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IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTEMENT : professeur des écoles LE RECIT AU CYCLE 3: une variété d’entrées, une variété d’apprentissages, une variété de plaisirs GAUTHIER Delphine DIRECTRICE DE MEMOIRE : Mme AUBRY ANNEE :2003 N° de dossier : 0001821J

IUFM DE BOURGOGNE · compréhension globale de l’oeuvre, et l’explication de textes qui vise à la compréhension d’un texte bref, en donnant aux élèves un maximum d’informations

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IUFM DE BOURGOGNE

CONCOURS DE RECRUTEMENT :professeur des écoles

LE RECIT AU CYCLE 3:une variété d’entrées, une variété d’apprentissages, une variété de plaisirs

GAUTHIER Delphine

DIRECTRICE DE MEMOIRE : Mme AUBRY

ANNEE :2003 N° de dossier : 0001821J

SOMMAIRE

INTRODUCTION...............................................................................................................p01

PREMIERE PARTIE : Comment choisir les récits à introduire à l’école parmi les ouvragesde la littérature de jeunesse ? ...........................................................................p03

1- Historique de la didactique de la littérature...............................................................p042- Essais de définition de « la littérature ».....................................................................p053- Le corpus des textes littéraires à introduire à l’école.................................................p064- Définition de « la littérature » par les programmes officiels......................................p07

DEUXIEME PARTIE : La compréhension littéraire : la structure et les outils de lanarration.............................................................................................................................p10

1- La structure du récit..................................................................................................p112- Le temps dans le récit...............................................................................................p133- Auteur- narrateur dans le récit..................................................................................p15Bilan de la deuxième partie..........................................................................................p19

TROISIEME PARTIE : Interdisciplinarité et pluridisciplinarité par le récit...........p20

1- Découvrir le monde par le récit...............................................................................p212- Découvrir le temps et l’histoire par le récit.............................................................p253- Découvrir l’art par le récit.......................................................................................p27Bilan de la troisième partie.........................................................................................p32

CONCLUSION.................................................................................................................p33

BIBLIOGRAPHIE...........................................................................................................p35

ANNEXES

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Introduction

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Après une évolution considérable de 1880 jusqu’à nos jours, la littérature a maintenant trouvé uneplace priviligiée à l’école.

Pour ce qui est de la littérature de jeunesse, elle est encore trop sous utilisée. Pourtant, elle est unréservoir de textes de fiction particulièrement adaptés aux enfants d’aujourd’hui. En effet, lalittérature de jeunesse a l’avantage d’offrir une diversité des formes et des genres, avec entre autreles albums, les recueils de poèmes, les bandes dessinées et les récits, et des atouts qui lui sontspécifiques comme l’image et l’humour.

Dans le corpus des « classiques » comme dans les nombreuses productions récentes, les enfantspeuvent trouver avec bonheur des textes de grande qualité. Le récit permet tout particulièrement untravail enrichissant : le conte, la fable, la légende, le mythe, la nouvelle, le roman, l’épopée, latragédie, le drame, la comédie et le fait divers en font partie.

Cependant, cette diversité n’est pas suffisante. En effet, l’exploitation- même du récit est àdiversifier.

Mais alors, une fois les textes choisis, comment varier les entrées, les apprentissages et les plaisirsen exploitant le récit ?

C’est ce que nous allons étudier dans une réflexion qui comporte trois parties et qui s’appuie surdes séquences menées en première et en deuxième année d’IUFM, mais aussi observées en stagesde préprofessionnalisation en université.

« A l’école primaire, la littérature est considérée comme un ensemble de textes, dont la qualitélittéraire ne fait aucun doute » (Littérature. Documents d’application des programmes. Ministèrede l’Education nationale.2002). Le récit qui prend place dans cet ensemble de textes doit aussi avoirune qualité littéraire reconnue. Avant même d’introduire les textes narratifs en classe, l’enseignantdoit s’interroger sur la nature de ces textes.

Nous allons donc tout d’abord observer la didactique de la littérature à l’école de 1880 jusqu’ànos jours, des essais de définition de « la littérature » par des écrivains, le corpus des texteslittéraires à introduire à l’école et enfin la définition de « la littérature » proposée par les programmesofficiels afin de pouvoir effectuer un choix pertinent parmi tous les textes narratifs offerts par lalittérature de jeunesse.

