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Finant'Cial Times 2 part 1

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Microcrédit part 1

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May 2011

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L’EDITO

Chères Audenciennes, Chers Audenciens

Voici le deuxième numéro du Finant’cial Times ! Et si vous l’avez dans les mains, c’est qu’apriori vous avez aimé notre premier numéro, et j’en suis très heureux.

Nous nous sommes attachés dans ce numéro à décrire les trois majeures en finance pro-posées par l’école. Afin de les illustrer, nous avons recueilli les témoignages d’étudiants qui y sontactuellement mais également des interviews de diplômés qui en sont sortis. J’espère que celavous permettra de faire un bon choix de majeure, et de voir où cela vous mènera.

Un dossier sur la microfinance vous permettra de savoir enfin ce qu’est réellement cemoyen de financement dont on entend tant parler, et inaugurera à cette occasion un nouveaupositionnement de Finantes: Finance & Responsabilité.

Je tiens également à remercier tous les participants de la coupe de France et de la Tra-ders’Cup. Un autre jeu boursier aura probablement lieu avant les stages.

Enfin, j’espère que vous avez aimé notre première conférence. Si vous n’avez pas pu y as-sister, aucun problème, il y en aura d’autres et de même qualité !

Notre équipe est toujours aussi motivée pour vous faire vivre plein d’événements.

A bientôt et bonne lecture !

Jocelyn.

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SOMMAIRE

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4. La rubrique lecturele virus B, crise financière et mathéma-tiques(2009) par Christian Walter et Michel dePracontal5. La rubrique politiquel’affrontement des deux fronts (Mélenchon-LePen)8. Le Dossierla microfinance17. Le portrait d’un économisteJacques Attali20. Description d’une place financièrezoom sur la place boursière de New-York21. Informations sur les majeuresEtudiants, diplômés et professeurs29. La revue de presseinterview de Michel Aglietta sur les hedges funds32. Football et ArgentParis truqués, matchs arrangés: football et déca-dence... Ou comment l’argent a perverti le milieu dufoot34. l’article sur le MIDEPle mouvement pour l’instauration de l’égalité faceau patrimoine36.Eroscopehoroscope et correction des mots croisés

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Après les explications partielles et partiales des béotiens, les inepties de Jean-Michel Apa-

thie et les condamnations moralisatrices et impertinentes des gouvernements, voici une véritable analyse

scientifique de la crise financière de 2007.

Les discours éthiques et les jugements de valeurs sur la sphère financière au sens large

n’expliquent en rien la débâcle des «subprimes». Aussi faut-il - pour penser la crise - revenir aux fonda-

mentaux de la finance : les modèles mathématiques.

A défaut d’être « glamour », l’essai de Walter (actuaire agrégé) et de Pracontal (journaliste)

a le mérite d’établir un bilan neutre et efficace tout en revenant aux origines des conceptions mathématiques

en vigueur sur les marchés. En somme, la crise des «subprimes» est fondamentalement une crise des

connaissances. Elle est due à l’hégémonie de modèles mathématiques qui supposent que les marchés se

comportent selon les lois du mouvement brownien et les fait apparaître comme plus réguliers qu’ils ne le

sont. Le « virus B » (pour «brownien») s’est transformé pendant des décennies : il est devenu pathogène,

signe prodromique d’une longue agonie. Il agit comme une machine à détourner la pensée, suscitant l’il-

lusion d’un univers fictif dans lequel les fluctuations sont atténuées, sans « exubérance irrationnelle »

(Alan Greenspan).

Seul remède : substituer le « hasard sauvage », plus proche des aléas réels des marchés, au

« hasard sage » brownien.

Le virus brownien est une infection qui touche la pensée, conduisant celui qui en est atteint à voir le monde

de manière «lisse» (ou continue) par opposition à une compréhension «rugueuse» (ou discontinue) des

phénomènes. Cette perception altérée peut être très dangereuse dans certaines situations car elle produit

une illusion d’optique sur la nature des risques, qu’on ne voit plus - ou mal.

Olivier Battiston

LECTURE

De l’autre côté du miroir :

aux antipodes des trivialités économiques

Livre : Le Virus B, Crise financière et Mathématiques (2009)

Auteurs : Christian Walter et Michel de Pracontal

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2012 : Le combat Mélenchon – Le Pen

Deux extrêmes, deux fortes têtes, deux adeptes du franc-parler (duplaisir sûrement aussi), Monsieur Mélenchon et Madame Le Pen sont deuxpoliticiens qui compteront aux présidentielles de 2012. Petit rappel :Jean-Luc Mélenchon est le leader du Front de Gauche, alliance entre leParti communiste français (PCF) et le Parti de gauche (PG codirigé par M.Mélenchon) créé lors des élections européennes de 2009. Le Front deGauche compte dans ses rangs de nombreux socialistes, des communistes,des écologistes, et des radicaux.

M. Mélenchon a profité d’une ascension médiatique fulgurante en2010. Il fustige les journalistes, accusés d’être à la botte du pouvoir, allantmême jusqu’à traiter David Pujadas de « larbin » et de « salaud » (Mes-dames Ferrari et Chabot en prendront aussi pour leur grade). Il dénonceavec force les technocrates et les élites, jamais avares de phrases chocs ; iln’y a qu’à taper « Mélenchon » sur Youtube pour voir défiler la longue listede : « Clash avec Denisot », « Attaque contre le CRIF », « Louanges deFidel Castro et de Hugo Chavez»… Fin 2010, il sort un livre, « Qu'ils s'en

aillent tous ! » qui, comme celui de Monsieur Hessel, fait un carton en li-brairie (si vous n’avez pas encore acheté ces deux livres, il semble néan-moins que vous n’ayez pas raté grand-chose). Tout ce tapage médiatiqueporte ses fruits : Olivier Besancenot (NPA) est totalement éclipsé de lascène politique. Le désormais candidat à la présidentielle, J-L Mélenchon,se porte à merveille dans les sondages.

A l’opposé de l’échiquier politique, Marine Le Pen est tout aussi enforme dans les sondages : 23% d’intentions de vote au premier tour, devantMartine Aubry,D.Strauss-Kahn et N.Sarkozy ! Ce sondage du 3 mars faitgrincer des dents à l’UMP : serait-ce le revers de la médaille de l’opérationséduction vis-à-vis des sympathisants FN lancée depuis quelques mois parle président (débat sur l’islam et la laïcité, réaffirmation des racines chré-tiennes de la France…)? Toujours est-il que le FN a le vent en poupe.

Pourtant, l’année 2011 n’avait pas si bien commencé : au momentmême où l’illustre président du FN, Jean-Marie Le Pen, passait en grandepompe le flambeau à sa fille, voila qu’éclate la révolte tunisienne… Pas debol : le départ du patriarche de la présidence du FN passe totalement ina-perçu dans les médias ! Comme un dernier coup du sort a celui qui, durant39 ans, s’est plaint d’être boycotté par les grands médias…

Cependant, les chiffres sont là et Mme Le Pen semble réellementfaire mieux que son géniteur. Le programme n’ayant pas changé d’un iota,on peut aisément supposer que c’est la personnalité de Mme Le Pen qui

On commence par une bonnenouvelle, de quoi rassurer les fu-turs investisseurs que vous êtes :la France conserve son triple

A ! Malgré des rumeurs de dé-gradation, l’agence de notationStandard & Poor’ s a confirméque la dette souveraine françaiseconservait la meilleure note.

Moins funky, Fitch abaisse

d’un cran la note du Portugal,sa dette à long terme passant deAA- à A+ , l’agence n’excluantpas une nouvelle dégradationdans un contexte économiquequalifié de « difficile ».

