’accepte pas la CMU ». Q : C’était y’a combien de temps ? S : Moins de deux ans. Q : Ah ouais, c’est récent alors. S : Donc à croire que les gens qui ont la CMU sont euh, sont pas toujours bien des professionnels soignants alors que quand on est en précarité, d’instabilité de logement etc., la santé ça doit être le volet numéro un sachant que la vie à la rue est fatigante au niveau physique, au niveau psychique euh…et puis l’important d’avoir un suivi médical, pas régulier mais de manière… Q : Ca vous est arrivé à plusieurs reprises d’avoir des refus comme ça ? S : Non. Q : C’était…

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S : Non mais je, maintenant je fais la demande c'est-à-dire que quand je prends un rendez-vous chez le dentiste ou même un autre médecin je demande est-ce que vous acceptez la CMU. Q : C’est quelque chose qui vous a vraiment marqué ce refus ? (Silence) S : Oui et non, oui et non après ça peut surprendre, moi je fais toujours la demande est-ce que, si la CMU est acceptée. Q : Et jusqu’à présent depuis que vous le demandez y’a pas eu de soucis particuliers ? S : Non. Q : D’accord, est-ce qu’y a eu d’autres expériences négatives du coup, d’autres choses qui se sont mal passées avec d’autres médecins ? S : Ben, non, non, non ça va moi je veux dire des médecins j’en ai vu « pou » (signe de quantité) dans ma vie, j’en ai vu plein. Q : Et pourquoi vous en avez vu plein, et pourquoi pas toujours le même ? S : Ben j’en ai vu plein du fait de ma maladie des hanches de 0 à 18 ans donc dans le cadre d’un suivi orthopédique. Q : Spécialisé. S : Spécifique, donc y’avait une surveillance accrue euh…au niveau orthopédique pour évaluer un petit peu comment ça se passait durant ma croissance et voir si l’opération avait bien fonctionné, voir si j’avais pris une bonne musculation, une bonne marche etc. Q : Donc vous avez vu plein de médecins à ce moment là et depuis que vous avez 18 ans ? S : Ca je fais encore des temps en temps un contrôle des hanches, genoux, cervicales parce que c’est trois parties de mon corps que j’ai vu souffrir un petit peu. Q : Mais là vous m’avez dit que vous avez un médecin traitant bien identifié depuis longtemps? S : Oui. Q : Mais vous continuez parfois à voir d’autres médecins… S : Oui, oui, oui mais que ce médecin traitant m’avait conseillé, là par exemple le 12 juillet je vais voir un rhumatologue pour je dirai faire un contrôle général sur certaines parties du corps, genoux, hanches, cervicales et je vais demander qu’elle refasse un shaker par rapport à ça, pour évaluer ce qui va pas et continuer le travail qui était fait sur euh…sur le centre d’alcoologie, j’étais suivi par un ostéopathe sur ce centre de désintoxication à l’alcool, il m’a dit que mon état orthopédique était, était satisfaisant même si j’étais un peu cassé de partout… Q : C’était pas génial mais ça tient ? S : Voilà ça tient. Q : Est-ce que vous avez vu d’autres médecins généralistes que votre médecin traitant ? S : Ces derniers temps ? Q : Oui. S : Oui ben du fait de mon séjour en cure alcoolique. Q : Donc dans la cure… S : Mais c’était plus imposé, c’était pas moi qui…, c’était plus des rendez-vous.

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Q : Et vous avez eu des rendez-vous avec des médecins généralistes en ville, c’était quoi en fait ? S : Non c’était en centre d’alcoologie (avec insistance). Q : D’accord. S : C'est-à-dire que c’était sur une structure fermée quoi, j’étais là bas pendants deux mois et demi, trois mois et tous les 15 jours j’avais un rendez-vous qui était planifié par la…la médecin. Q : Et en dehors de ce centre d’addictologie, est-ce que vous avez vu d’autres généralistes, à part le médecin traitant dans les dernières années ? S : Non. Q : Non, donc c’est vraiment votre médecin traitant que vous allez voir en général. S : Si j’ai vu un addictologue. Q : Ouais. S : J’ai vu un addictologue, du fait, du fait d’un passage aux Urgences à Trousseau, j’y suis resté moins d’une semaine et j’ai vu un addictologue là bas et qui m’a vu après en psychiatrie parce que j’ai passé quelques jours en psychiatrie pour préparer mon départ en cure. Q : Les Urgences c’est vous qui avez demandé…qu’est-ce qui s’était passé ? (Silence) S : ça j’aimerais pas trop, trop en parler. Q : D’accord pas de soucis, aucun souci ça me dérange pas, c’est vous qui avez appelé les Urgences ? S : De manière globale, j’étais en burn out ou en raz le bol donc raz le bol général sur ma situation personnelle assez compliquée, situation familiale assez compliquée aussi euh relations avec des gens qui étaient aussi un peu compliqués euh donc je sentais que j’étais à deux doigts de craquer et j’ai dit stop quoi. Q : C’est vous qui avez appelé ? S : Non je me suis déplacé. Q : Vous êtes allé directement… S : De mon propre chef je suis allé, j’ai été sur Trousseau, j’ai dit voilà il se passe ça, ça, ça, faut que je voie un médecin dans les…dans les…dans les heures qui suivent quoi. Q : Hum-hum, vous appelez à l’aide quoi ? S : J’ai pu dire help, help me, aidez moi. Q : D’accord. S : J’ai tendu la perche quoi, j’en avais besoin et j’avais besoin aussi de faire un break, une rupture et de repartir à zéro et de me débarrasser de l’addiction à l’alcool que je pouvais avoir depuis de nombreuses années. Q : Et là par rapport à ça, ça va mieux ? Bon là on est hors sujet mais c’est juste pour discuter entre nous. S : Là je vais sur mon septième mois d’abstinence, sans traitement par rapport à l’alcool, pas d’aotal, pas de révia, de… Q : Vous connaissez les noms parce que vous avez déjà eu ça ? S : J’ai déjà eu ce genre de médicaments mais j’aimais pas, ça me flinguait l’estomac, euh oui je connais ben parce que dans le centre d’alcoologie dans lequel j’étais, je discutais un petit peu avec les gens et ils me disaient « ouais moi je prends de l’aotal, du révia », ouais c’est bien moi je prends pas ça,

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j’étais en centre d’alcoologie avec des policiers à L (nom d’une ville) dans un château. C’était rigolo, j’appréhendais un petit peu au départ, je me suis dit c’est des gens de la force de l’ordre… Q : Ils étaient avec vous en cure ou ils encadraient ? S : Non enfin oui ils encadraient on va dire, c’est des PAMS, Policiers Auxiliaires Médico Social. Q : D’accord, je savais même pas que ça existait ça. S : C’est un centre de désintoxication qui est géré par le Ministère de l’Intérieur, l’ANAS, Association Nationale d’Action Sociale et c’est géré par le Ministère de l’Intérieur, Place B (nom d’une place). Q : D’accord, là vous m’aviez dit qu’au niveau couverture sociale… S : Ah je suis à jour. Q : Vous avez la CMU ? S : Ouais. Q : Qu’est-ce que ça veut dire pour vous avoir la CMU, avoir le 100% ? S : Que je puisse me faire soigner quand j’en ai besoin, déjà c’est un minimum syndical on va dire et du fait que j’ai pas envie de jouer avec ma santé aussi à bientôt 40 ans, j’ai encore envie de garder le minimum capital santé qu’il me reste. Q : Hum, donc c’est ça, le plus important pour vous dans la CMU c’est ça c’est l’accès aux soins au moment ou vous en avez besoin ? S : Ouais. Q : Plus sur l’urgence quoi ? S : Plus sur l’urgence et puis aussi avoir un suivi régulier en fonction des pépins de santé ne serait-ce que par rapport à mes hanches, je fais un suivi régulier par rapport à ça pour préparer un petit peu l’avenir et ma future vieillesse. Q : Et l’ALD pour vous ça veut dire quoi, le 100% ? S : ALD c’est la reconnaissance d’une affection longue durée sur…ben ça me permet d’avoir certains médicaments et… de pas payer, parce qu’on est pas bien riche en étant au RMI, c’est pas trop ancré dans les mœurs françaises de…j’ai l’impression que le Rmiste en ce moment c’est un peu le paria, on parle d’assistanat mais bon. Q : Est-ce que vous savez quand est-ce que vos droits CMU vont s’arrêter par exemple ? (Silence) S : Euh 2013 peut être, faudrait que je vérifie. Q : Vous avez votre attestation ? S : Oui j’ai mon dossier… Q : Vous vous promenez toujours avec ça ? S : Hein Q : Vous l’avez toujours avec vous ? S : Oui. D’ailleurs faudrait que je trouve une pochette pour mettre ces papiers. Q : Est-ce que ça vous est déjà arrivé d’avoir des moments ou vous aviez plus de CMU parce que vous avez pas renouvelé à temps par exemple ? S : Oui, après je faisais système D, système D, homéopathie etc., oui des droits CMU jusqu’en novembre 2012, donc faudra que je fasse le renouvellement au mois de septembre par exemple en sachant que l’ALD je

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vais essayer de voir avec mon médecin s’il peut pas changer un peu le protocole de soins parce que c’est pas, c’est pas suffisamment adapté. Q : Pour la CMU donc vous savez que vous vous y prenez deux mois à l’avance, c’est ce que vous disiez, septembre, octobre, novembre, vous savez où aller ? C’est vous qui le faites ? Comment est-ce que ça se passe ? S : Ben tout dépend de la Région dans laquelle je vais être parce qu’il était question que je parte dans une autre région proche de la Touraine et ben je ferai la demande là bas ou je ferai la demande ici et après le transfert de dossier sur la nouvelle région ou je serai. Q : Vous allez où faire la demande ? S : Euh à la CPAM ou éventuellement un Organisme qui puisse me délivrer un formulaire pour faire une demande quoi. Q : La dernière fois que vous y êtes allé c’était la fin de l’année, c’était à la CPAM ? S : Ah non la dernière fois que j’ai fait mon dossier c’était euh, c’était…fin avril et j’ai reçu le courrier début mai. Q : Et c’est vous qui étiez allé à la CPAM, comment ça s’était organisé en avril ? S : Euh que je me rappelle bien euh…non c’était le travailleur social qui me suivait sur le centre de désintoxication où j’étais qui m’avait donné un formulaire pour le faire et quand je suis revenu à T (nom d’une ville), j’ai refait le dossier et je l’ai déposé à la CPAM dans la boîte aux lettres et ils ont traité le dossier et ils m’ont envoyé par courrier postal mon attestation. Q : Et vous étiez en retard, y’avait un trou de CMU ou pas ? S : Oui un petit peu. Q : D’accord. S : Qui m’a un petit peu pénalisé pour continuer mes soins dentaires mais ça va c’est en cours. Q : Là en tout cas la CMU elle est… S : Je l’ai même en double, c’est quoi ce délire. Q : C’est peut être pas les mêmes dates, si ? S : Si, des fois je m’y perds dans les papiers, trop de papiers. Q : Est-ce que vous avez quelque chose à rajouter, là moi j’ai fini mes questions pré définies mais après si vous avez envie de parler d’autres choses sur l’accès aux soins, la facilité à voir un médecin ou les difficultés à voir un médecin, qu’est-ce qu’on peut faire pour améliorer ? S : Non ce que j’aurai à dire c’est qu’en 2008, y’a un guide qui a été fait par…l’entraide ouvrière, la DDASS qui date de 2008 et ce qui serait bien c’est qu’il soit peut être mis à jour celui là, SOS guide. Q : Donc ça vous, vous l’utilisez ? S : Oui je l’utilise pour avoir je dirai des adresses, là ou je peux éventuellement dormir, où je peux me restaurer, où je peux prendre soin de mon hygiène corporelle, où je puisse me vêtir, où je puisse me soigner, où je puisse recevoir mon courrier etc. Q : D’accord donc pour vous ce type de petit guide est intéressant mais il faut qu’il soit actualisé. S : Oui ce que je lui reproche c’est qu’il a pas été mis à jour parce que y’a eu des structures qui ont changé d’emplacement, y’a des nouvelles structures qui sont peut être ouvertes et dont on connait pas l’existence donc ça aurait été bien qu’il soit remis à jour.

