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Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité Valerie Yankey-Wayne Outil 4 Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest DCAF DCAF un centre pour la sécurité, le développement et l’état de droit

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Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Valerie Yankey-Wayne

Outil 4

Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest

DCAFDCAFun centre pour la sécurité,le développement etl’état de droit

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Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Valerie Yankey-Wayne

DCAFDCAFun centre pour la sécurité,le développement etl’état de droit

Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest

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À propos de l’auteureValerie Yankey-Wayne est titulaire d’un diplôme de troisième cycle en droit international et en sciences politiques de l’Université de Cambridge (Royaume-Uni). Elle dispose d’une longue expérience en matière de suivi et d’évaluation axés sur les résultats des programmes de réforme du secteur de la sécurité, acquise dans plus de 20 pays en Afrique et dans les Caraïbes. Valerie Yankey-Wayne a collaboré avec des gouvernements et des organisations régionales telles que l’Union africaine, la CEDEAO, la Ligue des États arabes et l’Union européenne, notamment dans le domaine de la formation, ainsi que pour l’élaboration de directives et de documents politiques et stratégiques sur la gestion des conflits et la réforme du secteur de la sécurité. Elle a participé à la rédaction et à la négociation de protocoles internationaux et régionaux relatifs au contrôle des armements et à la gestion des conflits et a publié de nombreux ouvrages sur le sujet. Valerie Yankey-Wayne est actuellement membre du Groupe d’experts des Nations Unies sur le contrôle des armements. Elle est aussi une experte de haut niveau en matière de réforme du secteur de la sécurité pour l’EPES Mandala Consulting et membre du Réseau africain pour le secteur de sécurité.

Éditrice principale : Ornella Moderan Assistante d’édition : Lisa BoströmConseillers éditoriaux : Kossi Agokla et Fabrice Ramadan

Comité éditorial Emma Birikorang, Abdourahmane Dieng, Eboe Hutchful et Christophe Kougniazonde.

RemerciementsL’auteure et les éditeurs tiennent à remercier les personnes suivantes pour leurs précieuses contributions à l’élaboration de cet Outil : Jeremy Astill-Brown, Ibrahim Bangura, Scott Deely, Anja Ebnöther, Mpako Foaleng, Jolie-Ruth Morand, Céline Nerny, Baly Ouattara, Daniel de Torres, Okey Uzoechina et Alwin Van den Boogaard.

DCAFLe Centre pour le contrôle démocratique des forces armées – Genève (DCAF) est une fondation internationale créée en 2000. Il s’agit d’une institution de premier plan à l’échelle mondiale dans les domaines de la bonne gouvernance et de la réforme du secteur de la sécurité (RSS). En Afrique, le DCAF soutient les efforts des organisations régionales, institutions nationales et acteurs non gouvernementaux soucieux d’améliorer l’efficacité et la redevabilité du secteur de la sécurité.

Photo de couverture : UNDP, 2007Traduction : Salvatore Saguès, Sara Dezalay et Géraldine ChantegrelConception graphique : Alice Lake-Hammond (www.alicelh.co)

ISBN: 978-92-9222-361-8

© DCAF 2015

Extrait à citer comme suit : Valerie Yankey-Wayne, « Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité », in Ornella Moderan (dir.), Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest (Genève : DCAF, 2015).

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À propos de la Boîte à Outils

Qu’est-ce que la Boîte à Outils ?

Cette publication fait partie de la Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest. L’objectif de cette ressource est de soutenir la mise en œuvre du cadre normatif régional de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) relatif à la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité. En apportant des conseils et orientations pratiques inspirés de l’expérience régionale et adaptés au contexte ouest-africain, la Boîte à Outils vise à faciliter la conception de politiques, ainsi que la mise en œuvre et la gestion des processus de RSS au niveau national.

À qui s’adresse la Boîte à Outils ?

La Boîte à Outils est conçue pour servir de ressource à la Commission de la CEDEAO et à l’ensemble des parties prenantes nationales au sein des États membres de la CEDEAO, incluant l’Exécutif, le Parlement, le pouvoir judiciaire, les institutions civiles chargées du contrôle du secteur de la sécurité et la société civile. Elle s’adresse également aux autres acteurs impliqués dans les processus de RSS, tels que les partenaires internationaux.

Comment la Boîte à Outils est-elle organisée ?

La Boîte à Outils se compose de huit publications thématiques, appelées Outils :

Outil 1 : Leadership politique et dynamique endogène des processus de réforme du secteur de la sécurité

Outil 2 : La programmation de la réforme du secteur de la sécurité

Outil 3 : Bonne gouvernance financière des institutions de défense et de sécurité

Outil 4 : Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Outil 5 : Le contrôle parlementaire du secteur de la sécurité

Outil 6 : Le rôle de la société civile dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité

Outil 7 : La place des prestataires non étatiques de justice et de sécurité dans la réforme du secteur de la sécurité

Outil 8 : La place du genre dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité

Qui est à l’origine du projet ?

La Boîte à Outils a été élaborée par le Centre pour le contrôle démocratique des forces armées – Genève (DCAF) à la demande de la CEDEAO.

Les Outils sont essentiellement rédigés par des experts ouest-africains et ont été examinés par un Comité éditorial composé de chercheurs et de praticiens de renommée mondiale. Les membres de ce Comité sont des spécialistes ouest-africains de la réforme et de la gouvernance du secteur de la sécurité qui possèdent une longue expérience et une excellente connaissance de la région.

La production de la Boîte à Outils a été possible grâce au soutien financier des ministères des Affaires étrangères du Royaume de Norvège et de la Confédération suisse.

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Liste des encadrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v

Sigles et acronymes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vi

1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

2. Pertinence du soutien extérieur au processus de RSS en Afrique de l’Ouest. . . . . . . . . . . . . 32.1. Qu’est-ce que la réforme du secteur de la sécurité ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

2.2. Quels sont les défis du financement national de la RSS ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

2.3. Pourquoi la communauté internationale fait-elle preuve d’une volonté accrue de soutenir les processus de RSS ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

3. Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113.1. Les défis liés à la souveraineté nationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

3.1.1. La limitation de l’autonomie en matière de politiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

3.1.2. Les conditionnalités imposées par les partenaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

3.1.3. L’agenda des acteurs extérieurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

3.1.4. Les risques de divulgation d’informations confidentielles relatives à la défense et à la sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

3.2. Les défis liés à la viabilité et à l’indépendance financière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

3.2.1. Le risque de dépendance financière et son impact sur la définition des politiques . . . . . . 16

3.2.2. Le risque des accords de financement à durée indéterminée pour la pérennité de la RSS . . 17

3.2.3. Le risque des partenariats à court terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

3.2.4. Le risque de non-respect des engagements et de retrait de partenaires . . . . . . . . . . . . . 18

3.3. Les défis liés aux capacités institutionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

3.3.1. Les coûts de transaction élevés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

3.3.2. La duplication des efforts due au manque de coordination des procédures . . . . . . . . . . . 21

4. Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS . . . . . . . . . . . . . . . 254.1. Les principes fondamentaux pour une coopération efficace au service du développement . . . . 25

4.2. Garantir le caractère endogène des réformes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

4.2.1. L’assistance en matière de RSS doit répondre à une demande . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

4.2.2. Toute demande d’assistance en matière de RSS doit reposer sur une évaluation nationale des besoins et des lacunes du pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

4.2.3. La RSS doit adopter un rythme adapté au contexte national . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

4.3. Garantir l’alignement des partenaires sur des systèmes nationaux fiables . . . . . . . . . . . . . . . 29

4.3.1. L’alignement des partenaires sur les politiques nationales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

4.3.2. L’alignement des partenaires sur les systèmes nationaux de gestion . . . . . . . . . . . . . . . 30

4.4. Encourager l’harmonisation entre les partenaires extérieurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

4.4.1. Améliorer la coordination des différents partenaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

4.4.2. Répartir les responsabilités en fonction des avantages comparatifs de chaque partenaire extérieur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

4.4.3. Bâtir des synergies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

Table des matières

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4.5. Assurer une gestion axée sur les résultats dans un cadre national . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

4.5.1. Comprendre les cadres d’évaluation des performances . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

4.5.2. Favoriser une culture institutionnelle de la gestion axée sur les résultats . . . . . . . . . . . 33

4.5.3. Élaborer des outils efficaces pour une gestion axée sur les résultats . . . . . . . . . . . . . . 33

4.6. Renforcer la confiance par le biais de mécanismes de redevabilité mutuelle efficaces . . . . . . . . 34

4.6.1. La redevabilité envers les mandants respectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4.6.2. La redevabilité conjointe envers les parties prenantes nationales . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4.6.3. La redevabilité réciproque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4.7. La coordination multiniveaux comme outil efficace de gestion des partenariats . . . . . . . . . . . 36

5. Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS . . . . . . . 415.1. Répartir clairement les mandats et les responsabilités pour l’établissement de partenariats . . . . 41

5.2. Comprendre l’environnement de l’assistance extérieure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

5.2.1. Identifier les sources potentielles de financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

5.2.2. Cartographier les profils et les domaines d’intérêt des partenaires potentiels . . . . . . . . . 45

5.2.3. Comprendre les modalités de financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

5.3. Appréhender l’environnement de l’assistance extérieure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

5.3.1. Choisir les modalités de financement en fonction des spécificités nationales . . . . . . . . . 51

5.3.2. Prendre en compte les préférences des partenaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

5.3.3. Soutenir une approche intégrée en encourageant le recours à l’appui budgétaire général plutôt que le financement de projets isolés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

5.4. Renforcer la crédibilité pour améliorer la mobilisation de ressources . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

5.4.1. Établir un cadre de partenariat d’égal à égal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

5.4.2. Inscrire l’assistance extérieure dans le cadre d’un financement national de la RSS . . . . . . 53

5.4.3. Renforcer les capacités de gestion au niveau national . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

5.5. Engager des négociations avec les partenaires extérieurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

5.5.1. Décliner le programme national de RSS en une documentation adaptée à chaque partenaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

5.5.2. Élaborer des requêtes de financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

5.5.3. Conduire la négociation et formaliser l’accord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

5.5.4. Répartir les ressources allouées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

6. Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés . 616.1. Mettre l’accent sur les réformes de la gouvernance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

6.2. La réforme des services de renseignement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

6.3. L’égalité hommes-femmes et la RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

6.4. La gestion des finances publiques liées au secteur de la sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

6.5. Le contrôle externe et les mécanismes de redevabilité démocratique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

6.5.1. Favoriser la redevabilité en soutenant le renforcement des capacités des acteurs du contrôle externe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

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iv

6.5.2. Favoriser la redevabilité faisant de la lutte contre la corruption dans le secteur de la sécurité une composante à part entière des programmes de RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

6.5.3. Promouvoir la transparence en favorisant l’accès à l’information . . . . . . . . . . . . . . . . . 69

6.6. Les prestataires de services de sécurité et de justice traditionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

7. Le rôle de la CEDEAO . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 737.1. Fournir des orientations normatives sur les relations avec les partenaires internationaux . . . . . 73

7.2. Renforcer l’efficacité du soutien extérieur à la RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

7.3. Explorer la possibilité de créer un « portefeuille dédié » au financement de la RGSS relevant de la direction financière du département Affaires politiques, paix et sécurité de la CEDEAO . . . . . . . . . 75

Aide-mémoire : Vers une mobilisation et une gestion efficaces des partenariats extérieurs en soutien à la RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

Ressources additionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80

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v

Liste des encadrés

Encadré 1 : Définitions de la RSS dans le Cadre d’orientation de l’Union africaine (2013) . . . . . . . . 3

Encadré 2 : Suprématie de l’autorité civile et loyauté à l’autorité constitutionnelle . . . . . . . . . . . . 4

Encadré 3 : Qu’est-ce que la réforme et la gouvernance démocratique du secteur de la sécurité ? Définitions proposées par la CEDEAO . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Encadré 4 : Quelques exemples de soutien extérieur aux processus de RSS en Afrique de l’Ouest . 10

Encadré 5 : Comprendre les défis politiques auxquels sont confrontés les gouvernements partenaires qui soutiennent des processus de RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

Encadré 6 : Un financement national pour garantir une définition nationale des priorités . . . . . . 17

Encadré 7 : Le financement extérieur n’est jamais garanti . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

Encadré 8 : Prendre en compte le poids de l’assistance extérieure sur le budget national . . . . . . 20

Encadré 9 : Les lacunes fréquentes du soutien extérieur à la RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

Encadré 10 : Lignes directrices relatives à l’appui extérieur à la RSS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

Encadré 11 : Bref rappel : leadership national et dynamique endogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

Encadré 12 : Le rôle des acteurs extérieurs pour soutenir le renforcement des systèmes nationaux . 31

Encadré 13 : Élaborer un cadre solide de redevabilité des partenaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

Encadré 14 : Mettre en place des groupes de travail inclusifs pour le suivi des actions complexes . 39

Encadré 15 : Risques liés à l’absence de stratégie de mobilisation de ressources . . . . . . . . . . . . . 43

Encadré 16 : Quels partenaires potentiels peuvent soutenir la mise en œuvre de la RSS en Afrique de l’Ouest ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

Encadré 17 : Éléments à prendre en considération pour cartographier les partenaires éventuels . . 46

Encadré 18 : Avantages et inconvénients de différents types d’instruments financiers . . . . . . . . . . 48

Encadré 19 : Le concept d’optimisation des ressources . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50

Encadré 20 : Apparier les contributions extérieures au financement national grâce au financement de projets communs et au cofinancement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

Encadré 21 : Rééquilibrer l’allocation des fonds entre les dimensions tangibles et intangibles de la RSS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

Encadré 22 : Importance de la réforme des services de renseignement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

Encadré 23 : La RGSS et le genre dans le Cadre de politique de la CEDEAO . . . . . . . . . . . . . . . . 65

Encadré 24 : Le contrôle démocratique du secteur de la sécurité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

Encadré 25 : Exemples de contributions de la CEDEAO aux initiatives visant à assurer la sécurité transfrontalière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

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vi

Sigles et acronymes

ABG Appui budgétaire général

ABS Appui budgétaire sectoriel

APS Appui aux programmes sectoriels

APD Aide publique au développement

CEDEAO Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest

GSS Gouvernance du secteur de la sécurité

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

ONU Organisation des Nations Unies

RGSS Réforme et gouvernance du secteur de la sécurité

RSS Réforme du secteur de la sécurité

UA Union africaine

UE Union européenne

UEMOA Union économique et monétaire ouest-africaine

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La réforme du secteur de la sécurité (RSS) est un processus hautement politique et extrêmement complexe au point de vue technique, qui exige des ressources humaines et financières considérables. La gestion de ces ressources est, en elle-même, une question politiquement sensible et d’une grande complexité technique, en ce qu’elle requiert de définir un programme d’action commun en matière de sécurité, de prévoir les processus budgétaires nécessaires à sa mise en œuvre et de créer des mécanismes fiables pour garantir la traçabilité des dépenses de sécurité. Dans de nombreux cas, afin de recueillir des financements complémentaires, ce processus de réforme nécessite également de nouer des partenariats constructifs1 avec des acteurs aussi bien internes qu’externes, sur la base d’un leadership au niveau national et d’un principe de redevabilité mutuelle. S’agissant de la RSS, l’incapacité à répondre aux besoins de réforme de manière efficace et transparente peut avoir des impacts négatifs sur la sécurité de l’État et de la population.

Les États d’Afrique de l’Ouest, dont les capacités financières sont limitées, peuvent rechercher le soutien de partenaires bilatéraux ou multilatéraux pour financer leurs processus de RSS. Si ce soutien extérieur constitue une opportunité pour les États membres de la CEDEAO qui souhaitent s’engager dans des programmes de RSS, la mobilisation et la gestion d’un tel appui soulèvent néanmoins des défis politiques, stratégiques et techniques. À cet égard, il est particulièrement important d’opérer un équilibre entre, d’une part, la valeur ajoutée de partenariats pouvant pallier le manque de ressources pour financer un processus national de RSS et, d’autre part, la nécessité de maintenir une dynamique endogène et un leadership national du processus de réforme, quelle que soit l’origine des fonds mobilisés de manière complémentaire. En effet, les États invoquent souvent leur souveraineté pour émettre des réserves quant à l’établissement de partenariats internationaux susceptibles de conduire à des ingérences dans des domaines clés de la politique intérieure, tels que les questions de défense et de sécurité.

Les directives internationales sur la coopération au développement ont fortement contribué à encadrer cet aspect des relations entre Etats. Toutefois, ils n’ont accordé qu’une attention limitée aux questions relatives à la RSS et à la gouvernance du secteur de la sécurité (GSS), en abordant ce domaine principalement du point de vue des prestataires d’une assistance internationale. Pourtant, l’application des principes relatifs à l’efficacité des partenariats pour le développement, de manière à répondre aux besoins de chaque contexte, peut offrir aux États qui s’engagent dans un processus de RSS un cadre viable pour gérer efficacement le soutien extérieur à cette réforme.

Le présent Outil part du constat qu’il existe un corpus relativement riche de directives et de recommandations à l’endroit des acteurs internationaux désireux de soutenir des processus de RSS dans

Introduction1

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le cadre de leur programme d’assistance extérieure. En revanche, les pays qui mettent en œuvre de telles réformes disposent de peu de conseils pratiques quant à la manière de gérer les relations avec les partenaires extérieurs. Conscient des défis uniques auxquels les États d’Afrique de l’Ouest peuvent être confrontés lorsqu’ils étendent leurs relations de coopération internationale au domaine de la RSS, le présent Outil vise à fournir aux États membres de la CEDEAO des conseils pratiques pour gérer l’assistance extérieure en matière de RSS de manière à soutenir l’approche nationale, garantir un bon rapport coût-efficacité, respecter le principe de redevabilité mutuelle et favoriser des résultats durables. Cet Outil aborde également l’appui apporté par la CEDEAO à ses États membres pour gérer leurs relations avec leurs pays et institutions partenaires, et ce, dans le respect des normes régionales relatives à une bonne gouvernance du secteur de la sécurité et des normes internationales assurant l’efficacité des partenariats de développement.

Étant donnée sa thématique, cet Outil est principalement destiné aux administrations nationales des États membres de la CEDEAO qui sont spécifiquement chargées de planifier, gérer et superviser l’allocation des ressources nationales et extérieures à la RSS. Cependant, il peut également être utile aux institutions qui assurent un contrôle indépendant du processus de réforme et sont impliquées dans le suivi du programme de sécurité nationale, du budget ou des politiques nationales en matière de coopération (par exemple les médias, les centres de recherche universitaires et les observatoires et organisations de la société civile).

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2.1. Qu’est-ce que la réforme du secteur de la sécurité ?

La CEDEAO définit la RSS comme « le processus par lequel les pays formulent ou orientent les politiques, les structures et les capacités des institutions et des groupes engagés dans le secteur de la sécurité, de façon à les rendre plus efficaces et efficients, plus responsables et attentifs au contrôle démocratique, ainsi qu’aux besoins de la population en matière de sécurité et de justice2. » Voir aussi l’encadré 1 pour les définitions adoptées par l’Union africaine (UA).

Pertinence du soutien extérieur au processus de RSS en Afrique de l’Ouest

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Encadré 1 : Définitions de la RSS dans le Cadre d’orientation de l’Union africaine (2013)

3. Sécurité : entendue mais pas limitée au sens de la définition de la sécurité donné dans la Déclaration solennelle sur la Politique commune africaine de défense et de sécurité (PCADS). La PCADS donne une définition multidimensionnelle de la sécurité qui englobe la notion traditionnelle centrée sur la sécurité de l’État relative à sa survie et à sa protection contre toute agression extérieure par des moyens militaires, ainsi que la notion non militaire de la sécurité de la personne, basée quant à elle sur les impératifs politiques, économiques, sociaux et environnementaux, en plus des droits de l’Homme.

4. Secteur de la sécurité : les composantes du secteur de la sécurité varient suivant le contexte de chaque pays. Mais de manière générale, et dans le contexte africain, le secteur de la sécurité comprend les personnes, les groupes et les institutions qui sont responsables d’assurer les prestations, la gestion et le contrôle de la sécurité des personnes et de l’État. Il s’agit, de façon non exhaustive, de ceux qui suivent :

(a) [Les] institutions primaires de sécurité : telles que les forces armées, la police, la gendarmerie et les autres agences d’application de la loi, la garde présidentielle, les unités antiterroristes, les services de gestion des frontières, les douanes et les autorités de l’immigration, ainsi que tous les autres services, bureaux/directions mis en place par un État membre ;

(b) Les institutions spécialisées de renseignement et de sécurité : telles que celles qui sont chargées de rassembler et d’exploiter les renseignements en vue de préserver la souveraineté et la sécurité de l’État, et d’en défendre les intérêts vitaux. Ces institutions peuvent être engagées dans des activités telles que le contre-espionnage, la lutte contre le terrorisme et la lutte contre toutes les autres formes de crime organisé ;

(c) [Les] organismes publics de contrôle et de gestion : tels que les ministères de l’Exécutif, de la Justice, le corps législatif, les organes consultatifs sur la sécurité nationale, les sous-comités parlementaires,

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4 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

L’agenda de la RSS s’appuie sur un constat clair : pour assurer une paix, une sécurité et un développement durables, le secteur de la sécurité doit répondre à certaines exigences. Notamment, il doit:

• répondre aux besoins de sécurité réels de l’État et de la population ;

• fournir et garantir des services de justice et de sécurité efficaces et accessibles à l’ensemble des hommes, femmes, garçons et filles ;

• offrir aux hommes et aux femmes des chances égales de contribuer à la sûreté et à la sécurité publiques à l’échelle locale et nationale ;

• respecter les droits humains et l’état de droit, notamment en garantissant strictement la séparation des pouvoirs et la subordination à l’autorité civile (voir encadré 2) ;

• présenter un haut niveau de professionnalisme, notamment en agissant de manière éthique, en faisant preuve d’intégrité et en se soumettant au contrôle démocratique.

Le principal objectif de la RSS est d’améliorer la GSS, qui « se réfère aux structures, processus, valeurs et attitudes qui déterminent les décisions relatives à la sécurité et à leur mise en œuvre3. »

Encadré 2 : Suprématie de l’autorité civile et loyauté à l’autorité constitutionnelle

Article 2 : Suprématie de l’autorité civile Les forces armées et services de sécurité sont à la disposition de l’autorité politique constitutionnellement établie et subordonnés aux autorités constitutionnellement et démocratiquement élues. Les autorités et les groupes politiques doivent se garder d’interférer indûment dans les opérations des forces armées et services de sécurité comme d’y étendre leur politique partisane. Le personnel des forces armées et services de sécurité observe une stricte neutralité vis-à-vis des questions politiques.

Article 13 : Loyauté à l’autorité constitutionnelle Le personnel des forces armées et services de sécurité doit, en tout temps, être discipliné et loyal envers l’État ; il doit obéissance et loyauté à l’autorité constitutionnelle démocratiquement élue en tout ce qu’elle commandera, en conformité avec les lois et règlements de l’État.

Source : Code de conduite des forces armées et services de sécurité de la CEDEAO, 2011.

les organes de lutte contre la corruption, les autorités coutumières, le Parlement panafricain et les organes parlementaires régionaux ;

(d) [Les] institutions chargées de la justice et de l’état de droit : telles que les institutions judiciaires, les établissements pénitentiaires et autres installations correctionnelles, [le Ministère de la Justice], le Bureau du Procureur général, les Médiateurs, les systèmes traditionnels et transitionnels de justice, les commissions des droits de l’Homme, les cours et tribunaux ;

(e) [Les] unités civiles d’intervention d’urgence : les services tels que ceux des secouristes, des sapeurs-pompiers, de contrôle des situations d’émeutes, de gestion des catastrophes naturelles et des unités chargées de la protection des ressources naturelles ; et

(f) Les organes non étatiques de sécurité : tels que les compagnies privées de sécurité, les autorités informelles, traditionnelles et coutumières et autres, tel que les États membres pourraient en décider.

5. Réforme du secteur de la sécurité (RSS) : Dans le présent cadre d’orientation, RSS signifie le processus par lequel les États formulent ou réorientent les politiques, les structures et les capacités des institutions et des groupes engagés dans le secteur de la sécurité, en vue de les rendre plus efficaces, plus efficients et [de leur permettre d’être réceptifs au contrôle démocratique] tout en étant attentifs aux besoins de sécurité et de justice de la population. Le présent cadre d’orientation prend note de ce que la « réforme du secteur de la sécurité » a quelquefois l’appellation de gouvernance du secteur de la sécurité, transformation du secteur de la sécurité, développement du secteur de la sécurité, examen du secteur de la sécurité [ou] réforme de la sécurité et de la justice.

Source : Union africaine, Cadre d’orientation sur la réforme du secteur de la sécurité, 2013.

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5Pertinence du soutien extérieur au processus de RSS en Afrique de l’Ouest

Pour assurer l’efficacité et la redevabilité du secteur de la sécurité, il est essentiel de faire en sorte que les institutions de sécurité répondent de leurs actions tant face aux mécanismes de contrôle internes que face aux organes de surveillance démocratique externes. Le projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité de la CEDEAO définit la gouvernance démocratique du secteur de la sécurité comme « la gestion et le contrôle du secteur de la sécurité, sur la base des principes et valeurs de démocratie, dans l’intérêt des populations. Elle nécessite la séparation des pouvoirs, ainsi qu’une approche participative et inclusive, permettant aux citoyens, à travers leurs représentants choisis de manière régulière et légale, de participer au processus de prise de décision, à la gestion et au contrôle des activités et des fonctions de l’État, dans le secteur de la sécurité » (article 5). Voir aussi l’encadré 3.

Ce projet de Cadre de politique précise également que « si la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité (RGSS) est une composante essentielle de la prévention des conflits, la CEDEAO reconnaît qu’elle devrait également s’inscrire dans un programme de réforme plus large concernant la promotion des droits humains, de l’état de droit, de l’établissement, du maintien et de la consolidation de la paix, ainsi que du développement durable » (article 10).

Dans la pratique, cela signifie que la RSS vise à la fois à renforcer la capacité opérationnelle et à consolider l’intégrité et la redevabilité du secteur de la sécurité dans son ensemble. La RSS reconnaît également le rôle important des acteurs de la société civile dans la gouvernance démocratique du secteur de la sécurité.

Chaque pays dispose d’un secteur de la sécurité unique, qui est le fruit d’une histoire, d’un contexte et d’une culture à nul autre pareil. Pour être pérennes, les réformes dans ce domaine doivent être adaptées à ces spécificités. Et pour garantir la mise en place d’un secteur de la sécurité légitime, digne de confiance et viable, qui prend en compte les besoins réels de sécurité de tous les secteurs de la population, ces réformes doivent résulter d’une initiative interne et être mues par une dynamique endogène.

La RSS est un processus de changement qui touche à des valeurs nationales fondamentales. À ce titre, elle vise à renforcer – voire à introduire – une nouvelle approche de la gouvernance de la sécurité, en se fondant sur les valeurs démocratiques, des mécanismes de gestion transparents et des relations constructives avec la population. Un tel processus de changement ne peut pas être imposé de l’extérieur ; il doit se développer à partir d’un débat national sur le type d’architecture de sécurité auquel tous les segments de la population aspirent. Dès lors, le rôle des acteurs extérieurs ne doit pas être de piloter la RSS, mais plutôt de soutenir les autorités nationales qui conduisent ce processus.

Encadré 3 : Qu’est-ce que la réforme et la gouvernance démocratique du secteur de la sécurité ? Définitions proposées par la CEDEAO

Le projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité de la CEDEAO propose les définitions suivantes :

Réforme du secteur de la sécurité : dans le présent Cadre de Politique, le terme « RSS » désigne le processus par lequel les pays formulent ou orientent les politiques, les structures et les capacités des institutions et des groupes engagés dans le secteur de la sécurité, de façon à les rendre plus efficaces et efficients, plus responsables et attentifs au contrôle démocratique, ainsi qu’aux besoins de la population en matière de sécurité et de justice.

Gouvernance démocratique du secteur de la sécurité : désigne la gestion et le contrôle du secteur de la sécurité, sur la base des principes et valeurs de démocratie, dans l’intérêt des populations. Elle nécessite la séparation des pouvoirs, ainsi qu’une approche participative et inclusive, permettant aux citoyens, à travers leurs représentants choisis de manière régulière et légale, de participer au processus de prise de décision, à la gestion et au contrôle des activités et des fonctions de l’État dans le secteur de la sécurité.

Source : CEDEAO, Projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité, articles 4-5.

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6 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

2.2. Quels sont les défis du financement national de la RSS ?

Financer les coûts de la RSS sur fonds propres est un moyen, pour les autorités d’un pays, d’affirmer le leadership national des réformes entreprises et de démontrer que l’État prend pleinement ses responsabilités en la matière. Toutefois, compte tenu des capacités budgétaires des pays d’Afrique de l’Ouest, le financement national peut se révéler difficile, notamment pour les raisons suivantes :

• Il faut couvrir simultanément plusieurs niveaux de coûts liés à la sécurité.

La RSS est un processus coûteux, qui exige des États qui s’y engagent un effort budgétaire intense et de longue haleine. Les besoins budgétaires associés à la RSS se répartissent sur trois niveaux, distincts mais complémentaires, qui opèrent simultanément. En effet, il s’agit de financer tout à la fois :

(a) Les structures et activités ordinaires du secteur de la sécurité, ce qui suppose la prise en charge des budgets de fonctionnement des forces armées, de la police, de la gendarmerie, des services de renseignement intérieurs et extérieurs, des services de contrôle des frontières, des tribunaux et du Parquet, de l’administration pénitentiaire, etc. , y compris les coûts de fonctionnement de leurs ministères de tutelle (ministères de la Défense, de la Sécurité et de la Justice), sans omettre les coûts afférents aux mécanismes de contrôle internes comme les services d’inspection, les services d’audit interne, les services anticorruption ou les cours martiales.

(b) Les mécanismes de gouvernance qui assurent le contrôle démocratique continu du secteur de la sécurité. Ces mécanismes comprennent généralement des organes parlementaires (tels que la commission de la défense et de la sécurité, la commission du budget et des finances ou toute autre commission d’enquête parlementaire compétente), les institutions indépendantes de supervision (tels que le Médiateur et la commission nationale des droits humains, le Bureau du Contrôleur général ou la Cour des comptes), l’organe indépendant de lutte contre la corruption, le pouvoir judiciaire et tout autre organe de surveillance doté d’un mandat spécifique. Pour exercer leurs fonctions de contrôle de manière efficace, ces institutions doivent être dotées des ressources suffisantes ; sinon, cela compromet toute possibilité d’amélioration significative de la gouvernance du secteur de la sécurité.

(c) Le processus de réforme en tant que tel, qui vise à redéfinir les politiques de sécurité, les institutions et les structures de gouvernance afin de renforcer leur efficacité et leur redevabilité. La réforme en elle-même requiert des ressources budgétaires spécifiques afin de financer la réalisation d’une évaluation des besoins de sécurité, l’organisation de consultations nationales sur la sécurité, l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme national de RSS de grande envergure ou d’initiatives de réformes plus limitées, le redimensionnement de l’architecture de sécurité nationale, ou encore la modernisation des systèmes de retraite du secteur de la sécurité.

• Il faut trouver un équilibre entre le financement des réponses étatiques aux besoins de sécurité et celui d’autres besoins sociaux et institutionnels.

Vu leur situation économique, il peut être très difficile pour les États ouest-africains d’assumer ces différents niveaux de coûts liés à la sécurité tout en répondant à d’autres besoins essentiels, tels que la fourniture de services sociaux de base. En effet, selon le classement de la Banque mondiale, la plupart de ces États figurent parmi les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire4. Les États membres de la CEDEAO présentent à la fois des ressources nationales limitées et d’immenses besoins de développement qui requièrent des niveaux élevés d’investissements publics et privés. De ce fait, ils éprouvent des difficultés pour financer leur développement tout en assurant la mise en œuvre d’un processus de RSS adapté aux besoins de gouvernance et de sécurité de l’État et de la population.

