Fiche 1 - La Dualite Juridictionnelle 2014-2015

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td de contentieux administratif séance 1

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    FICHE N 1 :

    LA DUALITE JURIDICTIONNELLE I. ELEMENTS DE BIBLIOGRAPHIE - Dossier La dualit de juridiction lors du bicentenaire de la loi des 16-24 aot 1790 , RFDA, 1990, p. 687 ; - Dossier Dbats sur lavenir du dualisme juridictionnel , AJDA, 2005, p. 1760 ; - Dossier La rforme du Conseil dtat , RFDA, 2008, p. 213 ; - Dossier Conseil dtat fonction consultative et fonction contentieuse , RFDA, 2009, p. 885 ; - AGUILA Y., La justice administrative, un modle majoritaire en Europe , AJDA, 2007, p. 290 ; - GALLET J.-L., Rapport sur la rforme du Tribunal des conflits, AJDA, 2013, p. 2130 ; - JORAT M., Supprimer la justice administrative deux sicles de dbats , RFDA, 2008, p. 456 ; - MASSOT J., La rpartition du contentieux entre les deux ordres , RFDA, 2010, p. 907 ; - PACTEAU B., Vicissitudes (et vrification ?) de ladage juger ladministration, cest encore administrer , Mlanges en lhonneur de Franck MODERNE, Dalloz, 2004, p. 317 ; - TRUCHET D., Fusionner les juridictions administrative et judiciaire ? , Etudes offertes Jean-Marie AUBY, Dalloz, 1992, p. 335 II. DOCUMENTS Le principe de dualit juridictionnelle Doc. 1 : Art. 13 de la loi des 16-24 aot 1790 et dcret du 16 fructidor an III Doc. 2 : Cons. const., 22 juillet 1980, Loi de validation, GDCC, 15e d., 2009, n 21 Doc. 3 : Cons. const., 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence, GAJA, 19e d., 2013, n 104, p. 794 La voie de fait Doc. 4 : CE Ord., 23 janvier 2013, Commune de Chirongui (v. la note de P. DELVOLVE, Rfr-libert et voie de fait , RFDA, 2013, p. 299) Doc. 5 : T. confl., 17 juin 2013, Bergoend c/ ERDF Annecy Lman (v. la note de P. DELVOLVE, Voie de fait : limitation et fondements , RFDA, 2013, p. 1041) Lemprise irrgulire Doc. 6 : T. confl., 9 dcembre 2013, M. et Mme Panizzon c. Commune de Saint-Palais-sur-Mer (v. la note de P. DELVOLVE, De la voie de fait lemprise : nouvelle rduction de la comptence judiciaire , RFDA, 2014, p. 61) Les consquences de la dualit juridictionnelle Doc. 7 : T. confl., 30 juin 2008, poux Bernardet (v. la note de B. SEILLER, Pour quelques ajustements de la mcanique du dualisme juridictionnel , RFDA, 2008, p. 1172) Doc. 8 : Cour europenne des droits de lhomme, 18 novembre 2010, Claude Baudoin Doc. 9 : Cons. const., 26 novembre 2010, Mlle Danielle S., n 2010-71 QPC Doc. 10 : Art. L. 3216-1 du Code de la sant publique (v. larticle de A. PENA, Internement psychiatrique, libert individuelle et dualisme juridictionnel : la nouvelle donne , RFDA, 2011, p. 951) Les questions prjudicielles entre juridiction administrative et juridiction judiciaire Voir : CE Sect., 17 octobre 2003, Bompard, GACA, 2e d., 2009, n 9 Doc. 11 : T. confl., 17 octobre 2011, SCEA du Chneau c/ INAPORC, GAJA, 19e d., 2013, n 117, p. 956 Doc. 12 : CE, 23 mars 2012, Fdration Sud Sant Sociaux (v. la note de E. MARC, Lapplication inverse et tendue de la jurisprudence SCEA du Chneau , AJDA, 2012, p. 1583) Doc. 13 : Cass. civ. 1, 24 mars 2013, n 12-18.180 (v. la note de J.-D. DREYFUS, Lapplication par le juge judiciaire de la jurisprudence tablie du juge administratif , AJDA, 2013, p. 1630)

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    Doc. 1 :

    Art. 13 de la loi des 16-24 aot 1790 : Les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours spares des fonctions administratives. Les juges ne pourront, peine de forfaiture, troubler, de quelque manire que ce soit, les oprations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions.

    Dcret du 16 fructidor an III : Dfenses itratives sont faites aux tribunaux de connatre des actes dadministration, de quelquespce quils soient, aux peines de droit. Doc. 2 : Cons. const., 22 juillet 1980, Loi de validation 6. Considrant qu'il rsulte des dispositions de l'article 64 de la Constitution en ce qui concerne l'autorit judiciaire et des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Rpublique en ce qui concerne, depuis la loi du 24 mai 1872, la juridiction administrative, que l'indpendance des juridictions est garantie ainsi que le caractre spcifique de leurs fonctions sur lesquelles ne peuvent empiter ni le lgislateur ni le Gouvernement ; qu'ainsi, il n'appartient ni au lgislateur ni au Gouvernement de censurer les dcisions des juridictions, d'adresser celles-ci des injonctions et de se substituer elles dans le jugement des litiges relevant de leur comptence ; 7. Mais considrant que ces principes de valeur constitutionnelle ne s'opposent pas ce que, dans l'exercice de sa comptence et au besoin, sauf en matire pnale, par la voie de dispositions rtroactives, le lgislateur modifie les rgles que le juge a mission d'appliquer ; qu'ainsi le fait que la loi soumise l'examen du Conseil constitutionnel intervient dans une matire ayant donn lieu des recours actuellement pendants n'est pas de nature faire regarder cette loi comme non conforme la Constitution ; Doc. 3 : Cons. const., 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence - SUR LE TRANSFERT A LA JURIDICTION JUDICIAIRE DU CONTROLE DES DECISIONS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE : 15. Considrant que les dispositions des articles 10 et 13 de la loi des 16 et 24 aot 1790 et du dcret du 16 fructidor An III qui ont pos dans sa gnralit le principe de sparation des autorits administratives et judiciaires n'ont pas en elles-

    mmes valeur constitutionnelle ; que, nanmoins, conformment la conception franaise de la sparation des pouvoirs, figure au nombre des "principes fondamentaux reconnus par les lois de la Rpublique" celui selon lequel, l'exception des matires rserves par nature l'autorit judiciaire, relve en dernier ressort de la comptence de la juridiction administrative l'annulation ou la rformation des dcisions prises, dans l'exercice des prrogatives de puissance publique, par les autorits exerant le pouvoir excutif, leurs agents, les collectivits territoriales de la Rpublique ou les organismes publics placs sous leur autorit ou leur contrle ; 16. Considrant cependant que, dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une lgislation ou d'une rglementation spcifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se rpartiraient, selon les rgles habituelles de comptence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au lgislateur, dans l'intrt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les rgles de comptence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intress ; 17. Considrant que, si le conseil de la concurrence, organisme administratif, est appel jouer un rle important dans l'application de certaines rgles relatives au droit de la concurrence, il n'en demeure pas moins que le juge pnal participe galement la rpression des pratiques anticoncurrentielles sans prjudice de celle d'autres infractions intressant le droit de la concurrence ; qu' des titres divers le juge civil ou commercial est appel connatre d'actions en responsabilit ou en nullit fondes sur le droit de la concurrence ; que la loi prsentement examine tend unifier sous l'autorit de la cour de cassation l'ensemble de ce contentieux spcifique et ainsi viter ou supprimer des divergences qui pourraient apparatre dans l'application et dans l'interprtation du droit de la concurrence ; 18. Considrant ds lors que cet amnagement prcis et limit des rgles de comptence juridictionnelle, justifi par les ncessits d'une bonne administration de la justice, ne mconnat pas le principe fondamental ci-dessus analys tel qu'il est reconnu par les lois de la Rpublique ; 19. Mais considrant que la loi dfre au Conseil constitutionnel a pour effet de priver les justiciables d'une des garanties essentielles leur dfense ; 20. Considrant en effet que le troisime alina de l'article 15 de l'ordonnance du 1er dcembre 1986 dispose que le recours form contre une dcision du conseil de la concurrence "n'est pas suspensif" ; que cette disposition n'aurait pas fait obstacle ce que,

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    conformment l'article 48 de l'ordonnance n 45-1708 du 31 juillet 1945 et au dcret n 63-766 du 30 juillet 1963, le Conseil d'tat pt, la demande du requrant, accorder un sursis l'excution de la dcision attaque si son excution risquait d'entraner des consquences difficilement rparables et si les moyens noncs dans la requte paraissaient srieux et de nature justifier l'annulation de la dcision attaque ; 21. Considrant au contraire, que la cour d'appel de Paris, substitue par la loi prsentement examine au Conseil d'tat, saisie d'un recours contre une dcision du conseil de la concurrence, ne pourrait prononcer aucune mesure de sursis excution ; qu'en effet, la loi a laiss subsister dans son intgralit le troisime alina de l'article 15 de l'ordonnance du 1er dcembre 1986 et n'a pas donn la cour d'appel le pouvoir de diffrer l'excution d'une dcision de caractre non juridictionnel frappe d'un recours auquel est dni tout effet suspensif, et ceci quelle que soit la gravit des consquences de l'excution de la dcision et le srieux des moyens invoqus contre celle-ci ; 22. Considrant que, compte tenu de la nature non juridictionnelle du conseil de la concurrence, de l'tendue des injonctions et de la gravit des sanctions pcuniaires qu'il peut prononcer, le droit pour le justiciable formant un recours contre une dcision de cet organisme de demander et d'obtenir, le cas chant, un sursis l'excution de la dcision attaque constitue une garantie essentielle des droits de la dfense ; 23. Considrant ds lors que les dispositions de l'article 2 de la loi prsentement examine ne sont pas conformes la Constitution ; que, les dispositions de l'article 1er n'en tant pas sparables, la loi doit, dans son ensemble, tre regarde comme non conforme la Constitution ; Doc. 4 : CE Ord., 23 janvier 2013, Commune de Chirongui Vu la requte, enregistre le 17 janvier 2013 au secrtariat du contentieux du Conseil d'Etat, prsente par la commune de Chirongui, reprsente par son maire ; la commune demande au juge des rfrs du Conseil d'Etat : 1) d'annuler l'ordonnance n 1200743 du 29 dcembre 2012 par laquelle le juge des rfrs du tribunal administratif de Mamoudzou, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, lui a enjoint de faire cesser immdiatement les travaux qu'elle a entrepris sur la parcelle dont la proprit est revendique par Mme Zanaba Bourhane Malamani ;

