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Mécanique & Industries 3 (2002) 457–462 Influence de la microstructure des aciers sur leur propriétés mécaniques Influence of steel microstructure on their mechanical properties André Galtier , Olivier Bouaziz, Astride Lambert ARCELOR R&D-IRSID, voie Romaine, BP 30320, 57283 Maizières-Lès-Metz cedex, France Résumé Afin de mieux comprendre l’influence des paramètres process sur les propriétés d’emploi des produits actuels et de permettre de réduire les délais et affiner la qualités de la réponse pour l’amélioration de ces nuances ou pour la conception de nouveaux produits, il apparaît fondamental de développer des approches permettant de relier l’effet de la microstructure sur les caractéristiques mécaniques. C’est pourquoi ARCELOR développe depuis plusieurs années des modèles à base physique ou des méthodes expérimentales (microscopie électronique, analyse d’image et évaluation non destructive in-situ) dans les domaines du comportement monotone, de la rupture et de la fatigue (micro- plasticité, limite d’endurance) afin de discerner les effets de la composition chimique, de la fraction volumique de chacune des phases en présence dans la microstructure (ferrite, martensite, perlite, bainite) et de leur morphologie (taille de grain ferritique, taille d’îlots martensi- tique. . . ). Cet article synthétise une partie de ces travaux concernant les aciers ferritiques, dual-phase (ferrite/martensite) et bainitiques. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Abstract The development of physical approaches describing the effects of the microstructures on the mechanical properties are essential first to understand the effects of the process parameters on the final product, second to rapidly find ways of optimising the process of these products and last but not least to conceive new products. Therefore ARCELOR has been developing for a few years physical models and experimental methods (TEM, image analysis, non-destructive in-situ evaluation) to describe monotonous behaviour, as well as fatigue and fracture mechanisms. Chemical composition, volume fraction of the different phases (ferrite, martensite, pearlite and bainite) and their morphology (grain size, diameter of the martensitic islands, etc.) are taken into account. The aim of the present article is to review a part of these experimental and modelling studies concerning ferritic, dual-phase and bainitic steel grades. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. 1. Introduction Dans tous les domaines de la mécanique, on tente depuis plusieurs années d’établir un lien entre la microstructure des aciers et leurs propriétés en service. Pour Usinor, dont le métier principal est de produire des nuances d’aciers de plus en plus adaptées au besoin, il est essentiel que son département recherche mette au point des méthodes pouvant prévoir les propriétés mécaniques dès le stade du développement de nouvelles nuances. Nous proposons dans la suite, de parcourir quelques exemples qui montrent le * Correspondance et tirés à part. Adresses e-mail : [email protected] (A. Galtier), [email protected] (O. Bouaziz), [email protected] (A. Lambert). potentiel de telles approches en traction monotone, dans le domaine de la rupture par clivage ou encore en fatigue. Ce texte est une synthèse de résultats d’études réalisées par ARCELOR R&D [1–3]. 2. Relation microstructure et propriétés de traction monotone (Bouaziz [1]) La caractérisation des matériaux la plus utilisée est sans nul doute la traction monotone. Outre les caractéristiques de limite d’élasticité, de résistance à rupture, l’ensemble de la courbe est souvent nécessaire dans le cas des modélisations. A partir du comportement collectif des dislocations, et en introduisant des paramètres liés à la microstructure, il est possible d’obtenir une bonne description de la courbe de 1296-2139/02/$ – see front matter 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. PII:S1296-2139(02)01188-0

Influence de la microstructure des aciers sur leur propriétés mécaniquesInfluence of steel microstructure on their mechanical properties

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Mécanique & Industries 3 (2002) 457–462

Influence de la microstructure des aciers sur leur propriétés mécaniques

Influence of steel microstructure on their mechanical properties

André Galtier∗, Olivier Bouaziz, Astride Lambert

ARCELOR R&D-IRSID, voie Romaine, BP 30320, 57283 Maizières-Lès-Metz cedex, France

Résumé

Afin de mieux comprendre l’influence des paramètres process sur les propriétés d’emploi des produits actuels et de permettre de réduireles délais et affiner la qualités de la réponse pour l’amélioration de ces nuances ou pour la conception de nouveaux produits, il apparaîtfondamental de développer des approches permettant de relier l’effet de la microstructure sur les caractéristiques mécaniques. C’est pourquoiARCELOR développe depuis plusieurs années des modèles à base physique ou des méthodes expérimentales (microscopie électronique,analyse d’image et évaluation non destructive in-situ) dans les domaines du comportement monotone, de la rupture et de la fatigue (micro-plasticité, limite d’endurance) afin de discerner les effets de la composition chimique, de la fraction volumique de chacune des phases enprésence dans la microstructure (ferrite, martensite, perlite, bainite) et de leur morphologie (taille de grain ferritique, taille d’îlots martensi-tique. . . ). Cet article synthétise une partie de ces travaux concernant les aciers ferritiques, dual-phase (ferrite/martensite) et bainitiques. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved.

