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43 MAI / JUIN 2012 N° 132 QUALITÉ CONSTRUCTION PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE ISOLATION THERMIQUE MOUSSE POLYURÉTHANE: DES ATOUTS DANS PLUSIEURS DOMAINES ISOLATION THERMIQUE MOUSSE POLYURÉTHANE: DES ATOUTS DANS PLUSIEURS DOMAINES Grâce à ses nombreux avantages, l’isolation thermique par projection de mousse polyuréthane est en plein développement. Cinq procédés d’isolation sous chape bénéficient d’ores et déjà d’un ATec favorable, tandis qu’un Pass’Innovation ouvre la voie en application murale. La vigilance étant de mise lors de la mise en œuvre, les recommandations de ces textes doivent être suivies et les applicateurs dûment formés. TEXTE : MARIE-PIERRE JOUAN PHOTOS : ICYNENE, ISOLAT FRANCE Photo Isolat France

ISOLATION THERMIQUE MOUSSE POLYURÉTHANE ......† DTU P92-703 Règles BF 88 – Méthode de justification par le calcul de la résistance au feu des structures en bois (février 1988)

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PATHOLOGIEMISE EN ŒUVRE

ISOLATION THERMIQUE

MOUSSEPOLYURÉTHANE: DES ATOUTS DANS PLUSIEURS DOMAINES

ISOLATION THERMIQUE

MOUSSEPOLYURÉTHANE: DES ATOUTS DANS PLUSIEURS DOMAINES

Grâce à ses nombreux avantages, l’isolationthermique par projection de mousse polyuréthane est en plein développement.Cinq procédés d’isolation sous chape bénéficient d’ores et déjà d’un ATecfavorable, tandis qu’un Pass’Innovation ouvre la voie en application murale.La vigilance étant de mise lors de la mise en œuvre, les recommandations de cestextes doivent être suivies et les applicateurs dûment formés.

TEXTE : MARIE-PIERRE JOUAN PHOTOS : ICYNENE, ISOLAT FRANCE

Photo Isolat France

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Les mousses polyuréthanesous Avis Techniques (ATec) du CSTBTitulaire Produit N° d’Avis Technique Limite de validitéAspa Europiso Isochape 20/10-193*V1 31/05/2013Mirbat Synersol-Isolege MK2 20/11-236 31/10/2014Isolat France Isolat Pur® 20/09-163*V2 30/11/2012

Isolat Sol® 20/11-237 31/10/2014Isotrie Isotrie 240 20/11-225 31/05/2014

Les cinq procédés sont sur la Liste Verte de la C2P (Commission Prévention Produits mis en œuvre) de l’AQC.Petit rappel : La Liste verte de la C2P (accessible sur http://listeverte-c2p.qualiteconstruction.com) est la liste des produits et/ou procédés,bénéficiant d’un Avis Technique (ATec) ou d’un Document Technique d’Application (DTA) en cours de validité, qui ne sont pas mis en obser-vation par la C2P. C’est la référence en la matière, car un produit peut faire partie d’une famille mise en observation et ne pas être lui-mêmemis en observation.

POUR EN SAVOIR PLUSTEXTES DE RÉFÉRENCE• NF DTU 26.2 Chapes et dalles

à base de liants hydrauliques(avril 2008).

• NF DTU 65.14 Exécution deplanchers chauffants à eauchaude (septembre 2006).

• NF P52-302 (DTU 65.7)Exécution des plancherschauffants par câblesélectriques enrobés dans le béton (mai 1993).

• NF DTU 52.1 Revêtements desol scellés (novembre 2010).

• NF P61-203 Partie communeau DTU 26.2 et au DTU 52.1 –Mise en œuvre des sous-couches isolantes sous chapeou dalle flottantes et souscarrelage (décembre 2003).

• NF DTU 20.1 Ouvragesen maçonnerie de petitséléments – Parois et murs(octobre 2008).

• NF P18-210 (DTU 32.1) Mursen béton banché (mai 1993).

• NF DTU 31.2 Constructionde maisons et bâtiments àossature en bois (janvier 2011).

• NF DTU 24.1 Travaux defumisterie – Systèmesd’évacuation des produits decombustion desservant un oudes appareils (février 2006)+ amendement A1 dedécembre 2011.

• NF DTU 25.41 Ouvrages enplaques de plâtre (février 2008).

