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79 Institut National de la Recherche Agronomique d’Algérie RÉSUMÉ Dans les régions sahariennes, la rareté des ressources en eau exige une bonne connaissance des besoins en eau des cultures qui sont nécessaires à la détermination des quantités d’eau réellement utilisables par la culture. Ces besoins peuvent êtres formulés de diverses manières, entre autres, par l’intermédiaire d’outils de pilotage des irrigations. Le premier outil testé dans les conditions du grand Sud est le lysimètre à fond drainant. L’intérêt de ceci repose sur l’établissement du bilan hydrique de la culture à travers le système sol-plante-atmosphère. Cependant, son utilisation à grande échelle est confrontée à des contraintes en termes de lourdeur de l’infrastructure à mettre en place et de durée de vie limitée. Les tensiomètres, un autre outil communément usité en agro- nomie, ont aussi fait l’objet de cette expérimentation sur l’irrigation de l’orge et dans les mêmes conditions dans le but de comparer les deux méthodes de détermination des besoins en eau des cultures. Les résultats obtenus ont montré que les tensiomètres présentent des limites d’utilisation en ter- mes de fiabilité des résultats. Pour palier aux insuffisances des cases lysiètriques, il faut choir le PVC ou du PEBD comme matériau plastique de fabrication des cuves avec une meilleure conception des orifices de drainage, en remplacement de l’acier sujet à la corrosion. Mots Clés : Régions sahariennes, rareté de l’eau, besoins en eau des cultures, cases lysimètriques, tensiomètres, limites, corrosion. MÉTHODES DE DÉTERMINATION DES BESOINS EN EAU DE LA CULTURE DANS LES RÉGIONS SAHARIENNES Laaboudi A., Chabane A., Belkhiri F.E. Institut National de la Recherche Agronomique d’Algérie. Division de recherche en bioclimatologie et hydraulique agricole.

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RÉSUMÉ

Dans les régions sahariennes, la rareté des ressources en eau exige une bonne connaissance desbesoins en eau des cultures qui sont nécessaires à la détermination des quantités d’eau réellementutilisables par la culture. Ces besoins peuvent êtres formulés de diverses manières, entre autres,par l’intermédiaire d’outils de pilotage des irrigations. Le premier outil testé dans les conditionsdu grand Sud est le lysimètre à fond drainant. L’intérêt de ceci repose sur l’établissement du bilanhydrique de la culture à travers le système sol-plante-atmosphère. Cependant, son utilisation àgrande échelle est confrontée à des contraintes en termes de lourdeur de l’infrastructure à mettreen place et de durée de vie limitée. Les tensiomètres, un autre outil communément usité en agro-nomie, ont aussi fait l’objet de cette expérimentation sur l’irrigation de l’orge et dans les mêmesconditions dans le but de comparer les deux méthodes de détermination des besoins en eau descultures.

Les résultats obtenus ont montré que les tensiomètres présentent des limites d’utilisation en ter-mes de fiabilité des résultats. Pour palier aux insuffisances des cases lysiètriques, il faut choir lePVC ou du PEBD comme matériau plastique de fabrication des cuves avec une meilleureconception des orifices de drainage, en remplacement de l’acier sujet à la corrosion.

Mots Clés : Régions sahariennes, rareté de l’eau, besoins en eau des cultures, cases lysimètriques,tensiomètres, limites, corrosion.

MÉTHODES DE DÉTERMINATION DES BESOINS EN EAU DE LA CULTUREDANS LES RÉGIONS SAHARIENNES

Laaboudi A., Chabane A., Belkhiri F.E.Institut National de la Recherche Agronomique d’Algérie. Division de recherche en bioclimatologie et hydraulique agricole.

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Pour assurer une production agricole har-monieuse, l’eau demeure le facteur déter-minant qui exige une bonne maitrise de sagestion par l’homme, tantôt pour subveniraux besoins en eau des plantes par l’irriga-tion et tantôt pour en éliminer les excès parles techniques de drainage. Ainsi, unehumidité contrôlée est indispensable pourobtenir des rendements élevés, car la cultu-re craint aussi bien les excès d’irrigationque les arrosages insuffisants (Dooremboset Kassam, 1980).