    2) de mettre la charge de Mme Bourhane la somme de 3 500 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; [...] 1. Considrant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifie par l'urgence, le juge des rfrs peut ordonner toutes mesures ncessaires la sauvegarde d'une libert fondamentale laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit priv charg de la gestion d'un service public aurait port, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illgale. Le juge des rfrs se prononce dans un dlai de quarante-huit heures ; 2. Considrant que Mme Zanaba Bourhane a saisi le juge des rfrs du tribunal administratif de Mamoudzou, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il ordonne la commune de Chirongui de faire cesser immdiatement les travaux entrepris sur une parcelle dont Mme Bourhane estime tre propritaire dans le village de Malamani qui dpend de cette commune ; que, par l'ordonnance du 29 dcembre 2012 dont la commune fait appel, le juge des rfrs a fait droit cette demande ; Sur la rgularit de l'ordonnance attaque : 3. Considrant qu'aux termes du premier alina de l'article L. 522-1 du code de justice administrative : Le juge des rfrs statue au terme d'une procdure contradictoire crite ou orale et que, selon l'article L. 5 de ce code : L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptes celles de l'urgence ; 4. Considrant qu'il ressort des pices du dossier que le juge des rfrs a t saisi de la demande de Mme Bourhane dans la soire du 27 dcembre 2012 ; que cette demande et l'avis d'audience ont t communiqus par tlcopie, le 28 dcembre 2012 vers 1 heure, la commune de Chirongui, l'audience tant fixe le 29 dcembre 2012 9 heures ; qu'un tel dlai, qui laissait la commune la journe du vendredi 28 pour prparer sa dfense et organiser sa prsence l'audience, tait adapt aux ncessits de l'urgence ; que, ds lors, le moyen tir de l'irrgularit de la procdure suivie en premire instance doit tre cart ; Au fond : 5. Considrant qu'il rsulte de l'instruction que Mme Bourhane, qui occupait une parcelle d'environ un hectare Malamani, a demand la collectivit de

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    Mayotte, devenue le Dpartement de Mayotte, de reconnatre son droit de proprit sur cette parcelle, dans le cadre des oprations de rgularisation foncire entreprises par cette collectivit, o il n'existait pas de cadastre ; que la commission du patrimoine et du foncier du conseil gnral a rendu, le 25 juin 2010, un avis favorable cette reconnaissance, au vu de l'avis galement favorable de la commune de Chirongui sur le territoire de laquelle se situe cette parcelle ; que, le mme jour, le prsident du conseil gnral a requis du conservateur de la proprit foncire l'immatriculation de cette parcelle, rfrence AR 50136, qui jusque-l tait rpute appartenir au domaine priv de la collectivit de Mayotte, en prcisant qu'aprs immatriculation elle serait mute au nom de Mme Bourhane, dsormais propritaire au terme de la procdure de rgularisation foncire ; que cette rgularisation a t approuve par dlibration de la commission permanente du 22 novembre 2010 ; que toutefois la commune de Chirongui a entrepris des travaux sur ce terrain, au mois de novembre 2012, en vue de raliser un lotissement caractre social ; que les premiers travaux ont notamment consist supprimer la vgtation qui le recouvrait ; 6. Considrant que, sous rserve que la condition d'urgence soit remplie, il appartient au juge administratif des rfrs, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre l'administration de faire cesser une atteinte grave et manifestement illgale au droit de proprit, lequel a le caractre d'une libert fondamentale, quand bien mme cette atteinte aurait le caractre d'une voie de fait ; 7. Considrant, en premier lieu, que la commune se prvaut, pour justifier sa dcision d'engager les travaux litigieux sur ce terrain, d'une dlibration du 10 mai 2012 par laquelle la commission permanente du conseil gnral a dcid de lui cder des parcelles appartenant au Dpartement en vue de permettre la ralisation de ce lotissement ; qu'il est cependant constant, d'une part, que la parcelle AR 50136 ne figure pas parmi celles dont la cession est ainsi prvue l'article 3 de cette dlibration ; que, d'autre part, aprs avoir rappel que le conseil gnral considre comme propritaire part entire les personnes qui, comme Mme Bourhane, ont bnfici de l'opration de rgularisation foncire, l'article 8 de la mme dlibration dispose que ces personnes doivent automatiquement bnficier de lot(s) dans le lotissement ... en fonction de la valeur et de la superficie de leurs parcelles concernes par le projet : que toutefois une telle mention ne saurait autoriser la commune de Chirongui, faute d'accord de Mme Bourhane l'change ainsi prvu, entreprendre des travaux sur cette parcelle ; que la circonstance, invoque par la commune, qu'elle a

    fait opposition au bornage de la parcelle en cause ne saurait lui confrer un titre l'autorisant y raliser des travaux sans l'accord de l'intresse ; 8. Considrant qu'il rsulte de ce qui prcde que c'est bon droit que le premier juge a estim que la commune de Chirongui avait port au droit de proprit de Mme Bourhane une atteinte grave et manifestement illgale ; 9. Considrant, en second lieu, que, dans le dernier tat de ses conclusions, telles qu'elles ont t prcises l'audience, la commune ne conteste pas que la condition particulire d'urgence requise par les dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est remplie ; 10. Considrant qu'il rsulte de ce qui prcde que la commune appelante n'est pas fonde soutenir que c'est tort que, par l'ordonnance attaque, le juge des rfrs du tribunal administratif de Mamoudzou a fait droit la demande de Mme Bourhane ; que ses conclusions prsentes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, ds lors, qu'tre rejetes ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre sa charge le versement Mme Bourhane d'une somme de 2 000 en application de ces mmes dispositions ; Ordonne : Article 1er : La requte de la commune de Chirongui est rejete. Doc. 5 : T. confl., 17 juin 2013, Bergoend c/ ERDF Annecy Lman Vu, enregistre son secrtariat le 15 fvrier 2013, l'expdition de l'arrt du 6 fvrier 2013 par lequel la Cour de cassation, saisie du pourvoi form par M. Bergoend contre l'arrt rendu le 6 octobre 2011 par la cour d'appel de Chambry dans le litige l'opposant la socit ERDF Annecy Lman, a renvoy au Tribunal, par application de l'article 35 du dcret du 26 octobre 1849 modifi, le soin de dcider sur la question de comptence ; [...] Vu les autres pices du dossier ; Vu la loi des 16-24 aot 1790 et le dcret du 16 fructidor an III ; Vu la loi du 24 mai 1872 ; Vu le dcret du 26 octobre 1849 modifi et, notamment, ses articles 35 et suivants ;

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    Vu la Constitution, notamment son Prambule et son article 66 ; Vu la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'nergie et, notamment, son article 12 ; Vu le dcret n 70-492 du 11 juin 1970 ; [...] Considrant que M. Bergoend est devenu propritaire le 15 juin 1990 d'une parcelle sur laquelle Electricit de France, aux droits de laquelle vient la socit ERDF Annecy Lman, avait implant un poteau en 1983, sans se conformer la procdure prvue par le dcret du 11 juin 1970 pris pour l'application de l'article 35 modifi de la loi du 8 avril 1946, ni conclure une convention avec le propritaire du terrain ; que, par acte du 24 aot 2009, il a fait assigner la socit ERDF devant le tribunal de grande instance de Bonneville, afin que soit ordonn le dplacement du poteau litigieux, sous astreinte, aux frais de la socit ; que, par un jugement du 21 janvier 2011, le tribunal de grande instance a dclin sa comptence ; qu'en appel, la cour d'appel de Chambry, par un arrt du 6 octobre 2011, a galement jug que la juridiction judiciaire tait incomptente pour connatre du litige engag par M. Bergoend ; que, saisie par l'intress d'un pourvoi contre cet arrt, la Cour de cassation a renvoy au Tribunal des conflits, par application de l'article 35 du dcret du 26 octobre 1849, le soin de dcider sur la question de comptence ; Considrant qu'il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de sparation des autorits administratives et judiciaires, la comptence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la rparation, que dans la mesure o l'administration soit a procd l'excution force, dans des conditions irrgulires, d'une dcision, mme rgulire, portant atteinte la libert individuelle ou aboutissant l'extinction d'un droit de proprit, soit a pris une dcision qui a les mmes effets d'atteinte la libert individuelle ou d'extinction d'un droit de proprit et qui est manifestement insusceptible d'tre rattache un pouvoir appartenant l'autorit administrative ; que l'implantation, mme sans titre, d'un ouvrage public sur le terrain d'une personne prive ne procde pas d'un acte manifestement insusceptible de se rattacher un pouvoir dont dispose l'administration ; Considrant qu'un poteau lectrique, qui est directement affect au service public de la distribution d'lectricit dont la socit ERDF est charge, a le caractre d'un ouvrage public ; que des conclusions tendant ce que soit ordonn le

    dplacement ou la suppression d'un tel ouvrage relvent par nature de la comptence du juge administratif, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'nergie ; que l'implantation, mme sans titre, d'un tel ouvrage public de distribution d'lectricit, qui, ainsi qu'il a t dit, ne procde pas d'un acte manifestement insusceptible de se rattacher un pouvoir dont dispose la socit charge du service public, n'aboutit pas, en outre, l'extinction d'un droit de proprit ; que, ds lors, elle ne saurait tre qualifie de voie de fait ; qu'il suit de l que les conclusions tendant ce que soit ordonn le dplacement du poteau lectrique irrgulirement implant sur le terrain de M. Bergoend relvent de la juridiction administrative ; Dcide : Article 1er : La juridiction administrative est comptente pour connatre du litige opposant M. Bergoend la socit ERDF Annecy Lman. Doc. 6 : T. confl., 9 dcembre 2013, M. et Mme Panizzon c. Commune de Saint-Palais-sur-Mer Vu les autres pices du dossier ; Vu la loi des 16-24 aot 1790 et le dcret du 16 fructidor an III ; Vu la loi du 24 mai 1872 ; Vu le dcret du 26 octobre 1849 modifi ; [...] Considrant que, par une convention conclue le 16 dcembre 2002, M. et Mme Panizzon ont mis disposition de la commune de Saint-Palais-sur-Mer une parcelle de terrain leur appartenant, pour une dure de quatre ans, afin de lui permettre d'y amnager une aire de sport ; que la commune s'est cependant maintenue dans les lieux aprs l'expiration de cette convention ; que, par dlibrations de son conseil municipal des 15 mai 2008 et 28 janvier 2009, la commune a entendu prolonger la convention initiale, ce que M. et Mme Panizzon n'ont pas accept ; que ces derniers ont assign la commune devant le tribunal de grande instance de Saintes, en invoquant l'existence d'une voie de fait, en vue d'obtenir l'expulsion de la commune ainsi que l'indemnisation de leur prjudice ; que, par une ordonnance du 19 mai 2010, le juge de la mise en tat de ce tribunal a fait droit l'exception d'incomptence souleve par la commune au profit de la juridiction administrative ; que les requrants ont alors saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une demande tendant l'annulation de la dcision tacite par laquelle le