• NF C15-100 COMPILInstallations électriques àbasse tension (octobre 2010)+ fiches d’interprétationF18 de mars 2011 et F19de juillet 2011.

• DTU P92-703 Règles BF 88 –Méthode de justification par lecalcul de la résistance au feudes structures en bois(février 1988).

SITES INTERNET• www.association-technique-

polyurethane-projete.fr,Association technique depolyuréthane projeté (ATTP).

L’isolation thermique par mousse polyuré-thane (PU) projetée in situ est pratiquéedepuis plus de 30 ans aux États-Unis, auCanada et dans l’Union européenne. EnFrance, deux sociétés appliquent ce procédé

depuis une vingtaine d’années. «Nous sommes, avecIsotrie qui est d’origine belge, les plus anciens appli-cateurs de mousse PU projetée ou injectée, signaleAlain Ricordeau, directeur technique d’Europiso.Depuis l’origine, Europiso utilise ces techniques en iso-lation de bâtiments industriels ou agricoles, mais aussidans les secteurs nautique, scénographique, du BTPou sur des ouvrages d’art comme le viaduc de Millau,par exemple. En 2004, nous avons mis au point le pro-cédé d’isolation thermique in situ par projection demousse polyuréthane sous chape ou sous dalle. »À ce jour, quatre sociétés bénéficient d’Avis Tech-niques (ATec) pour l’isolation thermique des solset planchers intermédiaires par mousse PU pro-jetée in situ, en neuf et en rénovation (voir tableauci-dessous). Cette mousse PU rigide cumule plu-sieurs avantages: conductivité thermique la plusfaible du marché, haute résistance à la compres-sion, remise à niveau des sols, légèreté, rapiditéde mise en œuvre, suppression des ponts ther-miques, imputrescibilité, durabilité… L’accent missur l’étanchéité à l’air par la RT 2012 et le label BBCprélude au développement de solutions murales.

Un ravoirage isolant et légerL’atout de ces produits d’isolation sous chape ousous dalle est de se substituer au ravoirage. Lamousse PU est projetée directement sur le sup-port et éventuellement sur les gaines. Elle adhèrefortement sur tous types de surfaces et comble lesmoindres interstices lors de sa phase d’expansion.En une seule opération, elle rattrape les défautsde forme des supports et enrobe les canalisationsdans la couche d’isolation. Le ravoirage devenantisolant, l’épaisseur totale de réservation en estréduite d’autant. La mousse projetée durcissanttrès rapidement, sa mise à niveau par ponçage estréalisée le jour même, et la mise en œuvre de lachape ou d’un plancher chauffant devient possible

dès le lendemain. Ce procédé peut aussi assurerune remise à niveau des sols. Par ailleurs, «notreproduit ne pèse que 4 kg/m2 en 10 cm d’épaisseur,c’est très peu comparé à un ravoirage, souligneThierry Louis, directeur général d’Isolat France. Surune maison de 120 m2, le gain de poids est de10 tonnes environ. Non seulement, la mousse per-met d’alléger les structures des bâtiments neufs,mais elle répond aux contraintes de la rénovation.»Classé SC1aCh (1), ce ravoirage en mousse PU peutservir de sous-couche isolante à un plancher chauf-fant à eau chaude basse température, réversibleou pas, ou à un plancher rayonnant électrique. Les procédés sous ATec ont une résistance à lacompression comprise entre 150 et 286 KPa (15 àenviron 28 tonnes) au m2. Leur masse volumiqueest de 40 kg/m3, sauf Isolat Pur® qui affiche 43 kg/m3.Ils répondent aux exigences des NF DTU 26.2,NF DTU 65.14, DTU 65.7 et s’appliquent à l’intérieurde locaux à faibles sollicitations mécaniquesdont les charges d’exploitation sont inférieures à500 kg/m2. Ces locaux, de type P2 ou P3 au sensdu classement Upec, sont à usage pédestre etactivités humaines usuelles (habitation, bureau,commerce…). Sont exclus les locaux avec siphonde sol, les planchers nécessitant une étanchéité àl’eau, de même qu’un emploi dans et au-dessus deslocaux à forte et très forte hygrométrie.

