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NUMÉRO 54 | HIVER 2014 / 15 Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper | www.alliancesud.ch Globalisation et politique Nord-Sud Coopération : la droite ( se ) trompe Financement des ODD :  Suisse sous pression Stocks obligatoires : sur le dos des pauvres Investissements : le Sud dit non

GLOBAL+ Nr. 54 | Hiver 2014/15

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Nouvelle initiative sur le dévéloppement: La droite (se) trompe, financement des ODD, investissement: le sud dit non; stocks obligatoires au dos des pauvres.

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Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | eper | www.alliancesud.ch

Globalisation et politique Nord-Sud

Coopération : la droite ( se ) trompeFinancement des ODD : Suisse sous pression

Stocks obligatoires :sur le dos des pauvres

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News

Finlande : plan d’action intéressantme. La Finlande a publié fin septembre son plan d’action national de mise en œuvre des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits humains. Si les ONG déplorent un manque d’actions concrètes, elles relèvent deux points posi-tifs. D’abord, la volonté de passer la législa-tion au scanner des Principes directeurs, en particulier sous l’angle de la diligence rai-sonnable et de l’accès à la justice. Le but est d’arriver à des propositions de modifications légales. Ensuite, l’obligation pour les entre-prises d’Etat d’informer sur les risques de droits humains et l’instauration d’un méca-nisme de plainte permettant aux citoyens de dénoncer des violations. Selon le postu-lat von Graffenried ( 12.3503 ), la Suisse a jusqu’à fin 2014 pour élaborer son propre plan d’action. Elle aura cependant du retard, le Seco n’ayant pas fait son travail.

APE : critiques d’officiels européensia. Des poids plumes qui se battent contre un poids lourd. Après des années de forcing, l’Union européenne a réussi à conclure des accords de partenariat économiques ( APE ), à savoir de vastes traités de libre-échange avec la plupart des pays africains. Les Etats d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique australe et d’Afrique de l’Est ont fini par signer. Fait

nouveau, des officiels européens ont verte-ment critiqué ces traités. Le commissaire pour l’Afrique du gouvernement allemand, Günter Nooke, a déclaré que les APE dé-truisent des décennies de coopération au dé-veloppement. L’analyste économique de l’ONU pour l’Afrique de l’Est, Andrew Mold, a affirmé que les économies africaines ne peuvent pas résister à la concurrence de pays comme l’Allemagne, dont les exporta-tions représentent une menace pour les in-dustries africaines.

Banque mondiale :  agitation dehors et dedansmh. La Banque mondiale mène depuis plu-sieurs semaines une consultation interna-tionale sur la réforme prévue de ses poli-tiques de sauvegarde. Il s’agit des standards sociaux et environnementaux dont la banque doit tenir compte dans le finance-ment de projets. Des organisations de la société civile critiquent avec véhémence le projet de révision, car il conduirait à un af-faiblissement massif des standards actuels. Les consultations ont même donné lieu à des manifestations à différents endroits de la planète. L’agitation règne également au quartier général à Washington. Ici, un nombre croissant d’employés s’insurgent contre la restructuration prévue et la nou-

velle stratégie, qui pourraient conduire à de nombreux licenciements. Au moment de son élection, le nouveau chef de la Banque mondiale Jim Yong Kim a fait figure d’espoir. Il est aujourd’hui l’objet de critiques crois-santes de tous côtés.

Société civile : écoute dans le bleupn. Avant d’élaborer ses objectifs et de les mettre en discussion, le gouvernement suisse a coutume depuis peu d’inviter « la société civile, l’économie et la science » à exprimer leurs desiderata concernant les stratégies, messages et lois. En 2014, deux questions ont donné lieu à des Landsgemein-den de ce genre : la stratégie à venir du Conseil fédéral pour le développement durable et le nouveau message sur la coo-pération internationale pour les années 2017 – 2020. Cette manière d’écouter la socié-té civile est un peu déconcertante pour les organisations consultées comme la nôtre. Nous préférerions nous prononcer sur des positions du gouvernement et de l’adminis-tration plutôt que de discuter dans le bleu. Dans le cas du nouveau message sur la coo-pération internationale, des documents in-ternes existent que la DDC aurait pu faire circuler, au moins comme thèses, pour le premier round de consultation.

Impressum

GLOBAL+paraît quatre fois par an.

Editeur :Alliance SudCommunauté de travail Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | epere-mail : [email protected] Site internet : www.alliancesud.chmédias sociaux : facebook.com/alliancesud, twitter.com/AllianceSud

Rédaction :michel egger ( me ) Tel. 021 612 00 98

Iconographie : Nicole AebyGraphisme : Clerici Partner AG, ZurichImpression : s+z : gutzumdruck, BrigTirage : 1500Prix au numéro : Fr. 7.50Abonnement annuel : Fr. 30.–Abonnement de soutien : min. Fr. 50.–Prix publicité / encartage : sur demandePhoto de couverture : riches et pauvres à rio de Janeiro : deux mondes géographi-quement proches, mais qui ne se mélangent pas. © Francesco Zizola/Noor/Keystone.

Le prochain numéro paraîtra en mars 2015.

