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Financement et régulation de la formationprofessionnelle : une analyse comparée

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Cette étude a été préparée dans le cadre du projet sur“ Nouvelles tendances dans l’enseignement technique et professionnel ”

dirigé par Françoise Caillods

Financement et régulation dela formation professionnelle:

une analyse comparée

David AtchoareIla

Paris 1994

UNESCO: Institut international de planification de l’éducation

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Les appellations employées dans ce volume et la présentation des don-nées qui y figurent n’impliquent de la part de l’UNESCO ou de 1’IIPEaucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villesou zones, ou de leurs autorités, ni quant à leurs frontières ou limites.

La publication de ce document a été financée grâce à la subvention del’UNESCO et aux contributions de plusieurs Etats membres de l’UNESCOdont la liste figure à la fin de ce document.

Le texte de ce document a été composé en utilisant les micro-o r d i n a t e u r sde l’IIPE; l’impression et le brochage ont été assurés

par l’atelier de reproduction de l’IIPE.

Institut international de planification de l’éducation7-9 rue Eugène-Delacroix, 75116 Paris

© UNESCO août 1994 IIPE/jv

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Table des matières

Liste des sigles v ii

Introduction 1

Chapitre 1 Principes et modèles de financement 7

1. Le rôle de l’Etat dans la formation professionnelle et son financement: doctrines et pratiques 7

1.1 Un rôle en mutation 71.2 Du bien-fondé de l’action publique 10

2. La participation des entreprises au financement de laformation professionnelle 14

2.1 Le débat sur la fiscalisation 142.2 Les formes de prélèvement fiscal 18

3. Le financement de la formation professionnelle dans le cadre de l’apprentissage 21

4. Le financement de la formation par les usagers 24

5. L’évaluation du financement et de son efficacité 25

Chapitre 2 Financement de la formation professionnelle etdynamiques nationales 29

1. Le financement de la formation professionnelle en situation d’industrialisation rapide: la République deCorée, Singapour et Maurice 30

1.1 Des pays en forte croissance 30

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1.2 Le “ modèle ” sud-coréen et ses variantes régionales 301.3 La qualification comme facteur d’ajustement d’un

marché du travail tendu 321.4 L’enseignement de base et la formation professionnelle:

socle du développement des ressources humaines 331.5 L’organisation du financement de la formation 401.6 La diffusion du modèle asiatique: le cas mauricien 44

2. Les précurseurs: le financement de la formation professionnelle en Amérique latine 50

2.1 Le syndrome de la “ décennie perdue ” 502.2 Les retombées de l’ajustement sur l’éducation 512.3 Le cas brésilien 522.4 Constitution et mutation du modèle latino-américain 64

3. Une expérience africaine:le cas de la Côte d’ivoire 673.1 Un modèle en panne 673.2 Ajustement et recomposition du système d’emploi 683.3 L’éducation: une priorité sans cesse réaffirmée 683.4 L’enseignement technique et la formation professionnelle 7 03.5 L’organisation du financement au fil des réformes 72

Chapitre 3. Politiques et mécanismes de financement: les options possibles 79

1. Eléments d’analyse comparée 79

2. La gestion des Fonds pour le financement de la formation professionnelle 84

2.1 Les principes généraux 842.2 La gestion financière 872.3 La participation à la gestion du financement 88

Chapitre 4. Eléments de conclusion: les rapports entre le financement de la formation et son efficacité 91

Bibliographie 96

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Table des matières

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Liste des sigles

ADEP Agence nationale pour le développement de l’éducationpermanente (France)

AGEPE Agence d’étude et de promotion de l’emploi(Côte d’ivoire)

AGEFOP Agence nationale de la formation professionnelle(Côte d’ivoire)

BEST Basic Education for Skills Training (Singapour)BIT Bureau international du travail

CEDEFOP Centre européen pour le développement de la formation professionnelle

CEPALC Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes

CINTERFOR Centro Interamericano de Investigación y Documentación sobre Formación Profesional

DSE German Foundation for International Development

FDFP Fonds de développement de la formation professionnelle(Côte d’ivoire)

FNR Fonds national de régulation (Côte d’ivoire)IET Institut d’éducation technique (Singapour)ILO International Labour OfficeIMF International Monetary Fund

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IN A Instituto Nacional de A p rendizaje (Costa Rica)

I N C E Instituto Nacional de Cooperació n Educativa (Ve n e z u e l a )

I N F T P Institut national de formation technique et professionnelle (Côte d Loire )

INPP Institut national de perfectionnement permanent(Côte d’ivoire)

IPNEPT Institut pédagogique national pour l’enseignementprofessionnel et technique (Côte d’Ivoire)

ITB Industrial Training Board (Singapour)

IVTB Industrial and Vocational Training Board(Maurice)

MOST Modular Skills Training (Singapour)

ONFP Office national de la formation professionnelle (Côte d’ivoire)

ONU Organisation des Nations Unies

PIB Produit intérieur brut

P N B Produit national brut

SENA Servicio Nacional de Aprendizaje (Colombie)

SENAC Se rviço Nacional de A p rendizagem Commercial (Brésil)

SENAI Se rviço Nacional de A p rendizagem Industrial (Brésil)

UNESCO Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

VITB Vocational and Industrial Training Board (Singapour)

Liste des sigles

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Introduction

1. Le contexte

La formation professionnelle, initiale ou continue, constitue uninstrument important des stratégies de développement des res-sources humaines, ainsi elle se trouve fréquemment au coeur despolitiques de l’emploi. Parée de mille vertus la formation profes-sionnelle doit tout à la fois favoriser l’insertion des jeunes, contri-buer à l’augmentation de la productivité du travail et à la mobilité,promouvoir la démocratie dans l’entreprise et apaiser les tensionssociales. Les enjeux sont donc de taille tant pour les pays indus-trialisés que pour les économies en développement. Cette concep-tion large de la formation professionnelle est omniprésente et ins-pire, de faéon plus ou moins explicite et avec une force variable, lecomportement des acteurs économiques et sociaux (Etat, entre-prises, familles, salariés, partenaires sociaux). Il importe, au-delàde ce constat, d’identifier les fondements sur lesquels repose unetelle perception de la formation et d’en analyser les implicationsquant au rôle respectif des différents agents, en particulier enmatiére de financement.

La propagation de thèses libérales semble s’accompagnerd’une résurgence du concept de capital humain dans les réflexionssur l’économie du travail et des qualifications. L’analyse des effetséconomiques de l’éducation a mis en évidence à la fois les gainsde revenu que procure aux individus un supplément de formation,et la contribution des dépenses éducatives à la croissance de lanation. C’est sur cette base qu’est financée une part importantedes investissements consacrés au développement de l’éducation,et, a fortiori, de la formation professionnelle.

La structuration d’un appareil de formation professionnelle estnée avec le phénomène d’industrialisation. Jusqu’au milieu duXIXe siècle l’acquisition des qualifications s’effectuait principale-ment de façon informelle, sur le tas. Ce processus conserve, à tra-

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vers l’apprentissage dit traditionnel, une place importante dans denombreux pays en développement.

L’organisation du système de formation dépend de l’articula-tion entre trois pôles formateurs que sont le système d’enseigne-ment, les centres de formation (publics ou privés) et enfin l’appa-reil de production. La répartition des rôles entre ces entités estfonction du contexte économique, politique, culturel et social danslequel s’inscrit la formation. Au plan économique, l’analysecoût/bénéfice permet de fournir des indications quant au choix dela modalité de formation la plus efficace pour une qualification don-née (Zymelman, 1976; Dougherty, 1989). La cohérence de l’en-semble du dispositif de formation exige de veiller à la complémen-tarité entre école, centres de formation et entreprises. Il est ainsifréquent de représenter le système de formation comme un conti-nuum associant enseignement, formation en centre, alternance etformation sur le lieu de production. Une premiére réflexion suggé-re que les connaissances d’ordre général, ou fondamental, doiventétre dispensées par le systéme d’enseignement alors que la trans-mission de qualifications très spécialisées relève, par nature, de laresponsabilité des entreprises.

L’évaluation économique des systèmes de formation a démon-tré leur utilité sur le plan social et privé comme pour les entreprises(Metcalf, 1985). Mais l’expérience semble également indiquer que,calculés à l’échelle sociale, les taux de rendement de l’enseigne-ment professionnel sont faibles en comparaison de ceux observéspour l’enseignement général (Middleton, 1988). En revanche iln’est pas possible de tirer des conclusions générales sur les avan-tages comparatifs des différents modes de formation profession-nelle (écoles professionnelles, centres de formation, apprentissageou formation sur le lieu de travail). Idéalement l’organisation duprocessus de formation devrait prendre en compte non seulementles moyens disponibles mais aussi les caractéristiques des publicsà former et la nature des savoirs à transmettre.

Mais au-delà de cette recherche de rationalité et d’efficacité,tant du point de vue économique que pédagogique, la répartitiondes rôles entre les différents pôles de formation n’est pas exemp-te de considérations d’ordre plus général sur le rôle de l’Etat dansla transmission des savoirs dits techniques ou professionnels.L’examen de la question du financement ne saurait faire l’écono-mie de cet éclairage qui, dans bien des cas, explique à lui seul les

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différences dans l’organisation de la formation professionnelle.Le financement de la formation professionnelle s’inscrit dans

un contexte global de crise financière de l’éducation, dans les paysen développement comme dans les pays les plus industrialisés.Très rapide au cours des années 60, la croissance de la part duPIB consacrée à l’éducation s’est d’abord poursuivie, à un rythmeplus faible, dans la plupart des pays du monde. Le point de ruptu-re de cette tendance se situe en 1980 (Orivel, 1990). Depuis lorson assiste plutôt à une stabilisation, voire à un déclin, de l’effort del’Etat en faveur de l’éducation. Cette inflexion est due à la combi-naison de facteurs d’ordre économique, démographique et idéolo-gique.

Le niveau de financement public de l’éducation a atteint danscertains pays des sommets qui, dans le contexte actuel, paraissentdifficilement franchissables. Au-delà d’un certain seuil, l’affectationd’une portion croissante du revenu national aux dépenses d’édu-cation se heurte à la concurrence des autres secteurs sociaux etdes investissements productifs. A cette contrainte d’équilibremacro-économique s’est ajoutée, dans nombre de pays, une pres-sion supplémentaire née de la détérioration de la balance des paie-ments et de 1’ adoption forcée de programmes d’ajustement struc-tures.

Dans les pays développés, le ralentissement de la natalité amodifié le volume et la structure de l’effort de scolarisation. Auméme moment le vieillissement de la population et la montée duchômage, notamment le chômage de longue durée, appelaientune réorientation de l’intervention publique. La double exigence desolidarité nationale, face à la crise de l’emploi, et de maintien d’in-vestissements intergénérationnels pour les inactifs retraités réduitd’autant la part des ressources publiques disponibles pour l’édu-cation et la formation professionnelle.

Face à une telle situation la tendance actuelle est de promou-voir une redistribution dans laquelle les responsabilités et lescharges sont partagées entre les divers acteurs de la formation.De tels changements affectent directement les systémes de finan-cement, tant dans leur conception générale que dans les méca-nismes qui les animent.

Introduction

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1.1 Objectifs et limites de l’étude

La plupart des travaux consacrés à la question du financementde la formation professionnelle adoptent une vision strictementfinanciére et scrutent les dispositifs de collecte et d’allocation à l’ai-de des critéres orthodoxes de l’économie publique. Sans occultercette approche ce document s’efforce d’aborder le théme du finan-cement en le reliant à la dynamique du systéme productif. Le modede financement s’inscrit en effet dans une stratégie globale dedéveloppement économique, il ne s’agit pas uniquement de collec-ter des fonds mais aussi de mobiliser les acteurs, sous forme decontrainte ou d’incitation, afin qu’ils contribuent au changementrecherché. C’est pourquoi cette recherche, inscrite dans le cadredu programme de FRIPE sur le développement des ressourceshumaines, appréhende le financement en tant que système reliantl’appareil de formation professionnelle à l’évolution de l’environne-ment socio-économique. Dans cette perspective les principauxobjectifs assignés à cette étude sont:

i) Dresser un Etat des lieux des systèmes et pratiques de finan-cement de la formation professionnelle, tant dans les pays endéveloppement que dans les économies industrialisées.

ii) Offrir une vue monographique de quelques systèmes natio-naux de financement dans des pays en développement.

iii) Tenter d’identifier, à partir des pays étudiés, des tendancesd’évolution significatives.

iv) Contribuer à la réflexion sur le partage des responsabilités etle partenariat entre les divers acteurs de la formation profes-sionnelle, en particulier l’Etat, les entreprises et les salariés.

En revanche, il ne s’agit pas là d’une analyse exhaustive del’ensemble des systémes en vigueur, ni d’un tableau statistique dessommes consacrées, dans les différents pays, à la formation pro-fessionnelle, et de leur provenance. La finalité de ce travail n’estpas non plus d’aboutir à des recommandations d’ordre financier oude politique générale.

La privatisation de l’enseignement technique et de la formationprofessionnelle ne constituera pas un objet d’étude spécifique. Ellesera traitée davantage comme une modalité d’organisation del’offre qu’en tant que mode de financement. En effet, l’analyse des

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circuits de financement ramène inexorablement aux trois sourcesprincipales que constituent l’Etat, les entreprises et les usagers. Lemanque de données sur les sommes consacrées à la formation parles individus a conduit à privilégier l’étude des contributions prove-nant des budgets publics et des employeurs.

L’impossibilité d’obtenir des informations qui soient à la foissuffisamment détaillées, mises à jour et identiques, pour les paysretenus, n’a pas permis de traiter de faéon totalement harmoniséel’analyse des systémes de financement et de pousser jusqu’aubout les comparaisons internationales .

Enfin, les études de cas nationales portent essentiellement surl’analyse du financement de la formation professionnelle dans lesecteur industriel.

1.2 Méthodologie et champ

Les données nécessaires à cette étude ont d’abord été obte-nues à partir d’une exploitation des publications disponibles sur lethème et les pays retenus. Complétant cette approche des ques-tionnaires ciblés ont été adressés à certains des Fonds pour lefinancement de la formation professionnelle couverts par l’étude.

La démarche retenue est inductive. Il s’agit, à partir de l’analy-se de quelques systèmes nationaux, de montrer de quelle façon lemode de financement reflète la répartition des rôles entre lesacteurs, et comment il peut contribuer à promouvoir le développe-ment de la formation et à rapprocher offre et demande.

L’approche comparative a alors pour objet de révéler les diver-gences, mais également les points communs et le sens des évolu-tions en cours. En tout Etat de cause la caractérisation de modélesde financement de la formation professionnelle ne doit pas condui-re à leur transposition dans d’autres pays. Les particularismesnationaux s’opposeraient à ce réflexe d’imitation. En revanche,outre son apport à la connaissance des pratiques en matière definancement, l’étude comparée peut contribuer à isoler des prin-cipes, qui sans être généralisables, présentent une pertinencedépassant leur cadre d’application actuel.

Les pays étudiés ont été choisis en raison de leur expériencerelativement longue et/ou réputée réussie dans le domaine, etaussi compte tenu de l’accessibilité des données. Ils offrent parailleurs une grande diversité au plan de leur dynamique écono-

Introduction

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mique (industrialisation rapide ou ajustement involutif), de leurstructure sociale et leur culture. Néanmoins les pays retenus sonttous dotés d’un tissu économique relativement développé, suffi-sant en tout cas pour permettre une réflexion sur le partage desrôles entre les différents acteurs. Parmi les cinq pays sélectionnéssur ces critéres, deux appartiennent à l’Asie (République de Coréeet Singapour), deux à la région Afrique (Côte d’Ivoire et Maurice) etun à l’Amérique latine (Brésil).

1.3 Structure de l’étude

Le Chapitre I présente les principales questions théoriquesrelatives au financement de la formation professionnelle. Il exposeégalement les caractéristiques principales, avantages et inconvé-nients, des divers modèles. L’organisation de ce chapitre reposesur une approche par source de financement (Etat, entreprises,financement mixte dans le cadre de l’apprentissage, usagers), sug-gérant ainsi l’un des axes de la problématique qui sous-tend cetteétude, à savoir le partage des responsabilités entre les acteurs dela formation.

Le Chapitre 2 examine les systèmes de financement de cinqpays. Sa structuration indique que la question du financement nepeut étre abordée sans référence au mode de croissance, à l’Etatdes équilibres financiers et économiques, à la situation de l’éduca-tion et au rôle de l’Etat.

Le Chapitre 3 s’efforce de dégager, à partir de l’analyse com-parative, les lignes de partage qui différencient les divers sys-tèmes, d’identifier les facteurs qui déterminent leur choix et derévéler les tendances d’évolution les plus marquantes. Il prolongeensuite la perspective par un examen de nature plus technique, surles modalités de gestion financière de la formation professionnelle.

En guise de conclusion la réflexion s’étend aux relations entrefinancement et qualité de la formation. L’étude conduit ainsi,au-delà des thèmes de l’organisation et de la gestion du finance-ment, à soulever de nouvelles questions sur le pilotage des sys-témes de formation, la notion de partenariat et les fonctionssociales de la formation professionnelle.

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Chapitre I

Principes et modèles de financement

1. Le rôle de l’Etat dans la formation professionnelle etson financement: doctrines et pratiques

1.1 Un rôle en mutationl

Le secteur de la formation professionnelle n’échappe pas àl’emprise du thème de la modernisation de l’appareil d’Etat et de laredéfinition de ses fonctions (Crozier, 1987). Jusqu’à la fin desannées 80 l’Etat occupait dans de très nombreux pays une placeprépondérante dans la vie économique et sociale. Aujourd’hui, lafaillite de la planification centralisée, dans les pays de l’Est commedans ceux du Sud, contribue à une véritable mutation du rôle et dufonctionnement de l’appareil d’Etat. La place de la puissancepublique est érodée par un processus généralisé de recentrageguidé par les règles de l’économie de marché. Ce mouvement deredéfinition des missions du service public et de concentration deson action aboutit à modifier assez sensiblement la conceptionclassique.

Par essence la fonction du pouvoir central est avant toutd’édicter des règles, de codifier. L’enseignement et la formationprofessionnelle constituent l’un des domaines fortement régi, danstous les pays, par l’Etat. La contrepartie de cette fonction essen-tielle est le contrôle de l’application des régles. Les financespubliques sont traditionnellement le champ d’application privilégiéde cette fonction de vérification. Mais l’Etat représente égalementun acteur qui intervient directement dans la vie économique. Cesinterventions concernent la sphère de la production mais se situentégalement à sa périphérie. C’est ainsi que dans de nombreusessociétés, la puissance publique prend en charge, à travers lecontrôle du système de formation professionnelle, la reproductiondu salariat. Ce rôle n’est cependant pas constitutif de l’Etat, et c’est

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réduction que s’opère actuellement l’effacement des pouvoirspublics au profit du marché.

La primauté nouvelle du principe de subsidiarité inaugure uneconception de l’Etat selon laquelle il doit se limiter aux saules fonc-tions qu’il est mieux à méme d’assurer que le secteur privé. Selonce principe les domaines de prédilection des pouvoirs publics cor-respondent aux fonctions régaliennes (ordre public, défense, régu-lation macroéconomique), ses fonctions productives, sociales oututélaires, comme l’éducation, pouvant être partiellement livrées aumarché.

Au-delà de ce recentrage des interventions de la puissancepublique, la tendance actuelle marque l’établissement d’un nou-veau type de rapports entre l’Etat et le secteur privé. A la fonctiontraditionnelle de contrôle tend à se greffer une mission de dialogue,de concertation avec les acteurs concernés. La recherche d’unpartenariat avec le Acteur privé, mais aussi avec d’autres entitésreprésentatives (syndicats de salariés, Organisations NonGouvernementales), illustre ce comportement. Déjà, dans certainspays (Chili, Mexique, Venezuela...), les orientations en matière depolitique sociale sont définies par des accords tripartites associantEtat, secteur privé et syndicats. Le modèle coercitif et bureaucra-tique laisserait ainsi la place à une approche partenariale que ren-forceraient les dispositifs de type incitatif et la déréglementation.C’est là une seconde dimension du principe de subsidiarité, l’Etatne doit plus gérer seul, de faéon centralisée, les domaines qui peu-vent faire l’objet d’une concertation voire étre décentralisés. Lamultiplication d’organismes à statut de droit public mais indépen-dants des ministéres, procéde du méme mouvement. Dans cecadre, outre sas fonctions planificatrices, l’Etat devient animateurdu développement (Rosanvallon, 1992).

Thème mobilisateur dans l’Europe communautaire, la recom-position du service public revêt une portée qui s’étend à tous lescontinents. Ainsi, dans son Rapport sur le développement dans lemonde (1991), la Banque Mondiale invitait la communauté interna-tionale à “ Repenser l’Etat ” (p. 10). Ce message est particuliére-ment prégnant pour les pays d’Afrique subsaharienne (Jacquemot,1988) pour lesquels l’Etat représentait, jusqu’au début des années80, le vecteur du développement. Aujourd’hui l’excès d’Etat est aucontraire dénoncé comme frein au développement. Dès lors la pro-blématique du retrait de la puissance publique imprègne l’espritdans lequel est conçu l’ajustement structures Mais à l’incapacitéfonctionnelle du service public s’ajoute souvent, dans des espacessocio-économiques atomisés et peu structurés, la difficulté de trou-

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ver les relais et partenaires tant célébrés.En matiére d’éducation cette nouvelle doctrine invite les pou-

voirs publics à concentrer leur action sur l’enseignement de baseet les formations générales et à confier, autant que possible, l’or-ganisation et le financement de la formation professionnelle ausecteur privé et en particulier aux entreprises (World Bank, 1991).Par ailleurs, la création d’organismes autonomes tripartites char-gés du développement de la formation professionnelle devraitcontribuer à une meilleure articulation entre financement, formationet emploi. La dérégulation est censée favoriser la mise en placed’un marché concurrentiel de la formation. Enfin, des mesures inci-tatives, notamment fiscales, pourraient amener les individus et lesentreprises à prendre davantage en charge la formation dont ils ontbesoin. Telle est schématiquement la traduction, dans le domainede la formation, de l’influence des principes de l’économie de mar-ché sur le rôle de l’Etat.

Une autre dimension de cette influence touche au fonctionne-ment même du secteur public. Comme une entreprit l’action de lapuissance publique est désormais soumise aux critéres d’efficaci-té et à la discipline du marché. Ce mode de gestion conduit, danscertains cas, à une recomposition structurelle de l’appareil d’Etat.Il s’agit alors de dissocier la fonction de décision qui appartient tou-jours à l’échelon ministériel, de la fonction d’exécution, qui peutêtre confiée à des agences autonomes, bien qu’appartenant à l’or-bite Etatique. La gestion des personnels connaît également uneévolution marquante. Rompant avec le modèle classique de lafonction publique, de nombreux pays s’efforcent d’introduire uneplus grande flexibilité dans la gestion des carrières des fonction-naires. Désormais, récompenser l’efficacité des agents ou aucontraire sanctionner leur manque de productivité ne sont plusl’apanage du secteur privé.

Pour la gestion du système de formation cette approche “managériale ” signifie notamment accroître l’autonomie desétablissements. En effet, la forte centralisation et réglementationdes systémes de formation professionnelle n’autorisent pas uneconcurrence et une flexibilité suffisantes. Fréquemment encore, ladéfinition des programmes. le recrutement du personnel, la gestiondes carriéres et le financement dépendent entiérement de l’admi-nistration centrale. Des tentatives sont cependant menées pourdoter les établissements d’une capacité d’adaptation de l’offre deformation aux spécificités de leur environnement (demande et

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caractéristiques des publics, besoins des entreprises locales).Dans ce cadre, l’implication des établissements et centres de for-mation dans la recherche de sources de financement addition-nelles, auprès des entreprises ou des collectivités locales, partici-pe également à cette plus large autonomie.