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    maire de Saint-Palais-sur-Mer avait rejet leur demande de restitution de leur terrain, ce qu'il soit enjoint la commune de le leur restituer sous astreinte, ainsi qu' la condamnation de cette collectivit rparer le prjudice rsultant de l'occupation illgale de leur terrain ; que, si le tribunal administratif a fait droit leurs conclusions sur les deux premiers points, il a, sur le troisime, estim tre en prsence d'une emprise irrgulire et en a dduit que les conclusions tendant l'indemnisation du prjudice correspondant relevaient de la comptence de l'autorit judiciaire ; Sur la saisine du Tribunal des conflits : Considrant, d'une part, que, devant le tribunal de grande instance comme devant le tribunal administratif, M. et Mme Panizzon demandaient une indemnit en rparation du prjudice qu'ils imputent l'occupation illgale de leur terrain ; qu'ainsi, les deux juridictions ont t saisies du mme litige, alors mme que les requrants ont saisi la premire en invoquant une voie de fait, tandis que la seconde a retenu l'existence d'une emprise irrgulire ; que, par suite et contrairement ce que soutient la commune de Saint-Palais-sur-Mer, le tribunal administratif a rgulirement renvoy au Tribunal des conflits, en application de l'article 34 du dcret du 26 octobre 1849, le soin de dcider sur la question de comptence ; Considrant, d'autre part, que si la commune a ultrieurement produit un protocole transactionnel conclu avec M. et Mme Panizzon si les parties s'y engagent se dsister sous la condition du versement du prix de vente de la parcelle en cause, aucun acte par lequel les requrants se seraient dsists purement et simplement de leur demande prsente au tribunal administratif de Poitiers n'a t produit devant le Tribunal des conflits ; que, dans ces conditions, il y a lieu de statuer sur la question de comptence renvoye par le tribunal administratif ; Sur la comptence : Considrant que, sauf dispositions lgislatives contraires, la responsabilit qui peut incomber l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputs leurs services publics administratifs est soumise un rgime de droit public et relve en consquence de la juridiction administrative ; que cette comptence, qui dcoule du principe de la sparation des autorits administratives et judiciaires pos par l'article 13 de la loi des 16-24 aot 1790 et par le dcret du 16 fructidor an III, ne vaut toutefois que sous rserve des matires dvolues l'autorit judiciaire par des rgles ou principes de valeur constitutionnelle ; que, dans le cas d'une dcision

    administrative portant atteinte la proprit prive, le juge administratif, comptent pour statuer sur le recours en annulation d'une telle dcision et, le cas chant, pour adresser des injonctions l'administration, l'est galement pour connatre de conclusions tendant la rparation des consquences dommageables de cette dcision administrative, hormis le cas o elle aurait pour effet l'extinction du droit de proprit ; Considrant que, si l'occupation de la parcelle de terrain appartenant M. et Mme Panizzon par la commune de Saint-Palais-sur-Mer a port atteinte au libre exercice de leur droit de proprit sur ce bien, elle n'a pas eu pour effet de les en dpossder dfinitivement ; qu'il rsulte de ce qui prcde que le tribunal administratif, comptent pour se prononcer sur la dcision du maire refusant de librer cette parcelle et pour enjoindre la commune d'y procder, l'est galement pour statuer sur leurs conclusions tendant l'indemnisation des consquences dommageables de cette occupation irrgulire ; Doc. 7 : T. confl., 30 juin 2008, poux Bernardet Vu, enregistre son secrtariat le 13 dcembre 2007, l'expdition de la dcision du 5 dcembre 2007 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi de la requte par laquelle les poux Bernardet avaient demand la condamnation de l'Etat la rparation de leur prjudice caus par la dure excessive de la procdure d'indemnisation qu'ils avaient engage en 1992 la suite d'une dcision, ultrieurement annule, de la commission de circonscription de l'enseignement prscolaire et lmentaire de Champigny ayant orient leur fille en section d'ducation spcialise, a renvoy au Tribunal, par application de l'article 35 du dcret du 26 octobre 1849 modifi par le dcret du 25 juillet 1960, le soin de dcider sur la question de la comptence ; [...] Considrant que les poux Bernardet ont saisi le juge administratif d'une requte tendant la condamnation de l'Etat les indemniser de leur prjudice n de la dure, qu'ils estiment excessive, de la procdure, introduite successivement devant la juridiction judiciaire puis devant la juridiction administrative et finalement attribue, en prvention d'un conflit ngatif, l'ordre judiciaire par une dcision du Tribunal des conflits, relative la rparation des consquences dommageables d'une dcision d'orientation de leur fille en section d'ducation spcialise prise par une commission de circonscription de l'enseignement prscolaire et lmentaire ; que le Conseil d'Etat a, en application

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    de l'article 35 du dcret du 26 octobre 1849, renvoy au Tribunal des conflits le soin de trancher les questions de savoir s'il est possible, dans le cas o une indemnisation est demande en raison de la dure, estime excessive, d'une procdure qui s'est droule devant les deux ordres de juridiction et a donn lieu saisine du Tribunal des conflits, de dsigner un seul ordre de juridiction pour connatre de l'ensemble de la demande, si cet ordre serait comptent pour connatre des conclusions relatives la dure de la procdure devant le Tribunal des conflits et, en cas de rponse affirmative la premire, et, le cas chant, la deuxime de ces questions, quel serait cet ordre de juridiction ; Considrant que, lorsque la dure totale de procdure qu'un justiciable estime excessive rsulte d'instances introduites successivement devant les deux ordres de juridiction en raison des difficults de dtermination de la juridiction comptente, que le Tribunal des conflits ait t amen statuer ou non, l'action en rparation du prjudice allgu doit tre porte devant l'ordre de juridiction comptent pour connatre du fond du litige, objet desdites instances ; que la juridiction saisie de la demande d'indemnisation, conformment aux rgles de comptence et de procdure propres l'ordre de juridiction auquel elle appartient, est comptente pour porter une apprciation globale sur la dure de la procdure devant les deux ordres de juridiction et, le cas chant, devant le Tribunal des conflits ; que, ds lors, en l'espce, la juridiction de l'ordre judiciaire est comptente pour statuer sur la demande des poux Bernardet en indemnisation du prjudice qu'ils imputent la dure prtendument excessive des instances tendant la rparation des consquences dommageables de la dcision d'orientation de leur fille Karine en section d'ducation spcialise ; Dcide : Article 1er : La juridiction de l'ordre judiciaire est comptente pour connatre de l'action en responsabilit dirige contre l'Etat par les poux Bernardet. Doc. 8 : Cour europenne des droits de lhomme, 18 novembre 2010, Claude Baudoin EN FAIT I. LES CIRCONSTANCES DE L'ESPCE 6. Le requrant est n en 1945 et est actuellement hospitalis l'unit pour malades difficiles (UMD) du centre hospitalier spcialis (CHS) de Plouguernvel.

    7. Les faits de la cause, tels qu'ils ont t exposs par les parties, peuvent se rsumer comme suit. 8. Le 3 dcembre 1975, le requrant fut condamn par la cour d'assises des Bouches-du-Rhne une peine de vingt ans de rclusion criminelle pour assassinat et tentative d'assassinat. En 1983, il fit l'objet d'un internement d'office l'unit pour malades difficiles du CHS de Montfavet. Par un arrt du 15 janvier 1998, la cour d'appel de Nmes dcida de le remettre en libert. Cependant, la suite d'une altercation avec le gardien d'un tablissement hospitalier de Bordeaux, o il avait t hospitalis pendant quelques jours pour un problme de sant bnin, il fut apprhend par les services de police et de nouveau hospitalis pour un mois au CHS de Cadillac-sur-Garonne, par un arrt prfectoral du 16 juillet 1998. 9. Le 12 aot 1998, un nouvel arrt reconduisit la mesure d'hospitalisation d'office pour une dure de trois mois compter du 15 aot suivant. Elle fut par la suite renouvele par des arrts prfectoraux mis les 13 novembre 1998, 14 mai et 15 novembre 1999, 15 mai et 15 novembre 2000, 14 mai et 13 novembre 2001, 14 mai, 14 juin et 14 novembre 2002, 14 novembre 2003, 17 mai (jusqu' l'annulation du 21 octobre - paragraphe 20 ci-dessous), 9 novembre, 10 novembre et 7 dcembre 2004, ainsi que les 10 mars, 9 septembre et 21 octobre 2005. 10. Afin d'obtenir la mainleve de la mesure dhospitalisation d'office prise son encontre, le requrant saisit les juridictions internes de trois types de recours. Devant le juge administratif, il introduisit, d'une part, des recours en annulation des arrts reconduisant la mesure d'internement et, d'autre part, plusieurs recours en rfr-suspension, en vertu de l'article L. 521-1-12 du code de justice administrative (paragraphe 70 ci-dessous), afin d'obtenir la suspension de l'excution de ces arrts. Il saisit galement, trois reprises, le juge judiciaire de demandes de sorties immdiates sur le fondement de l'article L. 3211-12 du code de la sant publique (paragraphe 67 ci-dessous). 11. A la suite de certaines difficults rencontres avec le personnel hospitalier de l'UMD de Cadillac, le requrant fut transfr le 27 octobre 2005 au CHS de Sarreguemines. Le 7 janvier 2008, il fut de nouveau transfr l'UMD du CHS de Cadillac, puis le 16 fvrier 2010 vers l'UMD du CHS de Plouguernvel, o il est toujours hospitalis l'heure actuelle. [...] II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

