Farges, La prophétie des papes dite de Saint Malachie et la Grande Guerre

8/3/2019 Farges, La prophtie des papes dite de Saint Malachie et la Grande Guerre

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Farges, Albert (1848-1926). A. Farges. La Prophtie des papes dite de Saint Malachie et la Grande Guerre. (1920). In-16, 64 p..

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~'


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jours, car la preuve d'une prophtie par

sa vrification future est le secret del'avenir. ; rv-d_ilL~:

'

(1) Propyloeum Maii, p. I, app. 4.


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La dissertation de cet auteur est d'ail-leurs-trs courte, Au lieu d'approfondirson:tude, il aime mieux renvoyer le lec-

teur' celle de Carrire sur ce futilesujet . On voit que Carrire a donn leton et fait cole.

Vingt ans plus tard environ (1689),.apparat un troisime adversaire de laprophtie, le P. Mnestrier, savant J-suite comme le prcdent, qui renforcerales arguments plutt ngatifs de Carrireet de Papebroch par une hypothse his-torique, qu'aucun document , n'appuie,mais dont" l'ingniosit sduisante fera lesuccs immense pendant plus d'un sicle.

Il imagine que ces prtendues proph-

ties'des. Papesont t

forgesde toutes-

pices au Conclave de 1590, par un par-tisan du cardinal Simoncolli qui, dureste, no fut pas lu. Ce cardinal tantd'Orv.ieto, en latin Urbs velus, ou Villevieille, le faussaire aurait imagin la de-vis t Ex aniiqUitaie Urbis. pour essayerde

persuaderau Sacr

Collge qu'il taitl'lu, de-Dieu..:: "Nous examinerons plus loin ce qu'il fautpenser de ce naf stratagme, qui d'il-' leurs n'et aucun succs auprs des car-dinaux. Constatons seulement que c'est surcette-fragile hypothse que s'ppi de-

\pis lors faute de rnieux sans doute-f- la critique qui ose reprocher aux par-tisans d la prophtie des Papes de ne

: s'appuyer sur. aucun document7;^Du moins ceux-ci s'appuierit-ls sur


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d'autres faits certains, tels que la rali-sation constante- et ininterrompue d]chaque devise prophtique par chaquepontificat, comme -nous le montrerons

plus loin. Aprs ces trois principaux adversairesde )a prophtie, en est-il paru d'autresvraiment originaux et apportant au dbatquelque argument nouveau? Nous ne lecroyons pas.

L'abb de Vallernont (1649-1721), au-jourd'hui si souvent cit, dans ses El-ments de l'histoire et ses Observations surla prophtie des Papes, ne fait gure querchauffer et mettre en ordre les argu-ments dj vus, et les continuateurs duGrand Dictionnaire historique, de Morerine

.font

quersumer les

critiquesdu

P. Mnestrier.On peut affirmer que la critique la plus

rcente n'y a rien ajout. Elle a, au con-traire, pass au crible toutes les objec-tions contre l'authenticit et la vracitdu clbre document et mis jour leur

caractre tout ngatif et purement con-jectural.^ Et tandis que cette faiblessedans l'attaque ; devenait de plus en plusmanifeste, l'accord rpt et parfois ton-nant de? devises prophtiques avec lesvnements accomplis devenait de plusen plus frappant, v

: /- ;,.;.;.. # .;;{:_Cette vrification^ constante au cours des

sicles ne pouvait/ en effet, manquer de


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produire, tt ou tard un revirement dansl'opinion publique, au moins' dans les es-prits que n'aveuglent pas le parti pris de*l'incrdulit et la ngation de tout surna-turel dans les affaires de ce monde.

Surtout aprs les premiers pontificats duxix* sicle, aprs la ralisation du Pregri-nus apostolieus par Pie VI, de VAquila ra-pax par Pie VI, du Crux.de cruce parPie IX, on vit apparatre des plaidoyers

trs rudits et parfois loquents en faveurde la prophtie si ddaigne. Nous n'enpouvons citer que quelques-uns, ceux quiont le plus contribu cette conversion del'opinion.