Le développement des procédures de contractualisation (enAmérique latine par exemple), par lesquelles l’Etat et d’autres par-tenaires engagent conjointement des moyens sur des objectifscommuns, préalablement négociés constitue aussi un renouvelle-ment des pratiques de fonctionnement du service public. Dans ledomaine de la formation, ce type de démarche peut permettre decompléter les fonds publics par des ressources provenant debranches professionnelles et de collectivités locales (Brésil). Cettemobilisation de financements d’origines diverses pour la réalisationd’objectifs à moyen terme peut être un moyen efficace de synergie.

Outre ces multiples formes d’actions de l’Etat dans le domainede la formation, la phase d’ajustement structures que traversentactuellement un grand nombre de pays introduit des obligationsnouvelles. La réussite de l’ajustement exige de définir des poli-tiques de formation professionnelle capables de contribuer auredressement de la productivité du travail, à l’augmentation de laflexibilité de l’appareil de production et à l’amélioration du fonction-nement du marché du travail. Parallèlement, la nécessaire prise encompte de la dimension humaine de l’ajustement justifie de déve-lopper l’accès à la formation des groupes défavorisés et d’assurerla reconversion professionnelle des actifs frappés par les mesuresd’austérité et de rationalisation.

1.2 Du bien-fondé de l’action publique

Le recentrage et la recomposition du rôle de l’Etat exigent queson action dans le domaine de l’organisation et du financement dela formation professionnelle soit étayée par une argumentation suf-fisante. En d’autres termes il s’agit de s’interroger sur les fonde-ments de l’intervention publique.

Il est désormais largement admis que les dépenses consentiespour l’éducation et la formation puissent être assimilées à un inves-tissement. Selon la théorie du capital humain (Schultz; Becker) ilexiste en effet une relation entre éducation et productivité du fac-teur travail, les différences de salaires reflétant des niveaux de pro-

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ductivité différents. Si de nombreux travaux ont pu empiriquementétablir l’existence d’un lien entre le niveau de formation et la quali-té de la main-d’oeuvre, il reste difficile d’en démontrer le caractérestable et universel. Ainsi, la détection d’effets de “ signalement ” apu montrer de quelle faéon les hauts salaires accordés à certainsdiplômés reflétaient en réalité une productivité anticipée par lesemployeurs. De même, selon la théorie du filtre (Arrow), la pos-session d’un diplôme ne constitue qu’une présomption et non ungage de productivité. Il est clair que le mode de financement desdépenses de formation dépendra en partie du cadre théorique deréférence.

Au-delà du modèle du capital humain appliqué à l’échelleindividuelle, la théorie de la croissance et l’économie du travail ontmis en évidence les effets macro-économiques des dépensesd’éducation et de formation tant sur la production nationale (contri-bution à la croissance du produit et à la flexibilité de l’appareil deproduction) que sur la structuration de marché du travail. Ce cadrethéorique et ces résultats empiriques militent en faveur de l’inves-tissement dans l’éducation et la formation. Mais ils n’indiquent pasquelle devrait être la participation financière de l’Etat.

Selon la théorie néo-classique, l’intervention des pouvoirspublics trouve sa justification dans l’existence de dysfonctionne-ments dans les mécanismes du marché, le modèle de concurren-ce parfaite constituant la référence. Dans ce cadre, il y a distorsionchaque fois que les hypothéses de base de la concurrence parfai-te ne sont pas réunies. Bien que le paradigme néo-classiqueaccorde la préférence aux mécanismes de marché, il admet queles activités présentant de fortes externalités peuvent être prisesen charge par le secteur public. La vision libérale de l’Etat limiteainsi l’intervention publique à la production de biens indivisibles,correspondant à la satisfaction de besoins collectifs. Dans cecadre, la responsabilité de l’Etat est évidente pour les fonctionsrégaliennes, il n’en est pas de méme pour l’éducation et surtout laformation professionnelle qui ne présentent pas toutes les caracté-ristiques des biens collectifs. Certes ces activités produisent desexternalités positives sur l’ensemble de la société, ce qui justifieleur prise en charge par la collectivité, mais cela n’exclut pas l’ini-tiative privée et, pour la formation professionnelle, la participationdes entreprises.

L’incapacité du secteur productif à satisfaire lui-même sesbesoins en formation constitue la principale forme de distorsionjustifiant l’intervention de l’Etat. De fait, certaines entreprises,notamment les plus petites, sont souvent peu enclines à offrir à

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leurs salariés des possibilités de formation. La demande indivi-duelle de formation professionnelle peut aussi s’avérer insuffisan-te, soit que son intérêt n’apparaisse pas clairement aux personnesconcernées, soit que leur niveau d’éducation de base leur interdi-se d’entreprendre une formation complémentaire.

Mais la théorie classique des dépenses publiques ignore quel’extension des responsabilités exercées par l’Etat traduit aussi laprise en compte d’une demande formulée par la majorité desacteurs sociaux. C’est précisément le cas en matiére d’enseigne-ment, et parfois dans le domaine de la formation professionnelle.En définitive, la frontière séparant l’intervention de l’Etat de l’initia-tive privée dépendra largement, du contenu donné, selon les payset les époques, à la notion de service public et de l’équilibre établientre la qualification du travailleur et la formation du citoyen.

Des critères sociaux et le souci d’équité inspirent ainsi souventle financement de programmes de formation professionnelle parl’Etat. La seule prise en compte, par le marché, de la demande sol-vable de formation conduirait à interdire l’accès à la qualificationprofessionnelle aux publics les plus démunis, aux plans écono-mique et social. Dans les pays industrialisés, les très nombreuxdispositifs destinés aux jeunes rencontrant des difficultés d’inser-tion ou aux chômeurs de longue durée témoignent de l’importancede la dimension sociale des politiques de formation profes-sionnelle. Elles constituent l’une des facettes de la fonction d’allo-cation (à travers le financement par l’impôt) et de redistribution(entre classes de revenus et aussi entre catégories d’actifs) opé-rée par les pouvoirs publics.

Dans les pays en développement, les programmes publics deformation destinés à la population active en milieu rural ou aux tra-vailleurs de l’économie informelle urbaine peuvent contribuer utile-ment à l’augmentation de la productivité et à une meilleure inser-tion de groupes jugés vulnérables.

Mais au-delà de ces principes, la tendance actuelle de réduc-tion de la contribution de l’Etat au financement de la formation pro-fessionnelle et, en contrepartie, l’appel croissant au secteur privés’explique également par la crise financière qui affecte les sys-témes éducatifs dans la plupart des pays. De plus en plus, l’effortd’assainissement des finances publiques consenti pour répondreaux normes d’orthodoxie budgétaire imposées par l’ajustementmilite en faveur d’une privatisation du financement.

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En définitive, la place du budget de l’Etat dans le financementde la formation professionnelle et les modalités de son interventionvarient selon des considérations d’ordre économique mais aussien fonction des sociétés concernées et de l’Etat de la conjoncture.La formation professionnelle initiale reléve encore souvent de lacompétence de l’Etat Mais sa taille, ainsi que la ligne de partageavec le secteur privé dépendent assez largement du consensusnational et du rôle respectif de l’Etat et des entreprises dans lareproduction du salariat. A une conception de la formation profes-sionnelle initiale comme partie intégrante du systéme scolaire cor-respond, dans certains pays, un financement par le budget géné-ral. Un tel systéme n’est toutefois pas incompatible, notamment,pour les formations supérieures, avec une participation des béné-ficiaires aux dépenses, quitte à leur permettre l’accés à des prétsspécifiques (du type préts aux étudiants). Une option plus libéraleconsiste à limiter les filiéres professionnelles de l’enseignementpublic au profit du développement de centres de formation privés,éventuellement contrôlés par les entreprises. La participation del’Etat s’opère alors par un transfert, sous forme de subvention, attri-bué en fonction des besoins identifiés et des résultats obtenus. Lareconnaissance d’une responsabilité du secteur privé dans la for-mation de sa future main-d’oeuvre peut aussi conduire à préleverauprès des entreprises, par la fiscalité, des fonds destinés à la for-mation professionnelle initiale.

La logique qui préside au financement de la formation profes-sionnelle des adultes est différente. La participation de l’Etat à tra-vers le budget général n’est concevable que dans la mesure oùelle correspond à un objectif de solidarité nationale. C’est parexemple fréquemment le cas pour les programmes destinés à laformation des jeunes sans emploi ou à celle des chômeurs delongue durée. En revanche, la formation continue des salariésrépond à une logique professionnelle, la formation bénéficie avanttout aux individus (dans le cas de qualifications transférables) etsurtout aux entreprises qui les emploient. Dès lors il semble cohé-rent que la formation soit financée par les bénéficiaires, c’est-à-direles entreprises et/ou les salariés. Ce schéma justifie un préléve-ment sur les salaires, ou sur un autre agrégat, par exemple lavaleur ajoutée. Toutefois les distorsions du marché peuvent parfoisfonder l’intervention de l’Etat. Celle-ci prend alors la forme de dis-positifs fiscaux d’incitation (régimes d’exonération fiscale) ou desubventions directes (par exemple prise en charge du salairedurant la période de formation).

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Il existe, en effet, une distinction essentielle entre l’éducationde base et la formation professionnelle. La première constitue undroit pour les individus et un devoir pour l’Etat. La seconde revétdavantage une dimension instrumentale et économique, à cetégard la différence souvent opérée entre formation professionnelleinitiale et continue s’estompe à mesure que leurs objectifs seconfondent. Dés lors il semble cohérent d’organiser le financementde l’éducation de base selon une logique redistributive, à traversles impôts et le budget, et d’inscrire partiellement la formation pro-fessionnelle dans une logique marchande. Cette vision justifie quela charge de la formation professionnelle soit partagée entre lesacteurs concernés, à savoir l’Etat, d’une part, et les entreprises etles individus (ou leurs représentants), d’autre part. Mais le cofinan-cement exige, en contrepartie, le partage des responsabilités. End’autres termes, le systéme de financement a des implications surle partage des rôles entre ces trois acteurs, pour la conception, etla gestion des filiéres, des programmes et des diplômes, ainsi quepour l’évaluation.

2. La participation des entreprises au financement de laformation professionnelle

2.1 Le débat sur la fiscalisation

Le principe d’une intervention de l’Etat, sous forme d’incitationou de prélèvement fiscal, repose sur le postulat selon lequel il exis-te un sous-investissement chronique des entreposes en matièrede formation.

La participation des entreprises au financement de la formationprofessionnelle procède alors de trois logiques de natures diffé-rentes. Tout d’abord le critère d’équité plaide pour qu’un dispositifs’inscrivant dans une dynamique professionnelle, et non dans unelogique de solidarité nationale, soit directement financé par lesintéressés, et non par la collectivité à travers l’impôt. Cette consi-dération fonde l’instauration d’une fiscalité spécifique destinée aufinancement de la formation.

Par ailleurs, les thèses sur le capital humain et la formationcomme investissement invitent à un raisonnement par analogie. Ilest en effet tentant d’établir une correspondance entre d’une part,l’amortissement du matériel et, d’autre part, le maintien de la qua-lification des salariés. Reconna”tre l’effet positif de la formation surla productivité du travail signifie donc pour l’entreprise d’accepterde consacrer une partie de ses revenus à l’entretien et au renou-

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vellement de ses ressources humaines. L’amortissement du capi-tal physique étant généralement encouragé par des procédures fis-cales, il semble cohérent d’adopter des mécanismes de mêmenature pour la formation.

Enfin, le contexte de raréfaction des ressources conduit à ima-giner des formules novatrices susceptibles de relayer l’effort public.Ce complément est d’autant plus nécessaire que, face à lacontraction des moyens classiques, la demande de formation tendà s’accro”tre. L’augmentation de l’intensité capitalistique de l’appa-reil de production, et les complémentarités entre capital physiqueet capital humain, exigent souvent en effet une main-d’oeuvre plusqualifiée.

L’alternative la plus fréquente au financement par le budgetgénéral consiste à instaurer un prélévement fiscal sur les salairesversés par les entreprises (Dougherty, 1991). Ce mécanisme s’ap-parente en fait à une nouvelle forme de prévoyance sociale, à uneassurance formation. Le coét du dispositif est supporté essentiel-lement par les salariés les plus âgés et les plus expérimentés carils se situent généralement au sommet de l’échelle salariale. Lesbénéficiaires potentiels sont en priorité les actifs les plus jeunes.Les jeunes classes d’âges de travailleurs sont normalement lesplus éducables et aussi celles qui ressentent davantage le besoinde formation. Ce mécanisme de financement induit donc, au seinde la force de travail, un effet de redistribution intergénérationnel-le. Une autre vision, plus pragmatique, considère que puisquedans la plupart des cas les principaux bénéficiaires sont les sala-riés les mieux formés, il est équitable de leur faire supporter unepart plus importante du financement.

L’assiette salariale confère à l’impôt un rendement théoriquerelativement stable et surtout qui évolue en fonction des fluctua-tions de l’emploi, et donc, dans une certaine mesure, des besoins.Ce systéme contribue finalement à une mise en cohérence dufinancement avec les finalités poursuivies. A l’échelle d’une vieactive, et pour une classe d’âge, il y aurait donc globalement péré-quation entre les prélèvements subis et la formation reçue.

En dépit de ces avantages et d’une application large dans ungrand nombre de pays, le financement de la formation profession-nelle par une cotisation calculée sur les salaires présente égale-ment des défauts. L’argumentation économique comporte trois cri-tiques essentielles qui dénoncent les distorsions qu’induit le prélé-vement sur les salaires (Euzeby, 1977; Lescure et Strauss-Kahn,1983).

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En premier lieu, ce prélèvement fiscal entraîne une modifica-tion des coûts relatifs du travail et du capital qui rend l’utilisation dece dernier plus avantageuse. Ce mode de financement tend ainsià favoriser la substitution du capital au travail et à dissuader lesentreprises d’embaucher. Les effets sur l’emploi seraient donc plu-tôt négatifs.

En second lieu, et pour les mêmes raisons, le système désa-vantage les industries de main-d’oeuvre. Le principe d’un finance-ment de la formation fondé sur les salaires tend en effet à les péna-liser par rapport aux entreprises qui emploient peu de personnel. Ilconvient néanmoins de tempérer cet argument en soulignant la dif-ficulté que rencontrent les économistes pour définir avec précisionle concept d’industrie de main-d’oeuvre.

La dernière des trois principales objections à ce mode definancement concerne son caractère inflationniste. Dans la mesu-re où cette charge supplémentaire sur les salaires est incorporéedirectement aux prix de revient, elle peut en effet générer de l’in-flation et grever la compétitivité externe des entreprises.

Un autre type de débat consiste à déterminer sur qui, en der-nière analyse, repose la charge du financement. Il s’agit en parti-culier de savoir si le financement est prélevé sur les employeurs ousur les salariés. Pour certains c’est là un faux débat car il n’y auraitpas de différence fondamentale, à l’échelle macro-économique,entre les deux sources, la participation de l’employeur étant en faitcelle de l’entreprise (Marchal, 1955). La distinction ne correspon-drait ainsi qu’à deux dimensions (production ou transfert) d’unmême revenu. D’autres insistent au contraire sur le partage de lacharge du financement de la formation. A cet égard les tendancesinflationnistes évoquées plus haut tendent à transférer la chargesur le budget du consommateur.

L’analyse de type classique retient la dichotomie entre le finan-cement des employeurs et la participation des salariés. Le premierrenchérit le coût du travail et risque de se répercuter sur le niveaudes prix. La seconde ampute le salaire réel. L’évaluation des effetsmacro-économiques du prélévement sur les salaires conduit ainsià prendre en compte le comportement des employeurs. Si cesderniers choisissent de compenser le prélèvement normalement àleur charge en comprimant le salaire réel, la diminution de lademande qui en résultera pourrait, selon un schéma keynésien,avoir un impact négatif sur l’emploi. Si au contraire les employeursconsentent à supporter le poids du financement de la formation,

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l’augmentation du coût du travail alimentera une pression inflation-niste. Ainsi, sur un marché du travail où prédomine un chômage detype classique, le transfert de la charge sur les salariés serait,selon ce schéma, préférable à une dérive inflationniste.

Face à ces distorsions économiques il peut sembler mieuxindiqué d’asseoir le prélèvement fiscal sur une autre assiette. Larecherche de la neutralité, c’est-à-dire d’un mode de financementqui traite sur un pied d’égalité le travail et le capital, milite en faveurd’un impôt sur la valeur ajoutée. Un tel systéme permettrait en effetde taxer la création de richesse sans introduire de discriminationentre les facteurs de production. Ce mode de calcul présente éga-lement un avantage pour fixer la contribution des entreprises dessecteurs à fort coefficient de main-d’oeuvre faisant largementappel à des travailleurs non salariés. C’est par exemple le cas dusecteur du b‰timent et des travaux publics qui mobilise fréquem-ment une force de travail saisonniére, à statut précaire. Dans cettesituation, un prélévement fondé sur la valeur ajoutée serait davan-tage à méme de dégager des ressources, de faéon cyclique, enfonction des besoins du secteur, et indépendamment du statut dela main-d’oeuvre employée.

Mais malgré son caractère a priori séduisant, le prélèvementsur la valeur ajoutée n’a pas connu beaucoup de succès. Il y a àcela quatre raisons principales:

• Ce système induirait des transferts entre entreprises, au détri-ment des firmes les plus dynamiques. Cela reviendrait donc àpénaliser la performance économique.

• L’effet de substitution dont est crédité le prélèvement sur lessalaires est difficile à établir avec certitude, le coét relatif desfacteurs n’est en effet que l’un des éléments qui, entre en jeupour déterminer le choix d’une combinaison productive. Il n’estdonc pas certain qu’un relèvement, d’ailleurs relativementmodeste, du prix du travail par le financement de la formationpuisse conduire à un accroissement de l’intensité capitalis-tique.

• La thèse de la neutralité peut être abordée de diversesmanières. Ainsi pour certains, le prélèvement ne doit pas êtreneutre car il constitue aussi un instrument de politique écono-mique. La modulation du taux en fonction du niveau de salai-re, et donc du niveau de qualification, peut ainsi contribuer àencourager la substitution du capital au travail, ou au contrai-

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re à favoriser l’emploi de personnes de bas niveau de qua-lification.

• Enfin, le dernier argument qui joue en défaveur du choix de lavaleur ajoutée comme assiette de l’impôt est d’ordre tech-nique. La valeur ajoutée n’est pas un agrégat toujours facile àcalculer, il ne s’applique pas à l’ensemble des secteurs, enfinsa détermination peut étre entachée de fraude. La masse sala-riale est au contraire un agrégat simple à évaluer, méme dansles pays, ou les entreprises, dans lesquelles le système comp-table est peu développé.

2.2 Les formes de prélévement fiscal

Deux types de fiscalisation de la participation des entre-prises au financement de la formation professionnelle peuventêtre distingués (Whalley; Ziderman, 1990). Dans le premier sys-téme les recettes fiscales générées par l’impôt sur les salairesservent à financer le développement d’un appareil de formationplus ou moins intimement lié au secteur privé. A l’origine cemode de financement a été mis en place par des paysd’Amérique latine. Le Brésil en fut le précurseur en l’introduisantdès le début des années 40. Cette filiation explique que ce sys-tème de financement soit parfois qualifié de “ modèlelatino-américain ”.

Ce modèle procéde d’une stratégie de formation fondée surl’édification d’un appareil de formation extérieur aux entreprisesmais placé sous leur contrôle. La responsabilité de la formationest donc délocalisée et dissociée de la fonction de production.Bien que dépendant, à un degré variable, de l’Etat, le dispositifest généralement géré par une entité autonome. Cette autono-mie et la participation des employeurs à la gestion du systèmesont destinées à conférer au dispositif une grande flexibilitéainsi qu’une capacité prononcée d’adaptation aux fluctuationsde la demande des entreprises. Ainsi, les centres de formationpeuvent aussi bien assurer la formation initiale que continue etparticiper à la mise en oeuvre de l’apprentissage.

Dans le second système de financement, le prélèvement fis-cal est lié à un mécanisme de remboursement, ou de créditd’impôt, dont le déclenchement est commandé par la réalisationd’actions de formation par les entreprises. Les frais de formationsont ainsi remboursés par l’Etat ou, selon les dispositifs, défal-qués du revenu imposable. Le droit à remboursement, ou à exo-nération, est fixé à concurrence d’une fraction des cotisations

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versées par l’entreprise. Ce mode de fiscalisation existe, sous desmodalités variables, dans une grande variété de pays (Nigeria,République de Corée, Singapour, Tunisie...).

L’objectif de ce système est d’inciter les entreprises à déve-lopper la formation que se soit en l’internalisant ou en la confiant àdes organismes extérieurs, généralement privés. Bien que le prin-cipe apparaisse cohérent, il risque d’encourager une approchedésordonnée de la formation, répondant plus souvent à des motifsd’ordre fiscal qu’à une logique d’investissement. Une varianteconsiste alors à conditionner l’éligibilité des actions de formation àl’élaboration préalable d’un plan pluriannuel traduisant une véri-table politique de l’entreprise dans ce domaine.

Bien que séduisante par sa simplicité, cette dichotomie entredeux grandes catégories de systèmes ne correspond pas vérita-blement à la réalité. Dans de nombreux pays le régime en vigueurincorpore des éléments de chacun des deux types. Ainsi, des sys-témes hybrides peuvent correspondre à une dualité d’objectifsvisant à la fois le financement d’un appareil de formation souventlié au secteur public et le développement de la formation dans lesentreprises.

L’un des avantages de l’instauration d’un impôt sur les salairespour financer la formation est la grande souplesse qu’autorise cesystème. En particulier il est parfaitement modulable, en jouant surla valeur des taux et les types d’entreprises assujetties, en fonctiondes objectifs poursuivis et de l’Etat de la conjoncture. Selon lespays les taux varient de 0,5 % à 4 %. Ils évoluent également enfonction du temps, dans le sens d’une réduction, ou au contraired’une augmentation, notamment compte tenu des changements ducomportement des entreprises face à la formation.

Le système peut également varier selon que l’obligation léga-le s’applique de la même faéon à toutes les entreprises, sans dis-tinction de statut, de taille ou de secteur, ou qu’au contraire l’impôtsoit discriminant. Ainsi, le plus souvent, l’agriculture, le secteurpublic et les petites entreprises sont exonérés. Dans certains paysla modulation du taux selon les catégories de salariés est utiliséepour influer sur les stratégies de gestion du personnel des entre-prises (Singapour). Une autre considération concerne les trans-ferts au sein de l’économie et la recherche éventuelle d’un équi-libre, pour chacun des secteurs, entre le coût des formations et lemontant de la contribution versée. Le critère d’équité peut alorsjustifier un taux majoré pour les industries qui bénéficient des for-mations les plus coûteuses. Mais un effet de redistribution peut au

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contraire étre recherché pour encourager les entreprises ou lesbranches les plus dynamiques, indépendamment du niveau de leurcontribution.

La relative simplicité de ce mode de financement, son rende-ment élevé et sa cohérence par rapport aux objectifs poursuivisexpliquent que de nombreux pays en développement et dévelop-pés l’aient adopté. Dans le monde en développement le modélelatino-américain s’est propagé au-delà de sa région d’origine, puisa muté pour inclure de nouveaux objectifs et poursuivre l’innova-tion fiscale. Dans les zones industrialisées aussi ce principe ren-contre des adeptes, il convient à cet égard d’évoquer la France qui,depuis 1971, a adopté puis actualisé un dispositif complexe et rela-tivement original qui associe largement les entreprises au finance-ment de la formation professionnelle (BIPE, 1990).