PrésidentHugo Fasel, directeur de Caritas Suisse

DirectionPeter Niggli ( directeur )Kathrin Spichiger, rosa Amelia Fierromonbijoustr. 31, Case postale 6735, 3001 BerneTél. 031 390 93 30Fax 031 390 93 31e-mail : [email protected]

Politique de développement

– Coopérationaudéveloppement eva Schmassmann, Tél. 031 390 93 40 [email protected]

– Politiquefinancièreetfiscale mark Herkenrath, Tél. 031 390 93 35 [email protected]

– Développementdurable/climat Jürg Staudenmann, Tél. 031 390 93 32 [email protected]

– Commerce isolda Agazzi, Tél. 021 612 00 97 [email protected]

– Multinationales michel egger, Tél. 021 612 00 98 [email protected]

– Médiasetcommunication Daniel Hitzig, Tél. 031 390 93 34 [email protected]

InfoDoc BerneJris Bertschi / emanuela Tognola / emanuel ZeiterTél. 031 390 93 [email protected]

Bureau de Lausannemichel egger / isolda Agazzi / Katia vivasTél. 021 612 00 95 / Fax 021 612 00 [email protected]

InfoDoc Lausanne Pierre Flatt / Amélie vallotton Preisig / Nicolas BugnonTél. 021 612 00 86, [email protected]

Bureau de LuganoLavinia Sommaruga / mirka CalettiTél. 091 967 33 66 / Fax 091 966 02 [email protected]

Alliance Sud en un clin d’œil

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Points forts

Coopération au développement 4 La droite à côté de la plaque

Financement du développement 6 Mettre un terme aux pratiques louches

Stocks obligatoires 8 Sur le dos des plus pauvres

Traités d’investissement 10 Vent nouveau du Sud

Alliance Sud infoDoc 11 Rencontres du « troisième lieu »

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Débat sur la croissance à la sauce helvétiqueDepuis une dizaine d’années, la croissance fait l’objet d’un débat inter-national. A l’origine, plusieurs facteurs : les changements climatiques et l’incapacité d’y répondre sérieusement ; la crise de 2008 avec la recon-naissance que, depuis 30 ans, la progression du revenu de la majeure partie de la population de nombreux pays industrialisés a reposé sur des crédits, alors que les élites économiques se sont appropriées la croissance réelle ; la persistance de la pauvreté de masse dans le monde, alors que l’économie de beaucoup de pays en développement n’a jamais crû autant que durant les 15 dernières années ; ou encore la croissance rapide de la Chine qui a empoisonné de manière systématique des ressources aussi vitales que les sols, l’air et l’eau.

Ces derniers mois, la Suisse a mené son propre débat sur la crois-sance, mais d’une autre manière. elle l’a axé sur l’augmentation des « étrangers » et de la population, qui serait la cause des effets négatifs de la croissance économique de la Suisse : bétonnage du paysage, embou-teillages, difficultés sur le marché de l’emploi. Trois points cependant ont été absents des discussions :

1.La croissance du revenu, qui pèse sur l’environnement. or, depuis 1970, le PiB par habitant de la Suisse s’est accru en termes réels d’un tiers, le nombre de voitures personnelles, de maisons familiales et de pendulaires par mille habitants a plus que doublé. Ce développement a changé le visage de la Suisse, qui ne ressemble plus à 1970, et conduit à un aména-gement du territoire « fédéralisé » qui préfère la croissance sauvage à la planification. Sans immigration après 1970, on compterait certes moins de voitures et de maisons individuelles en chiffres absolus, mais leur nombre aurait quand même plus que doublé et continuerait de croître.

2. La répartition inégale des fruits de la croissance. Nombre de celles et ceux qui ont voté pour les deux initiatives populaires sur la limitation de la population étrangère ont l’impression que leur revenu disponible réel n’a plus augmenté depuis le milieu des années 1990. Cela a neutralisé les contre-arguments économiques affirmant que l’économie suisse af-fiche une « croissance saine », qu’elle dépend de l’immigration et que globalement tout le monde en profite.

3. Le fait que dans une économie capitaliste sans croissance, seuls les effets négatifs augmentent : chômage, baisse des salaires, fuite des in-vestissements à l’étranger, alors que les recettes fiscales et les presta-tions sociales de l’etat baissent. Seules sont épargnées le plus souvent les personnes qui possèdent du terrain, des entreprises et du capital fi-nancier. Le monde occidental connaît cette situation depuis 2008, en particulier nos voisins européens.

Ces trois points ont été escamotés dans le débat helvétique sur la crois-sance. on est par là-même passé à côté du cœur de la discussion inter-nationale : comment sortir de la camisole de force de notre système éco-nomique sans entraîner l’économie dans une spirale vers le bas. Nous aurions tout à gagner à aborder cette question aussi en Suisse et à l’orienter davantage sur les sept milliards d’« étrangers » qui peuplent le reste du monde.

� Peter�Niggli,�directeur�d’Alliance�Sud

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Coopération�suisse�au�développement

Revendications de la droite  à côté de la plaque

Eva Schmassmann L’annonce en août 2014 du lancement d’une initiative

populaire sur l’aide au développement a fait sensation.

La Suisse devrait agiter la menace d’une baisse de son aide pour

amener les gouvernements à respecter les droits humains

et les minorités. Les initiants semblent cependant viser avant

tout une coupe claire dans le budget de la coopération.

