10
Hypertension artérielle pulmonaire Pulmonary arterial hypertension D. Montani, X. Jaïs, A.-M. Hamid, O. Sitbon * Service de pneumologie et réanimation respiratoire, Centre des maladies vasculaires pulmonaires, UPRES EA2705, Hôpital Antoine-Béclère, Université Paris-Sud, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, 92140 Clamart, France MOTS CLÉS Endothéline ; Hypertension artérielle pulmonaire ; Prostacycline KEYWORDS Endothelin; Pulmonary arterial hypertension; Prostacyclin Résumé L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est une maladie rare définie par l’augmentation des résistances artérielles pulmonaires évoluant vers l’insuffisance car- diaque droite en l’absence de traitement spécifique. Cette maladie peut survenir de façon sporadique (HTAP idiopathique ou « primitive »), dans un contexte familial (HTAP familiale) ou encore compliquer l’évolution de certaines situations (HTAP associée à une connectivite, une cardiopathie congénitale, une infection par le virus de l’immunodéfi- cience humaine, une hypertension portale, une prise d’anorexigènes...). L’incidence de l’HTAP idiopathique estimée à deux cas par million d’habitants et par an est probable- ment sous-estimée du fait de la faible spécificité des signes cliniques dominés par la dyspnée d’effort. L’échocardiographie couplée au doppler permet son dépistage. Le cathétérisme cardiaque droit confirme l’élévation de la pression artérielle pulmonaire moyenne (> 25 mmHg) associée à une pression artérielle pulmonaire d’occlusion normale (< 15 mmHg). Les récentes avancées thérapeutiques (dérivés de la prostacycline et antagonistes des récepteurs de l’endothéline) ont amélioré le pronostic de cette maladie orpheline. Les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5 sont prometteurs. La trans- plantation pulmonaire est aujourd’hui réservée aux patients résistant au traitement médical optimal. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Pulmonary arterial hypertension (PAH) is a rare condition characterized by an elevated pulmonary arterial resistance that, if untreated, leads to right heart failure. PAH can be sporadic (idiopathic PAH, or primary pulmonary hypertension), familial or related to other conditions including connective tissue diseases, congenital heart disease, human immunodeficiency virus infection, portal hypertension, appetite suppressant exposure .... The incidence of idiopathic PAH has been estimated to be 2 cases per million per year, but this figure may be underestimated due to the lack of specificity of PAH clinical signs (mostly the dyspnea). Echocardiography is the investigation of choice for non invasive screening. Measurement of haemodynamic parameters during right-heart catheterization is mandatory to establish definite diagnosis (mean pulmonary artery pressure > 25 mmHg with a pulmonary artery wedge pressure < 15 mmHg). Recent advances in the manage- ment of PAH including prostacyclin derivatives and endothelin receptor antagonists have improved markedly the patients’ prognosis. Novel treatments such as type 5 phosphodies * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (O. Sitbon). EMC-Médecine 2 (2005) 161–170 http://france.elsevier.com/direct/EMCMED/ 1762-4193/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emcmed.2005.01.002

Hypertension artérielle pulmonaire

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Hypertension artérielle pulmonaire

Hypertension artérielle pulmonaire

Pulmonary arterial hypertensionD. Montani, X. Jaïs, A.-M. Hamid, O. Sitbon *Service de pneumologie et réanimation respiratoire, Centre des maladies vasculaires pulmonaires,UPRES EA2705, Hôpital Antoine-Béclère, Université Paris-Sud, 157, rue de la Porte-de-Trivaux,92140 Clamart, France

MOTS CLÉSEndothéline ;Hypertensionartérielle pulmonaire ;Prostacycline

KEYWORDSEndothelin;Pulmonary arterialhypertension;Prostacyclin

Résumé L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est une maladie rare définie parl’augmentation des résistances artérielles pulmonaires évoluant vers l’insuffisance car-diaque droite en l’absence de traitement spécifique. Cette maladie peut survenir defaçon sporadique (HTAP idiopathique ou « primitive »), dans un contexte familial (HTAPfamiliale) ou encore compliquer l’évolution de certaines situations (HTAP associée à uneconnectivite, une cardiopathie congénitale, une infection par le virus de l’immunodéfi-cience humaine, une hypertension portale, une prise d’anorexigènes...). L’incidence del’HTAP idiopathique estimée à deux cas par million d’habitants et par an est probable-ment sous-estimée du fait de la faible spécificité des signes cliniques dominés par ladyspnée d’effort. L’échocardiographie couplée au doppler permet son dépistage. Lecathétérisme cardiaque droit confirme l’élévation de la pression artérielle pulmonairemoyenne (> 25 mmHg) associée à une pression artérielle pulmonaire d’occlusion normale(< 15 mmHg). Les récentes avancées thérapeutiques (dérivés de la prostacycline etantagonistes des récepteurs de l’endothéline) ont amélioré le pronostic de cette maladieorpheline. Les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5 sont prometteurs. La trans-plantation pulmonaire est aujourd’hui réservée aux patients résistant au traitementmédical optimal.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract Pulmonary arterial hypertension (PAH) is a rare condition characterized by anelevated pulmonary arterial resistance that, if untreated, leads to right heart failure. PAHcan be sporadic (idiopathic PAH, or primary pulmonary hypertension), familial or relatedto other conditions including connective tissue diseases, congenital heart disease, humanimmunodeficiency virus infection, portal hypertension, appetite suppressant exposure.... The incidence of idiopathic PAH has been estimated to be 2 cases per million per year,but this figure may be underestimated due to the lack of specificity of PAH clinical signs(mostly the dyspnea). Echocardiography is the investigation of choice for non invasivescreening. Measurement of haemodynamic parameters during right-heart catheterizationis mandatory to establish definite diagnosis (mean pulmonary artery pressure > 25 mmHgwith a pulmonary artery wedge pressure < 15 mmHg). Recent advances in the manage-ment of PAH including prostacyclin derivatives and endothelin receptor antagonists haveimproved markedly the patients’ prognosis. Novel treatments such as type 5 phosphodies

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (O. Sitbon).

