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Sciences en balade Un balcon sur le fleuve Bassens Au XIX e siècle, depuis le tertre de Panoramis, on avait une vue imprenable sur la palud de Bassens avec ses vignes et ses exploitations agricoles. En 1853, ce paysage bucolique est bouleversé par le passage de la ligne de chemin de fer Paris-Bordeaux qui coupe la com- mune en deux et isole les exploitations. La fin de l’agriculture est consommée lorsqu’en 1913, l’UCBB (Union com- merciale Bordeaux-Bassens) s’installe, bientôt suivie d’une poudrerie (1915) et d’Everite, société d’amiante-ciment qui, fuyant les combats, s’installe ici en 1917. Dans les années 20-30, l’industrialisation est intense. Aujourd’hui, de ce même tertre, la vue embrasse presque entièrement les 600 ha de la zone industrielle qui oc- cupe 60 % du territoire communal. Plus de soixante entreprises y sont installées mais l’on distingue encore, comme deux tours médiévales sous le pylône de haute tension à droite, les locaux de l’UCBB qui, elle, n’existe plus. De gauche à droite, la ZI aligne des tranches bien marquées correspondant aux terminaux portuaires. Légèrement sur la gauche, elle débute avec la zone à grumes où sont entreposés des bois tro- picaux et du nord de l’Europe. 300 000 TONNES DE PIN Depuis 2009 et la tempête Klaus, elle stocke aussi 300 000 tonnes de pin des Landes exportés vers la Chine. Suit une zone à dominante BTP où l’on exporte notamment vers la Finlande du quartz qui servira à Nokia pour la fabrication de portables. Plus on va vers la droite, plus les zones sont spécialisées. L’agroalimentaire suit avec notamment les immenses silos gris de la SPBL qui entrepose des céréales et, de plus en plus, des granu- lats pour le BTP. Les silos blancs sont ceux de Saipol, filiale de Lesieur, qui achemine par péniche ses oléagineux triturés vers Bacalan où ils sont em- bouteillés. Bassens est le premier port de céréales en France. Vient alors la zone d’hydrocarbures avec notamment les 60 ha de Michelin, l’une des deux seules unités dans le monde qui produise du caoutchouc synthétique. Depuis peu, elle récupère la chaleur des incinérateurs de Véolia qui la jouxte et économise ainsi 30 % de sa consommation de charbon. Le bout de la zone, que l’on distingue à peine, est dédié aux équipementiers automobiles qui occupent 20 hectares : ils achèvent l’aménagement des vé- hicules venant des constructeurs et les acheminent directement vers les concessionnaires. La zone industrielle Ambès. Il s’étend sur trois kilomètres de quais. Même si la quasi-totalité des ter- rains de la ZI appartient au GPM, le port en tant que tel n’occupe qu’une frange étroite au bord de l’eau, délimitée par la route départementale. L’une de ses ins- tallations les plus spectaculaires est la forme de radoub, longue de 247 m, large de 34 et profonde de 18. Construite en sept ans, achevée en 1965, elle était des- tinée à la réparation de bateaux mais n’a que très rarement servi à cet usage car, même si elle peut accueillir des navires de 45 000 tonneaux, elle est trop petite pour les bâtiments actuels. Malgré tout, elle a servi à la construction de plate- formes offshore et elle est utilisée ac- tuellement pour bâtir les embasements du futur pont Bacalan-Bastide. Mais le port ne reçoit pas seulement des navires de commerce. Le premier bateau de croisière, l’Europa, a accosté en sep- tembre 1985. Depuis, cette activité se poursuit et la mairie de Bassens souhaite la développer. Photo Association Histoire et patrimoine de Bassens, collection privée Bernard Vallier Interview de Mayté Banzo, géographe, maître de confé- rences à l'Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3. Chercheuse à l’UMR ADES (Aménagement, développe- ment, environnement, santé et sociétés), elle étudie le processus d’urbanisation dans les périphéries urbaines. Elle s’inté- resse aux zones naturelles et à leur valo- risation. Comment s’organise la juxtaposition de trois milieux très différents (naturel, ur- bain, industriel) comme à Bassens ? Ces trois fonctions sont systématiques dans la ville, à l’échelle de l’agglomé- ration, mais on a tendance à les penser séparées, même s’il y a des endroits où leur proximité est plus évidente. À Bas- sens, la fonction industrielle est remar- quable, elle se voit. Ces trois fonctions cohabitent aussi à Saint-Médard-en- Jalles mais on en parle plus rarement. Toutefois, il