Faire son journal télé pour apprendre l'anglais

7/29/2019 Faire son journal télé pour apprendre l'anglais

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Hélène Catsiapis

Faire son journal télé pour apprendre l'anglaisIn: Communication et langages. N°64, 2ème trimestre 1985. pp. 34-40.

Résumé

Les lecteurs de Communication et langages se souviennent probablement de la relation par Hélène Catsiapis d'une expérience

d'apprentissage de l'anglais par des jeux de théâtre. L'auteur, poursuivant ses recherches, nous présente ici une pédagogie

originale et stimulante : la confection de journaux télévisés en langue anglaise en tant que méthode d'apprentissage de cette

langue.

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Catsiapis Hélène. Faire son journal télé pour apprendre l'anglais. In: Communication et langages. N°64, 2ème trimestre 1985.

pp. 34-40.

doi : 10.3406/colan.1985.1690

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/colan_0336-1500_1985_num_64_1_1690

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_colan_24

http://dx.doi.org/10.3406/colan.1985.1690



http://dx.doi.org/10.3406/colan.1985.1690

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_colan_24



FAIRE SON JOURNAL TÉLÉ

POUR APPRENDRE L'ANGLAIS

par Hélène Catsiapîs

Les lecteurs de Communication et langages se souviennent probablemente la relation par Hélène Catsiapis d'une expérience d'apprentissage e. l'anglais par des jeux de théâtre1. L'auteur, poursuivantses recherches, nous présente ici une pédagogie originale et stimulante la confection de journaux télévisés en langue anglaise en tantque méthode d'apprentissage de cette langue.

Les élèves apprennent les langues vivantes en confectionnant desvidéo-cassettes.Hélène Catsiapis, maître de conférences docteur es Lettres, Chefdu département de langues vivantes de l'Institut industriel duNord (cité universitaire scientifique de Lille), a mis au point,avec la collaboration de ses collègues, professeurs d'anglais, d'allemand, d'espagnol et de russe, une méthode linguistique originalequi consiste à faire tourner et enregistrer par leurs étudiants desvidéo-cassettes en langues étrangères. Cette méthode nouvelleest particulièrement bien adaptée à des élèves ingénieurs, maiselle peut être également utilisée pour d'autres publics.

UNE SITUATION LOCALE PROPICEL'Institut industriel du Nord est. une grande école scientifique

2 qui recrute ses élèves par le concours national commun aux"g Ecoles centrales. A l'issue de deux ou trois années passées en

£> classes de mathématiques supérieures et spéciales, les élèves* reçus au concours ont le choix d'intégrer l'Ecole centrale de

f Paris, l'IDN de Lille, ou l'Ecole centrale de Lyon. A leur arrivée* à l'IDN, ils doivent étudier l'anglais ou l'allemand obligatoire-o ment, l'espagnol ou le russe, comme langues facultatives, s'ils2 souhaitent mettre à profit leurs trois années dans le Nord de la| France pour acquérir l'usage d'une langue supplémentaire.

e 1. Numéro 47, 3e trimestre 80.



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Lorsque le département de Langues vivantes a été créé en 1980,les professeurs ont, d'emblée, décidé de renouveler l'intérêt deleurs étudiants, qui arrivent sur le campus universitaire de Villeneuve d'Ascq, parfois blasés, lassés par des méthodes pédagogiqueslus ou moins cohérentes dont l'ennui le dispute à l'inefficacité. Les -élèves sont convaincus, souvent à juste titre, quel'anglais, l'allemand s'apprennent, en menant joyeuse vie, l'été,en Angleterre, aux Etats-Unis, en Allemagne, et que les cours delangues à l'école sont inutiles. Les enseignants de l'IDN ont voulubriser cette vision, trop traditionnelle du cours de langues, etoffrir à leurs élèves ingénieurs une pédagogie nouvelle parfait

