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1 Goussainville, son univers impitoyable La maison bourgeoise dans le "village fantôme" en février 2014. Ce quartier de Goussainville est à moitié abandonné depuis la construction de l'aéroport de Roissy en 1974. Il ne lui manque que le pétrole. Et les idées. Goussainville est le Dallas du Val d’Oise. Rumeurs, insultes, condamnations, revolvers et confettis sont de la partie. Depuis 30 ans, hommes et femmes politiques de la ville ne renoncent devant rien pour donner une atmosphère de far-west à cette ville déshéritée, dont les habitants, principales victimes de ces conflits, vivent entre un village fantôme et des barres HLM. Un mois avant les élections municipales, plongée dans cet univers de série télé, pourtant bien réel...

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Goussainville, son univers impitoyable

La maison bourgeoise dans le "village fantôme" en février 2014. Ce quartier de Goussainville est à moitié abandonné depuis la construction de l'aéroport de Roissy en 1974.

Il ne lui manque que le pétrole. Et les idées. Goussainville est le Dallas du Val d’Oise. Rumeurs, insultes, condamnations, revolvers et confettis sont de la partie. Depuis 30 ans, hommes et femmes politiques de la ville ne renoncent devant rien pour donner une atmosphère de far-west à cette ville déshéritée, dont les habitants, principales victimes de ces conflits, vivent entre un village fantôme et des barres HLM. Un mois avant les élections municipales, plongée dans cet univers de série télé, pourtant bien réel...

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Le  feuillton   Depuis tente ans, Goussainville traverse une zone de turbulences et les avions de Roissy qui décollent au-dessus de la ville n’y sont pour rien. Cette commune de 31 000 habitants, dans le département du Val d’Oise, va de rebondissements politiques en coups de théâtre judiciaires. Deux élections municipales ont été annulées et l’équipe vaincue en 1995 a même… cambriolé la mairie. Au cœur de ce feuilleton rocambolesque, Elisabeth Hermanville joue le premier rôle. A son palmarès, trois mandats de maire et autant de condamnations par la justice. Au premier plan, ou en coulisses, elle n’a jamais vraiment quitté les feux de la rampe. La preuve ? Elle participera pour la quatrième fois au casting qui

désignera le prochain maire avec de bonnes chances de l’emporter. Après tout, elle a déjà décroché la palme de la meilleure mise en scène, du scénario et des effets spéciaux…

Episode  1  :  Blonde,  Œdipe  et  communistes  Goussainville, Val d’Oise, au début des années quatre-vingts. Ses alignements de pavillons, ses grands ensembles et son vieux village déserté par les habitants après la construction de l’aéroport de Roissy. La mairie est communiste depuis la Libération avec deux maires emblématiques, Jean-Gaston Rousseau et Roger Gaston. En 1982, Elisabeth Hermanville et son mari s’installent dans la ville. Ils dirigent ensemble une petite entreprise de tracts publicitaires sur Paris et ils ne font pas encore de politique. Pourtant, elle accepte de figurer sur la liste de droite du Docteur Jean-Pierre Rousseau pour les élections municipales de 1983. Ce dernier est le fils de Jean-Gaston Rousseau, l’ex-maire PCF, cité plus haut. Il souhaite ravir la mairie aux communistes et probablement tuer le père, mais c’est une autre histoire. La liste de Jean-Pierre Rousseau remporte les élections mais celui-ci refuse de devenir maire. Il explique avoir beaucoup souffert lors des mandats de son père qui consacrait plus d’énergie à sa ville qu’à ses enfants. Il faut donc lui trouver un remplaçant, et c’est Elisabeth Hermanville qui sera choisie lors du premier conseil municipal. Devenir directement maire de la ville où l’on s’est installé il y a un an à peine, voilà le premier des nombreux exploits de la trentenaire originaire de Normandie aux cheveux blonds platine.