n’y a pas beaucoup de vraies zones industrielles. La plupart du temps, ce sont des zones d’activités où l’on mélange aussi du tertiaire. À Bassens, il y a un zonage très fort qui se comprend car l’activité est liée à la Garonne. Dans les villes où il y a une vieille industrie, elle est très mêlée à l’habitat. Cela a changé à partir des an- nées 1950 avec le fonctionnalisme, où l’on sépare toutes les fonctions en aug- mentant la mobilité entre les espaces. Entre ZI ou urbanisation, qu'est ce qui influe le plus sur le milieu naturel ? L’industrie génère une transformation de son environnement mais cela dé- pend du type d’industrie : celles de la première et de la seconde Révolution industrielle sont rares à Bordeaux. Elles sont les plus polluantes et ont un fort impact. L’impact de l’urbanisation est écolo- gique par l’imperméabilisation des sols qui entraîne une pollution par les eaux de ruissellement. L’urbanisation actuelle ne remet pas en cause la mo- bilité individuelle et sa consommation d’espace, d’hydrocarbures… Elle crée une contrainte sur la biodiversité car elle contrarie la circulation des flux. Les citadins veulent un cadre de vie plus agréable, végétalisé, et ils créent une nuisance paysagère avec les lotis- sements à la campagne. Bassens, la nature résiste à l'industrie Le port : de la guerre aux croisières C’est en 1911 que le port de Bordeaux s’intéresse au site de Bassens, dont la profondeur des eaux (plus de dix mètres) en fait un lieu intéressant pour implanter des quais supplémentaires. En 1915, 400 m de quais sont construits. En 1916, le premier cargo peut apponter mais c’est en 1917 que le port va vraiment prendre son essor. En avril, les Etats-Unis entrent en guerre et ils ont besoin de ports pour acheminer hommes et matériels. Ils choi- sissent Bassens pour débarquer leur ma- tériel mais le quai existant est trop petit. En huit mois, en travaillant 24 heures sur 24, entre 4 et 8 000 « Sammies » des Labour Battalions vont construire 1 300 mètres de quais en aval de celui déjà existant. C’est le « New Bassens », qui correspond actuellement au quai de Vial. Les premiers cargos transportant armes, véhicules et chevaux débarquent cinq mois après le début des travaux. Il y en aura 640 qui feront la navette pendant la durée de la guerre et ils révolutionnent la zone. Car lorsque l’armée américaine plie ba- gage en 1919, abandonnant 95 % de son matériel derrière elle, elle aura déchargé plus de véhicules qu’il y en avait dans toute la Gironde à l’époque. Surtout, elle laisse des infrastructures portuaires performantes, dont des grues ultra-mo- dernes capables de décharger 6 600 t de matériel par jour, des milliers de mètres carrés d’entrepôts et des voies ferrées de liaison dont le nœud ferroviaire, au lieu- dit Sabarèges, est toujours utilisé de nos jours. Le « Old Bassens » agricole n’existe plus et le port va devenir le centre de la vie communale. TROIS KILOMèTRES DE QUAIS De nos jours, le port de Bassens est l’un des six sites du Grand port maritime de Bordeaux (GPM), sixième port de com- merce métropolitain, qui a remplacé le Port autonome en 2008 (les autres sites sont Le Verdon, Pauillac, Blaye, le Bec d’Ambès et Bordeaux). Il est le deuxième site bordelais en terme de tonnage après Quais du port américain de Bassens en décembre 1918 E n longeant la ligne du coteau de Bassens, on se promène entre deux siècles. On marche dans un Bassens bucolique qui pourrait ressembler à celui du XIX e siècle même si l’herbe d’un espace public a remplacé la vigne qui poussait en contrebas du cimetière jusque dans les années 40. Et l’on domine l’étendue de la zone industrielle et du port qui n’existaient pas il y a un siècle. Il a fallu moins de cent ans et surtout une guerre mondiale pour que les prestigieux vins des « Côtes de Bassens » soient oubliés et que la commune devienne l’une des plus industrieuses d’Aquitaine, forte de la seule zone industrielle multi- modale de l’agglomération bordelaise, la seule qui puisse prétendre s’appuyer à la fois sur la route, le rail et le transport maritime. Du haut de la colline, zone industrielle et port paraissent étroitement imbriqués dans un désordre de bâtiments, de cheminées et de silos. Mais pour qui sait lire ce paysage chaotique, tout est parfaitement organisé et ordonné. Et si les armateurs ne vivent plus dans les belles demeures du haut de la colline, le fleuve