EMC-Médecine 2 (2005) 161–170

http://france.elsevier.com/direct/EMCMED/

1762-4193/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi: 10.1016/j.emcmed.2005.01.002

Page 2: Hypertension artérielle pulmonaire

terase inhibitors are promising in this setting. Lung transplantation is the last option forpatients deteriorating despite optimal medical treatment.© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Définition et classification

Le terme d’hypertension artérielle pulmonaire(HTAP) regroupe différentes maladies touchant lesartères pulmonaires de petit calibre entraînant uneaugmentation progressive des résistances artériel-les pulmonaires.1–4 L’échographie cardiaque avecdoppler pulsé permet le dépistage de l’HTAP, maisle diagnostic formel nécessite un cathétérisme car-diaque droit qui met en évidence une pressionartérielle pulmonaire moyenne supérieure à25 mmHg au repos (ou 30 mmHg à l’effort) sansélévation de la pression artérielle pulmonaire d’oc-clusion (PAPO) (< 15 mmHg ; élevée en cas decardiopathie gauche).1,2

La nouvelle classification définit l’HTAP idiopa-thique, anciennement HTAP « primitive », par lasurvenue de la maladie en l’absence de facteurs derisque classiques, tels que les connectivites, lescardiopathies congénitales, l’hypertension portale,l’infection par le virus de l’immunodéficience hu-maine (VIH) ou l’exposition à certains médica-ments, notamment certains anorexigènes3 (Ta-bleau 1). Cette nouvelle classification rapprocheles HTAP idiopathiques des HTAP associées à cesdiverses pathologies car toutes ces situations sontcaractérisées par une dysfonction endothéliale pul-monaire et des modifications histopathologiquessimilaires, justifiant d’une prise en charge cliniqueidentique.4 Par définition, les HTAP dites « secon-daires » à une cause bien identifiée pouvant béné-ficier d’un traitement spécifique comme l’HTAPobstructive du cœur pulmonaire chronique, l’hy-pertension pulmonaire postcapillaire de l’insuffi-sance cardiaque gauche ou l’hypertension pulmo-naire hypoxique des insuffisances respiratoireschroniques, n’appartiennent pas au groupe de ma-ladies définies par le terme d’HTAP.

Épidémiologie

L’HTAP est une maladie rare dont la prévalence etl’incidence sont difficiles à évaluer.1–4 De nom-breux cas d’HTAP ne sont pas diagnostiqués du faitdu peu de spécificité de la symptomatologie et dela difficulté pour confirmer le diagnostic. Néan-moins, l’échocardiographie a grandement facilitéle dépistage de la maladie en permettant une éva-luation non invasive de la pression artérielle pulmo-

naire. L’incidence annuelle de l’HTAP idiopathiqueest estimée à environ deux cas par million d’habi-tants, avec une nette prédominance féminine(1,7 femme pour un homme).1 La maladie est sou-vent diagnostiquée plusieurs mois après le débutdes symptômes, aboutissant à des diagnostics tar-difs à un stade évolué peut-être moins accessibleaux thérapeutiques actuelles. Le pic de fréquencede l’HTAP idiopathique se situe entre 20 et 40 ans,mais elle peut survenir à tout âge.1,2 L’HTAP sur-vient le plus souvent sous la forme de cas sporadi-ques, mais un contexte familial est retrouvé dansenviron 5 % des cas.2

La prévalence des HTAP associées semble plusimportante que celle de l’HTAP idiopathique etdirectement liée à l’incidence de la pathologiesous-jacente.3,4 Une HTAP complique ainsi environ10 % des sclérodermies systémiques, 0,5 % despatients séropositifs pour le VIH et entre 1 à 4 % despatients présentant une hypertension portale.3 En-fin, l’utilisation de certains anorexigènes (dérivéde la fenfluramine) a été l’origine de plusieurscentaines de cas d’HTAP dans les années qui ont

Tableau 1 Classification diagnostique des hypertensions ar-térielles pulmonaires (HTAP) (d’après les conclusions ducongrès mondial – Venise 2003).

1. HTAP « proliférantes »HTAP idiopathiqueHTAP familialeHTAP associée à• connectivites : sclérodermie ; autres connectivites• infection par le VIH• hypertension portale• anorexigènes et toxiques• cardiopathies congénitalesHTAP persistante du nouveau-néHTAP avec atteinte veineuse pulmonaire prédominante(maladie veino-occlusive)2. HTAP des cardiopathies gauchesAuriculaire ou ventriculaireValvulaire3. HTAP des maladies respiratoires chroniquesBPCOPneumopathies infiltrantes chroniquesApnées du sommeilAltitude4. HTAP « obstructives » liées à une maladie thromboem-bolique chronique (proximale ou distale)

VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; BPCO : bron-chopneumopathies chroniques obstructives.