Le concept de besoins en eau des plantesimplique, une bonne alimentation hydriquede la plante à tous moments. Vermeiren etJobling (1983) ont assimilé les besoins eneau des cultures à « l’évapotranspirationmaximale » ou ETM exprimée en millimè-tres d’eau évapotranspirée par le couvertvégétal et par unité de temps. C’est un phé-nomène écophysiologique combinant deuxprocessus connus que sont la transpirationmaximale de la plante et l’évaporation dela surface du sol, sous l’effet des transfertsde masse et d’énergie qui s’opèrent auniveau du continuum sol-plante-atmosphè-re. Ces pertes d’eau à partir du couvertvégétal traduisent les quantités d’eau nonrestrictives qui sont nécessaires à une cul-ture donnée durant tout son cycle végétatif,pour produire un rendement maximal(Daniel, 1984). Selon Booher (1974), lavariation de ce paramètre est conditionnéepar plusieurs facteurs comme l’itinérairetechnique, la culture et surtout les condi-tions climatiques.

En raison de la difficulté rencontrée pourévaluer directement l’ETM des différentescultures, les chercheurs ont essayé de cor-réler les besoins avec les variables clima-tiques (température de l’air, vitesse du vent,ensoleillement, etc…).

Cette relation est matérialisée par le rapportETM/ETP appelé « Cœfficient cultural »(Kc) qui intègre l’effet des résistances quis’opposent à la circulation de l’eau dans laplante et traduit le rythme de la transpira-tion de la culture à un stade donné(Robélin, 1983).

Généralement, l’estimation de l’ETM estréalisée au moyen de lysimètres qui sontdes outils les plus utilisés dans ce domaine.Le lysimètre est une cuve étanche installéeen plein champ dans laquelle une cultureest mise en place pour permettre une expo-sition à l’action des agents atmosphériquesde la face supérieure, alors que les faceslatérales empêchent tout échange avec l’ex-térieur (Jean Charles, 1995). Le plus sou-vent, la précision des mesures obtenuesavec un évapotranspiromètre ordinairevarie entre 10 ou 15% près (Perrier, 1974cité par Issolah, 1983). A l’inverse des éva-potranspiromètres pesables qui sont desdispositifs très onéreux mais ils permettentla mesure de l’ETM avec une précision del’ordre de ½ mm d’évaporation à un pas detemps inférieur à 1 heure.

En introduisant le concept de pilotage desirrigations, des outils comme les tensiomè-tres peuvent êtres utilisés à cet effet dont leprincipe de fonctionnement repose sur laforce de succion de l’eau par le sol. Cecidonne en permanence une indication sur lepotentiel matriciel du sol et sur son étatd’humidité. Le tensiomètre ne donne pasdirectement la mesure de l’humidité du sol

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INTRODUCTION

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mais seulement une indication sur son étathydrique. Il est admis que cette force desuccion que le végétal exerce pour extrairel’eau du sol se traduit par des valeurs detension de plus en plus élevées au rythmede desséchement du sol et, réciproquement,lorsque le sol est saturé, la tension est nulle.

L’emploi du tensiomètre en irrigation estdélicat puisqu’il ne mesure que des ten-sions faibles et nécessite des soins réguliersafin d’empêcher son désamorçage. Il peutcependant être employé utilement dans l’ir-rigation localisée en obligeant l’irrigant àmaintenir en permanence un bulbe humideautour des racines de la plante.

Malgré sa simplicité d’utilisation, il existecertaines difficultés qui limitent l’emploidu tensiomètre par exemple; l’incapacitédu tensiomètre à mesurer des dépressionsdépassant les 800 mbar (0,8 bar).

Dans notre étude, le but recherché est l’étu-de de la possibilité de développer l’emploides tensiomètres en milieu producteur agri-cole saharien qui, contrairement aux lysi-mètres, sont usuellement plus pratiques entermes de coût et dans leur mise en œuvre.

