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NUMÉRO 16 AVRIL 2003 http://www.mtq.gouv.qc.ca/cqttt http://www.mtq.gouv.qc.ca/cqttt Édition spéciale

Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

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Page 1: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

NUMÉRO 16 AVRIL 2003

http://www.mtq.gouv.qc.ca/cqttthttp://www.mtq.gouv.qc.ca/cqttt

Éditionspéciale

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LA RECHERCHE QUÉBÉCOISE SUR LES OUVRAGES D’ART

Depuis quinze ans, le ministère des Transports a intensifié son implication dans la recherche

sur les ouvrages d’art et les universités québécoises ont toujours été des partenaires privilégiés

dans une telle démarche. Après quelques années, le Ministère réalisait que le transfert des

connaissances acquises par ces recherches se faisait difficilement. Peu d’ingénieurs spécialisés

en structure étaient informés des résultats de recherche et lorsqu’ils l’étaient, c’était parfois

avec un décalage dans le temps.

Le Ministère s’est donc attaqué à cette problématique et c’est ainsi que sont apparus les bul-

letins Info-structures publiés par la Direction des structures, les articles dans la présente revue

Innovation Transport et, bien sûr, le Colloque sur la progression de la recherche québécoise sur

les ouvrages d’art qui regroupe annuellement, depuis dix ans maintenant, près de deux cents

ingénieurs et techniciens qui sont informés des tout derniers développements dans le

domaine.

Cet engouement vient certainement du fait que la recherche universitaire d’ici se consacre en

très grande partie à des problématiques typiquement québécoises. La présente parution de la

revue Innovation Transport en est un bel exemple : des cas bien de chez nous y sont présen-

tés et sauront très certainement attirer l’attention du lecteur et soutenir son intérêt.

Au cours des ans, la recherche a amené de nombreux étudiants québécois du deuxième et du

troisième cycle universitaire à se diriger vers l’ingénierie des ponts. Cette manne de spécial-

istes de haut calibre est maintenant appréciée au plus haut point à une période où le min-

istère des Transports du Québec s’attaque à un ambitieux plan décennal de remise en état de

son réseau routier.

Guy Richard, ing., M. Sc.

Directeur des structures

I N N O V A T I O N T R A N S P O R TsO M M A I R E

AUSCULTATION DES GRANDS OUVRAGES D’ARTAU QUÉBEC : LE CAS DU PONT DE L’ÎLED’ORLÉANS 3

CHEMISAGE DE POUTRES EN BÉTONPRÉCONTRAINT AU MOYEN DE MATÉRIAUX COMPOSITES 1 0

CONSTRUCTION D’UN PONT ROUTIER ALLIANTDES MATÉRIAUX COMPOSITES AVANCÉS ET UN SYSTÈME DE TÉLÉSURVEILLANCE ÀDISTANCE 1 5

COULIS D’INJECTION POUR OUVRAGES EN BÉTON PRÉCONTRAINT PAR POST-TENSION 2 0

MISE A JOUR DE L’INDICE DE FIABILITE DE PONTSEN BETON ARME PAR TELESURVEILLANCE 2 4

UTILISATION DE BÉTON ARMÉ DE FIBRES D’ACIERDANS LES DALLES DE PONT EN VUE D’AMÉLIORERLA DURABILITÉ AU DÉLAMINAGE 2 9

INNOVATION TRANSPORT est réalisé par le Centre québécois detransfert des technologies des transports et édité par la Directiondes communications du ministère des Transports du Québec. Il estmaintenant diffusé sur Internet à l'adresse suivante :http://www.mtq.gouv.qc.ca/cqttt

Coordination : Gilles BoutinRévision linguistique : Direction des communicationsSupervision graphique : Jean-Pierre TremblayConception : Tandem Conception et Infographie inc.Impression : J. B. DeschampsPhotogravure : Composition OrléansPour obtenir de l’information supplémentaire, il suffit des’adresser à :Ministère des Transports du QuébecDirection de la recherche et de l’environnement700, boul. René-Lévesque Est, 21e étageQuébec (Québec), G1R 5H1Téléphone : (418) 643-4717Télécopieur : (418) 643-0345Courriel : [email protected]

Dépôt légalBibliothèque nationale du QuébecISSN - 1480-610XTirage : 2500 exemplaires

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En ce sens, l’auscultation détaillée du pont del’île d’Orléans constitue donc une approche en voiede devenir ni plus ni moins qu’un standard inter-national en ce qui a trait au suivi structural desgrands ouvrages. Il va sans dire que ce standardnécessite l’utilisation d’appareils de mesure degrande précision dont la mise en place in situ, lefonctionnement et l’interprétation requièrent unsavoir-faire très spécialisé et pour l’instant peucommun. La fiabilité des résultats obtenus doit êtresans faille puisque les valeurs expérimentales sontnormalement considérées comme étant les valeursles plus proches du comportement réel de l’ou-vrage, plus précises et plus fiables donc que le seulcalcul théorique effectué en bonne et due forme.Dans les faits, après analyse, les valeurs expéri-mentales servent à modifier le modèle théoriquepour que ses valeurs calculées convergent vers lesmesures in situ, rien de moins. C’est ce qu’onappelle le calibrage du modèle. Puisque ces dif-férences peuvent souvent dépasser les 50 %(selon les composantes), toute erreur expérimen-tale est inacceptable. Il en va de la sécurité del’ouvrage et du public. Une fois cette étape ter-minée, il est alors possible de planifier, en touteconnaissance de cause, les travaux de réparation,de renforcement, voire d’élargissement de la struc-ture.

HISTORIQUE ET DESCRIPTIF DU PONT

Avant la construction du pont suspendu, lesseuls liens qui unissaient l’île d’Orléans à la terreferme étaient un bateau à vapeur l’été, des pontsde glace l’hiver; parfois même, il y avait absencede liens à la fonte ou à l’arrivée des glaces. Le

recueillies servent à calibrer un modèle par élé-ments finis 3-D qui représente au mieux l’ouvragein situ.

Il est évident cependant que tous les ponts nepeuvent faire l’objet d’une approche aussi raffinée.Le choix des ouvrages à ausculter se fait donc enfonction de certains critères dont notamment lataille, la géométrie et la complexité de l’ouvragede même que les pathologies décelées, l’impor-tance stratégique ou l’âge du pont. Or, il appertque la plupart des ponts suspendus dans le monderépondent à plusieurs de ces critères. De fait, onprocède déjà depuis plus de vingt ans à l’ausculta-tion expérimentale de ce type d’ouvrages, et ce,tant en Europe qu’en Asie et en Amérique afin decalibrer des modèles par éléments finis 3-D tou-jours plus proches de la réalité.

Il n’y a qu’à penser, par exemple, aux nom-breux ponts suspendus new-yorkais, au GoldenGate (San Francisco, 1937), au Lions’ Gate(Vancouver, 1937), qui ont déjà fait l’objet demesures in situ. De nombreux ouvrages suspendusbeaucoup moins anciens ont aussi été auscultésexpérimentalement en détail. C’est le cas duHumber Bridge (Grande-Bretagne, 1981), duSevern Bridge (Grande-Bretagne, 1966), desponts français de Tancarville (1959) etd’Aquitaine (1967). Même les nouveaux pontssuspendus et haubanés (au Japon, en Chine et enEurope notamment) font l’objet de mesuresexpérimentales qui permettent de préciser la con-formité et l’état de l’ouvrage originel et d’assurerun suivi précis de son évolution. On procède sou-vent ensuite à l’installation d’un système permanent de télésurveillance, et ce, dès l’ouver-ture de l’ouvrage à la circulation.

INTRODUCTION

Certains ouvrages complexes ou stratégiquesnécessitent une évaluation structurale beaucoupplus détaillée que celle qui est normalement effec-tuée. Les ponts suspendus d’un âge avancé telcelui de l’île d’Orléans font partie de ces ouvrages.Cet article présente les principales étapes effec-tuées à ce jour en ce qui a trait à une évaluationstructurale réaliste de l’ouvrage dans son étatactuel. Cette approche conduit à l’élaboration d’unmodèle par éléments finis non linéaire complet 3-D destiné à l’évaluation précise du pont. Pour quece modèle représente adéquatement la structure insitu, il a été calibré sur les valeurs expérimentalesde tests provenant de campagnes de mesureseffectuées aux cours des dernières années.

BESOINS EN ÉVALUATION DES STRUCTURES

Le vieillissement des structures et les limita-tions budgétaires des propriétaires d’ouvragesd’art font en sorte que l’évaluation structurale deces ouvrages se doit d’être de plus en plus précise.En général, une évaluation standard se base surune inspection rigoureuse et détaillée et sur un cal-cul par un modèle plus ou moins simplifié de lastructure. Cependant, de nombreuses observationspuisées dans la littérature ou issues de nos propresconstats ont prouvé qu’en général, le comporte-ment d’un pont in situ diffère substantiellement ducalcul théorique. C’est pourquoi la Direction desstructures s’est équipée au début des années1990 d’un laboratoire mobile qui permet de quan-tifier avec précision les comportements statiques etdynamiques de l’ouvrage. Les données ainsi

AUSCULTATION DES GRANDS OUVRAGES D’ART AU QUÉBEC : LE CAS DU PONT DE L’ÎLE D’ORLÉANS

Martin Talbot, ing. Ph. D., Direction des structures, ministère des Transports.

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choix d’un ouvrage suspendu a été adopté aprèsune étude comparative poussée avec des struc-tures de type cantilever, arche ou portées simples.Or, pour des raisons d’économie, d’adaptation auxconditions des fondations, d’esthétique, de facilitéd’érection et de contraintes de dégagement pour lanavigation imposées par le gouvernement fédéral(il fallait un minimum de 600 pieds de largeur et106 pieds de hauteur à marée haute), c’est l’ou-vrage suspendu qui l’a finalement emporté.

Il est important de noter que le pont de l’îled’Orléans est le tout premier pont suspendu d’en-vergure à avoir été à la fois entièrement conçu,fabriqué et érigé par des firmes canadiennes. Ils’agit d’une grande réalisation du début desannées trente des ingénieurs montréalaisMonsarrat et Pratley (aussi concepteurs du Lions’Gate de Vancouver en 1937). Le pont a été ouvertà la circulation le 6 juillet 1935, soit il y a près de68 ans (figure 1). Les travaux ont été répartis surune longue période de plus de quatre années carun des buts visés par le projet était la créationd’emplois en ces temps particulièrement difficilesqu’étaient ceux de la grande dépression desannées trente.

À l’époque, l’ouvrage complet a coûté 3,5 mil-lions de dollars si on inclut toutes les travées d’unelongueur totale de 1737,3 m. La partie suspenduemesure quant à elle 722 m d’un bloc d’ancrage àl’autre. Elle est formée de trois travées dont deuxde 127 m et une travée centrale de 323 m. Cepont suspendu n’a pas subi de modification ou derenforcement structural depuis 1935. Seule sacharge permanente a été légèrement modifiée parl’ajout d’une mince couche de bitume (avec unrevêtement antidérapant en 1962 et une répara-tion du bitume en 2001). Par contre, certains

scénarios de renforcements et de modificationssont présentement à l’étude.

DÉBUT DES MESURES EN 1981

Une première série de mesures portant surl’évolution de la géométrie de l’ouvrage et sur lesystème de suspension a été effectuée en 1981.Des mesures par métrologie de précision ont révéléque les fondations nord du pont avaient beaucoupbougé depuis 1935 comme le montre la figure 2.En fait, ces affaissements sont vraisemblablementdus au fait que la moitié nord de l’ouvrage reposesur un sol mou alors que la moitié sud repose surle roc. Des analyses poussées du sol de la partienord sont d’ailleurs en cours. Des travaux demétrologie ont été refaits à l’automne 2000 et ontconduit aux mêmes résultats qu’en 1981. La struc-ture est donc apparemment stabilisée de ce pointde vue.

L’effet structural de ces importants change-ments géométriques observés a pu être quantifiépar le modèle numérique. Les calculs ont démon-tré que l’affaissement de 635 mm au centre de la

travée centrale est dû, en partie, à une élongation(relaxation à long terme) du câble porteur d’unevaleur moyenne de 0,019 %. Cette valeur est

assez typique de ce qui est observé dans la littéra-ture pour ce genre de ponts.

Une inspection détaillée du câble porteur(incluant l’ouverture du câble porteur en certainspoints) a eu lieu en 1981. Globalement, les toronsétaient en relativement bon état malgré laprésence d’humidité à certaines sections et laprésence d’oxydation de la couche de galvanisa-tion et de quelques taches de rouille sans perte desections (notamment au portique nord). Uneouverture du câble est de nouveau prévue en2003. L’inspection détaillée des suspentes en1981 a démontré alors une bonne condition struc-turale avec une très légère corrosion des fils sur laplupart des suspentes. Il n’y avait pas de fils brisésobservables in situ mais on notait parfois une pos-sibilité pour l’eau de s’infiltrer. Une suspente a étédémontée et testée à la rupture (voir la sectionAnalyses au laboratoire des chaussées). Enfin,plusieurs inspections très détaillées de tous les élé-ments (nécessitant notamment des techniquesd’escalade) ont été effectuées régulièrementdepuis 1981.

M E S U R E S F A I T E S P A R L EL A B O R A T O I R E M O B I L E

Toute structure se déforme lorsqu’elle estsoumise à des sollicitations tant statiques quedynamiques. L’ingénieur dispose de plusieursapproches pour mesurer avec précision ces défor-mations et pour en déduire le comportement exactde l’ouvrage. Les techniques de mesures utiliséesdans cette étude sont :

• les jauges de déformations,• les accéléromètres,• l’interférométrie laser.

Figure 1 : Vue générale du pont de l’île d’Orléans.

Figure 2 : État actuel du pont dû à l’affaissement de la moitié nord et à la relaxation du câble porteur.

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Compte tenu des innombrables demandes d’ex-pertise en évaluation, en entretien et en conceptionqui incombent au laboratoire mobile et même parfoisà des organismes extérieurs au Ministère (pour desprojets de recherche universitaires ou pour diversesorganisations), et compte tenu également des limi-tations climatiques ou de la disponibilité de certainsappareils, les tests décrits ont été étalés sur plusieurssaisons, de l’automne 1998 à l’automne 2001, àtravers les autres demandes d’expertise courantes ouparfois urgentes soumises au laboratoire.

M E S U R E S D E S E F F O R T SD A N S L A F E R M E

Les premiers tests statiques et dynamiques ontété effectués à l’automne 1998. Les tests statiquespermettent une investigation locale précise du fluxd’efforts dus à la charge vive dans une section don-née de l’ouvrage. Dans le cas présent, il y avait 4jauges de déformation par membrure. Le test por-tait sur la section C-50 de la ferme, soit au tiers dela portée centrale, du côté sud (figure 3). On y afait circuler deux camions pesés, la nuit, sur le pontfermé à la circulation. Les valeurs des efforts dansles cordes inférieures et supérieures, les diagonales,les verticales et l’entretoise ont ainsi été comparéesavec succès à celles du modèle par éléments finis(figure 4). Un exemple comparatif pour la cordeverticale est donné à la figure 5. Globalement, lesrésultats ont mis en lumière le comportement par-tiellement (mais assez fortement) composite duvieux tablier (négligé à l’origine dans le calculthéorique). Ces résultats ont aussi permis d’établirun niveau de confiance élevé dans le modèle 3-Dpour cette partie de l’ouvrage (la ferme triangulée).Cette étape était particulièrement importantepuisque la ferme constitue l’une des composantesdont le facteur de sécurité est le plus faible de toutl’ouvrage suspendu.

A N A L Y S E M O D A L E P A RA C C É L É R O M È T R E S

Dans le cas d’une sollicitation dynamique,l’analyse du signal mesuré de la réponse de la

structure permet de caractériser l’ouvrage en termes de modes de vibration. Cette technique,appelée analyse modale, est l’une des techniquesles plus répandues dans les domaines impliquant lavibration de solides déformables. Dans le casprésent, les valeurs servent, par exemple, à l’esti-mation des facteurs de majoration dynamique, desensibilité séismique ou aérodynamique.