La Chine, sauveur de la zone

Euro ? c’est une possibilité, etle gouvernement chinois a an-noncé fin décembre pouvoiracheter les obligations émisespar les Etats en difficulté de lazone. Une Aide désintéressée ?rien n’est moins sûr, la Chinesouhaitant maintenir une multi-polarité et éviter qu’ 1/5 de sesexportations absorbées par l’UEne parte en fumée.

Bouygues se renforce dans le

bâtiment au Royaume-Uni : legéant français de la constructiona annoncé qu'il allait racheter lebritannique Leadbitter pour 45millions d'euros à son concur-rent néerlandais Heijmans.

Désolé pour les fans de L’OL,

le club fait un bide auprès des

investisseurs : l’émissiond'obligations convertibles de lasociété qui gère le club de footlyonnais n'a été souscrite qu'à83%. Et encore, pour l'essentiel,par les actionnaires actuels.

Immobilier : jamais les prixn’ont été aussi élevés. Les prixde l’immobilier ont en effet at-teint de nouveaux sommets en2010 (+18,46% à Paris !). L’anpassé, les tarifs des logementsont augmenté de 8,7% effaçant

NEWS EN BREF

RUBRIQUE POLITIQUEL’AFFRONTEMENT DESDEUX FRONTS

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provoque ce regain de popularité pour le FN. Il faut avouer que la stratégiede J-M Le Pen consistant à faire parler de lui grâce à ses fameux « déra-pages » commençait à agacer les français ; voici un triste rappel des der-nières provocations en date de J-M Le Pen : • 04/2010, J-M Le Pen : « Feindre de croire que le maréchal Pétainétait responsable de la persécution des juifs pendant la guerre c’est une pen-sée scandaleuse», car «les juifs français ont bénéficié (…) de l’action de(son) gouvernement».• 08/2010, (ibid.) : « [J’]ai acheté une maison de campagne pour per-mettre à [mes] enfants qui habitaient le XVe arrondissement de voir desvaches, au lieu des Arabes ». • 01/2011, (ibid.): (après le passage à tabac d’un journaliste lors d’unmeeting FN, réfutant une attaque antisémite) : « Cela ne se voyait pas surson nez qu'il était de confession juive».Bref, la liste est longue, mais heureusement, il semble que Mme Le Pen aiteu l’intelligence d’opter pour une autre stratégie de communication. Et celapaye.

Voila donc deux candidats (ou futurs) qui entendent bien surfer surle ras-le-bol actuel d’une partie de la population pour percer au premier tourde 2012. De plus, il se trouve que M. Mélenchon et Mme Le Pen partagentquelques points communs : un populisme assumé, un scepticisme vis-à-visdes journalistes, et un fort mépris pour l’Union européenne (tous deux dé-putés européens, vous avez cependant peu de chance de les apercevoir dansl’hémicycle de Strasbourg…). Ajoutez à cela une base électorale commune,les ouvriers et le vote populaire, et on les confondrait presque : « Mélen-chon, le J-M Le Pen de gauche » peut-on lire dans la presse.

Pourtant il ne faut pas s’y tromper, Plantu a beau les associer dansses caricatures, ces deux candidats « anti-système » ont des idées diamétra-lement opposées. Et ce qu’il y a de bien avec les idées des partis des ex-trêmes, c’est qu’elles n’ont pas franchement changé depuis GeorgeMarchais ou Pierre Poujade ! Marine Le Pen marche sur les pas de son pèreet déballe la rhétorique classique de la peur de l’immigration… avec unepetite mise à jour : le danger vient cette fois des réfugiés tunisiens de Lam-pedusa, aux portes de l’Europe. Ce à quoi répond M. Mélenchon : « Il fautlégaliser tous les travailleurs sans-papiers de France». D’un coup, on voit ladifférence !

De même avec un autre sujet phare du FN : l’abandon de l’euro (leprojet du FN prévoit le retour au franc de 1999, dévalué de 10%) et la fin dutraité de Maastricht : J-L Mélenchon, légèrement moins eurosceptique, sou-haite lui un SMIC européen (pour mettre fin à la concurrence des ouvriersétrangers). Il est aussi conscient des risques que comporte l’abandon del’euro pour la création d’un « franc Le Pen » : rien que son adoption provo-querait mécaniquement 20% d’inflation ! Il est donc favorable au maintiende la monnaie commune.

Enfin, il existe une autre divergence de fond entre ces fortes têtes.S’ils se déclarent tout deux en rupture totale avec l’intelligentsia actuelle,on peut cependant remarquer que Marine Le Pen apparait comme largementplus « anti-système » que J-L Mélenchon. En effet, Marine Le Pen aquelque peu hérité de l’image diabolique de son père. Cela la place donc de

les baisses enregistrées entre2008 et 2009, constate Century21, l’un des plus importants ré-seaux d’agences immobilières.

Info geek : Firefox, le navigateurinternet de Mozilla, a ravi laplace de numéro un européen àInternet Explorer de Microsoft,détrôné pour la première fois surun marché majeur, selon la so-ciété de mesure d'audience inter-net StatCounter.

L’euro introduit en Estonie :l’introduction de l'euro en Estonieau 1er janvier s'est passée sansheurt, ont indiqué la Commissioneuropéenne et la Banque centraleeuropéenne (BCE), quelque 26%des paiements effectués dans lesmagasins étant déjà libellés eneuros.

Le yuan atteint un nouveau

plus haut record face au dollar

: sa valeur spot a atteint un pic à6,6106 pour un dollar, le plushaut niveau depuis la réévalua-tion de la devise et les réformesdu système de changes engagéespar Pékin en 2005. Le prochaincap psychologique à franchirpour les dirigeants chinois est labarre des 6,60 yuans pour un dol-lar.

Chine toujours, Le PIB chinois

aurait progressé de 10% en

2010 selon les estimations de labanque Centrale.

Les prix alimentaires mondiaux

atteignent des nouveaux re-

cords : selon les derniers chiffresde l'Organisation des Nationsunies pour l'alimentation et l'agri-culture (FAO), les prix alimen-taires dépassent les sommetsatteints en 2008 quand leur flam-bée avait provoqué des émeutesdans plusieurs pays. 2010 a eneffet été une année de fortehausse pour les matières pre-mières agricoles. Sur les marchés,le blé et le soja se sont envolés deplus de 50 % depuis cet été ; lesucre a atteint un nouveau recordvieux de 30 ans…

Automobile : Ferrari n'a ja-

mais vendu autant de voitures

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fait en marge des grands partis politiques. De plus, elle est en totale opposi-tion avec les partis de droite. A l’inverse, M. Mélenchon appellera sansdoute à voter PS dans l’hypothèse d’un second tour gauche/droite en 2012.Rappelons aussi que M. Mélenchon a été ministre du gouvernement Jospinen 2000 : cela le place en porte-à-faux lors de ses discours enflamméscontre « un système perverti » auquel il ne faudrait pas adhérer... D’ailleurs,Mme Le Pen joue sur ce paradoxe et l’appelle allègrement « Monsieur leministre » !Bref, à y regarder de plus près, M. Mélenchon et Mme Le Pen n’ont guèrede points communs.

Il reste maintenant à savoir lequel des deux réussira le mieux àconvaincre l’électorat populaire. Mme Le Pen rêve d’un scénario à la 2002,où son père s’était hissé au second tour avec 18% des suffrages. M. Mélen-chon attend quant à lui avec impatience le jour où le Parti socialiste accep-tera d’appeler à voter « Front de Gauche » dans l’éventualité d’un secondtour Mélenchon/UMP en 2012. Toujours est-il que la guerre des « petitesphrases » entre le Front de Gauche et le FN ne fait que commencer.

Guillaume Crémière

en Chine qu'en 2010.