1. Description de la zone d’étude

1.1. Localisation du site d’essaiLes essais expérimentaux sont déroulésdurant la compagne agricole 2007/2008 auniveau de la station expérimentale de l’INRAd'Adrar située à 5 km au Sud du chef lieu dela wilaya, au niveau de la zone potentielle-ment agricole. Les coordonnées géogra-

phiques du site sont : Latitude : 27° 49' Nord,Longitude : 00° 18' Est, Altitude : 278 m.

1.2. Caractéristiques du climatLes valeurs moyennes annuelles de la tem-pérature de l’air et de la précipitation sontévaluées à 26,1 °C et 24,93 mm respective-ment. La combinaison de l’indice de conti-nentalité pluviale et le Diagnose générale deKöppen basés sur ces deux paramètres cli-matiques, donne un aperçu sur le climat. Ilsindiquent que celui-ci est de type déser-tique. En général, les conditions climatiquesdésertiques sont très sévères, l’humiditérelative de l’air est très faible et l’intensitélumineuse est très forte. La partie Sud de lawilaya est un peu plus chaude (productionde primeurs) par rapport à la partie Nord oùon enregistre fréquemment des gelées.

Les relevées météorologiques réalisésdurant les années 2007/2008 au niveau duparc agrométéorologique de la stationexpérimentale INRAA d’Adrar spécifientces caractéristiques climatiques propres àla région avec :

• La température de l’air dont l’amplitudethermique est un indice caractéristiqueaussi bien pour l’année que le mois et lajournée. Le maximum absolu atteint les49 °C et le minimum absolu descend jus-qu’à - 2°C. Les gelées sont rares maispeuvent causer des dégâts catastro-phiques lorsqu’elles surviennent.

• La pluviométrie annuelle (69,8 mm)relativement exceptionnelle au cours del’année 2004, avec un mois d’avril trèspluvieux (51,5 mm), n’est pas prise en

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MATÉRIELS ET MÉTHODES

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compte dans les calculs des besoins eneau des cultures.

• L’humidité relative de l’air est souventinférieure à 50% sauf pendant certainespériodes très courtes de jours pluvieux oùelle peut se rapprocher du maximum(100%). Par contre, la rosée est un phé-nomène très rare.

• Le vent souffle presque en permanencesuivant la direction dominante Nord-Est. Sa direction ouest provoque de vio-lentes tempêtes de sable avec des consé-quences sur le transport des sédiments etles dégâts occasionnés sur les cultures etsur les serres.

1.3. Caractéristiques du sol et des eauxd’irrigation Les résultats analytiques des caractéris-tiques physico-chimiques du sol de la sta-tion montrent une homogénéité des parcel-les. Ces sols présentent une texture grossiè-re de type sablo-limoneuse. Les analyseschimiques indiquent que ces sols présen-tent un déficit en matière organique (< 1%).L’azote total se trouve en très faible quanti-té (taux < 0.05%). Le rapport C/N varieentre 8 et 11 et le pH se situe entre 7 et 8,5.En général, ils sont moyennement riches enpotasse et pauvres en phosphore (tableau I).

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Tableau 1 : Propriétés physico-chimiques du sol et de l’eau d’irrigation.

8,44,010,420,0510

0,081,612,57,1

13.066,803,904,7463,2621,30

Analyse chimique

Analyse physique

pH eauC.E de l’eau d’irrigation (mS/cm)C.E du sol (extrait dilué au 1/5) (mS/cm)Potassium assimilable (meq/100 g)P2O5 (ppm)Azote total (N) %Densité apparenteDensité réelleHumidité au point de flétrissement (%)Humidité à la capacité au champ (%)Argile (%)Limon fin (%)Limon grossier (%)Sable fin (%)Sable grossier (%)

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Les eaux d’irrigation proviennent de lanappe du continental intercalaire ou «albien ». Leur conductivité électrique C.Evarie entre 2 et 5 mS/cm et on observe desconcentrations élevées à proximité des pal-meraies en raison de la forte évaporation.Ces eaux sont généralement captées par despuits peu profonds alimentés en partie parles eaux de drainage d’où leur forteconcentration en sels (puits de la station :C.E = 5 mS/cm).

