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1 HYDROGENE : AGISSONS AUJOURD’HUI POUR LA MOBILITE DE DEMAIN Les propositions de Mobilité Hydrogène France Juillet 2017

HYDROGENE : AGISSONS AUJOURD’HUI POUR LA MOBILITE DE DEMAIN Hydrogène France - Ana… · Pour cela, une impulsion politique forte est nécessaire : seul un Plan Hydrogène précis

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HYDROGENE : AGISSONS AUJOURD’HUI POUR LA MOBILITE DE DEMAIN Les propositions de Mobilité Hydrogène France Juillet 2017

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Executive Summary

Améliorer la qualité de l’air, réduire les émissions de CO2 et favoriser la transition énergétique… les

transports sont aujourd’hui au cœur de ces trois défis majeurs, que la France, comme d’autres pays a

décidé de relever.

Les incertitudes qui entourent aujourd’hui les réponses à apporter pourraient inciter à l’attentisme. Les

véhicules électriques à batterie seule peuvent-ils en effet se généraliser et, à eux seuls, répondre à nos

exigences de qualité de l’air et de réduction des émissions de gaz à effet de serre ? Quel sera l’impact

sur la pollution des nouveaux usages en matière de mobilité ? Etc.

Ne pas agir maintenant serait pourtant une erreur sociétale, écologique et économique. D’abord parce

qu’à défaut de certitudes, quatre grandes convictions peuvent servir de socle à des choix politiques

courageux : la première est que l’électromobilité se développera massivement, le scandale du

Dieselgate a encore amplifié la pression sociétale. La seconde est que véhicules électriques à batterie

et à hydrogène sont complémentaires dans l’électromobilité. Leur combinaison permet en effet de

concilier « 0 émissions », « décarbonation des transports » et « liberté des usages ». Troisième

conviction : l’hydrogène améliore la valorisation des énergies renouvelables produites et participe ainsi

à la dynamisation des territoires. De nombreux syndicats d’énergie et producteurs en témoignent déjà.

Quatrième conviction enfin : une combinaison élégante de véhicules électriques à batterie et à

hydrogène réduira les coûts d’investissement d’infrastructure pour la recharge des véhicules. Au final,

même si la mobilité hydrogène n’est pas l’unique solution pour relever les trois défis de la pollution,

des gaz à effet de serre et de la transition énergétique, elle est indéniablement un outil efficace pour

répondre aux trois de façon simultanée.

Quelles actions, alors, engager ? La filière hydrogène française, présente sur l’ensemble de la chaîne de

valeur avec des leaders reconnus, a déjà initié le déploiement de stations et de véhicules sur le

territoire, avec un modèle d’affaires qui limite le montant des investissements initiaux. Mais il est

temps de franchir le cap suivant, et d’assurer un volume de marché suffisant aux constructeurs et

fournisseurs d’électrolyseurs et de stations hydrogène pour baisser les coûts et s’assurer que la

mobilité électrique – batterie, hydrogène et hydride batterie/hydrogène – se généralise vraiment, en

support à la transition énergétique. Pour cela, une impulsion politique forte est nécessaire : seul un

Plan Hydrogène précis et inscrit dans la durée, co-construit par les autorités et les entreprises

impliquées, sera à même de garantir à la France une place sur le marché mondial de la mobilité de

demain, où d’autres pays sont déjà plus engagés. La France est dans la course. Il faut qu’elle y reste,

sous peine de devoir importer les solutions d’Asie ou des Etats-Unis.

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Table des matières Les transports, au cœur de trois défis majeurs ...................................................................... 4

AMELIORER LA QUALITE DE L’AIR EST UN ENJEU SOCIETAL FORT ...................................................... 4

Lutte contre la pollution : les résultats restent insuffisants ............................................................ 4

Quelles ambitions doit-on afficher sur la qualité de l’air? .............................................................. 7

LE DEFI CLIMATIQUE : L’IMPERATIF DE DECARBONATION ............................................................... 10

Gaz à effet de serre : la France prend du retard ........................................................................... 10

L’électromobilité reste une réponse d’actualité ........................................................................... 11

TRANSITION ENERGETIQUE : DE NOUVEAUX SCHEMAS DOIVENT ÊTRE PROMUS ........................... 12

Le mix énergétique de demain sera encore plus « vert » et plus local ......................................... 12

Optimiser la valorisation des énergies renouvelables est un enjeu clef pour réussir la transition

....................................................................................................................................................... 13

S’appuyer sur des convictions fortes est une nécessité pour que la France s’impose dans

la mobilité de demain ............................................................................................................ 16

1ere conviction : l’électromobilité se développera massivement .................................................... 16

2e conviction : la combinaison de véhicules électriques à batterie et à hydrogène permet de

concilier « 0 émissions », « confort du conducteur » et « flexibilité des usages ». .......................... 17

3e conviction : l’hydrogène améliore la valorisation des énergies renouvelables produites et

participe à la dynamisation des territoires ....................................................................................... 24

4e conviction : une combinaison de véhicules électriques à batterie et à hydrogène réduira les

coûts d’investissement sur le système électrique ............................................................................ 27

La mobilité hydrogène française prête au déploiement .................................................... 30

Profil énergétique, filière en ordre de marche : deux atouts clefs français ...................................... 30

Et maintenant ? La nécessaire impulsion des pouvoirs publics ........................................................ 31

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Les transports, au cœur de trois défis majeurs

AMELIORER LA QUALITE DE L’AIR EST UN ENJEU SOCIETAL

FORT

Lutte contre la pollution : les résultats restent insuffisants

La lutte contre la pollution ne fait que commencer. En France, 48 000 personnes décèdent encore

prématurément chaque année1 du fait des particules fines (9% des décès), positionnant de facto la

pollution de l’air comme la troisième cause de mortalité, derrière le tabac et l’alcool. Son rôle dans la

survenue de cancers2 et de maladies respiratoires est d’ailleurs unanimement reconnu. L’exposition aux

PM2,5 pourrait même être à l’origine de pathologies comme les maladies neurodégénératives, des

troubles cognitifs et le diabète3.

17 700 décès pourraient ainsi être évités chaque année et 7 mois d’espérance de vie à 30 ans seraient

gagnés dans les villes de plus de 100 000 habitants si la France respectait simplement le plafond fixé

par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur le sujet – soit 10 µg/m3 d’exposition annuelle aux

particules très fines (PM2,5)4.

Ceci aurait par ailleurs un impact financier. Le coût de la pollution est en effet estimé entre 75 et 104

milliards d’euros par an en France5, ce montant incluant les hospitalisations, les soins de ville etc. mais

aussi les conséquences financières de l’absentéisme au travail, de la mortalité prématurée ou encore

de la destruction de la biodiversité.

Or, si les origines de cette pollution sont multiples (activité industrielle, agricole, chauffage etc.), les

transports jouent un rôle majeur : en France en 2015, ils représentent 61% des émissions d’oxyde

d’azote (NOx)6, 14% de celle de particules fines PM10 et 18% des émissions de particules PM2.57. Les

transports routiers en particulier représentent environ 54 % des émissions de NOx en France

métropolitaine en 2014, dont 23% pour les voitures particulières diesel et 20% pour les poids lourds

diesel8.

1 Rapport de Santé publique France sur l’Impacts de l’exposition chronique aux particules fines sur la mortalité en France continentale et analyse

des gains en santé de plusieurs scénarios de réduction de la pollution atmosphérique, juin 2016 http://invs.santepubliquefrance.fr/Publications-et-

outils/Rapports-et-syntheses/Environnement-et-sante/2016/Impacts-de-l-exposition-chronique-aux-particules-fines-sur-la-mortalite-en-France-

continentale-et-analyse-des-gains-en-sante-de-plusieurs-scenarios-de-reduction-de-la-pollution-atmospherique 2 Elle est classée « cancérogène » par le Centre international de recherche contre le cancer - rapport du 17 octobre 2013 3 Avis de l’ANSES, mai 2017 4Santé Publique France (l’ex-Institut de veille sanitaire), 2016 5 Rapport sénatorial, juillet 2015 http://www.senat.fr/rap/r14-610-1/r14-610-11.pdf 6 CITEPA, format Secten, avril 2016 http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/lessentiel/ar/227/0/pollution-lair-oxydes-dazote.html 7 CITEPA, format Secten, avril 2016, http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/lessentiel/ar/227/0/pollution-lair-particules.html 8 CITEPA, format Secten, avril 2016 https://www.citepa.org/fr/air-et-climat/polluants/aep-item/oxydes-d-azote

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Les chiffres sont même supérieurs à certains endroits : les individus qui habitent le long des axes

routiers notamment sont les plus exposés dans les zones urbaines. A Toulouse par exemple, les relevés

sont éloquents (cf. Image ci-dessous). Et dans les centres-villes en général, le développement du e-

commerce soulève la question du « dernier kilomètre » et des émissions associées9.

De nombreuses actions correctives ont pourtant été mises en place depuis les années 90, comme la

création, en 1993, de la norme « Euro 1 » pour les constructeurs, ou la signature du protocole

international de Göteborg, en 199910. L’Europe a par ailleurs fixé des objectifs de réduction à horizon

2020 et 203011 et a durci ses normes12. Plus récemment la France, menacée de poursuites par la

Commission Européenne pour non-respect de ses obligations13 quant aux émissions de polluants14 a

voté de nouvelles règles dans la loi de Transition Energétique pour la Croissance Verte.