Outre la fiscalité des entreprises destinée principalement aufinancement de la formation des salariés, certains pays ont intro-duit un autre impôt sur les salaires, qualifié de « taxe d’apprentis-sage ”, dont le produit est affecté au financement exclusif des éta-blissements de formation professionnelle initiale. Dans ce cadreles entreprises assujetties peuvent avoir la possibilité de s’exoné-rer partiellement ou totalement du versement de la taxe en fina-néant certaines dépenses des établissements de formation initiale.Ce financement peut s’effectuer en nature, sous forme de dota-tions en équipement par exemple, ou prendre la forme d’une sub-vention.

Cette taxe, dans certains cas, peut paraître redondante avecle système générique décrit précédemment. De plus, les informa-tions sur l’existant sont pauvres, il semble néanmoins que souventle manque de dynamisme des pouvoirs publics et des entreprisesfait que le produit de la taxe alimente indifféremment les recettesgénérales de l’Etat. Là encore il importe de signaler l’exemple fra-néais dans lequel cette législation contribue au contraire, de faéontrès significative, au financement des établissements de formationprofessionnelle initiale (ministère de l’Education nationale et de laCulture, 1992).

Dans tous les cas, la fiscalisation de la participation des entre-prises n’est pas sans problèmes. Tout d’abord ce systéme requiertl’existence d’une base fiscale suffisante, c’est-à-dire qu’il supposeque le tissu productif ait atteint un degré de développement mini-mum. Les économies encore dominées par l’agriculture tradition-nelle, le secteur public et le secteur informel se prêtent difficilementà l’instauration d’un impôt spécifique sur les salaires.

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Autre difficulté bien réelle: le détournement des fonds collectésde leur usage originel. En ces temps d’austérité budgétaire et decrise des finances publiques, les ressources produites par la taxesur les salaires peuvent constituer une proie tentante pour réduirele déficit. La prévention de ce type de transfert est d’autant plus dif-ficile que les finances de certains pays sont régies par la règle del’unité budgétaire. Or, selon ce principe, il ne peut y avoir d’affec-tation prédéterminée de recettes à certains types de dépenses.C’est là traditionnellement une régle de bonne gestion qui, d’unepart, garantit la transparence des finances publiques et, d’autrepart, permet au budget d’assurer sa fonction de redistributionL’instauration d’un impôt spécifique destiné à financer la formationprofessionnelle apparaît alors comme une entorse à la règle del’unité. Habituellement tolérée cette exception peut aisément étredénoncée, en période de crise, pour justifier l’affectation à d’autresusages des fonds collectés. L’amendement de la loi organique quirégit la nomenclature et les imputations budgétaires constitue alorsla seule parade juridique à ce risque.

A cette orthodoxie budgétaire s’ajoute parfois une doctrine fis-cale libérale qui tend à proscrire l’instauration de tout nouvel impôt.Cette situation risque fort de se produire lors de la définition desprogrammes de stabilisation et d’ajustement structurez auxquelssont soumis de trés nombreux pays en développement.

Enfin, il convient de souligner que la gestion administratived’un tel système fiscal est inévitablement lourde et coûteuse. Touteobligation légale exige la mise en place de moyens de contrôle et,le cas échéant, de sanctions. La sophistication du systéme, parfoissouhaitable par souci d’efficacité, peut s’avérer désastreuse auplan de l’efficience, au terme de l’alourdissement des coéts de ges-tion. Malheureusement les travaux empiriques manquent pourévaluer le rendement net des divers systèmes en vigueur.

3. Le financement de la formation professionnelle dansle cadre de l’apprentissage

Le système de l’apprentissage constitue la forme primitive dela formation professionnelle. Dans les pays développés, le régimede l’apprentissage a été modernisé pour donner naissance auconcept de formation en alternance qui désigne la combinaisonentre des séquences d’apprentissage en entreprise et un ensei-

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gnement, de type plus scolaire, en centre. Dans certains paysen développement (Afrique, pays arabes), l’apprentissage dittraditionnel demeure le mode prédominant de qualification de lamain-d’oeuvre et de transfert des savoir-faire professionnels. Ilapprovisionne ainsi en main-d’oeuvre qualifiée et semi-qualifiéele secteur informel ainsi que les franges peu capitalistiques del’économie moderne.

La théorie économique classique enseigne que le financementde l’apprentissage doit être pris en charge par l’apprenti sous laforme d’un taux de salaire minoré. Cette formule se justifie dans lamesure où, au moins initialement, la productivité du travail de l’ap-prend est très faible alors qu’il bénéficie d’une formation. A l’issuede l’apprentissage il est en mesure de négocier la compétence pro-fessionnelle acquise au prix du marché correspondant à sonniveau de qualification. Il serait donc inéquitable de faire prendreen charge le coût de l’apprentissage à l’entreprise formatrice qui nesera pas forcément, à terme, l’employeur final, et donc qui nebénéficiera pas nécessairement de l’investissement formationconsenti. Suivant cette logique l’évolution de la rémunération del’apprenti durant sa formation sera fonction des deux variables quesont le coût de formation et la productivité du travail de l’apprend

Si, au début de la période d’apprentissage, la productivité del’apprenti est si faible que le rendement net soit nul ou égal,d’autres modalités de financement peuvent être envisagées. Lapremière consiste pour l’apprend à s’engager à demeurer, à l’issuede la formation, dans l’entreprise pour une durée déterminée avecune rémunération inférieure au prix du marché. La différence per-met ainsi de rembourser le coût initialement pris en charge par l’en-treprise. Dans la pratique cette disposition est relativement difficileà mettre en place, les deux autres alternatives sont ainsi plus fré-quentes.

L’allongement de la durée de l’apprentissage, au-delà dutemps nécessaire pour l’acquisition de la qualification, constitueune autre forme de compensation. Elle pourrait expliquer lesdurées de formation extrêmement longues parfois observées.

Mais très souvent le différentiel de coût est financé directementpar les familles sous forme de frais de formation. Ce mode definancement, autrefois courant en Europe, est encore prédominantdans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest.

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L’argument du transfert de qualification “poaching effect ” estsouvent avancé pour expliquer les réticences des employeurs àfinancer des formations professionnelles non spécifiques,c’est-à-dire monnayables ailleurs sur le marché du travail. La mobi-lité de la main-d’oeuvre constituerait ainsi un frein à la participationdes employeurs et impliquerait le partage du coét avec le salarié,sous forme de réduction de salaire, ou avec l’Etat, sous forme desubventionnement de la rémunération. Seuls les marchés du tra-vail internes autoriseraient le financement de l’intégralité de la for-mation par l’entreprise.

La prise en compte de cet argument conduit parfois à dénon-cer les risques que fait peser une législation du travail trop stricte,notamment en madère de salaire minimum, sur le financement del’apprentissage. En effet, lorsque ce minimum légal est appliqué defaéon rigide, l’employeur n’est plus en mesure de récupérer unepartie des charges liées à la formation sous la forme habituelled’une réduction du coét du travail non qualifié.. Dès lors, une légis-lation destinée à protéger les salariés peut, au contraire, avoir deseffets dissuasifs sur l’embauche d’apprentis et, en définitive, nuireà l’emploi de la main-d’oeuvre non qualifiée.

Dans les pays développés, le concept de formation en alter-nance, ou de systéme dual exprime un partage de responsabilitéet de charge entre l’entreprise, l’apprenti et les pouvoirs publics. Larépartition du coét entre l’apprend et l’entreprise qui l’accueilles’opére, conformément à la théorie classique, par un versementd’une rémunération inférieure au prix du marché. Le principe del’alternance confie à l’entreprise la partie professionnelle de l’en-seignement, l’Etat assurant dans des centres la formation de baseet, éventuellement, une qualification générale. Le plus souvent, lefinancement de ces centres pour apprentis est à la charge despouvoirs publics. De plus, l’Etat dédommage normalement lesentreprises pour le temps des apprentis ainsi soustrait à la pro-duction, en leur versant une allocation de compensation.

En dépit de ces incitations, nombre de pays développés seheurtent à de sérieuses difficultés pour augmenter, voire pour sim-plement maintenir les effectifs d’apprentis. Ce problème est dû aucomportement des entreprises qui soit, n’ont pas une forte traditionde formation des jeunes, soit préférent recourir à des catégories demain-d’oeuvre peu qualifiée encore moins coéteuses.

Il est certain que, sous ses diverses formes, la formule del’apprentissage présente un grand intérêt, au plan financier, pour leservice public.

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Néanmoins cet avantage doit être nuancé en tenant comptedes dérives qui peuvent être observées. Ainsi, dans certains paysen développement, l’allongement abusif de la durée de l’apprentis-sage, les contribuions exorbitantes demandées aux familles, ou lemontant excessif des frais dits de “ libération ” constituent autantde pratiques qui nuisent au bon fonctionnement, à la qualité et àl’image de l’apprentissage traditionnel. En l’occurrence il n’est pascertain que l’on puisse s’en remettre au seul libre jeu du marchépour rétablir des règles de financement cohérentes et équitables.L’intervention de l’Etat, notamment par la concertation, peut alorscontribuer à rétablir le bien-fondé des mécanismes traditionnels definancement de l’apprentissage.

Dans les pays développés également le développement incon-trôlé de l’apprentissage et d’autres types de formatons en alter-nance comporte des risques d’abus. Ainsi, sous couvert de forma-tion, certaines entreprises se livrent en réalité à l’exploitation sansborne d’une main-d’oeuvre bon marché et malléable. Le dévelop-pement de ces pratiques conduirait à utiliser l’apprentissage pourcréer un marché du travail spécifique. Là encore le contrôle del’Etat, exercé en liaison étroite avec les organismes patronaux,semble indispensable à l’efficacité du dispositif.

4. Le financement de la formation par les usagers

Considérer la formation professionnelle comme faisant partiede la sphère de l’économie marchande doit normalement conduireà rechercher un ajustement de l’offre à la demande au terme d’unprocessus de marché, c’est-à-dire par la médiation des prix.L’émergence du paradigme de marché dans le domaine de la for-mation justifie le développement d’une offre privée répondant auxcritéres de la concurrence, notamment l’atomicité et la transparen-ce. Dans de nombreux pays, notamment ceux qui ont opté pourl’instauration d’une taxe sur les salaires destinée à financer la for-mation, l’apparition d’une demande solvable permet le développe-ment d’un secteur privé de la formation. Le rôle de l’Etat peut alorstendre vers le seul contrôle du respect des règles du marché.

Dans les faits, le développement d’un secteur privé produisantdes services de formation se heurte quelquefois à une certaineméfiance surtout de la part des pouvoirs publics. Pourtant, laconstitution d’un véritable marché de la formation devrait normale-ment permettre à l’Etat de se décharger partiellement auprès dusecteur privé de son rôle d’offreur de formation. Outre ses fonc-

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tions de contrôle, l’Etat n’aurait alors plus qu’une responsabilitésubsidiaire dans la production de services de formation.Selon cette logique l’appareil de formation appartenant au sec-teur public devrait faire appel de faéon croissante aux contri-buions des usagers (Birdsall, 1986). Etayée par l’examen destaux de rendements sociaux et privés cette formule pourrait étredéveloppée dans la stricte limite du respect des objectifs d’équi-té et de redistribution.

5. L’évaluation du financement et de son efficacité

La question de l’évaluation du financement revêt deux dimen-sions principales, l’évaluation des résultats et la mesure des flux.Les effets attendus des dépenses consacrées à la formation pro-fessionnelle et des politiques de financement peuvent concernerde nombreux aspects:

• développement de la formation;• amélioration de la qualité de la formation;• évolution du comportement des acteurs;• amélioration de l’accès de certaines catégories de population;• amélioration du fonctionnement du marché du travail;• contribution à la politique de l’emploi.

L’analyse des effets doit ainsi combiner l’approche micro-éco-nomique (stratégies des acteurs...) et la vision macro-économique(marché du travail, budget de l’Etat, compétitivité extérieure...). Parailleurs, il importe également de distinguer entre les conséquencesimmédiates et les effets à long terme.

Idéalement, l’arbitrage entre financement public et privé de laformation professionnelle devrait être rendu à l’issue d’une com-paraison systématique des mérites et des inconvénients dechaque système. La première mesure devrait alors porter sur l’ef-ficacité allocative du financement, c’est-à-dire sur sa conformité aucritére d’optimalité de Pareto.

En réalité il convient de distinguer entre deux notions, l’effica-cité et l’efficience. La mesure de l’efficacité suppose l’existenced’une relation quantitative et causale entre objectifs et résultats.Elle consiste donc à jauger les performances obtenues par rapportaux buts fixés. Le caractère multidimensionnel des objectifs exige-

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rait d’utiliser une batterie de critéres susceptibles de restituer cettediversité. En fait, l’évaluation, trop souvent, privilégie ce qui estquantifiable et ignore le reste. La prégnance de l’économique et duquantitatif tend ainsi à réduire l’évaluation de l’action de l’Etat àl’usage des seuls critères d’efficacité économique. Certes lesrigueurs de l’ajustement imposent de privilégier ces approches,mais la légitimé et les effets des politiques publiques s’exprimentégalement dans des dimensions sociales et qualitatives.

Les critéres d’efficience comparent les résultats obtenus auxmoyens engagés. L’analyse coét-bénéfice constitue l’archétype dela mesure de l’efficience. Malheureusement, en dépit de son carac-tére séduisant, sa mise en oeuvre est souvent difficile. En l’absen-ce d’un indicateur fiable et complet, l’intuition suggère que l’amé-lioration des processus et des modes de gestion constitue un puis-sant facteur d’efficience des systèmes de financement de la for-mation professionnelle. En ce qui concerne les modes d’organisa-tion du financement, il est probable que l’application des principesde déconcentration, de décentralisation et de subsidiarité peut êtresource d’efficience. S’agissant des processus, amélioration de l’ac-tion de l’Etat passe certainement par davantage de participation(pour les choix d’affectation des ressources), de responsabilité (enexposant le système de formation au “ feed-back ” du marché) etde transparence (ce qui suppose de produire et de diffuser l’infor-mation sur les flux et les circuits de financement).

La saisie des données relatives au financement de la forma-tion professionnelle constitue un problème important. La premièredifficulté concerne la définition même du champ d’investigationUne première approche consiste à englober sous cette appellationaussi bien la formation professionnelle de type scolaire que la for-mation professionnelle contenue et l’apprentissage.

En général les statistiques scolaires des pays offrent la possi-bilité d’obtenir des données sur la part du budget de l’éducationconsacrée à la formation professionnelle. L’obtention de l’informa-tion est encore simplifiée lorsqu’un ministére particulier se chargede ce secteur. Néanmoins, les choses sont moins évidentes qu’iln’y para”t, et, à l’échelle internationale, il est difficile d’obtenir desstatistiques relativement complètes sur les dépenses consacrées àla formation professionnelle au niveau de l’enseignement secon-daire (UNESCO, l993). En outre, certaines contributions, commel’accueil en entreposes, sous forme de stage, de jeunes en forma-

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tion dans le système scolaire, échappent à la comptabilisation desdépenses.

En macère de formation professionnelle continue, la définitiondu concept représente un obstacle encore plus sérieux. En effet, ladistinction traditionnelle entre formation initiale et formation conti-nue devient de plus en plus floue. Les objectifs des deux disposi-tifs sont proches, sinon confondus, leurs publics sont souvent iden-tiques, de méme que les dispensateurs de formation et les sourcesde financement. Dès lors il semble légitime de s’interroger sur ladéfinition du concept de formation continue et sur ce qui le dis-tingue désormais de la formation initiale. A cette difficulté séman-tique, qui dissimule un véritable flou conceptuel, s’ajoute la com-plexité du paysage institutionnel de la formation professionnellecontenue. La multiplicité des acteurs et des niveaux de compéten-ce engendre une atomisation de l’information qui trouble la visiond’ensemble.

L’intégration de la formation aux t‰ches quotidiennes de pro-duction, les pratiques de formation sur le tas et la difficulté deprendre en compte le coét d’opportunité constitue des obstaclessupplémentaires à la saisie et à l’évaluation de l’effort effectif deformation continue.

Au plan financier la diversité des types de dépenses(dépenses en capital, rémunération des stagiaires, autresdépenses de fonctionnement), les multiples sources de finance-ment (Etat, autres collectivités publiques, entreprises, individus) etla superposition des mécanismes de prélévement ou d’affectation(frais d’inscription, instruments fiscaux, subvenions...) rendent lescircuits et les flux assez complexes. La complexité de ce paysageexplique que la plupart des pays ne soient pas dotés d’un systèmecomptable pour la formation professionnelle continue. Dans cecontexte les comparaisons internationales semblent encore plushasardeuses. Il convient cependant de noter les progrès réalisésen ce sens à l’échelle de la Communauté Européenne dans lecadre du projet FOCUS II, Centre européen pour le développe-ment de la formation professionnelle (CEDEFOP, 1990, 1991).

Pour ce qui est de l’Etat, l’analyse des documents budgétairesdoit permettre d’évaluer le montant des fonds alloués à la forma-tion professionnelle contenue. Les contributions des niveauxdécentralisés sont plus difficiles à appréhender si elles ne font pasl’objet de publication.Lorsqu’il existe une obligation légale, le calcul de la contributiondes entreprises se trouve facilité. Il est alors possible de saisir une

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grande partie des dépenses engagées, même si elle ne recouvrequ’une partie de l’effort réel.

Les dépenses consentes par les individus sont les plus diffi-ciles à appréhender. Les enquêtes ménages peuvent permettre dedisposer d’informations sur la part du budget qu’ils consacrent à laformation professionnelle. Un autre type d’investigation consiste àexploiter les comptabilités des centres de formation.

En outre, les mécanismes de refinancement, sous forme decrédit d’impôt au bénéfice des ménages ou des entreprises, ou deremboursement par l’Etat des dépenses privées engagées pour laformation rendent difficile le calcul du coût net. Le refinancementexige ainsi de distinguer entre divers niveaux de financement.

La mesure des coûts de l’apprentissage pose également desproblèmes d’ordre technique. Dans ses formes modernes, larépartition claire des fonctions entre les différents acteurs et l’ex-plicitation des sources de financement autorisent, en théorie, uneévaluation globale. En revanche la mesure est beaucoup plusaléatoire pour l’apprentissage dit traditionnel (Afrique). Là encore,seules des études empiriques seraient de nature à donner desindications du coût de la formation et de sa répartition entre l’arti-san, l’apprend et les familles.

Ce bref aperçu montre que la comptabilisation des sommesaffectées au financement de la formation professionnelle se heur-te à de sérieuses difficultés. Il serait par conséquent illusoire deprétendre généraliser une mesure exacte de l’effort financier etencore davantage de vouloir le comparer d’un pays à l’autre (saufpour un peut nombre de pays). Néanmoins, parvenir plus souventà une connaissance relativement précise de la contribution despouvoirs publics et des entreprises (au titre de l’obligation légale)constituerait déjà un progrès notable.

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Chapitre 2Financement de la formation

professionnelle et dynamiques nationales

Au-delà des principes généraux et des débats théoriques, lessystémes de financement de la formation sont fortement marquéspar l’environnement dans lequel ils opérent. Ainsi, outre la dimen-sion comparative, l’étude de cas particuliers révéle l’originalité dechaque systéme. En l’occurrence, le choix s’est porté sur cinqpays: la République de Corée, Singapour, Maurice, le Brésil et laCôte d’ivoire. Malgré certaines différences d’approche et de conte-nu, l’analyse de chacune des expériences nationales s’efforce defaire ressortir:

• la situation économique du pays; • le mode de développement économique; • la dynamique et les caractéristiques du système d’emploi; • la situation scolaire;• le degré de développement et les modalités d’organisation de

la formation professionnelle et de l’enseignement technique;• l’organisation du système de financement de la formation; et

enfin • des éléments statistiques et qualitatifs d’évaluation du fonc-

tionnement du dispositif en vigueur.

Même incomplet, ce panorama international, en ne se limitantpas aux seules structures réglementaires et financiéres, révéle lanature complexe et dynamique des systémes de financement de laformation.

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1. Le financement de la formation professionnelle ensituation d’industrialisation rapide: la Républiquede Corée, Singapour et Maurice

1.1 Des pays en forte croissance

La République de Corée et Singapour appartiennent à la caté-gorie des nouvelles économies industrielles. Dans les années 60et 70 ces deux pays ont connu un processus de croissance rapidereposant sur l’industrialisation. Dans les deux cas, à des degrésdivers, le développement du secteur manufacturier a surtout repo-sé sur les exportations, suivant ainsi un mode de croissance extra-verti. Après une première stratégie de substitution aux importa-tions, le développement industriel s’est poursuivi grâce à l’expor-tation de produits manufacturés à haute intensité de main-d’oeuvre(Singapour) et la production de biens intermédiaires et en capital(République de Corée).

Ainsi, à la fin des années 80, les quatre nouvelles économiesindustrielles d’Asie (République de Corée, Singapour, mais aussiHongkong et Taiwan) assuraient environ 50 % des exportations deproduits manufacturés de l’ensemble des pays en développementEn 1990, le taux de croissance de la République de Corée s’éle-vait à 8,8 %, celui de Singapour à 8,3 %. Aujourd’hui leur crois-sance industrielle repose de plus en plus sur l’augmentation de l’in-tensité capitalistique et technologique. Cette politique requiert uninvestissement important dans le développement des ressourceshumaines, en particulier en matière de formation professionnelle.

1.2 Le “ modèle ” sud-coréen et ses variantes régionales

La réussite sud-coréenne dans le domaine du développementéconomique a inspiré de nombreux essais de conceptualisation.La République de Corée semblait illustrer la possibilité d’une sor-tie du sous-développement et la tentation d’appliquer ailleurs cemodèle était forte. En réalité, la complexité et l’originalité de cetteexpérience ne se laissent pas enfermer dans un schéma type quiserait transposable, à l’identique, dans d’autres pays (Lanzarotti,1992).

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Faisant suite à une croissance forte dans les années 50 et sur-tout 60, l’économie sud-coréenne a connu un ralentissement entre1975 et 1980 lié à un phénomène d’endettement et d’inflation. Aucours de cette courte pause l’ajustement opéré avec succés permitune relance de l’appareil productif et un rétablissement des équi-libres macro-économiques. Ainsi, à partir de 1986 le pays connut ànouveau un rythme de croissance particuliérement élevé.

Les facteurs de cette croissance sont multiples, nous en isole-rons deux dont l’intervention n’est pas neutre à l’égard de la for-mation. Tout d’ abord la République de Corée se distingue par lerôle de l’État dans l’économie. En effet, et contrairement à l’imagenéo-libérale qui en est parfois donnée, le modéle sud-coréen secaractérise par une régulation étatique forte. Jusqu’au début desannées 80, I’Etat a géré de manière centralisée et relativementimpérative le fonctionnement de l’économie. Ainsi, l’indus-trialisation ne s’est pas spontanément déclenchée en vertu desforces du marché mais fut fortement guidée par les pouvoirspublics. L’intervention de l’Etat a notamment concerné le commer-ce extérieur (contrôle des importations, systéme d’incitation à l’ex-portation) et le financement de l’économie (contrôle de l’allocationdes ressources par l’intermédiaire de la gestion étatique du systé-me bancaire). Mais singuliérement cette planification étatique cen-tralisée, mais pragmatique, s’appliquait à un appareil productifprivé. Dans ce cadre, le contrôle du crédit a conféré au Plan uncaractère relativement coercitif, les entreprises devant se plier auxobjectifs fixés par l’administration.