2. Dispositif expérimental

2.1. Cuves lysimètriques, anneau degarde et chambre de contrôleDeux cuves métalliques de forme cylin-drique appelées aussi cases lysimètriques àfond drainant, couvrant une superficie de 3.1m² chacune avec une profondeur de 1 m,sont enfouies dans le sol jusqu’à 5 cm dubord. Elles sont équipées à leur base deconduites souterraines pour l’acheminementde l’eau de drainage vers la chambre decontrôle où elle est quotidiennement quanti-fiée (cf schéma 1 du dispositif). Afin de lut-ter contre «l’effet oasis », un anneau degarde a été créé autour des cases sur unesuperficie de 1000 m² afin de protéger lecouvert végétal mis en culture dans cescases pour les besoins de l’expérimentation.Durant les essais préliminaires, cette ceintu-re végétale a été conduite de la mêmemanière que les essais expérimentaux menésdans les cases, et cela en termes de culture,d’apports en eau et en éléments minéraux.Pour compléter le dispositif de mesure, unechambre de contrôle pour la collecte deseaux de drainage est aménagée à équidistan-ce entre les 02 cases. Avec une superficie de9 m² et une profondeur de 2,5 m. Elle a été

conçue de telle sorte que les tuyaux de drai-nage souterrains assurent l'écoulement del'eau drainée depuis les lysimètres vers lesrécipients de récupération prévus, à cet effet,dans le sous-sol de la chambre.

2.2. Culture test Les cases lysimétriques et l’anneau degarde sont cultivés en orge (Hordeum vul-gare, variété Saida) choisi comme culturetest. La densité de semis étant 150 kg/ha.Des apports en engrais de fond sont effec-tués avant le semis à raison de 150 unité /hade triple superphosphate (TSP) et 120 uni-tés/ha d’engrais azoté (urée) fractionné entrois apports tout le long du cycle végétatifde la plante.

2.3 Détermination du bilan hydriqueLe bilan hydrique de la culture est suiviquotidiennement au cours du cycle végéta-tif. On souligne que les doses d’irrigationsapportées, sont augmentées en fonction dudéveloppement du couvert végétal.

La quantité d’eau évapotranspirée (assimi-lée à l’évapotranspiration maximale de laculture) est la balance entre les apportsd’eau par les irrigations et les pertes pardrainage. Soit :

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Figure 1 : Dispositif des cases lysimètriques.

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ETM = I – D S (1)

Tous les termes de l’équation (1) sont éva-lués en mm. ETM est l’évapotranspirationmaximale, I est la dose d’irrigation, D est ledrainage et S est la variation du stockd’eau dans le sol. Pour une période relati-vement longue (quelques jours à une déca-de), la variation du stock est considéréecomme négligeable.

2.4 Etablissement de la relation tension-humidité du sol En liant la tension de l’eau du sol mesuréepar les tensiomètres à l’humidité du sol,nous avons pu établir la courbe de régres-sion entre ces deux paramètres. Le disposi-tif de mesure est composé de la combinai-son de deux types de tensiomètres (clas-

siques et électroniques). Leur installation aété réalisée au niveau de deux sites (empla-cements) comme indiqué dans le tableau II.

1 Corrélation entre la tension et l’humi-dité du sol.Les couples de points (tension- humidité)ont permis de tracer les droites de régres-sion et d’évaluer la relation qui l’est lie. Ilconvient de dire que cette relation est obte-nue après avoir déterminé l’humidité pon-dérale du sol des échantillons prélevés aumoment de la lecture des tensiomètres. Ils’est avéré qu’il existe une forte relationentre la teneur en eau du sol et la tension derétention de cette eau par les particules dusol comme le montre la figure 2.

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Tableau 2 : Mise en place des tensiomètres.