Puis nous analyserons le genre spécifique qu’est le récit et qui permet aux élèves un travail riched’inrérêts sur la structure et les outils de la narration tels que le temps et les points de vue desnarrateurs.

Enfin, nous étudierons l’interdisciplinarité et la pluridisciplinarité par le récit qui peuvent ainsi offrirla possibilité aux élèves de découvrir le monde, le temps, l’histoire et l’art.

Afin d’effectuer un travail plus approfondi sur le récit, il est nécessaire de centrer l’étude sur uncycle uniquement : le cycle des approfondissements.

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Comment choisir lesrécits à introduire à

l’école parmi lesouvrages de la

littérature de jeunesse ?

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1 - Histoire de la didactique de la littérature.

Afin de rappeler l’historique de la didactique de la littérature, il sera intéressant de répondre auxdeux questions suivantes :

- Comment la littérature a-t-elle été enseignée dans les classes ?- Quels rapports l’école et le fait littéraire entretiennent-ils ?

1 - Avant 1880.

Les motivations et les compétences des élèves sont alors assez homogènes. L’école met en valeurla mémoire : lire signifie mémoriser les modèles. La lecture est un entraînement systématique àl’écriture qui est considérée comme une pratique d’imitation. En effet, savoir imiter signifie êtrefamilier avec les grands auteurs latins. En imitant les grands modèles de l’antiquité, la méthode delecture est centrée sur l’analyse grammaticale et rhétorique. Il s’agit donc de vérifier si les textesrespectent les lois de syntaxe et de style.

2 - De 1880 à 1914.

C’est la période du grand développement de l’imprimé et de l’accroissement de la population delecteurs potentiels. Apparaissent alors des conflits : faut-il encore donner la priorité à la littératurelatine et continuer à faire de la rhétorique la discipline reine des disciplines littéraires ?

En 1895, la tâche du maître n’est plus de décomposer les textes syntaxiquement mais de susciterl’émotion des enfants devant « l’harmonie des mots et l’éclat des images ». On pense ainsi que lireles grands écrivains français sert à acquérir des références partagées présentées comme lefondement de la sensibilité et de l’esprit national.

Cela correspond à un développement de l’usage républicain de l’école, l’objectif de l’écolerépublicaine étant double : l’apprentissage de la langue et l’initiation aux textes, tout en garantissantl’égalité des chances pour tous les élèves.

3 - De 1914 à 1965.

La littérature est de plus en plus considérée comme l’illustration d’un patrimoine culturel qu’il fautvénérer. Ce patrimoine est à transmettre grâce à la littérature qui constitue une identité collective.L’école veut former l’élève au respect des « normes esthétiques et morales » en enseignant lesgrands auteurs et leurs chefs-d’oeuvre.

L’école veut ainsi que l’élève ait envie d’imiter ces grands auteurs. L’enseignement de l’histoirelittéraire apparaît d’ailleurs à cette même époque sous deux formes : la lecture suivie, qui vise à lacompréhension globale de l’oeuvre, et l’explication de textes qui vise à la compréhension d’un textebref, en donnant aux élèves un maximum d’informations sur le contexte du texte et notamment sur lavie de l’écrivain.

4 - De 1965 à 1980.

C’est la période de crise de la lecture scolaire. Trois causes sont à l’origine de cette crise :

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- le public scolaire a beaucoup augmenté et s’est diversifié, entraînant ainsi des niveaux différentschez les élèves,

- les disparités sociales, familiales et culturelles apparaissent dès 1957,- les pratiques individuelles des objets culturels tels que la télévision ont des conséquences sur

l’apprentissage de la lecture, le maître n’ayant aucun pouvoir sur ces objets.

De plus, le corpus des livres se modifie car de nouveaux auteurs apparaissent et le concept detextes s’élargit avec les bandes dessinées, les publicités ou les chansons, par exemple. De nouveauxenjeux sont ainsi assignés à l’enseignement de la lecture.

L’école doit tenir compte de l’hétérogénéité des élèves et de la diversité culturelle et des loisirs.L’enseignement de la lecture se voit attribuer des finalités plus réalistes telles que le besoin decommuniquer, et plus psychologiques et pédagogiques telles que l’autonomie de l’individu etl’épanouissement de la personnalité des élèves.

Finalement, les sciences de références telles que la linguistique, la sociologie ou la psychologiecontribuent aussi à la prise de conscience de l’hétérogénéité des élèves.