Une limite sur l’épaisseur«Les ATec en cours limitent l’épaisseur totale du pro-cédé à 12 cm, explique Maxime Roger, chef de la divi-sion hygrothermique des ouvrages au CSTB. Comme la mousse PU est projetée en couches suc-cessives de 2 à 3 cm d’épaisseur, les fabricants extra-polent aisément le comportement des faibles épaisseursen fortes épaisseurs. Sauf que ce procédé est destinéà supporter une chape flottante ou une dalle et nousignorons, à ce jour, quel sera son fluage, c’est-à-direson comportement à long terme sous une chargeconstante.» Thierry Louis estime que «nous pour-rions projeter plus de 12 cm mais les bancs d’essaisdu test de fluage avec un plancher chauffant ne sontpas prévus pour de fortes épaisseurs. Grâce à l’aide

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PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE

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que nous apporte le CSTB, les tests ont pu évoluer etnous attendons son rapport d’essai pour passer en20cm. D’autre part, nous avons un retour d’expériencede près de 30 ans en Europe pour les contraintes souscharge. Mais l’un des avantages de la projection in situest de permettre de moduler l’épaisseur en fonctionde la performance thermique recherchée.»«En termes de conductivité thermique utile, le polyu-réthane reste le plus performant des isolants usuels,reconnaît Maxime Roger. Pourtant, la qualificationde sa performance thermique est assez durepuisqu’elle impose un coefficient de vieillissementsur le lambda (2). Si ce dernier est un peu plus sévèreque pour les panneaux en PU, il permet de donner unlambda réaliste.» Alain Ricordeau précise que « lePU projeté a un lambda qui évolue. Au moment de laprojection, il est de 0,020 ou 0,021 W/m.K. Selonles marques, le lambda vieilli au-delà de 10 ans estde 0,025 ou 0,026 W/m.K, les valeurs étant donnéesselon la décision du CTAT (3). Tous les calculs ther-miques doivent être faits sur la base de ce dernierlambda, même si le vieillissement apparaît surtoutlorsque le produit est nu et très peu lorsqu’il est re-couvert par une dalle.»

L’atout d’une surfaceparfaitement plane L’isolation est projetée de façon uniforme sur toutela surface de plancher, épousant parfaitement lesupport, rattrapant toutes les irrégularités et fauxniveaux, contrairement aux isolants en panneauxou rouleaux. Le ponçage apporte une surface planeet lisse qui améliore l’état du support des ouvragesà venir (chape, dalle…). «Le DTU 26.2/52.1 donne desprescriptions de planéité des ouvrages qui sont re-prises pour le PU projeté, commente Maxime Roger.Les défauts de planéité ne doivent pas dépasser les 7 mm sous la règle de 2 m. Contrairement au PUprojeté qui forme une surface dure et continue, sansjoint, les isolants en panneaux peuvent présenter desdésaffleurs entre plaques. Des malfaçons existentaussi sur ces procédés. Pour gagner du temps, lescanalisations peuvent être intercalées entre les plaquesd’isolant, ou l’isolant posé directement dessus.» Dans

tous les cas, le risque réside dans le fait que le car-relage peut s’affaisser, se fissurer et casser. «Plusqu’à la compressibilité des isolants, les affaissementsde carrelage sont essentiellement dus à un mauvaissupport, ajoute un représentant de l’UNECB-FFB (4).Si le support présente une flèche de 7 mm sous la règle de 2 m et l’isolant une flèche de 6 mm, il n’estpas étonnant d’avoir un affaissement sous un creuxde 13 mm. L’isolation par mousse PU peut éviter cetteproblématique de support mal préparé.» La parfaiteadhérence du PU à son support offre une meilleurestabilité du sandwich dalle/mousse PU/chape etminimise les risques de fissuration de carrelage.«À ce jour, grâce à notre procédé et après plusieursmillions de m2 posés en France, nous n’avons pas eude sinistre», signale Thierry Louis.

Mélange en unité mobileLa mousse PU utilisée en sol est un bi-composantliquide (polyol et isocyanate) qui s’expanse à l’airlibre grâce à un gaz HFC (hydrofluorocarbone). La mise en œuvre s’effectue à partir d’une unitéde projection installée dans un véhicule équipéd’un groupe électrogène. L’application est réaliséepar un projeteur et un ponceur formés à ces tech-niques. «L’opérateur n’intervient pas sur les matièrespremières, explique Mathias Wessang, responsablede l’activité isolation de l’entreprise Shoenenberger(5).Elles sont délivrées par l’usine et justes transvaséesdans les cuves à l’intérieur de la camionnette. Lamachine de projection gère automatiquement le do-sage et le mélange des deux composants. Elle se meten défaut en cas d’écart sur le mélange ou s’il n’y aplus de matière qui sort du pistolet, par exemple.Nous sommes assurés d’avoir une mousse de qua-lité constante. Le tuyau de 40 m de long qui achemineles produits sous pression depuis la

“L’isolation par mousse polyuréthane peutéviter la problématique de support malpréparé”

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(1) SC1 : isolant noncompressible ; 1 : compression à 10 ansinférieure ou égale à 0,5 mm;a : habitation, bureaux…;Ch : utilisation en plancherchauffant.