Le succès paradoxal de ce type de planification et les perfor-mances économiques enregistrées en longue période par laRépublique de Corée sont souvent imputés en partie à la traditionconfucéenne du pays. Ainsi, les théses culturalistes insistent sur lerôle de l’héritage confucéen sur la qualité de la main-d’oeuvre, dis-ciplinée et travailleuse, les comportements d’épargne des consom-mateurs et l’efficacité de l’administration. La tradition historiqueserait également largement responsable d’un fort investissementdans la formation des hommes, en raison de l’importance séculai-re que la société accorde à l’éducation. Ce terreau culturel aurait,de la même façon, contribué au développement de Singapour etdes autres économies exportatrices d’Asie du Sud et de l’Est.

La dynamique de la croissance de Singapour se distingue depar sa configuration de ville-Etat qui lui a conféré traditionnelle-ment un rôle de carrefour commercial, d’entrepôt et de pôle deredistribution. Aujourd’hui les exportations industrielles et les réex-

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portations pétrolières constituent le fer de lance de l’économie.Outre les services financiers, qui se sont également fortement den-sifiés à partir des années 70, la stratégie de développement repo-se principalement sur l’attraction et l’expansion d’activités à forteintensité technologique, gourmandes en main-d’oeuvre hautementqualifiée.Comme en République de Corée le rôle de l’Etat dans la gestionmacro-économique est déterminant à Singapour. Là aussi le modecoercitif a prévalu pour amener les entreprises privées à respecteret à atteindre les objectifs fixés par les pouvoirs publics. Maisdavantage que la République de Corée, qui jouit d’une taille nette-ment supérieure, Singapour a été amené à faire largement appelaux investissements étrangers pour attirer et moderniser les tech-nologies de production.

1.3 La qualification comme facteur d’ajustement d’un marchédu travail tendu

En République de Corée comme à Singapour la mutation del’économie s’est accompagnée d’une recomposition du marché dutravail. A une situation d’excédent de main-d’oeuvre a succédé unétat de déficit chronique de l’offre de travail. Cette pénurie pése surles taux de salaires et favorise le processus d’automatisation de laproduction ainsi que le recours à l’immigration (Singapour).L’augmentation du coét du travail motive également un mouve-ment de délocalisation des opérations d’assemblage vers deszones moins développées d’Asie.

Le niveau particulièrement bas du taux de chômage (1990),2,7 % en République de Corée, 2, 1% à Singapour, permet de qua-lifier ce phénoméne de frictionnes (BIT, 1992). Il convient de noterque ce faible chômage s’accompagne d’une forte mobilité de l’em-ploi, son niveau s’adaptant rapidement aux variations conjonctu-relles de la production. En 1991 la Corée manquait de 190.000 tra-vailleurs dans le secteur manufacturier (BIT, 1992). Il faut soulignerque ce problème n’est pas seulement lié au rythme de croissancede l’économie. La pénurie de main-d’oeuvre résulte aussi d’unaffaissement de la dynamique démographique et d’une évolutiondes comportements que reflétent les changements des taux d’ac-tivité. Ainsi, une étude récente menée en République de Corée(BIT, 1992) révéle que 95 % des éléves du secondaire et 18 % desjeunes scolarisés dans des établissements professionnels aspirent

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à poursuivre leurs études plutôt qu’à entrer sur le marché du tra-vail.

Les politiques d’immigration varient sensiblement selon lespays. Traditionnellement la République de Corée prohibe l’appel àla main-d’oeuvre étrangére non qualifiée. Au contraire, Singapourest contraint de faire massivement appel à l’immigration, on ydénombre ainsi 150.000 étrangers sur une population totale de 1,3millions d’habitants. Néanmoins, cet apport considérable masqueune réglementation stricte qui lie étroitement les flux aux aléas dela conjoncture et n’exclut pas le renvoi des travailleurs “ invités ”.

La politique industrielle actuelle privilégie le développementdes technologies et de la productivité. Dans ce cadre la formationprofessionnelle revét une importance grandissante et la dépen-dance à l’égard de la main-d’oeuvre étrangére devrait étre conte-nue, voire réduite.

Le fonctionnement du marché du travail est également carac-térisé par une forte flexibilité des salaires. En République deCorée, comme à Singapour, le système de rémunération com-prend un salaire de base et un salaire variable dont le calcul estplus ou moins complexe. Cette composante variable est en gran-de partie indexée sur des performances, non pas de l’individu,mais de l’entreprise. Cette élasticité du salaire par rapport auxconditions économiques témoigne de la prégnance des méca-nismes concurrentiels sur le fonctionnement du marché du travail.

1.4 L’enseignement de base et la formation professionnelle:socle du développement des ressources humaines

De nombreux travaux ont montré l’importance de l’enseigne-ment primaire pour la qualité de la main-d’oeuvre. C’est en effet àce niveau que l’investissement produit le rendement le plus élevé.Le niveau d’instruction détermine également les possibilitésfutures de formation continue. La taille importante de l’appareilpublic d’enseignement et les forts taux de scolarisation témoignentde la prise en compte de cette donnée en République de Coréecomme à Singapour.

L’évolution et le niveau des taux de scolarisation expriment lesprogrès accomplis et reflètent les efforts réalisés dans le domainede l’éducation (Tableau 1). A cet égard il convient de remarquer,outre la généralisation de l’enseignement primaire, le taux élevé descolarisation dans le second degré, et pour la République de

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Corée, la participation particulièrement forte à l’enseignementsupérieur.

Tableau 1. La République de Corée et Singapour: taux bruts descolarisation

Source: UNESCO, Rapport mondial sur l’éducation, 1991. ND = Non disponible.________________________________________________________________

La formation professionnelle est aussi, dans les deux pays, unsecteur très développé et fortement institutionnalisé (Salomé;Charmes, 1980). Mais l’option retenue y est différente: formationprofessionnelle intégrée au systéme éducatif en République deCorée, externalisation de cette fonction à Singapour. Néanmoins,dans les deux pays, le dispositif de qualification de lamain-d’oeuvre est fortement contrôlé par les pouvoirs publics.

Le système sud-coréen comporte une offre variée. Les lycéesprofessionnels et les établissements d’enseignement profession-nel post-secondaire relèvent du ministère de l’Education, leurapparition au sein du systéme éducatif refléte le souci du gouver-nement de former la main-d’oeuvre qualifiée nécessaire à la rapi-de croissance économique.

Afin de lutter contre la pénurie de personnel qualifié deniveau intermédiaire, le ministère de l’Education a entrepris deporter la capacité d’accueil des lycées professionnels de750.000, en 1992’, à 1 million en 1995, ce qui reviendra àrépartir également les effectifs entre les lycées d’enseigne-ment général et la filiére professionnelle (Ministre of Education,

1. Les effectifs inscrits sont passés de 714.000 en 1992 à 738.000 en 1993 dont55 % accueillis dans des établissements privés, auxquels il conviendrait d’ajouter9i.000 élèves en cours du soir (Republic of Korea, Ministry of Education,Statistical Yearbook of Education, and and 1993).

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Republic of Korea, 1992). Cet objectif fait partie d’un ensemble demesures destinées à renforcer ce type de formation, et s’inscritdans le cadre du “ Plan pour l’expansion de l’enseignement pro-fessionnel ”. Ainsi, par exemple, les programmes de l’enseigne-ment général comporteront désormais des options dans desdomaines professionnels.

Par ailleurs, en 1989 la République de Corée comptait 119établissements postsecondaires d’enseignement professionnel,accueillant 291.000 étudiants. Le développement de services deformation continue pour les entreprises constitue également unaxe du rapprochement entre l’université et le monde du travail.Depuis 1991, des “ polytechnics ”, ou universités “ ouvertes ”, licesaux entreprises, offrent des formations aux salariés. Il est en outrefortement souhaité par les pouvoirs publics que les employeursoffrent des bourses, ou d’autres modes d’aide, pour financer cesformations.

Egalement au sein du service public, le ministère du Travailgère des centres de formation professionnelle pour les jeunes.Enfin, les grandes entreprises ont créé des établissements pourrépondre à leurs besoins spécifiques.

A la différence de la République de Corée, Singapour a choiside développer son appareil de formation professionnelle à l’exté-rieur du système scolaire. Cette option a été prise en 1973, l’hypo-thèse étant qu’une entité autonome, mais contrôlée par l’Etat,constituerait un outil plus flexible, mieux à méme de répondre rapi-dement à l’évolution des besoins liés au développement industrieldu pays. En 1979 le dispositif fut complété pour réunir sous uneautorité unique, le “ Vocational and Industrial Training Board (VITB)”, la formation professionnelle initiale et continue. L’originalité decette institution résidait dans sa gestion tripartite. Ainsi, le conseild’administration, présidé par un membre du gouvernement, étaitcomposé de représentants du ministère de l’Education, du secteurprivé et des syndicats de travailleurs. Les formations offertes dansles 14 centres du VITB s’articulaient autour de quatre compo-santes étroitement liées entre elles.

i) un dispositif de formation professionnelle initiale classiquepour les jeunes ayant quitté l’école;

ii) un appareil de formation continue offrant aux salariés soit desprogrammes professionnels sous forme modulaire soit descours d’enseignement général conduisant à une validation;

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iii) des systèmes contractuels associant les entreprises à la forma-tion dans le cadre de l’apprentissage, régi par le principe del’alternance, ou à l’occasion d’actions de formation en entrepri-se conduite par les employeurs avec l’appui du VITB;

iv) enfin, cette institution pilote des programmes d’éducation debase [Basic Education for SkillsTraining (BEST), WorkerImprovement through Secondary Education] destinés à conso-lider et à relever le niveau d’instruction générale des ouvriers.

Il faut également souligner que le VITB était également l’insti-tution de validation pour les diplômes professionnels.

En 1992, l’appareil de formation professionnelle a été rénovéet placé sous l’autorité d’un nouvel organisme, l’Institut d’éducationtechnique IET, dont la vocation est de développer la formation auniveau post-secondaire. Cette réforme répond ainsi à l’évolutionconstante du niveau éducatif des jeunes et de la main-d’oeuvre età l’élévation des besoins en qualification. Comme son prédéces-seur, l’IET fonctionne selon un mode tripartite, en associant l’Etat,les entreprises et les syndicats de salariés.

Outre cette recomposition de l’offre au niveau post-secondai-re, les fonctions dévolues à l’Institut sont élargies au conseil en for-mation et aux études. Auprés des employeurs ce nouvel organis-me contribue à la conception de centres de formation intra-entre-prise, ainsi qu’à la qualification de la main-d’oeuvre à travers l’ap-prentissage et la formation de formateurs. Une procédure d’habili-tation permet de contrôler et d’attester la conformité des structureset programmes de formation mis en place par les entreprises. Unequarantaine de centres intra-entreprise ont ainsi vu le jour, totali-sant une capacité d’accueil de plus de 5.000 stagiaires. Ces résul-tats traduisent l’effet multiplicateur du système développé, sur unebase tripartite, par Singapour.

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L’analyse de l’évolution des effectifs révèle les tendances sui-vantes

(Tableaux 2 à 5)

La formation professionnelle initiale a suivi, depuis 1981, uneprogression irrégulière, l’effectif maximum a été atteint en 1985, latendance est ensuite au fléchissement (Tableau 2).

Le nombre d’apprentis a connu un sort assez comparable.Ainsi, aprés une augmentation entre 1981 et 1982, les effectifs ontchuté assez sensiblement pour se stabiliser autour d’un peu plusde 2.000 personnes, réparties dans environ 200 entreprises, soitune moyenne de 10 apprentis par entreprise (Tableau 3). Il est parailleurs intéressant de remarquer que le secteur qui accueille leplus d’apprentis est celui de l’hôtellerie, industrie de main-d’oeuvreà faible intensité technologique (Tableau 4).

La fin des années 80 a également marqué une légére baissedes stagiaires bénéficiant des programmes de formation continue(Tableau 5).

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L'organisation de l'enseignement technique et dela formationprofessionnelle à Singapour, quelques jalons :

1964 Création du premier institut professionnel, sous latutelle du ministère de l'Education.

1968 Création d'un département de l'enseignement tech-nique au sein du ministère de l'Education.

1973 L' "Industrial Training Board (ITB)" remplace le dépar-tement de l'enseignement technique.

1979 Création du "Vocational and Industrial Training Board"par fusion de l'ITB et du Bureau pour l'éducation desadultes "Adult Education Board"

1992 Création de l' " Institute of Technical Education (ITE) "

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Ainsi, paradoxalement, en dépit d’un appareil de formationsophistiqué et très développé, la tendance actuelle semble accu-ser un recul, ou au mieux une stabilisation, de l’effort de formationprofessionnelle mesuré à travers le nombre de participants. Cetécart apparent entre une volonté politique, appuyée par desmoyens puissants, et les pratiques des acteurs, suggére que lavision des pouvoirs publics différe des attentes et des comporte-ments des usagers, employeurs, salariés ou élèves.

Tableau 4. Singapour: répartition des apprentis par secteur (1990)

Source: VITB, Key Statistics on Vocational Training, Singapore, 1990.____________________________________________________________________

Tableau 5. Singapour: évolution du nombre de stagiaires de la formation continue (1986-1990)

Source: VITB. Key Statistics on Vocational Training, Singapore,1990.____________________________________________________________________

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1.5 L’organisation du financement de la formation

En République de Corée, le financement de l’enseignement tech-nique et de la formation professionnelle initiale reléve du budget del’Etat, et des ministéres de l’Education et du Travail. En revanche, laformation professionnelle continue repose sur les contributions desentreprises. S’inscrivant dans une démarche planificatrice globale cesystème est fondé sur la contrainte et régulé en fonction des prévi-sions des besoins en qualification. Ainsi, selon une loi promulguée en1976 sur la formation professionnelle, les entreprises d’au moins 300personnes sont tenues de former chaque année une partie de leurpersonnel. L’effectif concerné est déterminé par un coefficient dont lavaleur est annuellement fixée par le ministère du Travail en tenantcompte notamment des besoins en qualification révélés par lesenquêtes main-d’oeuvre. Les entreprises qui se dérobent à cette obli-gation doivent verser à l’Etat une taxe dont le montant est calculé enfonction des coéts moyens de formation dans le secteur. Le produit dela taxe est versé à un Fonds pour la promotion de la formation pro-fessionnelle. L’exonération est soumise à l’approbation préalable duplan de formation par le ministére.

En dépit de ce dispositif sophistiqué les statistiques montrent unebaisse du nombre de stagiaires en entreprise entre 1980 et 1985(Tableau 6;). Ce fléchissement sensible coïncide avec une baisse dela valeur du coefficient de formation et une augmentation du nombred’entreprises qui choisissent de verser la taxe. Ces évolutions sem-blent révéler les limites du système de financement en vigueur. Fondésur la contrainte, il ne semble pas être parvenu à induire chez lesemployeurs un comportement durable en faveur de la formation dessalariés. La lourdeur administrative du dispositif et le contrôle bureau-cratique, a priori, qu’il induit participent certainement à l’apparent relâ-chement de l’effort de formation consenti par les entreprises.

A cela s’ajoute une relative inadéquation entre les moyensemployés et l’origine des pénuries de qualification. Ainsi, l’analyse dumarché du travail (Lee, 1985) semble indiquer que les pénuries demain-d’oeuvre ne sont pas tant liées à une offre insuffisante de travailqualifié qu’a la rudesse des conditions de travail et à la structure dessalaires.

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A Singapour également, le financement de la formation tech-nique et professionnelle est assuré principalement par le budget del’Etat. En outre les pouvoirs publics contribuent très largement, àtravers les programmes spécifiques destinés à la qualification dessalariés [Modular Skills Training (MOST); BEST], à la formation dela main-d’oeuvre. Ainsi, l’analyse du budget du “ Vocational andIndustrial Training Board ” montre, pour l’exercice 1991, que sur untotal d’un peu plus de 118 millions de dollars singapouriens, plusde 104 millions, soit approximativement 88 %, provenaient d’unesubvention du gouvernement (Tableau 7). L’augmentation forte etcontinue des dépenses courantes entre 1985 et 1989 exprime l’in-tensité croissante des actions de formation engagées (Tableau 8).

Tableau 7. Singapour: sources de financement du VITB pour l’exercice 1991(en milliers de dollars singapouriens)

Source: VITB, Annual Report 90/91, Singapore, 1991.____________________________________________________________________

Tableau 8. Singapour: évolution des dépenses de fonctionnement del’VITB (1985-1989), en dollars singapouriens

Outre les actions prioritaires financées par les pouvoirspublics, la formation continue des salariés est régie par une loi de1979. Ce texte instituait un Fonds de développement des qualifi-cations “ Skills Development Fund ” alimenté par une taxe pour laformation prélevée exclusivement sur les bas salaires. Cette poli-tique s’inscrivait dans une stratégie d’éradication des bas niveauxde qualification par la promotion de la formation. En effet, les

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sommes collectées étaient destinées, par un systéme de rembour-sement, au financement de la formation de cette catégorie de sala-riés. Une fois formée, cette main-d’oeuvre plus productive et doncmieux payée, sortait du champ d’application de la taxe.

De plus, le caractère discriminant de la taxe visait également,en introduisant une distorsion entre le prix relatif des facteurs deproduction, à encourager un mouvement de substitution du capitalau travail. Cette stratégie originale s’inscrit tout à fait dans la poli-tique d’industrialisation à haute valeur ajoutée, donc concentréesur les technologies de pointe, dans laquelle s’est engagé le pays.

Initialement fixé à 1 % de la fraction de la masse salarialeconcernée, le taux d’imposition fut rapidement porté à 4 %, puisramené à 1 % en 1986. Ce revirement peut être interprété de dif-férentes manières. La modification de la structure des emplois,consécutive au développement de la formation et de l’automatisa-tion, pourrait offrir une première explication. La transformation pro-gressive du comportement des employeurs, en faveur d’une priseen charge spontanée des besoins en formation pourrait aussiexpliquer cette tendance. Mais en dehors de ces facteurs, l’accu-mulation par le Fonds de ressources non affectées traduit égale-ment, sinon la réticence, au moins la difficulté que certaines entre-prises éprouvent à définir puis à mettre en application de véritablespolitiques de formation.

S’agissant de la formation continue des salariés, il convientégalement de mentionner l’implication des syndicats qui, à traversleur fédération “ National Trades Union Congress ”, ont participé àla conception et au financement du programme de qualificationmodulaire lancé en 1986 “ Modular Skills Training Scheme ”. Cedispositif a concerné plus de 33.300 salariés. Le Fonds rembourseaux entreprises 70 % du coût de la formation et près de 20 % desstagiaires ont bénéficié d’un financement d’origine syndicale.

Enfin, dans le cadre de l’apprentissage les entreprises pren-nent en charge une partie importante du coût de la formation desjeunes. Directement inspiré du modèle dual germanique ce systè-me devrait à l’avenir connaître une croissance accrue.

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1.6 La diffusion du modèle asiatique: le cas mauricien

• De l’économie de plantation à l’industrialisation

L’évolution de la société et l’économie mauricienne constitueun exemple assez atypique de mutation structurelle qui, en unedécennie environ, a transformé un pays traditionnellement consa-cré à une monoexportation agricole en un exportateur dynamiquede produits manufacturés. Ainsi, au début des années 80 l’écono-mie de Maurice était encore caractérisée par la monoculturesucrière et un taux de chômage élevé. L’insularité, l’éloignement etla petite dimension qui définissent la géographie du pays sem-blaient vouer Maurice à un rôle de production primaire, et de pôletouristique. Mais le réinvestissement des revenus sucriers dansl’industrie modifia progressivement le tissu économique national.Le développement d’une capacité industrielle non sucrière se tra-duisit par la création d’une zone franche d’exportation “ ExportProcessing Zone ” bâtie sur le modèle singapourien. A l’origine, lespremières entreprises implantées dans cette zone appartenaientau secteur dé la joaillerie et de l’horlogerie, mais très vite l’activitése concentra sur le textile. L’existence d’une main-d’oeuvre abon-dante, alphabétisée et déjà en partie formée au travail industriel,ainsi que le bas niveau des taux de salaire se prétaient bien à cetype de production à fort cÏfficient de main-d’oeuvre. Le tourismeconnut également un fort développement.

A la fin des années 80 Maurice pouvait afficher un profil éco-nomique totalement transformé avec d’une part un tissu productifdiversifié, reposant désormais sur trois piliers: l’agriculture, l’indus-trie et le tourisme, et d’autre part un marché du travail souffrant depénuries de main-d’oeuvre. La société de plantation a laissé placeau secteur moderne qui a progressivement monétarisé leséchanges et intégré la main-d’œuvre dans le salariat.

Ces performances remarquables expliquent le surnom de “petit dragon ” parfois attribué à Maurice. Mais en dépit d’une appa-rente similitude, voire filiation, entre ce mode de développement etl’émergence des nouveaux pays industrialisés d’Asie il importe desouligner l’originalité du processus d’accumulation mauricien.Tout d’abord, à la différence de Singapour, le secteur agricolecontinue d’occuper une place économique déterminante. Ensuitecontrairement au cas coréen, la dimension réduite du marché inté-rieur (à peine un peu plus d’un million d’habitants) condamne le

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pays à une extraversion forcenée. Il convient également de sou-ligner que Maurice bénéficie d’un statut privilégié qui lui accor-de, dans le cadre de la Convention de Lomé, un marché proté-gé, sinon captif. L’ouverture et le développement de l’économiese sont donc effectués au sein d’un espace protecteur. Cetteconcession n’enléve rien à la qualité de la stratégie d’industria-lisation suivie et aux mérites de l’Etat qui a su gérer cette tran-sition notamment en réussissant, comme la République deCorée, à combiner ajustement et croissance. Mais contraire-ment à ses références d’Asie férues de planification, l’état mau-ricien a préféré une option libérale, tant pour guider le dévelop-pement industriel que pour gérer les relations professionnelles.Après une décennie de croissance rapide l’économie mauri-cienne recherche un second souffle. Le “ problème ” du pleinemploi et l’accroissement du coût du travail rendent en effetobsolète l’outil industriel. Dès lors, l’indispensable reconversionde la zone d’exportation ajoutée au mouvement de mécanisa-tion des t‰ches exige une redéfinition de la politique industriel-le, et lance de nouveaux défis à la formation professionnelle.

• Le développement de l’éducation

Après avoir réalisé depuis déjà longtemps la scolarisation uni-verselle au niveau primaire, le taux net de scolarisation s’élève à98 %, Maurice s’est engagé en 1991 dans une vaste réforme édu-cative “ Master Plan for the Year 2000 ”. Les objectifs de cetteréforme sont d’offrir à chaque enfant une scolarité minimale d’unedurée de neuf ans et d’améliorer, à tous les niveaux, la qualité del’enseignement.

Ce plan de développement et de modernisation du systèmeéducatif s’inscrit dans le contexte actuel de transition de la sociétéet de l’économie.

Au-delà de ses objectifs éducatifs généraux, la réforme vise àpromouvoir la mobilité de la main-d’oeuvre et à élever son niveaude qualification. Ainsi, les mesures prises accordent une placeimportante à l’enseignement technique et professionnel ainsi qu’àla formation continue des travailleurs.

Outre le développement de la capacité d’accueil des structuresd’enseignement technique, notamment au niveau postsecondaireoù un nouvel établissement sera créé “ College of Further

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Education ”, l’actualisation des programmes devrait permettre demieux adapter la formation aux besoins des entreprises et de favo-riser l’introduction de nouvelles technologies (jusqu’à présent l’im-plantation du Acteur de l’électronique s’est toujours soldée par unéchec).