Il est essentiel pour ces États de trouver un équilibre adéquat entre les besoins de financement de la RSS et le financement des secteurs de développement socioéconomiques. Les autorités nationales chargées des arbitrages budgétaires doivent se montrer vigilantes face au danger de voir les enjeux sécuritaires reléguer les défis de développement au second plan. Bien au contraire, il faut tenir compte du fait que les risques d’insécurité peuvent s’aggraver lorsque les besoins sociaux élémentaires de la population ne sont pas satisfaits. Il existe de multiples exemples de situations dans lesquelles la faiblesse des services d’éducation, de santé et d’emploi a contribué à une augmentation de la violence, de la criminalité et de la radicalisation dans certains segments de la population.

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7Pertinence du soutien extérieur au processus de RSS en Afrique de l’Ouest

• Le processus de RSS requiert une planification nationale à long terme.

La RSS est un effort de longue haleine qui, au lieu d’améliorer la situation, peut finir par l’aggraver si les mesures entreprises ne sont pas menées à leur terme. Il s’agit d’un processus de changement qui nécessite du temps pour s’enraciner dans la société et pour générer un impact durable sur les mécanismes régissant le secteur de la sécurité. Le financement de la RSS doit donc être organisé sur le long terme et par le biais de mécanismes durables.

Les dispositifs de financement pluriannuels permettent d’assurer un financement national adéquat des initiatives de RSS à moyen et à long terme avec une certaine prévisibilité. Cependant, ces systèmes peuvent s’avérer extrêmement difficiles à appliquer lorsque les budgets nationaux sont soumis à de fortes fluctuations d’une année sur l’autre.

Dans les pays caractérisés par une situation macroéconomique instable, qui sont soumis à de fréquentes fluctuations de croissance et de revenus et dont les systèmes fiscaux sont peu performants, il peut être difficile de planifier des investissements à long terme visant à améliorer les structures de prestation des services de sécurité et les mécanismes de contrôle connexes. Parmi les nombreux défis auxquels ils sont confrontés, ces États peuvent être exposés à une volatilité incontrôlée des taux de change ; de même, leurs recettes fiscales peuvent sujettes aux variations imprévisibles de sources de revenus comme le pétrole ou d’autres ressources naturelles fortement soumises aux fluctuations des prix mondiaux. Ces facteurs peuvent compromettre le financement durable des politiques publiques en général, y compris la RSS.

• Il faut gérer les attentes.

L’expérience montre à quel point il est important que les autorités nationales restent vigilantes et réactives face aux attentes relatives au processus de réformes. Les attentes non satisfaites, y compris d’ordre budgétaire, peuvent générer des frustrations et susciter des manœuvres de sabotage du processus. Cela peut compromettre à terme les améliorations de la GSS voire, plus largement, la situation sécuritaire du pays.

Certains acteurs peuvent s’attendre à ce que le processus de réforme améliore leur propre situation financière, par exemple par le biais d’une réforme du système de retraite militaire ou d’une réévaluation des barèmes de rémunération dans le cadre d’une révision des politiques de ressources humaines. L’exemple de la Guinée-Bissau illustre comment des attentes déçues peuvent déclencher la résistance d’acteurs locaux influents. En l’occurrence, de nombreux militaires de haut rang ont émis de sérieuses réserves à l’égard d’un programme de RSS antérieur, qui avait été piloté par des acteurs internationaux. Leur doléance principale résidait dans le fait que les fonds alloués aux services de consultants externes auraient pu être utilisés pour consolider leur régime de retraite.

Lorsque la nature de la RSS n’est pas bien expliquée, les institutions de sécurité peuvent également s’attendre à ce que cette réforme entraîne une hausse de leur budget de fonctionnement, dans la mesure où la RSS est déclarée priorité nationale. Toutefois, l’expérience montre qu’une augmentation comptable des budgets militaires ne constitue pas nécessairement le moyen le plus efficace d’améliorer les performances des institutions de sécurité.

Il faut donc que les autorités nationales qui pilotent le processus de RSS surveillent attentivement l’émergence d’attentes irréalistes et améliorent la communication sur le processus de réforme, afin de dissiper ce type d’attentes à un stade précoce. Si elles laissent les institutions ou le personnel du secteur de la sécurité nourrir de faux espoirs, cela peut générer des désillusions et engendre une méfiance susceptible de nuire au processus de RSS.

Outre les projections d’individus ou de groupes à l’égard du processus de réforme ceux qui élaborent le programme de RSS nourrissent également des attentes vis-à-vis de cette réforme. Lors de la conception d’un tel programme, il est important de fixer des objectifs stratégiques et opérationnels qui soient réalistes au regard des capacités techniques, institutionnelles et financières de l’État. Certes, le budget prévisionnel de la RSS peut intégrer la perspective d’un soutien extérieur pour compléter le financement national, mais cette hypothèse doit reposer sur une évaluation réaliste de l’attractivité de l’État auprès des partenaires extérieurs, ainsi que de sa capacité à mobiliser des ressources externes.

Pour élaborer un programme de RSS, il faut avoir une vision très claire et faire preuve de réalisme non seulement quant aux efforts budgétaires qu’il peut être nécessaire d’effectuer sur le long terme, mais

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8 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

également quant à l’ampleur et à la nature du soutien extérieur qu’un pays peut raisonnablement espérer obtenir et gérer. Lorsque les coûts estimés des réformes requises sont totalement disproportionnés par rapport aux moyens de l’État, il peut être utile d’identifier, au sein programme d’action, des points d’entrée prioritaires et de se concentrer, dans un premier temps, sur des actions à faible coût et à fort impact, plus en accord avec les capacités de financement de l’État.

• Il faut gérer les résistances au processus.

Pour mener à bien une RSS, les autorités nationales doivent conduire des consultations auprès des professionnels de la sécurité et de la population afin de définir une vision commune de la sécurité, s’accorder sur les objectifs de la réforme, expliquer les arbitrages politiques, négocier et convaincre. Il n’est pas rare que divers acteurs expriment des réticences face au projet de réforme. Pour surmonter ces réticences et susciter une vaste dynamique endogène, il est nécessaire de mener un processus de consultation qui requiert généralement du temps et des ressources, ce qui accroît le coût financier de la RSS.

La RSS exige également de redéfinir les modalités d’allocation du budget de l’État aux institutions de sécurité. Il s’agit là d’un autre défi qui peut entraîner une redistribution des ressources entre les institutions et risque de susciter l’hostilité de certains acteurs face à la diminution ou au recadrage de leurs allocations budgétaires.

La RSS a par ailleurs un impact sur les cultures transactionnelles au sein du secteur de la sécurité, en ce qu’elle vise à assurer une gestion efficace et transparente des ressources nationales, d’une manière qui reflète les priorités convenues. De ce fait, la RSS est susceptible de remettre en question les habitudes individuelles et institutionnelles en matière de gestion financière au sein du secteur de la sécurité. Dans de nombreux cas, la promotion de l’intégrité, de la transparence et de la redevabilité risque de susciter les inquiétudes de certaines parties prenantes nationales, ce qui accroît le besoin d’un engagement politique ferme et de mécanismes efficaces pour gérer le changement.

2.3. Pourquoi la communauté internationale fait-elle preuve d’une volonté accrue de soutenir les processus de RSS ?

Les acteurs internationaux font preuve d’un intérêt et d’une volonté accrus de soutenir les processus de RSS en Afrique de l’Ouest (voir encadré 4). Cette tendance représente une opportunité pour les États membres de la CEDEAO, car elle renforce les possibilités de financement de la RSS dans une région où les ressources limitées.

Plusieurs facteurs contribuent à faire de la RSS un domaine de coopération internationale de plus en plus prioritaire.

• Au fil des ans, la RSS s’est imposée comme un outil majeur de consolidation de la paix et de stabilisation, suscitant ainsi un intérêt national et international.

Pour les États qui s’engagent dans un processus de RSS, comme pour leurs partenaires internationaux, ce type de réformes fait partie intégrante des efforts plus larges de stabilisation, de consolidation

Si rien n’est fait pour dissiper les attentes irréalistes des institutions ou du personnel du secteur de la sécurité, celles-ci peuvent générer une forte désillusion, de la défiance et une résistance qui aurait pu être évitée. Cela peut compromettre la réussite de la RSS.

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9Pertinence du soutien extérieur au processus de RSS en Afrique de l’Ouest

de la paix et de démocratisation à long terme. Selon les conclusions du Forum Afrique sur la RSS, qui s’est tenu à Addis Abeba en novembre 2014, « un bon contrôle, une bonne gestion et une bonne gouvernance du secteur de la sécurité, y compris dans le domaine de la gestion des finances publiques, devraient être des priorités du soutien international5. »

• Il est largement reconnu que les coûts engendrés par un processus de RSS peuvent dépasser la capacité financière de la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest.

La budgétisation et le financement d’un programme de RSS sont d’abord et avant tout une prérogative nationale. Toutefois, étant données les difficultés que les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire peuvent éprouver pour assurer le financement de leur RSS exclusivement à partir du budget national, le rôle des acteurs extérieurs consiste à aider les gouvernements de ces États à répondre à leurs besoins en matière de sécurité, notamment en palliant les déficits de ressources qui ne peuvent pas être comblés par un financement national. Cela contribue à améliorer la capacité de l’État à répondre à ses besoins de sécurité et à ceux de sa population.

• La nécessité d’articuler le programme de développement avec la réponse aux besoins de sécurité de l’État et de la population fait l’objet d’un large consensus ; toutefois, cela exige un équilibre délicat entre les diverses allocations budgétaires.

L’approche fondée sur la sécurité humaine reconnaît que l’état de droit, le développement et la sécurité sont intrinsèquement liés. L’impunité dont bénéficient les auteurs de violations des droits humains, la pauvreté endémique, l’analphabétisme et les autres maux sociaux sont à l’origine d’un large éventail de menaces à la sécurité allant de la violence domestique ou de la criminalité urbaine jusqu’aux violences extrémistes. Par conséquent, s’il est important de relier la RSS au programme national de développement, il existe un risque que cela conduise à axer le développement autour des enjeux de sécurité en faisant basculer des ressources essentielles pour le développement vers le secteur de la sécurité. À long terme, de tels arbitrages peuvent contribuer à aggraver les tensions sociales et entraîner l’émergence ou l’intensification de menaces pour la sécurité alimentées par de fortes frustrations sociales.

En augmentant le volume de ressources disponibles pour mettre en œuvre la politique de sécurité nationale, les partenaires extérieurs contribuent à alléger le fardeau budgétaire global qui pèse sur les États bénéficiaires de cette assistance, ce qui évite que l’allocation de fonds à la RSS porte atteinte au financement d’autres programmes socioéconomiques essentiels.

• Le soutien extérieur à la RSS n’est pas une question de charité, mais constitue au contraire un outil stratégique pour promouvoir la paix et la sécurité mondiales.

Il y a une prise de conscience croissante de l’interdépendance entre les problèmes de sécurité dans la région et leurs implications stratégiques au niveau international. La dynamique de certains conflits récents, tels que les conflits qui ont secoué les pays du bassin du fleuve Mano dans les années 1990 (Guinée, Libéria, Sierra Leone) et la crise de 2012 au Mali, ont montré de manière irréfutable que ce type de situations entraînait une multiplication des risques de sécurité transnationaux et que l’insécurité locale et l’instabilité nationale avaient un impact sur la paix et la sécurité régionales et internationales. En Afrique de l’Ouest, certaines de ces menaces sont de nature transnationale, par exemple la piraterie dans le golfe de Guinée, les activités transfrontalières de traite des êtres humains et de contrebande d’armes et de drogues ou l’émergence de factions terroristes dans le Sahel, le nord du Nigéria et les régions limitrophes. Ces menaces ne concernent pas seulement les pays d’Afrique de l’Ouest à titre individuel, mais ont un impact sur la région et, plus généralement, sur la sécurité mondiale.

En soutenant le renforcement des structures de gouvernance des États d’Afrique de l’Ouest dans le but de consolider leur capacité à répondre efficacement à ces menaces, les partenaires internationaux peuvent contribuer à contenir les menaces stratégiques ayant des implications à l’échelle mondiale, comme le terrorisme et la criminalité transnationale. En tant que telle, l’assistance extérieure aux processus de RSS est profitable aussi bien pour les pays bénéficiaires que pour les partenaires extérieurs.

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• La RSS touche à un éventail de questions de gouvernance plus larges et interconnectées qui peuvent susciter un intérêt particulier auprès des partenaires extérieurs.

En augmentant l’efficacité et la redevabilité des institutions de sécurité, la RSS contribue à améliorer la capacité de l’État à renforcer certaines dimensions de la gouvernance et de la sécurité humaine qui peuvent constituer des priorités dans la politique de coopération internationale des partenaires extérieurs.

Dans le cadre du programme national d’ensemble fixé par le pays qui s’engage dans un processus de RSS, les partenaires extérieurs peuvent souhaiter soutenir certaines composantes spécifiques qui font écho à leurs domaines d’intervention prioritaires. Par exemple, le soutien à un projet de réforme de la police peut permettre à des acteurs extérieurs de consolider tout un éventail d’autres dimensions liées à la gouvernance et la sécurité humaine, telles que le renforcement de la réponse institutionnelle à la violence sexiste, la promotion de l’égalité hommes-femmes dans les institutions publiques, la décentralisation des services publics, les mécanismes de dialogue local, le respect des droits humains, la participation de la société civile à l’élaboration des politiques ou l’obligation pour les agents de la fonction publique de rendre compte de leurs actes.

En tant que tel, le soutien à divers volets de la RSS concorde avec les priorités et les intérêts de nombreux partenaires extérieurs en matière d’aide au développement, ce qui favorise une approche mutuellement profitable de la coopération (voir également la section 5.5.1 sur la manière de souligner ces avantages par le biais d’une bonne communication avec les partenaires potentiels).

Encadré 4 : Quelques exemples de soutien extérieur aux processus de RSS en Afrique de l’Ouest

L’intérêt croissant que porte la communauté internationale au soutien à la RSS offre une opportunité pour les parties prenantes nationales de bénéficier de ressources humaines, logistiques et financières supplémentaires.

• La CEDEAO a soutenu les processus de RSS au Libéria, en Côte d’Ivoire et en Guinée-Bissau depuis les années 1990.

• En Sierra Leone, le Département du développement international (DFID) du gouvernement britannique a été un partenaire important des mesures de RSS menées au niveau national après la guerre civile.

• Le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest a également fait de la RSS un domaine prioritaire de son soutien aux efforts de prévention du conflit en Guinée.

• Au Mali, l’Organisation des Nations Unies et l’Union européenne ont mis au point, après la crise de 2012, des programmes de soutien de la RSS qui ont été mis en œuvre par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et par les missions de formation et de renforcement des capacités de l’Union européenne au Mali (EUTM/EUCAP Sahel Mali).

Source : Ornella Moderan, « Leadership politique et dynamique endogène des processus de réforme du secteur de la sécurité », in Ornella Moderan (dir.), Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest (Genève : DCAF, 2015).

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Le soutien extérieur accroît la faisabilité des processus de RSS en Afrique de l’Ouest. Cependant, du point de vue national, ce type appui soulève un certain nombre de défis. L’assistance extérieure peut, de ce fait, être perçue comme une opportunité à double tranchant, ce qui risque de créer un effet dissuasif et de limiter sa pertinence aux yeux des pays qui s’engagent dans la RSS. Il est essentiel de prendre conscience de ces obstacles et de mettre en place des mécanismes pour les atténuer afin de permettre aux États d’Afrique de l’Ouest de tirer le meilleur parti des possibilités offertes par le soutien extérieur, tout en minimisant ses inconvénients.

La section ci-dessous présente certains des défis qui peuvent dissuader les États d’Afrique de l’Ouest de faire appel à la coopération internationale en matière de RSS et propose des solutions pour surmonter ces défis.

3.1. Les défis liés à la souveraineté nationale

Un État souverain ne devrait sans doute pas dépendre de l’aide étrangère pour assurer la gestion et la réforme d’un secteur qui est au cœur de la sécurité et de l’autonomie nationales et qui est étroitement lié aux valeurs fondamentales de la société telles que la justice, la sécurité et le respect des droits humains. Les risques réels ou présumés d’ingérence dans les affaires intérieures constituent un défi politique majeur. De ce fait, il est indispensable de procéder à une sélection rigoureuse des partenaires extérieurs.

Plusieurs dimensions de la coopération internationale peuvent remettre en cause l’autodétermination.

3.1.1. La limitation de l’autonomie en matière de politiques

Risque : les pays qui s’engagent dans un processus de RSS craignent souvent que les acteurs extérieurs qui proposent une assistance humaine et financière tentent également d’influer sur l’élaboration des politiques nationales. Le fait d’accepter un appui extérieur risquerait donc de réduire l’autonomie du pays quant à la définition de politiques.

Solution proposée : Inscrire le partenariat dans un dialogue politique dès le début.

Il est légitime que les partenaires extérieurs s’assurent que leurs contributions ne servent pas à renforcer un appareil d’État en porte-à-faux leurs valeurs. Cependant, il est tout aussi légitime que les pays qui s’engagent dans un processus de RSS veillent à ce que leurs partenaires les traitent sur un pied d’égalité

Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

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12 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

et respectent leur souveraineté et leurs propres valeurs fondamentales, dans les limites fixées par le droit international. Les autorités nationales doivent exiger que ces partenariats reposent sur des relations d’égalité et sur des valeurs communes et partagées, plutôt que sur l’internalisation sans grande conviction et peu viable de principes importés.

En amont de toute coopération dans le domaine de la RSS, il est indispensable d’engager un dialogue politique en impliquant les plus hauts niveaux de représentation au sein des deux parties prenantes (chefs d’État ou de gouvernement, ministres des Affaires étrangères, ambassadeurs, etc.). Ce dialogue doit porter sur les valeurs fondamentales qui sous-tendent le processus de réforme, sur la vision nationale en matière de sécurité et sur les objectifs fixés à l’échelle nationale. Ces échanges permettent aux deux parties d’évaluer si leurs visions sont suffisamment convergentes pour mettre en place un partenariat fiable. À l’issue de ces concertations, les pays qui s’engagent dans une RSS doivent être prêts à décliner une offre de financement si les conditions de base pour un partenariat fondé sur un respect mutuel ne sont pas remplies.

Voir aussi la section 3.2.1 sur les manières de surmonter les impacts négatifs de la dépendance financière sur la définition des politiques.

Mise en garde : cette phase de dialogue politique préliminaire est parfois négligée, si bien que certains projets ou programmes de partenariats sont uniquement négociés à un niveau technique, sans qu’il y ait un consensus clair sur les valeurs fondamentales sous-jacentes ou une compréhension commune du cadre plus large d’intervention. Cela peut créer des relations asymétriques qui entravent le leadership national et la dynamique endogène de la RSS.

3.1.2. Les conditionnalités imposées par les partenaires

Risque : l’autonomie en matière de politiques peut également être remise en cause par les conditionnalités, qui sont parfois perçues comme des moyens – unilatéraux et illégitimes – utilisés par les acteurs extérieurs pour tenter de dicter une conduite à un État souverain. À première vue, les pays qui s’engagent dans un processus de RSS peuvent estimer que les conditionnalités imposées par les acteurs internationaux en échange de leur soutien remettent en question leur souveraineté.

Solution proposée : faire en sorte que les conditionnalités soient mutuelles et favoriser la compréhension réciproque du contexte politique caractérisant les deux pays partenaires.

Les autorités nationales doivent engager un dialogue sur les conditionnalités dans une perspective constructive et sur un pied d’égalité, en ayant une vision claire de ce qui est, ou non, négociable de leur point de vue et du côté du partenaire. Pour que le dialogue soit constructif, les conditionnalités doivent être envisagées comme reflétant le contexte politique de chacun des pays partenaires.

Partir sur un pied d’égalité : l’expérience montre que le rejet systématique de toutes les formes de conditionnalités n’est pas un moyen efficace pour bâtir une relation de confiance et des partenariats avec des acteurs extérieurs. Au contraire, pour mettre en place des partenariats sur un pied d’égalité, les deux parties doivent exposer ouvertement leurs conditions et décider librement, et en connaissance de cause, si oui ou non elles sont disposées à se conformer aux exigences de l’autre partie. Les conditionnalités doivent donc fonctionner dans les deux sens. Il est important que les États d’Afrique de l’Ouest évaluent non seulement les exigences préliminaires des partenaires potentiels, mais qu’ils formulent également leurs propres conditions préalables. Il s’agit là d’une condition nécessaire pour que les règles du jeu soient définies conjointement, et non pas imposées unilatéralement.

Entretenir une compréhension mutuelle des contextes politiques tout au long du partenariat : : si les partenaires veulent imposer des restrictions qui n’avaient pas été discutées en amont, les États d’Afrique de l’Ouest doivent examiner les origines et les motivations de ces nouvelles exigences. Lorsque les conditionnalités des partenaires évoluent au cours du partenariat, les pays bénéficiaires sont parfois prompts à condamner ces nouvelles exigences en les considérant comme abusives, sans procéder à une analyse plus approfondie de leur raison d’être.

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13Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

Or, il arrive que ces nouvelles conditions soient dictées par l’évolution du contexte politique du pays bénéficiaire ou du pourvoyeur d’assistance. Par exemple, les partenaires extérieurs considèrent généralement qu’une détérioration de la situation des droits humains dans le pays bénéficiaire justifie l’introduction de nouvelles conditions pour la poursuite de la coopération. Autre exemple : ces restrictions imprévues peuvent résulter d’une modification de la situation politique du pays qui fournit un appui, par exemple un changement de gouvernement après des élections.

Par ailleurs, le durcissement de l’opposition parlementaire dans le pays fournissant une assistance peut parfois conduire son ministère des Affaires étrangères à adopter de nouvelles restrictions, dans le but d’anticiper des pressions parlementaires ou d’autres formes de remise en cause politique qui pourraient conduire à l’arrêt prématuré des programmes. Dans de telles situations, il peut être dans l’intérêt des pays bénéficiaires « d’aider le partenaire à les aider » en acceptant des conditions supplémentaires afin de démontrer leur transparence et d’anticiper des manœuvres politiques au sein du pays fournisseur d’assistance, qui pourraient nuire au programme de coopération.

Il est essentiel que les autorités du pays bénéficiaire appréhendent correctement le contexte politique du pays partenaire. La compréhension mutuelle des défis de politique intérieure auxquels les pays partenaires sont confrontés est un gage de succès pour la coopération.

Pour bâtir des partenariats efficaces en matière d’assistance aux processus de RSS, les États d’Afrique de l’Ouest doivent veiller à ce que :

• les conditionnalités liées à cette assistance soient compatibles avec leur vision nationale ;

• les caractéristiques et les défis du processus de réforme, y compris ses objectifs, fassent l’objet d’une compréhension mutuelle ;

• les deux parties s’accordent sur la nécessité de maintenir un dialogue politique constructif et aient une compréhension réciproque de leurs contextes politiques, ces paramètres ayant un impact sur la qualité du partenariat ;

• les partenaires extérieurs acceptent également les conditions préalables fixées par les autorités du pays engagé dans un processus de RSS, telles que l’obligation d’axer la coopération sur les priorités nationales et d’adopter les modalités nationales d’établissement de rapports, de limiter à un certain plafond les sommes allouées aux consultants internationaux et les coûts de fonctionnement du partenaire, ou de veiller à ce que tous les membres du personnel engagé par les partenaires observent scrupuleusement la législation nationale relative à l’exploitation et aux abus sexuels.

Lorsqu’un dispositif de soutien extérieur est conditionné à la prise de certaines mesures par le gouvernement national, le respect de ces engagements doit être garanti conformément au calendrier préalablement défini. En cas de retard, le fait de communiquer à temps peut aider à limiter les conséquences négatives.

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14 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

3.1.3. L’agenda des acteurs extérieurs

Risque : le soutien venant de l’extérieur, les gouvernements d’Afrique de l’Ouest peuvent craindre de devoir accorder la priorité aux exigences des partenaires au développement et de ne pas pouvoir répondre aux besoins exprimés par la population. Cela peut compromettre la dynamique endogène et inclusive du processus de réforme et orienter la RSS vers des objectifs inadéquats.

Solution proposée : faire de l’adhésion des partenaires extérieurs à une vision nationale de la sécurité la condition préalable à toute coopération.

Au moment du dialogue politique initial (section 3.1.1), il est important que les autorités des pays qui s’engagent dans la RSS s’entendent avec les partenaires extérieurs sur la répartition des rôles : le leadership et la responsabilité principale de la RSS doivent incomber aux acteurs nationaux, les acteurs extérieurs jouant un rôle de soutien.

Les États membres de la CEDEAO ne doivent pas seulement formuler leurs requêtes d’assistance extérieure en termes de besoins de financement ; ils doivent aussi insister sur l’importance pour les partenaires potentiels d’adhérer à la vision nationale de la sécurité issue d’un processus de consultation mené dans le pays.

Il faut, pour cela, élaborer un programme de réforme qui prenne en compte les besoins de sécurité d’un large spectre d’acteurs nationaux, notamment par le biais de consultations avec la société civile et les communautés locales. Ce processus inclusif ne contribue pas seulement à susciter une vaste dynamique endogène et un sentiment de responsabilité collective parmi les acteurs nationaux. Il permet également de susciter un cadre de réforme plus légitime et plus crédible, lequel emportera plus aisément l’adhésion des partenaires extérieurs.

Mise en garde : la recherche d’un consensus inclusif sur une vision nationale en matière de sécurité est une dimension souveraine et essentielle de la RSS. Or, ce processus peut être court-circuité par certains partenaires internationaux soucieux d’obtenir des avancées rapides. Il arrive même que les partenaires proposent leur propre analyse des besoins en matière de RSS afin d’éviter un processus de consultation nationale qui peut sembler à la fois fastidieux et onéreux. Même s’il est parfois difficile de résister à de telles pressions, les autorités nationales doivent, en tous les cas, consacrer suffisamment de temps et d’efforts à la détermination de leurs besoins politiques propres, en consultation avec leur population. L’implication des acteurs de la société civile dans le processus de consultation constitue un moyen efficace de consolider la légitimité du processus et son appropriation collective par les parties prenantes nationales. À cette fin, les autorités des pays bénéficiaires doivent tempérer la volonté de certains acteurs internationaux d’accélérer les processus d’élaboration des politiques. En fin de compte, lorsque l’agenda politique national est défini sur la base d’un processus ouvert, transparent et inclusif, cela renforce le caractère endogène des réformes, et incite les partenaires extérieurs à en soutenir la mise en œuvre.

Encadré 5 : Comprendre les défis politiques auxquels sont confrontés les gouvernements partenaires qui soutiennent des processus de RSS

Pour éviter de perdre des opportunités de coopération internationale, les États qui recherchent une assistance doivent comprendre le contexte (politique, souvent) des pays partenaires. On se contente souvent d’examiner la situation du pays engagé dans une RSS, alors qu’il faudrait aussi prendre en compte le contexte politique des pays partenaires et l’impact de ce contexte sur l’assistance au processus de RSS.

Dans les pays traditionnellement bailleurs de fonds, l’opposition politique peut facilement remettre en cause la position du gouvernement en cas d’enlisement du processus de RSS dans le pays bénéficiaire et, a fortiori, en cas de violations des droits humains. Les gouvernements partenaires peuvent alors être amenés à prendre des mesures unilatérales pour éviter de perdre leurs appuis politiques sur le plan intérieur. Dans ces circonstances, il est très utile de maintenir de bonnes relations entre les partenaires, reposant sur un sens de l’engagement mutuel. Des relations cordiales et ouvertes avec les organisations non gouvernementales de droits humains peuvent aussi contribuer à entretenir un climat constructif.

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15Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

3.1.4. Les risques de divulgation d’informations confidentielles relatives à la défense et à la sécurité

Risque : les pays qui s’engagent dans un processus de RSS craignent parfois que l’implication d’acteurs extérieurs les oblige à communiquer des informations considérées comme strictement confidentielles et de caractère national. Utilisées à des fins de renseignements, de telles informations risqueraient de porter atteinte à la position géostratégique du pays et d’accroître sa vulnérabilité face à des pressions diplomatiques ou de l’exposer à des menaces d’ordre sécuritaire.

Solution proposée : définir des normes claires quant à la nature des informations à partager dans le cadre du programme de réforme.

Pour être efficace, le partenariat doit s’appuyer sur une communication constructive et un partage d’informations. Toutefois, le fait de pallier le manque de ressources pour le financement d’un processus de RSS n’habilite pas les partenaires extérieurs à accéder à toutes les informations relatives à la sécurité.

Pour concilier ces deux impératifs, il est préférable d’élaborer des directives claires quant à la nature des informations susceptibles d’être communiquées et aux processus régissant ce partage d’informations. Il ne suffit pas de mettre en place de telles directives ; il faut aussi les communiquer clairement au personnel national qui travaille en étroite collaboration avec des partenaires extérieurs. Ces directives doivent être conformes à la législation portant sur la classification des informations. Elles ne doivent être ni trop générales ni sujettes à interprétation, mais fournir des instructions pragmatiques et faciles à comprendre, de sorte à pouvoir être facilement intégrées dans les normes de fonctionnement des institutions de sécurité qui sont en relation avec des partenaires extérieurs. Dans la plupart des cas, les informations dont les partenaires extérieurs ont réellement besoin à des fins programmatiques sont relativement élémentaires et ne menacent pas la sécurité nationale.

Un processus endogène « repose sur un principe fondamental, à savoir le fait que l’assistance et l’engagement des acteurs extérieurs doivent être définis, orientés et pilotés par les parties prenantes nationales. Dans la mesure du possible, il est donc essentiel pour les acteurs extérieurs de s’efforcer d’adhérer aux processus de réformes nationaux, plutôt que de chercher à convaincre les acteurs nationaux d’adopter des notions et des processus développés ailleurs et par d’autres. Les acteurs nationaux qui recherchent l’appui ou l’adhésion des partenaires extérieurs aux idées inspirées, générées et négociées localement [et donc à une vision de la sécurité véritablement nationale], méritent d’être encouragés et soutenus dans cette démarche. L’absence d’une telle adhésion réduit à néant l’opportunité stratégique de parvenir à un processus de réforme durable. »

Source : Équipe spéciale interinstitutions des Nations Unies pour la réforme du secteur de la sécurité,

« Security Sector Reform, Integrated Technical Guidance Notes » (New York : Nations Unies, 2012), p. 16,

traduction libre.

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16 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

3.2. Les défis liés à la viabilité et à l’indépendance financière

L’assistance extérieure risque de générer une dépendance, et donc de porter atteinte à la maîtrise nationale du processus de réforme. Des partenariats instables créent des incertitudes quant au financement de la RSS. Ainsi, lorsque la réalisation des réformes repose en grande partie sur un financement extérieur, le processus de RSS peut se trouver paralysé pour peu que les partenaires retirent leur soutien de manière imprévue.

Les modalités de l’assistance extérieure semblent parfois sujettes à interprétation unilatérale, ce qui amplifie le sentiment de vulnérabilité et de dépendance face aux exigences du bailleur. De manière générale, le manque de prévisibilité de l’appui financier en termes de volume, de conditions et de calendrier de décaissement affecte la capacité de l’État à piloter la réforme selon un plan stratégique précis.

Afin de garantir une maîtrise nationale des questions relatives à la sécurité, les gouvernements doivent examiner les moyens durables de réduire leur dépendance envers les partenaires extérieurs à moyen et à long terme. Voici quelques solutions à prendre en considération.

3.2.1. Le risque de dépendance financière et son impact sur la définition des politiques

Risque : on peut légitimement craindre que le recours systématique à une assistance extérieure inhibe l’initiative de l’État et sa capacité à mobiliser les ressources nationales pour soutenir les priorités du pays. Cela peut alors restreindre son autonomie dans l’élaboration des politiques nationales.

Solution proposée : privilégier un financement national des processus de décisions stratégiques et des consultations à forte teneur politique.

Le recours à des financements extérieurs ne doit pas être systématique : au contraire, il doit être soigneusement étudié au cas par cas. Loin d’être automatique, cette décision doit reposer sur une définition claire des besoins et sur une évaluation des capacités nationales pour répondre à ces besoins. En effet, le recours à un soutien extérieur ne se justifie réellement qu’en cas de nécessité de pallier un manque de financement de la réforme (voir section 4.2).

Dans la mesure du possible, les composantes essentielles et les plus sensibles de la RSS, telles que la définition des priorités (voir encadré 6) et les actions stratégiques, doivent être financées par des ressources nationales afin de préserver l’indépendance de l’État quant à la direction de la réforme.