Abstract

The development of physical approaches describing the effects of the microstructures on the mechanical properties are essential firstto understand the effects of the process parameters on the final product, second to rapidly find ways of optimising the process of theseproducts and last but not least to conceive new products. Therefore ARCELOR has been developing for a few years physical models andexperimental methods (TEM, image analysis, non-destructive in-situ evaluation) to describe monotonous behaviour, as well as fatigue andfracture mechanisms. Chemical composition, volume fraction of the different phases (ferrite, martensite, pearlite and bainite) and theirmorphology (grain size, diameter of the martensitic islands, etc.) are taken into account. The aim of the present article is to review a part ofthese experimental and modelling studies concerning ferritic, dual-phase and bainitic steel grades. 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved.

1. Introduction

Dans tous les domaines de la mécanique, on tente depuisplusieurs années d’établir un lien entre la microstructuredes aciers et leurs propriétés en service. Pour Usinor, dontle métier principal est de produire des nuances d’aciersde plus en plus adaptées au besoin, il est essentiel queson département recherche mette au point des méthodespouvant prévoir les propriétés mécaniques dès le stade dudéveloppement de nouvelles nuances. Nous proposons dansla suite, de parcourir quelques exemples qui montrent le

* Correspondance et tirés à part.Adresses e-mail : [email protected] (A. Galtier),

[email protected] (O. Bouaziz),[email protected] (A. Lambert).

potentiel de telles approches en traction monotone, dans ledomaine de la rupture par clivage ou encore en fatigue. Cetexte est une synthèse de résultats d’études réalisées parARCELOR R&D [1–3].

2. Relation microstructure et propriétés de tractionmonotone (Bouaziz [1])

La caractérisation des matériaux la plus utilisée est sansnul doute la traction monotone. Outre les caractéristiques delimite d’élasticité, de résistance à rupture, l’ensemble de lacourbe est souvent nécessaire dans le cas des modélisations.A partir du comportement collectif des dislocations, et enintroduisant des paramètres liés à la microstructure, il estpossible d’obtenir une bonne description de la courbe de

1296-2139/02/$ – see front matter 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved.PII: S1296-2139(02 )01188-0

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(a) Acier ferritique (IF) (b) Acier dual-phase (DP)

Fig. 1. Microstructures types des aciers étudiés.

Fig. 1. Typical microstructure of steel grades studied.

Fig. 2. Répartition des dislocations dans la ferrite au voisinage d’un îlots demartensite aux très faibles déformations plastiques.

Fig. 2. Dislocation density distribution in ferrite near a martensite island.

traction en particulier sur des aciers ferritiques ou dual-phaseoù la ferrite contient une dispersion d’îlots de martensite.

Le comportement mécanique est obtenu par la relationentre la contrainte et la densité totale de dislocations :

σ = σ0 + αMµb√

ρ

avecα constant et voisin de 0,4,M est le facteur de Taylormoyen, µ le module de cisaillement etb le vecteur deBurgers.

La densité totale de dislocations peut être considéréecomme la somme de la densité des dislocations statistique-ment stockées et la densité des dislocations géométrique-ment nécessaires, soitρ = ρs + ρg.

L’évolution de la densité des dislocations statistiquementstockées en fonction du cisaillement cumuléγ résulte

Fig. 3. Évolution de la déformation d’incompatibilité avec la déformationde la matrice pour du cuivre contenant des inclusions de silice [5].

Fig. 3. Strain gradient versus average plastic strain for silica inclusion incopper matrix [5].

de la compétition entre accumulation et annihilation parrestauration dynamique :

dρs

dγ= 1

bd− fρs

avecd , la taille de grain ferritique comme libre parcoursmoyen etf est une constante du matériau.