Le constructeur italien de voi-tures de luxe a annoncé avoirvendu l'an dernier près de 300voitures en Chine, ce qui repré-sente un bond de près de 50% parrapport à 2009 et le meilleur ré-sultat jamais enregistré par lamarque au cheval cabré dans cepays. Afin de répondre à l'appétitdes riches Chinois pour le luxe,Ferrari a décidé de renforcer sonréseau officiel et de sélectionnerde nouveaux partenaires afind'augmenter le nombre de pointsde vente, actuellement au nombrede 10.

2010, année décevante pour les

placements : La rémunérationdes fonds en euro devrait encorediminuer cette année. Celle del'épargne de trésorerie est aussien baisse, à l'exception du livretA. En revanche, les fonds actionset l'or ont eux rapporté plus qu'en2009.

L'appel d'Eric Cantona fait le

bonheur du Crédit coopératif :Suite à "l'appel de Cantona" à re-tirer son argent des banques, lecollectif "Sauvons lesriches!"(non ce n’est pas un col-lectif de milliardaires, le nom seveut ironique ^^) avait conseilléle 6 décembre de changer d'éta-blissement pour migrer vers unebanque plus vertueuse et en avaitrecommandé trois: le Crédit coo-pératif, la Banque postale et laNef (Nouvelle économie frater-nelle). Le Crédit coopératif a re-connu mercredi 5 janvier avoirenregistré 3.500 demandes "pourdevenir client" en un mois. Sitoutes débouchent sur une ouver-ture de compte, elles ne représen-teraient pas moins de 1% de laclientèle totale de la banque !

Le Royaume-Uni (re)découvre

la rigueur : associé aux suppres-sions massives d’emplois chezles fonctionnaires, le passage dela TVA à 20% devrait rapporter15 milliards d'euros à l'État, sanstrop peser sur la croissance.

Le dessin de Plantu du 19/01/11 qui a créé la polémique :

« amusant » pour Marine Le Pen, « scandaleux : un odieux

amalgame » pour le patron du Front de Gauche.

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La Microfinance

La microfinance, un transfert d’espoir ?

Si vous en avez vaguement entendu parler mais ne savez pas ce que c’est, si vous aimeriez savoir ce que c’est, et

même, si possible, comprendre, pas de panique, votre magazine préféré est là pour vous !

Avant d'en parler comme un professeur de finance ou un journaliste de chaîne d'information, on pourrait déjà se demanderen quoi le microcrédit permettrait à quelqu'un qui en aurait besoin de se sortir du pétrin.Partout dans le monde, des millions de personnes font tout pour subvenir à leurs besoins, mais n'en ont pas forcémentles moyens. Pourtant ces personnes peuvent très bien avoir d'aussi bonnes capacités à être manager que n'importe quelétudiant d'école de commerce, ou ne seraient pas moins bons artisans que ceux qui ont pu le devenir. N’importe qui,homme ou femme, voisin, ami ou parent, peut un jour avoir besoin du petit coup de pouce qui lui permettra de suivre sapropre route.Pour cela le microcrédit n'est peut-être pas la solution miracle, mais pour l'instant elle est souvent considérée comme lameilleure. Alors comment ça marche ?Illustration avec Roger et Carmen.

conditions. Dynamique et sûre d'elle, elle décide alors qu'elleva travailler à son compte en tissant des vêtements tradition-nels péruviens.

2 – Mais ça coince !

Après avoir rapidement creusé, Carmen se rend compte queles usuriers à qui elle pourrait demander à emprunter un peud'argent pour se lancer sont les mêmes que ceux qui tiennentMaria, son amie d'enfance, dans la misère en lui faisant tou-jours contracter de nouvelles dettes pour payer les précé-dentes qui étaient sur des sommes ridicules et à des tauxexorbitants.Quant à Roger, il déchante très vite : démarrer une entrepriseen France, c'est beaucoup de papiers, beaucoup de procé-dures, et un certain nombres d'immobilisations à acheter: parexemple, avec quoi Roger va-t-il livrer ses baguettesde pain ? En France une banque veut desgaranties pour prêter une sommeimportante, garantiesque n'a pas un chômeurqui peine à joindre lesdeux bouts.

3 – Et alors, on fait quoi

maintenant ?

Carmen et Roger ne se connaissent peut-être pas et viventpeut-être à deux extrêmités opposées du monde, mais ils par-tagent au moins une chose : la volonté, et l'espoir qu'ils ontentraperçu de s'en sortir bientôt.

1 – Introduction

Roger est ce que d'aucunspourraient appeler le Fran-çais moyen. Père de fa-mille divorcé (oui,« moyen » mais modernequand même visiblement),à 37 ans il verse à son ex-femme une pension ali-mentaire afin d'élever aumieux ses deux fils, âgésde 10 et 13 ans, qu'il aime-rait bien un jour voir étudier dans une belle école de com-merce de l'Ouest de la France. Mais voilà, Roger estmaintenant au chômage depuis bien trop longtemps. Pour-tant, avant, Roger avait travaillé des années durant dans lamême entreprise. C'est dans le désespoir et la morosité d'unquotidien difficile qu'un vieil ami d'enfance lui insuffle l'idéede se lancer dans l'aventure en créant sa propre entreprise delivraison de pain dans sa ville natale, pour le compte desboulangeries locales.

Pendant ce temps, au Pérou, Carmen se demandeaussi comment elle va bien pouvoir faire pour faire vivre sa

famille : son mari peine àtrouver un job de plus de 3semaines et ses 3 enfantsn'ont même pas de bonnesfournitures pour aller àl'école dans de bonnes

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DOSSIER

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Et Roger a d'ores et déjà trouvé une solution. En faisantquelques recherches et en allant se renseigner à droite et àgauche, Roger s'est vite aperçu que si ce que l'on voulaitconstruire tenait la route, on finirait par trouver l'argent né-cessaire : il a au moins des aides régionales et le crédit mu-nicipal de sa ville pour l'aider. Mais auparavant, sur lesconseils du même ami d'enfance, il va voir des associations,des organismes et des sites internet visant spécialement àaider les jeunes entrepreneurs pleins de bonne volontécomme lui, qui lui donnent alors tous les contacts néces-saires.De là il demande l'aide pour peaufiner son projet et savoirle présenter et le valoriser. C'est d'ailleurs là qu'il apprend le

sens des mots «businessplan», «power point» etsurtout... «slide» . Main-tenant c'est bon, il estprêt, direction l'ADIE(Association pour le pro-jet à l'Initiative Econo-mique): il va faire sabelle présentation devantun petit jury, formé debénévoles qui sont chefs

d'entreprises, directeurs ou banquiers.Pendant ce temps, Carmen aussi trouve une solution. Ils'avère que dans son village, d'autres femmes veulent juste-ment se lancer dans la production textile et n'ont pas les souspour commencer. Vous avouerez quand même que c'est biendommage quand on voit la faiblesse de la somme à réclamer! En faisant de bonnes recherches sur internet et avec unevertueuse patience elles trouvent finalement la solution quileur évitera à toutes les usuriers : tout comme Roger enFrance elles vont se tourner vers le microcrédit.Mais la subtilité, c'est que pour réduirele coût fort d'un microcrédit (etdonc l'importance dutaux d'intérêt, évidem-ment), elles vont formerun groupe solidaire, c'est-à-dire qu'elles vont mutuel-lement se porter caution.Chacune d'elle aura accès à lasomme, mais chacune sera res-ponsable pour toutes les autres et si l'une d'elle faillit au rem-boursement, ce sont toutes ces femmes qui vont en pâtir.Elles vont alors se tourner ensemble vers un Institut de

Micro Finance (IMF).

4 – Et donc ça marche ?