La coopération suisse au développement doit devenir plus du-rable. C’est ce qu’exige une initiative populaire qui devrait être lancée au printemps 2015. Concrètement, l’aide publique au développement ( APD ) ne devrait aller qu’aux pays qui mettent en œuvre le droit public international contraignant, respectent les minorités et coopèrent en matière d’asile.

Les initiants pensent qu’en conditionnant ainsi l’aide au développement, il sera possible de susciter un changement chez les dictateurs qui violent systématiquement les droits humains. ils surestiment, ce faisant, totalement l’influence du petit pays qu’est la Suisse. Leur véritable objectif semble différent : la ré-duction du budget de la coopération. Selon leurs propres affir-mations, l’application de l’initiative pourrait facilement conduire à une diminution de moitié. Après plusieurs tentatives – avortées au Parlement – pour revenir sur l’objectif de 0,5 pour cent du revenu national brut décidé par le Conseil fédéral et les Chambres, le peuple devrait décider.

Pays APD * 2013, Mio CHF

Accord  réadmission

Requérants d’asile 2013

Erythrée 2 563Syrie 18,1 1 901

Nigeria 1 764Tunisie 19,9 1 737Maroc 6,6 1 068Afghanistan 24,2 2006 892Algérie 792Kosovo 61,8 2010 698Sri Lanka 10,4 684Chine 10,3 675Total 151,3 12 774

5,10 % 59,51 % Total APD Total requérants 

d’asile2 963,8 21 465

L’aide au développement détournée de sa finalité : des requérants d’asile érythréens dans l’abri de protection civile de Lumino ( TI ).

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e L’aide comme instrument de la politique d’asileL’initiative veut sanctionner les pays qui ne s’engagent pas à reprendre les requérants d’asile déboutés, via un accord de réad-mission. Cette demande méconnaît la réalité. L’erythrée et le Nigeria, numéros 1 et 3 en matière de requérants, ne reçoivent pas d’aide du tout. Près de 60 pour cent de tous les demandeurs d’asile en Suisse proviennent de 10 pays qui obtiennent 5,1 pour cent de l’aide helvétique.

Par ailleurs, la Suisse ne va pas se risquer à poser des condi-tions à des pays comme la Chine. Le spectre d’un retrait de l’aide laissera de marbre les pays où elle bénéficie non à l’etat mais à des organisations locales, ou – comme en Syrie avec l’aide humanitaire – à la population en détresse. vouloir conclure un accord de réadmission et menacer de fermer les robinets de l’aide au milieu d’une guerre civile serait d’un cy-nisme absolu.

* official Development Assistance, aide publique au développement.

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Source : admin.ch

Coopération sans tabou avec des dictateurs La Suisse est insérée de diverses manières dans une toile glo-bale. elle entretient des relations économiques, financières et politiques avec presque tous les pays. Les principaux flux d’argent transitent par des canaux économiques et financiers. La coopération au développement ne représente qu’une petite partie. elle est par là-même le levier le plus faible pour prendre de l’influence. Celle-ci est d’ailleurs également faible dans d’autres domaines.

Les initiants misent donc sur un mauvais pion dans un jeu difficile. ils ne veulent pas mettre en cause les intérêts écono-miques et politiques de la Suisse. Celle-ci forme avec huit pays d’Asie centrale et d’europe de l’est un groupe de vote à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international. Cette collaboration lui assure un siège au directoire des deux organi-sations. en même temps, la plupart de ces pays – l’ouzbékistan, le Turkménistan, le Tadjikistan, l’Azerbaïdjan, le Kirghizistan et le Kazakhstan – se distinguent par des gouvernements dicta-toriaux pour le moins peu respectueux des droits humains. Leur fortune – mal acquise sur le dos de leur peuple – repose dans des villas de luxe au bord du lac Léman.

Les droits humains, parents pauvres des exportations d’armesLes exportations d’armes illustrent bien la valeur réelle que les initiants accordent aux droits de l’homme. en 2008, sous la pres-sion d’une initiative populaire qui demandait leur interdiction, le Conseil fédéral a durci les conditions pour les exportations de matériel de guerre. Ces six dernières années, aucune arme ne devait être livrée à des pays portant atteinte systématiquement ou de manière grave aux droits humains, ainsi qu’à ceux confron-tés à de gros problèmes de développement. en 2014, suivant la décision du Parlement, le Conseil fédéral est revenu en arrière en assouplissant ces dispositions. Des exportations d’armes pourront à nouveau être effectuées vers l’Arabie Saoudite et le Pakistan, connus pour leur mépris des droits humains. elles ne sont plus exclues à priori vers les pays les moins développés. Les initiants ont soutenu ces assouplissements.

Les revendications de la droite pour conditionner l’aide au développement ignorent complètement la complexité des rela-tions extérieures de la Suisse et leur efficacité. Deux points sont importants dans le débat. Premièrement, le développement est un processus à long terme qui doit encourager la démocratisa-

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tion et les droits humains. La coopération internationale doit accompagner et promouvoir ces processus. une grande partie de l’aide suisse bénéficie, en ce sens, à des organisations non gouvernementales locales. Leur couper les fonds serait contre-productif. Deuxièmement, l’aide helvétique ne sera durable que si la Suisse soumet tous les domaines de sa politique extérieure – fiscale, financière, commerciale et climatique – au même im-pératif de politique de développement : la cohérence.