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Q : Hum-hum c’est vrai, déjà un ça veut dire que vous l’utilisez, donc c’est un outil qui est intéressant pour vous en tout cas et deux c’est vrai qu’il faut faire des mises à jour régulières pour que ce soit toujours collé à la réalité. S : Voilà, là ça c’est un peu je dirai pas désuet parce que y’a des adresses qui existent encore et des organismes qui fonctionnent encore mais y’en a d’autres ou y’a eu des changements, ce qui est bien c’est que c’est étendu à tout le département, c’est ça qui est bien Q : Bon ben merci beaucoup, je sais pas si vous avez d’autres choses à rajouter parce que moi j’ai fini mes questions. S : Non Q : C’était très intéressant. Explication de ma formation, de la thèse S : Après sur ces lieux là (les haltes), je pense que la présence d’un médecin pourrait être très intéressante, mais moi le CASOUS j’y vais plus…après c’est le médecin je sais pas si je la connais parce que du fait de mon traitement je sais pas si elle a la possibilité à prescrire ce que j’ai en ce moment donc c’est pour ça que je me retranche sur mon médecin traitant. Q : Mais vous pensez que ce serait intéressant d’avoir un médecin aux Haltes ? S : Oui, oui y’a quand même des gens en grande souffrance physique. Q : Oui mais comme y’a déjà le CASOUS et le CPO, vous pensez qu’avoir un médecin ici ça faciliterait ? S : Le CPO, il prenne pas la CMU par exemple, on m’a dit « si tu y vas ne dit pas que tu as la CMU » donc s’il faut mentir pour se faire soigner je trouve ça bas. Q : Mais parce que quand on a la CMU on peut voir n’importe quel médecin en ville, c’est un peu ça…mais vous trouvez que c’est difficile de voir un médecin en ville en fait ? (Silence) S : Tout dépend s’il est disponible. Q : D’accord, c’est pas si simple en fait, vous pensez que ce serait plus simple si il y avait un médecin ici, pour tout le monde, CMU ou pas CMU ? S : Y’a quand même des gens qui ont des pépins de santé assez, assez importants et comme je disais tout à l’heure la rue, la rue use les esprits, use le corps et use le cerveau aussi. Q : Est-ce que ce serait pas justement intéressant pour eux d’avoir un médecin régulier ? S : Oui. Q : Parce que du coup le médecin d’urgence de type halte etc… c’est pas forcément un médecin régulier, au CPO ça tourne tout le temps, est-ce que ce serait pas intéressant pour eux d’avoir un médecin généraliste en ville, juste à côté ? S : En complément du médecin traitant. Q : Je parlais pas pour vous, parce que vous vous avez déjà un médecin traitant après le problème pour vous d’après ce que j’ai compris c’est l’éloignement mais euh… S : Après médecin sur T (nom d’une ville), j’en connais pas, si j’en connais un éventuellement, il est en vacances et lui je pense qu’il aurait pu me faire la prescription que j’ai actuellement.

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Q : Si vous savez qu’il est en vacances c’est que vous avez demandé à le voir ? S : Non j’ai un ami qui est suivi par ce médecin et je lui ai demandé s’il était disponible au mois de juillet, il m’a dit qu’il était en vacances, mais j’ai peut être la possibilité de voir quelqu’un qui est dans la même spécialité et qui pourra faire son travail. Q : Bon merci

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Entretien N°16 (E16) Homme, 29 ans, Français, Hôtel, CMU et CMUc Lieu d’entretien : Halte de jour, 04/07/2012, 30mn Particularité : Q : question S : Sujet Q : Vous avez quel âge ? S : 29 ans. Q : Où est-ce que vous habitez là actuellement ? S : Là j’habite à S (nom d’une ville) jusqu’à la fin de la semaine je crois, jusqu’à la fin de la semaine et normalement je dois avoir Adoma, parce qu’on m’avait branché sur Adoma, parce que là où je suis c’est pas bien, déjà là je dors pas. Q : Parce que là vous êtes où actuellement à S (nom d’une ville) ? S : Je suis à l’hôtel de S (nom d’une ville). Q : Dans un hôtel ? S : Dans un hôtel oui, mais je paye cher, je paye 480 euros avec les APL je paye 180 euros mais le mec il nous gratte à fond tout ça, des fois on n’a pas de choses à manger tout ça alors ça se fait que j’ai fait des demandes à côté et ça se fait que normalement cette semaine je dois partir mais le mec là bas il nous gratte tellement qu’il faut qu’on fasse des préavis tout ça, mais non l’assistante sociale m’a dit de pas faire ça et de partir directement. Q : Ben c’est un hôtel. S : Elle m’a dit si j’ai Adoma de partir directement à Adoma, et là je vais m’en aller vite fait, je sais pas quand mais dans la semaine, mais je vais déposer les clefs, je sais pas comment… Q : Adoma vous attendez la réponse en fait ? S : J’ai déjà la réponse, ça a déjà été accepté mais j’attends juste la chambre qu’elle se libère et ça va se libérer dans la semaine avant vendredi on m’a dit ou bien vendredi et donc après je pars directement. Q : Vous avez une couverture sociale ? S : J’ai une CMU, CMUC je crois. Q : Votre nationalité ? S : Française. Q : Vous avez des enfants ? S : Non j’ai pas d’enfants. Q : D’accord, bon ça c’était juste histoire de se connaître un petit peu, là je vais poser plus des questions du coup vers le médecin, la dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est-ce que vous avez vu, qui est-ce que vous avez consulté ? S : La dernière fois que j’ai eu un problème de santé ? Q : Ouais. (Silence) S : J’ai consulté un médecin mais ça fait longtemps que j’ai eu des problèmes de santé, non la dernière fois que j’ai eu des problèmes de santé c’est pas que j’ai eu des problèmes de santé, c’est que j’ai fait une formation d’éducateur sportif, et ça rentre au mois de septembre, j’ai passé le test au

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mois d’août et je dois envoyer mon dossier avant le 20 juillet et dans le dossier il fallait absolument avoir un certificat médical et pour avoir les docteurs je suis venu voir l’assistante sociale, elle a appelé un docteur, c’est près de chez moi, j’ai fait le certificat médical et ben voilà, en fait j’étais pas malade mais on a pu se… Q : C’est ça qui m’intéresse, donc vous avez eu besoin d’un docteur, vous saviez pas forcément où aller ? S : Non je sais pas où faut aller, parce que j’ai cherché des docteurs, des docteurs mais ça donne des rendez-vous et moi je suis pressé, je suis speed, je suis quelqu’un de speed et je suis obligé d’aller voir l’assistante sociale, elle m’a appelé un médecin. Q : Vous l’avez vue où l’assistante sociale ? S : Je l’ai vue ici, je l’ai vue là haut. Q : A la halte de jour ? S : A la halte du jour ouais, et j’ai vu le médecin le lendemain, mon rendez-vous était le lendemain. Q : C’est elle qui a appelé le médecin ? S : C’est elle qui a appelé le médecin. Q : D’accord, elle vous a dit où c’était ? S : Elle m’a dit où c’était et m’a fait, elle a regardé sur internet où c’était, mais c’était près de chez moi, de toute façon je connaissais. Q : Elle a fait un plan ? S : Et comme j’avais besoin d’un médecin aussi pour la CAF, parce que la CAF on est obligatoire de voir un médecin, non pas la CAF euh l’Assurance Maladie. Q : Ouais. S : Alors je l’ai vu le médecin, je suis content parce que ça fait 3 ans, ça fait 4 ans que je suis ici et c’est la première fois que j’ai un médecin pour la CMU et voilà j’ai vu mon médecin, maintenant il a fait les papiers pour qu’il soit mon médecin et tout ça et voilà. Q : D’accord, pour y aller vous y êtes allé comment ? S : Pour y aller, comme c’était près de chez moi j’y suis allé à pied. Q : Donc du coup ça c’est un médecin que vous allez peut être revoir ? S : Si je suis malade. Q : Avant lui qui est-ce que vous avez vu comme médecin, récemment ? S : Avant lui j’étais incarcéré alors donc je vois des médecins en prison. Q : D’accord, entre la prison et celui là, il y en a pas eu ? S : Entre la prison et celui là, y’en a pas eu, non parce que je tombe jamais malade en fait. En un an je suis tombé une fois malade mais c’est une maladie vite fait, je me guéris moi-même des fois, je cueille les fruits euh je cueille les remèdes, je les cueille vite fait parce que je connais des remèdes qui pourrait aider à soulager un peu mais voilà Q : Et avant, tout à l’heure vous m’avez parlé du CASOUS c’était quoi cette période là ? S : Le CASOUS c’était en 2009, ça se fait que en 2009 j’étais un p’tit peu en situation difficile, j’étais à la rue et tout ça, j’avais un vélo comme moyen de transport et je faisais T (nom d’une ville) en vélo jusqu’à M (nom d’une ville) à pied euh en vélo, tous les soirs, tous les matins, tous les jours en fait, tous les jours je faisais ça… et c’était difficile pour moi de trouver un médecin parce que déjà premièrement je perdais tout le temps mes papiers et…j’avais

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un peu, j’avais beaucoup parce qu’on a beaucoup de papiers à faire quand on est dans la rue et tout ça, on a beaucoup de papier à faire, faut courir derrière les papiers et tout ça donc on n’a pas le temps d’aller voir un médecin, déjà on n’a pas de quoi manger et tout ça, faut se débrouiller donc on n’a pas le temps d’aller voir un médecin et ça se fait que le médecin je venais le voir au CASOUS, pour moi c’était le moyen le plus facile. Q : Qu’est-ce que vous trouviez intéressant dans ce lieu ? S : Le CASOUS ? Q : Ouais S : Rien, je trouvais rien d’intéressant mais sauf que voilà des fois le CASOUS ça aide bien les gens. Q : D’accord. Et en quoi ça vous aide, enfin pourquoi vous allez au CASOUS et pourquoi vous allez pas en ville, quelle est la particularité du CASOUS ? S : Je vais au CASOUS parce que déjà je me suis inscrit au CASOUS et à chaque fois on me donnait des rendez-vous au CASOUS tout ça, j’allais les voir au CASOUS, pour moi c’était le moyen le plus facile pour moi. Q : Au niveau médical ? S : Au niveau médical, au niveau…du moyen de s’en sortir tout ça parce que je demandais des foyers là bas au CASOUS, y’a des moyens d’avoir des foyers, une chambre, un lit tout ça et voilà c’était le moyen le plus simple pour moi, et je m’entendais bien, j’avais une bonne relation aussi avec le CASOUS et comme j’étais en situation difficile, voilà comme j’avais un vélo, le moyen pour moi c’était juste d’aller là bas. Q : À ce moment là vous aviez déjà la CMU ? S : J’ai déjà la CMU. Q : En 2009 ? S : Mais j’avais un problème de CMU, avant quand j’avais la CMU, j’avais que la carte j’avais pas comment ça s’appelle le papier qu’on demande… Q : L’attestation ? S : J’avais pas l’attestation et des fois quand je vais dans un endroit on me demande l’attestation mais on me demande pas la carte et des fois dans des endroits on me demande la carte mais j’ai pas l’attestation et la carte elle était pétée en deux, mais ça se fait que je la scotchais, un bout de scotch au milieu et je me trimballais avec ça, avec une carte comme ça et j’avais une carte d’identité mais elle était tellement vieille que je me trimballais avec ça. Q : Qu’est-ce qui était difficile pour vous dans l’idée d’aller voir un médecin généraliste en ville et pourquoi vous préfériez le CASOUS au généraliste ? S : Parce que c’était plus facile. Q : Qu’est-ce qui était plus facile ? S : Le…comment dire ça, le rendez-vous était plus facile pour moi d’aller au CASOUS que dans un autre service parce que j’étais en situation difficile, j’étais à la rue et tout ça… et ça fait pour moi, je pensais mal aussi, je réfléchissais mal aussi je réfléchissais mal donc quand j’allais dans un médecin pour moi c’est que les gens m’accepte pas là bas, en plus je venais d’arriver ici, je connaissais pas trop ici donc quand j’allais dans un médecin, quand je voyais la secrétaire, pour moi on dirait qu’on m’acceptait pas ici donc ça se fait que j’allais au CASOUS. C’était comme ça avant. Q : Vous avez eu déjà des expériences négatives…? S : Oui beaucoup. Q : Ouais, racontez-moi un peu ce qui s’est passé, avec les médecins ?