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Episode  2  :  Revolver,  confettis  et  poigne  de  fer   « La méthode Hermanville, c’est la gouvernance à coups de bâtons » se rappelle Thierry Chiabodo, élu communiste depuis 1989 à la barbe marxienne. Il évoque des conseils municipaux qui se terminaient en pugilat. Il critique l’autoritarisme d’Elisabeth Hermanville et de lever les yeux au ciel : « Le nombre de conseils municipaux où elle appelait la police quand quelqu’un voulait la contredire ! » Elisabeth Hermanville est incontestablement une femme à poigne. Son slogan de campagne pour 2014 l’évoque sans ambages : « Une femme, une force pour Goussainville ». Sur le marché, certains anciens se souviennent avec nostalgie d’une femme « qui a fait beaucoup de choses pour Goussainville » selon les mots de Monique Bessas, auxiliaire de vie. Cette habitante de la commune depuis 1983 évoque encore avec émotion le jour où l’ancienne maire a reçu son fils chômeur pour relire avec lui son CV. Une image touchante qui ne convainc manifestement pas Thierry Chiabodo. Il parle plutôt de la condescendance de l’élue qui « jetait des confettis par la fenêtre de la mairie sur les parents d’élèves venus protester ». Le compagnon corse de la maire est également bien présent dans les mémoires des anciens élus de l’opposition. Ils l’appellent tous par son nom de famille, Vincenti, sans jamais utiliser son prénom, et ils se remémorent le personnage en frissonnant. « Il se baladait armé dans la ville. Il sortait son revolver dans les cafés et le posait sur la table. C’était le Far-West, le clan des siciliens », décrit Thierry Chiabodo. L’influence d’Elisabeth Hermanville est encore perceptible aujourd’hui. Les commerçants sont tous très méfiants et refusent souvent de parler d’elle. Un maraîcher de la ville, sous couvert d’anonymat, justifie son silence : « elle est puissante et dangereuse ». Il n’est pas le seul à craindre les représailles de la candidate. « Elle est très rancunière. Si elle passe, elle n’hésitera pas à faire couler certains magasins, par vengeance », explique Michel Crédeville, son ex-premier adjoint devenu un de ses plus farouches détracteurs aujourd’hui. Tous ses adversaires s’accordent toutefois à reconnaître qu’elle est un fin stratège politique. Elle a en effet été réélue en 1989 et en 2001. « C’est une femme superbe, avec un culot monstre, qui ne recule devant rien », résume Michel Crédeville. Un élu renchérit : « c’est une femme qui en a ! »

Episode  3  :  Coups  de  sang,  fric-­‐frac  et  condamnation    La campagne pour les élections municipales de 1995 s’ouvre sous haute tension. « Le climat était très mauvais », se rappelle Thierry Chiabodo. « On partait coller les affiches à plusieurs parce qu’on était suivis en voiture par des gens armés », ajoute l’élu communiste. Du côté d’Elisabeth Hermanville, on est aussi à cran. Des dissensions sont apparues au sein de la majorité au fil de ses deux mandats. De nombreux adjoints de droite

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ont démissionné et deux d’entre eux se présentent contre elle. Face à cette droite désunie, le parti communiste et le parti socialiste font front commun dans une seule liste. Quelques semaines avant les élections, la maire sortante s’illustre également devant la caméra de France 2. Armée de son sac à main comme d’une fronde, elle s’attaque à la caméra des journalistes qui souhaitaient l’interviewer. Détail qui a son importance, la caméra enregistre l’intégralité de la scène. Les Goussainvillois peuvent admirer leur maire en plein coup de sang dans le journal du soir. Ce faux-pas abîme durablement l’image d’Elizabeth Hermanville et inspirera sans doute vingt ans plus tard Patrick Balkany, qu’elle connaît personnellement selon Michel Crédeville, son ex-premier adjoint. La liste de gauche menée par Michel Thoumazet, communiste, remporte la mairie le 18 juin 1995. Le lendemain, jour de fermeture au public de l’hôtel de ville, Elisabeth Hermanville et son équipe vident méthodiquement la mairie de son mobilier et de son matériel informatique. « En plein jour, des témoins ont pris des photos des voitures qui sortaient du parking de la mairie chargées de fauteuils et de plantes vertes », raconte Thierry Chiabodo, élu communiste sur la liste de Michel Thoumazet. Malgré les nombreux spectateurs de ce déménagement sauvage, la mauvaise perdante tente de faire passer cet épisode pour un cambriolage en règle en envoyant un adjoint porter plainte au commissariat. Après une garde à vue et une avalanche de témoignages l’accablant, Elisabeth Hermanville reconnaît avoir agi par vengeance. Celle qui avait occupé pendant douze ans son fauteuil de maire vivait comme une injustice de devoir l’abandonner. La plus grande partie du mobilier volé est restituée mais le préjudice s’élève tout de même à 400 000 Francs (60 000 euros). L’ancienne maire est finalement condamnée en 1996 à dix-huit mois de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité.