ementdaptée à leurs besoins professionnels. Un ingénieur français est un « créateur » qui doit parler l'anglais couramment, etsi possible, de surcroît, une deuxième langue. Au lieu de « déverser » des cours conventionnels à ces jeunes futurs « inventeurs », les professeurs de langues de l'IDN demandent maintenant leurs élèves de créer de manière concrète un « objet parlant » l'anglais, l'allemand, l'espagnol ou le russe. Pour obtenirson diplôme d'ingénieur, chaque élève devra présenter sur vidéocassette une sorte de programme télévisé en langues étrangères,entièrement confectionné par lui.Convaincus qu'on ne peut pas former les ingénieurs du XXIe siècle, avec les méthodes du XIXe, la direction et les professeursde langues ont équipé l'école des derniers. appareils vidéo. Chaque salle — et chaque enseignant a sa propre salle — possèdeun magnétoscope et une caméra permettant les enregistrementspendant les cours. Et surtout pour rendre possible les travauxhors de l'école, la direction a offert au club vidéo des élèves unéquipement vidéo complet. Etant donné la proximité de la Grande-Bretagne, avec une assurance spéciale, les élèves peuvent, durant le week-end, emporter le matériel de l'autre côté de laManche pour aller faire des reportages authentiques en anglais.L'école s'est équipée également d'une antenne appropriée permettant de capter les émissions télévisées de la BBC, sourced'information et de documentation inépuisable pour les étudiants.

Un élément humain de grande importance a contribué à la créationde la méthode : la présence durant le week-end, sur le campusuniversitei-e désertique de Villeneuve d'Ascq, de la plupart desélèves de l'IDN. Originaires de toute la France, et parfois mêmede l'étranger, les étudiants — à part les Nordistes et les Parisiens — sont contraints, pour des raisons géographiques et financ ières évidentes, à passer le week-end à la résidence universitaire, où l'on essaie de se distraire avec les faibles moyens

du campus. Alors, la confection d'une vidéo-cassette en anglais,allemand, espagnol ou russe, est pour de futurs ingénieurs brillants, mais dans l'immédiat désargentés et désœuvrés, une possibilité non négligeable de tuer le temps.



Pédagogie

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Enregistrement en langue étrangère d'une vidéo-cassette traitantde la réparation d'un moteur.

LA METHODE : FAIRE DE LA VIDEOII suffit de posséder un magnétoscope VHS; un récepteur detélévision, une caméra vidéo, deux spots lumineux et des vidéocassettes, de bonne qualité, mais d'usage standard. Il n'est pas

nécessaire d'avoir un coûteux studio d'enregistrement insonorisé.L'IDN n'en possède pas. Il n'est pas, non plus, nécessaire d'avoirun technicien durant les enregistrements. L'IDN n'en possèdepas. La manipulation des appareils est extrêmement facile, e,tne nécessite aucune formation technique particulière. Les professeurs de langues — des femmes dans leur quasi-totalité —utilisent leur équipement vidéo avec autant d'aisance que leurfour électrique ou leur machine à laver. Il faut cependant confessern avantage : en cas d'« imprévu » technique, les élèves ingén ieurs sont là IPour mettre en marche les appareils il suffit d'appuyer sur trois

boutons pour le magnétoscope, un pour le téléviseur, deux pourla caméra qui, avec son micro incorporé, enregistre simultanémenton et images.

Qu'enregistre-t-on ? Pour éviter la lassitude, il faut varier lesséquences. La caméra peut successivement filmer un élève expc-sant en anglais, ou en toute autre langue, un fait quelconque, puismontrer un graphique, un tableau qui sera commenté en voixoff, puis encore une photo, une diapositive parfaitement reproduite sur l'écran de télévision, et enfin des extraits de film,illustrant le thème choisi et apportant un divertissement de mouvement et de vie. Le succès technique de la vidéo-cassette dépendra de la variété harmonieuse de ces divers éléments. Il fautessentiellement éviter les séquences trop longues qui, quellequ'en soit la qualité, engendrent l'ennui, cet ennui mortel, viceirrémédiable de la pédagogie et- de l'art.



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Enregistrement d'un journal télévisé pendant un cours de langues.

LE JOURNAL TELEVISEII se prépare et s'enregistre durant les cours (de deux heuresconsécutives avec 15 élèves au maximum). Il s'agit d'un travailde longue haleine qui s'étale sur quatre ou cinq leçons (de 8 à

