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FINANCE INVESTISSEMENT RESPONSABLE CAHIER THÉMATIQUE G LE DEVOIR, LES SAMEDI 20 ET DIMANCHE 21 SEPTEMBRE 2014 Croissance constante du secteur de la finance responsable au Québec Page G 4 Des chercheurs démontrent la rentabilité de l’ investissement responsable Page G 3 PRI IN PERSON 2014 Montréal, capitale de l’investissement responsable HÉLÈNE ROULOT- GANZMAN «N os pra- tiques sont émer- gentes et nous sou- haitons mettre en lumière et promouvoir les meilleures, afin d’apprendre les uns des autres, explique Fiona Reynolds, di- rectrice générale des PRI, dont l’organisation est basée à Londres. Nous sommes particu- lièrement heureux de venir à Montréal, parce que le Québec dispose d’une véritable expertise grâce à un groupe PRI très ac- tif. Les membres collaborent en- tre eux, ils sont solidaires. Or nous avons besoin de gens très investis pour parvenir à faire sortir la finance durable de sa niche et en faire le courant do- minant. Nous sommes sur la bonne voie, mais le chemin est encore long. » PRI pour Principles for Res- ponsible Investment. Lancé en 2006 sous l’égide des Nations unies, ce mouvement incite les gestionnaires de fonds, les in- vestisseurs institutionnels et les autres conseillers finan- ciers à tenir compte des enjeux écologiques, sociaux et de gou- vernance dans leurs décisions d’affaires. Il réunit aujourd’hui près de 1300 signataires à tra- vers le monde, qui gèrent des actifs s’élevant à plus de 45 000 milliards de dollars américains. Au Québec, une cinquantaine d’organismes ont adopté ces principes, et pas les moindres, puisque le Mouvement Desjar- dins, la Caisse de dépôt et pla- cement, Bâtirente et le Fonds de solidarité FTQ font partie du réseau. «L’organisation de cette confé- rence à Montréal vient confir- mer le dynamisme des acteurs de la finance responsable au Québec, confirme Rosalie Ven- dette, conseillère principale en investissement responsable au Mouvement Desjardins. Dix- sept signataires québécois des PRI se sont d’ailleurs réunis en consortium pour organiser et commanditer cette conférence. Finance Montréal est aussi de la partie, c’est-à-dire la grappe in- dustrielle, l’organisme qui veille au développement du secteur fi- nancier au grand complet et pour tout le Québec. Que nous parvenions tous à collaborer pour mettre en place cet événe- ment témoigne de notre leader- ship en la matière. » Des produits financiers socia- lement responsables… Cer- tains verront une antinomie dans la formule. Pourtant, la lit- térature sur le sujet tend au- jourd’hui à démontrer qu’inves- tir en se souciant des enjeux éthiques, ça rapporte au moins autant que de ne pas le faire. « Du point de vue de l’investis- seur, notre mission est de faire fructifier l’argent que nos mem- bres nous confient, l’épargne-re- traite dans notre cas, expose Daniel Simard, directeur géné- ral de Bâtirente et membre du conseil consultatif des PRI. De le faire au mieux et en minimi- sant les risques. Or la dimension socialement responsable est une approche de gestion des risques. En finances, on ne peut pas réflé- chir uniquement en termes de profit. Il nous faut trouver les conditions qui créent les condi- tions du profit à long terme. Il y a aujourd’hui tout un corpus de preuves qui se construit dans le monde universitaire et qui mon- tre que les entreprises ayant des pratiques de développement du- rable ont tendance à mieux per- former. Ce niveau de discours-là parle aux financiers, qui ont plu- tôt tendance à rester loin des émotions et des valeurs. » Une affirmation que M. Si- mard nuance par ailleurs, car elle serait stéréotypée et pro- viendrait d’une autre époque. « Depuis 2008, certains finan- ciers sont en quête de sens. Les PRI ont été lancés en avril 2006. Ils ont traversé la crise en explo- sant littéralement. Ils sont allés chercher plus de 1300 signa- taires, qui, durant ces années-là, avaient pourtant bien d’autres chats à fouetter. La crise a nourri ce mouvement, parce que les entreprises ont compris que leurs actions pouvaient avoir de graves répercussions sur la so- ciété, d’une part, mais aussi sur leur réputation, donc sur leurs affaires, d’autre part. » Ainsi, le citoyen investisseur accompagne le mouvement. Et, si l’offre grandit, c’est aussi parce que la demande est là. « Chez Desjardins, on a connu, entre 2009 et 2013, une crois- sance de 402 % des avoirs de no- tre clientèle dans des produits fi- nanciers socialement responsa- bles, confirme Rosalie Vendette. Nous avons un peu plus de 1,6 milliard d’actifs sous gestion pour ce type de produit, soit 7 % des actifs des détenteurs de fonds communs de placement chez nous. La moyenne canadienne, elle, se situe à 1 % environ. » Mais qu’entend-on vraiment par « investissement responsa- ble» et où se situe la frontière entre une entreprise susceptible d’intégrer ces produits finan- ciers éthiques et une autre qui les exclut ? Les pratiques et les stratégies en la matière sont di- verses. Le premier pas consiste souvent à écarter les industries contentieuses, notamment les entreprises actives dans les do- maines du tabac, de l’armement et du nucléaire. Ensuite, cer- tains fonds éliminent les entre- prises qui n’assument pas leurs responsabilités d’un point de vue écologique ou sociétal. Mais, là encore, selon les inves- tisseurs, le curseur n’est pas for- cément placé au même niveau. « Il n’existe pas d’entreprise parfaite, note Daniel Simard. Mais, en tant qu’investisseur à long terme, nous pouvons utili- ser notre pouvoir d’influence, no- tre droit de parole, au sein des conseils d’administration notam- ment, pour apporter un point de vue différent, novateur. Bâti- rente mise beaucoup sur l’enga- gement actionnarial pour expri- mer son désir que l’économie et la finance se mettent au service du développement durable et que les entreprises avancent sur la voie d’un déploiement écono- mique qui prenne en compte les autres réalités de la firme, no- tamment les questions sociales et écologiques, qui sont des clés im- portantes de la façon dont la firme interagit avec la société. » Il s’agit donc moins d’ex- clure que de dialoguer avec les entreprises afin que toutes prennent le chemin de la res- ponsabilité. Toutes? Cette question sera franchement po- sée lors de la conférence pré- vue la semaine prochaine, puisque des enjeux très concrets, tels que l’acceptabi- lité ou non de l’exploitation des gaz de schiste et des sables bi- tumineux dans les produits dits responsables, seront discu- tés. La rémunération des diri- geants, les obligations vertes ou encore l’impact de la réputa- tion des entreprises sur les stratégies de portefeuille fe- ront également partie des thèmes abordés lors des diffé- rents débats, exposés ou ses- sions plénières. Pour en savoir plus sur l’événement, on peut visiter le site Internet de la conférence au www.unpri.org (en anglais seulement). Collaboratrice Le Devoir L’hôtel Hilton Bonaventure accueille dès lundi la conférence PRI in Person 2014, soit la plus importante rencontre an- nuelle mondiale sur l’investissement responsable. Pendant cinq jours, 500 participants — experts, chercheurs mais sur- tout investisseurs et financiers — discuteront des différentes stratégies mises en œuvre pour mieux tenir compte des en- jeux écologiques, sociaux et de gouvernance dans la constitu- tion de leurs portefeuilles. L’objectif : sortir de la niche pour devenir le courant dominant. Mais, pour cela, il faudra parve- nir à briser le mythe selon lequel investir de façon éthique fe- rait perdre de l’argent. JACQUES NADEAU LE DEVOIR À partir du 20 septembre, Montréal accueille PRI in Person, la plus grande conférence mondiale sur l’investissement responsable. PRI Fiona Reynolds, directrice générale des PRI

FINANCE - Le Devoir · FINANCE LE DEVOIR, LES SAMEDI 20 ET DIMANCHE 21 SEPTEMBRE 2014 G 3 Note : un placement dans un organisme de placement collectif peut donner lieu à des courtages,

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FINANCEINVESTISSEMENT RESPONSABLE

C A H I E R T H É M A T I Q U E G › L E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4

Croissance constantedu secteur de lafinance responsableau Québec Page G 4

Des chercheursdémontrent larentabilité del’investissementresponsable Page G 3

PRI IN PERSON 2014

Montréal, capitale de l’investissement responsable

H É L È N E R O U L O T -G A N Z M A N

«N os pra-t i q u e ssont émer-gentes etnous sou-

haitons mettre en lumière etpromouvoir les meilleures, afind’apprendre les uns des autres,explique Fiona Reynolds, di-rectrice générale des PRI,dont l’organisation est basée àLondres. Nous sommes particu-lièrement heureux de venir àMontréal, parce que le Québecdispose d’une véritable expertisegrâce à un groupe PRI très ac-tif. Les membres collaborent en-tre eux, ils sont solidaires. Ornous avons besoin de gens trèsinvestis pour parvenir à fairesortir la finance durable de saniche et en faire le courant do-minant. Nous sommes sur labonne voie, mais le chemin estencore long. »

PRI pour Principles for Res-ponsible Investment. Lancé en

2006 sous l’égide des Nationsunies, ce mouvement incite lesgestionnaires de fonds, les in-vestisseurs institutionnels etles autres conseillers finan-ciers à tenir compte des enjeuxécologiques, sociaux et de gou-vernance dans leurs décisionsd’affaires. Il réunit aujourd’huiprès de 1300 signataires à tra-vers le monde, qui gèrent desactifs s’élevant à plus de 45000milliards de dollars américains.Au Québec, une cinquantained’organismes ont adopté cesprincipes, et pas les moindres,puisque le Mouvement Desjar-dins, la Caisse de dépôt et pla-cement, Bâtirente et le Fondsde solidarité FTQ font partiedu réseau.