continue de marquer la vie de Bassens. L'itinéraire de la balade > VOIR PLAN DéTAILLé DU PARCOURS AU DOS MAIRIE DE BASSENS éGLISE SAINT-PIERRE TERTRE DE PANORAMIS RETENUE D’EAU PLATANE DE SéGUINAUD CHÂTEAU SéGUINAUD CHÂTEAU DES GRIFFONS CHÂTEAU POMEROL Le panorama près du point de départ Un détail du monument aux morts PLAN D'ACCèS AU PARCOURS Bordeaux rive gauche Cenon Lormont Bassens rocade rive droite avenue Thiers quai de Brazza quai de Bacalan boulevard Rue Lucien Faure sortie 2 côte de la Garonne pont de Pierre pont d’Aquitaine Mairie de Bassens Infos pratiques Distance : 3,5 km Durée du parcours : 2 h 30 COMMENT ACCéDER AU PARCOURS Départ : Mairie de Bassens, 42 avenue Jean-Jaurès Voitures : parking au départ Tramway : ligne A, terminal La Gardette-Bassens-Carbon Blanc MATéRIEL TECHNIQUE Une paire de jumelles De bonnes chaussures en cas de pluie LE TERTRE DE PANORAMIS Parfaitement ronde, cette plateforme de 18 mètres de diamètre est délimitée par une ceinture de pierre de taille. Un escalier en descend vers le sud sur une quinzaine de mètres. Autant dire que ce tertre n’est pas naturel mais son origine est floue. On sait qu’un belvédère, celui du château Lagarde aujourd’hui disparu, s’y élevait de 1900 à 1936 où il fut dé- truit par une tempête. Certains évoquent un moulin. Une autre plateforme, octogo- nale, occupe le fond du parc du château de Séguinaud. Ces postes d’observation permettaient aux armateurs qui habi- taient ces demeures de surveiller leurs bateaux. LE BASSIN D'éTALEMENT Dans la combe qui s'étend entre le tertre de Panoramis et le domaine de Fantaisie, un bassin d'étalement a été creusé. Il s'agit d'un bassin d'orage permettant de recueillir un volume d'eau de plus de 3 000 m 3 . Il est destiné à récupérer les eaux de pluie de l'ensemble du versant sud de la commune. LA MAIRIE L'éGLISE SAINT-PIERRE Construite au XII e siècle, elle fut fortement remaniée au XIX e , notamment par l’archi- tecte Abadie, émule de Viollet-le-Duc et qui transforma nombre de bâtiments romans de Gironde en néo-gothique. Elle symbolise le clochemerle que fut la séparation de Bassens et Carbon-blanc. Sous la royauté, Carbon-Blanc était le bourg le plus important mais dépendait de la paroisse de Bassens. La Révolution supprima les paroisses pour en faire des communes et Carbon-Blanc hérita de la plupart des administrations civiles, ne laissant que le culte à Bassens. La construction d’une église concurrente sous couvert d’une « chapelle de se- cours » à Carbon-Blanc mit le feu aux poudres en 1849, au point qu’il fallut faire appel à un régiment de dragons pour cal- mer Bassenais et Carbonblannais. La sé- paration des communes fut acceptée en avril 1853 mais les tensions perdurèrent jusqu’à la fin du siècle. LE PLATANE DE SéGUINAUD Le platane du parc de Séguinaud n’a rien d’exceptionnel mais il étonne tellement on est habitué à ne voir que les sages platanes d’alignement. Laissé « en li- berté », il peut vivre de 500 à, très ra- rement, 2 000 ans. L’espèce commune actuelle a été hybridée au XVI e siècle en Angleterre à partir du platane d’Occident, rare en Europe, et du platane d’Orient ra- mené par les Romains vers 400 av. J.-C. L’espèce est menacée par le chancre du platane. Ce champignon, mortel en cinq ans, a été introduit en Europe dans les caisses d’armements de l’armée améri- caine débarquée en Provence en 1944. L’épidémie atteint tout le sud- est français et s’approche de Toulouse. ❻❼❽ LES CHÂTEAUX Bassens accueillit de nom- breux riches bourgeois qui s’y firent construire de belles demeures aux XVIII e et XIX e siècles, dont beaucoup fu- rent des propriétés viticoles. Le vin des Côtes de Bassens était réputé, comme la tran- quillité du lieu. Sur le parcours, le domaine de Séguinaud fut une importante pro- priété viticole, le domaine de Bonnefont, connu sous le nom des Griffons , et le château Pomerol représentent une étonnante concentration de ces de- meures. Elles furent toutes propriété de la famille Maurel, armateurs, qui lancè- rent le traitement de l’arachide à Bacalan. Séguinaud est désormais un centre de loisirs, les Griffons fut une école dans les années 60 et il est propriété municipale. Pomerol est une maison de retraite. Un quatrième château, Lagarde, complétait cet alignement et appartenait aussi aux Maurel mais il a disparu. Les points forts de la balade Le fleuve vu du tertre de Panoramis Le château Pomerol

