107
Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain. Antoine KOLLEN Mémoire présenté en vue de l’obtention du Master 2 « Productions de terroir, labels de pays et alimentation de qualité » Septembre 2005 Tuteur universitaire : Céline Broggio Maître de stage : Jean-Louis Peltier Ce document est la propriété de la Chambre d’Agriculture de l’Ain. Reproduction interdite sans accord préalable.

Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

Impacts du développement desbiocarburants dans l’Ain.

Antoine KOLLENMémoire présenté en vue de l’obtention du Master 2 « Productions de terroir, labels de

pays et alimentation de qualité »Septembre 2005

Tuteur universitaire : Céline Broggio Maître de stage : Jean-Louis Peltier

Ce document est la propriété de la Chambre d’Agriculture de l’Ain. Reproduction interdite sans accord préalable.

Page 2: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

Antoine KOLLEN

Impacts du développement desbiocarburants dans l’Ain.

Cédits photographiques des illustrations en couverture :

- Tracteur : Hélianthe- Champ de colza et route : Ministère de l’agriculture.

Page 3: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

1

Ce mémoire est le résultat de cinq mois de stage à la Chambre d’Agriculture de l’Ain,à Bourg en Bresse. Il ponctue une année de Master 2 « Productions de terroir, labels dePays et alimentation de qualité », effectuée à l’Université Jean Moulin Lyon 3.

Au cours de cette période, deux missions principales m’ont été affectées.- La réactualisation d’un « catalogue des filières » de production agricole dans l’Ain,- La rédaction d’un rapport sur les impacts du développement des biocarburants dans le

département.

Le choix des biocarburants, comme sujet de mémoire, a été guidé par le fait qu’il génèreprobablement plus de contenu que le catalogue. Cependant, ce dernier m’a apporté denombreux points d’intérêts : affiner la méthode d’analyse et de traitement statistique,rencontrer les principaux acteurs départementaux de chaque filière de production,comprendre les enjeux, sur le terrain, du monde agricole… Ainsi et pour résumer le bénéficede ce premier travail : améliorer et valoriser concrètement mes compétences, au serviced’une Organisation Publique Agricole.

Le second dossier, celui des biocarburants, ne contribue pas moins à ma formation d’unepart, et à offrir une contribution à la Chambre d’Agriculture d’autre part. C’est en effet à lademande d’un comité de pilotage que j’ai été conduit à y travailler, il s’agit donc d’un besoin,d’une demande effective.

En quoi cet axe de travail est-il pour moi formateur ? Le catalogue des filières est un outilde références et d’aide à la décision. Le dossier des biocarburants participe plutôt d’unevolonté prospective. Cette approche différente élargit le champ des compétencesnécessaires. En cela, déjà, il est formateur. En outre, s’attacher à une filière précise permetd’en appréhender de façon plus exhaustive tous les ressorts (politiques, réglementaires,économiques, environnementaux…) et par-là, de mieux maîtriser les tenants et aboutissants,les enjeux et problèmes, voire les solutions à mettre en œuvre ; les notions de synthèse,d’analyse comparative et de perspectives d’actions sont ici valorisées et valorisantes.

Ainsi, le stage de Master 2, effectué à la Chambre d’Agriculture de l’Ain, m’a permis demettre en valeur mes compétences, d’en acquérir de nouvelles et d’appliquer des élémentsthéoriques dans des cas pratiques. Je retiens donc l’aspect positif et professionnalisant decette expérience.

Page 4: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

2

Les biocarburants font actuellement l’objet de nombreux débats, études, prospections.Ils constituent en effet une alternative plausible à plusieurs problèmes (économiques,environnementaux…). Dans ce contexte, il paraît intéressant d’évaluer, avec les moyensdisponibles, les impacts du développement d’une telle production sur les filières en place,dans l’Ain.

Dans cet axe de recherche, il est important de pouvoir bien cadrer le contexte, pourmieux comprendre le relatif engouement pour les biocarburants. Il est préalablementindispensable de définir ce qui est entendu par le terme de « biocarburant ». Partant, il serapossible de déterminer clairement la problématique directrice, dont découle le plan de cemémoire.

Bien définir, comprendre l’environnement (au sens large du terme), établir desprospectives ; voilà résumés les objectifs de cette étude.

Le terme de biocarburant est extrêmement large. Preuve en est la diversité desréponses qu’apportent différents dictionnaires. Selon le Petit Larousse, il s’agit d’un« carburant obtenu à partir de végétaux (oléagineux, céréales, canne à sucre, etc…) », enrevanche, le Hachette Illustré (2000) donne une vue moins neutre, ajoutant le qualificatif« carburant de substitution »… Prenant plutôt en compte la première, il reste encore à cernerplus précisément notre objet. En effet, l’acception généraliste exprimée recouvre deuxréalités distinctes : l’utilisation d’huile végétale pure en filière courte, et, en filière longue, desprocédés plus industriels.

Le présent travail se propose d’effectuer une synthèse des différents élémentsconstitutifs et encadrant de chacune de ces filières, avant d’en évaluer les possibilités dedéveloppement dans l’Ain et leurs conséquences sur les filières en place. Les définitionsrespectives de chacun des biocarburants sont reprises en annexe, mais il est utile, déjà, d’entracer les contours.

- Le biocarburant le plus utilisé dans le monde est, et de très loin, l'éthanol, un alcool liquideproduit à partir de la fermentation de sucres (betteraves, cannes à sucre, etc.) ou d'amidon(blé, maïs, etc.) après hydrolyse. Ses caractéristiques intrinsèques le dédient aux moteurs àessence.- Les biocarburants adaptés aux moteurs diesels sont produits à partir d'huile végétale decolza ou de tournesol (Europe) et de soja (Etats-Unis). Afin de la rendre parfaitementcompatible avec tous les moteurs diesels, il faut la faire réagir avec du méthanol (parexemple) pour la transformer en « ester », un ester méthylique d'huile végétale (EMHV).- L’huile végétale pure (HVP) est une production qui répond à des procédés moinsindustriels. Il s’agit de la pression, à froid, de graines d’oléagineux, dont résulte l’HVP et dutourteau gras. Ce biocarburant fonctionne en complément (voire en substitution) du gazole.

Le schéma ci-dessous offre une vue globale des méthodes de transformation, depuisla matière première jusqu’au carburant. Il s’agit des biocarburants en filière longue. Pouravoir un aperçu de la méthode de l’huile végétale pure, se reporter au document 22.

Page 5: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

3

Doc. 1 : Du végétal au biocarburant, les méthodes de fabrication.

Ainsi, ayant cerné clairement l’objet, il s’agit de le recadrer dans son contexte.

Pourquoi les biocarburants ?

Deux grands éléments tendent à favoriser leur développement : celui-ci estessentiellement à la connexion de questions économiques et environnementales. Si cespoints font l’objet d’une étude plus approfondie dans le corps de ce rapport, quelquesprécisions sont d’ores et déjà fort utiles.

Les intérêts économiques peuvent être appréhendés au regard de la dépendanceénergétique de la France et de l’Europe, en particulier dans le domaine des transports. Ladépendance à l’égard des énergies pour les transports atteint, en Europe, 98 % ! Les coûtsinduits par cette situation sont extrêmement lourds.

La question environnementale n’est pas moins sensible. Le pétrole est une énergiefossile et polluante. La France, entre autres pays, a pris plusieurs engagements (Unioneuropéenne, protocole de Kyoto…) qui l’engagent à réduire ses émissions de gaz à effet deserre. Plus généralement, les problèmes du réchauffement climatique et de la pollutionsemblent être admis par tous et les moyens à mettre en œuvre pour les modérer sontimportants.

Doc. 2 : Emissions de CO2 par mode de transport.

Carburant Origine du carburant Emissions de CO2(g/personne/ km)

Diesel Pétrole 165Essence Pétrole 215Gaz de Pétrole liquéfié (GPL) Pétrole et gaz naturel 180Biocarburants biomasse 110 à 180Source : RAC-France

Ces deux points permettent de comprendre la volonté partagée de développer desénergies alternatives et renouvelables, dont font partie les biocarburants.

Source : Institut Français du Pétrole.

Page 6: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

4

Problématique (s) :

De ces observations, le postulat de l’augmentation de la production de biocarburantsest autorisé. Il s’agit donc d’en évaluer les impacts dans l’Ain.

En quoi un tel développement modifie-t’il l’organisation des filières établies ? Selonles scénarii, quelle ampleur est-il possible d’accorder à ses conséquences ?

Pour répondre à ces interrogations, plusieurs biais sont nécessaires. Ainsi il fautcerner les enjeux, les intérêts et les freins que sous-tendent les biocarburants. Il faut établirun état des lieux de l’économie actuelle de la filière, mais également des actions (ou non)politiques dans ce domaine, des capacités et perspectives de recherches… Tous leséléments qui concourent à la possibilité d’élaborer des perspectives. Cette volontéprospective induit le passage par une vue globale du sujet, avant de se focaliser sur lesparticularismes du département de l’Ain.

Ainsi, tenter de qualifier et de quantifier les effets du développement des biocarburantsdans l’Ain (quatrième partie) passe par un examen des enjeux (première partie) puis de lastructure de la filière longue à d’autres échelles (deuxième partie). La troisième partie estconsacrée au cas spécifique de l’huile végétale pure.

Page 7: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

5

1. Les biocarburants en question.

Consacrer une étude à ce mode d’énergie suppose, d’abord, de bien en comprendre lesenjeux.

Quelle est la portée, le bénéfice du développement des biocarburants ? Si nombre deces intérêts sont aujourd’hui admis, il a fallu pour cela les démontrer de façon incontestable.En effet, l’ampleur des enjeux qui lient cette perspective à notre société suscite bien desdébats. Une synthèse des apports des biocarburants a donc semblé indispensable. Elle faitl’objet du premier point de cette première partie.

Cependant, si la voie de la croissance semble ouverte, il n’en reste pas moins que desérieux obstacles subsistent. Leur nature variée (technique, politique, d’ordre interne à lafilière…), qui sera exposée dans un second temps, engendre bien des interrogations,soulève de lourds problèmes…

Le troisième point cherche à présenter les éléments nécessaires pour supplanter, àl’avenir, les freins qui rendent aujourd’hui les perspectives délicates. Il se propose donc dedonner une approche des solutions aux difficultés actuelles de la filière.

Page 8: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

6

1.1 Des intérêts indéniables.

Le développement qui suit veut montrer qu’une large palette d’avantages ressort desbiocarburants. L’architecture de la démonstration reprend volontairement les trois piliers dudéveloppement durable, tels que définis lors de la conférence de Rio en 1992. Il constitue unmode de développement cherchant à concilier les progrès économiques et sociaux ainsi quela préservation de l'environnement. Cela induit notamment de répondre aux besoins duprésent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.

Une fois l’hypothèse de la concordance des biocarburants à ces principes établie, il s’agitde l’argumenter1. L’ordre choisit reflète les priorités généralement avancées en faveur desbiocarburants : il sera successivement question des intérêts environnementaux,économiques et, enfin, sociaux.

1.1.1 Un environnement mieux préservé.

Ecologiquement viable…

Cet élément du développement durable (sustainable developpement en anglais)s’applique sans critique possible, si l’on fait une comparaison pétrole / biocarburants. Lepremier est une source d’énergie dite non-renouvelable. En tous cas, les nappes de pétrolese forment sur des échelles de temps de plusieurs millions d’années, et l’Homme lesconsomme autrement plus rapidement. Ainsi, sans entrer dans une polémique autour de laquantité de réserves aujourd’hui disponibles, il est incontestable que celles-ci sontépuisables. En revanche, les biocarburants se classent dans les énergies renouvelables. Eneffet, issus de la culture de végétaux annuels, la matière première nécessaire à leurfabrication existe en quantité potentiellement infinie. Le principe de durabilité crédite donc lesbiocarburants d’un premier avantage avéré.

Cet atout a une portée peut-être plus importante que tous les autres. Il signifie que,quoiqu’il advienne, le pétrole n’offre que des perspectives à court ou moyen terme. Lesbiocarburants, quant à eux, induisent « seulement » la nécessaire poursuite del’agriculture… La potentialité d’une plus grande continuité dans le temps de celle-ci parrapport à une échéance certaine des réserves pétrolières ne fait guère de doute.

La question des gaz à effet de serre (GES)

Le problème de ces émissions présente un caractère autrement plus compliqué.L’objectif est ici de présenter les résultats de travaux, tout en conservant une approchesynthétique. L’étude comparée biocarburant / pétrole intègre deux niveaux : les rejets enGES et le rendement énergétique.

- Un rendement énergétique intéressant.

Une étude de l’ADEME (2002 pp. 13-16) permet de distinguer clairement les filièresrenouvelables des filières classiques (gazole et essence). Les deux graphiques ci-dessousmettent en évidence les avantages établis et à venir des biocarburants.

1 Le rapport à l’Assemblée nationale de Monsieur Alain Marleix, sur les biocarburants, donne des élémentsappréciables sur le sujet (pages 13-32)

Page 9: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

7

Il apparaît donc de façon indiscutable que les biocarburants bénéficient d’avantagescomparatifs. A noter l’intérêt particulier de l’huile végétale pure (cf. partie 3). Le cas de lafilière blé est inversement intéressant : son faible rendement énergétique le place juste au-dessus du gazole et de l’essence.

De façon générale, les deux graphiques indiquent une meilleure performance desbiocarburants. Le second appuie la thèse de progrès considérables en la matière, plusencore si on les compare aux perspectives restreintes pour les carburants classiques.

- Une diminution effective des GES.

Les mêmes travaux de l’ADEME consacrent les biocarburants, cette fois-ci sur le plan del’émission de gaz à effet de serre. Là encore, les commentaires sont sans équivoques.

Doc. 3 Bilans énergétiques comparés dans les conditions actuelles.

0,917 0,873

2,05

1,02

4,68

2,99

00,5

11,5

22,5

33,5

44,5

5

Gazole Essence Ethanol blé ETBE blé Huile colza EMVH colza

éner

gie

rest

ituée

/ én

ergi

e no

n re

nouv

elab

le u

tilis

ée.

Source : d’après ADEME et alii., 2002.

Doc. 4 Bilans énergétiques comparés selon des prospectives en 2009.

0,913 0,879

3,57

1,104

5,09

3,309

0

1

2

3

4

5

6

Gazole Essence Ethanol blé ETBE blé Huile colza EMVH colza

éner

gie

rest

ituée

/ én

ergi

e no

n-re

nouv

elab

le u

tilis

ée

Source : d’après ADEME et alii., 2002.

Page 10: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

8

Il est considéré ici, à juste titre, que la combustion de biocarburants ne contribue pas àl’effet de serre. En effet, le CO2 émis à cette étape équivaut à celui prélevé, lors de lacroissance des plantes, par le mécanisme de la photosynthèse.

Un argument en faveur des biocarburants est de dire que, par exemple, l’utilisation d’unlitre d’EMHV colza revient à émettre 75 % de GES en moins. En 2009, ce chiffre pourraitatteindre 78 %. Présenté de façon plus générale,- une tonne d’EMHV utilisée = 2,5 tonnes équivalent CO2 économisée- une tonne d’éthanol utilisée = 2,7 t éq. CO2 économisée.

Une pollution diminuée ?

Il est fait distinction entre les GES, considérés comme pollution « à effet indirect » (leurnocivité concerne l’ensemble de l’écosystème Terre) et les pollutions à effet direct (qui ontune incidence locale). Pour ces derniers, les réponses sont peut-être moins évidentes. Ilexiste des éléments positifs, d’autres demeurent plus nuancés.

Doc. 5 Bilan GES actuels (combustion complète).

3390

922660

888

2530

3650

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

Gazole Essence Ethanol blé ETBE blé Huile colza EMVH colza

g eq

. CO

2/kg

Source : d’après ADEME et alii., 2002.

Doc. 6 Bilan GES, scénario 2009 (combustion complète).

3454

505

2336

601 787

3635

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

Gazole Essence Ethanol blé ETBE blé Huile colza EMVH colza

g eq

. CO

2/kg

Source : d’après ADEME et alii., 2002.

Page 11: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

9

- Des effets bénéfiques.

Au début des années 1980, les biocarburants étaient surtout reconnus pour leur capacitéà réduire les émissions de polluants classiques à l’échappement des véhicules. Cettepropriété est aujourd’hui moins mise en avant, dans la mesure où l’évolution destechnologies de combustion mises en œuvre dans les moteurs et le traitement des fumées(pots catalytiques, filtres à particules) a permis de réduire ces pollutions.

Les gaz d’échappement des véhicules contiennent encore, néanmoins, nombre depolluants, tels que les hydrocarbures imbrûlés et le monoxyde de carbone (CO). Ceux-cirésultent d’une combustion incomplète du carburant et sont notamment à l’origine de laformation d’ozone, qui a des conséquences néfastes sur la santé humaine. Une illustrationde ce problème se trouve dans le nombre croissant de journées à « pics de pollution àl’ozone », conduisant les automobilistes à éviter de prendre les transports individuels ou, àdéfaut, de ralentir sur les routes. L’incorporation de biocarburants à l’essence et au gazoleenrichit le mélange en oxygène, ce qui permet d’améliorer l’efficacité de la combustion dansles moteurs et, par-là, de réduire les rejets polluants.

L’utilisation de biocarburants permet aussi aux raffineurs de diminuer l’incorporation dansles essences de certains composés comme le benzène et les aromatiques, dont les effetscancérigènes sont reconnus.

Un dernier point, non-négligeable, concerne les accidents du type marées noires.L’avantage pour les biocarburants est double : D’une part, leur biodégradabilité s’élève à87,4 % pour les EMHV (38.7 % pour le gazole), d’autre part, leur toxicité sur lesmammifères, bactéries et poissons est nettement inférieure (étude AGRICE). Ainsi, force estde constater que même dans la perspective d’une catastrophe, les biocarburants présententdes avantages.

- Un bilan à relativiser.

Si les bénéfices environnementaux induits par les biocarburants ne sont guèrecontestables, ni contestés, la principale réserve exprimée à leur sujet concerne les pratiquesagricoles. Elles sont à l’origine de certaines pollutions, notamment des eaux et des sols. Eneffet, une culture comme le colza est particulièrement exigeante en azote et sensible auxmaladies, ce qui induit des traitements relativement importants. En restant sur l’exemple ducolza, la culture en agriculture biologique est possible, mais son développement à l’échelledes besoins de la filière biocarburant reste aujourd’hui inenvisageable. Le CETIOM (CentreTechnique Interprofessionnel des Oléagineux Métropolitains) mène depuis 1993 des étudessur la question d’une agriculture raisonnée dans ce domaine. Il est dit que, entre 1992 et1997, les cultures de colza ont connu une diminution de 20 % des intrants (Marleix, 2004, p.18).

Restent donc de gros progrès à accomplir, en particulier à l’amont de la transformation,dans les phases de production agricole. Mais globalement, l’exposé des avantagesenvironnementaux montre que, déjà, les bénéfices supplantent largement les inconvénients.Outre ces éléments, les questions d’ordre économique et social n’ont pas encore étéabordées, il s’agit des développements ci-après.

Page 12: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

10

1.1.2 Une économie moins dépendante.

La subordination aux importations.

Dans le secteur de l’énergie, le souci d’indépendance est grand. C’est dans cetteoptique que la France a opté pour le nucléaire. En revanche, concernant les transports, lasituation de dépendance est poussée à son paroxysme, la quasi-intégralité des besoins esten effet couverte par des importations (environ 98,8 % en 2004). Depuis plus de trente anset en particulier depuis le premier choc pétrolier de 1974, la France prône l’amélioration decette situation. Comme il vient d’être dit, les résultats varient fortement selon les secteurs. Ilsera question de la conduite de la politique plus loin (cf. 1.2 et 1.3 notamment). L’objectif, ici,est de montrer les apports positifs du développement des biocarburants sur le problème dela dépendance économique.

La France est donc presque totalement soumise à l’extérieur pour sonapprovisionnement en pétrole brut. Mais, qui plus est, elle le transforme plutôt en essencequ’en gazole. Il en résulte que, concernant les produits raffinés, la France exporte del’essence, mais importe du gazole. L’astreinte liée à la dépendance existe donc à toutes lesétapes. Ainsi, la facture française des importations pétrolières s’élève, en 2004, à 28,3milliards d’€ (soit plus de 80 % de la facture énergétique totale du pays) représentant 85millions de tonnes. Le montant des recettes de la TIPP (Taxe Intérieure sur les ProduitsPétroliers) est d’environ 25 milliards d’Euros pour 2004. Le coût global est donc supérieur àcelui des recettes de l’Etat. Pour les entreprises et les particuliers, il est évident que le coûtest subit de plein fouet, puisque ceux-ci supportent à la fois le prix de la matière et celui de lataxe…

Les cours du pétrole représentent une incertitude inquiétante Le graphique ci-dessous illustre l’évolution sur les quinze dernières années. En dépit de variations, latendance générale est à la hausse. Celle-ci va d’ailleurs croissant depuis 2003.

Il ne s’agit pas de tabler sur telle ou telle perspective ou extrapolation, au résultattoujours fort contestable. Cependant, l’ensemble des observateurs s’accorde sur la probabletendance continuelle à la hausse. En parallèle, il est établi que la demande en carburants va

Doc. 7 : Evolution des cours du pétrole depuis 1990.

01020304050607080

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

févr

-05

mar

s-05

juin

-05

juil-

05

aout

-05

dollars/baril

Source : d’après Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie et Boursorama.

Page 13: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

11

augmenter dans les années et les décennies à venir, en France, mais aussi et surtout dansle monde. La simple mention de l’explosion en cours de la demande chinoise est, à cetégard, déterminant. Ce pays devient l’un des plus gros consommateurs de la planète, et lesperspectives de hausse considérable dans ce domaine sont évidentes. Par ailleurs, les coûtsde production de la matière première connaissent, eux aussi, des évolutions semblables :Dans des conditions « aisées » d’extraction, le coût du baril de brut est de l’ordre d’un à deuxdollars, ce chiffre dépasse les dix dollars dans les nouveaux lieux d’exploitation en eauxprofondes… Raréfaction et coût croissant de production se combinent pour mettre enévidence de mauvaises perspectives sur la situation de l’offre.

Ainsi, le tarissement relatif de l’offre et la croissance persistante de la demandeconduisent à pouvoir affirmer une augmentation continuelle du prix du pétrole.

Une question de sécurité des approvisionnements

Aux problèmes de coûts s’ajoutent des incertitudes d’ordre géopolitique. Ellesexpliquent pour une certaine part les variations des prix, mais suscitent également desinterrogations quant à l’assurance de l’assouvissement des besoins énergétiques, siindispensable à la croissance économique actuelle.

Parmi les grandes zones de production de la planète, nombre sont sujettes à uneinstabilité quasi-chronique. Au premier rang d’entre-elles se trouve le Moyen-Orient.Instabilité politique, troubles et conflits constants… La situation ne semble pas être en voied’amélioration. Il existe donc des problèmes à la source. De ce fait, découle une situation demise en concurrence croissante des pays importateurs. Devant des perspectives deraréfaction, combinées à une demande toujours en forte hausse (l’Agence Internationale del’Energie prévoit une augmentation de 50 % en 25 ans), la question devient particulièrementstratégique. S’il n’existe pas de conflit ouvert, aujourd’hui, entre les grandes puissancesimportatrices (Europe, Chine…), il n’est pas superflu de se poser la question concernant lesannées et les décennies à venir. Le caractère indispensable d’un approvisionnementénergétique suffisant étant avéré, il laisse présager de l’ampleur du problème susdit.

Il est évident que ces éléments engendrent une vulnérabilité criante à terme.Aujourd’hui déjà, en France, ce souci de limiter la dépendance se traduit par l’entretien d’unstock de pétrole. Mais ces réserves permettent une autonomie de seulement trois mois. Ellesvisent donc à répondre à une situation de crise « ponctuelle ». Il serait inenvisageable deconstituer un stock pour une échelle de temps bien supérieure. La France, si elle peutsubvenir à ses besoins lors d’une crise passagère, ne peut donc en aucun cas s’affranchirde sa dépendance au marché du pétrole, au-delà du très court terme.

Ces questions et problèmes concernent le pétrole. L’objectif de ces remarques est,bien sûr, de mettre en avant la nécessaire réflexion sur les alternatives possibles. Unembryon de solution, ou d’allègement de cette charge se trouve dans le développement desbiocarburants participant ainsi à la diversification des sources énergétiques, à la sécurisationdes apports de matières premières, à l’apaisement de tensions affichées ou sous-jacentes…Mais là ne sont pas les seuls bénéfices des biocarburants. Après avoir présenté les aspectsenvironnementaux et économiques, il s’agit désormais de caractériser les avantages pourl’agriculture.

Page 14: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

12

1.1.3 Une agriculture plus forte.

L’enjeu est immense pour l’agriculture. Le développement des biocarburants offredes perspectives nombreuses et variées, à la fois d’ordre économique, politique, social… Ce« nouvel » entrant dans la production agricole pourrait améliorer de manière non-négligeablela situation actuelle. L’introduction de cette première partie du mémoire, sur les intérêts desbiocarburants, insistait sur les aspects environnementaux, économiques et sociaux. Lesbénéfices que pourrait en tirer l’agriculture conjuguent ces trois éléments.

Une diversification des débouchés.

L’intérêt est ici économique. Face aux difficultés d’écoulement de la production et àson corollaire en terme de baisse des prix, l’élargissement des possibilités de valorisationdes récoltes est essentiel. Les utilisations de la biomasse sont extrêmement nombreuses. Ilexiste des marchés de plusieurs natures : alimentaire bien sûr, mais également médicale,industrielle (lubrifiants, plastiques biodégradables…) et, nous concernant, énergétique.Même en se positionnant sur les applications énergétiques, il en ressort une grandediversité. Les biocarburants dans les transports, biocombustibles et biogaz pour la chaleur etl’électricité… De larges possibilités sont donc ouvertes et s’ouvrent à l’agriculture. Deuxgrands effets favorables en résultent : un gage de sécurité pour les agriculteurs et un prixpotentiellement plus élevé.

Dans le principe même, la diversification des débouchés est un facteur qui peuttendre à diminuer la dépendance des agriculteurs vis à vis des cours. Les perspectives dedébouchés s’élargissent en parallèle de la croissance et de la variété de la demande. Unsecond élément, décisif pour la sécurité des débouchés, réside dans le fait que lacommercialisation de la production vers les filières énergétiques est contractualisée. Il en vaainsi pour les deux sources de colza énergétique, par exemple (sur jachère et hors jachèreavec l’aide ACE2). L’agriculteur est donc assuré par avance du débouché, les contrats sonten général de trois ans.

La France a des objectifs et s’est engagée à l’échelle internationale. Il existe unedirective européenne qui oblige les Etats membres à incorporer 5,75 % de biocarburantsdans les carburants d’origine fossile à l’horizon 2010 (cf. chapitre 2.1.2). Il est donc possiblede quantifier, tout du moins de faire une approche chiffrée des surfaces qui seront alorsnécessaires. Il apparaît qu’elles ne sont pas négligeables. Pour 2010, les prévisions tablentsur des besoins d’environ 1 670 000 hectares, soit 5,66 % de la Surface Agricole Utilefrançaise. Si l’on raisonne par rapport aux seules surfaces susceptibles de porter les culturesnécessaires à la production de biocarburants (betteraves, blé, maïs…), la proportion passe à12,46 %3. Ce chiffre met en évidence de façon significative l’intérêt du développement de cedébouché pour l’agriculture.