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S : Avec les médecins non, aucune…ben les médecins, je l’ai jamais vu le médecin, le médecin du CASOUS je l’ai vu deux fois, c’était pour avoir un foyer, parce que quand on veut un foyer on va le voir le médecin pour consulter si on va bien tout ça, alors je vais voir le médecin, j’ai vu le médecin deux fois, une fois je suis allé voir le médecin, il m’a dit que j’avais une maladie au cœur, or j’ai jamais eu de maladie, j’ai trouvé ça bizarre même, il m’a dit que j’avais un trou au cœur, je sais pas quoi, je faisais trop de sport tout ça alors ça se fait que ce jour là j’suis allé voir un grand médecin pour le cœur, ben en fait je l’ai payé pour rien le médecin pour le cœur, parce qu’il m’a mis beaucoup de truc sur le corps et tout ça et après à un moment donné il a retiré et il a dit « mais Monsieur vous êtes bien » et tout ça, il a même trouvé bizarre que le médecin là bas il a dit que vous avez une maladie au cœur alors ça se fait qu’aujourd’hui je lui dois je sais pas combien, je sais pas combien je lui dois mais il m’envoie des fois le courrier. Q : Parce que vous aviez pas la CMU ? S : Non j’avais une carte vitale mais la carte vitale comme je vous dis elle a été scotchée et ça se fait qu’elle passait pas dans la machine et deux semaines après je suis tombé et ça fait deux ans pleins, je suis sorti y’a huit mois et voilà. Q : Hum, est-ce que avant avec d’autres médecins au CASOUS ou surtout ailleurs, vous avez eu des expériences négatives, ça s’est mal passé quoi ? S : Non par contre je suis allé voir un dentiste une fois mais c’était un bon dentiste en plus, franchement c’était un bon dentiste mais c’était le seul docteur ailleurs que j’allais voir, un dentiste, je l’ai vu deux fois, lui je l’ai vu deux fois mais c’est tout sinon sans ça je voyais pas de docteur et quand je suis tombé normalement on est obligé de passer devant les médecins et moi j’étais bien, j’étais clean après je suis parce que moi je transfère beaucoup je reste pas ici quand je suis en prison je transfère dans d’autres prisons pareille aussi quand on va dans d’autres prisons on fait des entretiens avec des médecins, je suis arrivé ici j’étais clean et avant de sortir de prison j’ai fait un test et j’étais clean aussi et voilà même en prison des fois quand on tombe malade normalement on est obligé d’aller voir un médecin, moi j’allais pas voir les médecins je restais là, je sais pas mais je mettais du miel, de l’eau chaude etc.…parce que je sais comment guérir la grippe tout ça enfin je sais comment guérir les grippes, c’est ma mère qui m’a appris, des fois si ça passe pas je vais voir le médecin, si ça passe, tranquille et voilà je me guéris moi-même des fois mais avoir un grand problème, grand problème non je pense pas, si une fois pour mon pied, ils ont voulu me casser la cheville parce qu’on jouait au foot et tout ça, et comme je cours vite, ouais c’est de la jalousie un peu et voilà c’était le seul fois où j’ai vu un médecin mais elle m’a rien fait, elle m’a juste donné une attelle vite fait, j’ai mis l’attelle et là maintenant ça va. Q : ça vous a rien fait ? S : Elle m’a rien fait, elle m’a juste donné une attelle, elle m’a juste posé une question, comment ça va le pied et tout ça, j’ai dit oui ça va, ça fait un an hein, ça fait presque…l’année dernière c’était 2011, ouais ça fait un an et aujourd’hui j’ai encore mal au pied, je sais pas, je peux jouer au foot mais voilà après le foot j’ai des douleurs dans ce pied là, dans la cheville mais à chaque fois, heureusement que je vais faire du footing tout le temps tu vois, mais à chaque fois j’fais du footing, après le footing j’ai des douleurs dans le

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pied mais j’en ai pas parlé au médecin parce que j’fais une formation éducateur sportif, si j’envoie mon dossier et je réussis le test, je rentre au mois de septembre et là j’ai une formation qui m’a appelé la semaine prochaine, j’ai rendez-vous la semaine prochaine pour le BTP, une formation pour le BTP… Q : Pourquoi vous en avez pas parlé au médecin, de la douleur au pied ? S : Ben je sais pas parce que pour moi, c’est rien pour moi en fait, mais c’est des douleurs que ça fait mal des fois mais franchement c’est rien, même si y’a des douleurs je peux le masser mais voilà. Q : Par exemple demain, vous vous levez et ça va pas vous avez besoin d’aller voir un médecin, comment vous faites ? S : Ben maintenant je peux voir mon médecin, je peux voir un médecin traitant, là j’ai un médecin traitant. Q : Mais vous savez par exemple vous connaissez son numéro de téléphone ? S : Je crois que le numéro de téléphone il est inscrit sur un bout de papier, je crois ouais. Q : Concrètement comment vous faites demain matin ? S : Je sais même plus le médecin ou il est situé déjà, mais je pense savoir c’est quel médecin enfin je pense savoir c’est quel médecin parce que je me rappelle plus trop parce que j’ai beaucoup de choses à faire et ça se fait que les choses d’hier j’oublie, j’ai beaucoup de papiers à faire tout ça mais je pense savoir c’est quel médecin et si j’ai un problème je peux le voir parce que c’est lui-même qui me l’a dit, si j’ai un problème je peux venir le voir. Q : Mais demain matin comment vous faites ? S : Demain matin ben je vais le voir, je suis obligé d’aller le voir. Q : Vous allez dans le cabinet ? S : Je vais dans le cabinet parce que c’est le seul médecin que je connais, à part le médecin du CASOUS, c’est le seul médecin que j’connais mais pourtant j’ai fait des demandes de beaucoup de médecins mais y’a trop de rendez-vous, trop éloigné même des rendez-vous ils ont pris après le 29 juillet. Q : Donc là vous savez où il habite enfin où il a son cabinet ? S : Oui. Q : Donc du coup demain vous vous levez vous allez à ce cabinet pour prendre un rendez-vous avec la secrétaire ? S : Voilà. Q : S’il vous dit ben je peux pas vous voir maintenant, je peux vous voir en début d’après midi par exemple à 14h ? S : Je le vois en début d’après midi, il faut que j’le vois si j’le vois pas ce serait pas bien aussi, avant je faisais ça quelqu’un me donne un rendez-vous et j’viens pas des fois, j’viens pas pourquoi parce que des fois j’suis loin aussi, j’suis à M (nom d’une ville) en vélo et ça se fait qu’il faut monter ici en vélo, des fois j’arrive à l’heure des fois. Q : Quand vous loupez les rendez-vous c’est pour quelles raisons, d’habitude, avant ? S : Parce que j’ai beaucoup de pa…Avant ? Avant c’est parce que…déjà je faisais T-M (noms de villes) à vélo et des fois je faisais T-M à vélo par exemple j’ai rendez-vous à 2h et je partais à 1h30 à M (nom d’une ville) donc j’arrive là bas à 2h pile ben je reste là bas, je peux plus bouger, c’est ça aussi, je

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reste là bas, je peux plus remonter parce que c’est loin M (nom d’une ville) d’ici. Q : A M (nom d’une ville) y’a pas de médecins ? S : A M y’a des médecins mais M je fréquente pas trop les médecins là bas. Q : Pourquoi ? S : Je sais pas, pour moi c’est l’endroit pour chercher tout ici, tu vois, c’est plus grand aussi, c’est plus grand. Q : Parce que moi ça m’intéresse beaucoup, justement vous habitez M, pourquoi est-ce que vous allez pas voir un médecin à M ? S : En fait j’habitais pas là bas, non j’habitais pas là bas c’est que en fait, comme j’étais en situation difficile j’avais un pote qui bossait à l’AFPA, qui était à l’AFPA de V (nom d’une ville) mais il habitait à J (nom d’une ville), ça fait que tous les soirs il rentrait chez lui mais il avait aussi une chambre là bas, ça se fait que la chambre il me l’a donnée là bas, j’avais les clés de la chambre mais personne ne savait que je dormais là bas, j’arrivais là bas que le soir et je partais à 6h ou des fois à 2h du matin, des fois à 4h du matin je partais et je venais ici et comment ça, des fois j’avais des problèmes par exemple là bas les gens, connaissais que j’étais là alors je fermais partout, je fermais la maison mais j’avais une tente alors je descendais à M (nom d’une ville) où y’a un camping et je mettais la tente juste à côté du camping et je squattais dans la tente, voilà j’étais dans une situation difficile (appui sur ce dernier mot), franchement. Q : D’accord, vous alliez pas voir les médecins là bas parce que c’était, parce que tout était à T (nom d’une ville) en fait ? S : Tout était à T (nom d’une ville) oui. Q : Est-ce qu’il y’a d’autres raisons qui fait que vous aviez pas envie de voir les médecins de M (nom d’une ville) ? S : Non, en fait la raison, j’avais de bonnes relations ici à T (nom d’une ville) et c’est que les gens ils me branchaient sur beaucoup de trucs, donc pour moi c’était ici le plus facile donc à M (nom d’une ville) là bas je pensais pas avoir des trucs faciles à M (nom d’une ville), donc je pouvais pas aller voir un médecin à M (nom d’une ville), je venais voir qu’ici parce que tous mes rendez-vous étaient ici aussi et voilà je venais ici, j’étais obligé de venir ici. Q : Demain matin, vous allez voir au cabinet de votre médecin et c’est fermé et on vous dit qu’il est en vacances pendant une semaine. S : Ben j’attends pendant une semaine. Q : Oui mais si vous pouvez pas, vous êtes pas bien ? S : Je vais voir un autre médecin, j’ai le droit d’aller voir un autre médecin en plus. Q : Comment vous faites pour aller voir un autre médecin ? S : Ben je viens voir ici ou je sais pas je vais… Q : Vous essayez de revenir ici pour demander. S : Non c’est pas obligé de revenir ici, je vais à la halte du matin aussi, à la halte du matin je demande si on peut prendre un rendez-vous avec un médecin pour moi, mais ça dépend des jours, y’a des jours c’est que eux et y’a des jours y’a des assistantes sociales, mais eux ils peuvent pas faire grand-chose, ils vont peut être me laisser le téléphone mais ça va être à moi de prendre le rendez-vous. Q : Ca c’est difficile pour vous de prendre le rendez-vous ?

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S : Non, c’est pas difficile, je peux le faire moi, faut qu’on me laisse le faire mais quand y’a des assistantes sociales c’est un peu plus facile aussi parce qu’elles ont des relations des fois aussi, elles ont des bonnes relations avec d’autres gens tout ça et ça se fait que voilà. Q : Et c’est important les relations ? S : C’est important les relations bien sûr. Q : Pour prendre un rendez-vous chez un médecin, vous pensez que c’est important ? S : Pour certaines personnes oui mais pour moi c’est pas question que c’est…c’est pas si important que ça mais c’est que les gens ils…si par exemple il est là pour m’aider et que j’ai besoin de son aide ben voilà je viens la consulter, franchement je viens la consulter, des fois ils ont des bons conseils à donner, des fois ils ont des bons…des bons comment ?...ils vous dirigent dans des bonnes structures et tout ça voilà, c’est des choses, voilà, que tout le monde rêve d’avoir ici, certaines personnes rêvent d’avoir ici et ils ont pas mais en fin de compte quand on est dans des choses comme ça, il faut en profiter aussi et comme y’a des gens aussi ils mettent des coups de pression, y’a des gens aussi ils foutent la merde aussi, ils ont des assistantes sociales, ils ont le moyen d’être bien, ils ont le moyen d’être aidés mais non, ils foutent la merde. Q : Est-ce que c’est important pour vous d’avoir un médecin généraliste qui vous suit régulièrement ou est-ce que voir n’importe quel médecin ? S : Ouais, voir n’importe quel médecin. Q : Vous c’est plutôt ça. S : Ben moi j’apprécie bien le médecin que j’ai là parce que je le connais bien, déjà un je le connais bien, parce que dès que je suis arrivé ici, j’étais arrivé ici en 2008, le premier médecin que j’ai vu c’était lui, après en 2009 j’étais malade, non j’étais pas malade je faisais les pommes, je faisais les pommes j’avais un problème au poignet donc j’étais obligé d’aller voir un médecin, je suis arrivé je suis allé voir lui comme par hasard et là j’avais un petit problème de certificat médical, on a téléphoné comme par hasard, je connaissais pas le nom de la rue du médecin et je cherchais la rue, je cherchais la rue quand comme par hasard je suis tombé sur lui et c’était lui-même. Q : Comment il s’appelle ? S : Monsieur…euh je sais plus comment il s’appelle. Q : Vous connaissez le nom de la rue ? S : Le nom, même pas, c’est écrit sur un papier je crois mais voilà je suis tombé sur le même médecin, mais je pense que lui aussi il m’a reconnu, je pense que lui aussi m’a reconnu parce que quand j’suis arrivé, franchement dans son regard, il m’a reconnu franchement, il m’a reconnu et après il a commencé à dire voilà vous avez pas de médecin mais moi je savais pas qu’il fallait avoir un médecin, pour moi c’était fini ça d’avoir obligatoirement un médecin, après lui il va commencer à me dire Monsieur vous avez pas de médecin et tout ça, j’ai dit non Monsieur j’ai pas de médecin, je connais même pas s’il fallait avoir un médecin et tout ça, en fait c’est lui qui a fait tous les papiers. Q : Pour vous c’était important qu’il vous reconnaisse ? S : Ouais c’est important. Q : Pourquoi c’est important ?