Guide "Sciences en balade" de Bassens

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Sciences en balade

Un balcon sur le fleuve

Bassens

Au xixe siècle, depuis le tertre de Panoramis, on avait une vue imprenable sur la palud de Bassens avec ses vignes et ses exploitations agricoles. En 1853, ce paysage bucolique est bouleversé par le passage de la ligne de chemin de fer Paris-Bordeaux qui coupe la com-mune en deux et isole les exploitations. La fin de l’agriculture est consommée lorsqu’en 1913, l’UCBB (Union com-merciale Bordeaux-Bassens) s’installe, bientôt suivie d’une poudrerie (1915) et d’Everite, société d’amiante-ciment qui, fuyant les combats, s’installe ici en 1917. Dans les années 20-30, l’industrialisation est intense.

Aujourd’hui, de ce même tertre, la vue embrasse presque entièrement les 600 ha de la zone industrielle qui oc-cupe 60 % du territoire communal. Plus de soixante entreprises y sont installées

mais l’on distingue encore, comme deux tours médiévales sous le pylône de haute tension à droite, les locaux de l’UCBB qui, elle, n’existe plus. De gauche à droite, la ZI aligne des tranches bien marquées correspondant aux terminaux portuaires. Légèrement sur la gauche, elle débute avec la zone à grumes où sont entreposés des bois tro-picaux et du nord de l’Europe.