10 heures) et qui représente un enrichissement linguistique d'unerare valeur. Avant l'enregistrement proprement dit, la préparationoit être longue et minutieuse. Il est en tout premier lieurecommandé de projeter aux étudiants un journal télévisé authentique, anglais ou américain. Captant la BBC, l'IDN peut facilement présenter les TV news. D'autre part la chaîne CBS américaine loue en France ses actualités télévisées. Les écoles peuvent se les procurer sans difficulté. Elèves et professeurs doiventalors, dans le moindre détail, analyser les thèmes, les techniques,tous les éléments de langage réutilisables. Ensuite vient la distribution des rôles. Comme dans tout groupe un « leader » se

dégage naturellement : il sera le présentateur qui dirigera lejournal. Il faut alors donner aux élèves revues et journaux anglais,américains (ou allemands, espagnols, russes), de façon à ce qu'ilschoisissent leur rubrique, leur thème, leur reportage. Il y a lesnouvelles politiques, les faits divers, les arts, le sport, la bourse,le bulletin météorologique, et puis, les interviews/ l'invité dujournal, etc. Chaque élève écrira minutieusement en anglais sonintervention en réemployant nécessairement les structures linguistiques nouvellement apprises dans la presse. Le professeurcorrigera le texte de toutes les séquences avant leur passage àl'écran. Puis, vient l'enregistrement proprement dit. Un élève

filme ses camarades. Une ou deux répétitions sont nécessairespour corriger les fautes de comportement, de prononciation, etc.

Le produit fini, surtout lorsqu'il est réussi, donne aux étudiants



Pédagogie

l'impression d'en sortir linguistiquement très enrichi étant donnéla variété du vocabulaire utilisé. Le travail est d'autant plusagréable qu'on y met d'humour, et d'enthousiasme.

Les spots publicitairesUn travail analogue peut se faire sur les spots publicitaires. Ilsuffit, au préalable, de faire une analyse rigoureuse de la publicité télévisée à la BBC et des revues anglaises et américaines.Cette étude en anglais des techniques publicitaires, grâce àl'imagination et l'humour des étudiants donnent généralement debons résultats quelquefois même étonnants.Dans ces travaux collectifs, le rôle du professeur est déterminant.l ne doit pas avoir peur de se lancer dans la bataille del'inconnu. Il lui faut à la fois diriger et laisser une liberté absolueaux élèves. La tâche est ardue mais exaltante.

EXEMPLES DE TRAVAUXNDIVIDUELSL'intérêt de la méthode réside surtout dans la confection, horscours par chacun des élèves, de vidéo-cassettes dans la languede leur choix, traitant un sujet de leur choix. C'est une sorte dedissertation,. de mémoire, de monographie sur support vidéo. La

variété des sujets à exploiter est, en fait, illimitée. De manièregénérale, les étudiants se groupent à deux ou trois pour enregistrereur cassette. L'un filme lorsque l'autre parle. Et le plussouvent, ils ne sont pas trop de trois pour accomplir les innombrables astuces techniques nées de leur imagination débordante.Le but des élèves est d'obtenir des effets originaux à partir demoyens matériels finalement fort limités.

Les sujets traités se divisent en 9 catégories : science, technique, rt, cinéma, littérature, musique, civilisation, sport, tourisme. Parmi les meilleurs résultats obtenus on peut citer desvidéo-cassettes sur : la fabrication du béton, le forage au Texas,la crise de l'énergie, le moteur à réaction, les étoiles, l'énergiesolaire, la mécanique d'une automobile, mais aussi l'art grec,l'art flamand, la peinture anglaise, les icônes russes, la peintureespagnole, les cathédrales gothiques, le jazz, Léonard Cohen, ladentelle de Calais, les relations de la ville de Calais avec lesAnglais, les orateurs de Hyde Park, les pubs londoniens, les cafésparisiens, le whisky, le charbon en Lorraine, les ballons dirigeables,e football américain, le tennis, l'image d'Epinal, le bilinguisme en Alsace, les films de Fred Astaire, l'œuvre de StanleyKubric, Tex Avery, la réparation d'une vieille bicyclette, les « pro

menade-concerts » de Londres, Shakespeare, New York, Moscou, Leningrad, Madrid, Lille, Berlin, etc.

La réalisation d'une vidéo-cassette d'une demi-heure — certainsélèves passionnés présentent jusqu'à une heure d'enregistré-



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ment — demande, en moyenne, de 20 à 50 heures de préparation.Il est touchant, par exemple, de voir des élèves passer une nuitentière dans un garage glacial, par — 5°, à filmer les caprices •d'un vieux « tacot » dont ils expliquent, en anglais, les secretsde réparation. Un élève capable de traiter ainsi un sujet quelqu'il soit, avec aisance et rigueur en langue étrangère, saura,le moment venu, utiliser couramment cette langue dans sa vieprofessionnelle. Ces étudiants de très haut niveau s'efforcentd'exécuter des vidéo-cassettes de grande qualité, car entre euxla compétition amicale est rude. Ils n'oseraient jamais se pré

senter mutuellement des travaux médiocres ou simplement ordinaires. Le jeu consiste à étonner les camarades, et... à éblouirle professeur.