Selon les projections des besoins en main-d’oeuvre, le déficitdes cadres devrait s’élever à 7.000 personnes au cours desannées 90. Même si le ministére chargé de l’Education conservela responsabilité principale de la formation, il s’appuiera de plus enplus sur d’autres acteurs, notamment dans le secteur privé, pourremplir à bien sa tâche. Par ailleurs la formation continue se voitreconnaître une place grandissante. Dans un contexte de crois-sance des coéts du travail et de mécanisation de la production, lareconversion des personnes déjà en activité constitue un enjeuimportant. Ce partage des responsabilités et l’accent porté sur laformation continue se reflètent aussi dans l’organisation du finan-cement.

S’agissant de l’enseignement technique, le Plan prévoit quetoutes les nouvelles écoles secondaires intégreront des filières àcaractère professionnel.

• L’organisation de la formation professionnelle

La loi de 1988 sur la formation professionnelle institue un nou-vel organisme " Industrial and Vocational Training Board " dont lesobjectifs sont notamment de promouvoir ou d’offrir la formationprofessionnelle initiale ou en cours d’emploi.

Conformément au texte de 1988, amendé en 1991, le conseild’administration “ Council ” se compose des membres suivants:

• un président nommé par le Premier ministre;• un vice-président désigné par le ministre après consultation de

la Fédération des employeurs;• un représentant du ministère des Ressources humaines et de

la Formation professionnelle et technique;• un représentant des services du Premier ministre;• un représentant du ministère de la Planification économique et

du Développement;• un représentant des ministéres de l’Education et des Sciences;

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• un représentant du ministère de l’Industrie et de la Technologieindustrielle;

• un représentant du ministère de la Fonction publique et del’Emploi;

• six représentants du secteur privé désignés par le ministre.

Au cours des deux premières années de fonctionnementl’IVTB a contribué à la formation de 27.000 personnes dont prèsd’un millier ont été formées dans l’un de ses centres de formation.

Outre la formation continue des salariés, l’IVTB a en charge unprogramme de formation préprofessionnelle destiné aux enfantsâgés de 12 à 14 ans, ayant quitté le système scolaire. Les onzeétablissements offrant cette formation peuvent accueillir environ2.300 jeunes.

Mais les activités de cette institution dépassent le champ de laformation et englobent le conseil aux entreprises, la validation desacquis ainsi que l’habilitation des organismes de formation.L’habilitation est assujettie à des critéres de qualité s’appliquantaux locaux et équipements, aux contenus des stages et à la quali-fication des formateurs. La publication par l’IVTB d’un annuaire desorganismes de formation agréés contribue au respect du critére detransparence, condition indispensable au bon fonctionnement d’unmarché de la formation professionnelle.

Le dispositif mis en place par Maurice est ainsi très largementinspiré de la formule singapourienne. L’absence de représentantsdes syndicats de salariés au sein du conseil d’administration del’IVTB constitue néanmoins une différence notable dans la concep-tion des deux systémes.

• Le financement du dispositif

Jusqu’en 1988 le financement de la formation professionnellereposait soit sur les contributions des usagers, prélevées par lescentres de formation privés, soit sur des subventions accordéespar l’état aux établissements publics. Dans certains cas les pou-voirs publics finançaient également la formation sous forme debourses. L’année 1988 marqua une réforme complète de ce systé-me. Désormais le financement de la formation professionnelle estfondé sur le principe de cofinancement entre l’Etat et le secteurprivé. Ainsi, les activités de l’IVTB sont en partie financées par unFonds alimenté par le produit d’une taxe prélevée sur les salairesversés par les entreprises.

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L’Etat participe directement au financement des dépenses del’IVTB (à hauteur de 85 % pour les dépenses en capital, jusqu’à 50% des dépenses de fonctionnements le solde provient de la taxesur les salaires. Jusqu’à présent les frais d’inscription ne constituequ’une part faible des ressources.

Le taux d’imposition s’élève à 1 % de la masse salariale.L’impôt est levé pour le compte de l’IVTB par le ministère de laSécurité sociale lors du prélèvement des caisses retraites. Lessommes ainsi collectées alimentent le Fonds pour le financementde la formation professionnelle. Ce mode de collecte, identifiant lescotisations pour la formation aux autres cotisations sociales, cor-respond bien à la notion d’assurance formation qui a déjà étédécrite.

Ce Fonds est géré par un Conseil composé de 14 membresprovenant, à part égale, du secteur privé et du secteur public. Laprésidence du Fonds revient au ministre des Ressourceshumaines et de la Formation professionnelle et technique. LeFonds participe à l’identification des besoins en formation, à l’éla-boration des programmes, à l’évaluation des actions et conseillel’IVTB sur l’orientation à donner à la formation.

Le mécanisme de financement de la formation combine unabattement fiscal de 200 % et le remboursement, par le Fonds,d’une part des dépenses engagées pour la formation. Ce systèmemixte vise à encourager les employeurs à développer les actionsde formation. La somme remboursée par le Fonds est fonction ducoût de la formation (C) et du montant de l’abattement fiscal (R).La formule fixant le remboursement est la suivante:

C x [1-(0,25/1-2R)]

Selon cette formule la charge de l’employeur s’éléve à aumoins 25 % du coét total de la formation. Le solde est réparti entrel’Etat (sous forme d’abattement fiscal) et l’IVTB (sous forme desubvention), en fonction du taux d’imposition, selon la grille ci-des-sous:____________________________________________________________________

Taux d’imposition Part patronale Part défiscalisée Part IVTB____________________________________________________________________

15% 25% 11% 64%25 % 25 % 25 % 50 %35 % 25 % 58% 17%

____________________________________________________________________

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Depuis l’entrée en vigueur de ce régime, les financements etleur répartition ont évolué de la façon suivante:

Tableau 9. Statistiques sur les dépenses de formation professionnelleà Maurice (en millions de roupies mauriciennes)

L’augmentation importante des sommes consacrées à la for-mation professionnelle entre 1989 et 1993 (+389 %) traduit lacroissance de l’effort consent par l’Etat et les employeurs. En 1993la part de la contribution fiscale des entreposes représentait envi-ron 48 % des sommes investies dans la formation.

Ces chiffres montrent que la législation sur la formationprofessionnelle introduite en 1988, et le mécanisme de finance-ment qui lui est associé, ont contribua à soutenir très fidèlement lapolitique de développement de la formation impulsée par les pou-voirs publics. A terme, la poursuite de cette tendance devrait signi-fier une modification du comportement des employeurs à l’égardde la formation se traduisant par une croissance de la part patro-nale relayant l’effort de la collectivité nationale. Il convient toutefoisde s’interroger sur la capacité d’un système excluant les représen-tants des salariés des décisions à générer un mouvement ample etdurable de développement de la formation professionnelle.

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2. Les précurseurs: le financement de la formationprofessionnelle en Amérique latine

2.1 Le syndrome de la “ décennie perdue ”

Après une phase d’expansion et d’industrialisation l’Amériquelatine a traversé, durant les années 80, une période de dégrada-tion profonde des conditions économiques et sociales. C’est ceprocessus régressif d’involution que tente d’exprimer le terme de “décennie perdue ” popularisé par la Commission économique pourl’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).

La croissance passée reposait sur une stratégie d’industriali-sation par substitution aux importations. La dynamique d’accumu-lation était donc essentiellement interne, tournée vers la satisfac-tion du marché national. Ce processus, parfois associé à une poli-tique de réforme agraire et fiscale en faveur des bas revenus,conduisit à un développement de la classe moyenne et à la salari-sation d’une part importante de la force de travail.

Mais cette forte croissance était également génératrice dedéséquilibres aux effets parfois cumulés: inflation, déficit budgétai-re, déséquilibre de la balance commerciale, endettement extérieur.L’aggravation de ces déséquilibres, et la crise financière qui enrésulta, imposérent la mise en oeuvre de programmes de stabili-sation et d’ajustement parfois drastiques. Les mesures prises com-prenaient généralement la réduction des dépenses de l’Etat, la pri-vatisation du secteur public marchand, la dévaluation de la mon-naie, et, dans certains cas, une restriction réglementaire desimportations.

Tardant à produire les effets vertueux attendus, la réductiondes investissements publics a au contraire, au cours d’une pre-mière phase d’ajustement, contribué à la récession et déterminéun affaiblissement des structures productives, notamment indus-trielles. En effet, contrairement au cas de la République de Corée,ou de Maurice, le caractére fermé de l’économie n’a pas autoriséà la demande externe de relayer la contraction du marché intérieur.

Dans ce contexte, la crise s’est traduite par l’apparition dehyper-inflation, le gonflement de la sphère spéculative, une ten-dance à la désindustrialisation et, en définisse, par un mouvementde paupérisation. Ainsi, à l’orée de la décennie quatre-vingt-dix,l’Amérique latine se trouve sensiblement appauvrie. En dix ans(entre 1980 et 1990) le Produit intérieur brut (PIB) par habitant achuté de 9,6 %, la consommation a baissé de 6 % et, dans le sec-

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teur moderne, les salaires réels se sont affaissés d’environ 7 %.Selon le rapport du Bureau international du travail (BIT) sur le tra-vail dans le monde (1992) 44 % de la population était, à cette date,en situation de pauvreté.

Ce recul des conditions socio-économiques associé à lacontraction de l’emploi dans le secteur moderne a déclenché lerepli d’une part croissante de la population active vers un secteurinformel composé en grande partie d’activités de survie. Ainsi, 31% des travailleurs non agricoles sont occupés dans le secteurinformel (BIT, 1992). Globalement 42 % de la force de travail seraitsous-employée ou en chômage (BIT, 1992).

L’éclatement des statuts des travailleurs et la complexificationdes schémas de mobilité conduisent à l’exclusion durable d’unepart croissante de la main-d’oeuvre du salariat formalisé.Corrélativement ces actifs se voient écartés de l’accès à la forma-tion professionnelle.

2.2 Les retombées de l’ajustement sur l’éducation

Le processus de modernisation qu’ont connu les sociétés de larégion depuis les années 50 s’est accompagné de progrès sen-sibles dans le domaine de l’éducation. Les données disponiblespour la période 1970-90 confirment cette tendance.

Les taux d’alphabétisation ont progressé et dépassent aujour-d’hui 80 %. Ce progrés en termes relatifs s’est par ailleurs accom-pli alors que le nombre d’analphabétes se stabilisait, depuis 1970autour de 44 millions.

Les taux bruts de scolarisation dans le primaire dépassent 100% et la scolarisation préprimaire se développe de façon continue.L’augmentation des taux de scolarisation est également nette pourles second et troisième degrés de l’enseignement. En vingt ansces taux ont doublé pour l’enseignement secondaire et triplé pourle supérieur.

Cette expansion quantitative s’est cependant produite audétriment de la teneur de l’enseignement et des conditions d’ap-prentissage. L’insuffisante qualité de l’éducation de base constitueainsi un probléme majeur pour les systémes scolaires d’Amériquelatine (Schiefelbein, 1992).

En outre, la réduction des dépenses publiques qui a marqué lacrise financière des années 80 n’a pas épargné le secteur de l’édu-cation. La plupart des pays ont ainsi enregistré une baisse de lapart du PIB consacrée à l’éducation ainsi qu’un fléchissement des

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dépenses publiques par élève. Dans certains cas cette austéritébudgétaire a entraîné une baisse sensible de la qualité de l’ensei-gnement.

Le développement graduel de l’éducation, qui s’est traduit parune quasi-généralisation de l’enseignement primaire et une forteexpansion du secondaire, a progressivement modifié le contenu etle niveau de la formation professionnelle. La progression contenuedu niveau d’instruction de base a en effet permis un recentrage dela formation sur les compétences techniques et les savoir-faire, etune élévation du niveau d’apprentissage.

Les rigueurs de l’ajustement n’ont pas ménagé la formationprofessionnelle et les dispositifs de financement en vigueur s’ensont trouvé gravement éprouvé [Centro Interamericano deInvestigacion y Docamentacion sobre Formacion Profesional (CIN-TERFOR), 1991]. Dans la plupart des pays de la région, la raré-faction des ressources publiques et la contraction de l’emploi dansle secteur moderne se sont conjuguées pour assécher les sourcestraditionnelles de financement de la formation professionnelle:subventions étatiques et impôts sur les salaires. Cette conjoncturea néanmoins conduit les institutions créées pour la formation pro-fessionnelle à rénover leur mode de fonctionnement et à bâtir desmontages financiers innovants. Le Brésil, précurseur dans ledomaine du financement de la formation professionnelle enAmérique laine, constitue une bonne illustration de cette évolution.

2.3 Le cas brésilien

• Industrialisation et exclusion

L’industrialisation de l’économie brésilienne s’est opérée à par-tir des années 50. Jusque-là le pays était spécialisé dans la pro-duction d’un petit nombre de biens agricoles destinés à l’exporta-tion, en particulier le café. Largement inspirée des travaux de laCommission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes del’Organisation des Nations Unies (ONU), la politique industriellechoisie reposait sur la substitution aux importations. La structurede l’économie et la répartition de l’emploi se sont ainsi transfor-mées à mesure que se développait l’urbanisation.

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La densification et l’élargissement du tissu industriel ontprogressivement alimenté la croissance des services qui consti-tuent aujourd’hui la principale source d’emploi. Ce secteur repré-sente également la plus grosse part du PIB.

L’ampleur des disparités régionales est l’une des caractéris-tiques du mode de développement brésilien. Dés l’origine la crois-sance s’est concentrée dans la région de Sao Paulo.L’industrialisation s’est ainsi nourrie des revenus tirés de l’exporta-tion du café. Cette croissance a trés vite attiré une main-d’oeuvrenombreuse originaire des autres Etats de l’Union. En conséquen-ce, la région de Sao Paulo concentre près de la moitié de la popu-lation du pays, et rassemble environ 50 % de la production indus-trielle nationale et de l’emploi du secteur.

Au même titre que les autres pays de la région, le Brésil abeaucoup souffert de la crise des années 80. Au cours de cettepériode le PIB par habitant n’a progressé que de 10 %, contre 80% au cours de la décennie précédente. La détérioration des reve-nus du travail, le développement d’une inflation non maîtrisée et lacrise profonde des finances publiques ont conduit à une dégrada-tion des conditions socio-économiques, notamment pour les pluspauvres. Compte tenu de l’amplitude des différences sociales etrégionales qui caractérise le pays, la crise et les mesures d’ajuste-ment macro-économiques qu’elle a induites ont produit des effetsdifférentiels selon les catégories sociales et les régions.

L’impact de cette situation sur le système d’emploi a d’abordété une segmentation accrue du marché du travail. On estimeaujourd’hui qu’approximativement 60 % de la force de travail estoccupée dans le secteur informel. La crise particulièrement aiguësubie au cours de la période 1981-1983 a alimenté un vaste mou-vement de transfert de main-d’oeuvre du secteur moderne vers lesecteur informel.

Il importe de noter qu’environ 5 % des emplois industriels sontoccupés par des jeunes de moins de 18 ans, cette populationreprésente grosso modo 300.000 personnes. Ce public constitueune cible privilégiée pour la formation professionnelle. D’autantque l’entrée précoce dans le marché du travail est généralementconsidérée comme un handicap pour l’évolution professionnelledes jeunes.

En dépit des progrès indéniables réalisés dans le domaine del’éducation force est de constater qu’une vaste majorité des tra-vailleurs du secteur industriel ont un niveau de scolarisation infé-rieur à la fin du cycle d’études primaires (Tableau 10). Ce profil

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éducatif de la main d’oeuvre industrielle constitue un importantobstacle à la reconversion, pourtant inévitable en phase d’ajuste-ment structures et à l’introduction de nouvelles technologies, indis-pensables au développement.

Tableau 10. Niveau de scolarisation des travailleurs du secteur industriel (1985)

Source: MTb - Anuario RAIS - 85/Brasil. Extrait de: M. Assis (de), Brazil: Implications of technologicalchange for skiffs and training in Sao Paulo Industries, DiscussionPaper No. 47, ILO, 1990.________________________________________________________________________

• L’architecture bipolaire éducation/formation

Le système éducatif brésilien est structuré en trois degrés.D’une durée normale de huit ans, le premier degré accueille lesenfants de sept à quatorze ans. L’enseignement de second degréa été réformé en 1971 et offre désormais à tous les élèves, à côtéde l’enseignement général, une formation professionnelle. Lesétudes supérieures durent de quatre à six ans selon la discipline etle type d’établissement. La plupart des établissements sont publicsexcepté au niveau supérieur oé le secteur privé est majoritaire.

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Un dispositif extrascolaire, appelé enseignement suppléée estdestina aux personnes ayant quitté l’école primaire ou secondaireen cours de cycle, désireuses de compléter leur formation ou depoursuivre leurs études.

La formation professionnelle est dispensée par un grandnombre d’institutions. La principale d’entre elles, le ServiçoNational de Aprendizagem Industrial (SENAI), fut créé dès 1942pour satisfaire les besoins en main-d’oeuvre qualifiée liés à l’in-dustrialisation naissante. Le contrôle du SENAI par l’industrie scel-lait le transfert de la charge de la formation professionnelle del’Etat aux entreprises. Désormais la préparation de lamain-d’oeuvre industrielle, comme sa formation continue, incombeprincipalement aux employeurs du secteur. Une institution jumelle,le Serviço National de Aprendizagem Commercial (SENAC) a encharge les formations tertiaires.

Face au développement rapide de l’offre de formation privée,les pouvoirs publics décidérent, en 1976, de structurer le marchéde la formation professionnelle en créant une entité nationale decontrôle et de coordination (Systéme national de formation profes-sionnelle). Cet organisme a comptabilisé, pour l’exercice 1984,140.000 stages ayant concerné 4,4 millions de personnes.

Le chômage et la baisse du pouvoir d’achat nés de la réces-sion économique et de l’ajustement ont écarté un grand nombred’actifs de la formation professionnelle. De plus, cette conjoncturea également contribué à une insertion prématurée des mineurs surle marché du travail, généralement dans le secteur informel. Auméme moment, la raréfaction des ressources publiques a affectéle secteur de éducation, ainsi en 1983 et 1984, soit au plus fort dela crise, les dépenses publiques d’enseignement ont chuté trèssensiblement.

Ces contraintes de financement s’exercent aussi sur la forma-tion professionnelle qui par ailleurs, dans une dynamique socialede diversification des statuts productifs, ne peut s’adresser qu’àune fraction seulement des actifs (le SENAI n’a ainsi pas vocationà former les travailleurs du secteur informel). A prix constants lescontributions versées par les entreprises au SENAI en 1989 nereprésentaient que 63 % des prélèvements obtenus en 1980.Seule la légère reprise enregistrée au cours de la période1985-1987 a permis d’éviter une crise financière encore plusaiguë, ainsi les cotisations collectées en 1984 ne correspondaientqu’à 43 % des collectes de l’exercice 1980.

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• Le SENAI: émergence de la formule bipartite

Bien que créé par décret, le SENAI dépend de laConfédération nationale de l’Industrie et des Fédérations desIndustries des Etats du Brésil (Gomes, 1991). Il s’agit d’une insti-tution de droit privé. Sa structure de direction comprend un Conseilnational et des Conseils régionaux. Les ministères de l’Educationet du Travail participent aux instances de décision et de contrôle.L’organisation administrative emprunte le méme schéma et articu-le un Département national et 24 Départements régionaux. Cetteformule fortement décentralisée correspond aux réalitésadministratives et socio-économiques d’un grand pays fédéral.Dans ce cadre, l’autonomie dont jouissent les Départements régio-naux doit leur permettre d’adapter leur action et l’offre de formationaux particularités des industries et de la main-d’oeuvre de chacu-ne des régions. L’objectif est ici de parvenir à une adéquation àl’échelle territoriale, mais aussi sectorielle, entre les besoins enqualification et l’offre de formation professionnelle.

Pour y parvenir le SENAI dispose, en propre, de plus de 500unités opérationnelles, ou organes dispensateurs de formation,dont 266 unités mobiles. En outre, l’instauration participe aussi àun réseau comprenant plus de 200 centres de formation d’entre-prises. Cette stratégie vise à davantage intégrer les programmeset les moyens de formation au tissu productif.

Depuis sa création en 1942 le SENNE a formé plus de 10 mil-lions de stagiaires. Les publics visés sont très divers, tant en ce quiconcerne leur profil socio-démographique que leur niveau de for-mation initiale ou leur statut. A cette diversité de publics correspondune offre de formation variée qui comprend des dispositifs de for-mation professionnelle initiale, un système de formation en alter-nance (apprentissage) et des formules de formation en coursd’emploi.

L’innovation pédagogique fait partie intégrante des activités duSENAI. A cet égard des progrés notables ont été réalisés dans ledomaine de l’individualisation de la formation (SENAI-SP, 1990).

En amont de la formation, la réalisation d’études sur lesbesoins en qualification des entreprises constitue une des mis-sions importantes du SENAI. En aval, les études de suivi desanciens stagiaires fournissent des informations très utiles pour lepilotage en continue de l’appareil de formation.

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Les ressources du SENAI proviennent principalement d’uneretenue mensuelle de 1 % opérée sur les salaires versés par lesentreprises des secteurs de l’industrie, des transports terrestres,de la communication et de la poche. En plus de cette contributiondite générale, les entreprises employant plus de 500 personnessont soumises à un prélèvement additionnel de 0,2 %. La collecteest opérée par le ministère de la Sécurité sociale. Enfin, des sub-ventions publiques viennent compléter le budget. Ces dispositionsréglementaires ont permis de faire du SENAI un puissant organede formation, au service du secteur industriel.

L’affectation des fonds est régie, en fonction de leur origine,selon les règles suivantes (Tableau 11). Après déduction de 1 %des prélèvements pour couvrir les frais de collecte, l’administrationcentrale du SENAI conserve 15 % de la contribution nationale etl’intégralité des cotisations additionnelles. Le solde de la contribu-tion générale, soit 85 %, est transféré aux Départements régio-naux.

Tableau 11. Grille d’affectation des cotisations (SENAI)

Source: SENAI, A entidade SENAI, Série Prograrnador Curricular No. 2, Rio deJaneiro, 1991________________________________________________________________________

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Les 15 % de la contribution générale, retenus au niveau cen-tral sont mutualisés à l’échelle nationale. Ces fonds constituent uninstrument de régulation et de redistribution qui permet de privilé-gier les régions défavorisées ou déficitaires, en particulier le Nordet le Nord-Est, ou de promouvoir des politiques de formationjugées prioritaires. Les ressources dites additionnelles sont essen-tiellement consacrées au financement des plans de formation desentreprises cotisantes. Enfin, les subvenions sont utilisées enfaveur de programmes impulsés par les pouvoirs publics, tels laformation de formateurs ou la construction et l’équipement de nou-veaux centres de formation.

Depuis 1975 un dispositif complémentaire d’incitation fiscale(loi 6.297) permet aux entreprises de déduire de leur impôt, dansla limite d’un plafond, deux fois le montant des dépenses qu’ellesconsacrent à la formation. Cette mesure procéde d’une logique dif-férente de celle qui présidait à l’instauration d’un prélévement surles salaires. L’objectif poursuivi n’est plus de b‰tir un systéme deformation, certes contrôla par les entreprises mais qui leur estextérieur, mais d’internationaliser la formation. Dans ce cadre, lesplans de formation doivent être préalablement soumis au ministè-re du Travail pour accord. Le SENAI participe à l’examen de cesplans, il peut aussi aider à leur formulation et organiser les actionsde formation que les entreprises ne peuvent réaliser elles-mêmes.

Ce dispositif fiscal a constitué un levier de développement dela formation professionnelle au sein même des entreprises. Lescentres de formation intra-entreprise se sont multipliés et la forma-tion a davantage été perçue par l’industrie comme faisant partieintégrante des politiques de gestion de la main-d’oeuvre. Ainsi dés1976, 450.000 stagiaires ont bénéficié de ce dispositif. En 1984 lesstages mis en place entrant avantage de la loi 6.297 concernaientplus de 2 millions de travailleurs.