«L’organisation de cette confé-rence à Montréal vient confir-mer le dynamisme des acteursde la finance responsable auQuébec, confirme Rosalie Ven-dette, conseillère principale eninvestissement responsable auMouvement Desjardins. Dix-sept signataires québécois desPRI se sont d’ailleurs réunis en

consor tium pour organiser etcommanditer cette conférence.Finance Montréal est aussi de lapartie, c’est-à-dire la grappe in-dustrielle, l’organisme qui veilleau développement du secteur fi-nancier au grand complet etpour tout le Québec. Que nousparvenions tous à collaborerpour mettre en place cet événe-ment témoigne de notre leader-ship en la matière.»

Des produits financiers socia-lement responsables… Cer-tains verront une antinomiedans la formule. Pourtant, la lit-térature sur le sujet tend au-jourd’hui à démontrer qu’inves-tir en se souciant des enjeuxéthiques, ça rapporte au moinsautant que de ne pas le faire.

«Du point de vue de l’investis-seur, notre mission est de fairefructifier l’argent que nos mem-bres nous confient, l’épargne-re-traite dans notre cas, exposeDaniel Simard, directeur géné-ral de Bâtirente et membre duconseil consultatif des PRI. Dele faire au mieux et en minimi-sant les risques. Or la dimensionsocialement responsable est uneapproche de gestion des risques.En finances, on ne peut pas réflé-chir uniquement en termes deprofit. Il nous faut trouver lesconditions qui créent les condi-tions du profit à long terme. Il ya aujourd’hui tout un corpus depreuves qui se construit dans lemonde universitaire et qui mon-tre que les entreprises ayant despratiques de développement du-rable ont tendance à mieux per-former. Ce niveau de discours-làparle aux financiers, qui ont plu-

tôt tendance à rester loin desémotions et des valeurs.»

Une af firmation que M. Si-mard nuance par ailleurs, carelle serait stéréotypée et pro-viendrait d’une autre époque.

«Depuis 2008, certains finan-ciers sont en quête de sens. LesPRI ont été lancés en avril 2006.Ils ont traversé la crise en explo-sant littéralement. Ils sont alléschercher plus de 1300 signa-taires, qui, durant ces années-là,avaient pourtant bien d’autreschats à fouetter. La crise anourri ce mouvement, parce queles entreprises ont compris queleurs actions pouvaient avoir degraves répercussions sur la so-ciété, d’une part, mais aussi sur

leur réputation, donc sur leursaffaires, d’autre part.»

Ainsi, le citoyen investisseuraccompagne le mouvement.Et, si l’offre grandit, c’est aussiparce que la demande est là.

«Chez Desjardins, on a connu,entre 2009 et 2013, une crois-sance de 402% des avoirs de no-tre clientèle dans des produits fi-nanciers socialement responsa-bles, confirme Rosalie Vendette.Nous avons un peu plus de1,6 milliard d’actifs sous gestionpour ce type de produit, soit 7%des actifs des détenteurs de fondscommuns de placement cheznous. La moyenne canadienne,elle, se situe à 1% environ.»

Mais qu’entend-on vraimentpar « investissement responsa-ble» et où se situe la frontièreentre une entreprise susceptibled’intégrer ces produits finan-ciers éthiques et une autre quiles exclut? Les pratiques et lesstratégies en la matière sont di-verses. Le premier pas consistesouvent à écarter les industriescontentieuses, notamment lesentreprises actives dans les do-maines du tabac, de l’armementet du nucléaire. Ensuite, cer-tains fonds éliminent les entre-prises qui n’assument pas leursresponsabilités d’un point devue écologique ou sociétal.Mais, là encore, selon les inves-tisseurs, le curseur n’est pas for-cément placé au même niveau.

« Il n’existe pas d’entreprisepar faite, note Daniel Simard.Mais, en tant qu’investisseur àlong terme, nous pouvons utili-ser notre pouvoir d’influence, no-tre droit de parole, au sein des

conseils d’administration notam-ment, pour apporter un point devue dif férent, novateur. Bâti-rente mise beaucoup sur l’enga-gement actionnarial pour expri-mer son désir que l’économie etla finance se mettent au servicedu développement durable et queles entreprises avancent sur lavoie d’un déploiement écono-mique qui prenne en compte lesautres réalités de la firme, no-tamment les questions sociales etécologiques, qui sont des clés im-por tantes de la façon dont lafirme interagit avec la société.»

Il s’agit donc moins d’ex-clure que de dialoguer avec lesentreprises afin que toutesprennent le chemin de la res-ponsabilité. Toutes ? Cettequestion sera franchement po-sée lors de la conférence pré-vue la semaine prochaine,puisque des enjeux trèsconcrets, tels que l’acceptabi-lité ou non de l’exploitation desgaz de schiste et des sables bi-tumineux dans les produitsdits responsables, seront discu-tés. La rémunération des diri-geants, les obligations vertesou encore l’impact de la réputa-tion des entreprises sur lesstratégies de por tefeuille fe-ront également par tie desthèmes abordés lors des diffé-rents débats, exposés ou ses-sions plénières. Pour en savoirplus sur l’événement, on peutvisiter le site Internet de laconférence au www.unpri.org(en anglais seulement).

CollaboratriceLe Devoir

L’hôtel Hilton Bonaventure accueille dès lundi la conférencePRI in Person 2014, soit la plus importante rencontre an-nuelle mondiale sur l’investissement responsable. Pendantcinq jours, 500 participants — experts, chercheurs mais sur-tout investisseurs et financiers — discuteront des dif férentesstratégies mises en œuvre pour mieux tenir compte des en-jeux écologiques, sociaux et de gouvernance dans la constitu-tion de leurs portefeuilles. L’objectif : sortir de la niche pourdevenir le courant dominant. Mais, pour cela, il faudra parve-nir à briser le mythe selon lequel investir de façon éthique fe-rait perdre de l’argent.

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

À partir du 20 septembre, Montréal accueille PRI in Person, la plus grande conférence mondiale sur l’investissement responsable.

PRI

Fiona Reynolds, directricegénérale des PRI

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LA FROMAGERIE BOIVIN A CHOISI L’ÉNERGIE DU BON SENS.

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FINANCEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4 G 3

Note : un placement dans un organisme de placement collectif peut donner lieu à des courtages, des commissions de suivi, des frais de gestion et d’autres frais. Les ratios de frais de gestion varient d’une année à l’autre. Veuillez lire le prospectus avant d’effectuer un placement. Les organismes de placement collectif ne sont pas garantis, leur valeur fluctue souvent et leur rendement passé n’est pas indicatif de leur rendement futur. Les Fonds FÉRIQUE sont distribués par Services d’investissement FÉRIQUE, à titre de Placeur principal.

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Les Fonds FÉRIQUE sont gouvernés par une Politique d’investissement responsable régissant l’exercice des droits de vote, ce qui leur permet d’inciter activement les entreprises à mettre à niveau leurs codes de conduite en matière d’environnement, de responsabilité sociale et de gouvernance. Chaque dollar investi dans nos Fonds sert donc un double objectif : encourager les entreprises à adopter un comportement responsable, et protéger votre avoir à long terme.

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FÉRIQUE est signataire des Principes pourl’Investissement Responsable, une initiative du Secrétaire général des Nations Unies, mise en place par le programme des Nations Unies pour l’Environnement Initiative Financière (UNEP FI) et le Pacte Mondial des Nations Unies. Il s’agit d’un ensemble de six principes généraux de bonne conduite tournés vers l’investissement responsable.

Investir de façon responsable, pourquoi pas ?À condition que ce soit au moins aussi lucra-tif que de ne pas le faire… Depuis vingt ans,les chercheurs s’attellent à le démontrer et lalittérature sur le sujet est aujourd’hui for-melle. Mais, si ces derniers sont aujourd’huirégulièrement invités à présenter leurs résul-tats lors des conférences réunissant le petitmonde de la finance responsable, ils ont long-temps été considérés comme des allumés. En-trevue avec M’zali Bouchra, professeure titu-laire au Département de stratégie, responsabi-lité sociale et environnementale de l’UQAM.

P R O P O S R E C U E I L L I S P A RH É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

Comme d’autres chercheurs, vous serez pré-sente à la conférence sur l’investissement

responsable PRI, la semaine prochaine à Mont-réal. Est-ce à dire que les investisseurs et leschercheurs travaillent main dans la main surces enjeux?

Aujourd’hui, ils s’assoient à la même tablepour discuter, mais c’est franchement nouveau.J’ai commencé à me pencher sur la question en1995… Inutile de préciser qu’à l’époque on m’aprise pour une folle ! Ce n’est que dans les an-nées 2000 que les gens commencent à lorgnerun peu sérieusement du côté de l’investisse-ment responsable. Avec l’arrivée des réseauxsociaux, les entreprises se préoccupent de plusen plus de leur réputation. Les populations sontsensibilisées aux valeurs écologiques et so-ciales et elles sont mieux informées. Les inves-tisseurs se posent alors la question de la renta-bilité et ils font appel aux chercheurs. Mais, at-tention, dans ces années-là, Wall Street disaitencore que ce ne serait qu’une mode… Ce àquoi j’ai l’habitude d’ajouter que c’est une modequi ne s’est jamais démodée…

On ne parle donc finalement pas de valeurséthiques, mais bien de rentabilité?