Les tests ont eu lieu en septembre 2001 sous

le trafic ambiant, en incluant deux camions duMinistère circulant aléatoirement pour éviter lestemps morts de la circulation normale. Parsymétrie et compte tenu de la longueur du pont,seule la moitié sud de l’ouvrage a été couverte parsept accéléromètres (fixés aux membrures verti-cales de la ferme). Les accéléromètres ont étédéplacés six fois sur la travée centrale pour capterun maximum de modes puisque certaines posi-

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Figure 3 : Pause de jauges de déformation.

Figure 4 : Modèle par éléments finis 3-D complet du pont de l’île d’Orléans.

Figure 5 : Effort axial dans la corde verticale selon la position des camions

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tions correspondent à des nœuds immobiles de cer-tains modes. À chaque fois, les accéléromètres ontété mis en position verticale puis horizontale. Lamême procédure a été appliquée pour la travéed’approche avec cinq déplacements d’ac-céléromètres. Deux accéléromètres (un par travée)n’ont cependant jamais été déplacés afin de servirde référence pour l’ensemble des tests. De lamême manière, la tour sud a aussi été instrumen-tée avec deux séries de tests.

On a choisi ici un exemple typique de deuxaccéléromètres (4 et 5) en position 46 sur le pont,soit à 112,6 m de la tour sud sur la travée cen-

trale. L’accélération (transformée en volts) de l’ac-céléromètre 4 est donnée à la figure 6. Les ampli-tudes maximales sont dues aux passages descamions sur le pont. Un signal similaire a étéobtenu pour l’accéléromètre 5.

On peut établir les valeurs des fréquences devibration en déterminant les fréquences pourlesquelles l'énergie du signal obtenu de chaqueaccéléromètre atteint un maximum. La représenta-tion des fréquences d'un signal est obtenue en cal-culant la transformée de Fourier rapide (FFT pourFast Fourier Transform) de celui-ci. Le module decette fonction constituée de nombres complexes

est appelé le spectre du signal et représente la dis-tribution de l'énergie du signal en fonction de lafréquence. Le graphique obtenu s’appelle la den-sité spectrale de puissance (PSD pour Power spec-tral density, figure 7). On peut donc déterminer lesfréquences excitées de la structure en repérant lespics de valeurs maximales d'énergie ou pics de laFFT.

Pour s'assurer de l'authenticité des fréquencesidentifiées, on a utilisé une approche basée sur lesfonctions de réponses en fréquences (FRF). Aprèscalcul, l’approche fournit deux fonctions utiles dontune fonction dite de cohérence. Pour unefréquence donnée, une valeur élevée de la fonctionde cohérence (> 0,8) assure que celle-ci est bel etbien une fréquence de vibration de l’ouvrage (fig-ure 7). En effet, par définition, pour un mode devibration, les accélérations de deux pointsdemeurent en tout temps dans un rapport con-stant, ce qui établit une relation linéaire (unecohérence) entre les signaux des accélérations deces deux points.

Une autre fonction dite de phase du spectrecroisé permet de spécifier si le mouvement dupoint considéré est en phase (0 ± 20 degrés) oudéphasé (180 ± 20 degrés) par rapport au mou-vement du point de référence (figure 7). Dans lecas présent, une phase de près de 0 degré signifieun mouvement en phase dans le plan, soit unmode de flexion, et une phase de près de 180degrés signifie un mouvement en phase opposédans le plan, soit un mode de torsion.

Lors des tests, la fréquence d’échantillonnageétait de 100 lectures d’accélérations par secondepour 655 secondes. Comme on l’a dit précédem-ment, la figure 7 montre un exemple de fonctionsde réponses en fréquences (FRF) pour lesaccéléromètres 4 et 5 (dans le cas présent pour unsignal découpé en 4 signaux de 163,5 secondes,puis moyenné). On y voit très clairement les pics(en PSD avec une cohérence voisine de un et unephase près de zéro) de plusieurs modes de vibra-tions, dont les deux premiers modes de flexion de0,293 et 0,342 Hz (voir figure 8 pour la com-

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Figure 6 : Signal de l’accélération (transformée en volts) pour l’accéléromètre 4

Figure 7 : Fonctions de réponses en fréquences (FRF) pour les accéléromètres 4 et 5 (signal découpé en 4)

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paraison avec le modèle numérique). Plusieurs picsdeviennent aussi visibles lors du traitement,lorsqu’on change l’échelle du PSD. En effet, cer-tains modes bien réels sont parfois écrasés pard’autres en termes d’échelle. Une échelle logarith-mique est alors souvent utilisée. Une quarantainede modes ont ainsi pu être établis entre 0 et 4 Hz.Les résultats expérimentaux de ces très nombreuxmodes (de flexion, de torsion et transversaux)démontrent une bonne concordance avec ceux dumodèle 3-D (de l’ordre de 1 à 5 % environ). Il fautnoter qu’au total cette analyse modale constitueun travail particulièrement long et laborieuxcompte tenu de l’immense quantité de donnéesrecueillies (si on inclut tous les accéléromètres ettoutes leurs positions). Enfin, il a aussi été possibled’estimer l’amortissement modal à partir des FRFen appliquant la technique de l’acuité de réso-nance (half-power bandwidth method). Cesvaleurs d’amortissement sont importantes en cequi a trait à l’amplitude de la réponse dynamiquede la structure.

M E S U R E S D E S E F F O R T SD A N S L E S Y S T È M E D E S U S P E N S I O N

Le système de suspension est l’élément fon-damental de l’ouvrage et est constitué de deuxparties. Il y a d’une part les deux câbles porteursparaboliques qui forment une longueur totale de1535 m et qui sont constitués de 37 torons gal-vanisés (aire totale de 26 974,0 mm2). Puis,d’autre part, il y a les suspentes verticales (consti-tuées de 7 petits torons galvanisés torsadés) qui

proviennent toutes d’un câble unique de 3520 mde longueur découpé en 118 éléments delongueurs variables.

En principe, toutes les suspentes devraientavoir une tension égale sous le poids propre del’ouvrage et il en va de même pour les torons descâbles porteurs. Cependant, comme on le soulignedans la littérature, le réglage d’un pont suspendun’est pas une constante dans le temps et il importede s’inquiéter périodiquement de son évolution.Ainsi, il existe plusieurs ouvrages suspendus ouhaubanés, parfois récents, pour lesquels on a pumesurer un dérèglement significatif de la tensionde la suspension. Ce dérèglement est rarement vis-ible à l’œil nu mais peut tout de même avoir unegrande importance dans le calcul de la sécuritélocale et globale de l’ouvrage.

La tension de chacun des torons des câbles etdes suspentes a été mesurée par l’approche vibra-toire. Cette méthode, basée sur le principe de lacorde vibrante, est une approche classique pourobtenir la tension d’un câble. Ce principe stipuleque les fréquences sont proportionnelles à la ten-sion tout comme dans le cas bien connu d’uninstrument de musique à cordes. La technique util-isée ici fait appel aux développements d’une tech-nologie sans contact récente. Il s’agit de la tech-nique d’interférométrie laser (l’appareil est ici unVS-100 d’Ometron). Celle-ci est basée sur leprincipe de l’effet Doppler laser. L’appareil permetde mesurer, à distance et sans contact, la vitesseen surface d’un solide déformable. La procédureconsiste simplement à viser un toron avec le VS-100 alors que celui-ci est excité par un marteau en

caoutchouc. Le signal (vitesse) est alors traité enFFT de la même manière qu’un signal d’ac-céléromètre.

Récemment, des ingénieurs américains eteuropéens ont eu l’idée d’utiliser l’interférométrielaser pour mesurer la tension dans les câbles desponts haubanés. À ce jour, il semble que lesingénieurs du Ministère soient les premiers à utilis-er cette technique pour les ponts suspendus. Il afallu deux campagnes de mesures (automne2000 et automne 2001) pour compléter la col-lecte des données.

Les 37 torons des câbles porteurs aux 4 cham-bres d’ancrage ont été testés. Les caractéristiquesgéométriques de la zone d’ancrage constituentune bonne application de l’interférométrie laser carl’espace restreint et difficile d’accès interdit l’utili-sation d’accéléromètres pour la plupart des toronsinternes dans la zone d’épanouissement (figure9). Les torons sont ici d’égales longueurs (leurlongueur libre d’épanouissement est de 4,8 m).Les résultats typiques du toron 7 de la chambrenord-est sont donnés à la figure 10. Les principalesvaleurs des harmoniques sont 24,01, 48,70,75,42, 104,84, 137,31 Hz. À l’aide de cesvaleurs, on déduit facilement que la tension dutoron est ici de 271 kN comparée à une valeurthéorique de 284 kN. Les 148 torons ont ététraités de la même manière et le post-traitementn’établit aucune variation pathologique de la ten-sion. Ces résultats démontrent et confirment queles mouvements différentiels importants de la par-tie nord de l’ouvrage et la relaxation des câblesporteurs n’ont pas occasionné de distorsionnotable dans les efforts des torons.

Contrairement à celle des torons, la longueurdes suspentes varie énormément (elle va de moinsde 1,5 m à 36 m), ce qui conduit à une trèsgrande différence de spectre fréquentiel. Bien quepour les longues suspentes, la théorie de la simplecorde vibrante puisse être suffisante (et alors uneseule fréquence suffit en théorie), il est en généralsouhaitable d’avoir plusieurs pics de fréquencesclairement identifiés de manière à s’assurer de la

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Figure 8 : Exemples de modes de vibration

Page 8: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

précision de la mesure et, éventuellement, d’es-timer aussi (surtout pour les suspentes courtes)l’importance relative de la rigidité flexionnelle de lasuspente.

Aux fins de présentation, une suspente de taillemoyenne a été retenue, soit la C114M (travéecentrale amont) de 23,97 m de longueur. Lesrésultats de fréquences obtenus par FFT sontprésentés à la figure 11 où une quinzaine demodes ont été clairement déterminés (2,85,5,59, 8,44, …, 42,68 Hz). À l’aide de cesvaleurs, on déduit facilement la tension de la sus-pente, ici de 111 kN. Cela correspond bien à lavaleur théorique. Le post-traitement des 118 sus-pentes ne démontre aucune variationpathologique. On note simplement que les sus-pentes plus longues ont tendance à être un peumoins tendues et les suspentes plus courtes à êtreun plus tendues qu’en théorie.

M E S U R E S D E S D É P L A C E M E N T S P A R U N E T E C H N I Q U E G P S D E P R É C I S I O N

Une autre mesure intéressante, simple d’inter-prétation et dépendant seulement de la rigiditéglobale, est celle du déplacement d’un point del’ouvrage sous chargement connu. Les méthodeshabituelles de mesure en déplacements n’étantpas applicables ici, le choix s’est porté, pour la

toute première fois, sur une technique de GPS dontla précision a été améliorée par un post-traitementnumérique.

Les mesures ont été effectuées en juin 2001.L’approche GPS est avantageuse car les capteurssont faciles à installer et à déplacer et de plus ils setrouvent couramment sur le marché (ils peuvent

même être loués). Ils donnent aussi les déplace-ments en 3-D, c’est-à-dire dans les trois directionsx, y et z. L’installation de sept capteurs GPS (deuxau centre de chaque travée et un comme référenceau sol) a permis d’obtenir d’excellents résultatssous le passage quasi statique de 3 camions 10roues de 27 000 kg. Ainsi, la flèche centrale max-

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Figure 9 : Mesure typique d’un toronde chambre d’ancrage par inter-férométrie laser

Figure 10 : FFT pour le toron 7 de la chambre nord-est

Figure 11 : FFT pour la suspente no 114 amont centre (23,97 m de longueur)

Page 9: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

imale obtenue était de 356 mm avec le GPS (avec5 mesures par seconde pour une précision de ±6mm). En comparaison, le modèle par élémentsfinis donnait une flèche de 360 mm.

A N A L Y S E S A U L A B O R A T O I R E D E S C H A U S S É E S

Après l’inspection et les tests in situ concernantle comportement structural, il était fondamental des’assurer, après 68 ans, du bon état des matériauxconstitutifs de la suspension. Un test de ruptured’une suspente courte du pont (figure 12) anotamment été réalisé au Laboratoire deschaussées, en avril 2002. La valeur de ruptureobtenue est de 1441 kN. Un test similaire en1982 avait donné une valeur de 1426 kN alorsque les deux tests sur des suspentes neuves il yplus de 68 ans avaient donné 1445 kN et 1448kN. La résistance ultime spécifiée à l’époque étaitde 1317 kN. Une autre suspente a été retiréerécemment et sera aussi testée sous peu. Cesrésultats sont remarquablement bons si on lescompare à des tests de rupture pour des ouvragessimilaires. En effet, on peut citer plusieurs pontssuspendus, parfois bien plus récents que celui del’île d’Orléans, qui ont dû subir un remplacementcomplet de leurs suspentes.

Par contre, un premier fil cassé par la fatiguesur un toron extérieur près de la courbure au som-met de la suspente (figure 13) a été observé lorsde l’enlèvement de cette dernière. Cette observa-tion pourrait nécessiter une attention particulièreen ce domaine dans les années à venir. L’analysechimique pour l’évaluation de la couche résiduellede zinc (galvanisation) a démontré une grandestabilité de cette couche depuis l’analyse de 1982,même sur les fils de l’âme qui semblaient les pluscorrodés. Il faut cependant noter une forte varia-tion de l’épaisseur du zinc d’origine selon les filsétudiés (de 14 à 32 µm). Un exemple en estdonné à la figure 14. Le suivi régulier de l’état dela galvanisation est une opération capitale. Si cettecouche venait à disparaître, même localement,une dégradation accélérée des fils atteints pourraitmettre rapidement les éléments concernés enpéril.

C O N C L U S I O N

Depuis la fin de 1998, le pont suspendu del’île d’Orléans a fait l’objet de plusieurs cam-pagnes de mesures de précision tout à fait con-cluantes. De plus, une étude géotechnique détail-lée sur la partie nord est en cours et le câble por-teur sera ouvert pour inspection des torons en2003. Une étude en soufflerie pour un essai aéro-dynamique est aussi prévue dans le cas où un scé-nario de modification structurale serait retenu.

Les résultats obtenus ont permis de calibrer unmodèle par éléments finis non linéaire complet3-D fiable qui tient compte de l’état réel et actuelde l’ouvrage après ces 68 ans d’évolution pro-gressive. Les mesures prises in situ et les calculseffectués ont déjà mis en évidence que ce pont estglobalement dans un état supérieur à ce que lais-saient supposer son âge et les premières observa-tions. Ces résultats vont permettre la planificationdes travaux jugés nécessaires en évitant toutexcès de conservatisme coûteux et en s’assurantde la pertinence d’investir dans la réfection de cetouvrage. Les efforts consentis en valent la peines’ils sont vus sous l’angle d’un gain à long termepuisque la durée de vie utile d’un ouvrage de cetype est généralement bien supérieure à celle deponts standards de plus petites dimensions.

R E M E R C I E M E N T S

Nous tenons à remercier François Forcierd’Intertechnology et Boumédiène Falah del’UQAR pour les prêts prolongés d’un VS-100.Nous tenons aussi à remercier Marc Savard pourle travail portant sur les jauges, Jean-FrançoisLaflamme pour ce qui est du travail colossal relatifaux résultats dynamiques, Réal Nobert et DonaldVilleneuve pour les essais en laboratoire ainsi queles nombreuses personnes concernées de laDirection territoriale de Québec (notammentChristian Lagacé pour les mesures de GPS) et dela Direction des structures pour leur étroite collab-oration dans toutes les étapes de ce grand dossier.

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 9

Figure 12 : Test à la rupture d’une suspente

Figure 13 : Fils cassé par la fatigueprovenant de la suspente (X31)

Figure 14 : Coupe du toron de l’âmede la suspente (X320)

Acier

Zinc

Acier

36 µm

14 µm

Page 10: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

I N T R O D U C T I O N

La problématique abordée dans ce projet con-cerne une série de viaducs qui franchissent l’au-toroute Décarie à Montréal. Il s’agit d’ouvragesdont l’intégrité générale a été bien préservée, etpour lesquels il n’est pas nécessaire d’augmenterla capacité portante ni les charges admissibles devéhicules. Cependant, on observe que la corrosiondes étriers des poutres en béton précontraintprovoque un délaminage localisé du béton sous lasemelle inférieure des poutres. Cette couche super-ficielle de béton, qui peut atteindre 25 mm d’é-paisseur vis-à-vis de l’étrier et s’étendre sur 100 à200 mm de chaque côté de ce dernier (soit unecharge de 0,4 kN/m), constitue un risque impor-tant pour les usagers lorsque le béton se détachepour tomber sur les voies carrossables.