300 000 tonnes de pin Depuis 2009 et la tempête Klaus, elle stocke aussi 300 000 tonnes de pin des Landes exportés vers la Chine. Suit une zone à dominante BTP où l’on exporte notamment vers la Finlande du quartz qui servira à Nokia pour la fabrication de portables. Plus on va vers la droite, plus les zones

sont spécialisées. L’agroalimentaire suit avec notamment les immenses silos gris de la SPBL qui entrepose des céréales et, de plus en plus, des granu-lats pour le BTP. Les silos blancs sont ceux de Saipol, filiale de Lesieur, qui achemine par péniche ses oléagineux triturés vers Bacalan où ils sont em-bouteillés. Bassens est le premier port de céréales en France. Vient alors la zone d’hydrocarbures avec notamment les 60 ha de Michelin, l’une des deux seules unités dans le monde qui produise du caoutchouc synthétique. Depuis peu, elle récupère la chaleur des incinérateurs de Véolia qui la jouxte et économise ainsi 30 % de sa consommation de charbon. Le bout de la zone, que l’on distingue à peine, est dédié aux équipementiers

automobiles qui occupent 20 hectares : ils achèvent l’aménagement des vé-hicules venant des constructeurs et les acheminent directement vers les concessionnaires.

La zone industrielle

Ambès. Il s’étend sur trois kilomètres de quais. Même si la quasi-totalité des ter-rains de la ZI appartient au GPM, le port en tant que tel n’occupe qu’une frange étroite au bord de l’eau, délimitée par la route départementale. L’une de ses ins-tallations les plus spectaculaires est la forme de radoub, longue de 247 m, large de 34 et profonde de 18. Construite en sept ans, achevée en 1965, elle était des-tinée à la réparation de bateaux mais n’a que très rarement servi à cet usage car, même si elle peut accueillir des navires

de 45 000 tonneaux, elle est trop petite pour les bâtiments actuels. Malgré tout, elle a servi à la construction de plate-formes offshore et elle est utilisée ac-tuellement pour bâtir les embasements du futur pont Bacalan-Bastide. Mais le port ne reçoit pas seulement des navires de commerce. Le premier bateau de croisière, l’Europa, a accosté en sep-tembre 1985. Depuis, cette activité se poursuit et la mairie de Bassens souhaite la développer.

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Interview de Mayté Banzo, géographe, maître de confé-rences à l'Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3. Chercheuse à l’UMR ADES (Aménagement, développe-

ment, environnement, santé et sociétés), elle étudie le processus d’urbanisation dans les périphéries urbaines. Elle s’inté-resse aux zones naturelles et à leur valo-risation.

Comment s’organise la juxtaposition de trois milieux très différents (naturel, ur-bain, industriel) comme à Bassens ? Ces trois fonctions sont systématiques dans la ville, à l’échelle de l’agglomé-ration, mais on a tendance à les penser séparées, même s’il y a des endroits où leur proximité est plus évidente. À Bas-sens, la fonction industrielle est remar-quable, elle se voit. Ces trois fonctions cohabitent aussi à Saint-Médard-en-Jalles mais on en parle plus rarement. Toutefois, il n’y a pas beaucoup de vraies zones industrielles. La plupart du temps, ce sont des zones d’activités où l’on mélange aussi du tertiaire. À Bassens, il y a un zonage très fort qui

se comprend car l’activité est liée à la Garonne. Dans les villes où il y a une vieille industrie, elle est très mêlée à l’habitat. Cela a changé à partir des an-nées 1950 avec le fonctionnalisme, où l’on sépare toutes les fonctions en aug-mentant la mobilité entre les espaces.Entre ZI ou urbanisation, qu'est ce qui influe le plus sur le milieu naturel ?L’industrie génère une transformation de son environnement mais cela dé-pend du type d’industrie : celles de la première et de la seconde Révolution industrielle sont rares à Bordeaux. Elles sont les plus polluantes et ont un fort impact. L’impact de l’urbanisation est écolo-gique par l’imperméabilisation des sols qui entraîne une pollution par les eaux de ruissellement. L’urbanisation actuelle ne remet pas en cause la mo-bilité individuelle et sa consommation d’espace, d’hydrocarbures… Elle crée une contrainte sur la biodiversité car elle contrarie la circulation des flux. Les citadins veulent un cadre de vie plus agréable, végétalisé, et ils créent une nuisance paysagère avec les lotis-sements à la campagne.