Emplacement

Anneau de garde

Cases lysimètriques

Profondeur (cm)

20

30

05

30

20

30

50

80

01

02

03

04

05

06

07

08

Types de tensiomètres

Tensiomètres à manomètre

Tensiomètres électroniques

RÉSULTATS ET DISCUSSION

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2. Evaluation de l’humidité du sol A partir des équations de régression linéaireétablissant la relation entre les valeurs de latension de l’eau du sol et de sa teneur en eau,les valeurs tensiométriques obtenues durantla période de l’essai ont servi à la détermina-tion de cette humidité (Tableau III).

La performance des tensiomètres utilisésest testée grâce à l’analyse du degré de cor-rélation entre la tension et l’humidité dusol. Ainsi, les cœfficients de déterminationmontrent que ce paramètre varie en fonc-tion de type de tensiomètre utilisé.

3. Choix des tensiomètres Les essais expérimentaux ont permis demettre en évidence une distinction entre lesdeux types de tensiomètres utilisés. On obs-erve une meilleure performance des tensio-mètres à manomètre en comparaison avecles tensiomètres électroniques qui ont mon-tré des coefficients de détermination assezfaibles (0,54 et 0,32) pour les profondeursde 30 et 80 cm (Tableau III). La part expli-quée par la tension est faible et exprime mall’humidité réelle du sol. Pour cette raisonqu’ils ont été éliminés de l’utilisation.

En fait, ce type de tensiomètres (électro-niques) exige beaucoup plus d’attentionpour s’affranchir des fausses lectures. Onsupposerait que ces aberrations de résultatsont des origines dues au désamorçage dutensiomètre en raison de l’usure du « sep-tum » (membrane caoutchouteuse fermantle sommet de la colonne d’eau) qui exigeson remplacement après un nombre demanipulations déterminées (environ après40 à 50 fois d’utilisation) et aussi la faibles-se de la pile électrique qui pourrait causerun mauvais fonctionnement de l’appareil.

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R² = 0,9259

0

2

4

6

8

10

12

14

-40 -85 -130 -130 -150 -210 -320 -500

Ten

eur

en e

au d

u so

l (%

)

Figure 2 : Corrélation entre les tensions del'eau du sol et l'humidité pondérale du sol.

Emplacement Type Profondeur (cm)

Equation de régression

Cœfficientde détermination R²

Anneau de garde tensiomètres

à manomètre

20 h = 0,0093t + 11,00 0,931130 h = 0,0333t + 14,34 0,8849

Cases lysimètriques

5 h = 0,0107t + 10,86 0,859220 h = 0,0334t + 12,55 0,743630 h = 0,0336t + 14,24 0,7021

tensiomètres électroniques

30 h = 0,1062t + 17,98 0,544850 h = 0,1087t + 19,11 0,811680 h= 0,0764t + 17,13 0,3242

Tableau 3 : Equations de régression et cœfficients de détermination.

Où h est l’humidité pondérale et t la tension indiquée par le tensiomètre.

Tension de l'eau du sol (hpa)

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4. Détermination de la variation du stockd’eau dans le sol;

4.1. Cas de l’irrigation à l’ETMIl est difficile d’évaluer la variation dustock d’eau dans le sol pendant des pério-des courtes juste après le ressuyage, car àce moment précis, l’humidité du sol se sta-bilise durant un certain temps plus oumoins long selon la texture du sol. Il seraencore plus difficile d’évaluer la quantitéconsommée par les cultures car celles-ciutilisent une quantité d’eau gravitaire.C’est pour ces raisons que les tensiomètresindiquent presque les mêmes valeurs detension dans le cas des irrigations quoti-diennes et que les profils hydriques appa-raissent confondus et peuvent même sechevaucher comme le montre la Figure 3.

