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Dossier réalisé par la compagnie Java Vérité

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Dossier réalisé par la compagnie Java Vérité

FANTASIOTexte Alfred de Musset

Mise en scène Julia Vidit

Avec Guillaume Clémencin, Charlotte Corman, Benjamin Guillard, Joël Helluy,Nathalie Kousnetzoff, Marc Susini, Jean-Baptiste Verquin

Scénographie Thibaut FackLumières Nathalie Perrier

Costumes Valérie Ranchoux[Du 14 au 18 avril]Mardi et vendredi 20H30Mercredi et jeudi 19H00Samedi 17H00

Durée : 1H30

[Rencontre avec l’équipe artistique le jeudi 16 avril à l’issue de la représentation]

Contact : Pauline Salvi 03 81 88 90 74 / [email protected]

FANTASIO

Note d’intention

Fantasio – 1833

La période de 1830 est, disons-le franchement, très proche de la nôtre : les hommes se

questionnent dans un entre-deux siècle flottant.

Musset réussit à assumer ses doutes par la voix de Fantasio, qu’il fait voyager à vue dans toute la

littérature.

D’un côté, l’auteur construit une intrigue classique très théâtrale, faisant appel à des ressorts

connus et variés (travestissement, mariage forcé, roi, princesse et autres figures) sachant ainsi

stimuler la magie familière du geste scénique.

De l’autre, il va entraîner au cœur de cette intrigue Fantasio, profondément mélancolique, doutant

de son époque, de la portée de ses actes et usant de prose et d’alcool pour croire décrocher la lune.

L’incursion de cet homme dans le monde -ici très théâtral- nous questionne sur notre capacité à

agir – et comment ? – au sein d’une société de plus en plus codée et verrouillée.

Ce crissement entre ″un théâtre qui avance″ et ″un théâtre qui doute″ fait toute la modernité de la

pièce parce qu’elle pose, dans sa forme même, la question de l’engagement.

Le cynisme et la fantaisie du rôle- titre feront trembler le monde de la Cour jusqu’à déclencher la

guerre, démolir le décor.

Ne restera que la porte ouverte du théâtre, et le plateau dévasté...

Comment trouver sa place aujourd’hui ? Sous un masque ? Est- il obligatoire pour ne pas être saisi

par la peur, la distance, l’inertie, la colère, ou la dépression ?

Cette pièce, méconnue, est un terrain de jeu excitant pour la jeune compagnie Java Vérité.

Julia Vidit

SommaireSYNOPSIS RAPIDE, HISTOIRE OBLIGE p 4CETTE PIÈCE DOIT ÊTRE MONTÉE AUJOURD’HUI p5DU THÉÂTRE QUI AVANCE ET QUI SE QUESTIONNE p8JULIA VIDIT p11

SYNOPSIS RAPIDE, HISTOIRE OBLIGE !

Un bon gros roi annonce le mariage forcé de la princesse avec le Prince de Mantoue. Ainsi en veut la

raison d’état et le maintien de la paix entre les peuples.

Fantasio, un bourgeois de Munich, menacé de prison pour dettes, boit et discourt de la vie avec

Spark.

Saint-Jean, le Bouffon du roi, vient de mourir. Pour échapper à ses créanciers, Fantasio décide de

prendre sa place.

Il rencontre la Princesse et empêche son mariage sans le vouloir, pêchant, pour rire, la perruque du

Prince au bout d’un hameçon. Prince qui n’est autre que l’aide de camps qui avait pris sa place pour

permettre à son maître d’observer la Princesse.

Le Prince de Mantoue, déshonoré par l’épisode de la perruque, qui n’était même pas sur sa tête,

entre en fureur et s’enfuit, déclarant la guerre au Roi. Le mariage est annulé.

Fantasio est emprisonné.

La Princesse le libère et l’invite à rester Bouffon. Ce qu’il refuse en s’éclipsant…

CETTE PIÈCE DOIT ÊTRE MONTÉE AIJOURD’HUI

Musset et moi : nés trop tôt ou trop tard

Dans son poème Rolla, Musset confesse « je suis né trop tard dans un siècle trop vieux ». Comme

l’Empire pour Musset, notre époque est tristement « postrévolutionnaire». Musset étant l’enfant de

1789, comme je suis la fille de 1968, nous avons été éduqués dans une forme de désillusion.

Désillusion qui creuse les failles et nos doutes, parfois jusqu'à l’apathie, mais rend d’autant plus

urgentes la quête et l’action créatives.