Voir aussi l’Outil 3 sur la bonne gouvernance financière des institutions de défense et de sécurité.

3

Les pays qui font appel au soutien international pour améliorer la gouvernance de leur secteur de la sécurité considèrent souvent que cela risque d’exposer des informations essentielles pour la sécurité nationale au regard d’acteurs extérieurs, ce qui générerait un déséquilibre de l’information au profit du pays partenaire. Pour résoudre ce problème, il faut établir des règles claires concernant le type d’informations susceptibles d’être communiquées et mettre en place des procédures régissant ce partage d’informations.

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17Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

3.2.2. Le risque des accords de financement à durée indéterminée pour la pérennité de la RSS

Risque : les accords de financement à durée indéterminée peuvent amener les pays bénéficiaires à s’attendre à ce que le soutien extérieur soit constamment renouvelé. Le fait de ne pas lier un partenariat à un calendrier précis accroît le risque de dépendance envers les financements extérieurs, car cela ne favorise pas la recherche d’options nationales de financement viables sur le long terme. En l’absence de stratégie de désengagement claire, le retrait éventuel d’un partenaire – événement en général imprévu – risque de déstabiliser la RSS, qui est un processus de très longue haleine.

Solution proposée : assortir les partenariats d’un calendrier clair et planifier en amont les stratégies de désengagement.

Lorsqu’ils établissent des partenariats avec des acteurs extérieurs, les gouvernements des pays bénéficiaires doivent immédiatement planifier les stratégies de désengagement et prévoir des options de financements nationaux durables, et ce, sans attendre la dernière phase du partenariat. Le fait d’assortir dès le départ ces partenariats à d’objectifs et de calendriers prédéterminés et clairement définis permet à ces gouvernements d’échelonner l’engagement de leurs partenaires dans le temps. Il ne faut pas présupposer ou considérer comme acquis le renouvellement de financements au-delà des engagements strictement contractuels. Il peut également être utile d’intégrer dans l’accord de partenariat des dispositions relatives à la stratégie de désengagement.

Encadré 6 : Un financement national pour garantir une définition nationale des priorités

Les processus visant à établir un diagnostic préliminaire des problèmes de gouvernance qui doivent faire l’objet d’une réforme devraient être couverts intégralement, ou au moins substantiellement, par un financement national.

Les actions visant à définir les priorités de la RSS devraient être financées par des ressources nationales. Il peut s’agir, par exemple :

• d’une évaluation du secteur de la sécurité dans son ensemble, ou d’un audit organisationnel de certaines institutions de la sécurité en particulier ;

• d’un examen de la législation relative au secteur de la sécurité, éventuellement en collaboration avec des parlementaires, des experts académiques et des praticiens de la société civile ;

• d’une évaluation de la dimension genre soit dans le secteur de la sécurité en général, soit au sein de certaines institutions spécifiques de ce secteur ;

• de l’organisation d’un séminaire gouvernemental sur la RSS, comme moyen d’amorcer formellement une réflexion collective sur les dimensions de la GSS qui doivent faire l’objet d’une réforme ;

• de l’engagement d’un dialogue avec la société civile et les populations locales sur les besoins en matière de sécurité, tels qu’identifiés par les hommes, les femmes, les garçons et les filles vivant sur le territoire national.

Dans la mesure où ces actions préliminaires orientent, en général, la définition des priorités nationales, il est important qu’elles fassent l’objet d’une prise en charge souveraine car cela contribue à réduire le risque d’une ingérence des acteurs extérieurs dans la définition des priorités de réforme. Il s’agit ainsi d’éviter que l’agenda de réforme ne soit déterminé en fonction des intérêts ou préoccupations d’acteurs externes, mais plutôt en fonction des préoccupations exprimées par les acteurs nationaux à tous les niveaux. Ainsi, le financement national contribue à s’assurer non seulement que le soutien extérieur répond aux besoins nationaux, mais également que ces besoins sont réellement définis de manière endogène.

Le fait d’autofinancer les activités clés visant à définir l’agenda national est un moyen essentiel de renforcer la capacité de l’État à canaliser le soutien extérieur vers des domaines réellement identifiés par les parties prenantes nationales, et non pas sélectionnés par des acteurs extérieurs. Dans la mesure du possible, le soutien extérieur ne doit intervenir qu’à un stade ultérieur, afin de pallier des manques de ressources spécifiques identifiés par les autorités nationales.

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18 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

3.2.3. Le risque des partenariats à court terme

Risque : l’expérience montre que les partenaires extérieurs préfèrent parfois intervenir via des accords d’assistance à court terme, quitte à les renouveler, plutôt que s’engager dans un partenariat à long terme. Cela leur donne davantage de flexibilité dans la renégociation des termes du partenariat lors de chaque renouvellement du financement. Cependant, cette pratique empêche les autorités nationales du pays bénéficiaire d’établir une planification efficace à moyen et à long terme.

Solution proposée : mettre l’accent sur les engagements à moyen et long terme.

Les gouvernements des pays qui cherchent à obtenir un soutien extérieur pour leur processus de RSS doivent privilégier les partenaires qui sont disposés à s’engager dans des programmes d’assistance à moyen et à long terme. En règle générale, la politique ou les directives nationales concernant les relations avec les partenaires doivent favoriser des accords de partenariat pluriannuels cohérents, et non des offres d’assistance ponctuelles, même si celles-ci sont susceptibles d’être renouvelées à plusieurs reprises.

En effet, les accords d’assistance pluriannuels offrent une meilleure visibilité sur les financements extérieurs escomptés, qui peuvent donc être provisionnés dans le budget national. Ces accords présentent également des coûts de transaction plus faibles, car ils ne requièrent pas une renégociation permanente du cadre de l’assistance. À l’inverse, les offres d’assistance à court terme ne permettent pas d’avoir une vision stratégique des ressources disponibles, ni de définir une planification cohérente du budget national. Ce type d’accords génère également des coûts de transaction plus élevés, du fait de la nécessité de redéfinir constamment les contours du partenariat.

3.2.4. Le risque de non-respect des engagements et de retrait de partenaires

Risque : les partenaires ne respectent pas toujours leurs engagements, même lorsque les accords ont été négociés au mieux. Ce cas de figure génère un déficit de ressources imprévu pour le pays engagé dans le processus de RSS (voir encadré 7).

Solution proposée : diversifier les partenariats et formaliser les engagements.

Selon les bonnes pratiques en la matière, il est conseillé de s’assurer que les dispositifs d’appui extérieur sont systématiquement formalisés dans des documents officiels de partenariat qui précisent la portée des engagements respectifs et les responsabilités mutuelles de toutes les parties. Il est également recommandé d’assortir l’accord de partenariat d’un calendrier et de modalités précises pour la fourniture de l’assistance convenue. Le gouvernement qui s’engage dans un processus de RSS doit soigneusement veiller au respect de ces dispositions contractuelles.

Encadré 7 : Le financement extérieur n’est jamais garanti

Les partenaires peuvent revenir sur leurs engagements de manière inopinée, ce qui risque de nuire à l’ensemble du processus, en raison de l’impact potentiellement contreproductif d’actions inabouties. Ainsi, entre autres exemples, un changement de gouvernement, l’évolution de la politique étrangère ou une crise économique peuvent entraîner le retrait inopiné de partenaires et empêcher le pays engagé dans la RSS de poursuivre le processus de réforme.

De nombreux processus de RSS en Afrique de l’Ouest ont été paralysés par le retrait inattendu de partenaires extérieurs à un moment où ce soutien était particulièrement nécessaire. Par exemple, les institutions de sécurité en Sierra Leone, au Ghana et en Guinée-Bissau ont été affectées par les coupes budgétaires suite à la crise économique mondiale de 2008. De telles situations ont mis en évidence la nécessité de mettre en place un financement national de base, ainsi que des cadres de partenariat clairs et des plans d’urgence pour faire face à l’incertitude de l’aide extérieure.

D’après : Ornella Moderan, « Leadership politique et dynamique endogène des processus de réforme du secteur de la sécurité », in Ornella Moderan (dir.), Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest (Genève : DCAF, 2015).

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19Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

Lorsque des dispositifs d’appui extérieur prévoient un financement en plusieurs tranches, il est conseillé de faire en sorte que chaque versement corresponde à un ensemble cohérent d’activités. C’est là une sage précaution, en cas de retrait du partenaire. Cela contribue à garantir le financement de chaque ensemble d’interventions pratiquement comme s’il s’agissait d’un volet autonome de la réforme. Ainsi, la suspension d’un financement extérieur ne pourra pas entraver les activités en cours, ni créer des problèmes en laissant tout un éventail d’actions inachevées. Cette approche assure aux pays qui s’engagent dans un processus de RSS un minimum de sécurité par rapport au financement disponible pour chaque série d’interventions (qu’il s’agisse de projets particuliers ou de composantes du programme) avant leur lancement.

Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest doivent également exiger de leurs partenaires extérieurs qu’ils s’engagent à respecter un calendrier convenu pour le décaissement des fonds. De manière pratique, il peut être demandé aux partenaires extérieurs de fournir des prévisions officielles des décaissements prévus au moins quatre à six mois avant le début de l’élaboration du budget annuel. Cela permet de provisionner les engagements des partenaires – au moins à court terme (moins d’un an) – dans le budget annuel de l’État, et cela renforce le poids politique de ces engagements.

Pour minimiser l’impact d’un retrait inopiné de certains partenaires, les gouvernements des pays bénéficiaires doivent également chercher à diversifier leurs sources de financement et prévoir une marge de flexibilité pour pouvoir réaffecter le financement extérieur à des priorités imprévues ou renégocier l’allocation des fonds. Pour assurer une telle flexibilité, il est généralement préférable de privilégier les modalités de l’appui budgétaire général (voir section 5.2.3).

3.3. Les défis liés aux capacités institutionnelles

Le financement extérieur constitue certes une opportunité, mais il génère aussi des coûts administratifs pour les pays bénéficiaires. La mobilisation et la gestion des ressources extérieures exigent du temps et des efforts ; ce type de financement requiert de la coordination et augmente les obligations en matière d’établissement de rapports. En fin de compte, le financement extérieur accroît la pression sur des ressources humaines déjà faibles et met souvent à rude épreuve les capacités institutionnelles déjà limitées de l’État concerné.

3.3.1. Les coûts de transaction élevés

Risque : les acteurs d’assistance extérieurs ont souvent des attentes importantes vis-à-vis des gouvernements quant à l’utilisation des ressources nationales nécessaires à la mise en œuvre des programmes d’assistance. Dans le même temps, ils imposent à leurs partenaires de lourdes contraintes contractuelles. Ainsi, il est souvent demandé aux administrations nationales de se plier à de multiples missions d’évaluation, de consacrer du temps à des processus de consultation, nombreux et parfois redondants, avec leurs partenaires, ou encore d’établir régulièrement des rapports. Tout cela génère des coûts de transaction élevés.

En outre, la fragmentation de l’appui extérieur en une multitude de projets de petite à moyenne ampleur multiplie les coûts d’exploitation sans nécessairement améliorer la portée des résultats. Cela contraint également les pays bénéficiaires à mobiliser davantage de personnel, de moyens matériels et parfois de moyens financiers pour la coordination des partenaires internationaux. La conjonction de ces éléments augmente les coûts de transaction, ce qui réduit d’autant la valeur réelle de l’assistance reçue.

Compte tenu du poids des coûts de transaction par rapport à la valeur ajoutée des partenariats de coopération internationale, qui peut s’avérer limitée, il semble parfois que les bénéfices de l’assistance extérieure ne justifient pas les investissements requis pour la mettre en œuvre.

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20 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Solution proposée : évaluer les bénéfices de l’assistance extérieure de manière globale et favoriser les synergies.

En encourageant les partenaires extérieurs à développer des synergies et des initiatives communes telles que des mécanismes de financement conjoints, les autorités des pays qui s’engagent dans un processus de RSS peuvent minimiser les coûts de fonctionnement générés par une fragmentation de l’assistance extérieure. Les autorités nationales peuvent indiquer leur préférence pour cette approche dans le cadre de leur politique nationale de coopération ou d’autres politiques similaires. Elles peuvent aussi aborder cette question au cas par cas, en identifiant des intérêts communs avec leurs différents partenaires.

La recherche de synergies entre les partenaires extérieurs contribue à :

• réduire les coûts de gestion et de fonctionnement;

• accroître l’impact des initiatives ;

• réduire les coûts administratifs liés à la coordination et à l’établissement de rapports.

Pour s’assurer que les partenariats présentent une plus-value suffisante, les autorités des pays bénéficiaires doivent également évaluer les promesses d’engagements des partenaires à l’aune des coûts directs et indirects qu’implique leur assistance. Elles auront ainsi une vision plus complète et plus réaliste des bénéfices réels de l’assistance extérieure, ce qui les aidera à prendre des décisions rationnelles quant à l’opportunité de s’engager dans un partenariat avec tel ou tel acteur extérieur.

En outre, il est important d’identifier les coûts liés à l’appui extérieur et de les prendre en compte au titre de la contribution nationale au succès des projets d’assistance mis en œuvre par les partenaires internationaux (voir encadré 8). C’est une condition nécessaire pour assurer à la fois la gestion stratégique des coûts liés à la RSS et l’évaluation des politiques (politiques de coopération nationale et stratégie de RSS).

Encadré 8 : Prendre en compte le poids de l’assistance extérieure sur le budget national

Afin de créer un environnement propice à la coopération internationale, les autorités des pays bénéficiaires doivent assumer des contributions en nature, telles que la mise à disposition de locaux publics et de fonctionnaires. Ces coûts, dont l’importance est souvent négligée, sont supportés par le budget national. Bien qu’ils soient rarement pris en compte de manière adéquate, ces « coûts invisibles » des programmes et des projets de partenariat représentent une charge supplémentaire qui pèse sur les maigres ressources nationales. L’assistance internationale doit donc avoir des effets positifs substantiels afin de compenser ce fardeau.

Pour évaluer correctement l’assistance extérieure dont ils bénéficient, les gouvernements d’Afrique de l’Ouest qui acceptent un tel soutien à leurs processus de RSS doivent renforcer leurs capacités d’analyse du contenu des dépenses identifiées par leurs partenaires comme une aide publique au développement (APD) relative à la RSS. Cela leur fournira une base solide pour débattre des contributions de ces partenaires extérieurs et pour s’assurer que les montants que leurs partenaires affirment - au niveau international - avoir versés au titre de leur soutien à des processus de RSS correspondent effectivement à l’aide reçue. Cela peut également permettre de trouver un terrain d’entente en vue de négocier une assistance supplémentaire.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 2 sur la programmation de la réforme du secteur de la sécurité. 2

Les États d’Afrique de l’Ouest ne doivent pas considérer l’assistance extérieure comme un mécanisme de subvention n’impliquant aucun coût, mais plutôt comme une modalité de partenariat qui exige un certain degré d’investissement de leur part. Il est donc important d’avoir une vision stratégique des coûts et des bénéfices liés à l’assistance extérieure, afin d’opérer des choix rationnels en matière de partenariats.

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21Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

Conseil : Pour faire en sorte que leurs exigences quant aux activités à mener s’inscrivent dans le calendrier du gouvernement bénéficiaire avec le moins de contraintes possible, les partenaires au développement devraient être tenus de communiquer un calendrier harmonisé précisant leurs principales activités (missions, réunions, évaluations, développement de stratégies, etc.) sur une base annuelle ou semestrielle, avec une marge de flexibilité convenue afin que ce calendrier puisse être révisé périodiquement.

3.3.2. La duplication des efforts due au manque de coordination des procédures

Risque : l’éparpillement des procédures de gestion privilégiées par les partenaires et la redondance de leurs exigences en matière de gestion de projets peuvent également accroître les coûts de transaction. Certains partenaires extérieurs préfèrent ne pas s’appuyer sur les procédures et les mécanismes nationaux de gestion de projets et de programmes. Or, ce choix augmente la charge qui pèse sur les institutions nationales, car celles-ci doivent gérer un éventail de processus non coordonnés et souvent répétitifs imposés par les partenaires.

Solution proposée : insister sur l’importance de la coordination et de l’alignement des partenaires sur les systèmes de gestion nationaux.

La coordination de l’assistance extérieure incombe principalement aux autorités nationales, qui pilotent le processus de RSS. Il est nécessaire d’assurer une coordination régulière avec tous les partenaires extérieurs pour garantir la cohérence entre les différentes modalités de leur soutien. Outre les rencontres bilatérales, des réunions de coordination inclusives regroupant l’ensemble des partenaires extérieurs autour du gouvernement engagé dans une RSS peuvent contribuer à assurer un partage adéquat des informations et à fournir une vision complète de l’environnement de l’assistance extérieure.

Certes, la grande majorité des acteurs internationaux du développement soutiennent le principe consistant à recourir aux procédures et aux systèmes nationaux du pays bénéficiaire (voir section 4.3.2). Cependant, l’application de ce principe peut se révéler difficile. Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest doivent tout d’abord mettre en place des systèmes de gestion crédibles, fondés sur des normes internationales et des procédures harmonisées assorties de mécanismes de contrôle et d’audit, et dotés de ressources humaines suffisantes pour rendre ces systèmes opérationnels. La mise en place d’un cadre commun de gestion des projets et des programmes qui soit efficace repose largement sur la présence d’un personnel national formé, capable de mettre en œuvre les procédures nationales et de les expliquer clairement aux partenaires extérieurs.

Afin de minimiser le gaspillage de temps et de ressources dû à la duplication des procédures, les autorités des pays bénéficiaires peuvent confier à l’unité nationale de coordination de la RSS (au sein du mécanisme national de coordination de la RSS) le soin d’élaborer des canevas de rapports homogènes, d’organiser des évaluations conjointes, de définir des procédures budgétaires standardisées et de concevoir d’autres outils d’harmonisation.

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22 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Encadré 9 : Les lacunes fréquentes du soutien extérieur à la RSS

Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest qui s’engagent dans un processus de RSS doivent être conscients du fait que l’assistance extérieure dans ce domaine présente certaines lacunes qui sont souvent interconnectées. Les carences suivantes sont couramment observées :

• Une mauvaise compréhension du contexte local et national de la part des acteurs extérieurs. Il arrive que les partenaires internationaux ne tiennent pas compte des points de vue constructifs des acteurs nationaux. Or, s’ils ne sont pas guidés en permanence par les acteurs nationaux, les partenaires au développement risquent de ne pas percevoir les sensibilités culturelles, les héritages historiques et d’autres caractéristiques spécifiques au contexte. Cela peut les conduire à concevoir des actions qui ne répondent pas aux besoins réels d’un pays, d’une institution ou d’une communauté, ce qui peut avoir des effets néfastes. Tout au long du processus, le gouvernement du pays bénéficiaire et les parties prenantes nationales (y compris la société civile) doivent expliquer à leurs partenaires le contexte, l’héritage historique et les autres caractéristiques générales du pays. Il est essentiel de veiller à ce que toutes les initiatives prises par les partenaires internationaux soient validées et mises en œuvre par le biais de mécanismes inclusifs qui impliquent largement les parties prenantes nationales.

• La tendance à répliquer les modèles extérieurs. Les partenaires extérieurs ont parfois tendance à négliger les particularités liées au contexte local et national et à promouvoir une solution type pour répondre à des défis de gouvernance complexes. Si le transfert de politiques peut être un outil utile pour mettre à profit l’expérience d’autres pays, il faut systématiquement veiller à replacer les actions de RSS dans leur contexte. Dans ce domaine, il n’existe pas de modèle unique. Si le gouvernement du pays bénéficiaire souhaite examiner les expériences d’autres pays afin de nourrir son propre processus de décision, il doit explorer différents types d’approches.

• La technicisation excessive du processus de RSS. Les partenaires internationaux négligent souvent les dimensions sociales et politiques de la RSS et s’empressent de proposer des modalités d’assistance excessivement techniques. Cette approche sous-estime la nature fondamentalement politique de la RSS et met de côté les questions essentielles liées aux valeurs et à la vision nationales, aux cultures institutionnelles et à la confiance de la population qui sous-tendent la mise en place ou la consolidation d’un secteur de la sécurité fonctionnel et responsable. Elle limite également la possibilité d’impliquer dans la RSS des acteurs sociaux et politiques qui ont une forte influence sur la gouvernance de la sécurité, notamment les dirigeants nationaux, les parlementaires, les dirigeants des principaux mouvements civils d’autodéfense et d’autres prestataires non étatiques de services de sécurité, ainsi que les leaders d’opinion locaux.

• Une focalisation étroite sur les prestataires étatiques de services de sécurité. En s’appuyant sur la définition large du secteur de la sécurité adoptée par les cadres d’orientation de l’UA et de la CEDEAO, les partenaires au développement et les gouvernements engagés dans un processus de RSS ne doivent pas axer exclusivement leur attention sur les principales institutions de défense et de sécurité, mais prendre également en compte les acteurs chargés de la gestion et du contrôle de ces questions, tels que le Parlement, les commissions nationales des droits humains et d’autres institutions de médiation, ainsi que les organes de contrôle financier et les acteurs de la société civile.

• Une focalisation étroite sur l’entraînement et l’équipement. Pour reconstruire un secteur de la sécurité efficace et responsable, il ne suffit pas d’apporter un soutien pour améliorer le matériel, les infrastructures et la formation opérationnelle. Bien qu’ils soient nécessaires, ces éléments ne relèvent de la RSS qu’à condition d’être liées à une amélioration des structures de gouvernance et à un renforcement des normes éthiques. Une approche plus large de la RSS requiert également de ne pas limiter les actions de réforme à des domaines tels que la défense, les activités de renseignement, la gestion des frontières, la justice et les services d’application des peines, les services de police et la sécurité des communautés. Elle doit aussi relever certains défis structurels connexes, tels que le respect des droits humains et l’égalité entre les hommes et les femmes dans le secteur de la sécurité. En outre, la RSS doit être conçue comme un élément constitutif d’initiatives plus larges de réforme de l’État, qui peuvent inclure des réformes fiscales, des initiatives favorisant l’emploi des jeunes, des politiques d’autonomisation des femmes et d’autres processus institutionnels qui affectent l’environnement général de la sécurité humaine.

Remarque : la focalisation étroite sur les « activités d’entraînement et d’équipement » conduit souvent les partenaires internationaux à négliger d’autres domaines d’intervention en matière de RSS, tels que ceux décrits à la section 6.

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23Répondre aux risques et aux défis liés au soutien extérieur à la RSS du point de vue national

• Le manque de transparence sur l’assistance fournie. Les systèmes de comptes-rendus multiples et discordants entre les divers partenaires internationaux n’offrent pas une vision claire de la façon dont l’aide publique au développement liée à un processus de RSS recouvre effectivement. Ce manque de transparence remet en cause la fiabilité des éléments que certains partenaires déclarent comme une APD liée à la RSS au gouvernement bénéficiaire et aux organes internationaux chargés de recueillir des données relatives à la coopération au développement, tels que la Direction de la coopération pour le développement de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE). Le manque de clarté des mécanismes d’établissement de rapports augmente également le risque que les informations sur l’assistance extérieure soient incomplètes, peu claires et communiquées hors des délais prescrits. Dans l’ensemble, le manque de lisibilité des rapports sur l’assistance fournie entrave la capacité du gouvernement bénéficiaire à contrôler et gérer le soutien reçu de manière adéquate.

• L’absence de prévisibilité : voir section 2.2.3.

• Une assistance technique soumise à des restrictions excessives. Certains partenaires extérieurs ont tendance à confier une grande partie de leurs services d’assistance technique à des experts internationaux. Même si la fourniture d’une assistance technique est, en soi, un moyen précieux de réunir une expertise de haut niveau pour soutenir la RSS, le recours systématique à des consultants internationaux est souvent perçu comme une mesure imposée par les partenaires extérieurs, non transparente et inutilement coûteuse. Pour tirer le meilleur parti de l’assistance extérieure, il est recommandé de limiter la mobilisation d’experts extérieurs aux cas où l’expertise requise n’est pas disponible au niveau national. Même dans ce cas, l’assistance technique extérieure doit avoir pour objectif de renforcer les capacités nationales. Des dispositions doivent être prises pour assurer un transfert durable des compétences, notamment en formant des formateurs nationaux, en mettant en place des mécanismes de mentorat ou en associant des experts internationaux à des homologues nationaux.

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Les directives internationales relatives à la coopération au développement sont trop peu souvent appliquées au domaine de la RSS, notamment parce que les projets et les programmes de RSS ne sont pas toujours considérés comme relevant du domaine du développement. Cependant, reconnaissant les liens entre sécurité et développement, diverses organisations internationales (OCDE, ONU, UE, etc.) ont de plus en plus tendance à intégrer au titre de l’aide au développement les formes « douces » d’assistance en matière de sécurité qui visent à renforcer à la fois l’efficacité institutionnelle et le caractère démocratique de la gouvernance de la sécurité6.

Qu’il s’agisse de soutien à la RSS et ou de ce traditionnellement considéré comme « l’aide au développement », les relations de partenariat présentent des points communs. Bien que la RSS constitue un domaine d’intervention particulier qui requiert des précautions spécifiques, les directives internationales visant à assurer l’efficacité de la coopération au développement fournissent un cadre de base pour orienter de manière efficace les bonnes pratiques de partenariats dans le domaine de la RSS.

4.1. Les principes fondamentaux pour une coopération efficace au service du développement

Tirant les leçons de plusieurs décennies de coopération au développement, la communauté internationale a élaboré un ensemble de principes visant à renforcer l’efficacité de ces actions. Ces principes sont pour l’essentiel énoncés dans plusieurs documents de référence, tels que :

• La Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide au développement (2005) ;

• Le Programme d’action d’Accra (2008) ;

Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

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Les orientations générales visant à renforcer l’efficacité de la coopération au développement, telles que celles énoncées dans la Déclaration de Paris de 2005, le Programme d’action d’Accra de 2008 et le document de Partenariat de Busan de 2011, doivent également s’appliquer au soutien aux processus de RSS.

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26 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• Le Partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement (2011) ;

• Le Rapport du Groupe de personnalités de haut niveau chargé du programme de développement pour l’après-2015 (2013).

Ces initiatives internationales fournissent des orientations utiles pour optimiser la pertinence et accroître l’impact de l’assistance extérieure dans tous les domaines de la coopération internationale. La CEDEAO et ses États membres, ainsi que leurs partenaires bilatéraux et multilatéraux traditionnels, en ont approuvé un certain nombre.

La mise en œuvre de ces principes requiert un effort commun de l’ensemble des acteurs de la coopération internationale. Il revient aux acteurs internationaux, d’une part, d’améliorer les structures et la coordination de leurs politiques et pratiques de coopération. Quant aux pays bénéficiant d’un soutien extérieur, il leur revient d’améliorer leurs approches en ce qui concerne les relations avec leurs partenaires. En l’occurrence, pour établir des partenariats efficaces, il est essentiel d’envisager les relations de coopération comme un domaine de responsabilité mutuelle où chacune des parties doit tendre vers un perfectionnement continu.

Comme pour tout autre domaine de coopération en matière de gouvernance, ces principes généraux relatifs à l’efficacité de l’assistance au développement doivent guider la gestion de l’appui extérieur à la RSS. Par conséquent, les gouvernements d’Afrique de l’Ouest qui souhaitent s’engager dans une coopération en matière de RSS doivent s’appuyer sur les notions fondamentales suivantes :

• La définition nationale des priorités de la réforme, reposant sur une évaluation endogène des besoins du pays.

• L’alignement du soutien extérieur sur les politiques, les stratégies, les institutions et les procédures nationales.

• L’harmonisation par le biais d’une meilleure coordination entre les partenaires extérieurs et avec l’autorité nationale compétente, afin d’améliorer la pertinence, l’efficacité et l’efficience du soutien fourni.

• Une gestion axée sur les résultats reposant sur des structures et systèmes gérés au niveau national.

• La redevabilité mutuelle sur tous les aspects du partenariat, y compris une responsabilité partagée concernant l’utilisation des ressources, la réalisation des objectifs de la réforme et le respect de l’éthique.

Outre ces engagements généraux, l’UA et la CEDEAO ont formulé des orientations traitant spécifiquement de l’appui extérieur à la RSS dans leurs États membres (voir encadré 10 pour les lignes directrices de l’UA et section 7.1 pour les lignes directrices de la CEDEAO).

Encadré 10 : Lignes directrices relatives à l’appui extérieur à la RSS

(d) Vision nationale et paramètres pour le soutien extérieur en faveur de la RSS : l’appui extérieur à la RSS doit adhérer à la vision du secteur de la sécurité et de la réforme du secteur de la sécurité définie au niveau national. Dans le cas où une telle vision n’a pas encore été articulée de façon cohérente, les partenaires extérieurs pourraient chercher à en soutenir l’élaboration. En même temps, les acteurs nationaux doivent se partager la responsabilité de veiller à ce que le soutien extérieur fasse avancer une vision nationale et doivent être disposés à (re)négocier l’assistance extérieure si l’assistance proposée n’est pas compatible avec les buts et objectifs définis au niveau national.

(j) Coordination de l’assistance à la RSS : la coordination de l’assistance à la RSS relève en dernière instance de la responsabilité nationale. Dans le cas où les autorités nationales manquent de capacités pour assurer la coordination, les [Communautés économiques régionales], l’Union Africaine et/ou les Nations Unies pourraient, si nécessaire, travailler en partenariat avec les autorités nationales en vue de faciliter l’assistance à la RSS et renforcer les capacités de l’État membre pour éventuellement prendre en charge le rôle de coordination.

Source : Union africaine, Cadre d’orientation sur la réforme du secteur de la sécurité, 2013, section B, article 16, paragraphes (d) et (j).

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27Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

4.2. Garantir le caractère endogène des réformes

4.2.1. L’assistance en matière de RSS doit répondre à une demande

L’efficacité d’un soutien extérieur à la RSS repose dans une large mesure sur l’affirmation du leadership national et du caractère endogène du processus. Tout appui extérieur doit répondre à un besoin exprimé par les acteurs nationaux ; ce n’est pas l’offre qui doit déterminer le type d’appui à mobiliser, mais la demande. Cela signifie que la nature et le contenu de l’appui apportés doivent être dictés par les besoins locaux existants, et non pas fixés en fonction des préférences du partenaire qui propose son soutien. La pertinence et l’utilité d’un appui extérieur à la RSS doivent être évaluées à l’aune des besoins nationaux.

Afin de garantir que l’assistance internationale réponde à des besoins exprimés au niveau national, on peut notamment exiger, dans le cadre de la procédure d’établissements des partenariats, que :

• la source de la demande soit clairement identifiée (« à la demande des parties prenantes XYZ.. . ») ;

• la façon dont le soutien extérieur s’aligne sur les documents et la planification stratégique adoptés au niveau national soit explicitement soulignée.

Toute initiative d’appui extérieur doit être systématiquement validée en établissant clairement en quoi elle contribue à la vision globale de la sécurité promue par l’État. Il est important que les documents officiels (tels que les protocoles d’accords ou de coopération) stipulent expressément les conditions qui régissent le cadre de la collaboration, mais aussi qu’ils énoncent clairement les principes élémentaires de leadership national, de souveraineté de l’État et de redevabilité des partenaires comme prérequis fondamentaux à la conclusion d’un partenariat. Dans tous les cas, il est essentiel que les États d’Afrique de l’Ouest s’engagent dans des partenariats d’une manière sélective et réfléchie.

Encadré 11 : Bref rappel : leadership national et dynamique endogène

L’expérience a démontré à quel point il est important que les États d’Afrique de l’Ouest exercent un leadership clair des réformes qu’ils entreprennent en matière de sécurité. Pour ce faire, il s’agit :

• d’identifier leurs besoins nationaux en matière de gouvernance et de sécurité ;

• d’établir une vision nationale de la sécurité et un agenda de réforme basé sur cette vision ;

• d’évaluer leur capacité à mettre en œuvre cet agenda ;

• d’identifier clairement les domaines où un appui extérieur pourrait venir compléter les ressources investies au niveau national ;

• d’affirmer la nécessité que les partenaires s’appuient sur les systèmes de gestion nationaux ;

• de fixer le rythme de conduite des réformes (voir section 4.2.3).