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    [...] 2. Voies de recours 66. Il existe en droit franais une double comptence juridictionnelle en matire d'internement psychiatrique, fonde sur le principe de sparation des pouvoirs. 67. C'est au seul juge judiciaire, gardien des liberts selon l'article 66 de la Constitution de 1958, qu'il appartient de se prononcer sur le bien-fond d'un internement et, le cas chant, de statuer sur la demande de sortie de la personne interne. Pendant son hospitalisation force, la personne interne peut ainsi former tout moment devant le prsident du tribunal de grande instance statuant en la forme des rfrs , savoir juge unique et en urgence, une demande en sortie immdiate, en application de l'article L. 3211-12 du code de la sant publique, ainsi libell : Une personne hospitalise sans son consentement ou retenue dans quelque tablissement que ce soit, public ou priv, qui accueille des malades soigns pour troubles mentaux [...] [peut], quelque poque que ce soit, se pourvoir par simple requte devant le prsident du tribunal de grande instance du lieu de la situation de l'tablissement, qui, statuant en la forme des rfrs et aprs les vrifications ncessaires, ordonne, s'il y a lieu, la sortie immdiate [...] Dans la plupart des cas, ds sa saisine et avant de prendre une dcision, le prsident ordonne une expertise psychiatrique, confie un ou des experts indpendants de l'tablissement psychiatrique concern, afin de donner un avis mdical sur la demande de sortie, en leur fixant un dlai, gnralement bref, pour dposer leur rapport. 68. Par ailleurs, seules les juridictions administratives sont comptentes pour statuer sur la rgularit des dcisions administratives d'internement et, le cas chant, pour les annuler. Toutefois, leur comptence se limite a` l'apprciation de la lgalit dite externe de l'acte (comptence, motivation, formalits substantielles). Il en rsulte que, quand bien mme il annulerait l'acte sur le fondement duquel l'internement a t effectue, le juge administratif ne se reconnat pas le pouvoir d'ordonner la sortie de l'intress sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, aux termes duquel lorsque sa dcision implique ncessairement qu'une personne morale de droit public [...] prenne une mesure d'excution dans un sens dtermin, la juridiction [administrative], saisie de conclusions en ce sens,

    prescrit, par la mme dcision, cette mesure assortie, le cas chant, d'un dlai d'excution. 69. Jusqu'en 1997, chaque ordre de juridiction pouvait accorder rparation des ventuels prjudices dans sa sphre de comptence. Cependant, dans un arrt du 17 fvrier 1997 (Prfet de la rgion Ile-de-France, prfet de Paris, JCP. d. G, 1997-II-22885), le Tribunal des conflits a modifi la rpartition des comptences entre les deux ordres de juridictions en confiant au seul juge civil l'ensemble du contentieux de la rparation (la juridiction administrative restant comptente pour apprcier la rgularit des actes administratifs ordonnant l'internement). Le Tribunal des conflits a ainsi statu : [...] si l'autorit judiciaire est seule comptente [...] pour apprcier la ncessit d'une mesure de placement d'office en hpital psychiatrique et les consquences qui peuvent en rsulter, il appartient la juridiction administrative d'apprcier la rgularit de la dcision administrative qui ordonne le placement ; [...] lorsque cette dernire s'est prononce sur ce point, l'autorit judiciaire est comptente pour statuer sur les consquences dommageables de l'ensemble des irrgularits entachant la mesure de placement d'office [...] 70. Le code de justice administrative offre d'autres voies de recours. L'article L. 521-1-12 de ce code prvoit notamment l'existence d'un rfr-suspension : Quand une dcision administrative, mme de rejet, fait l'objet d'une requte en annulation ou en rformation, le juge des rfrs, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'excution de cette dcision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait tat d'un moyen propre crer, en l'tat de l'instruction, un doute srieux quant la lgalit de la dcision. Lorsque la suspension est prononce, il est statu sur la requte en annulation ou en rformation de la dcision dans les meilleurs dlais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statu sur la requte en annulation ou en rformation de la dcision. 71. Enfin, une loi du 30 juin 2000 (relative au rfr devant les juridictions administratives), entre en vigueur le 1er janvier 2001, a institu la possibilit de saisir le juge administratif d'un rfr-libert. La disposition pertinente, savoir l'article L. 521-2 du code de justice administrative, se lit ainsi : Saisi d'une demande en ce sens justifie par l'urgence, le juge des rfrs peut ordonner toutes

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    mesures ncessaires la sauvegarde d'une libert fondamentale laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit priv charg de la gestion d'un service public aurait port, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illgale. Le juge des rfrs se prononce dans un dlai de quarante-huit heures. EN DROIT [...] II. SUR LA VIOLATION ALLGUE DE L'ARTICLE 5 4 DE LA CONVENTION 95. Invoquant l'article 5 4 de la Convention, le requrant dnonce une violation de son droit disposer d'un recours effectif permettant qu'il soit statu sur la lgalit de la mesure d'hospitalisation d'office dont il fait l'objet. [...] L'article 5 4 se lit ainsi : Toute personne prive de sa libert par arrestation ou dtention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue bref dlai sur la lgalit de sa dtention et ordonne sa libration si la dtention est illgale. [...] A. Sur l'effectivit des recours dont le requrant a dispos en droit franais 1. Arguments des parties 99. Le requrant fait valoir qu'il a t maintenu hospitalis contre son gr pendant une trs longue priode, malgr l'annulation par les juridictions administratives des arrts prfectoraux fondant son internement. Il allgue que les comptences spares des ordres juridictionnels administratif et judiciaire quant aux voies de recours offertes par le droit franais aux personnes hospitalises d'office compliquent l'introduction d'un recours pour ces personnes. Selon lui, l'article 5 4 imposerait l'existence d'un recours unique en la matire, permettant toute personne interne d'obtenir une dcision la fois sur la lgalit de sa dtention et sur son ventuelle libration. Il allgue que les recours actuellement disponibles en droit franais ne rpondent pas aux exigences de cette disposition, ds lors qu'aucun de ces recours ne permet de faire contrler la fois le bien-fond et la forme d'un arrt d'hospitalisation d'office et, le cas chant, d'obtenir la sortie immdiate de la personne hospitalise. La France serait l'un des seuls pays europens dans cette situation.

    100. Le gouvernement rappelle d'abord les principes rgissant, en droit franais, la double comptence juridictionnelle en matire d'hospitalisation d'office. Il existe en effet un recours devant le juge judiciaire pour valuer le bien-fond de la mesure d'internement et accorder rparation en cas d'internement injustifi et un recours devant le juge administratif pour apprcier la rgularit externe des dcisions administratives d'internement et rparer les ventuelles fautes de l'administration. Le gouvernement soutient que cette dualit ne saurait passer pour contraire au principe de l'existence en droit franais d'un recours effectif au sens de l'article 5 4 permettant de contester la lgalit d'une mesure d'internement, ce que la Cour aurait d'ailleurs dj reconnu dans sa jurisprudence, notamment dans l'arrt Delbec c. France (prcit). De plus, le gouvernement fait valoir qu'eu gard l'exigence de clrit pose par cette disposition, l'examen de la lgalit formelle de l'acte fondant la dtention peut tre moins approfondi, afin de garantir la clrit du contrle et, partant, de l'ventuelle dcision de remise en libert par le juge judiciaire. Au regard des faits de l'espce, le gouvernement considre que le requrant a bnfici d'un contrle de qualit satisfaisant aux exigences de la jurisprudence de la Cour. En effet, le contrle exerc par le juge administratif a t probant puisqu'il a permis de dceler l'irrgularit externe de certains arrts d'hospitalisation. En toute hypothse, le contrle exerc par le juge civil devrait suffire, lui seul, satisfaire les exigences de la Cour en matire de contrle juridictionnel. En effet, le recours au juge judiciaire, prvu aujourd'hui l'article L. 3211-12 du code de la sant publique, permet la remise en libert immdiate de la personne hospitalise. Mais ce juge a galement la possibilit de vrifier que l'acte administratif critiqu ne constitue pas une voie de fait. Certes, en l'espce, le juge judiciaire a exerc un contrle sur la ncessit de l'hospitalisation du requrant comme la loi le prvoit, pour y rpondre in fine par l'affirmative. Mais il a aussi, pour carter la voie de fait, port une apprciation sur la lgalit externe des arrts prfectoraux, comme le montre l'arrt rendu le 8 juillet 2005 par la cour d'appel de Bordeaux. Le gouvernement observe enfin que l'annulation des arrts litigieux est due uniquement un revirement de la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui a durci les exigences formelles quant la motivation des arrts d'hospitalisation d'office. Au moment o ceux-ci ont t pris, ils taient en ralit tout fait valables au regard de la jurisprudence alors applicable.

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    2. Apprciation de la Cour 101. La Cour rappelle qu'en garantissant un recours aux personnes arrtes ou dtenues l'article 5 4 consacre aussi le droit pour celles-ci d'obtenir, dans un bref dlai compter de l'introduction du recours, une dcision judiciaire concernant la rgularit de leur dtention et mettant fin la privation de leur libert si elle se rvle illgale (voir, parmi d'autres, Van der Leer c. Pays-Bas, 21 fvrier 1990, 35, srie A no 170-A, et Musial c. Pologne [GC], no 24557/94, 43, CEDH 1999-II). Dans le cas prcis de l'internement des alins, la Cour a jug qu'outre le contrle de la dcision privative de libert il doit toujours y avoir place pour un contrle ultrieur, exercer des intervalles raisonnables, car les motifs qui justifiaient l'origine la dtention peuvent cesser d'exister (Luberti c. Italie, 23 fvrier 1984, 31, srie A no 75). En outre, le contrle requis par l'article 5 4 doit tre assez ample pour s'tendre chacune des conditions indispensables la rgularit de la dtention d'une personne, en l'occurrence pour alination mentale (voir, parmi d'autres, Ashingdane c. Royaume-Uni, 28 mai 1985, 52, srie A no 93, E. c. Norvge, 29 aot 1990, 50, srie A no 181-A, et Hutchison Reid c. Royaume-Uni, no 50272/99, 64, CEDH 2003-IV). 102. La Cour constate qu'il s'agit en l'espce de dterminer si le requrant a dispos d'un recours effectif lui permettant d'obtenir la mainleve de la mesure d'hospitalisation d'office dont il faisait l'objet, alors que l'irrgularit formelle de l'acte fondant son internement tait avre. Elle estime qu'il lui faut cette fin examiner l'ensemble des voies de recours exerces par le requrant. 103. Tout d'abord, quant aux mcanismes de rfr dont a us l'intress, la Cour observe que ni le rfr-suspension prvu par l'article L. 521-1-12 du code de justice administrative, qui doit tre suivi d'un recours en annulation de l'arrt contest, ni le mcanisme de rfr-libert mis en place par la loi du 30 juin 2000 (paragraphe 71 ci-dessus), qui permet uniquement au juge de contrler l'illgalit manifeste d'un acte de l'autorit administrative, ne peuvent donner lieu un examen au fond de la lgalit d'une dcision d'internement. Ds lors, elle considre que ces recours ne tombent pas sous l'empire de l'article 5 4. 104. Quant aux recours en annulation, la Cour rappelle que, dans l'affaire Delbec (prcite), o la requrante avait saisi tant les tribunaux administratifs que les juridictions judiciaires, elle a relev que le recours en annulation pouvant tre introduit devant les juridictions administratives afin de contester la lgalit externe d'une mesure d'internement ne permettait pas aux interns d'obtenir la sortie immdiate de l'tablissement