Musset précise « j’ai l’impression d’appartenir à un monde qui refuse sa propre vérité ». Impression

que je partage : la mondialisation équitable, inscrite dans le projet d’un développement durable,

n’est- elle pas une grande utopie? N’en n’avons- nous pas la preuve sur la question de

l’environnement, par exemple?

Musset, comme moi, s’inquiète d’une époque qui va consciemment dans un mur.

Nous cherchons tous deux du sens, en écrivant ou en montant Fantasio.

En 1830 autant qu’en 2007, le théâtre partout et nulle part

Vers 1815 et jusqu'à l’apogée du drame romantique dans les années 40, le théâtre en France connaît

une grande crise, qui se traduit par une période de creux et un éclatement des genres.

On s’accroche à la tragédie classique au Français déserté, Musset écrira « j’étais seul ce soir au

Théâtre Français… ».Le boulevard du Crime donne des mélodrames et des scènes historiques, mais il

n’y a pas de renouveau ou de dominant. La bataille d’Hernani d’Hugo en 1829 montrera la difficulté

du public et des auteurs dits classiques à accepter la nouveauté.

Musset est tiraillé entre une désir de modernité et son amour pour le théâtre classique.

En tant que jeune metteur en scène, mes doutes sont aussi nombreux que la variétés des

propositions présentées sur nos scènes. Formée en tant qu’actrice au Conservatoire, j’ai abordé

autant de façon d’entrevoir le jeu que de pédagogues. Le temps du Maître, tel que Vitez pouvait le

représenter, est révolu. Cette pièce permet d’assumer et de sublimer cette période de transition.

Fantasio, pièce audacieuse et ignorée

C’est l’échec de « La nuit vénitienne » à la Comédie Française, qui décide Musset à éditer « Fantasio»

dans le recueil « Spectacle dans un fauteuil » et non pour la scène.

Influencé par les romantiques allemands, Hoffmann en particulier, il décide de construire sa pièce

sur le modèle du conte fantastique, mais sa construction se fera en réalité beaucoup plus complexe :

de fait, l’écriture épouse tous les doutes de Musset, qui finit, à travers Fantasio, par explorer tous

les théâtres. Secoué par Shakespeare qu’il découvre, habité par la tragédie classique et Marivaux, il

est aussi séduit par certains aspects du drame.

Musset n’a pas conscience de la modernité de ce mélange improbable, et il fait répondre à Fantasio

lorsque Facio lui demande : « - Que ferons nous de cette belle soirée ? –Tout absolument, hors un

roman nouveau ».

Il y a une grande humilité dans ces propos. Qu’est-ce qui est nouveau ? Comment affirmer son geste

artistique ? Y a-t- il une vérité du spectacle vivant ? A-t-il une portée ?

En tant que jeune metteur en scène, ce voyage à travers tous les théâtres permet de questionner

mon identité artistique, d’affirmer- à travers des ressorts classiques- ma faim de jeu et de théâtre

dans tous les sens du terme, tout en assumant mes doutes face à une quelconque vérité du théâtre.

Il y a de plus en plus de Fantasio, même vieux…

Fantasio ne trouve pas sa place dans le monde. Poursuivi par ses créanciers, il dit assumer une

position en marge de la société, sans avoir d’autre vocation que celle-là.

Il ne veut pas avoir de rôle social. Il veut pouvoir être oisif, attraper la lune, compter jusqu’au jour

de sa mort, lire le monde comme un poème et a recours à l’ivresse pour croire qu’une telle place est

possible. Son mal s’appellerait aujourd’hui, banalement, dépression.

Sa seule fantaisie, sa seule pirouette est de prendre, le temps de se cacher, le costume du bouffon.

Position ancestrale et particulière qui lui permettra de laisser jaillir son cynisme sous le masque du

rire.

Son cynisme deviendra vulgaire quand il défendra l’utilité de la guerre, « nous saurons quoi faire de

nos bras ! », qu’il a lui même déclenché par une bouffonnerie.

Cette posture est très répandue aujourd’hui. Un position extérieure, de jugement, sans aucun

engagement personnel par ailleurs.