Plus à l’aval de la production des biocarburants, les perspectives de croissance dumarché de la consommation sont indubitables. Aujourd’hui, le niveau, en France, n’est quede 1 %. Les deux débouchés les plus probables sont les flottes captives (transportspublics…) et l’obligation d’incorporation de biocarburants par les pétroliers. Ainsi, il existe bel

2 La Politique Agricole Commune comprend deux mesures dans ce domaine : l’obligation de gel de terres, avecune possibilité d’y travailler des cultures énergétiques, et l’Aide aux Cultures Energétiques qui, à hauteur de 45€/ ha, soutient ce type de cultures au sein même de la surface agricole utile.3 Source : Association Générale des Producteurs de Blé et autres céréales (AGPB)

Page 15: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

13

et bien une issue « aisée » à la production, observation d’autant plus importante que passerde 1 à 5,75 % d’incorporation en cinq ans induit un marché à croissance particulièrementsoutenue.

Des prix à la production rehaussés ?

L’idée ci-dessus appuyée est donc celle d’un débouché nouveau et assuré, élémentparticulièrement intéressant dans le contexte économique actuel. La question de l’influencedu développement des biocarburants sur les prix demeure en revanche moins évidente.

Jusqu’aujourd’hui, plusieurs systèmes ont cohabité. Certains collecteurs pratiquaientdes prix différenciés, en fonction de la destination de la production (que le débouché soitalimentaire ou énergétique). Il semble très probable que la tendance soit à l’uniformisationdes montants versés aux producteurs. Ainsi, le différentiel direct, selon la destination,apparaît a priori compromis.

Le second élément à prendre en compte est l’influence sur les prix globaux de laproduction. La croissance du débouché énergétique aura t’elle une incidence ? La questionfait débat. Il apparaît d’ailleurs que les réponses données sont généralement partisanes : lesdétracteurs affirmant que les prix ne changeront pas, les défenseurs, au contraire, voyantdans le développement des biocarburants une probabilité de hausse. « Pour moi, le doublemarché alimentaire-biocarburants va permettre de consolider les prix, malgré uneconjoncture difficile. » (Xavier Beulin, président de la Fédération des Oléo-Protéagineux)4, ensomme, il s’agit de créer de la rareté pour faire, mécaniquement, augmenter les prix. Unesynthèse possible de ce débat consiste à dire que, si des incertitudes demeurent, l’incidencedu débouché biocarburants peut être nulle, voire positive… Mais en aucun cas négative.

Des emplois supplémentaires.

Des tendances économiques évoquées, découlent des effets sur l’emploi. C’estdomaine socio-économique d’une importance particulière dans la conjoncture actuelle.Plusieurs études permettent d’appréhender ce sujet 5.

La Commission européenne a estimé en 2001 que, si les biocarburants remplaçaientseulement 1 % des carburants fossiles en Europe, leur production conduirait à la création de45 000 à 75 000 emplois.

A l’échelle de la France, les chiffres varient selon les sources, mais la fourchetteacceptable semble se trouver entre 10 et 19 emplois pour 1 000 tonnes de biocarburantsproduits. A titre de comparaison, la même quantité d’essence peut être produite avec 0,08emploi. Les biocarburants sollicitent donc incontestablement plus de main d’œuvre que lescarburants issus du pétrole. Ce différentiel est vrai aujourd’hui, mais même si la productivitédu travail sera probablement améliorée à terme, l’ampleur de l’écart actuel lui laisse unavenir certain.

Un avantage non-négligeable, en particulier pour la promotion des biodiesels, estconstitué par le fait que cette production se substitue à des importations, aucun emploi

4 La France Agricole, n°3073, 25 février 2005, p. 22.5 Rapport d’information à l’Assemblée Nationale d’Alain MARLEIX, Avis au Conseil Economique et Social deJean-Claude PASTY.

Page 16: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

14

national n’est donc détruit. A l’échelle du pays et du développement rural et local, legraphique ci-dessous met en lumière qu’une majorité des emplois créés l’est dans le milieurural et agricole.

Un rôle nouveau.

En plus des intérêts environnementaux de l’utilisation des biocarburants, au détrimentdes carburants d'origine fossile, une conséquence intéressante de leur développements’apprécie en terme d’image. L’agriculture a parfois, voire souvent, mauvaise presse au seinde l’opinion publique. De nombreux efforts sont effectués, les choses évoluent… Mais leconcept d’une agriculture productrice d’une énergie verte est porteur d’une image fortementrenouvelée et positive. D’une réputation, à tort ou à raison, de pollueur, le milieu agricoletient là une opportunité d’action et de communication plus avantageuse.

Du point de vue des agriculteurs, il existe un intérêt dans le rapport à la professionagricole : la nouvelle PAC confère un rôle d’entretien du paysage, lequel ne crée pas unengouement, la vocation première d’un agriculteur relevant de l’action productive. Lesbiocarburants concilient donc les exigences d’une production « environnementale » avec lesaspirations de la profession agricole.

CONCLUSION 1.1

Le bilan des intérêts du développement des biocarburants est donc riche. Lesconséquences en sont variées (économique, environnementales, sociales…) et palpables(contribution à l’équilibre de la balance commerciale, baisse de la pollution, augmentation etfixation des emplois …). La synthèse en a été présentée dans cette partie. Ces aspectspositifs ne doivent cependant pas masquer l’ampleur des difficultés restant à régler dans cesecteur. Là encore, elles sont de natures multiples et complexes. Il s’agit donc de lesprésenter et de les analyser.

Doc. 8 Répartition des emplois par étapes de production de biodiesel.

2 : cultures et stockage

54%

3 : trituration et raffinage

16%

4 : esterification

8%

5 : transport EMVH

4%

étape 1 : agrofourniture

18%

Source : d’après A. MARLEIX, 2004, p. 29.

Page 17: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

15

1.2 Des freins non-négligeables.

Les entraves à l’essor des biocarburants sont, globalement, de trois ordres : interne à lafilière, politique et technologique. La filière est en effet encore insuffisamment constituée, lapolitique demeure réservée et les progrès technologiques nécessaires sont importants. Si laconjugaison de ces éléments nuit à la rapidité du processus de croissance dans ce secteur,il n’en reste pas moins qu’ils sont tous trois surpassables. Il semble en tous cas possible, àterme, d’en diminuer la prégnance.

1.2.1 Une filière naissante.

Il s’agit d’évoquer ici un manque de structuration, d’interlocuteur unique… A ce déficitrelatif d’organisation, répond un poids d’autant plus faible que le développement desbiocarburants touche, voire s’oppose, à des filières parmi les plus construites (pétroliers…).

Des voix dissonantes

Les biocarburants regroupent des réalités diverses. De la production à leur utilisationen passant par leur transformation, ils mobilisent des acteurs variés, dont les intérêtspeuvent parfois être contradictoires. En outre, le terme unique de biocarburant efface ladiversité des matières premières possibles en production agricole (betteraves, blé, maïs,colza, tournesol…), celle des modalités de transformation (Huile Végétale Pure, EMHV,éthanol, ETBE6…) et d’utilisation (pur, en mélange, sans évoquer les co-produits…).Ainsi, cette filière en devenir nécessite des regroupements transversaux et nombreux.Organiser la concertation entre producteurs, collecteurs, pétroliers voire écologistesn’apparaît pas comme une tache aisée. Il existe bien des associations de promotion(ADECA), des collectifs d’utilisateurs (partenaires diester), de recherche (AGRICE…), maisces initiatives sont autant de voix. Il est évident que celles-ci sont généralementconcordantes (bien que cela ne se vérifie pas systématiquement) mais la communicationapparaît plutôt comme un saupoudrage, dont la portée s’en trouve nécessairement affaiblie.L’idée d’une instance, sinon unique, en tous cas proéminente serait probablement mieuxadaptée.

Des conflits d’intérêts

Une illustration de ce besoin se trouve dans la communication radicalement différenteque profèrent les pétroliers et leurs détracteurs. Les premiers se positionnent comme desacteurs clefs des biocarburants7. Ce point de vue est argumenté par le fait qu’ils constituentle principal débouché, en tant qu’intermédiaires entre production et consommation. Legroupe Total Fina Elf est représenté dans quasiment toutes les instances de réflexion, depromotion et de recherche sur les biocarburants. A noter, par ailleurs, que cette compagnieétait, avant d’être privatisée, une entreprise publique. En dépit de la privatisation, l’Etat étantle garant de la sécurité des approvisionnements énergétiques, un lien fort entre le groupe etl’Etat demeure.

Ainsi, il apparaît que les pétroliers sont des agents incontournables. Mais cetaffichage a des revers : le groupe est considéré comme auteur d’un lobbying puissant. Cepropos des détracteurs est également étayé par plusieurs éléments : les pétroliers freinent 6 Cf. annexe 1.7 Cf. document de communication, Total, s.d.

Page 18: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

16

l’incorporation d’éthanol pur à l’essence, arguant qu’il est plus judicieux de transformer cetéthanol en ETBE. Or, cette étape industrielle réduit l’efficience environnementale de cebiocarburant (transformation par des procédés industriels lourds) et augmente ses coûts(ajoute une étape à la fabrication). Il peut être intéressant, pour expliquer ce phénomène, desouligner que le groupe Total possède trois usines de ce type en France (Dunkerque,Gonfreville et Feyzin)… Il faut rappeler, pour se positionner dans ce débat, qu’au Brésil(principal producteur mondial d’éthanol), les taux d’incorporation directe d’éthanol purs’élèvent à 25 %, sans aucune modification des moteurs. Ceux-ci étant les mêmes enFrance et au Brésil, il est juste de soulever le problème de cette manière. Un second pointvient corroborer la thèse d’un relatif blocage lié à la politique des pétroliers. Dans le cadre dela limitation des émissions polluantes, l’Etat français inflige des pénalités en cas dedépassement de seuils de pollution (mécanisme de la Taxe Globale sur les ActivitésPolluantes). Total se situe bien au-delà des taux légaux et se voit ainsi infliger des amendes.Le cas est déjà significatif, mais le point plus révélateur encore est que le groupe restitue lemontant de ces pénalités sur le prix du carburant à la pompe, se déchargeant sur lesconsommateurs d’une astreinte résultant de ses propres choix.

En dehors de communiqués condamnant ce mode opératoire, les autres acteurs nepeuvent guère influer beaucoup plus, aujourd’hui, sur la situation. Pour faire le point sur lesaspects négatifs lié à la relative jeunesse de la « filière » biocarburants, il faut rappelerqu’elle est particulièrement éclectique et éclatée. D’ailleurs, s’il est probable que la situationira s’améliorant, il est d’ores et déjà possible de dire qu’il n’existera pas une filière unique.L’objet même qu’est le biocarburant induit au moins trois filières distinctes : Ethanol,biodiesel et huile végétale pure (HVP).

1.2.2 Une politique réservée.

Le développement des biocarburants en particulier, et de toute innovation majeure engénéral nécessite une volonté politique réelle. A celle-ci doit, en plus, s’ajouter de l’actionconcrète (les bonnes intentions ne suffisant pas…). La position de la France est partagée, ilsera fait mention plus loin (2.1.3) des démarches positives engagées, le développementprésent se proposant de traiter plutôt des limites de l’action gouvernementale.

Un dossier éclaté

Il est remarquable, déjà, de noter qu’à l’éclatement de la filière, répond celui du suivide ce dossier au sein de l’Etat. Quatre Ministères sont chargés, chacun en fonction de leursattributions, des biocarburants. Le Ministère de l’Agriculture, de l’alimentation, de la pêche etdes affaires rurales ; le Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie ; le Ministèrede l’écologie et du développement durable et le Ministère des transports, de l’équipement, dutourisme et de la mer. Dans ce domaine comme dans d’autres, il est possible de soulignerles problèmes qu’induit cette situation : lenteur des décisions, manque de transmission desdonnées, faiblesse de la clarté de l’analyse, multiplicité des déclarations diverses… Ainsi, lephénomène qui s’observe dans la filière trouve un caractère similaire dans les instancesgouvernementales.

Page 19: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

17

Du temps et de l’argent…

Une seconde remarque d’ordre général consiste à soulever le problème de latemporalité des engagements de l’Etat. La position de principe en faveur du développementdes biocarburants est clairement affichée, mais un des éléments permettant cet essor estune lisibilité dans le temps. Le débat sur la fiscalité appliquée aux biocarburants cristallisebien les contradictions de cet ordre. Les biocarburants bénéficient d’une exonération partiellede la Taxe Intérieur sur les Produits Pétroliers (TIPP), mais l’Etat, de par la nature de notredémocratie, tend à avoir une vision à très court terme (échéances électorales…), les acteursde la filière ont un besoin primordial de visibilité sur une échelle de temps plus longue (lesinvestissements sont lourds). Or, le débat sur la défiscalisation est relancé chaque année,lors de l’élaboration des Lois de Finances annuelles.

Un enjeu majeur, pour lancer (au moins) la filière repose, selon tous les observateurs,sur une défiscalisation des biocarburants. Cependant, l’Etat considère comme une pertenette l’éventualité d’une telle initiative. Le conflit entre ces deux visions entrave lesperspectives, à court terme, d’une croissance potentiellement importante. Les arguments del’Etat se basent sur le fait que la TIPP constitue sa quatrième source de revenus avec 25milliards d’ Euros en 2004 (après la TVA, l’impôt sur les revenus et celui sur les sociétés).Chaque concession entamant cette ressource nuit donc, de prime abord, aux intérêts de laFrance dont la situation financière est passablement exécrable. Mais il faut mentionner quece calcul ne prend pas en compte les externalités positives énoncées au début de ce dossier(durabilité, environnement non-dégradé…) et que, comme énoncé ci-dessus, il s’agit d’unevision à court terme.

Ainsi, outre la volonté affichée, il semble nécessaire de promouvoir le développementdes biocarburants par des mesures concrètes. D’autres ont fait des efforts dans ce domaine,et il sera développé plus tard le cas d’autres pays, au sein desquels un volontarismepolitique actif porte ses fruits (cf. 2.2).

1.2.3 Des besoins technologiques.

A la jeunesse de la filière et à la relative frilosité politique s’ajoutent des exigences enmatière de recherche. Les deux pans de celle-ci, fondamentale et appliquée, sont utiles auxprogrès de la filière.

Démontrer les avantages

Les études sur les avantages environnementaux sont nombreuses. Les améliorationsque suscitent les biocarburants font de moins en moins l’objet de contestations. Reste que,selon la méthode utilisée et les variables prises en compte, subsistent des interprétationspossibles encore trop dissemblables. Il serait donc souhaitable d’établir des bilansécologiques, notamment, particulièrement fiables, afin d’asseoir de façon incontestable lesbénéfices tirés par rapport au pétrole.

Améliorer la production.

Le second enjeu consiste à rationaliser la production. A chaque étape, les marges deprogrès existent.- La production végétale fait l’objet de nombreux travaux pour diminuer les intrants.- Les gains de productivités, donc de coûts, sont potentiellement très importants.

Page 20: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

18

CONCLUSION 1.2

Les limites actuelles qui ont été évoquées suscitent une réflexion quant à leurs solutionspotentielles, quant aux possibilités et aux perspectives de leur résorption. Il s’agit, dans ledéveloppement qui suit, de faire le point sur les éléments indispensables à l’atténuation deces obstacles.

Page 21: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

19

1.3 Les enjeux du développement.

La structure du raisonnement reprend, dans l’ordre, celle appliquée aux freins actuels : lebesoin d’organisation au sein de la filière, celui d’une affirmation plus poussée de l’actionpolitique et enfin, les exigences de résultats dans le domaine de la recherche.

1.3.1 Une filière à consolider.

Les filières agricoles classiques sont souvent d’organisation forte, voire mêmecomplexe à l’excès. Le développement des biocarburants est relativement récent, élémentqui contribue à l’explication des lacunes dans ce domaine. Mais il est manifeste que despartenariats se nouent, dès lors qu’il existe des logiques gagnant-gagnant entre les acteurs.

Du temps et des volumes.

Une image conforte la thèse d’une nécessaire ancienneté d’une filière dans la soliditéde sa structuration : le contraste entre la force des acteurs du secteur des grandes cultureset les difficultés de mise en place d’une organisation autour de l’agriculture biologique. Cettedifférence s’applique de façon également saisissante avec les biocarburants et ce d’autantplus que, en France, le démarrage de la production est plus récent encore (début desannées 1990) que l’engouement pour l’agriculture biologique. En plus d’un élémentd’explication, cette réflexion conduit à des perspectives plus satisfaisantes pour la filière.L’exemple de la filière Diester (cf. infra) est un cas intéressant d’une initiative positive.

Outre le contenant (l’architecture de la filière), la base indispensable audéveloppement de la structuration réside dans le contenu, à savoir l’augmentation desvolumes de production. En dépit de la jeunesse de ce débouché, le document 9 met enévidence sa croissance significative, en France. Celle-ci reste subordonnée aux agrémentsqu’autorise l’Etat. Mais les objectifs annoncés laissent présager d’une hausse forte etcontinue. L’approvisionnement en matière première est par ailleurs une condition sine quanon de la rentabilité des usines de transformation. Il est remarquable de noter que le choixde la localisation de ces sites reflète ce souci premier : au sein de bassins de productionimportants et/ ou en des lieux d’accès à des voies de communication conséquentes (zonesportuaires…).

Page 22: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

20

Ainsi, le souci aujourd’hui manifeste d’un manque de coordination interne estrelativisé par une mise en perspective, et ce à relativement court terme. Un bon indicateurest en effet de rappeler les engagements de la France à Kyoto et les objectifs fixés parl’Europe. L’exemple du partenariat suscité par la filière Diester représente un secondindicateur intéressant.

Un partenariat prometteur.

Depuis 1992, les différents acteurs de la production d’EMHV se sont regroupés au seinde ce qu’il est d’usage d’appeler la filière Diester. Du producteur au distributeur, en passantpar la recherche, chaque entité est représentée. La rapidité de cette émergence est louable.Une part certaine de l’explication se trouve dans le fait que l’ensemble des partenaires entire profit :- Un débouché supplémentaire pour les agriculteurs et les collecteurs (cf. 1.1.3),- Des usines approvisionnées pour les transformateurs,- Un respect de la législation facilité et une diminution des importations pour les

distributeurs.Il est à noter que les consommateurs ne sont pas directement impliqués dans le processus,si ce n’est de façon indirecte, en réponse à des préoccupations environnementales.

Doc. 9 : Production française de biocarburants depuis 1992.

050

100150200250300350

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003

ktep

ETBE EMVH

source : d’après Ministère de l'économie des finances et de l'industrie, observatoire de l'énergie,les énergies renouvelables en France 1970-2003, janvier 2005

Page 23: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

21

L’aspect positif de cette incontestable réussite doit être relativisé. Si les pétroliersvoient dans la baisse des importations de gazole un élément favorable, les groupes françaisconnaissent en revanche un excédent de production d’essence. L’éventualité de laconstruction d’une telle filière, non plus sur le diesel, mais sur l’essence (dont les équivalentsen matières premières pour les biocarburants sont la betterave, le blé, le maïs…) estbeaucoup plus problématique. Le blocage qu’effectuent les pétroliers contre l’incorporationdirecte d’éthanol dans l’essence est une illustration de leur volonté réduite dans ce domaine.

Cet élément conduit à traiter du rôle des instances gouvernementales dans ce conflit,mais également dans la pérennisation et le développement de la filière biodiesel.

Production

collecte

transformation

commercialisation

Recherche,Financement…

promotion

Doc. 10 L’exemple du diester : uncas intéressant.

Page 24: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

22

1.3.2 Un nécessaire volontarisme politique…

Le terme de politique doit être compris dans son acception la plus large : toutes leséchelles de décisions et de pouvoirs possèdent des possibilités d’action. Du pouvoir exécutifet législatif de l’Etat à la mobilisation citoyenne, en passant par le rôle des collectivitésterritoriales.

… Des instances gouvernementales

La clef principale semble se trouver à l’échelon étatique. Ses attributs peuventpermettre un encouragement par le biais de la législation, par l’élaboration de perspectiveset par une organisation plus efficiente de son action.

L’autorité de l’Etat se matérialise notamment par son pouvoir législatif. En matière debiocarburants, deux dossiers retiennent particulièrement l’attention : la fiscalité et l’éventuelleobligation d’incorporation dans les carburants classiques. L’aspect fiscal a déjà été évoqué, ilest cependant important d’y insister, étant donnée son importance. Les allégements fiscauxdont bénéficient les biocarburants doivent être reconduits dans le temps (voire augmentésjusqu’à une exonération totale), au mois à moyen terme. Car s’il est clair que cela autorise laconsolidation de la filière, cela engendre d’autres externalités positives dont il a déjà été faitmention : diminution de la dépendance énergétique, de la dépendance à l’importation(pétrole mais aussi tourteaux, co-produits de l’extraction de l’huile carburant). Cesremarques conduisent par ailleurs à nuancer le coût d’une telle mesure.

Le second volet législatif est plus délicat encore : les acteurs amont de la filièreréclament une obligation d’incorporation, pour pallier au blocage des pétroliers (sur laquestion du mélange direct de l’essence avec l’éthanol notamment). Une telle loi,contraignante, induirait à la fois des débouchés assurés, des perspectives claires et donc,cette indispensable lisibilité. Récemment interrogé sur ce dossier, le Ministre de l’agriculture(Dominique Bussereau), confiait que « L’État prendra ses responsabilités et appuiera sur lesboutons nécessaires en cas de blocage »8.

L’Etat peut également être porteur de perspectives. Dans la mesure où il fixe lesagréments pour les usines de transformation, il conditionne fortement la rapidité (ou non) dudéveloppement de la production. Dans la même entrevue, Dominique Bussereau assuraitque « Les tranches d’agréments pour 2009 et 2010 seront annoncées bientôt, de sorte queles industriels puissent programmer leurs investissements à long terme ». Peut-être faut ilnuancer son propos : une échelle perspective de quatre à cinq ans ne caractérise pasvéritablement l’idée du long terme. Cependant, encore une fois, rares sont les domaines oùl’évolution économique est planifiée de façon aussi assurée sur cinq ans. Ainsi, apparaît unevolonté politique de l’Etat non-négligeable, le cadre de cette action sera éclairci de façonplus précise dans la partie lui étant consacrée (2.1.3).

Le pouvoir décisif de l’Etat ne se joue pas uniquement sur le territoire national. Lesnégociations en cours avec le MERCOSUR, et le Brésil en particulier, ont une incidencecapitale sur les évolutions des biocarburants en France. Un des points de ces tractationsrepose sur la volonté du Brésil de voir réduire les barrières douanières qui bloquent sesexportations de biocarburants vers l’Europe. La dimension incomparable de ce géant desbiocarburants (de l’éthanol en particulier, cf. 2.2.1) confère à ce débat une ampleur décisive.En dépit des coûts de transports, les avantages comparatifs de ce pays engendrent unecompétitivité sans égal. Les négociations portent sur une possible ouverture à l’importation 8 L’Ain agricole n°2714, 29 juillet 2005, p. 20.

Page 25: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

23

européenne de 12,5 millions d’hectolitres d’éthanol à droits réduits, soit plus de dix fois laproduction française (1,14 millions d’hl en 2003). Etant donnée la fragilité de la filière éthanolen France, cela reviendrait à « tuer dans l’œuf » une filière pourtant prometteuse, c’estpourquoi la mobilisation des acteurs contre cette éventualité est importante. Cet élémentmontre l’actualité de la question du protectionnisme et de la préférence communautaire, dontle Premier Ministre Dominique de Villepin, lors de son discours d’orientation générale,réaffirmait l’importance.

L’organisation de la gestion du dossier des biocarburants au sein de l’Etat constituele troisième élément essentiel. Comme il a été dit précédemment, son éclatement entreplusieurs ministères nuit à l’efficacité de l’action. En réponse à ce problème, un responsableinterministériel, rattaché auprès du Ministre de l’agriculture, va être chargé de ce dossier.

Le gouvernement fait donc preuve d’une réelle volonté d’action. Il est évident que sesorientations constituent l’un des enjeux majeurs du développement des biocarburants et deleurs filières. Dans un autre domaine, les autres échelons territoriaux ont également leur rôleà jouer.

… Des collectivités territoriales.

Les compétences et attributions des collectivités locales dans les transports sontvastes. En conséquence, les flottes dont elles disposent deviennent des vecteurs forts, à lafois dans l’utilisation et dans la promotion des biocarburants.

De la commune à la région, entre transports routiers collectifs et parcs de véhiculesde services, les biocarburants pourraient disposer d’un débouché particulièrementintéressant. Les collectivités tendent à vouloir favoriser le respect de l’environnement sur leurterritoire. Il est donc fréquent qu’elles prennent des initiatives en ce sens. En l’occurrence,cette utilisation fait double emploi : un débouché supplémentaire, donc, mais aussi un outilde promotion. Le document ci-dessous vient illustrer ce propos : il s’agit de la cartographiedes adhérents à l’association Partenaires Diester. Il est remarquable que les collectivitéssont des utilisateurs prépondérants. Par ailleurs, le fichier d’adhésion à cette structure faitdes collectivités les cibles clairement privilégiées de ses campagnes9.

9 Cf. annexe 2.

Page 26: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

24

Source : Partenaires Diester.

Ainsi, le domaine des transports routiers publics urbains et interurbains constitue unpotentiel d’importance. L’ensemble de cette flotte dite captive est d’autant plus considérablequ’elle constitue une vitrine possible pour les biocarburants. Il existe donc un aspectpromotionnel dans ce type d’initiatives. Les collectivités soucieuses de leur environnementbénéficient d’une image plus positive, et en retour, leurs actions constituent un médiaintéressant pour la diffusion de l’intérêt des biocarburants.

… De l’action citoyenne.

A l’exemple de la promotion effectuée par les collectivités, d’autres modes de fairevaloir pour les biocarburants passent par la mobilisation citoyenne. Associations, syndicats,médias (notamment internet), voire même discussions en général permettent une diffusionélargie de la publicité sur les biocarburants. Portée à la connaissance du plus grand nombre,cette volonté de développement peut devenir un moyen de pression non-négligeable.

Des perspectives semblent donc s’ouvrir, en dépit des freins évoqués précédemment.Des progrès techniques demeurent encore nécessaires. La recherche doit donc s’impliquerdans ce domaine.

Doc. 11 Les collectivités territoriales : vecteurs d’utilisation et de promotion.

Page 27: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

25

1.3.3 Une recherche forte.

Deux grandes problématiques constituent le corps des travaux en cours ou à venir :la rationalisation de la production et l’amélioration du bilan environnemental.

Affiner les processus de fabrication.

Le premier axe de travail s’attache à augmenter la productivité, à chaque étape de laproduction. L’objectif poursuivi est en particulier de réduire les coûts, accroissant d’autant lacompétitivité des biocarburants face au pétrole.

Les process industriels sont, bien sûr, au centre des réflexions et concentrent ungrand nombre de recherches (Institut Français du Pétrole, ADEME…). Le tableau ci-dessousmontre le différentiel profond qu’il existe entre des pays ayant une longue expérience desbiocarburants (Etats-Unis et surtout Brésil) et la situation en Europe, quant aux coûts deproduction.

Doc. 12 Coûts comparés de la filière éthanol dans le monde.Europe Etats-Unis Brésil

En €/ litre 0,4 à 0,6 0,3 0,23En €/ gigajoule 19 à 29 14 11Source : IFP 2004.