Il semblerait que les beaux jours se rapprochent pour Car-men et Roger. Le groupe de femmes au Pérou finit par ob-tenir 1000€ collectivement, qu'elles se répartissent entreelles selon leurs négociations. Carmen réussit à avoir 200€,qui lui serviront à acheter de nouvelles fournitures scolairespour ses enfants et surtout le matériel nécessaire pourconfectionner elle-même ses tissus.De son côté Roger a réussi à obtenir un prêt auprès del'ADIE pour un montant de 6.000 € à taux raisonnable. Çaparaît insuffisant, c'est vrai, mais il a également pu contrac-ter un prêt d'honneur (taux 0) d'un montant de 2.000€ auprèsde l'Etat; enfin une anque, au vu de ses sommes de départ,a été prête à lui accorder un autre prêt d'un montant de10.000 €. Roger va donc pouvoir démarrer avec 18.000 €.

5 – Mais d'où vient cet argent ?

Voilà une question très intéressante, et il y a encore biend'autres questions qu'il faut se poser et auxquelles on se doitde répondre très vite !Mais d'abord, finissons notre histoire.

6 – Epilogue

Cette histoire, c'était il y a 3 ans maintenant. Désormais Carmen est un exemple pour ses voisins qui sontencore dans la misère. Elle peut faire vivre convenablementsa famille et son mari ne s'endette plus toutes les semainesavec un vil usurier. D'ailleurs elle a aussi réussi à sortir sesvoisins du besoin et a sorti son amie d'enfance Maria desgriffes de ses créanciers.Roger est désormais hors du besoin et ses enfants l'admirentpour ce qu’il a accompli. L'aîné a désormais 16 ans, et pensemême faire une prépa après son bac pour ensuite faire uneécole de commerce dans le grand Ouest. Comble de la réus-site : la petite entreprise de Roger est en si bonne santéqu'elle est même passé au 13h de Jean-Pierre Pernaut.

« Je vois les pauvres comme des bonsaïs. Quand on plante les meilleures semences du plus grand

des arbres dans un pot de quinze centimètres de profondeur, on obtient une réplique parfaite de cet

arbre – mais elle n'est haute que de quelques centimètres. Il n'y a rien de mauvais dans les semences :

c'est le sol dans lequel elles ont été plantées qui pose problème. Les pauvres sont des hommes-bonsaïs.

Rien dans leur origine ne pose problème. Mais la société ne leur a jamais donné ce dont ils avaient besoin

pour grandir. Pour sortir de la pauvreté, les pauvres n'ont besoin que d'un environnement favorable. »

(Muhammad Yunus)

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Les questions techniques

On parle de microcrédit et de microfinance, mais quelle

est la différence ?

Pour faire simple, les microcrédits sont des crédits de faiblemontant destinés à des familles pauvres pour les aider à selancer dans des activités productives. La microfinance a unchamp d'action plus large, dû au développement mondial desmicrocrédits : la microfinance comporte, en plus des micro-crédits, des services tels que l'épargne, l'assurance ou letransfert d'argent. Aujourd'hui 60 millions de personnes onteu recours au microcrédit; le marché potentiel, lui, est estiméà 600 millions de clients.A noter que la microfinance, elle, ne concerne pas exclusi-vement les populations pauvres. D'ailleurs la majorité desinstitutions de microfinance (IMF) sont aujourd’hui à but lu-cratif, car c'est une condition nécessaire pour proposer desservices d'épargne.

Mais qu’en est-il de ses services d'épargne ? En quoi

sont-ils importants pour des populations pauvres ?

En fait ces populations peuvent avoir une épargne, mais doi-vent régulièrement piocher dedans, du fait des aléas de lavie et de l'irrégularité de leurs revenus. Ils ont donc besoind'une épargne sûre et flexible, et doivent pouvoir récupérerfacilement et rapidement leur argent. Pour offrir le meilleurservice les IMF proposent souvent des dispositifs spéciaux,plus souples. Finalement les pauvres ont autant besoin d'uneépargne efficace que d'un crédit !

Quand la microfinance est-elle apparue ?

Les prémices du microcrédit, on les doit à MuhammadYunus, qui dès les années 1970 met au point, teste et adoptece nouveau système auprès de groupes de femmes dans levillage de Jobra: un premier prêt de 27 dollars qui aura faitde nombreux petits. Le système connait ensuite une trèsgrande croissance dès les années 1980 (notamment avec lacréation de la Grameen Bank par Yunus). A noter que de pre-mières coopératives d'épargne avaient déjà vu le jour enAfrique dans les années 1960.

A qui s'adresse la microfinance ?

Le client habituel est une personne que l'on peut qualifier depauvre, qui n'a pas accès aux institutions financières tradi-tionnelles. On les désigne souvent par le terme « micro-en-trepreneur ». En zone rurale ce sont plutôt de petits paysans

tandis qu'en zone urbaine l'éventail est plus large.

D'où vient cet argent ?

Sachant que les IMF sont généralement des ONG, leursfonds ont été constitués par des dons externes (souvent dé-fiscalisés). Certains IMF qui ont connu une croissance suf-fisamment importante sont régulièrement amenées àemprunter directement sur les marchés locaux ou auprès debanques internationales.

Quel impact pour les pauvres et en quoi cela les aide-t-il

?

Les deux premiers impacts directs sont l'augmentation durevenu et la création d'entreprises. L'objectif reste toujoursde les sortir de la pauvreté. Pour les femmes c'est un vecteurd'émancipation. De plus (et pour vous rappeler les coursd'éco, pour ceux qui ont eu la grande chance d'en avoir) onpeut parler d'effet multiplicateur : l'argent prêté sera intégra-lement utilisé, soit dans la consommation soit pour la créa-tion de l'entreprise. Or cette consommation consistera enl'achat de produits fabriqués par d'autres entreprises ou d'au-tres agriculteurs, et l'entreprise, elle, va devoir s'approvision-ner, donc acheter auprès des autres entreprises. Tout lecapital va donc circuler dans le système économique et fa-vorisera de façon efficace d'une part le développement éco-nomique par les revenus, d'autre part le développementsocial par l'intégration professionnelle ou encore l'émanci-pation des femmes.« La microfinance est une finance de proximité […]. Elleest toujours adaptée aux besoins, c'est pourquoi elle innoveen permanence. » (Michel LELART, membre du Réseau En-trepreneuriat de l'AUF).

Y a-t-il des situations où la microfinance n'est pas appro-

priée ?

Évidemment : tout crédit doit être remboursé, et prêter à unepersonne qui n'aurait en aucun cas les capacités de rembour-ser ne ferait qu'aggraver la situation.De plus, certains gouvernements ont déjà tenté de lancer desprogrammes nationaux de microfinance, mais le succès a ra-rement été au rendez-vous.

Quest-ce qu’un prêt d'honneur ?

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C'est un crédit à moyen terme (généralement 2 à 5 ans), etqui engage la responsabilité individuelle de l'emprunteur,bien que le prêt soit octroyé dans le cadre d'une créationd'entreprise. Le taux appliqué est normalement de 0%.

Pourquoi des intérêts si élevés de la part des IMF ?

La réponse est un peu la même que pour un problème decomptabilité de gestion finalement : c'est surtout l'impor-tance des coûts fixes qui va déterminer le taux. En effet, letraitement d'un crédit de 1.000 € est le même que pour uncrédit de 15.000 €, d'où une forte répartition par unité demonnaie prêtée. De plus, en microfinance, les emprunteursne présentant pas nécessairement une garantie digne de cenom, les agents doivent surveiller le dossier plus intensé-ment que pour un crédit classique (jusqu'à la visite au domi-cile). Sur un grand nombre de petits prêts ces divers fraissont très coûteux, ce qui explique l'application d'un taux re-lativement élevé, même parfois lorsqu'il s'agit d'associationstelles que l'ADIE.

Dans ce cas, quelles mesures sont prises pour éviter aux

pauvres de vivre l'enfer ?