    hospitalier. Aussi a-t-elle conclu dans cette affaire que la voie de recours administrative n'tait pas un recours pertinent sous l'angle de l'article 5 4 tant donn qu'il ne donnait pas au demandeur la possibilit d'tre mis en libert dans le cas o sa privation de libert tait dclare illgale (Delbec, prcit, 30). En consquence, elle a examin uniquement si la procdure judiciaire relative la demande de sortie immdiate tait ou non conforme l'article 5 4, pour finalement conclure la violation de cette disposition en raison du non-respect de la condition du bref dlai . 105. La Cour observe d'emble que rien dans la prsente affaire ne peut l'amener s'carter de la conclusion laquelle elle tait parvenue dans l'affaire Delbec. Elle relve en effet que les juges administratifs ont oppos plusieurs reprises au requrant leur incomptence s'agissant d'ordonner sa sortie immdiate, alors mme qu'ils venaient de constater l'illgalit de l'arrt fondant l'internement de l'intress (voir, notamment, la motivation du jugement rendu le 21 octobre 2004 par le tribunal administratif de Bordeaux - paragraphe 20 ci-dessus - annulant l'arrt prfectoral du 17 mai 2004). La Cour remarque cet gard que cette situation dcoule logiquement du partage de comptences opr par le Tribunal des conflits dans son arrt du 17 fvrier 1997 (paragraphe 69 ci-dessus), selon lequel lorsque la juridiction administrative s'est prononce sur la rgularit de l'arrt d'internement, c'est l'autorit judiciaire qui est comptente pour statuer sur les consquences dommageables de l'ensemble des irrgularits entachant la mesure d'hospitalisation d'office. 106. Quant la voie judiciaire ouverte aux personnes internes pour faire statuer sur leurs demandes de sortie immdiate, la Cour constate qu'en l'espce le requrant a us de cette possibilit. Elle relve que les juridictions judiciaires saisies se sont attaches dterminer si l'hospitalisation d'office du requrant tait justifie par son tat de sant, et n'ont abord la question de la lgalit externe des arrts d'hospitalisation que pour constater la comptence des juges administratifs en la matire. Ainsi, dans son arrt du 8 juillet 2005, la cour d'appel de Bordeaux a annul le jugement rendu prcdemment par le juge des liberts et de la dtention ordonnant la sortie immdiate du requrant au motif notamment que l'apprciation du moyen tir de l'irrgularit des arrts prfectoraux des 9 novembre 2004, 7 dcembre 2004 [...] et 10 mars 2005 [...] n'est pas de la comptence du juge civil mais de celle du juge administratif (paragraphe 40 ci-dessus). En conclusion, la cour d'appel a relev qu'aucune voie de fait ne pouvait tre retenue, et qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner la sortie immdiate du requrant.

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    107. Pour la Cour, il ressort donc des faits de l'espce que le juge judiciaire n'est pas habilit examiner les conditions de validit formelle des arrts litigieux. 108. Certes, la Cour relve, avec le gouvernement, la complmentarit des recours existants pouvant permettre de contrler l'ensemble des lments de la lgalit d'un acte, puis aboutir la libration de la personne interne. Toutefois, dans la prsente affaire, la Cour ne peut que constater que les actes successifs fondant la privation de libert du requrant ont t annuls par les juges administratifs, sans que jamais l'intress n'obtienne une dcision des tribunaux judiciaires mettant fin la mesure d'hospitalisation. Ds lors, la Cour parvient la conclusion que, dans les circonstances trs particulires de l'espce, l'articulation entre la comptence du juge judiciaire et celle du juge administratif quant aux voies de recours offertes n'a pas permis au requrant d'obtenir une dcision d'un tribunal pouvant statuer sur la lgalit de sa dtention et ordonner sa libration si la dtention est illgale . 109. Eu gard ce qui prcde, la Cour estime qu'il y a lieu d'accueillir l'exception souleve par le gouvernement quant l'inapplicabilit de l'article 5 4 aux procdures introduites par le requrant devant les juridictions de l'ordre administratif (recours en annulation et procdures de rfr). Elle constate en outre que le requrant n'a dispos d'aucun recours effectif qui lui aurait permis d'obtenir une dcision judiciaire constatant l'irrgularit de l'acte fondant son internement et mettant fin, par voie de consquence, sa privation de libert irrgulire. 110. Partant, elle conclut la violation de l'article 5 4. Doc. 9 : Cons. const., 26 novembre 2010, Mlle Danielle S., n 2010-71 QPC Le Conseil constitutionnel a t saisi le 24 septembre 2010 par le Conseil d'tat (dcision n 339110 du 24 septembre 2010), dans les conditions prvues l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalit pose par Mlle Danielle S., relative la conformit aux droits et liberts que la Constitution garantit des dispositions des articles L. 326-3, L. 331, L. 333, L. 333-1, L. 333-2, L. 334, L. 337 et L. 351 du code de la sant publique, dsormais repris aux articles L. 3211-3, L. 3211-12, L. 3212-1, L. 3212-2, L. 3212-3, L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3222-1 du mme code. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

    Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n 58-1067 du 7 novembre 1958 modifie portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de la sant publique ; Vu la loi n 81-82 du 2 fvrier 1981 renforant la scurit et protgeant la libert des personnes, notamment son article 71 ; Vu la loi n 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et la protection des personnes hospitalises en raison de troubles mentaux et leurs conditions d'hospitalisation ; Vu l'ordonnance n 2000-548 du 15 juin 2000 relative la partie lgislative du code de la sant publique ; [...] 10. Considrant que la requrante conteste, d'une part, les conditions dans lesquelles une personne peut tre place, la demande d'un tiers, puis maintenue en hospitalisation sans son consentement et, d'autre part, l'insuffisance des droits reconnus aux personnes ainsi hospitalises ; [...] Sur les droits des personnes hospitalises sans leur consentement : 27. Considrant que, selon la requrante, les conditions dans lesquelles les hospitalisations sans consentement sont mises en oeuvre mconnaissent la dignit de la personne ; qu'elle soutient galement qu'en ne reconnaissant pas ces personnes le droit de tlphoner et le droit de refuser un traitement, l'article L. 326-3 du code de la sant publique porte une atteinte inconstitutionnelle aux droits et liberts ; qu'enfin le droit de ces malades un recours juridictionnel ne serait pas effectif compte tenu de la lenteur des procdures, de l'absence d'information effective de ces personnes sur leurs droits et de la dualit des comptences des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire ; [...] En ce qui concerne le droit un recours juridictionnel effectif : 33. Considrant qu'aux termes de l'article 16 de la Dclaration de 1789 : Toute socit dans laquelle la garantie des droits n'est pas assure, ni la

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    sparation des pouvoirs dtermine, n'a point de Constitution ; qu'est garanti par cette disposition le droit des personnes intresses exercer un recours juridictionnel effectif ; 34. Considrant, en premier lieu, qu'en vertu du deuxime alina de l'article L. 326-3 du code de la sant publique toute personne hospitalise sans son consentement doit tre informe ds l'admission et, par la suite, sa demande, de sa situation juridique et de ses droits ; que, selon le troisime alina de ce mme article, elle dispose en tout tat de cause du droit de prendre conseil d'un avocat de son choix ; 35. Considrant, en deuxime lieu, que la Constitution reconnat deux ordres de juridictions au sommet desquels sont placs le Conseil d'Etat et la Cour de cassation ; que figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la Rpublique celui selon lequel, l'exception des matires rserves par nature l'autorit judiciaire, relve en dernier ressort de la comptence de la juridiction administrative l'annulation ou la rformation des dcisions prises, dans l'exercice des prrogatives de puissance publique, par les autorits exerant le pouvoir excutif, leurs agents, les collectivits territoriales de la Rpublique ou les organismes publics placs sous leur autorit ou leur contrle ; 36. Considrant que, dans la mise en oeuvre de ce principe, lorsque l'application d'une lgislation ou d'une rglementation spcifique pourrait engendrer des contestations contentieuses diverses qui se rpartiraient, selon les rgles habituelles de comptence, entre la juridiction administrative et la juridiction judiciaire, il est loisible au lgislateur, dans l'intrt d'une bonne administration de la justice, d'unifier les rgles de comptence juridictionnelle au sein de l'ordre juridictionnel principalement intress ; 37. Considrant que, si, en l'tat du droit applicable, les juridictions de l'ordre judiciaire ne sont pas comptentes pour apprcier la rgularit de la procdure et de la dcision administratives qui ont conduit une mesure d'hospitalisation sans consentement, la dualit des ordres de juridiction ne limite pas leur comptence pour apprcier la ncessit de la privation de libert en cause ; 38. Considrant, en troisime lieu, que l'article L. 351 du code de la sant publique reconnat toute personne hospitalise sans son consentement ou retenue dans quelque tablissement que ce soit le droit de se pourvoir par simple requte tout moment devant le prsident du tribunal de grande instance pour qu'il soit mis fin l'hospitalisation sans consentement ; que le droit de saisir ce juge est

    galement reconnu toute personne susceptible d'intervenir dans l'intrt de la personne hospitalise ; 39. Considrant toutefois que, s'agissant d'une mesure privative de libert, le droit un recours juridictionnel effectif impose que le juge judiciaire soit tenu de statuer sur la demande de sortie immdiate dans les plus brefs dlais compte tenu de la ncessit ventuelle de recueillir des lments d'information complmentaires sur l'tat de sant de la personne hospitalise ; 40. Considrant qu'il rsulte de ce qui prcde que, sous la rserve nonce au considrant 39, les articles L. 326-3 et L. 351 du code de la sant publique ne sont pas contraires aux droits et liberts que la Constitution garantit ; Doc. 10 : Art. L. 3216-1 du Code de la sant publique (issu de la loi n 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux

    droits et la protection des personnes faisant lobjet de soins psychiatriques et aux modalits de leur

    prise en charge) : La rgularit des dcisions administratives prises en application des chapitres II IV du prsent titre [relatifs ladmission en soins psychiatriques la demande dun tiers ou en cas de pril imminent, sur dcision du reprsentant de lEtat, ou des personnes dtenues atteintes de troubles mentaux] ne peut tre conteste que devant le juge judiciaire. Doc. 11 : T. confl., 17 octobre 2011, SCEA du Chneau c/ INAPORC Vu, 1 sous le n 3828, la lettre, enregistre son secrtariat le 17 juin 2011, par laquelle le garde des Sceaux, ministre de la justice et des liberts, a transmis au Tribunal le dossier de la procdure opposant la SCEA du Chneau et autres l'interprofession nationale porcine (INAPORC) et autres devant le tribunal de grande instance de Rennes ; Vu le dclinatoire, prsent le 14 fvrier 2011 par le prfet de la rgion Bretagne, prfet d'Ille-et-Vilaine, tendant voir dclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incomptente pour se prononcer sur la question, que posent ncessairement les demandes dont elle est saisie, de la lgalit des arrts interministriels rendant obligatoires les cotisations interprofessionnelles en cause, par le motif qu'il n'appartient qu'au Conseil d'Etat, qui doit tre saisi d'une question prjudicielle en ce sens, de statuer sur la lgalit de ces actes rglementaires ;