Si les chiffres peuvent susciter l’inquiétude face à une mise en concurrence (vouluepar les Brésiliens), ils laissent également présager des progrès envisageables à terme. Lapolitique menée, depuis les années 1970, par le Brésil (« plan alcool ») lui donne en effetune avance certaine, mais il est probable que cet avantage se réduise relativementrapidement. Il est possible d’affirmer, même, qu’il ne faudra pas 35 ans à l’Europe pourarriver au stade où en est le Brésil (étant donnée la capacité de recherche actuelle).

Travailler sur les atouts environnementaux.

Il ne s’agit pas là de communication, mais d’améliorer à la fois les connaissances etl’efficacité du bilan écologique des biocarburants. Les premières serviront les arguments depromotion, la seconde les objectifs environnementaux.

L’écobilan des biocarburants est favorable, s’il est mis en parallèle à celui descarburants fossiles10. Mais il est intéressant de noter qu’il est envisageable de l’améliorerencore. Le comparatif entre les biocarburants et les carburants fossiles est éloquent. Lesdocuments trois et quatre de ce dossier mettent en lumière successivement le bénéfice del’utilisation et les perspectives d’efficience croissante. L’éthanol mobilise aujourd’hui, pour saproduction, 2,34 fois moins d’énergie fossile que l’essence. Ce rapport est de 3,26 entrel’EMHV et le gazole. Les estimations pour 2009 avancent un argument important :l’amélioration escomptée est de l’ordre d’un écart croissant d’environ 50 %. Autrement dit, lebilan déjà largement positif va s’améliorer de façon significative et ce à très court terme.

10 Cf. l’étude de l’ADEME, 2002.

Page 28: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

26

L’identification des contributions relatives des différentes étapes de production apporteun éclairage intéressant. Selon l’étude de l’ADEME, il apparaît que :- L’étape de culture contribue pour 40 % aux bilans des huiles de colza, pour 20 %

seulement pour le blé.- L’étape de première transformation industrielle (transformation du blé en éthanol, des

graines oléagineuses en huile) contribue pour l’éthanol à 80 % du bilan, 20 % pour leshuiles.

- L’étape secondaire de transformation telle que l’estérification de l’huile contribue à 40 %environ du bilan énergétique des EMHV. La synthèse en ETBE de l’éthanol contribue à80 % à la mobilisation d’énergies non-renouvelables.

Les enseignements à tirer de cette étude sont multiples, mais l’attention est portéespécialement sur deux éléments. Pour la filière EMHV, les efforts doivent surtout êtreconcentrés sur l’étape de culture, particulièrement sensible. En revanche, la partprépondérante de l’énergie utilisée pour la filière blé se trouve à l’étape de sa transformationen ETBE. L’intérêt de l’incorporation directe d’éthanol, avant transformation, est donc icifortement appuyé.

Il est donc acquis que des progrès importants vont permettre aux biocarburants d’asseoirde manière plus poussée encore leurs qualités. La recherche s’est d’ailleurs récemmentétoffée d’un nouveau pôle de compétitivité : le pôle agro-ressources de ChampagneArdennes Picardie a été conforté par le Premier Ministre comme l’un des 67 pôles decompétitivité retenu en juillet 2005. Cela signifie, pour ce centre d’études sur lesbiocarburants (entre autres), un accroissement substanciel des subventions.

CONCLUSION 1.3

En dépit de l’importance des limites que connaît actuellement le développement desbiocarburants en France, il apparaît que la situation va s’améliorant. Les perspectivespositives ont plusieurs origines : la volonté que démontrent les filières, celle de l’Etat aussi,ainsi que les résultats attendus de la recherche.

Page 29: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

27

CONCLUSION 1 Les biocarburants comme élément de solution.

Il a été question, au cours de cette partie, des facteurs qui entrent en compte dans laprospection sur le devenir des biocarburants. Les examens successifs (intérêts, freins,enjeux) ont autant permis de démontrer le bénéfice qu’induit leur utilisation que de souleverles besoins et enjeux qui leur sont liés. Une synthèse des intérêts consiste à dire que lesbiocarburants s’intègrent bien dans le concept du développement durable, en tant queproduction économiquement, écologiquement et socialement viable. Les obstacles audéveloppement demeurent conséquents, mais les actions engagées ou prévues pour aller àl’encontre de ces problèmes semblent porteuses.

Partant, il s’agit de mettre en lumière les perspectives, actions et résultats. La secondepartie traite de l’état des lieux des biocarburants. Il est contrasté : les engagements diffèrentselon les Etats, et, par voie de conséquence, les filières qui résultent de cette volonté sontéclectiques. A la suite, donc, de l’examen du contexte général, l’objectif est maintenant dedévelopper deux points : quelle est la situation en France et ce que, avec d’autres exemples,des expériences à l’étranger peuvent apporter à la réflexion.

Page 30: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

28

2 Un état des lieux contrasté.

La question de l’évolution du marché du pétrole, celle de la pollution globale, la pressionde l’opinion publique… L’explication de la poussée actuelle du débat sur les biocarburants setrouve notamment dans ces éléments. Mais si ces données sont globales, les réponsesenvisagées n’ont pas été les mêmes partout. La situation évolue vers une volonté d’entrerdans ces démarches et de les soutenir. Il en résulte d’une part des engagements, d’autrepart des réalités distinctes.

La revue des engagements pris notamment par la France permet d’appréhenderl’évolution à venir (2.1). L’observation de la situation dans d’autres pays est riched’enseignements sur les chemins parcourus et à parcourir (2.2).

Page 31: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

29

2.1 Des engagements positifs.

La prise de conscience de la dérégulation des mécanismes climatiques et du rôle del’Homme dans ces évolutions a permis de générer des dynamiques intéressantes. De lareconnaissance de l’influence de l’Homme à l’élaboration de plans d’actions, les processusont été suivis par de nombreux pays, dont la France11. Il en résulte des décisions à tous leséchelons, des Nations Unies à l’Etat français.

2.1.1 Des décisions internationales.

Elles se fondent principalement sur deux points : les déclarations de principes et lesprogrammes d’actions, les premiers précédant généralement les seconds. L’organisation etle suivi de ces projets, calendriers, études… sont effectuées par des instancesinternationales.

De Stockholm à Kyoto.

En 1972, la Conférence des Nations Unies sur l’environnement a adopté une série deprincipes en faveur d’une gestion écologiquement rationnelle de l’environnement.L’innovation majeure de cette « Déclaration de Stockholm » est d’avoir placé les questionsécologiques au rang des préoccupations internationales.

En 1992, à Rio de Janeiro (Brésil), les participants à la Conférence des Nations Uniespour l’environnement et le développement (connue sous le nom de sommet « PlanèteTerre ») ont adopté une déclaration12 qui a fait progresser le concept des droits et desresponsabilités des pays dans le domaine de l’environnement. Celle-ci témoigne de deuxgrandes préoccupations apparues pendant l’intervalle de vingt années séparant les deuxconférences : la détérioration de l’environnement et la thèse que le progrès économique àlong terme est conditionné par une protection efficace de cet environnement. La déclarationde Rio n’est pas juridiquement contraignante, cependant, elle porte en elle l’embryon demesures plus concrètes.

Le texte est construit autour de 27 principes. Sept d’entre-eux s’appliquent de près oude loin, aux biocarburants, puisqu’ils pointent l’indispensable durabilité du développement(principes 3 et 8), la responsabilité des pays développés dans l’effort à fournir (principe 7),les besoins en matière de recherches (principe 9) et le nécessaire soutien législatif aubénéfice de l’environnement (principes 11 et 13).

Le protocole de Kyoto13, rédigé en décembre 1997, résulte de cette progression desidées, et de la volonté d’agir. Il exige des pays signataires de réduire d’ici 2012 leursémissions de six gaz réchauffant la planète, à commencer par le gaz carbonique (CO2). Sonentrée en vigueur date, quant à elle, de février 2005. Il était prévu, en effet, que les pays leratifiant représentent au moins 55 % des émissions de CO2 des pays industrialisés. LesUSA ayant rejeté ce protocole, sa validité était suspendue à la ratification de la Russie (17,4% des émissions de 1990), obtenue en novembre 2004.

11 Les principaux absents de cette prise de position sont les USA (un des principaux pollueurs mondiaux), dont leprésident vient tout juste de reconnaître, au sommet du G8 de Gleneagles, en Ecosse, du 6 au 9 juillet 2005, quel’Homme pouvait influer sur le climat.12 Cf. annexe 3.13 Cf. annexe 4.

Page 32: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

30

Les innovations majeures de cet accord international résident dans son caractèrecontraignant, et dans les engagements chiffrés qu’il induit. La France et l’Union européennese sont fixé un objectif de réduction de 8 % de l’émission de leur gaz à effet de serre (GES)d’ici 2012 (en comparaison du niveau de 1990).

Les conséquences de l’entrée en vigueur.

Les détracteurs du protocole avancent généralement trois arguments :- Le manque d’ambition face à l’ampleur des besoins pour modifier l’évolution du climat,- L’absence de ratification par des émetteurs de GES majeurs (USA, Australie…),- Le système d’échanges de « droits à polluer » (de quotas d’émission des GES),

permettant aux uns d’en racheter aux autres, à l’image du système en vigueur avec lesdroits de pêche, fausse l’appréciation des efforts effectués.Ces observations ne sont pas dénuées de pertinence, cependant, il demeure

incontestable que le protocole de Kyoto constitue un pas sans précédent dans l’histoire de lalutte contre le réchauffement climatique et donc, dans la promotion et la nécessité del’utilisation des biocarburants.

Instrument contraignant, le protocole de Kyoto implique un suivi des mécanismes de laréalisation de ses objectifs. Celui-ci se caractérise par des procédures et des instances devalidation.

Les réunions des signataires prennent la forme de « conférences des parties ». Dixséances de ce type ont déjà eu lieu, la onzième est programmée à Montréal en décembre2005. Plus nombreux lors de la mise en œuvre et de la période suivant l’élaboration duprotocole, ces rassemblements ont désormais lieu à intervalles plus réguliers, de l’ordre d’unpar an. Les ordres du jour ont généralement pour objet la modification de parties du texte, lacoordination des mesures…

Des organes de suivi jouent également un rôle important. C’est le cas, par exemple, duGroupement Intergouvernemental d’experts sur l’Evolution du Climat (GIEC, IPCC enanglais), branche scientifique chargée de l’observation et de la prospection dans cedomaine. Mais l’outil clef de ce protocole est « l’Organe subsidiaire de conseil scientifique ettechnologique ». Son rôle est d’examiner les variations des émissions des pays ayant signéle protocole. Il est donc l’observateur de la tenue des objectifs annoncés. Pour fournir unexemple de ses attributions, il est entendu, par le biais de l’article 3 de la convention, que« chacune des parties (…) devra avoir accompli en 2005, dans l’exécution de sesengagements au titre du présent Protocole, des progrès dont elle pourra apporter lapreuve ». Preuves qui devront être soumises à l’appréciation de cet Organe subsidiaire.

De cet état de fait découle l’obligation de mise en œuvre des dispositions du protocolepar l’Union européenne et ses Etats membres. C’est ce dont il est question dans la suite dece raisonnement, en appuyant particulièrement sur les conséquences pour ledéveloppement des biocarburants.

Page 33: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

31

2.1.2 Des effets sur les orientations communautaires.

L’impact sur les décisions, à l’échelle européenne, se matérialise dans deux voiescomplémentaires : leur distinction repose sur le caractère contraignant ou incitatif desmesures mises en place.

La PAC, un instrument d’encouragement.

Les réformes successives de la Politique Agricole Commune intègrent peu à peu deséléments favorables au développement des cultures énergétiques.

La révision de 1992 à introduit le principe du gel obligatoire d’une partie de la SurfaceAgricole Utile (SAU), en réponse à des problèmes de surproduction et de la baisse des prixqui l’accompagne. Sur cette jachère, il est néanmoins possible de pratiquer des cultures non-alimentaires, dont font partie les cultures énergétiques.

La mise en place de cette mesure augmente de façon conséquente le potentiel dedéveloppement de ce type de production. En effet, le taux de gel obligatoire est fixé à unpourcentage de la SAU en Céréales et Oléo-Protéagineux (COP), ce qui leur garantit ainsiune réserve assurée, puisqu’elles sont écartées de la concurrence avec les autresproductions. La part de la surface allouée à la jachère obligatoire était, en 1999, en France,d’environ 20 % de la SCOP (il a diminué depuis à 10 %). La PAC, dès 1993, a donccommencé à influer sur le développement des biocarburants.

La réforme de juin 2003 pousse encore la logique du soutien à ce type de productionen créant une aide spécifique : l’Aide aux Cultures Energétiques (ACE). Son caractère plusciblé sur la production à vocation énergétique constitue un pas supplémentaire.

Le montant est de 45 € par hectare. Les conditions d’admissibilité reposent surtoutsur le fait que cette aide peut être accordée uniquement si les superficies concernées nesont pas comptabilisées dans la jachère obligatoire. Les cultures énergétiques font doncirruption au sein même de la SCOP, ce qui accroît leur développement potentiel. Un plafondde superficie maximale éligible à l’ACE a été défini à l’échelle européenne. Il est fixé à 1 500000 hectares. Ce chiffre sera insuffisant puisque, pour la France, 2 millions d’hectares serontnécessaires pour les objectifs de production de 2010. Le tableau ci-dessous illustre ceproblème : avec un peu plus de 20 % de la jachère obligatoire allouée aux biocarburants(cas de 2004), il faudrait déjà plus de 1,7 millions d’hectares d’aides ACE. Même avec 100 %de cette jachère pour les biocarburants (cas inapplicable), plus de la moitié du plafondd’aides européen serait absorbé par la France.

Doc. 13 : Un plafond d’aides ACE insuffisant.

Objectif 2010% de la jachèreobligatoire enbiocarburants

Equivalent en milliersd’hectares*.

Nombre d’hectaresbénéficiant de l’aide

ACE (milliers)20,91 (cas 2004) 241 1 759

30 346 1 65450 577 1 423

2 millions d’ha pourrépondre à ladirective 2003/30/CE 100 1 153 847* Calcul basé sur la jachère de 2004, soit 1 153 202 ha.

Un rapport d’évaluation de l’efficacité de cette mesure, et des éventuellesmodifications à y apporter est prévu d’ici fin 2006. Il serait intéressant de revoir le

Page 34: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

32

plafonnement de cette aide à la hausse. Par ailleurs, un rapport de l’Office d’évaluation deschoix scientifiques et technologiques du Parlement européen s’est prononcé en faveur duredéploiement des aides PAC vers les cultures énergétiques, c’est à dire d’uneaugmentation du montant de l'ACE (le rapport de J.C. Pasty suggère une prime de 100 €14).

Un paramètre intéressant se trouve dans les modalités de distribution de ces soutiensaux cultures non-alimentaires, et énergétiques en particulier : Afin de pouvoir assurer uncontrôle sur la destination effective de la production (hors du circuit alimentaire), la PACexige que ces cultures soient encadrées par un contrat entre le producteur et letransformateur. En dépit des contraintes administratives que cela engendre, les agriculteurscomme les transformateurs tirent un bénéfice certain de cette exigence : les premierss’assurent un débouché et les seconds leur approvisionnement.

L’examen des initiatives en faveur du développement des biocarburants, dans lecadre de la PAC montre bien la volonté de l’Union européenne d’appuyer ces démarches.Elle s’y emploie d’une manière plus significative encore à travers deux directives.

Deux directives porteuses.

Les deux textes, parus en 2003, se complètent pour aller en direction d’un emploiaccru des biocarburants en Europe. Elles ont pour objet, respectivement :L’utilisation des biocarburantsLa fiscalité qui leur est appliquée.

- La directive visant à promouvoir l’utilisation de biocarburants (2003/30/CE)

Arrêtée le 8 mai 2003, cette directive du parlement et du conseil européen fixe desobjectifs et un calendrier concernant l’utilisation des biocarburants dans les Etats membres.Le projet initial imaginait un scénario dans lequel ces objectifs avaient valeur d’obligation. Teln’a pas été le principe retenu dans la version finale. Toutefois, les Etats membres doiventrépondre à des contraintes importantes.

Ils sont amenés à fixer des objectifs nationaux indicatifs, sur la base d’une valeur deréférence de 2 % de biocarburants mis en vente sur le marché au 31 décembre 2005, puisde 5,75 % fin 2010. Chaque année, les Etats doivent présenter à la Commission européenneun rapport établissant les mesures prises pour promouvoir l’utilisation, la part desbiocarburants dans la quantité totale de carburants vendus ainsi que le niveau de leursobjectifs.

L’éventuelle divergence de ces derniers avec les valeurs de référence européennedoit répondre à une explication précise. Dans le cas contraire, la directive prévoit desmesures d’incitation à l’encontre des pays concernés, dans un premier temps, voire mêmedes valeurs obligatoires à respecter par la suite.

La conformité de l’action des Etats membres par rapport à cette directive n’est pasgénérale. Neuf Etats ne respectent pas certaines dispositions prévues : Huit sont en retarddans le processus de transposition de la directive dans leur droit national ; trois n’ont passoumis leur rapport à la Commission ; deux de ces rapports posent problème sur lesobjectifs affichés. Ce dernier cas est celui de la France, qui n’indique qu’un objectifprovisoire. 14 Pasty JC, 2004, p. 10

Page 35: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

33

La Commission européenne a adressé à cet ensemble plusieurs mises en garde dontla dernière stipule qu’elle s’apprête à engager des poursuites devant la Cour européenne dejustice.

Il est incontestable que cette directive constitue une avancée décisive dans lapromotion des biocarburants. Elle est complétée par la directive suivante.

- La directive sur la fiscalité des biocarburants (2003/96/CE)

Arrêtée le 27 octobre 2003, cette directive porte sur le thème de la taxation desproduits énergétiques en général et de l’électricité. Elle n’est donc pas spécifique auxbiocarburants mais elle comprend des éléments en leur faveur.

Selon son article 16, les Etats membres auront la possibilité d’appliquer uneexonération partielle ou totale de taxes (TVA exclue) sur les biocarburants. Un opérateuréconomique pourra bénéficier de cette disposition pour une période de six ans renouvelable.Il est également prévu que cette exonération soit modulée selon les prix des matièrespremières, agricoles et pétrolière, afin d’éviter les surcompensations.

L’avancée majeure est donc la reconnaissance du nécessaire appui, fiscal enl’occurrence, à apporter aux biocarburants. En France, le problème de la fiscalité reposenotamment sur le caractère annuel de la réactualisation de la réduction de la TIPP, qui nuit àl’assouvissement du besoin de perspectives à long terme de la filière. Mais si cela constitueun frein certain, la présente directive ne peut être mise en cause dans ce phénomène.

- Deux projets intéressants.

Le dynamisme de l’Union européenne se prolonge avec deux programmesdirectement liés aux biocarburants. Il existe, d’abord, un projet d’une nouvelle directive.Celle-ci viserait à relever les valeurs limites de volatilité des essences en vue de leurapplication aux mélanges avec les biocarburants. Cette possibilité, si elle se concrétisait,faciliterait grandement le développement de l’éthanol en mélange direct à l’essence, dont lavolatilité est plus forte. Cela permettrait de répondre aux pétroliers, pour lesquels ce pointconstitue le principal argument, et donc de contribuer aux déblocage de la situation.

Le second projet entérinerait des objectifs ambitieux pour les biocarburants. L’Unioneuropéenne souhaite porter, à terme, le taux d’incorporation des biocarburants à 20 % dutotal des ventes de carburants. Pour illustrer le caractère fort de cette ambition, il faudraitmultiplier par 20 le pourcentage actuellement atteint en France. Ce projet reste à mieuxdéfinir, mais il démontre une volonté claire.

De même que les évolutions à l’échelle internationale jouent sur la volonté del’Europe, celle-ci influe sur la politique française. La France a entamé une démarche positivesur la question des biocarburants, les résultats en seront exposés plus loin (cf. 2.2.3), mais ilfaut, dans un premier temps, rendre compte du chemin parcouru et de l’action engagée.

Page 36: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

34

2.1.3 La France sur la voie.

Les facteurs d’explication de la prise de conscience de la nécessité d’agir sontmultiples. Les obligations dont il vient d’être fait mention en font partie, mais la motivationrépond également à des perspectives économiques intéressantes, à une opinion publiquefavorable… Le dossier des biocarburants est donc porteur car conjointement nécessaire etpopulaire. De cet état de fait résultent d’importants moyens de communications et desmesures significatives.

Un affichage fort.

Un premier aspect de l’implication des gouvernements dans la volonté de réduire lesémissions de Gaz à Effet de Serre (GES) ressort de la communication massive qu’il produità ce sujet.

Un point central de cet effort est la réalisation, par l’Agence De l’Environnement et dela Maîtrise de l’Energie (ADEME), d’une campagne de publicité intitulée « Faisons vite, çachauffe ». Par le biais de l’ensemble des médias (télévision, radio, internet…), l’objectif estnotamment de sensibiliser le grand public aux enjeux du réchauffement climatique et de lamaîtrise de l’énergie. Il est remarquable de souligner la vigueur appliquée à cette campagne.Deux temps distincts en ressortent : un message mobilisateur et populaire d’abord,« Economies d'énergie, faisons vite, ça chauffe » associé à la chanson " Paroles, Paroles "de Dalida, en phase avec l'enjeu de la communication. Ensuite, une seconde phase destinéeà montrer les exemples à suivre, en matière de transports notamment.

Doc. 14 : Mobiliser le grand public.

Source : ADEME

Cette puissante campagne (dans ses moyens en tout cas) n’est pas spécifique auxbiocarburants. Il est, en revanche, flagrant de voir que ceux-ci mobilisent toute l’attention desgouvernements successifs. Le recensement du terme « biocarburants » dans les discoursofficiels est impossible, tant l’ensemble des acteurs institutionnels l’emploient. A titred’exemple, l’ancien Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin s’est déplacé en septembre 2004sur le site d’une usine Diester (à Venette, près de Compiègne), accompagné du secrétaired’Etat à l’agriculture et du Ministre de l’écologie. Il s’y est rendu pour annoncer de nouveauxagréments à la production de biocarburants, mais également pour afficher la positionvolontariste de l’Etat, afin que celle-ci soit relatée dans la presse.

Page 37: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

35

Doc. 15 : Afficher la volonté de l’Etat.

Source : www.premier-ministre.gouv.fr

Outre cette mise en avant constante des grands principes d’engagement, il est possiblede tirer des interventions nombreuses les objectifs chiffrés que fixe le gouvernement. Ceux-civeulent répondre aux programmes et contraintes internationaux et européens. Les étapesaffichées à ces échelles sont les suivantes :- Atteindre un taux d’incorporation de biocarburants dans l’ensemble des carburants de

5,75 % d’ici 2010, dans le cadre de la directive européenne n°2003/30/CE.- Diminuer les émissions de GES de 8 % d’ici 2012, dans le cadre du protocole de Kyoto.- Atteindre des réductions plus ambitieuses encore dans quelques décennies (2020,

2050…).Pour être en concordance avec ces objectifs, la France a mis en place un panel de

mesures qui se matérialisent, aujourd’hui, dans le Plan Climat principalement.

Des mesures en conséquence.

L’action de l’Etat dans le domaine des questions climatiques est, depuis 2000,encadrée par des plans nationaux.

Sous le gouvernement de Lionel Jospin, il s’agissait du Plan National de Lutte contrele Changement Climatique (PNLCC). Pour les transports, les mesures de ce Plan visaient àdiminuer les émissions de 4 millions de tonnes équivalent CO2 par an (pour information :une tonne d’EMHV utilisée = 2,5 t éq. CO2 économisées). Quatre grands axes définissaientles modalités d’actions : les mesures fiscales, les améliorations technologiques, lespolitiques publiques territoriales et la sensibilisation des usagers.

Le bilan de cette première initiative importante en la matière demeure mitigé.Concernant les mesures fiscales, le dispositif le plus porteur n’a pas été mis en place. Ils’agissait de la taxe « carbone » qui projetait d’appliquer, à travers la TIPP, une fiscalité surles émissions de CO2. Cette seule mesure représentait le quart du programme de réductiondes émissions de GES. D’autre part, l’extension du parc automobile français annule l’effetdes améliorations technologiques. Enfin, un retard considérable des politiques publiquesterritoriales est observé. La mise en place de Plans de Déplacement Urbains (PDU), visantnotamment à favoriser l’emploi des transports collectifs, est en effet peu fonctionelle et donctrop peu efficace.

Page 38: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

36

Le changement de gouvernement s’est accompagné d’un nouvel outil, remplaçant lePNLCC : le Plan Climat.

Ce document regroupe les objectifs et mesures des gouvernements Raffarin puis deVillepin. Le premier date de 2003, il a été reconduit (et modifié) en 2004. Il recense unesoixantaine de mesures, dans tous les secteurs de l’économie. L’annonce des objectifs y estrenouvelée : Réduire les émissions de GES de 5,75 % d’ici 2010 pour les stabiliser, puis lesdiviser par quatre d’ici 2050. L’ensemble des dépenses liées à ce Plan Climat est évalué à90 millions d’Euros (y compris les crédits de la recherche et les mesures fiscales). Certainesmesures ciblent plus particulièrement le secteur des transports et des biocarburants.

Dans l’ordre des actions envisagées, les biocarburants figurent en seconde position(après le bonus-malus, prime incitative à l’achat de voitures propres), point remarquableétant donné que cette mesure était absente du Plan de 2003. Sur les 54 millions de tonneséquivalent CO2 par année que le protocole de Kyoto exige d’économiser, cette seule actionreprésente un gain annuel de 7 millions de tonnes. Les principes de cette mesure reposentsur la croissance des agréments à la production de biocarburants et sur la fiscalité qui leurest appliquée.

- Des agréments croissants.

La politique d’encadrement de la production de biocarburants repose sur l’attributionprogressive d’autorisation de transformation. Afin de répondre aux objectifs précités, l’Etatprocède à de régulières augmentations de ces quotas.

Doc. 16 : Des agréments aux surfaces nécessaires.Quotas EMHV

(milliers detonnes)

Equivalenthectares colza

(milliers)

Quotas Ethanol(milliers de

tonnes)

Eq. Ha. Céréales(milliers)

1999 350 450 270 182003 365 475 219 142005 649,5 843 321 202007 (annoncés) 845 1 097 539 342010 (prévus) 1 500 1 948 789 52

Les chiffres énoncés dans ce tableau doivent être appréhendés avec recul. Les sourcesutilisées pour sa réalisation sont variées, les divergences de résultats selon l’une ou l’autresont importantes. Cependant, les ordres de grandeurs demeurent valables. Ainsi, cedocument nourrit plusieurs réflexions :- Le potentiel de développement apparaît plus prometteur avec le colza, plutôt qu’avec le

blé. En effet, la betterave représente 70 % des surfaces nécessaires à la productiond’éthanol et les rendements sont beaucoup plus importants en betterave et blé qu’encolza. En outre, la diésélisation croissante du parc automobile français induit undébouché plus sûr pour l’EMHV (colza) que pour l’éthanol.

- Le débouché que représente les biocarburants pour le colza devient particulièrementimportant. A l’horizon 2010, les besoins en surface dépassent la SAU en colza actuelle.La sole de colza, intégrée dans la rotation, n’est pas démultipliable (il serait cependantenvisageable de passer de quatre à trois ans). Il est possible de présager d’unaccroissement des rendements, qui viendrait modérer l’augmentation des surfaces.