9

https://www.codespar.org/fileadmin/site_codespar/accueil/projets/Logistique_urbaine/doc/PP29_DOSSIER_lo

gistique-urbaine.pdf

10 http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/documents/2012/EB/ECE_EB_AIR_2012_1_F.pdf 11 Notamment via la Directive NEC en 2001, remplacée par la Directive 2016/2284 du 16 décembre 2016 - http://eur-lex.europa.eu/legal-

content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32016L2284&from=SV 12 La norme « Euro 4 » par exemple, instaurée en 2005, a limité à 50 % les émissions de NOx pour les véhicules par rapport à la norme « Euro 3. 13 Obligations qui consistent en une réduction de 50% des émissions de NOx et de 27% de celles de PM2.5 par rapport à 2005, puis

respectivement de 69 et 57% d’ici à 2030 (par rapport à 2005). 14 http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-15-4871_fr.htm

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Surtout, les villes sont

montées en première ligne

via la mise en place de

dispositifs variés- les

Zones de Circulation

Restreintes (ZCR)

notamment empêchent

l’accès à certaines zones

aux véhicules polluants et

anciens. Elles ont été

instaurées dans près de

200 villes européennes

comme Berlin ou Londres.

D’autres villes ont mis en

place un péage à leur

entrée. Et nombre d’entre

elles se sont regroupées

au sein d’un réseau

engagé dans la lutte

contre la pollution, le C4015. Il faut dire que les maires ont une incitation forte à agir pour améliorer la

qualité de l’air : la pression des citoyens. En Ile de France par exemple, 84% des habitants considèrent

la lutte contre la pollution de l’air comme un enjeu prioritaire16.

Le nombre de décès actuels signe une conclusion qui s’impose à tous : malgré les progrès réalisés17,

les résultats sont incontestablement insuffisants. L’Agence Nationale de sécurité sanitaire, de

l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) l’a d’ailleurs rappelé dans son avis du 23 mai

201718 : la France et l’Europe, contrairement à des pays comme les Etats-Unis ou le Canada, sont

encore loin des normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), avec des moyennes annuelles

qui atteignent 25 µg/m3 (et encore 20 µg/m3 à partir du 1er janvier 2020) – contre 10 considérées

comme un plafond à ne pas dépasser. Dans un arrêté rendu le 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat a

d’ailleurs condamné l’Etat pour dépassements répétés des normes d’émissions de particules fines et de

dioxyde d’azote et enjoint le gouvernement à proposer des mesures concrètes avant le 31 mars 2018.

Mais avec quelle ambition ?

15 Le réseau mondial C40 Cities Climate Leadership Group a été créé en 2005. Il compte aujourd’hui 81 villes adhérentes et 6 villes observatrices. En

se regroupant et en agissant de concert, les villes membres espèrent améliorer la qualité de l’air et réduire les émissions de gaz polluants. 16 Ifop pour le Journal Du Dimanche, décembre 2014. « En Ile-de-France, diriez-vous que la lutte contre la pollution de l’air est un enjeu tout à fait

prioritaire, plutôt prioritaire, plutôt pas prioritaire ou pas du tout prioritaire ? » 17 Les émissions de NOx ont diminué de 47 % en Ile de France entre 2000 et 2015, celles de PM10 de 39 % et celles de PM2.5 de 46 % (CITEPA, avril

2016). Dans le secteur des transports en particulier, la diminution a été de l’ordre de 48 % pour le NOx et de 55 % pour les PM10 entre 2000 et 2012

(Airparif) 18 Rapport de l’ANSES, avril 2017 « Normes de qualité de l’air ambiant » https://www.anses.fr/fr/system/files/AIR2016SA0092Ra.pdf

La loi de Transition énergétique : des avancées

dans la lutte contre la pollution

La Loi relative à la Transition énergétique pour une croissance verte

(LTECV), promulguée le 18 août 2015, contient plusieurs dispositions

pour lutter contre la pollution :

- Obligation, pour l’Etat, de définir une stratégie pour le

développement de la mobilité propre (article 40).

- Obligation, pour l’Etat et les collectivités, de respecter une

proportion minimale de véhicules à faibles émissions de gaz à effet

de serre et de polluants atmosphériques dans leurs appels d’offres de

renouvellement de véhicules (article 37).

- Octroi aux communes du pouvoir de prendre des mesures

coercitives contre la pollution ou encore incitation à la pratique du

covoiturage dans les entreprises (articles 48 et 52).

- Mise en place d’un plan de réduction des polluants atmosphériques

(article 64) – il a été publié le 10 mai 2017. Un des objectifs affichés

est clair : il s’agit de « développer les transports propres pour

améliorer la qualité de l’air et protéger la santé des Français ».

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Quelles ambitions doit-on afficher sur la qualité de l’air ?

En matière de transport en effet, la trajectoire semblait jusqu’à présent évidente – calquée sur

l’évolution des contraintes imposées par les normes Euro - « l’Euro 6b » imposé en 2015 devant être

remplacé par « l’Euro 6c » en 2018.

Le souci est que le Dieselgate, qui a remis en cause l’outil de mesure et de contrôle, pose aussi

indirectement la question de la pertinence des objectifs. En avril 2017, des calculs réalisés pour le

compte de l’Agence Allemande de l’Environnement (UBA) ont ainsi révélé qu’en situation réelle, hors

des laboratoires, les nouveaux véhicules diesel considérés conformes à la norme Euro 6 émettaient en

moyenne 507 mg de NOx/km (534% au-dessus de la limite officielle de 80)19. Et la liste des

constructeurs touchés par le scandale ne cesse de s’allonger.

Ceci explique l’initiative prise par certains maires en mars 2017 : Anne Hidalgo, Maire de Paris et

présidente du réseau de villes C40, et Sadiq Khan, Maire de Londres, ont annoncé le lancement de

projets « notant les nouveaux modèles de voitures selon leurs émissions réelles et leur impact sur la

qualité de l'air (…) ».20.

Deux questions – avant tout politiques - se posent alors : quel est l’objectif le plus acceptable pour la

société en matière de réduction des émissions ? Et quels sont les meilleurs moyens à déployer pour y

arriver ?

Pour y répondre, il est sans doute utile de considérer l’impact des restrictions d’usage de véhicules

« polluants » (ex. : via l’utilisation des vignettes Crit’air à Paris par exemple, l’instauration de péages

urbains etc.), le fait que les contraintes en matière d’émissions vont augmenter leur prix de vente21, et

le développement de nouvelles formes de mobilités, plus partagées. Ces tendances de fond auront

indéniablement un impact sur les comportements et conduiront in fine à une baisse des émissions.

Mais quel sera l’ampleur de cet impact ? Impossible aujourd’hui de l’estimer. Simplement parce que

cela supposerait d’anticiper notamment les usages des transports qui influeront sur le nombre de

kilomètres parcourus par personne, le nombre d’individus par voiture et leurs choix en matière de

transport, sans oublier les politiques de développement urbain…

19 http://www.umweltbundesamt.de/en/press/pressinformation/nitrogen-pollution-from-diesel-fuelled-cars-even 20 https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/0211922412100-londres-et-paris-unis-contre-la-pollution-de-lair-

2075989.php#IiORag2jQBJI5kSI.99 21 http://www.autoactu.com/en-europe--le-cout-de-la-depollution-va-grimper-a-315-euros-par-vehicule-d-ici-2025--indique-faurecia.shtml

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Surtout, comment garantir

que cette baisse des

émissions soit « suffisante »

pour réduire « suffisamment »

les impacts sur l’ensemble des

individus, incluant les plus

fragiles, à la ville et à la

campagne, le long des axes

routiers, au fond des vallées

alpines etc. ?

La question est d’autant plus

délicate que le terme même

de « suffisant » est lui aussi

sujet à interprétations. Peut-

on vraiment le définir de

façon arbitraire à partir d’une

moyenne ? La tentation

existe : à titre d’exemple, le

remplacement d’une grande

partie des voitures

individuelles thermiques

roulant en ville par des

véhicules hybrides qui

fonctionneraient en mode

électrique batterie en zone

urbaine et au biocarburant à

l’extérieur (à supposer que le

contrôle soit possible)

permettrait indéniablement

de faire baisser les émissions

de particules issues des

transports et la moyenne globale. Mais est-il socialement acceptable de réserver la pollution associée à

l’utilisation de moteurs thermiques – quel que soit le carburant – à la campagne, au motif que la

qualité de l’air y serait moins dégradée ?

Péages urbains et qualité de l’air : efficaces à

Milan, moins à Londres

Le raisonnement est a priori implacable : instaurer un péage urbain

réduit naturellement le nombre de véhicules qui entrent en ville, donc la

congestion et la pollution. Sauf que… l’impact en matière de qualité de

l’air dépend aussi, en particulier, de la taille de la zone à péage et des

activités industrielles voisines. Résultat : si à Londres la mise en place

d’un péage urbain en 2003 a effectivement permis de faire reculer

l’usage de la voiture – moins 25 % entre 2005 et 2014 - il n’a pas

entraîné de baisse de la pollution. Il faut dire que la zone à péage

recouvre une infime partie de l’agglomération (seulement 1,4%). A

l’inverse, grâce à l’instauration d’un péage urbain sur une zone élargie

en 2011, les Milanais respirent mieux aujourd’hui : en trois ans

seulement, le trafic a été réduit de 28 % et les émissions de particules

fines de 10 %. La part de véhicules propres est, elle, passée de 9.6 % à

16.6 %. La ville italienne a d’ailleurs été primée par le Forum

international des transports, rattaché à l’OCDE, pour son dispositif,

approuvé à 80 % par les Milanais.