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S : Parce qu’il y a pas de faux…parce que voilà c’est quelqu’un…ben il me connait bien, c’est quelqu’un qui me connait bien parce que parfois je vais chez des médecins et je crains franchement je crains parce que les gens ils me calculent trop ici. Q : Je crains, vous avez l’impression que les médecins vous jugent ? S : C’est pas question que les médecins me jugent mais j’ai l’impression que il a toujours un truc derrière la tête, ici dans cette ville y’a toujours un truc derrière la tête, les gens ils vous font remarquer, pas tout le monde hein, je met pas tout le monde dans le même sac hein mais du regard des gens j’vois y’a toujours un truc dans la tête des gens et des fois j’me méfie mais j’me méfie, il s’appelle B G (nom et prénom du médecin)et voilà ça me donne envie de me méfier des gens et quand je me méfie ben au lieu de les calculer et de les juger ben je préfère m’en aller, je préfère m’en aller, ne pas me prendre la tête et je vais chez un autre médecin. Q : D’accord, du coup avoir un médecin régulier c’est aussi rassurant parce que vous le connaissez et il vous connait ? S : Voilà, mais des fois un médecin il vous connait et des fois il est pas là, il peut vous donner un rendez-vous chez un médecin que lui il connait, le médecin que j’ai c’est un médecin comme ça. Q : Tout à l’heure quand je vous ai posé la question de est-ce que c’est important pour vous d’avoir un médecin régulier vous m’avez plutôt dit l’inverse, vous m’avez plutôt dit non moi je m’en fiche. S : Non c’est pas que je m’en fiche. Q : Non, non excusez moi je me suis mal… S : Non c’est bien d’avoir un médecin traitant, dans un sens c’est bien Q : Pas forcément traitant, régulier je parle, un médecin que vous voyez… S : Tout le temps, un petit peu tout le temps, si dans un sens c’est bien mais moi comme je tombe jamais malade, comme je tombe presque jamais malade, je suis pas trop intéressé (rire discret) pour aller voir un médecin quand j’ai rien, faut vraiment que j’ai un gros truc même pour ma cheville je vais pas voir le médecin parce que je sais que c’est pas un gros truc, ça peut se guérir, il suffit juste de le masser. Q : Non mais le certificat par exemple comme tout à l’heure vous aviez besoin d’un certificat ? S : Voilà là c’est important, là c’était important, franchement c’était important parce que j’fais un dossier pour…ma formation et ben voilà j’ai réussi à avoir le certificat parce que ça fait un bon moment que je cours derrière ce certificat, je demande des rendez-vous, je demande des rendez-vous mais c’est tout le temps après le 20 juillet. Q : Vous demandez des rendez-vous à qui ? S : A des médecins, à des secrétaires des médecins. Q : Généralistes ? S : Généralistes, y’a à T (nom d’une ville), Boulevard B (nom)…y’a aussi à côté du V (…) Q : Et vous demandez comment, par qui, par la halte aussi ? S : Non je demande seul parce que eux aussi ils me poussent à aller voir un médecin et des fois j’en ai marre aussi tout le temps d’aller voir un médecin. Q : Qui est-ce qui vous pousse ? S : Ben l’assistante sociale, je suis suivi par pôle emploi, par une prestation de pôle emploi tout ça et quand je vais là bas des fois il me pousse à aller voir

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un médecin comme quoi je peux avoir mon certificat médical et tout le temps je dis oui, j’vais l’faire, j’vais l’faire, j’vais l’faire et jamais je l’fais parce que j’ai trop de papiers à faire, et des fois j’leur dit que j’aime pas trop les médecins (rire discret) aussi, j’aime pas trop les médecins aussi parce qu’ils vont me tripoter (rire) et tout ça, après il me pousse à aller voir un médecin à la dernière minute parce qu’il manquait que ce papier et j’suis obligé d’aller voir ce médecin. Q : Qu’est ce qui vous gêne dans la relation, vous me disiez la relation au corps, est-ce qu’il y a d’autres choses qui vous gênent en consultation ? S : De médecin ? Q : Ouais. (Silence) S : C’est tout. J’aime pas trop qu’on me tripote. Q : C’est ça qui vous freine, c’est le contact ? S : Ouais mais voilà, mais s’il faut le faire je le fais, y’a pas de problème mais voilà, mais il faut que ce soit vite fait, pour moi faut que ce soit vite fait dans la relation avec les médecins faut que ce soit vite fait, comme ça je peux sortir vite fait, je peux rentrer chez moi parce que j’aime pas trop aller voir les médecins, franchement j’aime pas trop les médecins, mais comme vous dites de temps en temps…avoir…avoir…avoir un entretien avec un médecin c’est bien aussi de temps en temps, mais moi j’aime pas. Q : Là vous m’aviez dit la dernière fois que le pôle emploi, l’assistante sociale tout ça, tout le monde vous disait d’aller voir un médecin, vous vous avez essayé de demander plusieurs rendez-vous, comment vous avez fait pour demander les rendez-vous ? S : Ben j’suis arrivé, y’a une secrétaire… Q : Vous alliez sur place ? S : Je vais sur place oui mais eux ils me donnent des adresses, des téléphones, ils me disent tout le temps de téléphoner mais moi je téléphone pas. Q : Alors le pôle emploi ou l’assistante sociale vous donnent des adresses et des téléphones et vous vous téléphonez pas à ce moment là ? S : Non je téléphone pas. Q : Vous préférez y aller ? S : Je préfère aller sur place directement. Q : Vous allez sur les numéros qu’ils vous ont donnés ou vous allez n’importe où ? S : Je vais n’importe comment. Q : D’accord, vous demandez à quelqu’un où est-ce qu’il y a un médecin dans le coin ? S : Non pas besoin, je vais à C (nom d’une ville), par exemple j’ai de l’argent, j’vais à C (nom d’une ville), j’vais m’acheter quelque chose à C (nom d’une ville) et là je vois un médecin, ben je m’arrête là, je vais consulter un médecin pour voir si je peux prendre un rendez-vous mais j’y vais comme ça, même ici, par exemple à T (nom d’une ville), j’vais en ville par exemple j’vais en ville et je vois un médecin ben je rentre dans le bureau du médecin juste pour voir si je peux prendre un rendez-vous, voilà je fais ça comme ça. Q : D’accord et c’est là ils vous disent le rendez-vous c’est dans un mois quoi ?

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S : Des fois ils me disent le rendez-vous c’est dans un mois, des fois ils me disent les rendez-vous les gens ils ont trop pleins, il faut deux jours pour le rendez-vous. Q : Puis vous, vous êtes là par hasard donc si on vous dit de revenir le lendemain, c’est pas simple quoi ? S : Si on me dit de revenir le lendemain ben c’est plus facile pour moi, je reviens le lendemain, si on me donne un rendez-vous le lendemain je reviens le lendemain mais si on me dit de revenir le lendemain pour avoir un rendez-vous tel jour ben je viens plus. Q : Et là à chaque fois quand vous avez demandé pour le certificat médical, y’avait plus de places ? S : Pour le certificat ? Q : Oui comme vous me disiez que vous êtes allé voir plusieurs médecins et vous… S : Non c’est pas question qu’y’avait pas de places, y’en a mais les rendez-vous ils étaient trop éloignés et y’en a je tombais pas sur les bons médecins généralistes, je tombais sur des podologues ou des chirurgiens esthétiques, des diététiciens et moi je savais pas parce que je voyais pas je rentrais chez des médecins et je demande les rendez-vous mais les gens ils me disent que voilà ben Monsieur vous vous êtes trompé d’endroit, ici c’est pas un médecin c’est un podologue ou ils disent c’est un psychiatre ou des choses comme ça et je m’en vais. Q : D’accord, là vous avez la CMU ? S : Euh j’ai la CMUC. Q : Vous savez jusqu’à quand elle se termine ? S : Non je connais pas mais si le 31 juillet je crois mais j’ai fait le renouvellement et je sais pas ce que ça a donné mais j’attends. Q : Comment vous faites le renouvellement ? S : Le renouvellement je l’ai fait sur place, c’est une femme qui m’a aidé en fait je sais même pas comment je l’ai fait, en fait c’est la femme qui avait tout rempli, elle m’a demandé un certificat d’adresse et… Q : Elle était où la femme ? S : Elle était à l’Assurance Maladie, elle travaillait dedans. Q : Qui est-ce qui vous a dit d’aller à l’assurance maladie, comment vous saviez ? S : En fait…parce que quand on sort de prison on est obligé de refaire tous ces papiers, faut courir derrière tous ces papiers sinon on n’a pas de travail, on n’a pas ceci, on n’a pas cela alors je refais tous mes papiers, j’vais à la CAF, je vais refaire ma carte d’identité, je suis rentré en prison j’avais ma carte d’identité, je suis sorti de prison j’avais plus ma carte d’identité, j’avais plus de papiers alors j’étais obligé de tout refaire. Q : Parce qu’en sortant ils vous ont dit faut aller à la CPAM, il faut aller… S : Ils m’ont rien dit, normalement quand on sort de prison on doit nous rendre la carte d’identité mais j’avais des problèmes avec les chefs aussi tout ça et c’est que j’pense qui m’ont fait un truc de ouf pourtant j’étais à U (nom d’une ville), il fallait prendre le train, il fallait prendre le bus mais j’avais pas de carte d’identité, moi je pensais que ma carte d’identité elle était dans mon sac parce que pour moi c’était sûr d’être rentré en prison avec ma carte d’identité et quand je suis arrivé ici à T (nom d’une ville), je suis arrivé dans les foyers 1euros et tout ça, les foyers ??? (25’37) alors j’ai dû vider tout

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mon sac et j’ai pas trouvé des papiers, de carte d’identité c’est ça je trouvais bizarre et j’ai pensé, bon j’me suis dit de toute façon des gens comme ça ils m’arrêteront pas, de toute façon ils peuvent faire ce qu’ils veulent des gens comme ça ils m’arrêteront pas, alors j’ai refais tous mes papiers, aujourd’hui j’ai tous mes papiers, ma carte d’identité en sortant de prison je l’ai perdue deux fois, en une semaine je l’ai perdue deux fois, non parce que quand je suis sorti de prison j’ai refait ma carte d’identité et j’ai attendu un mois, je l’ai eue ma carte d’identité, une semaine après je l’ai perdue parce que je suis tombé dans la Loire, je sais même pas comment c’était le soir, je suis tombé dans la Loire, j’ai perdu ma carte d’identité et là je l’ai refaite, je l’ai re-eue, je l’ai encore là, je suis obligé de la garder de bien surveiller parce que si je la reperd là ça va être dur et en plus j’en ai besoin pour ma formation tout ça, la carte vitale je l’ai refait aussi. Q : Est-ce que ça vous est arrivé quand vous aviez la CMU entre deux d’avoir des trous, des moments ou vous aviez pas de CMU par exemple, quand vous refaisiez pas assez vite, est-ce qu’il y a eu des périodes où vous aviez plus de couverture maladie ? S : Oui ça m’est arrivé, mais…ça m’est arrivé comment, c’est pas question qu’ça m’est arrivé et que j’ai plus de CMU parce que je vais jamais au médecin, je vais jamais consulter un médecin, la seule fois que j’ai consulté un médecin pendant ces quatre dernières années, à l’extérieur hein, c’était le médecin du cœur là parce qu’il croyait que j’avais un problème au cœur tout ça, c’était le seul médecin que j’ai consulté parce que ma carte vitale elle était scotchée, y’avait pas de photo, c’était l’ancienne carte vitale et ça passait pas dans la machine alors le docteur il m’a dit c’est pas grave, on va laissé passer tout ça, alors j’étais obligé de refaire une carte vitale, ils m’ont confisqué ma carte vitale et là je suis sorti j’ai plus de carte vitale… Q : vous avez refait la CMU, vous avez refait tout ça. S : Voilà, et là j’ai tout maintenant. Q : D’accord, (silence), bon on a vu pas mal de choses, est-ce que ça vous parait intéressant, est-ce qu’y a des choses à rajouter, est-ce que vous avez envie de parler d’autres choses ? S : Non c’est bon, vous avez des questions ? Q : Ben les questions j’pense que j’en ai eu pas mal. (Rires) Q : Mais d’après ce que vous me dites y’a vraiment eu deux périodes, y’a eu une période où vous alliez beaucoup au CASOUS et où vous aviez pas vraiment de médecin et vous trainiez un peu et puis maintenant j’ai l’impression c’est plus facile d’avoir un médecin identifié pour vous, vous ça vous parait plus simple. S : C’est meilleur aussi de chercher un truc par soi même et d’arrêter tout le temps de baser sur le CASOUS, tout le temps le CASOUS, après le CASOUS ça aide bien mais voilà, c’est tout le temps se baser là-dessus, y’a plein de monde qui va au CASOUS, ce docteur là franchement il consulte beaucoup de personnes, à un moment donné les rendez-vous on va pas les avoir du jour au lendemain, avant quand on va au CASOUS on pouvait avoir des rendez-vous du jour au lendemain parce qu’on était dans des situations difficiles aussi, en plus les gens ils savaient que je faisais de T à M (noms de villes), je faisais que ça donc les choses étaient un peu plus faciles aussi pour moi avec le CASOUS que de voir les médecins généralistes parce que les médecins

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généralistes extérieurs ils savaient pas trop ma situation alors que le CASOUS il connaissait bien la situation. Q : Et que les généralistes connaissent pas votre situation c’était compliqué pour vous ? S : C’est pas question que c’était compliqué pour moi mais ils se doutent de rien, on arrive là chez un médecin, il se doute de rien, si on a rendez-vous demain ben vas y c’est rendez-vous demain, si on n’a pas de rendez-vous vous voyez ce que je veux dire mais tandis qu’au CASOUS, au CASOUS ils vont chercher vite fait un rendez-vous pour vous donner un jour mais au plus vite possible voilà au plus vite possible, vous pouvez avoir un rendez-vous le lendemain, voilà pour moi c’était plus facile, parce que consulter un médecin dehors vu la situation dans laquelle j’étais, j’étais pas bien même si j’étais motivé mais j’étais pas bien tout le temps franchement, je pensais mal mais j’étais obligé de penser mal vu la situation dans laquelle j’étais, voilà. Q : Ok, merci beaucoup. S : De rien. Q : C’était très gentil de participer à l’entretien.