Episode  4  :  Corses,  écoutes  téléphoniques,  47  procédures   La stratégie du repentir de la candidate a aussi porté ses fruits. Elle assure à qui veut l’entendre qu’elle a changé. Les Goussainvillois semblent particulièrement prompts à pardonner ses écarts. « Elle a été condamnée pour quoi ? Pour un vol de crayons ! Ils ont tous fait bien pire », s’exclame avec franchise Marie-Thérèse, retraitée, qui vit à Goussainville depuis trente-neuf ans. A 400 000 francs le crayon, l’autographe de Madame Le Maire doit valoir de l’or. Après six ans de traversée du désert, Elisabeth Hermanville récupère sa mairie et renoue avec ses méthodes musclées. Pour le plus grand plaisir de certains de ses administrés. Maureen Bessas, dix-huit ans, vit dans la Cité des Acacias depuis toujours et aime à rappeler l’investissement de l’ancienne maire qui accompagnait la police municipale lors de ses descentes dans la cité. « En 2001, on a été trop confiants, on a cru que notre bilan suffirait et on n’a pas vraiment fait de campagne », regrette Thierry Chiabodo, élu communiste. A droite, Elisabeth Hermanville achève tout juste sa période d’inéligibilité. Elle peut donc se représenter légalement et elle parvient à rassembler au second tour toutes les voix de droite pour battre la liste de gauche. Comment une candidate battue, condamnée par la justice et oubliée, a-t-elle pu réussir cet exploit ?

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En bénéficiant tout d’abord d’un allié de poids. « Charles Pasqua protégeait Elisabeth Hermanville », assure Michel Crédeville, son ex-premier adjoint, L’ancien ministre de l’Intérieur, originaire de Corse comme trois des quatre compagnons successifs d’Elisabeth Hermanville, a pu jouer de son influence pour convaincre les bureaux nationaux de lui apporter leurs soutiens en 2001. Pour d’autres, en revanche, le retour d’Elisabeth Hermanville est une mauvaise nouvelle. « Elle espionnait les conversations téléphoniques de ses collaborateurs depuis son bureau et avait mis en place un système d’écoute dans la mairie », raconte Alain Louis, l’actuel maire. « On doit encore avoir tout le bazar derrière », ajoute-il en désignant le mur du fond de son bureau. Au cours de son troisième mandat, Elisabeth Hermanville règle ses comptes. « Elle a fait des choses inadmissibles », poursuit Alain Louis. « Quand je suis arrivé, il y avait quarante-sept procédures en cours contre elle ».

Episode  5  :  Garage  ,  tour  de  passe-­‐passe  et  homme  de  paille   Comme dans un mauvais soap-opera, Goussainville bruisse des rumeurs sur les amours d’Elisabeth Hermanville. Après avoir divorcé du fameux Vincenti au début des années 1990, elle a eu plusieurs compagnons, tous originaires de Corse. « C’est une mangeuse d’hommes », exagère Michel Crédeville, son ex-premier adjoint. Thierry Chiabodo, l’élu communiste renchérit en égrenant une liste qui sent bon le maquis : « elle a eu Vincenti, Michelengeli, Casula ». Ces hommes deviennent souvent ses adjoints, car dans le clan Hermanville la politique se partage en famille. Pendant son troisième mandat, son compagnon de l’époque Antoine Casula, ainsi que son gendre, siègent au conseil municipal à ses côtés. Au début des années 2000, une bombe à retardement s’apprête à bouleverser le mandat d’Elisabeth Hermanville. Il s’agit d’une plainte déposée par Michel Thoumazet après sa victoire aux municipales de 1995. Le garage chargé de la maintenance des véhicules municipaux sous-traite une partie des opérations au beau-frère d’Elisabeth Hermanville dans le plus grand secret. Cette dernière jure ne pas être au courant de ses pratiques, mais les nombreux appels qu’elle dépose sont rejetés et elle est condamnée à un an d’inéligibilité en septembre 2005 pour prise illégale d’intérêt. Elle doit céder son cher fauteuil, mais pas à n’importe qui. Elle souhaite que son compagnon Antoine Casula reprenne le flambeau. Elle réussit par un habile tour de passe-passe à le faire élire par le conseil municipal. Elisabeth Hermanville ne cache pas que c’est une manière pour elle de rester aux affaires. Les opposants de

l’ancienne maire ne veulent pas en rester là et ils forment un recours auprès du tribunal administratif. Ils finiront par obtenir gain de cause en 2006 après une longue procédure. Le Conseil d’Etat juge que l’élection par le conseil municipal d’Antoine Casula a été entachée d’irrégularités et qu’elle est donc invalidée. Appelés aux urnes en 2006, les Goussainvillois doivent choisir un nouveau maire. Un soulagement pour Michel

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Crédeville, l’ex-premier adjoint d’Elisabeth Hermanville, qui nourrit l’espoir d’accéder au fauteuil du maire. L’invalidation d’Antoine Casula ne décourage pas les électeurs. A la surprise générale, ils prennent le contre-pied du Conseil d’Etat et décide de faire du candidat désavoué, Antoine Casula, leur maire légitimement élu.