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    Vu le jugement du 18 avril 2011 par lequel tribunal de grande instance de Rennes a rejet le dclinatoire de comptence ; Vu l'arrt du 9 mai 2011 par lequel le prfet a lev le conflit ; [...] Vu, 2 sous le n 3829, la lettre, enregistre son secrtariat le 17 juin 2011, par laquelle le garde des Sceaux, ministre de la justice et des liberts, a transmis au Tribunal le dossier de la procdure opposant M. Cherel et autres au Centre national interprofessionnel de l'conomie laitire (CNIEL) et autres devant le tribunal de grande instance de Rennes ; Vu le dclinatoire, prsent le 14 fvrier 2011 par le prfet de la rgion Bretagne, prfet d'Ille-et-Vilaine, tendant voir dclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incomptente pour se prononcer sur la question, que posent ncessairement les demandes dont elle est saisie, de la lgalit des arrts interministriels rendant obligatoires les cotisations interprofessionnelles en cause, par le motif qu'il n'appartient qu'au Conseil d'Etat, qui doit tre saisi d'une question prjudicielle en ce sens, de statuer sur la lgalit de ces actes rglementaires ; Vu le jugement du 18 avril 2011 par lequel tribunal de grande instance de Rennes a rejet le dclinatoire de comptence ; Vu l'arrt du 9 mai 2011 par lequel le prfet a lev le conflit ; [...] Vu les autres pices du dossier ; Vu la loi des 16-24 aot 1790 et le dcret du 16 fructidor an III ; Vu la loi du 24 mai 1872 ; Vu l'ordonnance du 1er juin 1828 ; Vu l'ordonnance des 12-21 mars 1831 ; Vu le dcret du 26 octobre 1849 ; Vu la Constitution ; Vu le trait sur l'Union europenne et le trait sur le fonctionnement de l'Union europenne ; Vu le code rural et de la pche maritime ; Vu la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;

    [...] Considrant que les arrts de conflit viss ci-dessus soulvent la mme question de comptence ; qu'il y a lieu de les joindre et de statuer par une seule dcision ; Considrant que les litiges opposant, devant le tribunal de grande instance de Rennes, d'une part, la SCEA du Chneau et autres l'interprofession nationale porcine (INAPORC) et autres et, d'autre part, M. Cherel et autres au Centre national interprofessionnel de l'conomie laitire (CNIEL) et autres portent sur le remboursement de cotisations interprofessionnelles volontaires rendues obligatoires que les demandeurs ont verses en application d'accords interprofessionnels rendus obligatoires par des arrts interministriels pris en application, respectivement, des articles L. 632-3 et L. 632-12 du code rural et de la pche maritime ; que, si ces litiges opposant des personnes prives relvent titre principal des tribunaux de l'ordre judiciaire, les demandeurs se fondent sur ce que les cotisations litigieuses auraient t exiges en application d'un rgime d'aide d'Etat irrgulirement institu, faute d'avoir t pralablement notifi la Commission europenne en application des articles 87 et 88 du trait instituant la Communaut europenne, devenus les articles 107 et 108 du trait sur le fonctionnement de l'Union europenne ; que le prfet de la rgion Bretagne, prfet d'Ille-et-Vilaine, estimant que la contestation ainsi souleve portait sur la lgalit d'actes administratifs rglementaires, a prsent deux dclinatoires demandant au tribunal de grande instance de se dclarer incomptent pour connatre de cette contestation et de poser en consquence la juridiction administrative une question prjudicielle ; que, par jugements du 18 avril 2011, le tribunal de grande instance a rejet ces dclinatoires ; que, par arrts du 9 mai 2011, le prfet a lev le conflit ; Sur la rgularit de la procdure de conflit : Considrant qu'aux termes de l'article 8 de l'ordonnance du 1er juin 1828 : Si le dclinatoire de comptence est rejet, le prfet du dpartement pourra lever le conflit dans la quinzaine de rception pour tout dlai [...] et que, selon l'article 11 de la mme ordonnance : Si dans le dlai de quinzaine l'arrt de conflit n'tait pas parvenu au greffe, le conflit ne pourrait plus tre lev devant le tribunal saisi de l'affaire ; Considrant qu'il ressort des dossiers que la copie de chacun des jugements du 18 avril 2011 intervenus sur les dclinatoires de comptence a t notifie au prfet par lettre recommande reue le

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    26 avril suivant ; que, les arrts de conflit pris le 9 mai 2011 ont t reus au parquet et dposs au greffe du tribunal de grande instance le lendemain 10 mai, soit avant l'expiration du dlai de quinzaine prescrit par les articles 8 et 11 de l'ordonnance du 1er juin 1828 ; qu'ainsi, contrairement ce que soutiennent la SCEA du Chneau et autres et M. Cherel et autres, le conflit n'a pas t lev tardivement ; Sur la validit des arrts de conflit : Considrant qu'en vertu du principe de sparation des autorits administratives et judiciaires pos par l'article 13 de la loi des 16-24 aot 1790 et par le dcret du 16 fructidor an III, sous rserve des matires rserves par nature l'autorit judiciaire et sauf dispositions lgislatives contraires, il n'appartient qu' la juridiction administrative de connatre des recours tendant l'annulation ou la rformation des dcisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prrogatives de puissance publique ; que de mme, le juge administratif est en principe seul comptent pour statuer, le cas chant par voie de question prjudicielle, sur toute contestation de la lgalit de telles dcisions, souleve l'occasion d'un litige relevant titre principal de l'autorit judiciaire ; Considrant que, pour retenir nanmoins sa comptence et rejeter les dclinatoires, le tribunal de grande instance de Rennes s'est fond sur les dispositions de l'article 55 de la Constitution et sur le principe de la primaut du droit communautaire ; Considrant que les dispositions de l'article 55 de la Constitution confrant aux traits, dans les conditions qu'elles dfinissent, une autorit suprieure celle des lois ne prescrivent ni n'impliquent aucune drogation aux principes, rappels ci-dessus, rgissant la rpartition des comptences entre ces juridictions, lorsquest en cause la lgalit d'une disposition rglementaire, alors mme que la contestation porterait sur la compatibilit d'une telle disposition avec les engagements internationaux ; Considrant toutefois, d'une part, que ces principes doivent tre concilis tant avec l'exigence de bonne administration de la justice qu'avec les principes gnraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions, en vertu desquels tout justiciable a droit ce que sa demande soit juge dans un dlai raisonnable ; qu'il suit de l que si, en cas de contestation srieuse portant sur la lgalit d'un acte administratif, les tribunaux de l'ordre judiciaire statuant en matire civile doivent surseoir statuer jusqu' ce que la question prjudicielle de la lgalit de cet acte soit tranche par la juridiction administrative, il en va autrement lorsqu'il apparat

    manifestement, au vu d'une jurisprudence tablie, que la contestation peut tre accueillie par le juge saisi au principal ; Considrant, d'autre part, que, s'agissant du cas particulier du droit de l'Union europenne, dont le respect constitue une obligation, tant en vertu du trait sur l'Union europenne et du trait sur le fonctionnement de l'Union europenne qu'en application de l'article 88-1 de la Constitution, il rsulte du principe d'effectivit issu des dispositions de ces traits, telles qu'elles ont t interprtes par la Cour de justice de l'Union europenne, que le juge national charg d'appliquer les dispositions du droit de l'Union a l'obligation d'en assurer le plein effet en laissant au besoin inappliqu, de sa propre autorit, toute disposition contraire ; qu' cet effet, il doit pouvoir, en cas de difficult d'interprtation de ces normes, en saisir lui-mme la Cour de justice titre prjudiciel ou, lorsqu'il s'estime en tat de le faire, appliquer le droit de l'Union, sans tre tenu de saisir au pralable la juridiction administrative d'une question prjudicielle, dans le cas o serait en cause devant lui, titre incident, la conformit d'un acte administratif au droit de l'Union europenne ; Considrant que, si la contestation souleve par la SCEA du Chneau et autres et par M. Cherel et autres met ncessairement en cause la lgalit des actes administratifs qui ont rendu obligatoires les cotisations litigieuses, il rsulte de ce qui vient d'tre dit qu'il appartient la juridiction de l'ordre judiciaire, comptemment saisie du litige au principal, de se prononcer elle-mme, le cas chant aprs renvoi la Cour de justice, sur un moyen tir de la mconnaissance du droit de l'Union europenne ; que c'est ds lors tort que le conflit a t lev ; Considrant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espce, de faire droit aux conclusions prsents par la SCEA du Chneau et autres et par M. Cherel et autres en application de l'article 75 I de la loi du 10 juillet 1991 ; [annulation] Doc. 12 : CE, 23 mars 2012, Fdration Sud Sant Sociaux Vu la requte, enregistre le 8 septembre 2009 au secrtariat du contentieux du Conseil d'Etat, prsente par la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX, dont le sige est 70, rue Philippe de Girard Paris (75018), reprsente par son secrtaire gnral ; la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excs de pouvoir l'arrt du 7 juillet 2009 en tant qu'il agre l'accord du 20 mai 2009 de la