Les nouvelles ditions du Dictionnairehistorique, si connu, de Feller, ds le dbut

du xix 6 sicle s'inclinent avec tonnementet respect devant la prophtie qui a pu!i annoncer, tant de sicles l'avance, le Pe-

regrinus apostolieus.En 1810, Henrion, dans son Histoire de

la Papaut, reproduit la prophtie en don-'

naut chaque Pape la devise qui le d- (

signe, et admire. l'accord tonnant entre la plupart d'entre elles et des cir-. constances, remarquables de leur pontificat.

En 1844 et 1849, la Nouvelle Revue deBruxelles, dans des articles trs srieuxet trs tudis, prend la dfense de ,'Iaprophtie contre les objections courantes.

Vers 1866, Chantrel publie son Histoiredes Papes au moyen ge, ,o il souligneles devises prophtiques qui dsignent cer-tains pontificats avec une grande vrit

^et une grande nergie . . i . ^


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* - 22 ; .. V ':-.'. .

"v.Mais . c'est surtout en 1871 que com-

mence la discussion et la rfutation mth-!diques des objections de la critique histo-

rique. L'abb Gucherat, dans les "'numros,du.15 juin au 15 novembre de la.'Revue dumontfe catholique, publie une srie d'ar-ticles trs consciencieux et trs rudits,tirs part avec corrections et additions,en 1873, sous le titre : La propilitio d Msuccession des Papes. \

Ce travail, trs favorablement apprcipar la Civilta 'caltolica, VEcho de Rome-et'la plupart des revues catholiques, inspi-rera et documentera la plupart des auteursqui suivront. Ainsi, Mgr Fvre dans spnhistoire apologtique de la Papaut,Mgr Perriot dans i'Awii du^Clerg (30 bct.

1895) et bien d'autres auteurs, reprendront leur compt la plupart des arguments del'abb Cucherat.

Cependant, M. Ulysse Chevalier, dansson prcieux Rpertoire

' des sources his-toriques du moyen ge (Paris, 1877-1886Vne regardant plus, sans doute, comme f^

tile pareil sujet, consacre un long article la/Clbre prophtie des Papes et ouvreaux chercheurs de nouvelles indicationsbibliographiques.

Ce sont ces, indications qui ont orientles recherches trs rudites et trs ori-ginales du dernier auteur que nous avons

signaler, et qui, jusqu'ici, n'a t d-pass ni mme gal dans cette tude decritique historique.

Nous voulons parler de M. l'abb JosephMatre, ancien -lve du Sminaire fran-


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cais Rome, docteur en philosophie et enthologie, licenci es sciences mathma-

tiques. Ses deux ouvrages principauxsont:

1Z*a prophtie des Pape.s attribue

saint Malachie, gros vol. in-12 de 864 pages,et celui qui le complte : Les Papes et laPapaut, d'aprs la prophtie attribue saint Malachie, vol. in-12 de 768 pages.Us ont paru en 1901-1902 et ont t si

rapidement puiss qu'ils sont aujour-d'hui presque introuvables (1).

Sans partager toutes les thories del'auteur, notamment les relations, notresens trop troites, qu'il suppose entre cetteprophtie et l'Apocalypse de saint Jean,et ipieh d'autres hypothses, nous sommes

heureux de rendre hommage- son rudi-tion hors pair, quoique un peu trop touf-fue, et sa vigueur d'argumentation. Detous les travaux que nous avons consults,c'est Celui qui nous a servi davantage etauquel nous devrons le plus.': Tels sont les principaux ouvrages catho-.

liqes parus en France et plus ou moinsouvertement favorables la prophtie desPapes. Nous en aurions pu citer biend'autres, notamment en Italie et en Alle-magne, mme parmi les protestants; Ondirait mme que les protestants trouvaientintrt vanter la prophtie en interpr-

tant faussement sa partie finale commeannonant la chute de la Papaut et, par-

: (1) Encore des exemplaires, nous dit-on, chezLthielleux, Paris.,-. > . v


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24 ~

tant, le manque de prennit de l'institu-.Mon pontificale.