Episode  6  :  Noms  d’oiseaux,  whisky,  1200  radiations   « Elle le traitait de tous les noms d’oiseaux en pleine rue après leur séparation », raconte Thierry Chiabodo, tête de file des communistes. L’idylle entre Elisabeth Hermanville et Antoine Casula prend fin avant les élections municipales de 2008 et c’est seul qu’il se présente pour un deuxième mandat. Sa réélection surprend ses adversaires politiques qui estiment qu’il n’avait pas les compétences pour être maire. « Niveau CM1, et encore, je suis gentil », tacle Michel Crédeville qui n’a visiblement toujours pas digéré l’élection de son rival. Alain Figuières, conseiller municipal et ex-bras droit d’Antoine Casula, l’explique à sa manière : « Casula, c’était un brave gars. Son problème à lui, c’était le whisky. Mais bon, il ne faut pas tirer sur l’ambulance, il a eu un AVC depuis ». Les résultats de l’élection sont toutefois très serrés. La droite ne l’a emporté que de treize voix ! Alain Louis, le candidat de gauche, décide de déposer un recours auprès du tribunal administratif. Rebelote et nouveau tour de piste dans les arcanes du système judiciaire français pour Goussainville. Le Conseil d’Etat finit par annuler l’élection en 2009, en constatant des irrégularités. En effet, plus de 1200 électeurs ont été radiés des listes électorales dans les mois précédents le scrutin, sans que toutes les conditions soient respectées. Pour la troisième fois en quatre ans, les électeurs de la commune doivent se rendre aux urnes pour choisir un maire. « Les enfants de Goussainville croient qu’on vote tous les ans », ironise Alain Figuières. Une nouvelle campagne électorale a lieu et Elisabeth Hermanville complique le jeu à droite. Elle ne veut pas jouer les seconds couteaux et exige d’être dans le Top 5 des adjoints. Son ex refuse, et c’est la séparation d’esprit après celle de corps qui intervient. « Elisabeth Hermanville fait campagne pour Alain Louis et contre Antoine Casula. C’est quasiment elle qui l’a fait élire », s’étonne Michel Crédeville, ex-premier adjoint de l’ancienne maire. Le dimanche 21 Juin 2009, Alain Louis devient maire de Goussainville dès le premier tour avec 51 % des voix. Les électeurs peuvent souffler un bon coup, plusieurs années de tranquillité s’ouvrent à eux. Du moins, jusqu’aux prochaines élections. Aujourd’hui, c’est à gauche qu’on se déchire. Entre Alain Louis, le maire sortant, et Luc Broussy son ex-poulain devenu candidat officiel du PS, la guerre est déclarée. A droite, Elisabeth Hermanville, candidate investie par l’UMP, se frotte les mains. Sa

nomination a été vivement critiquée par la gauche, mais elle n’en a cure et ne souhaite pas se justifier. « Il me reste quarante jours pour faire ma campagne tranquillou, dans mon coin. Je ne veux pas être médiatisée », a-t-elle confiée. Mais quand Goussainville sert de décor à un audacieux remake du western « Le Bon, la Brute et le Truand», c’est difficile de résister. Vivement la prochaine saison !

Clémence Boyer

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Goussainville : la politique du chaos Attention, terrain vague. Entre ses quartiers abandonnés et ses hommes politiques enragés, Goussainville aborde les prochaines élections municipales comme à son habitude : en état de siège. Dont les principales victimes sont ses propres habitants. « La ville n’a plus de crédibilité politique, on se croirait dans un film de Scorsese ou dans Amour, Gloire et Beauté », s’étouffe André-Yannick Owona. Martin Scorsese appréciera. Autant que les Goussainvillois. Car c’est bien de leur ville dont parle le candidat UDI à la mairie de la sixième agglomération la plus peuplée du Val d’Oise. Fidèle à son histoire, Goussainville aborde sa campagne pour les municipales des 23 et 30 mars prochains à coups de bâtons. Pif ! Paf ! « Hermanville (UMP), elle sent le soufre, elle est là depuis trop longtemps. Quant à Alain Louis, à l’oral, il est nul. Il n’y a pas un débat où il tient plus de trois minutes face à moi », vitupère Luc Broussy, le candidat PS. Le maire en place lui répond qu’il « n’aime pas les attaques » mais voit quand même en lui un « manipulateur, capable de tout. » Bref, la ville est rongée par une « querelle des egos », observe dans son coin Christophe Crédeville, la tête de liste frontiste. Goussainville n’a qu’un seul lycée et pas de commissariat, mais cinq candidats et surtout deux listes socialistes. Une officielle, celle de Luc Broussy, 47 ans, et une dissidente, celle du maire sortant, Alain Louis, 69 ans. Les deux hommes se détestent. Le plus jeune reproche à l’ancien sa « politique pépère » qui ne laisse pas de place à sa « vision » moderne de la politique. Mais après seulement cinq ans de mandat, Alain Louis n’est pas prêt à laisser son fauteuil à « un magouilleur de première » qui ne rêve que « de devenir député ou ministre. » Ici plus qu’ailleurs, le pouvoir est un et indivisible. Associé à des personnalités, il ne se partage pas.