Bassens, la nature résiste à l'industrie

Le port : de la guerre aux croisières

C’est en 1911 que le port de Bordeaux s’intéresse au site de Bassens, dont la profondeur des eaux (plus de dix mètres) en fait un lieu intéressant pour implanter des quais supplémentaires. En 1915, 400 m de quais sont construits. En 1916, le premier cargo peut apponter mais c’est en 1917 que le port va vraiment prendre son essor. En avril, les Etats-Unis entrent en guerre et ils ont besoin de ports pour acheminer hommes et matériels. Ils choi-sissent Bassens pour débarquer leur ma-tériel mais le quai existant est trop petit. En huit mois, en travaillant 24 heures sur 24, entre 4 et 8 000 « Sammies » des Labour Battalions vont construire 1 300 mètres de quais en aval de celui déjà existant. C’est le « New Bassens », qui correspond actuellement au quai de Vial. Les premiers cargos transportant armes, véhicules et chevaux débarquent cinq mois après le début des travaux. Il y en aura 640 qui feront la navette pendant la durée de la guerre et ils révolutionnent la zone.

Car lorsque l’armée américaine plie ba-gage en 1919, abandonnant 95 % de son matériel derrière elle, elle aura déchargé plus de véhicules qu’il y en avait dans toute la Gironde à l’époque. Surtout, elle laisse des infrastructures portuaires performantes, dont des grues ultra-mo-dernes capables de décharger 6 600 t de matériel par jour, des milliers de mètres carrés d’entrepôts et des voies ferrées de liaison dont le nœud ferroviaire, au lieu-dit Sabarèges, est toujours utilisé de nos jours. Le « Old Bassens » agricole n’existe plus et le port va devenir le centre de la vie communale.

trois kiloMètres de quaisDe nos jours, le port de Bassens est l’un des six sites du Grand port maritime de Bordeaux (GPM), sixième port de com-merce métropolitain, qui a remplacé le Port autonome en 2008 (les autres sites sont Le Verdon, Pauillac, Blaye, le Bec d’Ambès et Bordeaux). Il est le deuxième site bordelais en terme de tonnage après

Quais du port américain de Bassens en décembre 1918

En longeant la ligne du coteau de Bassens, on se promène entre deux siècles. On marche dans un Bassens bucolique qui pourrait ressembler

à celui du xixe siècle même si l’herbe d’un espace public a remplacé la vigne qui poussait en contrebas du cimetière jusque dans les années 40. Et l’on domine l’étendue de la zone industrielle et du port qui n’existaient pas il y a un siècle. Il a fallu moins de cent ans et surtout une guerre mondiale pour que

les prestigieux vins des « Côtes de Bassens » soient oubliés et que la commune devienne l’une des plus industrieuses

d’Aquitaine, forte de la seule zone industrielle multi-modale de l’agglomération bordelaise, la seule qui puisse prétendre s’appuyer à la fois sur la route, le rail et le transport maritime. Du haut de la colline, zone industrielle et port paraissent étroitement imbriqués dans un désordre

de bâtiments, de cheminées et de silos. Mais pour qui sait lire ce paysage chaotique, tout est parfaitement

organisé et ordonné. Et si les armateurs ne vivent plus dans les belles demeures du haut de la

colline, le fleuve continue de marquer la vie de Bassens.