Deux points se sont déjà développés. D'un côté des initia-tives de protection ont permi de sensibiliser les populations,mais aussi d'imposer des principes de transparence et l'obli-gation de proposer des mécanismes de recours. D'un autrecôté les clients sont protégés par la divulgation des perfor-mances sociales des IMF. Les clients ayant généralement lechoix de l'IMF, certaines d'entre elles peuvent même se re-trouver délaissées et sont alors obligées de s'adapter aux be-soins et de diversifier leurs produits.

Et justement, qu’est-ce que cette mesure des perfor-

mances sociales ?

La majorité des IMF s'inscrivent dans un objectif social.Pour mesurer les performances sociales, et non pas finan-cières, tout un tas d'indicateurs sont utilisés. Cette mesureoblige les IMF à toujours se placer dans cette optique so-ciale.

Quels pourraient être les produits nouveaux de la micro-

finance ?

Des produits novateurs ont été adoptés par les IMF, tels quele crédit-bail, tandis que des outils de sécurisation ont étédéveloppés, tels que les centrales de risque.

Quelques citations

« Lutter contre la pauvreté est radicale-

ment de gauche; faire rentrer les pauvres dans

l'économie  de  marché  est  radicalement  de

droite. »(Jacques Attali, à propos de Muham-

mad Yunus)

« La microfi

nance, c’e

st la ressou

rce financ

ière deven

ue

pouvoir p

opulaire. »

(Ghislain Paradis, PDG de Développe-

ment International Desjardins, Canada)

« Les êtres humains ne sont pas simplement

des travailleurs, des consommateurs, ou même des en-

trepreneurs. Ce sont aussi des parents, des enfants,

des amis, des voisins et des citoyens. » (Muhammad

Yunus)

Finant’cial Times | mai 2011 | 11

Page 12: Finant'Cial Times 2 part 1

Au delà du soutien actif apporté à l'association AxéSud,Audencia a depuis 4 ans sa propre chaire de microfinancerassemblant les enseignants-chercheurs de l'école et les pra-ticiens du Groupe Banque Populaire. Destinée à évaluer« les conditions de succès et les améliorations possibles »

en matière de microfinance, le pro-gramme s'appuie sur d'autres parte-nariats extérieurs dans l'optiqued'éclairer sur « le rôle économiqueet social des banques coopéra-tives »*, dans les pays émergentscomme dans les pays développés.La chaire Banque Populaire est

membre du Réseau Européen de la Microfinance.

L'œuvre de Jacques Attali

Fondée en 1998 à Paris par Jacques Attali et Arnaud Ven-tura, PlaNet Finance est aujourd'hui un groupe - rassem-blant une fondation depuis 2010, une ONG et desentreprises sociales - présent dans plus de 80 pays. Focussur la réussite d'une finance solidaire.

Dans près de 50 pays PlaNet Finance accomplit quotidien-nement sa mission : lutter contre la pauvreté par le déve-loppement de la microfinance. Sur tous les continents legroupe assure toute une batterie de services adressés auxporteurs de projets et micro-entrepreneurs en tous genres.Pour commencer, des services de conseil et d'assistancetechnique sont apportés par tous les experts. La formationet la recherche en microfinance sont assurés par PlaNetUniversity. De plus les programmes Microfinance Plus ap-portent à la fois le financement (microfinance) et des pro-grammes de développement social (santé, éducation,environnement).Sans oublier que le groupe offre également des services denotation en microfinance, de micro-assurance, agit aussivia le microcapital risque solidaire*, et accompagne les au-tres instituts de micro finance.

Et tout ceci rassemble près de 250 employés à travers lemonde et 1200 collaborateurs, présidés par MuhammadYunus.

Jacques AttaliEconomisteEcrivainHaut fonctionnaireCo-fondateur de PlaNet Finance

Et Audencia, dans tout ça ?

Tout le monde le sait, le groupe Audencia Nantes est pro-fondément engagé en faveur de la responsabilité globale.Et le microcrédit n'est pas oublié !

La chaire Banque Populaire

* www.microfinance.audencia.com

Création de l'Association Française de Microfinance

(AFMF)

Au début de l'année 2011 la Chaire Banque Populaire d'Au-dencia et la Fédération Nationale des Banques Populairesont créé l'AFMF, dont Christophe Villa, professeur associéet titulaire de la Chaire Banque Populaire, est le directeurscientifique. Avec pour objectif officiel « d'offrir un cadreouvert permettant de favoriser les coopérations entre cher-cheurs, praticiens et organisations œuvrant en France », lafédération des Banques Populaires, la Chaire Banque Po-pulaire sont fidèles à leurs valeurs d'engagement et d'accom-

pagnement.

Christophe Villa

Professeur associéTitulaire de la Chairedes Banques PopulairesDirecteur scientifiqueAFMF

Finant’cial Times | mai 2011 |12

Page 13: Finant'Cial Times 2 part 1

Né en 1940, celui qu'on appelle « le Banquier despauvres  », le fondateur du micro crédit et prixNobel de la paix (2006), a su inventer un nouveausystème économique, plus social et plus attaché àla valeur humaine.

Après avoir étudié puis enseigné l'économie du dé-veloppement aux Etats-Unis entre 1965 et 1971, c'est face àla grande famine du Bangladesh de 1971 qui a tué près d'1,5millions de personnes que la révélation a lieu. « Toutes lesbelles théories que j'enseignais, les mérites du crédit, les ver-tus de l'économie de marché, la force de la libre entreprise,ont littéralement volé en éclat par ce que j'ai vu. »

C'est alors dans le petit village de Jobra qu'il décou-vre le cercle vicieux de la pauvreté causé par un sys-

tème bancaire qui « tient les pauvres » enleur imposant des emprunts quo-

tidiens à des taux abu-sivement élevés sous

prétexte d'insolvabilité.En 1976 il décide de prê-

ter 27 dollars à 42femmes pauvres qui se

porteront mutuellementcaution (elles sont « collec-

tivement responsables de chacune d'entre elles »). Depuiscette date, Muhammad Yunus a aidé plus de 6 millions depersonnes et débloqué près de 6 milliards de dollars de prêts.

En 1983, il crée la Grameen Bank. C'est une pre-mière dans l'Histoire. La Grameen Bank aide désormais plusde 50 000 villages et a fait des petits partout dans le monde.

Bien que Yunus soit favo-rable à l'économie demarché, selonlui le problèmeest que notrethéorie écono-mique a une « vueétroite de la naturehumaine » : nousn'envisageons que lamaximisation du pro-fit. Les êtres humainss'inquiètent de leur fa-

mille, se soucient de leur réputation, de leurs communautés.Ils sont composés de millions de nuances que ne prend pasen compte une vision mathématique du système écono-mique. Ces considérations-là, la Grameen Bank les prend encompte. Ce ne sont pas seulement des entrepreneurs qu'ellesoutient, « ce sont aussi des parents, des enfants, des amis,des voisins, et des citoyens ».D'un point de vue plus technique, il faut aussi préciser quela Grameen Bank tient aussi à mesurer, à percevoir, la pau-vreté dans toute sa complexité. Au-delà de l'aspect écono-mique du revenu, la Grameen Bank approche la pauvreté autravers de pas moins de 12 critères.

Les vertus du marché, que Yunus défend néan-moins, doivent selon lui être mises au serviced'un progrès social et écologique : c'estsa définition du Social Busi-ness. Il en considère 2sortes : celles qui appar-tiennent à de gros inves-tisseurs et celles quiappartiennent à des pau-vres. La première, c'est l'ac-tion sur le modèle del'économie de marché, maisqui ne verse pas de profit ni dedividende, réinvestissant tout lesurplus dans le projet; l'investis-seur vise le gain social maximumet non plus la maximisation duprofit. La deuxième, s'adresse à desprojets portés par les pauvres pourles pauvres, et les profits et dividendes sont donc reversésau propriétaire, qui lui même vient du milieu d'appartenancecible.