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    branche sanitaire, sociale et mdico-sociale but non lucratif relatif la mise disposition de salaris auprs d'une organisation syndicale ; [...] Considrant que l'Union des fdrations et syndicats nationaux d'employeurs sans but lucratif du secteur sanitaire, mdico-social et social (UNIFED) a conclu le 20 mai 2009 avec les organisations syndicales CFDT sant sociaux, CFTC sant sociaux, CFE-CGC sant mdecine et action sociale, CGT sant et action sociale, FO sant et FO action sociale un accord de branche dterminant les conditions de mise disposition de salaris auprs de ces organisations syndicales ; que cet accord a fait l'objet d'un agrment du ministre charg de l'action sociale par arrt du 7 juillet 2009, conformment l'article L. 314-6 du code l'action sociale et des familles, et a t tendu par arrt du 18 dcembre 2009 ; que la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX demande l'annulation de l'arrt du 7 juillet 2009 en tant qu'il agre cet accord ; Considrant qu'aux termes de l'article L. 314-6 du code de l'action sociale et des familles : Les conventions collectives de travail, conventions d'entreprise ou d'tablissement et accords de retraite applicables aux salaris des tablissements et services sociaux et mdico-sociaux but non lucratif dont les dpenses de fonctionnement sont, en vertu de dispositions lgislatives ou rglementaires, supportes, en tout ou partie, directement ou indirectement, soit par des personnes morales de droit public, soit par des organismes de scurit sociale, ne prennent effet qu'aprs agrment donn par le ministre comptent aprs avis d'une commission o sont reprsents des lus locaux et dans des conditions fixes par voie rglementaire ; Considrant qu'aux termes du premier alina de l'article L. 2135-7 du code du travail : Avec son accord exprs et dans les conditions prvues par l'article L. 2135-8, un salari peut tre mis disposition d'une organisation syndicale ou d'une association d'employeurs mentionnes l'article L. 2231-1 ; qu'aux termes de l'article L. 2135-8 du mme code : Une convention collective ou un accord collectif de branche tendus ou un accord d'entreprise dtermine les conditions dans lesquelles il peut tre procd une mise disposition de salaris auprs d'organisations syndicales ou d'associations d'employeurs. ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 2231-1 de ce code : La convention ou l'accord est conclu entre : / - d'une part, une ou plusieurs organisations syndicales de salaris reprsentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord ; / -

    d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales d'employeurs ou toute autre association d'employeurs [...] ; qu'il rsulte de la combinaison de ces dispositions que la convention collective ou l'accord de branche tendu dterminant les conditions dans lesquelles il peut tre procd une mise disposition de salaris auprs d'organisations syndicales doit tre sign par les organisations syndicales reprsentatives dans le champ d'application de la convention ou de l'accord et que cette mise disposition ne peut se faire qu'auprs d'organisations syndicales reprsentatives ; Considrant que la loi du 20 aot 2008 portant rnovation de la dmocratie sociale et rforme du temps de travail a introduit dans le code du travail de nouveaux critres d'apprciation de la reprsentativit syndicale et mis fin, l'issue de la priode transitoire prvue son article 11, la prsomption irrfragable de reprsentativit dont bnficiaient, au niveau national et interprofessionnel, les organisations syndicales de salaris reconnues reprsentatives par l'arrt du 31 mars 1966 du premier ministre et du ministre charg du travail et, au niveau de la branche professionnelle, les organisations syndicales de salaris affilies aux prcdentes ; qu'aux termes de l'article 11 de cette mme loi : I - La premire mesure de l'audience au niveau des branches professionnelles et au niveau national et interprofessionnel, prvue aux articles L. 2122-5 et L. 2122-9 du code du travail, dans leur rdaction issue de la prsente loi, est ralise au plus tard cinq ans aprs la publication de la prsente loi. / II - Jusqu' la premire dtermination des organisations syndicales de salaris reconnues reprsentatives au niveau national et interprofessionnel, telle que prvue au I de cet article, sont prsumes reprsentatives ce niveau les organisations syndicales de salaris prsumes reprsentatives au niveau national et interprofessionnel la date de publication de la prsente loi [...], ainsi que toute organisation syndicale de salaris dont la reprsentativit est fonde sur les critres mentionns l'article L. 2121-1 du code du travail, dans sa rdaction antrieure la prsente loi. / III - Jusqu' la premire dtermination des organisations syndicales de salaris reconnues reprsentatives au niveau de la branche professionnelle, telle que prvue au I du prsent article, sont prsums reprsentatifs ce niveau les syndicats affilis aux organisations syndicales de salaris reprsentatives au niveau national et interprofessionnel mentionnes au II et les organisations syndicales de salaris dj reprsentatives au niveau de la branche la date de publication de la prsente loi [...] ; Considrant, en premier lieu, que les organisations syndicales signataires de l'accord taient, la date de la signature de cet accord, reprsentatives, en

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    vertu du III de l'article 11 de la loi du 20 aot 2008, dans le champ d'application de l'accord en raison de leur affiliation aux organisations syndicales de salaris reprsentatives au niveau national et interprofessionnel ; que, par suite, le moyen tir de ce que l'accord aurait t sign par des organisations qui n'auraient pas justifi de leur reprsentativit dans le champ de l'accord doit tre cart ; Considrant, en deuxime lieu, que le moyen tir de ce que le ministre ne justifierait pas avoir vrifi la validit des mandats dont disposaient les signataires de l'accord ne peut qu'tre cart, ds lors qu'il n'est pas mme allgu que ces mandats auraient fait dfaut ; Considrant cependant, en troisime lieu, que pour contester l'arrt attaqu, la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX soutient que l'accord qu'il agre, qui accorde la mise disposition de salaris six organisations syndicales prsumes reprsentatives la date de sa signature, d'une part, mconnat la loi du 20 aot 2008 en ce qu'il est conclu pour une dure indtermine et ne prvoit de rvision que par la volont des parties, alors qu'il aurait d prvoir une vrification priodique du caractre reprsentatif des bnficiaires ainsi que de l'ventuelle apparition d'une organisation nouvellement reprsentative, d'autre part, mconnat le principe d'galit ; que si une organisation syndicale devenue reprsentative peut adhrer l'accord et soit en demander la rvision, soit le dnoncer ou, lorsqu'elle a recueilli la majorit des suffrages exprims, exercer son droit d'opposition l'entre en vigueur d'un ventuel avenant, l'accord agr ne comporte pas de stipulations permettant de prendre en compte les consquences de la mise en oeuvre des nouvelles rgles de reprsentativit issues de la loi du 20 aot 2008 ; que s'il est soutenu qu'il pourrait, le cas chant, tre procd l'abrogation de l'arrt d'extension de l'accord qui serait devenu illgal la suite de l'apparition d'une nouvelle organisation syndicale reprsentative, cette circonstance est en tout tat de cause sans incidence sur la lgalit de l'arrt attaqu, qui doit tre apprcie la date laquelle il est intervenu ; Considrant que, lorsque, l'occasion d'un litige relevant de la comptence de la juridiction administrative, une contestation srieuse s'lve sur la validit d'un arrt prononant l'extension ou l'agrment d'une convention ou d'un accord collectif de travail, il appartient au juge saisi de ce litige de surseoir statuer jusqu' ce que l'autorit judiciaire se soit prononce sur la question prjudicielle que prsente juger cette contestation ; Considrant toutefois qu'eu gard l'exigence de

    bonne administration de la justice et aux principes gnraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions, en vertu desquels tout justiciable a droit ce que sa demande soit juge dans un dlai raisonnable, il en va autrement s'il apparat manifestement, au vu d'une jurisprudence tablie, que la contestation peut tre accueillie par le juge saisi au principal ; qu'en outre, s'agissant du cas particulier du droit de l'Union europenne, dont le respect constitue une obligation, tant en vertu du trait sur l'Union europenne et du trait sur le fonctionnement de l'Union europenne qu'en application de l'article 88-1 de la Constitution, il rsulte du principe d'effectivit issu des dispositions de ces traits, telles qu'elles ont t interprtes par la Cour de justice de l'Union europenne, que le juge national charg d'appliquer les dispositions du droit de l'Union a l'obligation d'en assurer le plein effet en laissant au besoin inapplique, de sa propre autorit, toute disposition contraire ; qu' cet effet, le juge administratif doit pouvoir, en cas de difficult d'interprtation de ces normes, en saisir lui-mme la Cour de justice titre prjudiciel ou, lorsqu'il s'estime en tat de le faire, appliquer le droit de l'Union europenne, sans tre tenu de saisir au pralable l'autorit judiciaire d'une question prjudicielle, dans le cas o serait en cause devant lui, titre incident, la conformit d'une convention ou d'un accord collectif au droit de l'Union europenne ; Considrant, par ailleurs, que dans l'hypothse o le lgislateur a prvu que les mesures prises pour l'application de la loi seront dfinies par un accord collectif conclu entre les partenaires sociaux, dont l'entre en vigueur est subordonne l'intervention d'un arrt ministriel d'extension ou d'agrment, il appartient au juge administratif, comptemment saisi d'un recours pour excs de pouvoir dirig contre cet arrt, de se prononcer lui-mme, compte tenu de la nature particulire d'un tel accord, sur les moyens mettant en cause la lgalit de ce dernier ; Considrant qu'en l'espce le lgislateur a ouvert aux partenaires sociaux une simple facult de conclure une convention collective ou un accord, au niveau de la branche ou de l'entreprise, prvoyant les conditions dans lesquelles des salaris peuvent tre mis disposition des organisations syndicales reprsentatives ou d'associations d'employeurs ; qu'en outre, l'article L. 314-6 du code de l'action sociale et des familles, s'il prvoit que les conventions collectives de travail et les accords de retraite applicables aux salaris des tablissements sociaux et services sociaux et mdico-sociaux dont des personnes morales de droit public ou des organismes de scurit sociale assurent en tout ou partie le financement ne prennent effet qu'aprs leur agrment, n'a pas pour objet de confier aux partenaires sociaux le soin de dfinir les mesures

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    prises pour l'application de la loi ; que la contestation de l'accord litigieux au regard de la loi du 20 aot 2008, en ce qu'il est conclu pour une dure indtermine et ne prvoit de rvision que par la volont des parties, et au regard du principe d'galit, qui ne peut tre rsolue au vu d'une jurisprudence tablie et qui ne met pas en cause la conformit de l'accord litigieux au droit de l'Union europenne, soulve une difficult srieuse qui justifie que le Conseil d'Etat sursoie statuer sur la requte de la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX tendant l'annulation de l'arrt du 7 juillet 2009 en tant qu'il agre l'accord du 20 mai 2009 jusqu' ce que la juridiction comptente se soit prononce sur cette question ; Dcide : Article 1er : Il est sursis statuer sur la requte de la FEDERATION SUD SANTE SOCIAUX dirige contre l'arrt du 7 juillet 2009 en tant qu'il agre l'accord du 20 mai 2009 jusqu' ce que l'autorit judiciaire se soit prononce sur la licit de cet accord, au regard de la loi du 20 aot 2008, en ce qu'il est conclu pour une dure indtermine et ne prvoit de rvision que par la volont des parties, et au regard du principe d'galit. Doc. 13 : Cass. civ. 1, 24 mars 2013, n 12-18.180 Attendu, selon l'arrt attaqu (Bourges, 22 mars 2012), que le syndicat mixte du Parc des Grivelles (le syndicat) a confi MM. X., Y. et Z., pour le compte d'une socit en formation, puis la socit Les Fils de Madame Graud et la socit Frry (les socits), l'exploitation du march bestiaux du Parc des Grivelles dpendant du domaine public de la commune de Sancoins (la commune), que la convention initiale, conclue le 6 juin 1974, a t modifie par un avenant, intitul convention de refonte , sign le 24 novembre 1994 et lui mme suivi de plusieurs avenants, que par lettre du 5 juin 2009, le syndicat a rsili la convention d'affermage pour motif d'intrt gnral, avec effet au 1er septembre 2009 ; que les socits ont saisi les juridictions de l'ordre judiciaire pour obtenir rparation de leurs prjudices ; [...] Sur les premier, deuxime et troisime moyens runis : Attendu que le syndicat et la commune font grief l'arrt de rejeter leur demande de sursis statuer jusqu' ce que le tribunal administratif ait apprci, par voie prjudicielle, la lgalit, dans leur ensemble, de la convention de refonte et de ses avenants, ainsi que celle des articles 20, 21 et 22 de