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Biocarburants et gaz à effet de serre (GES)

Au sens de l’analyse de cycle de vie (« well to wheel »), les biocarburants induiraient des émissions de GES

réduites par rapport aux carburants fossiles – c’est d’ailleurs une des raisons qui explique leur développement

en Europe via notamment la directive sur les énergies renouvelables (2009/28 CE) : les objectifs de réduction

des GES sont de -60% à partir du 1er janvier 2018, et l’immense majorité des biocarburants distribués en

Europe aujourd’hui y satisfont. Sauf que l’importance de la prise en compte dans ce bilan1 du changement

d’usage des sols associée au développement des biocarburants, apparaît critique mais ne fait pas à ce jour

l’objet d’un consensus - le graphique suivant donne une illustration des enjeux.

Study - The Land use change impact of biofuels consumed in the EU Quantification of area and greenhouse

gas impacts, a cooperation of Ecofys, IIASA and E4tech

Biocarburants et qualité de l’air

Utiliser des biocarburants en lieu et place des carburants fossiles permet-il de réduire les émissions de

polluants (NOx et particules) ? Assez peu si l’on considère la première génération (G1) de biocarburants –

c’est-à-dire l’ajout d’éthanol de céréales (maïs…) ou de plantes à sucre (canne, betterave…) dans les

supercarburants SP95 ou SP95-E10, et l’ajout de biodiesel (ester d’huiles végétales ou huiles végétales

hydrotraitées-HVO- à base de colza, soja ou déchets de l’industrie agroalimentaire…) dans le gazole routier.

Normal : les technologies moteur sont conservées et la composition chimique est proche de celle des

carburants traditionnels. Le point n’a d’ailleurs jamais vraiment été mis en avant par les promoteurs de

biocarburants. Seules les émissions de particules sont légèrement impactées : selon une étude menée en

2016 par l’IFP Energies nouvelles (IFPEN) pour le compte du groupe agro-industriel Avril (tests menés sur des

bancs à rouleaux et non en situation réelle), l’ajout de biodiesel dans le gazole permettrait de les baisser sur

les voitures qui ne sont pas équipées de filtres à particules. Sur les véhicules Euro 6 équipés de tels filtres,

l’impact ne serait pas significatif. De l’autre côté de la Manche, en 2011, un rapport présenté par le ministère

britannique de l'environnement révélait déjà des résultats mitigés quant aux effets du biodiesel et du

bioéthanol sur la qualité de l'air. L’introduction des biocarburants avancés ou dits de 2ème génération (G2),

issus de la biomasse ligno-cellulosique, ne modifiera pas significativement cet état de fait.

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Ceci explique les nombreuses discussions en cours au sein de l’UE pour mettre à jour la politique

européenne post 2020 de soutien aux biocarburants, avec des propositions comme le plafonnement

des taux d’incorporation des filières G1, des taux d’incorporation minimum pour la G2, l’introduction

de facteurs « ILUC » … L’objectif est de garantir que les biocarburants mis sur le marché auront

l’impact positif attendu sur le changement climatique.

La question est d’autant plus délicate que les connaissances concernant les molécules polluantes

émises par les moteurs à combustion, leurs mécanismes de diffusion et leurs impacts sanitaires

évoluent chaque jour - une étude suisse a par exemple récemment conclu que certains moteurs à

injection directe d’essence émettaient autant de particules que d’anciens moteurs diesel non filtrés22.

Les incertitudes, au final, sont donc nombreuses : lorsqu’il s’agit de définir un objectif de baisse des

émissions et les outils pour la mesurer, tout est affaire d’interprétation et de qualité des recherches

effectuées. Dans ce cas, l’option la moins risquée et la seule définitivement acceptable pour la société

ne serait-elle pas simplement d’assurer un cheminement de tous, constructeurs et consommateurs,

vers le zéro émission ? C’est une question similaire qui se pose en matière de gaz à effet de serre.

LE DEFI CLIMATIQUE : L’IMPERATIF DE DECARBONATION

Gaz à effet de serre : la France prend du retard

La France a été le premier Etat de l'Union européenne à ratifier l'accord de Paris de décembre 2015 -

195 pays signataires s’y sont engagé à lutter pour réduire leurs rejets de gaz à effet de serre (GES), afin

de contenir le réchauffement de la planète au-dessous de 2 degrés.

Pourtant, ses résultats dans le secteur des transports, premier émetteur (30 %), sont décevants à ce

jour : alors que les émissions de GES y étaient en baisse depuis 2004 (-0,7% en moyenne annuelle), la

tendance s’est inversée en 2015 (+0,9%)23, remettant en cause l’atteinte de l’objectif fixé par la loi de

transition énergétique et la stratégie bas carbone (-40 % d’émissions de gaz à effet de serre en 2030

par rapport à 1990, puis une division par 4 d’ici à 2050)24

En cause ? La circulation routière avant tout, qui est repartie à la hausse (+2,2 %) en 2015, et en

particulier celle des voitures particulières (+2,4 %,), qui représentent aujourd'hui plus de 70 % du trafic

total.

22 http://www.greencarcongress.com/2017/05/20170524-gdi.html 23 « Transports en 2015 : plus de voyageurs, moins de marchandises, un peu plus de GES ». Note publiée le 25 août 2016 par le Conseil général de

l’Environnement et du développement durable. 24 Dans le Cadre pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030, adopté en octobre 2014, l’Union Européenne s’est donné pour objectif de réduire les

émissions de gaz à effet de serre de 80 à 95% d’ici à 2050. En matière de transports, le paquet législatif « Europe on the move », dévoilé le 31 mai

2017, s’inscrit en ligne avec cette ambition de réduction, en faisant payer les pollueurs, non plus sur le temps mais sur la distance parcourue.

https://ec.europa.eu/transport/modes/road/news/2017-05-31-europe-on-the-move_en

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L’électromobilité reste une réponse d’actualité

Face à l’enjeu climatique, le développement des véhicules électriques reste, plus que jamais, une

réponse pertinente – leur production de GES étant nulle au niveau du véhicule.

Lors du Mondial de l’Automobile 2016, Ségolène Royal, Ministre de l’Environnement et du

Développement durable, avait d‘ailleurs annoncé vouloir favoriser l’implantation de 1 million de bornes

d’ici 2020 dont 90% chez les particuliers (et jusqu’à 7 millions de bornes en 203025). De nombreux

soutiens financiers ont en outre été mis en place : au-delà des aides à l’achat de véhicules, le dispositif

d’aide au déploiement d’infrastructures de recharges (IRVE) par exemple a permis aux collectivités de

déposer 57 projets et de construire 8 619 bornes de recharge électrique 26. En janvier 201727, on

dénombrait ainsi 122 000 points de charge, dont 15 000 publics (répartis en 4 500 stations).

C’est le cumul d’annonces fortes du gouvernement et de mise en place de financements qui ont à la

fois fait naître le marché - en mars 2017 celui des véhicules particuliers et utilitaires 100% électriques a

franchi un premier cap des 100 000 immatriculations cumulées depuis 201028– et encouragé les

acteurs (opérateurs et constructeurs) à définir des stratégies ambitieuses. Le plan Bus 2025 de la RATP

prévoit par exemple un réseau 100% écologique en 202529 - alors que pour l’instant, 97% des 4500 bus

de la Régie fonctionnent au diesel…

En juillet 2017 Nicolas Hulot, Ministre de la Transition écologique et solidaire, a annoncé son ambition

de bannir les moteurs thermiques des routes d’ici à 2040. Plus que jamais la question est alors :

comment faire en sorte que les véhicules électriques se développent vraiment – ils ne représentent

que 1,2% des immatriculations en 2016 – et participent activement à la réduction des émissions de

GES ?

25 Objectif fixé dans la LTECV – article 41 26 http://www.assemblee-nationale.fr/14/cr-eco/16-17/c1617046.asp 27 Source : Enedis/Avere 28 71 169 véhicules vendus exclusivement à des particuliers 29 http://www.ratp.fr/bus2025/

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Les mesures à mettre en place sont sans doute nombreuses. Toutes devront néanmoins avoir en

commun un point : s’intégrer dans un contexte de transition énergétique réalisée par les territoires et

les régions.

TRANSITION ENERGETIQUE : DE NOUVEAUX SCHEMAS

DOIVENT ÊTRE PROMUS

Le mix énergétique de demain sera encore plus « vert » et plus local

Derrière les ambitions nationales en matière de transition énergétique – déclinaisons des objectifs

européens (voir encadré) –opère depuis plusieurs années une armée de maîtres d’œuvre : les

territoires.

Tous ont en effet pour objectif de

développer les énergies renouvelables

dans le cadre de leur transition

énergétique - certains visant même les

« labels » Territoires à Energie Positive

(TEPOS)30 ou Territoires à Energie

Positive pour la Croissance Verte

(TEPCV)31. Certes, ils sont en partie

contraints d’engager de telles

démarches, opérées dans les faits par

les syndicats d’énergie – la loi de

transition énergétique ayant affirmé le

rôle des régions sur la question et

donné une nouvelle dimension à des

outils comme les plans climat-air-

énergie territoriaux (PCAET).

Mais les territoires perçoivent

également la dynamique économique

associée à la transition énergétique.

Comme le souligne l’ancien directeur

30 Un TEPOS est un territoire qui vise l'objectif de réduire ses besoins d’énergie au maximum, par la sobriété et l'efficacité énergétiques, et de les

couvrir par les énergies renouvelables locales ("100% renouvelables et plus"). Il intègre par ailleurs la question de l'énergie dans un engagement

politique, stratégique et systémique en faveur du développement local. La marque TEPOS est déposée par le CLER, réseau pour la transition

énergétique. La démarche TEPOS n’est ni réglementaire, ni normée. 31 L’article premier de la Loi relative à la Transition énergétique pour la croissance verte précise que : « Est dénommé territoire à énergie positive un

territoire qui s'engage dans une démarche permettant d'atteindre l'équilibre entre la consommation et la production d'énergie à l'échelle locale en

réduisant autant que possible les besoins énergétiques et dans le respect des équilibres des systèmes énergétiques nationaux. Un territoire à

énergie positive doit favoriser l'efficacité énergétique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la diminution de la consommation des

énergies fossiles et viser le déploiement d'énergies renouvelables dans son approvisionnement. »

La trajectoire européenne (Cadre pour le

Climat et l’Energie à l’Horizon 2030, adopté

par l’UE en octobre 2014)

- Réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au

moins 40% (par rapport à 1990)

- Augmentation de la part des ENR à 27%

- Amélioration de l’efficacité énergétique d’au moins

27%.