Ces résultats sont obtenus durant 07 joursau cours du stade montaison. Ils reflètent ladifficulté d’estimer la quantité d’eau réelle-ment consommée par la culture. Dans cer-tains cas, nous avons obtenus des valeurstensiomètriques qui reflètent un étathydrique du sol supérieur au précédent.Ceci donne un mauvais aperçu sur la quan-tité d’eau réellement consommée par levégétal. Par contre, pour la même période,les cases lysimètriques ont permis d’éva-luer les composantes du bilan hydrique etpar conséquent les quantités d’eau maxi-males consommées par la culture (TableauIV).

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Figure 3 : Profils hydriques (conduite de l’irrigation à ETM).

Date (mois de mars) Irrigation (mm/j) Drainage (mm/j) ETM (mm/j) 08 5,89 2,65 3,24 09 5,89 0,02 5,87 10 11,78 0,03 11,75 11 11,78 0,03 11,75 12 17,68 3,15 14,53 13 17,68 4,21 13,47 14 17,68 4,71 12,96

Tableau 4 : bilan hydrique de l’orge des cases lysimètriques (stade montaison).

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4.2. Cas de l’irrigation à l’ETR Si la fréquence d’arrosage dépasse unejournée, la réserve en eau du sol diminuesensiblement et les forces de succion aug-mentent graduellement.

Dans cette situation, la régulation stoma-tique par le mécanisme de fermeture etd’ouverture des stomates se met en actionau niveau des feuilles de la plante en affec-tant l’évapotranspiration. Elle n’est plus àsa valeur maximale mais plutôt à sa valeurréelle. Les indications du tensiomètre s’é-loignent rapidement de zéro, notammentdans la couche superficielle du sol où latension passe de -71 à -141 hpa au bout de3 jours et l’humidité pondérale du sol suitla même tendance (figure 4).

La variation du stock pendant deux jours austade montaison (du 06/03/2008 au08/03/2008) sur un profil de 50 cm peutêtre déterminée en calculant la différenceentre les humidités pondérale du sol relati-ves à deux irrigations successives. C'est-à-dire, la différence entre l’humidité du solaprès le ressuyage du sol concernant l’irri-gation précédente (Apir) et l’humidité dusol juste avant l’irrigation actuelle (Avir).Par la suite, la conversion de l’humiditépondérale (Hp) en humidité volumétriqueexprimée en lame d’eau (mm) peut êtreréalisée grâce à la densité apparente du sol(tableau V).

En sommant les ETR sur tout le profil, ontrouve 2,56 mm, alors que la valeur obte-nue par les cases lysimètriques est large-ment supérieure à cette valeur soit 11,04mm pour ces deux journées. Les remontéescapillaires peuvent être à l’origine de cettedifférence.

De la même façon, on peut tracer les pro-fils hydriques entre deux irrigations consé-cutives dont la fréquence d’arrosage dépas-se une journée (figure 5) et en déduire lavariation du stock pour chaque cas.

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Figure 4 : Profils hydriques (stade montaison).

Profondeur (cm) Hp (%). (apir.) Hp (%) (avir) ∆∆S (%) ETR (mm)0 10,69 9,84 0,85 1,36

-20 9,87 9,51 0,36 0,57-30 11,55 11,48 0,07 0,11-50 11,15 10,99 0,16 0,51

Tableau 5 : Variation du stock est entre deux irrigations consécutives.

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En général, ce sont les couches superficiel-les du sol qui contribuent le plus au phéno-mène d’évaporation en se desséchant rapi-dement. Après ressuyage, l’humidité descouches sous-jacentes varie lentement, puisle phénomène de remontée capillaire s’ac-centue au fur et à mesure de l’importancede la demande climatique (Laaboudi,2009).

5. Comparaison entre ETRL et ETRT

Les valeurs de variation du stock du sol(qui représentent l’évapotranspiration réel-le de la culture) déterminées par les tensio-mètres se rapprochent de la réalité quandl’intervalle entre deux irrigations devientplus large. La comparaison entre lesvaleurs obtenues par les cases lysimè-triques (ETR L ) et celles obtenues par lestensiomètres (ETRT ) montre de petitesfluctuations les unes par rapport aux autres(tableau VI).

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Figure 5 : Profil hydrique du blé. a ; stade épiaison, b ; stade floraison.