    cette mme convention alors, selon le moyen : 1/ qu'il n'appartient au juge civil ni d'interprter les clauses d'un contrat administratif ou des avenants qui l'ont modifi ni d'en apprcier la validit ; que l'article 136 du dcret du 17 mai 1809 relatif aux octrois municipaux, applicable aux droits de places perus dans les halles et marchs, attribue spcialement comptence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur toutes les contestations qui pourraient s'lever entre les communes et les fermiers de ces taxes indirectes, sauf renvoi prjudiciel la juridiction administrative sur le sens et la lgalit des clauses contestes des baux ; qu'il s'ensuit que la juridiction administrative est seule comptente pour apprcier, par voie de question prjudicielle, la lgalit d'un contrat relatif la perception des droits de place dans les halles, foires et marchs ; qu'il revient ensuite l'autorit judiciaire, lorsqu'elle est saisie par une commune et son fermier d'un litige relatif l'excution du contrat qui les lie, d'apprcier si elle doit carter le contrat et renoncer rgler le litige sur le terrain contractuel, eu gard l'illgalit constate, le cas chant, par la juridiction administrative ; qu'il rsulte des dispositions de l'article 38 et 40 de la loi n 93 122 du 29 janvier 1993 relative la prvention de la corruption et la transparence de la vie conomique et des procdures publiques, applicables la date de conclusion des conventions litigieuses, que les dlgations de service public des personnes publiques sont soumises par l'autorit dlgante une procdure de publicit et mise en concurrence et qu'elles doivent tre limites dans leur dure, celle-ci tant fonction de la dure normale d'amortissement des installations mises la charge du dlgataire et ne pouvant tre prolonge que sous certaines conditions ; qu'en l'espce, la lgalit de l'avenant-convention de refonte conclu le 24 novembre 1994 sans mise en concurrence pralable et pour une dure de vingt-cinq ans, de la dlibration du 16 novembre 1994 par laquelle le conseil syndical a autoris le prsident du syndicat mixte signer ledit avenant, de l'avenant n 1 du 13 mars 1996, de la dlibration du 22 dcembre 1995 autorisant le prsident du syndicat mixte le signer et des avenants ultrieurs suscitait, au regard de ces dispositions, une difficult srieuse et dont dpendait la solution du litige, qui chappait la comptence de la juridiction judiciaire qui il appartenait de renvoyer les parties faire trancher la question prjudicielle par la juridiction administrative et de surseoir statuer ; qu'il appartenait seulement ensuite au juge judiciaire de tirer les consquences des illgalits ventuellement constates par le juge administratif en rglant le litige sur un terrain contractuel ou en choisissant au contraire d'carter le contrat, eu gard la gravit du vice entachant ce dernier ; qu'en rejetant la

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    demande de question prjudicielle, la cour d'appel a viol la loi des 16-24 aot 1790, ensemble le dcret du 16 fructidor an III, le dcret du 17 mai 1809 et les articles 38 et 40 de la loi n 93-122 du 29 janvier 1993 codifis aux articles L. 1411-1 et L. 1411-2 du code gnral des collectivits territoriales concernant ces dernires ; 2/ que le juge administratif est seul comptent pour apprcier la lgalit d'un contrat relatif la perception des droits de place dans les halles, foires et marchs ; qu'au cas d'espce, la lgalit de l'avenant-convention de refonte du 24 novembre 1994, des avenants postrieurs et des dlibrations autorisant leur signature posait une difficult srieuse et dont dpendait le rglement du litige, au regard des rgles de mise en concurrence et de dure des dlgations de service public prvues par les articles 38 et 40 de la loi n 93 122 du 29 janvier 1993 codifis aux articles L. 1411-1 et L. 1411-2 du code gnral des collectivits territoriales concernant ces dernires ; qu'en rejetant la demande de question prjudicielle, la cour d'appel a mconnu la comptence du juge administratif auquel il appartenait seul d'apprcier l'irrgularit ainsi invoque ; qu'elle a, ce faisant, commis un excs de pouvoir en violation de la loi des 16-24 aot 1790, ensemble le dcret du 16 fructidor an III ; 3/ que l'article 136 du dcret du 17 mai 1809 relatif aux octrois municipaux et de bienfaisance, applicable aux droits de places perus dans les halles et marchs, attribue spcialement comptence aux tribunaux judiciaires pour statuer sur toutes les contestations qui pourraient s'lever entre les communes et les fermiers de ces taxes indirectes, sauf renvoi prjudiciel la juridiction administrative sur le sens et la lgalit des clauses contestes des baux ; qu'il s'ensuit que la juridiction administrative, saisie par voie de question prjudicielle, est seule comptente pour apprcier la lgalit d'un contrat relatif la perception des droits de place dans les halles, foires et marchs ; qu'il revient au juge judiciaire, lorsqu'il est saisi par une commune et son fermier d'un litige relatif l'excution du contrat qui les lie, d'apprcier s'il doit carter le contrat et renoncer rgler le litige sur le terrain contractuel, eu gard l'illgalit constate, le cas chant, par la juridiction administrative ; qu'il rsulte des dispositions de l'article L. 376-2 du code des communes, alors en vigueur, reprises l'article L. 2224-18 du code gnral des collectivits territoriales, que le rgime des droits de place et de stationnement sur les halles et les marchs est dfini conformment aux dispositions d'un cahier des charges ou d'un rglement tabli par l'autorit municipale aprs consultation des organisations professionnelles intresses ; qu'en l'espce, la lgalit des articles 20 22 de l'avenant-convention de refonte du 24 novembre 1994 relatifs

    aux redevances et aux tarifs posait au regard de ces dispositions une difficult srieuse dont dpendait la solution du litige, ds lors que les organisations professionnelles intresses n'ont jamais t consultes ; qu'il appartenait la cour d'appel de surseoir statuer jusqu' ce que le juge administratif statue sur cette question pour ensuite apprcier, eu gard l'irrgularit ventuellement releve par ce dernier, s'il devait carter le contrat et renoncer rgler le litige sur le terrain contractuel ; qu'en rejetant la demande de renvoi prjudiciel, la cour d'appel a mconnu la loi des 16-24 aot 1790, ensemble le dcret du 16 fructidor an III, le dcret du 17 mai 1809 et les dispositions de l'article L. 376-2 du code des communes reprises l'article L. 2224-18 du code gnral des collectivits territoriales ; 4/ que l'apprciation de la lgalit des clauses relatives aux redevances et aux tarifs d'un contrat d'affermage des droits de place sur les marchs communaux relve de la comptence du juge administratif ds lors que se pose une difficult srieuse dont la solution est ncessaire la rsolution du litige ; que tel tait le cas en l'espce, au regard des dispositions de l'article L. 376-2 du code des communes devenu l'article L. 2224-18 du code gnral des collectivits territoriales, faute de consultation des organisations professionnelles intresses pralablement l'adoption de ces clauses ; que le comportement des parties et le principe de loyaut des relations contractuelles taient sans incidence sur cette irrgularit et ne pouvaient tre pris en compte par le juge judiciaire qu'au stade de l'apprciation des consquences tirer de l'illgalit ventuellement constate par le juge administratif ; qu'en rejetant la demande de renvoi prjudiciel, la cour d'appel a commis un excs de pouvoir au regard de la loi des 16-24 aot 1790 et du dcret du 16 fructidor an III ; 5/ que la juridiction administrative, saisie par voie de question prjudicielle, est seule comptente pour apprcier la lgalit d'un contrat relatif la perception des droits de place dans les halles, foires et marchs ; qu'il revient au juge judiciaire, lorsqu'il est saisi par une commune et son fermier d'un litige relatif l'excution du contrat qui les lie, d'apprcier s'il doit carter le contrat et renoncer rgler le litige sur le terrain contractuel, eu gard l'illgalit constate, le cas chant, par la juridiction administrative ; que l'absence de transmission au contrle de lgalit de la dlibration autorisant le prsident d'un syndicat mixte signer un contrat avant la date laquelle le prsident procde sa signature constitue un vice affectant les conditions dans lesquelles les parties ont donn leur consentement ; qu'en l'espce, la dlibration du 16 novembre 1994 par laquelle le conseil syndical a autoris le prsident du syndicat

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    mixte signer l'avenant-convention de refonte du 24 novembre 1994 n'tait pas devenue excutoire cette date puisqu'elle n'a t transmise la prfecture que le 25 novembre 1994, de sorte que ledit avenant, sign par une autorit incomptente, est illgal ; que de cette question posant une difficult srieuse dpendait la solution du litige ; qu'en refusant de faire droit la demande de renvoi prjudiciel, la cour d'appel a viol la loi des 16-24 aot 1790, ensemble le dcret du 16 fructidor an III, le dcret du 17 mai 1809 et les dispositions aujourd'hui codifies aux articles L. 2131-1, L. 3131-1 et L. 5721-4 du code gnral des collectivits territoriales ; 6/ que ce refus de question prjudicielle entache l'arrt attaqu d'excs de pouvoir au regard de la loi des 16-24 aot 1790 et du dcret du 16 fructidor an III ; Mais attendu que, lorsqu'il est saisi d'une demande de question prjudicielle sur le sens et la lgalit des clauses d'un contrat d'affermage des droits de places perus dans les halles et marchs communaux, le juge judiciaire, seul comptent, en vertu de l'article 136 du dcret du 17 mai 1809, pour statuer sur les contestations nes l'occasion de l'excution de ce contrat administratif, a la facult de constater, conformment une jurisprudence tablie du juge administratif, qu'eu gard l'exigence de loyaut des relations contractuelles, l'irrgularit invoque par l'une des parties n'est pas d'une gravit telle qu'il y ait lieu d'carter l'application du contrat, de sorte que l'apprciation de la lgalit de cet acte par le juge administratif n'est pas ncessaire la solution du litige ; Que c'est, ds lors, sans mconnatre le principe de la sparation des autorits administrative et judiciaire ni excder ses pouvoirs que la cour d'appel a retenu qu'au regard de cette exigence, les irrgularits allgues par l'autorit dlgante n'taient pas d'une gravit suffisante pour carter l'application du contrat et qu'elle en a dduit que la demande de question prjudicielle devait tre rejete ; D'o il suit que le moyen n'est pas fond ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les autres moyens, dont aucun n'est de nature permettre l'admission du pourvoi ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.