Toutefois, en dépit de ces résultats apparemment très positifs,un examen plus attentif de l’utilisation de cet avantage fiscal arévélé qu’il concernait seulement 1 % des entreprises imposables.En réalité ce sont essentiellement les grandes entreprises de larégion de Sao Paulo qui ont su tirer profit de ce dispositif pourconsolider leur politique de formation. En d’autres termes, l’incita-tion fiscale a surtout eu comme effet d’appuyer les entreprises quiformaient déjà, l’impact sur les autres restant marginal. En définiti-ve le résultat produit aura bien sûr accru l’effort global de forma-tion, mais en creusant encore l’écart entre régions et entre entre-prises.

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Ce biais en faveur des grandes entreprises semble être unecaractéristique du système brésilien, ainsi, dans le cadre de lacréation du réseau de centres de formation d’entreprises, le SENAIa signé, avec une cinquantaine de grandes firmes nationales, desaccords particuliers de financement. Au terme de ces engage-ments, les entreprises contractantes sont exonérées de la contri-bution générale de 1 % et peuvent conserver une partie du prélè-vement additionnel de 0,2 %. Les sommes ainsi préservées doi-vent être affectées au financement d’actions de formation s’inscri-vant dans des programmes d’intérêt général (développement duréseau ferroviaire fédéral, amélioration des transports urbains,modernisation du système de production et de distribution d’éner-gie...).

Géré par le SENAI, le système de formation en alternanceconstitue une autre modalité de partage de la charge du finance-ment de la formation professionnelle. Ainsi, les entreprises sontlégalement tenues d’accueillir un nombre d’apprentis représentantentre 5 % et 15 % des emplois qualifiés. Durant la premiére moitiéde la période d’apprentissage les apprends perçoivent l’équivalentde la moitié du salaire minimum. Leur rémunération s’élève ensui-te au deux tiers du minimum légal.

La nature composite du montage financier développé par leSENAI contribue au développement et à l’adaptation de la forma-tion. Alors que le prélèvement obligatoire, assorti de subventionspubliques, garantissant normalement une certaine stabilité finan-cière, le système d’incitation fiscal encourage les entreprises àrésoudre elles-mêmes, éventuellement avec l’appui du SENAI,leurs problèmes de qualification de la main-d’oeuvre. Par ailleurs,le développement d’accords de cofinancement avec les entre-prises, comme aussi la gestion de l’apprentissage, permettent auSENAI d’étre à l’écoute de l’évolution des structures profession-nelles et du contenu des emplois. Cette proximité entre les entre-prises et le système de formation n’est pas seulement source derevenu mais favorise également l’adéquation entre l’offre et lesbesoins.

Malgré ces réalisations, les mécanismes de financement de laformation ne sont pas parvenus à atténuer les disparités d’accésselon les régions, les tailles d’entreprises et les catégories de sala-riés. C’est certainement là une limite importante du dispositif quin’a pas su opérer la redistribution nécessaire. Pourtant les instru-ments d’une répartition plus équitable existent, c’est leur mise enoeuvre qui pose un problème. A cet égard on peut s’interroger surles raisons et les conséquences de l’exclusion des organisations

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représentant les salariés des instances de direction du SENAI. Laquestion est de savoir si, à terme, le modèle étatique-patronal misen place par le Brésil sera capable, sans impliquer davantage lessalariés, de satisfaire les besoins de formation et de reconversioninévitablement générés par le processus d’ajustement structures.

La façon dont le SENAI a survécu à la profonde crise financiè-re des années 80 constitue un exemple intéressant de gestion del’austérité. Au-delà de ses aspects mutants, la pénurie a égalementété l’occasion d’utiliser davantage certaines possibilités de gestionfinanciére et surtout de renouveler les pratiques de l’institution.

La dégradation des conditions économiques a conduit aucours de la décennie à la disparition de plus de 200.000 emploisindustriels dans la région de Sao Paulo. Ce vaste mouvement decontraction de l’emploi a brutalement tari la source de financementdu SENAI. Ainsi en 1982, les entreprises cotisantes ne comptaientplus que 2,8 millions de salariés, contre 3,1 millions en 1980. Ladétérioration du niveau des salaires a également joué en défaveurde la collecte.

Mais à ces facteurs conjoncturels se sont ajoutées desréformes réglementaires qui, en rétrécissant la base du prélève-ment, ont à leur tour véritablement sapé l’assise financière duSENAI.2 Cette révision à la baisse de l’appareillage légal surlequel reposait le financement de la formation professionnelle n’apas épargné le système d’incitation fiscale. Ainsi en 1990, 1’abat-tement fiscal fut suspendu pour une durée indéterminée, en appli-cation d’une instruction ministérielle prévoyant la suppression dessubventions publiques (Mesure Provisoire N° 161). Ces phéno-mènes montrent de quelle façon, les programmes de stabilisation,et l’orthodoxie budgétaire qui les inspire, peuvent remettre grave-ment en cause le financement de la formation professionnelle.

Le programme d’austérité mis en place par le SENAI pour sur-vivre a consisté principalement en une réduction drastique desdépenses, surtout les dépenses courantes. Le montant des fraisde fonctionnement n’avait toujours pas, à la fin de la décennie,retrouvé le niveau de 1980. Le personnel fut la premiére victime dela crise et, au cours de la période

2. Le prélèvement fiscal était jusqu’en 1981 plafonné à un montant équivalent à20 fois le salaire minimum, en 1981 le décret-loi 1.861 ramena ce plafond à 10 fois lavaleur d’un salaire dit de référence, ce salaire correspond actuellement à 46 % dusalaire minimum.

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1980-1985, deux vagues de licenciements ont frappé respective-ment 12 %, puis 14 % des salariés.

Le souci de préserver l’oubli de formation a conduit à épargnerdavantage les dépenses en capital. Ainsi depuis 1987, date cor-respondant à un certain Resserrement de la contrainte financière,la progression des investissements a repris si bien qu’en 1989 leurmontant représentait une augmentation de 80 % par rapport àl’exercice de 1980. A partir de 1985 les effectifs de stagiaires ontde nouveau augmenté (Tableau 12) et, sur la décennie, leur tauxde progression annuel moyen s’est situé à près de 4 %, taux net-tement supérieur à celui de l’augmentation de l’emploi dans lesentreprises cotisantes.

Tableau 12. SENAI: Evolution des effectifs (1980-1989)

Source: SENAI, A décadada de qualidade, 1980/89, Sao Paulo, 1989____________________________________________________________________

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En période de raréfaction des ressources normales du SENAI,c’est-à-dire des cotisations, l’équilibre financier n’a pu être mainte-nu que par le développement d’autres revenus (Tableau 13). Enl’occurrence, la différence, toujours largement positive, entre lesrecettes et les dépenses, a permis la capitalisation d’une épargneimportante dont le placement sur le marché a généré des res-sources relativement abondantes. En définitive, les revenus de cecapital ont constitua une sorte de recette d’équilibre sauvegardantla solvabilité financière du SENAI.

A cette gestion financière habile, certes facilitée dans uneconjoncture d’hyperinflation et de spéculation, s’est ajouté le déve-loppement de pratiques nouvelles de contractualisation qui enga-gent le SENAI et les entreprises signataires sur un programmecommun de développement de la formation. Outre le fait que cesaccords (Termos de Cooperaçao Técnica e Financeira) permettentde garantir des ressources nouvelles stables, elles imposent etsoutiennent une véritable politique de formation au sein des entre-poses concernées.

La reprise de la croissance des effectifs de stagiaires et lesefforts réalisés par le SENAI dans le domaine de l’ingénierie de laformation (développement des études sur les besoins en qualifica-tion, production de matériel didactique, innovations pédagogiques)semblent témoigner de la capacité d’adaptation de l’institution etdes nombreuses possibilités offertes par ce mécanisme de finan-cement de la formation. Diversification des activités et des res-sources se sont ainsi combinées pour permettre au SENAI d’évo-luer en fonction à la fois du resserrement de la contrainte financiè-re et de l’émergence de nouveaux besoins.

2.4 Constitution et mutation du modèle latino-américain

Le système de formation professionnelle développé par leBrésil dans les années 40 a progressivement essaimé dans lesautres pays d’Amérique latine (Ducci, l991). A parer de cette matri-ce originelle chacun des Etats de la région a créé un dispositif spé-cifique. Ainsi, la responsabilité respective de l’Etat et des entre-prises dans la gestion du système, le rôle des syndicats, le statutjuridique et, bien sûr, les modalités de financement varient d’uneinstitution à l’autre. Mais en dépit de ces variantes le principe fon-dateur est le même, il s’agit pour l’Etat de transférer auprés desentreprises tout ou partie de la charge de former la main-d’oeuvrequalifiée dont elles ont besoin.

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Les caractéristiques communes de la plupart de ces instituionspour la formation professionnelle pourraient être décrites de lamanière suivante:

i) créées à l’initiative de l’Etat elles impliquent les entreprisesdans la reproduction du travailleur salarié;

ii) par conséquent leur public se limite habituellement à desjeunes destinés à entrer sur le marché du travail structuré (for-mation professionnelle initiale), et à des actifs déjà occupésdans le secteur moderne (formation en cours d’emploi); etenfin

iii) leur mode de financement principal consiste à instaurer unimpôt sur les salaires versés par les entreprises.

L’analyse de l’activité des instituions chargées de la formationprofessionnelle révèle que l’ampleur du processus de segmenta-tion du marché du travail a conduit certaines d’entre elles à diver-sifier leur public. Ainsi dans quelques pays, tels le Costa RicaInstituto Nacional de Aprendizaje (INA), le Venezuela InstitutoNacional de Cooperacion Educativa ONCES la Colombie ServicioNacional de Aprendizaje (SENA), les pouvoirs publics ont financéla mise en place de programmes de formation destinés aux tra-vailleurs du secteur informel. Néanmoins cette tendance est loin des’être généralisée et certaines instituions, comme le SENAI auBrésil, revendiquent une mission exclusivement tournée vers lesecteur moderne.

Un inventaire des sources de financement les plus communé-ment utilisées par les organismes chargés de la formation profes-sionnelle montre que progressivement les ressources se sontdiversifiées. Ce mouvement permet une moindre dépendance àl’égard des fluctuations de l’emploi salarié. On a pu ainsi dénom-brer au moins dix différentes sources de financement (Ducci,1991):

i) les taxes sur les salaires;ii) les abattements fiscaux;iii) les subvenions publiques;iv) les bourses octroyées par l’Etat;v) les contribuions provenant du budget des collectivités locales;vi) les taxes sur la valeur ajoutée;vii) les accords de cofinancement,

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viii) les frais d’inscription et de scolarité; ix) les dotations en nature (équipements, matière d’oeuvre); et

enfin x) la vente de services, en particulier le conseil en formation.

Le dosage de chacune des ces ressources dans le montagefinancier est très variable selon les organismes. D’une faéon géné-rale, les taxes sur les salaires et les subventions publiques formenttraditionnellement le noyau dur du financement.

A la différence des financements classiques, l’obtention de laplupart des nouveaux types de ressources exige une démarchevolontariste, voire une véritable stratégie de marketing. Cela traduitune profonde évolution dans les modes de gestion, et les rapportsqui sont entretenus avec les entreprises. Celles-ci constituent demoins en moins un financement passif et deviennent de véritablespartenaires. Désormais le marché a davantage les moyens desanctionner, ou de récompenser, l’offre de formation.

Au-delà de la diversification des activités et des ressourcesc’est d’une inversion des rapports entre offre et demande qu’ils’agit. Jusqu’à présent l’appareil de formation n’était contrôlé etguidé par les entreprises que de façon assez lointaine, à traversles organes de gestion aux échelons central et régionaux. La puis-sance et la taille du systéme étaient telles que la lourdeur et l’iner-tie menaçaient d’enfermer la formation dans une programmationroutinière, peu à l’écoute de évolution des besoins des entreprises.L’austérité budgétaire et la recherche contrainte de nouveauxfinancements contribuent, paradoxalement, à rapprocher l’offre dela demande de formation. L’enjeu est de taille au moment où leprocessus d’ajustement structures fait émerger de nouveauxbesoins (introduction de nouvelles technologies, reconversiond’une partie de la main-d’oeuvre).

Cependant la recomposition du financement demeure, au plandes ressources marginales, et c’est surtout l’inflexion qu’elle aintroduite dans les pratiques de formation qui est porteuse dechangement. Au plus fort de la crise se sont partout les revenusprés du placement des excédents qui ont garant la solvabilitéfinanciére du systéme de formation. Bien que de moindre ampleur,la coopération internationale a également joué un rôle de transfertnon négligeable.

Depuis les débuts de l’industrialisation l’Etat a souvent choisi,en Amérique latine, de confier l’organisation et le financement dela formation professionnelle à une organisation collective desemployeurs, ou tout au moins de partager avec eux cette respon-sabilité. Aujourd’hui, l’exclusion durable d’un nombre croissant

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d’actifs pose la question de la légitimation du retrait de l’Etat. Lerecours au financement des entreprises s’avère en effet incapablede répondre aux besoins de formation des groupes défavorisés.Ainsi, le maintien de l’équilibre financier prime la recherche del’équité. Reste à savoir si le processus de démocratisation enmarche dans la région est compatible avec cette alternative, etsinon quel pourrait être un mode de financement alternatif

3. Une expérience africaine: le cas de la Côte d’Ivoire

3.1 Un modèle en panne

Longtemps considérée comme un modèle pour l’Afrique, laCôte d’ivoire rencontre depuis le début des années 80 des difficul-tés économiques et financières récurrentes. La gravité des désé-quilibres enregistrés a conduit à l’adoption de plans de stabilisationet d’ajustement en cascade. Les problémes structurels auxquelsest confronté le pays conjuguent des causes internes et exté-rieures.

Les effets de l’environnement international sur l’économies’exercent surtout à travers les fluctuations incertaines des mar-chés de produits agricoles, en l’occurrence le café, le cacao et lesbananes, qui conséquent la base des ressources extérieures etbudgétaires. De plus la pression de la contrainte extérieure se trou-ve exacerbée par l’endettement du secteur public.

Au plan interne, le déséquilibre des finances publiques, lemanque de compétitivité des industries de substitution aux impor-tations et l’aggravation des déséquilibres villes/campagne comp-tent parmi les signes de crise les plus marquants.

Dans ce contexte, les plans successifs d’ajustement structuresvisaient à relancer la croissance en libéralisant les échanges, enprivilégiant les secteurs d’exportation et en réduisant le secteurpublic. Parmi les mesures prises à cet effet figuraient l’assainisse-ment des finances publiques (contraction de la taille de l’Etat, limi-tations des dépenses de fonctionnement, notamment en person-nel) et des relances sectorielles (exportations industrielles, moder-nisation de l’agriculture et promotion des revenus du secteur).

Les résultats de cette politique sur l’équilibre des comptesnationaux et la croissance demeurent incertains. Durant deuxdécennies l’expansion de l’économie ivoirienne a été impulsée par

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les investissements publics, au moyen d’un transfert étique de larente primaire vers l’industrie. L’abandon forcé de ce mode decroissance a plongé le pays dans une crise économique et socia-le grave et durable. Le désengagement programmé d’un secteurpublic hypertrophié, accompagné de mesures de relance ne sonttoujours pas parvenus à produire l’effet d’appel escompté sur l’in-vestissement privé.

3.2 Ajustement et recomposition du systéme d’emploi

Les répercussions de l’ajustement sur l’emploi ont été consi-dérables (Nguyen; Schneider, 1991). Dans le secteur moderne letaux de décroissance de l’emploi, pour la période 1981 - 1985, aété d’environ -9 % par an. Ce fléchissement doit être comparé à unrythme de croissance annuelle légérement supérieur à 9 % de1975 à 1980. Cette tendance traduit les pertes d’emplois enregis-trées dans le secteur public à la suite des restructurations opérées,et la disparition de nombreuses entreprises du secteur privé vic-times de la crise (soit au total plusieurs dizaines de milliers delicenciements).

Corrélativement à la contraction du volume d’emploi, chômageet sous-emploi se sont développés, surtout en milieu urbain. AAbidjan, le taux de chômage était estimé, en 1985, à 20 %. Parailleurs, l’augmentation des emplois dans le secteur informel estestimée à environ 10 % par an depuis 1981 (Nguyen; Schneider,op. cit.).

La dégradation de la situation économique et du marché dutravail s’est soldée par le développement du phénoméne de pau-vreté et par une véritable crise sociale.

3.3 L’éducation: une priorité sans cesse réaffirmée

l’éducation a toujours constitua en Côte d’ivoire un secteurprioritaire. Cet engagement en faveur de l’enseignement se traduitpar la part importante du budget national qui lui est affectée. Ainsien 1989, 43 % des dépenses de l’Etat étaient consacrées à l’édu-cation, soit l’effort relatif le plus important parmi les pays d’Afriquefrancophone. Il est significatif que cette priorité soit jusqu’à présentmaintenue, malgré les difficultés économiques et financiéres aux-quelles se trouve confronté le pays, et en dépit des rigueurs del’ajustement. Ainsi en 1989, les seules dépenses ordinaires d’édu-

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cation représentaient 6,5 % du Produit national brut (PNB).L’effort accordé au secteur de l’éducation a permis un fort

développement de la scolarisation entre 1960 et 1980, et ce pourtous les degrés d’enseignement. En revanche, la décennie 80 amarqué un renversement de tendance caractérisé par un fléchis-sement des principaux indicateurs de scolarisation. (Tableau 14).

Tableau 14. Indicateurs de scolarisation en Côte d’ivoire

Source : UNESCO, Rapport mondial sur l’éducation, l991.____________________________________________________________________

La vigueur du taux d’accroissement démographique (4,2 % paran en moyenne pour la période 1980-90, soit, avec le Kenya, letaux le plus élevé d’Afrique) compte parmi les facteurs qui remet-tent perpétuellement en cause le développement de l’éducation.La difficulté d’ajuster l’offre et la qualité à la croissance rapide desbesoins s’exprime notamment à travers un taux d’analphabétismetoujours élevé (46,2 % en 1990).

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3.4 L’enseignement technique et la formation professionnelle

Les moyens importants accordés depuis l’indépendance audéveloppement des ressources humaines ont été également favo-rables à l’enseignement technique et à la formation professionnel-le. Ainsi, dès 1970 fut créé un ministère de l’Enseignement tech-nique et de la Formation professionnelle. Le souci de former lamain-d’oeuvre qualifiée nécessaire à l’industrialisation et à l’ex-pansion de l’économie a motivé le développement progressif d’unsystème relativement diversifié, comprenant un grand nombre defilières. En 1986 l’enseignement technique accueillait environ25.000 élèves, soit près de 9 % des effectifs du second degré. Unepartie de ces élèves sont inscrits dans des établissements relevantde ministéres sectoriels. Mais au secteur public s’ajoutent de nom-breux établissements privés qui préparent surtout aux métiers dutertiaire, y compris dans le cadre de la formation continue.

Le réseau public comprend pour les emplois d’ouvrier qualifiédes Centres de Formation professionnelle, des Collégesd’Enseignement technique, des Centres de Formation artisanaleainsi qu’un parc d’unités mobiles de formation en milieu rural. Laformation des techniciens est assurée par les lycées profession-nels. Enfin il existe des établissements spécialisés pour les étudestechniques supérieures (troisième degré).

Le besoin de pilotage et de coordination de l’ensemble de cedispositif, ainsi que le développement de la formation continue, ontdonné naissance à plusieurs structures d’appui:

L’Office national de la formation professionnelle (ONFP), crééen 1966 notamment pour réaliser des études sur la relation emploi/formation.• L’Institut national de perfectionnement permanent (INPP),

fondé en 1971 pour fédérer les organes de formation continue,et remplacé en 1987 par l’Institut national de formation tech-nique et professionnelle (INFTP).

• L’Institut pédagogique national pour l’enseignement profes-sionnel et technique (IPNEPT), constitué en 1975 pour la for-mation de formateurs et la recherche pédagogique.

• Le Fonds national de régulation (FNR), institué en 1977 pourpromouvoir la formation professionnelle continue (Achio,1993).

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A la fin des années 80, la persistance de la crise économique,l’aggravation de la situation de l’emploi et la raréfaction des res-sources publiques ont conduit à reconsidérer l’organisation d’unsystème de formation conclu en période de forte croissance et depénurie de main-d’oeuvre qualifiée.

C’est ainsi que le “ cadre de développement ” que le pays s’estfixé pour les années 90, assigne des objectifs ambitieux à la for-mation professionnelle, tant pour contribuer à la relance de lacroissance que pour combattre le développement de la pauvreté.Dans ce cadre, et conformément aux dispositions du programmed’ajustement en vigueur, le programme de valorisation des res-sources humaines, élaboré en liaison avec la Banque Mondiale,prévoit une réforme de l’Enseignement technique et de la forma-tion professionnelle. Celle-ci, entamée en 1991, repose essentiel-lement sur deux principes fondateurs: (i) la redéfinition du rôle del’Etat; et (ii) la décentralisation.

Dans cet esprit la puissance publique devra réduire son impli-cation directe dans l’appareil de formation au profit de fonctionsd’accompagnement, d’incitation, de coordination et de contrôle.Cette recomposition du système de formation devrait donc accor-der une place plus large aux dispensateurs de formation privés etdévelopper un climat et des accords de partenariat avec les sec-teurs économiques et les collectivités locales.

Outre une redéfinition des missions et des modes d’interven-tion, le programme de redéploiement de l’enseignement profes-sionnel et technique introduit une vaste réforme du paysage insti-tutionnel de la formation. Les principales mesures sont les sui-vantes:

• Réintégration du système d’enseignement professionnel ettechnique dans les compétences du ministère de l’Educationnationale.

• Dissolution de l’ONFP, de l’INFTP et du FNR.• Création de l’Agence nationale de la formation professionnelle

(AGEFOP), chargée d’assurer des fonctions d’ingénierie de laformation (initiale et continue).

• Constitution d’une structure soeur dans le domaine de l’emploi,l’Agence d’étude et de promotion de l’emploi (AGEPE), qui,notamment, animera un Observatoire de l’emploi et des quali-fications, outil d’analyse du marché du travail et de pilotagedes politiques de formation.

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• Mise en place du Fonds de développement de la formationprofessionnelle (FDFP), organisme de gestion de l’ensembledes ressources extrabudgétaires destinées à la formation pro-fessionnelle initiale et continue.

Le caractère encore récent de cette refonte institutionnelle nepermet pas d’en apprécier les résultats. Ces réformes traduisentun souci de rompre avec les lourdeurs bureaucratiques d’uneadministration fortement centralisée en introduisant davantage deflexibilité et d’ouverture dans l’offre de formation et en dotant lesinstitutions de plus d’autonomie. La diversité et surtout la complé-mentarité des organes mis en place, ou rénovés, témoignent d’unevolonté de cohérence. Ainsi, les moyens de formation se trou-vent-ils désormais enserrés dans un système dense intégrant l’ob-servation du marché du travail (AGEPE), l’analyse des besoins enqualifications (AGEFOP) et le financement (FDFP). Néanmoins, lacomplexité d’un dispositif mettant en oeuvre trois structures auto-nomes mais placées sous la tutelle, parfois conjointe, des minis-tères de l’Education, de l’Economie et de l’Emploi soulève un pro-blème de coordination non négligeable. L’articulation de cetensemble implique le bon fonctionnement des procédures deconcertation interministérielle et d’arbitrage, ainsi que la formula-tion préalable d’une politique générale de formation et d’objectifsclairement identifiés.

Au-delà de ces nouveaux développements, le système de for-mation de la Côte d’ivoire s’est toujours caractérisé par une asso-ciation adroite entre enseignement technique et formation profes-sionnelle. Cette constante n’est pas sans rapport avec la nouvelleorganisation du dispositif de financement.