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Dans ce combat à mort, un seul survivra. « Au second tour, le rassemblement doit primer, explique Thierry Chiabodo, chef de file du parti communiste (PC) qui soutient Alain Louis. Mais il faut que les deux camps le veuillent. S’il y a 20% d’écart, le report de voix se fera naturellement, mais s’il n’y a que 2% ou 3% ça va être compliqué. » Luc Broussy est bien de cet avis : « Alain Louis a développé une haine viscérale contre moi. Ca relève de la psychanalyse. Arrivé à un tel niveau, ça rend impossible toute alliance au second tour », se défend celui qui a fait expulser son « concurrent » du parti socialiste. Ambiance.

« Je ne m’y retrouve plus, moi » Goussainville est une île sans pont, séparée du reste du Val d’Oise par un aéroport et des champs. « C’est un circuit fermé, un cul-de-sac, témoigne Nasser, l’un des plus anciens commerçants de la ville. Tout le monde se connaît », tout se sait et le virus se transmet : « tout le monde se tape dessus », insiste André-Yannick Owona. Y compris les militants. « Le climat est exécrable parmi les militants de gauche. Les affiches des candidats sont arrachées dix fois par jour », regrette Thierry Chiabodo qui ne se prive pourtant pas d’ajouter de la colle à leur seau. « Broussy est un arriviste, il veut être calife à la place du calife alors qu’il ne vient pas d’ici. Un parachutage n’est pas scandaleux en soi, mais à un moment donné il faut atterrir », ironise ce sosie du grand Karl. Mais quand Marx attaque… Broussy contre-attaque : « Chiabodo est bien d’ici lui. Il est né à Goussainville, quasiment dans une grange ! » Les insultes fusent. Au risque d’alimenter les ragots… « Goussainville est la ville des rumeurs », affirme en connaisseur Michel Crédeville, ancien adjoint au maire. Sur le marché, les graines semées par les équipes de campagne des différents candidats ont bien germé. Meilleure compilation ? Luc Broussy habiterait à Paris sur une péniche située… rue de Rivoli !

Des débats qui volent bien bas et laissent les Goussainvillois dans l’embarras. « Je ne m’y retrouve plus, moi », soupire Odile, retraitée désabusée qui « ne sait pas si elle ira voter. » Mais si c’est le cas, ce ne sera pas pour ces deux-là. La guerre des deux gauches profite à l’adroite Elisabeth Hermanville, 66 ans, investie par l’UMP, et décidée à faire tomber l’ancien bastion communiste pour la quatrième fois. Sollicitée à plusieurs reprises, l’indéboulonnable et sulfureuse dame de fer se fait discrète, cherche à lisser son image et n’a donc pas souhaité s’exprimer. Mais son aura pèse encore lourd dans l’esprit des habitants. Déclarée inéligible à deux reprises, ses amis

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la défendent et ses ennemis la craignent. Même neuf ans après la fin prématurée de son dernier mandat. « Je suis dégoûtée de la vie politique, mais on a quand même eu beaucoup plus avec Hermanville qu’avec tous les autres », s’exclame Monique Bessas, la cinquantaine bien tassée, auxiliaire de vie à Goussainville depuis 1983. Beaucoup plus de quoi ? On ne saura pas. Mais « tous les anciens vont voter pour elle », affirme-t-elle, exaltée. Le ton est plus feutré chez le propriétaire de l’un des plus grands commerces du centre-ville qui préfère garder l’anonymat. « C’est anti-commercial de faire de la politique à Goussainville. On peut avoir des problèmes avec les candidats et leurs soutiens. Un permis de construire bloqué est vite arrivé. Je ne peux pas me griller. Hermanville, elle est inoffensive tant qu’elle n’est pas au pouvoir. Si j’étais à la retraite je parlerais, mais là… non », susurre-t-il, un brin méfiant. « Elle a de l’influence. Elle fait pression sur certains commerçants et utilise des méthodes douteuses », résume Christophe Crédeville, fils de son ancien homme à tout faire.