Page 39: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

37

L’ampleur des évolutions prévisibles met en lumière l’ambition de ce projet, d’une part,ainsi que les conséquences importantes sur l’état des filières concernées, d’autre part. Resteà savoir si ces objectifs seront atteints. Dans cette optique, l’Etat a également mis en placeun système fiscal spécifique aux biocarburants.

- Une fiscalité particulière.

Les biocarburants bénéficient, depuis 1992, d’une exonération partielle de TIPP afinde compenser leurs surcoûts de production. Cette défiscalisation est accordée auxbiocarburants produits par des unités ayant reçu un agrément. Le tableau ci-dessous indiqueles montants de défiscalisation.

Doc. 17 : Une exonération partielle de TIPP (en €/ hectolitre)1992 1994 1998 2003 2005

EMHV totale 35,06 36,59 35,06 33Ethanol totale 50,23 50,23 50,23 37

Avec la loi de finances 2005 (article 32), une nouvelle taxe est introduite. La TaxeGénérale sur les Activités Polluantes (TGAP) est une pénalité infligée aux distributeurs decarburants. Elle se base sur la mise à la consommation d’essence et de gazole. Son taux estcroissant, de 1,2 % en 2005 à 5,75 % en 2010. Il est cependant diminué de la part debiocarburants incorporés dans les carburants classiques. Autrement dit, pour bénéficierd’une exonération totale de cette taxe, les distributeurs doivent respecter les taux voulus parle gouvernement, notamment l’objectif de 5,75 % d’incorporation en 2010. Il faut rappelerque l’effet escompté de cette mesure est anihilé par la méthode de contournement mise enplace par les pétroliers, qui restituent le montant de cette astreinte sur les prix du carburant àla pompe.

CONCLUSION 2.1

Aux programmes en cours répondent les actions simultanées de l’Europe et de laFrance. Devant l’ampleur des ambitions promulguées, les mesures peuvent semblerlimitées. Par ailleurs, le regard sur les surfaces nécessaires, s’il est un gage de débouchéspour la production, pose la question de sa faisabilité réelle.

En dépit des ces points de nuance, il faut souligner que la force des objectifsprovoque une relative rapidité des décisions. Peu de filières, quelles qu’elles soient,bénéficient d’aussi lourds engagements.

Après avoir saisi ces engagements, il est nécessaire d’en examiner les résultats.L’observation de cas étrangers permet de compléter le diagnostic et d’enrichir lesperspectives.

Page 40: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

38

2.2 Des filières éclectiques.

La méthode de l’étude comparative permet de soulever différents points intéressants, enparticulier en exposant le cas de la France à la suite des principaux producteurs mondiaux(Brésil, USA) et des voisins européens plus en avance (Allemagne, Espagne). La revue desmesures adoptées, en particulier, éclaire les impacts de la politique sur la production debiocarburants.

2.2.1 Deux géants mondiaux.

Le Brésil et les Etats-Unis sont les deux principaux producteurs d’éthanol au monde.Le graphique ci-dessous illustre la quasi-hégémonie de ces deux pays.

Doc. 18 : Une production quasi-exclusivement américaine.

Avec 95 % de la production, ces deux pays ont une mainmise sur le dossier del’éthanol. En regard, la production française représente un peu moins de 0,5 % du total.Quels sont les éléments d’explication qui permettent de comprendre cette différenceprofonde ?

Le Brésil : précurseur mondial.

A la suite du premier choc pétrolier, en 1973, le Brésil lance le programme Proalcool.Il s’agit de promouvoir l’alcool de canne à sucre comme substitut au pétrole pour réduired’autant sa facture énergétique.

La canne à sucre, introduite par les colons portugais au 16e siècle, constitue uneproduction de premier ordre au Brésil. Avec plus de 15 millions de tonnes, il est le secondproducteur mondial et possède encore de larges réserves, en vue de l’accroissementpotentiel des surfaces (actuellement de 5 millions d’hectares). D’autre part, la technologie detransformation du sucre en éthanol y est connue depuis la seconde guerre mondiale. Lesconditions pratiques et techniques sont donc réunies. Reste à examiner l’aspect politique.

Production mondiale d'éthanol carburant : 19 Millions de t.

Brésil52%

Etats-Unis43%

Autres5%

Source : Institut Technique du Pétrole, 2004.

Page 41: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

39

La politique du Brésil se définit par trois grands volets : la réunion des acteurs, lessubventions et les travaux sur l’adaptation des moteurs.

Coordonner l’action des différents protagonistes y prend une ampleur particulière :l’Etat a du réunir sur le sujet sept Ministères, le principal groupe pétrolier Petrobras(entreprise publique) ainsi que les planteurs et les consommateurs.

Mais le point clef de l’action de l’Etat repose sur la question financière. L’effort dansce domaine a été double : des subventions directes à la production, diminuant le coût derevient et, en parralèle, une surtaxation des carburants fossiles. Ce système a si bienfonctionné qu’à la pompe, le consommateur paie deux fois moins cher l’éthanol que le superou le diesel.

Enfin, un important travail a été effectué avec les constructeurs, afin d’adapter lesmoteurs. Cet élément a permis au Brésil de produire, en 1985, 96 % de voitures fonctionnantà 100 % d’éthanol. Depuis, l’option du mélange a été choisie. Mais le taux d’éthanol dansl’essence s’établit tout de même à 25 %. Il faut, à cet égard, souligner que le taux demélange maximal, en France, n’est que de 5 %, alors que les moteurs sont les mêmes…

Les enseignements à tirer de cette expérience sont multiples. Le principe del’efficacité d’un Etat volontariste est ici démontrée. Par ailleurs, la pression sur lesconstructeurs et les pétroliers a porté ses fruits : de la surtaxation des carburants fossiles àl’adaptation des moteurs, ce qui est présenté comme impossible en France à eu lieu auBrésil. En revanche, il est évident que la dimension du pays et ses capacités de productiondépassent largement les possibilités qui sont offertes en France.

Les Etats-Unis : la force législative.

Les USA sont les seconds producteurs et utilisateurs d’éthanol carburant au monde.La situation des Etats-Unis résulte d’un couplage d’efforts fiscaux et législatifs.

Sur la question fiscale, depuis 1978, le mélange essance/ éthanol à 10 % bénéficied’une réduction des taxes. De 14,5 €/ hectolitre au départ, elles sont progressivementdiminuées pour atteindre 12,35 € en 2005. A cette exonération fédérale s’ajoute unedéfiscalisation jusqu’à 5 €/ hectolitre attribuée en particulier par les Etats producteurs. Cettedéduction fiscale est inférieure à celle que connaît la filière française (37 €/ hl en 2005), maisla différence réside dans le fait que cette exonération, crée en 1978 pour 12 ans a étéreconduite plusieurs fois à des échéances plus longues (1990, 2000, 2007). La visibilité pourles opérateurs était donc guarantie.

Mais le facteur principal de la réussite de la filière éthanol aux Etats-Unis se trouvesur le terrain législatif. Alors qu’en Europe, l’idée de l’obligation d’incorporation fait débat,qu’il existe seulement une incitation fiscale depuis 2005 (TGAP), les incitations datent de1970 et l’obligation de 1990 aux Etats-Unis. Une loi environnementale, le Clean Air Act de1970 et ses amendements de 1990 sont le cadre de cette obligation d’incorporation.

La conclusion de l’observation de la situation américaine enrichit la réflexion de deuxremarques supplémentaires :- L’inscription des efforts du gouvernement dans la durée conditionne la portée de ses

initiatives (fiscales et législatives)- L’implication de plusieurs échelons de décision peut servir le développement d’une telle

filière (gouvernement fédéral et états fédérés).

Un volontarisme des institutions à tous les échelons, des décisions fortes (surtaxationdes carburants fossiles par exemple), l’implication de tous les partenaires (des pétroliers aux

Page 42: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

40

constructeurs) et l’importance du temps et de la stabilité des mesures sont les recettes quiont contribué à la situation particulièrement favorable que connaissent le Brésil et les USA.L’examen de ces “extrèmes” doit être enrichi par celui de voisins européens.

2.2.2 Des cas intéressants dans l’Union européenne.

L’intérêt d’observer la situation de pays plus proche de la France se situe dans le faitqu’ils connaissent les mêmes engagements internationaux, les mêmes directiveseuropéennes… La comparaison en est rendue plus aisée et moins contestable. Les deuxcas les plus intéressants sont l’Allemagne et l’Espagne.

L’Allemagne, leader européen de l’EMVH.

Depuis 2001, ce pays est le premier producteur mondial de biodiesel avec uneproduction de plus de 700 milliers de tonnes par an, elle a été multipliée par dix en dix ans.

Doc. 19 : L’Allemagne, pays de première importance.

Quatre points principaux sont a relever dans le contexte allemand. Chacun de ceséléments constitue une différence majeure avec la France.- Tous les biocarburants, inclus les mélanges diesel/ biodiesels, sont totalement exempts

de taxe et ce jusqu’en 2010 (dans le cas desmélanges, l’exonération porte sur la quantitéde biocarburants incorporés). Cette exemption, à la hauteur du taux de biocarburantsincorporé n’est que partielle en France

- Il n’existe pas de système d’agrément, en Allemagne, qui contigenterait la productionselon la volonté de l’Etat.

- L’HVP de colza est garanti par les constructeurs allemands.- La consommation de biocarburants par les flottes captives représente 60 à 70 % de la

production (beaucoup moins en France).

Production mondiale d'EMVH carburant : 1,6 Millions de t.

France22%

Allemagne44%

Italie17%

Autres17%

Source : Institut Français du Pétrole, 2004.

Page 43: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

41

Doc. 20 : Un développement rapide en l’Allemagne(production d’EMHV en milliers de tonnes).

1995-2000 2001 2002 2003Allemagne < 200 350 450 700France < 350 339 363 410

Le tableau ci-dessus montre la force et la rapidité des évolutions en Allemagne. Laréunion de l’action de l’Etat (fiscalité incitative, liberté de production), des collectivités (flottescaptives) et des constructeurs (garantie) confère à l’Allemagne des avantages comparatifsindéniables et conditionne sa place dans la production de biocarburants.

L’Espagne : l’éthanol européen.

Ce pays est, depuis 2003, le premier producteur européen d’éthanol avec uneproduction de 180 000 tonnes d’éthanol et 383 400 tonnes d’ETBE. Le démarrage politiquedu soutien à la production de biocarburants est à peu près simultané avec la France. Il estremarquable de souligner, tout de même, la rapidité de sa mise en œuvre en Espagne : uncomité interministériel a été crée dès 1999, alors que ce projet va être finalisé prochainementen France. L’exemple espagnol apporte encore de nouveaux éclairages sur ce qu’il seraitenvisageable d’appliquer en France.

Trois différences notables existent sur les aspects fiscaux.- Pour les producteurs de biocarburants, une réduction de 10 % de l’impôt sur les sociétés

est accordée (comme pour l’ensemble des activités contribuant à la protection del’environnement).

- Jusqu’en 2012, les biocarburants sont éxonérés intégralement de taxes. En cas demélange biocarburants/ carburants fossiles, s’applique la même modulation qu’enAllemagne. Cette décision vient renforcer les dispositifs existants depuis 1993. Lacomparaison avec la France est à cet égard significative : le document 16 montre qu’enFrance, d’une exonération totale en 1992, il y a eu passage vers une exonérationpartielle ; L’inverse se produit en Espagne.

- De la même façon qu’en Allemagne, aucun quota d’exonération de taxe ne limite lepotentiel de développement de la production.

Les soutiens des pouvoirs publics ne s’arrètent pas à la fiscalité. L’aide auxinvestissements est également très importante et ce à tous les échelons territoriaux. Lacréation d’une usine engendre des coûts aux alentours de 100 millions d’Euros(grossièrement entre 75 et 150 millions d’€). Trois exemples mettent en évidencel’implication de l’Etat et des collectivités territoriales. Lors de l’implantation d’une usine àCarthagène, l’Etat central à participé à hauteur de 30 % aux investissements de départ.Environ 10 % de l’usine de Montmelo ont été financés par la région catalane. Enfin, le site del’usine de La Corogne a été cédé gratuitement par la ville, pour en favoriser l’installation surplace.

Ce qui est à retenir ici, c’est la notion de multiplicité. Multiplicité des aides, des aidants etdes aidés, à tel point que l’agence espagnole pour la diversification énergétique (IDAE)reconnaît qu’il est très difficile d’évaluer la totalité des aides non-fiscales perçues au titre dudéveloppement des biocarburants.

Un particularisme espagnol réside dans le poids des initiatives privées. L’entrepriseAbengoa, principal groupe producteur de biocarburants, agit par le biais d’une de ses filiales

Page 44: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

42

(Ecoagricola) sur la promotion à la production. Cette filiale mène en effet une politique activede sensibilisation auprès des agriculteurs pour les convaincre de cultiver leurs jachèresobligatoires en céréales à destination de la production d’éthanol. Cette politique secaractérise par des actions telles que des visites d’usines, la production de plaquettesd’informations, mais aussi et surtout par des plans d’assolement personnalisés. La principalecrainte des agriculteurs à ce sujet est d’effectuer de mauvais choix, au risque de pondérerleurs aides PAC par dépassement de la superficie autorisée. Ecoagricola, par la création decontrats spécifiques et, donc, par ces plans d’assolement, rassure les agriculteurs et accroitd’autant ses approvisionnements.

L’exemple espagnol vient donc affiner encore le diagnostic des solutions possibles. A lanotion d’efficacité incontestable des efforts fiscaux, viennent s’ajouter les intérêts respectifsdes aides à l’investissement, de l’implication à toutes les échelles de décision et du rôle dusecteur privé.

Additionnée à l’étude des principaux producteurs mondiaux, l’examen de ces deux caseuropéens enrichit le panel de mesures appliquables en vue du soutien aux biocarburants. Ils’agit maintenant d’évaluer les possibilités de transposition de ces éléments à la situationfrançaise.

2.2.3 La France en retard.

Après avoir présenté le pays comme étant sur la bonne voie (cf. 2.1.3), il apparaîtdésormais que ce point de vue doit être pondéré. A la suite d’un résumé des possibilités, ilfaudra étudier les freins et potentialités de transfert.

Un éventail très ouvert.

Le recueil successif des initiatives adoptées par différents Etats en avance sur laFrance, dans le domaine des biocarburants, montre la richesse et la variété des soutienspossibles. Si la France se définit comme ambitieuse dans ce secteur, le tableau ci-dessousrecense les voies explorées à l’étranger et absentes en France.

Page 45: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

43

Doc. 21 : Un panel de possibilités très large.Domaines d’action Mesures correspondantes

Exonération totale de taxes sur lesbiocarburantsSurtaxation des carburants fossilesRéduction de l’impôt sur les sociétésconcernées

Fiscalité

Absence de plafond d’agrémentLégislatif Obligation d’incorporation

Aux investissementsSubventions A la productionPétroliersConstructeurs (garantie)Transformateurs (promotion)Implication des partenairesCollectivités territoriales (fiscalité,subventions, flottes captives)Inscription dans la durée (pour la constructionde la filière et la visibilité)Administration cohérente Gestion rationnelle du dossier (comitéinterministériel…)

Suite à ce constat, il faut prendre en compte d’éventuelles spécificités françaises ettenter de dégager les pistes les plus à même d’être suivies en France.

Pistes de réflexion.

Il s’agit donc de reprendre les mesures et d’observer leur transposabilité à la France.A noter dès maintenant que, dans le principe général, chacune d’elles sont potentiellementappliquables. Le principal frein repose sur la volonté de l’Etat, ou non, d’investir dans lesfilières biocarburants.

Cette remarque vaut en particulier sur la question fiscale. Le débat est vif entrepartisans ou non d’efforts fiscaux revus à la hausse. Pour exemple, en avril 2004, NicolasSarkosy alors Ministre de l’Economie, des finances et de l’industrie se prononce au coursd’un débat sur l’énergie : “Tout ne peut pas se réduire au recettes fiscales (…) et c’est leMinistre des finances qui vous le dit ! En effet, la catastrophe environnementale qui pourraits’ensuivre coûterait beaucoup plus cher qu’un déficit de recettes sur la TIPP.”15 Cetteintervention relevait plus d’un effet d’annonce que d’une réelle volonté d’agir, mais ellemontre que le débat est bien présent. En réalité, il est très difficile de trancher objectivement.Les résultats de calculs des coûts tenant compte des externalités positives (environnement,emploi, indépandance énergétique…) tiennent jusqu’alors d’argumentaires partisans. Laprospective dans ce domaine est relativement hasardeuse, étant donné le caractère non-arrêté des résultats à long terme.

Il en va de même pour l’éventualité d’une réduction de l’impôt sur les sociétés. Cedébat rejoint le précédent dans la mesure où cet impôt représente la troisième source derevenu de l’Etat, la TIPP se positionnant directement après dans ce classement. De la mêmefaçon, la notion de plafond d’agréments revêt encore la même signification : cecontingentement des quantités éligibles à la réduction de taxes agit comme un contrôle des 15 J.O. Débats, Assemblée nationale, n°36 du 16 avril 2004, p. 3 019.

Page 46: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

44

dépenses (en l’occurrence des non-recettes) de l’Etat. Seule cette justification peut êtrevalidée. Il faut rappeler les exemples allemands et espagnols, pour lesquels aucun quotan’est attribué.

L’idée d’une surtaxation des carburants fossiles doit être liée à celle de l’obligationd’incorporation : Toutes deux buttent sur le lobbying des pétroliers. Dans ce domaine, uneinitiative intéressante a récemment vu le jour. Plusieurs députés ont présenté au mois dejuillet 2005 une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquêtevisant à étudier les blocages à la mise en place d'une politique ambitieuse d'utilisation desbiocarburants. L’annonce de cette proposition appuie tout particulièrement sur le rôle desgroupes pétroliers dans ce débat. Ainsi, le blocage demeure mais les idées progressent.

S’agissant des subventions, les perspectives sont partagées. La faisabilité du soutiendirect à la production, tel qu’il était pratiqué au Brésil, apparaît fortement compromise dans lecontexte actuel. En revanche, les aides à l’investissement sont tout à fait envisageables, leurconcrétisation est conditionnée, de la même manière que les mesures fiscales, parl’affirmation d’une volonté politique forte.

L’implication des échelons territoriaux devrait pouvoir être promue dans le cadre duPlan Climat. Un des points de celui-ci insiste sur la notion d’un « Etat exemplaire »,élargissant ce principe à l’ensemble des pouvoirs publics. Mais, en comparant avec lescollectivités allemandes, l’élément qui ressort reste un relatif immobilisme français dans cedomaine (à nuancer par certaines initiatives, regroupées par exemple au sein del’association Partenaires Diester).

Les moyens de pressions sur les pétroliers sont limités, il semble qu’il en aille demême à l’égard des constructeurs. Les perspectives d’adaptation et de garantie des moteursà l’usage des biocarburants semblent ténues à court terme, il apparaît plutôt que lesconstructeurs attendent une filière puissamment constituée et un marché suffisament étendupour s’impliquer dans ce domaine.

Enfin, des efforts sont nécessaires, eu égard à la cohérence de l’action de l’Etat. Lanécessaire inscription dans la durée de l’action de l’Etat fait encore, aujourd’hui, défaut. Lesmodalités de contrôle financier de la filière (système des agréments à la production) freinentson développement et la visibilité à moyen terme. Un point positif (mais tardif) est constituépar la prochaine nomination d’un responsable interministériel, en charge du dossier desbiocarburants. Ce nouvel acteur pourrait, à l’avenir, contribuer à la rationalisation de l’actionétatique.

Pour synthétiser l’appréciation de la position de l’Etat français, il faut rappeler lesengagements forts qu’ont pris les gouvernements, mais souligner que les moyens mis enœuvre ne semblent pas être à la mesure des objectifs. Pour illustrer ce jugement, unsondage effectué au sein d’un groupe de réflexion international sur les biocarburants(VIEWLS) montre le peu de crédit accordé à la perspective de la pleine réalisation desobjectifs de 2005 (5,75 % d’incorporation) : 76 % des sondés déclarent ne pas penser qu’ilsseront atteints16.

16 Sondage basé sur le volontariat, avec 65 votants seulement. Il faut donc nuancer la valeur du résultat, maiségalement souligner que les votants, participant à ce groupe de travail, sont supposés agir en connaissance decause.

Page 47: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

45

CONCLUSION 2.2

La diversité des soutiens envisageables est importante et leur ampleur variefortement selon les pays. Comparée à d’autre, la France apparaît comme la retardataire, ausein des pays exposés. Outre cette observation, l’élément clef de cet exposé réside dans lacorrélation désormais évidente entre le développement des biocarburants et la volonté(active) de l’Etat.

Page 48: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

46

CONCLUSION 2 De l’engagement à l’action.

Dans le cadre d’une prise de conscience des conséquences du réchauffementclimatique, la France a pris des engagements importants, qui constituent une avancéeglobale et un potentiel fort de croissance pour les biocarburants. A toutes les échelles supra-nationales, les politiques concordent et vont dans le sens de leur développement.

Au niveau français, les évolutions ne sont pas négligeables. Mais en contre-poids decette progression, subsistent de nombreuses questions et des freins préjudiciables.L’analyse de politiques étrangères a mis en exergue les manques que connaît la Francedans plusieurs domaines. Il y a donc un besoin crucial de renforcement des dispositionsactuellement en vigueur.

La troisième partie de ce mémoire est consacrée à la troisième filière biocarburants encours de constitution : l’utilisation de l’huile végétale pure. Dans le même esprit qui a présidéà la rédaction de la question des EMHV et de l’éthanol, il s’agit de procéder à la synthèse decette filière, de ses intérêts de ses freins et de ses enjeux.

Page 49: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

47

3. L’Huile Végétale Pure (HVP).

L’étude de cette filière doit nécessairement être produite séparement. Sesparticularismes sont en effet nombreux. Des points communs existent tout de même : laplupart des intérêts se retrouvent, voire sont plus pertinents encore. Les freins, dans leursprincipes, sont proches. Enfin les enjeux sont sensiblement les mêmes : volonté politique,recherche…

Il serait donc superflu de reprendre, point par point, les éléments qui concourent à ladéfinition, déjà effectuée, du contexte des biocarburants. Néanmoins, il est nécessaire des’arrêter sur les distinctions, les spécificités propres à la filière HVP. C’est une fois ce travaileffectué qu’il sera possible d’élaborer des perspectives, de tracer les chemins que lesacteurs de la filière sont susceptibles d’emprunter.

Page 50: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

48

3.1 Quid de l’HVP.

Le développement qui suit fait à la fois le parallèle et la distinction avec les biocarburantsen filière longue : de la revue rapide des points communs vers les spécificités propres àl’HVP. Il faut d’abord, cependant, définir plus clairement ce qu’est, ce que sont plusexactement les HVP.

3.1.1 Une définition large.

Les données concernant les Huiles Végétales Pures sont légions, les élémentsobjectifs sont en revanche beaucoup plus réduits. Les points de vue “pro-“ et “anti-“ dominentle débat. A titre d’exemple, aux antipodes de la vigueur de la communication autour desfilières longues, par les gouvernements, se trouve la faiblesse des sources officelles sur lesHVP. Il est cependant possible d’en donner une définition.

La fabrication de l’HVP

Elle s’utilise dans les moteurs diesel. Elle est le résultat d’une pression à froid(température < 50°C), d’une décantation puis d’une filtration de graines d’oléagineux. EnEurope, elle est principalement produite à partir de colza ou de tournesol et aux USA, plutôtà partir du soja. Un éclairage assez parlant est de dire que ces HVP sont équivalentes auxbonnes huiles de table “première pression à froid”. Le présent mémoire se concentreprincipalement sur l’huile de colza,pour laquelle les connaissances et données disponiblessont les plus fournies. Le document ci-desous présente le schéma de production de l’HVP.Le pressage génère l’huile ainsi que le co-produit tourteau, dont il sera question plus tard.

Doc. 22 : Schéma de la fabrication et de l’utilisation d’HVP.

Cultured’oléagineux Pressage

Tourteaux

Décantation Filtration

Page 51: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

49

Doc. 23 : Les étapes de la fabrication du carburant.OPERATIONS OBJECTIFS DISPOSITIFS

Séchage des graines Atteindre un taux d’humiditérelative < 8 %

Testeur d’humidité graine,ventilateur, hygromètre

Nettoyage Réduire le taux d’impuretés àmoins de 1 %

Tamis, séparateur

Stockage Etaler le pressage en fonctiondes besoins

Silos

Pression à froid Extraire l’huile et le tourteau Presse ou tritureuse avec vissans fin

Décantation (3 semaines) Purifier l’huile Bacs, cuvesFiltration Eliminer les cires qui se

développent à bassetempérature (phospholipides)

Filtres 5 microns (maximum),plutôt inférieurs à 3

Stockage Stocker le tourteau à l’abri del’air et de la lumière (jusqu’à 3mois) et l’huile (jusqu’à 2 ans)

Bacs, cuves opaques

Source : d’après IHVP, 2004, page 31.

Le procédé est défini par plusieurs termes. Des marques déposées, d’abord : DieselNature® par l’Huilerie du Bocage (Haute-Garonne) et Gazhuile® par l’AssociationDépartementale de Vulgarisation Agricole (Haute-Garonne). Le terme générique longtempsutilisé a été “Huile Végétale Brute”, mais il s’avère inapproprié, l’huile carburant nécessite eneffet une décantation puis une filtration. L’utilisation, qui se répand, d’Huile Végétale Pure,marque ainsi sa distinction par rapport aux biocarburants résultant de procédés industriels etchimiques (EMHV, éthanol, ETBE).

Le potentiel de production et d’utilisation.

A la largeur de la définition répond celle du potentiel de production et d’utilisation.Autrement dit, une surface et un nombre de machines importants. La culture d’oléagineuxest très répendue en France (presque 2 millions d’hectares soit plus de 6 % de la SAU). Enparallèle, le parc de machines agricoles constitue un débouché important (environ 10millions d’unités), il est avéré que, avec une modification minimale des moteurs (réchauffeuravant la pompe à injection), il est possible de rouler avec 30 % d’HVP en mélange dans lesmachines d’anciennes générations (sans rampe commune). En outre, avec un kit debicarburation, le pourcentage peut s’accroître fortement (jusqu’à 75 %).

Le débouché potentiel s’accroît avec la possibilité d’utiliser l’huile dans les pompesd’irrigation, les groupes électrogènes et les chaudières d’exploitation. A noter que, si cemémoire s’intéresse plus particulièrement aux transports, il ne faut pas négliger ce marchésubstanciel.

Un élément clef de cet embryon de filière réside dans la simplicité technique de samise en œuvre. En individuel ou en Coopératives d’Utilisation de Matériel Agricole (CUMA),le cycle de production est tout à fait accessible. L’investissement dans une presse et dansson fonctionnement sont, dans le principe, envisageables. Il n’y a pas là de procédéindustriel. C’est pourquoi l’HVP est reconnue comme le biocarburant de la filière courte, làaussi, se distinguant des EMHV et éthanol, produits de filières longues.

Page 52: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

50

Un point important pour le développement de l’HVP au niveau des exploitants est queceux-ci conservent la maîtrise de la plus grande partie du cycle de production.

L’ensemble des biocarburants ne diffèrent cependant pas selon tous les angles,l’HVP demeure un carburant végétal, à l’égal de ses homologues en filière longue.

3.1.2 L’HVP, un biocarburant.

Biocarburant parmi les autres, tels qu’ils ont été présentés tout au long des deuxpremières parties. En cela, les mêmes arguments macro-économiques peuvent êtreavancés, des blocages semblables existent et les enjeux sont proches.