Ainsi, par exemple, ds .1677, nous

voyons un pasteur protestant, Graff, deMarbourg, en Allemagne, rpondre victo-rieusement aux objections de Carrire etprendre l dfense de la prophtie contreceux qui nient son'authenticit.

En 1684, un autre protestant, J.-H. Hei-degger, d'Amsterdam, dans son histoire

haineuse de la Papaut, se montre favo-rable la prophtie.

En 1706, Dan. Mollr, n^ Presbourg, deparents protestants, est partisan convaincude l'authenticit. De mme, Th. Gruger, Wittemberg. De mme encore, Th. Joecher,en 4750, Leipzig*

A Vienne, en 1868, le - chanoineJos. Ginzel rpond aux objections duP. Mnestrier et avoue toute sa confianceen la prophtie. . -

En 1879, le clbre professeur Harnack,tout en rejetant la valeur surnaturelle dela prophtie, la venge des soupons de

Weingarten qui accusait de Wion d'tre unfaussaire. Nous reviendrons sur ce souponcalomnieux, ^' Ces quelques citations suffisent pourmontrer la grande place qu'a occupe etqu'occupe encore de nos jours dans l'es-prit des savants, mme protestants, la fa-meuse prophtie des Papes.. Elle a t lesujet de thses de doctorat, d'articles dansles plus savantes revues et d'ouvrages lesplus sriiix de critique historique. On nerappellera plus dsormais, comme on*le fit


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m

si -lgrement au- xvn" sicl?, un sujetfutile , et nous avons hte d'en aborder la

discussion.' .- H'

Objections et rponses

Nous ferons grce au lecteur des objec-

tions sur les miracles et les prophties eugnral. Ceux qui nient Dieu la puis-sance d'en produire en ce bas monde, Jean-Jacques Rousseau les a traits-d'insenss,et nous les renvoyons aux notions lmen-taires de la philosophie,

^uaht aux croyants qui mettent en doute

leur utilit ou leur opportunit, nous lesrenvoyons saint Paul, qui compte la pro-'ptitie parmi les dons que le Saint-Esprit

rpartit encore ses fidles quand il luiplat (1). .

--La premire objection srieuse soulevecontre la prophtie des Papes, c'est l'igno-

rance o nous "sommes de la nature et del valeur du manuscrit publi par de Wion,en 1595. Nous avons dj entendu Pape-

, brodh se; plaindre amrement de cettelabsrice de documents qui nous permet-

^ (1) 4M quvdemper SpiHtum datur sermo sa-pieni, aMl.. alii prophetia ... Hoec autemmnia bperatur urtus atque idem Spiritus, divi-dms singulis prout vult. (/ Cor. XII, 8-110 Spriium nblte extihguere. Prophetia nolHe

^spemere. Omnia autem probate. Quod bonumsttnete.(IThss..v,i9-'ii.)


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26 - ; '.,' :".'

trait de juger nous-mmes de l'antiquit;et de la valeur d ce parchemin.

Certes nous l'avons dj reconnu -

cette lacune est trs regrettable. Cepen-dant, elle n'est pas totale. Nous savons quede Wion a soumis le manuscrit qu'il avaitdcouvert l'un des plus grands ruditsde l'poque, au clbre Ciacconius l'au-teur du grand ouvrage La vie et les actesdes Papes et des cardinaux, le savant l

plus capable, cette poque, d se pro-noncer sur l valeur de ce document ^-etque celui-ci, aprs mr examen, l'a jugdigne de sa considration et de son tude,au point d'en faire lui-mme un commenttaire, montrant clairement la ralisationdes devises aux Papes qui se succ-

drent depuis Clstin II, en 1143, jusqu'Urbain VII, en 1590 (1). C'est ce commen-taire qu'a publi de Wion avec le textede la prophtie, ajoutant ainsi sa sciencepropre l'approbation et l'autorit du grandsavant Dominicain.