(2) L’aptitude d’un matériauisolant à se laisser traverserplus ou moins par les flux dechaleur est déterminée par lecoefficient de conductivitéthermique, appelé « lambda»(�) et exprimé en W/m.K. Plusle lambda est faible, plus lematériau est isolant àépaisseur égale.

(3) Comité thermique de l’AvisTechnique.

(4) Union nationale desentrepreneurs céramistes dubâtiment de la Fédérationfrançaise du bâtiment.

(5) Concessionnaire du réseauIsolat France.

Illustration Isolat France

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Un ponçageprécisL’écrêtage de la surfaces’effectue par ponçagecirculaire. «Lorsque nous

arrivons au niveau fini, nous

le contrôlons par un maillage

d’un mètre environ à partir

de notre point de référence,explique Mathias Wessang, del’entreprise Shoenenberger(concessionnaire du réseauIsolat France). Les zones

restant à poncer sont alors

marquées d’une croix.

Comme il peut rester de

petites dépressions entre

celles-ci, elles sont comblées

par l’application d’une fine

couche de finition. Nous

ponçons cette dernière

surépaisseur et stoppons

lorsque les croix

réapparaissent par

transparence.»L’horizontalité est vérifiée àpartir du point de repère etla planéité sous la règle de2 mètres. L’isolation estalors prête à être revêtuepar une chape, un carrelagescellé… Une maison de100 m2 peut être traitée enune seule journée. Lesrésidus de ponçage sontéliminés par balayage etaspiration. Cependant, « il reste souvent des petits

morceaux de PU sur le

produit, explique MaximeRoger du CSTB. Si la chape

fluide est coulée directement

dessus, ces particules de PU

flottent et remontent à la

surface, ce qui pose des

difficultés aux chapistes.

Aujourd’hui, les ATec

imposent l’interposition d’un

film de polyéthylène entre la

mousse PU et la chape fluide,

mais certains ne respectent

pas ces prescriptions.»

Photo Isolat France

Ponçage de la mousse PUjusqu’à réapparition desmarques de niveau.

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PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE

camionnette jusqu’au lieu de projection est maintenuen température constante pour obtenir une bonneexpansion de la mousse.» Toutefois, «un mauvais ré-glage de la machine donne des mélanges n’ayant pasles caractéristiques souhaitées, alerte Maxime Roger.Il peut en résulter une mauvaise masse volumique,d’où une performance thermique inadéquate ou unemauvaise résistance à la compression, avec desrisques de désordres pour la chape posée au-dessus.Par ailleurs, tous les produits ne se valent pas. Laqualité des matières premières diffère suivant lesfabricants. Selon la réaction chimique, la vitesse d’ex-pansion…, les mousses sont plus ou moins rigides,plus ou moins denses, plus ou moins stables. La sta-bilité dimensionnelle du produit reste un point délicatlors de l’instruction d’une demande d’ATec. Nousavons constaté lors de prélèvements sur des chan-tiers, que l’échantillon de mousse pouvait changer deforme 48 heures après. Il n’est pas stable, soit parceque sa réaction chimique n’est pas terminée, soitparce que n’étant plus tenu par adhérence à ses sup-ports, il se relâche. Nous avons donc imposé d’avoirau moins des produits stables lors du prélèvement.S’ils ne le sont pas, c’est qu’ils présentent un risqueinconnu et non maîtrisé pour l’ouvrage. Aujourd’hui,les titulaires des ATec utilisent des matières premièresde bonne qualité et leurs produits ont une stabilitédimensionnelle satisfaisante.» Par ailleurs, «unecertification sur ces produits est en cours de déve-loppement pour 2012. Les produits sous ATec seraientcertifiés et réciproquement, les produits devraientêtre sous ATec pour être certifiés. Ce processus

permet de cadrer la mise en œuvre, l’assistance tech-nique, le contrôle du réseau d’applicateurs et lescaractéristiques produit», conclut Maxime Roger.