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Entretien N°17 (E17) Homme, 40 ans, Français, Foyer Colbert, CMU en attente, avait eu RG+Complémentaire, puis CMU+CMUc. Lieu d’entretien : Halte de jour, le 04/07/2012, 15mn Particularité : rupture sociale il y a environ, 2 ans. La santé n’est pas une priorité à la rue. Q : Question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : Euh…j’ai 40 ans. Q : D’accord, où est-ce que vous habitez là actuellement ? S : Euh pff à gauche à droite, Q : Ouais. S : Mais là aujourd’hui je suis à Colbert. Q : D’accord. S : De l’autre côté de la rivière, de la Loire. Q : Depuis longtemps vous êtes là bas ? S : Euh non, ça fait, ça fait même pas trois nuits. Q : Trois nuits, d’accord. Et avant vous étiez où ? S : Dans la rue. Q : Dans la rue, vous avez beaucoup dormi à la rue ? S : Ouais. Q : C’est chez des gens ? S : Non, non, dans la rue, je connaissais personne, je suis venu ici au pif comme ça. Q : Ca fait pas longtemps que vous êtes à Tours ? S : Non pas longtemps. Q : D’accord, vous êtes de quelle nationalité ? S : Française. Q : Française. S : D’origine Marocaine. Q : D’accord mais vous êtes né en France et vous avez la nationalité française ? S : Oui basanée, accessoirement mat de peau. Q : Oui, oui non mais ça de toute façon, c’est juste dans mon étude pour connaître… S : Oui je comprends (rires). Q : …En fonction des parcours de demande d’asile si besoin. S : Oui non mais je prends pas les choses de ce côté-là. Q : Ca marche. Au niveau Sécurité Sociale vous avez quoi ? S : Euh, avant j’étais bien pff, j’avais une Sécurité Sociale, une assurance vie, mutuelle et tout ça, là j’ai plus rien. Q : Pas de CMU ? S : Là je suis en train de faire faire la CMU. Q : D’accord, ok, ça marche… S : Enfin les deux extrêmes tu vois la vie comme elle est faite. Q : Passer de…

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S : Hier j’avais tout euh parce que y’a…voilà, fallait me protéger, protéger mon bien mais quand on perd tout on s’en fout même de la santé. Q : Oui ben oui, c’est pour ça que je suis là, c’est parce que justement, des fois rattraper sur la santé ça peut permettre de se remettre… S : Ouais c’est de l’argent, la santé c’est de l’argent aujourd’hui. Q : La dernière fois que vous avez vu un médecin quand est-ce que c’était ? S : Euh…ça…deux ans. Q : À ce moment là vous aviez la CMU, vous aviez une couverture ? Vous aviez quelque chose ou pas ? S : Euh…oui, oui j’avais, un an ou deux ans (murmures), oui, oui j’avais la mutuelle et tout, j’avais une Sécurité Sociale. Q : Depuis deux ans vous n’avez jamais vu de médecin ? S : Non Q : Ni aux Urgences, ni en ville, ni nulle part ? S : Non jamais, je touche le bois (rires), heureusement ça. Q : Donc le médecin que vous avez vu, c’était un médecin que vous connaissiez déjà ? Comment ça s’est passé ? S : Euh…ben c’était mon médecin référent. Q : Un médecin que vous connaissiez déjà ? S : Non, non mais c’était le médecin référent là. Q : Médecin traitant ? S : Traitant voilà. C’est pas référent, c’est traitant c’est ça le terme et après voilà. Q : D’accord, ça c’était dans votre ancienne vie, c’était dans un moment… S : Oui, oui, oui exactement, exactement. Q : Vous l’aviez… S : C’était un check, euh comment on dit déjà, checker, check out, check up. Q : Ouais check up. S : C’est un contrôle. C’était un contrôle là. Q : D’accord. S : C’était presque un médecin de famille tout ça. Q : Vous le connaissiez depuis longtemps ? S : Oui. Q : Et ça allait bien et à ce moment là… S : J’avais rien du tout. Q : Ouais. S : Après c’est la chute et puis ben voilà. Q : Et donc depuis la chute vous avez pas revu de médecin ? S : Euh, pfff, voilà le médecin ça fait plus partie de mes priorités finalement, une fois dans la rue c’est, le plus important quand on se lève c’est…c’est de pouvoir manger, de pouvoir euh… trouver de l’argent pour se bourrer la gueule, oublier un petit peu nous, c’est une sorte (claque des doigts) de…pfff, on se sort de quelque chose, j’assume, j’assume mais au bout d’un moment tu dis c’est bon. Je veux boire et après on s’en fout ah ça va faire mal par exemple le foie et tout ça on s’en fout, on s’en fout finalement parce que bon, t’as plus rien à perdre. Ça c’est des moments vides mais après c’est la raison qui rattrape tout, après c’est normal, je suis à jeun, je me brosse les dents mais y’a un laisser aller. Q : Est-ce que c’est important pour vous d’avoir un médecin régulier ? S : Pas du tout.

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Q : Pas du tout, n’importe quel médecin ? S : Pas du tout alors là même les médecins je m’en fous aujourd’hui. Q : Pourquoi c’est pas important ? S : C’est pas important, la vie et la mort pour moi c’est pas important. Q : Vous pensez que n’importe quel médecin vous… S : Le médecin il est là, il est pas là c’est son problème, c’est plus le mien. Q : Imaginons… S : Parce que c’est psychologique si tu veux, je veux dire je suis pas psychologue hein mais parce que c’est plus ma priorité le médecin, la priorité pour moi c’est…c’est des cases, c’est ça le, le, le, on se forge un personnalité à travers quand on traverse des moments difficile et tout ça donc y’a des priorités et donc pour moi par exemple je suis dans la démarche de trouver un logement, euh un travail alimentaire dans l’urgence, après le médecin et tout ça, il viendra après mais aujourd’hui je m’en fous, il est là, il est pas là mais Dieu merci parce que j’ai une bonne santé je pense. Q : Imaginons demain vous avez les papiers CMU qui viennent donc vous avez tout ça qui est en règle et donc y’a pas de soucis de ce côté-là et vous avez besoin de voir un médecin, demain matin, comment est-ce que vous faites pour voir un médecin, est-ce que vous savez? S : Aucune idée. Q : Non ? S : Parce que j’ai jamais géré des situations telles, le truc, avant je me posais même pas la question, j’étais bien j’avais pas de problèmes. Q : Si demain vous êtes pas bien, à qui est-ce que vous allez vous adresser par exemple ? S : Je sais pas. Q : Comment vous allez faire pour trouver un médecin ? S : Honnêtement je sais pas, au pif comme ça le hasard. Q : Le hasard, sur quoi ? (Silence) S : C’est irrationnel, je sais pas peut-être j’irai à l’hôpital, peut être euh… Q : L’hôpital c’est les Urgences ? S : Voilà les Urgences. Q : Vous y allez vous-même ? S : Non, non j’y ai jamais été mais bon, si jamais j’ai un pépin peut être j’irai là bas, peut être j’irai pas. Q : Hum S : Je sais pas. Q : Si vous avez envie de voir un médecin généraliste, vous dites il faut quand même que je vois un médecin, est-ce que, comment vous allez faire pour trouver le médecin ? S : Ah j’ai pas de critères de sélection. Q : Non pas de critères de sélection mais simplement savoir où est-ce qu’y a un médecin ? S : Ah oui mais là, alors là euh, alors là je sais même pas parce qu’avant j’avais un médecin de famille donc le médecin de mon ex qui était mon médecin traitant et tout ça donc j’étais très bien entouré finalement donc je ne savais pas comment faut faire pour avoir accès ou un numéro d’un médecin sauf quand je passe dans la rue je vois médecin machin mais bon je sais pas.

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Q : D’accord, plus la plaque sur la porte ? S : Exactement je pense que c’est ça. Q : Demander à quelqu’un par exemple un numéro ? (Silence) S : Euh non, honnêtement non parce que bon…pour moi un médecin c’est quelqu’un de digne de confiance, ça c’est ma définition à moi, ils ont une euh…euh…ils ont une euh comment on appelle ça, la déontologie, ils ont ce serment là et tout ça donc pour moi c’est l’être humain qui est là au service de l’autre, d’autrui donc pour moi je fais confiance et j’espère pas que j’aurai besoin dans l’immédiateté d’un médecin parce que sinon ça serai encore une galère, ça serai galère mais après c’est des gens à qui je fais totalement confiance donc là-dessus y’a pas, je fais pas de choix jamais, quand on voit un médecin c’est la première porte, le premier c’est le… Q : Est-ce que ça vous est arrivé d’avoir une mauvaise expérience avec un médecin ? S : Jamais. Q : Non ? S : Moi jamais, jamais. Q : Qu’est-ce qui est facile ou qu’est-ce qui est difficile pour aller voir un médecin généraliste en ville ? S : Mais c’est ça j’ai jamais géré euh avant j’étais bien, j’avais tout, je faisais pas attention, je suis remboursé, pas remboursé, je me suis jamais posé la question euh raison de plus si j’étais toujours remboursé à 100% je sais pas quoi, parce que j’avais… une mutuelle, je paye beaucoup d’argent parce que bon je me protège un truc comme ça mais…je sais pas, j’ai jamais eu de problèmes et tout ça, j’ai fait des voyages, Dieu sait que j’ai été au Maroc plusieurs fois et ça c’est très bien passé avec les gens. Q : D’accord S : À T (nom d’une ville) jamais, je connaissais pas mais j’ai été, je suis en train de faire faire ma CMU ou à l’Hôpital Bretonneau avec une assistante médicale ou sociale je sais pas les termes. Q : C’est vous qui êtes allé la voir, comment vous avez fait pour trouver cette assistante sociale à Bretonneau ? S : Ben moi j’y suis allé comme ça. Q : Comme ça ? S : Ouais là j’étais dans le jardin l’après midi je me suis dit bon quand même je vais poser des questions sur ma santé on sait jamais, si un jour j’étais bien aussi. Q : Et comment vous avez fait, vous êtes allé à l’accueil et vous avez demandé, comment ça s’est passé ce jour là ? S : Ah ben je suis allé, j’ai demandé à l’accueil, j’ai demandé un service là que spé…enfin qui s’occupe uniquement des gens soit dis…dit en situation difficile, les défavorisés je sais pas quoi, je sais plus euh…euh…sans ressources mais c’était PASS mais je me rappelle plus ce que ça veut dire PASS. Accès quelque chose comme ça santé, sanitaire je sais pas quoi. Q : Et vous avez vu un médecin aussi à la PASS ? S : Non, non, non, non j’ai vu une assistante sociale qui était là, on a rempli ce qu’il fallait remplir et puis voilà. Q : Elle est-ce qu’elle vous a aidé pour trouver un médecin, elle vous a parlé de ça ou pas, non c’était juste sur la CMU ?