Objectif : permettre à l’Union d’atteindre ses ambitions

en matière de réduction des émissions de gaz à effet de

serre (de 80 à 95% d’ici à 2050).

Quelques chiffres de la loi relative à la

Transition énergétique pour la Croissance

verte

- Les ENR devront représenter 32 % de la

consommation énergétique en 2030, dont 40 % de la

production d’électricité (contre 19 % en 2016).

- La part de l’atome dans la production d’électricité

doit passer de 75 % à 50 % à l’horizon de 2025.

Source : Ministère de la transition écologique et solidaire

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exécutif de Greenpeace France Bruno Rebelle « Cette transition-là est un fantastique levier de

relocalisation de l’économie, de valorisation des ressources locales – énergétiques, techniques et

humaines – et d’innovation sous toutes les formes : technologiques, organisationnelles et socio-

politiques »32. Et de citer l’exemple du réseau régional des TEPOS-CV d’Auvergne Rhône Alpes, où 19

territoires (sur 40) ont des trajectoires de « transition » : « les effets économiques sont déjà sensibles,

affirme Bruno Rebelle. Ces 19 territoires affichent collectivement une facture énergétique de près de 5

milliards d’euros, facture qui se réduit chaque année de plus de 70 millions d’euros du fait des

économies engagées. Le développement des énergies renouvelables apportera en outre chaque année

60 millions d’euros de revenus supplémentaires. Ainsi, la facture énergétique nette des territoires

concernés sera réduite à 500 millions d’euros en 2050, permettant la réinjection de 4,5 milliards

d’euros dans l’économie locale par rapport à un scénario tendanciel ! ».

Optimiser la valorisation des énergies renouvelables est un enjeu clef pour

réussir la transition

Reste que produire des énergies renouvelables induit de nouveaux défis, que les territoires et leurs

syndicats d’énergies se doivent de relever. Le premier est celui de la variabilité des énergies solaires et

éoliennes, qui rend la production peu flexible. Conséquence : les moments de production ne

rencontrent pas forcément une demande (cf. illustration – témoignage de l’entreprise CNR page 27). Cette

inadéquation est encore largement couverte par les tarifs de rachat, qui permettent aux producteurs

d’écouler leurs surplus à un prix garanti. Le « souci » est que l’on s’achemine vers la fin de ces tarifs.

Comme le remarque Sylvestre Huet, journaliste scientifique et auteur de Les dessous de la cacophonie

climatique (Ed. La ville brûle, 2015), « cette courbe permet de mieux comprendre la très forte variabilité

de la production éolienne, le fait qu’elle ne suit en aucune manière l’évolution de la demande, et

qu’elle peut chuter à des niveaux dérisoires au regard de la puissance installée »

32 http://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/transition-energetique-des-territoires-un-investissement-rentable

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La loi sur la transition énergétique, conformément aux lignes directrices européennes, prévoit en effet

de remplacer les tarifs d'achat garantis par un tarif variable, constitué du prix du marché augmenté

d'une prime. Résultat : les producteurs vont devoir vendre leur électricité sur le marché de gros, et

certainement s’organiser différemment vu la baisse tendancielle des prix qui y est constatée. « Cette

évolution est loin d'être neutre pour les industriels, souligne Jean-Louis Bal, président du Syndicat des

énergies renouvelables (SER), il n'est pas évident de vendre son électricité directement sur le

marché »33.

Pour les territoires, tout l’enjeu est alors de valoriser au mieux leur production d’électricité

renouvelable, afin de ne pas subir les variations du marché de gros, d’assurer la rentabilité des

syndicats d’énergie et de préserver les dynamiques locales déjà créées.

33https://www.lesechos.fr/monde/dossiers/Climat-croissance/021327723214-energies-vertes-ce-que-va-changer-la-fin-des-tarifs-dachat-

1157453.php

Prix spot moyens sur les bourses de l’électricité en 2016

« Durant 8 mois de l’année, les prix du marché de gros au jour le jour ont stagné en moyenne à 28

euros le MWh. Voire descendent… sous le zéro. Des « prix négatifs » lorsque des producteurs payent

pour que l’on accepte leur électricité de manière à ne pas arrêter une centrale »

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Le défi n’est pas simple. Il s’ajoute de plus aux incertitudes qui pèsent déjà quant aux politiques les

plus pertinentes à adopter en matière de qualité de l’air et d’émission de gaz à effet de serre. Dans ce

contexte néanmoins deux attitudes sont possibles : la première consiste à attendre qu’une partie du

brouillard se dissipe pour oser prendre des mesures fortes, au risque de perdre des avantages

compétitifs sur les marchés au profit de solutions étrangères, et chinoises en particulier. La seconde

consiste à agir, en faisant des choix qui minimisent les incertitudes et s’appuient sur de solides

convictions. Car la mobilité de demain et la part de la France sur ce marché se pensent dès aujourd’hui.

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S’appuyer sur des convictions fortes est une

nécessité pour que la France s’impose dans la

mobilité de demain

La France a déjà, par le passé, commis l’erreur d’attendre – le secteur du photovoltaïque en est

l’illustration la plus évidente. Faut-il la renouveler aujourd’hui en matière de mobilité, sachant que

cette dernière doit désormais se penser en cohérence avec la transition énergétique, et que sur ce

marché le cycle industriel est de 20 ans environ ? Nicolas Hulot, Ministre de la Transition écologique et

solidaire, a fait preuve de conviction lorsqu’il a annoncé, en juillet 2017, sa volonté de libérer les routes

des véhicules thermiques d’ici à 2040. Les mesures qui permettraient de consolider l’écosystème des

acteurs français capables de remporter les défis économiques associés à cet objectif peuvent elles

aussi s’appuyer sur de solides convictions.

1ere conviction : l’électromobilité se développera

massivement

Si la part de véhicules électriques dans le parc automobile français est encore marginale (environ 1.2 %

des immatriculations totales), sa croissance est inévitable. Elle est en effet portée par le volontarisme

des pouvoirs publics, qui ont fixé un horizon clair à 2040 pour sortir du thermique, et par une forte

attente sociétale en matière de réduction des nuisances (pollution, bruit etc.).

Les 350 000 véhicules électriques en circulation annoncés en 202034 ne devraient donc être qu’une

première étape. Car les outils permettant de lever les freins à leur adoption (le temps de recharge et

l’autonomie) existent déjà et sont opérationnels (voir conviction 2).

Toute la question sera de savoir quelle part la France décidera de prendre sur ce marché mondial (cf. la

filière est prête au déploiement – page 31)

34 http://www.avere-france.org/Site/Article/?article_id=6904

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2e conviction : la combinaison de véhicules électriques à

batterie et à hydrogène permet de concilier « zéro

émission », « confort du conducteur » et « flexibilité des

usages ».

Les véhicules électriques à batterie ne pourront pas répondre seuls à la nécessaire généralisation de la

mobilité électrique. D’abord parce qu’ils obligent les conducteurs à renoncer à la flexibilité des usages

à laquelle ils ont été habitués avec les véhicules thermiques – leur autonomie est réduite et le temps

de recharge nécessite de patienter entre 20 minutes et 8 heures. Des contraintes difficiles à accepter

par les Français35, et en particulier chez les professionnels comme les taxis. D’après une étude Taxis

Bleus-Nissan menée en 2015 les chauffeurs parisiens perdent en effet 2 courses par jour en moyenne

en passant au véhicule électrique à batterie.

Or, une vraie amélioration des batteries en matière de temps de recharge et d’autonomie nécessiterait

une rupture technologique réelle, qui ne compromette ni leur durée de vie, ni leur prix et ni leur

sécurité (voir encadré ci-dessous), et que les fabricants ne vont pas opérer à court terme :

l’industrialisation de technologies telles que le métal-air36 notamment n’est pas envisagée à un horizon

visible et précis (au-delà de 2030-2035 pour certains constructeurs automobiles). Pour des acteurs

comme Tesla et Panasonic par exemple, priorité est aujourd’hui donnée à l’augmentation massive de

la production pour rentabiliser les investissements déjà réalisés sur un marché de plus en plus tendu37.

.

35 D’après une étude Ipsos pour Mobivia et l’Avere, menée en septembre 2016, les Français seraient prêts à passer à l’électrique si :

• Le manque d’autonomie était résolu pour 58% des français (2016), c’est-à-dire, si l’autonomie de la voiture était supérieure à 300km

(72%) et si la possibilité de recharge était facilitée à proximité ou à l’intérieur de leur domicile (62%).

