4
1 Les financements publics des secteurs sociaux en RDC Combien est disponible pour la santé et l’éducation ? 2 790 FC dépensés per capita pour la santé, et pour l’éducation 27 514 FC par élève du primaire et secondaire en 2013. Comment ces ressources sont- elles distribuées ? 6,1 % du budget exécuté l’était pour la santé et 14,8 % pour l’éducation en 2013. A quoi ce montant est consacré ? ± 80 % des budgets de l’éducation et de la santé sont consacrés aux salaires (2013). Dans le budget national, savez-vous… Pourquoi est-ce si important de connaitre le budget national ? Les budgets et les financements publics sont l’affaire de tous les citoyens, y compris des enfants. Ils devraient refléter les priorités et les politiques du pays. Le budget est l’instrument à travers lequel le gouvernement répartit les ressources, en fonction de ses politiques publiques. Les résultats budgétaires – les conséquences des entrées et des sorties budgétaires – ont un impact sur tous ! Les défis dans les secteurs de la santé et de l’éducation persistent en RDC Ces dernières années, les taux d’accès à l’éducation et aux soins de santé ont progressé en RDC. Ceci se reflète par l’accroissement du taux de scolarisation et par la réduction des taux de mortalité infantile et de prévalence de certaines maladies endémiques. Cependant, les performances des secteurs de la santé et de l’éducation ne sont pas encore satisfaisantes, et d’importants défis restent à relever. Il reste un déficit infrastructurel et l’offre de services est aussi bien limitée qu’inégalement répartie sur le territoire national. Le milieu rural est le moins nanti. Les niveaux bas des salaires affectent aussi la qualité des services offerts. Pour mieux relever ces défis et répondre aux besoins des enfants congolais en termes d’éducation et de santé, il faudrait susciter le débat sur le financement public des secteurs sociaux dans le pays : espace budgétaire, allocation des ressources et efficacité attendue des dépenses éducatives et sanitaires. Indicateurs santé 2007 2010 2014 Mortalité infanto-juvénile (‰) 148 158 104 Mortalité maternelle (‰) 540 - 560 Malnutrition enfant <5ans (%) 46 43 42.5 Enfants de 12-23 mois vaccinés (%) 31 42 45.3 Indice de Développement Humain (IDH) 0.323 0.333 0.338 Espérance de vie (ans) 48 48.7 50 Espérance de vie en Afrique (ans) 54.4 54.9 56 Le budget de l’État indique à combien s’élèvent les rentrées d’argent (recettes et dons), d’où elles proviennent et comment elles seront reparties et dépensées. Qu’est-ce que le budget de l’État ? Indicateurs éducation 2007 2010 2014 Taux de scolarisa- tion primaire, % 61 74,8 - Taux de scolarisa- tion secondaire, % 28,9 31,8 - Source : EDS 2007, MICS 2010, EDS 2014, Ministère du Plan

financements publics des secteurs sociaux en

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Page 1: financements publics des secteurs sociaux en

1

Les

financements

publics des

secteurs

sociaux en

RDC

Combien est disponible pour la

santé et l’éducation ?

2 790 FC dépensés per capita

pour la santé, et pour l’éducation

27 514 FC par élève du primaire

et secondaire en 2013.

Comment ces ressources sont-

elles distribuées ?

6,1 % du budget exécuté l’était

pour la santé et 14,8 % pour

l’éducation en 2013.

A quoi ce montant est

consacré ?

± 80 % des budgets de

l’éducation et de la santé sont

consacrés aux salaires (2013).

Dans le budget national,

savez-vous…

Pourquoi est-ce si important de connaitre le budget

national ?

Les budgets et les financements publics sont l’affaire de tous les

citoyens, y compris des enfants. Ils devraient refléter les priorités et les

politiques du pays. Le budget est l’instrument à travers lequel le

gouvernement répartit les ressources, en fonction de ses politiques

publiques. Les résultats budgétaires – les conséquences des entrées et

des sorties budgétaires – ont un impact sur tous !

Les défis dans les secteurs de la santé et de l’éducation

persistent en RDC

Ces dernières années, les taux d’accès à l’éducation et aux soins de

santé ont progressé en RDC. Ceci se reflète par l’accroissement du

taux de scolarisation et par la réduction des taux de mortalité infantile et

de prévalence de certaines maladies endémiques. Cependant, les

performances des secteurs de la santé et de l’éducation ne sont pas

encore satisfaisantes, et d’importants défis restent à relever. Il reste un

déficit infrastructurel et l’offre de services est aussi bien limitée

qu’inégalement répartie sur le territoire national.