Le processus endogène (ownership) « est défini comme la situation dans laquelle la réforme des politiques, des institutions et des actions relatives à la sécurité est conçue, gérée et mise en œuvre par les acteurs nationaux plutôt que par des acteurs extérieurs. Ce n’est pas tant le soutien local aux programmes et projets des bailleurs de fonds qui est nécessaire, mais plutôt le soutien de ceux-ci aux programmes et projets initiés par les acteurs locaux. »

Leopold von Carlowitz, « Local ownership in practice: The justice system reform in Kosovo and Liberia »,

DCAF Occasional Paper 23 (Genève : DCAF, 2011), p. 2, traduction libre.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 1 sur le leadership politique et la dynamique endogène des processus de réforme du secteur de la sécurité.

1

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28 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

4.2.2. Toute demande d’assistance en matière de RSS doit reposer sur une évaluation nationale des besoins et des lacunes du pays

Toute demande d’assistance extérieure doit être fondée sur les besoins nationaux, identifiés dans le cadre d’une évaluation inclusive et globale des besoins de sécurité et de la capacité du pays à y répondre. Ce processus participatif, mené par le pays concerné, doit tenir compte des besoins de sécurité de l’État, de la population dans son ensemble et de groupes sociaux spécifiques tels que les hommes, les femmes, les garçons, les filles, certains groupes d’âge particuliers, les secteurs de la population peu instruits, les minorités ou les communautés rurales reculées.

L’analyse de la capacité à répondre réellement aux besoins de sécurité, telle qu’identifiée par ce processus d’évaluation inclusif, fournit une meilleure vision des lacunes à combler afin que l’État puisse mieux répondre aux défis auxquels il est confronté en la matière. En mettant en lumière les domaines concrets qui nécessitent des améliorations, cette analyse des lacunes aide à définir les priorités de la réforme et à évaluer les financements nécessaires pour permettre aux institutions du secteur de la sécurité de remplir leur mission avec l’efficacité requise. L’évaluation peut ensuite servir de feuille de route pour la mobilisation d’un soutien extérieur. Ce dernier doit pallier les besoins, en termes de capacités et de financements, que les ressources nationales ne peuvent pas couvrir.

Pour procéder à une analyse des lacunes devant être comblées par un soutien extérieur, il faut commencer par définir clairement la vision nationale de la sécurité par le biais d’un processus de consultation inclusif et participatif impliquant un large éventail de parties prenantes nationales. Cette évaluation des besoins en matière de sécurité ne doit pas se limiter aux seules institutions gouvernementales ; elle doit adopter une approche inclusive qui intègre l’ensemble des parties prenantes et des interlocuteurs nationaux et locaux. L’objectif est de renforcer la confiance dans le processus de réforme et de favoriser son appropriation par une large palette de représentants du secteur de la sécurité et des populations locales. Il est important que les autorités nationales qui organisent ce processus de consultation travaillent en partenariat avec des organisations de la société civile crédibles pour s’assurer que le processus est aussi inclusif que possible.

La vision nationale commune ainsi développée doit ensuite constituer le socle du dialogue politique avec les partenaires extérieurs (voir section 3.1.1), afin d’emporter leur adhésion à ce processus (voir section 3.1.3) et de convenir, sur des bases partagées, de l’octroi d’une assistance permettant de réaliser les objectifs fixés à l’échelle nationale à l’aune des besoins exprimés localement.

4.2.3. La RSS doit adopter un rythme adapté au contexte national

Les partenaires internationaux exercent souvent des pressions sur les autorités nationales pour accélérer certains processus, afin que ceux-ci répondent à leurs attentes ou aux exigences de leurs cycles de financement, lesquels ne correspondent pas nécessairement aux cycles nationaux de gouvernance.

Il est important de régler le rythme de progression des réformes de manière à maintenir la dynamique et la crédibilité du processus. Pour autant, le rythme de la RSS ne doit pas être imposé par les cycles de

Les bonnes pratiques recommandent que les États qui s’engagent dans un processus de RSS posent l’exigence politique et procédurale selon laquelle seules les offres de soutien extérieur répondant à l’expression de besoins spécifiquement endogènes seront retenues. L’origine de la demande doit être dûment établie dans l’accord de partenariat, qui doit aussi préciser dans quelle mesure le soutien proposé est en adéquation avec les priorités nationales.

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29Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

programmation des partenaires extérieurs au risque de compromettre l’adhésion de la société ou des institutions nationales au processus. Les réformes requièrent des efforts sur le long terme, et cela doit être souligné au moment du lancement du processus. Les autorités nationales doivent fixer un calendrier réaliste pour atteindre leurs objectifs sociétaux, et éviter de prendre des engagements trop ambitieux susceptibles de surcharger la réforme de manière contreproductive et excessivement technocratique.

Au niveau sociétal, les processus tels que les consultations nationales, le développement des capacités parlementaires et l’instauration d’un climat de confiance constituent des domaines essentiels dont la mise en œuvre ne doit pas être indûment brusquée par des partenaires extérieurs ou autres. Le financement national de base aide l’État à conserver la maîtrise du rythme des réformes.

Au niveau institutionnel, les réformes doivent se fonder sur des transformations institutionnelles qui vont au-delà de simples modifications technocratiques des procédures de gestion, pour englober les changements de cultures institutionnelles et de mentalités individuelles qu’il est nécessaire d’opérer. De telles transformations nécessitent des efforts continus à long terme, qui peuvent parfois s’étaler sur une génération.

Au niveau des activités opérationnelles, la nécessité de donner la priorité au renforcement continu des capacités peut ralentir l’exécution de certaines tâches. Par exemple, les partenaires extérieurs qui fournissent une assistance technique pour réformer les politiques peuvent être tentés de le « faire eux-mêmes » afin d’accélérer le processus. Cependant, cette approche ne peut pas être durable car elle ne permet pas un transfert de compétences. Au contraire, il est préférable de soutenir le développement d’une expertise nationale solide par un travail en collaboration et un mentorat. Ce type d’approche nécessitant davantage de temps, il faut en tenir compte au moment de la planification des réformes.

4.3. Garantir l’alignement des partenaires sur des systèmes nationaux fiables

Le principe de l’alignement fait référence à deux engagements importants. Tout d’abord, les partenaires doivent fonder leur assistance sur les priorités, les politiques et les stratégies définies au niveau national. Ensuite, la fourniture de ce soutien extérieur doit s’effectuer par l’intermédiaire des systèmes nationaux.

4.3.1. L’alignement des partenaires sur les politiques nationales

L’alignement sur les politiques nationales renvoie à la nécessité pour les partenaires extérieurs d’adapter leur offre d’assistance à l’agenda et aux priorités définis par les parties prenantes nationales, afin de respecter le caractère endogène des processus (voir section 4.2).

Pour faciliter l’alignement de l’assistance extérieure sur les priorités nationales, les gouvernements d’Afrique de l’Ouest doivent s’efforcer d’élaborer une politique de sécurité nationale et/ou des documents politiques ou stratégiques sectoriels qui énoncent les priorités et les objectifs stratégiques de la RSS. Ces documents constituent des références importantes qui permettent aux parties prenantes nationales et aux acteurs extérieurs de comprendre la vision nationale de la sécurité afin de s’aligner sur elle. Idéalement, la politique de sécurité nationale doit fournir une vision aussi exhaustive et cohérente que possible, de laquelle une stratégie spécifique en matière de RSS peut découler. Les stratégies sous-sectorielles (par exemple, un livre blanc sur la défense, une stratégie de sécurité intérieure, une stratégie de gestion des frontières, etc.) peuvent, quant à elles, alimenter la stratégie politique générale du pays en matière de RSS.

Pour obtenir des résultats durables, les processus de RSS doivent s’inscrire dans le temps et reposer sur des mécanismes de gestion du changement bien calibrés.

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30 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Cependant, l’élaboration d’un cadre global pour la politique de sécurité nationale représente une entreprise extrêmement ambitieuse. Il peut être plus facile pour les gouvernements des pays qui s’engagent dans un processus de RSS d’élaborer des déclarations d’intention qui précisent clairement les buts et les objectifs stratégiques pour chaque secteur de la sécurité. Dans tous les cas, il est important de disposer d’un cadre stratégique clair sur lequel les partenaires peuvent s’aligner.

4.3.2. L’alignement des partenaires sur les systèmes nationaux de gestion

L’expérience, en Afrique de l’Ouest et ailleurs, a montré que les partenaires extérieurs sont parfois tentés de concevoir et de mettre en œuvre les projets relatifs à la RSS en utilisant leurs propres systèmes et procédures. Cela est contraire aux principes d’un partenariat efficace et d’un leadership national de la RSS. Les programmes et les projets financés par des partenaires extérieurs doivent, au contraire, être gérés en appliquant les procédures nationales et par le biais des structures nationales.

Pour faire en sorte que les partenaires s’alignent sur les systèmes et les procédures au niveau national, les États qui demandent une assistance doivent accroître la crédibilité de leurs institutions et la confiance envers elles, notamment en modernisant de manière globale leurs systèmes nationaux de gestion et en luttant contre la corruption. Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest souhaitant faire appel à une assistance extérieure pour soutenir leur RSS doivent élaborer des systèmes nationaux fiables qui respectent les normes de transparence largement acceptées, notamment en ce qui concerne les systèmes de gestion financière et de passation de marchés publics. Il est parfois nécessaire de renforcer les procédures et les structures nationales. Cet aspect doit alors être planifié de manière adéquate et faire partie intégrante de l’accord d’assistance conclu avec un partenaire extérieur (voir encadré 12).

En règle générale, les autorités nationales devraient dissuader la création de structures de mise en œuvre parallèles, et plutôt encourager les partenaires à utiliser les systèmes nationaux existants ou à contribuer à leur amélioration. Si les partenaires ont déjà commencé à s’appuyer sur des systèmes de gestion parallèles, il faut, sans perdre de temps, réaffirmer l’engagement politique en faveur du principe de l’alignement, démontrer la fiabilité technique des mécanismes nationaux et s’accorder sur des plans d’intégration réalistes.

L’alignement des partenaires sur les systèmes nationaux accroît la visibilité du gouvernement sur les formes et l’ampleur de l’assistance fournie. C’est essentiel pour améliorer la prévisibilité et le suivi de l’assistance extérieure, et veiller à ce que le financement extérieur soit intégralement et correctement reflété dans le budget national. Enfin, cela améliore la cohérence de la planification budgétaire et permet d’assurer une surveillance et un compte rendu exhaustifs de l’appui extérieur.

La crédibilité des systèmes nationaux repose à la fois sur leur efficacité et leur transparence. Des audits extérieurs des comptes publics menés de manière indépendante et systématique, ainsi qu’un contrôle parlementaire actif de la gestion des finances publiques, contribuent à renforcer la confiance des partenaires dans les systèmes nationaux.

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31Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

4.4. Encourager l’harmonisation entre les partenaires extérieurs

4.4.1. Améliorer la coordination des différents partenaires

Dans de nombreux cas, la fragmentation de l’aide au développement en une multitude de canaux et d’initiatives de financement suscite des préoccupations légitimes de la part des États d’Afrique de l’Ouest. La prolifération de microprojets gonfle les coûts de gestion de cette assistance et accroît la pression sur les mécanismes nationaux de coordination. Toutefois, du fait de la concurrence entre les partenaires extérieurs, il est souvent difficile de traduire dans la réalité les appels à une planification et à une mise en œuvre conjointes de leurs actions. Le recours continu à des évaluations, examens, audits, missions et consultations d’experts non harmonisés, redondants et se chevauchant, représente une surcharge pour les administrations nationales. De même, l’absence d’harmonisation des mécanismes d’examen mis en place par les partenaires extérieurs entraîne des exigences multiples relatives à l’établissement de rapports qui sollicitent excessivement les capacités des administrations nationales (voir également section 3.3).

Conformément aux principes du leadership national et de la dynamique endogène, il est important que les gouvernements d’Afrique de l’Ouest qui s’engagent dans des partenariats d’assistance en matière de RSS prennent l’initiative d’encourager l’harmonisation de l’assistance extérieure en :

• sensibilisant les partenaires aux risques liés à la duplication des efforts ;

• créant des mécanismes de coordination crédibles et des outils de coordination efficaces ;

• confiant à un partenaire extérieur considéré comme légitime (tel que l’UA, la CEDEAO, les Nations Unies ou un partenaire bilatéral respecté) la responsabilité de coordonner l’ensemble des partenaires extérieurs ;

• favorisant le partage d’informations et l’échange avec les partenaires et entre ces derniers.

Encadré 12 : Le rôle des acteurs extérieurs pour soutenir le renforcement des systèmes nationaux

Lorsque la faiblesse des systèmes nationaux rend difficile l’alignement des partenaires extérieurs, ceux-ci doivent soutenir le renforcement de ces systèmes au lieu d’imposer leurs propres mécanismes.

Dans le cadre de partenariats efficaces destinés à générer des impacts structurels à long terme, les gouvernements des pays qui s’engagent dans un processus de RSS peuvent bénéficier d’un soutien extérieur pour renforcer leurs propres systèmes de gestion. À cet égard, l’appui des partenaires vise généralement au renforcement des capacités institutionnelles sur des aspects tels que :

• la gestion du cycle budgétaire ;

• la gestion des comptes publics et des dépenses dans le secteur de la sécurité ;

• l’établissement de rapports financiers sur la mise en œuvre de la politique publique relative au secteur de la sécurité ;

• l’organisation d’audits des comptes publics ;

• la rationalisation des procédures de passation de marchés ;

• le soutien aux initiatives de transparence, telles que les plans de lutte contre la corruption et le détournement de fonds ou d’actifs.

Au Togo, l’Union européenne met en œuvre un programme d’appui institutionnel pluriannuel dont l’un des volets vise à renforcer les modalités de prise de décisions économiques et la gestion des finances publiques, parallèlement à divers projets d’appui budgétaire. Bien que cet exemple ne concerne pas spécifiquement l’assistance en matière de RSS, il illustre la manière dont les partenaires internationaux peuvent améliorer le fonctionnement des systèmes nationaux tout en renforçant la prestation des services publics par ces systèmes.

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32 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

À l’évidence, les efforts d’harmonisation requièrent des niveaux élevés de confiance et de communication entre les acteurs nationaux et les partenaires au développement, mais également au sein de ces derniers. Le recours à des tableaux de bord intégrés permet de rendre compte de la diversité des initiatives d’assistance extérieure de manière synthétique et favorise ainsi des synergies utiles. Voir également la section 4.7 sur la coordination multiniveaux comme outil efficace de gestion des partenariats.

4.4.2. Répartir les responsabilités en fonction des avantages comparatifs de chaque partenaire extérieur

Afin d’accroître l’efficacité du soutien extérieur, le Programme d’action d’Accra promeut le principe de la spécialisation de l’assistance internationale. Ce texte encourage les acteurs internationaux à se focaliser sur un petit nombre de secteurs où ils présentent un réel avantage comparatif, de manière à restreindre l’étendue de leur intervention tout en en renforçant la qualité.

Certains partenaires au développement procèdent ainsi à une répartition du travail en fonction de leurs mandats et compétences respectifs. Dans le cas de la RSS, cette répartition des tâches peut conduire à un partage des responsabilités entre partenaires extérieurs pour l’appui à certaines réformes sectorielles (tels que la réforme de la défense, de la police, de la justice ou encore la réforme du système pénal) ou projets transversaux (tels que le soutien au contrôle parlementaire du secteur de la sécurité, la promotion des droits humains ou de l’égalité hommes-femmes dans ce secteur).

En menant conjointement des analyses SWOT (forces, faiblesses, opportunités, menaces) pour déterminer les domaines où chaque partenaire extérieur peut offrir un avantage comparatif, les autorités des pays bénéficiaires peuvent encourager efficacement la spécialisation de leurs partenaires afin d’accroître l’efficacité du soutien extérieur.

4.4.3. Bâtir des synergies

Prendre en compte les avantages comparatifs de chaque partenaire extérieur permet d’identifier les domaines dans lesquels leurs valeurs ajoutées respectives se renforcent mutuellement. Cela favorise des synergies qui contribuent à amplifier l’impact de l’assistance extérieure, tout en améliorant la cohérence globale du soutien extérieur à la RSS. Des pistes de synergies peuvent être identifiées à tous les niveaux, qu’il s’agisse d’une activité ponctuelle ou plus largement d’un projet ou d’un programme.

Les autorités nationales peuvent aussi encourager les partenaires au développement à utiliser les modalités de coopération conçues pour des interventions conjointes, telles que les mécanismes de financement commun ou de cofinancement, pour faire en sorte que les responsabilités soient partagées au mieux selon un cadre global coordonnant ce soutien extérieur.

Ces modalités impliquent généralement les éléments suivants :

• analyser et identifier conjointement les objectifs du programme ;

• concevoir les programmes et planifier conjointement leur mise en œuvre en précisant le rôle et la responsabilité de chaque partenaire ;

• effectuer un suivi et une évaluation, ainsi qu’un audit conjoints ;

• mener des processus conjoints de réflexion critique dans le cadre du suivi et de l’évaluation.

En tant que telles, ces modalités créent un élan permettant une harmonisation de la vision et des outils de gestion. En outre, les financements communs et l’harmonisation des procédures réduisent les coûts de transaction et allègent la gestion pour les gouvernements bénéficiaires.

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33Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

4.5. Assurer une gestion axée sur les résultats dans un cadre national

4.5.1. Comprendre les cadres d’évaluation des performances

Les engagements internationaux visant à assurer l’efficacité de la coopération au développement appellent les acteurs du développement, ainsi que les pays bénéficiaires, à gérer et à mettre en œuvre leurs projets et programmes à travers des cadres axés sur la performance. Ces cadres ont pour but de faciliter la gestion des interventions de manière à produire les résultats escomptés à moindre coût et conformément à un plan convenu.

Les cadres d’évaluation des performances se fondent sur l’identification concertée des objectifs à atteindre (résultats visés) et sur la détermination d’indicateurs pertinents afin d’évaluer les progrès vers la réalisation de ces objectifs. Les systèmes d’établissement de rapports axés sur les résultats assurent le suivi des progrès réalisés, tandis que les systèmes d’évaluation axés sur les résultats identifient les facteurs de réussite ou d’échec des programmes, ainsi que les mesures à prendre pour améliorer les résultats.

Le fait d’utiliser à la fois des indicateurs de résultats et des systèmes de suivi de ces résultats donne l’impulsion nécessaire pour intégrer les résultats solidement documentés – issus de cette évaluation de la performance – dans les processus de prise de décisions à différents niveaux : opérationnel, institutionnel et politique. En ce sens, lorsque les systèmes d’évaluation axés sur les résultats sont liés à des systèmes d’établissement de rapports axés sur les résultats, ils deviennent de précieux outils de gestion.

4.5.2. Favoriser une culture institutionnelle de la gestion axée sur les résultats

Dans plusieurs États membres de la CEDEAO, appliquer une gestion axée sur les résultats requiert un changement fondamental des cultures institutionnelles au sein de l’administration publique, en particulier dans le secteur de la sécurité. Les institutions de sécurité de nombreux pays s’appuient peu sur ce type d’instruments pour élaborer et mettre en œuvre leurs politiques. Par conséquent, la création d’une culture de la gestion axée sur les résultats nécessite des efforts à long terme et des approches graduelles.

Malgré les capacités limitées de certains organes gouvernementaux, les États membres de la CEDEAO peuvent généralement intégrer dans leur programmation en matière de RGSS des cadres, nationaux, de gestion axés sur les résultats. Il peut être utile de mettre en place des mécanismes de gestion du changement pour accompagner l’adoption de pratiques d’évaluation de la performance, afin de réduire les risques de résistance du personnel face à de telles évaluations.

4.5.3. Élaborer des outils efficaces pour une gestion axée sur les résultats

Les cadres de gestion nationaux permettent aux gouvernements d’Afrique de l’Ouest d’organiser leurs propres processus de réforme et d’élaborer les outils les plus appropriés pour suivre l’avancement des initiatives selon leurs contextes nationaux et institutionnels spécifiques. Conformément au principe de l’alignement, les partenaires extérieurs doivent adapter leurs cadres de gestion aux outils nationaux d’évaluation de la performance, et non pas l’inverse.

Bien que les cadres logiques ou les théories du changement soient souvent utilisés comme matrice type de la gestion axée sur les résultats, ils doivent être considérés comme des outils programmatiques dont la valeur dépend de la solidité de la planification stratégique sur laquelle reposent les réformes.

Au lieu de les envisager comme des exigences procédurales superficielles imposées par des partenaires extérieurs, les pays qui s’engagent dans un processus de RSS devraient considérer l’élaboration de ces outils comme un exercice leur permettant de décomposer leur vision stratégique en étapes opérationnelles qu’il est possible de suivre. Ainsi, ils progresseront plus facilement vers les objectifs prédéfinis. En tant que tel, cet exercice offre une occasion unique pour le pays qui s’engage dans un processus de RSS de définir les changements auxquels il aspire et de décliner sa stratégie générale en phases opérationnelles afin de la traduire dans la réalité. De plus, les cadres logiques doivent être considérés comme des instruments

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34 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

flexibles à adapter au contexte et à la stratégie nationale, contribuant à préciser en permanence les modalités opérationnelles de réalisation des objectifs de la RSS.

Étant donnés la complexité et le caractère sensible des processus de RSS, ces outils de gestion sont particulièrement utiles pour clarifier la logique des actions, ce qui contribue à rationaliser le processus de réforme, à séquencer les actions de la manière la plus efficace et à réduire les coûts connexes. Le suivi continu permet d’identifier les éventuelles erreurs d’appréciation susceptibles de nuire à la performance des projets sur le long terme, et d’opérer les corrections nécessaires en temps opportun.

Compte tenu du caractère essentiellement politique de la RSS, les paramètres techniques du cadre logique type peuvent s’avérer insuffisants pour suivre l’avancement des réformes. Outre les indicateurs de performance quantitatifs et autres outils de mesure fixes, un système de gestion efficace de la RSS axé sur les résultats doit également intégrer les évolutions des cultures institutionnelles, les normes éthiques et d’autres dimensions intangibles des résultats de la réforme.

Le plus important est que les interventions soutenues par les partenaires (activités, projets, programmes) respectent le cadre national conçu pour suivre les avancées de la réforme. Il s’agit là d’une condition sine qua non pour respecter le principe de l’alignement, comme décrit à la section 4.3.2. Il est indispensable que les partenaires adhèrent au système de suivi adopté au niveau national afin d’harmoniser les exigences en matière d’établissement de rapports et de faciliter un partage d’informations cohérent, que ce soit au niveau opérationnel ou au niveau stratégique.

4.6. Renforcer la confiance par le biais de mécanismes de redevabilité mutuelle efficaces

4.6.1. La redevabilité envers les mandants respectifs

Les orientations internationales pour une coopération au développement efficace appellent les partenaires au développement et les pays bénéficiaires à rendre des comptes, avant tout, à leurs mandants respectifs. Cela implique une responsabilité envers le Parlement et l’électorat quant à l’utilisation et l’impact des ressources disponibles au titre de l’assistance extérieure. Les partenaires extérieurs rendent généralement compte de leur action aux autorités qui les mandatent, notamment les conseils d’administration des organisations internationales ou les ministères des Affaires étrangères et des Finances, ainsi que les parlements des pays fournissant des ressources.

Les gouvernements bénéficiant d’un soutien extérieur pour mener un processus de RSS doivent, eux aussi, rendre des comptes à leurs mandants, par le biais de mécanismes de redevabilité à la fois internes et externes qui incluent :

• le Parlement et, en particulier, les commissions parlementaires chargées des questions de défense et de sécurité, ainsi que du budget et des finances ;

• les institutions de contrôle nationales indépendantes, telles que la Commission nationale des droits de l’Homme, le Bureau national des audits et l’agence indépendante chargée de la lutte contre la corruption ;

• les autorités locales, y compris les élus locaux et les autorités traditionnelles ;

• les acteurs de la société civile, y compris les organisations de femmes, les associations de jeunes, les centres de recherche universitaires, les mouvements pour la transparence ou encore les médias, y compris au niveau local et communautaire.

Dans la mesure du possible, ces institutions et organisations nationales doivent s’efforcer de dialoguer avec leurs homologues dans le pays partenaire. Les échanges entre les institutions et les organisations de contrôle peuvent améliorer la compréhension et la sensibilisation mutuelles quant au contexte de chacun des pays partenaires. Cela peut contribuer à renforcer le cadre du partenariat grâce à une diversification constructive des canaux de dialogue et de soutien politique.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 2 sur la programmation de la réforme du secteur de la sécurité.

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35Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

4.6.2. La redevabilité conjointe envers les parties prenantes nationales

Les autorités nationales et les partenaires extérieurs doivent également être conjointement responsables envers la population du pays engagé dans un processus de RSS avec un soutien extérieur. Les États d’Afrique de l’Ouest peuvent respecter cette exigence de redevabilité en menant notamment les actions suivantes :

• inclure des sessions d’information parlementaire dans les projets et les programmes de RSS soutenus par des partenaires extérieurs ;

• impliquer des représentants parlementaires dans les évaluations conjointes des projets et programmes soutenus des partenaires extérieurs ;

• planifier des visites de parlementaires et de représentants de la société civile dans les locaux des institutions de sécurité faisant l’objet d’initiatives menées grâce à un soutien extérieur ;

• habiliter et encourager le Parlement à auditionner des représentants des institutions partenaires extérieures qui souhaitent soutenir, soutiennent ou ont soutenu, des actions liées à la RSS ;

• habiliter des commissions d’enquête parlementaire et des institutions nationales des droits humains à enquêter sur les allégations de violations des droits humains, d’exploitation sexuelle et d’autres violences sexistes commises par des partenaires extérieurs ;

• encourager la société civile à effectuer une analyse budgétaire du secteur de la sécurité ;

• commander à des observatoires de la société civile ou à des centres de recherche un audit opérationnel indépendant des programmes soutenus par des partenaires extérieurs ;

• soumettre des programmes soutenus par des partenaires extérieurs à un audit indépendant, confié soit à des entreprises privées réputées recrutées à l’issue d’un processus concurrentiel, soit à une institution officielle chargée du contrôle financier telle que la Cour des comptes ou le Vérificateur général ;

• habiliter des organes indépendants de lutte contre la corruption à superviser l’assistance fournie par des partenaires extérieurs, ainsi que la gestion de ces ressources par le gouvernement ;

• permettre aux citoyens de participer au contrôle de l’assistance extérieure, en créant des canaux qui permettent aux citoyens de signaler les fautes graves commises par des membres du personnel des institutions partenaires extérieures, de dénoncer les pratiques financières frauduleuses d’acteurs nationaux comme internationaux, les abus et gaspillages des ressources publiques provenant de l’assistance internationale ;

• faciliter l’accès de la population aux rapports non confidentiels relatifs aux projets et programmes mis en œuvre grâce à un financement externe, par des partenaires extérieurs ou par d’autres formes de contributions extérieures.

4.6.3. La redevabilité réciproque

La responsabilité mutuelle repose sans doute pour l’essentiel sur la redevabilité réciproque des partenaires extérieurs et des acteurs nationaux du développement. Pour mettre en œuvre ce principe, les pays d’Afrique de l’Ouest doivent envisager l’assistance extérieure comme une opportunité d’établir des partenariats sur un pied d’égalité, et non comme une relation à sens unique entre donateur et récipiendaire. En effet, la plupart des pays de la région sont habitués à rendre compte à leurs partenaires extérieurs de l’utilisation des ressources allouées dans le cadre des programmes d’assistance, mais la réciproque est parfois plus difficile à obtenir.

Pourtant, il est important que les gouvernements des pays bénéficiaires élaborent des mécanismes efficaces visant à demander des comptes à leurs partenaires extérieurs quant à l’efficacité de l’assistance technique et financière que ceux-ci fournissent. Ces mécanismes doivent prêter attention aux insuffisances telles que :

• le non-alignement des programmes des partenaires extérieurs sur la politique nationale ;

• l’utilisation inadéquate des systèmes nationaux par les partenaires extérieurs ;

• la fragmentation de l’assistance extérieure et la mauvaise coordination entre les différents partenaires ;

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36 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• le manque de clarté dans la ventilation des ressources comptabilisées au titre de l’APD, y compris le poids excessif des coûts opérationnels des bailleurs de fonds ;

• le respect des délais pour les versements de fonds conformément aux accords contractuels ;

• la pertinence et l’accessibilité de l’assistance technique fournie, en incluant les cas éventuels de surévaluation des coûts d’expertise.

Dans la pratique, ce principe de redevabilité réciproque peut notamment se concrétiser par des évaluations conjointes des projets, un partage continu des informations et des réunions d’information conjointes régulières sur les projets. Lorsque cela est possible à moindre coût, les gouvernements nationaux peuvent envisager de mettre en place un mécanisme indépendant de suivi, impliquant des représentants des institutions partenaires extérieures, de l’administration nationale du pays concerné, de la société civile et des commissions parlementaires chargées des questions de défense et de sécurité. Ce mécanisme peut se voir confier un rôle de contrôle visant à garantir la crédibilité du processus de redevabilité mutuelle. La CEDEAO peut également être invitée à mettre en place un mécanisme de contrôle indépendant de la redevabilité mutuelle au titre de son soutien régional à la gestion efficace de l’assistance extérieure par ses États membres.

En outre, la communication joue un rôle majeur pour instaurer un climat de confiance avec les partenaires extérieurs. De manière générale, maintenir de bonnes relations avec les partenaires extérieurs sur la base d’échanges ouverts et transparents réduit le risque de perdre des opportunités de partenariats. Ce partage d’informations peut fournir l’occasion d’expliquer le contexte et de présenter les progrès accomplis et les défis rencontrés. En cas de lacunes dans la mise en œuvre de certains projets, il est préférable de communiquer de manière proactive sur la situation en présentant la nature des difficultés rencontrées et les mesures prises ou envisagées pour les surmonter. La confiance et la compréhension mutuelles entre partenaires reposent sur une communication ouverte et transparente. Les relations entre partenaires doivent être construites et entretenues dans l’objectif de pouvoir faire face ensemble aux situations difficiles.

4.7. La coordination multiniveaux comme outil efficace de gestion des partenariats

La coordination efficace de tous les acteurs, y compris les acteurs extérieurs, est un élément clé d’un processus de RSS efficace, résultant d’une dynamique endogène et piloté au niveau national. Conformément aux principes relatifs à l’efficacité de la coopération au développement, il est important de veiller à ce que les contributions des différents partenaires extérieurs s’inscrivent dans un cadre cohérent axé sur la réalisation des objectifs stratégiques de la RSS.

À cette fin, il convient d’assurer la coordination des partenaires à trois niveaux.

Encadré 13 : Élaborer un cadre solide de redevabilité des partenaires

Les mécanismes nationaux des pays impliqués dans un processus de réforme doivent offrir un cadre adapté à la reddition de comptes par les partenaires extérieurs. La transparence s’impose dans au moins deux domaines majeurs.

• L’éthique et le comportement : dans des pays comme le Libéria, les parties prenantes nationales ont été confrontées aux fautes graves commises par des acteurs extérieurs lors de la mise en œuvre de programmes d’assistance. Dans le cadre d’un partenariat d’assistance, des pratiques telles que la corruption et la discrimination fondée sur le genre dans l’attribution d’emplois ou de contrats ou l’exploitation sexuelle de membres de la population civile ne doivent être tolérées en aucun cas.

• L’utilisation des fonds et des moyens : la ventilation de dépenses réalisées directement par les partenaires internationaux peut parfois révéler une surreprésentation des coûts d’exploitation ou des coûts alloués à une expertise internationale qui pourrait être mobilisée au niveau national à moindres frais. La prévention de ces excès requiert un suivi, une analyse budgétaire et de solides capacités d’évaluation des projets.

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37Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

• La coordination entre les acteurs gouvernementaux permet de s’assurer que le gouvernement communique avec ses partenaires extérieurs d’une seule voix et de manière cohérente. Cette responsabilité peut être confiée à l’organe ou au mécanisme national chargé de coordonner le processus de RSS, à l’entité gouvernementale chargée de coordonner les relations avec les partenaires ou à une autre institution pertinente.