Stades dedéveloppement ETRL (mm/j) ETRT (mm/j) Différence (mm/j)

Taux de fluctuation(%)

Montaison 4,80 5,52 -0,72 15Epiaison 5,19 4,49 0,69 17,50Floraison 5,70 5,22 0,49 9

Tableau 6 : Comparaison entre ETRL et ETRT.

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Logiquement, les valeurs obtenues par leslysimètres doivent être supérieures à cellesobtenues par les tensiomètres car, les pre-miers outils estiment la consommation dela culture sur l’ensemble de la profondeurracinaire alors que les seconds n’évaluentque l’absorption effectuée sur une tranchede 50 cm de sol.

Les causes de fluctuation des ces valeurspeuvent avoir plusieurs causes, on citeentre autres :

* l’estimation de l’humidité à partir desvaleurs de tensions prises par les tensio-mètres est approximative car les critèresde performance du modèle de prédictionne sont pas optimaux. Les coefficients dedétermination par exemple varient entre70% et 93%.* les indications des tensiomètres électro-niques ne sont pas très justes.* les erreurs commises par les lysimètressont aussi non négligeables car elles sontestimées dans les meilleurs des cas de 10à 15%.

D’après ces résultats, on peut admettre quel’utilisation des tensiomètres est préférablepour le pilotage d’irrigation. Dans ce sens,Rivière et al., (1995) ont montré que lestensiomètres sont utiles pour maintenirl’enracinement de la culture dans unconfort hydrique évitant l’apparition d’unstress dont elle pourrait en souffrir. Ils sontaussi utiles pour maintenir une tension desuccion de l’eau par la particule du sol quiassure une bonne alimentation hydrique etgarantit une productivité satisfaisante(Vaccinum, 2008).

D’une manière générale, on peut conclureque le tensiomètre estime mieux les quanti-tés d’eau prélevées par le végétal quandl’humidité s’éloigne de la capacité auchamp tout en restant dans les limites demesure par les tensiomètres (< 800 hpa). Lafiabilité des résultats devient de plus enplus faible en s’approchant du point de flé-trissement permanent (fig.6).

Les résultats obtenus ont confirmé quedans les régions sahariennes il existe uneforte relation entre la teneur en eau du solet son corollaire la tension mesurée par lestensiomètres. Le degré de corrélation entreces deux paramètres reflète la performancedes tensiomètres utilisés. Il en résulte ausside ce travail qu’il est difficile d’évaluer lavariation du stock d’eau dans le sol pendantdes périodes courtes juste après ressuyage

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CONCLUSION

Figure 6 : Evolution de l’humidité du sol culti-vé (stade montaison).

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par les tensiomètres. Par contre, dans lesmêmes conditions, les cases lysimètriquesont permis d’évaluer les composantes dubilan hydrique et par conséquent les quan-tités maximales d’eau consommées par laculture.

Les valeurs de l’ETR déterminées par lestensiomètres se rapprochent de la réalitéquand l’intervalle entre deux irrigationsdevient plus grand. D’après ces résultats,on peut admettre que l’utilisation des ten-siomètres est préférable pour le pilotaged’irrigation.

Il est intéressant de souligner que les caseslysimètriques ont toujours joué un rôleimportant dans la détermination desbesoins en eau des cultures à condition queleur conduite serait soignée. D’une manièregénérale, les inconvénients les plus récur-rents relevés suite aux expériences menéesau niveau de nos stations de recherche pourla conduite des cases lysimètriques résidentprincipalement le poids lourd des cases etla corrosion érosive de celles-ci et desconduites de drainage.

Certaines recommandations plausiblespouvant palier à ces insuffisances commele choix du PVC ou du PEBD commematériau plastique de fabrication des cuveslysimètriques en remplacement de l’aciersujet à la corrosion et aussi une meilleureconception des orifices de drainage.

Quant aux tensiomètres, l’expérience a mon-tré que les tensiomètres à manomètre sontbeaucoup plus performants en comparaisonavec ceux à fonctionnement électronique.

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