Pays APD 2013, Mio CHF Freedomhouse Index 2014

Persécution minorités * Exportations d’armes 2013, CHF **

Arabie Saoudite Pas libre 3 ( rel ) 21 897 144Emirats arabes unis Pas libre 1 ( rel ) 10 193 256Inde 6,7 Libre 2 ( rel, indig ) 5 140 720Afrique du Sud 7,1 Libre 1 ( race ) 1 797 190Pakistan 16,4 Partiellement libre 3 ( ethno, rel ) 769 846Liban 14,1 Partiellement libre 1 ( ethno, rel ) 473 752Jordanie 11,5 Partiellement libre 1 ( rel ) 413 206Kenya 6,7 Partiellement libre 2 ( ethno, indig, rel ) 187 845Bosnie-Herzégovine 19,6 Partiellement libre 1 ( ethno ) 185 380Ukraine 16,0 Partiellement libre 3 ( ling, ethno ) 182 447

* intensité croissante de 1 à 3 pour différentes catégories de conflits : religieux, ethniques, racistes, linguistiques et indigènes. Présentation propre établie sur la base des données du minority rights Group international. ** Les statistiques de 2013 contiennent des exportations d’armes autorisées avant 2009 ainsi que des livraisons de pièces détachées qui n’étaient pas soumises au durcissement légal.

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Conférence�d’Addis�Abeba�sur�le�financement�du�développement

Mettre un terme  aux pratiques louches

en septembre 2015, l’oNu entend fixer de nouveaux objectifs globaux de développement durable ( oDD ). Les pré-négocia-tions dans le cadre du Groupe de travail ouvert ont débouché sur un catalogue ambitieux de 17 objectifs principaux assortis de nombreux sous-objectifs, qui renvoient avec force égale aux aspects économiques, sociaux et écologiques du développe-ment durable. on ne sait pas encore si ces objectifs ne seront pas édulcorés d’ici à la fin des pourparlers. Plusieurs pays ont déjà annoncé leur résistance à certaines propositions.

une autre question ouverte concerne le financement de ces futurs objectifs. Ce qui est sûr, c’est que les coûts de leur mise en œuvre vont excéder les capacités propres des pays les plus pauvres. C’est pourquoi les pays du Sud ont obtenu qu’à Addis Abeba ( ethiopie ) se déroule déjà en juillet 2015, soit deux mois avant la clôture des négociations sur les oDD, une confé-rence de l’oNu à haut niveau sur le thème du financement du développement. un but essentiel de ce sommet sera que les pays industrialisés confirment leur engagement d’investir 0,7 pour cent de leur revenu national brut dans l’aide publique au développement et qu’ils établissent pour cela un nouveau calendrier contraignant. Cet objectif de 0,7 pour cent aurait déjà dû être atteint en 2015.

Sources innovantes et flux douteuxDe leur côté, les pays industrialisés vont vraisemblablement pousser avant tout des mesures utiles à leurs propres multina-tionales et personnes privées fortunées. Y figure par exemple l’instauration de fonds pour financer la création d’entreprises dans les pays en développement. La discussion portera égale-ment sur les garanties publiques pour les risques liés aux inves-tissements de multinationales dans les pays en développement considérés comme politiquement fragiles ou économiquement à risque.

Le problème de ces mesures est qu’elles encouragent exclu-sivement le secteur privé. Les bénéficiaires, certes, incluent les entreprises domestiques des pays en développement. mais le

Mark Herkenrath En juillet 2015 se tiendra à Addis

Abeba la troisième conférence de l’ONU sur le

financement du développement. Les pays en

développement vont exiger des pays industriali-

sés un soutien accru dans la lutte contre l’éva-

sion fiscale et les transferts de gains des multi-

nationales. La Suisse a du pain sur la planche.

financement de services publics essentiels comme l’éducation, la santé, la construction et l’entretien d’infrastructures n’est absolument pas couvert. Pour ces tâches étatiques centrales, les pays en développement ont urgemment besoin de recettes publiques plus élevées.

un autre thème central de la conférence d’Addis Abeba concernera les flux financiers douteux qui, chaque année, am-

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putent de milliards de francs les budgets des pays en dévelop-pement. il s’agit des déplacements de fortunes sur des comptes étrangers, qui servent à l’évasion fiscale ou à la dissimulation de la corruption et d’autres activités illégales. Le montant de ces transactions dépasse de plusieurs fois l’aide publique des pays industrialisés. A cela s’ajoutent les transferts des bénéfices des multinationales vers les paradis fiscaux. il est capital de mettre un terme à ces pratiques pour soutenir les pays concer-nés dans le financement des oDD.