5 - De 1980 jusqu’à aujourd’hui.

Depuis 1980, l’école revient aux valeurs de la lecture supplantées dans les années 70 par lesvaleurs de la communication. En effet, on constate que le savoir lire est à la base de toute réussitescolaire. La lecture est alors définie comme une avtivité de compréhension.

Les questions sur les fins de la lecture ( pourquoi faut-il lire et que faut-il lire ? ) font place auxmoyens sur la lecture ( comment lire ? ). Le débat idéologique s’est donc déplacé vers une réflexionméthodologique.

2 - Essais de définition de « la littérature ».

Plusieurs écrivains, des critiques et des sociologues ont essayé de définir un texte littéraire :

l - «Est littéraire un texte qui ne renvoie à aucune réalité, mais qui crée lui-même sa réalitéfictive» (Käte Hamburger).

- « Lire un texte comme littéraire, c’est s’attendre à ce que tout élément y fasse signe» (Th.Aron).

- «Est littéraire ce qui est désigné comme tel par l’élite des lecteurs « dominants »» (Bourdieu).- « Il n’existe pas de traits communs à l’ensemble des œuvres littéraires qui constitueraient les

conditions pour qu’un texte soit littéraire. « Littérature » désigne une série d’attitudes que nousprenons à l’égard d’un champ des discours plutôt qu’une propriété interne de ce champ » (Searle).

- « L’intérêt de la lecture littéraire peut être envisagé sous trois angles : lire dans un texte un « pour soi » (c’est la lecture comme information culturelle : l’œuvre fait entendre la voix d’un sujet,et, derrière lui, de son époque), un « pour moi » (c’est la lecture comme support d’unréinvestissement personnel : le texte traverse le temps pour venir me parler de ce que je suis), et

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également un « pour tous » (c’est la lecture comme miroir universel : il y a dans l’objet littéraire unedimension universelle où chaque lecteur peut se reconnaître indépendamment de sa situation » (V.Jouve).

- « C’est toujours la lecture qui décide du littéraire. Il existe des écrits sans lecteurs, mais non delittérature sans lecture. En littérature, toute évaluation esthétique passe par la lecture, qu’il s’agisse dufameux jugement de la postérité ou de celui de l’écrivain lui-même, lequel n’est tel que s’il sait dumême coup écrire et se lire » (M. Picard).

- « Un texte littéraire est une machine paresseuse qui exige du lecteur un travail coopératifacharné pour remplir les espaces de non-dit ou de déjà- dit restés en blanc » (Umberto Eco).

- D’après Poslaniec, les thèses de Jauss et Iser impliqueraient l’idée du « texte littéraire commeconstamment ouvert, inépuisable, capable d’accepter des interprétations que l’auteur,historiquement, ne pouvait pas même supposer », et également l’idée suivante : « le véritable écrivaincrée délibérément une œuvre qui se prête à de multiples interprétations ». Selon Poslianec toutefois,tout ce qu’on peut trouver dans l’œuvre n’est pas forcément délibéré de la part de l’auteur… « Unefois le livre achevé, publié, c’est comme si l’émetteur était mort… Il n’y a aucune rétroactionpossible concernant ce pseudo message (le livre). Il ne s’agit donc pas de communication ».

l Käte Hamburger rompt totalement avec la tradition littéraire en observant que la réalité d’untexte n’est pas à chercher ailleurs que dans lui-même.

Th. Aron se place dans la perspective du lecteur en affirmant que dans un texte littéraire il n’y apas de hasard, ni d’inutile.

Searle s’accorde avec le sociologue Bourdieu pour dire que ce sont les lecteurs dominants quidécident si un texte doit être littéraire ou non, mais Searle ajoute que le caractère littéraire est dansl’attitude que prend le lecteur vis-à-vis des textes.

V. Jouve propose trois angles de lecture d’une œuvre littéraire. Afin de mieux comprendre sonpoint de vue, transposons ces trois angles de lecture sur Les Misérables de Victor Hugo. La lectured’un « pour soi » reviendrait à lire des renseignements sur la manière de vivre des Parisiens au 19e

siècle. La lecture d’un « pour moi » rappellerait au lecteur la façon dont il a été battu par sa mère àtravers le personnage de Cosette. Enfin, la lecture d’un « pour tous » reviendrait à intéresserhumainement le lecteur face à des personnages qui vivent et qui souffrent.