Les chercheurs ont joué un rôle déterminant,dans le sens où, s’ils arrivaient à prouver, hors

de tout doute raisonnable, qu’être socialementresponsable ne coûtait pas plus cher, alors toutle monde pouvait foncer, y compris les fonds depension. Bien entendu, si les investissementsresponsables impliquaient des pertes moné-taires, il n’aurait pas été question pour eux d’al-ler investir là-dedans. Il faut cependant biencomprendre que, au dépar t, il ne s’agit pasd’une commande de l’industrie. Elle y est ve-nue parce que la pression citoyenne l’y incitait.Mais nous travaillons sur ces sujets depuis unevingtaine d’années et l’intérêt des investisseursest là depuis huit à neuf ans seulement.

Depuis la crise de 2008?Il y a la signature des PRI en 2006, cette

sorte de déclaration volontaire des organismesfinanciers qui acceptent d’essayer d’investir enincluant les critères ESG (environnement, so-cial et gouvernance). En fait, il y a un mouve-ment simultané avec, d’un côté, des investis-seurs qui ne veulent plus investir dansdes choses qui détruisent le bien-êtrede gens, l’environnement, la qualité devie des riverains, etc., et, de l’autre, desclients, des consommateurs qui revien-nent au bio, qui achètent des produitséquitables, etc. Et, parallèlement, descampagnes de boycottage menéescontre Nike, Gap ou Shell pour des rai-sons éthiques. Tout ça a un effet sur lesrevenus, les profits, la rentabilité desentreprises. Et, tout à coup, le regardsur nous, chercheurs, change. Nous nesommes plus des marginaux complètement al-lumés. Nos résultats sont publiés plus facile-ment, la responsabilité sociale devient un véri-table paradigme.

Ça signifie que la responsabilité sociale est au-jourd’hui intégrée dans tous les cursus universi-taires liés à la finance?

Loin de là ! En Europe et aux États-Unis, çase voit de plus en plus, c’est vrai. Mais, au Ca-nada, c’est très compliqué. Moi-même, je suispassée du Département des finances à celui dela responsabilité sociale parce que je n’arrivepas à lancer un programme en finance respon-sable à l’UQAM. En fait, il ne suffit pas d’inté-grer un cours au cursus, c’est tout un mode depensée qui est à revoir. Il faut adopter cette no-

tion dans chacun des cours. Il faut que ça de-vienne un critère d’évaluation comme un autre.Si je prends l’exemple de l’implantation d’unemine, ne pas tenir compte des riverains, ne pasles intégrer d’une manière ou d’une autre auprojet, ça aura forcément un coût à plus oumoins long terme. C’est paradoxal : au-jourd’hui, ce sont les investisseurs qui se plai-gnent de ne pas pouvoir recruter des spécia-listes de la question !

Mais comment peut-on mesurer ce que pèse lamauvaise réputation sur les résultats d’uneentreprise?

On fait des études événementielles. On re-garde les variations boursières au moment del’annonce d’une catastrophe écologique ou lorsd’une campagne de boycottage. A contrario, onétudie les résultats des entreprises qui adop-tent une certification ISO ou autre et on lescompare avec ceux d’entreprises équivalentes.

C’est comme ça qu’on s’est renducompte que les rendements étaientéquivalents. Pas forcément meilleurs,mais pas pire.

Si ce n’est pas pire, c’est donc meilleur,puisqu’on pose en plus des gesteshumanistes.

C’est votre point de vue, mais pas for-cément celui de toute l’industrie, parceque ça suppose de changer pas mal defaçons de faire dans l’entreprise, et toutle monde n’est pas prêt à mettre de

l’énergie là-dessus. Bien souvent, le seul dis-cours qui prévaut en la matière, c’est de dé-montrer que l’entreprise n’a pas d’autre choix.Qu’elle ne peut plus déverser des produits chi-miques en Afrique en toute impunité. Car,même là-bas, ils ont aujourd’hui des cellulaires,et si tout un village est malade, très vite uneONG va le savoir et va le rendre public et viralvia les réseaux sociaux.

Si on se place maintenant du point de vue de l’in-vestisseur, comment peut-il être certain qu’ilplace ses actifs dans des entreprises éthique-ment responsables?

C’est très difficile, surtout lorsqu’il s’agit demultinationales qui sont basées un peu partoutsur la planète et qui modifient leurs normes en

fonction du pays. C’est pourquoi nous sommesun petit groupe à prôner la création, à Mont-réal, d’un institut international qui délivreraitdes certifications. Ça permettrait d’informer etde former les conseillers financiers et les inves-tisseurs, de les aider à mieux appréhender laresponsabilité sociale, de leur faire comprendrel’intérêt notamment de s’exprimer lors des as-semblées d’actionnaires. Car, davantage qued’exclure des entreprises, il s’agit de faire pres-sion pour que le plus grand nombre d’entreelles assument leurs responsabilités. C’est enmultipliant ce type d’action que le virage pourravéritablement être pris.

CollaboratriceLe Devoir

La recherche a permis de faire la preuvede la rentabilité de l’investissement responsable

M’zaliBouchra

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

La chercheure M’zali Bouchra fait partie de ceuxqui souhaitent la créat ion d’un inst i tutinternational de certification à Montréal, afin queles investisseurs puissent s’assurer de l’éthiquedes entreprises dans lesquelles ils comptentplacer leur argent.

L O Ï C H A M O N

L a conférence internatio-nale PRI in Person 2014,

qui s’ouvrira cette semaine àMontréal, réunira plusieursexper ts québécois et cana-diens de l’investisse-ment responsable,mais aussi quelquesconférenciers inter-nationaux de renom.

À commencer parl’économiste hétéro-doxe James K. Gal-braith, détenteur dela Chaire Bensten Ju-nior Lloyd et profes-seur à la Lyndon B.Johnson School ofPublic Af fairs del ’ U n i v e r s i t é d uTe xas , qu i ag i racomme conférencierprincipal lors de l’ou-verture du colloque,le mercredi 24 sep-tembre, au Hilton Bonaventure.

Fils du célèbre économisteaméricain John Kenneth Gal-braith, proche du Parti démo-crate, il vient de publier TheEnd of Normal, un nouveau li-vre dans lequel il met en pers-pective la dernière crise écono-

mique de 2008 face à la crois-sance des 50 dernières années,qui pourrait n’être qu’illusoire.James K. Galbraith est aussil’auteur du livre L’État préda-teur, publié en 2009, dans le-quel il dénonce notamment la

mainmise des lob-bies sur le marché.

Autre figure deproue, mais dans ledomaine de l’envi-r o n n e m e n t ,Mme Christiana Fi-gueres, secrétairee x é c u t i v e d e l aConvention-cadredes Nations Uniess u r l e s c h a n g e -ments climatiques,viendra parler de laConférence ParisClimat 2015, la pro-chaine et 21e confé-rence de l’ONU surles changements cli-matiques, et de ce

que les investisseurs doiventen attendre.

Mme Figueres, qui détient no-tamment une maîtrise en an-thropologie de la LondonSchool of Economics, a unelongue feuille de route dans ledomaine du développement du-

rable et de l’environnement.Elle participe aux négociationsinternationales sur les change-ments climatiques depuis 1995.

Mentionnons également laprésence de Spencer P. Glen-don, vice-président, associé etdirecteur de recherche et ma-croanalyse de la firme Welling-ton Management, une multina-tionale américaine spécialiséeen gestion de fonds d’investis-sement et d’actifs. Il sera leconférencier principal, jeudimatin, du colloque « Ten-dances macroéconomiques :que consommerons-nous de-main et comment ? ». Titulaireentre autres d’un doctorat enéconomie de l’Université Har-vard, M. Glendon poursuit unprogramme de recherche surl’évolution des marchés et lesrelations entre les données,les gens et la société.

Notons enfin que le ministredes Finances du Québec, Car-los Leitao, doit prononcer uneallocution sur la situation éco-nomique et financière du Qué-bec, en début d’après-midi levendredi. Programme completà www.unpri.org.

Le Devoir

PRI IN PERSON

Des conférenciers de renom

Mme Figueres aune longuefeuille de routedans ledomaine dudéveloppementdurable et del’environnement

KARIM JAAFAR AGENCE FRANCE-PRESSE

Christiana Figueres, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur leschangements climatiques, viendra parler de la Conférence Paris Climat 2015.

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FINANCEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4G 4

%

Fier signataire des Principespour l’investissement responsable (PRI) dès 2006!

Les valeurs syndicales et l’intérêt économique à long terme de nos 20 000 membres sont au cœur de notre action en investissement responsable

R É G I N A L D H A R V E Y

U n Portrait 2013 de la finance responsableau Québec sera présenté à l’occasion de la

conférence « PRI in person » qui se tiendra lasemaine prochaine à Montréal.

Cette recherche, conduite à l’initiative deCAP Finance, dresse un inventaire détaillé desressources dans ce domaine et indique les ten-dances de ce marché financier non traditionnel.Il y a dans ce rapport les volets d’investisse-ment et de placement.

L’investissement totalise 11,6 milliards injec-tés dans l’essor des entreprises québécoises,dont 1,1 milliard dans les entreprises d’écono-mie sociale. Le placement responsable s’élève à274,5 milliards, principalement dirigés vers lemarché boursier.