La Suisse sur la selletteLa Suisse est directement concernée en tant que principale place financière au monde dans le secteur bancaire privé off­shore. elle a certes accompli certains progrès, mais plusieurs projets de loi favorables aux pays en développement sont en-core en discussion au Parlement :

–Fondsdespotentats. Sur la scène internationale, la Suisse a toujours la réputation douteuse de constituer un havre pour les fortunes mal acquises. Les lacunes de la loi sur le blanchiment d’argent ainsi que l’application très insuffi-sante par certaines banques de l’obligation de diligence, ont pour résultat que de tels fonds continuent d’atterrir en Suisse. Les millions d’avoirs – bloqués entre-temps – de l’en-tourage du président ukrainien déchu Janukowitsch en sont l’exemple le plus récent.

La Suisse a accompli ces dernières années des progrès indéniables dans le gel et la restitution de ces fonds. Après la chute de dictateurs étrangers, elle figure à chaque fois parmi les premiers pays à geler leur fortune. Par ailleurs, elle soutient fortement les pays d’origine dans la formula-tion des demandes d’entraide judiciaire, nécessaires pour la confiscation et la restitution des fonds. une nouvelle loi devrait donner à ces pratiques une base légale solide. elle sera traitée en 2015 par les Chambres fédérales.

–Soustractiond’impôt. La Suisse peine toujours à prendre les mesures requises contre l’évasion fiscale des pays en déve-loppement. La mise en œuvre de l’obligation ( 2009 ) d’offrir une entraide fiscale administrative élargie à tous les pays intéressés, traîne les pieds. La liste des pays auxquels la Suisse est prête à transmettre les informations bancaires nécessaires en cas de soupçon avéré d’évasion fiscale, ne comprend aujourd’hui que sept pays en développement, à côté de nombreux pays industrialisés.

il est en ce sens réjouissant que le Conseil fédéral ait mis en consultation en octobre une loi qui devrait remédier à ces carences. Le projet légal prévoit l’extension unila-térale de l’entraide administrative élargie à quelque 50 autres pays en développement. L’idéal – politiquement, hélas, sans espoir – serait que le Conseil fédéral leur offre en même temps l’échange automatique d’information. Cela aiderait les autorités fiscales des pays en dévelop-pement à détecter les éventuels cas de fraude.

–Privilègesfiscaux. Pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale des multinationales, il convient d’abolir les privi-lèges fiscaux offerts par les cantons aux holdings et autres sociétés à régime fiscal spécial. C’est heureusement prévu dans le cadre de la réforme de l’imposition des entreprises iii, qui est actuellement en consultation. Ainsi que nous l’avons montré dans le dernier numéro de GLoBAL+ ( 53/2014 ), le Conseil fédéral envisage cependant de créer de nouvelles possibilités pour inciter les entreprises à transférer en Suisse et sans imposition leurs gains à l’étran-ger. Contrairement aux privilèges accordés aux holdings, les mesures prévues – licence�boxes et baisses générales d’impôt – seraient cependant conformes aux normes de l’oCDe.

Sans de nouveaux mécanismes de financement, les objectifs de développement durable resteront des tigres de papier. C’est pourquoi la Suisse devrait s’engager à Addis Abeba pour des mesures tangibles contre l’évasion fiscale de personnes privées et les transferts de bénéfices des multinationales dictés par des raisons fiscales. A l’évidence, la Suisse a aussi du pain sur la planche de sa politique intérieure.

Siège de la société Leasing & Financial Services Ltd à Mumbai. Les fortunes in-

diennes déposées dans les banques suisses pèsent sur les négociations d’un

accord de libre-échange avec l’Inde.

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Approvisionnement�économique�du�pays

Sur le dos des pays  les plus pauvres

Michel Egger Le projet de nouvelle loi sur l’approvisionnement économique du

pays entérine le financement des stocks obligatoires de la Suisse par

les importations de produits en provenance aussi des pays les plus pauvres.

Un système contraire aux engagements internationaux de la Suisse.

Il reviendra au Parlement de corriger le tir.

Pour sa sécurité en temps de crise et de pénurie, la Suisse a constitué des stocks de denrées alimentaires. ils sont gérés par la société coopérative de droit privé réservesuisse et financés par une taxe à la frontière qui est prélevée sur les importations de différents produits alimentaires : riz, sucre, café, huiles et graisses comestibles, céréales panifiables, blé dur et denrées fourragères. Cette taxe, appelée « contribution au fonds de ga-rantie », s’ajoute aux tarifs douaniers et est limitée par les engagements de la Suisse à l’omC. La production indigène y échappe.

Tissu d’incohérencesDepuis plusieurs années, le Conseil fédéral doute de la péren-nité de ce système, peu compatible à terme avec la libéralisa-tion des marchés, notamment avec l’union européenne. en 2010, par exemple, il déclarait : « Pour l’avenir, il faut envisager de supprimer le lien entre les contributions au fonds de garan-tie et les prélèvements douaniers ».1 La révision en cours de la

Loi sur l’approvisionnement du pays ( LAP ), qui date de 1982, était l’occasion d’une telle réforme. Celle-ci, malheureusement, n’aura pas lieu. Le Conseil fédéral n’a pas tiré les conséquences de ses propres réflexions. Le projet sur lequel la Commission de la politique de sécurité du Conseil des etats est entré en matière début novembre, reconduit le mode de financement actuel. un véritable tissu d’incohérences entre les politiques d’approvi-sionnement, agricole, commerciale et de développement.