Alors que M. Picard précise qu’il ne faut pas étudier la littérature contemporaine car sa qualité estincertaine par rapport à une bonne littérature qui a su traverser les siècles, Umberto Eco affirmequ’un livre ne devient tel que dans le dynamisme du lecteur, quand il lit ce texte rempli d’implicites etd’ellipses.

Finalement, Jauss et Iser, deux critiques allemands, précisent qu’un texte peut toujours êtreinterprété différemment car les lecteurs sont tous différents et que l’écrivain qui crée une œuvre tropclaire n’est pas un véritable écrivain.

Il est donc difficile de donner une définition générale du caractère littéraire ou non d’une œuvre,chaque auteur ayant sa propre conception du mot « littéraire ».

3 – Le corpus des textes littéraires à introduire à l’école.

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l Deux positions dominantes peuvent être observées pour définir le corpus des textes littérairesà introduire à l’école.

- Tout d’abord, la première position vise à limiter la littérature à sa « sphère deproduction restreinte » (Bourdieu). Il s’agit d’un conception intensive de la culture où lalittérature est un enseignement homogène et limité d’œuvres définies, précises et reconnuescomme telles. Les pratiques qui accompagnent ces textes sont des pratiques de lecturesavante. Cette première position se situe dans la perspective de la fin du 18e siècle jusqu’en1960.

- Puis la seconde position vise une littérature considérée dans sa « sphère deproduction large ». Il s’agit d’une conception extensive de la culture. Les genres culturelsdeviennent hétérogènes et la littérature intègre les genres dits « mineurs », tels que lascience-fiction et les écrits journalistiques, ainsi que les genres qui ne sont pas uniquementtextuels tels que la bande dessinée, la chanson et le cinéma. Cette seconde position peut setrouver dans l’enseignement des années 1970.

l Finalement, pour choisir un corpus de textes, trois critères doivent être combinés :- il faut des textes à la portée des élèves et qui les intéressent,- il faut des textes qui motivent et qui intéressent les enseignants,- il faut des textes massivement diffusés et valorisés par l’institution culturelle, c’est-à-

dire des textes qui donnent lieu à des adaptations ou à des réécritures dans les médias.

Ces trois critères ont chacun leur importance et doivent être équilibrés les uns par rapport auxautres. En effet, si un enseignant valorise à l’excès le premier critère, les élèves seront maintenus dansce qu’ils connaissent uniquement. En revanche, si un enseignant valorise à l’excès le second critère,les élèves n’auront pas de vision d’ensemble mais une vision focalisée sur les préférences del’enseignant. Enfin, si un enseignant valorise à l’excès le troisième critère, il risque de conserver destextes trop difficiles pour les élèves.

4- Définition de « la littérature » par les programmes officiels.

Ce sont les instructions officielles qui vont réellement pouvoir nous guider dans notre choix desrécits à introduire à l’école. Pour cela, nous allons observer quelle est la définition de la « littérature »donnée par les programmes officiels. Cette définition qui englobe la littérature de jeunesse en général,concerne donc aussi le récit en particulier.

l Les programmes officiels de l’école de 1995 ne définissent pas la littérature par rapport à lanon littérature, mais ils recommandent, dès le cycle des apprentissages fondamentaux, des « texteslittéraires très simples », et pour le cycle suivant, « des textes littéraires accessibles aux élèves ». Letexte littéraire semblerait alors se distinguer par sa relative difficulté d’accès. Cette difficulté, tient-elle

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au contenu du texte, à des particularités de forme, au choix de ses constituants linguistiques ? Outient-elle au statut de son auteur, reconnu dès le départ comme un écrivain exceptionnel ?

Il est possible d’essayer de répondre à ces questions en observant la place de la littérature àl’école élémentaire décrite par l’institution elle-même. Dans l’ouvrage La Maîtrise de la Langue àl’Ecole, publié par le Ministère de l’Education Nationale et de la Culture en 1992, les « activitéslittéraires » sont présentées comme relevant non d’un apprentissage spécifique, mais d’uneinitiation » :

« Il ne s’agit pas de construire des apprentissages, mais de préparer aux activités littérairesultérieures, celles que prendront en charge le collège et le lycée. Cet enrichissement des pratiquesculturelles des enfants se construit dans l’échange : lire et partager ce qu’on a lu avec d’autres,commencer à faire sien un langage qui permet de parler de ce qu’on a lu » (p. 162).