L prophtie est donc couverte par l'au-

torit des deux plus nlinerits savants duxvie sicle, l'un qui est la gloire do l'Ordrede Saint-Benot, l'autre, de celui de Sjaint-Dominiqu. Elle* fut-aussi communique; d'autres savants, puisqu'au tmoignagede Wion lui-mme, nombreux furent ceux

"

qui dsirrent l.conhttre, l possder, a

(1) Ce fait permet de croire que le commen?taire de Ciacconiusfut termin en 1590et qu'enle publiant en 1595,de Wion ne se crutle drplt

;d'y rien ajouter.


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mltis desiderata, et lui en conseillrentla publication.

Voil un fait capital, trop facilementoubli par ls critiques, et qui jette unelumire clatante dans une questionobscure. .

Pour voiler cette lumire, il faudraitsoutenir que ces deux grands savants qu'on ne peut traiter d'ignorants ou de

crdules -*- de Wion et Ciacconius, sont desfaussaires et d'odieux imposteurs.Un seul auteur, croyons-nous, l'Alle-

mand Weingarten, en 1857, a os soupon-ner la mauvaise foi de de Wion. Mais soncoreligionnaire, le clbre professeurHarnack, n'a pas eu de peine, lui dmon-

trer que ses soupons ne reposaient suraucun argument srieux, et que le carac-tre mme de cet (excellent religieux B-ndictin l'aurait rendu incapable detromper ses lecteurs, mme par manirede plaisanterie.- Du reste, si de Wion tait un faussaire,Ciacconius serait le complice du faux, etc'est ici que nous touchons l'invraisem--blable. /

A moins de dire que de Wion a invent Ja.fois la prophtie et les commentairesqu'il attribue Ciacconius, mais leur pu-blication du vivant mme de Giacconisrend le fait impossible. Impossible d'inirprimer dans un grand ouvrage destin aumonde. lettr ~ sans .s'exposer au d-menti de ce .savant et la rise publique~ un avertissement pomme celui que nousv ' '"::" ' '-"' -'""'' " '';

':


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' --28 '' ;.

lisons en tte de cette publication : Lesnotes sur les Pontifes ne sont pas de Ma-lachie lui-mme, mais du.R, P. F. Alphonse

Chacon,de l'Ordre des Frres

Prcheurs,interprte de cette prophtie, '(1)C'est la folle audace d'un tel soupon

qui dpasse les limites de la bonne foi.Aussi, le procs est jug et la tentativecalomnieuse de Weingarten n'a eu aucuncho dans le monde savant. .A

Depuis les dcouvertes retentissantes,par les Mai, les Dom Pitra et tant d'autresinfatigables Chercheurs, de documents ou-blis aprs des centaines et des milliersd'annes d'existence, on ne s'tonne plusaujourd'hui qu'un rdit Bndictin deMantoue ait pu dcouvrir dans la vieille

bibliothque de son abbaye de Smt'-.Benot ou du Mont-Cassin, un manuscritdu xiie sicle, dont l'antiquit vnrableet l'authenticit furent contrles par leplus grand savant de l'poque, l'illustreCiacconius.

:> '-.-*' '-. -' -AiTout autre a t le sort rserv l'in-

vention du P. Mnestrier, dont le succsdure encore. Nous voulons parler de l'irisgttiuSe hypothse de la fabrication de l

'

prophtie pendant le -Conclave de 4590.^Aussi devons-nous la signaler et lardiK

uter plus longuement,v

;

-

^AAA'A(1) Qux.ad Pontifics stii[adject nonsntfont al-lusion qu' quelques dtails personnels,tels

quele lieu de

naissance,les

origines,la famille, le blason, etc., de tel o telPape, sont beaucoup plus difficiles in-''terprter de nos jours, cause de l'oublio sont facilement tombs tous ces dtails.