1. « La sécurité de l’approvisionnement revêt le caractère d’un bien public »2, déclare le directeur de l’office fédéral de l’agriculture, Bernard Lehmann. il entérine le discours de nom-breux chercheurs et organisations internationales. Question : pourquoi l’invocation du bien public pour justifier les subven-tions agricoles de la Suisse ne vaut-elle pas pour les stocks obli-gatoires ? La logique voudrait en effet que ceux-ci soient finan-cés par le budget de l’etat, ainsi que le font d’autres pays, et non par le consommateur via un renchérissement des denrées alimentaires. il serait donc plus cohérent avec la notion de bien

Plus de 3,3 millions de francs de taxes sont prélevés sur des huiles et graisses comestibles en provenance des pays les plus pauvres. Une entorse aux en-gagements internatio-naux de la Suisse. Ph

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© recherche effectuée par Anne-marie Browne

public et socialement plus équitable de financer les stocks ali-mentaires avec la caisse fédérale. Cela serait également tout à fait supportable en termes budgétaires : de 1995 à 2010, leurs coûts ont diminué de 307 à 116 millions, soit de 43 à 15 francs par habitant.3

Finalité détournée2. « L’approvisionnement économique du pays est conçu pour maîtriser les crises et non pour poursuivre des objectifs de politique structurelle. Ces derniers relèvent de secteurs tradi-tionnels comme […] la politique agricole ».4 Bien dit ! mais pourquoi alors la contribution au fonds de garantie pour le sucre – 140 francs par tonne aujourd’hui – est-elle trois à quatre fois plus élevée que celles pour les autres denrées non produites en Suisse, comme le riz ou le café ? Pourquoi ces taxes restent-elles stables, alors que celle pour le sucre n’a cessé d’évoluer en fonction de l’évolution du prix du marché mondial, sans rap-port avec les coûts effectifs des réserves ? Pourquoi, le 1er juin 2007, le Conseil fédéral – confronté à une forte augmentation des importations de sucre du Sud – l’a-t-il augmentée de 100 à 160 francs ? La réponse tient en un mot : protectionnisme. on a là un clair détournement de la LAP à des fins de politique agri-cole, avec des effets dommageables pour les pays en dévelop-pement exportateurs. on notera que les paysans suisses ne contribuent pas aux réserves alimentaires, alors même que la Suisse est devenue quasi autosuffisante en sucre.

3. « Le monde développé et les pays émergents doivent sup-primer quotas et tarifs sur tous les produits des pays les moins avancés », déclarait le conseiller fédéral Joseph Deiss en 2005 à la conférence ministérielle de l’organisation mondiale du com-merce ( omC ) à Hong Kong. en 2009, parallèlement à l’union européenne, la Suisse a accordé le libre accès intégral ( en fran-chise de droit et de contingent ) à tous les produits en prove-nance des pays les plus pauvres. or, réservesuisse continue de prélever une contribution au fonds de garantie sur les impor-tations de produits en provenant de ces pays : riz semi-blanchi ou blanchi, brisures de riz, huiles et graisses comestibles, cer-tains sucres, denrées fourragères. Cela a rapporté plus de 3,3 millions de francs en 2013. Cette pratique est contraire aux

� 1� Réponse�à�la�Question�de�Luc�Barthassat,� �Financement�des�stocks�obligatoires�et�PMA�(�10.1016�).�

� 2� «�Les�grandes�lignes�de�la�Politique�agricole�2014�–�2017�»,� �La�Vie�économique,�4­2012.

� 3� Rapport�sur�l’approvisionnement�économique�du�pays� �(�2009�à�2012�),�p.20.�

� 4� Rapport�explicatif�du�Conseil�fédéral,�p.�12.

CoNTRIBUTIoNS AU FoNDS DE gARANTIE ( CFg ) 2013

Pays les moins avancés ( PmA ) Pays en développement SGP *

Quantité, kg Droit douane CHF/100 kg

CFg CHF/100 kg

Total CFg CHF

Quantité, kg Droit douane CHF/100 kg

CFg CHF/100 kg

Total CFg CHF

Café ( total )– non torréfié– torréfié– essences

6 915 0556 913 985

1 02149

000

04,508,85

520

464

93 385 24693 239 355

43 621102 270

000

3,754,50

0,90 - 8,85

3 506 7783 496 475

1 9638 339

Riz ( total )– brut– blanchi     et semi

32 5054 145

28 360

 00

04,75

1 3470

1 347

21 016 9052 379 415

18 637 490

00

2,85 - 4,754,75

998 303113 022885 281

Sucres 26 349 0 0 - 14 3 686 9 931 801 0 8,2 - 14,0 1 390 285Huiles & graisses 39 641 525 0 6,05 - 9,80 3 326 780 64 189 694 0 6,05 - 9,80 5 256 226Céréales 0 0 0 0 681 925 18 5 34 096

Tous produits 3 331 865 11 185 688

engagements internationaux de la Suisse. elle est également éthiquement discutable, car elle revient à financer la sécurité d’approvisionnement d’un des pays les plus riches de la planète par des taxes sur les importations des pays les plus pauvres.