Professeure et directrice adjointe de l’écoledes affaires publiques et communautaires del’Université Concordia, Marguerite Mendell adirigé les travaux à l’origine de ce document :« C’était un travail impor tant et intéressant,mais en même temps un boulot énorme», assure-t-elle. Sur quoi au juste se sont penchés leschercheurs ? « On a étudié les activités des ac-teurs en finance solidaire et en capital de déve-loppement. » La première étude du genre est pa-rue en 2006, suivie d’une deuxième en 2010 :«On voit, à travers chacune d’elles, qu’il y a unecroissance continuelle des actifs et des investisse-ments dans ce secteur. »

Avant d’élaborer avec celle-ci sur les élé-ments distinctifs des données recueillies, soncollègue Gilles Bourque, responsable des don-nées sur le placement pour l’étude et chargé deprojet à l’Institut de recherche en économiecontemporaine (IRÉC), se penche sur les no-tions d’investissement et de placement : « C’estproblématique parce que, en anglais, le mot « in-vestment» s’applique à tout. D’un autre côté, enfinance socialement responsable, il y a deuxgrandes dimensions qui sont intégrées : celle duplacement sur les marchés financiers, soit à tra-vers des actions, des obligations ou de l’immobili-sation, et celle de l’investissement, en vertu de la-

quelle des organismes injectent de l’argent direc-tement dans les entreprises plutôt que de passerpar les marchés financiers. »

Les lignes de forceDe retour vers Mme Mendell. Elle s’abstient

de recourir à un océan de chif fres, pourmieux éclairer leur signification elle-même àl’intérieur du Portrait : « Si on met les deux en-semble, le capital de développement et la fi-nance solidaire, on se rend d’abord comptequ’il y a une reconnaissance accrue de la renta-bilité de ces investissements qui ont des objectifssocioéconomiques et qui se distinguent des mar-chés traditionnels, axés sur tout sur le rende-ment et le profit. »

Elle se tourne vers 2008 : « Si on inclut lacrise financière et la sévère récession, on s’aper-

çoit, en examinant la finance responsable, qu’onn’assiste pas aux catastrophes vécues par l’autresecteur traditionnel. On le savait déjà, mais çajette un meilleur éclairage sur le fait que ces in-vestissements ne sont pas tributaires des rende-ments spéculatifs ; ils font preuve de stabilité etles gens commencent à comprendre que cela re-présente un avantage. » Elle aborde la questionsous un autre angle : « L’économie collective etles entreprises de ce genre prennent une place im-portante ailleurs dans le monde, mais c’est parti-culièrement le cas au Québec ; c’est un acteuréconomique incontournable ici. » Il existe mêmeune loi à son sujet, adoptée le 10 octobre 2013,qui reconnaît dans son préambule qu’une telleéconomie contribue à l’essor et au bien-être dela société.

La barrière des préjugés s’est levée pour lais-ser passer le véhicule de la croissance : «Ceux-ci ont carrément disparu, à savoir que les inves-tisseurs considéraient que c’était une économiemarginale réservée aux gens pauvres. Il est cer-tain que ce ne sont pas madame et monsieurTout-le-monde qui la connaissent ; il est toutefoisrévélateur de constater que beaucoup des activi-tés transactionnelles qui se déroulent actuelle-ment illustrent la reconnaissance par plusieursde la rentabilité d’investissements qui contri-buent à la fois à une économie durable, à unemeilleure qualité de vie et au bien-être deshommes et des femmes. »

La professeure dégage un aspect plus mé-connu de cette économie, sur le plan de l’em-ploi : «Les entreprises collectives attirent un trèsgrand nombre de jeunes qui veulent travailler etentreprendre autrement ; ils font preuve de préoc-cupations socioéconomiques et sont extrêmementsensibilisés aux questions écologiques. Je suis profet je constate cela autour de moi. »

Un grand ensemble structurantLe Québec se targue de ses performances in-

téressantes en économie sociale, mais il est lar-gement tributaire des mouvements coopératifet syndical dans ce secteur d’activité. Margue-rite Mendell en convient volontiers : « On a

beaucoup de défis économiques ici comme ail-leurs, mais il y a beaucoup de choses qui nousdistinguent : quand on parle de la finance socia-lement responsable, c’est rendu possible et déter-minant grâce à une collaboration et à un parte-nariat entre divers acteurs collectifs du milieu enprovenance des syndicats, des coopératives et desregroupements sociaux. »

Elle en fournit la preuve : « En regardant lesmontages financiers, par exemple, on voit trèsbien et très souvent qu’il existe un partenariatentre ces divers groupes ; il y a aussi Investisse-ment Québec qui joue un rôle très important. »Elle survole l’histoire : « Si on remonte loin enarrière, il y a le Mouvement Desjardins qui esttrès présent, et, plusieurs décennies plus tard,verront le jour ces fonds de travailleurs quesont le Fonds de solidarité et Fondaction. »Elle mentionne encore l’existence du réseauCAP Finance et des CLD, qui sont autantd’organisations qui font partie d’un vaste en-semble structurant.

Elle revient sur le Portrait 2013 pour mieuxdémontrer le caractère distinctif du Québec :«Si on a la patience de réunir tous les morceaux,on voit apparaître un écosystème et une architec-ture construits par les mouvements coopératif, so-cial et syndical, par le Chantier de l’économie so-ciale, par toutes les autres filiales et par les di-vers intermédiaires. »

Tout ce beau monde appor te de l’eau aumoulin d’une nouvelle économie : «On traverseune période difficile : on se retrouve avec des défisdevant nous qui sont durs à relever et on fait faceà des situations plutôt sombres. Mais on a ici auQuébec cet écosystème qui nous sert à travaillerensemble, à chercher des solutions, à répondre àdes besoins, à identifier de nouveaux secteursd’activité et à regarder vers l’avenir. » Elleajoute : « On se distingue aussi parce qu’il y alongtemps qu’on a ici une collaboration trèsétroite entre les chercheurs universitaires et lesgens du milieu financier. »

CollaborateurLe Devoir

Le secteur de la finance responsable afficheune courbe de croissance constante

ACFAS

La Professeure et directrice adjointe de l’écoledes af faires publiques et communautaires del’Université Concordia, Marguerite Mendellsoutient que la finance responsable n’a pas étéautant touchée par la crise de 2008 que lesecteur traditionnel.

CAP Finance est formée d’un réseau élargi de partenaires

R É G I N A L D H A R V E Y

L’ organisation s’est donnépour mandat « de promou-

voir et de développer la financesolidaire et le capital de déve-loppement, de mettre en valeurl’expertise des professionnels duréseau, de faire la promotion del’investissement responsabledans le grand public et auprèsdes parties prenantes ». Elle en-tend « devenir une référencedans le financement d’entre-prises d’économie sociale ou decelles qui sont engagées dansune démarche de développe-ment durable».

Jacques Charest est le prési-dent et directeur général de ceréseau de sept partenaires, quicomprend la Caisse d’écono-mie solidaire Desjardins, la Fi-ducie du Chantier de l’écono-mie sociale, Filaction, Fondac-

tion, le Fonds de solidarité, leRéseau d’investissement socialdu Québec et le Réseau québé-cois du crédit communautaire.D’universitaire et collectif, leregroupement a changé de sta-tut en 2010 : « À ce moment, leprogramme qui soutenait cetterecherche partenariale a prisfin. Les organismes financiersvoulaient se donner un lieupour continuer à travailler en-semble et ont mis sur pied CAPFinance», signale le p.-d.g.

Ces organismes « cherchentà réduire les écarts trop impor-tants qui existent entre lespréoccupations de la popula-tion et les comportements d’en-treprises axées uniquement surla recherche du profit ».

D’autres sont invités à ap-porter leur contribution : « Lesmembres fondateurs sont les or-ganismes financiers, mais on

veut aussi donner une placeaux chercheurs. On veut enavoir au sein de notre conseild’administration pour qu’onsoit en mesure de les interpelleren tout temps pour “ cocons-

truire ”, pour bâtir ensemble.On travaille au sein de notregouvernance même avec deschercheurs et des représentantsdes acteurs du milieu que sontles centres locaux de développe-

ment (CLD) et les corporationsde développement économiquecommunautaire (CDEC).»

Diffusion et interventionsLe réseau s’est lancé dans

une campagne de promotion :«On veut faire savoir qu’il existeun autre angle de développe-ment économique, une autre fa-

Les gens de la finance responsable et de l’économie sociale,qui sont issus de diverses organisations, travaillent au Qué-bec d’un commun accord pour élargir la portée de leurs ac-tions. En 2010, ils ont convenu de mettre en place une struc-ture propre à leur assurer une convergence et une synergiedans la poursuite de leurs objectifs. CAP Finance les accom-pagne désormais.

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Le président et directeur général de CAP Finance, Jacques Charest, explique que ce réseau vise à faire valoir son point de vue qui estdif férent de celui de la finance traditionnelle.