Il s’agit de déterminer dans quelle mesure desmatériaux composites peuvent servir à effectuerdes chemisages préventifs pour empêcher la chutede fragments de béton. À cette fin, des sections dela semelle inférieure de poutres retirées d’un via-duc de l’autoroute Décarie ont été découpées puischemisées en laboratoire au moyen de divers plas-tiques renforcés de fibres de verre (PRF). Par lasuite, la résistance et la durabilité du chemisageont été mesurées.

O B J E C T I F S

Les objectifs de cette étude expérimentale sont :

• de déterminer si des lamelles, feuilles ou stratifiés de PRF peuvent retenir les fragmentsde béton qui se détachent des poutres en bétonprécontraint;

• d'établir la configuration de PRF la plus économique possible pour cet usage, en termes dematériaux, de préparation de surface et de mise enplace; et

• d'étudier la durabilité du chemisage sous les conditions climatiques propres au Québec, entenant compte en particulier de leur résistance auxcycles de gel-dégel.

L E S É C H A N T I L L O N S E T L E SM A T É R I A U X

Les échantillons utilisés sont des segments desemelles inférieures de trois poutres AASTHO detype IV récupérées lors du remplacement du tabli-er du viaduc Édouard-Montpetit localisé au-dessusde l’autoroute Décarie à Montréal (voir figure 1).Les échantillons, appelés « poutrelles », incluent lapartie inférieure de l’âme (150 mm) et ont unelongueur de 1800 mm. Pour ce qui est des échan-tillons utilisés pour le test de vieillissement,appelés « mini-poutrelles », ils ont des dimensionsplus modestes, soit la demi-largeur de la poutrellesur 600 mm de long.

Le programme expérimental prévu initialementa dû être modifié en cours de route, d’une part àla suite des résultats obtenus, mais également àcause des changements de produits des différentsfournisseurs de PRF. De plus, le paramètre initiale-ment prévu du collage du PRF sur les côtés de lasemelle inférieure des poutres a été retiré du pro-gramme d’étude lorsqu’on a constaté que leszones de délaminage se retrouvent principalementsur la partie inclinée de la semelle inférieure; lechemisage doit nécessairement couvrir une partiede l’âme. Le changement surprise de résine parSika Canada a aussi forcé la reprise de certainsessais, ce qui a entraîné l’élimination de l’étude del’effet du chanfrein vu le nombre limité depoutrelles encore disponibles; il a fallu tout demême réutiliser quatre mini-poutrelles pour l’étudede la durabilité avec la nouvelle résine de SikaCanada.

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CHEMISAGE DE POUTRES EN BÉTON PRÉCONTRAINT AU MOYEN DE MATÉRIAUX COMPOSITES

Marc Demers, ing., M. Sc. A. associé de recherche, Département de génie civil, Université de Sherbrooke

et

Denis Bérubé, ing., Service de l'entretien, Direction des structures, Ministère des Transports du Québec

Figure 1 : Prélèvement et découpage des échantillons

Page 11: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 1 1

Dans la mesure où il est impossible d’étudiertoutes les possibilités du marché en termes de pro-duits, on a décidé de poursuivre l’étude avec seule-ment deux matériaux typiques :

• le système Tyfo Fibrwrap, constitué du tissude fibres de verre SEH51 et de la résine époxy TyfoS, fabriqué par Fyfe Co. LLC;

• le système SikaWrap, constitué du tissu defibres de verre SikaWrap 430G et de la résineépoxy Sikadur 330 (en remplacement du tissuSikaWrap 100G et de la résine Sikadur Hex 300),fabriqué par Sika Canada.

La préparation de la surface du béton avant lecollage du chemisage a été un paramètre impor-tant de cette étude. On avait initialement convenude réduire au minimum la préparation de surfaceafin de réduire le coût et la durée des travaux enchantier mais les premiers essais ont été déce-vants; on a alors décidé de préparer les surfaces debéton selon les directives standards relatives à lapose de matériaux composites. Quatre prépara-tions de surface ont finalement été étudiées :

• nettoyage au jet de sable ou au jet d’eausous pression sans correction du profil;

• préparation de la surface au jet de sable ouau jet d’eau sous pression suivie d’une correctiondu profil avec un mortier de réparation.

L A L I S T E D E S E S S A I S D U P R O G R A M M E E X P É R I M E N T A L

La description des essais de résistance réalisésest synthétisée au tableau 1. Le chemisage desquatre premières poutrelles (groupe 1), réaliséavec le système initial de Sika et le système Tyfo,a pour but d’obtenir des valeurs de référence. Lechemisage de trois autres poutrelles (groupe 2),réalisé avec le nouveau système de Sika, a pourbut d’établir de nouvelles valeurs de référence. Lespoutrelles du groupe 3 servent à étudier l’effet dutype de préparation de la surface de béton.Finalement, les poutrelles du groupe 4, dont lesessais sont à venir, permettront d’étudier l’effetdes vibrations durant le durcissement de la résine.

La description des essais de durabilité réalisésest présentée au tableau 2. L’imposition de cyclesde gel-dégel est le type de vieillissement accéléréretenu pour étudier la durabilité dans le cadre de ceprojet de recherche. Un cycle type consiste en unepériode de 16 heures dans l’air d’un congélateurréglé à –20 °C suivie d’une période de 8 heuresdans un bassin d’eau à la température ambiantedu laboratoire. Les quatre mini-poutrelles dugroupe V1 ne subissent aucun vieillissement afinde servir de référence. L'utilisation des mini-poutrelles du groupe V2 a pour objectif de fournirrapidement des indications préliminaires sur ladurabilité (100 cycles de gel-dégel). Celles-ci ontdonc reçu différentes préparations de surfaces etles systèmes de chemisage prévus initialement. Legroupe V3 permettra de compléter l’étude de dura-bilité du système Tyfo au terme de 300 cycles de

gel-dégel. Le groupe V4 a été ajouté en cours deréalisation du projet afin d’étudier la durabilité dunouveau système de Sika. Il comprend deux mini-poutrelles qui subiront 300 cycles de gel-dégel etdeux autres mini-poutrelles non vieillies à titre deréférence. Finalement, comme pour le groupe V3,un enduit de surface, le Tex-Cote XL-70 Bridge-Cote, a été appliqué sur le chemisage d’une de cesdeux dernières mini-poutrelles afin d’examiner ladurabilité de l’enduit de surface comme écran pro-tecteur contre les rayons UV.

Tableau 1 : Liste des essais de résistance sur les poutrelles

Page 12: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

L E S M O N T A G E S E X P É R I M E N T A U X

Le principal essai consiste à mesurer la chargeque peut reprendre le chemisage en PRF. Afin d’ex-ercer une charge à l’intérieur de l’enveloppe enPRF, une plaque d’acier de 9,5 mm d’épaisseur aété installée entre le béton et l’enveloppe en PRFau moment du chemisage des échantillons. Lescôtés des plaques ont été chanfreinés à 45° demanière à prolonger la géométrie de la section debéton.

La figure 2 présente le montage d’essai utilisépour les essais de résistance. On note que leséchantillons sont retournés et retenus en place par

des poutres transversales ancrées au plancher de ladalle d’essai. La force d’arrachement vers le hautexercée par un vérin hydraulique est divisée en

deux parties égales par un profilé creux en acier.Deux boulons insérés dans ce profilé creux vien-nent se visser dans les écrous préalablementsoudés sous la plaque d’acier sous le chemisage.Le montage d’essai pour les mini-poutrelles est trèssimilaire bien que la plaque d’acier ne soit chargéequ’en un seul point.

R É S U L T A T S D E S E S S A I S

Mini-poutrelle de validation

Avant d’entreprendre le chemisage despoutrelles du groupe 1, trois essais ont été effec-tués sur une même mini-poutrelle afin de validerl’orientation des fibres de verre, le montage d’es-sai et l’instrumentation requise.

Après un premier essai infructueux, un deux-ième essai (fibres du PRF posées parallèlement àl’axe de la poutre) a montré un déplacement de2,5 mm sous une charge de rupture de 10 kN; cedéplacement est suffisant pour accommoder l’aug-mentation de volume due à la corrosion des étriersen acier mais insuffisant pour détecter l’anomalieà l’œil nu (ductilité insuffisante). Un troisièmeessai (fibres du PRF posées perpendiculairement àla poutre) a montré un déplacement de 24 mmsous une charge de rupture de 75 kN. Cette dis-position n’était pas initialement prévue au pro-gramme de recherche car elle présente un niveaude difficulté de mise en place légèrement plusgrand; elle permet cependant aux fibres de con-tribuer à la résistance du chemisage alors que l’ori-entation parallèle à l’axe de la poutre reporte la

1 2 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3

Tableau 2 : Liste des essais sur les mini-poutrelles

Figure 2 : Montage sur les essais de résistance en laboratoire

Page 13: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

totalité de la charge à la résine. Les essais sub-séquents ont donc été réalisés en disposant le PRFperpendiculairement à l’axe de la poutre.

Poutrelles du groupe 1 : première série de référence

Le relief de la surface n’a pas été corrigé afin desimuler une mise en place rapide avec une prépara-tion de surface minimale. Cette préparation défi-ciente de la surface a laissé des zones où il estvirtuellement impossible d’obtenir un contact PRF-béton malgré le fait que les quatre poutrelles aientété chemisées en position renversée pour simplifierl’installation en laboratoire (les autres poutrelles del’étude ont été chemisées en position normale).Même retenu en place par un système de blocs etde courroies pour la durée de la cure de la résine, lechemisage n’était en contact avec le béton que sur30 à 50 % des surfaces latérales. Entre-temps, SikaCanada a décidé de changer sa résine fluide SikadurHEX 300 par la résine en pâte Sikadur 330.

Une première poutrelle, chemisée avec le sys-tème SikaWrap et pour laquelle la surface colléeest estimée à 30 %, affiche une faible résistance,soit seulement 40 kN; l’autre poutrelle chemiséeau moyen du SikaWrap affiche une résistance plusimportante (155 kN) bien que la surface de PRFcollée ne soit que d’environ 50 %.

Une troisième poutrelle, chemisée avec le sys-tème Tyfo et pour laquelle la surface collée est de100 % (surfaces de béton non endommagées),affiche une résistance de 310 kN. Une dernièrepoutrelle, dont les surfaces sont endommagées surune des parties inclinées, a aussi été chemisée aumoyen du système Tyfo. La surface collée de cettepoutrelle est estimée à 80 % et la résistancemesurée est de 175 kN.

De ces résultats, on retient que même avecune mise en place déficiente, le chemisage offreune résistance et une ductilité suffisantes pourretenir des fragments de béton délaminé et sur-vivre à l’expansion que pourrait provoquer la cor-rosion des armatures internes en acier. Toutefois,les vides entre l’enveloppe en PRF et le béton ont

soulevé un questionnement au sujet de la durabil-ité du chemisage. On a reconnu que l’effet ne pou-vait qu’être défavorable étant donné la possibilitéde gel de l’eau qui pourrait s’y accumuler. Pourcette raison, on a décidé de poursuivre les essaisen corrigeant le profil de béton de manière àobtenir un contact le plus continu possible duchemisage.

Poutrelles du groupe 2 : deuxième série de référence

Pour ces trois poutrelles, aucun vide n’a étédécelé entre l’enveloppe en PRF et le béton (voirfigure 3). On a constaté que le système SikaWrap430G/Sikadur 330 est facile d’installation etreste en place même sur les angles à 45° deschanfreins. Il faut noter que le tissu 430G est plusléger que le tissu 100G, ce qui en facilite la miseen place. Les deux poutrelles chemisées avec letissu 430G ont une résistance mesurée de 80 kNavec un déplacement de 10 mm. Cette résistanceest amplement suffisante pour retenir en place lebéton délaminé tout en conservant une ductilitéadéquate.

Ces essais montrent que la plaque d’acier ini-tie systématiquement la rupture par ses arêtesvives (voir figure 4). Conséquemment, il est

recommandé d’arrondir les angles des chanfreinsdes poutres à chemiser lors des travaux en chantierafin d’atténuer le risque de ce type de rupture.

Poutrelles du groupe 3 : préparation de surface

Pour ces deux poutrelles, les surfaces de bétonont donc été préparées au moyen d’un jet d’eausous pression de 48 MPa (7000 psi) avant lapose du système SikaWrap 430G. Aucun vide n’aété décelé entre l’enveloppe en PRF et le béton,même sur les angles à 45° des chanfreins. Larésistance mesurée s’élève à 120 kN, soit uneaugmentation d’environ 50 % par rapport auxpoutrelles de référence du groupe 2, tout en ayantun déplacement de 15 mm. Ces résultats montrentque la préparation au moyen d’un jet d’eau souspression, moins polluant qu’un jet d’abrasifs, nediminue en rien la résistance du chemisage.

Poutrelles du groupe 4 : vibrations

Les résultats de ces essais sont à venir.

Mini-poutrelles du groupe V1 : référence à 0 cycle

Avec des dimensions réduites et un côté scié,plat et sans chanfrein, les mini-poutrelles sont tropdifférentes des poutrelles pour une comparaison

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 1 3

Figure 3 : Chemisage d’une poutrelle avec Sika Wrap 430G et Sikadur 330

Figure 4 : Poutrelles du groupe 2 après les essais

Page 14: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

directe. Pour cette raison, les quatre mini-poutrellesdu groupe V1 servent de référence et ne subissentaucun vieillissement. Comme pour toutes les mini-poutrelles, celles-ci ont été chemisées en positionrenversée pour simplifier l’installation de la plaqued’acier qui n’avait ainsi pas besoin d’être ancréeau béton. Le tissu PRF a été mis en place perpen-diculairement à l’axe de la poutre.

Le tissu SikaWrap 100G est collé à 90 % de lasurface de la mini-poutrelle. Le tissu Tyfo est colléà 80 % de la surface de la mini-poutrelle malgrédes dommages importants aux surfaces de béton.La charge mesurée des quatre mini-poutrelles estde l’ordre de 65 kN avec un déplacement d’envi-ron 20 à 30 mm.

Mini-poutrelles du groupe V2 : 100 cycles de gel-dégel

L'utilisation des quatre mini-poutrelles dugroupe V2 a pour objectif de fournir rapidementdes indications préliminaires sur la durabilité. À ceteffet, celles-ci ont reçu différentes préparations desurface ainsi que les systèmes de chemisageprévus initialement (qui sont les mêmes que ceuxutilisés pour le groupe V1). La résistance deschemisages a été mesurée après 100 cycles degel-dégel.

Le tissu Sika est collé à 70 et 100 % respec-tivement à la surface de deux mini-poutrelles. Letissu Tyfo est collé à 90 et 100 % respectivementà la surface de deux autres mini-poutrelles. Après100 cycles de gel-dégel, la résistance mesurée secompare à celle mesurée sur le groupe V1; on peutdonc conclure de façon préliminaire que la durabil-ité du chemisage est excellente.

Mini-poutrelles du groupe V3 : 300 cycles de gel-dégel

L'utilisation des deux mini-poutrelles du groupeV3 a pour objectif d’établir la durabilité du chemis-age effectué avec le système Tyfo après 300cycles de gel-dégel. De plus, l’effet d’un enduit desurface (Tex-Cote XL-70 Bridge-cote) est étudié surl’une d’elles. Le tissu est collé à 100 % de la sur-face des mini-poutrelles.

Les résultats de ces essais sont à venir.

Mini-poutrelles du groupe V4 : nouveaux matériaux de Sika

L'utilisation des quatre mini-poutrelles dugroupe V4 a pour objectif d’établir la durabilité duchemisage effectué avec le système Sika (tissu430G) après 300 cycles de gel-dégel. Deux mini-poutrelles ne sont pas vieillies afin de servircomme valeurs de référence. De plus, l’effet d’unenduit de surface (Tex-Cote XL-70 Bridge-cote) estétudié sur l’une des mini-poutrelles vieillies. Letissu est collé à 100 % de la surface des mini-poutrelles.