Il serait fastidieux et inutile de passer à nouveau en revue les éléments largementdéveloppés précédemment. Ainsi, le renvoi à la première partie suffit à caractériser lesprincipes fondamentaux de l’HVP.

En revanche, il est intéressant de s’attacher à souligner ses particularités sur certainspoints. Outre des procédés différents, la filière HVP demeure à un niveau de développementplus restreint encore, fait qui exacerbe les enjeux de son développement.

3.1.3 L’HVP, un cas particulier.

La nature même de ce carburant le crédite d’avantages environnementaux plusprécieux.

Le bilan écologique est, par essence (!), plus appréciable, étant donné le caractèredu carburant et du circuit économique court qu’il engendre. Il faut distinguer les pollutionsdirectes (locales) et indirectes (globales).

Concernant les nuisances liées à la pollution directe, il est intéressant de comparerl’HVP au gazole auquel il se substitue.

Doc. 24 : Valeurs comparatives et effets des émissions du gazole et de l’HVP de colza.Emissions Selon EMPA

g/km17Selon Tüv

g/m3 18Effets

Particulessuies 1,71 8,85

Bronchiolite,cancérogène, asthme,irritations occulaires…

CO 1,71 1,13 Leucémie, crisescardiaques…

NOx 1,23 3,21 Asthme, développementtumoral…

HydrocarburesAromatiquesPolycycliques

Rapportgazole/ HVP

4,08 -Cancer des voiesrespiratoires, tumeurspulmonaires…

Source : d’après IHVP, 2004, page 27.

17 Rapport FAT, station fédérale de recherche en économie et technologie agricole, Les mélanges d’huilesvégétales utilisés comme carburant pour moteurs diesels, Suisse.18 Automotive Gmbh Unternehmensgruppe Süddeutschland.

Page 53: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

51

Le commentaire de ce tableau est sans appel. Sur l’ensemble des caractéristiquesétudiées, l’HVP ressort comme un carburant moins nocif. Il faut y ajouter plusieurs donnéessupplémentaires :- Une forte réduction des composés soufrés. Selon les sources, la présence de soufre va

de l’absence totale (hypothèse la plus probable) à une division par 10 par rapport augazole.

- Une légère réduction des hydrocarbures imbrûlés, étant donnée la forte teneur enoxygène de l’HVP, qui améliore sa combustion.

- Une réduction des émissions d’ozone (O3), puisque celui ci résulte de la combinaisonentre les NOx et le CO, dont les teneurs sont moindres dans l’HVP.

Des arguments supplémentaires, certes secondaires, viennent corroborer l’idée d’uncarburant plus propre :- Réduction des risques liés à la production et au transport. L’HVP étant biodégradable, les

risques de pollutions type marées noires (ou verte !), pollution des eaux continentales oudes sols… sont considérablement réduits.

- Relevant d’une filière courte, locale, les coûts environnementaux de transport de l’HVPsont inférieurs à ceux induits par le transport du gazole sur l’ensemble du territoire.

- Réduction de la consommation d’oxygène. On estime qu’un kg de gazole consomme2,26 kg d’oxygène, l’HVP en consomme seulement 1,9 kg.

Ce dernier point vient faire la transition avec les pollutions globales. Le comparatif estfavorable aux HVP non seulement par rapport au carburants fossiles mais également parrapport aux EMHV et éthanol.

L’illustration de ce bilan positif apparaît dans les documents 3 à 6 de ce mémoire, il estretranscrit et résumé ci-dessous.

Doc. 25 : Bilans comparés de l’HVP avec le gazole et l’EMHV (%).Bilan énergétique Bilan GES

2005 2009 2005 2009HVP/ gazole + 500 + 600 - 500 - 600HVP/ EMHV + 33 + 35 - 25 - 25Source : d’après ADEME et alii, 2002.

Le bilan énergétique (énergie restituée / énergie utilisée) et celui des gaz à effet deserre est 5 fois plus intéressant que celui du gazole, les marges de progression à courtterme (2009) étant, en outre, conséquentes. La comparaison avec l’EMHV montre la lourdeincidence de l’étape de transformation industrielle.

Une spécificité de la filière HVP lui confère un caractère socialement bénéfique :L’organisation simplifiée, en regard des autres carburants, permet une implantation locale ducircuit, ancrant ainsi l’activité économique au sein de territoires ruraux. Les difficultés dansce domaine sont importantes en zone rurale, si faible soit le nombre d’emplois créés, ilsconstituent un élément positif (l’Institut français des Huiles Végétales Pures évalue à unemploi créé pour 100 hectares en HVP, ce chiffre étant à prendre au conditionnel).

Page 54: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

52

CONCLUSION 3.1

Ajoutés aux intérêts des biocarburants dans leur ensemble, les avantagessupplémentaires de l’HVP engendrent des acquis incontestables, en particulier en rapportavec les véléhités de réduction des émissions de GES. Mais, en dépit de cette force, lafaiblesse de la filière ralentit le processus de développement de l’HVP. La description etl’analyse de cet état de fait est l’objet des points suivants.

Page 55: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

53

3.2 Une filière en gestation.

La filière longue est qualifiée, dans ce mémoire, de “naissante” (cf. 1.2.1). La logiquecomparative veut que la filière HVP soit alors présentée comme “en gestation”, tant elle seréduit à peu de choses. Sa jeunesse et son éclatement sont les principaux qualificatifspermettant de caractériser cette filière.

3.2.1 Une reconnaissance tardive.

Rudolph Diesel, le créateur du moteur du même nom, disait en 1892 : “Ceci sembleêtre aujourd’hui un rêve d’avenir, mais je me risque à prédire, avec une entière conviction,que ce mode d’emploi du moteur Diesel [aux huiles végétales] peut, dans un temps donné,acquérir une grande importance”19. Le concepteur même du moteur aujourd’hui objet de tousles débats avait procédé à des tests convaincants avec l’HVP. Le paradoxe que soulèvecette citation est renforcé par le fait que les institutions (européenne puis française) ont exclujusque tout récemment l’HVP de la liste des carburants.

L’Union Européenne ne reconnaît en effet l’HVP que depuis la directive 2003/30/CEdu 8 mai 2003. Ce carburant figure en dernier (10e position) dans la liste des produitsconsidérés comme biocarburants par l’article 2 de la directive : “huile végétale pure : huileproduite à partir de plantes oléagineuses par pression, extraction ou procédés comparables,brute ou raffinée, mais sans modification chimique, dans les cas où son utilisation estcompatible avec le type de moteur concerné et les exigences correspondantes en matièred’émissions”.

La transposition de cette directive en droit français devait être effectuée à la fin del’année 2004. Il est déjà significatif de dire que tel n’est pas encore le cas, l’été 2005touchant à sa fin. Néanmoins, cette transposition est en projet, rédigée dans le projet de loid’orientation agricole qui sera débattu en automne. La définition est reprise au mot près.

La formule “dans les cas ou son utilisation est compatible avec le type de moteurconcerné et les exigences correspondantes en matière d’émissions” n’est pas sansconséquence. Si elle répond à une logique implacable, son application n’en est pas pourautant évidente.

3.2.2 Vers la normalisation du carburant.

Les aspects positifs en matière d’émissions ont déjà été développés. Cependant, ilfaut se poser la question de la nature organique de l’HVP. Les méthodes artisanales etéclatées de sa production, en France notamment, engendre des HVP de qualités variables(selon la nature de la presse, la taille du filtre, la matière première…). L’objectif étant depouvoir correspondre à la définition de la directive, il est nécessaire de travailler sur unenormalisation de l’HVP.

Les normes qui encadrent les carburants d’origine fossile sont innombrables etparticulièrement complexes. Elles régissent l’ensemble du processus de fabrication etd’utilisation. Ainsi, de la composition du carburant aux rejets lors de sa combustion, il existeune accumulation de contraintes et de standards. La comparaison avec les HVP est 19 Plassard T., 2002, p. 59.

Page 56: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

54

éloquente. Cela a pour conséquence immédiate un manque de fiabilité et de crédibilité.Ainsi, les constructeurs se montrent pour l’instant réticents à garantir des moteurs destinés àfonctionner à l’HVP.

Ce blocage ne peut donc être contourné que par la mise en place d’une norme surl’HVP. Des travaux sont en cours, sur la base en particulier d’une “pré-norme” bâtie enAllemagne, dont le contenu figure ci-dessous.

Page 57: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

55

Doc. 26 : Pré-norme établie, en Allemagne, pour l’HVP.

Source : Guiral, 2005, p. 24.

Page 58: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

56

En France, le retard dans ce domaine est important. La volonté de mettre sur piedcette norme avance et, le conseil régional des Pays de la Loire (entre autres) acommissionné, à partir de septembre 2005, un groupe de travail sur le dossier. Déjà, uneréflexion existe au sein du réseau CUMA notamment (Mayenne et Drôme en particulier).Ajouté à l’acquis que constitue la pré-norme, le projet de loi d’orientation agricole20

contribuerait à faire sortir de la clandestinité les utilisateurs d’HVP et, par là, à accumuler desdonnées techniques. Pré-norme et base de données importante sont les deux constituantsqui permettront de bâtir la norme.

Devant les enjeux que sous-tendent la situation, la position des constructeurs et desconcessionaires tend à évoluer. D’une opposition conflictuelle, les rapports avec lespromoteurs de la filière HVP glissent vers une volonté de partenariat. Les perspectives degarantie des moteurs semblent se rapprocher (elle existe déjà en Allemagne). Il apparaît eneffet que les motoristes ont déjà effectué certains travaux, ils prennent desrenseignements… En définitive, ils semblent plus en avance qu’il n’y paraît au premierabord. Par exemple, au cours du salon Mécacéréales du 10 aôut 2005 (Loiret), des essaisont été réalisés (à 70 % d’HVP), mais sans implication officielle de concessionnaires etconstructeurs…

La perspective que semblent dessiner les constructeurs, aux vues d’argumentsinformels, tendrait plutôt vers la bicarburation. Un élément d’explication réside dans le faitque la stabilité du mélange HVP/ gazole serait insuffisament systématique et fiable.

A ces éléments caractéristiques d’une filière en devenir, il faut des précisions sur sastructure même. Sa fragilité montre encore une fois les avancées qu’il reste à faire.

3.2.3 Une logique partisane peu organisée.

Dans le même esprit que pour les filières longues, l’HVP provoque nombre dedébats, d’interventions, de prise de positions… Le cas de cette filière est plus criant encore.La structure interne, les détracteurs et l’Etat combinent leurs voix, portant par le fait vers lacacophonie.

Le terme de filière, utilisé ici, pour l’HVP est peut-être surévalué. Il faudrait plutôtparler de réseau, de travaux à échelle locale, ayant parfois des arguments dissonants. Lesrapports, mémoires, études… ne manquent pas mais confinent souvent à une approchepartisane et, par le fait, nuancent leur crédibilité. Cela va de manifestes idéologiquesjusqu’aux exposés de chiffres contradictoires. Partant, le déficit que connaissent les filièreslongues est ici exacerbé. En revanche, la multiplication des travaux permet tout de même,tout disparates qu’il soient, de compiler des données et de faire avancer le dossier. Ainsi,des organismes crédités d’une démarche plus sérieuse s’intéressent de plus en plus à l’HVP(ADEME, Chambres d’agriculture, CUMA…).

L’enjeu est important si le besoin d’un argumentaire fiable est mis en parallèle avec lapuissance du lobbying des détracteurs. En effet, plus encore que pour les EMHV et éthanol,le cas de l’HVP fait face à des oppositions. Cela s’explique notamment par le fait que lespétroliers voient dans ces initiatives une partie de leurs marchés disparaître, la filière, de parson fonctionnement, étant en relative autonomie. Cette notion d’autonomie ne fait d’ailleurs

20 Ce projet est développé en 3.3. En substance, il s’agirait d’autoriser l’utilisation d’HVP sur les exploitationsagricoles qui la produisent.

Page 59: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

57

pas l’unanimité, en témoigne la position de fédérations type FOP (fédération des Oléagineuxet Protéagineux) qui communiquent énormément sur l’EMHV, mais nullement sur l’HVP.

L’Etat, lui-même, s’implique peu dans ce dossier. Pour les raisons évoquées ci-dessus, il ne s’est penché sur la question que très récemment. Le point suivant permet decomprendre qu’en dépit de ce retrait, il souhaite conserver le contrôle de l’évolution.

CONCLUSION 3.2

Ainsi, l’organisation de la “filière” HVP rencontre des freins nombreux. De la logiquepartisane au lobbying des détracteurs, le passage à la maturité s’effectue à petits pas.L’action de l’Etat illustre bien ce déroulement.

Page 60: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

58

3.3 Un Etat en retrait.

La position de l’Etat est le reflet (et, partiellement, le responsable) de l’évolution de lafilière. De son intransigeance à son manque d’initiative, il ralentit le développement de l’HVP.

3.3.1 Une initiative condamnée.

Il s’agit ici de présenter le cas de Valenergol. Cette entreprise a été créée en 1996par Alain Juste (ancien président du parti des Verts du Lot et Garonne). La société a pourbut de valoriser les produits oléagineux de façon énergétique. Outre cet objet, un aspectrevendicatif affiché caractérise la démarche : Alain Juste utilisait et commercialisait l’HVP. Ila ainsi parcouru nombre de kilomètres avec une voiture particulière sans connaître deproblèmes.

Mais cette initiative était en contradiction avec la législation. En effet, Alain Juste nes’acquittait pas de la TIPP, considérant que l’HVP ne relevait pas d’une taxe sur les produitspétroliers. Ainsi, il a été poursuivit par le Ministère de l’Economie et des finances puiscondamné par la justice au remboursement des sommes dues (7 509 €). Après appel, cettesomme a néanmoins été réduite.

Cette affaire est intéressante sur plusieurs points :- Le procès a engendré une campagne de soutien ainsi qu’une forte couverture

médiatique. S’il a quelque peu cristalisé les opinions, il a tout de même permis de faireparler de la question des biocarburants, de la fiscalité qui leur est appliquée… Parexemple, la société Valenergol a envoyé une lettre à l’intégralité des députés français en2001 afin de faire progresser le dossier des HVP…

- Cet éclatement a également pu partiellement modifier le point de vue de l’Etat,jusqu’alors particulièrement tranché. En effet, le rapport, en 1993, de Raymond Lévy(ancien pdg d’EDF, de Renault, ex-n°2 d’ELF, créateur d’un groupe d’industrielsconsidéré comme un puissant lobby) sur la politique énergétique à mener avait fortementorienté les perspectives vers la production d’EMVH, au dépend de l’HVP : “Parmi lesvoies exploitables actuellement pour la production des biocarburants, la conclusion denotre étude favorise sans contestation celle de l’ester methylique de colza” 21. Ce rapportavait été largement critiqué, mais est resté la référence en la matière pendant longtemps.Un autre exemple de son influence : il est le premier a écarter l’idée d’une incorporationdirecte d’éthanol : “l’analyse (…) conduit, sauf pour des expériences limitées (…) àécarter le mélange direct de ce produit avec les carburants” 22.

Le blocage a semblé total jusque récemment (cf. 3.2.1). La reconnaissance de l’HVPcomme carburant a donc été tardive. Des avancées permettent néanmoins de tracer desperspectives.

3.3.2 Un nouveau départ ?

Une note positive ressort de l’analyse du projet de loi d’orientation agricole (LOA), quisera examiné à l’automne 2005. Dans sa version actuelle, il intègre une ouverture pour laproduction et l’utilisation de l’HVP.

21 Lévy, 1993, page 13.22 Idem, page 5.

Page 61: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

59

Un projet intéressant.

L’article 12 du projet de loi vise à modifier le code des douanes. Celui-ci ne faitjusqu’alors nullement mention de possibilités pour l’HVP. Le texte se présente ainsi :

Doc. 27 : Extrait du projet de loi d’orientation agricole 2005.

TITRE IICONSOLIDER LE REVENU AGRICOLE

ET FAVORISER L'EMPLOICHAPITRE Ier

Améliorer les débouchés des produits agricoles et forestiersArticle 12I.- Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Il est inséré à l'article 265 bis A, après le 1, un 1 bis ainsi rédigé :

« 1 bis.- Les huiles végétales pures, utilisées dans les conditions prévues à l'article 265 tercomme carburant agricole dans les exploitations agricoles sur lesquelles elles auront étéproduites bénéficient d'une exonération de la taxe intérieure de consommation. » ;

2° L'article 265 ter est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 265 ter.- 1. Sont interdites l'utilisation à la carburation, la vente ou la mise en vente pour lacarburation de produits dont l'utilisation et la vente pour cet usage n'ont pas été spécialementautorisés par des arrêtés du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'industrie.« Sans préjudice des interdictions ou pénalités qui pourraient résulter d'autres dispositionslégislatives, les produits utilisés ou destinés à être utilisés en violation des prescriptions dupremier alinéa sont assujettis à la taxe intérieure de consommation selon les modalités prévuesau premier alinéa du III de l'article 265.

« 2. Dans les cas où elle est compatible avec le type de moteur utilisé et les exigencescorrespondantes en matière d'émissions, l'utilisation en auto-consommation comme carburantagricole d'huile végétale pure dans les exploitations agricoles sur lesquelles elle aura été produitepeut être autorisée à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2007 dans les conditions prévuespar décret.

« On entend par huile végétale pure l'huile produite à partir de plantes oléagineuses par pression,extraction ou procédés comparables, brute ou raffinée, mais sans modification chimique.

« Toute infraction à ces dispositions que l'administration des douanes est chargée d'appliquer estpassible, dans le cas où l'infraction relève du a du 2 de l'article 410, de l'amende prévue au 1 dumême article et, dans les autres cas, de l'amende prévue au 1 de l'article 411. »

II.- Au 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, les mots : « à usage domestique »sont supprimés.

Page 62: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

60

Une analyse indispensable.

L’analyse du contenu de cet article, et en particulier des passages surlignés, est riched’enseignements.- Le premier point, non-négligeable, réside dans la transposition de la directive

2003/30/CE de l’Union européenne sur les biocarburants. La France reconnaît doncl’HVP comme carburant.

- Le second, fondamental, est celui de l’adoption de la défiscalisation totale des HVPconcernant la Taxe Interieure sur la Consommation (ex-TIPP).

- Le troisième élément repose sur les conditions à remplir pour bénéficier de l’exonération.En dépit de l’aspect très succint du texte, il apparaît qu’elles sont relativement restrictives(cf. infra).

- Le dernier point à souligner est la mention d’une période de référence, qui prendrait fin le31 décembre 2007. Comme vu précedemment, il s’agirait de regrouper des données envue de l’élaboration de la norme. Cet aspect positif est nuancé par la faiblesse deperspective dans le temps qu’offre ce projet.

Il est nécessaire de se concentrer plus spécifiquement sur les exigences requises pourbénéficier de l’exonération. Celle-ci conditionnant la rentabilité de la production d’HVP, cesont donc ces clauses qui vont façonner l’organisation des acteurs, d’autant qu’il estclairement indiqué que toute infraction à ces dispositions est passible d’amende. Outre ladéfinition du produit HVP, quatre expressions sont à analyser au plus près. Deux sont issusde la directive européenne : la compatibilité avec le type de moteur et les exigences enmatière d’émissions. Les deux autres sont nouvelles, introduites au niveau français : lanotion d’auto-consommation et le fait que celle-ci soit autorisée dans les exploitations surlesquelles l’huile aura été produite.

Possibilités et perspectives.

Partant donc de ces constats, il faut énumérer les éventualités offertes auxexploitants agricoles. En plus des cas explicitement acceptés, il faut également examiner leséventualités sous-jacentes.

Le cas type retenu dans le projet de loi s’appuie sur une exploitation au sein delaquelle tout le processus est regroupé. Le potentiel est important, puisque si l’huile doit êtreproduite et consommée sur l’exploitation, aucune restriction de ce type n’est mentionnéepour les co-produits. La valorisation de ceux-ci conditionnent la rentabilité de l’opération.Ainsi, dans un premier temps, il était à craindre que seuls les exploitants en polyculture-élevage puissent profiter de l’ouverture (utilisation des tourteaux pour le cheptel). Mais le faitque les co-produits puissent être valorisés dans un circuit traditionnel ouvre aux exploitantsnon-éleveurs la perspective de l’HVP (cf. 4.4.3).

Une seconde voie est possible, respectant le texte du projet de LOA.L’investissement que représente une presse (de l’ordre de 8 à 15 000 € pour un modèleconvenable) peut-être un frein à l’équipement. Mais rien n’interdit aux agriculteurs de seregrouper en CUMA, laquelle serait équipée d’une presse mobile. Chaque exploitantutiliserait donc cette presse commune au sein même de son exploitation. Autrement dit, larestriction que pose le texte oblige que le pressage soit effectué sur l’exploitation, maisaucunement que le matériel appartienne en propre à l’exploitant.

Page 63: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

61

Doc. 28 : Exemple, en Mayenne, d’une presse à huile montée sur camion.

Source : Réussir Lait-élevage n°180, avril 2005 p. 58. Cliché B. Griffoul.

Preuve de la faisabilité d’une telle pratique, Entraid’, la revue des CUMA a recensé16 groupements équipés ainsi qu’une cinquantaine de départements dans lesquels desgroupes d’agriculteurs ont un projet d’achat de presse à huile.

Page 64: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

62

Doc. 29 : Une forte expansion des achats de presses en CUMA.

Source : Entraid’ n°135, février 2005, p. 23.

Si l’on se confère au texte du projet de loi en l’état, il semble que seules ces deuxpossibilités soient offertes. Cependant, le débat ayant lieu en automne, le corps du texte et,plus encore, les décrets d’application verront les choses se préciser. Il est déjà possible deformuler des hypothèses, en particulier sur l’autorisation de la pratique suivante : unecoopérative se munit d’une presse beaucoup plus puissante (plus d’huile et des tourteauxmoins gras, mieux valorisables). Elle travaille à façon pour ses adhérents qui récupèrent leurHVP, le tourteau étant valorisé par la coopérative, qui détient des marchés plus importants.Le problème réside donc dans le fait que le pressage est effectué en dehors de l’exploitation,mais une adaptation du projet de loi en ce sens est envisageable (à condition de présenterun projet viable et complet). Cette méthode contribuerait probablement de façon importante

Page 65: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

63

au développement de l’utilisation d’HVP. Déjà, le Ministère de l’agriculture précise qu’il nemarque pas une opposition de principe à cette modalité de valorisation23.

En plus de la stricte ouverture à l’utilisation de l’HVP, le projet de loi va permettred’obtenir de nombreuses données techniques, en vue de répondre aux exigenceseuropéennes : en effet, celles-ci sont formulées comme suit : ”Dans les cas où elle estcompatible avec le type de moteur utilisé et les exigences correspondantes en matièred'émissions”. Une des volontés de l’Etat est donc de recueillir suffisamment d’éléments pourcontribuer à la formulation d’une norme en la matière, condition d’un développementautrement plus conséquent pour les HVP.

CONCLUSION 3.3

Ainsi, la position de l’Etat à l’égard de l’HVP évolue. Elle demeure trop peu engagéepour beaucoup, mais une progression apparaît. Pour la première fois, l’utilisation de l’HVPest autorisée et des perspectives établies. Les cas exposés ci-dessus laissent entrevoir despossibilités intéressantes.

23 Communication non-officielle de Jean-Marc Gourdon, en charge du dossier des valorisations non-alimentairesdes produits agricoles, le 24 août 2005.

Page 66: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

64

CONCLUSION 3 : Un biocarburant, des biocarburants.

L’huile végétale pure marque sa spécificité sur trois points en particulier :- Un carburant « simple » à produire,- Une filière qui s’apparente plutôt à un réseau d’utilisateurs,- Une législation spécifique.Ces trois facteurs concourent à la formation d’une activité économique en circuit court. Il fautmentionner que l’exemple le plus abouti, en Europe, dans la progression des HVP, se situe,encore une fois, en Allemagne. A cet égard, un voyage d’étude en mars 2005 est riched’enseignements24.

Le bénéfice de l’agriculture, par le biais des biocarburants, se voit donc enrichit d’unepossibilité nouvelle. Ainsi, il apparaît qu’une cohabitation, en parallèle, de ces deux modesde faire-valoir de la production agricole (circuits court et long) est aussi bien possible quesouhaitable.

La partie qui suit, quatrième et dernière, veut quantifier le développement possible etprobable des biocarburants dans l’Ain, ainsi que l’impact qui en résulterait sur les filièrestelles qu’elles sont actuellement. Cet objectif suscite une réflexion sur l’état des lieux, dans ledépartement, des biocarburants. Ce constat établi, il faudra alors dresser des hypothèsespour son développement futur. Se basant principalement sur des questions de rentabilité, ilsera indispensable d’exposer un résultat financier favorable aux débouchés biocarburants.C’est alors qu’un bilan des impacts et des adaptations nécessaires pourra être effectué.

24 Guiral, 2005. Association de Rhonalpenergie Environnement, de la FRCUMA Rhône-Alpes, d’Hélianthe et dela Chambre d’agriculture de la Drôme.

Page 67: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

65

4 L’Ain et les biocarburants.

L’ensemble de l’étude présentée jusqu’ici vise à fixer de façon précise le cadre globaldes biocarburants. Tous les aspects ont été traités (environnementaux, législatifs,fiscaux,politiques …) et permettent désormais de s’attacher à répondre à la question : Quelsdéveloppements et quels impacts des biocarburants dans l’Ain ? Il s’agit donc de procéder àl’application effective des principes développés tout au long de ce travail.

Pour parvenir à un tel objectif, le développement à venir poursuit la logique suivante :- Examiner l’état des lieux, aujourd’hui,- Démontrer la viabilité économique du choix des biocarburants,- Emettre des hypothèses de développement,- En étudier les conséquences et les conditions

Page 68: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

66

4.1 L’Ain, un acteur de second plan ?

La revue des initiatives et des volumes concernés, dans l’Ain, fait apparaître uneimplication du département relativement faible à l’échelle de la France. Il faut cependantrecenser les surfaces en biocarburants puis examiner les positions et les actions des acteurslocaux.

4.1.1 Une bonne situation pour le biodiesel.

Un positionnement intéressant

L’Ain est un département au sein duquel la surface en oléagineux est limitée. Sonrang dans le classement des départements le place à la 38e position. Il est donc prévisibleque sa place dans les biocarburants soit relativement faible. Mais il apparaît au contraire quel’Ain s’y trouve en 35e place. Ce chiffre est peu probant, mais il s’ajoute à celui dupourcentage de la sole de colza dédiée aux biocarburants : 52 % en 2003, alors que lamoyenne nationale tourne autour de 30 %. Ainsi, l’Ain, malgré une SAU colza relativementbasse a un positionnement fort sur le débouché biodiesel.

En revanche, si l’Ain y contribue à hauteur de 2 500 hectares en 2005, etcontrairement à l’idée que pourrait donner le développement à l’échelle de la France, cettesurface n’est pas en augmentation, mais plutôt en stagnation dans le département.

Ces chiffres bruts doivent être comparés avec les autres départements français. La carteci-dessous amène plusieurs commentaires.- Globalement, il existe une corrélation entre bassins de production et fournisseurs de

colza énergétique. Il faut cependant prendre du recul par rapport à cette affirmation, lapart de l’industriel dans le total variant de façon significative selon les départements.

- L’Ain se situe à la limite Sud des départements fournisseurs, il est le 35e départementfournisseur et représente 0,93 % de la collecte destinée au Diester.