Respecter l’ordre de projectionAvant toute chose, le sol doit être propre et sec. «Lesrisques sont simples et les conséquences importantes,souligne Thierry Louis. La mousse PU n’adhère nisur un milieu humide, ni sur la graisse ou la poussièrequi s’interposent entre elle et le support. Heureusement,l’avantage est que sa réaction est visible immédia-tement, pas besoin d’attendre trois ou quatre jourspour constater qu’elle n’a pas de tenue.» Si l’humi-dité de l’air ambiant n’a pas d’influence sur laprojection, l’expansion et la qualité finale de lamousse, en revanche la température du supportdoit être comprise entre 5 et 35 °C. Les ATec détaillent bien l’ordre de projection à suivre. «Nous commençons par définir, avec un ni-veau laser ou à eau, un point de repère fixe au-dessusde l’isolant fini en préservant les réservations néces-saires pour la chape et le revêtement», commenteMathias Wessang. L’applicateur vérifie qu’il n’existeaucun vide (saignées…) sous les canalisations, si-non il convient de le combler par une projectionponctuelle de mousse PU. Il s’assure que toutesles canalisations ou nappes de canalisations sontsuffisamment bien fixées au sol, surtout au niveaude leur croisement, des passages de porte, etc. L’ap-plication commence par la projection sur les zonesde chevauchements des canalisations jusqu’à leurenrobage complet. Suit le traitement d’un point

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sensible toujours difficile à traiter avec des isolantsclassiques et auquel la mousse PU répond parfai-tement. «Nous projetons à la liaison murs-sol unboudin périphérique qui supprime les ponts ther-miques et assure l’étanchéité à l’air», décrit MathiasWessang. «Le non-respect de l’ordre de projection surles points singuliers peut conduire à des désordres,alerte Maxime Roger. L’applicateur ne doit laisseraucun vide d’air résiduel sous les gaines et notammentà leurs croisements. Si les canalisations ou nappesde canalisations sont mal fixées au sol, elles peuventse déplacer ou se soulever pendant la projection.L’applicateur doit les maintenir en place pendant qu’ilprojette dessus, de façon à les enrober intimement.Selon son savoir-faire et la qualité de la mousse, despoches d’air peuvent se former sous les canalisa-tions par défaut d’enrobage. Or un trou sous unenappe peut conduire à des désordres lorsqu’on mar-chera dessus.»La réalisation de l’isolation en partie courantecomprend « la projection d’une première couche de3 à 5 mm de mousse PU sur toute la surface, préciseThierry Louis. Elle joue un rôle d’apprêt, comme leferait une peinture.» Puis la mousse est projetéeau pistolet par couches successives de 1 à 3 cmd’épaisseur sur une largeur d’environ 1 m, 1,20 m.La mousse s’expanse de 30 fois son volume liquide

et sèche en quelques secondes. Elle devient ri-gide, renfermant alors plus de 90 % de cellulesfermées. Sa couche durcie peut recevoir trois mi-nutes plus tard une nouvelle couche, sans qu’il yait pour autant de temps limite pour intervenir. Lescouches superposées sont croisées ou pas, jusqu’àobtention de l’épaisseur demandée. Croisées, ellesaméliorent la planéité et permettent de diminuerle temps de ponçage. «La projection de plusieurscouches de faible épaisseur permet de conserver larésistance à la compression de la mousse PU, pré-cise Thierry Louis. Certains applicateurs projettenttout de suite de fortes épaisseurs. La mousse s’expansedavantage, perd de sa densité et sa performance di-minue. D’où l’intérêt de faire des prélèvementssystématiques d’échantillons sur les chantiers. Ilspermettent de valider le bon respect des épaisseursde projection.»

Bien placer la sous-couche acoustiqueLorsqu’une exigence acoustique s’impose, il fautajouter une Sous-couche acoustique mince (Scam)dans l’ouvrage. Mais attention, «contrairement à cequi se fait traditionnellement, la Scam ne doit pas êtreposée en dessous de l’isolation thermique en PU maisexceptionnellement au-dessus, insiste

“Le non-respect de l’ordre de projection sur lespoints singuliers peut conduire à des désordres”

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Début de la projection de mousse PU Isolat Pur® surles gaines.