3.5 L’organisation du financement au fil des réformes

L’instauration, en Côte d’ivoire, d’une taxe d’apprentissage,taxe d’Etat due par les entreprises, remonte à 1959. Son taux étaitalors de 0,30 % de la masse salariale des entreprises industrielles.En 1966 cette contribution fut portée à 0,5 % et l’Office national dela formation professionnelle, créé cette méme année, en devintl’organisme gestionnaire. Les ressources ainsi collectées permet-taient de subventionner des établissements publics de formationinitiale, et également de couvrir les frais de fonctionnement del’ONFP.

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L’adoption, en 1977, d’une législation sur la formation profes-sionnelle continue compléta le dispositif de financement. Inspiréepar le ministère de l’Enseignement technique et de la Formationprofessionnelle et bénéficiant de l’accord des partenaires sociaux,la nouvelle loi oblige les entreprises à verser, pour la formationcontinue, l’équivalent d’une fraction de leur masse salariale. Leproduit de cet impôt devait être versé sur un compte spécial, admi-nistré par l’Office national de formation professionnelle salon lesavis d’un organe tripartite, le Conseil de Gestion.

Le Fonds national d’intervention pour la formation continue,rebaptisé plus tard Fonds national de régulation (FNR), était placésous la double tutelle technique et financiére du ministére de l’en-seignement technique et de la Formation professionnelle, d’unepart, du ministère des Finances, d’autre part (Montiez, 1990).

Ce dispositif resta en vigueur jusqu’en 1987, date à laquelleles fonds de la taxe d’apprentissage, destinés à la formation initia-le, furent dissociés des ressources prélevées au titre de l’impôtpour la formation continue. Dès lors le FNR constitua une entité àpart entière, distincte de l’ONFP, dotée d’autonomie et caractériséepar sa structure tripartite (Figure 1).

Le Fonds était alimenté chaque mois par les prélèvementseffectués par le Trésor au titre de l’impôt et taxe sur les salaires,soit 1,5 % de la masse salariale, part ramenée à 1,2 % aprèsl’abattement autorisé de 20 %. Les ressources collectées étaientversées à un compte ouvert au nom du FNR à la Caisse Autonomed’Amortissement. Passage obligé, le canal du Trésor devait contri-buer à la transparence du circuit de financement.

Les cotisations versées par les entreprises constituaient deuxtypes de ressources. Une moitié du prélèvement conférait àchaque entreprise cotisante un “ droit de tirage ” destiné au finan-cement de son plan de formation “ part entreprise ”. Le solde, soit50 %, constituait une réserve affectée à la réalisation de projetscollectifs ou à l’octroi de moyens supplémentaires à certainesentreprises “ part FNR ”. Le respect de ce principe impliquait unegestion distincte des deux fractions des prélèvements.

L’originalité du dispositif ivoirien reposait sur deux dispositions:le principe d’épargne et la procédure de mutualisation. En vertu duprincipe d’épargne les entreprises devaient avoir à leur crédit aumoins douze mois de prélèvement avant de pouvoir prétendre auremboursement de sommes engagées au titre de la formation.Cette mesure devait garantir la solvabilité du Fonds.

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Figure 1. Organigramme structurel du Fonds national de régulation (FNR) - Tripartisme au niveau de décision et de concertation- Une entité technique

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La mutualisation d’une partie des prélévements permettaitnotamment la réalisation de projets collectifs. Ce mécanisme favo-risait l’accés à la formation de salariés défavorisés, comme les tra-vailleurs d’entreprises peu actives en ce domaine, souvent lesentreprises de plus petite taille. Mais il permettait aussi de trans-former un système basé sur la contrainte en un dispositif incitatif.La possibilité, pour les entreprises les plus dynamiques, de béné-ficier, grâce à la part FNR, de financements supérieurs à leurcontribution encourageait en effet la promotion de la formation.

Mais la seule mutualisation ne suffit pas au développement decette mission d’incitation. Elle suppose également de fournir auxentreprises des services d’appui. Ainsi, outre la gestion des finan-cements, l’information et le conseil figuraient en bonne place sur laliste des activités du FNR, et contribuaient à la définition et à lamise en oeuvre tant des plans de formation que des projets col-lectifs. En sus, les procédures d’agrément de projets, préalableindispensable à l’intervention du Fonds, et d’habilitation d’orga-nismes de formation, comme les travaux d’évaluation contribuèrentà la structuration du marché de la formation et à la professionnali-sation des acteurs impliqués.

De 1987 à 1991 le FNR a financé la réalisation de 82 projetscollectifs, sectoriels ou régionaux, et de 1.420 plans de formationconcernant 87.777 salariés de 705 entreprises (FNR, 1992). Lenombre de stagiaires doit être rapporté au volume estimé de l’em-ploi dans le secteur moderne, soit 200.000, pour mesurer l’impactdes actions menées.

Les Tableaux 15 à 18 permettent de mieux apprécier l’activitédu Fonds au cours de cette période.

L’analyse de ces informations montre qu’en dépit de la mutua-lisation, plus de 90 % des stagiaires ont bénéficié d’un stage dansle cadre de plans de formation, donc sur l’initiative directe de l’em-ployeur. Bien que de moindre ampleur les projets collectifs ontreprésenté un volume financier considérable (22,4 % du budgettotal). A cet égard, la dimension régionale des interventions consti-tuait un élément novateur. Ce type d’action comme celles desti-nées au secteur artisanal témoigne d’une ambition dépassant lasimple satisfaction des besoins en formation des entreprises coti-santes. En dépit de cette vision élargie de la mission du FNR dansle développement des ressources humaines du pays, ce sont lesentreprises de plus de 500 salariés qui ont le plus eu recours auxservices du Fonds.

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Tableau 15. Destination des fonds (1987-1991)(en milliards de francs CFA)

Source: FNR, 1992.____________________________________________________________________

Tableau 16. Nombre de stagiaires formés par type d’action (1987-1 9 9 1 )

Source: FNR, 1992.____________________________________________________________________

Tableau 17. Financements attribués au titre des plans de formation par taille d’entreprise (1987-1991) (en milliards de francs CFA )

Source: FNR, 1992.____________________________________________________________________

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Tableau 18. Types d’actions financées au titre des projets collectifs,en nombre de stagiaires formés (1987-1991)

Source: FNR, 1992.____________________________________________________________________

Malgré des résultats indéniables, et une structure stable ayantsu demeurer de taille réduite (29 personnes), le FNR a été trésrapidement confronté à deux types de difficultés. Tout d’abord, à lafin des années 80, 1’involution du secteur moderne a progressive-ment réduit l’assiette de l’impôt, asséchant ainsi les recettes. Aumême moment les problèmes d’un Etat en prise avec les rigueursde l’ajustement ont rendu les ressources prélevées par le Trésorde moins en moins accessibles. L’aggravation de ce phénoméne aconduit le FNR à une crise de trésorerie et finalement à la dissolu-tion.

La disparition du FNR ne doit pas occulter son rôle dans la pro-motion de la qualification professionnelle des salariés et la structu-ration du marché de la formation. Par ailleurs cette expérience pré-coce a constitué, de par son caractére novateur, un exempled’avant-garde pour le continent africain. Les orientations prises,vingt ans plus tard, par bon nombre de pays de la région en témoi-gnent.

Les obstacles rencontrés par le dispositif ivoirien sont d’ordrestructures et légal. La déroute économique ne peut que remettreen cause la capacité des agents économiques à financer la forma-tion. Quant au cadre juridique, le principe d’unicité de caisse, selonlequel un type de recette ne peut étre affecté à une dépense parti -culiére, ne tolére l’existence d’une taxe destinée au financementde la formation que comme une mesure dérogatoire. En situationde crise financière il est bien difficile de réconcilier l’orthodoxie

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budgétaire avec la politique de valorisation des ressourceshumaines. La solvabilité de l’Etat prime alors sur le financement dela formation.

En 1992 le gouvernement ivoirien a décidé, après liquidationdu FNR, de constituer une nouvelle structure, le Fonds de déve-loppement de la formation professionnelle (FDFP), établissementpublic national. A la différence du FNR ce Fonds est chargé degérer à la fois le produit de l’impôt pour la formation continue etcelui de la taxe d’apprentissage. Hormis cette modification, quis’apparente à la situation qui a prévalu entre 1977 et 1987, le nou-veau dispositif marque plutôt un recul. Ainsi, les employeurs peu-vent désormais conserver 50 % de la cotisation obligatoire. Cettedisposition, en réduisant les possibilités de mutualisation, pénaliseles entreprises et les publics défavorisés. Enfin, l’emprise plus fortede l’administration sur le nouveau Fonds laissera moins de champà l’expression des représentants des salariés.

Fort des enseignements tirés de l’expérience précédente, legouvernement a décidé d’instaurer une obligation, pour le Trésorpublic, de reversement du produit de l’impôt au compte ouvert aunom du FDFP à la Caisse Autonome d’Amortissement. Il est clairque le respect de cette règle conditionnera en grande partie la via-bilité du nouveau dispositif, mais à plus long terme son futur resteassujetti à une reprise de la croissance économique.

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Chapitre 3Politiques et mécanismes de financement:

les options possibles

1. Eléments d’analyse comparée

L’analyse comparative des systémes de financement de la for-mation professionnelle n’échappe pas aux écueils habituels descomparaisons internationales. Il peut ainsi appara”tre un peu artifi-ciel de rapprocher des systémes nationaux dont la nature et lagenése sont le produit d’une combinaison originale de facteurs his-toriques, économiques, sociaux et culturels. La source des finan-cements, leur forme, les modalités de leur gestion et de leur affec-tation, ainsi que la répartition des attributions entre chacun desacteurs dans la régulation de ce système complexe constituentavant tout l’expression d’une dynamique nationale. Néanmoins, lagénéralisation des contraintes et des enjeux, comme la similaritédes instruments, favorisent, à l’échelle internationale, l’émergencede convergences.

Mais tout d’abord, les pays étudiés (République de Corée,S i n g a p o u r, Maurice, Brésil, Côte d’ivoire) présentent descontrastes marqués dans les systèmes de formation profession-nelle et les principes de financement. La République de Corée, etdans une moindre mesure la Côte d’ivoire, ont opté pour un systé-me de formation fortement scolarisé. A Singapour et à Mauricel’appareil de formation professionnelle demeure contrôlé par l’Etatmais se trouve confié à une structure mixte autonome. Le modèlebrésilien illustre une troisième configuration dans laquelle la res-ponsabilité est transférée aux employeurs organisés en fédéra-tions.

Une autre ligne de partage distingue les systèmes articulant defaçon distincte formation initiale et formation contenue et ceux quitendent à intégrer deux formes d’apprentissage. La République de

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Corée dissocie structurellement la formation première de la forma-tion en cours d’emploi. La Côte d’ivoire distingue également asseznettement l’enseignement technique de la formation professionnel-le continue, qui est largement assurée par des centres de forma-tion privés. Dans tous les autres cas étudiés, et indépendammentdu rôle de l’Etat, les formules retenues tendent à intégrer au seind’un méme dispositif, distinct de l’institution scolaire, formation ini-tiale et formation continue.

Le mode d’organisation de la formation n’est pas indifférentaux logiques de financement. Il serait par exemple peu cohérent definancer principalement par des recettes fiscales générales unappareil de formation contrôlé majoritairement, sinon exclusive-ment, par les employeurs. A l’inverse on ne peut attendre desentreprises qu’elles consentent à financer dans de larges propor-tions, y compris sous la modalité de l’apprentissage, un appareil deformation relevant intégralement de l’Etat, dont les règles de fonc-tionnement et la taille leur échapperaient totalement. La répartitiondes compétences appelle le partage des coûts et réciproquement.Ainsi, l’analyse des systèmes de financement renvoit en amont auxconstructions institutionnelles sur lesquelles reposent les politiquesde formation professionnelle.

Mais outre cette relative dépendance entre l’organisation dusystème de formation et son financement, de nombreux facteurscontextuels interviennent tels la stratégie d’industrialisation, les dif-férences de dotation en ressources naturelles, et l’organisation dela société civile. A cet égard les exemples retenus offrent uncontraste marqué entre trois catégories:

1. Des pays en cours d’industrialisation rapide, connaissant despénuries de main-d’oeuvre, dotés d’une économie ouverte surl’extérieur et guidés par l’Etat (République de Corée,Singapour, Maurice).

2. Les pays latino-américains, en phase d’ajustement structureset parfois de désindustrialisation, confrontés à des surplus demain-d’oeuvre chroniques et dont l’économie, longtemps intro-vertie conformément à une stratégie planifiée par les pouvoirspublics, tente aujourd’hui de s’ouvrir aux libres impulsions dumarché et à l’exténuer.

3. La Côte d’ivoire, prototype du pays africain en coursd’industrialisation, dont la dynamique d’accumulation, une foispassée la phase de stabilisation, pourrait connaître une repri-se et constituer un pôle de développement sous-régional.

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Ces évolutions divergentes laissent entrevoir différents typesd’organisation des rapports entre système de formation et systèmeproductif. Dans le modèle asiatique, l’intégration de lamain-d’oeuvre dans le rapport salarial est généralisée et s’effectuedans un cadre fortement institutionnalisé, conformément à desobjectifs de qualification déterminés par les pouvoirs publics.L’Amérique latine traverse un douloureux processus de reconver-sion de l’appareil productif, sécrété autant que possible par lesmécanismes concurrentiels du marché, dans lequel l’appareil deformation, plus ou moins contrôlé par les employeurs, exclut unepopulation croissante. En Côte d’ivoire la production de main-d’oeuvre qualifiée demeure encore assez déconnectée des fluc-tuations du marché du travail, les retombées de l’ajustement surl’enseignement technique prenant surtout la forme de restrictionsbudgétaires. En revanche, la formation continue des actifs tend àêtre davantage placée sous la responsabilité directe desemployeurs, à l’échelle de l’entreprise et non plus collectivementCe recentrage risque de limiter l’accès à la formation aux tra-vailleurs des entreprises les plus grosses et les mieux structurées.

Au-delà de ces schémas, les modalités du financement de laformation professionnelle semblent surdéterminées par cinq élé-ments principaux:

1. La structure de l’appareil de production (dont dépend la capa-cité contributive des entreprises).

2. La doctrine économique en vigueur (option libérale ou planifi-catrice).

3. La maturité des acteurs par rapport aux enjeux de la formation(variable qui explique leur comportement plus ou moins favo-rable à la formation).

4. Les rapports qu’entretiennent entre eux l’Etat, les entrepriseset les usagers (dont dépend notamment la répartition des rôlesdans la formation).

5. Enfin, les objectifs poursuivis.

Le contenu des objectifs mérite une attention particulière. Leurteneur est en effet de nature trés variable. Selon les cas il s’agitd’un objectif d’état (collecter des fonds) ou de processus (induiredes comportements nouveaux). L’effet sur les comportements neconcerne pas que les stratégies de formation mais aussi d’autresaspects des politiques de main-d’oeuvre des entreprises comme lechoix de leur combinaison productive.

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La façon dont les objectifs sont atteints permet de distinguerentre les systèmes fondés sur la contrainte de ceux qui s’inscriventdans une logique d’incitation.

Le croisement entre les modalités et les objectifs du finance-ment de la formation par les entreprises permet de caractériser lesdivers systèmes nationaux (Tableau 19).

Tableau 19. Caractérisation des dispositifs de financement de la formation professionnelle selon la nature des instruments utilisés et les objectifs poursuivis

Les systèmes d’incitation reposent généralement sur le princi-pe de l’abattement fiscal (Brésil, Maurice) ou sur celui du rem-boursement des frais occasionnés par la formation (Maurice, Côted’ivoire).

La contrainte, sous la forme d’une obligation légale, prendgénéralement la forme d’une cotisation obligatoire, plus rarementcelle de la réalisation d’un volume minimum de formation(République de Corée).

Les contributions de l’Etat sont le plus souvent destinées aufinancement de l’appareil de formation professionnelle initialepublic (République de Corée, Singapour, Maurice, Côte d’ivoire).Mais elles peuvent aussi, dans un souci d’équité, promouvoir despolitiques prioritairement ciblées sur des publics sensibles, tels lesexclus du marché du travail ou les salariés “ marginaux ”(Amérique latine).

L’expérience des pays étudiés confirme les qualités du systè-me de cotisation indexé sur les salaires. Son rendement est élevéet stable, au moins en courte période, et l’effet négatif sur l’emploin’a pu être vérifié. En revanche, les dispositifs d’abattement fiscal

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et de remboursement, en dépit de leur portée à long terme, com-portent un coût de gestion élevé car ils impliquent des procéduresde contrôle et de vérification lourdes.

La formalisation de l’apprentissage dans le cadre du principede l’alternance semble partout constituer une formule prometteu-se. Outre son pouvoir qualifiant l’apprentissage favorise l’insertiondes jeunes dans l’entreprise et, du point de vue financier, présen-te une bonne flexibilité des coéts en fonction des fluctuations dumarché.

Enfin, il semble que seul l’Etat puisse être le garant de l’objec-tif d’équité. A ce titre, au moins, il ne peut disparaître complètementdu financement de la formation professionnelle.

La prise en compte du rôle des acteurs dans la gestion dufinancement et le contrôle de l’affectation des fonds complètent latypologie des systèmes de financement.

Le modèle concurrentiel pur correspondrait à une situationdans laquelle la formation serait financée librement par les entre-prises, et les individus, en fonction des besoins de l’appareil pro-ductif et de la demande sociale. La modalité dominante de trans-fert des qualifications serait alors la formation sur le tas, dont l’offredépendrait du marché. C’est en réalité un schéma théorique.

Dans le modèle professionnel, ou corporatiste (Brésil), le sys-tème de formation est contrôlé et financé par des fédérations d’en-treprises. La participation de l’Etat est alors faible.

Le modèle paritaire a la particularité de rassembler l’ensembledes partenaires de la formation professionnelle. L’organisation,l’orientation et le financement dépendent, selon une partitionvariable, des trois pôles que sont l’Etat, les employeurs et les sala-riés (Singapour, Côte d’Ivoire). La formule tripartite et paritaireconstitue ainsi le dispositif le plus complexe. Mais cette complexi-té correspond à la diversité des logiques et des champs dans les-quels s’inscrit la formation professionnelle:

• politiques macro-économiques de régulation du marché du tra-vail et de croissance;

• objectifs des entreprises d’augmentation de la productivité du travail;• souci des individus de promotion professionnelle et sociale.

Il convient cependant de se méfier du tripartisme de façadedans lequel la participation des travailleurs est essentiellement denature formelle. Dans d’autres pays, le caractère trop conflictueldes rapports sociaux et l’intensité des luttes syndicales n’offrent

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pas les conditions consensuelles minimales indispensables à unmode de gestion concerté.

Cette classification tripolaire (modèle concurrentiel, profes-sionnel et paritaire) pourrait fournir la base d’une typologie des sys-tèmes nationaux de financement.

Mais au-delà de ces différences, qui reflètent notamment desparticularités sociales et culturelles, les évolutions en cours àl’échelle internationale révèlent des pistes convergentes, notam-ment:

• l’instauration de Fonds pour le financement de la formation;• la diversification des services offerts par ces organismes, leur

développement tend ainsi à suivre une logique de filière inté-grant progressivement l’amont (études et conseil) et l’aval(habilitation des centres, validation des acquis) de la formation;

• la diversification des financements; et enfin• l’affirmation d’un souci de qualité de la formation.

2. La gestion des Fonds pour le financement de laformation professionnelle

2.1 Les principes généraux

De par la nature de leur activité, les Fonds chargés du finance-ment de la formation professionnelle constituent des entités relati-vement originales. Ainsi, bon nombre d’entre eux, sans être pro-ducteurs de biens ou prestataires de services, gèrent des volumesfinanciers considérables. La dissociation, parfois observée, entre lafonction de dispensateur de formation et celle de financer tend àtransformer ces organismes en véritables banquiers de la forma-tion. Le caractère relativement inédit d’un tel statut, ainsi que l’im-portance des sommes engagées, exigent l’instauration de procé-dures de gestion et de contrôle qui permettent la transparence desopérations et garantissent leur conformité aux objectifs poursuivis.Le prélévement de la taxe sur les salaires par l’intermédiaire duTrésor, au même titre que les autres impôts, ou par le ministèrechargé de la Sécurité sociale, avec les cotisations sociales, simpli-fie la collecte et participe normalement à la transparence des cir-cuits de financement.

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Les règles de gestion des Fonds sont très variables d’un paysà l’autre, selon le cadre juridique en vigueur et les objectifs pour-suivis. Il est néanmoins possible de distinguer trois principauxmodes de gestion:

la gestion sous forme de “ juste retour ”; la gestion sous formede mutualisation; et la gestion sous forme de droits de tirage.

i) la gestion sous forme de “ juste retour ”

Ce système est le plus simple, il prévoit en effet qu’aprés s’étreacquittée de son obligation légale, chaque entreprise peut bénéfi-cier, au cours d’une période déterminée, de remboursements équi-valents à sa contribution. Dans ce cadre le Fonds constitue unsimple guichet, il n’a pas de rôle dynamique sur le développementde la formation. Le principe de “ juste retour ” détermine souverai-nement son effort de formation, dans la limite de sa contribution.Le Fonds tend alors à s’apparenter à un organisme financier.

ii) la gestion sous forme de mutualisation

La mutualisation constitue la traduction, au plan financier, duprincipe de solidarité. Dans ce système les cotisations verséeséchappent à la propriété des entreprises, elles sont gérées globa-lement par le Fonds. Il n’y a donc plus, dans ce cas, de propor-tionnalité entre le montant des cotisations et les ressources aux-quelles les entreprises peuvent prétendre pour financer leursactions de formation. Certaines percevront davantage que le mon-tant de leurs contributions, d’autres moins.

Le principe de mutualisation transforme complétement la natu-re et les missions du Fonds (IPROFOP, 1989). Il ne s’agit plus d’unbanquier, au sens étroit du terme, mais davantage d’une mutuelle.Dès lors les instances de gestion du Fonds ont les moyens d’im-pulser de véritables politiques de développement de la formationen fonction de publics, de secteurs, de catégories d’entreprises oude régions jugées prioritaires. Le cas du Brésil (SENAI) fournit unebonne illustration de la mise en place de ce principe de mutualisa-tion au profit des régions déficitaires ou défavorisées (Nord etNord-Est). A la logique d’entreprise qu’incarnait le principe de “juste retour ” se substitue alors une logique de branche ou d’inté-

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rêt collectif. Le pouvoir que confère la mutualisation aux Fonds leurpermet également d’exercer une influence sur la structure de l’offrede formation et sa qualité.

iii) la gestion sous forme de droits de tirage

Il s’agit là d’un dispositif mixte. Chaque entreprise acquiert undroit de tirage égal à une fraction de sa cotisation, le solde étantmutualisé. De plus, en général, au-delà d’une certaine période lesfonds non utilisés sont versés au compte commun. Tout en per-mettant à chaque entreprise de conserver une certaine autonomie,ce système a le mérite de doter le Fonds de réserves qui facilitentsa gestion courante.

Ces trois principes de gestion révèlent la diversité des fonc-tions que peut exercer le Fonds:

• fonction de type bancaire dans le cadre d’une gestion sousforme de“ juste retour ”;

• rôle de mutuelle dans le cadre de la mutualisation des cotisations;• mais également rôle d’assurance lorsqu’en situation de crise

(mutation technologique, reconversion...) le Fonds puise dansses ressources pour accompagner l’ajustement ou la restruc-turation du tissu productif.