« Et en plus, c’est un nègre ! »

Attablé au café « Les Amis », à quelques pas de la mairie qu’il convoite aussi, son ancien colistier, André-Yannick Owona, 31 ans, détaille son programme UDI, fleur au fusil. « Je veux que le prochain Marc Zuckerberg sorte de Goussain… », il est interrompu. « Pauvre type ! » vient d’hurler son voisin de derrière, encouragé par sa troisième bière. Le « petit Obama local » reprend son envolée sans se démonter. « Hermanville m’a tellement diffamé que c’est impossible qu’il y ait un report de voix au second tour », explique-t-il posément. « Et en plus, c’est un nègre ! », reprend le pataud ivre. A la fin de l’entretien, le très croyant Owona lui sert la main. Visiblement sans rancune. Scène ordinaire de la vie politique goussainvilloise. Dans ce micmac politique, un autre homme croit avoir une carte à jouer. Christophe Crédeville, 41 ans, est le candidat Bleu marine (RBM). Comme André-Yannick – qu’il appelle Patrick - son style dénote clairement des trois principaux candidats. Lacets défaits, regard hagard, il nous reçoit chez ses parents. « Je ne distribue pas mes tracts au marché pour ne pas gêner les pauvres commerçants, ne pas les empêcher de travailler comme le font les autres candidats, balbutie-t-il. Et puis quand je tracte, j’y vais tout seul, j’évite de mettre mes colistiers en avant. Ca se pique vite, un colistier… » Presque touchant. « Sa crédibilité personnelle est sujette à caution », évacue Luc Broussy. Mais, Michel, son père n’en a que faire. « Mon fils va faire un excellent score dans les zones pavillonnaires », chevrote l’ancien élu Modem, qui jure, à demi-mots, ne pas s’impliquer dans les affaires de son fils. Rongée par le chômage (16% contre 11%

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dans le département), la très cosmopolite Goussainville accueille avec bienveillance les idées de Marine Le Pen. En 2012, elle y frôlait les 20%. Christophe Crédeville est donc presque assuré d’avoir sa place au second tour. Surtout si les Goussainvillois, désabusés, ne prennent pas le chemin des urnes. « L’abstention et le mauvais temps jouent en ma faveur », se réjouit, soudain lucide, le candidat RBM. Aux dernières législatives, plus d’un électeur sur deux ne s’était pas déplacé. « Dans le temps, il y a toujours eu un taux de corrélation entre le taux de participation et la victoire de la gauche, s’inquiète Luc Broussy. On vit avec l’abstention. » Et parfois même, on meurt avec. NB: Certains prénoms ont été modifiés à la demande des personnes interrogées.

Kevin Erkeletyan

L’avis de l’expert « Il y a peu de chances que la gauche conserve la mairie de Goussainville » L’abstention et le Front national seront les deux grands arbitres des élections municipales (23 et 30 mars prochains). Et pourraient avoir une grande influence sur le résultat du scrutin de Goussainville, selon Denys Pouillard, directeur de l’Observatoire de la vie politique et parlementaire. Le Front national sera-t-il le principal arbitre des prochaines élections municipales ? Denys Pouillard: C’est l’un des arbitres, mais il n’est pas le seul. L’abstention jouera tout autant. Le Front national a beaucoup progressé depuis l’élection présidentielle de 2012. A l’exception des grandes villes, son poids aux municipales se ressentira dans de nombreuses communes, où il jouera un rôle d’arbitre éliminatoire. Il peut éliminer la gauche dont les électeurs risquent de se déporter vers l’abstention. Ceux qui ne votent pas donnent une chance à ceux qui le font. Le poids de l’abstention est l’énorme inconnue de ces municipales mais on considère qu’il sera surtout déterminant dans les petites et moyennes villes. Il devrait beaucoup influer sur les duels droite/gauche. Qui sont les abstentionnistes ? DP: Il n’y a pas un profil type de l’abstentionniste. Il change d’élections en élections. Quelques tendances se dessinent quand même aujourd’hui. Les citoyens qui ont entre 18 et 30 ans votent globalement moins que les autres. L’inclination à aller voter est aussi parallèle à l’accès aux responsabilités professionnelles, quand les gens y voient des implications pour leur vie personnelle et professionnelle. L’autre facteur, c’est l’état de l’opinion nationale. Il se peut que le choix fait par les électeurs aux municipales soit motivé par la politique nationale. Les priorités locales des citoyens sont aujourd’hui proches de leurs préoccupations à l’échelon national. Ce qui vient en premier, ce sont les problèmes économiques, le traitement du chômage et la fiscalité. Mais il y a un climat de défiance et c’est à gauche qu’il est le plus fort.

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Ces caractéristiques sont proches de celles d’une part non négligeable des habitants de Goussainville… DP: Il y a peu de chances que la gauche conserve la municipalité à Goussainville à cause de ses divisions. La droite est bien placée pour reprendre la mairie, malgré le casier judiciaire de sa candidate, Elisabeth Hermanville. Ses condamnations étaient déjà connues en 2001 et 2008 et la droite a quand même gagné. Les gens passent assez vite l’éponge sur les condamnations de leurs élus. Ce qui est terrible c’est que l’opinion a, aujourd’hui, le sentiment que n’importe quel camp peut franchir la ligne jaune. Le critère judiciaire n’est pas nécessairement un élément d’exclusion ou de rejet.