L'itinéraire de la balade> Voir plan détaillé du parcours au dos

❶ Mairie de bassens

❷ éGlise saint-pierre

❸ tertre de panoraMis

❹ retenue d’eau

❺ platane de séGuinaud

❻ cHÂteau séGuinaud

❼ cHÂteau des GriFFons

❽ cHÂteau poMerol

Le panorama près du point de départ

Un détail du monument aux morts

plan d'accès au parcours

Bordeaux rive gauche

Cenon

Lormont

Bassens

roca

de ri

ve d

roite

avenue Thiers quai de Brazza quai de Bacalan

boulevard

Rue Lucien Faure

sortie 2

côte de la Garonne

pont de Pierre

pont d’Aquitaine

Mairie de

Bassens

Infos pratiques● Distance : 3,5 km● Durée du parcours : 2 h 30

coMMent accéder au parcours● Départ : Mairie de Bassens, 42 avenue Jean-Jaurès● Voitures : parking au départ● Tramway : ligne A, terminal La Gardette-Bassens-Carbon Blanc

Matériel tecHnique● Une paire de jumelles● De bonnes chaussures en cas de pluie

❸ le tertre de panoraMisParfaitement ronde, cette plateforme de 18 mètres de diamètre est délimitée par une ceinture de pierre de taille. Un escalier en descend vers le sud sur une quinzaine de mètres. Autant dire que ce tertre n’est pas naturel mais son origine est floue. On sait qu’un belvédère, celui du château Lagarde aujourd’hui disparu, s’y élevait de 1900 à 1936 où il fut dé-truit par une tempête. Certains évoquent un moulin. Une autre plateforme, octogo-nale, occupe le fond du parc du château de Séguinaud. Ces postes d’observation permettaient aux armateurs qui habi-taient ces demeures de surveiller leurs bateaux.

❹ le bassin d'étaleMentDans la combe qui s'étend entre le tertre de Panoramis et le domaine de Fantaisie, un bassin d'étalement a été creusé. Il s'agit d'un bassin d'orage permettant de recueillir un volume d'eau de plus de 3 000 m

3. Il est destiné à récupérer les

eaux de pluie de l'ensemble du versant sud de la commune.

❶ la Mairie

❷ l'éGlise saint-pierreConstruite au xii

e siècle, elle fut fortement

remaniée au xixe, notamment par l’archi-

tecte Abadie, émule de Viollet-le-Duc et qui transforma nombre de bâtiments romans de Gironde en néo-gothique. Elle symbolise le clochemerle que fut la séparation de Bassens et Carbon-blanc. Sous la royauté, Carbon-Blanc était le bourg le plus important mais dépendait de la paroisse de Bassens. La Révolution supprima les paroisses pour en faire des communes et Carbon-Blanc hérita de la plupart des administrations civiles, ne laissant que le culte à Bassens. La construction d’une église concurrente sous couvert d’une « chapelle de se-cours » à Carbon-Blanc mit le feu aux poudres en 1849, au point qu’il fallut faire appel à un régiment de dragons pour cal-mer Bassenais et Carbonblannais. La sé-paration des communes fut acceptée en avril 1853 mais les tensions perdurèrent jusqu’à la fin du siècle.

❺ le platane de séGuinaudLe platane du parc de Séguinaud n’a rien d’exceptionnel mais il étonne tellement on est habitué à ne voir que les sages platanes d’alignement. Laissé « en li-berté », il peut vivre de 500 à, très ra-rement, 2 000 ans. L’espèce commune actuelle a été hybridée au xvi

e siècle en

Angleterre à partir du platane d’Occident, rare en Europe, et du platane d’Orient ra-mené par les Romains vers 400 av. J.-C. L’espèce est menacée par le chancre du platane. Ce champignon, mortel en cinq ans, a été introduit en Europe dans les caisses d’armements de l’armée améri-caine débarquée en Provence en 1944.

L’épidémie atteint tout le sud-est français et s’approche de Toulouse.