• Le coût à l’achat était similaire à celui du thermique (72%)

36 Ces nouvelles technologies de batterie permettent des quantités d'énergie stockées par unité de métal beaucoup plus élevées que les batteries

actuelles, ce qui engendre des baisses de poids et de coûts très importantes. Elles pourraient entrer en phase d'industrialisation après 2025. 37 « La mission de Tesla est d’accélérer la transition mondiale vers une énergie durable. Pour atteindre cet objectif, nous devons produire des

véhicules électriques en quantité suffisante afin d'imposer ce changement dans le secteur de l'automobile. Avec un taux de production planifié de

500 000 voitures par an au cours des cinq prochaines années, Tesla, à elle seule, doublera la totalité de la production mondiale actuelle de

batteries au lithium-ion. La Tesla Gigafactory est née d'une nécessité et fournira suffisamment de batteries pour répondre à notre demande de

véhicules prévisionnelle ». Source : Tesla.com

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Batteries for Electric Cars. Challenges, opportunities and outlook for 2020,

Source Boston Consulting Group (BCG), ©2010.

La qualité des batteries s’évalue selon 6 critères : le coût, la puissance, la sécurité, la performance, la durée de vie et

l’énergie. Or, quelle que soit la technologie, aucune ne performe sur l’ensemble de ces critères en même temps.

La généralisation des véhicules à batterie nécessiterait aussi de multiplier les bornes de recharge

rapide pour lever en partie la contrainte de l’attente - on comptait 53 Superchargeurs pour 390 points

de recharge Tesla en France en mai 201738. Le souci est que la recharge se fera toujours, dans le

meilleur des cas (température, capacité du Superchargeur, état de la batterie…) en 15 à 30 minutes,

alors que le modèle de l’échange de batterie a montré ses limites (cf. Encadré ci-dessous).

Au-delà, le

développement de

bornes de recharge

rapide ne garantirait

pas le confort de

l’usager - des

possesseurs de Tesla

se ravitaillant aux

Superchargeurs se

sont notamment

aperçus que ces

derniers étaient

souvent en sous

38 En mai 2017, on comptait 5 000 Superchargeurs et 9 000 points de recharge Tesla dans le monde. Ces chiffres devraient être doublés d’ici la fin

de l’année.

L’expérience Better Place

Régler le problème de la faible autonomie en organisant un système

d’échanges des batteries dans des stations dédiées… l’idée de Better Place

semblait séduisante. En 2008 la start-up israélienne avait d’ailleurs

convaincu Renault de devenir partenaire de l’aventure en Israël et au

Danemark. Objectif : vendre rapidement 100.000 modèles électriques dans

ces deux pays. Sauf que le prix des stations s’est révélé trop élevé, et la

logistique inhérente à la gestion de stocks de différents types de batteries

trop compliquée. Résultat : seuls 1000 exemplaires ont été écoulés en

Israël et 240 au Danemark. En 2013, Better Place a été déclaré en faillite.

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régime39. Surtout, le manque de place peut créer des files d’attentes là où l’espace est contraint40.

Les véhicules électriques à batterie à coût abordable resteront donc probablement pertinents sur les

seuls petits trajets urbains pendant de nombreuses années.

A leurs côtés, les véhicules 100% hydrogène se rechargent, eux, entre 3 et 5 minutes, par simple

équilibrage des pressions entre la station de recharge et le véhicule, et bénéficient d’une autonomie

(500 à 600 kilomètres) proche de celle des véhicules thermiques41. Ils sont donc parfaitement adaptés

aux fortes contraintes des conducteurs professionnels - le retour d’expérience des taxis STEP à Paris

(voir encadré ci-dessous) et des livreurs UPS42 en est la preuve.

39 https://electrek.co/2017/05/07/tesla-limits-supercharging-speed-number-charges/ 40 http://www.valuewalk.com/2015/07/tesla-buyers-irritated-charging-queues/

41 L’autonomie s’explique par le fait qu’un stockage d’hydrogène a environ 5 fois plus d’énergie par kilo que la batterie lithium (160 fois plus en

énergie théorique - https://en.wikipedia.org/wiki/Energy_density), pour un même poids embarqué. Le stockage se fait dans des réservoirs

cylindriques haute pression, comme pour le gaz naturel. Ce format ne facilite pas, par contre, l’intégration dans des véhicules de petite taille.

42 https://www.trucks.com/2017/05/02/ups-fuel-cell-electric-delivery-truck/

Recyclage : un défi pour l’électromobilité

La généralisation des véhicules électriques soulève naturellement une question environnementale

clef : quel est le potentiel de recyclage des batteries et des piles à hydrogène ?

Or, sur ce sujet, les batteries semblent faire moins bien. Elles contiennent en effet du lithium, dont

le retraitement après utilisation n’est pas rentable financièrement (il ne coûte que 9 100 $ la tonne

en 2017, contre 58 000 $ en juillet de la même année pour le cobalt par exemple, autre métal rare

utilisé dans les batteries). Ceci soulève la question de son accessibilité à terme. Or, d’après la

Banque Mondiale, le développement de nouvelles solutions énergétiques - solaire, éolien,

stockage etc. – lié aux engagements internationaux en matière de climat pourrait entraîner une

augmentation de 1000% de la demande de lithium. Et pour ne rien arranger, le développement de

Gigafactories de batteries pourrait accélérer le phénomène...

A l’inverse, les piles à hydrogène contiennent avant tout du platine, valorisé près de 30 000 € la

tonne en 2017. Pas étonnant à ce prix que des chercheurs français aient mis au point une

technologie permettant de recycler 76% du platine d’une pile, en l’extrayant grâce à un mélange

d’eau oxygénée et de chlorure d’hydrogène. Ce qui résout quasiment, de fait, la question de

l’accessibilité.

Sources :

Banque Mondiale :

http://documents.banquemondiale.org/curated/fr/207371500386458722/pdf/117581-WP-P159838-PUBLIC-

ClimateSmartMiningJuly.pdf

Journal of cleaner production:

ttps://hal-univ-evry.archives-ouvertes.fr/G-SCOP/emse-01392130

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Certes, le prix de l’hydrogène est encore trop élevé pour le conducteur – il est à environ 10 euros/kg (à

partir d’électrolyse), sachant qu’à 7 euros/kg le coût d’un plein pour le consommateur serait le même

qu’avec un véhicule diesel43 (à supposer que les prix du diesel ne s’envolent pas à nouveau). Le prix

des véhicules aussi est à ce jour trop haut (il faut compter 65750 euros HT moins 6000 euros de bonus

écologique pour une Toyota Mirai par exemple).

43 Un véhicule essence ou diesel utilise 20% à 30% du Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI) du carburant, soit entre 2 et 3 kWh par litre d’utile. Un

véhicule hydrogène utilise 45% à 55% du PCI de l’hydrogène. Un kilo d’hydrogène a donc 15 à 18kWh d’utile. Le rapport est donc de 18/2 pour le

plus favorable à 15/3 pour le moins favorable, 7€ en moyenne.

Hype convertit les taxis à l’hydrogène

Mathieu Gardies, fondateur de la Société du Taxi Electrique Parisien (STEP), le reconnaît sans peine

: il a d’abord pensé aux véhicules à batterie lorsqu’il a créé l’entreprise, en 2009, avec l’objectif de

constituer la première flotte de taxis « zéro émission » en France. Et pour cause : à l’époque, il

n’existait aucun véhicule hydrogène de série. « Mais nous nous sommes rapidement heurtés à des

difficultés techniques et opérationnelles, explique ce dernier. Les contraintes en termes de

recharge et d’autonomie notamment étaient difficiles à accepter pour les chauffeurs ». Lorsque

Toyota et Hyundai ont lancé leurs premiers véhicules hydrogène de série, en 2014, Mathieu

Gardies n’a donc pas hésité à sauter le pas : l’année suivante, il lançait les taxis Hype (d’abord 5

véhicules, puis 15 aujourd’hui), en partenariat avec Air Liquide – actionnaire minoritaire de la STEP

en charge du déploiement des stations d’hydrogène – et avec un modèle original pour le secteur.

Les chauffeurs Hype, qui conservent avec l’hydrogène la liberté qu’ils avaient avec des véhicules

thermiques, sont en effet salariés (le secteur, lui, fonctionne essentiellement avec des

indépendants) et utilisent les voitures en doublage (deux chauffeurs en alternance par véhicule). La

formule séduit : après avoir reçu le soutien de la Mairie de Paris et de la Région Ile de France, la

STEP a accueilli la Caisse des Dépôts à son capital en juillet 2017. Ceci lui permet de réaffirmer ses

ambitions : déployer 600 véhicules dans Paris à l’horizon 2020, se lancer dans d’autres métropoles

françaises, émerger à l’international, et convaincre aussi dans un deuxième temps les chauffeurs

indépendants de se convertir aux véhicules hydrogène. « Avec 600 véhicules, nous aurons une

taille critique qui nous permettra de démontrer totalement la pertinence de la solution hydrogène,

et donc de créer les conditions qui permettront une transition massive des autres opérateurs vers

cette solution » explique en effet Mathieu Gardies.

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Mais tous les deux devraient baisser avec la généralisation de l’électromobilité. Le coût de production

de l’hydrogène par électrolyse pourra en effet être compris entre 3,2 €/kg et 6,7 €/kg44 d’après le

rapport conjoint du Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable et du Conseil

général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies. Sachant qu’à ce jour, le coût le

plus atteignable aujourd’hui est de l’ordre de 6 Euros du kilo.

Mieux, d’après les calculs de la filière hydrogène française, même si une Taxe Intérieure de

Consommation sur les Produits Energétiques (TICPE) était appliquée à l’hydrogène, avec

l’augmentation de la demande liée à celle de la production de véhicules, elle pourrait être de 30% sans

impacter l’équivalence avec le diesel… mais en permettant en plus de limiter les importations

d’énergies fossiles.

Les très faibles productions actuelles de véhicules, elles, correspondent à des « têtes de série » et ne

permettent pas d’apprécier le prix objectif en volume de ces derniers. En fait, de nombreuses études45

sur le sujet montrent néanmoins qu’un coût équivalent voire inférieur à un véhicule diesel est

facilement accessible pour des véhicules hydrogène à même niveau de production (voir encadré ci-

dessous).