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S : D’abord c’est sur le plan administratif, elle a dit d’abord il faut que je rentre dans le circuit, ça serait l’inscription au système et après on parlerait, elle a dit donc le jour où vous allez recevoir un courrier pour ça vous revenez me voir et à ce moment là on pourra discuter peut être. Q : D’accord, donc elle peut être elle pourra vous conseiller. S : Je pense, je pense que ça marche, désolé je peux pas vous aider plus. Q : Ah non mais c’est très bien moi je trouve ça très intéressant votre parcours. S : Là vous faites face à des gens un petit peu…comment dirai-je euh pff…qui passent des moments ou c’est, à la fois on est…je pleurniche pas attention mais c’est des gens qui ont, c’est une exception, soit ils ont pas de logement, soit on est dans des abris de fortune soit dans des, y’a des soirs ou tu appelles le 115 et après y’a personne au bout, c’est saturé, y’a personne et tout ça et on passe le truc, le truc, donc psychologiquement on est fragilisé mais bon en même temps…c’est paradoxal ce que je vais dire, on est fragilisé (rire discret) en même temps ça nous donne parfois la force d’y aller de l’avant, de dire bon je veux repartir sur un nouveau pied avec une nouvelle analyse, une nouvelle prospective et introspective parce que y’a des moments on se dit, ah j’assume moi aussi une partie de tout ça, c’est vrai parce que moi j’assume mon cas hein je parle pas des autres mais moi j’assume et puis voilà quoi, y’a une partie. Q : Qu’est-ce que ça veut dire pour vous avoir une CMU, qu’est-ce que ça veut dire, à quoi ça sert ? S : Pour moi c’est une protection voilà. Q : C’est une protection ? S : C’est une protection. Q : Ca vous protège de quoi ? S : Si jamais j’ai un pépin au moins sur le plan euh…santé ou un truc comme ça voilà, peut être ça me permettra d’avoir un accès direct pour voir un médecin. Q : Hum-hum. S : Et peut –être là au moment. Q : Pourquoi peut être ? (Silence) S : Parce que j’espère être en bonne santé, je veux pas y aller, j’espère parce que c’est pas…on mange un p’tit p…psychologiquement y’a beaucoup de stress et tout ça mais je veux garder la bonne santé en moi pour ne pas, pour être capable d’attaquer d’autres problèmes. Q : Hum-hum. S : Voilà c’est tout ce que je peux dire sur (rire discret). Q : Non mais c’est intéressant, on a discuté de pas mal de choses. Ca marche, est-ce que vous avez quelque chose à rajouter, est-ce que vous avez envie de parler d’autres choses, par rapport à l’accès aux médecins, savoir si c’est facile, si c’est difficile, comment on peut faire pour améliorer les choses ? S : Euh, pfff (silence) honnêtement euh pff… pour améliorer les choses je sais pas donc euh…mais j’ai fait pas mal d’organismes et tout ça et y’a toujours un médecin à la disposition au moins un jour par semaine et c’est déjà pas mal. Q : Hum-hum.

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S : C’est déjà pas mal. Q : Vous êtes déjà allé voir un médecin comme ça, un médecin associatif ? S : Non, non, non, non là j’avais un rendez-vous avec une assistante sociale donc il m’a proposé là, ben elle m’a dit que j’ai droit enfin si je veux je peux voir un médecin et même un psy mais là j’ai pas besoin, c’est pas le moment. Q : A la PASS ? S : Au CASOUS Q : D’accord, vous êtes déjà allé au CASOUS ? S : Ouais c’est là ou y’a mon assistante sociale qui suis mon dossier tout ça. Q : D’accord, c’est pas à l’hôpital Bretonneau, c’est au CASOUS ? S : L’hôpital Bretonneau c’est pour la CMU. Q : D’accord. S : Et le CASOUS c’est pour tout ce qui est logement, démarches administratives euh… Q : Mais vous savez qu’y a un médecin au CASOUS ? S : Oui c’est aujourd’hui qui m’ont appris que par exemple tout ça. Q : Ok, bon ben très bien, ça marche ben merci beaucoup. S : Merci à vous et bonne continuation. Q : C’est gentil, merci S : Et je suis toujours à la disposition. Q : (rire) C’est très bien ça m’aide.

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Entretien N°18 (E18) Homme, 46 ans, Français, Adoma, CMU et CMUc Lieu d’entretien : Halte de jour, 04/07/2012, 17mn Particularité : Demande d’asile acceptée, a eu suivi en médecine générale, maintenant ne sait pas trop comment consulter. Q : Question S : Sujet Q : Quel âge vous avez ? S : J’ai, j’aurai 47 ans au mois d’août, j’ai 46 ans. Q : D’accord, donc là vous habitez, vous m’avez dit au foyer comment il s’appelle ? S : Adoma. Q : Adoma d’accord, ça fait longtemps que vous êtes à Adoma ? S : Euh, depuis début… début mai. Q : D’accord, mai, juin, juillet, ça fait deux mois quoi ? S : Hum-hum Q : Et là vous me disiez que vous alliez sortir pour aller à droite à gauche ? S : Voilà, à droite, à gauche parce que j’ai un projet qu’on me donne cet appartement là. Q : C’est quoi l’appartement ? S : Euh c’est…ici, là HLM. Q : D’accord, vous êtes de quelle nationalité ? S : Je suis française mais d’origine congolaise. Q : D’accord Congo RDC ou… S : RDC. Q : De quel côté ? S : Euh Kinshasa. Q : D’accord à l’ouest ? S : Euh Kinshasa c’est au centre, je sais même plus. Q : Parce que moi j’y étais mais j’étais au Nord Kivu. S : Ah oui Kivu c’est à l’Est. Moi je suis Kinshasa. Q : D’accord. S : Mais qu’est-ce que vous avez, qu’est-ce que vous avez fait là bas ? Q : Je travaillais avec Médecins sans frontières. S : Ah bon d’accord. Q : Pendant 6 mois en tant que médecin au nord de Goma. S : Ah bon d’accord, bon ben je connais, je connais, ma mère elle est d’origine de Goma. Q : Elle parlait le swahili ? (Je ana sema kiswahili ? en langue swahili) S : Elle parlait bien le swahili. (Étonné) Q : Et vous non. S : Et moi non (rire), elle parlait bien le swahili ma mère. Q : Vous vous êtes de nationalité française, vous êtes né en France ? S : Nationalité, naturalisé. Voilà. Q : Et initialement vous étiez donc congolais ? S : Au Congo voilà. Q : Donc vous avez les deux nationalités ?

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S : Non j’ai que une seule parce que moi mon passeport je l’avais… laissé à l’OFPRA quand j’étais réfugié. Q : D’accord vous êtes passé par la demande d’asile ? S : Voilà oui. Q : Vous avez des enfants ? S : Non, Q : Non, d’accord. La dernière fois que vous avez eu un problème de santé, qui est-ce que vous avez consulté ? S : Euh, j’ai passé tout mon bilan de santé, il est nickel pour l’instant il n’y a rien donc je vais passer là parce qu’il faut que je passe, il faut que je prenne quoi la, la vaccination pour l’hépatite B mais sinon tout est bon. Q : La dernière fois c’était quand, la dernière fois que vous avez vu un médecin ? S : Euh…pff, rien du tout mais sauf le bilan de santé. Q : Qui est le médecin qui vous suit ? S : Euh…vous savez que ça fait deux mois que je suis ici, donc ici pour l’instant je n’ai pas de médecin. Q : Est-ce que vous avez vu un médecin ici à T (nom d’une ville). S : Non Q : Votre bilan de santé c’est qui ? S : C’est euh, pff, je vais vous montrer c’est un endroit là bas, rue J (nom d’une rue) je sais pas quoi là…attendez je vais vous montrer…comment que j’oublie tous les papiers. Q : Ca c’est depuis que vous êtes à T (nom d’une ville) que vous êtes allé là ? S : Oui, oui, oui, c’est une prise de sang, c’est gratuit hein. Q : Y’a un médecin aussi ? S : Y’a des médecins là bas aussi. Q : D’accord, vous avez vu un médecin aussi quand vous avez fait le bilan de santé ? S : Oui, oui, oui, oui il m’a dit que tout est bon, et puis il faut que j’aille, il faut que je fasse des vaccinations. Tout est bon pour moi tout est bon. Q : Ok. S : Voilà pour l’hépatite b… Q : Comment est-ce que vous êtes allé dans ce lieu ? S : Ben je passé rue J (nom d’une rue) je sais pas… Q : Ca me dit quelque chose. S : Voilà, voilà. Non mais je passais comme ça, j’ai regardé j’ai dit ah prise de sang, c’était écrit sur un panneau et puis je suis entré, je suis entré comme ça, c’est au hasard. Q : Personne ne vous en a parlé ? S : Non Q : Vous marchiez dans la rue et vous avez vu… S : Voilà, voilà. Q : Et c’était gratuit ? S : Gratuit, je sais que…vous, vous aussi vous êtes médecin, vous pouvez le savoir, voilà c’est un endroit gratuit, tout le monde peut passer euh, vous pouvez faire des examens. Q : C’est là où il y a le dépistage ? S : Dépistage voilà.

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Q : C’est ça, c’est le centre de dépistage ? S : Voilà, voilà, voilà, voilà, voilà, c’est là, voilà mais pour l’instant je suis arrivé au mois de mai, pour l’instant je n’ai pas de médecin trai…euh traitant. En fait je vais habiter ici, à partir d’ici je vais trouver médecin traitant. Q : Avant, avant d’arriver à T (nom d’une ville) vous étiez où ? S : A D (nom d’une ville). Q : A D (nom d’une ville), à D (nom d’une ville) vous aviez un médecin qui vous suivait ? S : J’avais un médecin, oui, oui. Q : Pendant longtemps ? S : Je suis resté 10 ans là bas, voilà, j’étais dans un appartement, je suis sorti et là Adoma, Adoma après je vais venir ici. Q : Le médecin que vous aviez à D (nom d’une ville) vous l’avez trouvé comment ? S : Euh ben c’est le médecin du quartier. Q : D’accord, le bouche à oreille ? S : Non, non, non, non c’est le médecin du quartier. Q : Oui mais vous comment est-ce que vous l’avez trouvé ? S : Ben j’avais une fièvre et on m’a donné bon j’ai regardé et j’ai dit ah il y a un médecin à côté, bon comme c’était un médecin à côté, j’ai pris les papiers, j’ai signé, j’ai dit bon voilà ce sera mon médecin traitant. Q : Qu’est-ce qui était bien chez ce médecin ou dans son cabinet ? S : Tout, non tout était bien, il était accueillant, non tout était bon voilà. Q : Qu’est-ce qui était pratique pour vous, intéressant pour vous ? S : Elle était à l’écoute. Q : D’accord, ça c’est important ? S : Voilà. Elle était à l’écoute, quand je lui parle elle comprend et puis voilà, c’est une personne qui me connaît déjà, elle connait mes défauts, mes qualités. C'est-à-dire que c’est un médecin quand tu arrives, elle sait déjà tes défauts, elle sait déjà tes qualités et elle comprend vu que ce n’est pas un médecin comme ça au hasard (rire), elle sait que bon voilà mon patient si il me dit ça c’est qu’il a ça puis elle me donne tout ce que je veux. Q : Est-ce qu’y a d’autres choses qui étaient importantes chez ce médecin là ? S : Non, non, non, non. Q : Du fait qu’il soit à côté par exemple, la proximité avec lui ? S : La proximité c’est déjà bien mais c’est quelqu’un qui comprend aussi. Q : Ca suffit pas la proximité ? S : Voilà, voilà c’est quelqu’un qui comprend. Bon là je suis maintenant à T (nom d’une ville), il faut que je trouve un autre médecin mais… Q : Non mais ce qui m’intéresse déjà c’est à D (nom d’une ville) comment vous fonctionniez à ce moment là et après on va parler de Tours. S : Non mais c’était une dame âgée, elle a de l’expérience. Q : Elle était sur rendez-vous ? S : Euh oui, parfois sur rendez-vous, parfois non. Q : Vous préfériez avec ou sans qu’est-ce que vous avez préféré ? S : De quoi ? Q : Vous alliez tout le temps sans rendez-vous ou vous alliez tout le temps… S : Euh…j’allais pas tout le temps parce que moi je suis en bonne santé.