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.33:'

:

;Donc, l'opposition que l'on S'est plu 'inventer entre la clart des devises avantGrgoire XIV et l'obscurit des suivantes

est imaginaire. En ralit, le mme voile'mystrieux recouvre galement les unes et.les autres^ et si, aprs les vnements ac-complis, ce voile est trs souvent soulevavec un clat merveilleux, pariois cepen-dant il ne s'efface pas compltement auregard de nos contemporains.

Que si l'on tenait absolument voir uncontraste entre les deux parties de la pro-phtie, la clart serait, au contraire, enfaveur de la seconde. Depuis Grgoire XIV,les lgendes paraissent encore plus faciles interprter, et celles des xix et xxc siclessont encore plus' belles et plus saisis-

santes. , On dirait que l'oeil du prophte avu ls vnements d'autant plus claire-ment qu'ils taient plus loigns do sonregard dans la suite des ges. Ce qui ruineabsolument la fameuse lgende de la fabri-cation de ce document'par des contem-porains de Grgoire XIV, au Conclave

de 1590.

Une autre invraisemblance de cette pr-tendue fabrication se tire du silence detous les "documents contemporains sur l'his-toire de ce Conclave, et c'est l un

argument contre lequel ne sauraient protes-ter les hauts critiques contemporains quise fondent si souvent-sur l'absence ou lesilence des documents.

En 1617, paraissait Francfort une lus-


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<


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guments ngatifs, sur de simples souponshabilement prsents,'et dont le nombre a

J3Ufaire illusion, mais chaque partie de cet

norme faisceau analyse sparment estd'une fragilit qui ne rsiste pas unesrieuse critique.

Une troisime srie d'objections a ttire des caractres internes de ce docu-ment, de son style, de ses jeux de mots,et surtout de la prdiction de la fin dumonde, qui le termine et semblerait pro-chaine.J Nous glisserons rapidement sur le style :c'est l-une question qui ne.'peut tre dis-

cute utilement qu'entre spcialistes. Di-sons seulement que les mtaphores ou^images paennes qu'on y rencontre par-fois, quoique trs rarement, ne fixent nul-lement sa composition l'poque de laRenaissance, qui mit la mode le got dela littrature paenne.

Le moyen ge, tout chrtien qu'il tait,ne les a jamais exclues. Oii voit, parexemple, la .mythologie de Virgile occuperUne place considrable dans la Divine Co-mdiede Dante. Et, remontant jusqu'auxpremiers sicles chrtiens, nous constatonsqu'ils n'ont pas hsit peindre dans les

fresques des Catacombes et reprsenterNtre-Seigneur sous la 'figure d'Orphecharmant les btes sauvages aux accentsde sa lyre.

Ce sont l des symboles emprunts au


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paganisme, sans doute, mais ils sont con-sacrs au service de l'ide chrtieiie,

tandis que, la Renaissance s'prit d'adn^

ration, non seulement pour les formes,umais aussi pour les.ides paennes., Or, ce reproche ne peut tre adress

aux deux devises prophtiques surJules II et Pie IV, si souvent allguescomme preuve.

La premire, Fructus Jovis juvabiti d-

signe sous le nom d'arbre de Jupiter lechne qui distinguait les armoiries desRovre et de Jules II. En mme temps,par cette image paenne qui ne lui estpas familire," le prophte prdit l'explo-ision de la Renaissance paenne, qui fut lecaractre de cette poque et de ce ponti-

ficat lui-mme.La seconde, Esculapii pharmacum, faitallusion, par Esculape, le dieu de la m-decine, au nom de Pie IV, sorti de. la fa-mille de Mdicis. En outre, elle prdiV legrand remde surnaturel et divin que cePontife doit appliquer la maladie en-

vahissante, au xvr sicle,.du protestan-tisme, par les dcrets du Concile deTrente, qu, Pie IV confirmera et publiera;solennellement dans tout le monde chr-tien.