• La coordination entre les partenaires extérieurs permet de fluidifier le partage d’informations entre les partenaires et de faire en sorte que ceux-ci tiennent compte des contributions les uns des autres. Le gouvernement bénéficiaire peut demander à un partenaire extérieur jouissant d’une légitimité auprès de ses pairs de prendre la tête de la coordination des acteurs extérieurs. Ce rôle est souvent attribué au Bureau du coordonnateur résident des Nations Unies, à la représentation de l’UA ou de la CEDEAO dans le pays, ou à un partenaire bilatéral doté de la crédibilité et de la capacité nécessaires.

• La coordination des partenaires extérieurs par le gouvernement bénéficiaire permet de veiller à ce que l’ensemble des financements et des actions qui soutiennent le processus de RSS, quelles que soient leurs sources, s’inscrivent de manière cohérente dans l’agenda de réforme défini au niveau national. Il incombe généralement au mécanisme national de coordination de la RSS de superviser la cohérence de l’assistance extérieure avec les objectifs et les actions nationales. Pour ce faire, il faut des capacités institutionnelles permettant de centraliser les informations relatives aux partenariats et aux projets, et de faciliter le partage d’informations entre tous les acteurs impliqués, aussi bien nationaux qu’extérieurs.

Ces trois formes de coordination doivent être assurées à la fois au niveau politique et au niveau technique.

• Au niveau politique, la coordination est nécessaire pour assurer l’orientation stratégique continue du processus de réforme.

• La coordination intragouvernementale au niveau politique relève habituellement de la Présidence de la République, de la Primature ou, au niveau sectoriel, de ministres ou de directeurs, en fonction de la politique gouvernementale et de la complexité du projet/programme. Les orientations et la coordination générales du processus de RSS relèvent souvent de la responsabilité de dirigeants politiques (Chef de l’État ou du gouvernement) présidant le Bureau de la sécurité nationale, le Conseil national chargé de la RSS ou une entité similaire chargée de piloter ce processus de réforme. L’implication de ce niveau de décision garantit un soutien politique fort aux programmes de RGSS et fournit une vision stratégique cohérente.

• La coordination interpartenaire au niveau politique est généralement assurée par les chefs des représentations diplomatiques et des agences de développement, avec le guidage du coordonnateur des partenaires extérieurs.

• La coordination entre le gouvernement et les partenaires au niveau politique repose sur les échanges entre les autorités nationales à des niveaux décisionnels élevés et les dirigeants institutionnels des organisations et des agences partenaires au développement. Des canaux de communication déficients à ce niveau peuvent contribuer à accroître la volatilité et l’imprévisibilité de l’assistance extérieure. Le dialogue politique continu entre les autorités nationales et les dirigeants des institutions partenaires permet de s’accorder sur les conditions et les objectifs de l’assistance à fournir, et de maintenir une compréhension commune de ces aspects. Il existe plusieurs moyens de soutenir la communication à ce niveau, notamment (mais sans s’y limiter) les consultations bilatérales, les réunions de haut niveau et les échanges de courriers officiels.

• Au niveau technique, la coordination favorise la complémentarité dans la mise en œuvre des projets et des programmes, et plus généralement le travail quotidien lié à la RSS. La coordination technique renforce également la qualité des contributions des techniciens aux processus de prise de décision, en ce qu’elle offre une vision d’ensemble plus complète de la RSS du point de vue des praticiens.

• La coordination intragouvernementale au niveau technique requiert un partage des informations entre les membres de l’administration nationale et les praticiens, à la fois au sein et entre les institutions nationales. L’organisation régulière de rencontres techniques peut permettre aux

Pour plus d’informations, voir l’Outil 2 sur la programmation de la réforme du secteur de la sécurité.

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38 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

différents ministères d’examiner les mesures de réforme en cours, d’améliorer la collaboration inter-institutions et d’identifier les synergies possibles. En s’appuyant sur la complémentarité entre les différents acteurs étatiques impliqués dans le processus de RSS, cette forme de coordination contribue à optimiser l’utilisation des ressources nationales, à la fois humaines et financières, grâce à une approche globale et intersectorielle de la RSS. Pour favoriser cette forme de coordination, on peut, par exemple, créer des groupes de travail intersectoriels ou renforcer l’efficacité des groupes existants (voir encadré 14).

• La coordination interpartenaire au niveau technique repose sur des canaux de communication solides entre les agents chargés des projets et des programmes au sein des différentes institutions partenaires. La création de pôles ou de groupes de travail interagences peut contribuer à améliorer la coordination au niveau de chaque projet ou programme, en particulier parmi les partenaires qui soutiennent les mêmes acteurs ou domaines de réforme au niveau national.

• La coordination entre le gouvernement et les partenaires au niveau technique contribue à assurer une prestation efficace de l’assistance grâce à des canaux harmonisés. La mise en place de communautés de pratique ou d’autres forums de partage d’informations, de connaissances et d’expertises peut favoriser les interactions constructives entre les spécialistes et les praticiens des organes gouvernementaux et des institutions partenaires extérieures. En réunissant des spécialistes et des praticiens de différentes institutions nationales et partenaires, ces mécanismes contribuent à la circulation de l’information et facilitent l’identification des points d’entrée pour la collaboration et la mise en place d’initiatives communes. Dans certains cas, les formations conjointes prodiguées à certains membres du personnel technique de diverses institutions nationales et internationales peuvent offrir des occasions précieuses d’instaurer une communication interpersonnelle, ce qui facilite la collaboration au quotidien par la suite. Il est également possible d’organiser conjointement des évaluations des besoins, des examens de projets, des visites de terrain ou d’autres initiatives de gestion dans le cadre du cycle de projet afin de renforcer la coordination technique et de créer des opportunités de soutien réciproque, tout en mettant en pratique le principe de redevabilité mutuelle. Le partage d’informations sur les problèmes éventuels, les retards ou d’autres obstacles peut également renforcer la confiance et la collaboration au niveau technique.

La coordination des partenaires joue un rôle indispensable pour favoriser la cohérence des processus complexes de RSS et accroître l’impact de l’assistance extérieure. Elle contribue à :

• renforcer la crédibilité du gouvernement du pays bénéficiaire, qui fait preuve de leadership en assumant la responsabilité principale de la coordination ;

• réduire les risques de duplication des efforts, en évitant que des actions similaires ne soient entreprises en parallèle par différents acteurs ;

• réduire le risque d’actions contradictoires, car un manque de communication et de coordination entre les acteurs impliqués dans la fourniture et la gestion de l’assistance extérieure à la RSS peut conduire à des interventions contradictoires, ou qui se neutralisent mutuellement ;

• réduire les coûts d’exploitation grâce à des synergies, des interventions conjointes et un séquençage adéquat afin que chaque acteur et chaque opportunité de financement contribuent au volet de la réforme auquel ils apportent le plus de valeur ajoutée ;

Pour que le soutien extérieur soit efficace, il faut une grande confiance et une communication permanente entre le gouvernement bénéficiaire et les partenaires au développement à tous les niveaux.

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39Appliquer les principes de coopération efficace au domaine de la RSS

• tirer le meilleur parti de la valeur ajoutée de chaque acteur, à travers un partage adéquat des responsabilités qui prend en compte les avantages comparatifs des partenaires extérieurs en soutien aux objectifs nationaux ;

• mutualiser les connaissances par l’échange d’informations, de bonnes pratiques ou d’enseignements tirés de l’expérience, et par la mutualisation des moyens lorsque cela est possible.

Dans la mesure du possible, le gouvernement bénéficiaire ou l’organe chargé de la mise en œuvre de la réforme doit utiliser, renforcer et consolider les structures de coordination existantes au lieu de créer des structures parallèles. Cela renforce la cohérence des structures et garantit la pérennité des projets.

Dans certains cas, une coordination informelle entre les personnels travaillant directement sur certains projets est l’option la plus efficace. La multiplication des documents et de la correspondance circulant entre le gouvernement bénéficiaire et les partenaires au développement peut facilement entraîner des malentendus et des méprises. Pour atténuer ce risque et améliorer la circulation des informations, il est possible de créer des canaux de communication informels (parallèlement aux canaux officiels) entre l’institution partenaire et l’organe gouvernemental.

Encadré 14 : Mettre en place des groupes de travail inclusifs pour le suivi des actions complexes

La mise en place de groupes ou de comités de travail thématiques contribue souvent à renforcer la coordination, tout en assurant une approche inclusive au niveau technique. Ces groupes peuvent inclure des agents issus d’institutions de sécurité qui travaillent sur les projets, des représentants des commissions parlementaires chargées des questions de défense et de sécurité, des représentants des organes gouvernementaux compétents et, le cas échéant, d’autres parties prenantes, notamment les organes de contrôle et un représentant de l’institution ou du gouvernement pourvoyeur de fonds. En outre, ces groupes de travail doivent comprendre des représentants de la société civile et être composés aussi bien de femmes que d’hommes.

Le groupe de travail chargé de la coordination technique veille à la mise en œuvre des actions contribuant à atteindre les objectifs stratégiques de la RSS, dans les délais prévus et conformément à un plan convenu. Ces groupes de travail techniques agissent souvent comme des mécanismes de surveillance fondés sur la collaboration. Le groupe ou le comité de travail peut avoir besoin de travailler avec le comité chargé de contrôler le budget ou avec les services du budget pour assurer l’allocation des fonds en temps voulu et améliorer la rapidité et la prévisibilité du financement.

En tant que mécanismes de gestion de la réforme, ces groupes devraient, en règle générale, se composer uniquement de représentants des parties prenantes nationales. Toutefois, des partenaires extérieurs peuvent être invités à assister à des réunions particulières en tant qu’observateurs et/ou pour apporter des contributions ponctuelles.

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La mobilisation d’un soutien extérieur pour appuyer un processus de RSS, en particulier un soutien financier, requiert une stratégie claire et une approche harmonisée. Les États membres de la CEDEAO doivent donc procéder avec prudence et méthode lorsqu’ils se tournent vers des partenaires au développement pour solliciter un soutien à leur processus de RSS. Il est alors essentiel d’élaborer une stratégie cohérente en matière de partenariat et de mobilisation des ressources pour encadrer les relations de l’État avec les acteurs extérieurs. Il est tout aussi important de mettre en place les structures nécessaires pour exécuter cette stratégie.

La fragmentation des interventions extérieures peut compromettre l’efficacité de la coopération. Les autorités gouvernementales doivent tenir compte de ce problème en maintenant constamment le dialogue, la communication et la coordination entre leurs différentes entités sur tout projet de demande de soutien financier ou technique de grande ampleur.

Surtout, pour être efficace, la mobilisation d’un appui extérieur doit reposer sur un dialogue politique de haut niveau, qui établit clairement les objectifs communs poursuivis par toutes les parties impliquées dans le partenariat. Même s’il est fondé sur de bonnes intentions, un soutien extérieur non sollicité ou encadré de manière inadéquate peut porter atteinte aux objectifs de la réforme et entraver le leadership national et la dynamique endogène du processus.

5.1. Répartir clairement les mandats et les responsabilités pour l’établissement de partenariats

Pour un processus aussi complexe que la RSS, lorsque les mandats et les procédures régissant la mobilisation de ressources externes (formulation de demandes d’assistance, négociation et conclusion d’accords de partenariats) ne sont pas clairs, les institutions nationales risquent d’engager des discussions parallèles auprès des mêmes partenaires et de se trouver en concurrence pour l’obtention de ressources ou d’une assistance technique. Cela peut nuire à la cohérence globale et à l’utilité du soutien extérieur en entraînant, par exemple, des actions redondantes ou contradictoires. En outre, l’absence de coordination entre les parties prenantes nationales, en provoquant une fragmentation potentielle de la demande d’assistance, peut augmenter les coûts de transaction.

Du côté des partenaires, la difficulté d’identifier des interlocuteurs clairement et officiellement mandatés par les autorités nationales pour engager un dialogue en matière de coopération peut dissuader certains

Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

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42 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

acteurs extérieurs de s’impliquer dans le domaine sensible de la RSS. Si un gouvernement ne s’exprime pas d’une seule voix dans le cadre d’un dialogue avec les partenaires extérieurs, cela peut également nuire à la crédibilité du leadership national du processus de RSS et donner l’impression que les autorités nationales procèdent de manière confuse et indécise.

Pour éviter ces problèmes, il est essentiel de désigner un organe national chargé spécifiquement de piloter les discussions en matière de coopération. Le rôle d’un tel organe consiste d’une part à centraliser et à coordonner les demandes d’assistance émanant de diverses institutions nationales, et d’autre part à communiquer de manière adéquate, aux institutions publiques compétentes, les informations pertinentes sur les partenariats à venir, en cours et passés.

La responsabilité de coordonner les relations avec les partenaires susceptibles d’apporter un soutien extérieur est souvent confiée aux ministères des Finances, de la Planification ou des Affaires étrangères, mais d’autres structures peuvent également être désignées à cet effet, en fonction du contexte national. Lorsqu’il existe un mécanisme national de coordination de la RSS relevant directement de la Primature ou de la Présidence de la République, cet organe peut être chargé, en collaboration avec tous les ministères concernés, assurer la cohérence de la position nationale dans le cadre du dialogue avec les partenaires extérieurs. Quelle que soit la structure chargée de cette question, celle-ci doit surtout :

• disposer d’un mandat clair et des capacités nécessaires pour entamer des discussions politiques de haut niveau en se fondant sur les directives fournies par les plus hautes autorités nationales ;

• évaluer la cohérence entre les propositions soumises par les institutions nationales et les projets existants, de manière à éviter les approches redondantes et contradictoires ;

• veiller à ce que les propositions présentées à des partenaires extérieurs soient compatibles avec les priorités du gouvernement et conformes aux stratégies ou aux politiques convenues au niveau national.

Outre la désignation d’un organe de coordination au niveau interne, il est également important de clarifier les procédures de mobilisation de l’assistance, qui impliquent généralement diverses institutions nationales à différents niveaux et à différents titres :

a) Les discussions sur les domaines susceptibles de bénéficier d’un soutien extérieur peuvent être engagées soit par la direction de l’institution concernée (par exemple le ministre de la Défense, de la Sécurité ou de la Justice), soit par une institution intersectorielle ayant pour mandat de mobiliser l’assistance, au nom de ses ministères de tutelle et en se fondant sur l’expression de leurs besoins.

b) Lorsqu’un ministère de tutelle ou un organe gouvernemental identifie clairement un besoin d’assistance extérieure pour un volet de la réforme, il doit en informer les autres ministères concernés et s’enquérir des éventuelles interactions gouvernementales avec le partenaire visé, avant d’engager des discussions avec celui-ci.

c) Le ministère des Affaires étrangères peut jouer un rôle important d’interface entre les institutions nationales et les partenaires extérieurs, et doit être tenu informé de toute évolution affectant ses relations diplomatiques.

d) Il est généralement nécessaire d’informer le ministère de la Planification des projets proposés, afin d’assurer une vision stratégique et globale du soutien extérieur.

e) Dès qu’il est envisagé de faire appel à une assistance financière, il peut être nécessaire d’impliquer le ministère des Finances afin qu’il assure le suivi de ce financement extérieur, fournisse des conseils pour la gestion comptable des interventions proposées et intègre ces ressources extérieures dans la gestion du budget national. Ce ministère peut également faire office d’autorité centrale chargée des discussions relatives au financement extérieur versé dans le budget central du gouvernement.

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43Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

5.2. Comprendre l’environnement de l’assistance extérieure

Avant de chercher activement à mobiliser un soutien extérieur, les gouvernements d’Afrique de l’Ouest doivent avoir une vision claire des options de coopération existantes : quels sont les partenaires possibles, quels sont leurs domaines d’intérêt et leurs valeurs ajoutées, comment les modalités de coopération privilégiées par ces partenaires potentiels peuvent concorder, ou non, avec les besoins nationaux en matière de RSS, etc.

5.2.1. Identifier les sources potentielles de financement

Les gouvernements qui cherchent à mobiliser des ressources extérieures pour soutenir un processus de RSS doivent au préalable avoir une vision d’ensemble claire des partenaires financiers potentiels. L’encadré 16 présente un aperçu indicatif des partenaires potentiels pour les États d’Afrique de l’Ouest. La cartographie des sources potentielles de financement doit être établie au niveau national et actualisée aussi souvent que nécessaire.

Encadré 15 : Risques liés à l’absence de stratégie de mobilisation de ressources

En l’absence de procédures claires pour la mobilisation de ressources extérieures, les ministères de tutelle et les entités décentralisées sont souvent amenés à négocier directement avec des partenaires potentiels. Cela affaiblit le rôle des ministères des Finances et des Affaires étrangères dans la négociation et la gestion des propositions d’assistance. L’expérience a également démontré que l’absence de politique ou de stratégie claire en matière de mobilisation de ressources permet aux acteurs extérieurs d’imposer leurs priorités en créant des dissensions parmi les organes ou ministères de l’État concerné.

Si l’expression de besoins substantiels émane des ministères responsables des aspects essentiels du secteur de la sécurité (défense, sécurité, justice), la participation du ministère de la Planification (ou de son équivalent) peut contribuer à assurer une cohérence intragouvernementale. Par ailleurs, le ministère des Affaires étrangères joue traditionnellement un rôle important d’interface dans les relations avec les acteurs extérieurs, tandis que le ministère des Finances assume la responsabilité de coordonner les flux financiers en accord avec le cadre macroéconomique national.

Il est donc souhaitable que ces trois ministères soient systématiquement tenus informés de toute consultation avec des partenaires bilatéraux qui serait engagée par les ministères ou les institutions chargés des aspects clés du secteur de la sécurité.

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44 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

La cartographie des partenaires potentiels permet au gouvernement qui la réalise d’explorer des opportunités innovantes de partenariat au-delà du groupe des partenaires « traditionnels » avec lesquels il a noué des liens historiques. L’élargissement du réservoir de partenaires extérieurs accroît les sources de financement et réduit la dépendance envers une seule source d’assistance.

De nouveaux partenaires peuvent être identifiés après d’États ou d’organisations qui ne disposent pas d’une représentation diplomatique dans le pays, mais qui soutiennent activement, sur la scène internationale, des problématiques telles que la gouvernance démocratique, la participation de la société civile, l’accès des femmes et des filles à la justice et à la sécurité, la mise en place de services de police communautaires, le respect des droits humains ou d’autres questions constituant des points d’entrée solides pour soutenir un processus de RSS.

Le secteur privé est une source potentielle de financement qui est souvent négligée. En soulignant les impacts bénéfiques de certaines réformes sur le climat des affaires, les autorités nationales peuvent encourager les opérateurs économiques à s’impliquer activement, par exemple en soutenant le développement des capacités des services publics de lutte contre la criminalité et le renforcement des institutions qui garantissent l’état de droit.

Il est aussi important de sensibiliser le secteur privé aux avantages générés par des politiques d’entreprises responsables, qui soutiennent des projets d’appui aux populations locales, tels que ceux visant à améliorer l’accès des femmes et des filles à la justice et de la sécurité. Les entreprises privées peuvent s’impliquer dans la RSS en finançant des projets de la société civile, ou en soutenant le développement des infrastructures de défense et de sécurité par le biais de contributions financières ou de dons de matériel non lié au combat (véhicules, matériels de communication, etc.), l’objectif étant alors de contribuer à la professionnalisation de ces forces.

Cependant, étant donnés le caractère sensible et la complexité de la RGSS, les gouvernements bénéficiaires doivent déterminer soigneusement le cadre juridique et opérationnel de leurs accords de partenariat financier avec le secteur privé. Lorsqu’une source de financement potentielle est envisagée, en particulier

Encadré 16 : Quels partenaires potentiels peuvent soutenir la mise en œuvre de la RSS en Afrique de l’Ouest ?

Les partenaires potentiels de mise en œuvre de la RSS en Afrique de l’Ouest incluent, sans s’y limiter, les acteurs suivants :

• Les organisations multilatérales dont sont membres les pays ouest-africains, telles que l’ONU, l’UA, la CEDEAO, l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), l’Union du fleuve Mano, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le Commonwealth, etc.

• Les institutions financières internationales ou régionales, telles que la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Banque ouest-africaine de développement (en tant qu’instrument de financement du développement de l’UEMOA), etc.

• D’autres organisations multilatérales, telles que l’Union européenne (UE), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), etc.

• Les partenaires bilatéraux (les États et leurs agences), dans les pays développés ou émergents.

• Les acteurs de la société civile au niveau international, tels que les fondations et ONG internationales, les institutions universitaires et de recherche, les groupes de réflexion et équipes internationales d’experts-conseils, etc.

• Les entreprises de sécurité privées.

• Les entreprises du secteur privé (non spécialisées dans le domaine de la sécurité).

Le gouvernement peut impliquer des entreprises du secteur privé par des moyens divers, y compris par des politiques relatives à la responsabilité sociale des entreprises et des mesures fiscales ciblant ces opérateurs économiques.

Source : Ornella Moderan, « Leadership politique et dynamique endogène des processus de réforme du secteur de la sécurité », in Ornella Moderan (dir.), Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest (Genève : DCAF, 2015).

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45Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

si elle provient du secteur privé, il est important que les autorités évaluent avec attention les antécédents et la crédibilité de cet acteur en tant qu’éventuel partenaire. Dans la plupart des cas, il est conseillé d’impliquer pleinement la société civile dans ces discussions. Surtout, il faut que toutes les sources de financement respectent les priorités du gouvernement et soient traitées par le biais de procédures transparentes, afin de garantir le principe de redevabilité et de réduire les risques de corruption ou de conflits d’intérêts.

5.2.2. Cartographier les profils et les domaines d’intérêt des partenaires potentiels

Les organisations internationales et les agences de coopération des pays partenaires ont généralement un mandat précis et des domaines d’intérêt particuliers, qui délimitent aussi leurs domaines de spécialisation et leurs champs d’expertise. Leur politique étrangère (pour les partenaires bilatéraux) ou leurs mandats (pour les organisations multilatérales) déterminent généralement leurs domaines d’engagement prioritaires sur le plan international. De ce fait, elles ont des attentes et des domaines d’intérêt variables, ce qui ouvre différentes opportunités de soutien direct ou indirect à la RSS.

Aussi est-il important de commencer par cartographier le profil des partenaires financiers potentiels, en tenant compte notamment des éléments suivants :

• la portée de leurs mandats ;

• l’historique de leurs collaborations avec des institutions nationales ;

• les soutiens apportés dans le passé à des processus de RSS dans la région ou à l’échelle mondiale ;

• leurs domaines d’intérêt stratégiques explicites et implicites ;

• leurs perspectives de financement, en évaluant les fonds disponibles, les opportunités de financement, ainsi que les conditions et directives pour accéder à un soutien financier.

Voir également l’encadré 17 sur les dimensions à prendre en compte pour cartographier les partenaires éventuels.

Les partenaires au développement offrent un soutien à des programmes qui reflètent leurs préoccupations humanitaires, leurs domaines d’intérêt stratégiques et les priorités de leur politique de développement. Comprendre clairement les motivations de ces acteurs permet de mobiliser la forme d’assistance adéquate auprès du partenaire le mieux à même de la fournir

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46 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Dans la mesure où chaque partenaire potentiel utilise une méthodologie spécifique pour déterminer les fonds alloués en soutien aux programmes de RSS, l’identification des priorités de chacun aide à établir une approche de coopération mutuellement profitable, qui recoupe les intérêts prioritaires des partenaires de part et d’autre. Cela peut permettre aux gouvernements qui s’engagent dans un processus de RSS de mieux évaluer la compatibilité de leurs besoins avec les priorités des partenaires en question, et de déterminer quel type de partenaires est le plus pertinent selon les domaines concernés.

Même si certains objectifs sous-jacents et sensibles ne sont pas toujours énoncés ouvertement, les ambassades et les bureaux locaux des partenaires au développement sont généralement en mesure de répondre aux questions du gouvernement du pays bénéficiaire quant aux attentes et aux intérêts des institutions de coopération qu’ils représentent. Le ministère des Affaires étrangères devrait, de préférence, assurer le dialogue politique avec les partenaires extérieurs par le biais de ses missions dans le pays. Les ministères de tutelle qui sollicitent un soutien extérieur doivent être tenus informés de toute évolution pertinente dans les relations diplomatiques de leur pays. En collaboration avec les ministères ou les organes de tutelle, le ministère des Affaires étrangères est souvent bien placé pour contribuer à l’identification de nouvelles pistes de partenariat.

5.2.3. Comprendre les modalités de financement

Le terme « modalités de financement » renvoie à la façon dont l’APD est fournie. Les processus de transfert de financements suivent différentes modalités qui déterminent la manière dont les fonds sont gérés et décaissés. Ces modalités incluent le type et les conditions du financement, les canaux de décaissement, les conditions de passation des marchés, ainsi que le ciblage et le suivi des ressources allouées par le partenaire extérieur.

L’APD peut être fournie selon différentes modalités, notamment :

• l’appui budgétaire : les fonds sont versés directement dans le budget national, ce qui permet aux autorités d’allouer de manière discrétionnaire les fonds à la mise en œuvre des programmes nationaux ou sectoriels ;

Encadré 17 : Éléments à prendre en considération pour cartographier les partenaires éventuels

Parmi les éléments à prendre en compte lors de la cartographie des partenaires éventuels, on peut mentionner :

• L’identification de tous les acteurs extérieurs susceptibles dans l’absolu, de soutenir le processus de RSS dans son ensemble ou un volet spécifique de la réforme.

• La définition des mandats, des domaines d’intérêt et des domaines d’engagement prioritaires spécifiques de chaque partenaire potentiel.

• L’évaluation de la cohérence entre les domaines d’intérêt des partenaires et les priorités nationales du pays qui sollicite une assistance.

• Les enseignements tirés des expériences de coopération passées avec ces partenaires, en particulier concernant :

ú leur degré de compréhension du contexte national et leur réceptivité aux contributions des parties prenantes nationales ;

ú leur prise en compte du leadership national et de la dynamique endogène des programmes de développement en général, et de la RSS en particulier ;

ú leur flexibilité quant aux conditions de partenariat (y compris les questions opérationnelles telles que la limitation des domaines susceptibles d’être sous-traités) ;

ú leur volonté d’établir un partenariat sur un pied d’égalité ;

ú leur fiabilité dans le respect des financements promis et des autres formes d’engagements officiels ;

ú l’utilité et l’efficacité du soutien technique que ces partenaires sont susceptibles de fournir, outre leur soutien financier.

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47Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

• l’appui aux programmes sectoriels : le financement est fourni en appui d’un secteur ou d’une stratégie thématique, sur la base d’une collaboration étroite entre les partenaires et d’un processus structuré visant à accroître le recours aux systèmes nationaux ;

• l’appui aux projets : le financement est fourni par le biais de structures de gestion et de dispositifs ad hoc ;

• la coopération ou assistance technique : les partenaires au développement fournissent ce type de soutien pour favoriser le transfert durable des compétences.

De nombreux instruments de financement peuvent être utilisés pour mettre en œuvre chacune de ces modalités. Par exemple, un programme sectoriel ou un projet autonome peut bénéficier d’un mécanisme de financement multi-contributeurs.

Les partenaires internationaux des États d’Afrique de l’Ouest peuvent assurer un soutien à un processus de RSS par le biais de :

• différents types de financement (subventions, prêts, etc.) ;

• différentes modalités d’approvisionnement des fonds (transfert de liquidités ou soutien en nature, sous forme de matériels ou de compétences techniques qui peuvent être liés à des sources de financement spécifiques) ;

• divers canaux de décaissement et mécanismes de traçabilité : appui budgétaire général (ABG), appui budgétaire sectoriel (ABS), appui aux programmes sectoriels (APS), financement de projets autonomes, financement commun ou fonds fiduciaires multi-contributeurs réservés à des fins spécifiques ou non.

Chacune de ces modalités présente des avantages et des inconvénients qui lui sont propres (voir l’encadré 18 pour une vue d’ensemble sur la base des expériences du Ghana et de la Sierra Leone). Il est essentiel de comprendre la nature et les implications de toutes les options disponibles, afin de déterminer quelles modalités de partenariat sont les mieux adaptées au contexte national. Si certaines dimensions comme le degré d’ouverture démocratique, la stabilité institutionnelle, la capacité nationale à lutter contre la corruption et la fiabilité du système de finances publiques incitent les partenaires extérieurs à favoriser telle ou telle modalité de coopération, le gouvernement du pays bénéficiaire doit tenir compte de ces paramètres tout en veillant à ce que les options proposées soient compatibles avec ses propres priorités, besoins et capacités de gestion.

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48 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Encadré 18 : Avantages et inconvénients de différents types d’instruments financiers7

Type d’instrument financier

Avantages Limitations/mises en garde

Appui budgétaire général (ABG)

• Les fonds sont acheminés au travers du budget national du pays bénéficiaire. Cet appui vise à soutenir les priorités budgétaires globales et permet au pays bénéficiaire de conserver une certaine flexibilité dans l’allocation de ces fonds, dans le cadre de la gestion souveraine du budget national.

• L’ABG accroît le volume des fonds disponibles pour la programmation discrétionnaire du budget de l’État et incite les pays partenaires à améliorer leurs systèmes de planification et de budgétisation dans leur ensemble.

• Ce financement n’est généralement pas préaffecté et respecte pleinement les règles et les procédures nationales relatives à la gestion des dépenses publiques.

• L’ABG exige un certain degré de fiabilité institutionnelle et de discipline budgétaire, ce qui peut être particulièrement difficile dans les contextes fragiles.

• Les risques incluent le manque de transparence des flux de financement en raison de procédures inadéquates de compte-rendu. Cela renforce le risque d’une faible redevabilité au niveau national.

• Compte tenu de son caractère général, l’ABG n’est pas destiné à soutenir la mise en œuvre de telle ou telle réforme en particulier (en les ciblant explicitement en amont). Plutôt, il appartient au gouvernement bénéficiaire de définir s’il souhaite utiliser cet ABG en appui à des réformes de nature politique.

Appui budgétaire sectoriel (ABS)

• Les fonds sont acheminés au travers du budget national du pays bénéficiaire, mais ciblent précisément un secteur prédéfini (par exemple, la défense, la sécurité intérieure, la protection civile, la réforme pénale, etc.).

• Cette option de financement permet de soutenir un secteur spécifique, sous la conduite du gouvernement national et en utilisant des procédures communes de gestion et d’établissement de rapports.

• Pour cette forme d’appui, il est habituellement préférable de garder un peu de flexibilité pour ce qui est du détail des postes d’affectation des fonds au sein d’une même branche sectorielle.

• Cette modalité de financement peut parfois créer des problèmes de coordination, de gestion et de reddition de comptes lorsqu’elle est allouée à des programmes sectoriels qui intègrent les secteurs de sécurité traditionnels tels que la défense et les services de renseignement (caractérisés par une culture du secret).

Appui aux programmes sectoriels (APS)

• L’APS repose souvent sur un cadre budgétaire commun, et soutient généralement un secteur spécifique ou une stratégie thématique.

• Les fonds peuvent être acheminés à travers un panier commun ou des financements de projet dans le cadre d’une approche sectorielle clairement définie.

• L’APS a des avantages s’il s’aligne clairement sur les priorités du gouvernement, s’il est planifié dans le budget national et s’il est assorti de stratégies prédéfinies de désengagement.

• Il faut toutefois prêter attention à ce que ce type d’appui ne génère pas des coûts excessifs pour le gouvernement récipiendaire.

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49Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

À noter : Dans les contextes fragiles, le recours aux fonds fiduciaires multi-contributeurs, paniers communs et autres dispositifs de financement collectifs peut présenter un certain nombre d’avantages. Tout d’abord, ce type de dispositif suppose en amont une bonne coordination des bailleurs, et renforce en aval cette coordination. De plus, la multiplicité de contributeurs facilite une certaine continuité en termes de disponibilité des fonds. Il est parfois possible d’établir un calendrier des versements des contributions qui échelonne les entrées de fonds dans le temps et permet ainsi d’assurer une disponibilité continue dans le cadre d’une planification commune. Ceci permet de décaisser les rapidement en réponse aux besoins du terrain. Cependant, l’un des principaux risques associés à ces avantages est un ancrage national faible des interventions financées par ce moyen. En effet, mal intégré dans les structures gouvernementales existantes – et a fortiori en l’absence de telles structures au niveau national – ce type de dispositif peut vite faire l’impasse sur l’exigence d’une dynamique endogène des réformes. De telles interventions seront alors perçues comme un agenda des bailleurs et auront peu de chances de produire des résultats pérennes.