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Q : Oui, mais quand vous aviez envie vous choisissiez un rendez-vous ou vous alliez sur les plages libres ? S : Non non sans rendez-vous. Q : Vous préférez le sans rendez-vous ? S : Ouais, sans rendez-vous, j’arrive comme tous les patients puis voilà, et puis chacun son tour (…). Q : D’accord, pourquoi vous préférez sans rendez-vous ? S : Non mais euh, la maladie ça peut arriver euh…au hasard, c’est pas moi qui choisit que je sois malade, ça peut arriver ou j’avais trop bu, j’ai fait des malaises ça peut arriver que je me sens pas bien dans ma tête, que je déprimais un petit peu, ça peut arriver que j’ai mal au ventre, après je dis ah je vais aller voir un médecin et puis j’arrive, elle elle est là, elle me reçoit, voilà. Q : D’accord, ça a toujours été facile de la voir ? S : Facile. Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec des médecins généralistes ? S : Non. Q : Avec elle, avant, après ? S : Non, non, non, non, non. Q : Est-ce qu’y a un moment… S : L’accueil est toujours bonne. Q : La relation, est-ce qu’elle est toujours bonne ? S : Ouais, ouais, toujours, toujours, avec des médecins je trouve que ça va, voilà. Il n’y a pas, je n’ai pas eu de problèmes avec des médecins, jamais. Q : Est-ce que, vous m’avez dit que elle elle écoutait et que c’était important, S : Voilà. Q : Est-ce qu’y a d’autres médecins qui écoutent pas par exemple ? S : Oh mais tous les médecins que j’ai vu ça a écouté, parce que elle elle habitait vous voyez comme J (nom d’une ville), j’habitais pas vraiment à D (nom d’une ville), j’habitais à… H (nom d’une ville) c’est une petite commune à côté. Mais quand j’étais à D (nom d’une ville) c’était pareil, le médecin elle écoutait. Q : Parce que vous avez vu une autre médecin à D (nom d’une ville) ? S : Avant oui voilà, voilà parce que j’ai changé de commune, c’est comme D (nom d’une ville), je suis allé à J (nom d’une ville), je change de médecin. Voilà c’est pareil. Q : D’accord, comment vous faites à chaque fois pour trouver un nouveau médecin quand vous déménagez ? S : Oh ben si j’ai des bobos, parfois je me renseigne chez des pharmaciens. Q : Les pharmaciens, eux ils connaissent ? S : Voilà, il est où le médecin dans le coin, médecin untel voilà et puis… Q : Donc les pharmaciens, est-ce qu’y a d’autres gens qui renseignent ? S : Non, non, non, non c’est surtout pharmacien, voilà, non parce que quand t’as des bobos tu vas aller chercher médicaments chez le pharmacien voilà, c’est le pharmacien qui va dire voilà écoutez il y a un médecin dans le coin, c’est tel médecin que tu peux voir. Q : Est-ce que c’est important pour vous d’avoir un médecin régulier, un médecin habituel ?

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S : Oui c’est important, c’est important parce que c’est quelqu’un qui suit ta santé. Q : Et qu’est-ce que ça, du coup ça apporte quoi ? S : Ben ça apporte que une personne qui te connaît, qui connaît tes habitudes c’est quelqu’un qui peut bien te soigner que quelqu’un qui te connaît pas, voyez si j’y vais en urgence je vais dire ah j’ai mal à la tête, ah mal à la tête, bon c’est une urgence mais ton médecin il peut te dire ben écoute reste là, moi je prends une ordonnance parce que il connait bien ton dossier, il connait bien tes bobos. Voilà, médecin traitant c’est très important quand urgence que quelqu’un qui te connait pas parce que il suit ton dossier dès le début jusqu’à la fin, voilà. Q : Du coup c’est mieux ? S : C’est mieux voilà, parce que j’avais des problèmes de cœur c’est elle qui m’a dit euh bon voilà allez voir tel cardiologue, c’est elle qui m’a envoyé là bas et puis le cardiologue tout le temps il suit mon dossier chez mon médecin traitant, j’avais mal au ventre il m’a dit aller voir tel médecin, on m’a fait le…comment on appelle, coloscopie hein, voilà donc le médecin traitant généraliste, elle t’écoute et puis elle t’oriente, va voir telle personne, va voir telle personne et puis le résultat c’est elle qui a tous les dossiers…, vous comprenez ? Q : Elle centralise ? S : Voilà, voilà, voilà, donc le médecin traitant c’est quelqu’un, il faut pas choisir n’importe quel médecin parce que un médecin traitant c’est comme ta famille il connait bien tes bobos, c’est comme un garagiste (rire) il connaissait il va dire y’a les bobos là et y’a les bobos là et je vais l’orienter là et je vais l’orienter là, vous voyez ? Q : Hum-hum. S : Voilà, j’ai mal au ventre, c’est elle qui m’a envoyé bon il faut aller voir quelqu’un pour qu’on te fasse coloscopie, t’as quoi, bon j’avais mal aux yeux, aller voir euh…comment on dit déjà ? Q : L’ophtalmo. S : Voilà, tout c’est elle donc elle a tout mon dossier voilà. Donc un généraliste c’est quelqu’un qui est plus important que un médecin traitant comme ça d’urgence non, généraliste c’est quelqu’un d’important. Q : D’accord, alors on a vu déjà un peu comment vous faisiez avant, imaginons demain matin vous vous réveillez et vous vous sentez pas bien, vous avez besoin d’avoir un avis médical, comment est-ce que vous faites ? S : Pour l’instant je n’ai pas de médecin ici. Q : Donc concrètement demain matin vous vous réveillez, vous avez besoin… S : Je vais faire le 15. Q : Vous faites le 15 ? S : Voilà. Q : D’accord, vous savez qui est-ce que vous allez avoir au bout du 15 ? S : J’en sais rien. Q : Ouais. S : Dès que j’aurai un logement fixe, alors si je suis malade je sais que je vais habiter ici alors là je vais chercher un médecin dans le coin. Q : D’accord, le 15 qu’est-ce qui va vous dire ?

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S : Le 15 c’est l’urgence voilà. Si je suis malade ben je fais le 15, et puis le 15 ils vont m’envoyer un médecin d’urgence et puis voilà quoi. Q : Et si le 15 vous dit ben on peut pas vous emmener aux Urgences, faut que vous trouviez un médecin autour de chez vous ? S : Et ben là je vais trouver un médecin. Q : Comment vous faites ? S : Ben je regarde, pharmacien dans le coin, s’il y a un panneau médecin, ah j’entre et je dis ben j’habite à côté. Q : D’accord n’importe lequel ? S : N’importe lequel. Q : Vous pouvez aller voir n’importe quel médecin ? S : N’importe lequel médecin. Q : D’accord. (Silence) Q : Donc là vous m’avez dit en couverture santé vous aviez ? S : J’ai tout, j’ai la CMU et puis j’ai la Sécurité Sociale. Q : Qu’est-ce que ça signifie pour vous ? S : Oh c’est déjà une aide essentielle. Q : Une aide à quoi ? S : Une aide pour la santé, voilà, sans la couverture malade, ben écoute moi je n’ai pas l’argent pour avancer les soins puis j’ai rien, je touche les ARE bientôt je serai au RSA donc j’ai rien du tout, vous voyez. Sans cette aide là voyez on est paumé Q : Ca vous permet de faire quoi ? S : Ben ça me permet quand même d’être assuré que si il m’arrive quelque chose, j’ai des soins gratuits. Q : D’accord. (Silence) Q : Est-ce que y’a d’autre chose que vous pouvez faire ? S : Pfff non. Q : Donc vous avez des soins gratuits dans l’urgence ? S : Dans l’urgence. Q : Uniquement ? S : Uniquement. Q : D’accord, un suivi par exemple on peut pas faire…. S : Ah non, non, non pas de suivi, ça dépend y’a des gens qui ont la psychologie faible, ça c’est des suivis, moi de toute façon je souffre pas du tout, si ça m’arrive ben d’avoir un malaise, mal au ventre, mal à la tête, j’appelle le médecin et je dis j’ai ça qui m’arrive, à l’occasion… Q : Est-ce que vous savez, la CMU est-ce que vous savez quand la renouveler, la prochaine fois ? S : Oui, oui je sais que c’est en 2013, au mois d’avril. Q : Comment vous faites pour renouveler la CMU ? S : Ben je pars à la…Sécurité Sociale. Q : Et après là bas vous demandez… S : Je dépose tous les papiers et ils ont déjà un contact avec la CAF, un contact avec tout. Q : Hum-hum. S : Et ils regardent si j’ai droit ou pas. Si j’ai droit, il me dit t’as droit, et si je n’ai pas droit, il me dit tu n’as pas droit.

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Q : Est-ce que ça vous est arrivé d’avoir un délai entre deux CMU, de pas renouveler assez trop par exemple ? S : Oui, oui ça peut arriver aussi, oui, ça peut arriver. Q : Qu’est-ce qui se passe dans ce cas là ? S : Ben t’as ton attestation de la Sécurité Sociale, voilà. Q : Parce que si on renouvelle pas assez vite, du coup on peut… S : Non, non, non, non ça prend du temps mais quand même ils peuvent te dire voilà prend cette attestation qui prouve que t’as les droits, que ton dossier est en cours, on est quand même des gens civilisés, il n’y a rien de mal, voilà. Q : Ok, bon ben très bien, est-ce que vous avez d’autres choses à rajouter sur le médecin ? S : Non, non, non. Q : Sur la facilité, qu’est ce qu’on peut faire pour améliorer l’accès vers le médecin ? S : Oh mais non, mais moi je trouve que la relation entre le médecin et le patient il est cool, ça va, ça va, ça va, moi je trouve pas de problèmes même là je peux appeler un médecin, c’est des gens qui sont préoccupés, il y a du monde, ça va prendre un peu de temps mais tu verras qu’il va arriver. Si je fais le 15 il y aura le SAMU qui va arriver, donc je trouve que les relations entre euh…personne avec un médecin c’est toujours nickel, vive la France. (Rire) Q : Bon de ce côté-là c’est bien. S : Il n’y a pas de problèmes. Q : D’accord. S : Voilà, que ce soit la Police, que ce soit tout, tout cela, tu appelles, ils arrivent, voilà. Q : Ok. S : Merci beaucoup Monsieur. Q : Et ben très bien, ben moi j’ai fini, ben merci. S : Merci, merci beaucoup. Q : Ca m’a beaucoup aidé. S : Ok, merci.

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Entretien N°20 (E19) Homme, 19 ans, Français, SDF (Halte) Lieu d’entretien : Halte de jour, 04/07/2012, 17mn Particularité : La discussion est partie sur le mode du tutoiement avant l’entretien enregistré. Q : Question S : Sujet Q : Alors, t’as quel âge ? S : 19, euh qui vient lundi là. Q : D’accord, ça te dérange pas si on se tutoie ? S : Non vas-y ça me plait. Q : Ca marche, là actuellement t’habites où ? S : A la halte. Q : A la halte la journée, et la nuit t’es où, tu dors où par exemple ? S : Oh je squatte dans les halls. Q : Tu squattes dans les halls ? S : Ouais. Q : Depuis longtemps ? S : Depuis…ben moi j’étais au bus et après il a fermé, je me suis squatté un hall en fait. Q : D’accord, ok, t’as une couverture sociale ? S : De survie ? Q : Non une couverture, une assurance maladie, tu dis que tu avais la CMU ? S : Ah ouais, le truc complémentaire là, la mutuelle ou je sais pas quoi, ouais, ouais, je l’ai ça. Q : Ca marche. Ta nationalité ? S : Française. Q : Ok. Bon t’as pas d’enfants ? S : Non. Q : Bon la dernière fois que tu as eu un problème de santé, qui est-ce que tu as consulté ? (silence) S : Personne parce que j’ai attendu que ça passe, et j’avais mal je sais pas, j’avais attrapé je sais pas quoi, ça devait être enrhumé ou quoi je sais pas donc j’ai attendu que ça passe. Q : Et la fois d’avant, la dernière fois que tu as vu quelqu’un c’était qui, un médecin ? S : Oh là là. La dernière fois ? Q : Hum. S : Ouais c’était pour… Q : Qu’est-ce qui s’est passé là au niveau du poignet ? S : J’ai eu un accident en voiture. Q : Et du coup t’es allé voir qui ? S : Euh… Q : Là tu me montres des points de sutures, ça a été fait où ça ? S : Euh à l’Hôpital de C (nom d’une ville) Q : D’accord, c’est toi qui as appelé les secours, comment ça s’est passé ?