Comme on le voit, s'il y a dans les motsde ces deux devises des allusions au

pa-ganisme, l'ide en demeure profondmentchrtienne, et rien n'y trahit l'poque dela Renaissance..Bien loin de s'appliquer parler la-


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g:v.v;--'

. H 37

tangu raffine de la Rome "paenne,comme r on s'en faisait gloire cettepoque, le prophte sacrifie constamment

la form" littraire l'ide. Son style estd'une brivet, d'une simplicit, parfoisd'une bizarrerie qui surprend. Et cettetendance faire^prdominer l'ide sur laforme est bien celle du moyen ge. C'estencore l une raison de dater ce docu-ment du xnc sicle plutt que du xvi.

Aprs le style, ce sont les jeux de motsque l'on attaque, comme peu dignes del'inspiration du Saint-Esprit. Mais il y al une quivoque ou plutt une ignorancedes principes thologiques qu'il nous fautcommencer par dvoiler.

L'actipn prophtiquedu

Saint-Espritno

consiste pas dicter des mots ou des; phrases au voyant. Pour l'ordinaire, tout

au moins, il fait passer sous ses yeuxdes images ou des sries de tableaux re-produisant ^ou symbolisant la srie desvnements'' venir, et laisse le voyant

libre de les exprimer son gr, dans lamesure o il les aura compris, et dans lalangue et le style les. plus conformes ses habitudes et son propre gnie.

En sorte que, si la dcouverte des idesvient de Dieu, leur expression vient de

.; l'homme ;- c'est l sa part de coopration

. .l'action divine o se peuvent glisserbien des imperfectioiis.de style, et comme


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- 38

Sans doute, Dieu peut ajouter aux lu-mires prophliques de la vision" sonassistance dans la rdaction, qui prserve

l'crivainau

moinsde

toute erreur. C'estce qu'il a fait, comme l'Eglise nous l'en-seigne, pour nos saints Evangiles et tousles livres sacrs do l Bible. Mais cetteassistance trs spciale n'est nullementncessaire pour la rdaction des rvla-tions prives. Elles ont aussi un but sp-

cial, dans le plan de la divine Providence,et il suffit que "ce but soit atteint.Ainsi, par exemple, on peut y supposer

des erreurs scientifiques ou historiques,tandis qu'on ne peut souponner de vri-tables erreurs daii3 nos livres inspirs (1).

Ces principes tablis, nous n'aurions au-

cun droit de nous scandaliser si nous d-couvrions dans la prophtie des Papes,soit des bizarreries de style, soit des jeuxde mots risqus, soit mme quelques er-reurs do dtail. C'est l la part de l'hommedans le concours divin, avc"^ la marquindlbile de ses imperfections.

Mais c'est l, de notre part, Une purehypothse que nous sommes loin d'ac-corder. En dehors des obscurits pro-fondes dans tels ou tels dtails, et',ne nui-sant nullement la clart de l'ensemble obscurits que nous reconnaissons!vp-

(1) Voir l'Encyclique Providentissimus'Deusde S..fe. Lon XIII, sur l'tude des Saintes Ecri-tures (18 hbv. 1893) et l'Encyclique aux vquesde France en date, du 8 sept. 1899* y'r ='?i::


45/72

;3

lontiers, mais qui sont communes toutesles prophties officiellement acceptes parl^glise, comme l'Apocalypse de saint

Jean,- nous'ne dcouvrons aucun dfautcapable de rendre ce document indigned'tre une prophtie.

Tel est aussi l'avis des critiques les plusrcents qui en ont fait l'tude la plus con-sciencieuse et la plus approfondie. Lesjeux de mots eux-mmes ne nous choquent

plus, depuis que nous avons dcouvert, hla'suite de M. Matre, le sens figur etsymbolique si profond qu'ils renferment.