La présence éventuelle des inclusions de martensite dansla matrice ferritique génère des dislocations d’accommoda-tion, comme le confirme l’observation MET de la Fig. 2,dans la ferrite dont l’évolution est choisie conformément àla relation établie par Ashby [4] :

ρg = 8fm

bdmγ ∗

avecγ ∗ le gradient de déformation moyen entre les deuxphases dure et molle,f m la fraction volumique de martensiteetdm la taille des îlots de martensite.

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Fig. 4. Comparaison entre la modélisation et l’expérimentation en traction.

Fig. 4. Comparison between experimental results and modelling for tensile stress-strain curve.

L’expression de l’incompatibilité de déformationγ ∗ enfonction de la déformationγ de la ferrite est choisie de laforme :

γ ∗ = 1− exp(−rγ )

r

afin de reproduire les quantifications issues des observationsMET de Atkinson et al. sur une matrice de cuivre contenantune dispersions d’inclusions de silice (Fig. 3) avecr, uneconstante à identifier.

Le facteur de Taylor relie le cisaillement cumulé avec ladéformation de traction macroscopique :γ = Mε.

La combinaison des équations précédentes donne direc-tement la contrainte :

σ = σ0 + αMµ√

b

(1− exp(−f M(ε + ε0))

f d

+ 8fm

dm

1− exp(−rM(ε + ε0))

r

)1/2

où ε0 est une déformation équivalente prenant en compte ladilatation induite par la transformation austénite/martensited’environ 1 % dans le cas des aciers DP.

Le modèle a été appliqué sur des nuances ferritiques IFavec µ = 80 000 MPa,b = 2,5·10−10 m, M = 3 et α =0,4. Avec les mêmes valeurs l’application aux aciers dualphase donneε0 = 0,7 % et r = 4,5. Les Figs. 4 montrentla bonne corrélation entre la prévision et les résultatsexpérimentaux.

Grâce à cette modélisation il est maintenant aisé deprévoir et/ou optimiser les propriétés de traction à partir dela microstructure des diverses nuances d’acier dès le stade dela conception du matériau ou même en ligne de production.

3. Utilisation de l’émission acoustique dans le domainede la rupture (Lambert [2])

Les aciers de construction au carbone manganèse sontcouramment assemblés par soudage. Au cours du soudage,

il apparaît des Zones Affectées par la Chaleur dans les-quelles des transformations métallurgiques se produisent. Ilse forme en particulier des structures de trempe pouvantcontenir des phases dures fragilisantes. Dans les aciers mo-dernes à basse teneur en carbone, les régions les plus fragilescorrespondent aux zones à gros grains et aux zones à grosgrains réchauffées dans le domaine intercritique. Cette fra-gilité est imputée principalement à la présence de secondephase, mais les mécanismes de rupture restent encore malconnus.

Afin de corréler la ténacité et les microstructures des ZACsimulées, il est intéressant de connaître les premières étapesde la rupture en endommageant le matériau sans le rompre.Dans le cas de la rupture fragile, cela constitue une difficultéexpérimentale importante. Quelques-uns des résultats pré-sentés ici ont été obtenus en utilisant la technique de l’émis-sion acoustique (E.A.). Cette technique, très utilisée dansl’étude de la rupture en corrosion sous contrainte, a été, jus-qu’à présent, peu appliquée au clivage. Une étude prélimi-naire, entreprise à IRSID a montré qu’elle permet la détec-tion d’évènements locaux comme le clivage et l’interruptiond’essais de traction avant la rupture catastrophique.

Le métal de base utilisé est un acier de construction E450TMCP micro-allié. Les microstructures de ZAC sont obte-nues après des traitements thermiques de simulation. Lesessais réalisés sur éprouvettes axisymétriques entaillées àdifférentes températures (−60◦C < T < 20◦C) sont suivispar un système d’émission acoustique MISTRAS à l’aidede deux capteurs piézo-électriques placés aux deux extré-mités de l’éprouvette. Les salves très énergétiques, carac-téristiques du clivage, sont utilisées comme critère d’inter-ruption de l’essai. Certaines éprouvettes endommagées sontsectionnées longitudinalement et les fissures de clivage sontétudiées par diffraction des électrons rétrodiffusés (EBSD).D’autres éprouvettes sont ré-usinées et sollicitées en fa-tigue afin d’amorcer une rupture à partir des clivages exis-tants.