Le milieu rural est le moins nanti. Les niveaux bas des salaires affectent

aussi la qualité des services offerts.

Pour mieux relever ces défis et répondre aux besoins des enfants

congolais en termes d’éducation et de santé, il faudrait susciter le débat

sur le financement public des secteurs sociaux dans le pays : espace

budgétaire, allocation des ressources et efficacité attendue des

dépenses éducatives et sanitaires.

Indicateurs santé 2007 2010 2014

Mortalité infanto-juvénile (‰) 148 158 104

Mortalité maternelle (‰) 540 - 560

Malnutrition enfant <5ans (%) 46 43 42.5

Enfants de 12-23 mois vaccinés (%) 31 42 45.3

Indice de Développement Humain (IDH) 0.323 0.333 0.338

Espérance de vie (ans) 48 48.7 50

Espérance de vie en Afrique (ans) 54.4 54.9 56

Le budget de l’État indique à

combien s’élèvent les rentrées

d’argent (recettes et dons), d’où

elles proviennent et comment

elles seront reparties et

dépensées.

Qu’est-ce que le budget

de l’État ?

Indicateurs éducation

2007 2010 2014

Taux de scolarisa-tion primaire, %

61 74,8 -

Taux de scolarisa-tion secondaire, %

28,9 31,8 -

Source : EDS 2007, MICS 2010, EDS 2014, Ministère du Plan

Page 2: financements publics des secteurs sociaux en

2

Les

financements

publics des

secteurs

sociaux en

RDC

Quelle est la vision du Gouvernement pour la santé et

l’éducation?

La stratégie du sous-secteur de l’enseignement primaire, secondaire et

professionnel est définie dans le Plan Intérimaire de l’Education (PIE)

2012-2014, qui a pour objectifs : accroître l’accès, l’équité et la

rétention ; améliorer la qualité et la pertinence ; et renforcer la

gouvernance.

D’après le Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) 2011-

2015, les priorités dans le secteur de la santé sont : le développement

des zones de santé ; les stratégies d’appui au développement des

zones de santé ; le renforcement du leadership et de la gouvernance

dans le secteur ; et le renforcement de la collaboration intersectorielle.

Part de l’éducation et de la santé dans le budget national, 2011 – 2014

Exécuté Alloué % budget total

2011 2012 2013 2014

Education 12.3 12.8 14.8 14.4

Santé 4.3 4.5 6.1 10.8

Total 16.6 17.3 20.9 25.2

Ministère du Budget, exécution (2011-2013) et allocation (2014) par fonction, dont res-sources des partenaires, dans le budget

Le bon financement des secteurs

de la santé et de l’éducation des

enfants dépend de 3 éléments:

1. Le niveau de recettes :

quel est le montant disponible ?

2. L’allocation des ressources :

à quoi sont-elles consacrées ?

3. L’exécution des dépenses :

sont-elles bien utilisées ?

La prise de bonnes décisions sur

la collecte, l’allocation et la

distribution des ressources ainsi

que l’exécution des dépenses est

primordiale pour obtenir des bons

résultats budgétaires.

L’importance des résultats

budgétaires

1. Espace budgétaire : comment accroitre les

ressources ?

Le premier facteur est le niveau de revenus disponibles. Le budget

national devrait être planifié et mis en œuvre en assurant que les

dépenses soient abordables. Pour une meilleure prise en charge des

dépenses publiques en général et des dépenses sociales en particulier,

une mobilisation accrue de ressources est très importante. C’est ainsi

que des efforts sont conjugués par le Gouvernement pour élargir

l’espace budgétaire, grâce à l’amélioration du rendement des régies

financières ; et à la lutte contre la fraude, l’évasion fiscale et les

détournements des deniers publics.

De 2009 à 2013, les recettes publiques sont passées de 16,8 % à 21 %

du produit intérieur brut (PIB). Cependant, les industries extractives

contribuent faiblement aux recettes fiscales du pays, alors qu’elles sont

le principal levier de la croissance de l’économie depuis 2002.

Pour garantir le droit à l’éducation primaire et aux soins de santé de

base pour tous les enfants, le Gouvernement devrait consacrer plus de

moyens à ces deux secteurs. Le budget national de 2013 a déboursé et

exécuté, pour les deux secteurs, un crédit représentant 20,9 %.