Ce texte de recommandations insiste sur les deux questions du patrimoine et des référencesculturelles. L’initiation des œuvres littéraires y est définie par contraste avec la lecture « utilitaire » ou« fonctionnelle ».

Quelques indications sont fournies : la référence aux « grands textes » de la tradition, lafréquentation complémentaire des bibliothèques, la découverte de thèmes universels dans uneapproche interculturelle affirmée et le recours à la littérature de jeunesse, car c’est par celle-ci que« l’enfant entrera le plus aisément dans le plaisir de lire qui est tout à la fois celui d’une fréquentationde la belle langue et celui d’une rencontre des questions et des émotions qui sont de tous les temps etde tous les lieux ».

Plus récemment, dans les Documents d’application des programmes de l’école élémentaire(B.O. spécial du n° 7, 26/ 08/ 1999), il est fait mention de l’objectif fixé à la lecture des textes pluslongs et plus difficiles : « acquérir des connaissances et des repères culturels ».

l Enfin, dans Les nouveaux programmes de 2002 (p 83), il est rappelé que comme à l’écolematernelle, les textes littéraires doivent être au cœur des activités de l’école élémentaire. Il importeque les œuvres rencontrées soient nombreuses et variées. « Les auteurs de littérature de jeunesse, eten cela ils ne se distinguent pas des autres écrivains, tissent de nombreux liens entre les textes qu’ilsécrivent et ceux qui constituent le contexte culturel de leur création. C’est dire qu’on ne comprendvéritablement un livre, serait-ce un simple album, sans retrouver ces relations subtiles qui font d’uneœuvre une œuvre littéraire. Les lectures littéraires du cycle des apprentissages fondamentaux,comme celles des autre cycles, doivent donc être choisies avec soin et organisées en parcours quipermettent de retrouver un personnage, un thème, un genre, un auteur, un illustrateur… Par là, et parlà seulement, l’habitude de fréquenter les livres devient progressivement une culture ».

Au cycle 3, Les nouveaux programmes (p 185, 186, 187) prévoient de 4h30 à 5h30d’enseignement de la littérature, au sein des 12h hebdomadaires du domaine « Languefrançaise,littéraire et humaine ».

« Le programme de littérature du cycle 3 vise à donner à chaque élève un répertoire deréférences appropriées à son âge et puisées dans la littérature de jeunesse, qu’il s’agisse de son richepatrimoine ou de la production toujours renouvelée qui la caractérise. Il permet ainsi que se constitueune culture commune susceptible d’être partagée, y compris entre générations… Les textes lus aucycle 3 sont choisis parmi les ouvrages répertoriés dans la bibliographie publiée avec les textes

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d’application. Elle comporte des « classiques de l’enfance » souvent réédités et qui constituent unpatrimoine se transmettant de génération en génération. Elle comporte aussi des œuvres de lalittérature de jeunesse vivante dont la liste est régulièrement renouvelée. Chaque année, deux« classiques » doivent être lus et au moins huit ouvrages appartenant à la bibliographie de littératurede jeunesse contemporaine.

Pour que l’élève puisse acquérir des références culturelles, il importe que les lectures ne soientpas abordées au hasard, mais se constituent, tout au long du cycle, en réseaux ordonnés : autourd’un personnage, d’un motif, d’un genre, d’un auteur, d’une époque, d’un lieu, d’un format, etc. Aucycle des approfondissements, c’est cet aspect de la lecture littéraire qui doit être privilégiée plutôtque l’exploitation approfondie d’une œuvre.

Chaque lecture, lorsqu’elle a fait l’objet d’un travail de compréhension et d’interprétation, laisseen suspens des émotions et pose de multiples questions qui peuvent devenir des thèmes de débatparticulièrement riches. Cette exploration de l’univers de connaissances et de valeurs qu’ est lalittérature peut être conduite très librement à partir d’un texte ou, au contraire, de la confrontation deplusieurs lectures, ou encore en s’appuyant sur des œuvres ou connaissances rencontrées dans desautres enseignements (un film, un tableau, un paysage, un portrait photographique, une gravure, etc.).

Les enseignants veillent à suggérer des œuvres appropriées à chacun, tant par l’intérêt qu’ellessuscitent que par les difficultés qu’elles présentent. L’objectif est de faire de chaque enfant un lecteurassidu. ».