Critiques d’Alliance Sud« Faciliter l’accès au marché des produits issus de pays défavo-risés contribue de façon non négligeable à la promotion du commerce, à l’accroissement des recettes à l’exportation et, par-tant, au développement économique des pays partenaires », peut-on lire sur le site du Secrétariat d’etat à l’économie. L’un des instruments est l’octroi de préférences douanières à ces pays. or, une taxe pour le financement des stocks obligatoires va à l’encontre de ces objectifs et des déclarations d’intention de la Suisse. elle fait perdre aux pays en développement une partie de leur compétitivité naturelle et de l’avantage compa-ratif acquis avec les préférences tarifaires. Selon les produits, elle pèse particulièrement sur les initiatives de commerce équitable comme max Havelaar, qui tentent de gagner des parts de marché.

Lors de la procédure de consultation sur le nouveau projet de loi, Alliance Sud a relevé ces incohérences et conflits d’inté-rêt entre le fonctionnement prévu et certains engagements de la Suisse envers les pays en développement. Dans la mesure où un changement du mode de financement des stocks obli-gatoires semble à priori exclu, elle demande au Parlement au moins de supprimer la contribution au fonds de garantie pour les produits en provenance des pays les moins avancés ainsi que pour les pays en développement bénéficiaires de préférences douanières.

* SGP signifie Système généralisé de préférences

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10 GLOBAL+ Hiver 2014 /15

Traités�d’investissement

Un vent nouveau souffle du SudIsolda Agazzi Fatigués des procès que leur intentent des multinationales, de plus en plus de pays en développement revoient leurs traités d’investissement. Ainsi, l’Afrique du Sud ne renouvelle pas ceux qui arrivent à échéance, dont celui avec la Suisse.

« Les temps changent. Lorsque nous avons mis fin à nos accords d’investisse-ment, nous étions l’ennemi public numé-ro un. Aujourd’hui, nous espérons que d’autres pays vont suivre ! », déclarait le Sud-Africain mustaqeem De Gama en oc-tobre à la CNuCeD. Pretoria a décidé de ne pas renouveler ses 49 accords d’in-vestissement lorsqu’ils arriveraient à échéance ni d’en renégocier de nouveaux.

en 2007, des investisseurs ont récla-mé 340 millions de dollars à l’Afrique du Sud pour la promulgation d’une loi an tidiscrimination. Le cas a été réglé à l’amiable, mais cela a constitué une vé-

ritable douche froide pour le pays arc- en-ciel. D’où la décision de mettre fin à ses traités. « Depuis lors, pas un seul investis-seur n’a quitté le pays, assure De Gama. Au contraire, l’investissement a augmenté. il n’y a donc pas de lien de causalité entre ces accords et les flux d’investissements. »

L’indonésie est en train de revoir ses 67 accords. Plusieurs points sont en ques-tion : la définition de l’investissement et sa contribution au développement ; l’ar-bitrage entre l’investisseur et l’etat ; les clauses du traitement juste et équitable, du traitement national, de la nation la plus favorisée et de l’expropriation indi-

La Suisse bouge, mais trop lentement

ia. L’accord entre la Suisse et l’Afrique du Sud s’est terminé le 31 octobre 2014. En vertu de la clause de survie, ses dispo-sitions continueront à s’appliquer pendant encore vingt ans. Berne a l’intention de parapher la Convention des Nations Unies sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et Etats, qui sera ouverte à la signature en mars 2015 à l’île Maurice. Alliance Sud salue cette décision et demande à la Suisse de ne pas émettre de réserves. Le mieux serait cepen-dant qu’elle renonce entièrement à l’arbitrage investisseur-Etat et le remplace par un mécanisme de règlement des diffé-rends entre les deux Etats, ou par le recours aux tribunaux internes. Elle devrait aussi supprimer la clause de survie de ses futurs traités, éliminer ou réduire drastiquement la clause sur l’expropriation indirecte ainsi que la clause sur le traitement juste et équitable.

Mexico, district fédéral. Le Mexique, sous in-fluence américaine, est l’un des rares pays émergents et en déve-loppement à voir plus d’avantages que l’in-verse dans ses accords d’investissement.

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recte, qui toutes limitent la capacité de régulation de l’etat en matière sociale et environnementale. Djakarta a terminé son traité avec les Pays Bas et pourrait ne pas renouveler les autres.

Pas de liens entre traités et investissementsAprès avoir essuyé une première condam-nation en 2009, l’inde est aussi en train de repenser ses 90 accords. elle veut res-treindre l’arbitrage investisseur-etat au profit des tribunaux internes et limiter les clauses du traitement juste et équi-table ainsi que de la nation la plus favo-risée.

L’equateur doit faire face à des plaintes à hauteur de 19 milliards de dol-lars. malgré ses 30 traités, c’est le pays d’Amérique latine qui reçoit le moins d’investissements et ceux-ci vont surtout dans le secteur pétrolier, avec des dégâts environnementaux énormes. A ce jour, le gouvernement a mis fin à 10 traités et s’apprête à en terminer 16 autres. en 2009, il a dénoncé le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements ( CirDi ), qui est le tribunal arbitral de la Banque mondiale.

Bien qu’étant l’un des pays qui reçoit le plus de capitaux en Amérique latine, le Brésil n’a signé aucun accord d’investis-sement. Les 14 accords paraphés dans les années 1990 ( dont celui avec la Suisse ) n’ont pas été ratifiés par le parlement, qui les considérait comme contraires à la constitution.