VOIR PAGE G 5 : CAP

Page 5: FINANCE - Le Devoir · FINANCE LE DEVOIR, LES SAMEDI 20 ET DIMANCHE 21 SEPTEMBRE 2014 G 3 Note : un placement dans un organisme de placement collectif peut donner lieu à des courtages,

FINANCEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4 G 5

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SUITE DE LA PAGE G 4

CAP

çon d’envisager le financementet de travailler ensemble pourraf fermir la position de l’in-vestissement responsable. On afait le Portrait 2013 de l’inves-tissement responsable dansl’économie du Québec, parutout récemment. Maintenant,on veut intervenir dans les dé-bats publics, on souhaite s’ex-primer lors du dépôt du budgetet sur d’autres sujets connexesau monde financier. En fait,on entend faire valoir notrepoint de vue, qui dif fère de ce-lui du secteur de la financetraditionnelle. »

Sur le plan de l’ac-tion, il revient et in-siste sur la notionde concertation en-tre les intervenantsdes dif férents pa-l iers : « Il y a deuxéléments qui nousdistinguent, dont lepremier relève de no-tre capacité et de no-tre façon de travail-ler ensemble. Endeuxième lieu, on setourne résolumentvers la “ coconstruc-tion ”, ce qui veutdire qu’on agit tou-jours au Québec enfonction de l’of fre etd e l a d e m a n d e ,parce qu’il ne nousser t à rien de seule-ment mettre sur lemarché un produitfinancier ; on n’est pas là pourcette raison, et nous, quand onbrasse des af faires, on veut sa-voir de quelle nature est le be-soin et comment y répondre. »

Il précise sa pensée à ce su-jet : « Si on met en place desproduits financiers, on veutaussi s’associer aux gens quicollaborent avec les entreprisesd’économie sociale et qui lesaident, pour s’assurer que cequ’on met sur le marché ré-pond à un besoin. On tisse desliens avec les gens qui sont surle terrain pour identifier lesbesoins qui ne sont pas cou-ver ts. Il s ’agit vraiment de“ coconstruction ” entre les di-vers intervenants, et on sepenche autant sur l’of fre quesur la demande. »

Au sujet de la dynamique dumilieu dans la mise en œuvre deprojets, le p.-d.g. ne s’inquiètepas outre mesure; il revient auPortrait 2013, dont il dégage unedes informations qui éclairent

sur ce plan: «Il ressort de cetteétude que, relativement à la ca-pacité d’investissement potentieldes membres de CAP Finance, ilreste beaucoup d’argent dans lescof fres, mais qu’il y en a beau-coup qui a été investi.»

La croissance sepoursuivra

Tout indique pour l’instantque les embellies des der-nières années se poursui-vront, comme le font obser-ver unanimement les indivi-dus et les groupes qui prati-quent l’investissement res-

ponsable. JacquesCharest se montretout aussi optimistequant à l’évolutiond’un marché qui re-garde constammenten amont pour s’as-surer du respectdes principes d’en-vironnement, de so-ciété et de gouver-nance (ESG) : « Iln’y a pas de doute,la croissance est là.Il y a eu une baissedans les placementsr e s p o n s a b l e s e n2008 et on ne ca-chera pas qu’il y aeu une certaine criseà ce moment-là ; iln’empêche que cesplacements ne sontpas spéculatifs etqu’on n’est pas là

pour 30 minutes quand on faitaf faire avec une entreprise.Dans la finance solidaire etl’investissement responsable, ledéclin a été moins marqué ;une certaine stabilité est appa-rue, parce qu’on travaille surle terrain avec des entreprisesqui rendent des services. »

Il prévoit un ajustement dumarché : « Il y a eu une périodede temps que je qualifierais de“ Il faut y être ” ; c’était à lamode. Il y a eu beaucoup deGreen Washing au dépar t,mais maintenant les gens dési-rent vraiment comprendre dequoi il s’agit et veulent s’enga-ger avec clairvoyance. Ils inter-pellent les spécialistes qui ef fec-tuent des placements au sujetde leur fonds de pension : ils neveulent pas que du rendement,mais un rendement qui est por-teur de sens. »

CollaborateurLe Devoir

«Il existe unautre angle dedéveloppementéconomique,une autre façond’envisager lefinancement etde travaillerensemble pourraffermir laposition del’investissementresponsable»

En 2004, la Caisse de dépôt et placement duQuébec a fait figure de pionnière en se dotantd’une politique d’investissement responsable.Elle fut également parmi les premiers signa-taires des Principes pour l’investissement res-ponsable (PRI) adoptés par les Nations Unies,qui préconisent la responsabilité collective, ledialogue avec les entreprises et la transpa-rence de celles-ci vis-à-vis de l’environnementet des populations. La Caisse souligne donc cedixième anniversaire en accueillant les inves-tisseurs du monde entier venus participer à laConférence annuelle PRI de l’ONU, qui auralieu cette semaine à la Place Bonaventure.

C L A U D E L A F L E U R

«L orsqu’on a adopté notre politique, c’étaitun changement de culture qu’on devait

imposer, puisque, à l’époque, personne n’avaitentendu parler de l’investissement responsable,se rappelle Ginette Depelteau, vice-présidenteprincipale, Conformité et investissement res-ponsable, à la Caisse de dépôt et placement. Onétait vraiment des précurseurs ! Mais ce que jeconstate à présent, c’est que l’investissement res-ponsable fait partie intégrante du marché, c’estvraiment dans le mainstream du marché. » Eneffet, tous les investisseurs se préoccupent àprésent de ces questions, puisque « la meilleurefaçon de gérer un por tefeuille, c’est de tenircompte à la fois des risques financiers et extrafi-nanciers », remarque-t-elle.

«Voilà ce qui a le plus changé, je dirais, depuis10 ans », poursuit Mme Depelteau. C’est direque, à la Caisse, les équipes chargées d’évaluerles risques de tout investissement intègrent do-rénavant l’évaluation des risques extrafinan-ciers. « Pour toute entreprise qui cour t desrisques écologiques, sociaux ou de gouvernance,nos gestionnaires de portefeuille ont le réflexe dedire : “Essayons de quantifier ces risques-là et ceque pourrait être leur impact sur les rendementsattendus ” », indique Mme Depelteau.

Elle souligne par ailleurs qu’auparavant on par-lait d’investissement socialement responsable,alors qu’à présent on parle plutôt d’investisse-

ment responsable. «Nous voulons bien faire res-sortir le fait que nous sommes un investisseur res-ponsable, dit-elle. Nous avons donc changé un peunotre terminologie pour bien faire valoir ce point.»

Collaborer pour influencer lesentreprises

La vice-présidente rapporte que la politiqued’investissement responsable de laCaisse a bien entendu évolué ces 10 der-nières années. C’est ainsi que la Caisseapplique désormais les principes de l’in-vestissement responsable selon troisaxes. «Il y a tout d’abord l’intégration desfacteurs ESG (écologiques, sociaux et degouvernance) dans la gestion de nos por-tefeuilles. Il y a ensuite tout ce quiconcerne l’engagement actionnarial, et,finalement, nous réalisons énormémentd’actions collaboratives avec nos pairs.»

Ainsi, à la base de l’investissement responsa-ble, il y a entre autres l’idée que les grands in-vestisseurs doivent encourager les entreprises

à adopter de bonnes pratiques ESG. Or l’unedes meilleures façons d’y parvenir est, pour laCaisse, d’utiliser son droit de vote lors des as-semblées d’actionnaires, se comportant alorsen actionnaire actif.

« Mais il y a maintenant plus, enchaîne Gi-nette Depelteau. On continue de voter — c’esttoujours aussi important — mais, depuis trois

ans, on mène beaucoup d’actions collabo-ratives avec nos pairs. » C’est ainsi quela Caisse se concerte sur de nombreuxenjeux avec les caisses de retraite duCanada, de l’Ontario, de l’Alberta et dela Colombie-Britannique. « Chaque foisqu’il se passe quelque chose, on pense col-laboratif », dit-elle.

De même, la Caisse collabore avec leRéseau PRI Québec, qu’elle a contribué àfonder et qui rassemble plus de 25 inves-tisseurs institutionnels québécois. Ce ré-

seau vise à sensibiliser les investisseurs à l’inté-gration des critères ESG dans leurs activités etdécisions d’investissement. Il favorise en outre la

mise en commun de l’expertise de ses membreset le partage des meilleures pratiques en investis-sement responsable.

«C’est ainsi que le poids de l’ensemble des inves-tisseurs est plus important, puisque nos actionssont concertées, fait-elle remarquer. On a doncune plus grande force auprès des entreprises.»

Faire valoir l’expertise québécoiseDans le cadre de la Conférence PRI de

l’ONU, baptisée PRI in person, la Caisse en pro-fitera pour faire connaître l’expertise québé-coise en matière d’investissement responsable.C’est ainsi que, à l’occasion des deux premièresjournées, consacrées aux recherches universi-taires, elle organisera un séminaire où dif fé-rents spécialistes feront le point sur lesconnaissances développées ici.

« Depuis trois ans, rapporte Ginette Depel-teau, la Caisse organise une conférence annuellesur l’investissement responsable. Lors de la pre-mière, nous avions d’ailleurs présenté l’ensemblede la recherche universitaire. L’année dernière,la conférence portait sur les enjeux que repré-sente l’eau, et, cette année, notre conférence setient dans le cadre du PRI universitaire. »

À cette occasion, Stephen Kibsey, vice-prési-dent conseil, Gestion des risques, à la Caisse,traitera de la recherche universitaire dont ontbesoin les investisseurs responsables. Pour sapart, Bouchra M’Zali, professeure titulaire de fi-nance à l’UQAM, abordera ce qu’on a appris en20 ans de recherche sur la performance finan-cière et l’intégration des critères ESG. Puis,Frank Coggins, professeur titulaire à l’Univer-sité de Sherbrooke, parlera de la réaction desmarchés financiers aux variations de la perfor-mance sociétale des entreprises. La Caisse enprofitera également pour annoncer la créationd’une bourse destinée aux jeunes chercheurs.«Sans cesse, nous cherchons à encourager la re-lève», déclare avec satisfaction Mme Depelteau.