Ainsi, l’école propose de lire des textes qui comportent des liens entre eux et d’autres textes ainsiqu’avec le contexte culturel de la création de ceux-ci, des textes variés, en nombre important etadaptés à l’âge des élèves, des textes qui suscitent des émotions et un intérêt, des textes qui puissententraîner un débat d’interprétation et des textes qui puissent se confronter avec d’autres champsdisciplinaires.

Finalement, l’école peut proposer pour le texte littéraire une autre fonction que celle de permettred’agir ou d’apprendre : celle d’accéder à une culture et d’y trouver du plaisir.

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La compréhensionlittéraire :

la structure et les outilsde la narration

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Dans la littérature de jeunesse, le récit offre de nombreuses possibilités pourles élèves de perfectionner leur lecture et leur écriture, les deux activitéss’appuyant réciproquement, et de goûter au plaisir immense de créer eux-mêmesdes histoires et de les raconter de mieux en mieux.

1 – Structure du récit.

l De nombreux travaux, parus essentiellement lors des dix dernières années, permettent unemeilleure connaissance du fonctionnement de ce type de texte. Pourtant, l’origine en est plus lointainepuisqu’il faut remonter aux recherches de Vladimir Propp en URSS qui fit paraître en 1928 son livreMorphologie du conte, collection Points/ Seuil. Il y considérait le conte comme un objet que l’onpeut explorer et parvint à mettre à jour un certain nombre d’invariants lui permettant de décrire lamorphologie de tel ou tel conte.

Des études plus récentes ont conservé l’esprit dans lequel V. Propp a exécuté ces recherchestout en les élargissant. Les textes sont alors perçus comme des systèmes dont l’organisation produitdu sens. Paul Larivaille définit ainsi le schéma narratif dans Poétique n° 19 en 1974. Le récit va alorsse constituer entre deux situations stables, l’état initial et l’état final.

[voir ANNEXE 1]

Les analyses de Greimas sur les actants, dans la Sémantique structurale (Larousse), décriventaussi le rôle que jouent les personnages, les objets et les animaux dans l’action. Greimas remet ainsien cause l’approche psychologique des personnages pour les considérer selon ce qu’ils « font » plusque ce qu’ils sont. Il décrit six catégories d’actants, liées deux par deux :

- la catégorie sujet / objet de la quête qui constitue le récit,- la catégorie adjuvant / opposant qui aide le sujet (pour l’adjuvant) ou qui lui fait

obstacle (pour l’opposant) dans sa quête,- la catégorie destinateur / destinataire de cette quête.

Ce schéma a été conçu à partir de récits mythiques et s’applique donc bien aux contes, mais ilpermet de décrire aussi le fonctionnement de nombreux récits.

l s Une séquence menée dans une classe de CE2 a ainsi pour objectifs de faire prendreconscience aux élèves de la structure d’un récit et de l’utiliser comme support dans une situationd’écriture.

ss Matériel :

Le travail porte sur le livre A ta santé, le loup écrit par Eléonore Schmidt, chez CenturionJeunesse.

ss Déroulement :

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1) Après une présentation du livre par l’enseignant à la classe, les élèves ont plusieurs jours pourle lire.

2) Collectivement, les élèves analysent le récit lors d’un temps d’échange à propos du contenu etde son sens profond. La récapitulation se fait sous la forme d’un tableau.

[voir ANNEXE 2]

3) La structure dégagée en commun est ensuite généralisée et résumée sous la forme d’unschéma.

[voir ANNEXE 3]

La trame d’un nouveau récit est ainsi concrétisée et est proposée en situation de départ pour uneécriture de récit.

Dans un premier temps, les élèves essaient d’imaginer des situations correspondant au schéma etles proposent oralement à l’ensemble de la classe.

Afin d’éviter que les premiers scénarios soient une copie conforme du texte A ta santé, le loup,l’enseignant aide les enfants à prendre davantage de recul par rapport au texte de départ en leurdemandant de faire un inventaire de tout ce qui peut constituer le bonheur d’un enfant (exemple : êtreavec ses parents, avoir des copains, pouvoir jouer au foot, habiter dans une grande maison, avoirdes frères et sœurs, etc. ).