Doc. 30 : SAU en colza non-alimentaire dans l'Ain.

3600

2500 25003000

2500 2500

0500

1000150020002500300035004000

2000 2001 2002 2003 2004 2005

ha

Source : DDAF de l’Ain.

Page 69: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

67

- Une nuance a apporter est que les échanges virtuels sont nombreux, les fournisseurseffectifs étant en réalité plutôt ceux situés proche des usines de transformation.

- L’explication du différentiel entre les surfaces annoncées dans les documents 30 et 31réside dans la distinction entre surfaces réelles (doc. 30) et estimées (doc. 31), lesrapports interdépartementaux restant approximativement inchangés.

Doc. 31 : Répartition des surfaces en colza industriel en 2003.

Source : ONIOL.

Ayant replacé l’Ain dans le contexte national, il est intéressant d’observer la situationrégionale. Il apparaît alors que l’Ain est le principal contributeur rhônalpin avec presque lamoitiée des surfaces.

Page 70: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

68

S’intéressant aux trois départements les plus représentatifs, l’Ain, l’Isère et le Rhône,le pourcentage de colza industriel dans le total représente respectivement 46 %, un tiers et30 %.

Des perspectives ouvertes.

Ce constat amène à se poser la question de la capacité d’acroissement de cepourcentage dans l’Ain ou, à défaut, de l’accroissement de la surface totale de colza dudépartement. A cet égard, il est remarquable de constater que cette SAU a beaucoup variéces trente dernières années. Il est donc possible de dire qu’elle peut augmenter à nouveau.

En effet, dans la majeure partie des années 1980, la surface dépassait les 10 000hectares. Ces évolutions sont principalement imputables à des facteurs conjoncturels et rien

Doc. 32 : SAU en colza industriel en Rhône-Alpes.

Ain47,4%

Ardèche0,5%

Drôme8,9%

Isère28,0%

Loire1,1%

Rhône10,6%

Savoie0,1%

Hte-Savoie3,4%

Source : ONIOL 2003.

Doc. 33 : La production de colza dans l'Ain depuis 1970.

0

2000

4000

6000

8000

10000

12000

14000

1970 1973 1976 1979 1982 1985 1988 1991 1994 1997 2000 2003

ha

0

5000

10000

15000

20000

25000

30000

35000

40000tonnes

ha tonnage

Source : SAA Agreste.

Page 71: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

69

n’empèche, techniquement, le retour à de telles surfaces (soit plus qu’un doublement). Ainsi,la marge de progression du colza énergétique s’en trouve renforcée.

Finalement, le commentaire de la situation est pluriel. L’observation permet d’affirmerque le développement des surfaces en colza Diester est possible. Les facteurs qui vontorienter l’évolution se situent à toutes les échelles de décision :- l’Etat doit augmenter fortement les agréments à la production de biodiesel défiscalisé. Il a

été clairement exposé ici que cette condition devrait être remplie.- Les collecteurs (Cérégrain en particulier) doivent continuer leur politique de diversification

des débouchés et, autant que possible, favoriser le Diester. Il s’agit là d’une condition deréussite indispensable, Cérégrain étant le principal collecteur de l’Ain.

- Les exploitants doivent trouver leur compte à produire du colza énergétique. Lesconditions favorables générées à ce sujet par la PAC25 peuvent jouer en cette faveur. Atitre d’exemple, les adhérents de la coopérative la Dauphinoise (principalement implantéeen Isère) ont permi à celle-ci d’augmenter de 180 % en un an les contrats énergétiques.Cet argument de l’influence de la PAC est avancé par Raphaël Comte, responsable descultures contractuelles du groupe26. L’intérêt de ce type de choix est examiné de façonplus précise plus avant (cf. 4.2.2).

A noter pour terminer ce panorama de la faisabilité théorique de la production debiodiesel, et en transition vers la question de l’HVP, que la répartition spatiale de la culturede colza dans l’Ain est également un facteur de son utilisation (du fait de la législation). Ainsi,les régions de la Bresse et plus encore de la Dombes seront nécessairement les lieuxprivilégiés du développement des biocarburants dans l’Ain. La carte ci-dessous date de2000, mais la répartition est demeurée sensiblement identique depuis.

25 Possibilité de cultiver du colza énergétique hors jachère, avec une aide de 45 €/ha, une productioncontractualisée… Ceci venant s’ajouter à l’incitation à la production énergétique que constitue le gel obligatoire.26 Terroir Magazine, mai-juin 2005, n°116, p. 12.

Page 72: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

70

Doc. 34 : Répartition géographique de la SAU en colza de l’Ain.

Source : SIG SRAD CA 01, DDAF 01.

4.1.2 L’HVP en attente.

La situation actuelle, concernant l’huile végétale pure, montre un département peut-être moins en avance. La nature même du cas de l’HVP implique de traiter ses possibilitésde développement en lien avec la rentabilité à l’échelle de l’exploitation. Cela induit donc dereporter cet examen au point consacré à l’approche micro-économique (cf. 4.2.1). Enrevanche, il faut ici s’attacher à en faire l’état des lieux, particulièrement en comparant l’Ainavec d’autres départements.

Les acteurs de l’Ain sont, pour les CUMA au moins, tous potentiellement intéressés. Lepanel des agriculteurs concernés est large, dans la mesure ou les intérêts peuvent être à lafois militant et économique. Mais, de façon plus précise, il est possible de détecter, déjà,deux exploitants équipés (Mr Michal à Cleyzieux et la SCEA Robin à Domsure) et 5 projetsd’achats en communs. Il s’agit des CUMA de :- Saint Martin du Mont, le Perrey- Servas-Lent- Cormoz la Bresse- Chaleins la vallée de la Saône- Saint Triviers sur Moignan an 2000.

Page 73: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

71

Le cas de cette dernière CUMA est intéressant : Les membres souhaitent renouveler unparc de cinq tracteurs d’ici deux ans. Dans cet objectif, ils font pression sur leurconcessionnaire, Massey Ferguson, en vue d’obtenir une réponse à leur volonté d’utilisationdes biocarburants (sous menace, en l’occurrence, de se tourner vers la concurrence). Uncontrat sur cinq machines agricoles constitue un objet intéressant pour le concessionnaire,cela laisse donc présager de la probable volonté de celui-ci de conserver ses clients.

Les quelques exemples connus dans l’Ain sont encourageants. Cepandant il faut, làaussi, effectuer quelques comparaisons. A l’échelle nationale, compte tenu de la législation,il s’avère impossible d’opérer un recensement exhaustif des cas d’utilisation d’HVP. La cartedu document 29 offre une vue, déjà, de la répartition des CUMA concernées. Aux 16 déjàexistantes, il faut ajouter une cinquantaine de projets annoncés. Mais ces chiffres masquentune réalité a priori bien plus importante. En effet, dans le seul département de l’Ain, dont lacarte ne mentionne ni presse ni projet, on trouve déjà plusieurs exemples. En outre, ledocument 29 énumère uniquement les CUMA, ce qui ne reflète que partiellement la réalité.

Ainsi, il n’existe pas de données fiables, mais un fort présentiment d’un engouementréel et d’une très forte sous-évaluation du phénomène HVP à l’échelle de la France.

4.1.3 Vers l’implication des acteurs ?

Un autre indicateur de dynamisme peut être trouvé dans l’implication des acteursdans la recherche, au sens large, sur les biocarburants. Le département de l’Ain est, à cesujet, plutôt au stade de la réflexion, bien que des exemples ponctuels montrent une volontéporteuse. Il est remarquable de souligner les avancées effectuées dans ce domaine dansd’autres secteurs géographiques de la France.

L’ain en quête.

Outre les agriculteurs intéressés, il s’agit ici de se concentrer sur l’action (ou non) desorganismes agricoles principalement. Il est possible, encore, de dire que l’intégralité desacteurs s’intéressent aux biocarburants. Mais ce constat effectué, apparaissent desdisparités dans leur implication effective. Ainsi, la plupart suivent, de plus ou moins près,l’évolution des informations qui circulent.

De façon plus pratique, des partenariats se nouent sur les questions énergétiques.Par exemple, la FDGEDA (Fédération Départementale des Groupes d’Etudes et deDéveloppement Agricole), l’association de développement des énergies renouvelablesHélianthe, la FDCUMA, l’AFOCG (Association de Formation Collective à la Gestion) et leContrôle Laitier travaillent à ce sujet. D’autres projets vont voir le jour, la FDSEA souhaitecollaborer avec la FDCUMA, Cérégrain à partir de septembre…

Par ailleurs, une volonté d’accumulation de données (techniques, réglementaires,économiques…) se matérialise. En effet, un document technique27 a été réalisé par laFDCUMA, le contrôle laitier, Hélianthe (ainsi que l’Institut Technique du Porc de Toulouse).Le présent mémoire contribue également au regroupement et à la création de données en cesens. La Chambre d’Agriculture joue également un rôle dans ce domaine. Du financementde ce stage à la mise en place d’une fiche projet sur le sujet… soit l’émergence d’unevolonté de principe de s’intéresser aux biocarburants.

27 Boinon, 2005.

Page 74: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

72

La position des concessionnaires a été vue plus haut. Là aussi, l’heure est plutôt à laprise d’informations qu’a une réelle action (pour les raisons déjà exposées : attente de lanorme…). En effet, dans l’Ain, ils n’apportent aujourd’hui aucune réponse claire sur leuraction.

Enfin, le Conseil Général intervient de façon indirecte, en finançant partiellement desorganismes (FDCUMA, Hélianthe, peut-être FDGEDA bientôt…). Mais il apparaît que cessoutiens financiers ne sont jamais spécifiquement liés aux biocarburants mais plutôt àl’énergie, voire à l’innovation en général.

De ce tour d’horizon des initiatives en cours ou en devenir, il ressort trois élémentsconcrets :- La production de documents sur le sujet,- Des animations prévues (28 août, 10 septembre et 3 novembre 2005)- Des formations en préparation (fin 2005 début 2006, avec l’intervention de Jean-Pierre

Couvreur de la FDCUMA Mayenne).

Mais en dehors de ces aspects effectifs, le point majeur reste que l’Ain est au stade de laréflexion, de la perspective d’action… S’il est évident que les choses vont évoluer, il estmanifeste que la plupart des acteurs demeurent dans une position d’attente. Ce constat estrenforcé par l’observation d’exemples à l’exterieur du département.

Des forces mieux utilisées.

Il est impossible d’effectuer une revue exhaustive des initiatives, mais quelquesexemples significatifs d’organisations agricoles et de collectivités territoriales peuvent êtrerelevés.

Concernant les organismes, il apparaît une implication forte des fédérationsdépartementales et régionales de CUMA, aux premiers rangs desquelles se trouvent laFDCUMA de Mayenne et la FRCUMA de Midi-Pyrénées.

La première s’est très tôt intéressé à l’HVP, si bien qu’elle se pose en spécialiste etconnaît une véritable explosion des demandes de renseignements sur le sujet. La FDCUMA53 a donc produit des plaquettes d’information, mis en place des formations (Mr Couvreurest prévu à celles qui auront lieu dans l’Ain). Par ailleurs, ses employés travaillent sur lafuture norme et il existe une réelle volonté de structurer un réseau de réflexion et d’échangessur l’HVP.

En Midi-Pyrénées, la fédération régionale a déjà effectué, notamment, des essaistechniques sur les moteurs et contribue activement à la résolution des problèmes. Il faudraitégalement citer les FDCUMA de l’Aveyron et de la Drôme qui sont particulièrement mobiliséssur le sujet.

Certaines collectivités territoriales pèsent également de façon non-négligeable.L’importance du débouché que représentent leurs flottes captives, dont certaines roulentdéjà avec des biocarburants, a été mentionné. Se référant à nouveau au document 11, ilapparaît une faible représentation de collectivités rhônalpines (seule la Communautéd’Agglomération grenobloise) et, donc, leur absence totale dans l’Ain.

Mais la portée que peuvent avoir les collectivités ne se restreint pas à l’utilisation.Certaines en favorisent la production. Par exemple, les Conseils Régionaux de Midi-Pyrénées, de Basse Normandie et des Pays de la Loire soutiennent la recherche. Demanière plus directe encore, le Conseil Régional de Midi-Pyrénées contribue financièrement

Page 75: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

73

à une CUMA pionnière : La CUMA DEI dans l’Aveyron, en tant que projet innovant. Mais lecas le plus intéressant se trouve en Alsace.

Doc. 35 : Une aide à l’investissement en Alsace.

Source : Conseil Régional d’Alsace.

Ces exemples montrent que tous les acteurs et échelles de décisions peuventœuvrer pour le développement de ces filières. A noter que l’HVP est largement privilégiée ausein de ces travaux. Une explication peut être apportée : les partenaires locaux ont plus de

Le Conseil Régional d’Alsace, réuni ce vendredi 24 juin 2005 en séance plénière, sousla présidence d’Adrien Zeller, a décidé de soutenir le développement d’une filièrebiocarburants : l’huile végétale brute. Il s’agit d’un carburant qui peut être produit enAlsace, à base de tournesol, de colza ou de lin.

En l’état actuel des essais opérés dans le Bas-Rhin notamment, avec le concours de lachambre d’agriculture et du Conseil Général et des recherches, cette production semontre accessible et maîtrisable.Les huiles végétales brutes (HVB), en plus de leurs caractères d’énergierenouvelable sont relativement propres par rapport aux carburants produits à partirde pétrole : les HVB ne contiennent pas de soufre favorisant les pluies acides, demétaux lourds (notamment de plomb) polluant les sols et les nappes phréatiques, etd’hydrocarbures résiduels tel le benzène, puissant cancérigène.

De plus elles peuvent renforcer la compétitivité des exploitations agricoles alsaciennesen baissant les coûts liés à la consommation d’énergie lors des opérations culturales(labour, semis, irrigations, traitements, …) nécessaires à l’acte de production.La Région Alsace soutiendra désormais les agriculteurs qui souhaitent améliorer leurautonomie énergétique en fabricant à la ferme un carburant au moyen d’un processsimple mais performant d’un point de vue environnemental et énergétique.

Les investissements éligibles à l’aide régionale sont :le kit de carburation (pour tracteur ou pompe d’irrigation) ainsi que son installation, la presse fixe ou mobile ainsi que l’unité de filtrage, les unités de stockage de l’huile végétale.

La Région Alsace interviendra à hauteur de 25% des coûts à la charge du producteurpour ses investissements propres et à hauteur de 40% pour des investissementseffectués en collectif (les presses peuvent en effet être mobiles et circulerd’exploitation en exploitation).Le montant subventionnable sera plafonné pour chacun des bénéficiaires à hauteur de13 500 € HT.Les équipements collectifs seront aidés sous réserve de l’établissement d’un cahier descharges entre utilisateurs spécifiant que chaque exploitant presse et utilise l’huile issuede sa production propre.Le montant dédié à l’aide de la filière biocarburant s’élèvera annuellement à 30 000 €.

Page 76: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

74

prise sur ce dossier que sur celui des filières longues, déjà bien en place et géréesprincipalement à d’autres échelles. Il est cependant possible, voire souhaitable, que lesorganismes comme les Chambres d’agriculture missionnent, à terme, des agents sur laquestion globale des biocarburants (cas de la Chambre de la Drôme par exemple).

CONCLUSION 4.1

Ainsi, après avoir fait échos du potentiel théorique de développement des biocarburantsdans l’Ain, ont été précisées les positions et actions de chacun, de même que des exemplesen France qui semblent porteurs et qui pourraient orienter les initiatives dans l’Ain. L’objectifest désormais de poser les conditions de la rentabilité et de la faisabilité de la mise en place,à l’échelle de l’exploitation, de l’HVP et du débouché diester. Il sera possible ensuite detracer des hypothèses de développement.

Page 77: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

75

4.2 Une rentabilité cruciale.

Les deux critères clef de la mise sur pied de l’utilisation de l’HVP sur une exploitationsont la rentabilité et la continuité. Autrement dit, un exploitant produira de l’HVP s’il en tirebénéfice (plus que par conviction militante) et si cela ne bouleverse pas son moded’exploitation.

4.2.1 L’HVP en autoconsommation.

Il est donc évident que l’économie prend le pas sur d’autres facteurs de décision. Ilfaut alors prouver ici que cette initiative est rentable. De nombreux travaux ont été effectuéssur ce thème. Il ressort, a priori, que cette condition est remplie. Mais l’intérêt de conforterces exemples par un nouveau calcul n’est pas redondant. Au contraire, reprendre et affinerla méthode permettra d’approcher au plus près la réalité.

Afin, toujours, de coller à l’application dans l’Ain, deux exemples d’exploitations typedu département sont utilisés : Un agriculteur en céréales et lait, l’autre en céréales. Il s’agit àchaque fois de comparer les résultats économiques de deux cas : avec et sansbiocarburants.

Exploitation n°1 : système lait et céréales en plaine.

Dans le cas de cette exloitation laitière, les calculs se calent sur les besoins entourteaux, co-produit issus du pressage des graines de colza. Il peuvent en effet êtrevalorisés, comme les tourteaux industriels, dans l’alimentation des vaches. Cependant, lestourteaux issus du pressage “artisanal” contiennent plus de matières grasses (MG), 16 %actuellement en tourteaux gras artisanal, 3 % en industriel. La digestion des vaches laitièresest perturbée par une teneur trop élevée de MG. Il y a là une contrainte à prendre encompte.

D’après le Contrôle Laitier28, la substitution du tourteau à 3 % de MG par du tourteaugras peut atteindre 50 % dans la ration complémentaire. L’exemple qui suit prend uneexploitation de 50 vaches laitières. La ration complémentaire en colza s’élève à 3kg/UGB29/jour sur 200 jours, la production de tourteaux gras annuelle peut donc être de 15tonnes30. Avec un rendement en colza à 3 tonnes/hectares, la production de tourteau estd’environ 2,2 tonnes (et 800 litres d’HVP). Ainsi, environ 7 hectares sont nécessaires pouravoir une autonomie en tourteau de 50 %.

Deux points de méthodologie doivent être exposés :- Le choix de la structure de l’exploitation type s’est, dans un premier temps, fondé sur

l’analyse de données de l’OFGA (Office de la Fiscalité et de Gestion Agricole de l’Ain).Cependant, avec seulement 2 hectares de colza en moyenne (4 en oléagineux), il estapparu que les surfaces en colza étaient insuffisantes pour combler les besoins entourteau. Les calculs partent donc d’une sole en colza de 10 hectares (7 pour lestourteaux, 3 pour le diester). Il sera développé plus loin l’impact que cette modificationdans l’assolement pourra avoir sur les filières du département.

28 Boinon et alii, 2005, p. 9.29 Unité Gros Bétail. Une vache laitière = une UGB.30 Le calcul applicable dans tous les cas est que 50 % de la quantité de colza dans la ration complémentairepeuvent être substitués par du tourteau gras de colza.

Page 78: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

76

- Les calculs prennent systématiquement en compte l’hypothèse “basse”, à savoir la moinsfavorable à l’HVP (prix du tourteau, du fuel agricole…) afin de garantir et de renforcer lavaleur des résultats.

Il s’agit donc de présenter les budgets partiels respectifs de l’option biocarburants et deson contraire (“aujourd’hui”). Dans un premier temps, il est considéré que la recherche estl’équilibre, que le produit en situation actuelle et en option HVP soient les mêmes. Pour unhectare de colza à 30 quintaux, l’estimation des résultats est la suivante :

Doc. 36 : Pour un équilibre financier. (sur un hectare avec un rendement de 30 quintaux)Aujourd’hui Option HVP

Produits (en €) Prix (en €)Vente grains : 174 €/tnet en moyenne + 521

Tourteau gras : 2,2t/ha (évalué à 150 €/t) + 330

Aides PAC31 + 87,89 Aides PAC + 87,89Charges financièresstockage, utilisation…(évaluées à 35 €/t)*

- 105

HVP : 800 l/ha + 296 soit 0,37 €/litreTOTAL : 608,89 €

D’après Boinon, 2005, page 9.

* Calcul basé sur une presse à 9 150 €, débitant 60 kg/heure soit 2 jours/hectares.Financée avec : 25 % de subvention (2 300 € du conseil régional au titre de l’achat collectif dematériel qui contribue au respect de l’environnement et de la création de CUMA) ; 20 % de capitalsocial (1 850 € d’engagement financier propre) et 5 000 € d’emprunt sur 3 ans à un taux de 3,4 %. Unchangement de la vis de la presse (700 €) est compris.Amortissement sur 5 ans avec objectif de revente au bout de 3 ans à 2 cinquièmes de la valeur dedépart.

L’analyse du tableau est la suivante : Pour un niveau de produit équivalent à celui ducircuit traditionnel, l’huile est valorisée à 0,37 centimes du litre. Afin d’illustrer ce propos, letableau ci-dessous applique ces éléments économiques à l’exploitation type n°1. Il estconsidéré qu’une exploitation de ce type consomme annuellement 145 litres de carburants àl’hectare32.

Doc. 37 : Répercussions sur le différentiel à la consommation de carburant.

Gazole* HVP 10 % HVP 30 %** HVP maximale(75 %)**

Coût annuel en€/hectare 67,62 66,22 (- 1,4) 63,68 (- 3,94) 59,64 (- 7,98)

* Le coût du gazole agricole est fixé à 0,46632 €/litre (0,58 €/litre dont est déduite la TVA, cas indicatifd’une livraison à la mi-juillet). A noter qu’il est probable que la tendance soit à la hausse, ce quiviendrait améliorer d’autant le bilan économique.

31 Le calcul des aides PAC tient compte de la réforme engagée. Concernant le colza, le taux de couplage choisipar la France est de 25 %, le reste étant compris dans le calcul des Droits à Paiement Uniques.32 Communication de P. Chrétien, conseillé d’entreprise Chambre d’agriculture de l’Ain.

Page 79: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

77

** Pour les taux d’HVP à 30 et à 75 %, ont été pris en compte les modifications moteurs à effectuersur les machines :- à 30 %, un réchauffeur placé au plus près de la pompe à injection est nécessaire (pour limiter le

problème de la viscosité de l’huile notamment). Son coût est de 150 €, il est considéré ici que ceréchauffeur est amorti sur 6 ans, ce qui augmente le coût à l’hectare de 0,25 €/an.

- à 75 %, les modifications s’élèvent à 1 500 € (2 réchauffeurs, un kit de bicarburation automatiqueavec une sonde de température). Le même procédé d’amortissement est utilisé, ce qui accroît leprix à l’hectare de 2,5 €. Le taux de 75 % semble aujourd’hui être un maximum, étant donné quele démarrage se fait au gazole, jusqu’à une montée de la température de 60°C et le moteurpompe l’HVP entre cette température et 80°C, lorsque la charge est supérieure à 65 % de lapuissance nominale du moteur. Ainsi, sur une conduite de 6 heures, le temps d’utilisation del’HVP est évalué à 4 heures 30, soit 75 % du temps.

- Les possibilités d’incorporation se basent sur des tracteurs à injection directe sans rampecommune. D’autre part, si l’utilisation à 30 % et dans ces conditions ne pose aucun problème,l’incorporation à 75 % demeure au stade de l’expérimentation et le recul nécessaire n’est peut-être pas suffisant.

Ainsi, il apparaît que les coûts de production sont réduits par l’utilisation de l’HVP. Pourpouvoir cerner de façon plus exhaustive les conditions de la rentabilité du passage à l’HVP, ilreste à comparer les prix de revient en colza avec ceux en maïs et blé. En effet, il a été posécomme condition de faisabilité que la sole de colza augmente… nécessairement au dépendd’une autre culture. Reste donc à voir s’il est rentable de substituer du blé ou du maïs par ducolza. De ces trois cultures, celle du colza alimentaire est actuellement la moinséconomiquement intéressante, il faut donc tenir compte des bénéfices supplémentairesqu’engendrent le colza HVP

Doc. 38 : 2004-2005, l’HVP rentable.Produit net à l’hectare en €

Maïs 569,43Blé 641,025Colza alimentaire 535,77Colza HVP33 687,31

A charges de production égales, il apparaît que le colza HVP supplante largement lesautres cultures, le commentaire de ce tableau est donc positif. : dans les conditions de lacampagne 2004-2005, les bénéfices de l’incorporation d’HVP couvrent les pertes liées auchangement de l’assolement. Afin de caractériser de façon plus exhaustive les conditions derentabilité, il faut émettre des hypothèses de variations de plusieurs paramètres, afin dedétecter les seuils. Deux facteurs peuvent influer : les prix et les rendements de laproduction. Le prix et le rendement du colza sont considérés comme constants dans ceshypothèses, sur la base de la campagne 2004-2005.

33 économie de gazole : 357,31 € + tourteaux : 330 €

Page 80: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

78

Doc. 39 : Les seuils de rentabilité de la progression du colza.Maïs

< 76,35 (actuellement 63,27)BléEvolution des prix (en € net/t)

< 91,65 (actuellement 85,47)Maïs

< 10,86 (actuellement 9)BléEvolution des rendements (en t/ha)

< 8,4 (actuellement 7,5)

Le bilan de cette analyse paraît favorable aux HVP. Cependant, il faut nuancer cepropos. Les prix à la tonnes ont été bas en 2004/2005. Depuis 1995, la rentabilité de l’HVPn’aurait pas été aussi évidente, compte tenu de prix à la tonne plus intéressants en maïs etblé. La question de l’évolution des rendements est également posée : 108 quintaux àl’hectare de maïs et 85 en blé sont des paliers qui seront probablement dépassés àrelativement court terme (sauf effets conjoncturels type sécheresse…).

Il faut donc prendre en compte un vecteur d’évolution supplémentaire : le prix ducarburant. Les tableau ci-dessus prennent un carburant à 0,58 € (soit 0,46632 sans la TVA),le document 40 met en évidence la croissance de l’effet positif de l’HVP à mesure que le prixdu carburant fossile augmente.

Doc. 40 : L’HVP de plus en plus bénéfique.Prix du fioul agricole (€/litre) Taux d’incorporation d’HVP Différentiel à l’hectare (€)

10 1,430 3,940,4663275 7,9810 5,4830 9,760,675 20,0110 6,2430 18,510,875 44,2610 9,1430 27,16175 66,01

Le prix du gazole est donc un facteur clef dans la viabilité économique de ladémarche. Il est remarquable de constater la puissante croissance du différentiel. Plus legazole est cher et plus le taux d’HVP est fort, plus la rentabilité du mode HVP est importante.Rappelant que la dynamique du coût du pétrole est très clairement à la hausse, ceshypothèses ne sont peut-être pas si lointaines…

Synthèse exploitation 1.

A l’instant présent, en système lait céréales, l’intérêt économique de l’utilisationd’HVP est avéré. L’impact sur les coûts de production à l’hectare est significatif. Pour uneexploitation de 100 ha qui tournerait à 75 % d’HVP, les charges en moins s’éleveraient àpresque 800 € par an (voire, bientôt, jusqu’à plus de 6 600 €). L’intérêt de la substitution dumaïs ou du blé par du colza est peut-être plus fragile à terme, mais une réflexion sur le bilan

Page 81: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

79

global met en évidence l’intérêt de l’utilisation d’HVP (et, par là, de l’augmentation de la solede colza).

Ainsi, outre les avantages globaux (environnementaux… cf. partie 1), une telletransformation permet d’accroître l’autonomie alimentaire et la traçabilité par l’emploi destourteaux ainsi que de réduire les charges énergétiques de l’exploitation.