Appui aux projets

• Cette modalité est généralement mobilisée pour soutenir des projets autonomes. Les projets concernés sont assortis d’objectifs et de calendriers de mise en œuvre précis et qui leur sont propres, tout en restant cohérents avec les autres aspects de l’effort national.

• L’appui aux projets est parfois utilisé pour soutenir des investissements dans les infrastructures, qui peuvent être considérés comme des projets « autonomes ».

• Ce type de financement permet d’affecter des fonds à des activités spécifiques dans des sous-secteurs particulièrement sensibles au sein du secteur de la sécurité, tels que la défense ou les services de renseignement.

• L’appui aux projets répond habituellement à une demande nationale précise. Ce type d’appui est donc conçu en fonction de besoins clairement identifiés par le gouvernement national, ou au minimum avec son concours.

• Ce type de financement visant des projets spécifiques, il risque de ne pas être clairement aligné sur les priorités du gouvernement et les institutions existantes.

• Les gouvernements qui s’engagent dans la RSS gagneraient à encourager les partenaires à concevoir cette modalité de soutien d’une manière qui privilégie le transfert des connaissances et met l’accent sur la transmission durable de compétences. Ce type de soutien doit aussi permettre une optimisation des ressources (voir encadré 19).

• Cela étant, l’appui aux projets doit rester limité dans le temps et être assorti, dès le début, d’une stratégie de désengagement (exit strategy).

• À défaut d’une gestion stratégique, ce type de soutien peut rapidement conduire à la prolifération de projets parallèles et redondants, entraînant par la même occasion des coûts de transaction élevés pour le pays bénéficiaire.

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50 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Encadré 19 : Le concept d’optimisation des ressources

Le programme d’assistance extérieure de la Nouvelle-Zélande définit le concept d’optimisation des ressources (value for money) comme « l’obtention des meilleurs résultats possible en matière de développement au cours de la mise en œuvre d’une activité par rapport au coût total de la gestion et du financement de cette activité, tout en s’assurant que ces ressources sont utilisées de manière efficace, économique et sans gaspillage8. »

Utilisé à l’origine par le secteur privé, le concept d’optimisation des ressources est de plus en plus employé par les agences de développement et les pays partenaires pour définir le cadre d’allocation des fonds destinés à la coopération internationale et pour en rendre compte auprès de leurs contribuables. Ainsi, le Département du développement international (DFID) du gouvernement britannique considère que cette démarche vise à « maximiser l’impact de chaque livre sterling dépensée pour améliorer [. . .] la vie des populations9. »

Pour leur part, et malgré certaines références épisodiques et actions isolées inspirées par ce principe, la plupart des États bénéficiaires de programmes d’assistance internationale ne s’appuient pas encore suffisamment sur ce concept pour orienter leur approche et optimiser l’utilisation des ressources internes et externes allouées aux programmes de développement et de gouvernance, tels que la RSS.

Pourtant, le principe d’optimisation des ressources peut aider les gouvernements d’Afrique de l’Ouest et d’ailleurs à évaluer la valeur nette de l’assistance extérieure affectée à la RSS, en tenant compte non seulement du montant des fonds alloués et décaissés, mais aussi des coûts de transaction associés à ces allocations et du rendement social qu’ils génèrent (à travers la création d’emplois et le renforcement des capacités institutionnelles à long terme).

En tant qu’approche globale, le concept d’optimisation des ressources intègre les éléments suivants10.

• L’utilisation économique des fonds alloués : les biens et services sont-ils fournis au moindre coût tout en assurant un niveau de qualité adéquat ? Le principe de l’utilisation économique des fonds ne signifie pas que seules les options les moins coûteuses doivent être retenues ; l’objectif est plutôt d’obtenir la qualité désirée au meilleur prix. Par exemple, il peut être moins coûteux de solliciter les services d’un consultant pour élaborer un projet de politique institutionnelle en matière de lutte contre la discrimination et le harcèlement sexuel dans les services de police. Cependant, la nécessité d’obtenir l’adhésion de l’institution en question justifiera aisément la décision de choisir un processus d’élaboration des politiques plus inclusif, bien que plus long et plus onéreux : il en va du succès et de la pérennité du résultat final.

• Le rapport coût-efficacité des fonds alloués : le rapport coût-efficacité renvoie à l’utilisation optimale des ressources disponibles pour atteindre les objectifs fixés. L’enjeu est de vérifier si les mêmes résultats auraient pu être obtenus à moindres frais. Par exemple, certains partenaires extérieurs ont tendance à engager systématiquement des consultants internationaux, même si des experts nationaux compétents pourraient effectuer ce même travail à un moindre coût. À moins que cette décision ne renvoie, au cas par cas, à un risque réel en termes de réception du produit (par exemple), la préférence systématique accordée à une expertise étrangère constitue un réflexe qui va à l’encontre d’une utilisation efficace des fonds.

• L’utilisation effective des fonds alloués : les fonds utilisés ont-ils effectivement généré les résultats escomptés ? Il s’agit ici d’évaluer la mise en œuvre effective des mesures convenues et à leur contribution à la réalisation d’objectifs donnés. En reliant ces deux dimensions, on peut alors établir la pertinence des actions financées dans la perspective d’objectifs plus larges. Par exemple, si les fonds sont alloués dans l’objectif de développer des relations civilo-militaires constructives, la démarche d’optimisation des ressources cherchera à vérifier que toute activité financée dans ce cadre apporte une réelle valeur ajoutée pour la réalisation de cet objectif.

• L’utilisation équitable des fonds alloués : l’équité est étroitement liée à l’efficacité et l’effectivité ; il s’agit ici de vérifier que les bénéfices d’un programme d’assistance sont répartis équitablement et de manière à assurer les meilleurs impacts sociaux possibles. Par exemple, si une initiative visant à accroître la participation de la société civile n’a pas impliqué les organisations de femmes et les organisations à base communautaire, il est possible que les fonds disponibles n’aient pas été utilisés de la manière la plus équitable (et efficace) possible.

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51Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

5.3. Appréhender l’environnement de l’assistance extérieure

5.3.1. Choisir les modalités de financement en fonction des spécificités nationales

Il n’existe pas de modèle unique en matière de RSS. Toute élaboration de programme doit être adaptée aux spécificités du pays concerné. Cela vaut également pour les modalités de financement. Le contexte national détermine la faisabilité et l’opportunité des diverses options de financement, tant du point de vue des autorités nationales que des partenaires extérieurs.

Les diverses éléments d’un dispositif de financement (qu’il s’agisse de fonds d’appui spécifiques, des mécanismes de décaissement, etc.) peuvent avoir des effets différents selon les contextes. En fonction de la nature, des caractéristiques et des priorités d’un pays, les différentes modalités et les différents instruments de financement extérieur peuvent s’avérer plus ou moins appropriés. Par exemple, certaines caractéristiques nationales, telles que la fiabilité des systèmes financiers publics et la capacité de l’administration à lutter contre la corruption, déterminent si certains mécanismes de financement sont adéquats ou non.

Dans tous les cas, les gouvernements bénéficiaires doivent s’assurer que toutes les modalités d’appui retenues sont compatibles avec les besoins, les priorités et les capacités de gestion au niveau national.

5.3.2. Prendre en compte les préférences des partenaires

Afin de négocier les modalités de financement les plus appropriées, il est important que les gouvernements d’Afrique de l’Ouest comprennent au mieux la manière dont les partenaires conçoivent le soutien à la RSS dans la région, et plus spécifiquement dans leur pays. En règle générale, le contexte national détermine dans une large mesure la préférence des partenaires pour telle modalité de financement plutôt qu’une autre.

Il peut être difficile d’évaluer les préférences des partenaires au développement, dans la mesure où chacun a sa propre méthodologie d’analyse des demandes de financement et d’évaluation des capacités nationales de gestion des ressources allouées aux programmes de RGSS. Ces méthodologies ne sont pas toujours communiquées aux autres partenaires ou aux autorités du pays bénéficiaire. En outre, les différences d’approche et de perspective entre les partenaires accentuent l’incertitude quant à la flexibilité de l’allocation des ressources et de la gestion des risques, qui sont pourtant des facteurs important de succès pour les programmes de RGSS.

Situations de crise, pays en post-conflit ou en transition, démocraties stables : les pratiques des partenaires diffèrent selon les contextes. Par exemple, certains instruments de financement sont particulièrement difficiles à utiliser dans les pays fragiles et affectés par un conflit, et ce en raison de la déficience des systèmes de gestion des finances publiques, de l’absence de discipline budgétaire et de l’incapacité de ces pays à se plier aux exigences de réforme nécessaires pour se voir allouer des fonds externes. Afin d’obtenir des conditions plus souples, il est donc important que les gouvernements bénéficiaires démontrent la fiabilité de leurs mécanismes nationaux de gestion et de contrôle financiers.

Dans d’autres cas, les instruments de financement sont prédéterminés par les politiques internes du partenaire contributeur. Par exemple, la Commission européenne encourage ses services à privilégier le soutien à des programmes financés conjointement avec d’autres bailleurs de fonds internationaux. La Commission européenne cherche également à rationaliser ses interventions en se focalisant sur un nombre limité de secteurs par pays. Il appartient aux pays d’Afrique de l’Ouest d’entretenir avec leurs partenaires effectifs et potentiels un dialogue continu afin de comprendre les politiques des partenaires et d’adapter leurs stratégies de mobilisation de ressources en tenant compte des contraintes institutionnelles et politiques de ces derniers. Cette approche permet d’axer les négociations sur les domaines où les partenaires disposent d’une certaine marge de manœuvre.

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52 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

5.3.3. Soutenir une approche intégrée en encourageant le recours à l’appui budgétaire général plutôt que le financement de projets isolés

Les États d’Afrique de l’Ouest qui s’engagent dans des partenariats de financement pour leur processus de RSS devraient encourager leurs partenaires extérieurs à moins se focaliser sur le financement de projets uniques (autonomes) pour privilégier, au contraire, le soutien à des programmes ou à une programmation sectoriels par le biais d’un ABG ou de mécanismes similaires qui offrent une plus grande souplesse au niveau national. Cela contribue en effet à améliorer la gestion globale des ressources à la disposition des administrations nationales. De plus, l’ABG étant acheminé au travers du budget national, cela renforce la redevabilité démocratique du gouvernement en ce qui concerne l’allocation des fonds, le Parlement et les institutions d’audit public ayant plus facilement accès à ce budget dans une optique de surveillance.

Certes, la plupart des agences nationales préfèrent que l’assistance extérieure cible des projets autonomes, car cela leur donne un accès et un contrôle directs sur le financement. Mais une approche plus intégrée de la programmation renforce la cohérence stratégique. Cela nécessite donc un changement des habitudes et un leadership fort de la part des autorités nationales.

Conformément à leurs engagements relatifs à l’efficacité de la coopération internationale, certains bailleurs de fonds privilégient de plus en plus l’appui à des programmes de grande envergure qui s’inscrivent explicitement dans le cadre général de la mise en œuvre des politiques adoptées par le pays partenaire, plutôt que l’appui à de petits projets isolés.

On observe également une tendance croissante en faveur du cofinancement ou du recours à un financement commun. Cette évolution est peut servir les intérêts des gouvernements qui mènent un processus de RSS, dans la mesure où le cofinancement réduit le risque de duplication des efforts. Il faudra toutefois prêter attention aux risques énoncés plus haut.

Du côté du pays bénéficiaire d’un soutien extérieur, les accords de cofinancement présentent les avantages suivants :

• Ils réduisent les coûts de transaction et le fardeau administratif en harmonisant les méthodes d’établissement de rapports et d’autres exigences en matière de gestion ;

• Ils accroissent l’autonomie gouvernementale en matière d’allocation des ressources en fonction des priorités nationales.

5.4. Renforcer la crédibilité pour améliorer la mobilisation de ressources

5.4.1. Établir un cadre de partenariat d’égal à égal

En règle générale, et notamment en raison du caractère politiquement sensible de la RSS, les accords d’assistance extérieure devraient être fondés sur la confiance et la compréhension mutuelles entre les parties, et reposer sur une communauté de principes fondamentaux visant à assurer l’efficacité de ces partenariats. Les engagements internationaux en la matière fournissent un cadre général solide, qui peut être complété par des principes propres à chaque contexte.

S’agissant d’établir une relation d’égal à égal avec les partenaires extérieurs, les pays de la CEDEAO devraient envisager l’assistance extérieure comme un partenariat stratégique et engager activement un dialogue politique de haut niveau quant aux objectifs à poursuivre. Cette démarche peut jouer un rôle déterminant pour se départir de la relation unilatérale traditionnelle entre bailleur de fonds et bénéficiaire, qui engendre un déséquilibre des relations et compromet la crédibilité du leadership national. Les discussions sur les aspects techniques et programmatiques ne devraient intervenir qu’après la conclusion d’un accord au niveau politique qui fixe la nature et les objectifs du partenariat.

Cette phase préliminaire de dialogue politique offre aux gouvernements d’Afrique de l’Ouest l’opportunité d’énoncer clairement leurs priorités, afin d’inviter les partenaires à s’aligner sur ces priorités. Elle leur permet également d’évaluer l’opportunité et la pertinence du partenariat en question, toute forme d’assistance n’étant pas forcément souhaitable. Il s’agit là d’un moment crucial où les autorités des pays

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53Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

qui sollicitent une assistance peuvent affirmer leur leadership stratégique sur le processus de réforme et définir les règles du jeu en collaboration avec leurs partenaires. Les ministères des Affaires étrangères peuvent jouer un rôle essentiel à cet égard en engageant et en maintenant un large dialogue politique avec les partenaires extérieurs.

Afin d’instaurer un climat de confiance, les gouvernements qui sollicitent une assistance extérieure devraient en outre mettre en place de solides systèmes de redevabilité, fondés à la fois sur des procédures de gestion harmonisées, la systématisation d’audits indépendants et l’opérationnalisation des mécanismes nationaux d’audits des comptes publics, l’effectivité d’un contrôle démocratique par la commission parlementaire chargée des finances et du budget national. Il est également important que les autorités facilitent l’accès des citoyens et d’acteurs crédibles de la société civile aux éléments dont ils ont besoin pour effectuer un suivi attentif de l’utilisation des deniers publics alloués à la réforme et à la gouvernance du secteur de la sécurité.

5.4.2. Inscrire l’assistance extérieure dans le cadre d’un financement national de la RSS

Il est important, pour les gouvernements qui souhaitent mobiliser un financement extérieur pour soutenir leur processus de RSS, de démontrer de manière convaincante leur capacité à conduire des réformes ainsi que leur fiabilité en tant que partenaires assumant pleinement la responsabilité première de la RSS. À cette fin, il est essentiel d’inscrire l’assistance extérieure dans le cadre plus large d’un financement de la réforme élaboré à l’échelle nationale. Ce cadre doit être conçu de manière stratégique et globale afin d’assurer un rapport coût-efficacité favorable, une hiérarchisation adéquate des priorités, la transparence et la redevabilité.

Conformément aux principes fondamentaux du leadership national et de la dynamique endogène des processus de RSS, le soutien extérieur doit uniquement venir en complément de la mobilisation de ressources nationales. En termes de financement, cela signifie que les contributions extérieures sont destinées à compléter les ressources nationales en général, et certaines dispositions budgétaires nationales en particulier. En allouant une masse critique de ressources nationales à la RSS, les autorités envoient le signal fort qu’il s’agit d’un processus national, souverain et dont l’impulsion provient bel et bien de l’intérieur.

Par exemple, l’allocation de fonds provenant du budget national pour lancer des activités préparatoires visant à définir les besoins et les priorités de réforme (voir encadré 5) permet de déclencher la mobilisation de ressources complémentaires de la part de partenaires extérieurs, tout en démontrant le caractère endogène du processus et la responsabilité assumée de l’État eu égard à la gouvernance de la sécurité. Pour les États d’Afrique de l’Ouest, c’est aussi un moyen efficace de prendre clairement en main l’évaluation de leurs besoins, la définition de leurs priorités et la création des conditions permettant

La mobilisation de ressources pour la RSS ne doit pas commencer pas avec la formulation de requêtes d’appui extérieur, mais au contraire avec l’affectation d’un financement national de base. L’objet des contributions étrangères est de venir compléter les ressources mobilisées au plan national, et non de s’y substituer. Le point 17.1 des Objectifs de développement durable des Nations Unies reconnaît le besoin important d’« améliorer, notamment grâce à l’aide internationale aux pays en développement, la mobilisation de ressources nationales en vue de renforcer les capacités nationales de collecte de l’impôt et d’autres recettes11. »

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54 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

l’adhésion de leurs partenaires à un programme de sécurité établi au niveau national. Le financement national de ces évaluations préliminaires démontre que l’État a conscience de la nécessité d’une réforme et témoigne de son engagement à consacrer du temps, des efforts et des ressources aux réformes pour améliorer la prestation des services publics en matière de justice et de sécurité.

Ainsi, l’intégration des coûts de la RSS au budget de l’État contribue à démontrer l’engagement politique en faveur de la réforme et souligne le leadership et la responsabilité des autorités nationales en ce qui concerne les dépenses de défense et de sécurité. Compte tenu des contraintes budgétaires de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest, la conduite de réformes fiscales et l’introduction de mesures d’incitation à l’épargne et aux investissements nationaux peuvent aider à renforcer la capacité nationale de financement de la RSS.

Encadré 20 : Apparier les contributions extérieures au financement national grâce au financement de projets communs et au cofinancement

Le financement des programmes de RSS par le budget national est un indicateur par excellence de deux facteurs de réussite essentiels : la volonté politique et l’engagement national.

[…]

Tout comme les ressources nationales allouées à la RSS, les financements fournis par les partenaires au développement doivent être pris en compte dans une approche de programmation intégrée, et leur affectation réalisée dans le cadre du budget de l’État.

Établir des mécanismes de convergence entre investissement national et contributions extérieures permet de garantir la cohérence budgétaire et l’utilisation rationnelle de toutes les ressources imputées à la RSS. À cet effet, il existe des mécanismes d’appariement qui permettent de relier l’utilisation des contributions extérieures à celle des ressources nationales. Les plus fréquents sont le financement conjoint de projets et les fonds de contrepartie.

Le financement conjoint de projets consiste, pour l’État, à participer au financement de chaque projet appuyé par un partenaire extérieur. Il faut alors déterminer, pour chaque projet, la part (pourcentage) des coûts que l’État entend supporter. À travers le financement conjoint, les autorités nationales jouent un rôle de bailleur au même titre que le partenaire extérieur, ce qui renforce le leadership national.

Sur le plan technique, le financement conjoint de projets suppose que l’État concerné et son partenaire extérieur s’accordent sur un système de gestion partagé, depuis le montage du projet jusqu’à l’évaluation des coûts, la détermination des expertises requises, le recrutement de consultants, les procédures d’achats, le suivi et l’évaluation, etc. La mise en place d’un tel dispositif peut s’avérer difficile dans un État fragile et particulièrement limité dans ses ressources.

Le fonds de contrepartie consiste, pour sa part, à prévoir dans le budget national un fonds commun provisionnel destiné à couvrir la part de l’État dans le financement des activités de la RSS, toutes composantes confondues. Ce dispositif présente le double avantage d’une disponibilité immédiate des fonds et d’une relative souplesse quant à leur utilisation. Il peut constituer une solution commode lorsque les charges réciproques restent à convenir avec chaque partenaire ou que la part de l’État n’est pas évaluée de façon précise.

Cette approche présente toutefois le risque d’une dissipation opaque ou inefficiente des fonds. Pour limiter ce risque, il est recommandé d’associer aux fonds de contrepartie des règles de gestion propres à favoriser la transparence : critères d’éligibilité de l’activité à financer et du partenaire de mise en œuvre, plafonnement des montants à octroyer, modalités de déboursement et de contrôle, etc.

Source : Mpako Foaleng et Amadou Mahamane Ousmane, « La programmation de la réforme du secteur de la sécurité », in Ornella Moderan (dir.), Boîte à Outils pour la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest (Genève : DCAF, 2015).

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55Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

5.4.3. Renforcer les capacités de gestion au niveau national

Les capacités de gestion au niveau national constituent un facteur de crédibilité important, lorsqu’il s’agit de négocier un appui extérieur. En général, les partenaires sont davantage enclins à allouer des fonds à des pays dotés d’une administration opérationnelle et régie par des procédures de gestion et de contrôle efficaces.

Les capacités de gestion de l’assistance extérieure au niveau national dépendent à la fois des systèmes et procédures institutionnels et des ressources humaines. Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest qui souhaitent mobiliser des ressources supplémentaires en soutien à un processus de RSS peuvent estimer nécessaire d’améliorer les mécanismes institutionnels qui ont trait à la gestion du financement national et extérieur des principaux programmes de réforme, tels que la RSS. Parmi les aspects à examiner figurent les points suivants.

• Performances institutionnelles et processus managériaux : les procédures de prise de décision, de gestion budgétaire et de passation de marchés, les règles et règlements institutionnels, les mécanismes de coordination intra et interinstitutionnelle, les capacités de suivi et d’évaluation, les politiques et les pratiques de gestion des ressources humaines, les mécanismes internes et externes de redevabilité, etc.

• Capacités humaines et compétences : la disponibilité d’une expertise nationale dans tous les domaines nécessaires, y compris l’expertise budgétaire et les finances, la formation et les autres modes de renforcement des capacités des agents de l’État, les mécanismes de promotion et de gestion de carrières visant à retenir les talents, aussi bien masculins et féminins, etc. Les projets isolés menés avec des partenaires extérieurs ont également tendance à monopoliser le personnel national qualifié, ce qui prive l’administration de cette expertise.

Dans de nombreux cas, les principaux domaines à améliorer peuvent être identifiés en analysant les structurelles institutionnelles ou en évaluant les lacunes à combler en termes de capacités. Parfois, il peut être nécessaire de réformer en profondeur les institutions tandis que, dans d’autres cas, des réajustements limités suffisent à améliorer l’efficacité du système dans son ensemble.

5.5. Engager des négociations avec les partenaires extérieurs

5.5.1. Décliner le programme national de RSS en une documentation adaptée à chaque partenaire

Il arrive que les partenaires extérieurs adressent directement des offres d’assistance aux gouvernements d’Afrique de l’Ouest. Cependant, dans la plupart des cas, l’initiative d’engager les discussions sur un éventuel appui extérieur revient au gouvernement initiant un processus de RSS. Comme précédemment mentionné, les demandes de soutien sont davantage susceptibles d’aboutir si elles cadrent avec les priorités du partenaire en matière d’assistance au développement et si elles sont présentées comme une opportunité de collaboration mutuellement profitable.

Pour susciter l’intérêt de partenaires potentiels, il est essentiel d’aborder ces acteurs de manière judicieuse. Il faut à la fois présenter le processus de RSS dans toute sa portée et démontrer plus spécifiquement en quoi le programme national de RSS rejoint les domaines d’intérêt de chaque partenaire. Comme indiqué à la section 2.3, la RSS touche une variété de questions interdépendantes de gouvernance, lesquelles peuvent susciter un intérêt particulier de la part d’un partenaire extérieur.

La crédibilité est aussi une question de capacités institutionnelles et techniques.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 2 sur la programmation de la réforme du secteur de la sécurité, section 6.3.

2

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56 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Une approche trop restrictive de la RSS peut conduire certains partenaires potentiels à exclure toute possibilité de coopération. Pour éviter ce risque, il convient de souligner les multiples liens entre la RSS et des préoccupations plus larges en matière de gouvernance. Il est généralement utile de faire en sorte que les partenaires ne se focalisent pas sur une acception étroite de la RSS qui se limiterait à des actions visant à « former et équiper » les forces de défense et de sécurité, mais qu’ils adoptent plutôt une perspective plus globale visant à améliorer la gouvernance de la sécurité et des institutions qui en sont responsables.

La cartographie des partenaires potentiels et l’identification de leurs priorités en matière d’assistance contribuent à identifier des points de convergence à partir desquels on pourra bâtir des outils de communication à l’intention des partenaires. En partant de la présentation générale du processus et du programme national de RSS, il peut être utile, par exemple, de dérouler à l’attention de chaque partenaire potentiel une documentation spécifique mettant l’accent sur les domaines d’intérêts qui lui sont propres.

Sans dénaturer le contenu du programme d’action ni trahir les priorités nationales, cette démarche consiste à mettre en évidence les points de convergence entre les domaines d’intérêt privilégiés du partenaire et le processus de RSS dans son ensemble. Elle permet d’identifier les points d’entrée pertinents pour engager le dialogue sur un partenariat potentiel. Bien souvent, ces points d’entrée concernent des questions telles que :

• la promotion de l’égalité hommes-femmes : lorsqu’elles engagent un dialogue avec un partenaire pour qui l’égalité hommes-femmes constitue une priorité stratégique, les autorités gouvernementales du pays qui conduit une RSS peuvent estimer opportun d’expliquer en quoi cette question fait partie intégrante de la bonne gouvernance de la sécurité. L’intégration d’une perspective de genre dans la gestion des institutions de sécurité peut améliorer l’attractivité de ces institutions, permettre le recrutement d’un plus grand nombre de femmes et accroître la qualité des services de sécurité fournis aux hommes, aux femmes, aux filles et aux garçons. Les autorités nationales peuvent par exemple solliciter auprès de ce partenaire une assistance ciblant des projets dédiés à améliorer l’accès des femmes et des filles aux services de justice et de sécurité, à élaborer ou réviser des politiques d’égalité au sein des institutions de sécurité ou encore à mener des actions de sensibilisation sur la dimension genre dans le système judiciaire.

• la lutte contre la corruption : lorsqu’elles engagent un dialogue avec un partenaire dont l’orientation stratégique est axée sur les questions d’intégrité, les autorités nationales peuvent souligner qu’une composante importante de la RSS vise justement à améliorer la gouvernance financière des institutions de défense et de sécurité. Cet aspect de la réforme permet de créer une culture institutionnelle plus résistante aux pratiques de corruption. Il peut être utile de préciser que la RSS aborde également la question du respect des normes de comportement éthique au sein du secteur de la sécurité, ce qui constitue un aspect essentiel de la lutte contre la corruption dans la fonction publique. Rien n’empêche les autorités nationales de requérir l’assistance du partenaire ayant cette priorité pour des projets dédiés (mais idéalement par le biais d’un ABG). Un projet visant, par exemple, à renforcer les capacités de contrôle des finances internes et externes, pourrait bien retenir l’attention de ce partenaire. Le financement extérieur acheminé via l’ABG peut également être affecté au renforcement de l’implication de la société civile dans le suivi budgétaire du secteur de la sécurité.

• la protection des enfants : lorsqu’elles engagent un dialogue avec un partenaire particulièrement attaché à la protection de l’enfance, les autorités nationales menant un processus de RSS peuvent souligner que la professionnalisation des institutions de défense et de sécurité contribue à améliorer la lutte contre les abus et les violences commises à l’encontre des mineurs. La RSS prévoit également le renforcement des relations de collaboration entre la société civile et les institutions de sécurité, ce qui est essentiel pour améliorer la prévention et la lutte contre de tels abus et violences.

• l’appui à la décentralisation et à la gouvernance locale : dans les pays où l’administration déficiente et excessivement centralisée d’un vaste territoire a abouti à l’émergence ou à l’intensification de menaces pour la sécurité – humaine, nationale et/ou régionale– il peut s’avérer opportun pour les autorités désireuses de mobiliser des ressources supplémentaires pour la RSS d’invoquer la mise en place de dispositifs de sécurité efficaces au niveau communautaire et la création d’un espace de dialogue entre les communautés et les institutions de sécurité au niveau local. Autant d’éléments qui s’inscrivent dans le cadre d’un processus de réforme holistique et durable.

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57Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

• la promotion et protection des droits humains : lorsqu’elles engagent un dialogue avec un partenaire dont la politique en matière d’aide au développement est principalement axée sur les droits humains, les autorités nationales peuvent être amenées à expliquer en quoi la RSS contribue à améliorer le respect des droits humains et à renforcer l’état de droit dans leur pays. Il peut alors être utile de souligner que des aspects importants de la RSS :

• visent à renforcer le cadre juridique de la gouvernance de la sécurité, y compris par l’intégration de toutes les normes de droits humains ;

• améliorent la redevabilité du secteur de la sécurité, y compris en ce qui concerne les droits humains, et que les institutions spécialisées (telles que les commissions nationales des droits humains) et les organisations de défense des droits humains issues de la société civile jouent un rôle important dans le contrôle démocratique du secteur de la sécurité ;

• cherchent à renforcer la capacité des institutions de sécurité et de justice à protéger efficacement les droits fondamentaux des populations à la vie, à l’intégrité physique et à l’égalité hommes-femmes (qui constitue l’un des droits humains) ;

• contribuent à un environnement pacifique, condition sine qua non à la réalisation des droits socioéconomiques de la population.

• Une variété d’autres dimensions de la RSS peuvent être soulignées pour éveiller l’intérêt de partenaires potentiels : pourquoi ne pas mettre en avant les impacts positifs du programme national de RSS sur l’environnement de sécurité transnational, sur le développement des capacités parlementaires en tant que priorité de la démocratisation, sur la pérennité du processus de désarmement, démobilisation et réintégration, et sur beaucoup d’autres aspects qui sont directement liés aux objectifs de la RSS en tant qu’outil de promotion de l’état de droit, de consolidation de la paix et de prévention des conflits.

Attention, toutefois ! Même si l’accent est mis sur une dimension particulière de la réforme, il est cependant important de présenter le programme aussi dans son ensemble et de souligner sa cohérence globale en termes de coordination et de résultats attendus. Cela contribue à rassurer les partenaires quant à la solidité et à la durabilité du cadre général de réforme. Cela offre également une raison solide de préconiser le recours à l’ABG plutôt qu’à un financement limité à des projets spécifiques, et ce même si les partenaires préfèrent soutenir un domaine particulier de la réforme.

5.5.2. Élaborer des requêtes de financement

Que l’initiative de la coopération provienne du partenaire potentiel ou de la partie nationale, il est essentiel que l’administration nationale définisse le type, le contenu et la portée de l’assistance souhaitée. C’est sur cette base qu’elle pourra le plus valablement proposer une requête de financement. Typiquement, une telle requête énoncera les objectifs, la stratégie et les ressources demandées afin d’atteindre des résultats prédéterminés qui contribuent à l’amélioration générale de la gouvernance de la sécurité. Bien que cela ne soit pas systématiquement requis par le contributeur potentiel, il est utile d’indiquer la part du budget couverte par des ressources nationales, et de chiffrer la différence que l’appui des partenaires vise à combler. Compte tenu de la transparence dont elle témoigne, cette démarche renforce la crédibilité de la requête, ce qui ne peut que faciliter l’obtention du financement complémentaire sollicité.

Formuler une requête de financement requiert des compétences en matière de programmation et de rédaction, ainsi qu’une certaine expertise financière. Afin de veiller à ce que les questions transversales relatives à l’égalité hommes-femmes et aux droits humains soient pleinement intégrées, une expertise spécifique dans ces domaines peut aussi être nécessaire.

Cependant, compte tenu de la nature sensible de la RSS, l’élaboration d’une telle requête exige bien plus encore que ces compétences techniques. Il faut aussi une vision stratégique et la capacité de la restituer sous la forme d’une planification opérationnelle, dans le cadre d’une approche de programmation cohérente. Il est essentiel d’aligner la requête sur la vision nationale de la sécurité, telle qu’exprimée dans la politique de sécurité nationale ou un document équivalent. Lors de la rédaction de la requête, il est également préférable de s’appuyer sur une évaluation des besoins menés par les acteurs nationaux eux-mêmes.

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58 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

En fonction des dispositions de la politique nationale qui encadrent la mobilisation des ressources extérieures pour la RSS, les requêtes pour un appui extérieur peuvent être élaborées par :

• l’institution gouvernementale qui sollicite un soutien sectoriel spécifique (généralement les ministères de la Défense, de la Sécurité ou de la Justice) ;

• le mécanisme de coordination de la RSS (le Bureau de la sécurité nationale, la cellule de coordination du comité national de pilotage de la RSS, etc.) en collaboration avec l’ensemble des ministères et institutions concernés, en particulier lorsque la requête a une portée intersectorielle ;

• l’organe chargé de coordonner la mobilisation des ressources pour la RSS (voir section 5.1), qui peut se voir confier la tâche de centraliser l’expression des besoins de toutes les parties prenantes concernées et de formuler une proposition intégrée sur cette base.