Projetée sur un ancienplancher bois, la mousse PUrattrape toutes les inégalités de ce support.

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Protectionobligatoiredesintervenants«Le projeteur doit porter unecombinaison et un masqueéquipé d’un système deventilation assistée qui leprotège du gaz d’expansionet des particules quipourraient se trouver ensuspension dans l’air, préciseMathias Wessang, del’entreprise Shoenenberger(concessionnaire du réseauIsolat France). Cetéquipement qui a été reconnupar la Cram n’est pasnécessaire pour le ponçagepuisque la mousse a alorsdurci et est devenue inerte.»L’idéal est qu’il n’y ait aucunautre intervenant surle chantier pendant laprojection, ce qui estrelativement facile enmaison individuelle maispas forcément en bâtimentcollectif. «Si les applicateurssont protégés, les intervenantsdes autres corps de métierqui peuvent se trouver dansune autre pièce ne le sontpas, s’inquiète MaximeRoger du CSTB. Ils sontpeut-être soumis à desexpositions plus ou moinsimportantes ou plus ou moinslongues… Peut-être faut-ilprévoir des dispositifs deprotection pour cespersonnes, c’est un pointd’interrogation.»Attention, l’adhérence de la mousse PU sur toussupports peut devenir undéfaut. Aussi, toutes lessurfaces susceptibles derecevoir des projections departicules doivent êtreprotégées (menuiseries…).Le local doit être vide et la projection effectuéeavant la réalisation despréparations des mursou des enduits.

Photo Isolat France

Maxime Roger. La performance de l’ouvrage compre-nant une Scam posée sur du PU projeté perd 1 ou 2 dBpar rapport à un ouvrage contenant une Scam seule,mais elle permet d’atteindre des niveaux d’affaiblis-sement aux bruits de chocs compatibles avec le respect de la réglementation.» Les Scam doiventbénéficier d’une certification CSTBat « Sous-couches acoustiques minces» et d’une classe decompressibilité SC1a1, SC1a2 ou SC1aCh pour unepose sous plancher chauffant. Leur indice d’affai-blissement aux bruits de chocs doit présenter undelta Lw minimum de 19 dB. «Normalement, laScam ne doit pas être percée pour ne pas dégraderses performances acoustiques, explique ThierryLouis. Nous avons fait des essais avec le CSTB enaccord avec le fabricant de la sous-couche. Ces testsont démontré qu’il n’y avait pas d’altération de sa per-formance acoustique lorsqu’elle est percée, puisqu’elleest directement posée sur la mousse PU. Notre ATecest donc le seul autorisé à mettre en œuvre n’importequel plancher chauffant sur notre procédé, mêmeagrafé. Le delta Lw obtenu est de 18 dB.» Dans lesautres cas, seuls les planchers rayonnants élec-triques livrés en trames adhésives sont autoriséssur les sous-couches acoustiques minces.

Procédé de sol adapté en murIsolat France bénéficie d’un Pass’Innovation pourson procédé Isolat Mur (6), une application muralede son procédé pour sol ; la mousse rigide et à cel-lules fermées est identique et possède les mêmescaractéristiques. Son domaine d’application vise les

murs en maçonneries de petits éléments (NFDTU 20.1) et les murs en béton banchés (DTU 23.1).La méthodologie du chantier suit le même proto-cole qu’en projection de sol. Une fois en contact avecle mur, la mousse adhère quasi immédiatement ausupport, sans couler: elle rattrape tous les petitsdéfauts de surface, colmate les joints mal comblés,les microfissures et supprime les ponts thermiques.L’épaisseur est comprise entre 5 et 12 cm maxi-mum. «Une couche de 6 cm d’épaisseur isole aussibien que 10 cm de laine de verre classique ou 8 cmde polystyrène, relève Thierry Louis. Ce qui assureun gain de surface habitable en construction neuveoù le m2 coûte cher». Cette mousse n’a pas obligation d’être protégée parun pare-vapeur. «L’étanchéité à l’air est garantie surtoute l’épaisseur de l’isolant et sur toute la surface dumur, insiste Thierry Louis. Elle ne se fait pas au dosde la plaque de plâtre comme le ferait un pare-vapeur,mais contre le mur de façade. Même si les occupantsplantent un clou à travers la plaque de plâtre, ellerestera étanche à l’air. En cela nous nous inscrivonsdans la RT 2012 et le label BBC.» Maxime Rogernuance: «Il est indéniable que la mousse projetée vientétancher la surface sur laquelle elle est projetée. Maisà ce jour, il n’existe pas d’évaluation sur ces procédésen tant que “système global” d’étanchéité à l’air, enparticulier en ce qui concerne le traitement des pointssinguliers et la jonction avec les autres parois. »Le produit n’étant pas destiné à rester apparent,sa surface n’est pas poncée. «Une lame d’air de 3 cmenviron est souvent aménagée entre la mousse et le