«On axe notre atelier de façon à mettre en lu-mière la recherche québécoise, conclut-elle.L’idée, pour nous, c’est que les universitaires etles gestionnaires de portefeuille se rencontrentpour faire en sorte que la recherche universitairesoit utile aux gestionnaires. »

CollaborateurLe Devoir

CAISSE DE DÉPÔT ET PLACEMENT

Dix ans d’investissement responsable

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Dans le cadre de la Conférence PRI de l’ONU, la Caisse en profitera pour faire connaître l’expertisequébécoise en matière d’investissement responsable.

GinetteDepelteau

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FINANCEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4G 6

R É G I N A L D H A R V E Y

L a car te d’af faires de laCaisse d’économie soli-

daire Desjardins se lit commesuit : principale institution fi-nancière consacrée à l’écono-mie sociale et à l’investisse-ment socialement responsable(ISR) au Québec. Elle soutientfinancièrement près de 3000coopératives, organismes àbut non lucratif, syndicats etentreprises socialement enga-gées. Au 31 décembre 2013,son chiffre d’affaires dépassaitles 1,4 milliard de dollars etson actif tournait au-tour de 738 millions.

Son directeur géné-ral, Marc Picard, ajoutede la couleur à ces don-nées et résume l’his-toire de la Caisse : « Ilfaut avoir en tête quec’était un établissementqui, au départ, rassem-blait essentiellement desgens du monde syndicalet plus particulièrementdes travailleurs regroupés à laConfédération des syndicats na-tionaux (CSN). On a d’abordessayé carrément de développerdes projets sélectifs à même lesrevenus de l’établissement quenous étions. On s’est en faitrendu compte que ce modèle-làavait des limites, dans le faitd’agir à la fois comme banquieret promoteur de projets : on n’ob-tenait pas l’impact recherché.»

L’idée germe d’élaborer unautre scénario : « On a pris unvirage dès les années 1960, par-ticulièrement du côté de Qué-bec, selon lequel on utilisaitl’épargne pour faire de l’inves-tissement dans les entreprisesd’économie sociale et solidaire ;de cette façon, on multipliait lesretombées de l’utilisation de no-tre épargne. » Une vision pluslarge s’impose alors : «On sou-haitait créer une économie al-ternative qui ne repose pas ex-clusivement sur le secteur privéou sur l’État. Il s’agissait làd’un grand projet politique detransformation de l’économiedu Québec. » Inspirée au fil du

temps par ce qui se passe surla scène internationale, laCaisse occupera finalement deplus en plus de place dans cetype de marché.

Plus tard, un aspect plus mé-connu des activités de l’établis-sement prendra forme, ce querapporte le directeur général :« On s’occupe aussi du place-ment responsable. Au Mouve-ment Desjardins, dont on faitpartie, il existe des produits definance solidaire et on en est undes plus gros vendeurs. Il y adans cette activité une concor-dance avec notre vision du dé-

veloppement de la so-ciété et on consacrebeaucoup d’ef forts à laformation de notre per-sonnel pour qu’il soit enmesure de connaître cesproduits et de les propo-ser à nos membres. »

Sur le plan du passé,il relève un dernierpoint : « En 2009 sur-vient un événement im-portant dans notre his-

toire, alors qu’on devient signa-taire des Principes de l’investis-sement responsable (PRI) ; on aainsi formalisé notre approchedans ce domaine par notreadoption d’un cadre reconnusur le plan international.»

D’hier à aujourd’huiMarc Picard se tourne vers

le présent : « L’environnementa beaucoup changé. Dans lesannées 1960, on comprendraqu’il y avait très peu d’acteurset qu’on était très novateur. Parla suite, notre démarched’avant-garde a fait des petitsau Québec, quand sont apparusles fonds de travailleurs, soit leFonds de solidarité et Fondac-tion, qui est plus près de nous ;c’est un outil très proche de laCaisse que la CSN a égalementdéveloppé. »

Fondaction par tage lamême vision du développe-ment de la société : « Le fondsse tourne vers un créneau unpeu dif férent du nôtre, qui estcelui de l’investissement dansles entreprises privées ; notre

environnement s’en est trouvémodifié à son arrivée, parcequ’on peut maintenant travail-ler avec lui, ce qui augmenteau final notre apport dans l’in-vestissement consacré à l’écono-m i e s o c i a l e . » L a C a i s s ecompte pour 58 % dans le sou-tien financier à l’économie so-ciale québécoise.

Le dirigeant identifie laclientèle : « Une grosse par tiede notre portefeuille est forméepar les coopératives d’habita-tion, soit une sur trois au Qué-bec, et aussi par les coops funé-

raires. Il y a, bien sûr, toute lagamme des entreprises qui s’ac-tivent dans des secteurs très dif-férents ; on en trouve dans le do-maine de l’immobilier, de l’ali-mentation, de l’inser tion so-ciale, de la culture, etc. ; le spec-tre est assez large. »

Il ne saurait s’abstenir designaler des cas d’exception :« On est fier d’avoir dans no-tre CV une entreprise commele Cirque du soleil, qu’on aaccompagnée dans ses pre-miers pas. Guy Laliber téavait fait le tour des établisse-

ments et personne ne voulaitlui prêter des sous ; c’est lacaisse de Québec qui a été lapremière à se mouiller danscette aventure, devenue uneréussite planétaire. »

Il énumère aussi d’autrespartenaires d’importance : laSociété de développement An-gus, présente dans Rosemontet dans le projet de revitalisa-tion Saint-Laurent, Équiterre,avec laquelle a été mise surpied la Maison du développe-ment durable, plusieurs Cen-tres des ser vices aux entre-

prises (CSE), avec lesquels laCaisse collabore, et un certainnombre de coopératives funé-raires ayant le vent dans lesvoiles ; sans compter que l’éta-blissement est omniprésentdans la relance du secteur duQuartier des spectacles.

Une source d’inspirationLa Caisse d’économie soli-

daire a traversé la crise de2008 sans subir de dégâts ma-jeurs susceptibles d’ébranlerses assises. Marc Picardaborde la question : «On est deplus en plus reconnu de ce côté-là et il y a d’ailleurs plusieursfondations privées qui nous ren-contrent pour voir comment onaccomplit notre travail et pours’inspirer de nos pratiques. »

Il élabore son point de vueen faisant référence à un émi-nent professeur de gestion àl’Université McGill, Henr yMintzberg : « À la chute ducommunisme, on pensait quele capitalisme était triom-phant, alors qu’il pose ceconstat dans ses analyses : c’estdavantage l’économie mixtequi a été triomphante ; ce sontdes économies où on retrouvaitde l’économie sociale, du capi-talisme et l ’État. Celles-ciétaient beaucoup plus stablesque le modèle mis de l’avantpar les Américains, qui reposeexclusivement sur l’entrepre-neuriat privé. C’est là, à notreavis, un nouveau courant depensée économique qui vacontinuer à se développer. »

Pour l’heure, il se préoccupeplutôt d’une certaine apathiedu milieu : « Je m’inquiète,comme investisseur, de voir deplus en plus d’acteurs qui sontprêts à investir dans ce secteurd’activité-là, mais il faut quedes promoteurs de projet sui-vent. Sans que ce soit docu-menté, on sent, nous, que lesoutils de financement se déve-loppent plus rapidement que lesprojets sur le terrain. »

CollaborateurLe Devoir

CAISSE D’ÉCONOMIE SOLIDAIRE DESJARDINS

Chef de file de l’économie socialeet de l’investissement responsable

Marc Picard

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

La Caisse d’économie solidaire a traversé la crise de 2008 sans subir de dégâts majeurs susceptiblesd’ébranler ses assises.

Voué au maintien et à la création d’emploisau Québec, le fonds de travailleurs Fondac-tion, de la CSN, se distingue en matière dereddition de comptes et de préoccupationsécologiques, sociales et de gouvernance. Si-gnataire entre autres du pacte mondial et desPrincipes pour l’investissement responsable(PRI) mis de l’avant par les Nations Unies,l’organisme dévoile cette semaine un nouveaurapport de développement durable conformeaux plus hautes exigences de la Global Repor-ting Initiative (GRI).

B E N O I T R O S E

À quelques jours de l’importante conférencemondiale sur les PRI qui doit se tenir à

Montréal, du 22 au 26 septembre 2014, le prési-dent-directeur général de Fondaction, LéopoldBeaulieu, croit que les invités internationauxont tout intérêt à saisir ce que permet la for-mule québécoise des fonds de travailleurs.«C’est à la fois de savoir recueillir une épargne-retraite, qui constitue un enjeu majeur pour lasociété québécoise, et de faire en sorte que la ma-jeure partie de cette épargne soit dirigée directe-ment en capital de développement et en capitalde risque, atténué par une présence prudente surles marchés financiers, explique-t-il. Ça fait unfonds qui est diversifié, avec une utilité et unepertinence assez exceptionnelles. »

L’homme souligne que son organisme, enétant à la fois présent directement en entre-prise et sur les marchés financiers, démontreson souci d’une finance socialement responsa-ble. Le partenariat avec les PRI des NationsUnies concerne exclusivement ses investisse-ments faits sur les marchés financiers. Pourêtre qualifiés de socialement responsables,ceux-ci doivent tenir compte des questionsécologiques, sociales et de gouver nance(ESG). Fondaction se dit actif au sein du ré-seau québécois des signataires des PRI et par-ticipe à la sensibilisation des marchés finan-ciers à l’importance d’adopter des comporte-ments responsables.