Le choix du mode de gestion n’est pas indifférent quant aupouvoir de décision des divers acteurs sur l’affectation des res-sources. La formule dite du “ juste retour ” maintient le centre dedécision au sein de l’entreprise, et atomise ainsi le pouvoir et l’ac-tion. Au contraire, le mécanisme de la mutualisation prive lesemployeurs, pris individuellement, d’une partie de leurs attributionsau profit des structures de gestion du Fonds contrôlées par lesfédérations d’entreprises, l’Etat et aussi, dans le cadre d’entités tri-partites, les représentants des salariés.

Les pratiques de mutualisation constituent certainement lecoeur des politiques de financement de la formation professionnel-le fondées sur un systéme à base de cotisations. Contrairement auprincipe de juste retour qui produit un effet de segmentation dansl’accés à la formation, renforéant les inégalités initiales, la mutuali-sation peut contribuer à générer un effet de nivellement. La redis-tribution des ressources bénéficie alors, selon l’objectif poursuivi,de la mise en oeuvre de stratégies de formation différenciées, des-

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tinées à des publics spécifiques. Les mécanismes de financementparticipent ainsi à l’équité du systéme de formation professionnel-le.

L’expérience montre néanmoins que, pour être efficace, lamutualisation des fonds doit être assortie de mesures activesvisant à stimuler la demande de formation chez les publics cibles.Très souvent, en effet, l’adoption d’un comportement dynamique àl’égard de la formation suppose une capacité d’anticipation et unema”trise de l’environnement qui sont généralement le privilége descatégories d’entreprises, de salariés ou de régions les plus favori-sées. En l’absence de cet accompagnement la mutualisationengendre au contraire un phénomène, contre nature, de transfertà rebours au bénéfice des groupes dominants (les salariés les plusqualifiés, les entreprises les plus performantes, les régions les plusdéveloppées).

Mais la mutualisation n’est pas seulement un instrumentd’équité, elle participe également à l’efficacité des dépenses deformation. Ainsi, lorsque la mutualisation offre la possibilité d’accu-muler des réserves, le systéme de financement a potentiellementdes effets de stabilisation cyclique (SENAI) qui autorisent, dansune certaine mesure, des réactions financiéres anticycliques (c’estle rôle d’assurance évoqué plus haut). Certes ces effets sont limi-tés lorsqu’il s’agit d’une récession profonde et durable (cas duBrésil). Le système à base de cotisation génère alors des déficitseux-mêmes inducteurs d’une segmentation de l’offre de formationexcluant les publics marginaux.

2.2 La gestion financière

La solvabilité financière des organismes chargés du finance-ment de la formation professionnelle exige de réglementer lesconditions d’exigibilité. Différentes formules sont possibles pourgarantir un niveau de réserve suffisant. L’une d’entre elles consis-te à introduire un principe d’épargne (Côte d’ivoire) selon lequel lesentreprises cotisantes ne peuvent faire valoir leur droit au finance-ment qu’aprés s’étre acquittées d’un nombre minimum de men-sualités. Mais au-delà de cette disposition, il s’avère très difficile,dans le cadre d’une gestion sous forme de mutualisation, de pré-voir avec précision le montant des réserves indispensable pourfaire face aux dépenses.

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A l’inverse le montant et l’utilisation des excédents doiventégalement faire l’objet d’une réglementation afin d’éviter que lesFonds ne se transforment en véritables institutions financières.L’accumulation durable d’excédents équivaut à une thésaurisationcontraire à l’esprit dans lequel les Fonds ont été créés (cas deSingapour). Dans tous les cas, les disponibilités sont placées surle marché. Les excédents de trésorerie, auxquels s’ajoutent lesréserves, produisent ainsi des ressources parfois significatives,voire indispensables à la solvabilité financière du Fonds (cas duSENAI). L’affectation des produits financiers au financement desactivités, et non à l’accumulation du capital doit cependant demeu-rer une règle de base.

Le respect de transparence justifie aussi les dispositions parti-culières. Ainsi, certains organismes sont tenus de gérer les res-sources de façon distincte, selon leur origine, cloisonnant notam-ment l’utilisation des cotisations de celle des subventionspubliques. Ces pratiques ne doivent cependant pas occulter lanature fondamentalement hybride des fonds collectés sont certesprivés car transférés par des entreprises à une entité autonome.Mais, ayant pour origine une obligation légale, ils s’apparentent for-tement i un financement public.

2.3 La participation à la gestion du financement

Par essence la formation professionnelle constitue virtuelle-ment un terrain privilégié de dialogue social. Elle se situe en effetau carrefour entre les politiques publiques de développement, lesenjeux de modernisation des entreprises et les aspirations dessalariés à la promotion sociale et professionnelle (Verdier, 1987). Acet égard le degré de participation des différents acteurs au systè-me de financement de la formation est révélateur du mode de rela-tions professionnelles en vigueur.

L’Etat et les entreprises sont presque partout parties prenantesdans l’organisation et le contrôle des mécanismes de financement.En revanche la participation des représentants des salariés, béné-ficiaires finals de toute action de formation, n’est pas généralisée.Les cas de Maurice et du Brésil ont ainsi illustré des systèmesexcluant les salariés des décisions relatives au financement de laformation..En dépit de ces exemples, il semble raisonnable de risquer l’hypo-thése selon laquelle l’industrialisation de l’économie conjuguée à ladémocratisation de la société constituent des facteurs favorables

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aux pratiques de dialogue social. Mais les progrès de ce phéno-mène demeurent assez variables selon les pays et les régions. EnRépublique de Corée le nombre de travailleurs syndiqués apresque doublé entre 1987 et 1990 pour frôler la barre des deuxmillions. Paradoxalement, à Singapour, l’augmentation du taux desyndicalisation va de pair avec un affaiblissement des syndicatsqui jouissent d’une moindre confiance. En Amérique latine la syn-dicalisation concerne environ 30 % de la main-d’oeuvre du secteurmoderne, avec des variations fortes selon les pays. Conformémentà une longue tradition latino-américaine l’Etat est très impliquédans les négociations collectives.. L’emprise de l’Etat sur les rela-tions professionnelles caractérise aussi la situation qui prévaut enAfrique. Le modèle de la centrale syndicale unique fortementcontrôlée par l’Etat y est encore influent. Néanmoins, les change-ments politiques récents ont impulsé une dynamique syndicale quia souvent contribué à la démocratisation de la société.

La portée et l’intensité de ces évolutions dépendent fortementde la nature des syndicalismes nationaux. Ainsi, il faut distinguerentre des formes de participation qui s’apparentent à une coges-tion (modèles asiatiques) et une concertation sociale davantageanimée par des divisions idéologiques (cas latino-américain). Al’extrême, le syndicat conçu comme “ organisation de masse ”,option retenue dans le passé par de nombreux régimes africains,interdit une véritable concertation.

L’émergence des structures tripartites n’en demeure pasmoins une tendance lourde de l’évolution récente des relationsindustrielles. Le champ du financement de la formation profession-nelle n’échappe pas à cet élan et une part importante des orga-nismes qui en sont chargés sont de nature tripartite.. A cet égardle cas brésilien constitue un peu une exception et, dans de nom-breux autres pays latino-américains, l’institution chargée de la for-mation est une structure tripartite. Dès lors ces organismes devien-nent des instruments institutionnels de participation.. Selon lesrégles de fonctionnement du conseil de gestion les partenairessociaux sont de simples médiateurs ou des décideurs à part entiè-re.

La gestion tripartite du Fonds implique que les représentantsqualifiés de l’Etat, des employeurs et des salariés soient habilitésà exercer un contrôle sur le financement. La participation des sala-riés influence la politique du Fonds mais contribue aussi à la trans-parence des modes d’utilisation des sommes affectées à la forma-tion..

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La gestion du Fonds et la nature de son action sont détermi-nées au terme de la confrontation de trois logiques distinctes.. Lalogique des pouvoirs publics peut parfois combiner l’appui à dessecteurs jugés prioritaires (logique de compétitivité de l’économie)et une préoccupation sociale en faveur de groupes marginalisés(logique de redistribution). Souvent la logique des employeursconsidére l’entreprise comme seul lieu de décision en matiére deformation.. La logique des salariés tend à promouvoir un systèmeinspiré des dispositifs de sécurité sociale selon lequel assurance-formation constitue une nouvelle garantie..

A cette configuration schématique correspondent des modesde gestion distincts. Désireux d’opérer des corrections tout en res-pectant l’initiative des entreposes, l’Etat préconisera un certainniveau de mutualisation, assorti, dans un souci d’équité, de sub-ventions publiques. Le courant libéral, dominant auprès des entre-prises, est relativement allergique au principe de la mutualisationet préférera s’en remettre à une gestion non interventionniste fon-dée sur le “ juste retour ”. Pour les salades, au contraire, la mutua-lisation peut constituer un outil puissant de réduction des inégalitésd’accés à la formation..

Le niveau auquel sont organisées les relations industriellespeut également influer sur l’utilisation des financements. Selon ledegré de décentralisation du dialogue social le Fonds aura plus oumoins tendance à promouvoir des actions interprofessionnelles,des politiques de branches ou des programmes territorialisés.

En définitive, et bien qu’il comporte des risques non négli-geables de blocage du système, le principe du partenariat, qu’in-carnent les formules tripartites paritaires, semble étre le mieux àméme d’assurer le rôle de fédérateur indispensable à la mise encohérence de la diversité des logiques des acteurs.

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Chapitre 4Eléments de conclusion: les rapportsentre le financement de la formation

et son efficacité

La construction de cette étude repose résolument sur le soucid’inscrire la logique du financement au sein des rapports com-plexes qu’entretiennent formation et emploi. Idéalement le systè-me de financement doit contribuer à l’efficacité de la formation..Mais bien que son utilisation soit en quelque sorte banalisée dansle discours sur l’économie des ressources humaines, cette notiond’efficacité mérite un examen attentif,

Il serait déraisonnable et vain de tenter d’appréhender lanotion d’efficacité de la formation à travers les seules approchesde type coût/bénéfice. La performance d’un système n’est pasréductible à la valeur d’un taux de rendement. De plus, une visioncomplète exige de s’intéresser non seulement au résultat maiségalement au processus de formation et à son organisation. Lespropriétés d’un produit sont en effet trés liées à la qualité de l’ap-pareil de production qui lui a donné naissance. L’analyse écono-mique nous enseigne que la qualité d’un produit traduit son adé-quation à un besoin. Ainsi, un produit peut être considéré de bonnequalité lorsqu’il satisfait le besoin des usagers. Par analogie, l’effi-cacité de la formation revêt deux dimensions:

• une dimension essentiellement quantitative: le système estefficace lorsqu’il contribue à l’insertion professionnelle des per-sonnes qualifiées (fonction régulatrice du marché du travail);

• une dimension qualitative: le système est efficace lorsqu’il per-met aux bénéficiaires d’acquérir les capacités professionnellesqui correspondent à un profil de poste. Cette dimension revêtelle-même deux éléments, l’un de nature pédagogique (la qua-lité du processus d’apprentissage), l’autre de nature

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socio-ergonomique (la pertinence des curricula eu égard aucontenu des emplois).

Dès lors, la mesure de l’efficacité de l’enseignement techniqueet de la formation professionnelle, suppose, outre le recours clas-sique aux analysés de type coût/bénéfice, le recours à une batte-rie d’indicateurs incluant:

• l’évaluation des connaissances et des compétences acquises(évaluation de l’action de formation);

• l’analyse des taux de chômage des diplômés (enquêtes de suivi);• l’analyse des écarts entre ce qui est enseigné et le contenu

des emplois (analyse de postes).

Compte tenu de la complexité de la notion d’efficacité ainsidéfinie, il est probable que seul un dispositif impliquant une plura-lité d’acteurs est capable de maintenir la performance du système.En ce sens, les modalités de financement, analysées comme uneforme de participation, entretiennent un rapport, indirect mais signi-ficatif, avec l’efficacité de la formation.. L’étude sur les pays sélec-tionnés a ainsi confirmé que les acteurs qui participent au finance-ment et à sa gestion ont effectivement vocation à s’impliquer dansla définition et l’évaluation des politiques de formation..

La création, dans un nombre croissant de pays, d’un Fondspour gérer les sommes collectées, essentiellement auprès desentreprises, constitue une réelle innovation.. En effet, au-delà deleurs missions strictement financières, ces structures, remplissentune double fonction régulatrice à l’égard du marché de la formationet des relations professionnelles.

De par leur surface financière et leur proximité organique avecles entreprises, les Fonds sont en mesure de peser significative-ment sur l’offre de formation.. Mais pour assurer pleinement ce rôled’interface entre l’offre et la demande de qualification, ils doiventdévelopper des structures opérationnelles d’études, de conseil etd’animation. Leur mode d’intervention sur le marché du travail peutalors revêtir des formes très variées. Le modèle latino-américainest fondé sur un contrôle direct de l’offre de formation par l’orga-nisme financeur qui occupe ainsi une place dominante. Une autreoption consiste à intervenir de faéon indirecte par l’octroi des finan-cements, l’habilitation et la validation. Le Fonds se contente alors

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de structurer un marché de la formation caractérisé par uneoffre plus ou moins atomisée (Maurice, Côte d’ivoire).

Les critères de choix entre ces deux stratégies sont difficiles àcirconscrire. Confier à l’organisme chargé du financement la res-ponsabilité d’opérateur direct (cas latino-américain) risque dedéclencher un processus de sclérose au terme duquel l’offre deformation, assurée de son financement, tend à se reproduire àl’identique, indépendamment des besoins du marché. Au contraire,affranchir le Fonds de la gestion de l’offre (Maurice, Côte d’ivoire)peut contribuer à lui faire remplir une fonction régulatrice, le jeudes incitations/sanctions financières garantissant une meilleureflexibilité. Mais cette régulation libérale introduit un élément d’in-certitude qui peut pénaliser la constitution d’un appareil de forma-tion performant. En la matiére, la stabilité est, en effet, nécessaireà la capitalisation des savoirs et à la professionnalisation des for-mateurs.

Le juste milieu entre flexibilité et stabilité réside peut-être enune combinaison harmonieuse associant formation en milieu sco-laire et éducation permanente. Là encore la réponse n’est pasimmédiate. A cet égard l’exemple ivoirien témoigne, à Avers sesflottements, du caractére complexe de l’intégration entre ensei-gnement technique et formation professionnelle. En l’occurrence,la prépondérance accordée traditionnellement à la formation initia-le en milieu scolarisé n’a pas permis le développement de forma-tions qualifiantes courtes, répondant à des besoins ponctuels, ouencore de promouvoir les formations en alternance. Après un replivers des dispositifs distincts, la récente réforme cherche à réintro-duire les éléments d’une synergie entre enseignement techniqueet formation professionnelle.

Au plan du financement cette démarche renvoit à la questionde la gestion des impôts destinés à la formation, taxe d’apprentis-sage et impôt pour la formation continue. A l’heure actuelle dans laplupart des pays africains ayant opté pour la taxe d’apprentissage,les recettes ainsi collectées alimentent indifféremment les caissesde l’Etat. Il est possible que le versement du produit de cette taxeau Fonds pour la formation continue permettrait de récupérer uneressource additionnelle et d’accro”tre la rentabilité de l’investisse-ment consenti, par ailleurs, pour développer des structures de pro-motion de la formation, notamment les observatoires. Cette formu-le suppose évidemment la transparence des circuits financiersempruntés par les deux recettes.

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Une question subsidiaire concerne le rôle des Fonds face auxinsuffisances du système scolaire. Le Brésil et la Côte d’ivoire, quitous deux souffrent d’un déficit de qualité de l’éducation de base, yont apporté une réponse différente. Dans le premier cas unconsensus semble s’étre dégagé pour assigner à l’appareil de for-mation une fonction supplémentaire de rattrapage. Au contraire,dans le second cas, l’élargissement des missions se heurte à defortes résistances, probablement en raison de la pénurie de res-sources mais aussi à cause de la conception même du Fonds. Larécente réforme atténuera peut-être cette réticence.

Sans préjuger de l’état des rapports sociaux dans les diverspays, la constitution des Fonds sur une base tripartite offre sinonune garantie, au moins un gage de volonté de concertation entreles acteurs de la formation. L’aménagement d’un tel espace de dia-logue et de réflexion doit contribuer à renouveler les modalités dedéfinition et d’évaluation des politiques de formation.L’institutionnalisation d’une collaboration entre l’Etat et les parte-naires sociaux, la décentralisation de l’offre et la diversification desinstruments de planification se conjuguent ainsi pour impulser denouvelles approches de la relation formation/emploi.

Au plan purement financier, le principe de mutualisation consti-tue un instrument privilégié pour promouvoir des politiques de for-mation, permettre un mécanisme de stabilisation cyclique et pré-server l’équité. C’est également l’outil indispensable à une inter-vention vers des publics non traditionnels (petits entrepreneurs,actifs du secteur informel, chômeurs...). Mais ce type de mécanis-me s’avère, au-delà d’un certain seuil, incapable de répondre à cesbesoins. Sans pour autant exclure les entreprises, le financementd’actions relevant d’une logique de solidarité nationale requiert laparticipation de l’Etat. Or, en situation d’ajustement, ce recoursconduit souvent à une impasse. Comment alors financer l’accèsdes publics défavorisés, voire marginalisés, à la formationprofessionnelle ? Par ailleurs on peut s’interroger sur la capacitéde l’appareil de formation classique, c’est-à-dire orienté vers lesecteur moderne, à traiter des publics appartenant au secteurinformel. Les savoir-faire requis sont-ils identiques ? Quels sont lesoutils transférables ?

L’esprit du système de financement voudrait que utilisation del’obligation légale comme contrainte laisse progressivement laplace aux incitations fiscales. Mais celles-ci ne peuvent produirepleinement leurs effets que dans un environnement où la majoritédes acteurs favorise spontanément le développement de la forma-

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Page 103: Financement et Régulation de la formation - · PDF filetion large de la formation professionnelle est omniprésente et ins-pire, de faéon plus ou moins explicite et avec une force

tion.. Elle devient alors l’une des composantes des stratégies anti-cipatrices de gestion des ressources humaines, et la logique demoyens (collecter des fonds) qui inspirait le régime de financements’estompe au profit d’une logique d’objectifs (induire un processusde changement). D’ores et déjà le système de financement fixé parles pouvoirs à travers les dispositifs d’incitation fiscale, mais aussidans le cadre de l’apprentissage, confére aux entreprises le statutde pôle de formation, au même titre que l’appareil d’enseignementou les structures non formelles. A terme, il serait concevable qu’unsystème de financement fondé sur l’incitation renverse les rôles ettransfert la source de l’impulsion de l’Etat vers les entreposes.

Dans les appareils productifs les plus performants l’émergen-ce de nouveaux modes d’organisation travail s’accompagne d’uneintégration croissante de la formation à la production.. Cet aban-don progressif des schémas inspirés du taylorisme entretient ainsiune requalification continue du personnel. A terme, la diffusion dela notion d’organisation qualifiante devrait aboutir à la dilutiond’une part importante du financement de la formation par les entre-poses dans les charges d’exploitation courantes. Cette tendance àl’occultation des flux participe au renouvellement de l’analyse descoéts et du financement de la formation professionnelle.

Néanmoins ce schéma est encore loin de faire figure de modè-le dominant et, dans bien des pays, pour longtemps encore, l’in-suffisant développement du systéme productif impliquera le main-tien, et l’expansion d’un appareil de formation externe à l’entrepri-se mobilisant des ressources d’origines diverses. Cette réalité, etla nécessité de concevoir la formation comme un investissement àlong terme, justifient le rôle de régulation et de planification assurépar l’Etat au travers de modalités variées, associant sous desformes et à des degrés divers, les entreposes et les autres acteursdu développement national.

A cet égard, le souci de guider l’action avec davantage derigueur et de rationalité justifierait de conduire des recherchesapprofondies sur les zones d’ombre qui subsistent encore.L’efficacité comparée des divers montages institutionnels asso-ciant ou au contraire dissociant les fonctions de formation et definancement, les vertus réelles de la mutualisation, l’effet de la fis-calisation sur l’emploi selon diverses configurations socio-écono-miques, enfin la relation financement/équité ouvrent des pistes derecherche encore largement en friche.

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Publications et documents de FRIPE

Plus de 750 ouvrages sur la planification de l’éducation ont étépubliés par l’Institut international de planification de l’éducation. Ilsfigurent dans un catalogue détaillé qui comprend rapports derecherches, études de cas, documents de séminaires, matérielsdidactiques, cahiers de FRIPE et ouvrages de référence traitantdes sujets suivants:

L’économie de l’éducation, coûts et financement.

Main-d’oeuvre et emploi.

Etudes démographiques.

La carte scolaire, planification sous-nationale.

Administration et gestion.

Elaboration et évaluation des programmes scolaires.

Technologies éducatives.

Enseignement primaire, secondaire et supérieur.

Formation professionnelle et enseignement technique.

Enseignement non formel et extrascolaire: enseignement desadultes et enseignement rural.

Pour obtenir le catalogue, s’adresser à l’Unité des publications de l’IIPE.

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L’Institut international de planification de l’éducationL’Institut international de planification de l’éducation (IIPE) est uncentre international, créé par l’UNESCO en 1963, pour la formation etla recherche dans le domaine de la planification de l’éducation. Lefinancement de l’Institut est assuré par l’UNESCO et les contributionsvolontaires des Etats membres. Au cours des derniéres années,l’Institut a reéu des contributions volontaires des Etats membres sui-vants: Belgique, Canada, Danemark, Finlande, Inde, Irlande, Islande,Norvège, Suède, Suisse et Venezuela.

L’Institut a pour but de contribuer au développement de l’éducation àtravers le monde par I accroissement aussi bien des connaissancesque du nombre d’experts compétents en matière de planification del’éducation. Pour atteindre ce but, l’Institut apporte sa collaborationaux organisations dans les Etats membres qui s’intéressent à cetaspect de la formation et de la recherche. Le Conseil d’administrationde IIPE qui donne son accord au programme et au budget de l’Institut,se compose de huât membres élus et de quatre membres désignéspar l’Organisation des Nations Unies et par certains de ses institutionset instituts spécialisés.

Président:Victor L. Urquidi (Mexique), Professeur-Chercheur Emérite, El

Colegio de Mexico, Mexico.

Membres désignés:Arturo Nuñez del Prado, Directeur, Institut latino-américain et des

Caraïbes de planification économique et sociale, Santiago.Cristian Ossa, Directeur, Division de l’Analyse générale et des poli-

tiques, Département des Affaires économiques et sociales interna-tionales, Nations Unies.

Visvanathan Rajagopalan, Vice-Président, Conseiller auprès duPrésident, Banque mondiale.

Allan F. Salt, Directeur, Département de la formation, Bureau inter-national du travail.

Membres élus:Isao Amagi Capon), Conseiller auprès du Ministre de l’éducation, des

sciences et de la culture, Tokyo.Mohamed Dowidar (Egypte), Professeur et Président du

Département d’économie, Faculté de droit Université d’Alexandrie,Alexandrie.

Sabirs Kinyanjui (Kenya), Directeur des programmes, Division desSciences sociales, Centre de recherche pour le développementinternational, Nairobi.

Lamas Kozma (Hongrie), Directeur général, Institut hongrois pour larecherche en éducation, Budapest

Yolanda M. Rojas (Costa Rica), Vi c e-Recteur d’Académie,Université de Costa Rica, San José.

Michel dernières (France), Professeur de Sciences économiques,Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne Paris.

Lennart Wohlgemuth (Suède), Directeur, Institut scandinave desétudes africaines, Uppsala.

Pour obtenir des renseignements sur l’institut s’adresser à:Secrétariat du Directeur, Institut international de planification de l’édu-cation.7-9, rue Eugène Delacroix, 75116 Paris, France.

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