162 D. Montani et al.

Page 3: Hypertension artérielle pulmonaire

suivi la prise de ces médicaments actuellementretirés du marché.3,4

Génétique

L’analyse des cas d’HTAP familiales a permis demettre en évidence l’existence de sauts de généra-tion et de « porteurs sains », suggérant un mode detransmission autosomique dominant avec une péné-trance variable de l’ordre de 10 à 20 %. Un gènecandidat pour l’HTAP familiale a été identifié sur lebras long du chromosome 2 correspondant à ungène codant pour un récepteur de la famille dutransforming growth factor bêta (TGFb) appelébone morphogenetic protein receptor, type II(BMPR2). Ce récepteur est impliqué dans la diffé-renciation, la prolifération et l’apoptose de nom-breux types cellulaires. Les mutations du gène sontà l’origine d’une diminution de l’expression de laprotéine BMPR2 favorisant une prolifération endo-théliale et musculaire lisse vasculaire pulmonaire.Plusieurs dizaines de mutations de BMPR2 ont étéidentifiées à ce jour.5 Ces mutations sont retrou-vées dans 60 % des cas d’HTAP familiales5 mais ellessont également présentes chez 20 à 30 % des HTAPapparemment sporadiques, ce qui pourrait suggé-rer que certaines HTAP sporadiques sont en fait lepremier cas identifié d’une forme familiale ignoréejusque-là. En revanche, aucune mutation du gènecodant pour BMPR2 n’a été identifiée dans les for-mes « associées » d’HTAP.Plus récemment, des HTAP survenant dans un

contexte de maladie de Rendu-Osler ont permis demontrer que des mutations de gènes codant pourd’autres récepteurs de la famille du TGFb (ALK1 etendogline) peuvent favoriser la survenue d’uneHTAP. Toutes ces constatations soulignent l’impor-tance de la voie de transduction du TGFb dansl’HTAP, mais expliquent aussi les difficultés actuel-les de mise en place d’un test de dépistage généti-que de routine.La pénétrance incomplète de la maladie est pro-

bablement liée à l’existence de phénomènes envi-ronnementaux favorisant l’apparition d’une HTAPchez des patients présentant une susceptibilité gé-nétique.6 De même, on a vu plus haut que les HTAPassociées à d’autres pathologies ne surviennent quechez une faible proportion de malades exposés àces facteurs de risque.3

En pratique, il est recommandé de proposer undépistage aux parents du premier degré d’un pa-tient atteint d’HTAP familiale. Ce dépistage associeun examen clinique, une radiographie de thorax, unélectrocardiogramme et une échographie cardia-que, répétés tous les 2 à 3 ans. Certains auteurs ont

proposé un dépistage présymptomatique par écho-cardiographie d’effort chez les membres de la fa-mille de sujets souffrant d’HTAP. Cependant, lapénétrance incomplète soulève le problème éthi-que du devenir psychologique de patients connais-sant leur statut de porteurs de la mutation et pourlesquels il n’existe aucun moyen de déterminer s’ilsvont développer la maladie.

Physiopathologie et anatomiepathologique

La vasoconstriction et l’obstruction artérielle pul-monaire sont les deux mécanismes principaux par-ticipant au développement de l’HTAP.4 La rupturede l’équilibre vasodilatation - vasoconstriction enfaveur d’une vasoconstriction inadaptée est carac-térisée par une production endothéliale pulmonaireréduite de monoxyde d’azote et de prostacycline(vasodilatateurs) et accrue d’endothéline-1 (vaso-constricteur).4 Cette vasoconstriction s’accompa-gne d’un remodelage vasculaire au niveau des artè-res pulmonaires de petit calibre à l’origine d’uneobstruction artérielle fixée entraînant une éléva-tion persistante des résistances artérielles pulmo-naires. Cette obstruction est aggravée par desthromboses in situ favorisées par la dysfonctionendothéliale et la diminution du flux sanguin dansles artères pulmonaires. D’autres phénomènes phy-siopathologiques sont possiblement impliqués dansla survenue et le développement de l’HTAP (ano-malies des canaux potassiques, polymorphisme dutransporteur de la sérotonine, infections virales àhuman herpes virus [HHV]8, rôle de l’inflamma-tion).Histologiquement, on observe classiquement une

artériopathie plexiforme caractéristique de l’HTAPassociant une hypertrophie de la média, une fibrosede l’intima, des lésions plexiformes et des throm-boses organisées et recanalisées.4 Ces constata-tions histologiques ne sont pas nécessaires au dia-gnostic et les biopsies pulmonaires doivent êtreévitées chez ces patients car elles ne modifient pasla prise en charge et sont à haut risque.

Manifestations cliniques

Il n’existe pas de signes cliniques spécifiques del’HTAP. Les manifestations cliniques ne traduisentque le retentissement de la maladie sur le cœurdroit (cœur pulmonaire chronique) ou les manifes-tations liées à la maladie sous-jacente (scléroder-mie, infection par le VIH, cirrhose...).