Lorsque la requête de financement porte sur une intervention intersectorielle, les autorités estiment parfois judicieux d’en confier la rédaction à une équipe restreinte composée de représentants des différents ministères ou organes gouvernementaux concernés, de manière à ce que tous les chefs de file des secteurs pertinents soient en phase.

Pour des raisons évidentes de coordination, il est important que les agences gouvernementales qui envisageraient de solliciter un soutien extérieur prennent l’habitude de contacter systématiquement l’organe chargé de coordonner la mobilisation des ressources pour la RSS en présentant leur besoin, en expliquant dans quelle mesure il découle des plans stratégiques nationaux et/ou sectoriels pertinents et en partageant les informations relatives à toute expression d’intérêt ou contact préliminaire initié par les partenaires. Ces contacts doivent avoir lieu très tôt dans le processus d’élaboration de la requête de financement à proprement parler, de manière à ce que l’organe de coordination puisse confirmer en amont si l’objet de cette requête cadre bien avec les priorités et les politiques nationales.

Quel que soit l’organe gouvernemental qui se voit attribuer la responsabilité de coordonner la mobilisation des ressources extérieures pour la RSS, toutes les correspondances et informations relatives à des échanges pertinents avec les partenaires au développement doivent être communiquées aux ministères ou aux organes gouvernementaux compétents, sans oublier :

• le ministère des Finances, qui supervise le budget national et les flux financiers affectant les institutions publiques ;

• le ministère des Affaires étrangères, qui joue un rôle d’interface avec les acteurs internationaux.

5.5.3. Conduire la négociation et formaliser l’accord

Le financement extérieur peut être négocié sur une base bilatérale, ou par le biais de négociations simultanées avec plusieurs partenaires lors d’une table ronde ou de réunions similaires visant à favoriser la coopération internationale. Grâce à sa légitimité diplomatique et à son statut institutionnel, la Commission de la CEDEAO est bien placée pour aider les États membres de la Communauté à organiser de telles plates-formes de négociation. De fait, la Commission a apporté son concours dans de nombreux cas, soit en organisant directement ce type d’événements et en conviant des partenaires extérieurs pour le compte d’un État membre, soit en fournissant un soutien politique, financier et opérationnel aux États membres désireux d’organiser des rencontres de ce type avec leurs partenaires.

Lorsque les autorités souhaitent convier des partenaires extérieurs à une réunion de mobilisation de ressources, il peut être dans leur intérêt de désigner une équipe de négociation compétente composée de femmes et d’hommes qualifiés et expérimentés. À eux tous, les membres de cette équipe doivent réunir une solide expérience dans certains domaines clés, comme en matière de finances, de passation de marchés, de gestion de programmes et de renforcement des capacités. Le cas échéant, il est possible de faire appel à un expert (ou à un petit groupe d’experts) en matière de programmation, de finances ou de passation de marchés. Il est alors important que ces personnes se familiarisent avec la proposition élaborée par les autorités, ainsi qu’avec les contraintes de la RSS. Elles peuvent être chargées soit d’appuyer l’équipe de négociation durant les tractations, soit de renforcer en amont ses capacités.

Pour toute négociation relative à possible prêt, c’est-à-dire un financement que le gouvernement sera tenu de rembourser en tout ou partie, il convient de consulter dans les meilleurs délais et avant la

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59Élaborer une stratégie efficace pour mobiliser des ressources en soutien à la RSS

conclusion de tout accord le ministère des Finances (et notamment, dans certains pays, la direction du Trésor).

Étant donné que les conditions particulières au secteur de la sécurité peuvent se détériorer rapidement, il est essentiel que l’équipe de négociation prenne des dispositions pour garantir que le soutien promis par les partenaires extérieurs sera fourni en temps utile. Il est en effet souhaitable d’améliorer, dans la mesure du possible, la rapidité et la prévisibilité du financement afin de faciliter la réussite du programme de réforme. À cet égard, l’équipe de négociation s’efforcera d’obtenir l’adoption de calendriers annuels ou pluriannuels pour arrêter les échéances de décaissements de l’assistance financière mobilisée.

Lorsque les deux parties sont satisfaites du résultat des négociations, leur accord doit être consigné par écrit, par exemple sous la forme d’un protocole d’accord ou d’un document de même nature récapitulant les principales conditions de l’accord conclu. Celui-ci doit ensuite être signé par un ministre ou toute autre personne habilitée à le faire au nom du gouvernement.

5.5.4. Répartir les ressources allouées

Une fois la requête de financement approuvée par le partenaire ou la négociation aboutie et l’accord signé (selon le cas de figure), le service du budget de l’organe gouvernemental habilité à cet effet doit procéder à la répartition des ressources entre les ministères ou institutions concernés, conformément aux priorités institutionnelles et aux dispositions de l’accord de financement. Cette répartition doit être effectué avec diligence et respecter un équilibre adéquat entre discrétion et ouverture, pour permettre un contrôle démocratique de l’utilisation des ressources mobilisées au nom de la nation.

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6.1. Mettre l’accent sur les réformes de la gouvernance

En tant que processus holistique, la RSS ne doit pas seulement répondre aux besoins matériels relatifs au développement des forces de défense et des services de sécurité en ce qui concerne notamment les installations, les équipements et la formation opérationnelle du personnel en uniforme. La RSS est aussi, et surtout, un processus axé sur la gouvernance en ce qu’elle vise à améliorer les structures de gestion et de gouvernance qui influencent les prises de décision, la prestation de services et la redevabilité dans le secteur de la sécurité.

Pour parvenir à transformer effectivement ce secteur, la réforme ne doit pas être uniquement axée sur des initiatives « tangibles » (soft) visant à apporter un soutien matériel et opérationnel immédiat, mais elle doit aussi intégrer les dimensions « intangibles » (hard) de la GSS. Il convient notamment de mettre l’accent sur le respect des normes de comportement éthiques et professionnelles, ainsi que sur les droits humains, la promotion de l’égalité hommes-femmes et la mise en œuvre des autres exigences relatives à la bonne gouvernance au sein des institutions de sécurité. Il faut également mettre en place des mécanismes de redevabilité inclusifs impliquant les civils dans l’élaboration des politiques et dans le suivi de la performance des services de sécurité.

Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

6

‘La mise en œuvre de la RSS doit mettre l’accent aussi bien sur l’efficacité des principaux prestataires de sécurité que sur la qualité de leur contrôle et de leur gestion. La RSS implique non seulement l’élaboration d’un système cohérent d’institutions de sécurité efficaces, mais aussi la mise en place des fondements d’une bonne gouvernance sur lesquelles ces institutions peuvent s’appuyer. Ce dernier domaine reste le parent pauvre de l’assistance internationale internationaux.’

D’après : Union africaine, Conclusions du Forum Afrique sur la réforme du secteur de la sécurité, Addis Abeba,

24-26 novembre 201412

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62 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

La RSS ne peut avoir une dimension transformatrice qu’à condition d’adopter une vision holistique qui inclut le renforcement de l’intégrité, la promotion de la sécurité humaine, la protection des droits humains, la (ré)orientation vers les normes démocratiques et les principes de bonne gouvernance, ainsi que la nécessité de réformer les structures institutionnelles et de renforcer les compétences professionnelles. À défaut, elle risque de renforcer un système inadéquat et d’en enraciner les dysfonctionnements, et au final d’affaiblir la légitimité de l’État aux yeux de la population.

La mobilisation de ressources supplémentaires en faveur de la RSS permet d’accroître les fonds alloués aux dimensions « intangibles » de la réforme qui sont généralement négligées, ainsi qu’à certaines réformes sectorielles, souvent négligées. Cette section présente, de manière non exhaustive, quelques actions à entreprendre dans certains des domaines traditionnellement sous-financés dans le cadre de la RSS :

• la réforme des services de renseignement ;

• l’égalité hommes-femmes dans le secteur de la sécurité ;

• la gestion des finances publiques liées aux institutions de défense et de sécurité ;

• les mécanismes de redevabilité tels que les efforts de lutte contre la corruption et de promotion de la liberté de l’information ;

• les systèmes de sécurité et de justice traditionnels.

6.2. La réforme des services de renseignement

En raison de la culture du secret qui sous-tend leurs activités, les services de renseignement sont souvent occultés de la RSS. Pourtant, les services de renseignement civils et militaires, tout comme les services de renseignement intérieur et extérieur, font partie intégrante du secteur de la sécurité et jouent un rôle important dans la capacité de l’État à appréhender son environnement stratégique et à anticiper les menaces de sécurité intérieures comme extérieures.

Encadré 21 : Rééquilibrer l’allocation des fonds entre les dimensions tangibles et intangibles de la RSS

Dans son examen thématique de la réforme du secteur de la sécurité et de la consolidation de la paix, le Bureau d’appui à la consolidation de la paix a conclu en 2012 que les efforts d’assistance du Fonds pour la consolidation de la paix dans les domaines « abstraits » tels que la gouvernance et le contrôle des institutions étaient marginaux par rapport aux ressources consacrées aux priorités « concrètes » telles que les infrastructures, la formation et l’équipement.

[Par exemple,] selon l’examen thématique de la réforme du secteur de la sécurité et de la consolidation de la paix, 93 % des ressources allouées par le Fonds pour la consolidation de la paix ont été affectées aux infrastructures, à la formation et l’équipement et à l’appui opérationnel, tandis que 7 % seulement étaient consacrées à la réforme générale du secteur de la sécurité.

Pour susciter une confiance élémentaire entre les citoyens et les institutions publiques et pour commencer à pallier les déficiences du contrat social, les organes de sécurité doivent améliorer la qualité des services fournis au public. Cela suppose de mettre clairement l’accent sur l’objectif final, qui est d’améliorer la sécurité et la sûreté de la population, ce qui implique un dialogue ouvert à tous et la participation des citoyens et des organisations de la société civile, notamment des groupes de femmes.

Source : Nations Unies, « Sécurité des États et des sociétés : renforcer l’appui global apporté par l’Organisation des Nations Unies à la réforme du secteur de la sécurité », Rapport du Secrétaire général, 13 août 2013, paragraphes 54 et 55.

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63Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

Les services de renseignement ont notamment pour tâche de :

• recueillir et analyser les informations dont l’importance peut être capitale pour la sécurité de l’État et des personnes ;

• faciliter les prises de décisions stratégiques en fournissant des analyses sur des domaines pertinents pour la sécurité nationale et régionale ;

• anticiper et surveiller l’évolution des risques de crise ou l’imminence d’une crise, pour alerter les autorités de manière précoce ;

• fournir des informations utiles à la planification en matière de sécurité nationale et aux opérations de défense et de sécurité.

Dans la plupart des États d’Afrique de l’Ouest, les services de renseignement jouent un rôle crucial pour prévenir et combattre les menaces intérieures et transnationales telles que l’extrémisme violent, le terrorisme et les trafics mis en place par des groupes criminels organisés (armes légères, stupéfiants, traite des êtres humains, blanchiment d’argent, etc.).

Cependant, la plupart des fonds alloués à la RSS font l’impasse sur les besoins en matière de réforme du renseignement. Cela est dû, en partie, au fait que les gouvernements qui s’engagent dans un processus de RSS sous-estiment souvent l’importance de prendre en compte ce domaine. Dans de nombreux cas, ils hésitent à inclure la sphère sensible du renseignement dans le programme de réforme et sont encore plus réticents à impliquer les parties prenantes civiles et les partenaires extérieurs dans quelque aspect que ce soit de la gouvernance de ce secteur.

Pour leur part, les partenaires extérieurs sont limités par des mandats et des directives internes qui imposent parfois une certaine prudence en ce qui concerne les domaines très sensibles, à l’instar de tout ce qui touche aux services de renseignement étatiques. La plupart des partenaires extérieurs considèrent que le soutien à la réforme des services de renseignement présente trop de risques. Cependant, la prise en compte des services de renseignement au sein de l’architecture de sécurité d’un pays ainsi que la promotion de leur efficacité et de leur redevabilité dans le cadre de la gouvernance démocratique contribuent à la stabilité nationale globale et à la consolidation de l’état de droit.

Dans certains cas, les ministères des Affaires étrangères et de la Défense de certains pays bailleurs expriment le souhait de soutenir les capacités de renseignement des pays en développement qui sont confrontés à des menaces de sécurité ayant potentiellement des implications à l’échelle mondiale. Pour autant, l’appui extérieur à la réforme du renseignement ne doit pas relever exclusivement de la coopération militaire. Les organisations internationales et certains partenaires civils peuvent également être en mesure de fournir une assistance financière et technique contribuant à :

• repenser le cadre institutionnel et les procédures des services de renseignement à l’aune des droits humains et des exigences de l’état de droit ;

Encadré 22 : Importance de la réforme des services de renseignement

La réforme du renseignement vise à améliorer l’efficacité et la redevabilité des services de renseignement dans le cadre plus large de la RSS.

• Efficacité : la réforme du renseignement contribue à améliorer la qualité des prestations fournies par les services de renseignement, en affinant les systèmes de gestion internes et en optimisant l’utilisation des fonds publics.

• Contrôle : la réforme du renseignement contribue au renforcement de la gouvernance démocratique des services de renseignement (y compris leur responsabilité envers l’électorat), afin d’assurer le respect de l’état de droit et de veiller à l’efficacité et l’efficience des opérations de ces services.

Source : Hans Born et Gabriel Geisler Mesevage, « Introducing intelligence oversight », in Hans Born et Aidan Wills (dir.), Overseeing Intelligence Services : A Toolkit (Genève : DCAF, 2012), traduction libre.

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64 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• renforcer les capacités parlementaires et les autres formes de contrôle civil des services de renseignement ;

• élaborer une législation relative à la sécurité nationale (notamment des lois, des politiques et des stratégies) servant de fondement à l’ensemble des structures, réglementations et mandats des services de renseignement ;

• élaborer des normes éthiques applicables aux services de renseignement, en particulier en ce qui concerne les droits humains et l’intégrité ;

• renforcer la professionnalisation du personnel de renseignement par le biais de formations sur l’éthique et la déontologie, les droits humains, l’égalité hommes-femmes, l’intégrité financière, la communication et d’autres compétences nécessaires ;

• mettre en place ou améliorer les systèmes nationaux et régionaux de partage des informations, en tenant compte de la nature transnationale de certaines questions de sécurité émergentes liées à la lutte contre le terrorisme, la contre-insurrection, la lutte contre le trafic de drogues et la traite des êtres humains ;

• améliorer la gestion financière des services de renseignement.

6.3. L’égalité hommes-femmes et la RSS

La promotion de l’égalité hommes-femmes fait partie intégrante de la RSS. Cette dimension est une composante essentielle de chacun des principes d’une bonne gouvernance du secteur de la sécurité et devrait, par conséquent, orienter l’ensemble des stratégies de réforme de ce secteur. Il s’agit non seulement d’un fondement de la bonne gouvernance, mais également d’une exigence opérationnelle pour assurer la prestation efficace des services de sécurité à tous les membres d’une société.

• L’égalité hommes-femmes est un droit humain, consacré dans nombre d’instruments internationaux et régionaux tels que la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique et la Déclaration solennelle de l’UA sur l’égalité hommes-femmes en Afrique. Le projet de Cadre de politique de la CEDEAO régissant la RGSS consacre « l’obligation qu’ont les États membres d’appliquer les principes de l’égalité entre les sexes et de l’autonomisation de la femme, y compris dans le cadre du processus de RSS. » Voir aussi l’encadré 23.

• L’égalité hommes-femmes joue un rôle essentiel pour garantir l’état de droit : les discriminations sexistes sont contraires à l’exigence d’égalité devant la loi. En revanche, l’accès égal des femmes et des hommes aux services de justice et de sécurité renforce l’état de droit.

• L’égalité hommes-femmes est un principe démocratique : la participation égale de tous les citoyens à la gouvernance des affaires publiques est un principe fondamental de la démocratie. Eu égard à la RGSS, cela signifie que les femmes doivent pouvoir participer au même titre que les hommes à la direction, à la gestion et aux opérations des institutions de sécurité, et ce à tous les niveaux. L’égalité hommes-femmes dans le cadre de la GSS implique également le droit de participer sur un pied d’égalité au contrôle externe exercé par le Parlement, les institutions de contrôle officielles et la société civile.

• L’égalité hommes-femmes est une composante essentielle de la sécurité humaine : l’approche de sécurité humaine place les besoins de sécurité des individus au cœur des priorités de la sécurité nationale. Cela signifie que les politiques de sécurité doivent prendre en compte toutes les formes de violence sexiste (y compris la violence domestique et toutes les formes de violence sexuelle), ainsi que les menaces à la sécurité humaine des aussi bien des femmes, des hommes, que des filles et des garçons.

• L’égalité hommes-femmes joue un rôle essentiel pour améliorer la représentativité et l’efficacité des services de sécurité : afin de fournir des services de justice et de sécurité efficaces à tous les membres de la société, les institutions de sécurité doivent renforcer leur capacité à répondre à une large palette de vulnérabilités et de menaces, qui affectent les citoyens différemment en fonction de leur identité

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65Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

de genre. Le recrutement d’un plus grand nombre de femmes dans les institutions de sécurité contribue à renforcer la représentativité des institutions de sécurité, ce qui augmente leur capacité à assurer la sécurité des différents groupes d’usagers des services publics. Il est également important d’impliquer les hommes en tant que parties prenantes de la lutte contre toutes les formes de violence sexiste. Des services de sécurité respectant davantage l’égalité hommes-femmes ont davantage de crédibilité et de légitimité aux yeux de la population.

Cependant, l’expérience montre que, dans de nombreux cas, l’intégration d’une perspective de genre au sein du processus de RGSS est encore une exigence largement portée par les acteurs extérieurs. Il est essentiel que les gouvernements d’Afrique de l’Ouest fassent preuve de leadership en la matière et prennent effectivement l’initiative de promouvoir l’égalité hommes-femmes comme moyen d’améliorer l’efficacité et la redevabilité du secteur de la sécurité. À cette fin, et dans la mesure où l’égalité hommes-femmes fait partie intégrante de la RSS et constitue un prérequis de tout programme de RSS, les bonnes pratiques recommandent d’œuvrer pour mobiliser de manière proactive des ressources nationales et extérieures pour soutenir cet objectif.

Les stratégies permettant l’intégration systématique d’une approche favorable à l’égalité hommes-femmes dans un processus de RSS sont multiples. Il peut notamment s’agir :

• d’intégrer la dimension genre dans tous les projets et programmes de RSS, dès leur phase de conception et tout au long de leur mise en œuvre. La prise en compte effective d’une perspective de genre dans un processus de RGSS requiert une approche systématique et institutionnelle qui doit être pilotée par les acteurs nationaux.

• de consacrer des projets spécifiques aux défis liés au genre, soit en mettant l’accent sur un aspect institutionnel spécifique, soit par le biais d’interventions intersectorielles. La conception et la mise en œuvre de ces projets doivent cependant s’inscrire de manière cohérente dans le cadre général de la RSS, plutôt qu’être le fruit d’initiatives isolées.

L’égalité hommes-femmes n’est pas seulement une exigence normative ; elle accroît également l’efficacité opérationnelle du secteur de la sécurité. En poursuivant cet objectif d’égalité, les autorités prennent en compte de manière plus inclusive les besoins de sécurité de l’ensemble de la population.

Encadré 23 : La RGSS et le genre dans le Cadre de politique de la CEDEAO

Les programmes de RGSS devront respecter les principes d’égalité entre les sexes et d’autonomisation de la femme, tels que contenus dans l’article 63 du Traité révisé de la CEDEAO (1993), dans la Politique de la CEDEAO en matière de genre (2004), dans l’article 81 du Cadre de prévention des conflits de la CEDEAO et dans le Plan d’action régional de la CEDEAO pour la mise en œuvre des Résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité de l’ONU (2010). Lesdits programmes devront également se conformer aux principes contenus dans les autres instruments pertinents de l’UA, de l’ONU et des États membres de la CEDEAO. Dans le cadre de la programmation de la RGSS, des activités sexospécifiques seront prises en compte, visant à promouvoir l’égalité entre les sexes dans le secteur de la sécurité.

Source : CEDEAO, Projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité, article 16(f).

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66 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Les bonnes pratiques recommandent que les programmes de RSS prévoient des fonds spécifiques pour lutter contre les inégalités hommes-femmes. Il existe pour cela plusieurs options. Il peut s’agir de réserver une partie des fonds mobilisés au titre de l’ABG ou de l’ABS, spécifiquement pour le financement des actions visant à corriger ces inégalités. Cette méthode (allocation ciblée des fonds) permet de garantir qu’un certain financement ira effectivement à cet objectif, et ce dans le cadre d’une démarche de financement intégrée et cohérente à l’échelle du programme de RSS dans son ensemble. Il faudra alors aussi prévoir la mise en place, au niveau national, de mécanismes de suivi chargés de veiller à ce que les fonds théoriquement réservés aux actions pour l’égalité de genre dans le cadre de projets ou de programmes plus larges soient effectivement alloués à des activités qui soutiennent cet objectif.

Un autre moyen de s’assurer que le programme de RSS ne fait pas l’impasse sur la dimension genre est de constituer des réserves budgétaires dédiées à appuyer des projets spécifiques pour l’égalité hommes-femmes. Cependant, cette méthode comporte un risque : celui de voir les interventions liées au genre isolées en projets séparés du reste des activités de la réforme, comme s’il s’agissait de projets à part et non intrinsèques à la réforme. L’expérience montre que ce risque est encore plus grand si les projets en question sont confiés à un ministère chargé du genre ou de la condition de la femme, alors que les autres activités de la RSS relèvent de ministères sectoriels du secteur de la sécurité. Afin de réduire ce risque, il peut s’avérer judicieux de placer de tels projets sous la responsabilité de l’un des ministères responsables du secteur de la sécurité, de manière à susciter une réelle prise en main de cette problématique, en éviter la marginalisation et renforcer du même coup la cohérence entre les projets dédiés à la dimension et les autres volets de la réforme.

Notons toutefois que le fait d’assigner des ressources spécialement pour l’égalité hommes-femmes et la dimension genre, à travers l’une ou l’autre des méthodes présentées ci-avant, n’annule en rien l’éligibilité de cet objectif — au même titre que tous les autres— aux budgets plus généraux qui financent la RSS : l’un n’empêche pas l’autre.

6.4. La gestion des finances publiques liées au secteur de la sécurité

Parmi les partenaires extérieurs qui soutiennent certains volets de la RSS liés aux questions de gouvernance, nombreux sont ceux dont le mandat s’étend sans peine au renforcement des capacités de gestion des finances publiques au sein de ce secteur. Cependant, il s’est avéré difficile de soumettre certains domaines comme le budget du secteur de la défense aux regards extérieurs, que ce soit par des acteurs internationaux ou par des acteurs nationaux tels que le Parlement ou la société civile.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 8 sur la place du genre dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité.

8

La volonté des partenaires extérieurs de soutenir les initiatives de promotion de l’égalité hommes-femmes dans le cadre d’une RSS offre une opportunité sous-exploitée par les gouvernements d’Afrique de l’Ouest. Il est dans l’intérêt des institutions gouvernementales impliquées dans la planification de la RSS de saisir cette possibilité de manière proactive, non pas en se contentant d’afficher l’usage de la terminologie inhérente au genre, mais en prenant l’initiative de lutter contre les expressions populaires et concrètes des inégalités de genre, qu’elles doivent considérer comme un obstacle à la bonne gouvernance de la sécurité. L’égalité hommes-femmes doit devenir bien plus qu’une priorité imposée par les acteurs extérieurs.

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67Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

Les transactions hors budget – et en particulier les crédits spéciaux accordés aux services traditionnellement ancrés dans une culture du secret tels que les services de renseignement ou certains volets de la défense nationale – sont particulièrement propices à une gestion financière opaque. Le manque d’harmonisation ou de rationalisation des procédures de gestion financière favorise également l’utilisation inefficiente des fonds, ce qui aboutit au gaspillage tout en augmentant le coût de la RSS et en compromettant la pérennité de la réforme dans les pays ouest-africains à faible revenu ou à revenu intermédiaire.

Pour répondre à ces défis, la RSS vise à améliorer le rapport coût-efficacité des institutions du secteur de la sécurité, tout en renforçant la transparence dans l’utilisation des deniers publics par les acteurs de ce secteur. Les partenaires extérieurs disposés à soutenir la RSS dans les pays d’Afrique de l’Ouest ne devraient pas seulement s’engager à combler les lacunes dans le budget de la RSS ; ils devraient également soutenir l’élaboration d’un cadre de gestion propice à la viabilité financière de secteur de la sécurité sur le long terme, condition sine qua non à la pérennité de la réforme.

Il est donc important d’inclure, dans les objectifs des partenariats d’assistance, un soutien au développement des systèmes et des capacités dont le pays aura besoin pour assurer à long terme une gestion saine de ses finances. Par exemple, plutôt qu’un acte isolé, le soutien aux procédures d’examen des dépenses des services de sécurité et de justice devrait s’inscrire dans le cadre du renforcement durable des capacités des services d’audit ou des mécanismes de redevabilité. Pour que les systèmes de gestion financière soient pleinement opérationnels et efficaces, les responsables du secteur de la sécurité à des postes clés doivent bénéficier des compétences nécessaires pour comprendre et évaluer la gestion et l’analyse financières, le contrôle financier et les politiques de dépenses dans ce secteur.

Par exemple, le soutien extérieur peut être axé sur les aspects suivants :

• l’examen, la rationalisation et l’harmonisation des procédures et des systèmes financiers sur la base desquels les institutions du secteur de la sécurité opèrent;

• l’institutionnalisation des examens des dépenses du secteur de la sécurité ;

• l’élaboration d’approches et d’outils novateurs pour assurer une gestion transparente des ressources humaines ;

Un bon contrôle, une bonne gestion et une bonne gouvernance du secteur de la sécurité, y compris dans le domaine de la gestion des finances publiques, devraient être des priorités du soutien international. Il convient de rééquilibrer les processus et les programmes qui jusqu’ici privilégiaient surtout sur le renforcement des capacités, afin de parvenir à une prise en compte plus paritaire des aspects tout à la fois d’efficacité, d’efficience et de redevabilité. La réforme du secteur de la sécurité [est] un processus onéreux pour les pays qui l’entreprennent et si elle n’était pas assortie de procédures de vérification financière claires, elle pourrait être préjudiciable aux autres actions de développement. Afin d’être durables et transparentes, les réformes doivent être soutenues par de solides dispositions légales et politiques d’encadrement en matière de gestion des finances publiques.

D’après : Union africaine, Conclusions du Forum Afrique sur la réforme du secteur de la sécurité, Addis

Abeba, 24–26 novembre 2014

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68 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• la gestion et la supervision des achats (y compris les protocoles de passation de marchés et le contrôle de l’acquisition de biens classifiés) ;

• le renforcement des compétences des autorités civiles chargées de la gestion et du contrôle interne du processus budgétaire des institutions de sécurité. Les gestionnaires financiers clés au sein de ces institutions doivent avoir les capacités de comprendre et de mettre en œuvre les processus d’allocation des ressources ;

• l’élaboration et le renforcement du cadre juridique relatif au contrôle financier du secteur de la sécurité, y compris en définissant clairement les rôles et les prérogatives du Parlement et d’autres institutions de contrôle officielles compétentes en matière de contrôle budgétaire et financier (organe de lutte contre la corruption, bureau d’audits publics, etc.), ainsi que le rôle de la société civile ;

• le renforcement des capacités du Parlement, en particulier celles des commissions parlementaires chargées des questions de défense et de sécurité, ainsi que du budget et des finances. Les parlementaires doivent être en mesure de jouer pleinement leur rôle dans le cadre du processus budgétaire national en allouant des ressources aux institutions de sécurité en fonction du mandat qui leur est assigné et priorités nationales. Grâce au renforcement de leurs capacités et au développement d’un environnement institutionnel propice, les parlementaires seront mieux placés pour contrôler l’utilisation des fonds alloués aux institutions du secteur de la sécurité dans le respect des droits humains et de l’état de droit, et conformément à leurs mandats et aux besoins de la population.

6.5. Le contrôle externe et les mécanismes de redevabilité démocratique

6.5.1. Favoriser la redevabilité en soutenant le renforcement des capacités des acteurs du contrôle externe

Les partenaires extérieurs peuvent avoir tendance à négliger l’importance des mécanismes de contrôle externe, qui font pourtant partie intégrante de la RSS. Même si un premier élargissement de leur approche de la RSS peut les conduire à admettre la nécessité de soutenir l’amélioration des mécanismes internes de gouvernance des principales institutions de justice et de sécurité, la prise en compte des besoins liés au contrôle externe représente une étape supplémentaire dans la mise en œuvre d’une stratégie d’appui holistique. Soutenir le développement des capacités nécessaires à un contrôle parlementaire efficace du secteur de la sécurité, ou encore encourager la participation de la société civile au contrôle public du secteur de la sécurité ne sont souvent des évidences que trop tardives.

Les organes l’Exécutif qui sont chargés de négocier des partenariats avec les acteurs internationaux peuvent aussi avoir tendance à considérer la RSS uniquement dans une perspective gouvernementale et à négliger, de ce fait, le rôle et les besoins des autres parties prenantes nationales. Cette tendance a de fortes chances de compromettre la dynamique endogène du processus, qui va bien au-delà du gouvernement ou de l’État pour inclure la société civile, le Parlement, les médias, et les institutions informelles et traditionnelles de justice, etc.

Pour plus d’informations, voir l’Outil 3 sur la bonne gouvernance financière des institutions de défense et de sécurité

3

Encadré 24 : Le contrôle démocratique du secteur de la sécurité

L’UA recommande aux États membres de s’engager dans le renforcement des instruments de contrôle démocratique du secteur de la sécurité. Ces instruments de supervision peuvent être spécifiques à chaque État membre, tout en cherchant à promouvoir et à soutenir les principes de la bonne gouvernance, de la prééminence de l’état de droit et du respect des cadres légaux, y compris les droits de l’Homme et l’égalité des sexes.

Source : Union africaine, Cadre d’orientation sur la réforme du secteur de la sécurité, 2013, article 40.

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69Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

Sans contrôle externe, il n’y a pas de bonne gouvernance du secteur de la sécurité. Ce contrôle joue un rôle particulièrement important dans la lutte contre la corruption dans le secteur de la sécurité et permet d’assurer la redevabilité des institutions de sécurité.

La relation entre la société civile et les services de sécurité constitue l’un des principaux enjeux de la RSS. Elle représente un maillon essentiel qui permet la mise en œuvre effective d’un cadre de gouvernance de la sécurité inclusif et participatif. Une relation positive avec les citoyens favorise l’efficacité et la légitimité des services de sécurité.

6.5.2. Favoriser la redevabilité faisant de la lutte contre la corruption dans le secteur de la sécurité une composante à part entière des programmes de RSS

L’un des enjeux de la RSS consiste à renforcer la confiance de la population dans les institutions de sécurité en luttant contre la corruption dans ce secteur. Toutefois, cet aspect fait souvent l’objet d’une attention et d’un financement insuffisants.

De manière générale, les conditionnalités liées à l’appui budgétaire jouent un rôle important pour faciliter et soutenir la mise en œuvre des réformes, ce qui inclut la nécessité de créer un environnement propice à la lutte contre la corruption et les détournements de fonds. En général, ces conditionnalités requièrent notamment une amélioration de la gestion des dépenses publiques et des audits (voir section 7.3.). Cependant, l’appui budgétaire ne peut contribuer à lutter contre la corruption que s’il s’accompagne d’un engagement ferme du gouvernement en faveur de la transparence et des réformes, assorti d’un contrôle démocratique adéquat du secteur de la sécurité.

Dans le cadre de leur contrôle démocratique de ce secteur, et outre les défis liés à l’’accès à l’information, le Parlement et la société civile peuvent éprouver des difficultés à analyser les données financières relatives aux budgets de sécurité. En dépit de leur légitimité à jouer un tel rôle, ces acteurs ne maîtrisent pas toujours suffisamment les procédures de demandes d’informations au gouvernement, les méthodologies d’analyse des données, ou a fortiori les meilleures pratiques en la matière. Dans la plupart des cas, les médias et les autres organisations de la société civile manquent de ressources et d’expertise pour comprendre le fonctionnement du Parlement et du secteur de la sécurité et pour expliquer à la population les questions budgétaires dans un langage accessible.