Les résultats de ces essais sont à venir.

C O N C L U S I O N

Le présent projet de recherche vise à déter-miner dans quelle mesure des matériaux compos-ites peuvent servir à effectuer des chemisagespréventifs sur des ouvrages affectés par le délami-nage superficiel du béton. À cette fin, des sectionsde la semelle inférieure des poutres d’un viaducont été découpées puis chemisées au moyen dedivers plastiques renforcés de fibres de verre(PRF). Par la suite, la résistance du chemisage aété mesurée. De plus, un aperçu de la durabilité deces chemisages a été obtenu en faisant subir 100cycles de gel-dégel à quatre échantillons avantd’en mesurer la résistance résiduelle.

Les résultats des essais de résistance montrentque le tissu PRF doit être posé en alignant lesfibres perpendiculairement à l’axe de la poutre,que les surfaces doivent être préparées avant lapose du PRF pour minimiser les vides entre celui-ciet le béton et que le système Sika exige l’utilisa-tion d’une résine pâteuse. De plus, on a aussi con-staté que les coins devraient être arrondis pourminimiser la rupture du PRF initiée par des anglestrop abrupts. Finalement, la préparation des sur-faces au moyen d’eau sous pression, moins pollu-ante que la préparation au jet d’abrasifs, n’affectepas la résistance du chemisage.

Les résultats des essais de durabilité montrentque celle-ci n’est pas réduite après 100 cycles degel-dégel. Les conclusions concernant la durabilitésont préliminaires puisque d’autres résultats après300 cycles sont attendus à l’été 2003.

Cette étude sera suivie d’essais en chantier àl’été 2003 sur la structure du Chemin de la CôteSaint-Antoine située au-dessus de l’autorouteDécarie à Montréal. Ces essais en chantier serontinstrumentés afin de vérifier l’activité de corrosionavant et après la mise en place du chemisage.

B I B L I O G R A P H I E

BEAUDOIN, Y., P. LABOSSIÈRE et K. W. NEALE(1998). « Wet-dry action on the bond between com-posite materials and reinforced concrete beams »,dans B. Benmokrane et H. Rahman (dir.), Durabilityof Fibre Reinforced Polymer (FRP) Composites forConstruction, Sherbrooke, Université de Sherbrooke,p. 537-546.

BISBY, L. A., M. F. GREEN, Y. BEAUDOIN, et P.LABOSSIÈRE (2000). « FRP plates and sheets bond-ed to reinforced concrete beams », dans J. Humar etA. Ghani, (dir.), Comptes rendus de la 3e Conférenceinternationale sur les matériaux composites d'avant-garde pour ponts et charpentes (MCAPC-III), Ottawa,Société canadienne de génie civil, p. 209-216.

BISBY, L. A. et M. F. GREEN (2002). « Resistanceto Freezing and Thawing of Fiber-Reinforced Polymer-Concrete Bond », ACI Structural Journal, AmericanConcrete Institute, vol. 99, no 2, p. 215-223.

DEMERS, Marc (2003). Rapport d’étape.Chemisage de poutres en béton précontraint aumoyen de matériaux composites, Sherbrooke, ISISCanada.

GREEN, M. F., L. A. BISBY, Y. BEAUDOIN et P.LABOSSIÈRE (1998). « Effects of freeze-thaw actionon the bond of FRP sheets to concrete », dans B.Benmokrane et H. Rahman (dir.), Durability of FibreReinforced Polymer (FRP) Composites forConstruction, Sherbrooke, Université de Sherbrooke,p. 179-190.

RAÎCHE, A., Y. BEAUDOIN, et P. LABOSSIÈRE(1999). Durability of Composite Materials used asExternal Reinforcement for RC Beams, Congrèsannuel de la Société canadienne de génie civil,Ottawa, Société canadienne de génie civil, p. 155-164.

1 4 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3

Page 15: Innovation Transport, numéro 16, avril 2003

I N T R O D U C T I O N

En Amérique du Nord et plus particulièrementau Québec, la corrosion occasionnée par l’é-pandage de sels de déglaçage est le premier fac-teur réduisant la durée de vie des ouvrages d’art etelle engendre par le fait même des coûts de répa-ration très importants. Les tabliers de pont enbéton armé sont parmi les structures les plusexposées aux conditions favorisant la corrosion del’armature d’acier, l’éclatement du béton et la fis-suration de l’enrobé bitumineux.

Cette corrosion de l’acier d’armature est laprincipale cause de détérioration des infrastructuresen béton et constitue présentement un grand défipour les propriétaires d’ouvrages publics et privés àtravers le monde. De plus, les tabliers de pont con-stituent les éléments pour lesquels l’endommage-ment dû à la corrosion des armatures est le pluscoûteux, tant par les coûts directs d’auscultation,de réfection ou de remplacement, que par les coûtsindirects reliés à la perturbation du trafic lorsquedes interventions sont nécessaires.

L’utilisation de béton à haute performance,l’augmentation de l’enrobage de béton, la gal-vanisation de l’acier d’armature et l’utilisation demembranes d’étanchéité sont les principales tech-niques qui sont utilisées pour retarder la corrosionde l’acier et l’éclatement du béton. Cependant, cesmatériaux et techniques ont une efficacité limitée,surtout dans le cas de structures exposées à desenvironnements particulièrement agressifs tels queles tabliers de pont où l’on a souvent recours à l’u-tilisation de sels et de produits de déglaçage.

Il faut donc trouver une solution durable pourprolonger la durée de vie des structures de béton

armé et pour réduire les coûts de réparation sanscesse croissants. L’une des solutions envisagéespour éliminer le problème de corrosion est l’utilisa-tion d’armatures en matériaux composites à basede polymères renforcés de fibres (PRF).

On fait maintenant de plus en plus appel àcette nouvelle technologie des armatures enmatériaux composites constitués de polymèresrenforcés de fibres pour les structures en bétonarmé, dont les tabliers de pont. Ces matériauxcomposites en PRF, légers et de haute résistance,se caractérisent par une grande immunité contre lacorrosion, une longue durée de vie et une réduc-tion des coûts liés à l’entretien. Ces matériaux fontmaintenant l’objet d’un chapitre (chapitre 16)dans le Code canadien pour le calcul des pontsroutiers (CAN/CSA-S6-00).

P R O J E T D E R E C H E R C H E

La Direction des structures du ministère desTransports du Québec a amorcé en 2000 un projetde recherche dans le but d’utiliser cette technolo-gie dans les tabliers de pont. Ce projet, mené encollaboration avec la Direction territoriale de l’Estrieet la municipalité de Wotton, fut confié à uneéquipe de recherche du Département de génie civilde l’Université de Sherbrooke. Cette équipe a tra-vaillé en partenariat avec l’entreprise Pultrall inc.de Thetford Mines, qui fabrique des barres d’ar-mature de type ISOROD en matériaux composites,constituées de fibre de verre et de fibre de carboneavec résine de vinylester.

La phase 1 du projet de recherche a traité desessais préliminaires effectués sur l’armature enmatériaux composites à base de fibre de carboneISOROD; cette phase portait sur le développement

et l’optimisation des propriétés mécaniques etstructurales. Ces essais visaient à optimiser les pro-priétés de la nouvelle barre en fibre de carbone entermes de taux optimal en fibre de carbone, d’unepart, et la mise au point d’un nouveau procédépour le revêtement extérieur de l’armature afind’assurer une bonne adhérence au béton structur-al, d’autre part. Les essais préliminaires effectuéscomprenaient des essais de traction uniaxiale, desessais de durabilité (armature sous tension enmilieu alcalin), des essais d’adhérence arma-ture/béton et des essais de flexion sur des poutresen béton armé. Les résultats préliminaires obtenusdans cette phase du projet ont été très satis-faisants, ce qui a permis la poursuite du projet derecherche.

La phase 2 a porté sur les résultats d’essaiseffectués sur l’armature en fibre de carboneISOROD optimisée. Les résultats d’essais de trac-tion, d’essais d’adhérence d’armature noyée dansle béton et d’essais de chargements statiqueseffectués sur des poutres en béton armé à l’aided’armature en matériaux composites et d’arma-ture conventionnelle en acier ont été décrits etanalysés. Des essais en flexion à quatre pointssous charge statique effectués sur six dalles unidi-rectionnelles (3100 mm x 1000 mm x 200 mm)en béton ont été effectués. La configuration de l’ar-mature des dalles (lit inférieur et lit supérieur) aété choisie pour simuler différentes configurationsd’armature en matériaux composites et en acierpour les dalles de tablier de pont en béton. Lesrésultats d’essais effectués en laboratoire (phases1 et 2) ont démontré la bonne performance del’armature en matériaux composites pour son utili-sation dans les tabliers de pont en béton armé.

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 1 5

CONSTRUCTION D’UN PONT ROUTIER ALLIANT DES MATÉRIAUX COMPOSITES AVANCÉS ET UN SYSTÈME DE TÉLÉSURVEILLANCE À DISTANCE

par Gérard Desgagné, ing. M. Sc., Direction des structures, MTQet Brahim Benmokrane, ing. Ph. D., Université de Sherbrooke

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La phase 3 du projet de recherche consistait àappliquer la nouvelle technologie sur un pont réel.

A P P L I C A T I O N S U R U NP O N T R É E L

Le pont qui a été retenu pour ce projet par leministère des Transports du Québec se situe sur lechemin du 6e Rang Ouest, au-dessus de la rivièreNicolet-Centre, à Wotton (Québec). Les figures 1et 2 montrent respectivement l’ancien pont et lepont projeté. Mené de concert avec les ingénieursdu ministère des Transports du Québec (Directiondes structures) et le consultant chargé du projet dereconstruction de ce pont (Groupe Teknika), ceprojet pilote comprend l’utilisation de l’armatureen matériaux composites dans une partie de ladalle et du chasse-roue du pont.

Il s’agit d’un pont biais en béton à une seuletravée d’une longueur totale de 30,60 m et d’une

largeur de 8,90 m. La dalle du tablier a une épais-seur de 200 mm et repose sur quatre poutres pré-fabriquées en béton précontraint de type AASHTOIV avec un espacement entre poutres de 2,3 m etun porte-à-faux de 1 m de chaque côté du tablier.L’armature en matériaux composites a été utiliséedans la moitié de la dalle du pont pour la nappesupérieure (voir figure 3) et sur une longueur de5 m pour la nappe inférieure. De l’armature à basede fibre de verre (# 5 – 15,9 mm) a été utiliséedans toutes les directions excepté dans la directiontransversale de la nappe inférieure où de l’arma-ture à base de fibre de carbone (# 3 – 9,5 mm)a été utilisée (voir figure 4). Le reste de la dalle dutablier du pont a été armé avec de l’armature enacier de no 15. Il faut également noter que de l’ar-mature droite et courbe en matériaux compositesà base de fibre de verre (# 5 – 15,9 mm) a étéutilisée pour le renforcement du béton du chasse-roue sur une longueur correspondant à la moitié du

pont; l’autre moitié du chasse-roue a été arméeavec de l’armature conventionnelle en acier deno 15. La figure 5 montre une vue générale de l’ar-mature de la dalle. Un béton normal de type Vavec une résistance moyenne à la compression à28 jours de 37 MPa a été utilisé pour la dalle dutablier du pont. La figure 6 montre le bétonnagede la dalle du tablier du pont.

Ce pont constitue le premier pont au mondepour lequel de l’armature en fibres de verre et decarbone a été utilisée aussi bien pour le litsupérieur que pour le lit inférieur.

Le pont a été instrumenté à l’aide de capteursà fibre optique pour déterminer l'influence précisedes différentes sollicitations que pourra subir lepont sur une longue période de temps. Quel quesoit le type de sollicitation que le pont subira (ther-mique, mécanique, impact, vibration et oscillation,etc.) les instruments de mesure utilisés permet-tront d'évaluer l'effet spécifique de chaque type desollicitation et d'enregistrer des données. Parailleurs, l'instrumentation retenue permettrad'établir une comparaison directe entre le com-portement de l'armature en matériaux compositeset celui de l'armature en acier sous l'impact dutrafic normal et sous différentes conditions envi-ronnementales. Les capteurs à fibre optique utilisésdans ce projet sont produits par la compagnieRoctest Ltée (Saint-Lambert, Québec). Un systèmed'acquisition de données a été installé à même lepont pour l'enregistrement des données et la sur-veillance du comportement de l'ouvrage à dis-tance. Ce système de télésurveillance à distancepermet de tester le pont et de voir son comporte-ment en temps réel sans se déplacer sur le terrain.

À la fin de la construction du pont en octobre2001, son comportement a été validé à l’aided’essais de chargement statique et dynamique enutilisant des camions chargés à poids calibré.

Figure 1 : Ancien pont situé à Wotton

Figure 2 : Nouveau pont novateur situé à Wotton

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Figure 3 : Armature en fibre de verredu lit supérieur

Figure 4 : Armature en fibre de carbonedu lit inférieur

Figure 5 : Vue générale de l’armaturede la dalle

Figure 6 : Bétonnage de la dalle dutablier du pont

R É S U L T A T S D EL ’ E X P É R I M E N T A T I O N

Le pont a été testé pour en évaluer le comporte-ment sous charges statiques et dynamiques en util-isant des camions à poids calibré (camion de troisessieux ayant 102 kN sur l'essieu à l'avant etapproximativement 116 kN pour chacun des essieuxà l'arrière). Les essais de chargement (voir fig. 7) surle pont ont été effectués le 16 novembre 2001, soitenviron six semaines après l’ouverture du pont autrafic. Les essais statiques ont été effectués à l'aidede deux camions. Un système d'acquisition de don-nées à haute vitesse (1000 Hz) a été installé sousle pont pour enregistrer les données des capteurs àfibre optique pendant les essais. Aussi, pendant tousles essais statiques et dynamiques, les déflexions de

la dalle et des poutres ont été mesurées en utilisantun système de règles et de théodolites.

Sur la base des étapes de construction du pontet des résultats des essais de chargement, on peutémettre les constatations suivantes :

- Aucun problème de manutention ou de mise enœuvre relié à l'utilisation des barres en matériauxcomposites de PRF durant la construction du pontn'a été signalé.

- La performance des barres en PRF sous chargesmécaniques est similaire à celle des barres enacier.

- Les déformations en traction dans le béton sur lasurface supérieure et inférieure atteignent unmaximum de 10 et 25 µε, respectivement. Cesvaleurs sont bien au-dessous de la déformation à

Figure 7 : Essais de chargement sur le pont à l’aide de camions

Figure 8 : Résultat d’essai de chargement statique

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- La déflexion du tablier du pont reste inférieureaux limites permises.

L’instrumentation du pont par des capteurs àfibre optique permettra d’en suivre le comporte-ment à distance et de comparer l’armature en PRFet l’armature en acier sous des conditions réellesde service (voir fig. 10).

C O N C L U S I O N

Le pont de Wotton constitue une réalisationunique au monde basée sur l’utilisation de la tech-nologie des barres d’armature en matériaux com-

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la fissuration du béton qui est de 100 à 125 µεpour un béton normal avec une résistance à lacompression de 30 à 35 MPa.

- Durant les essais statiques (voir fig. 8), la défor-mation en traction maximale dans les barres enPRF du lit supérieur est de 4 µε; cependant celledu lit inférieur est de 15 µε. Cette dernière valeurreprésente moins de 1 % de la déformation ultimedu matériau.

- Durant les essais dynamiques (voir fig. 9), ladéformation en traction maximale était de 15 µεdans les barres en PRF et de 20 µε pour les bar-res en acier.

Figure 9 : Résultat d’essai de chargement dynamique

Fig. 10 : Variation des déformations sous différentes conditions de service

posites à base de fibre de carbone et de fibre deverre, alliée à l’emploi de capteurs à fibre optiqueet à une télésurveillance à distance. Cette réalisa-tion fournira à tous les partenaires impliqués desdonnées précieuses sur le comportement et la per-formance, non seulement sur la technologie desmatériaux composites comme armature à béton,mais aussi sur la technologie d’instrumentation descapteurs à fibre optique. L’avantage économiquedes armatures en matériaux composites en PRF sesitue surtout à long terme. En effet, l’utilisation decette technologie permet de réduire les coûts d’en-tretien de la structure et aussi d’en allonger ladurée de service comparativement aux structuresen béton armé d’acier. De plus, le coût initial d’unestructure utilisant ce type d’armature se trouve peuaugmenté comparativement à celui d’une mêmestructure conventionnelle en béton armé. En effet,le coût de l’armature ne représente qu’une infimepartie du coût global d’un ouvrage en béton armé(en général inférieur à 5 %).