163Hypertension artérielle pulmonaire

Page 4: Hypertension artérielle pulmonaire

Symptômes

La dyspnée d’effort est le signe le plus souventretrouvé, présent chez plus de 95 % des patientssouffrant d’HTAP.1,2,4 L’apparition de cette dysp-née est en règle progressive et souvent négligée,expliquant le fréquent retard à la prise en charge(environ 2 ans entre le début des symptômes et lediagnostic d’HTAP). L’importance de la dyspnée estévaluée selon la classe fonctionnelle New YorkHeart Association (NYHA) modifiée (Tableau 2) per-mettant une évaluation simple et reproductible duretentissement de la maladie au cours du suivi. Laclassification NYHA est un élément pronostique ma-jeur, les patients en classe fonctionnelle III ou IVayant une survie très inférieure aux patients enclasse I ou II. La dyspnée s’accompagne fréquem-ment d’asthénie.La survenue de douleurs thoraciques, de lipothy-

mies ou de syncopes à l’effort constitue des critèresde gravité de la maladie, témoignant de l’inadap-tation du débit cardiaque.Des palpitations sont fréquentes à l’effort et

peuvent parfois révéler de véritables troubles durythme cardiaque, en particulier des arythmies parfibrillation auriculaire.Des hémoptysies, en règle minimes, peuvent sur-

venir ; elles nécessitent parfois la réalisation d’uneembolisation artérielle bronchique. Une dysphoniepeut être observée, témoignant d’une paralysierécurentielle gauche secondaire à la compressiondu nerf récurrent par le tronc de l’artère pulmo-naire gauche dilatée (syndrome d’Ortner).

Examen clinique

L’auscultation cardiaque retrouve un éclat de B2 aufoyer pulmonaire de manière quasi constante, unsouffle systolique d’insuffisance tricuspide dans60 % des cas, et plus rarement un souffle diastoli-que d’insuffisance pulmonaire. L’auscultation pul-monaire est classiquement normale et contrasteavec l’importance de la symptomatologie.Il est impératif de rechercher des signes d’insuf-

fisance ventriculaire droite. La turgescence jugu-laire, le reflux hépatojugulaire et les hépatalgiessurvenant préférentiellement à l’effort sont lessignes les plus fréquemment retrouvés. La présenced’œdèmes des membres inférieurs, d’une ascite oud’une anasarque souligne la sévérité de l’insuffi-sance cardiaque droite.Une cyanose des extrémités est parfois retrou-

vée, en particulier en cas d’hypoxie sévère. L’exa-men et l’interrogatoire doivent rechercher unsyndrome de Raynaud, celui-ci étant plus fréquem-ment observé dans les HTAP liées aux connectivi-tes. La présence d’un syndrome de Raynaud doitfaire rechercher en particulier une sclérodermiesystémique.

Explorations

La confirmation du diagnostic d’HTAP nécessite lamesure de la pression artérielle pulmonairemoyenne lors d’un cathétérisme cardiaque droit.4

Certains examens peuvent cependant orienter versle diagnostic d’HTAP, évaluer sa gravité ou recher-cher une pathologie associée.

Examens orientant vers le diagnosticd’hypertension artérielle pulmonaire

La radiographie de thorax (Fig. 1) est souvent anor-male avec une hypertrophie du tronc et des bran-ches proximales des artères pulmonaires et uneaugmentation de l’index cardiothoracique. Iln’existe pas classiquement de syndrome intersti-tiel, sa présence devant faire évoquer certainesformes d’HTAP (HTAP postcapillaire, sclérodermie,maladie veino-occlusive). Elle permet aussi de re-chercher des anomalies parenchymateuses témoi-gnant d’une maladie respiratoire associée.L’électrocardiogramme (Fig. 2) retrouve classi-

quement des signes d’hypertrophie droite à l’étageauriculaire (onde P ample en DII-DIII et bifide en V1)et ventriculaire (grande onde R en V1, onde R < S enV6, dextrorotation avec aspect S1Q3, troubles de larepolarisation dans les dérivations droites). Il peut

Tableau 2 Nomenclature et classification des hypertensionspulmonaires. Classification fonctionnellea (Organisationmondiale de la santé, 1998).

A. Classe I Patients souffrant d’hypertension pulmonairemais sans limitation de l’activité physique. Les activitésphysiques habituelles n’induisent pas de dyspnée ou de fati-gue excessive, ni de douleurs thoraciques ou de sensationslipothymiques.B. Classe II Patients souffrant d’hypertension pulmonaire,légèrement limités dans leur activité physique. Ces patientsne sont pas gênés au repos. Les activités physiques habi-tuelles induisent une dyspnée ou une fatigue excessive, desdouleurs thoraciques ou des sensations lipothymiques.C. Classe III Patients souffrant d’hypertension pulmonaire,très limités dans leur activité physique. Ces patients ne sontpas gênés au repos. Les activités physiques même légèresinduisent une dyspnée ou une fatigue excessive, des dou-leurs thoraciques ou des sensations lipothymiques.D. Classe IV Patients souffrant d’hypertension pulmonaire,incapables de mener quelque activité physique que ce soitsans ressentir de symptômes. Ces patients ont des signesd’insuffisance cardiaque droite. Une dyspnée et/ou unefatigue peut être présente même au repos. Le handicap estaugmenté par n’importe quelle activité physique.a Version modifiée de la classification New York Heart Asso-ciation (NYHA).

164 D. Montani et al.

Page 5: Hypertension artérielle pulmonaire

aussi mettre en évidence des troubles de conduc-tion, en particulier un bloc de branche droit com-plet ou des troubles du rythme prédominant àl’étage auriculaire (fibrillation, flutter, tachysysto-lie auriculaire).Les épreuves fonctionnelles respiratoires retrou-

vent des volumes et des débits le plus souventnormaux. Néanmoins, la diffusion de l’oxyde decarbone rapportée au volume alvéolaire (DLCO/VA)est quasiment toujours diminuée traduisant la di-minution de la diffusion alvéolocapillaire secon-daire à l’atteinte vasculaire pulmonaire.