44 https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/cge/Rapports/2016_05_03_Filiere_hydrogene_energie.pdf Page 19 45 http://www.gppq.fct.pt/h2020/_docs/brochuras/fch-ju/power_trains_for_europe.pdf

https://www.hydrogen.energy.gov/pdfs/16020_fuel_cell_system_cost_2016.pdf ;

https://www.hydrogen.energy.gov/pdfs/progress16/iv_a_2_james_2016.pdf

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Enfin, une troisième catégorie de véhicules devrait contribuer activement à la généralisation de

l’électromobilité : les véhicules électriques hybrides batterie/hydrogène.

Véhicules hydrogène – les prix à la baisse

McKinsey (étude « A portfolio of power-train for Europe) l’affirmait dès 2010 : le prix des véhicules

hydrogène (FCEV) et à batterie (BEV) serait quasiment équivalent à celui des véhicules hybrides

thermiques (PHEV) à horizon 2020). La tendance se confirme d’après les études du Department of

Energy américain : le prix estimé du système hydrogène et des réservoirs est de 11 200 Euros fin

2016, avec une production de 500 000 unités par an alors que l’étude McKinsey estimait ses

éléments à 10 022 Euros en 2020.

1 - Ranges based on data variance and sensitivities (fossil fuel prices varied by +/- 50%; learning rates varied by +/- 50%). Source:

McKinsey, A portfolio of power-train for Europe, 2010.

Sources : McKinsey et Mobilité Hydrogène France

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A ce jour, les véhicules de ce type les plus répandus en France sont fabriqués par la société Symbio, à

partir d’une base de Kangoo ZE (utilitaire). Cette flotte de 200 véhicules en exploitation - la plus

importante d’Europe - offre aux usagers la liberté des véhicules thermiques (3 minutes de temps de

recharge, deux à trois fois plus d’autonomie que son équivalent batterie) tout en étant zéro émission.

Ainsi, la mobilité individuelle de demain s’appuiera certainement sur trois types de

véhicules électriques : des 100% batterie lorsque les usages le permettent (par exemple, de courts

trajets urbains avec de faibles contraintes de disponibilité du véhicule), des hybrides batterie/pile à

hydrogène pour un maximum de flexibilité, et des 100% hydrogène pour les usages très intensifs en

énergie (grands rouleurs, camions de livraison, bus).

Ceci, naturellement, aura des conséquences en matière d’infrastructures, mais le coût, au final, pourrait

être moins élevé que dans d’autres scénarii (voir 4ème conviction).

Les véhicules hybrides batterie/hydrogène – décryptage

Les véhicules hybrides hydrogène sont équipés à la fois d’une batterie – qui sert au minimum à la

récupération d’énergie lors du freinage - et d’une pile à combustible. Cette combinaison de deux

modes de stockage garantit la flexibilité des usages et l’optimisation du coût de l’énergie. Si le

conducteur a le temps et se trouve à proximité d’une borne de recharge, il peut en effet faire le

« plein » d’électricité – qui reste peu chère. Le plein d’hydrogène sera préféré dans les autres cas. A

noter que ce modèle est d’autant plus pertinent que le véhicule est imposant (bus, camion) – la

présence d’une pile à hydrogène permet en effet de limiter l’impact sur la charge utile du poids de

la batterie.

Fonctionnement

➊ Le moteur électrique assure une propulsion zéro émission.

➋ La pile à hydrogène produit de l’électricité à bord.

➌ La batterie et la pile hydrogène alimentent le moteur

➍ La batterie se recharge sur le secteur, l’hydrogène à la station

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3e conviction : l’hydrogène améliore la valorisation des

énergies renouvelables produites et participe à la

dynamisation des territoires

On associe classiquement au vecteur hydrogène-énergie des capacités de stockage, utiles pour pallier

la variabilité des énergies renouvelables - l’électricité qui est produite lors des périodes de forte

production et de faible consommation est transformée en hydrogène.

Mais de quel « stockage » parle-t-on ? D’ici à 2030, les technologies qui permettent de stocker

massivement l’hydrogène seront prêtes. Elles permettront de transformer ce dernier soit en gaz

(« Power to gas ») soit en électricité (Projet MYRTE) avant la réinjection dans les réseaux. Elles seront

associées, aussi, à des modèles économiques acceptables.

Dès à présent néanmoins, l’hydrogène produit à partir des surplus d’EnR peut aussi être utilisé pour

faire fonctionner des véhicules électriques hydrogène ou hybrides batterie/hydrogène. Dans ce cas, il

permet à la fois une valorisation immédiate des surplus d’énergie et l’optimisation de la gestion des

réseaux – donc une meilleure rentabilité des installations de production. A l’heure où se dessine la fin

des tarifs de rachat, des syndicats d’énergies, des entreprises et des collectivités ont bien compris

l’intérêt de la mobilité hydrogène (cf. encadrés ci-dessous).

Les conclusions de l’ADEME

Les scénarios de l’ADEME sur l’évolution du mix énergétique montrent que passé une part

d’environ 60% à 70% d’ENR (solaire, éolien, biomasse, hydraulique) dans le mix électrique, 40% de

l’énergie devra être stockée sur plus de 35 heures. Les batteries et le stockage hydraulique n’y

suffiront pas, l’hydrogène apparaissant comme le seul complément connu actuellement.

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25

.

L’hydrogène au cœur

du dynamisme vendéen

L’équation, a priori, semblait impossible à résoudre. Lorsqu’au début des années 2000 le Syndicat

Départemental d’Energie et d’Equipement de la Vendée (SyDEV) s’est vu confié la mission de

développer la production d’énergies renouvelables (EnR), les contraintes étaient en effet

maximales : dès cette époque il était prévisible que la consommation énergétique de la Vendée

allait augmenter très fortement– activité industrielle, touristique et croissance démographique

obligent (elle a d’ailleurs cru trois fois plus vite que dans le reste de la France depuis 2002). Il était

aussi certain que les pointes de consommation allaient se multiplier. Ceci alors que les

investissements dans les réseaux étaient déjà importants. « Nous investissions près de 100 millions

d’euros chaque année, se souvient Olivier Loizeau, Directeur général de Vendée énergie (société

d’économie mixte détenue à 75% par le SyDEV, en charge du développement des EnR). Si en plus

nous devions les renforcer pour qu’ils puissent accueillir les nouvelles productions éoliennes et

solaires, sans que cela ne résolve pour autant la question de l’intermittence… cela s’annonçait

périlleux ».

La Vendée a pourtant trouvé une solution dans le cadre de l’appel à manifestation d’Intérêts «

Smart Grid Vendée » : « la mise en œuvre d’outils de flexibilité sur le réseau public de distribution,

pour piloter et optimiser le flux, en partenariat avec Enedis notamment » répond Olivier Loizeau. Et

dans cette équation l’hydrogène comme vecteur de stockage s’est naturellement imposé. En

octobre 2016, Vendée Energie et le SyDEV ont ainsi été lauréats de l’appel à projets « Territoire

Hydrogène ». « L’idée était de déployer jusqu’à 7 électrolyseurs répartis de façon homogène sur le

territoire et au plus près des points de consommation », explique Olivier Loizeau. Ceci nous

permet à la fois d’optimiser la production d’énergies renouvelables et d’envisager, à court terme,

d’offrir aux entreprises des services de flottes captives alimentées en hydrogène ».

Objectif final : faire en sorte que 50% de consommation électrique vendéenne soit produite

localement à horizon 2025, tout en créant de la valeur pour le territoire. « Cela suppose de

maximiser la valorisation de nos énergies renouvelables, d’autant que certaines de nos éoliennes

sortent du mécanisme de tarifs de rachat dès 2018, explique Olivier Loizeau. L’hydrogène est, sur

ce point, un outil incontournable en Vendée »

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L’Occitanie affiche ses ambitions

Devenir la première région à énergie positive à horizon 2050.

Telle est l’ambition de l’Occitanie et de sa présidente, Carole Delga, adoptée en conseil régional en

novembre 2016. Si le chemin à parcourir pour la réaliser est encore long – la collectivité devra

notamment réduire de 40 % des dépenses énergétiques et multiplier par 4 sa production

d’énergie renouvelable - Bernard Gilabert, élu régional en Occitanie et secrétaire de l’AVERE, ne

doute pas que la région y parviendra. « Au-delà de l’atout que représente naturellement le

potentiel de production hydraulique, solaire et éolienne, la région a défini sa stratégie énergétique

de façon globale, en imaginant de nouvelles chaînes de valeur pour rentabiliser le système dans

son ensemble, coût des équipements inclus, explique ce dernier, et cette approche est la condition

première du succès ». La non-pérennité des tarifs de rachat a ainsi été prise en compte, et l’intérêt

de l’hydrogène comme vecteur de stockage et de valorisation directe dans les transports ». « Cela

nous est apparu comme une évidence » se souvient Bernard Gilabert. Le projet HYPORT prévoit

ainsi de déployer des écosystèmes hydrogène autour des aéroports de Tarbes et Toulouse-

Blagnac. Une première étape.