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S : Hein ? Q : C’est toi qui as appelé les secours ? S : Oh pas vraiment en fait, ben ça s’est passé qu’en fait c’est moi qui conduisait en fait, je conduisais sans permis, donc quand y’a eu l’accident je me suis cassé quoi, et quand les flics ils m’ont trouvé quatre jours après, en fait j’avais l’os qui était tourné et je le sentais pas trop. Q : C’était cassé dedans ? S : Non, non c’est une luxation en fait, la boule elle s’était retournée sur elle même, et donc du coup ils m‘ont obligé à faire une radio et sur la radio on a vu en fait… Q : Et donc c’est les flics quand ils t’ont retrouvé… S : Ouais, ils m’ont obligé à faire une radio. Q : A aller aux Urgences ? S : Ouais, ouais, ils m’ont emmené aux Urgences. Q : ça marche (interruption par le patient qui demande un café à un autre résident du foyer) Q : Donc c’est eux qui t’ont amené aux Urgences ? S : Ouais. Q : Depuis les Urgences, t’as pas vu un médecin ? S : Non. Q : Non, c’était quand ça ? (Silence) Q : Tu te souviens, là C (nom d’une ville) c’était quand, environ ? S : Y’a un peu plus d’un an. Q : Y’a un peu plus d’un an. S : Un an et trois mois. Q : D’accord. Donc depuis un an et trois mois, depuis l’hiver 2011 quoi, t’as pas vu de médecin du tout ? S : Non, juillet 2011. Q : Juillet, oui, oui excuse moi. S : C’est pas grave. Q : Donc t’as pas vu de médecin du tout depuis ce moment là ? S : Non. Q : Est-ce que t’as déjà vu en ville un médecin généraliste à Tours où ailleurs ? S : C’est quoi ça ? Q : C’est les médecins qui sont en ville, dans un cabinet individuel, c’est pas à l’hôpital. S : Euh non, non mais pour dire j’ai pas trop de problèmes de santé en ce moment. Q : Est-ce que t’es déjà allé au CASOUS par exemple ? (Silence) S : Euh non parce que j’ai, mon assistante sociale elle est ici. Q : Hum, non mais y’a des médecins aussi. S : Ouais, oui, oui. Q : Ou au CPO ? S : Ben je sais mais…à quoi ça sert d’aller voir un médecin alors que je suis pas malade, je suis en pleine santé ?

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Q : Mais de temps en temps, même si c’était y’a deux ans ou y’a trois ans, y’a un moment ou tu te sentais pas bien et t’es allé voir un médecin, non t’as pas l’impression ? S : Ouais je m’en rappelle plus, ouais si peut être sûrement. Q : Ce qui m’intéresse c’est vraiment savoir, d’habitude, enfin est-ce que t’as une habitude de voir un médecin. S : Non j’ai vraiment pas l’habitude. Q : Donc pas l’habitude, donc ça fait au moins, ça fait très longtemps parce que avant l’accident déjà tu y étais allé, tu te souviens ? S : Ouais si peut être deux ou trois fois. Q : Tu te souviens d’un médecin ici à Tours par exemple ? S : À Tours non j’ai jamais vu de médecin. Q : C’était où alors, c’était à C (nom d’une ville) ? S : C’était à C (nom d’une ville). Q : Ouais, c’est qui le médecin que t’avais vu alors ? S : Oh là là le nom, c’est un nom, c’est un nom euh Renanzyakis euh Rastapopoulos, Renanzyakis un truc comme ça. Q : Il était, il habitait où lui, il était en ville ? S : Ouais il avait son cabinet en ville. Q : Tu l’avais vu plusieurs fois ? S : Deux fois. Q : Comment est-ce que tu l’avais trouvé ? S : Hein ? Q : Qui est-ce qui t’en avais parlé, comment t’as fait pour le trouver ? S : Euh je me rappelle plus, je sais plus. Q : T’avais été accompagné pour aller là-bas ou tu… comment ça s’est passé, tu te souviens pas ? S : Non je me rappelle plus, ça fait un moment, non j’ai jamais eu vraiment de problème de santé à part ça non. Q : Est-ce que avoir un médecin régulier, un médecin qui te connaît enfin qui te suit depuis longtemps, est-ce que c’est important pour toi ou pas ? (Silence) S : Ben dans le sens non parce que de toute façon qu’il me connaisse ou pas, un médecin ça reste un médecin, donc après si je vais le voir c’est vraiment que j’en ai besoin, je vais pas aller le voir pour lui faire ça va, j’ai un petit peu, j’ai un peu mal au doigt là, voilà quoi. Q : Hum, hum. Mais est-ce que c’est important d’aller voir toujours le même médecin, où est-ce que on peut prendre n’importe lequel ? S : Non, ouais, n’importe lequel, peut être qu’il a les diplômes on s’en bat les couilles (… ?). Q : D’accord. S : Après je sais pas (en marmonnant) Q : Imaginons demain matin, tu te lèves dans ton hall là etc., tu te sens vraiment pas bien, y’a vraiment, t’as besoin de voir un médecin et tu peux pas faire autrement. S : Ben je demanderai à S (nom d’un professionnel du foyer) Q : Tu viens ici ? S : Ouais voilà et puis je verrai ce que je peux faire avec S (nom d’un professionnel du foyer).

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Q : S (nom d’un professionnel du foyer) il te demande quel médecin tu veux voir ? S : Je sais pas celui qui peut trouver le plus vite. Q : D’accord, c’est toi qui appelles, c’est lui qui appelle, comment ça se passe ? S : Ben je sais pas, ça s’est jamais arrivé encore. Q : Ouais, toi prendre le téléphone, appeler pour prendre un rendez-vous c’est quelque chose que tu as l’habitude de faire, ça te dérange ou pas ? S : Euh, j’ai l’habitude de le faire mais pas forcément pour les médecins quoi, style mission locale des trucs comme ça. Q : D’accord, c’est souvent toi qui prends les rendez-vous ? S : Ouaaais enfin souvent non parce que j’y vais plus souvent, ils me cassent les couilles là. Q : D’accord. S : Y’a un moment de ça je parle. (Silence). Non mais… d’un côté je sais pas parce que normalement vous savez y’a un carnet qui vous suit dans la vie et moi je l’ai plus mon carnet de santé, il s’est fait la malle. Q : Après ça peut se refaire. S : Ah ouais, vous refaites un carnet de santé vous ? Q : Ben les vaccinations c’est ça le plus important. S : Je me rappelle plus, je fais pas les vaccinations, y’a un moment…Non mais… Q : Pour aller en ville par exemple S (nom d’un professionnel du foyer) il trouve un rendez-vous avec un médecin, comment vous allez faire pour y aller ? Est-ce qu’il vous accompagne …. S : Non j’y vais à pied. Q : A pied ? ou en bus enfin vous connaissez. S : Au pire en bus. Q : Des fois y’a des médecins qui ont des rendez-vous et des fois y’a des médecins qui prennent sans rendez-vous, est-ce qu’y a quelque chose que vous préférez ? S : Sans rendez-vous parce que moi attendre 10 minutes dans la salle d’attente ça me fait péter un plomb. Q : C’est compliqué pour vous d’attendre dans la salle d’attente ? S : Ah je peux pas mais pas que chez les médecins, euh la salle d’attente partout, je peux pas. Q : Ouais, est-ce qu’il y a d’autres choses qui sont compliquées chez le médecin ? S : Ouais…y’en a un gros…le fait que il va vous parler pendant 10 minutes avec des phrases, des mots que vous comprenez pas pour en fait vous dire en deux mots que vous êtes malade, je l’ai remarqué c’est vrai, ils vont vous sortir les mots, jamais vous entendrez ça et puis ils vous parlent, vous comprenez rien à ce qu’ils vous parlent, c’est chiant non c’est chiant. Q : Ouais, ouais. S : C’est chiant parce que du coup ça vous fait perdre 10 minutes juste pour vous dire ben vous êtes malade. Q : Est-ce que vous avez déjà eu des expériences négatives avec un médecin ? S : Ouais. Q : Qu’est-ce qui s’est passé ?

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(Silence) S : Un fois j’étais ben on en parlait pour un vaccin et ce con en me piquant il a dérapé l’aiguille elle était ressortie par l’autre côté comme ça (en montrant), oh là là, bon quand même les médecins des fois ça peut déraper. Q : Est-ce qu’y a eu d’autres choses, est-ce que des fois ça s’est mal passé avec un médecin ? S : Non, non j’ai pas de souvenir. Q : Ou un médecin qui vous a pas plu, il s’est passé quelque chose et ça vous a pas plu ? (Silence) S : Ben non après à part (… ?) Q : Hum S : Mais ça c’est tous les médecins. (Silence) Q : Ca c’est un truc qui vous gêne beaucoup la salle d’attente, attendre ? S : Ah non je peux pas. Q : Au niveau relationnel avec le médecin, ça se passe toujours bien ? S : Je vous dis j’en ai pas vu tant que ça dans ma vie non plus quoi. Q : Hum. (Silence) S : Mais ouais dans l’ensemble ouais, (… ?) à part le con qui m’a charcuté avec son aiguille. Q : Là vous avez la CMU, c’est ça c’est ce que vous m’avez dit ? S : Ouais. Q : Ouais, c’est quand le prochain renouvellement ? S : Euh je sais pas, je sais plus. Q : Ouais. S : Faudrait que je regarde dans la lettre. Q : Est-ce que vous savez comment faire pour la renouveler ? S : Ouais, je demande à mon assistante sociale, elle me le fait. Q : Vous l’a trouvez où l’assistante sociale ? S : Ici c’est celle de la Halte. Q : D’accord. S : Enfin maintenant elle est plus ici, elle est à la Halte du midi. Q : ça vous est déjà arrivé entre deux CMU d’avoir un moment ou vous n’aviez plus d’assurance ? S : C’est à dire ? Q : Plus de CMU parce que vous avez mis un peu de temps à refaire la nouvelle par exemple ? S : Non je crois pas. Q : D’accord. A chaque fois vous arrivez à refaire la nouvelle assez vite. S : Ouais, dans l’ensemble ouais. Q : Qu’est-ce que ça signifie pour vous la CMU ? S : Ben…on est remboursé complémentaire. Q : Hum-hum. S : Enfin vous m’avez compris, on est remboursé quoi. Q : Ouais, comment ça se passe ? S : Oh je sais pas. Q : On est remboursé ça veut dire que vous payez et vous êtes remboursés après ?

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S : Ouais je crois, un truc comme ça, je sais pas, j’ai jamais fait attention. Q : D’accord, c’est payant quand on a une CMU ? S : Je sais pas, parce que depuis j’ai la CMU je suis pas allé au médecin. Q : On vous a pas expliqué à quoi ça servait la CMU ? S : Non, on m’a juste dit que j’avais la CMU, bon c’est bien. Q : Si vous avez besoin d’aller chez le médecin ou prendre un médicament, vous avez pas du tout à payer, vous avez pas à avancer. S : Ah ouais. Q : Ce qui permet enfin grosso modo pour vous c’est gratuit, alors c’est pas gratuit parce que le médecin il se fait payer après par la Caisse… S : Ouais la Sécu. Q : Mais ça lui permet, voilà la Sécu, ça vous permet vous d’aller voir n’importe quel médecin et de rien avoir à payer. S : C’est bien ça. Q : ça vous étiez pas au courant ? S : Non. Q : D’accord. S : Non je croyais qu’on payait et qu’après on était remboursé totalement. (Quelqu’un entre) S : Oh là y’a la patronne ! Voix de femme : La patronne non. (Elle sort) Q : Ca marche, bon ben on a fait un peu le tour, est-ce que t’as d’autres choses à rajouter, sur l’accès aux médecins, est-ce que ça te semble compliqué ? S : Non, si l’accès aux médecins ben si comme je l’ai dit le seul truc compliqué c’est la salle d’attente. Q : Ouais ça c’est vraiment. S : Ah je peux pas, ah non c’est horrible, vous êtes là assis en troupe. Q : Hum, comment on pourrait faire ? S : Ha j’sais pas, de ne pas aller aux médecins. Q : Ca c’est l’idéal ! (rire) mais quand on en a besoin c’est toujours ça le problème ? S : Eh ben j’appelle, je prends rendez-vous pour telle heure, moi je m’en bat les couilles qu’il y ait quelqu’un ou pas, moi c’est à telle heure j’ouvre la porte, je rentre dedans c’est bon c’est l’heure, allez passer si vous voulez, poussez pas un peu, vous avez rendez-vous à 10h30 à 11h30 vous y êtes toujours, Madame excusez moi c’est quand je vais pouvoir passer, ah non c’est bon. Q : Vous avez fait la déclaration médecin traitant, vous savez quand on a la CMU il faut déclarer un médecin ? S : oh j’sais pas c’est pas moi qui l’ai fait ça, c’est mon assistante sociale. Q : D’accord, bon ben merci beaucoup. S : De rien. Q : C’était intéressant. S : Puis ben ouais…et vous faites ça à tout le monde. Q : Je fais ça a beaucoup de gens, j’en suis pour l’instant à 18. S : Oh là là il faut aller à combien ? Q : Y’a pas de chiffres, c’est quand j’en ai marre. S : Ah ouais, et ça te sert à quoi ça en fait ?

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Q : Ben après le but c’est de regarder…, je vais tout rédiger, je vais remettre les paroles etc. et après je vais essayer de comparer entre pour trouver des points communs et des points qui sont pas communs et après essayer de comprendre l’accès aux soins et de voir ce qu’on peut proposer pour améliorer, comment on peut faire pour faciliter l’accès vers le médecin. S : Ben moi la seule chose qui faut améliorer c’est la salle d’attente. Q : ca marche, je ferai attention à ça, je te remercie. S : Moi je veux que dans les salles d’attente quand j’arrive y’a plus d’attente. (rires)