: Ainsi, pour nous en tenir aux deux quenous venons de signaler, quoi de plus ex-pressif que .d'appeler le chne du blasonde JUles II, du surnom d'arbre de Jupiter,

pour marquer la renaissance paenne del'poque et du pontificat ! Quoi de plussaisissant.que dev.rappeler Esculape pro-pos d'un Mdicis, et d'annoncer le grand

vremde qu'il apporterait du ciel l'Eglisedj si malade de la fivre aigu et de laplaie envahissante du protestantisme I

Bien loin de trouver ces images incon-venantes, nous les admirons comme vrai-ment gniales, si elles ne sont inspires etdivines.

;-AA'::'y- *

Mais ce qui a le plus choqu les adver-

saires de la prophtie des Papes, ce quien'a rendu quelques-uns irrductibles et ir-rconciliables, c'est qu'elle ose encoreannoncer aux savants modernes, la fin dumonde comme une catastrophe prochaine.


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Et c'est l une. objection capitale qu'ilnous est impossible de passer sous silence,car elle mrite d'tre srieusement dis-cute.

On peut dire qu'aucun des savants con-temporains faisant autorit ne nie la findu monde. Tousi reconnaissent que le mou-vement perptuel est impossible. Et desastronomes minents comme Faye (1^, oudes gologues de premier ordre comme deLpparent (2), se sont complus numrer

les causes multiples du ralentissementquotidien ou sculaire de notre systmesolaire, et supputer le nombre de si-cles qu'exigera son arrt complet.

Or, ce nomb.vo de sicles est tellementprodigieux, qu'il confond notre imagina-tion, et qu'annoncer la fin du monde pourun temps prochain n'apparat dsormaisqu'une mauvaise plaisanterie.

Plusieurs rponses s'imposent ici. Lapremire, c'est que la fin du monde pr-dite par les savants est une fin naturelle,qui doit s'oprer par le ralentissementprogressif des mouvements cosmiques, et un

(i) FAYE*QHgine du monde (2e.dt.),.p. 30G-;313 : Notices publies en 1873 et 74 dans VAn-nuaire-du bureau des longitudes.

(2) DR LAPPARENT,a Destine de la, terreferme (Congrs scientif. des cath. 1891, t. VU,

p. 289). Cf. LANGE,Histoire du matrialisme,II, p. 243-245 ; fYNDEL,la Chaleur, p. 418 ; FARGES,l'Ide de Dieu, pi. S3-99 ; E. PIOARD,la Science moderne et son tatactuel, p. 132.


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refroidissement incompatible avec la vie

organiquevEncor cette fin naturelle fait-elle abstraction des accidents imprvus,comme il s'en produit de nos jours dans les

toiles catastrophes (1). ^Celle qui est prophtise par nos Saints

Livres est, au contraire, surnaturelle ; ellesera l'effet d'une volont spciale de Dieu,et c'est le feu et non le froid qui en seral'instrument physique.

La contradiction n'est doncqu'appa-rente entre la science et la rvlation.

Mais l'on insiste pour mettre ladite pro-phtie en contradiction avec la rvla-tion elle-mme. En effet, s'il est une v-rit clairement exprime et souvent redite

:A{i) Ce sont des toiles dans lesquelles seproduit une brusque dislocation de la crotesusperflciellei. La matire intrieure, l'tatdUghition, s'extravase, comme celle d'un oeufdont coquille est brise , et le feu submergebientt tout le globe. Cette subite incandes-cence de l'toile n'est que temporaire, etbientt elle s'teint par suite d'un nouveau

refroidissement do la surface. Aprs" avoirbrtti quelque temps, l'toile disparat sansrtour, ou priodiquement. Les toiles fameuses

-du Cygne, du Serpentaire, de ia Couronneborale, de Cassiope, etc., en sont des

-exemples. (Voir 'VALSON,la Dure du mondeactuel, dans la Controverse et le Contemporain,t, XII, p. 501, 15 avril 1888.) Quant une

catastrophe imprvue provenantde la ren-

contre de l terre avec une comte ou quelqueautre corps sidral, fluide ou solide, visibleou invisible, quoique peu probable, elle neparat pas impossible. (Voir DE KIRWAN,Com-ment peut finir l'univers, chez Bloud et Barrai.)