Avec près de 100 millions de « clients » à travers lemonde, on peut dire que c'est un système qui marche ! En2007 Yunus envisage même de créer au Bangladesh un nou-veau parti politique. Et pourtant, le chemin vers une meil-leure justice n'est pas sans embuche...

Portrait

MUHAMMAD YUNUS

LA FIGURE EMBLEMATIQUE DE LA MICROFINANCE

Finant’cial Times | mai 2011 | 13

Page 14: Finant'Cial Times 2 part 1

Barrières

Muhammad Yunus mis hors de la Grameen Bank !

Créer et mener à bien un modèle financier à destination des pauvres ne semble en effet pas du goût de tous. C'est dumoins le cas du gouvernement actuel du Bangladesh.

La nouvelle tombe : Muhammad Yunus est démis de ses fonctions par la Banque Cen-trale du Bangladesh. Avec l'âge comme prétexte, le Banquier des pauvres est doncjeté de la Banque qu'il avait lui même créé il y a de ça presque 30 ans. Une décisioncertes surprenante, mais qui révèle un conflit ancien.

3 Mars 2011

Qui est à l'origine de toutes ces enquêtes, des faux soupçons ré-

cents ou de cette décision ?

Ni plus ni moins que le gouvernement actuel du Bangladesh. Mais quepourrait bien avoir de si spécial ce gouvernement ?

Ce que l'on sait clairement, c'est que l'actuelle première ministre était assignée àrésidence pour corruption en 2007, alors même que Yunus voulait fonder son parti.On sait désormais aussi que depuis cette date Muhammad Yunus a reçu plusieursmenaces de mort.

Sheikh Hasina (photo, à gauche)

Actuelle première ministre du Bangladesh.... et reconnue coupable de corruption en 2007

Coïncidence ? Peut-être. En tout cas la pauvreté, elle, esttoujours là. Yunus a le soutien des équipes de sa GrameenBank, des clients, ou de personnalités. Plus de 20.000 per-sonnes se sont rassemblées au Bangladesh, et d'autres ma-nifestations sont organisées en soutien, comme la chaînehumaine du 16 Mars à Paris, pour un homme qui s'est battu,et se bat encore, pour un monde meilleur.

« La  seule  chose qui permet au Mal de

triompher est l'inaction des hommes de bien »

(E. Burke)

(Cédric Adgié)Finant’cial Times | mai 2011 |14

Page 15: Finant'Cial Times 2 part 1

INTERVIEWAxéSud

Nous avons pu interviewer Antoine Riboulon,

Président d’AxéSud, afin d’en savoir plus sur cette

association et sur la microfinance à Audencia.

Que fait concrètement AxéSud ?

A.R. : C'est l'association de microcrédit d'Audencia, quis'articule autour de trois actions majeures : deux à l'exté-rieur d'Audencia, qui consistent en l'envoi de prêts collectéssur Nantes (et auprès des connaissances des membres) etqui sont envoyés aux IMF partenaires au Pérou et au Bénin;l'autre action à Audencia, c'est l'organisation de la Journéede la Microfinance (JMF), qui se déroule en avril-mai, etconsiste en une journée de conférences avec les acteurs cléde la micro finance à Nantes et en France, comme l'ADIE,Finansol, Banque Populaire, ou encore PlaNet Finance. Enparallèle nous éditons également un Guide de la Microfi-nance, et envisageons cette année d'intervenir dans les ly-cées afin d'informer et sensibiliser. Enfin on vend aussi,sous le nom de marque Racine Andine que l'association adéposé, les bijoux produits par les artisans péruviens finan-cés par nos prêts. Sans oublier l'aide apportée aux étudiantsd'Audencia qui souhaitent partir en API au Pérou !

Qui sont les personnes financées par AxéSud ?

A.R. : Jusqu'à maintenant nous finançons des artisans pé-ruviens et des agriculteurs béninois. Malheureusement nousn'avons pas les moyens de choisir directement les per-sonnes qui bénéficieront de ces prêts, puisque ce sont lesIMF qui gèrent indépendamment les prêts que nous luitransférons. En gros, même si on a les moyens de voir àlong terme l'impact positif que ça a sur les projets mis enplace dans ces pays, on souhaiterait aller plus loin et se don-ner les moyens de choisir les personnes auxquelles lessommes collectées sont prêtées en développant notre actionà Nantes et sa région.

Qu'entendez-vous par « développer l'action sur

Nantes » ?

A.R. : En 2011, AxéSud veut se lancer dans le financementde TPE. Nous sommes encore en train de réfléchir sur leprojet, mais on a d'ores et déjà des éléments encourageants: ce projet a été sélectionné par Ernst & Young dans le cadredu concours de la meilleure association et a suscité l'intérêtde la direction France d'Ernst & Young.

Et comment fonctionnerait ce financement d'entreprise

?

A.R. : On veut bénéficier de dons défiscalisés collectés au-près des entreprises, qui nous permettront d'avoir des fonds

propres, qu'on pourrait redistribuer sous forme de prêtsd'honneur (taux 0 %) à des porteurs de projets responsables,tels que des chômeurs ou des jeunes actifs. Cela leur per-mettrait de contracter plus facilement d'autres prêts auprèsdes banques et d'autres établissements de microcrédit, etpar effet boule de neige de lancer concrètement leurs pro-jets.

Qu'est-ce que ça pourrait apporter à Audencia et aux

étudiants ?

A.R. : Cela permettrait à l'école de gagner en rayonnementet en influence sur le tissu économique nantais et permet-trait de renforcer son engagement du point de vue de la res-ponsabilité sociale. Quant aux étudiants, ils pourraientprofiter dans l'idéal de missions dans le cadre du suivi quel'on souhaite également proposer aux porteurs de projets;ils seraient aussi sollicités pour la sélection des projets danslesquels investir. Enfin, on peut imaginer des partenariatsavec d'autres associations d'Audencia, comme la JE, quipourrait proposer des enquêtes à prix réduit aux projets quifonctionnent, ou Finantes, qui pourrait faire la promotionde ces projets ou entreprises.

(Propos recueillis par Cédric Adgié)

Ndlr : Cette année la JMF est prévue pour le mois de mai

à Audencia.

(Cédric Adgié)

Finant’cial Times | mai 2011 | 15

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Les associations d’entrepreneuriat social des grandes écoles

se rassemblent en une fédération

Vendredi 25 Mars 2011, Nice. Des représentants – Présidents, Vice-Présidents ou délégués – des associations agissant

dans le cadre de – ou promouvant – l'entrepreneuriat social dans les grandes écoles françaises se retrouvent ensembles

sur le campus de l'EDHEC Nice à l'occasion du premier forum ISEF (International Social Entreprise Forum), initiative

d'Anis FNAIECH de l'association Develop Edhec Social Business.

A l'issue de cette série de conférences sur l'économie sociale et solidaire et de deux jours de discussions et réflexions, est

annoncée publiquement l'inauguration d'un groupement d'étudiants et associations pour l'entrepreneuriat social, signée

par des associations de l'EDHEC (Devlop), ESCEM (Accede Escem), l'Ecole Polytechnique (X-Entrepreneuriat So-

cial), Audencia (AxéSud), Ponts et Chaussées (Developponts), ESCP-Europe (Accede Escp), EM Lyon (eMicrOcrédit),

et HEC Paris (Esp'R). Des associations de l'ESSEC (EDI et SIFE Essec), Euromed Management (Accede Euromed)

et ISC Paris (Accede ISC Paris).

Avec pour objectif de devenir un ac-

teur clé et un interlocuteur privilégié,

le groupement s'engage à promouvoir

l'entrepreneuriat social, au travers

d'évènements communs et nationaux

et la publication d'un journal, ainsi

qu'à consolider chaque association

par le partage des informations,

contacts, évènements et conseils.