Avant de tracer des perspectives d’utilisation, il faut encore se pencher sur le cas del’exploitation type n°2 qui, en système céréales spécialisés, connaît certains particularismes.

Exploitation n°2 : système spécialisé en céréales.

Trois différences fondamentales conduisent à traiter ces deux systèmes séparément.Deux difficultés supplémentaires existent en spécialisé céréales dans la mesure où se posela question de la valorisation du tourteau gras et que “seulement” 125 litres/hectare/an sontnécessaires à la conduite de l’exploitation. En revanche, la conversion de blé ou de maïsdevra être de moindre importance, puisque la moyenne des surfaces en colza des céréaliersspécialisés (sec) est 2,4 fois supérieure à celle des lait céréales (soit 4,6 hectares selon lesdonnées de l’OFGA).

Le premier frein est donc constitué par la question de la valorisation du tourteau gras.En l’absence de cheptel, la valorisation directe en est rendue impossible. La conditionindispensable est donc de pouvoir vendre ce co-produit. Cette question est reprise etdéveloppée dans les conditions de réussite nécessaires au développement desbiocarburants dans l’Ain (cf. 4.4.3). En l’absence d’intérêt premier pour les tourteaux, lescalculs sont basés sur les besoins en HVP.

Doc. 41 : Besoins d’une exploitation céréalière de 100 hectaresHVP 10 % HVP 30 % HVP 75 %

Litres HVP 1 250 3 750 9 375Hectares 1,56 4,69 11,72

La plus grande facilité qu’aurait un céréalier à passer en HVP est évidente : jusqu’à30 %, aucune modification de l’assolement n’est nécessaire. Il faudrait cependant multiplierpar 2,5 la sole de colza pour parvenir à 75 % d’incorporation. La rentabilité d’une tellesubstitution est exposée par les documents 38 et 39.

Partant du principe d’une valorisation du tourteau, les coûts de l’équipement enpresse à huile sont les mêmes (cf. document 36). L’huile reste donc évaluée à 37 centimespar litre. Il faut désormais établir les répercussions sur le différentiel entre coût du gazole etcoût de l’HVP à l’hectare.

Doc. 42 : Application au système céréalier du différentiel de coût du carburant.gazole HVP 10 % HVP 30 % HVP 75 %

Coût annuel en€/ha 58,29 57,09 (- 1,2) 54,93 (- 3,36) 51,76 (- 6,53)

Les différentiels de coûts sont plus réduits. De presque 8 €/ha pour 75 % d’HVP enlait céréales, la moindre consommation de carburant en système céréales induit unedifférence de seulement 6,53 €. L’impact de l’augmentation du litre de gazole va s’en trouverdiminué.

Page 82: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

80

Doc. 43 : Prise en compte de la variable hausse du prix du carburant.Prix du fioul agricole (€/litre) Taux d’incorporation d’HVP Différentiel à l’hectare (€)

10 1,230 3,360,4663275 6,5310 2,8830 8,380,675 19,0610 5,3830 15,880,875 37,8110 7,8830 23,38175 56,56

Les effets de la hausse du gazole sont donc amoindris en exploitation type céréales,mais néanmoins substenciels. De 1,2 €/ha à 10 % d’incorporation aujourd’hui, le gainatteindrait 56,56 €/ha à 75 % d’incorporation avec un prix du carburant à 1 €/litre. Autrementdit, la fourchette de gain annuel sur l’exploitation passe de 120 à 5 656 €.

Synthèse exploitation 2

Les spécificités des exploitations céréalières conduisent à mesurer les conclusionstirées de l’exploitation n°1. Mais si les gains sont légerement inférieurs, la condition derentabilité économique est pleinement remplie. A noter que l’hypothèse retient la valorisationdu tourteau gras.

Afin de préparer de façon plus complète l’examen des hypothèses de développementdes biocarburants dans l’Ain, il reste à évaluer les éléments économiques du colza diester.

4.2.2 Le colza diester en concurrence.

Il faut cerner la compétitivité du colza destiné à la production de biodiesel par rapportaux cultures avec lesquelles il est en concurrence (colza alimentaire, colza HVP, maïs etblé). La distinction selon le type d’exploitation n’a plus lieu d’être, étant donné le caractèrecommun à tous de l’accès entier à ce débouché.

Il faut rappeler que, dans l’Ain, les exploitants trouvent leur intérêt dans le débouchédiester (contractualisation, valorisation de la jachère…). La question n’est donc pas, ici,strictement économique : le produit net à l’hectare peut être le même qu’en colzaalimentaire. En effet, la nouvelle aide introduite par la réforme de la PAC (Aide aux CulturesEnergétique) impose, dans ses conditions d’elligibilité, que la culture soit effectuée horsjachère. Or, une large majorité (63 %) du colza produit dans l’Ain l’est sur jachère et setrouve exclu de la prime ACE. Les 27 % restant sont en alimentaires et hors-jachères, c’estdonc sur ces surfaces que pourrait se répandre le débouché énergétique.

Page 83: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

81

Doc. 44 : Un colza diester en position incertaine.Produit net à l’hectare en €

Maïs 569,43Blé 641,025Colza alimentaire 535,77Colza HVP 687,31Colza diester avec ACE 580,77Colza diester sur jachère 535,77

La problématique, concernant le colza diester, est donc de conserver son emprise(actuellement 2 500 hectares). Or, le tableau ci-dessus met en évidence sa moindrecompétitivité, en particulier par rapport au colza HVP. Le potentiel de substitution de maïs encolza reste limité et il est possible de douter de son ampleur, dans la mesure ou ce colza àdestination de la production de l’EMHV n’apporte aucun bénéfice supplémentaire. Ainsi, il estpermi de penser que c’est au dépend du colza alimentaire que le colza diester a deschances de progresser ou de se stabiliser (dans l’éventualité du développement du colzaHVP). La prime de la PAC pourrait peser dans les choix des agriculteurs. Il est intéressantde noter à ce sujet que Cérégrain indique qu’il n’est pas hostile par principe à la diminution,voire la disparition du débouché alimentaire34. Il n’existe donc pas d’obstacle majeur à laréorientation des débouchés dans ce domaine.

CONCLUSION 4.2

Le condition sine qua non du développement des biocarburants, à court terme aumoins, réside dans leur rentabilité économique pour le producteur. Les éléments exposés icipermettent de répondre positivement, globalement, à cette problématique. L’utilisation d’HVPest moins coûteuse que celle du gazole. Mais une question importante demeure : celle de lasubstitution de cultures de céréales par du colza, dont le bénéfice est fragile sinonactuellement inexistant. L’évolution de la sole de colza est un élément clef. Déjà, lesconditions techniques et agronomiques de son augmentation sont réunies. A l’échelledépartementale, rien ne s’oppose donc à la croissance de cette culture. Sa faisabilité devraêtre évaluée au cas par cas.

34 Communication de François de la Perrière, directeur de production chez Cérégrain.

Page 84: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

82

4.3 Du bilan micro-économique aux perspectives départementales.

Ayant mis en évidence la rentabilité et ses conditions, il est désormais possible detracer des perspectives. Celles-ci s’attachent, par des hypothèses, à évaluer le nombred’exploitations qui sont susceptibles de produire et d’utiliser de l’HVP. De là, une partvariable de la sole de colza départementale verra son débouché se modifier et il serapossible d’appréhender les conséquences induites.

Le choix des exploitations possiblement intéressées par l’HVP doit être fixé selon lescritères les plus objectifs possibles. Ils sont les suivants35 :- Les exploitations professionnelles de l’Ain (3 228 au Recencement Général Agricole de

2000), pondérée par une baisse de 3 % par an depuis cette date, soit 2 772 en 2005.- Y sont retranchées les exploitations dont les OTEX (Orientation Technique des

Exploitations) n’induisent pas le potentiel besoin d’HVP. Cette opération porte à 2 200 lesexploitations, dans l’Ain, comptabilisées36.

- Y sont retranchés 30 % du total, afin d’écarter les exploitations en zone de montagne(absence de colza) et de partir d’une hypothèse relativement basse et, donc, plusraisonnable.

- Ainsi, le total des exploitations sur lesquelles reposent les calculs est porté à 1 500. Il estconsidéré que cela représente 150 000 hectares de la SAU départementale, avec 65 %d’exploitations à dominante élevage et 35 % à dominante céréales.

Afin d’évaluer les évolutions selon différents scénarii, les taux d’incorporation pris encompte dans le calcul sont les mêmes que dans les développements précédents (10, 30 et75 %). Cependant, un crédit particulier doit être à accorder aux 75 %, dans la mesure ou, àterme, les constructeurs garantiront les moteurs, la bicarburation (permettant une telleincorporation) semble déjà être leur orientation. L’objectif, dans un premier temps, estd’évaluer la consommation annuelle de carburant ; Le croisement du nombre d’exploitationsprenant part à cette dynamique avec le pourcentage d’HVP incorporés permettra de donnerune fourchette des besoins en colza.

La consommation annuelle en carburant de l’ensemble de ces exploitations s’élève àplus de 20 millions de litres (20 700 000) répartis comme suit :- 14 137 500 pour les exploitations à dominante élevage (97 500 hectares avec 145

litres/ha)- 6 562 500 pour les dominantes céréales (52 500 ha avec 125 litres/ha).

Le document ci-dessous offre une vue du potentiel des besoins en SAU colza. Selon lesdifférentes variables prises en compte, de 260 à presque 20 000 hectares serontnécessaires. Le tableau qui suit reprend les probabilités les plus signifiantes.

35 En concertation avec J.L. Peltier, cf. supra36 Les OTEX prises en compte sont : céréales et oléoprotéagineux, cultures générales, bovins lait, bovins lait-viande, granivores, polyculture, polyélevage, grandes cultures et herbivores.

Page 85: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

83

Doc. 46 : Hectares en colza nécessaires selon taux d’incorporation et exploitationsimpliquées.Exploitations impliquées en %Incorporation

HVP en % 10 25 50 10010 259 647 1 294 2 58830 776 1 941 3 881 7 76375 1 941 4 852 9 703 19 406

Doc. 45 : rapports entre exploitations en HVP et besoins en ha de colza.

0

5000

10000

15000

20000

25000

10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 % expl.

ha

10 % hvp30 % hvp75 % hvp

Page 86: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

84

CONCLUSION 4.3

Ainsi, une surface plus ou moins significative de la sole de colza va probablementêtre allouée à la production d’HVP. L’écart entre les hypothèses les plus extrèmes ne permetpas de cerner une évolution claire. Cela est dû à un panel de variables très important, àpartir desquelles il est aujourd’hui impossible de trancher définitivement. A défaut, donc, depouvoir fixer plus précisement les évolutions à venir, il est cependant d’ores et déjà possiblede soulever les conditions de la plus ou moins grande croissance du phénomène. Lediagnostic sera alors plus affiné, et les probabilités mieux cernées (notamment sur larépartition entre les colzas alimentaire, diester et HVP).

Page 87: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

85

4.4 Du démarrage à la confirmation : les conditions de la réussite.

Avant de se concentrer sur le cas de l’Ain, le rappel succint d’éléments globaux est utile :la hausse du prix du carburant est un facteur significatif de l’amélioration du bilanéconomique et l’Etat doit confirmer ses intentions :- L’adoption du projet de loi d’orientation agricole (article 12 en particulier), voire, à terme,

une extension des possibilités offertes à l’utilisation des HVP,- Continuer et augmenter de façon significative les agréments donnés à la défiscalisation

pour les biocarburants de la filière longue,- Poursuivre les actions de promotion et de recherche qui sont engagées (lancement de

l’Agence pour l’innovation industrielle, soutien à l’ADEME…

A l’échelle départementale, il apparaît que tous les acteurs peuvent et doivent jouer unrôle dans le développement des biocarburants : des collectivités territoriales aux exploitants,en passant par les organismes agricole, les concessionnaires… Le développement part del’échelle régionale pour terminer sur le potentiel agronomique d’une exploitation, du généralau particulier.

4.4.1 Des collectivités promotrices et financeurs.

Leur potentiel d’implication a déjà été plusieurs fois mentionné au cours de cemémoire. Il s’agit ici d’un rappel mais surtout de l’examen de projets spécifiques.L’incorporation, dans les flottes captives, de biocarburants à des taux importants constitueautant un accroissement du débouché qu’une action de promotion intéressante. Par ailleurset en accord avec leurs attributions et discours, il est souhaitable qu’elles s’impliquent dansle financement du développement des biocarburants.

Des exemples d’incitations ont été exposés (Alsace, Midi-Pyrénées…), lescollectivités telles que la région Rhône-Alpes et le conseil général de l’Ain pourraientapporter leur soutien sur ce dossier, aucune aide spécifique n’existant actuellement.Un projet bénéficiant de financements européens dans le cadre d’une expérimentation, enrégion Rhône-Alpes, sur l’HVP37 a été validé. Il s’agirait là de la première initiative concrèteet directe des pouvoirs locaux sur les biocarburants. En outre, la hauteur du financement duconseil régional pour les investissements en plaine (priorités 2 et 3, respectivement“environnement” et “création de CUMA”) est fixé à 15 % du montant. Il semble probable qu’àla suite de demandes successives et répétées, le taux soit porté à 25 %.

Il serait souhaitable que cette tendance au niveau régionale s’observe également àl’échelle départementale, voire même à celle d’une communauté de communes par exemple.

Ainsi, il semble que des projets porteurs soient en devenir. Ils restent cependantrelativement ponctuels et leur généralisation (tout du moins leur augmentation) permettraittout autant de faciliter le développement de l’utilisation d’HVP que de participer activement àla promotion des initiatives.

37 Cédric Charrier, Chambre d’agriculture de la Drôme.

Page 88: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

86

4.4.2 Les organismes agricoles, premiers concernés.

Des syndicats à la Chambre d’agriculture de l’Ain, de nombreuses initiatives restent àlancer. Le stade de la réflexion suit son cours et le passage à l’action devrait se confirmer.D’autres Chambres, départementales notamment38, ont pris part activement dans le dossieret le faible retard de l’Ain peut être comblé.

L’implication de ces organismes, de par la largeur de leurs compétences, peuts’avérer particulièrement efficace. Les actions de promotion, de conseil et de renseignementen constituent un premier élément important. D’autre part, deux types d’initiatives pourraientêtre notoirement déterminantes : la formation aux agriculteurs et la recherche appliquée. Eneffet, l’échelle peut sembler être spécialement intéressante et, par voie de conséquence, lesimpacts en terme de progression des biocarburants dans l’Ain se verraient accrus. A titred’exemple, la fourniture d’une information ciblée et objective supplanterait de façon positiveles renseignements disponibles actuellement, trop souvent à la fois évasifs (peu applicables)et subjectifs (fortement marqués idéologiquement et parfois, de ce fait, éronnés).

Ainsi, l’idée d’un conseil et d’une analyse personnalisée pourrait être une voie deréflexion intéressante pour les organismes locaux, outre l’indispensable part d’informationaux exploitants du département. Autrement dit, de la formation à l’implantation et au suivides agriculteurs sur un système d’exploitation intégrant la problématique des biocarburants,l’attention des organismes agricoles départementaux peut trouver une voie efficace.

4.4.3 L’intérêt des collecteurs.

Débouchés des produits agricoles par définition, leur positionnement conditionne defaçon non-négligeable l’évolution possible. Interlocuteurs incontourables pour le colzadiester, ils pourraient également constituer une solution concernant l’HVP.

La question de la valorisation des tourteaux, co-produits du pressage des graines decolza, constitue une condition fondamentale de l’intérêt des exploitants pour l’HVP.Concernant les exploitations en élevage, l’accès à un débouché est facilité par la possibilitéde la valorisation directe, par le biais de la ration complémentaire des animaux. Le problèmepouvait sembler plus aigü pour les exploitations sans élevage.

Cette problématique se trouve résolue d’une manière fort simple. Les EtablissementsGuénard (fabricant d’aliment au sein duquel Cérégrain possède des participations)indiquent39 qu’ils sont tout à fait susceptibles de collecter les tourteaux gras. Ce débouchéest donc ouvert à l’ensemble des intéressés, à la condition de constituer des lots de 25tonnes. Cette quantité de tourteaux représente le pressage d’un peu plus de 11 hectares decolza. Il est donc à envisager une organisation collective du pressage du colza, type CUMA.

Les capacités d’intercession dans la problématique de la production destinée auxbiocarburants en filière longue est évidente. Deux éléments viennent nourrir la réflexion :- Il n’existe aucune volonté ferme de conserver des contrats pour des débouchés

alimentaires en colza chez Cérégrain40. Partant, le problème du besoin de disponibilité

38 Le cas de la Drôme est intéressant à cet égard. Contacter Sarah Franco, missionnée sur les HVP.39 Communication de Monsieur Bruet, responsable des achats des Ets Guénard.40 Cf. note 34.

Page 89: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

87

de surfaces en colza, certes primordial, s’en trouve néanmoins atténué. Il n’existe pas delimite inférieure au débouché alimentaire.

- Le second point demeure aujourd’hui plus hypothétique. L’éventualité d’une usine detransformation plus proche que celle qui constitue le débouché actuel du colza diester del’Ain (Sète, dans l’Hérault) pourrait diminuer les coûts de 5 €/tonnes, surcoût dû autransport sur plus de 500 kilomètres. Une réflexion a été engagée. La condition premièred’une telle initiative repose sur une possibilité de collecte suffisante. Il apparaît que larégion Rhône-Alpes, l’Ain plus encore, ne suffirait pas à fournir une usine. Il serait, enrevanche, envisageable d’implanter cette usine au sein du bassin de production entre lenord de Rhône-Alpes et la Bourgogne (Dijon, Chalons…). Mais cette affirmation deprincipe masque quelque peu la réalité pour plusieurs raisons. La réflexion ne peut-êtreengagée qu’à l’échelle nationale, étant donné que la rentabilité est conditionnée par laquantité de l’approvisionnement pour amortir des investissements particulièrement lourds(une usine nécessite entre 75 et 150 millions d’€). Ainsi, dans les conditions actuelles, lacréation d’une nouvelle usine viendrait pénaliser celles déjà existantes, Sète notamment.Ce frein ne pourrait être levé qu’à condition que l’Etat augmente de façon conséquenteles agréments à la production. En définitive, la construction d’une usine plus proche del’Ain ne semble pas être à l’ordre du jour.

En dépit de la faible probabilité de la perspective d’une usine, les collecteurs prennentdéjà une part active dans le développement des biocarburants. Leur rôle est déjà significatifet leur action pourrait fortement s’étendre.

4.4.4 Des fournisseurs de matériels agricoles partie prenante.

Cette affirmation doit être comprise comme une condition de réussite, non comme unfait établi.

Il existe cependant des éléments positifs, en premier lieu desquels l’existence d’unegamme assez large de presses à huile. Un document produit par l’association Hélianthedevrait voir le jour fin septembre 2005, son objet est de référencer et de comparer lesdifférentes presses disponibles. Il est déjà possible de donner une image du large paneloffert :- Du pressage d’un hectare en plus de 12 jours jusqu’en moins de 40 heures,- D’un montant inférieur à 4 000 € jusqu’à plus de 220 000 €.

En conséquence, il est possible d’affirmer que pour chaque situation particulière, il existeune presse à huile adaptée, de la petite exploitation en autonomie jusqu’à de grosses CUMAou même, à terme, des structures plus importantes.

Une question plus épineuse repose sur la position des concessionnaires. Actuellement,aucune garantie n’est fournie pour le fonctionnement des moteurs à l’HVP. Cependant,plusieurs éléments peuvent conduire à une évolution positive :- La mise sur pied de la norme sur les HVP mettrait très probablement un terme à cette

situation, elle est attendue d’ici 2008-2010,- Plus localement et plus rapidement, deux moyens pourrait permettre d’accélérer le

phénomène. Une pression venue des clients, pour lesquels les concessionnairespourraient se mobiliser, afin d’éviter la perte de contrats, aurait des effets indiscutables.Selon une autre dimension, l’intégration de ces concessionnaires locaux au sein desgroupes de réflexion existants ou projetés (avec les syndiacts, la FDCUMA, la Chambred’agriculture…) pourrait également porter ses fruits. L’objectif serait d’ajouter à la forcede pression des clients une invitation à la coopération des instances agricoles.

Page 90: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

88

Il faut souligner l’importance du rôle des fournisseurs de matériels agricoles. En effet, lespossibilités d’utilisation de l’HVP sont directement conditionnées par la nature des moteurs.La plupart des essais sont effectués sur des tracteurs à injection directe, sans rampecommune (principe souligné dans les préalables aux calculs de faisabilité économique dansce mémoire). Cela ne représente pas, loin s’en faut, l’intégralité du parc. Pour pousser laréflexion plus avant, outre la garantie des moteurs, il serait souhaitable d’étendre le champde l’utilisation au plus large possible. Les services de recherche des motoristes sont alorsdes acteurs incontournables.

4.4.5 La centralité de l’exploitant.

Il est incontestable que le point nodal de l’ensemble des perspectives demeurel’exploitant.

La rentabilité de l’utilisation d’HVP est une condition essentielle, mais qui n’est pasuniquement fonction de facteurs à l’échelle de l’exploitation. La maîtrise des vecteurs debénéfices n’est donc pas du seul ressort de l’exploitant. En revanche, la volonté desproducteurs, élément inquantifiable mais indispensable, constitue une clef du développementdes biocarburants. Cette remarque prend toute sa valeur dans la situation actuelle : lelancement et la confirmation de ces embryons de filières sont les palliers les moins évidentsà franchir. Il est fort probable qu’une fois lancées, les initiatives vont se multiplier et sepérenniser. La prise de conscience et le démarrage sont donc deux notions sur lesquelles iln’est pas aisé d’influer mais qui sont pourtant indispensables (d’où l’intérêt de l’information etde la formation auprès des agriculteurs).

Il faut également rappeler ici le rôle de persuasion que peuvent jouer les exploitantsagricoles. L’exemple des concessionnaires a déjà été traité, mais il est possible d’élargircette faculté d’influence. Les agriculteurs sont bénéficiaires mais également contributeursdes organismes agricoles. Par ce biais, il existe une capacité non-négligeable d’orientationdes politiques menées.

Enfin, une condition de réussite repose sur la volonté de recourir à des évolutionsdans les modes d’organisation et de structuration : création de nouvelles CUMA et/ouchangement dans la nutrition du cheptel, voire modification de l’assolement.

De toute évidence, donc, la part des exploitants est fondamentale dans l’évolution àvenir. Ils constituent le premier maillon de décision ainsi qu’une force de pressionintéressante.

4.4.6 Une question d’agronomie.

Il s’agit là d’un facteur forcément incontournable. A l’échelle du département, il estpossible de mettre en parallèle les possibilités biologiques de la culture du colza avec sarépartition effective (cf. document 34). Ainsi, des régions comme le Bugey se trouventécartées d’office.

A l’échelle de l’exploitation également, la question du potentiel agronomique des solsse pose. Il est impossible de généraliser des propos à ce sujet, chaque situation doit êtreévaluée au cas par cas. Un autre élément peut être vu dans la maîtrise technique, par

Page 91: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

89

l’exploitant, de telle ou telle culture. En l’occurence, la production de colza est relativementdifficile et il est possible que cela constitue, parfois, un frein.

Les questions des aptitudes des sols et de la maîtrise technique ne peuvent donc pasêtre occultées. Plus qu’une véritable condition de réussite, ils constitueraient plutôt une clefde répartition.

CONCLUSION 4.4

D’une part infime de la production jusqu’à l’explosion des surfaces consacrées auxbiocarburants, il apparaît que les facteurs sont multiples et se situent à toutes les échelles.Cependant, des pistes ont été ouvertes et il est probable que les choses évoluentrapidement. Cette hypothèse de rapidité des changements vient appuyer l’argument de lanécessité de l’action, en vue de la maîtrise et du développement des biocarburants dansl’Ain.

Page 92: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

90

CONCLUSION 4 : Du potentiel à la réalisation.

La place de l’Ain dans le secteur des biocarburants doit être comprise selon plusieursvues. A cet égard, le différentiel entre un département fortement impliqué dans la productionde biodiesel et un démarrage comparativement difficile de l’HVP est flagrant. A signalerl’absence du débouché éthanol, cela s’explique par le fait que l’Ain est en dehors de la zonede collecte des différentes usines et que la betterave (non produite dans l’Ain) représenteune matière première plus efficace que les céréales (70 % de l’ETBE, en France, est produità partir de la betterave).

Il s’agit d’une période charnière pour le développement des biocarburants, et del’HVP en particulier. Le qualificatif de filière “en gestation” semble en effet adapté à cesecteur. Mais il apparaît de façon claire qu’outre les réflexions et recherches encorenécessaires, arrive le temps de l’action. Les facteurs de croissance sont nombreux et il seraitdonc souhaitable que chacun soit partie prenante afin d’accompagner cette évolution.

Comme cette partie le met en évidence, il est difficile d’apposer des donnéesquantitatives précises. Cependant, cette conclusion peut être le lieu privilégié d’unehypothèse :- Les bénéfices de l’utilisation d’HVP semblent sufffisants pour lui conférer des

perspectives importantes de développement des surfaces qui lui seraient consacrées.- La sole de colza peut augmenter jusqu’à un maximum de 12 000 hectares, plus

probablement environ 7 000 (4 700 actuellement). L’impact sur d’autres cultures tellesque celle du blé ou du maïs ne sera pas, a priori, particulièrement prégnant, étantdonnée la faible marge de rentabilité de la substitution.

- Le colza diester, poste donc significatif dans l’Ain, pourra voir sa part augmenter,spécialement si l’on intègre la potentialité de l’obtention de l’aide aux culture énergétique.

- L’hypothèse ici formulée est donc que la progression du colza à vocation énergétique(diester et HVP) se fera plutôt au dépend du colza alimentaire. Le fait que celui-ci soitproduit hors-jachères et qu’il soit, dans ce cas, mis en concurrence avec le colza diester,financièrement soutenu, vient corroborer cette thèse.

Ainsi, le bilan de cette réflexion est intéressant : le développement des filièresbiocarburants peut se produire de façon importante sans que les filières et structures enplace ne voient leur organisation bouleversée. Selon l’hypothèse présentée, “seule” uneredistribution des débouchés de la culture du colza est nécessaire. La réussite de cesréorientations repose sur l’action concertée et prompte de tous, mais ne trouve pas deblocage particulièrement important (type perte de grandes surfaces de céréales…).

Page 93: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

91

CONCLUSION GENERALE

Le thème des biocarburants touche de très près l’actualité, en témoignent lesinnombrables évocations du sujet dans les médias, par les politiques… Aussi positive quesoit cette marque d’intérêt collectif, elle a pour effet pervers de ne refléter souvent qu’uneréalité partielle. Autrement dit, la nature même de cette communication de masse a pourconséquence de biaiser (volontairement ou non) les faits objectifs. Une des cibles de cemémoire a été de traduire la globalité de ces éléments de la façon la plus neutre, la pluscomplète et la plus synthétique possible.

Les trois premières parties sont le cadre de cet examen approfondi. Sans les développeroutre mesure, il est intéressant de revenir sur les traits principaux qui caractérisent lesbiocarburants.