Examens confirmant le diagnosticd’hypertension artérielle pulmonaireet évaluant son retentissement

L’échographie cardiaque transthoracique coupléeau doppler constitue l’examen de référence pour ledépistage de l’HTAP. Il est en effet possible d’esti-mer la pression artérielle pulmonaire systolique parla mesure de la vitesse du flux d’insuffisance tricus-pide. Lorsque les conditions de réalisation sontoptimales, elle permet d’estimer la pression arté-rielle pulmonaire diastolique et le débit cardiaque,mais ces conditions sont rarement rassemblées enpratique courante. L’échographie retrouve en gé-néral une dilatation des cavités droites associée àun mouvement paradoxal du septum interventricu-laire. La présence d’un épanchement péricardiqueconstitue un élément de mauvais pronostic. Cetexamen plus ou moins associé à une échographiecardiaque transœsophagienne permet de recher-cher une cardiopathie congénitale ou un shuntdroite-gauche par ouverture du foramen ovale. Latechnique peut être améliorée par l’injection demicrobulles à la recherche d’un passage précoce ducontraste dans les cavités gauches, témoignant dela présence d’un shunt vrai.Le cathétérisme droit (Fig. 3) est le seul examen

permettant d’affirmer le diagnostic d’HTAP par lamesure de la pression artérielle pulmonaire supé-rieure à 25 mmHg au repos ou supérieure à30 mmHg à l’effort.1,2,4 Lors de ce cathétérismedroit, il est réalisé une mesure de la PAPO, reflet dela pression capillaire. Lorsque celle-ci est infé-rieure à 15 mmHg en présence d’une élévation de lapression artérielle pulmonaire (gradient PAPd-PAPO > 10 mmHg), cela signe la présence d’une

Figure 1 Radiographie de thorax : hypertrophie du tronc et desbranches proximales des artères pulmonaires associée à uneaugmentation de l’index cardiothoracique.

Figure 2 Électrocardiogramme d’un patient présentant une hypertension artérielle pulmonaire sévère, mettant en évidence un blocde branche droit incomplet, une dextrorotation, une onde P pulmonaire et des troubles de la repolarisation diffus.

165Hypertension artérielle pulmonaire

Page 6: Hypertension artérielle pulmonaire

HTAP précapillaire. Cette mesure peut être affinéepar la perfusion d’un soluté de remplissage permet-tant de démasquer une dysfonction gauche diasto-lique isolée. Cet examen permet aussi d’évaluer lagravité de l’HTAP par la mesure de différents para-mètres (pression auriculaire droite, index cardia-que, résistances vasculaires pulmonaires et satura-tion en oxygène du sang veineux mêlé). Lecathétérisme droit permet d’analyser la réponseaiguë à un test de vasodilatation par inhalation demonoxyde d’azote, les résultats de ce test permet-tant de déterminer l’efficacité potentielle des inhi-biteurs calciques.7

Le test de marche de 6 minutes est un moyensimple et facilement reproductible d’évaluer lehandicap fonctionnel.8 Ce test est associé à lamesure continue de l’oxymétrie et l’évaluation parle patient de sa dyspnée (échelle de Borg). Lesépreuves d’exercice (mesure de la consommationmaximale d’O2) doivent être évitées chez les pa-tients les plus sévères (classe fonctionnelle III ouIV), du fait du risque de survenue d’accidents gra-ves (syncopes, mort subite). Elles pourraient avoirun intérêt chez les patients en classe fonctionnelleI ou II afin de quantifier précisément le handicapfonctionnel.

Bilan étiologique

Les épreuves fonctionnelles respiratoires et les gazdu sang artériel dépistent une éventuelle maladierespiratoire associée et évaluent sa gravité. Laréalisation de gaz du sang en oxygène pur permet

de mettre en évidence une hypoxie par shunt vrai.Cette hypoxie peut être secondaire à une réouver-ture du foramen ovale ou à une inversion de shuntau niveau d’une malformation cardiaque faisantsuite à une élévation des pressions auriculairesdroites.La tomodensitométrie pulmonaire associée à la

réalisation d’un angioscanner et de coupes millimé-triques recherche des éléments évoquant un cœurpulmonaire chronique postembolique ou une mala-die veino-occlusive pulmonaire (épaississement dessepta, nodules flous, adénopathies médiastinales).Dans l’HTAP idiopathique ou associée, l’angioscan-ner peut objectiver des thrombus dans les artèrespulmonaires, secondaires au ralentissement du fluxsanguin (« thrombus d’alluvionnement »). Elle per-met aussi de dépister une maladie respiratoire àl’origine d’une HTAP hypoxique (emphysème, fi-brose pulmonaire...).La scintigraphie pulmonaire de ventilation et de

perfusion est indispensable pour rechercher deséléments en faveur d’une maladie thromboemboli-que. Par ailleurs, l’existence d’un passage extra-pulmonaire du marqueur permet de mettre en évi-dence un shunt vrai. En cas de doute sur un cœurpulmonaire chronique postembolique, l’angiogra-phie pulmonaire reste indispensable.Parfois, un enregistrement polysomnographique

peut s’avérer utile en cas de doute sur l’existenced’une HTAP secondaire à un syndrome d’apnéesobstructives du sommeil.L’échographie abdominale avec doppler du tronc

porte recherche des signes pouvant faire évoquer

Figure 3 Cathétérisme cardiaque droit retrouvant une hypertension artérielle pulmonaire sévère avec une pression artériellepulmonaire d’occlusion (PAPO) normale et une augmentation du gradient PAP diastolique – PAPO. Les résistances vasculairespulmonaires (RVP) sont calculées selon la formule : RVP = (PAPn - PAPo)/débit cardiaque.