Fantasio, de plus, n‘assumera pas ses actes. Il laissera derrière lui, le plateau dévasté, les figures

dans une situation bien pire. Il prendra la porte du théâtre, laissant un champ des possibles : calme,

suicide, joie, fuite, accident, chance, crime ou inertie et silence…

Les rôles sociaux et les pouvoirs en place

Les figures de la pièce trouvent aisément des analogies à l’heure actuelle. La princesse pourrait être

une institutrice qui s’engage pour faire avancer les méthodes d’enseignement contre une machine

plus puissante qu’elle. Fantasio pourrait être un rmiste qui a fait le choix délibéré de l’être, refusant

le monde du travail, venant remettre en question l’institutrice. Il est question du rôle social endossé

malgré nous, qu’on l’accepte ou pas.

L’intrigue, elle, met en valeur le vide politique ambiant, le manque de pensée politique. Le mariage

forcé de la princesse montre qu’il n’y pas de réelle volonté politique à faire la paix.

Le sacrifice d’une princesse est-il suffisant et nécessaire pour maintenir la paix entre les peuples ?

Ou alors une paix fragile, puisqu’en arrachant la perruque du Prince (qui n’est pas le Prince) en

public, Fantasio met dans une telle fureur l’homme d’Etat déshonoré, qu’il refuse le mariage et

déclare la guerre.

Ces deux épisodes illustrent le manque de mesures concrètes face aux problèmes urgents, et la

prédominance de l’image sur la pensée. L’envol de la perruque au théâtre, comme la chute de Castro

à la télévision produisent des incidents diplomatiques considérables et disproportionnés.

DU THÉÂTRE QUI AVANCE ET QUI SE QUESTIONNE

Sur le plateau nu, Fantasio et ses copainsAprès l’apparition rapide du gros roi proclamant le mariage, qui annonce une fiction classique, cesont des êtres vivant le temps réel et le lieu comme les spectateurs, qui contrediront l’amorce duspectacle. Ils n’arrivent pas à s’amuser sur le plateau, il regarde le théâtre comme il regarde la vie.Ils sont sur le théâtre, refusant d’en faire, et passent leur temps en bavardage et en alcool. Ils ontl’air de ne pas jouer, mais font du bruit et le public les écoute. Au sol, des marquages d’une piècejouée précédemment dans ce lieu.Ils sont habillés comme pourrait l’être un spectateur, seule une pâleur et de subtils détails 19èmeseront le signe de la représentation.Ils regardent avec étonnement l’officier, sorte de guignol à matraque, qui leur demande de rire plusloin, Marinoni qui intrigue ou les porteurs du bouffon défunt qui passent, la princesse en deuil,jusqu’à ce que la fiction les emporte. Le théâtre arrive.

Un décor qui se déplie à mesure que la fiction s’épaissitLa scène vide n’attend que le décor et le spectacle. Pointe un trône fragile (une échelle ?) sur unespace vide, proposant un départ de fiction. Au fil de la discussion entre jeunes, des personnagespassent. La cape du prince devient un chemin, et la scène, le jardin de la cour.Le décor s’épaissit grâce à une structure forme un espace de jeu, les figures prennent place etFantasio devient le bouffon dans un décor qui s’est déployé peu à peu. Socle des intrigues, offrantdes espaces secrets ainsi que des carrefours publics, ce jardin- labyrinthe doit créer un niveau defiction, de rêve, de féerie au point d’emporter les spectateurs dans un monde imaginaire. Apparaîtau bout d’un fil, comme une colombe, la perruque blanche, et aussitôt la fureur du prince démoli ledécor à son paroxysme.Le décor tombe, formant la prison où Fantasio se réveille sans costume. La princesse le libère, luioffre de remplir le costume mais il quitte le tout préférant sa tenue initiale et le plateau nu, devenu,pour les spectateurs, un décor par l’étrangeté de son vide.Je crois que la construction progressive de l’espace est très importante, autant que sa destruction àla suite du paroxysme de l’intrigue.

Un théâtre de figures : costumes classiques retravaillés

Pour camper la petite cour de Bavière, Mussetutilise des figures piochées dans tout lethéâtre classique : ils sont la fiction,l’histoire. Le roi d’opérette avec un grospourpoint et une couronne disproportionnée,découvrant une culotte frêle et pendante.La petite princesse, une femme voulantremplir son rôle de tragédienne, est perduedans sa robe de princesse comme dans unecage dont elle ne peut s’extraire qu’à certainsmoments.La gouvernante qui vit dans ses romans,friande d’intrigues et de rebondissements estune longue herbe verte sortie d’un conte dejardinière, en décalage physique et rythmiqueavec sa maîtresse.Le prince déclamatoire, sorti de Beaumarchaisa une cape de vingt mètres, des cuissardes, ila tous les attributs d’un prince de théâtreclassique, qu’il échangera contre le costumemilitaire trop petit de son aide de camps.