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dans nos Saints Livres, c'est bien que ladate exacte do la catastrophe finale quiprcdera Je jugement dernier a t ca-che aux hommes, et que Notro-Seigneufi

lui-mme a refus' de la rvler sesaptres. :

Il ne vous appartient pas, leur rpond-il, de connatre l'poque et le "moment queDieu le Pre a rservs dans sa puis-sance. (1) Ce jour et cette heure, per-sonne n'en sait rien, pas mme les nge.s des

cieux ; seul, mon Pre ls connat. (2)Et saint Paul de rpter : Inutile quevous sachiez le temps et le moment de ce

jour du Seigneur. (3)La seule chose que notre divin Sauveur'

ait jug opportun de nous rvler sur cesujet, ce sont les signes avant-coureurs de

la fin du monde et du jugement dernier etla ncessit de nous tenir toujours prts,car le Fi's de l'homme viendra l'impro-viste et comme un voleur pendant lanuit (4), qui surprend ceux qui ne setiennent pas toujours sur leur garde. L'ave-nir doit donc pour nous rester un mystre:

tel est le plan nettement affirm do la Sa-^gesse divine.Or,.nous dit-on, la prophtie ds Papes,

viendrait contredire ce plan. En nous rv-lant le nombre des Pontifes qui doivent

(i) Act. i, 7.(2) Mallh, xxiv, 36 ; Marc,_xiii, 32. f(3) / Thess. v,.i.(4) Sicul fur,"foi nocte, ita vniel, ('/ Thessi

v. 12. tt Petr, m, 10.) V -


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r{nor se succder jusqu' la fin des temps,^je nous permettrait de calculer trs vrai-

sembiablement l'poque de la fin du monde.;Ainsj, aprs Benot XV, actuellement r- .

gnant, il ne resterait plus que sept autres: pontificats avant le dernier o aura lieua: catastrophe, et en leur supposant une

Jdure moyenne de vingt arts au plus, cettedat fatale devait se placer srement avantun sicle etdemi.

Telle est bien l'objection : nous n'avons

: rien cach de sa force. Et nous convenonsVolontiers qu'une prophtie nous annonanti fin du monde d'ici cent cinquante ans,

A~- sans tre radicalement impossible latoute-puissance de Dieu, serait de laplus haute invraisemblance et lgitimeraitla condamnation formelle porte par divers

Conciles, notamment, par le V6 Concile deLatran sous Lpn X, en 1516, de toutes lesprophties nouvelles annonant l'poque deTahtchrist et le jour certain du jugementdernier: Tempus-pnefixum antichri-iti,vel diem cerlum judibiL

Et cependant, la prophtie des Papes,

nous l'avons dit n'a point, t condam-ne : c'est dj une grave prsomption

: qu'elle ne fait point une telle annonce,quoique ses nombreux commentateurs peu prs unanimement se soient com-plu l'interprter dans ce. sens. Il nous,s.ufflra de la relire attentivement pour dis-tinguer nettement ce qu'elle dit de ce qu'onlui fait dire par des additions trs hypo-thtiques et tendancieuses.'

Aprs l'numraiion des cent ornse pre-


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miers papes (depuis Clestin II), par'au-tant de formules prophtiques trs, brves

et trs sches deux ou- trois mots enmoyenne pour chacun, le voyant s'ar-rte, et changeant tout coup de langage-

Documents

Farges, La prophétie des papes dite de Saint Malachie et la Grande Guerre