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parement en plaques de plâtre pour permettre lepassage des gaines électriques ou sanitaires», pré-cise Mathias Wessang. De son côté, Thierry Louisrappelle que « la mousse PU n’absorbe pas l’eau etest imputrescible. De plus, avec un coefficient de ré-sistance à la diffusion de la vapeur d’eau (� = 80) (7),elle offre une bonne perméabilité à la vapeur d’eau.Elle ne vieillit pas et ne bouge pas dans le temps.Dans 10-15 ans, le bâtiment aura toujours la mêmeperformance énergétique, à l’inverse d’autres maté-riaux qui se tassent, moisissent ou sont attaqués pardes rongeurs ou des insectes.»

Réseaux et formationPlus délicate qu’il n’y paraît, la mise en œuvre desmousses PU doit être réalisée par des applica-teurs formés et avertis. Elle est toujours réaliséepar deux opérateurs. «Tout le monde ne peut pass’inventer projeteur, déclare Thierry Louis. C’estune profession qui doit être encadrée et les applica-teurs doivent recevoir une réelle formation dans letemps.» Les sociétés citées dans cet article dis-posent de leur propre réseau de professionnelsqu’elles forment à leur produit et aux bons gestes

de la mise en œuvre. Ce cursus comprend uneformation chez le constructeur de la machine àprojeter, dont la maîtrise et l’entretien sont déter-minants pour la qualité de la mousse. Puis vient lapratique sur le terrain: les applicateurs sont sui-vis tout au long de l’année et peuvent bénéficierd’une assistance technique à leur demande. Outre la reconnaissance de la qualité de la moussesur le chantier, la formation intègre les procéduresde mise à disposition d’échantillons pour le CSTB.Les candidats sont souvent des carreleurs ou desposeurs de plancher chauffant. En s’appropriantcette technique d’isolation, ils deviennent maîtresde leur support et de l’ouvrage qui vient dessus.Ils peuvent ainsi offrir une offre globale en suppri-mant les responsabilités en cascade. Bien quel’investissement en matériel soit un frein, environ100000 euros, beaucoup veulent devenir projeteur.«Reste qu’il est possible d’acheter une machine sansavoir de compétence, déplore Alain Ricordeau. Afinde mieux cadrer la profession, l’Association techniquedu polyuréthane projeté (ATPP) a pour objectif de ras-sembler les applicateurs projeteurs autour d’unecharte de qualité.» ■

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(6) Pass’Innovation «vert»n° 2011-104, valide jusqu’au10 février 2013.

(7) Une grande perméance à lavapeur d’eau ou faiblerésistance à sa diffusioncorrespond à � = 1. Plus lavaleur de � augmente, moinsle produit est perméable à lavapeur d’eau et plus il résisteà sa diffusion.

“Les applicateurs sont souvent des carreleurs ou desposeurs de plancher chauffant. En s’appropriant cettetechnique d’isolation, ils deviennent maîtres de leursupport et de l’ouvrage qui vient dessus”

L’agrafage d’un plancherchauffant directement dans lamousse PU ne dégrade pas saperformance thermique.

Coulage de la chape liquidedirectement sur la mousse PUsimplement recouverte d’un filmpolyéthylène.

La mousse comble tous lesponts thermiques autour desévacuations.