Leurs intérêts sont multiples. Des bilans environnementaux plus positifs leur confèrentune légitimité incontestable, encore faut-il faire la distinction entre les différentsbiocarburants : l’ETBE est considérablement moins intéressant que l’HVP par exemple. Ledéveloppement des biocarburants induit également des conséquences favorables sur le planmacro-économique, il en est ainsi de la réduction de la dépendance énergétique et de lasécurité des approvisionnements. Cet avantage prend toute son ampleur lorsqu’il est mis enparallèle avec la hausse incontrolée des cours du pétrole et la dépréciation qu’elle engendresur la santé de l’économie. Enfin, le dossier biocarburant constitue un atout majeur pourl’agriculture en général et peut participer à la résolution de certains problèmes, tels que lacrise des débouchés et des prix de la production.

Ce qui peut alors paraître, sur certains points, comme une véritable aubaine se trouvenéanmoins considérablement freiné par la persistance de blocages forts. La jeunesse de cesfilières est un problème qui pourra être surpassé relativement aisément. Mais la frilosité et lemanque de volonté politique fait barrage à nombre de possibilités. La situation évolueégalement sur ce plan, bien que le postulat d’une lenteur excessive dans les décisions àprendre ne soit guère contestable. A noter qu’il est également peu discutable de mettre enavant le poids “invisible” du lobbying, des pétroliers notamment, en défaveur desbiocarburants. Les grands enjeux se fixent donc autour des ces thématiques.

L’observation des évolutions permet d’affirmer qu’une prise de conscience a eu lieu, dontdécoulent en particulier des engagements sérieux et porteurs (Kyoto, directiveseuropéennes…). Le respect, dans les temps impartis, des ces résolutions peut êtrecependant sujet à caution, tant l’ampleur de la tâche est forte et les moyens mis en œuvreinsuffisants. Concernant ces mesures, l’examen d’initiatives et de politiques étrangères surles biocarburants a permis de dégager des axes de réflexion pertinents (Brésil, Etats-Unis,Allemagne, Espagne…).

Si les spécificités de l’Huile Végétale Pure ont contraint à une étude à part, il n’en restepas moins que les mêmes arguments sont applicables à la définition des enjeux globaux.Ses particularismes reposent sur des intérêts environnementaux plus grands, mais aussi surune structure plus éclatée et une législation plus ressérée notamment.

La restitution de l’ensemble de ces éléments a permis de cerner au mieux les enjeux, lesbesoins et les clefs du développement des biocarburants. Partant, a été rendu possible leurtransposition dans le département de l’Ain.

La principale interrogation de la Chambre d’agriculture, qui a conduit à la réalisation dece mémoire, reposait sur l’impact potentiel de l’essor des biocarburants dans le département.L’analyse préalablement indispensable de la situation actuelle a mis en lumière plusieurséléments. Concrètement, l’Ain se situe plutôt en avance sur le biodiesel (EMVH), mais reste

Page 94: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

92

légerement en retrait sur la question de l’HVP. Les travaux effectués, ailleurs, sur cebiocarburant de la filière courte permettent de tracer des pistes intéressantes, en vue de leurmise en place dans l’Ain.

La rentabilité économique à l’échelle de l’exploitation constitue le facteur le plus décisifdans l’évaluation des perspectives de développement. Le présent travail s’est donc attardésur cette question incontournable. Alors, suite à la démonstration de l’intérêt financier effectif,le postulat d’une croissance de la production de biocarburants a été autorisé. A signaler, toutde même, l’importance de l’évaluation au cas par cas et dans les conditions spécifiques dechaque exploitations.

La formulation d’hypothèses quantifiées de cette expansion, en fonction de différentesvariables a mis en évidence leurs incidences en terme de surfaces, donc d’impacts sur lesfilières en place. Il est apparu que, selon les présomptions les plus réalistes, l’organisationdes acteurs des filières actuelles ne se verra pas modifiée à l’excès. Les principalesévolutions devraient jouer sur la sole de colza départementale et la re-répartition de sesdébouchés, au bénéfice de l’HVP voire du colza diester, probablement au dépend du colzaalimentaire.

Cependant, la réponse à la problématique de départ n’a pû être que partielle. En effet, denombreuses conditions président et présideront au développement plus ou moins importantdes possibilités énoncées. En conséquence, il a été ici question de caractériser lesexigences à remplir, en vue d’un déploiement optimal des forces de chacun et donc, d’undéveloppement accru des biocarburants. Au terme de cette revue des conditions de réussite,sont clairement apparus l’importance du rôle et de l’implication active de l’ensemble desacteurs du monde agricole, de l’exploitant jusqu’aux pouvoirs publics, en passant par laChambre d’agriculture. Une illustration du besoin de concrétisation rapide des initiatives endormance est donnée par la notion de concurrence. Les biocarburants sont une solutionparmi d’autres et les recherches progressent de façon également significative dans différentsdomaines (piles à combustible par exemple). Ainsi, il serait souhaitable que la chance, pourl’agriculture, que représente les biocarburants ne soit pas occultée, supplantée par unmanque de réactivité et de mobilisation.

D’un point de vue plus large, la question des débouchés peut devenir un poste non-négligeable de l’économie agricole. Déjà, les rapports étroits entre énergies et agricultureouvrent des perspectives immenses. Il est d’ores et déjà possible de conférer à ce postulatune valeur d’affirmation. La multiplicité des potentialités d’utilisation de la biomasse dans dessecteurs comme les transports, l’électricité, le chauffage… participerait à la résolution decertains maux de l’agriculture (d’un déficit d’image à la crise des débouchés). De la mêmefaçon que pour les biocarburants, ces enjeux doivent être soulevés et les réponsesvalorisées avec volonté et rapidité. Par ce biais, une approche intéressante des mutations àvenir est donnée, et des pistes de réflexion tracées…

Pour conclure, ce mémoire a permis de synthétiser l’ensemble des aspects relatifs auxbiocarburants, d’en démontrer le potentiel de développement à l’échelle locale et, finalement,de soulever les enjeux qui demeurent, le chemin qu’il reste à parcourir. En cela, il répond àla demande de la Chambre d’agriculture de l’Ain, tout en se conformant aux exigencesuniversitaires du traitement global d’un sujet donné.

Page 95: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

93

ANNEXES

Page 96: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

94

1. Définition et caractérisation de différents biocarburants.

Bioéthanol :Ce biocarburant est incorporé dans l’essence. Il est extrait de la betterave, de céréales, depommes de terre, de canne à sucre ou de déchets végétaux. Les sucres contenus dans cesmatières premières sont transformés en alcool par fermentation. Cet alcool peut-être utilisédirectement ou transformé en éthyl-tertio-butyl-éther (ETBE), composé oxygéné obtenu parréaction avec de l’isobutylène.

Biodiesel :Ce biocarburant est incorporé dans le diesel. Les esters méthyliques d’huiles végétales(EMVH) sont obtenus à l’issue d’une réaction entre une huile végétale (de colza ou detournesol notamment) et du méthanol, laquelle produit de la glycérine. En associant 90unités d’huile à 10 unités de glycérine, on obtient 90 unités d’EMVH et 10 unités deglycérine. Plusieurs noms sont donnés à ce produit : en Europe, il est appelé biodiesel ; enFrance, l’établissement financier de la filière française des huiles végétales, Sofiprotéol, adéposé la marque « diester », contraction de diesel et ester. Ce terme est devenu communpour désigner l’EMVH dans notre pays.

Ces deux produits constituent les éléments de la filière dite « longue ». Celle-ci secaractérise par des procédés industriels lourds.

Huile Végétale Pure (HVP)L’HVP est une huile obtenue par pression à froid, sans solvant, décantée puis filtrée. Il s’agitlà d’un biocarburant appartenant à la filière dite « courte ». En effet, l’échelle d’utilisationactuelle et le mode de production basé tout au plus sur des CUMA, sinon en individuelconduisent à la nommer de la sorte. A noter que le terme Huile Végétale Brute est souventemployée comme synonyme de l’HVP. Il est en réalité inapproprié puisqu’il désigne unehuile qui n’aurait connu aucune transformation, alors que l’HVP nécessite une filtration.

Il ne sera pas fait mention, ici, d’autres biocarburants (Biomass to Liquid ou Gaz de PétroleLiquéfié par exemple)

Page 97: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

95

2. Formulaire d’adhésion à l’association de promotion « Partenaires Diester ».

Source : Partenaires Diester

Page 98: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

96

3. DÉCLARATION DE RIO SUR L'ENVIRONNEMENT ET LE DÉVELOPPEMENTSOMMET PLANETE TERREConférence des Nations Unies

sur l'environnement et le développement

La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement,Réunie à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992,Réaffirmant la Déclaration de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement adoptéeà Stockholm le 16 juin 1972, et cherchant à en assurer le prolongement,Dans le but d'établir un partenariat mondial sur une base nouvelle et équitable en créant desniveaux de coopération nouveaux entre les Etats, les secteurs clefs de la société et lespeuples,Oeuvrant en vue d'accords internationaux qui respectent les intérêts de tous et protègentl'intégrité du système mondial de l'environnement et du développement,Reconnaissant que la Terre, foyer de l'humanité, constitue un tout marqué parl'interdépendance,Proclame ce qui suit :

PRINCIPE 1Les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable.Ils ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la nature.

PRINCIPE 2Conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, les Etatsont le droit souverain d'exploiter leurs propres ressources selon leur politiqued'environnement et de développement, et ils ont le devoir de faire en sorte que les activitésexercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas dedommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des zones ne relevant d'aucunejuridiction nationale.

PRINCIPE 3Le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les besoinsrelatifs au développement et à l'environnement des générations présentes et futures.

PRINCIPE 4Pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partieintégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément.

PRINCIPE 5Tous les Etats et tous les peuples doivent coopérer à la tâche essentielle de l'élimination dela pauvreté, qui constitue une condition indispensable du développement durable, afin deréduire les différences de niveaux de vie et de mieux répondre aux besoins de la majoritédes peuples du monde.

PRINCIPE 6La situation et les besoins particuliers des pays en développement, en particulier des paysles moins avancés et des pays les plus vulnérables sur le plan de l'environnement, doiventse voir accorder une priorité spéciale. Les actions internationales entreprises en matière

Page 99: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

97

d'environnement et de développement devraient également prendre en considération lesintérêts et les besoins de tous les pays.

PRINCIPE 7Les Etats doivent coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, deprotéger et de rétablir la santé et l'intégrité de l'écosystème terrestre. Etant donné la diversitédes rôles joués dans la dégradation de l'environnement mondial, les Etats ont desresponsabilités communes mais différenciées. Les pays développés admettent laresponsabilité qui leur incombe dans l'effort international en faveur du développementdurable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l'environnement mondialet des techniques et des ressources financières dont ils disposent.

PRINCIPE 8Afin de parvenir à un développement durable et à une meilleure qualité de vie pour tous lespeuples, les Etats devraient réduire et éliminer les modes de production et de consommationnon viables et promouvoir des politiques démographiques appropriées.

PRINCIPE 9Les Etats devraient coopérer ou intensifier le renforcement des capacités endogènes enmatière de développement durable en améliorant la compréhension scientifique par deséchanges de connaissances scientifiques et techniques et en facilitant la mise au point,l'adaptation, la diffusion et le transfert de techniques, y compris de techniques nouvelles etnovatrices.

PRINCIPE 10La meilleure façon de traiter les questions d'environnement est d'assurer la participation detous les citoyens concernés, au niveau qui convient. Au niveau national, chaque individu doitavoir dûment accès aux informations relatives à l'environnement que détiennent les autoritéspubliques, y compris aux informations relatives aux substances et activités dangereusesdans leurs collectivités, et avoir la possibilité de participer aux processus de prise dedécision. Les Etats doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation dupublic en mettant les informations à la disposition de celui-ci. Un accès effectif à des actionsjudiciaires et administratives, notamment des réparations et des recours, doit être assuré.

PRINCIPE 11Les Etats doivent promulguer des mesures législatives efficaces en matièred'environnement. Les normes écologiques et les objectifs et priorités pour la gestion del'environnement devraient être adaptés à la situation en matière d'environnement et dedéveloppement à laquelle ils s'appliquent. Les normes appliquées par certains pays peuventne pas convenir à d'autres pays, en particulier à des pays en développement, et leur imposerun coût économique et social injustifié.

PRINCIPE 12Les Etats devraient coopérer pour promouvoir un système économique international ouvertet favorable, propre à engendrer une croissance économique et un développement durabledans tous les pays, qui permettrait de mieux lutter contre les problèmes de dégradation del'environnement. Les mesures de politique commerciale motivées par des considérationsrelatives à l'environnement ne devraient pas constituer un moyen de discrimination arbitraireou injustifiable, ni une restriction déguisée aux échanges internationaux. Toute actionunilatérale visant à résoudre les grands problèmes écologiques au-delà de la juridiction dupays importateur devrait être évitée. Les mesures de lutte contre les problèmes écologiques

Page 100: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

98

transfrontières ou mondiaux devraient, autant que possible, être fondées sur un consensusinternational.

PRINCIPE 13Les Etats doivent élaborer une législation nationale concernant la responsabilité de lapollution et d'autres dommages à l'environnement et l'indemnisation de leurs victimes. Ilsdoivent aussi coopérer diligemment et plus résolument pour développer davantage le droitinternational concernant la responsabilité et l'indemnisation en cas d'effets néfastes dedommages causés à l'environnement dans des zones situées au-delà des limites de leurjuridiction par des activités menées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle.

PRINCIPE 14Les Etats devraient concerter efficacement leurs efforts pour décourager ou prévenir lesdéplacements et les transferts dans d'autres Etats de toutes activités et substances quiprovoquent une grave détérioration de l'environnement ou dont on a constaté qu'elles étaientnocives pour la santé de l'homme.

PRINCIPE 15Pour protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent être largementappliquées par les Etats selon leurs capacités. En cas de risque de dommages graves ouirréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pourremettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation del'environnement.

PRINCIPE 16Les autorités nationales devraient s'efforcer de promouvoir l'internalisation des coûts deprotection de l'environnement et l'utilisation d'instruments économiques, en vertu du principeselon lequel c'est le pollueur qui doit, en principe, assumer le coût de la pollution, dans lesouci de l'intérêt public et sans fausser le jeu du commerce international et del'investissement.

PRINCIPE 17Une étude d'impact sur l'environnement, en tant qu'instrument national, doit être entreprisedans le cas des activités envisagées qui risquent d'avoir des effets nocifs importants surl'environnement et dépendent de la décision d'une autorité nationale compétente.

PRINCIPE 18Les Etats doivent notifier immédiatement aux autres Etats toute catastrophe naturelle outoute autre situation d'urgence qui risque d'avoir des effets néfastes soudains surl'environnement de ces derniers. La communauté internationale doit faire tout son possiblepour aider les Etats sinistrés.

PRINCIPE 19Les Etats doivent prévenir suffisamment à l'avance les Etats susceptibles d'être affectés etleur communiquer toutes informations pertinentes sur les activités qui peuvent avoir deseffets transfrontières sérieusement nocifs sur l'environnement et mener des consultationsavec ces Etats rapidement et de bonne foi.

PRINCIPE 20Les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l'environnement et le développement. Leurpleine participation est donc essentielle à la réalisation d'un développement durable.

Page 101: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

99

PRINCIPE 21Il faut mobiliser la créativité, les idéaux et le courage des jeunes du monde entier afin deforger un partenariat mondial, de manière à assurer un développement durable et à garantirà chacun un avenir meilleur.

PRINCIPE 22Les populations et communautés autochtones et les autres collectivités locales ont un rôlevital à jouer dans la gestion de l'environnement et le développement du fait de leursconnaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles. Les Etats devraient reconnaîtreleur identité, leur culture et leurs intérêts, leur accorder tout l'appui nécessaire et leurpermettre de participer efficacement à la réalisation d'un développement durable.

PRINCIPE 23L'environnement et les ressources naturelles des peuples soumis à oppression, dominationet occupation doivent être protégés.

PRINCIPE 24La guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable. LesEtats doivent donc respecter le droit international relatif à la protection de l'environnement entemps de conflit armé et participer à son développement, selon que de besoin.

PRINCIPE 25La paix, le développement et la protection de l'environnement sont interdépendants etindissociables.

PRINCIPE 26Les Etats doivent résoudre pacifiquement tous leurs différends en matière d'environnement,en employant des moyens appropriés conformément à la Charte des Nations Unies.

PRINCIPE 27Les Etats et les peuples doivent coopérer de bonne foi et dans un esprit de solidarité àl'application des principes consacrés dans la présente Déclaration et au développement dudroit international dans le domaine du développement durable.

Page 102: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

100

4. Extrait du Protocole de Kyoto.

Page 103: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

101

Bibliographie

ADEME, PricewaterhouseCoopers et DIREM, décembre 2002, Bilans énergétiques et gaz àeffet de serre des filières de production de biocarburants en France Note de synthèse.

AGRICE et ADEME, 2004, Les mystères de l’or vert, Enquêtes sur le végétal dans lesproduits industriels.

AMBASSADE DE FRANCE EN ALLEMAGNE, 2005, Les carburants et propulsions alternatifs enAllemagne.

AUBERT M.H., P. BRANA ET R. BLUM, 1999, Analyse du rôle des compagnies pétrolières àl'étranger et en France pour en tirer des enseignements sur l'application des normesinternationales (droits de l'Homme, droits sociaux, environnementaux) par les grandsgroupes, sur le rôle des Etats notamment la France et sur le développement économiquedurable, Assemblée Nationale, Commission des affaires étrangères

BUSSEREAU D., 18 mai 2005, Projet de loi d’orientation agricole, Assemblée nationale.

COMMISSION EUROPEENNE, 29 novembre 2000, Livre vert, Vers une stratégie de sécuritéd’approvisionnement énergétique.

CONVENTION-CADRE DES NATIONS UNIES SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES (CCNUCC), 11décembre 1997, Protocole de Kyoto, Kyoto, Japon.

CONFERENCE DES NATIONS UNIES SUR L’ENVIRONNEMENT ET LE DEVELOPPEMENT, 3-14 juin1992, Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement, Rio de Janeiro, Brésil.

BOINON N., S. BRUNIER, A. BLONDEL, M. FONTANET ET M. ALIBERT, août 2005, Versl’autonomie énergétique par l’utilisation d’Huile Végétale Pure ?, Cuma Ain, Hélianthe, ITP,Contrôle laitier de l’Ain.

DIRECTION GENERALE DE L’ENVIRONNEMENT DE BELGIQUE ET PRICEWATERHOUSECOOPERS,2005, Biofuels and other renewable fuels for transport.

FDCUMA et Chambre d’agriculture de la Saône et Loire, 8 avril 2005, Presse à huile : CUMAsaveurs de Bourgogne, document powerpoint.

FERRIERE J.M. et alii., Septembre 1997, L’analyse énergétique à l’échelle de l’exploitation,dans Fourrages n°151, AFPF.

GUIRAL E. et C. SAINT-CYR, 2005, Voyage d’étude sur les huiles végétales pures,Fürstenfeldbruck (Allemagne) 18-19 mars 2005, Rhonalpenergie environnement, CumaRhône-Alpes, Hélianthe, Chambre d’agriculture de la Drôme.

GUIRAL E. et C. SAINT-CYR, septembre 2005, Les biocarburants en Rhône-Alpes :potentialités des oléagineux et opportunités de l’Huile Végétale Pure, Chambre d’agriculturede la Drôme, Rhonalpenergie Environnement.

HELIANTHE, à paraître, référentiel et comparatifs des différentes presses à huiles disponibles.

Page 104: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

102

INSTITUT FRANÇAIS DES HUILES VEGETALES PURES, octobre 2004, Rapport de synthèse 2004,Végétole, un carburant vert.

JOURNAL OFFICIEL DE L’UNION EUROPEENNE, 2003, directive 2003/30/CE du parlementeuropéen et du conseil du 8 mai 2003 visant à promouvoir l’utilisation de biocarburants ouautres carburants renouvelables dans les transports.

JOURNAL OFFICIEL DE L’UNION EUROPEENNE, 2003, directive 2003/96/CE du conseil du 27octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques etde l’électricité.

LEVY R., février 1993, Les biocarburants. Rapport à l’Assemblée nationale.

MARLEIX A., 26 mai 2004, Rapport d’information à l’Assemblée Nationale sur lesbiocarburants, Assemblée nationale.

OBSERVATOIRE DE L'ENERGIE, janvier 2005, les énergies renouvelables en France 1970-2003,Ministère de l'économie, des Finances et de l'Industrie.

PASTY J.C., 30 avril 2004, Les débouchés non alimentaires des produits agricoles : un enjeupour la France et l’Union européenne, Conseil économique et social.

PLASSARD T., 2002, Rouler à l’huile de tournesol, pourquoi et comment mettre des fleursdans son moteur ?, publié sur www.econologie.com.

PLASSAT G., 2004, Les technologies des véhicules lourds et leurs carburants, ADEME.

Réseau Pétales, 2003, Mécanique des fleurs, Adaptation des véhicules diesel pour rouleraux huiles végétales.

SANDRE S. et M. ROUX, juillet/août 2005, Agriculture, Comment réduire la facture carburant ?,dans BIMA le magazine du Ministère de l’agriculture et de la pêche n° 1515, pp. 22-29.

SOURIE J.C., 1998, Coûts des productions non-alimentaires, INRA-AGRICE.

TOTAL, s. d., Total et les biocarburants, Total développement agricole.

Revues

L’Ain AgricoleEntraid’EstTerroir MagazineLa France AgricoleCampagnes solidairesRéussir lait-élevage

Page 105: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

103

Table des illustrations.

N° Titre Page1 Du végétal au biocarburant, les méthodes de fabrication ------------------------------- 32 Emissions de CO2 par mode de transport -------------------------------------------------- 33 Bilans énergétiques comparés dans les conditions actuelles -------------------------- 74 Bilans énergétiques comparés selon des prospectives en 2009 ---------------------- 75 Bilans GES actuels (combustion complète) ------------------------------------------------ 86 Bilans GES scénario 2009 (combustion complète) --------------------------------------- 87 Evolution des cours du pétrole depuis 1990 ------------------------------------------------ 108 Répartition des emplois par étapes de production de biodiesel ----------------------- 149 Production française de biocarburants depuis 1992 ------------------------------------- 20

10 L’exemple du diester : un cas intéressant --------------------------------------------------- 2111 Les collectivités territoriales : vecteurs d’utilisation et de promotion ----------------- 2412 Coûts comparés de la filière éthanol dans le monde ------------------------------------- 2513 Un plafond d’aide ACE insuffisant ------------------------------------------------------------ 3114 Mobiliser le grand public ------------------------------------------------------------------------- 3415 Afficher la volonté de l’Etat ---------------------------------------------------------------------- 3516 Des agréments aux surfaces nécessaires -------------------------------------------------- 3617 Une exonération partielle de TIPP ------------------------------------------------------------ 3718 Une production quasi-exclusivement américaine ----------------------------------------- 3819 L’Allemagne, pays de première importance ------------------------------------------------ 4020 Un développement rapide en Allemagne ---------------------------------------------------- 4121 Un panel de possibilités très larges ----------------------------------------------------------- 4322 Schéma de la fabrication et de l’utilisation d’HVP ----------------------------------------- 4823 Les étapes de la fabrication du carburant --------------------------------------------------- 4924 Valeurs comparatives et effets des émissions du gazole et de l’HVP de colza --- 5025 Bilans comparés de l’HVP avec le gazole et l’EMHV ------------------------------------ 5126 Pré-norme établie, en Allemagne, pour l’HVP --------------------------------------------- 5527 Extrait du projet de loi d’orientation agricole 2005 ---------------------------------------- 5928 Exemple, en Mayenne, d’une presse à huile montée sur camion -------------------- 6129 Une forte expansion des achats de presses en CUMA --------------------------------- 6230 SAU en colza non-alimentaire dans l’Ain ---------------------------------------------------- 6631 Répartition des surfaces en colza industriel en 2003 ------------------------------------ 6732 SAU en colza industriel en Rhône-Alpes ---------------------------------------------------- 6833 La production de colza dans l’Ain depuis 1970 -------------------------------------------- 6834 Répartition géographique de la SAU en colza de l’Ain ---------------------------------- 7035 Une aide à l’investissement en Alsace ------------------------------------------------------- 7336 Pour un équilibre financier ---------------------------------------------------------------------- 7637 Répercussions sur le différentiel à la consommation de carburant ------------------- 7638 2004-2005, l’HVP rentable ---------------------------------------------------------------------- 7739 Les seuils de rentabilité de la progression du colza -------------------------------------- 7840 L’HVP de plus en plus bénéfique -------------------------------------------------------------- 7841 Besoins d’une exploitation céréalière de 100 hectares ---------------------------------- 7942 Application au système céréalier du différentiel de coût du carburant --------------- 7943 Prise en compte de la variable hausse du prix du carburant --------------------------- 8044 Un colza diester en position incertaine ------------------------------------------------------ 8145 Rapports entre exploitations en HVP et besoins en hectares de colza ------------- 8346 Hectares en colza nécessaires selon taux d’incorporation et expl. impliquées -- 83

Page 106: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

104

Table des matières.

Introduction page 1

1. Les biocarburants en questions 5

1.1 Des intérêts indéniables 61.1.1 Un environnement mieux préservé 61.1.2 Une économie moins dépendante 101.1.3 Une agriculture plus forte 12

1.2 Des freins non-négligeables 151.2.1 Une filière naissante 151.2.2 Une politique réservée 161.2.3 Des besoins technologiques 17

1.3 Les enjeux du développement 191.3.1 Une filière à consolider 191.3.2 Un nécessaire volontarisme politique 221.3.3 Une recherche forte 25

2. Un état des lieux contrasté 28

2.1 Des engagements positifs 292.1.1 Des décisions internationales 292.1.2 Des effets sur les orientations communautaires 312.1.3 La France sur la voie 34

2.2 Des filières éclectiques 382.2.1 Deux géants mondiaux 382.2.2 Des cas intéressants dans l’UE 402.2.3 La France en retard 42

3. L’huile végétale pure 47

3.1 Quid de l’HVP 483.1.1 Une définition large 483.1.2 L’HVP, un biocarburant 503.1.3 L’HVP, un cas particulier 50

3.2 Une filière en gestation 533.2.1 Une reconnaissance tardive 533.2.2 Vers la normalisation du carburant 533.2.3 Une logique partisane peu organisée 56

3.3 Un Etat en retrait 583.3.1 Une initiative condamnée 583.3.2 Un nouveau départ ? 58

Page 107: Impacts du développement des biocarburants dans l'Ain

___________________________________________________________________________________Antoine KOLLEN Impacts du développement des biocarburants dans l’Ain

2005

105

4. L’Ain et les biocarburants 65

4.1 L’Ain, un acteur de second plan ? 664.1.1 Une bonne situation pour le biodiesel 664.1.2 L’HVP en attente 704.1.3 Vers l’implication des acteurs ? 71

4.2 Une rentabilité cruciale 754.2.1 L’HVP en autoconsommation 754.2.2 Le colza diester en concurrence 80

4.3 Du bilan micro-économique aux perspectives départementales 82

4.4 Du démarrage à la confirmation : les conditions de la réussite 854.4.1 Des collectivités promotrices et financeurs 854.4.2 Les organismes agricoles, premiers concernés 864.4.3 L’intérêt des collecteurs 864.4.4 Des fournisseurs de matériels agricoles partie prenante 874.4.5 La centralité de l’exploitant 884.4.6 Une question d’agronomie 88

Conclusion 91

Annexes 931. Définition / caractérisation technique des différents biocarburants 942. Formulaire d’adhésion à l’association Partenaires Diester 953. Déclaration de Rio 964. Protocole de Kyoto 100

Bibliographie 101Table des illustrations 103Table des matières 104