Les premiers pics d’émission acoustique apparaissenten début de plasticité et correspondent au mouvement

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simultané de nombreuses dislocations (Fig. 5). Dans lecas de microstructure contenant de l’austénite résiduelle,on remarque également des émissions correspondant à latransformation martensitique induite par la déformation. La

Fig. 5. Exemple d’évolution du signal acoustique moyen et de la charge enfonction du déplacement.

Fig. 5. Evolution of the Average Signal Level (ASL) and load withdisplacement.

rupture instable est précédée d’évènements acoustiques defortes énergies, caractéristiques de l’amorçage du clivage.Ces énergies sont plus élevées à basse température (−60◦C).

L’utilisation conjointe de l’émission acoustique et d’in-vestigations métallurgiques (EBSD, MEB. . . ) permet de dé-crire le processus de rupture et la nature des différentes bar-rières microstructurales. L’aspect néfaste des îlots Austénite-Martensite (M-A) vis à vis de l’initiation des fissures estconfirmé (Fig. 6). Beaucoup moins connu, le rôle des jointsde paquets bainitiques fortement désorientés (angle> 50◦)comme entité microstructurale contrôlant la propagation estclairement établi (Fig. 7).

Les influences respectives de ces deux barrières sur leprocessus global de rupture ont également été étudiées enfonction de la température. Aux températures d’essai cou-ramment requises par les procédures de qualification (entre−10 et −40◦C), une action sur la matrice (en particulierles désorientations cristallographiques entre paquets baini-tiques) apparaît comme une voie efficace d’amélioration dela ténacité. Des développements sont en cours sur le su-jet.

Fig. 6. Rupture d’un îlot MA et facette de clivage avec amorce de la rupture.

Fig. 6. M-A island-sized microcrack observed on a cross-section and cleavage facet with the fracture initiation site.

Fig. 7. Fissures de clivage observées après l’arrêt de l’essai par émission acoustique.

Fig. 7. Cleavage crack observed in the bulk of a specimen after acoustic emission detection and misorientation profile determined by EBSD parallel to thecrack.

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4. Mesure de la microplasticité par l’échauffement(Galtier [3])

Depuis de nombreuses années, les expérimentateurs onttenté de réduire la durée des essais de fatigue dans ledomaine de l’endurance, c’est-à-dire pour des nombres decycles de l’ordre de 106 et 107.

Récemment, certaines équipes de recherche ont tentéd’utiliser l’échauffement constaté lors du cyclage des éprou-vettes pour déterminer rapidement la limite d’endurance(asymptote de la courbe de Wöhler). Nous avons, depuis1994, dans Usinor, cherché à déterminer quels mécanismesphysiques, l’accroissement de température pouvait traduireet quels résultats on pouvait en déduire.

Parmi l’ensemble des moyens de mesure de la tempéra-ture d’échantillons en cours d’essai de fatigue, nous avonschoisi d’utiliser des thermocouples de surface en cuivre-constantan.

Si on se place dans le cadre des fréquences élevées parrapport au moyen de mesure de la température, c’est-à-diresupérieur à quelques Hertz, on peut tracer l’évolution del’échauffement moyen stabilisé en fonction de l’amplitudede la contrainte appliquée (Fig. 8). On distingue, pour la ma-jorité des aciers, deux domaines. Une première partie cor-respondant aux faibles contraintes dans laquelle l’échauffe-ment évolue de manière linéaire avec la contrainte. Ensuite,à partir d’une certaine contrainte (notéeσ rev) l’échauffements’effectue de façon exponentielle en fonction de l’amplitudede la contrainte appliquée. Certains auteurs [4] proposent dedéterminer la limite de fatigue à partir de l’intersection de 2tangentes comme le montre la Fig. 8. L’expérience ne validepas toujours cette méthodologie.

Lorsqu’un matériau métallique est soumis à un effort, lesdislocations présentes sont déplacées et d’autres sont créées.Une partie de l’énergie fournie au matériau est stockée par

Fig. 8. Évolution de l’augmentation de température en fonction de l’ampli-tude de contrainte.

Fig. 8. Evolution of specimen temperature increase versus the stressamplitude.

l’augmentation de la densité de dislocations et une partie estrestituée sous forme de chaleur.

Dans le domaine purement élastique, on pourrait s’at-tendre à ce que la température moyenne de l’éprouvette soitl’ambiante ; cependant compte tenu du grand nombre de dis-locations présentes dans le matériau, y compris dans son étatinitial, l’application d’un effort même très faible, va les dé-placer, conduisant à des frottements de réseau (effet visco-élastique). Le balayage d’une dislocation ancrée entre deuxobstacles, même si elle peut être considérée comme mé-caniquement réversible, ne l’est pas thermodynamiquementcréant un échauffement local, ce qui se traduit par une boucled’hystérésis dans le domaine élastique.