❻❼❽ les cHÂteauxBassens accueillit de nom-breux riches bourgeois qui s’y firent construire de belles demeures aux xviii

e et xix

e

siècles, dont beaucoup fu-rent des propriétés viticoles. Le vin des Côtes de Bassens

était réputé, comme la tran-quillité du lieu. Sur le parcours, le domaine de Séguinaud ❻ fut une importante pro-priété viticole, le domaine de Bonnefont, connu sous le nom des Griffons ❼, et le château Pomerol ❽ représentent une étonnante concentration de ces de-meures. Elles furent toutes propriété de la famille Maurel, armateurs, qui lancè-rent le traitement de l’arachide à Bacalan. Séguinaud est désormais un centre de loisirs, les Griffons fut une école dans les années 60 et il est propriété municipale. Pomerol est une maison de retraite. Un quatrième château, Lagarde, complétait cet alignement et appartenait aussi aux Maurel mais il a disparu.

Les points forts de la balade

Le fleuve vu du tertre de Panoramis

Le château Pomerol

L'itinéraire de la balade ❶ Mairie de bassens❷ ÉGLise sainT-Pierre❸ TerTre de PanOraMis❹ reTenUe d’eaU❺ PLaTane de sÉGUinaUd❻ CHÂTeaU sÉGUinaUd❼ CHÂTeaU des GriFFOns❽ CHÂTeaU POMerOL

La sTaTiOn de MesUre de La POLLUTiOn de L’air

Située au 11 rue Paul-Bert, la station de mesure de l’Airaq (Air Aquitaine) est une des quatre « stations urbaines de fond » de l’agglomération bordelaise que gère l’association, qui dispose d’un réseau de 30 stations fixes en Aquitaine. Disséminées dans des endroits « représentatifs », ces stations collectent des données qui permettent d’établir l’indice « Atmo » qui mesure le niveau moyen d’exposition de la population à la pollution. La station de Bassens, établie en 1997, collecte des données 24 heures/24 sur l’ozone, les dioxydes d’azote et de soufre, les BTX/ COV (Benzène, toluène, xylène/composés or-ganiques volatils) et les particules en suspension d’une taille comprise entre 2,5 et 10 micromètres (les plus lourdes).

Le LavOir eT Les sOUrCesEn contrebas du parc de Séguinaud, le lavoir du domaine est difficilement accessible. Alimenté par l’une des nombreuses sources qui coulent depuis le coteau, il possède une éton-nante réserve souterraine de vingt mètres de long pour quatre mètres de profondeur. Il est muré car il marquait le départ d’un souterrain sous la falaise. Sous ce lavoir, une deuxième source jaillit également au domaine de Fantaisie (privé), elle aussi équipée d’un réservoir. Et une troisième a été découverte ré-cemment près de la ligne de chemin de fer.

Sciences en balade

Un balcon sur le fleuve

Bassens

13, avenue Pierre-Curie – 33270 FloiracTél. et fax : 05 56 86 18 82

[email protected]

www.cap-sciences.net

Le bassin d’ÉTaLeMenT

mars 2010 • Image fond : ORTHO HR IGN de La CUB (2008) • © IGN - Paris 2010 • Autorisation no 2201009

Réalisation Cap sciences. Directeur de publication : Bernard Alaux. Responsable éditorial : Alexandre Marsat. Coordinatrice du projet : Alexia Sonnois. Rédaction : Jean-Luc Eluard. Photographies : Pierre Baudier. Graphisme : José Rodrigues. Impression : Imprimerie Pujol, Le Bouscat.

n

Le POnT d’aqUiTaineC’est de Bassens qu’on a le meilleur point du vue sur le Pont d’Aquitaine dont la première pierre fut posée en mai 1960 et qui fut achevé en mai 1967. Ses trois travées sont relativement modestes (respectivement 143, 394 et 143 m) mais il se classe parmi les plus longs ponts de France grâce au viaduc de 1014 m qui le prolonge rive gauche. Il surplombe la Garonne de 53 mètres et ses pylônes culminent à 105 mètres. Il devait être le deuxième pont sur la Garonne mais le pont Saint-Jean, démarré en 1963 fut

achevé deux ans plus tôt, en 1965.

❸❹

❺❻

❼❽

Station tramway