«Lorsqu’on choisit une firme qui fait de la ges-tion de portefeuille, donne en exemple M. Beau-lieu, nous examinons avec elle la concordanceavec nos valeurs. Elle nous présente sa politiqued’investissement et nous fait sa reddition decomptes. » Fondaction procède aussi à une ap-préciation de la qualité et de la pertinence de

l’exercice des droits de vote avant de sélection-ner un gestionnaire externe qui lui convient.D’ailleurs, en date du 31 mai 2014, six des par-tenaires choisis étaient eux-mêmes signatairesdes PRI, un critère important pour le fonds.

Plus qu’une modeCe mouvement n’est pas qu’une simple

mode, souligne M. Beaulieu. Lorsqu’on ob-serve la situation planétaire, avec ses « crisesalimentaires, sociales et politiques répétées », etqu’on tient compte du rapport «accablant » pu-blié à l’automne 2013 par le Groupe d’expertsintergouvernemental sur l’évolution du climat(GIEC), on ne peut que convenir, croit-il, qu’il ya certainement des mesures très importantes àprendre. L’acceptabilité de l’exploitation des sa-bles bitumineux fait justement par tie desgrands enjeux actuels qui seront discutés àMontréal, tout comme la question du marchédes obligations vertes.

« Quand on regarde aussi l’éthique du côté dela gouvernance des entreprises, il y a un souciimpor tant pour une gestion plus transpa-rente », avance-t - i l , avant d’ajouter quel’épargne-retraite, justement parce qu’elle seretrouve sur les marchés financiers, a absolu-ment besoin de pouvoir compter sur des rè-gles de transparence. L’avenir de toute unepartie de la population dépend des choix decomportement des « citoyens corporatifs ». Pla-cer ses billes dans une entreprise qui exposeclairement ses préoccupations ESG se pré-sente aujourd’hui comme une voie plus sûre àmoyen et à long terme pour une partie gran-dissante des investisseurs, qui redoutent lesscandales et les poursuites.

Selon M. Beaulieu, sur le plan des conditionsde développement économique, plusieurs fa-çons de faire, auparavant considérées comme« des vérités immuables », sont aujourd’hui soli-dement «remises en question». Dans le contexteactuel, au lendemain d’une crise financière etéconomique d’envergure, les conditions de pro-duction doivent mieux concorder avec les inté-rêts des populations, croit-il, ce que sous-ten-dent les préoccupations portées par les PRI.

Un engagement globalMais la principale raison d’être de Fondac-

tion, rappelle M. Beaulieu, demeure l’inter-vention en entreprise dans le but de mainteniret de créer des emplois de qualité. En tantque partenaire de l’économie sociale, Fondac-tion a investi au moins 60 % de son actif dansdes entreprises québécoises, « principalement

celles inscrites dans un processus de gestionpar ticipative, des entreprises autocontrôlées,des coopératives ou d’autres, dont la charte pré-voit une répartition égale du droit de vote entreles actionnaires et les membres, ou des entre-prises dont les décisions ou activités contri-buent à la protection ou à l’amélioration de laqualité de l’environnement ».

« De ce côté-là, de dire M. Beaulieu, on estdans la triple reddition de comptes du développe-ment durable et on essaie d’accompagner l’entre-prise à l’égard de cet ensemble de préoccupa-tions. » On retrouve également chez Fondactionces mêmes soucis pour les questions écolo-giques, sociales et de gouvernance dans sespropres règles de fonctionnement interne. Cetengagement très global du fonds de travailleursl’a poussé à s’assujettir, pour ses rapports dedéveloppement durable, aux lignes directricesde la GRI, une organisation internationalecréée notamment à l’initiative du Programmedes Nations unies pour l’environnement(PNUE).

Depuis 2010, ces rapports, produits tous les

deux ans, ont été soumis à l’examen d’un vérifi-cateur indépendant ainsi qu’auprès de la GRI,obtenant chaque fois le niveau A +. Son cin-quième rapport (2012-2014), dévoilé cette se-maine, a pour sa part été réalisé en conformitéavec les plus récentes lignes directrices G4 dela GRI et selon l’option la plus exigeante rela-tive aux critères exhaustifs. « On est certaine-ment l’un des premiers organismes financiers àtravers le monde à avoir tout de suite adoptécette option relative aux critères exhaustifs de laGRI», d’avancer M. Beaulieu.

Fondaction, dans une perspective d’améliora-tion continue, œuvre présentement à la mise aupoint d’une grille d’appréciation pouvant lui per-mettre de « cerner les secteurs d’activité qui ontles impacts les plus positifs en relation avec lesenjeux fondamentaux qui se posent à l’économiedu Québec ». Car, d’affirmer Léopold Beaulieu,le travail n’est jamais terminé. «C’est un proces-sus d’amélioration continue. »

CollaborateurLe Devoir

Fondaction, exemple en matière de reddition de comptes

OSA IMAGES

« Quand on regarde aussi l’éthique du côté de la gouvernance des entreprises, il y a un souciimportant pour une gestion plus transparente», soutient le président-directeur général de Fondaction,Léopold Beaulieu.

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FINANCEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 2 0 E T D I M A N C H E 2 1 S E P T E M B R E 2 0 1 4 G 7

BÂTIRENTE

L’investissement responsable bénéficie à tout le monde

C L A U D E L A F L E U R

I l s’agit en fait d’une recon-naissance d’autant plus re-

marquable que c’est un jur yd’experts internationaux qui aanalysé les rapports d’activitéde divers fonds d’investisse-ment d’un peu par tout à tra-vers le monde et qui a, de cefait, reconnu la qualité du tra-vail de Bâtirente.

M. Simard confirmed’ailleurs que son or-ganisme n’avait passoumis sa candidatureà ce concours; c’est lejury qui a repéré lui-même l’existence deBâtirente. Soulignonsde plus un « doubléquébécois» : non seule-ment Bâtirente s’est-ildistingué pour l’édi-tion 2012 de son rap-port annuel, mais il enfut de même pour leFonds de solidaritéFTQ quant à l’édition2013 de son rappor tannuel et de dévelop-pement durable.

«Et, ce qui est remar-quable, d’ajouter M. Si-mard, c’est que les fondsavec lesquels nousétions en compétitionétaient tous des géantsqui possèdent nettementplus de moyens quenous.» En effet, des dixfinalistes, Bâtirentegère des actifs de500 millions, alors queles autres fonds admi-nistrent des capitauxde 3 à 27 milliards.« Nous sommes vrai-ment tout petits compa-rativement aux autres,fait-il remarquer, etceux-ci doivent sansdoute disposer de res-sources que nous n’avons pas!»

Il ajoute avec fierté : « Nousne sommes pas un très grand or-ganisme dans ce monde-là, maison nous a fait de très bons com-mentaires quant à ce que nousrapportons dans notre rapport.»

Régimes collectifsd’épargne-retraite

Le rapport annuel de Bâti-rente fait, entre autres, la re-cension des activités en inves-tissement responsable et parti-culièrement en engagementactionnarial, précise Daniel Si-mard. « C’est vraiment là queça se passe, dit-il, et ResponsibleInvestor a reconnu que ce quenous faisons est de qualité. »

Bâtirente est un cabinet deser vices financiers mis surpied par la CSN en 1987 afind’offrir et de gérer des régimes

de retraite collectifs. Il permetà 20000 travailleurs, regroupésau sein de 300 syndicats, deprofiter de régimes de retraiteadaptés à leurs besoins.

«En réalité, Bâtirente est undispositif qui permet d’offrir, auxsyndicats du secteur privé affiliésà la CSN, un service de cueilletteet de gestion des cotisations desemployeurs et des employés, ex-plique le directeur général de

l’organisme. Ce queBâtirente of fre à sesmembres, c’est uneplate-forme de place-ments dans laquelleceux-ci peuvent ef fec-tuer un certain nom-bre de choix selon leurprofil de risque et lerendement à longterme dont ils souhai-tent bénéficier. » No-tons que Bâtirentes’adresse uniquementaux syndicats mem-bres de la CSN.

Notons aussi qu’onne doit pas confon-dre Bâtirente et Fon-daction, égalementmis en place par laCSN. Ce dernier estun véhicule d’inves-tissement pour tousceux et celles qui dé-sirent économiser enprévision de leur re-traite. « Vous avezdroit d’acheter des ac-tions de Fondaction etde les placer dans vosR E E R , r a p p e l l eM. Simard, tandisque nous, nous of-frons des régimes col-lectifs d’épargne-re-traite. » Qui plus est,Bâtirente ne peut pasacheter des titres deFondaction, puisqueseules les personnes

physiques ont ce droit.

Engagement actionnarialDaniel Simard est particuliè-

rement fier du fait que son or-ganisme s’est fait remarquer àl’échelle internationale pourses activités de reddition decomptes et d’investissementresponsable. « Voilà qui té-moigne de la qualité de notreengagement envers la financeresponsable, souligne-t-il. Jepuis vous dire, vu que jeconnais bien l’industrie, quenous avons été évalués par unjury vraiment prestigieux. »

Il souligne du coup que l’unedes forces de Bâtirente, c’estl’engagement actionnarial, c’est-à-dire que, dès que ce fonds dé-cide d’investir dans une entre-prise, il s’y engage comme ac-tionnaire. «C’est vraiment là que

nous portons une grande part denos efforts», insiste-t-il.