De gauche à droite : Thibault FERRAND (EM Lyon), Thibaut GIMENEZ (ESCPEurope), Julie SALESSES (HEC Paris), Stanislas RIFFAUD (EDHEC), SarraFELLAOUINE (ESCEM), Cédric ADGIE (Audencia), Audrey BIENFAIT (EcolePolytechnique), Alexis DE VIENNE (Ponts et Chaussées)

Signature de la Déclaration Inaugurale du groupement

+ d’info :

Contacter le délégué du groupement d'AxéSud :

Cédric Adgié : [email protected]

Finant’cial Times | mai 2011 |16

Page 17: Finant'Cial Times 2 part 1

Finant’cial Times | mai 2011 | 17

Jacques AttaliJacques Attali

A l’heure de vous présenter Jacques Attali, le doute

m’assaille : par quoi vais-je bien pouvoir commencer

? Cet homme brillant, connu et reconnu comme major

de l’école Polytechnique ou comme le conseiller spé-

cial de François Mitterrand, est

aussi économiste, écrivain, ou

encore professeur. Il a fondé

PlaNet Finance, organisation

de solidarité internationale re-

posant sur le développement de

la microfinance (voir notre dos-

sier spécial). En réalité Jacques

Attali est l’un des intellectuels

qui depuis plus de 30 ans

comptent le plus en France

comme dans le monde. Il est

d’ailleurs, selon le bimestriel

américain Foreign Policy, « l’un des cent intellectuels

les plus importants au monde ». Ainsi peut-on sans

aucun doute affirmer que Jacques Attali, à l’image de

ceux qu’on appelait les « philosophes de Milet », est

un homme qui parvient à penser et agir avec perti-

nence dans de très vastes domaines. J’oubliais

presque de rappeler qu’il est diplômé de l’Ecole Na-

tionale d’Administration (ENA), de Sciences-Po

Paris, qu’il est co-fondateur d’Action contre la Faim

(1979), qu’il préside la Commission pour la libération

de la croissance…

Cette capacité à être compétent sur de nom-

breux sujets d’importance est quelque chose de véri-

tablement fascinant. Toutefois ce que j’admire le plus

chez lui, c’est cette capacité à toujours agir selon un

triptyque investigation-réflexion-action. En effet, sur

tous les sujets majeurs comme celui de la dette récem-

ment, Jacques Attali procède à une longue et minu-

tieuse recherche historique puis analyse en détail la

situation présente ; il livre enfin son point de vue en

précisant quelles sont les perspectives et ce qu’il pré-

conise pour résoudre le problème. Grâce à cela, cha-

cune de ses analyses présente l’avantage d’être

documentée, argumentée mais également claire pour

quiconque souhaite s’y intéresser.

Bien évidemment je pourrais continuer à énu-

mérer les réussites de Jacques Attali, vous décrire son

brillant parcours académique… Cependant j’ai fait le

choix de vous développer son point de vue sur trois

sujets d’actualité majeurs : la moralisation du capita-

lisme, la dette, et les révolutions arabes. Je choisis no-

tamment ces thèmes car ils nous concernent

directement, ce qui nous encouragera peut-être à les

approfondir. « Faut-il se contenter du monde comme

il est et de l’histoire comme elle vient ? », demande

Jacques Attali ; je vais tenter dans cette perspective

de vous résumer et de vous faire comprendre au

mieux sa pensée tout en vous faisant découvrir cer-

taines de ses actions passées.

La crise de 2008 a soulevé de nombreuses

questions. Le système même du capitalisme est remis

en cause. Plus précisément il lui est reproché de ne

pas être moral ; on peut même se demander si la crise

financière actuelle n’est pas elle-même une crise mo-

rale. De nombreux chefs d’Etat annoncent de ce fait

que la solution miracle réside dans l’instauration d’un

capitalisme qui précisément devienne moral. Mais

Jacques Attali, quant à lui, questionne cette possibilité

de moralisation du capitalisme.

Fidèle à sa manière de raisonner, il nous rap-

Page 18: Finant'Cial Times 2 part 1

pelle d’abord les deux grandes thèses à propos de

l’accumulation des richesses : ainsi, pour les civili-

sations chrétiennes ou asiatiques, le scandale c’est la

richesse. Au contraire, pour les civilisations juives et

musulmanes, c’est la pauvreté. Salomon déclarait

d’ailleurs au moment de l’inauguration du Temple :

« Nous sommes très riches et très puissants mais cette

richesse ne nous permettra d'être heureux que si elle

sert aux soixante-dix peuples alentours ». Le pro-

blème est qu’aujourd’hui les deux scandales sont réu-

nis et le capitalisme en est un peu responsable. Là

encore Jacques Attali nous fait un bref rappel histo-

rique : « De siècle en siècle, l’humanité impose la pri-

mauté de la liberté individuelle sur toute autre valeur.

» (Une brève histoire de l’avenir). En effet, les Etats

ont historiquement laissé de plus en plus de liberté,

aux marchands notamment. C’est pourquoi marché

et démocratie sont interdépendants car ils sont fondés

sur une même liberté individuelle illimitée. Et c’est

là l’un des problèmes actuels majeurs, car d’une part

les libertés s’entrechoquent et d’autre part il y a un

décalage entre la démocratie et le marché à tel point

que la démocratie ne peut plus produire de droit. A

partir de là tout est permis : c’est la « dérégulation ».

Or la morale est inutile si elle ne se traduit pas en

droit, puis en sanctions pour garantir celui-ci.

Ainsi, allons-nous être capables de créer un

système de droit mondial ? Selon Jacques Attali la

règle morale doit devenir planétaire. Il rappelle

qu’une sorte de gouvernement mondial existe déjà

dans le football (avec la FIFA) ; alors pourquoi ne se-

rait-ce pas possible avec la finance ? J. Attali répond

en outre à quelques unes des interrogations que sou-

lève un tel gouvernement.

1) Comment instaurer un gouvernement mon-

dial avec des intérêts divergents ?

Il explique tout d’abord que le fédéralisme est une

des clés de l’indépendance et donc de la puissance

d’une/des nation(s) - avec une nouvelle fois un exem-

ple à l’appui : celui des Etats-Unis. Dès lors, si on

réussit en Europe, la même logique s'installera à

l'échelle mondiale. Il faut donc l'équivalent mondial

du marché unique en Europe, et la création de règles

au niveau planétaire. Or la crise crée cette nécessité,

le G20 a le mérite d'exister, la prise de conscience elle

aussi existe.

2) Faut-il limiter la liberté individuelle ?

Cela semble évident si l’on veut donner un sens à la

morale. C'est un privilège que de pouvoir être utile.

3) La Chine est-elle un contre-exemple de l'évo-

lution vers la démocratie ?

Non, la démocratie se développe en Chine: les grèves

qui commencent, la liberté de la presse qui s'installe,

les vraies élections libres dans le Parti communiste

chinois pour désigner le maire... On constate l’appa-

rition d'une vraie classe moyenne, condition de la

naissance de la démocratie.

Jacques Attali conclut en disant que « le marché pé-

nalise les minorités pauvres alors que la démocratie

pénalise les minorités riches » (Fraternités : Une nou-

velle utopie).

Dans un de ses tous derniers essais intitulé

Tous ruinés dans dix ans ? Dette publique : la dernière

chance, Jacques Attali aborde une question cruciale :

celle de la dette publique. Cruciale car la dette est à

l’heure actuelle la préoccupation majeure de pays

comme l’Irlande, la Grèce ou l’Espagne, et risque de

devenir la nôtre si les autorités ne trouvent pas rapi-

dement 35 milliards d’euros par an - et plutôt même

50 selon Jacques Attali.