Les partenaires désireux de soutenir la lutte contre la corruption dans le secteur de la sécurité peuvent explorer à cet effet un certain nombre de pistes, comme :

• l’appui à la révision et l’élaboration d’une législation adéquate de lutte contre la corruption ;

• l’appui à la formation d’organes de contrôle (tels qu’une commission parlementaire spéciale, des organes de lutte contre la corruption, la société civile, les médias et autres) aux techniques d’analyse budgétaires et d’enquêtes dans ce domaine ;

• l’appui à l’opérationnalisation et au renforcement des organes publics chargés de l’examen des plaintes ;

• l’appui à la création et au renforcement des capacités d’organes de contrôle indépendants habilités à connaitre des plaintes liées à l’intégrité financière et/ou à mener des investigations sur les allégations de corruption impliquant des acteurs du secteur de la sécurité;

• le soutien à une réforme de l’éducation et de la formation, ou encore à l’examen et la révision des politiques de ressources humaines portant sur les procédures de recrutement, l’emploi, les salaires, les promotions et les systèmes de retraites de tous les organes de sécurité de l’État.

6.5.3. Promouvoir la transparence en favorisant l’accès à l’information

Pour créer des institutions de sécurité responsables devant la loi et les citoyens, il faut que la population bénéficie d’un certain niveau d’accès aux informations relatives au secteur de la sécurité. Pourtant, l’accès à l’information reste un domaine insuffisamment pris en compte par les programmes de RSS. Pour mobiliser des ressources nationales et extérieures en faveur de cette dimension de la réforme, il est important que le gouvernement, qui détient ce type d’informations et en contrôle la circulation, accepte de considérer la question de l’accès à l’information du point de vue des parties prenantes nationales engagées dans le

Pour plus d’informations, voir l’Outil 5 sur le contrôle parlementaire du secteur de la sécurité et

l’Outil 6 sur le rôle de la société civile dans la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité.

5 6

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70 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

contrôle externe du secteur de la sécurité. Cet exercice, qui prend à contre-pied certaines habitudes au niveau de l’Exécutif, peut se révéler très difficile à mettre en œuvre.

En 2013, vingt-deux organisations et centres universitaires ont adopté de nouvelles règles générales sur le droit à l’information, connues sous le nom de « Principes de Tshwane sur la sécurité nationale et le droit à l’information ». Ces principes définissent des modalités permettant de rendre publiques des informations gouvernementales sans mettre en péril les efforts légitimes déployés pour protéger la population contre les menaces à la sécurité nationale. Ils ont été conçus pour fournir des orientations à ceux qui sont engagés dans l’élaboration, la révision ou la mise en œuvre de lois et politiques en matière d’accès à l’information touchant aux questions de sécurité.

Les Principes de Tshwane précisent que, même si un gouvernement peut légitimement retenir des informations dans des domaines étroitement définis tels que les programmes de défense, le développement d’armements, les opérations et les opérations des services de renseignement, ainsi que des informations confidentielles fournies par les gouvernements étrangers en relation avec des questions de sécurité, les autorités doivent néanmoins rendre des comptes en cas de violations du droit international humanitaire et des droits humains.

Les États membres de la CEDEAO pourraient envisager d’intégrer ces principes dans leur interprétation de la législation relative à la sécurité nationale. Ils pourraient chercher un soutien extérieur pour :

• réviser la législation et intégrer les éléments fondamentaux des Principes de Tshwane sur la sécurité nationale et le droit à l’information dans leur cadre législatif ou leur stratégie nationale en la matière ;

• encourager la formation d’organes de contrôle indépendants, tels que les commissions parlementaires spéciales sur la corruption, les groupes de travail de la société civile dans ce domaine et d’autres mécanismes similaires aux principes de transparence et de redevabilité tels que définis par le droit international les droits humains.

6.6. Les prestataires de services de sécurité et de justice traditionnels

La plupart des pays d’Afrique de l’Ouest possèdent des systèmes de sécurité et de justice traditionnels. Bien souvent, ceux-ci incluent des leaders locaux tels que les chefs traditionnels (notamment mais pas seulement lorsqu’ils bénéficient de certains pouvoirs de police), responsables religieux, et diverses légitimités traditionnelles. Pour leur part, les tribunaux coutumiers et systèmes traditionnels de règlement des conflits contribuent également, quoique de manière variablement formalisée, à la prestation de services de justice.

Il existe également des groupes locaux d’autodéfense ou de surveillance des quartiers, des comités de rues et bien d’autres regroupements plus ou moins officiels qui assurent de facto des missions de sécurité, même sans mandat officiel. Ces systèmes traditionnels et informels sont souvent les prestataires de justice et de sécurité les plus proches des populations pauvres, marginales et rurales.

Le Whistleblowers Act (loi 720), adopté par le Ghana en 2006, habilite les citoyens à divulguer, dans l’intérêt public, des informations relatives à la conduite illégale ou aux pratiques de corruption dont ils auraient connaissance. Cette loi protège également les individus qui font ces révélations contre le harcèlement et les représailles.

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71Élaborer des stratégies spécifiques pour soutenir les domaines sous-financés ou négligés

Pour plus d’informations, voir l’Outil 7 sur la place des prestataires non étatiques de justice et de sécurité dans la réforme du secteur de la sécurité.

7

Cependant, les relations de ces groupes informels avec les institutions de l’État sont parfois problématiques, en particulier lorsque ceux-ci ne sont pas officiellement reconnus par l’État ou lorsqu’ils contestent directement l’autorité de celui-ci. Dans de tels cas, les autorités nationales qui s’engageant dans une RSS peuvent être tentées d’exclure ces acteurs du processus de réforme, et ce même s’ils sont perçus par la population comme des institutions légitimes. Dans d’autres cas, leur mise à l’écart du processus n’est pas forcément le fait d’une volonté d’exclusion de la part gouvernement, mais découle simplement d’une vision étroite de la RSS qui néglige de prendre en compte les prestataires de sécurité informels et traditionnels.

Il est important que la RSS intègre le rôle, trop souvent ignoré, des acteurs traditionnels et informels de justice et de sécurité. Il n’est pas rare que de tels acteurs représentent la clé de voûte de systèmes locaux solidement établis et qui ont démontré leur efficacité dans la résolution de litiges mineurs, le règlement pacifique de différends intra- et intercommunautaires, la prévention de conflits locaux et, plus largement, dans le maintien d’un climat de sécurité au niveau local.

En Afrique de l’Ouest, les institutions de justice informelles sont des acteurs importants qui doivent être intégrés dans tout processus visant à améliorer l’accès des populations à la justice. Ces acteurs peuvent certes avoir une influence positive ; mais pour cela, encore faut-il les sensibiliser aux normes relatives aux droits humains, à la redevabilité et à l’état de droit, et les relier aux institutions étatiques.

Comment les partenaires peuvent-ils valablement s’investir dans ce domaine ? Les possibilités sont nombreuses, notamment :

• L’appui à la reconnaissance et/ou à la restructuration de tribunaux traditionnels. Par exemple, les États membres de la CEDEAO qui le souhaiteraient pourraient s’inspirer des tribunaux sociaux des Kébélés en Éthiopie, qui ont été reconnus comme des organes étatiques quasi officiels et qui prennent des décisions de justice fondées sur la shimglina, un mécanisme traditionnel d’arbitrage.

• L’appui au renforcement des compétences des chefs traditionnels, des responsables et des arbitres communautaires en matière de résolution des conflits, notamment fonciers, afin de décharger les services de sécurité étatiques et les tribunaux officiels de certains litiges locaux d’envergure limitée, sans pour autant compromettre la sécurité au niveau local.

• La sensibilisation des prestataires de services de sécurité traditionnels et informels aux droits humains et le renforcement de leur compréhension de l’importance de la redevabilité et de l’état de droit.

• La sensibilisation des prestataires traditionnels et informels de sécurité aux inégalités de genre et le renforcement de leurs capacités à lutter contre la violence sexiste, y compris la violence domestique, d’une manière qui assure efficacement la sécurité des femmes et des filles.

• L’information des personnes soumises aux juridictions traditionnelles afin qu’elles puissent connaître leurs droits, les revendiquer et exiger la reddition de comptes.

• Le renforcement de l’efficacité et de l’intégrité des prestataires de services de sécurité et de justice traditionnels, au bénéfice de tous les citoyens, hommes comme femmes.

• Le renforcement du partage de connaissance et d’expérience entre les communautés ou entre les acteurs coutumiers sur les questions relatives à la résolution des conflits, la gestion des crises, les initiatives de réduction de la violence, etc. – l’enjeu étant de cultiver les bonnes pratiques.

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La CEDEAO, en tant qu’institution régionale, continue à jouer un rôle clé en apportant, elle aussi, son soutien aux efforts de ses États membres.

7.1. Fournir des orientations normatives sur les relations avec les partenaires internationaux

Dans son projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique de l’Ouest, la CEDEAO propose des orientations normatives pour mettre en place une « stratégie efficace de mobilisation de ressources et de financement de la RGSS » (section G). Ces orientations précisent notamment les points suivants :

• Article 49 : Afin d’assurer la transparence, la viabilité et le financement à long terme de la RGSS, les États membres sont tenus d’allouer une part conséquente et appropriée du budget national au secteur de la sécurité, sous réserve d’un contrôle indépendant et parlementaire. Ils doivent également coordonner la mobilisation des ressources avec les partenaires bilatéraux et multilatéraux en vue de garantir l’efficacité des processus de [gouvernance démocratique et réforme du secteur de la sécurité].

• Article 51 : Les États membres mettront en place une stratégie efficace de mobilisation de ressources, à partir de sources intérieures et extérieures, afin de garantir le financement à long terme des programmes de la RGSS. La stratégie de mobilisation de ressources pourrait inclure notamment :

a) Des actions de plaidoyer orientées vers des donateurs internes et externes potentiels exposant dans le détail les besoins en matière de sécurité et de justice, ainsi que les ressources requises pour y faire face ;

b) Une contribution du secteur privé et du monde des affaires, qui ira au-delà de la responsabilité d’entreprise, sous forme d’investissements en faveur de la promotion d’un climat sain et stable des affaires ;

c) Un mécanisme de suivi des flux financiers ;

d) Une gestion saine des ressources mobilisées et l’obligation de communiquer tous les résultats aux acteurs appropriés ;

e) L’établissement de rapports périodiques et la tenue à jour des registres qui seront disponibles au public et à l’ensemble des acteurs concernés.

Le rôle de la CEDEAO7

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74 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• Article 53 : Les États membres sont responsables de la coordination du soutien extérieur aux programmes nationaux de RGSS. Lorsqu’ils n’en ont pas les capacités, il leur est loisible de solliciter un appui extérieur et une assistance en matière de renforcement de capacités auprès de la Commission de la CEDEAO, de l’Union africaine, de l’ONU et d’autres partenaires.

• Article 54 : Les États membres mettront en place une structure ou un cadre national de coopération et de partenariat pour aider à la mise en œuvre des programmes en matière de RGSS. Cette structure nationale sera composée d’acteurs tels que les représentants des pouvoirs publics, les OSC, les partenaires internationaux, les [organisations à base communautaire], les instituts de recherche et de l’enseignement supérieur.

• Article 55 : Dans le cas des États membres sortant de conflits et dont les institutions étatiques sont fragiles, la CEDEAO peut, avec le soutien de la communauté internationale et d’autres acteurs compétents, se charger de coordonner l’assistance extérieure à leur place, jusqu’à ce que lesdits États en aient la capacité.

• Article 56 : Les États membres engagés dans la mise en œuvre des programmes de RGSS, veilleront à se doter d’une bonne stratégie de communication en vue de : […]

c) garantir un soutien accru des partenaires internes et externes, y compris sous forme de financements.

7.2. Renforcer l’efficacité du soutien extérieur à la RSS

Le Cadre d’orientation de l’UA sur la RSS recommande aux communautés économiques régionales, telles que la CEDEAO, de « mener le plaidoyer auprès des partenaires internationaux tels que les Nations Unies, en faveur de la mise en œuvre des activités nationales de RSS dans les États membres » (article 69(e)).

Selon le projet de Cadre de politique régissant la RGSS en Afrique de l’Ouest, la Commission de la CEDEAO doit « contribuer aux stratégies de mobilisation des ressources des États membres, dans le cadre de la mise en œuvre des programmes de RGSS » (article 64(g)). Ce texte précise également que : « Si nécessaire, la CEDEAO apportera son aide aux États membres, dans le cadre de la conception, de la mise en œuvre et de l’évaluation de leurs programmes de la RGSS, dans la limite des ressources disponibles. Elle peut également solliciter l’assistance des partenaires à cet effet » (article 50).

À cet égard, les recommandations pratiques peuvent inclure les points suivants :

• Renforcer la capacité des États membres à concevoir, mettre en œuvre et assurer le suivi et l’évaluation des programmes de RGSS.

• Créer et entretenir des espaces de dialogue sur la contribution des partenaires internationaux à la réponse aux menaces transnationale, notamment les questions relatives au terrorisme, à la sécurité maritime et la piraterie, au trafic de drogues, à la traite des êtres humains et à toute autre forme de la criminalité organisée et transfrontalière. Ces questions sont notamment abordées à l’occasion de divers forums régionaux tels que les réunions annuelles de coordination entre la CEDEAO et les partenaires au développement, au sein de groupes thématiques mixtes (y compris ceux chargés de la paix et de la sécurité) de diverses instances internationales, ou encore lors des rencontres restreintes de partenaires telles que celles du P3+.

• Participer à des évaluations conjointes ainsi qu’à des missions d’établissement des faits, de suivi et d’évaluation des questions relatives à l’efficacité de l’assistance extérieure en matière de RGSS (à la demande d’un État membre). Par exemple, la CEDEAO a participé à ce type de missions au Mali et en Guinée-Bissau entre 2012 et 2015.

• Susciter des opportunités dialogue, de consultation et de coopération technique entre les États membres et d’autres acteurs en Afrique et au sein de la communauté internationale.

• Organiser des rencontres visant à élargir les partenariats, obtenir des engagements de soutien aux processus de RGSS de la part des partenaires au développement ou participer à un suivi conjoint des réformes en cours, ou prendre part à de telles rencontres lorsqu’elles sont organisées par les États Membres ou d’autres partenaires habilités.

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75Le rôle de la CEDEAO

• Mettre à profit les plateformes existantes pour encourager les partenaires à investir dans l’appui à la RGSS. Par exemple, le P3+ (réunion de coordination de certains bailleurs de la CEDEAO) et les réunions annuelles de coordination entre la CEDEAO et l’ensemble de ses partenaires au développement examinent le suivi des engagements destinés à soutenir les initiatives de paix et de sécurité. En tant que telles, ces rencontres peuvent constituer de bonnes occasions de discuter du financement extérieur d’initiatives relatives à la RGSS dans les États membres de la CEDEAO.

• Aider les États membres à organiser des rencontres de mobilisation ou de consolidation des partenariats, ou d’autres réunions de mobilisation de ressources.

7.3. Explorer la possibilité de créer un « portefeuille dédié » au financement de la RGSS relevant de la direction financière du département Affaires politiques, paix et sécurité de la CEDEAO

Compte tenu des problèmes de ressources humaines et des défis institutionnels et structurels auxquels est confrontée la Commission de la CEDEAO, il pourrait être utile de créer un « portefeuille dédié » relevant de la direction financière du département Affaires politiques, paix et sécurité de la CEDEAO pour soutenir les processus de RGSS dans ses États membres. Étant donné le manque de fonds alloués à la RGSS, et en particulier aux questions liées à la sécurité humaine, les fonds provenant de ce « portefeuille dédié » pourraient également être utilisés pour soutenir les réponses aux menaces transnationales à la sécurité (cybercriminalité, traite des êtres humains, trafic de drogues et d’armes illégales, terrorisme, mouvements d’insurrection, violence armée et autres). Les problèmes internes qui constituent un risque pour la sécurité humaine dans un État et qui sont susceptibles d’entraîner une insécurité dans d’autres États représentent également des préoccupations légitimes pour la CEDEAO, dans les limites de son traité constitutif révisé.

Cette possibilité ne va toutefois pas sans contreparties, qu’il convient de peser attentivement. La mise en place d’un « portefeuille dédié » présente en effet le risque d’entraîner la création d’instruments politiques non indispensables et d’alourdir la charge des services existants qui devront gérer ce fonds. Néanmoins, une telle initiative pourrait renforcer l’ancrage institutionnel et l’alignement des actions sur les stratégies régionales et nationales en matière de RGSS.

Avant de pouvoir envisager la création et l’opérationnalisation d’un tel fonds, la CEDEAO aura à clarifier certaines questions politiques et techniques. Pour mettre en place un éventuel fonds qui soutiendrait spécifiquement les questions transnationales en matière de RGSS, les points à examiner incluent notamment les questions clés suivantes.

• Les États membres de la CEDEAO partagent-ils la même conception du projet de création d’un « portefeuille dédié » au financement de la RGSS et relevant de la direction financière du département Affaires politiques, paix et sécurité de la CEDEAO ?

• Un « portefeuille dédié » qui prendrait en charge les questions transnationales en matière de RGSS sous la direction du département Affaires politiques, paix et sécurité de la Commission de la CEDEAO entrerait-il en conflit avec le mandat de l’unité Développement humain et genre, qui traite de la criminalité transfrontalière ?

Encadré 25 : Exemples de contributions de la CEDEAO aux initiatives visant à assurer la sécurité transfrontalière

La CEDEAO continue de fournir un soutien technique et financier à ses États membres dans leurs actions de renforcement de la sécurité transfrontalière. Par exemple, la Communauté a apporté un soutien financier au Libéria, en 2012 et 2013, pour lutter contre l’insécurité le long de la frontière entre ce pays et son voisin la Côte d’Ivoire, et prévenir ainsi une reprise des conflits et un retour de l’instabilité dans cette région. La CEDEAO a également alloué la somme de 500 000 dollars US pour soutenir, en 2014, la mise en œuvre de la stratégie de l’Union du fleuve Mano visant à établir un forum consultatif transfrontalier pour la prévention des conflits et l’alerte précoce.

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76

• Ce « fonds dédié » permettra-t-il de renforcer et d’améliorer l’efficacité de l’assistance internationale à l’échelle des États membres ?

• Ce « portefeuille dédié » sera-t-il en mesure de faciliter l’accès à des ressources supplémentaires provenant de bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux ? Depuis 2014, les partenaires de la CEDEAO dans les domaines de la paix et de la sécurité s’appuient sur le plan de mise en œuvre (matrice) du Cadre de prévention des conflits de la CEDEAO afin de coordonner leur soutien à la Communauté dans ce domaine. Le plan de mise en œuvre (qui possède une composante sécurité régionale, sans pour autant traiter spécifiquement de la RGSS) est un document unique, car il articule les actions prioritaires de plusieurs directions concernées au sein de la Commission. Bien qu’il soit encore en cours de finalisation (2015), il permet aux partenaires au développement de mieux identifier les lacunes et les demandes exprimées par les directions de la CEDEAO.

• La CEDEAO pourrait-elle constituer une plate-forme efficace pour l’obtention de financements alternatifs, en particulier en provenance du secteur privé, de fondations et de donateurs individuels, afin de mettre en place un « fonds dédié » au financement de la RGSS ?

• Ce « fonds dédié » va-t-il améliorer la coordination des partenaires au développement, ainsi que l’harmonisation et l’alignement de l’assistance sur les priorités des gouvernements bénéficiaires ?

• Comment garantir la gestion efficace, responsable, réactive et transparente d’un tel « fonds dédié » ?

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Cet aide-mémoire s’inspire des expériences de terrain dans de nombreux pays, notamment en Afrique de l’Ouest et dans d’autres régions d’Afrique et des Caraïbes. Il récapitule les éléments que les gouvernements d’Afrique de l’Ouest devraient prendre en compte pour évaluer et améliorer l’efficacité de la gestion du soutien extérieur à la RGSS. La liste d’actions présentée ici n’est ni exhaustive ni obligatoire et doit, le cas échéant, être adaptée en fonction de chaque contexte.

1. Définir l’agenda de la RSS et déterminer les capacités et les besoins en termes de ressources

• Procéder à une évaluation exhaustive des besoins de sécurité de l’État et de la population et élaborer une vision nationale de la sécurité par le biais d’un processus inclusif.

• Examiner et évaluer la capacité du secteur de la sécurité à répondre aux besoins identifiés.

• Déterminer les lacunes à combler afin de renforcer les capacités nationales à répondre aux besoins de sécurité de l’État et de la population.

• Définir les domaines prioritaires de la réforme sur la base de cette évaluation et élaborer un programme national de RSS.

• Élaborer le budget du programme national de RSS.

• Identifier les capacités nationales de financement pour couvrir les besoins budgétaires.

• Déterminer les déficits (écarts de moyens) susceptibles d’être comblées par un soutien extérieur.

2. Élaborer une stratégie efficace de mobilisation des ressources

• Attribuer des mandats et des responsabilités clairs aux différents organes gouvernementaux chargés d’établir des partenariats, en précisant les rôles des acteurs clés tels que les ministères de tutelle des institutions de sécurité, le ministère des Finances, le ministère de la Planification, le ministère des Affaires étrangères et le mécanisme national de coordination de la RSS.

• Définir des procédures claires pour engager tout dialogue formel — a fortiori des négociations — avec de futurs ou potentiels partenaires extérieurs, établir des partenariats et partager des informations sur les partenariats au sein de l’administration.

• Identifier les possibles sources de financement (en procédant à une cartographie des partenaires), déterminer les profils et les domaines d’intérêt des partenaires potentiels et identifier les points d’entrée pour engager des négociations sur la base des convergences entre les priorités nationales et les domaines d’intérêt des partenaires potentiels.

Aide-mémoire : Vers une mobilisation et une gestion efficaces des partenariats extérieurs en soutien à la RSS

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78 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

• Engager un dialogue politique de haut niveau pour convenir des conditions préalables à un partenariat — pour garantir, en particulier, une relation d’égal à égal, le leadership national et la dynamique endogène du processus de réforme, l’alignement des partenaires sur les priorités nationales, l’harmonisation des initiatives d’appui et la coordination des partenaires extérieurs, la gestion axée sur les résultats et la redevabilité mutuelle.

• Mettre à la disposition des partenaires une présentation générale des objectifs de la RSS, accompagnée d’un argumentaire de mobilisation des ressources adaptée à chaque partenaire potentiel majeur et qui met l’accent sur les points de convergence entre ses priorités propres et celles de l’agenda de réforme défini au niveau national.

• Entamer des négociations et choisir les modalités de financement en fonction des spécificités nationales (en règle générale, l’appui budgétaire général offre davantage de souplesse et est le mieux adapté à la nature holistique de la RSS).

• Évaluer les avantages de l’assistance offerte à l’aune des coûts de transaction et de la charge administrative engendrés, et établir des partenariats de manière avisée et sélective.

• Convenir avec les partenaires de critères de gestion et d’établissement de rapports simplifiés.

3. Renforcer les capacités nationales en matière de gestion

• Inclure dans les cadres de partenariat les actions visant à améliorer la mobilisation des ressources nationales.

• Le cas échéant, inclure dans les cadres de partenariat le soutien au développement des capacités du secteur de la sécurité en matière de gestion financière, y compris les actions de lutte contre la corruption.

• Démontrer un solide engagement politique en faveur d’un changement des cultures institutionnelles, notamment en ce qui concerne l’adoption de systèmes de gestion axée sur les résultats et l’administration des financements alloués au secteur de la sécurité à travers ces systèmes.

• Renforcer et harmoniser les cadres de gestion administrative et financière dans le secteur de la sécurité, y compris les procédures de passation de marchés, la gestion des actifs et les mécanismes de contrôle internes.

• Créer un environnement propice au contrôle du budget du secteur de la sécurité par le Parlement, en particulier la commission chargée du budget et des finances et celle chargée de la défense et de la sécurité.

• Créer un environnement propice au contrôle financier du secteur de la sécurité par les institutions officielles d’audit public, les agences de lutte contre la corruption et la société civile.

• Mettre en place des mécanismes de suivi et d’évaluation visant à assurer la pertinence, l’efficacité, le rapport coût-efficacité et d’autres dimensions fondamentales de la gestion des dépenses.

• Fournir des comptes rendus réguliers sur les engagements afin d’instaurer et de maintenir un climat de confiance entre les partenaires.

4. Élaborer des stratégies de soutien spécifiques pour les domaines de la réforme qui ne font pas l’objet d’une attention suffisante

• Allouer un financement suffisant aux réformes liées à la gouvernance, et pas uniquement au développement des infrastructures, à l’achat de matériel et à la formation opérationnelle.

• Intégrer les objectifs d’égalité entre les hommes et les femmes dans l’ensemble du processus de réforme et allouer un financement spécifique aux actions consacrées à la dimension genre.

• Prendre des dispositions pour étendre la réforme, en tant que de besoin, aux services de renseignement et autres composantes sectorielles habituellement laissées de côté.

• Prendre des dispositions pour assurer le développement, le renforcement et la viabilisation à long terme de la gestion des finances publiques.

• Prendre des dispositions pour assurer le développement à long terme des mécanismes de contrôle internes et externes, y compris le renforcement des capacités du Parlement et de la société civile en matière d’analyse budgétaire.

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79Ressources additionnelles

Ressources additionnelles

Megan Bastick et Kristin Valasek (dir.), Boîte à Outils « Place du genre dans la réforme du secteur de la sécurité » (Genève : DCAF, OSCE/BIDDH, UN-INSTRAW, 2008), http://www.dcaf.ch/Publications/Gender-Security-Sector-Reform-Toolkit / http://www.osce.org/fr/odihr/104131.

Hans Born et Aidan Wills (dir.), Overseeing Intelligence Services : A Toolkit (Genève : DCAF, 2012), www.dcaf.ch/Publications/Overseeing-Intelligence-Services-A-Toolkit.

CEDEAO, Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité – Projet de document (Abuja : CEDEAO, 2015).

CEDEAO, Code de conduite des forces armées et services de sécurité de la CEDEAO (Abuja : CEDEAO, 2011), www.dcaf.ch/content/download/431/4500/version/3/file/Acte_additionnel_portant_code_de_conduite_18.08.11.pdf.

Ghana Whistleblower Act (Act 720), GPC/A532/350/8/2006 (Accra : Assembly Press, 2006) http://www.drasuszodis.lt/userfiles/Ghana%20Whitsleblwer%20Act.pdf.

International Dialogue on Peacebuilding and Statebuilding, Un New Deal pour l’Engagement dans les Etats Fragiles (Dili : G+7, 2011), http://static1.squarespace.com/static/52117f47e4b01103f3653a0f/t/52faf925e4b00ea56bbc062d/1392179493625/New+Deal+French.pdf.

OCDE, Partenariat de Busan pour une coopération efficace au service du développement (Paris : OCDE, 2011), http://www.oecd.org/fr/cad/efficacite/49650184.pdf.

OCDE, Déclaration de Paris sur l’efficacité de l’aide au développement (Paris : OCDE, 2005), http://www.oecd.org/fr/cad/efficacite/34579826.pdf.

OCDE, Programme d’action d’Accra (Paris : OCDE, 2008), http://www.oecd.org/fr/cad/efficacite/34579826.pdf.

OCDE-CAD, Manuel de l’OCDE-CAD sur la réforme des systèmes de sécurité : soutenir la sécurité et la justice (Paris : OCDE, 2007), http://www.operationspaix.net/DATA/DOCUMENT/945~v~Manuel_de_l_OCDE_sur_la_reforme_des_systemes_de_securite.pdf.

Forum sur l’efficacité du développement des OSC, Consensus OSC de Siem Reap relatif au Cadre international pour l’efficacité de la contribution des OSC au développement (Siem Reap : Forum sur l’efficacité du développement des OSC, 2011), http://cso-effectiveness.org/IMG/pdf/international_framework_open_forum_fr.pdf.

Open Society Foundations, Principes globaux sur la sécurité nationale et le droit à l’information (« Principes de Tshwane ») (New York : Open Society Foundations, 2013), https://www.opensocietyfoundations.org/sites/default/files/tshwane-french-20150209_0.pdf.

Sida, Public Finance Management in Development Co-operation – A Handbook for Sida Staff (Stockholm : Sida, 2007), http://issat.dcaf.ch/Learn/Resource-Library/Books/Public-Finance-Management-in-Development-Co-operation-A-Handbook-for-Sida-Staff.

Union africaine, Cadre d’orientation sur la réforme du secteur de la sécurité (Addis Abeba : Commission de l’Union africaine, 2013), http://www.peaceau.org/uploads/ssr-policy-framework-fr.pdf.

Union africaine, Conclusions du Forum Afrique sur la réforme du secteur de la sécurité (RSS) (Addis Abeba : Union africaine, 2014), http://issat.dcaf.ch/fre/content/download/74681/1461870/file/French_%20Conclusions%20of%20the%20Forum%20on%20SSR.pdf.

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80 Gestion efficace de l’appui extérieur à la réforme du secteur de la sécurité

Notes

1. Aux fins de cette Boîte à Outils, et conformément à la terminologie utilisée par la Commission de la CEDEAO, les termes « soutien » et « partenaire » sont utilisés de préférence à ceux d’« aide » et de « bailleur de fonds », afin de refléter la nature de plus en plus nuancée des partenariats noués entre les acteurs nationaux en Afrique de l’Ouest et les partenaires extérieurs.

2. CEDEAO, Projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité (Abuja : CEDEAO, 2015). Au moment de la publication du présent Outil, le projet de Cadre de politique régissant la réforme et la gouvernance du secteur de la sécurité de la CEDEAO a été approuvé par les experts techniques représentant les États membres de la CEDEAO et est en instance d’adoption officielle par les chefs d’État et de gouvernement.

3. DCAF, Réforme et gouvernance du secteur de la sécurité, Document d’information (Genève : DCAF, 2009).

4. Banque mondiale, « Country and Lending Groups », http://data.worldbank.org/about/country-and-lending-groups.

5. Union africaine, Conclusions du Forum Afrique sur la réforme du secteur de la sécurité (RSS) (Addis Abeba : Union africaine, 2014), p. 3, http://issat.dcaf.ch/fre/content/download/74681/1461870/fi le/French_%20Conclusions%20of%20the%20Forum%20on%20SSR.pdf.

6. Alejandro Pachon, « Financing security sector reform: A review of official development assistance data », SSR Issue Papers No. 4 (Waterloo, ON: Centre for International Governance Innovation, 2012), https: //www.cigionline.org/sites/default/files/SSR%20Issue%20Paper_Pachon_ODA%20as%20SSR_final.pdf.

7. Les informations contenues dans cet encadré sont fondées sur les expériences du Ghana et de la Sierra Leone (voir Gouvernement du Ghana, « Ghana aid policy and strategy 2011–2015 », 2010 ; Gouvernement de la Sierra Leone, « Aid policy », 2010 ; République du Ghana, « National anticorruption action plan 2012–2021 », 2011). Cet encadré se fonde également sur les expériences de terrain de l’auteure du présent Outil, ainsi que sur des informations issues des processus du suivi et d’évaluation de projets relatifs à RSS dans 10 pays d’Afrique de l’Ouest.

8. Ministère des Affaires étrangères et du Commerce de la Nouvelle-Zélande, « Value for money guideline », 2011, traduction libre, https://www.mfat.govt.nz/assets/_securedfiles/Aid-Prog-docs/Value-for-Money-Guideline.pdf.

9. Department for International Development, « DFID’s approach to value for money (VfM) » (Londres : DFID, 2011), traduction libre, https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/67479/DFID-approach-value-money.pdf.

10. Librement adapté de Farida Fleming, « Value for money », BetterEvaluation, 2014, http://betterevaluation.org/evaluation-options/value_for_money.

11. ONU Femmes, « ODD 17 : Renforcer les moyens de mettre en œuvre le Partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser », s. d. , http://www.unwomen.org/fr/news/in-focus/women-and-the-sdgs/sdg-17-partnerships-for-the-goals.

12. Traduction libre de l’anglais.

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