Puis L’enseignant les incitent à imaginer des circonstances qui entraînent la perte de ce bonheur(exemple : un départ, une maladie, un déménagement, une dispute, etc. ).

4) Ainsi sont déterminés plusieurs débuts de scénarios possibles qui sont ensuite développés dansle cadre d’une écriture individuelle.

ll Observations – Prolongements possibles :

s La structure du récit a été acquise par la majorité des élèves, certainement grâce au schémanarratif- outil construit collectivement et affiché au tableau lors des productions. Dans la productionde Florient, [voir ANNEXE 4], le schéma narratif en cinq étapes apparaît clairement :

- Situation initiale : bonheur d’un enfant, David, qui vit au Maroc.- Complication : David doit quitter son pays et ses copains pour aller vivre en France.- Action : il cherche de nouveaux copains en France.- Résolution : il se met à jouer au foot, et en devenant gardien de but, il fait gagner son

équipe.- Etat final : David est heureux et a retrouvé des copains.

Certains élèves n’ont respecté que quatre étapes dans leur récit car ils ont fusionné l’étape 4 (larésolution) avec l’étape 5 (la conclusion). La nuance entre ces deux étapes peut en effet paraîtrequelquefois délicate et il est d’ailleurs vrai que dans plusieurs récits de la littérature de jeunesse cesdeux dernières étapes n’en forment qu’une.

Nous pouvons tout de même réfléchir sur un tel apprentissage, sur ses difficultés et ses limites.

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s La priorité est accordée plus au fonctionnement des textes qu’à leur sens et cela peut êtrecritiquable.

s Certes le récit dans son ensemble est composé selon ce schéma quinaire, mais il compte lui-même un certain nombre de séquences élémentaires fonctionnant sur le même mode et s’enchaînantde différentes façons : leur nombre et la subtilité de leurs enchaînements traduisent en faitpartiellement la complexité du texte.

A partir de la liste des événements, il aurait fallu faire prendre conscience aux élèves que, parmiles différentes possibilités qui s’offrent à lui pour le déroulement du récit, l’auteur fait des choix et quechacun de ses choix provoque un rebondissement dans le récit.

s En effet, le récit fonctionne toujours plus ou moins en situation de dialogue. Il est destiné àquelqu’un. C’est sur cette dimension communicationnelle qu’une observation pourrait être effectuéeen classe. La prise de conscience de l’interaction qui se joue entre deux partenaires va aider lesenfants à repérer comment l’auteur d’un récit oriente son lecteur et déploie une véritable stratégieafin de créer tel ou tel effet (exemple : récit policier : la finesse d’écriture pour créer des atmosphèreset le fait de disposer des indices parmi lesquels le lecteur ne distingue pas les vrais des faux).

Le sens n’est pas enfermé dans le texte mais est en construction dans la coopération entrel’auteur et son lecteur.

s Enfin, il est tout à fait nécessaire de préciser aux élèves que l’emploi du schéma quinaire estvérifiable pour beaucoup de récits mais que tous les récits ne sont pas obligatoirement construits surce type de structure et qu’ils peuvent ainsi fonctionner.

2- Le temps dans le récit.

l Le temps est important dans le récit. L’auteur appartient à une époque et le lecteur appartientlui aussi à une époque déterminée qui n’est pas forcément celle de l’auteur. En effet, le récit peut êtrecontemporain, passé ou futur par rapport à son lecteur et même par rapport à son auteur lorsqu’ils’agit par exemple de science fiction.

Dans la fiction même, l’action a une durée qui peut être délimitée en siècles ou en heures, et quipeut être repérée grâce à un certain nombre de procédés lexicaux tels que « le lendemain » ou« deux jours plus tard », mais aussi grâce au vieillissement des personnages ou par exemple lanotation d’évènements historiques.

Enfin, pour élaborer son récit, l’auteur a plusieurs problèmes à résoudre. Tout d’abord, le rythmedu récit peut varier : soit tous les évènements sans exception sont racontés, soit certaines périodessont passées sous silence (« dix ans plus tard »)- ce sont les ellipses- ou résumées- ce sont alors lessommaires-, soit certains moments sont racontés longuement. Puis la chronologie peut constituerl’ordre dans lequel va s’écrire le récit (synchronie) ou bien des retours en arrière (analepses) et desplongées en avant (prolepses) peuvent être introduits. Finalement, la simultanéité est possible grâce àdes formules du type « pendant ce temps ».