Trifyl (Tarn) « Le schéma dans lequel l’hydrogène est utilisé pour

la mobilité est incontestablement le plus intéressant »

Dans le Tarn, le potentiel économique de la production hydrogène a été compris il y a bien

longtemps. « Dès 2006, le Trifyl a lancé un projet de recherche pour valoriser une partie du biogaz

produit dans le département » se souvient Alex de Nardi, chargé de recherche et développement

au sein de l’établissement public en charge de la valorisation des déchets ménagers et assimilés du

Tarn. Il faut dire que, dès cette époque, et sous l’impulsion de son Président Jean-Marc Pastor, le

Trifyl avait défini une stratégie claire pour soutenir son activité à long terme tout en participant à

la transition énergétique du département : développer toutes les formes de valorisation possibles

– et ne pas miser sur une seule – pour ne pas subir les évolutions des garanties de rachat. « Ce

sont ces garanties qui nous incitent encore aujourd’hui à valoriser le biogaz via la cogénération

avant tout, puis via la production de bio méthane », explique Alex de Nardi. Mais le schéma dans

lequel l’hydrogène est utilisé pour la mobilité est incontestablement le plus intéressant. « La

technologie que nous utilisons nous permet de transformer directement le biogaz en hydrogène,

donc de réduire les coûts, affirme Alex de Nardi. Aujourd’hui, c’est uniquement par manque de

débouchés en mobilité que nous sommes contraints de limiter la production d’hydrogène à 100

kilos par jour, mais nous avons la capacité de monter très vite ».

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4e conviction : une combinaison de véhicules électriques à

batterie et à hydrogène réduira les coûts d’investissement

sur le système électrique

Lorsqu’on s’interroge sur l’impact que pourrait avoir le développement de l’électromobilité sur les

réseaux, deux évidences semblent s’imposer. La première est qu’il va falloir augmenter leur puissance.

La seconde est qu’au regard des investissements déjà réalisés dans les bornes de recharge pour

véhicules à batterie, bâtir une autre infrastructure pour servir la mobilité – toujours électrique mais

hydrogène – aurait certainement un coût qui peut difficilement se justifier. Mieux vaudrait donc, a

priori, concentrer les investissements sur les bornes et ne pas se disperser. D’autant que, compte-tenu

des rendements des électrolyseurs, batteries et piles, les véhicules hydrogène consomment deux fois

plus d’énergie électrique…

voit loin

Le premier producteur français d’énergie 100% renouvelable est-il aussi celui qui voit le plus loin ?

Si la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) est aujourd’hui associée à plusieurs projets de la

mobilité hydrogène – et notamment le déploiement de véhicules électriques hybrides

batterie/hydrogène en Auvergne-Rhône-Alpes (projet Hyway) – c’est qu’ils s’inscrivent dans une

feuille de route claire, visant à assurer le développement de la production d’électricité

renouvelable de l’entreprise à long terme. « L’industrialisation des technologies de mobilité

hydrogène est une étape indispensable pour nous doter, demain, de la capacité de stocker l’électricité

à grande échelle via la technologie du « power to gas », explique Frédéric Storck, Directeur de la

Transition Energétique et de l’Innovation de l’entreprise. Nous avons donc décidé d’y participer ». Il

faut dire que, pour CNR, le stockage de l’électricité sur des durées longues à un coût marginal

faible est, à terme, la clef de la rentabilité. « Il est la seule réponse possible au fait que nous allons

connaître, dans les années à venir, un nombre croissant de prix négatifs et une volatilité accrue sur le

marché de gros de l’électricité » explique Frédéric Storck. Plusieurs sites de production d’énergie

éolienne de l’entreprise sortent en effet des tarifs de rachat dès 2020, alors que le développement

de l’efficacité énergétique favorise la baisse de la consommation. Comme la technologie du Power

to Gas est en cours de démonstration et que les stations de stockage par pompage turbinage

(STEP) ont un potentiel limité, la mobilité hydrogène s’est imposée à la fois comme un débouché

immédiat et comme un investissement. « Les acteurs de ce secteur sont les mêmes que ceux du

Power to Gas, explique en effet Frédéric Storck. En les accompagnant nous préparons simplement

l’avenir de CNR. Notre ambition ? Avoir, demain, la capacité de choisir de valoriser notre production

d’électricité verte soit via le réseau électrique, soit sous forme d’hydrogène pour le réseau de gaz,

pour la mobilité ou pour un industriel, selon les prix de ces deux marchés ».

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La première évidence s’impose effectivement : même s’il est compliqué d’annoncer aujourd’hui des

montants précis, il va falloir investir dans les réseaux. D’abord parce que l’architecture actuelle des

« tuyaux », même avec l’optimisation permise par le « Smart Grid », ne permettra pas de faire passer

l’équivalent énergétique de ce qui est aujourd’hui transporté par les carburants pour servir la mobilité :

les camions citerne qui distribuent les carburants en Europe transportent environ 20% d’énergie en

plus que le réseau électrique (cf. schéma ci-dessous).

Composition of the primary energy entering the energy system of the EU-28 in 2013, Source: European Environment

Agency. Le réseau électrique transporte 276 MTOE (221 + 56) // Les transports utilisent 327 MTOE (majoritairement

par camions)

Ensuite parce que le dimensionnement d’un réseau énergétique se fait selon le critère de puissance -

pour permettre aux véhicules de se charger y compris lors des périodes de forte consommation

électrique. Sachant que la recharge d’un véhicule électrique pour un parcours de 120 kilomètres

représente un appel de puissance équivalent à celui d’un chauffe-eau si la recharge s’effectue en 8

heures, d’un immeuble si la recharge s’effectue en 2 heures, et d’un quartier urbain si la recharge

s’effectue en 15 à 20 minutes….

La deuxième « évidence » en revanche… ne l’est pas tant que cela. Simplement parce que l’affirmation

selon laquelle il est économiquement plus pertinent de concentrer les investissements sur les bornes

au lieu de les « disperser » aussi dans des stations hydrogène ignore un fait majeur : augmenter le

nombre de véhicules hydrogène est aussi un moyen de réduire la puissance additionnelle qui serait

demandée au réseau si les véhicules à batterie seule se généralisaient.

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Les capacités de stockage de l’hydrogène permettent en effet de pallier en partie la variabilité des

énergies renouvelables, comme déjà énoncé. En termes d’impact sur le réseau, cela permet de

compenser le fait que les véhicules hydrogène consomment plus d’énergie primaire que leurs

homologues à batterie46.

La flexibilité d’installation des stations de recharge hydrogène limite par ailleurs les besoins

d’investissements dans le réseau électrique. D’ici à ce que la consommation d’hydrogène permette de

rentabiliser rapidement des électrolyseurs installés sur site (d’ici à 2030 si un Plan hydrogène est mis

en œuvre), ces derniers peuvent en effet être prioritairement installés à proximité des lignes à haute et

très haute tension. Le transport de l’hydrogène vers les stations se fait ensuite par camions (à

hydrogène à compter de 2020, dans certaines régions), comme c’est le cas aujourd’hui…. et de façon

comparable à ce qui se pratique pour les véhicules essence et diesel.

Bien entendu, le développement massif de l’électromobilité, la complémentarité batterie/hydrogène, la

rentabilité des installations de production d’EnR via l’hydrogène, la réduction des investissements

réseaux… il ne s’agit « que » de convictions. Elles seront toujours confrontées à des études

prospectives variées, qui insistent sur le fait que les batteries de nouvelle génération sont prêtes à

répondre à toutes les contraintes, et/ou que le Smart Grid rend inutile tout investissement

supplémentaire dans le réseau par exemple. Mais ces convictions s’appuient sur des signaux forts, déjà

concrétisés, parfois, sur le terrain (via les projets des territoires notamment). Surtout, elles ne concluent

pas que la mobilité hydrogène est la solution unique et optimale à tous les enjeux identifiés (qualité de

l’air, décarbonation et transition énergétique) – mais simplement qu’elle peut répondre à tous à la fois.

Existe-t-il beaucoup d’autres réponses capables de parvenir à cette conclusion ? Si la réponse est

« non », alors l’urgence d’agir, pour les pouvoirs publics, n’en est que plus évidente.

46 Aujourd’hui, pour un même nombre de kilomètres, la quantité d’électricité (énergie primaire) nécessaire pour alimenter un véhicule est environ

deux fois plus élevée lorsqu’il fonctionne à hydrogène que lorsqu’il utilise uniquement une batterie - du fait des rendements des électrolyseurs et

des piles à hydrogène.

Coût des infrastructures : décryptage technique

Si le coût d'une petite station hydrogène est environ quatre fois supérieur à celui d'une station de

recharge rapide de type "Superchargeur", elle distribue techniquement quatre fois plus d’énergie. Le

coût d'investissement de l'infrastructure pour un même nombre de véhicules est donc équivalent avec

les deux technologies.

Le bilan économique pourrait même être plus favorable aux stations hydrogène si l’on considère que

l’électricité est moins chère que l’hydrogène - l’amortissement de l’investissement est alors plus

difficile pour les Superchargeurs (moins de marge au kWh). D’autant que le taux d'utilisation d'une

station hydrogène sera équivalent à celui d’une station d’essence, alors que le taux d’usage des

Superchargeurs est en moyenne plus faible.

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Hydrogène coproduit par l’industrie

chimique : un potentiel à exploiter

Si l’hydrogène peut être produit à partir d’énergies

renouvelables, environ 50 000 tonnes par an (de quoi

alimenter 250.000 véhicules qui font 20.000km/an)

peuvent aussi être coproduites… par l’industrie

chimique. Cet hydrogène, aujourd’hui, est peu ou pas

valorisés (il est utilisé en cogénération locale ou rejeté

dans l’atmosphère). Mais le projet VhycTOR, soutenu

par la Bourgogne Franche-Comté, vise à démontrer

que l’on peut y remédier. Son enjeu ? Purifier et

comprimer l’hydrogène coproduit pour qu’il soit

compatible avec un usage en mobilité. Un territoire

allant de Beaune à Besançon en passant par Dijon et

Lons-le Saunier devrait être ainsi couvert en points de

distribution d’hydrogène dans les prochains mois, et

alimenté par plus de 10.000 tonnes d’hydrogène

coproduit par an (le site d’Inovyn du Grand Dole étant

le plus gros producteur en France). Principal intérêt :

un coût environnemental marginal nul ou très réduit,

l’hydrogène étant coproduit localement.