«Nous analysons toutes les en-treprises dans lesquelles nouspourrions investir, en recher-chant celles qui nous semblent of-frir le plus de potentiel de crois-sance, poursuit M. Simard. Puis,nous entamons et poursuivonsun dialogue avec celles dans les-quelles nous investissons.»

« Notre objectif ? Puisquenous sommes des investisseursde long terme, nous désironsnous assurer que les entreprisesdans lesquelles nous investis-

sons auront des per formancescroissantes et s’améliorerontsans cesse en matière de pra-tiques écologiques et sociales. »

Il cite, entre autres, l’exem-ple de Métro-Richelieu.« Voilà une entreprise qui aprogressé remarquablement de-puis que nous avons engagé ledialogue avec elle, il y a septou huit ans », déclare M. Si-mard. Métro a ainsi améliorél’offre de produits écorespon-sables dans son secteur ali-mentaire. Elle a aussi été lapremière au Canada à adopter

des normes éthiques pour lecommerce des produits de lamer, alors qu’elle publie à pré-sent un rapport sur ses activi-tés de développement dura-ble. « C’est une entreprise qui afait des progrès gigantesquesdepuis la première fois où onlui a fait valoir les enjeux liésau fait qu’elle ne commerciali-sait aucun produit de la nicheéquitable, commente DanielSimard. Et on pourrait nom-mer de nombreuses autres en-treprises dans lesquelles nousavons investi— dont Rona,

Produits forestiers Resolute,Talisman Energy, etc. — etqui ont pris des décisions parsuite de nos approches. »

«Tout compte fait, pour nous,l’enjeu premier, c’est la sainegestion des risques et la vision àlong terme, de conclure DanielSimard. Et il ne fait aucundoute pour nous que l’investisse-ment socialement responsablesera payant à long terme, et ce,au bénéfice de tout le monde!»

CollaborateurLe Devoir

Ce printemps, Bâtirente, le système de retraite de la CSN,s’est vu décerner une mention d’excellence dans le cadre desResponsible Investor Reporting Awards 2014. Voilà qui a sur-pris Daniel Simard, directeur général de ce cabinet-conseil,qui a appris la nouvelle en même temps que tout le monde.Ce concours récompense les meilleures pratiques en matièrede reddition de comptes et de divulgation des activités d’in-vestissement responsable à l’échelle mondiale.

www.fondaction.com

DONNER DU SENS À L’ARGENTFondaction est une institution financière québécoise innovante. Par la collecte d’épargne-retraite et l’investissement dans les entreprises d’ici, Fondaction participe à la création d’une économieplus performante, plus équitable et plus verte.

«Puisquenous sommesdesinvestisseursde long terme,nous désironsnous assurerque lesentreprisesdanslesquellesnousinvestissonsauront desperformancescroissantes ets’améliorerontsans cesse enmatière depratiquesécologiqueset sociales»

Daniel Simard, directeur général de Bâtirente.

PHOTOS MICHEL GIROUX

Bâtirente est un cabinet de services financiers mis sur pied par la CSN en 1987 afin d’offrir et de gérer des régimes de retraite collectifs. Ilpermet à 20000 travailleurs, regroupés au sein de 300 syndicats, de profiter de régimes de retraite adaptés à leurs besoins.

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Le Fonds de solidarité FTQ adhère pleinementaux Principes pour l’investissement responsa-ble, assure son vice-président aux Affaires pu-bliques et corporatives, Mario Tremblay.

T H I E R R Y H A R O U N

D’ ailleurs, le Fonds participera à une impor-tante conférence mondiale sur l’investis-

sement responsable qui se tiendra à Montréal,du 22 au 26 septembre, où des centaines d’ex-perts d’un peu partout dans le monde sont at-tendus. Une occasion unique pour échangersur toute cette question, rappelle M. Tremblay :« L’idée de cette rencontre est de se rassemblerpour faire le point sur les meilleures pratiquesdans le monde. C’est aussi une occasion de met-tre en commun des gens qui travaillent avecnous. Vous savez, on parle beaucoup de la mon-dialisation des marchés depuis quelques années.Mais, ce que je trouve d’extraordinaire, c’est que,à cette mondialisation des marchés, on a ré-pondu par une mondialisation de la responsabi-lité et de la solidarité sur le plan de l’investisse-ment responsable. C’est fondamental. » Et ilajoute : « On ne peut pas laisser la mondialisa-tion seulement aux entreprises. Il nous faut desfonds comme le nôtre qui croient que l’être hu-main doit être au centre du développement éco-nomique. Il faut s’occuper de la mondialisation,sinon c’est elle qui va s’occuper de nous. »

Les Principes pour l’investissement respon-sable (ou PRI, pour Principles for ResponsibleInvestment), décrétés par les Nations Uniesvoilà près de 10 ans, ont pour objectif la priseen compte des questions écologiques, socialeset de gouvernance (ESG) dans les investisse-ments. Mais voilà, tout cela n’est pas très no-vateur pour le Fonds de solidarité, même s’il ya adhéré officiellement en 2011, parce que cesprincipes sont inscrits dans l’ADN du Fonds,fait valoir Mario Tremblay. « Je ne veux pas êtreprétentieux, mais nous, on y croit aux PRI, etce, même avant qu’ils n’existent. Depuis notrecréation par le FTQ et le gouvernement du Qué-bec, nous avons dans notre loi, dans notre ADN,

les principes de l’investissement responsable. Ons’occupe certes de l’état financier de l’entreprisedans laquelle on veut investir, mais on s’inté-resse aussi à ce qui s’y passe vraiment.Quel est son climat de travail ? Dequelle manière l’employeur traite-t-il sesemployés ? Quelles sont les relations del’employeur avec son milieu ? »

Reste que, depuis 2011, le Fonds s’estinscrit officiellement dans la démarcheamorcée par l’ONU. «Les principes d’in-vestissement socialement responsablesont intégrés depuis longtemps à l’ap-proche du Fonds. Dès sa création, leFonds a ajouté une dimension socialepréalable à tout soutien financier, exprimantainsi clairement le fait que ses investissementsn’étaient pas fondés uniquement sur le rende-ment financier, mais aussi sur les impacts des en-treprises dans la communauté », avait alors dé-claré le président-directeur général du Fondsde solidarité à l’époque, Yvon Bolduc.

Mais, concrètement, que s’est-il passé de-

puis cette adhésion ? Mario Tremblay fait va-loir que son organisme a organisé, enfévrier 2013 à Montréal, un impor tant col-

loque consacré à l’investissement res-ponsable. Un sommet qui a d’ailleursété l’occasion de lancer le premier re-groupement d’investisseurs responsa-bles du Québec, le Réseau PRI Qué-bec. Ce réseau comprend plusieurssignataires institutionnels, dont laCaisse d’économie solidaire Desjar-dins, la Caisse de dépôt et placementdu Québec, Fondaction CSN, FondsDesjardins, les régimes de retraite del’Université de Montréal et de l’Uni-versité du Québec et SSQ Groupe fi-

nancier. « Vous savez, il y a peu d’endroitsdans le monde où a été lancée une telle initia-tive, a été créé un tel rassemblement territo-rial. Ce colloque nous a permis d’échanger surnos pratiques [d’investissement] dans uncontexte québécois », dit-il.

Ces pratiques d’investissement sont régies

par des règles strictes, tient à rappelerM. Tremblay. « Nous avons investi cette année548 millions de dollars dans des entreprisesquébécoises. Tous ces investissements sont pas-sés par le filtre des principes de l’ISR [investis-sement socialement responsable]. » Tous ?« Oui, tous ! Écoutez, il y a un bilan social danschaque investissement [qui est exigé]. Il y aaussi une vérification diligente qui est faite. Et,avec les questions de corruption qui sont dansl’actualité ces dernières années, nous avonsajouté, dans notre processus de vérification, unevérification diligente de la réputation. » AuFonds de solidarité de la FTQ, on va aussijusqu’à exclure des entreprises.

Ainsi, la toute dernière politique-cadre de dé-veloppement durable du Fonds indique que,«sauf exception, le Fonds n’exclut pas d’emblée l’en-semble des entreprises de quelque secteur d’activitéque ce soit, sauf si, après avoir fait l’analyse d’unsecteur donné, il juge que celui-ci est suffisammenten contradiction avec les valeurs du Fonds ou peutreprésenter des risques importants pour le Fonds(un risque réputationnel, par exemple).»

Cependant, note-t-on plus loin, à moinsd’avoir des motifs raisonnables de croire quedes correctifs appropriés seront mis en place,le Fonds exclut les entreprises dont plus de10 % des ventes brutes sont dérivées de la pro-duction ou de la vente d’armements, qui fontpartie de l’industrie du tabac, qui ont un histo-rique de pratiques non responsables sur le plande l’environnement selon la législation et lespratiques applicables dans le secteur en ques-tion, qui ont un historique de non-respect desnormes du travail ou de la législation concer-nant les droits de la personne et qui ne respec-tent pas le Code de conduite international duFonds (ce critère s’applique uniquement auportefeuille d’investissements).

Cela dit, outre les titres du secteur du tabac,sont également sur la liste noire du Fonds lesfirmes suivantes : Consol Energy, Halliburton,Monsanto, Total, Wal-Mart Stores, Glencore In-ternational PLC et Vedanta Ressources.

CollaborateurLe Devoir

FONDS DE SOLIDARITÉ FTQ

« Il faut s’occuper de la mondialisation, sinon,c’est elle qui va s’occuper de nous !»

MarioTremblay

JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Les Principes pour l’investissement responsable ont pour objectif la prise en compte des questionsécologiques, sociales et de gouvernance dans les investissements.