La réalisation de ce pont novateur constitue unbon exemple de transfert de technologie des labo-ratoires de recherche universitaires aux proprié-taires et gestionnaires d’ouvrages publics (munici-palités, ministère des Transports) et à l’industrie dela construction (firmes de génie-conseil et entre-preneurs en construction).

Enfin, la municipalité de Wotton et les dif-férents intervenants dans ce projet de pont ontgagné le Prix d’innovation technologique en infra-structures (novembre 2002) décerné par le min-istère des Affaires municipales et de la Métropole.Ce prix a été remis lors du Gala d’excellence du 26novembre 2002 organisé par le CERIU (Centred’expertise et de recherche en infrastructuresurbaines) à tous les intervenants dans le projet(municipalité de Wotton, ministère des Transportsdu Québec [Direction des structures], Université deSherbrooke [Groupe de recherche de la Chaire duCRSNG sur les renforcements en matériaux com-posites pour les structures en béton], Teknika Inc.,Les Coffrages Carmel Inc., ADS Le GroupeComposites/Pultrall Inc., et Roctest Ltée).

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R É F É R E N C E S

BENMOKRANE, B., EL-SALAKAWY, E., KASSEM,C., MASMOUDI, R. Tablier de pont en béton arméà l’aide de matériaux composites – Phase 3 :Application à un pont dans la municipalité Wotton(Québec), Rapport final soumis au ministère desTransports du Québec, Décembre 2002.

EL-SALAKAWY, E., KASSEM, C., MASMOUDI,R., et BENMOKRANE, B. Renforcement de la dalledu tablier à l’aide de l’armature en matériaux com-posites à base de fibres de carbone Isorod,Complément d’information au Rapport final (pha-ses 1 et 2) soumis au ministère des Transports duQuébec, Mars 2002, 26 p.

KASSEM, C., EL-SALAKAWY, E., MASMOUDI, R.et BENMOKRANE, B. Tablier de pont en béton arméà l’aide de matériaux composites – phase 3 : appli-cation à un pont dans la municipalité de Wotton(Québec), Rapport d’étape (phase 3) soumis auministère des Transports du Québec, Septembre2001, 24 p.

KASSEM, C., LAOUBI, K., TIGHIOUART, B.,MASMOUDI, R. et BENMOKRANE, B.Renforcement de la dalle du tablier à l’aide de l’ar-mature en matériaux composites à base de fibresde carbone Isorod, Rapport final (phases 1 et 2)soumis au ministère des Transports du Québec, juil-let 2001, 36 p.

LAOUBI, K., LORD, I., ROBERT, J. F., MAS-MOUDI, R., BENMOKRANE, B. Tabliers de ponts enbéton armés avec de l’armature en fibre de car-bone Isorod, Rapport technique (Phase 1), soumisau ministère des Transports du Québec, Mars2000, 33 p.

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I n t r o d u c t i o n

Au Québec, il est d’usage que les gaines descâbles de précontrainte soient injectées au coulisde ciment lors de la construction de structures depont en béton précontraint par post-tension. L’undes objectifs recherchés par l’injection est d’offrirune protection aux torons d’acier contre la corro-sion. Le coulis de ciment est alors considérécomme la dernière barrière protectrice des câblescontre les agents agressifs. Si la qualité de la miseen oeuvre de cette injection ou, encore, si la qual-ité du coulis d’injection est non adéquate, des con-séquences graves quant à l’intégralité des struc-tures peuvent en découler.

Les conditions climatiques du Québec entraî-nent l’usage de sels déglaçants sur les infrastruc-tures routières. Dans ce contexte, la fissurationmême partielle du coulis permet aux ions dechlorure présents dans la structure de béton depénétrer profondément dans la gaine pour finale-ment entrer en contact avec le câble de précon-trainte. De la même façon, la présence de videsd’air ou d’eau de ressuage permet aux agentsagressifs d’atteindre rapidement les câbles etfavorise la dégradation des ouvrages précontraintspar post-tension.

Cette problématique liée à la dégradation parcorrosion des structures construites à l’aide de lapost-tension est généralisée : on la retrouve auxÉtats-Unis, au Royaume-Uni, au Canada et dansplusieurs pays d’Europe et d’Asie. Au Québec, leministère des Transports possède un nombreimportant de structures précontraintes dont la plu-part sont d’envergure (plusieurs travées) et situées

sur des routes stratégiques. Force est de constaterque plusieurs de ces structures montrent des signesde dégradation dus à une corrosion prématuréedes câbles de précontrainte.

Cette situation est d’autant plus complexe etpréoccupante qu’il n’existe pas, pour le moment,de techniques d’inspection pleinement satis-faisantes permettant une évaluation correcte del’état de dégradation des câbles de précontrainteou encore permettant la détection de vide (oud’absence) de coulis dans les gaines. C’est ainsique l’inspection des câbles de précontrainte estune opération toujours difficile et très coûteuse,d’où l’importance d’une bonne technique de miseen place des coulis et du choix de produits perfor-mants, c’est-à-dire des coulis offrant un enrobageadéquat des torons.

Compte tenu des considérations précédentes,le ministère des Transports du Québec (MTQ) amandaté, en 2001, une équipe de recherche duDépartement de génie civil de l’Université Lavalafin de comparer la performance de divers coulisdisponibles sur le marché européen et nord-améri-cain. Cette étude avait pour objectif de déterminerles caractéristiques requises afin qu’un coulis soitrobuste et de haute qualité, c’est-à-dire qu’ilréponde à des impératifs de durabilité et de pro-tection.

R É G L E M E N T A T I O N SA C T U E L L E S E T P R O G R A M M E D ’ É T U D E

Compte tenu des dégradations observées surles ouvrages, il semble bien que certains coulisd’injection utilisés jusqu’alors au Québec comme

ailleurs n’assurent pas toujours une injection dequalité. Conséquemment, il y avait lieu de porterune attention particulière aux essais de caractéri-sation normalisés des coulis et de s’interroger surla représentativité de certains, compte tenu desrésultats obtenus sur chantier. Par ailleurs, la qual-ité de la mise en œuvre et la formation du person-nel sont également des éléments soulevant desinquiétudes.

Parallèlement à l’étude réalisée auDépartement de génie civil de l’Université Laval,deux regroupements, le Post-Tension Institute(PTI) et la Fédération internationale du béton(FIB) ont relevé des essais de caractérisation pourcoulis jugés valables pour attester de la pertinenced’un coulis (ainsi que les plages des résultatsattendus). Ils ont également émis des propositionsquant à la certification du personnel technique. Enparticulier, de nouveaux essais dits «de stabilité»ont été proposés, soit les essais d’injection detubes inclinés et ceux de tubes verticaux. Cesessais avaient notamment pour but de reproduiredes conditions de mise en place qui s’apparententde plus près aux conditions d’utilisation des coulisen chantier que les conditions associées aux essaisnormalisés typiques. Ces nouveaux essais devaientainsi faire l’objet d’un examen attentif étant donnéleur nouveauté.

Le programme global de l’étude entreprise àl’Université Laval a donc porté sur 7 coulis dif-férents. Le programme expérimental a été réaliséen deux étapes. Premièrement, les différents coulisont été évalués en laboratoire selon des procéduresnormalisées typiques, incluant la résistance en com-pression (ASTM C942), le mini-cône d’affaisse-

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COULIS D’INJECTION POUR OUVRAGES EN BÉTON PRÉCONTRAINT PAR POST-TENSION

J. Bastien Ph. D. ing.*, G. Desgagné M. Sc. ing.** et D. Beaupré Ph. D. ing.*

* CRIB, Département de génie civil, Université Laval

** Direction des structures, ministère des Transports du Québec

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ment (ASTM C143 mod), le temps de prise (ASTMC953), le ressuage statique (ASTM C940), les car-actéristiques des vides d’air (ASTM C457), lechangement de volume (ASTM C1090), l’écoule-ment au cône (ASTM C939) et la résistance au gel-dégel (ASTM C666). Deuxièmement, les coulis ontété évalués par la méthode du tube incliné et dutube vertical à deux températures ambiantes dif-férentes (5 °C et 30 °C).

L’essai au tube incliné consiste à injecter untube de 5 mètres de longueur, incliné à 30 degrés,et contenant 12 torons (figure 1). L’objectif de cetessai est de quantifier le ressuage des coulis ampli-fié par l’effet filtre provoqué par la présence destorons. Des études antérieures (Fuzier, 2001) ontmontré que les torons offrent un passage privilégiéà l’eau qui s’achemine vers la partie supérieure dutube sous l’action des forces de capillarité nommée

«wick action» ou effet mèche. Il est égalementsupposé que l’inclinaison du tube favorise la sédi-mentation du coulis, ce phénomène étant connusous l’expression " Boycott effect " (Chaussin etChabert, 2001). Ce type d’essai permet derecueillir de l’information additionnelle sur les qual-ités rhéologiques et l’injectabilité des coulis demême que sur leur potentiel à offrir un enrobageadéquat des câbles. Pour sa part, l’essai au tubevertical est similaire à l’essai de ressuage statiquebien qu’il soit fait à plus grande échelle (tube de 2mètres) et que l’injection du tube soit réalisée avecdes équipements de chantier.

La comparaison des essais en laboratoire telsles essais statiques de ressuage (avec ou sanstoron, figure 2) avec ceux de plus grande échelle(tube incliné et tube vertical) revêtait un intérêtparticulier dans l’étude réalisée.

L’ensemble du programme expérimental avaitdonc pour but d’écarter les mélanges jugésmédiocres et de déterminer les produits les plusperformants parmi une gamme de produits testés.À terme, l’étude avait pour but de dégager les con-ditions à respecter pour obtenir des coulis durableset une mise en œuvre optimale des coulis d’injec-tion à base cimentaire.

R É S U L T A T S

Les coulis d’injection sont très variables en ter-mes de composition. Ils peuvent contenir desajouts minéraux tels que des cendres volantes etde la fumée de silice, ou encore des adjuvantschimiques tels que des réducteurs d’eau, desagents réducteurs de retrait, des agents expansifs,des additifs anti-ressuage, des inhibiteurs de corro-sion, etc. Cette variation dans les compositionss’est reflétée dans l’étendue des résultats obtenusde même que dans les défauts observés. À titred’exemple, les figures 3 à 5 présentent certainscomportements douteux qu’ont dévoilés les essaisd’injection.

Parmi les coulis sous étude, très peu ont satis-fait l’ensemble des critères associés aux essais nor-

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Figure 1 : Montage relatif à l’injection de tubes inclinés et verticaux (tiré de Côté, 2002).

Figure 2 : Ressuage statique (sans toron), essai de la mèche (avec toron) et tubevertical (sans toron) (tiré de Côté, 2002).

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Figure 3 : Ressuage du coulis peu de temps après l’injection (tiré de Côté, 2002).

Figure 4 : Gonflement important (tiré de Côté, 2002).

Figure 5 : Réseau de bulles d’air (tiré de Côté, 2002).

matifs typiques de laboratoire et aux essais d’in-jection. Les coulis d’injection utilisés au Québec nesemblaient pas présenter les caractéristiques d’uncoulis de bonne qualité. Il est toutefois apparu que4 coulis se démarquaient et pouvaient être retenuspour la suite de l’étude bien que ne satisfaisantpas nécessairement à l’ensemble des critères.Cette étude a également souligné l’importance del’équipement de malaxage sur les caractéristiquesdes coulis frais et durcis. Les malaxeurs de type col-loïdal se sont rapidement imposés comme étantceux qui assuraient le mélange optimal des consti-tuants des coulis. Par ailleurs, cette étude a égale-ment montré que les essais typiques jusqu’alorsutilisés en laboratoire pour évaluer le potentiel deressuage des coulis étaient très discutables et queles essais du tube incliné semblaient plus représen-tatifs et efficaces pour distinguer un bon coulis d’unmauvais coulis.

C O N C L U S I O N

L’étude commandée par le MTQ a montré queles spécifications actuelles pour les coulis d’injec-tion ne semblaient pas être assez sévères pourassurer une protection optimale des câbles d’aciercontre la corrosion. D’autre part, elle a permis dedéterminer les essais les plus informatifs enmatière de performance des coulis. Un certainnombre de recommandations en ont découlé afind’assurer la qualité du produit lors de son élabora-tion en laboratoire tout comme lors de son utilisa-tion sur chantier. Une de ces recommandations,soit l’utilisation d’un malaxeur colloïdal surchantier, est d’ailleurs déjà apparue dans les spéci-fications du MTQ en 2002.

Le contrôle de la mise en œuvre des coulis etleur fabrication sur chantier sont apparus des élé-ments essentiels pour réussir un ouvrage durableet de qualité. C’est pourquoi les produits préen-sachés semblent être une avenue intéressantepuisqu’ils permettent un contrôle plus serré surchantier de l’apport en eau des mélanges. Pourrépondre à ces préoccupations, la suite des travauxportera sur la robustesse des coulis les plus promet-

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teurs quant à la variabilité de leur comportementaprès un apport en eau variable. Il s’agit doncd’examiner leur stabilité rhéologique et, ainsi, leurpotentiel d’injectabilité, en fonction de conditionsvariables survenant sur chantier. Des injections sursites sont également prévues à l’été 2003.

R É F É R E N C E S

CHAUSSIN, R., et A. CHABERT (2001). « Stategies for improvement – Approach in France »,fib Bulletin, no 15 : Durability of Post-TensioningTendons, Workshop, Belgium, p. 235-244.

CÔTÉ, F. (2002). Évaluation de la performancede coulis d'injection pour les structures précon-traintes par post-tension, mémoire de maîtrise,Département de génie civil, Université Laval, 137 p.

FUZIER, J. Ph. (2001). «Development ofgrout and grouting techniques », FreyssinetInternational (France), fib Bulletin, no 15 :Durability of Post-Tensioning Tendons, p. 173-194.

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MISE A JOUR DE L’INDICE DE FIABILITE DE PONTS EN BETON ARME PAR TELESURVEILLANCE

Marc Savard, Ph. D., ing. Ministère des Transports du Québec

Josée Bastien, Ph. D., ing. professeure agrégée, Université Laval

Marc Jolin, Ph. D., ing. attaché de recherche, Université Laval

I N T R O D U C T I O N

Les infrastructures autoroutières, en particulierles ponts, sont soumises à des conditions d’ex-ploitation de plus en plus exigeantes. De nom-breux ponts ne répondent plus aux exigencesactuelles et des interventions de plus en plus nom-breuses et coûteuses doivent être réalisées pourassurer la sécurité des usagers. Par ailleurs, la ges-tion efficace de ces interventions est tributaire dela qualité du processus d’évaluation de la capacitédes ponts existants. Or, la capacité réelle d’unestructure est difficile à quantifier avec précision, demême que son évolution dans le temps. En effet,l’évaluation de l’incidence sur la capacité d’unedétérioration révélée lors d’une inspection visuelleest une démarche très complexe. La perte decapacité associée à un défaut dépend de la naturede celui-ci, de sa localisation sur l’ouvrage et deson ampleur. De plus, le processus de détériorationévolue dans le temps, souvent au détriment de lacapacité structurale. À titre d’exemple, dans unepoutre en béton armé, des fissures apparaissent,peuvent progresser et s’élargir graduellement sousl’effet des surcharges routières et des cycles devariation des gradients thermiques. Or, la largeurde ces fissures ainsi que leur type (flexion, cisaille-ment ou combinaison des deux) ont une incidencesignificative sur la résistance offerte par le béton(Minor et White, 1988).