La mobilité hydrogène française prête au

déploiement

La France possède de solides atouts pour prendre une place de leader sur le marché de la mobilité de

demain. Elle pourrait néanmoins perdre la course si la nécessaire impulsion politique n’était pas

donnée.

Profil énergétique, filière en ordre de marche : deux atouts

clefs français

La France possède trois avantages majeurs pour peser sur le marché mondial de la mobilité de demain.

Le premier est une production électrique de qualité et décarbonée – le pays est classé 9ème mondial sur

le sujet47 - et abondante. Cette richesse est à ce jour quasiment inexploitée en matière de mobilité -

97% des transports dépendent aujourd’hui d’un pétrole importé. Mais elle ne demande qu’à l’être.

Deuxième atout, la filière hydrogène

française, qui regroupe tous les acteurs de

la chaîne de valeur (cf. liste complète en

annexe, et membres de Mobilité Hydrogène

France dans le tableau ci-dessous), est

prête à répondre aux défis posés, car elle

est déjà opérationnelle : non seulement

elle produit des véhicules de tous types

qui ont largement dépassé le stade de

prototypes (voitures, bus, bateaux, vélos

etc.) mais elle maîtrise aussi les projets de

déploiement. Ses membres ont en effet

défini une approche par « cluster » qui

minimise les investissements initiaux et

résout le dilemme de la « poule et de

l’œuf » (pas de véhicules sans stations/pas

de stations sans véhicules) : les stations

sont installées uniquement là où le

potentiel de véhicules (flottes captives) est

47 La France est le plus performant en Europe continentale, devant l’Allemagne et le Royaume-Uni et 9e au classement mondial, d’après Institut

Choiseul et KPMG. Ce classement prend en compte la qualité du mix énergétique, l’accès et la disponibilité en matière d’électricité et l’empreinte

environnementale. La production électrique est majoritairement faite en France. http://choiseul.info/wp-content/uploads/2016/02/Choiseul-

Energy-Index-2016.pdf

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démontré, l’accent est mis sur les véhicules utilitaires (les professionnels de la route étant souvent de

grands rouleurs, de plus en plus contraints dans les centres-villes) et les garagistes formés à la

maintenance. L’intérêt de cette approche est triple : elle permet de commencer le déploiement sans

attendre que le pays soit totalement maillé en stations de recharge, elle assure la rentabilité rapide de

la station en y attachant des flottes et elle maximise les bénéfices en termes de qualité de l’air. Les

premiers clusters sont ainsi déjà opérationnels dans l’Ouest (St-Lo, Nantes), en Auvergne-Rhône-Alpes

(Lyon, Grenoble) et à Paris par exemple.

Types d’activités Entités membres de Mobilité Hydrogène France Energie – Electricité/gaz/renouvelables

Air Liquide, CNR, EDF, ENGIE, Linde

Equimentiers (électrolyseurs, stations de recharge, équipement automobile)

AREVA H2Gen, Atawey, Greenerity, GreenGT, ITM Power, McPhy,

Michelin, PRAGMA Industries

Constructeurs – Ateliers techniques

PFA, Safra, Symbio, Toyota

Opérateurs de transport STEP

R&D CEA, IFPEN

Travaux publics/environnement

SERFIM

Associations AFHYPAC, PHyRENEES

Banques d’investissement Natureo Finance

Conseil Avenhyr Conseil, Seiya Conseil

Grande distribution Carrefour

Pôles de compétitivité LUTB Transport and Mobility Systems, Tenerrdis, Véhicule du Futur

Dernier atout enfin : la France possède une solide industrie automobile prête à investir dans

l’hydrogène, comme le font déjà Faurecia, Michelin et Plastic Omnium notamment. Il ne lui manque

plus qu’une réassurance sur les volumes potentiels de véhicules écoulés pour accélérer.

Et maintenant ? La nécessaire impulsion des pouvoirs

publics

L’enjeu aujourd’hui est clair : après les premiers déploiements, il s’agit d’atteindre rapidement la taille

critique de marché (50 000 véhicules par an et par constructeur). Pour que les véhicules hydrogène ou

batterie/hydrogène parviennent en effet à un prix de marché équivalent à celui de leurs homologues

thermiques, les niveaux de production doivent en effet être équivalents, tout comme la qualité de

service (stations de recharge et maintenance). Même raisonnement côté énergéticiens : seule une

demande importante en hydrogène leur assurera une rentabilité sur des investissements

d’électrolyseurs et sur les stations hydrogène, qu’ils ne savent pas amortir aujourd’hui.

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Décider et mettre en œuvre les mesures qui permettraient d’atteindre cette taille critique de marché

n’est pas simple. Cela suppose en effet que les pouvoirs publics adoptent une vision de la mobilité qui

ne soit plus en silo, mais intégrée à la mise en œuvre de la transition énergétique. Cela nécessite aussi

une prise de conscience des atouts à ce jour inexploités du pays (électricité abondante et pas chère

notamment), du potentiel industriel et humain existant en France pour y relever ces défis, et des

avancées déjà opérées dans d’autres pays (voir encadré ci-dessus). Enfin, cela suppose que les

autorités, dans l’esprit et la continuité de l’article 121 de la Loi de Transition Energétique pour la

Croissance Verte, réunissent l’ensemble des acteurs de l’écosystème (constructeurs, énergéticiens,

fabricants de stations, équipementiers etc.) et les invitent à bâtir ensemble une feuille de route claire,

avec des objectifs précis en matière de nombre de stations, de véhicules, et un calendrier… soit un Plan

Hydrogène pour permettre une taille critique de marché.

Ce « Plan Hydrogène » comprendra certainement des ajustements règlementaires48 et la mise en place

de financements – un « Fonds Mobilités » sur le modèle du « Fonds Chaleur »49 de l’ADEME à

destination des constructeurs d’infrastructures d’hydrogène (stations de recharge, électrolyseurs…)

permettrait en effet une ouverture du marché et assurerait une rentabilité en attendant que le nombre

de véhicules soit suffisant pour compenser les investissements initiaux et couvrir les risques financiers

48 Le cadre réglementaire européen est adapté pour le développement des véhicules à hydrogène mais les mesures pour un déploiement à grande

échelle ne sont pas optimales. En l’état, un règlement européen datant de 2009 établit des normes européennes pour l’homologation des

véhicules à hydrogène. Le règlement permet aussi de promouvoir les voitures à hydrogène dans les villes européennes et de protéger leur

environnement. Les stations hydrogène quant à elles ne sont pas encadrée par un texte clair, qui faciliterait leur déploiement tout en garantissant

un niveau de sécurité optimal. 49 Le Fonds chaleur a pour but de soutenir les réalisations allant dans le sens des objectifs de réductions de CO2 dans le domaine de la production

de chaleur. Entre 2009 et 2013, il a ainsi été doté de 1.12 milliard d’euros pour 3000 réalisations

Véhicules hydrogène : les constructeurs asiatiques prêts à

s’imposer sur les marchés, les allemands en challengers

Les constructeurs asiatiques sont incontestablement les plus avancés en matière de mobilité

hydrogène. Dès 2014 Toyota a ainsi lancé la Mirai au Japon – une berline à pile à hydrogène –

sachant que cette initiative s’inscrit dans un plan plus large de développement de la mobilité

propre, avec une large gamme de véhicules non polluants. Honda, autre constructeur japonais, a

commercialisé dès 2008 un premier véhicule hydrogène : le FCX Clarity, suivi en 2016 par la Clarity

Fuel Cell. Enfin, le coréen Hyundai a été le premier constructeur à proposer un véhicule hydrogène

de série, le ix35 ou « fuel cell Tucson », commercialisé en France depuis le printemps 2015. Il est

déjà utilisé par la société de taxi parisienne STEP et le Conseil départemental de la Manche.

Les constructeurs allemands, eux annoncent des véhicules dans les mois et années à venir :

Daimler - Mercedes-Benz, qui continue à court terme à se concentrer sur les véhicules électriques

batterie, devrait présenter son SUV à hydrogène à l’occasion d’un prochain salon.

BMW, partenaire de Toyota et membre du consortium allemand CEP, a présenté en juillet 2015

deux concept cars à hydrogène, la Série 5 GT et l’i8, pour une commercialisation en 2020. General

Motors enfin a construit 12 modèles différents de véhicules hydrogène entre 1998 et 2009, des

concepts-car mais également des véhicules testés en plusieurs centaines d’exemplaires comme le

véhicule particulier Equinox (Opel Hydrogen4) développé avec Opel. L’américain pourrait

commercialiser un modèle développé avec Honda en 2020. Audi enfin a annoncé en 2016 le

lancement du H-tron Quattro Concept

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en garantissant leur rentabilité minimum. Un volet de soutien aux acquéreurs de véhicules à

hydrogène sera aussi nécessaire.

Mais ce qui fera la compétitivité de la France sur les marchés de la mobilité de demain est avant tout

un accord de l’ensemble de l’écosystème sur l’objectif et le calendrier. L’Etat de Californie, avec toutes

ses particularités – et notamment le fait qu’il ne produit pas de véhicules diesel – a réussi, dès 2008, à

imposer aux acteurs la définition d’une feuille de route qui fait aujourd’hui ses preuves. S’il ne s’agit

pas de copier ce qui est parfois présenté comme un modèle, alors il est sans doute nécessaire… de

faire mieux.

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Annexe – Liste des membres de l’AFHYPAC