Toutefois, les montants alloués ne suffisent pas et les ménages

continuent à financer significativement la scolarisation et la santé. À titre

indicatif, la part des ménages dans le financement de l'Education est

estimée à 76 %, d’après le RESEN (2012).

Au niveau provincial, les recettes publiques ont aussi augmenté. Mais

leur collecte est inférieure au potentiel réalisable, en raison de

problèmes organiques et du sous-équipement des directions

provinciales des recettes.

L’appui extérieur au financement des secteurs sociaux en RDC est

considérable. Il a augmenté dans le budget de l’éducation, passant de

8 % en 2010/2011 à ± 20 % en 2013. S’agissant du budget de la santé,

il a reçu un appui extérieur de plus de 50 % en 2012 et de 33 % en

2013. Toutefois, un des défis par rapport au financement externe reste

la traçabilité de ces fonds, étant donné qu’ils ne passent pas tous par la

chaine de la dépense.

La Constitution du pays établit

une distinction entre les budgets

du pouvoir central et des pro-

vinces, le processus de décentra-

lisation requérant un transfert de

compétences du pouvoir central

aux provinces pour l’éducation et

la santé. Leurs calendriers bud-

gétaires étant interdépendants, la

Constitution reconnait aux pro-

vinces le droit de retenir [à la

source] 40 % des recettes collec-

tées sur leurs territoires par les

régies financières nationales

(DGI, DGDA et DGRAD). Dans la

pratique, cette retenue n’est pas

opérée et les données sur les re-

cettes collectées ne sont pas

bien connues des Provinces.

L’interaction entre pouvoir

central et provinces

Page 3: financements publics des secteurs sociaux en

3

Dépenses par tête dans l’éducation et la santé : 2013

(en CDF) Dépenses de santé par tête

Dépenses par élève primaire et secondaire

Kasaï-Occidental

943 4 340

Katanga 678 11 974

Kasaï-Oriental

4 014 12 659

Sud-Kivu 745 14 448

Nord-Kivu 815 14 672

Province Orientale

848 14 875

Maniema 1 277 18 785

Equateur 946 19 010

Bandundu 1 012 19 938

Bas-Congo

1 470 23 767

Kinshasa 4 210 52 699

Source : Ministère de la Santé et Ministère de l’EPSP, dépenses services centraux exclues

Structure des dépenses

éducatives et sanitaires

2. Allocation budgétaire : comment répondre aux réelles

attentes des enfants en matière d’éducation et santé ?

Le deuxième facteur à considérer dans l’analyse budgétaire est

l’allocation des ressources. Sont-elles compatibles aux priorités ?

Malgré l’accroissement de la part du budget national consacré aux

secteurs de l’éducation et de la santé, certaines faiblesses persistent en

matière d’allocation des fonds.

Premièrement, les ressources sont majoritairement consommées par la

rubrique « rémunérations », qui a représenté plus de 90 % des

dépenses engagées en 2012 et 2013. La part réservée aux dépenses

d’investissement est faible, alors qu’il y a un important déficit

infrastructurel à résorber.

Les dépenses d’investissement ont connu des faibles taux d’exécution

[±30 % en moyenne de 2005 à 2012]. Toutefois, en 2013, elles ont

augmenté dans les deux secteurs, en raison du programme

gouvernemental de construction et de réhabilitation des écoles et du

rééquipement de centres de santé et hôpitaux.

Il est aussi intéressant de savoir où ces ressources sont allouées, et si

cela est fait sur base d’un ensemble de critères. Malgré le processus de

décentralisation, la majorité des ressources intérieures affectées aux

deux secteurs sont sous le contrôle du Gouvernement central. Il reste

de fortes disparités entre les allocations d’une province à une autre. Le

volume de financement ne semble pas être corrélé aux besoins,

mesurés en termes de population à servir ou élèves.

Ceci est aussi reflété dans le tableau ci-contre, dans lequel sont notés

les montants alloués par le pouvoir central à chaque province par

personne pour la santé et par élève pour l’éducation. L’allocation est

faite principalement sur base de la capacité installée, c’est-à-dire le

personnel. Ceci résulte éventuellement aussi en une marge de

manœuvre assez limitée en termes d’allocation du financement actuel.