Propos recueillis par Clémence Boyer et Kevin Erkeletyan

SCOOP  Quand Elisabeth Hermanville (UMP) s’invente des soutiens… Non contente d’être investie par l’UMP, Elisabeth Hermanville, candidate à la mairie de Goussainville, s’est approprié les logos d’autres partis politiques. Parfois abusivement. Un espace vide. C’est tout ce qu’il reste de l’étiquette du Nouveau Centre (NC) qui habillait le bas des affiches de campagne d’Elisabeth Hermanville. La candidate investie par l’UMP pour les prochaines élections municipales (23 et 30 mars 2014) de Goussainville a cru bon de revendiquer le soutien du parti d’Hervé Morin alors que c’est son adversaire de l’UDI, André-Yannick Owona, qui en bénéficie. « Elisabeth Hermanville n’a pas le droit d’utiliser le logo Nouveau Centre car le Nouveau Centre fait partie de l’UDI, explique Emmanuel Landreau, le délégué départemental de l’UDI Val d’Oise. Je lui ai envoyé un mail fin janvier pour lui demander d’enlever ce logo. » Depuis, il a été découpé au ciseau. Ses premiers tracts, également aux couleurs du Nouveau Centre, ont par ailleurs été mis hors circuit.

« Cela doit être une erreur de ses colistiers, poursuit Emmanuel landreau. Ils ont cru bon de le faire car ils ont sûrement un ou deux adhérents au Nouveau Centre sur leur liste, ce n’est pas trop grave, mais ça ne se fait pas. » Aucun recours ne sera toutefois déposé, la candidate ayant obtempéré. Contactée par téléphone, Elisabeth Hermanville n’a pas souhaité s’exprimer. Mais il lui reste encore une chance d’arborer ce logo qui lui plaît tant… « L’UMP est le partenaire naturel de l’UDI, précise le délégué du parti centriste. Si une liste ne

franchit pas le premier tour, elle se désistera pour l’autre. Si c’est Elisabeth Hermanville, j’espère qu’elle soutiendra M. Owona et si c’est M. Owona, je lui demanderai de rejoindre Mme Hermanville. Les deux logos UMP-UDI seront alors réunis. »

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Ceux de l’UMP et de Debout la République le sont déjà et le resteront. Pourtant Elisabeth Hermanville n’a pas non plus reçu le soutien du parti de Nicolas Dupont-Aignan. Et pour cause, ce dernier s’y est fermement opposé. « Aucune liste, PS, UDI, UMP ou FN ne peut se réclamer du soutien de DLR pour les municipales. Scrutin local, enjeu local », écrivait-il sur Twitter le 30 octobre. Alerté de la présence du logo de son parti sur les affiches de la candidate, Nicolas Dupont-Aignan a donc semblé surpris. « Je suis presque sûr que c’est totalement mensonger », a assuré le maire de Yerres qui, dans sa propre ville, n’affiche pas de symbole de Debout la République. Mais Elisabeth Hermanville, si. « Madame Hermanville bénéficie du soutien local du président départemental du Val d’Oise de DLR, monsieur Jean-Luc Enjalbert, assure Nicolas Calbrix, le directeur de Cabinet de Nicolas Dupont-Aignan. Election locale, soutien local. » Elisabeth Hermanville n’est donc pas directement soutenue par DLR mais par un membre du parti. Pas tout à fait le sens du tweet de Nicolas Dupont-Aignan… Condamnée deux fois à des peines d’inéligibilité pour prise illégale d’intérêt et cambriolage de sa propre mairie, l’ancienne maire de Goussainville n’a pourtant pas le profil de femme politique recherché par Nicolas Dupont-Aignan. « Un élu condamné pour corruption devrait selon moi être inéligible à vie », affirmait-il dans une interview donnée avant l’élection présidentielle de 2012 à l’ONG Transparency International. « Je ne connais pas son passé en détails mais si elle est éligible, il n’y a pas de raison de ne pas pouvoir la soutenir, estime cependant Jean-Luc Enjalbert. Nous ne sommes ni des censeurs ni des juges ni des moralisateurs. » Les tracts et affiches de campagne d’Elisabeth Hermanville n’ont donc plus rien à craindre. Son équipe de campagne n’aura pas à les mutiler une seconde fois.