Toutes ces figures, poussées à bout dans descostumes imposants, forment des structurestraduisant le carcan de leur fonction sociale,la démesure de leur implication et de leur jeu.Chaque silhouette doit être une surprise pourle spectateur : il s’agira d’utiliser des codescollectifs, des couleurs très riches et desmatières brutes, qui jouent d’entrée de jeu.

Nous utiliserons les stocks de différentsthéâtres, costumes de Gérard Philippe, entreautres. Les acteurs porteront des costumesretravaillés portant l’histoire du théâtreclassique français créé au 20ième

Le plaisir et le gouffre du jeu

Si ce sont plusieurs théâtres qui se rencontrent, ils doivents’imbriquer sans à-coups, car c’est le même auteur qui a écrit lapièce. Je dois donc créer avec les acteurs un code de jeucohérent sur la globalité de la pièce et faire que seuls des signesprennent en charge les différents univers offerts en si peu detemps. Pour ce faire, il s’agira d’abord de travailler sur le textemême, sa langue, reconnaître les théâtres qui s’y cachentEnsuite, nous travaillerons sur ces registres peut-être même àl’extrême : par exemple, traiter le premier dialogue de lagouvernante et la princesse comme une scène de tragédie.Toutes ces étapes devraient nous mener à trouver la distancejuste entre la pièce et la personnalité de chaque acteur.L’humour dans l’œil pour faire entendre cette représentation dumonde..C’est un plaisir extrêmement jouissif pour l’acteur de pouvoir aucours d’une même pièce assumer le gouffre d’unereprésentation, le vide du plateau, et en même temps depouvoir jubiler de son savoir-faire, de l’envol du jeu et d’undécor fertile. Ce contraste dans le jeu , à mon sens, convoquerale public.

Questionnons les spectateurs après coup

L’incursion d’un jeune homme qui ne veut pasrentrer dans le monde permet de poserthéâtralement la question de la comédiehumaine. Je souhaite emmener lesspectateurs dans l’illusion, l’émotion et leplaisir de la fiction en même temps que dansle réel de le représentation. Ils rentrent dansla fable grâce à Fantasio, et s’attachent auxdifférents fils de l’intrigue. Ce processusenclenché, notre faux héros le désamorceraen refusant la place de Bouffon, laissantbrutalement les spectateurs face à la réalité.Qui a joué la comédie ? Fantasio, refusantd’entrer dans la pièce, y rentrant finalementdéguisé, ou les figures qui agissent selon leurfonction ? Qui a porté le masque ? J’aimeraisque le spectateur croit au théâtre en sortantdu bâtiment. :au théâtre de Fantasio ou àcelui des figures…

JULIA VIDIT

Après une formation classique de hautbois et de danse à Metz, elle suit la formation de l’école de

théâtre du Passage, où elle travaille notamment avec Alexandre Del Perugia, Niels Arestrup et

François Clavier.

Elle poursuit sa formation au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique avec Denis

Podalydès, Alain Françon, Jean-Paul Wenzel, Catherine Hiégel et Dominique Valadié. Elle profitera

de ce lieu pour faire ses premières mises en scène : Tabataba de Bernard-Marie Koltès, La religion

des imbéciles de Henri Monnier et une lecture d’Ecrire de Marguerite Duras.

Depuis sa sortie, elle mène de front son travail de comédienne et de mise en scène. Elle a ainsi joué

sous la direction de Ludovic Lagarde, Christophe Honoré, Victor Gaultier- Martin, Jean-Baptiste

Sastre. Parallèlement, elle créé la compagnie Java Vérité au printemps 2006 et présente une

première maquette dans le cadre des « Plateaux Lorrains » de Fantasio de Musset. En septembre

2007, elle crée avec Emmanuel Matte, Mon cadavre sera piégé, monologue à partir de textes de

Pierre Desproges, en tournée pour la saison 2007/2008, dont la production déléguée est confiée à

Polyfolies. Spectacle repris à partir du 4 mars 2008 au théâtre du Splendid à Paris.

Actuellement, elle prépare la création de Fantasio. Par ailleurs, elle joue dans Le Cid de

Pierre Corneille, mis en scène par Alain Ollivier au TGP et repris en tournée au cours de la

saison 2007/2008.