De plus, un nombre important de fonctionnaires ne sont pas encore

mécanisés, ou mécanisés mais non payés. Selon le RESEN, 36% des

enseignants ne sont pas mécanisés ni payés.

0

25

50

75

100

2012 2013

Autres Investissement Salaires

Source : Ministère de la Sante, Ministère de l’EPSP

Page 4: financements publics des secteurs sociaux en

4

3. Exécution des dépenses : comment améliorer la

qualité des dépenses ?

Le troisième facteur à considérer est la qualité des dépenses. Sont-

elles exécutées afin de maximiser la rentabilité économico-sociale et de

minimiser le gaspillage ? La redevabilité et le suivi de la performance

des secteurs de la santé et de l’éducation dépendent de la

transparence et des outils de traçabilité des dépenses publiques.

Les stratégies et plans opérationnels sectoriels ne sont pas reflétés

dans la nomenclature des dépenses. La planification et les actions

prioritaires dans ces secteurs ne sont donc pas traçables. La

nomenclature intègre les attributions de chaque secteur, comme

l’organisation des enseignements maternel, primaire, secondaire et

professionnel pour l’éducation, mais pas les plans sectoriels, par

exemple les dix programmes du plan intérimaire de l’EPSP, ou une

codification des Proved et sous-Proved.

Des faiblesses persistent dans la nomenclature budgétaire, rendant la

comptabilité publique difficile. Certains frais de fonctionnement et frais

généraux (frais de missions et de voyage) sont comptabilisés dans la

rubrique « rémunération ». Ceci est fait en partie parce que les

transferts pour ces frais généraux sont faits régulièrement aux

provinces. Une ligne budgétaire « fonctionnement des écoles » existe,

mais elle n’est pas utilisée pour les frais de fonctionnement des écoles.

Par conséquent, il est difficile d’identifier les différents types de frais et

de tracer les fonds.

Le gouvernement a fait un effort pour définir un certain nombre de

lignes budgétaires protégées. C’est un concept très utile, qui permet de

refléter les priorités dans le budget. Par contre, souvent seules les

dépenses pour les salaires sont réellement protégées.

Il est aussi important de noter que des reformes des finances publiques

sont en cours et que la budgétisation programme est prévue pour

l’année 2019.

Le Pouvoir central élabore les

politiques éducatives et

sanitaires, prépare et exécute le

budget.

Les Autorités provinciales

participent aussi à la définition et

à la mise en œuvre des

politiques.

L’Assemblée nationale et les

Assemblées provinciales

approuvent et votent le budget, y

compris ses orientations dans les

secteurs de l’éducation et de la

santé.

Les gestionnaires de

l’éducation et de la santé sont

responsables des fonds

consacrés aux écoles et

structures sanitaires.

La société civile, y compris les

médias, peut mener un plaidoyer

budgétaire pour l’éducation et la

santé.

Les partenaires techniques et

financiers devraient continuer

à appuyer l’éducation et la santé,

tout en accompagnant la réforme

des finances publiques.

Qui a un rôle à jouer ?

En guise de conclusion… Investir dans les enfants, c’est bâtir le Congo !

Les budgets sont l’affaire de tous les citoyens et nous avons tous un rôle à jouer

Comment accroitre les ressources ?

Pour assurer une éducation et une couverture sanitaire universelles, les allocations budgétaires en faveur de

l’éducation et de la santé devraient être améliorées. Le pays dispose d’un potentiel important pour accroitre

l’espace fiscal à travers la mise en œuvre de réformes soutenues, notamment la mise en place d’une chaine

de la recette publique, aussi bien au niveau central que provincial.

Comment améliorer la distribution des ressources ?

Pour assurer une meilleure cohérence des dépenses, il est important que l’allocation budgétaire soit faite

suivant les stratégies des secteurs de l’éducation et de la santé. Des critères d’allocation des ressources

standardisés et permettant de respecter les principes d’équité, d’efficience, et de qualité sont nécessaires.

Comment améliorer la qualité des dépenses ?

Il importe de bien exécuter le budget et de rendre compte à la population. La composition des dépenses

devrait déboucher sur des gains d’efficacité de l’action publique. Pour assurer plus de transparence et un

meilleur suivi des dépenses publiques, le renforcement de la chaine de la dépense, des évaluations

budgétaires et une révision de la nomenclature pour tenir compte des stratégies et plans opérationnels

sectoriels devront être accélérés.