Plusieurs interventions peuvent être consid-érées par le gestionnaire d’une structure dont l’é-valuation théorique démontre que la résistance estinsuffisante (Savard, 2002). Dans le cas d’unestructure présentant peu d’indices de détériorationmalgré une incapacité structurale théorique, il peuts’avérer avantageux de la placer sous surveillance

électronique. Un des objectifs de cette surveillanceest de suivre de façon assidue le comportement del’ouvrage afin de connaître le rythme d’évolutiondu processus d’endommagement. Ce suivi peutêtre effectué sur des paramètres tels que les défor-mations longitudinales, la rotation ou la flèche endifférents endroits. Des plages de variations saison-nières de ces paramètres sont alors déterminées etdes seuils d’alerte ou de préalerte, caractérisantune situation dangereuse ou faisant craindre lapossibilité d’une défaillance de l’ouvrage, peuventêtre définis. En cas de dépassement de ces valeurslimites, les mesures de sécurité préalablementdéfinies doivent être exécutées. La télésurveillanceest donc un moyen de vérifier si le pont se com-porte adéquatement sous l’effet de toutes les sol-licitations agissant sur lui.

Par ailleurs, pour faire l’objet d’une surveil-lance électronique, les modes de rupture doiventêtre ductiles. Ainsi, des signes précurseurs,traduisant l’évolution du processus de détériora-tion, peuvent être détectés par le système de sur-veillance. La défaillance de l’ouvrage ne doit pasêtre envisagée à court terme. Dans le cas des struc-tures en béton armé, les poutres doivent être sous-armées de manière à ce que les barres d’armaturetendues se déforment plastiquement avant que lebéton n’éclate en compression. Lorsqu’une rupturefragile doit être envisagée, telle qu’une rupture encisaillement, des mesures immédiates de renforce-ment visant à contrer cette éventualité doivent êtreprises. Dans tous les cas où une télésurveillance estenvisagée, la réduction de l’indice de fiabilité de lastructure doit résulter d’une aggravation ultérieureet progressive des défauts.

Sous l’influence des surcharges routières, duvent, des séismes et des éléments environnemen-taux, la structure se dégrade, ce qui se traduit parune réduction de la rigidité et de la résistance deses éléments structuraux. Ainsi, dans le cadred’une activité de télésurveillance, les tendancesdécelées, une fois corrigées de l’influence desphénomènes récurrents (tels que les effets ther-miques) et des effets des surcharges routières,peuvent être considérées comme des indicateursde la performance offerte par la structure pour sup-porter les charges permanentes qui lui sontimposées. Ces mesures sont donc représentativesd’états limites d’utilisation tels que les limitationsde flèches, les vibrations, le contrôle de la fissura-tion et la fatigue.

Pour que ces données puissent être utiles pourla mise à jour de la résistance à l’ultime d’unemembrure ou de toute la structure, une relationdoit être établie entre les mesures effectuées et larésistance associée à chacun des modes de ruptureprévus. Cette relation est difficile à établirpuisqu’elle équivaut à une extrapolation du com-portement manifesté par la structure soumise àdes chargements d’intensité inférieurs à ceux cor-respondant à l’état limite ultime. De plus, lesmesures obtenues par télésurveillance indiquent,s’il y a lieu, l’endommagement (et le taux de pro-gression de celui-ci) encouru depuis le début de lacampagne de surveillance, ce qui peut être très dif-férent de l’endommagement total subi depuis lamise en service de l’ouvrage.

Dans ce contexte, l’objectif des travaux derecherche présentés dans cet article consiste àdévelopper une approche permettant d’interpréterles mesures de télésurveillance de manière à quan-

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tifier la réduction de la résistance à l’ultime d’unélément structural ayant subi une forme d’endom-magement. Pour ce faire, on se limitera à l’étudedes poutres en béton armé de travées de pont sim-plement appuyées. Seul le mode de rupture flex-ionnel sera considéré. La perte de résistance seraquantifiée par la diminution relative de l’indice defiabilité de la structure, lequel aura été préalable-ment établi au moment de l’évaluation théoriquede la capacité de la structure. Incidemment, la pré-cision de cette mise à jour est fonction de la natureet du niveau de complexité de l’approche retenuepour l’évaluation. La section suivante présente lesmécanismes d’endommagement des élémentsstructuraux.

P R O C E S S U S D ’ E N D O M -M A G E M E N T D A N S L E SP O U T R E S E N B É T O N A R M É

Les principaux paramètres ayant une incidencesur la résistance en flexion d’une poutre et pouvantêtre affectés par le processus d’endommagementsont la diminution de la section des barres d’ar-mature tendues, la perte d’adhérence entre lesbarres d’armature et le béton, et la diminution dela résistance en compression du béton.

D I M I N U T I O N D E L A S E C T I O N D E S B A R R E SD ’ A R M A T U R E T E N D U E S

La diminution de la section des barres par lacorrosion est la forme d’endommagement la pluscourante. Dans une structure en bon état, le bétonenrobe les barres d’armature et en assure ainsi laprotection. De plus, une couche passive de protec-tion se forme à la surface de l’acier placé dans unmilieu alcalin tel que celui offert par le béton dontle pH est supérieur à 13. Cependant, les sur-charges routières, le vent, les tremblements deterre, les gradients thermiques, les tassements dif-férentiels des appuis, le retrait, les cycles de gel-dégel, la réaction alcalis-silice, les changementsvolumiques du béton, etc., peuvent occasionner lafissuration du béton étant donné sa faible résis-

tance en traction. Ces fissures diminuent la protec-tion offerte par le béton en facilitant, par exemple,l’intrusion d’ions de chlorure, favorisant ainsi leprocessus de corrosion. Ces ions peuvent égale-ment migrer à travers le béton sain (lequel estnaturellement poreux) lorsqu’il est saturé. Unautre facteur favorisant l’initiation de la corrosionest la carbonatation. Celle-ci s’accompagne d’uneréduction de l’alcalinité du béton, ce qui détruitéventuellement le film protecteur d’oxyde ferreuxinhibiteur de la corrosion et présent à la surface del’acier (Chen, 1998).

Les ions de chlorure proviennent généralementdes sels de déglaçage répandus sur les routes ouprésents dans les environnements marins. Le gazcarbonique atmosphérique (CO2) et d’autres pol-luants (oxydes d’azote ou de soufre) contribuentégalement à la dégradation des structures encréant un environnement corrosif autour de lastructure.

Le moment interne résistant développé dansune poutre en béton armé est directement propor-tionnel à l’aire des barres d’armature tendues.Ainsi, la diminution de la section des barres d’ar-mature par corrosion peut se manifester par unaffaissement progressif de la poutre sollicitée parson propre poids. La courbure de celle-ci aura donctendance à augmenter et l’axe neutre, définissantle lieu des contraintes et déformations longitudi-nales nulles, progressera vers le haut de la poutre.La corrosion des barres d’armature est donc unphénomène progressif accompagné de signestémoignant de cette progression. Cette apparenteductilité est cependant fonction du maintien d’unlien d’adhérence satisfaisant entre les barres et lebéton environnant.

P E R T E D ’ A D H É R E N C EE N T R E L E S B A R R E S D ’ A R M A T U R E E T L E B É T O N

L’adhérence entre le béton et les barres d’ar-mature est essentielle pour que celles-ci puissentdévelopper les contraintes de traction requises pourcréer le moment résistant interne. Dans le cas de

barres d’armature crénelées, les crénelures butentcontre le béton (interaction mécanique) etassurent ainsi le transfert des contraintes d’unmatériau à l’autre. Le frottement et la liaison chim-ique d’adhésion à l’interface acier-béton con-tribuent également à ancrer les barres tenduesdans le massif de béton environnant. La com-posante horizontale (tangentielle à la barre) de lacontrainte agissant sur le béton permet le transfertde la force de traction des barres d’armature aubéton. La composante perpendiculaire aux barrespeut provoquer le fendage longitudinal ou horizon-tal (sur la face verticale d’une poutre) de l’en-robage de béton. Il faut noter également que l’in-tensité de la composante perpendiculaire aug-mente avec la formation des produits de corrosionà la surface de la barre.

Dans le cas de barres lisses sans dispositif d’an-crage mécanique (crochet ou autre), seuls le frot-tement et l’adhésion chimique permettent le trans-fert des contraintes de cisaillement entre les barreset le béton. Ce lien est atténué et disparaîtéventuellement avec la diminution de la section dela barre sollicitée en traction (effets de poisson).De plus, la corrosion de la surface exposée des bar-res d’armature peut être suffisante pour agir tel unlubrifiant et faciliter le glissement de la barre parrapport au béton environnant (Gaillet etMassicotte, 1997).

En résumé, la rupture par perte d’adhérencesurvient lorsqu’une des conditions suivantes (ouune combinaison de celles-ci) est vérifiée : les con-traintes radiales provoquent le fendage du béton,les contraintes tangentielles dépassent la con-trainte maximale tolérée par les matériaux encause, la longueur d’ancrage est insuffisante, larupture du béton survient par compression autourd’un crochet (enrobage insuffisant), les nervuresde la barre provoquent l’écrasement ou le cisaille-ment du béton. Il faut noter que l’historique duchargement ainsi que son intensité ont une grandeinfluence sur le taux de détérioration de l’ad-hérence.

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2 6 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3

V A R I A T I O N D E L A R É S I S -T A N C E E N C O M P R E S S I O ND U B É T O N

La résistance en compression du béton est unparamètre qui peut être mesuré avec précision enprélevant des échantillons du matériau. Ceparamètre varie le long de la poutre et dépend del’endommagement subi par fissuration ou altéra-tion des propriétés physicochimiques du béton. Deplus, la variation de la résistance en compressiondu béton a une incidence sur la position de l’axeneutre dans la section et, conséquemment, sur lavaleur du moment résistant interne. Dans ce con-texte, il est pertinent d’étudier l’évolution desparamètres décrivant le comportement du bétonen cours d’endommagement.

Des résultats expérimentaux obtenus lors d’es-sais cycliques de chargement de compression sansinversion d’efforts démontrent que la courbeenveloppe formée des valeurs de la contraintemaximale atteinte à chaque cycle coïncide avec lacourbe contrainte-déformation obtenue lors d’unessai de chargement monotone (Lowes, 1999).Ainsi, après plusieurs cycles de chargement signifi-catifs, l’augmentation de la déformation perma-nente de compression s’accompagne d’une réduc-tion à la fois de la contrainte maximale de com-pression admissible et du module d’élasticité dubéton.

À défaut d’une information plus précise sur lespropriétés du béton, le module d’élasticité initialpeut être évalué à l’aide de la norme CAN/CSAS6 2000. Cette valeur du module d’élasticité estvalide jusqu’à environ 40 % de la contrainte max-imale en compression. Le module d’élasticité cor-respondant à la contrainte maximale de compres-sion peut être estimé par le module sécant, définicomme le ratio de la contrainte maximale en com-pression sur la déformation correspondante. Lemodule sécant est de l’ordre de 60 % du moduled’élasticité initial.

La réduction de la valeur du module d’élastic-ité est encore plus significative en phase post-pic,soit pour les cycles de chargement se produisant

après que la contrainte maximale de compressiona été atteinte (Lowes, 1999). Ces résultatsindiquent que le module d’élasticité du bétons’avère un bon indicateur de l’endommagementinduit par tous les cycles de chargement passés,lesquels sont d’intensité inconnue. Or, la valeur dumodule d’élasticité peut être mise à jour à partirdes mesures de l’évolution temporelle de la cour-bure et de la position de l’axe neutre obtenues àune section donnée.

I N T E R P R É T A T I O N D E SD O N N É E S D ET É L É S U R V E I L L A N C E

Tel que cela a été mentionné auparavant, latélésurveillance permet de connaître l’évolution decertains paramètres caractéristiques alors que lastructure est sollicitée par les charges perma-nentes. Dans le cadre de cette étude, on se pro-pose d’établir un lien entre la résistance résiduelleà l’ultime et deux paramètres faisant l’objet de lasurveillance électronique, soit la courbure et laposition de l’axe neutre. Ces paramètres sont doncmis à jour au fur et à mesure que l’endommage-ment progresse.

Dans le cas des poutres en béton armé, larésistance en flexion dépend principalement del’aire des barres d’armature tendues (laquellediminue avec la corrosion), de la contrainte maxi-male de traction admissible dans les barres d’ar-mature (laquelle est une propriété du matériau util-isé et dépend de la qualité du lien d’adhérenceentre le béton et les barres d’armature) et de larésistance en compression du béton. Ledéveloppement des équations permettant de met-tre à jour l’aire des barres d’armature tendues et lemodule d’élasticité du béton d’une poutre endom-magée à partir de l’évolution de la courbure et dela position de l’axe neutre à une section critiqueest présenté par Savard et Bastien (2003). Lacontrainte maximale de traction admissible dansles barres d’armature ne pouvant être mesuréeexplicitement ou déduite d’autres mesures, l’influ-ence de ce paramètre sur la résistance à l’ultime

est discutée ailleurs dans ce même document(Savard et Bastien, 2003).

M I S E À J O U R D E L ’ I N D I C ED E F I A B I L I T É

Le niveau de sécurité offert par une structuredoit être évalué en tenant compte de la variabilitéde la résistance et des sollicitations. Une structureest jugée acceptable tant et aussi longtemps quesa résistance à l’ultime (MU) est égale ousupérieure aux effets correspondants des charges(MS). On définit la marge de sécurité existantecomme la différence entre le moment résistant etl’effet des sollicitations (MU – MS). L’indice de fia-bilité β représente le ratio de la moyenne sur l’é-cart type de la marge de sécurité. Il faut noter qu’ilexiste un indice spécifique pour chacun des modesde rupture de la structure ou d’un de ses éléments,selon le cas.

L’endommagement occasionne une réductionde la résistance et, conséquemment, une diminu-tion de l’indice de fiabilité de la structure endom-magée. Cet indice est également tributaire del’évolution de l’intensité des effets des charges.Cependant, dans le cadre de cette étude, onadmettra que l’intensité des charges vives consti-tuant le trafic routier à un site donné demeureinchangée.

Le suivi de la progression de la courbure et dela position de l’axe neutre permet la mise à jour dumoment résistant ultime de la poutre et, con-séquemment, de son indice de fiabilité.L’expression suivante permet le calcul de l’indicede fiabilité de la poutre endommagée β*(l’astérisque indiquant que l’endommagement aeu lieu) en admettant qu’il n’y a pas de variationde l’intensité des charges permises après l’endom-magement :

où MU* est le moment résistant ultime moyen

de la poutre endommagée, Ms représente le

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moment de flexion moyen induit par toutes lescharges sollicitant simultanément la poutre, V*

R estle coefficient de variation de la résistance de lapoutre endommagée, VS est le coefficient de vari-ation des charges et ln est le logarithme népérien.Faute d’information sur les propriétés statistiquesde la résistance de cette poutre ou de ses sollicita-tions, on peut utiliser les propriétés suggérées dansla littérature et ayant servi à l’établissement de lanorme CAN/CSA-S6-88 (Buckland, 1988).

Il faut noter que la démarche de télésurveil-lance débute, dans la plupart des cas, alors que lapoutre est déjà endommagée. L’endommagementobservé en cours de surveillance conduit à une vari-ation de l’indice de fiabilité donnée par l’expres-sion suivante :

où m est le ratio du moment résistant ultimemoyen de la poutre endommagée, MU*, sur lemoment résistant ultime moyen de la poutre audébut de la surveillance, MU .

Une poutre fictive a été analysée suivant ladémarche proposée ci-dessus pour estimer laréduction du moment résistant et la variation del’indice de fiabilité pour divers scénarios d’endom-magement. On présente à la figure 1 la variationde l’indice de fiabilité, ∆β, d’une poutre fictive de22 mètres de longueur en fonction de la variationde la courbure causée par les charges perma-nentes. En plus d’admettre que la résistance à latraction du béton est négligeable dans les calculs,on a considéré, dans un premier cas, que l’axeneutre demeure immobile et que les valeurs actu-alisées de l’aire des barres d’armature et du mod-ule d’élasticité du béton sont calculées en tenantcompte de la courbure qui est imposée. Dans lesecond cas, on a supposé que l’acier ne corrodepas et que l’endommagement prend la formed’une réduction du module d’élasticité et de larésistance en compression du béton. Commeprévu, au fur et à mesure de la progression de l’en-

dommagement, l’indice de fiabilité diminue si l’in-tensité des sollicitations n’est pas réduite. End’autres mots, la progression de l’endommage-ment conduit à une augmentation de la probabilitéde rupture si aucune limitation des charges n’estimposée. Par ailleurs, on note que l’immobilité del’axe neutre constitue un comportement avan-tageux lorsqu’une poutre s’endommage puisque letaux de diminution de l’indice de fiabilité est moin-dre pour une augmentation donnée de la courbure.