166 D. Montani et al.

Page 7: Hypertension artérielle pulmonaire

une hypertension portopulmonaire (cirrhose, hy-pertension portale).

En cas de doute sur une dysfonction cardiaquegauche associée, il est possible de mesurer la frac-tion d’éjection isotopique, voire de pratiquer uncathétérisme cardiaque gauche avec coronarogra-phie.

Du point de vue biologique, il est nécessaire deréaliser des sérologies virales (VIH et virus deshépatites B et C), l’HTAP pouvant révéler ces infec-tions jusqu’alors asymptomatiques. Les marqueursd’auto-immunité et la recherche d’anomalies de lacoagulation sont recherchés de manière systémati-que. Chez 10 % des patients, il est retrouvé desfacteurs antinucléaires positifs ou des anticorpsanticardiolipines sans que leur présence représenteun facteur pronostique de l’évolution de la mala-die. Une thrombopénie ainsi que des perturbationsdu bilan hépatique à type de cholestase ou decytolyse sont fréquentes et en règle générale se-condaires à une décompensation cardiaque droite.

Traitement

Le traitement de l’HTAP a pour objectif de s’oppo-ser aux effets délétères de la vasoconstriction, del’obstruction vasculaire pulmonaire par remode-lage et thrombose et de l’insuffisance cardiaquedroite. Devant l’évolution rapide de la prise encharge de ces malades, un algorithme décisionnel aété établi à partir des données actuelles de lalittérature9 (Fig. 4).

Traitement « conventionnel »

La limitation des efforts est une mesure essentielleà expliquer au patient souffrant d’HTAP. Les effortsprovoquant un essoufflement sont contre-indiqués,la dyspnée étant le témoin de l’inadéquation entrele débit cardiaque et les besoins en oxygène. Demême, les situations pouvant majorer l’hypoxiedoivent être contre-indiquées, en particulier l’alti-tude (montagne, cabine d’avion non pressurisée).Les diurétiques en association avec un régime

sans sel permettent de diminuer les signes de sur-

Figure 4 Algorithme pour le traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). 1. Cet algorithme est accepté pour lespatients en classe fonctionnelle III ou IV de la New York Heart Association (NYHA), mais il existe peu de données pour les patients enclasse fonctionnelle I ou II. 2. Les substances utilisées pour tester la vasoréactivité sont des agents de courte demi–vie comme laprostacycline intraveineuse ou le NO inhalé. Les traitements au long cours par les inhibiteurs calciques doivent être proposésseulement aux patients considérés comme « répondeurs » au test de vasodilatation. 3. Certains patients traités par les inhibiteurscalciques ont un bénéfice clinique persistant. Ces patients sont en classe fonctionnelle I ou II de la NYHA avec des paramètreshémodynamiques proches de la normale après 1 an de traitement. 4. La plupart des experts recommandent de traiter les patients enclasse fonctionnelle IV de la NYHA par l’époprosténol en intraveineux. En dehors de cette situation particulière, le traitement depremière intention peut inclure le bosentan par voie orale ou un analogue de la prostacycline. 5. La transplantation pulmonairereprésente une alternative pour les patients encore en classe fonctionnelle III ou IV de la NYHA après 3 mois de traitement parépoprosténol. L’atrioseptostomie représente une alternative pour des patients ayant une HTAP sévère s’aggravant malgré untraitement médical maximal.

167Hypertension artérielle pulmonaire

Page 8: Hypertension artérielle pulmonaire

charge ventriculaire droite et d’améliorer la symp-tomatologie. La posologie doit être adaptée à laclinique (poids de base, présence d’œdème desmembres inférieurs) mais peut être aussi ajustée enfonction des pressions de remplissage mesurées lorsdes bilans hémodynamiques. Un traitement digita-lique est parfois associé, en particulier en casd’arythmie complète par fibrillation auriculairepersistante.Le traitement anticoagulant permet de diminuer

la mortalité des patients souffrant d’HTAP. Il doitdonc être proposé de manière systématiquelorsqu’il n’existe pas de contre-indication au trai-tement. L’efficacité du traitement anticoagulantobservée dans l’HTAP est probablement liée à laréduction des phénomènes de thrombose in situ. Letraitement est constitué d’antivitamines K, avec unobjectif d’international normalized ratio (INR) en-tre 1,5 et 2,5.1 Il est nécessaire de réaliser uncontrôle régulier du niveau d’anticoagulation, l’in-suffisance ventriculaire droite pouvant majorer leseffets des antivitamines K.L’oxygénothérapie est prescrite lorsqu’il existe

une hypoxie (PaO2 < 60 mmHg), l’objectif étantprincipalement symptomatique. L’intérêt d’uneoxygénothérapie en cas de shunt vrai est discuta-ble.Les anesthésies générales ne sont réalisées qu’en

cas d’absolue nécessité, autant que possible avecl’aide d’une équipe spécialisée. La grossesse est àéviter du fait d’un risque considérable d’aggrava-tion hémodynamique pouvant conduire au décès. Ilest donc indispensable d’expliquer l’importanced’une contraception efficace aux patientes présen-tant une HTAP.9

Les vaccinations antigrippale et antipneumococ-cique sont recommandées.