Une fois encore dans cet essai de 250 pages, Jacques

Attali reste fidèle à sa manière de raisonner. Après

avoir rappelé l’histoire des différentes dettes (souve-

raines, publiques), il revient sur la situation actuelle.

Finant’cial Times | mai 2011 |18

Page 19: Finant'Cial Times 2 part 1

Tout lecteur quel qu’il soit sera contraint de constater

que la situation est grave, si ce n’est dramatique. En

réalité la France, dans les prochains mois, va devoir

rembourser ses emprunts dont les montants atteignent

des milliards d’euros, et sera donc contrainte de

réemprunter à des taux plus élevés. Enfermée dans

ce cycle infernal elle verra sa sacro-sainte note dé-

gradée, et les prêteurs commenceront à faire défaut.

La France manquera finalement d’argent pour assurer

certains services tels que l’éducation ou la santé. A

plus long terme, Jacques Attali tire la sonnette

d’alarme: de telles dettes peuvent mener à la dispari-

tion d’un pays… Cette question de la dette n’est donc

pas à prendre à la légère. C’est pourquoi je vous

conseille vivement de lire ce petit essai instructif.

Enfin je voudrais vous parler d’un thème qui

déchaîne aujourd’hui les passions, non seulement en

France mais aussi et surtout dans le monde: les révo-

lutions arabes. Sur cette question, Jacques Attali

prône une aide rapide et massive à la Tunisie et à la

Libye pour éviter un retour de la dictature, car d’une

part on ne peut souhaiter que de tels régimes existent

et d’autre part cela signifierait l’apparition d’un nou-

veau marché pour la France. J’aimerais à partir de là

revenir sur une des peurs majeures des Européens en

rapport avec ces révolutions : les arrivées massives

de populations nord-africaines. Jacques Attali rap-

pelle qu’une situation semblable s’est produite il y a

plus de vingt ans pour les populations d’Europe de

l’Est, lors de la chute du mur de Berlin ; aujourd’hui

c’est le mur de la Méditerranée qui tombe. Or à

l’époque Jacques Attali avait fondé la Banque euro-

péenne pour la reconstruction et le développement

(BERD), qui a aidé les pays de l’Est à s’enraciner

dans le marché et la démocratie. Ainsi l’attitude à

adopter est-elle la même selon Jacques Attali, même

s’il reconnaît qu’il y a eu quelques « plombiers polo-

nais » : il faut donc une institution qui aide les pays

comme la Libye et la Tunisie.

Pour conclure ce portrait, j’aimerais rendre

hommage à l’engagement de Jacques Attali pour la

défense de la démocratie – il rappelle à juste titre que

« jamais une démocratie n’a fait jusqu’ici la guerre à

une démocratie » - et au service de la société toute

entière. Un homme dont beaucoup peuvent s’inspi-

rer.

Paul Chartier

Remerciements à H. Plassard-Berstel

Finant’cial Times | mai 2011 | 19

Page 20: Finant'Cial Times 2 part 1

LA BOURSE DE NEW YORK

Quand elle s’écroule, c’est le monde entier qui tremble. On en fait des films, des sagas. Vous avez deviné, on parle

bien de la bourse de Wall Street, la bourse la plus importante du monde. Alors comme tout financier qui se respecte,

vous vous devez de la connaître et voilà une petite mise au point qui devrait vous y aider.

PLACE FINANCIERE

Finant’cial Times | mai 2011 |20

Son origine: une PME qui croît très très vite.

Son origine remonte à la signature, par 24 agents de changede New York le 17 mai 1792, d'une convention dite «accordde Buttonwood», c'est-à-dire du platane («buttonwood tree»en anglais) sous lequel ils avaient l'habitude de se réunir, situéà l'emplacement de l'actuel 68, Wall Street.À la création, la cotation officielle se limite pour commencerà cinq titres, trois obligations d'État et deux actions debanques. L'activité croît très vite pour atteindre un pic de 380000 actions en 1817, avant d'être divisée par six en quelquesannées puis de rebondir à partir de 1830 avec la première co-tation d'actions de sociétés de chemin de fer (la Mowhak andHudson est la première société de chemin de fer à entrer enBourse). Le 8 mars 1817, une charte de l'organisation est rédigée re-nommant la bourse de New York «New York Stock & Ex-change Board». Anthony Stockholm en fut le premierprésident. En 1863, la bourse new-yorkaise prend officielle-ment le nom de New York Stock Exchange (NYSE) et démé-nage deux ans plus tard au 10-12, Broad Street.En 1884, Charles Dow publie une liste de onze actions de ré-férence, qui deviennent officiellement en 1896 l'indice DowJones.Le NYSE fut fermé en juillet 1914 au début de la Première

Guerre mondiale pour rouvrir quelques mois plus tard, le 28novembre, dans le cadre de la vente des bons du Trésor pouraider à l'effort de guerre.La période des années 20 constitue une période de prospéritépour les Etats-Unis et Wall Street.

Le krach de 1929 et ses conséquences.

Le krach de 1929 est une crise boursière qui se déroula au New YorkStock Exchange entre le 24 octobre etle 29 octobre 1929. Cet événementmarqua le début de la Grande Dépres-

sion, la plus grande crise économi-que du XXe siècle. Les jours-clés du krach ont hérité de sur-noms distincts : le 24 octobre est appelé "Jeudi noir", le 28octobre est le "Lundi noir", et le 29 octobre le "Mardi noir".Le 31 octobre 1938, les dirigeants du NYSE déploient un pro-gramme pour améliorer la protection des investisseurs et re-gagner la confiance des épargnants.D’ailleurs, depuis le 1er octobre 1934, les échanges sont sur-veillés comme les autres échanges de valeurs sur le territoirenational par la Commission des opérations de bourse

américaine, composée alors d'un président et de 33 membres de conseil.

La bourse de Wall Street aujou-

rd’hui: la première bourse du

monde

Après des années de contrôles des marchés financiers par lesautorités (en application des lois de Bretton-Woods notam-ment), Reagan et Thatcher changent la donne dans les années1980: la dérégulation, le décloisonnement des marchés profiteaux bourses qui ne cessent de gonfler...Mais le 19 octobre 1987, le Dow Jones chute de 22,6 %. C'estla plus forte baisse enregistrée en une journée dans l'histoiredes marchés financiers. On appelle ce jour le «deuxièmeLundi noir».Le 27 octobre 1997, à la suite d'une baisse de 554,26 pointsde l'indice du Dow Jones, les fonctionnaires en charge ducommerce font appel pour la première fois au «disjoncteur»pour faire cesser les échanges. Cette décision a été très contro-versée, ce qui a entraîné un remplacement rapide de cetterègle. Désormais, dès que l'indice chute de 10 %, 20 %, voire30 %, la bourse ferme alors temporairement. Cette fermeturepeut durer une heure et, dans certains cas, les échanges sontclos pour le reste de la journée.Nénanmoins la bourse de New York réserve toujours des sur-prises et dans les années 2000... vient la période de forte spé-culation sur les nouvelles technologies, la fameuse «BulleInternet» (2000-2001) qui prendra fin avec les attentats du 11septembre 2001.Le NYSE est fermé du 11 au 17 septembre 2001 en raison deces attentats, ce qui induit bien sûr des pertes énormes pourcette place boursière.Le 6 décembre 2005, le bureau de la bourse de New York ap-prouve la fusion avec Archipelago, le NYSE perdant son statutde société à but non lucratif et devenant une société anonyme.Il en ressort alors le 8 mars 2006 une nouvelle société, leNYSE Group.Le 1er juin 2006, le NYSE Group et Euronext fusionnent pourformer NYSE-Euronext.La suite, vous la connaissez, la bourse s’effondre à nouveauen 2008-2009 et on reparle de régulation, et c’est reparti pourun tour...Sarah Tenenbaum