Kevin Erkeletyan

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Portraits  

Luc  Broussy  PS 47 ans Parcours: Conseiller général du Val d’Oise, ex-adjoint au maire de Goussainville (2009-2013) et délégué national du PS aux personnes âgées (2000-2008). Egalement patron de presse spécialisée. Slogans : « Faire bouger Goussainville » ; « Faisons entrer Goussainville dans le XXI° siècle» Positionnement par rapport aux autres candidats : Dans son esprit, il a « un concurrent », Alain Louis (divers gauche), et un « adversaire », Elisabeth Hermanville (UMP). Les deux autres candidats, Christophe Crédeville (RBM) et André-Yannick Owona (UDI), n’existent pas. Sa cible principale reste le maire sortant, Alain Louis, qu’il déteste et qu’il a fait expulser du PS. D’après lui, Alain Louis se présente pour faire élire son adjoint Badr Slassi à qui il laisserait sa place dès les premiers mois de son mandat. Autoportrait : « Allo ? Ici Luc Broussy, collaborateur de lui-même » ; « Je tutoyais Fabius à 25 ans » ; « J’ai raté l’investiture pour les législatives à cause d’Alain Louis. Sans ça, il n’entendrait peut-être plus parler de moi aujourd’hui. »

Alain  Louis  DVG 69 ans Parcours: Maire de Goussainville depuis 2009. Elu à Goussainville dès 1977. Ancien directeur d’usine. Slogan : « Ensemble, continuons pour Goussainville » Positionnement par rapport aux autres candidats : Il déteste Luc Broussy (PS), son ancien adjoint et rival socialiste, « quelqu’un qui vous prend toujours un peu de haut » et qu’il accuse de traitrise. Les autres ? Il n’en parle presque pas. Autoportrait : « Je suis en retraite professionnelle depuis 10 ans » ; « J’ai un compte Facebook mais ce n’est pas moi qui le gère, je l’ai confié à ma secrétaire » ; « Après mon mandat, je peux aspirer à me retirer dans ma maison en Normandie »

André-­‐Yannick  Owona  UDI 31 ans Parcours: Assistant juridique dans un cabinet d’avocat. Ancien soutien d’Elisabeth Hermanville Slogan : « De l’oxygène pour Goussainville » Positionnement par rapport aux autres candidats : C’est l’outsider. Et le seul à ne pas s’en prendre verbalement à ses adversaires. Il a même de la sympathie pour Christophe Crédeville (FN) : « Il est super, il est vrai, on discute tranquillement »,

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même s’il ne partage pas ses opinions. Ses chances de second tour sont très faibles mais il compte, notamment, sur la jeunesse de la ville pour faire un score honorable. Autoportrait : « Être noir est à la fois ma richesse et mon défaut » ; « Je n’ai pas été nommé par hasard, je suis très croyant »

Elisabeth  Hermanville  UMP 66 ans Parcours: Ancien maire de Goussainville (1983-1995 ; 2001-2005), condamnée trois fois pour cambriolage de sa mairie (1995), prise illégale d’intérêts (2005) et harcèlement moral (2007). Slogans : « Une femme, une force pour Goussainville » ; « Oui, je suis candidate » Positionnement par rapport aux autres candidats : Dans la peau de la revenante, elle se fait discrète et ne souhaite pas s’exprimer dans les médias. Profite de la division des gauches. André-Yannick Owona (UDI), son ancien soutien, assure qu’elle le traite « de tous les noms d’oiseaux. » Vue par les autres : « Hermanville est Hermanville avant tout » (Michel Crédeville) ; « Ce qu’elle aime c’est le pouvoir » (Alain Figuières)

Christophe  Crédeville  RBM (FN) 41 ans Parcours: Assistant de vie aux familles Slogan : « Changer pour réussir ensemble » Positionnement par rapport aux autres candidats : Il est en embuscade derrière les trois principaux acteurs. La guerre entre Luc Broussy (« un opportuniste ») et Alain Louis (« qui se présente par orgueil »), une probable forte abstention et le choix de la candidate UMP (« avec un autre candidat, ça aurait été plus difficile pour moi ») lui donnent des espoirs de second tour. André-Yannick Owona ? « C’est encore celui qui œuvre le plus pour l’intérêt de Goussainville. » Autoportrait : « Mon père me donne parfois des tuyaux mais dire qu’il m’aide serait un grand mot » ; « Mon père (ancien Modem) a appris ma candidature dans un communiqué. Je ne voulais pas lui dire de but en blanc, il a quand même un certain âge… » Source : journalistes au CFJ http://formation.djehouti.com/cfj2014/projet03/goussainville.html Les 23 et 30 mars prochains, les 36 681 communes de France et de Navarre éliront leur maire pour les six prochaines années. Dans les colonnes de vos journaux, sur les écrans de vos télés, quelques grandes villes aimantent toutes les attentions, au détriment d’enjeux plus enfouis. Ce sont ce que les étudiants en deuxième année du CFJ ont choisis d’exhumer, d’explorer, d’examiner pour mieux vous les expliquer. Pendant plusieurs semaines, ils ont arpenté les routes d’Île-de-France derrière le périphérique.