On peut également calculer la réduction req-uise de l’intensité des charges pour que soit main-tenu à une certaine valeur ciblée l’indice de fiabil-ité de la poutre endommagée. La variation du fac-teur de surcharge, ∆F, causée par une réduction dela résistance et exprimée en termes du facteur Foriginal, est donnée par l’expression suivante :

où D est le moment induit par les charges per-manentes, φ et αD sont les coefficients depondération, respectivement de la résistance etdes charges permanentes, tels qu’ils sont proposésdans la norme S6-00 pour un indice de fiabilité βdonné, et U est le coefficient d’uniformisation. La

figure 2 illustre un exemple de calcul. Les obser-vations ressortant de la figure 1 sont confirméespar la figure 2. De plus, pour conserver un indicede fiabilité de 2,5, l’augmentation de la courburede la poutre étudiée de l’ordre de 3 x 10-08 mm-1

doit être accompagnée d’une réduction d’environ30 % de l’intensité maximale des charges per-mises.

C O N C L U S I O N

La démarche proposée dans cet article peuts’avérer très intéressante pour maintenir en serviceune structure jugée théoriquement déficiente. Lesmesures acquises par télésurveillance permettentla mise à jour de l’indice de fiabilité préalablementcalculé à l’étape de l’évaluation. On peut égale-ment calculer la limitation requise de l’intensité dessurcharges routières pour qu’un indice de fiabilitéciblé soit garanti.

Cependant, cette approche nécessite l’utilisa-tion d’un système d’acquisition de données degrande qualité, combiné à des capteurs alliant uneexcellente résolution et une stabilité à touteépreuve. À titre d’exemple, la poutre étudiée subitune diminution d’environ 30 % de sa capacitélorsqu’une déformation permanente de traction del’ordre de 25 µe (correspondant à une variation dela courbure de 3 x 10-08 mm-1) apparaît dans les

Figure 1 : Variation de l’indice de fiabilité en fonction de la courbure

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 2 7

Var

iatio

n de

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fiabi

lité

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barres d’armature inférieures. La déformation per-manente correspondant à une perte de capacitééquivalente serait évidemment plus importantedans une travée de plus grande envergure.

R E C O M M A N D A T I O N S P O U RL A P O U R S U I T E D E ST R A V A U X

Pour la poursuite des travaux, les prévisions dumodèle proposé seront comparées avec les résul-tats obtenus avec des poutres préalablementendommagées en laboratoire (application répétéede surcharges, gel-dégel, bruine saline, réactionalcalis-granulats, etc.). Ces travaux seront effec-tués dans le cadre d’un projet de recherche confiéà Mme Josée Bastien et M. Marc Jolin del’Université Laval. L’analyse des résultats permet-tra également de juger de la pertinence de ladémarche proposée pour établir des seuils detolérance à l’endommagement diagnostiqué par latélésurveillance.

De plus, on devra étudier l’incidence d’unevariation des conditions d’appui comme manifes-tation d’une forme d’endommagement. Desparamètres supplémentaires (rotations auxextrémités, déformations longitudinales mesuréesprès des extrémités, mesure de la variation de la

longueur totale de la poutre, etc.) devront êtreétablis et interprétés pour estimer le changementdes conditions de retenue de la poutre et extrairecette influence des mesures servant à la mise àjour de la résistance résiduelle de l’élément.

B I B L I O G R A P H I E

BUCKLAND, P. G. (1988). « Improvements toClause 12 of S6», Contract 8909, Buckland andTaylor Ltd., mars.

CHEN, W. H. (1998). « Cracking DamageAssessment of Reinforced Concrete Members »,Proceedings of the Nationals. Science Council,vol. 22, no 6, p. 765-774.

GAILLET, O., et B. MASSICOTTE (1997).« Détermination des longueurs de développementdes barres lisses pour l’évaluation des ponts exis-tants », 4e Colloque sur la progression de larecherche québécoise sur les ouvrages d’art, min-istère des Transports du Québec, Université Laval,École Polytechnique de Montréal, avril.

GIRARD, C. (2000). Modélisation de colonnesde pont en béton armé sous sollicitations cycliques,thèse de doctorat, Université Laval, Québec.

LOWES, L. N. (1999). Finite ElementModeling of Reinforced Concrete Beam-Column

Bridge Connection, Ph. D. thesis, University ofCalifornia, Berkeley.

MINOR, J., et K. R. WHITE (1988). « Con-dition surveys of Concrete Bridge Components.User’s Manual », NCHRP report 312, Transpor-tation Research Board, décembre.

MINISTÈRE DES TRANSPORTS DU QUÉBEC(2002). Manuel d’évaluation des structures.

SAVARD, M., et J. BASTIEN (2003).« Interprétation des mesures de télésurveillancepour la mise à jour de l’indice de fiabilité des pontsroutiers en béton armé », 10e colloque sur la pro-gression de la recherche sur les ouvrages d’art,ministère des Transports du Québec, UniversitéLaval, École Polytechnique de Montréal (àparaître).

SAVARD, M. (2002).« Surveillance électron-ique du comportement en service d’un pont routi-er en béton armé », Innovation Transport, min-istère des Transports du Québec, no 13, septembre.

VAL, D. V., M. G. STEWART, et R. E. MELCHERS(1998). « Effect of Reinforcement Corrosion onReliability of Highway Bridges », EngineeringStructures, vol. 20, no. 11, p. 1010-1019.

2 8 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3

Figure 2 : Variation de l’indice de fiabilité et du facteur de surcharge en fonctionde la courbure

Var

iatio

n de

l’in

dice

de

fiabi

lité

Calcul de ∆β: solicitation maintenue; calcul de F : β ciblé égal à 2,5

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I N T R O D U C T I O N

Du point de vue de la conception, les dalles depont ont longtemps été perçues comme des élé-ments secondaires, leur rôle consistant simplementau transfert des charges vers les éléments por-teurs, le plus souvent des poutres. Cette perceptionerronée, combinée à des connaissances limitéessur la durabilité des bétons, a conduit à la con-struction dans le passé de dalles qui ont mal vieilliet qui nécessitent aujourd’hui des déboursés impor-tants. Elles sont en effet les éléments des pontspour lesquels les besoins budgétaires de réparationet de réfection sont les plus importants1.

Les dalles des ponts sont de fait les élémentsles plus sollicités, tant par les agents corrosifscomme le sel de déglaçage que par les chargesroutières. Les observations faites sur le terrain, auQuébec comme ailleurs2, montrent que, dans cer-taines conditions, les dalles de béton des ponts oùl'on retrouve de forts débits de camions se détéri-orent prématurément. Cet effet est observé en par-ticulier sur les ponts dont le système structural estflexible.

Cet article porte sur les solutions utilisées par leministère des Transports lors du remplacement dela dalle du pont de l’autoroute 73 au-dessus de larivière Chaudière au cours de l’été 2002 ainsi quesur les résultats d’un projet de recherche effectuéà l’École Polytechnique de Montréal qui a servi àvalider et à bonifier les solutions proposées.

C O N T E X T E

Situé dans l’axe du pont Pierre-Laporte et sup-portant un débit de circulation journalier moyen deplus de 100 000 véhicules3, le pont de la rivière

Chaudière est parmi les ponts du Québec les plussollicités par le trafic routier. Il est constitué de dixpoutres d’acier espacées de 2591 mm qui suppor-tent une dalle de béton armé de 178 mm. Il com-porte 7 travées de 42,7 mètres de longueur et salargeur est de 27 mètres. Le pont présente un biais(angle du pont par rapport à un axe perpendicu-

laire à la route) de 22 degrés, ce qui est peufréquent pour un pont de cette longueur. La figure1 montre une vue générale du pont.

Le volume élevé de trafic routier, le systèmestructural flexible des poutres d’acier, la flexionalternée de la dalle et l’effet du biais (figure 2)

I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3 2 9

UTILISATION DE BÉTON ARMÉ DE FIBRES D’ACIER DANS LES DALLES DE PONTEN VUE D’AMÉLIORER LA DURABILITÉ AU DÉLAMINAGE

Bernard Pilon ing., Service de l’entretien, Direction des structuresBruno Massicotte ing., professeur titulaire, Génie civil, École Polytechnique de Montréal

Figure 1 : Pont de la rivière Chaudière.

Figure 2 : Effet du biais

Note : Considérons l’axe A-A, un axe perpendiculaire aux poutres du pont. Les déflexions relatives de chaquepoutre à leur intersection avec cet axe sont toutes différentes. Par exemple, le point d’intersection de l’axe A-Aavec la poutre 1, qui est plus près du centre de la portée que le point d’intersection avec la poutre 3, aura unedéflexion proportionnellement plus grande.

A

A

1

2

3Anglede biais

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sont autant de facteurs qui contribuent à solliciterfortement la dalle de ce pont sur le planmécanique. L’effet du biais est surtout importantdans le cas d’éléments travaillant dans le senstransversal au pont, comme la dalle ou les con-treventements. Chaque passage d’un véhiculelourd induit ainsi une distorsion qui accentue la sol-licitation mécanique dans ces éléments.

Au printemps de l’année 2001, la Directionterritoriale de Chaudière-Appalaches a mandaté laDirection des structures pour la préparation desplans et devis en vue de la réfection de la dalle dupont de la rivière Chaudière. La dalle existanteprésentait alors depuis quelques années des signesimportants de détérioration, surtout par délami-nage. Le délaminage est un phénomène qui seproduit lorsque le béton d’un élément fissure, leplus souvent dans un plan de faiblesse comme unlit d’armatures, et s’écaille par zones plus oumoins importantes. La figure 3 présente un exem-ple typique du délaminage qui était présent dansla dalle du pont de la rivière Chaudière avant lestravaux.

Le délaminage peut provenir de sources divers-es. L'infiltration d'agents corrosifs et le gonflementdes armatures dû aux produits de corrosion sontles causes les plus souvent citées. Cependant, lescharges cycliques qui induisent des efforts de flex-ion peuvent en être également la cause2. Il estainsi fort probable, dans le cas des dalles de pontoù les efforts de flexion sont importants, que lephénomène de délaminage soit lié à l'applicationdes charges cycliques, ce qui conduit en quelquesorte à une rupture en fatigue du béton. Le délam-inage se produit lorsque le lien entre le béton et lesbarres d’armature se brise. Les efforts de tractiondans les barres se transfèrent alors à la masse debéton par la butée des crénelures des barres d’ar-mature. Ce transfert d’effort induit dans le bétondes contraintes de traction radiales, perpendicu-laires aux armatures (figure 4). Lorsque le bétonn’est pas confiné, comme dans les dalles, les con-traintes de traction induisent des fissures qui sepropagent avec les cycles de chargement jusqu’àun décollement complet de la surface du béton auniveau du rang d’armature.

À cet effet, l'observation du mode de rupturemontré sur la figure 3 permet de tirer des conclu-sions intéressantes. On constate que le plan de fis-suration horizontal, bien qu'ayant débuté au droitd'armatures, ne s'est pas propagé dans le plan desarmatures alors que les aciers n'ont pas subi degonflement dû à la corrosion. Ceci tend à démon-trer que le problème de délaminage n’a été causéque par des efforts externes et il y a donc lieu depenser que les efforts cycliques de flexion en sontla cause.

L’expérience passée en matière de fibres d’aci-er a démontré qu’à partir d’un certain dosage,celles-ci pouvaient servir à diminuer les contraintes

dans les barres d’armature conventionnelles4 et àempêcher la propagation des fissures5, ce qui con-tribue à maintenir l'intégrité structurale des élé-ments. L’utilisation des fibres d’acier pour diminuerles effets du délaminage est donc apparue commeune solution intéressante. Afin de valider la viabil-ité de cette solution dans le cadre du remplace-ment de la dalle du pont de la rivière Chaudière,un projet de recherche a été entrepris par leMinistère en collaboration avec l’ÉcolePolytechnique de Montréal.

P R O G R A M M EE X P É R I M E N T A L

Le projet de recherche, dirigé par BrunoMassicotte, professeur de génie civil, et réalisédans le cadre des études de maîtrise de M. SteveNolet, comportait deux objectifs principaux. Le pre-mier consistait à reproduire en laboratoire les con-ditions prévalant sur le pont de la rivière Chaudièrealors que le second visait à quantifier les améliora-tions apportées par la solution retenue en ce qui atrait au délaminage et à la fissuration de la dallede béton. Ainsi, deux types de dalles ont été fab-riquées et testées. Le premier type reproduisait ladalle existante du pont alors que le second typeprésentait la dalle de remplacement proposée.

La solution retenue pour la dalle de remplace-ment, déterminée en début de projet par laDirection des structures, consistait à utiliser unedalle d'épaisseur accrue en béton renforcé defibres dans laquelle la quantité d'armature avaitété déterminée selon les règles classiques du Codedes ponts6. Ainsi, on s’attendait à ce que l'ajoutd'un volume de fibres permettrait d’éliminer ledélaminage, de contrôler l’ouverture des fissuresde flexion qui seront indubitablement induites parles charges routières et de réduire les efforts dansles armatures. L'épaisseur accrue de la dalle assur-erait un enrobage suffisant pour protéger les barresd’acier contre la corrosion tout en amenant unerigidité additionnelle au système structural.

Les poutres principales étant espacées de2591 mm, l'épaisseur de la nouvelle dalle a été

3 0 I N N O VA T I O N T R A N S P O R T AV R I L 2 0 0 3

Figure 3 : Délaminage vis-à-vis du rang d’armature supérieur (dans une section de dalle sciée).

Figure 4 : Transfert des contraintesd’une barre d’armature à la masse debéton.

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fixée à 220 mm. Le volume de fibres a été déter-miné en fonction des études réalisées sur les dallesde béton renforcé de fibres avec armaturesréduites4,7. Les critères de performance en ce qui atrait à la résistance post-fissuration du béton avecfibres dans le cas où les armatures sont réduitessont bien connus car le rôle des fibres est déce-lable. Toutefois, dans le cas du pont de la rivièreChaudière, le rôle des fibres est plus secondaire etil était moins bien cerné en début de projet. On adonc décidé arbitrairement, sur la base de l'expéri-ence acquise, d'utiliser le même type de fibres quecelui employé dans des projets antérieurs mais àun dosage réduit. Ainsi le choix s'est arrêté sur desfibres à crochets de 60 mm de longueur par 0,75mm de diamètre. Le dosage retenu a été de50 kg/m3 de béton.

Les essais ont été réalisés sur un montagereproduisant les conditions d'hyperstaticité desdalles de pont. Les spécimens, qui reproduisaientune tranche transversale d'une dalle, avaient unelongueur de 5 mètres et une largeur de 1 mètrealors qu’ils étaient supportés en quatre points,comme l’illustre la figure 5. Le programme expéri-mental a été réalisé avec des dalles modélisant lasituation existante au pont de la rivière Chaudière(béton armé et armatures) et le nouveau type dedalle (béton renforcé de fibres et armatures). Deuxtypes d'essais ont été réalisés : des essais dechargements statiques et des essais cycliques defatigue.

Le chargement statique a produit sensiblementle même type de comportement et par conséquentde fissuration sur les deux types de dalles. Bienque la dalle de béton armé avec fibres d’acier aitprésenté un comportement plus ductile après rup-ture que celle sans fibres d’acier, le chargement ini-tial a provoqué l’apparition sur les deux dalles defissures de flexion en moment négatif au-dessusdes appuis et en moment positif sous le point d'ap-plication de la charge. La rupture dans le cas de ladalle en béton armé s’est produite par poinçon-nement alors que pour la dalle en béton armé ren-forcé de fibres un mode de rupture par flexion aété observé.