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Photos Isolat France

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Utilisé depuis plus de 25 ans au Canada,le procédé Icynene LD-C-50™ bénéficie dumarquage CE et d’un DTA (1) du CSTB pour l’application sur murs à ossaturebois et d’une Enquête de TechniqueNouvelle du bureau de Contrôle AlphaContrôle qui assure en décennale tous lesautres champs d’application. Ce procédédiffère des mousses polyuréthane, tantpar sa composition que par lescaractéristiques qui en découlent.«Produite à partir de deux composantsliquides (un catalyseur MDI [2] et une résinepolymère en phase aqueuse, le LD-C-50™B-Side Resin), la mousse s’expanse avec lavapeur d’eau sans aucune émanationtoxique, commente Isabelle Bonali,dirigeante de Somari Diffusion,distributeur du procédé en France. Outrela projection, elle peut être injectée entredeux cloisons, par exemple. La mousseprend 100 fois son volume liquide ens’expansant. Pour 1 mm projeté, vousobtenez en 5 secondes 10 cm d’une moussealvéolaire, très souple, composée à 99 %d’air, soit moins d’1 % de chimie résiduelledans le produit fini.» La rapiditéd’expansion de la mousse lui permet des’infiltrer dans tous les vides etdiscontinuités des parois pour éliminertoute pénétration d’air extérieur et réduireles ponts thermiques. Très légère(8 kg/m3) et très adhérente, elle ne setasse jamais. Son élasticité et sasouplesse résistent aux mouvements

structurels du bâti et pérennisentl’isolation et l’étanchéité à l’air. Avec unlambda de conductivité thermique utile de0,042 W/m.K, la mousse est moinsperformante que les polyuréthanes etdoit, pour compenser, se poser en plusforte épaisseur (entre 40 et 240 mm). En contrepartie, sa structure à cellulesouvertes offre une bien meilleureperméance à la vapeur d’eau (� = 3,3) etfavorise l’évacuation de l’humidité, leprincipal agent de dégradation du bâti.«Notre mousse est le seul isolant dumarché à offrir à la fois une bonneperméance à la vapeur d’eau et une bonneétanchéité à l’air durable dans le temps»,insiste Isabelle Bonali. L’application enconstruction bois est effectuée parremplissage des caissons en bois– montants, traverses et entretoiseshorizontales – adossés sur un supportrigide (des panneaux de contreventementplacés côté extérieur). Pour desapplications sur murs maçonnés, elles’opère entre une ossature de plaquistes.En toiture, elle est projetée sur le soldirectement pour les combles perdus, ousur un film HPV en sous-toiture, entre desrails de plaquiste. Dans toutes les zonesvisitables, elle sera recouverte par unpanneau de finition plâtre. La projections’effectue, de bas en haut, en une passe

(des ajouts d’épaisseur sont possibles). Lamousse remplit instantanément tout levolume à isoler en totale adhérence avecses parois, sans se tasser. Pour faciliter ladécoupe de la surépaisseur, l’applicateurremplit une traverse sur deux. La surfacetraitée est de 30 à 40 m2/h environ. Letraitement des points singuliers, tels quele calfeutrement des menuiseries, leraccord bas des fenêtres et les raccordssol et plafond, est développé dans le DTA.Concernant l’installation des réseaux defluides et d’électricité, trois configurationssont possibles. Ils peuvent être installésdans le vide ménagé entre la mousse et leparement intérieur, sauf en ERP où laprésence de cette lame d’air n’est pastolérée eu égard à la sécurité incendie.Ils peuvent être insérés dans des gaines,placés dans les caissons et bien fixés afind’éviter leur déplacement lors de laprojection de la mousse qui les recouvre.Enfin, ils peuvent être posés en apparentsur les parements intérieurs. À propos de la sécurité incendie, «notremousse qui n’est pas classée au feu estauto-extinguible, précise Isabelle Bonali.Elle ne goutte pas et ne dégage pas de gaztoxique. C’est le parement de finition qui larend résistante au feu, BS1D0 derrière uneplaque de plâtre (voir l’Agrément TechniqueEuropéen ETA-08/0018).» ■

ALTERNATIVE AU POLYURÉTHANE

UNE MOUSSE EXPANSIVE ENPHASE AQUEUSE

50 Q U A L I T É C O N S T R U C T I O N • N ° 1 3 2 • M A I / J U I N 2 0 1 2

PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE

(1) Document Technique d’Application (DTA) n° 20/10-173. (2) Diphenylmethane, 4-4 d’isocyanate.

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Très aérée et très souple,la mousse est projetée selon unangle de 90°, de bas en haut, enune seule passe.

Découpe du surplus demousse avec une scie sabre. La surface est prête pour la posede cloisons sèches ou autres.

Avant projection de la moussedans une maison à ossature bois.

Après projection: la mousseisole les murs et les plafonds touten laissant respirer le bois.

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51M A I / J U I N 2 0 1 2 • N ° 1 3 2 • Q U A L I T É C O N S T R U C T I O N

Photos Icynene