Traitements spécifiques

Les inhibiteurs calciques peuvent s’opposer à lavasoconstriction, mais leurs effets sur le remode-lage vasculaire pulmonaire sont incertains. Chezcertains patients, la vasoconstriction prédominelargement sur les phénomènes de remodelage vas-culaire, et les inhibiteurs calciques peuvent appor-ter un bénéfice clinique. Ces patients « répon-deurs » sont identifiés par un test de vasodilatationaiguë réalisé au cours du cathétérisme cardiaquedroit.7 On définit comme « répondeurs » les pa-tients présentant une baisse de la pression arté-rielle pulmonaire moyenne d’au moins 10 mmHgjusqu’à un niveau inférieur à 40 mmHg avec undébit cardiaque normal ou augmenté au cours del’inhalation de monoxyde d’azote. Malheureuse-ment, ces patients ne représentent qu’environ 10 %

de l’ensemble des patients présentant une HTAPidiopathique.9 Chez eux, le diltiazem, la nifédipineou l’amlodipine permettront une réponse cliniquetrès satisfaisante.La prostacycline administrée par voie intravei-

neuse continue (époprosténol, Flolan®) est un puis-sant vasodilatateur et antiproliférant.9,10 Du faitd’une très courte demi-vie, l’époprosténol ne peutêtre administré que par voie intraveineuse conti-nue à l’aide d’une pompe connectée à un cathétertunnellisé sous-clavier.9,10 Chez les patients enclasse fonctionnelle III ou IV de la NYHA, le traite-ment par prostacycline intraveineuse a prouvé qu’ilapportait une amélioration significative des para-mètres fonctionnels (test de marche) et hémodyna-miques ainsi qu’une réduction de la mortalité.10

L’amélioration sous prostacycline intraveineusen’est pas évaluée par la réponse hémodynamiqueau test de vasodilatation aiguë mais par la réponseclinique et hémodynamique après 3 mois de traite-ment.10 Après ces 3 mois de traitement, lesmeilleurs éléments pronostiques sont la classefonctionnelle (bénéfice marqué pour les patientspassés en classe I ou II), le test de marche de6 minutes (supérieur à 380 m) et la réduction d’aumoins 30 % des résistances pulmonaires totales.10

Les douleurs des mâchoires, les céphalées, lesflushes, la diarrhée ou les nausées constituent leseffets secondaires habituels du traitement. Lescomplications du traitement sont principalementliées au mode d’administration, et sont dominéespar les infections ou les thromboses de cathéterscentraux. L’arrêt brutal du traitement après rup-ture du cathéter ou dysfonction de la pompe peutentraîner une aggravation hémodynamique sévère(syncope, insuffisance ventriculaire droite) justi-fiant la reprise immédiate du traitement par voiepériphérique ou le changement de pompe. À noterque des œdèmes pulmonaires sévères ont été rap-portés chez des patients présentant une maladieveino-occlusive pulmonaire, probablement en ré-ponse à une augmentation du débit cardiaque enprésence d’un obstacle postcapillaire en grandepartie fixé.9 Le Flolan® est approuvé dans le traite-ment de l’HTAP idiopathique en classe fonction-nelle III ou IV de la NYHA.Des analogues de la prostacycline ont été déve-

loppés dans le but de simplifier le traitement parprostacycline. Ils existent sous forme orale (béra-prost, Beradrak®), sous-cutanée (tréprostinil, Re-modulin®) et inhalée (iloprost, Ventavis®). L’effet àcourt terme de ces traitements est relativementbien évalué, mais les données à long terme sontmanquantes. À ce jour, l’iloprost et le tréprostinilont obtenu une autorisation de mise sur le marché(AMM) européenne dans l’indication suivante :

168 D. Montani et al.

Page 9: Hypertension artérielle pulmonaire

HTAP idiopathique en classe fonctionnelle III de laNYHA.9 Le tréprostinil est approuvé aux États-Unisdans l’HTAP en classe fonctionnelle II à IV. Ledéveloppement du béraprost a été interrompu dufait de résultats contradictoires.Les antagonistes des récepteurs de l’endothéline

représentent une nouvelle classe thérapeutique del’HTAP.11 Le bosentan (Tracleer®) est une formeorale d’antagoniste des récepteurs A et B de l’en-dothéline. Les études ont mis en évidence uneefficacité clinique et hémodynamique chez des pa-tients présentant des HTAP en classe fonctionnelleIII de la NYHA. Le traitement est débuté à la dose de62,5 mg matin et soir pendant 4 semaines puisaugmenté à la dose de 125 mg matin et soir enl’absence d’élévation des transaminases. Les effetssecondaires sont en effet dominés par la possibilitéd’élévation des transaminases, nécessitant la sur-veillance régulière du bilan hépatique, toutes les2 semaines puis de manière mensuelle. Une éléva-tion des transaminases supérieure à trois fois lanormale survient dans 7 % des cas environ, uneélévation à plus de 8 fois nécessite l’arrêt définitifdu traitement.11 L’efficacité du bosentan à longterme est prometteuse avec des résultats encoura-geants à 12 et 24 mois de traitement.12 Le Tra-cleer® est approuvé aux États-Unis et en Europepour le traitement de l’HTAP de classe III de laNYHA.Les inhibiteurs des phosphodiestérases de type 5

(sildénafil, Viagra®) ont un effet vasodilatateur pul-monaire et certains cas d’amélioration clinique ontété rapportés chez des patients présentant uneHTAP.13 Les résultats de l’étude multicentriquecontrôlée sont prometteurs. La place exacte dusildénafil dans la stratégie thérapeutique reste àdéfinir.