Les essais cycliques quant à eux comportaientdeux étapes : la fissuration initiale et le charge-ment cyclique de la dalle. La charge initiale de fis-suration avait pour fonction d'endommager ladalle à un niveau comparable à celui auquel onpourrait réellement s'attendre sur un ouvrage lorsdu passage d'une charge lourde et occasionnelle.La charge cyclique a quant à elle été déterminéeen fonction des charges usuelles de camions quel'on s'attend à retrouver sur le réseau routierquébécois. Pour des raisons pratiques, chacun desessais de fatigue a été limité à 2,5 millions decycles, ce qui correspond à environ 5 années decharges cycliques lourdes prévisibles sur le pont dela rivière Chaudière en considérant les données decirculation. Malgré le nombre limité de cycles, lesobservations réalisées durant et après les essaisont permis d'en arriver à des conclusions claires.

Le chargement cyclique de la dalle en bétonarmé sans fibres a provoqué l’apparition d’unpatron de fissuration formant un quadrillage,comme l'illustre la figure 5. On peut conclure aisé-ment que la présence éventuelle d'un plan de fis-

suration, au niveau du premier rang d'armature,viendrait créer une séparation de l'enrobage desarmatures, ce qui favoriserait le détachement de cedernier en plaques, comme cela s’est produit sur lepont de la rivière Chaudière. Afin d'observer la for-mation d'un plan de fissuration parallèle à la sur-face au niveau des armatures, un carottage a étéréalisé sur la dalle soumise au chargementcyclique. Celui-ci a permis de confirmer la présenced'une amorce de fissure horizontale dans le plandes rangs d'armatures. Il est donc fort probableque des essais sur une période plus longueauraient conduit au délaminage du béton de ladalle.

Dans le cas des dalles renforcées de fibres,seules des fissures flexionnelles, exclusivementlocalisées en haut des appuis en moment négatif,se sont produites. De plus, ces fissures étaientbeaucoup plus fines que dans le cas de la dallesans fibres. Étant donné cette faible fissuration, etafin d'observer un endommagement plus sévèredes dalles renforcées de fibres, la sollicitation max-imale du chargement cyclique a été doublée à 200

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Figure 5 : Montage d’essai et patrons de fissuration de la face supérieure desdeux types de dalles testées à la fin des essais cycliques

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kN (au lieu des 100 kN initiaux) après 2,3 mil-lions de cycles pour une durée de 100 000 cyclesadditionnels. Cette amplitude représente deux foisla charge de service attendue. Malgré cette aug-mentation du taux de chargement à la fin de l'es-sai, la dalle renforcée de fibres n'a présentéaucune fissure perpendiculaire aux fissures princi-pales de flexion (voir figure 5). Ainsi le patron defissuration en forme de quadrillage observé pour ladalle en béton armé n'a pu se développer.

Bref, sous les charges cycliques, deux pointsmajeurs distinguent la dalle existante du pont de larivière Chaudière de la dalle proposée pour sonremplacement. Premièrement, l'ajout de fibres aubéton, combiné à l'augmentation de l'enrobagedes armatures, a permis d'éviter le développementde fissures parallèles aux barres d’armatures prin-cipales de flexion de la dalle. Ce sont ces fissuresqui, combinées avec des fissures de flexion, sonten mesure de former un patron de fissuration enquadrillage susceptible de causer le délaminage enplaques de l'enrobage supérieur du béton.Deuxièmement, la faible ouverture des fissures dela dalle en béton renforcé de fibres, constatée à lasuite des essais, permet à celle-ci de conserver sarigidité et de maintenir des fissures très faiblementouvertes une fois les charges enlevées. D'après lesrésultats obtenus, il apparaît clairement que cetype de dalle est en mesure de résister à la for-mation et à la propagation de fissures de délami-nage ce qui accroît la durabilité des dalles de pontfortement sollicitées par les charges routières.

R É A L I S A T I O N D E ST R A V A U X

Une fois la solution technique bien établie etson efficacité démontrée, il restait à procéder à lamise en œuvre. Le fort volume de trafic et l’im-portance stratégique du pont de la rivièreChaudière ont fait en sorte que, très tôt dans laplanification des travaux, la gestion de la circula-tion est devenue l’aspect le plus important. Afin deminimiser l’impact sur la circulation, la DirectionChaudière-Appalaches a prévu quatre phases pour

réaliser les travaux. Chacune des phases couvraitapproximativement une voie et demie des sixvoies de circulation existantes sur le pont.

Mélange de béton

À partir de plusieurs critères de durabilité et demise en œuvre, un mélange de béton composéd’un ciment avec fumée de silice (béton normalisétype V) a été retenu pour le projet. Comme cela aété expliqué dans la portion du programme expéri-mental, à la suite de l’expérience du Ministère, desfibres d’acier à un dosage de 50 kg par m3 ont étéemployées dans le mélange de béton. Une nou-veauté importante à souligner pour ces travaux aété l’exigence formulée au devis d’utiliser unmalaxeur stationnaire, ou « premix », pour lemalaxage du béton.

Les malaxeurs stationnaires permettentd’obtenir un bon malaxage des constituants dubéton8. Le but visé par l’utilisation de ce type demalaxeur, par opposition à un malaxage effectuédirectement à la bétonnière (camion toupie), étaitd’en arriver à une meilleure dispersion des fibresdans le mélange et à une meilleure homogénéitédes mélanges.

L’expérience du Ministère en matière de bétonarmé de fibres d’acier a en effet démontré qu’ilétait parfois difficile pour les entrepreneursd’ajuster le mélange et d’obtenir un béton uni-forme9. Avec ses 1915 mètres cubes, la quantitéde béton avec fibres d’acier à placer lors duchantier du pont de la rivière Chaudière corre-spondait au plus grand volume utilisé dans le cadred’un projet de pont sous la juridiction du Ministère.La quantité de béton de même que l’étalementdes coulées sur une très longue période de tempsont encouragé l’utilisation du malaxeur station-naire. Des bétonnières ont été employées pourtransporter le mélange de béton frais de l’usine demalaxage au chantier.

Coulée de convenance

Comme dans la plupart des chantiers où desvolumes importants de béton possédant des carac-téristiques particulières sont utilisés, une coulée de

convenance a été prévue. Celle-ci consiste en unerépétition avant le début des travaux de la produc-tion et de la mise en place du béton afin d’ajusterau besoin le mélange pour ainsi régler d’éventuelsproblèmes dans la mise en place au chantier.L’aspect intéressant de la coulée de convenanceréalisée pour ce projet a été l’essai par l’entrepre-neur d’une pompe à béton pour effectuer la miseen place.

L’utilisation de la pompe avait été interdite audevis puisque le Ministère appréhendait des prob-lèmes de mise en place liés au dosage et au typede fibres utilisées. Néanmoins, sur demande del’entrepreneur, et afin de vérifier la possibilité d’u-tilisation, un essai de mise en place avec la pompea été permis lors de la coulée de convenance.

La ligne de pompage correspondait endénivelée à la hauteur du tablier du pont de la riv-ière Chaudière par rapport au fond de la vallée, soit35 mètres. Un tuyau de pompage métallique d’undiamètre de 150 mm a été utilisé. Le but de l’en-trepreneur était de pomper le mélange sur le tabli-er du pont sans y accéder avec les camionsmalaxeurs.

Le mélange fourni a montré de très bonnes car-actéristiques au pompage. Il était très fluide à lasortie de la pompe sans pour autant subir de pertesrelativement au réseau d’air. Des problèmes d’in-compatibilité avec les adjuvants du béton et desproblèmes d’oursins qui seront traités un peu plusloin ont finalement empêché l’utilisation de lapompe à grande échelle sur le chantier. La couléede convenance aura tout de même permis de con-stater que le pompage du béton armé de fibres audosage employé est possible et éventuellementsouhaitable pour en faciliter la manipulation.

Chantier

Le béton armé de fibres d’acier de la dalle dupont de la rivière Chaudière a été mis en place surune période allant du mois de juin 2002 au moisde novembre de la même année. Les coulées debéton se déroulaient de nuit afin de minimiser lesimpacts sur les usagers et de profiter de tempéra-

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tures plus propices à la mise en place du bétondurant l’été. Les coulées se déroulaient par sec-tions de dalle d’une largeur variant entre 5 et 8mètres et d’une longueur variant de 22 à 32mètres. Le béton était déchargé du camionmalaxeur et directement mis en place dans les cof-frages au moyen du dalot de la bétonnière.

Les barres d’armature étaient réparties endeux lits avec un espacement de 160 mm entreles barres transversales. Malgré l’espacement rela-tivement serré des barres d’armature, la mise enplace du béton armé de fibres n’a présenté quepeu de problèmes. Il faut noter que sur une dallede plus de 8000 mètres carrés de surface, seulesquelques zones situées sous la surface de roule-ment ont présenté des nids de cailloux. Ce défautde surface est caractérisé par un manque d’en-robage des gros granulats et peut être attribué àune vibration incomplète du béton à l’état frais10.Ces défauts ont presque tous été concentrés prèsd’un joint de coulée et couvraient une surfaceinférieure à 0,1 mètre carré, alors que les plusimportants avaient une profondeur approximativede 100 mm. La méthode de réparation de cesdéfauts au moyen de mortier ou de béton est bienconnue et généralement assez facilement réalis-able. La figure 6 présente un de ces nids de cail-loux avec présence de fibres.

Un problème de formation d’oursins a égale-ment été constaté sur la livraison de béton dequelques camions, et ce, tout au long du projet.Les oursins sont des agglomérats de fibres qui seforment dans le béton à l’état frais; ils sontgénéralement dus à un malaxage excessif ou à unproblème de mise au point de mélange11. Lesoursins, dont le diamètre variait de 100 à 200mm, étaient enlevés de façon manuelle par lesouvriers responsables de la mise en place du bétonà l’avant du finisseur automoteur.

Il est difficile de connaître avec précision lacause de ce phénomène. Il se peut qu’une mau-vaise introduction des fibres à l’usine de malaxageen soit responsable. Il se peut également que cer-tains mélanges un peu plus raides en maniabilitéaient favorisé la formation des oursins. Il se peutmême qu’une trop longue période de malaxagedans les camions en soit l’explication. Dans le casde ce chantier, les conséquences ont été mineures.Il faudra cependant en venir à l’élimination de ceproblème en vue de l’utilisation éventuelle d’unepompe à béton à grande échelle sur un chantier.

La surface de la dalle a été finie à la règlevibrante pour certaines phases des travaux et aufinisseur automoteur pour les autres. Peu importela méthode utilisée, la dalle présentait, une fois

finie, une surface uniforme sans présence de fibresverticales en surface. Un traitement mécanique dela surface de la dalle durcie avant la pose de lamembrane d’étanchéité a été effectué. Ce traite-ment fait partie des pratiques habituelles duMinistère. Il consiste à projeter des billes d’aciersur la surface de béton afin d’éliminer touteaspérité. Dans le cas du pont de la rivièreChaudière, ce traitement enlevait également lesfibres d’acier lâches restées près de la surface. Lapose de la membrane d’étanchéité sur cette sur-face n’a présenté aucune difficulté particulière.

Les coûts soumissionnés du béton armé defibres d’acier pour ce pont se sont avéréssupérieurs de 15 % par rapport au coût du bétonsans fibres utilisé sur le pont de l’autoroute 73 au-dessus de la route 132 dont la réfection faisait par-tie du même contrat. Ces coûts comprenaient lafourniture, la mise en place et la cure du béton. Sil’on inclut tous les frais liés au remplacement de ladalle (armatures, membrane, signalisation, etc.),le surplus pour les fibres d’acier correspond à env-iron 5 % du coût. Cette augmentation des coûtssera cependant largement compensée par unedurée de vie accrue de la dalle car il ne faudraitqu'une dizaine d'années de durée de vie addition-nelle pour compenser le coût des fibres, et ce, enexcluant les coûts associés à l'entretien de mêmeque ceux reliés à la perturbation de la circulationlors de travaux.

C O N C L U S I O N

Les résultats obtenus lors des essais effectuéspar l’École Polytechnique laissent entrevoir unexcellent comportement mécanique à long termede la nouvelle dalle du pont de l’autoroute 73 au-dessus de la rivière Chaudière. L’ajout de fibresd’acier au béton semble en effet jouer un rôleimportant dans la diminution des dommagescausés par le phénomène du délaminage du bétondes dalles de pont.

L’utilisation d’un malaxeur stationnaire pourmélanger le béton, par opposition à un malaxage

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Figure 6 : Nid de cailloux avec présence de fibres.

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du béton directement à partir de camions, a permisd’obtenir un béton présentant une distribution uni-forme des fibres. La qualité du mélange tout aulong du projet qui s’est déroulé sur une période deplusieurs mois est demeurée constante, mis à partquelques problèmes ponctuels. Bien qu’il soit pos-sible de produire un béton d’excellente qualité, l’u-tilisation des fibres dans le béton demeure doncquelque peu problématique pour ce qui est de lamise au point du mélange et de la maniabilité dubéton frais.

La coulée du béton tout au long des travauxs’est effectuée sans grande difficulté bien quequelques problèmes ponctuels aient été notés. Lebéton armé de fibres s’est révélé presque aussimaniable qu’un béton conventionnel et la quantitéd’armature dans la dalle n’a pas posé de réel prob-lème de mise en place. Un dosage de 50 kg defibres par mètre cube de béton a été utilisé pour ceprojet mais cette quantité pourrait fort probable-ment être optimisée pour une utilisation future, cequi faciliterait le pompage, rendrait pluséconomique l’utilisation du béton armé de fibres etdiminuerait du même coup les possibilités de prob-lèmes lors de la mise en place.

En se basant sur les résultats obtenus au pontde la rivière Chaudière, la Direction des structuresdevra, en collaboration avec la Direction duLaboratoire des chaussées, déterminer s’il y a lieud’étendre l’utilisation du béton armé de fibresd’acier pour le remplacement ou la constructiondes dalles de pont fortement sollicitées par lescharges routières lorsque le système structural dupont est très flexible.

R É F É R E N C E S

1. MINISTÈRE DES TRANSPORTS DUQUÉBEC, DIRECTION DES STRUCTURES (2000).Système de gestion des structures, module inspec-tion, année d’inspection 2000.

2. ACI 408.2.R-92 (1992). « State-of-the-art report on bond under cyclic loads ». ACICommittee 408.

3. MINISTÈRE DES TRANSPORTS DUQUÉBEC (1996). Données sur la circulation parnuméro de route, de tronçon et de section, recueil1996.

4. MASSICOTTE, B., G DEGRANGE, A.BÉLANGER, K. MOFFAT et L. FRAGAPANE (1998).« Utilisation de béton haute performance avecfibres d’acier dans les dalles de pont en vue d’ac-croître leur durabilité, phase 2 », Rapport no EPM-CGS-1999-06.

5. NEVILLE, A. et J.J. BROOKS (1987).Concrete technology, Longman Scientific andTechnical, 438 p.

6. ASSOCIATION CANADIENNE DE NORMALI-SATION (1990). Calcul des ponts-routes, NormeCAN/CSA-S6-88.

7. MASSICOTTE, B. et A. BÉLANGER (2000).« Utilisation du BHPFA pour la conception desdalles de pont », Compte rendu du 7e Colloque surla progression de la recherche québécoise sur lesouvrages d’art, Transports Québec, UniversitéLaval, École Polytechnique de Montréal.

8. NEVILLE, A. (2000). Propriétés des bétons,Eyrolles, 806 p.

9. MASSICOTTE, B. et A. BÉLANGER (1999).« Construction de dalles de pont en BHP avecfibres d’acier », Compte rendu du 6e Colloque surla progression de la recherche québécoise sur lesouvrages d’art, Transports Québec, UniversitéLaval, École Polytechnique de Montréal.

10. MINISTÈRE DES TRANSPORTS DUQUÉBEC, DIRECTION DES STRUCTURES (2002).Manuel d’inspection des structures, instructionstechniques, Transports Québec, Université Laval,École Polytechnique de Montréal.

11. MASSICOTTE, B., K. MOFFAT et N. DZELE-TOVIC (1998). « Utilisation du béton armé defibres d’acier dans les dalles de pont », Compterendu du 5e Colloque sur la progression de larecherche québécoise sur les ouvrages d’art,Transports Québec, Université Laval, ÉcolePolytechnique de Montréal.

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