LA PEDAGOGIE DE L'ENTHOUSIASME

La méthode est créativeElle a le don de passionner les élèves qui ne « subissent » plusles cours traditionnels : ils «font» au lieu de «recevoir». Ilest beaucoup plus intéressant de « fabriquer » de l'anglais, del'allemand, de l'espagnol ou du russe sur un sujet que l'on aime,

que d'avoir à assimiler, bon gré mal gré, un discours étrangersur un thème choisi par un professeur. Le cours de langue parcréativité vidéo est devenu une joie pour les étudiants. Cetteméthode illustre la pédagogie de l'enthousiasme sans laquelleil ne peut y avoir de véritable humanisme.

Elle est à la fois collective et individuelleLes travaux personnels des élèves permettent de structurer, laclasse,. de révéler les talents cachés, talents parfois menés, chezces jeunes ingénieurs, à un niveau quasi professionnel. Ici chaque étudiant se trouve valorisé aux yeux de ses camarades, en

offrant sur la cassette le meilleur de sa personnalité : le sportif,le musicien, le philosophe, le photographe, l'artiste, le cinéaste,le financier, le politicien, le mécanicien prennent mieux leurplace dans le groupe grâce à leur originalité mise ainsi en évidence.

De tels travaux favorisent la communication linguistique, si difficile à établir. Se connaissant mieux, les élèves parviennent àparler mieux et plus au cours de langue.

Elle est à l'image de la réalitéEntreprise à la fois manuelle, technique, intellectuelle, artistiqueet linguistique, cette méthode consiste à concevoir un ensemblecohérent, mais également varié, pour éviter la lassitude. Elleenseigne aussi la ténacité indispensable à l'achèvement de touttravail.



Pédagogie

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Elle est le meilleur enrichissement linguistiqueLa caméra vidéo est le juge le plus sévère qui ne pardonne rien.Si par négligence ou indulgence généreuse mais coupable, leprofesseur de langues laisse parfois passer une faute — il estdes cas où il est impossible de tout corriger : le sens, la grammaire, la nature des sons, l'accent tonique, l'intonation — lacaméra, elle, est impitoyable. Alors, l'élève, ne serait-ce que parorgueil, s'autocorrigera nécessairement, ne voulant pas imprimerdéfinitivement sur la cassette et présenter à ses camarades m oqueurs des erreurs qu'il pouvait supprimer. Les étudiants sont

donc obligés de répéter leur texte.

Cette méthode peut être employée par tous, à tous les niveauxII est indéniable que tous les établissements scolaires et d'enseignement supérieur seront de plus en plus équipés de ces appareils. Le magnétoscope et la caméra deviendront vite d'un usageaussi courant que le magnétophone. Au collège, au lycée, l'élaboration d'une vidéo-cassette en langues vivantes sur un thèmechoisi par les élèves pourrait être l'ouvrage d'une année, uneheure par semaine, au cours de travaux dirigés.De même les universités devraient offrir la possibilité, aux étudiants qu i Je souhaiteraient, de confectionner en langue étrangère — ou éventuellement en français — une vidéo-cassettesur un sujet traitant d'art, de littérature, ou de civilisation. A laBBC, the Open University présente les meilleurs exemples deces cassettes culturelles, diffusées aux étudiants de formationpermanente. Les téléspectateurs reçoivent ainsi des programmesmontrant, par exemple; la vie des sœurs Brontë, l'art grec autemps de Périclès, le roman de Flaubert, Madame Bovary, desleçons de chimie, de biologie, de jardinage ou même de maquillage. Il est admirable de constater combien en Grande-Bretagnee sérieux académique

et*le plaisir de l'image télévisuelle

savent flirter avec une aisance inhabituelle mais parfaite. Sansvouloir atteindre la perfection professionnelle de la BBC, tousles étudiants français devraient. être en mesure de produire leurspropres travaux sur vidéo-cassette.

Hélène Catsiapis

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