Traitement non médical

L’atrioseptostomie a pour but de diminuer la pres-sion ventriculaire droite en créant un shunt droit-gauche.14 Cette technique fait suite à l’observationd’un meilleur pronostic chez les patients présen-tant une cardiopathie congénitale avec un shuntdroit-gauche ou un foramen ovale perméable.L’atrioseptostomie a probablement un intérêt chezles patients dont l’état s’aggrave malgré un traite-ment médical maximal.La transplantation bipulmonaire ou cardiopulmo-

naire représente le seul traitement curatif del’HTAP et la seule alternative en cas d’échec dutraitement médical.15 Cette technique est réservéeaux sujets jeunes (< 55-60 ans) présentant uneHTAP sévère. Les résultats de la transplantationpulmonaire montrent des survies de 75 % à 1 an et

50 % à 5 ans. Il est important que l’inscription surliste de greffe ne soit pas trop tardive, le nombrede donneurs étant en effet relativement faible, cequi entraîne une durée moyenne d’attente d’envi-ron 18 mois avant transplantation en France.

Conclusion

L’HTAP est une maladie orpheline à l’origine d’unesymptomatologie invalidante et dont le pronosticest médiocre en l’absence de traitement efficace.L’avènement de l’époprosténol et le développe-ment de nouveaux médicaments ont permis d’amé-liorer le pronostic et la prise en charge des patientssouffrant d’HTAP. Nous espérons qu’une meilleurecompréhension des mécanismes conduisant à cettemaladie permette le développement de nouveauxtraitements ciblant directement la proliférationanormale des cellules endothéliales et musculaireslisses vasculaires pulmonaires. De telles avancéespourraient faire envisager l’émergence d’un traite-ment curatif de cette maladie.

Références

1. Rubin LJ. Primary pulmonary hypertension. N Engl J Med1997;336:111–7.

2. Runo JR, Loyd JE. Primary pulmonary hypertension. Lancet2003;361:1533–44.

3. Humbert M, Nunes H, Sitbon O, Parent F, Hervé P, Simon-neau G. Risk factors for pulmonary arterial hypertension.Clin Chest Med 2001;22:459–75.

4. Humbert M, Sitbon O, Simonneau G. Les hypertensionspulmonaires. In: Cohen A, Belmatoug N, editors. Cœur etmédecine interne. Paris: ESTEM; 2002. p. 1275–309.

5. Humbert M, Trembath R. Genetics of pulmonary arterialhypertension: from bench to bedside. Eur Respir J 2002;20:741–9.

6. Humbert M, Deng Z, Simonneau G, Barst RJ, Sitbon O,Wolf M, et al. BMPR2 germline mutations in pulmonaryhypertension associated with fenfluramine derivatives.Eur Respir J 2002;20:518–23.

7. Sitbon O, Humbert M, Jagot JL, Taravella O, Fartoukh M,Parent F, et al. Inhaled nitric oxide as a screening agent forsafely identifying responders to oral calcium-channelblockers in primary pulmonary hypertension. Eur Respir J1998;12:265–70.

8. Miyamoto S, Nagaya N, Satoh T, Kyotani S, Sakamaki F,Fujita M, et al. Clinical correlates and prognostic signifi-cance of six-minute walk test in patients with primarypulmonary hypertension: comparison with cardiopulmo-nary exercise testing. Am J Respir Crit Care Med 2000;161:487–92.

9. Humbert M, Sitbon O, Simonneau G. Treatment of pulmo-nary arterial hypertension. N Engl J Med 2004;351:35–46.

169Hypertension artérielle pulmonaire

Page 10: Hypertension artérielle pulmonaire

10. Sitbon O, Humbert M, Nunes H, Parent F, Garcia G,Herve P, et al. Long-term intravenous epoprostenol infu-sion in primary pulmonary hypertension: prognostic factorsand survival. J Am Coll Cardiol 2002;40:780–8.

11. Rubin LJ, Badesch DB, Barst RJ, Galie N, Black CM,Keogh A, et al. Bosentan therapy for pulmonary arterialhypertension. N Engl J Med 2002;346:896–903.

12. Sitbon O, Badesch DB, Channick RN, Frost A, Robbins IM,Simonneau G, et al. Effect of the dual endothelin receptorantagonist bosentan in patients with pulmonary arterialhypertension: a one year follow-up study. Chest 2003;124:247–54.

13. Prasad S, Wilkinson J, Gatzoulis MA. Sildenafil in primarypulmonary hypertension. N Engl J Med 2000;343:1342.

14. Sandoval J, Gaspar J, Pulido T, Bautista E, Martinez-Guerra ML, Zeballos M, et al. Graded balloon dilation atrialseptostomy in severe primary pulmonary hypertension: atherapeutic alternative for patients nonresponsive tovasodilator treatment. J Am Coll Cardiol 1998;32:297–304.

15. Pielsticker EJ, Martinez FJ, Rubenfire M. Lung and heart-lung transplant practice patterns in pulmonary hyperten-sion centers. J Heart Lung Transplant 2001;20:1297–304.

170 D. Montani et al.