Dans le domaine de la fatigue plastique, y compris pourdes faibles niveaux de déformation, le tracé de l’évolutionde la température stabilisée en surface en fonction de ladéformation plastique montre une bonne corrélation (Fig. 9).

Afin de relier sans ambiguïté l’échauffement au dévelop-pement de la plasticité cyclique nous avons observé l’évolu-tion microstructurale de la nuance USIDUR 355 sollicitée enfatigue. Cet acier est principalement ferritique avec quelquesîlots de perlite. La plasticité cyclique se traduit par l’appari-tion de dislocations puis de bandes de cisaillement et enfinde bandes de glissements dans lesquelles se localise la dé-formation.

Dans les faibles niveaux de déformation ou de contrainte,c’est-à-dire pour des amplitudes de l’ordre de la limited’endurance du matériau, la déformation à l’échelle de lamicrostructure est très hétérogène. Elle dépend fortement del’orientation des grains et donc de leurs plans de glissementpar rapport à l’axe de sollicitation. Il est donc très difficile dequantifier la déformation plastique cumulée locale moyenne.Nous avons souhaité approcher cette valeur relative enquantifiant la surface des bandes de glissement que l’onpeut observer en surface sur une éprouvette polie. Comptetenu de l’hétérogénéité, il est indispensable d’observer unesurface suffisamment grande pour que la mesure puisse êtreconsidérée comme représentative. La surface occupée par lesbandes de glissement est quantifiée par analyse d’images.

Fig. 9. Relation entre la déformation plastique et l’échauffement.

Fig. 9. Relationship between the plastic strain and the temperature increase.

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Fig. 10. Évolution de la surface des bandes de glissement.

Fig. 10. Evolution of the slip bands area.

Fig. 11. Exemple de surface polie après sollicitation de fatigue (240 MPa durant 400 000 cycles).

Fig. 11. Example of the surface after fatigue cycling (240 MPa during 400 000 cycles).

Il est à noter que compte tenu du grossissement utilisé,les bandes de glissement naissantes ou les bandes decisaillement ne sont pas visibles. De plus, l’intensité duglissement dans une bande ne peut pas être assimilée à lalargeur de sa trace en surface. On a donc très probablementune valeur sous estimée de la plasticité induite.

Le tracé des mesures de surface des bandes de glissementen fonction du niveau de contrainte pour un nombre decycles appliqué de 400 000 cycles est donné dans la Fig. 10.La Fig. 11 présente un exemple de la quantité de bandes pour240 MPa.

Notons que le même type de mesure a été effectué surun acier IF Ti (ferritique sans interstitiel) dont la courbe detempérature possède un coude très prononcé. On a observéque les bandes de glissement sont formées dès l’applicationd’un niveau de contrainte correspondant au début du coude.

Ces observations valident la notion de contrainte deréversibilitéσ rev.

5. Conclusions

Au travers de ces quelques exemples, on remarquel’importance de considérer le comportement mécanique

en relation directe avec la métallurgie ou la physique.Une observation fine des mécanismes des rupture et deschangement microstructuraux doit permettre une meilleurecompréhension des mécanismes en vue de leur modélisation.

Pour une société sidérurgique comme Usinor, ces étudesdoivent permettre à terme, aussi bien une prévision en lignedes propriétés, qu’un développement de nouvelles nuancesou encore l’établissement de modèles de dimensionnement.

Références

[1] O. Bouaziz, T. Iung, M. Kandel, Physical modelling of microstructureand mechanical properties of dual-phase steel, in : 4th Euromech, Metz,France, June 26–30, 2000.

[2] A. Lambert, X. Garat, T. Sturel, A.F. Gourgues, A. Gingell, Applicationof acoustic emission to the study of cleavage fracture mechanism in aHSLA steel, IRSID RE 00.01, 01-2000.

[3] A. Galtier, A. Carmet, Mesure de la microplasticité par l’échauffementdes éprouvettes en cours d’essai de fatigue, Journée GAMI thermogra-phie.

[4] M.F. Ashby, Phil. Mag. 21 (1970) 399.[5] J.D. Atkinson, L.M. Brown, W.M. Stobbs, Mat. Sci. Engrg. 5 (1969)

193.