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GLOBAL+ Hiver 2014 /15 11

InaugurationAfin de fêter son ouverture, Alliance Sud infoDoc a le plaisir de convier le public à l’inauguration de son nouvel espace le jeudi 29 janvier 2015 dès 17 h. Les locaux ( Avenue de Cour 1, Lausanne ) resteront ouverts jusqu’à 21 h pour permettre au public de les découvrir et de rencontrer les documentalistes autour d’un apéritif. une partie officielle se tiendra de 18 h à 18 h 30, en présence notamment de repré-sentants d’éducation21 ( nos colocataires ), d’Alliance Sud et de l’architecte.

en 2014, les centres de documentation ont décidé d’adopter un nouveau nom afin de renforcer leur identité : c’est ainsi qu’Alliance�Sud�InfoDoc est né. Ce changement est le symbole d’un pari – le rapprochement avec son public – et d’une nou-velle dynamique dans l’accomplissement de son mandat. Alliance Sud infoDoc ambitionne de devenir un nouvel espace public de rencontre, de débat et de réflexion.

issu de la sociologie urbaine, le concept de « troisième lieu » se distingue du premier lieu qu’est la maison et du deuxième qu’est le travail. C’est un espace neutre et public, à la manière des places de marché et des bistrots d’antan. un lieu de ren-contre et de création de capital social. L’omniprésence d’inter-net a considérablement appauvri l’échange social. Les relations se sont virtualisées de plus en plus, au détriment des rencontres irl ( in�real�life, comme disent les anglophones ).

Le « pari physique » lancé par les documentalistes d’Al-liance Sud est de créer des espaces de rencontre par l’organisa-tion de projections, débats, conférences et expositions. il s’agit en quelque sorte de rétablir le lien entre le réel et le virtuel, mais aussi de favoriser la démocratisation culturelle et l’éveil politique. Le monde a singulièrement besoin de citoyen-ne-s qui s’engagent et, pour cela, l’information choisie, vérifiée et organisée constitue un outil essentiel.

L’état du monde à portée de mainLa particularité du travail d’infoDoc tient à son lien avec l’actua-lité. Avec plus d’une centaine de titres suivis, la presse – suisse, régionale, internationale, générale et spécialisée – constitue le cœur de son fonds documentaire. L’information ainsi mise à disposition du public est unique en Suisse : constituée de plus de 100 000 coupures de presse organisées thématiquement et

InfoDoc�inaugure�ses�nouveaux�locaux

Rencontres du « troisième lieu »Pierre Flatt Janvier 2015 marquera un tournant dans l’existence des centres de documentation d’Alliance Sud. Après trente ans, le site bernois a migré au rez-de-chaussée de la rue Monbijou, ouvrant ainsi directement ses portes au public. A Lausanne, une transformation complète des locaux va permettre l’organisation d’événements. Un concept né de la sociologie urbaine, le « troisième lieu », illustre cette métamorphose.

géographiquement, elle éclaire les enjeux mondiaux actuels de manière inédite. elle est complétée par une bibliothèque spécialisée et une collection de périodiques ( Berne ).

Pour mettre l’état du monde à portée de main, Alliance Sud infoDoc propose également de nombreux produits en ligne : catalogue, dossiers électroniques thématiques, bases de don-nées de sites internet de référence ( Globalia ), portail multimé-dia, fiches pédagogiques. une foule d’informations sans cesse actualisées par une équipe de six professionnel-le-s documen-talistes. Ceux-ci mettent en outre leurs compétences à dispo-sition du public, en accompagnant et conseillant les utilisateurs sur place et à distance, ou en offrant un service de recherche sur demande.

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www.alliancesud.ch

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L’aide publique au développement ( APD ) de la Suisse représente 0,47 pour cent du revenu national brut.

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Plus d’un franc sur sept de l’APD suisse sert à couvrir les dépenses liées aux requérants d’asile.

Faits et chiffres Aide au développement

Photo : © Fabian Stamm

Le fils aîné d’une famille syrienne fuit la ville-frontière turc d’Akçakale. La famille a passé la nuit sur un terrain vague. « C’est toujours mieux qu’Alep », déclare le jeune homme. Son père n’a pas survécu à la guerre. En tant que mâle le plus âgé de la famille, il est maintenant responsable de sa mère, de ses frères et sœurs, de sa femme et du bébé de quelques mois. Cette image est tirée d’un travail paru dans l’ouvrage Les grands reportages pour la liberté de l’information publié par Reporter sans frontières Suisse. www.rsf-ch.ch

Né à Schaffhouse en 1983, Fabian Stamm a étudié au centre de formation pour les médias MAZ. Il a obtenu en 2014 le prix de la culture de la ville de Schaffhouse. Il travaille comme photographe libre pour divers médias de Suisse.

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C’est le montant des exportations suisses de matériel de guerre.

Sources�:�eda.admin.ch� �et�seco.admin.ch� �(�chiffres�pour�2013�).

Regards suisses sur le Sud.

GLOBAL+ Avenue de Cour 1 | 1007 Lausanne Téléphone 021 612 00 95e-mail : [email protected] www.facebook.com / alliancesud