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A partir de la liste chronologique des évènements d’un récit, l’enseignant peut faire prendreconscience aux élèves de l’importance du temps dans les récits.

l s Ainsi, une séquence menée en classe de CM2 a pour objectifs d’asseoir la notiond’asynchronie (discordance entre le temps de l’histoire et le temps du récit) et de développer uneutilisation réfléchie du « retour en arrière » en tenant compte du caractère dramatique de l’histoire.

ss Matériel :

Le travail porte sur la nouvelle Le papa de Simon de Guy de Maupassant dans « Histoiresdouces amères » à l’Ecole de Loisirs.

ss Déroulement :

Le texte n’est lu aux élèves qu’après qu’ils ont eux-mêmes écrits. 1) Les élèves ont entre les mains la liste des moments du récit dans l’ordre chronologique, c’est-

à-dire dans l’ordre de l’histoire. [voir ANNEXE 5]

Après la lecture individuelle, les élèves recherchent collectivement le moment où se noue l’action. Ils reconstituent le sens qu’ils donnent au récit et l’accent est mis sur le caractère dramatique de

l’histoire. Ils réfléchissent sur le rôle des renseignements donnés : ils sont l’explication et la justification de la

situation- problème. Puis les élèves se demandent à quel moment précis ils pourraient faire commencer le récit.

2) Avant de procéder à l’écriture du récit, les élèves placent sur un axe les différents momentsdans l’ordre où ils choisissent de les faire apparaître.

[voir ANNEXE 6]

3) Après ce travail qui détermine la trame narrative, chacun produit son récit. Pour éviter untravail trop long, l’enseignant demande aux élèves de s’arrêter au moment n°10.

ll Observations- Prolongements possibles :

s Dans l’étape n°1 lorsque les élèves cherchent le moment précis où ils pourraient fairecommencer le récit, le bilan des propositions révèle une vraie réflexion des enfants : les momentssélectionnés pour être placés au début du récit doivent créer une atmosphère dramatique.

Un des moments les plus choisis se situent en 6, quand Simon est penché au bord de l’eau et qu’ilrevit sa sortie de l’école. Les enfants perçoivent qu’il s’agit d’un moment- problème car Simon veutse noyer.

Une réflexion s’est alors faite nécessaire sur le rôle des renseignements qui ont précédé cemoment : ils sont l’explication et la justification de la situation problème, indispensables à lacompréhension du récit.

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s Par ailleurs, la correction collective des premiers jets a permis de vérifier (chacun lisant sontexte) :

- si l’aspect dramatique est bien mis en valeur,- s’il ne manque pas de détails indispensables à la compréhension,- si l’emploi des temps est correct et rend bien compte de l’antériorité de certains faits.

En effet, il est ici indispensable d’employer correctement l’imparfait, le passé- simple et le plus-que- parfait. De nombreux élèves ne maîtrisant pas ces temps, il a fallu mettre en place un travail destructuration en grammaire- conjugaison pour que chacun puisse ensuite corriger efficacement seserreurs. C’est précisément ce point qui a posé le plus de problèmes à la classe dans cetapprentissage sur le récit.

3- Auteur- narrateur dans le récit.

l Il est tout d’abord nécessaire de distinguer trois instances dans le récit qui sont évoquées danscette phrase de Roland Barthes dans l’ « Introduction à l’analyse structurale des récits » dansCommunications n°8 : «qui parle (dans le récit) n’est pas qui écrit (dans la vie) et qui écrit n’est pasqui est ».

- « Qui est » renvoie à la personne de l’auteur,- « Qui écrit » n’est pas à confondre avec la première instance,- « Qui parle » désigne le narrateur qui n’est aucune des instances précédentes.

Les rapports possibles entre ces trois termes peuvent être nombreux et les élèves pourront ainsiapprendre à distinguer les récits autobiographiques de ceux qui le sont partiellement et de ceux quine le sont pas du tout.

Mais il est surtout intéressant de s’interroger sur le point de vue que l’auteur a envisagé pour sonnarrateur. En effet, Gérard Genette propose ainsi trois situations possibles :

- La focalisation zéro dans laquelle le narrateur omniscient en sait plus qu’aucun despersonnages pris séparément. Il peut accéder à la conscience des personnages.

- La focalisation interne dans laquelle le narrateur est l’un des personnages de l’histoirequi décrit les évènements selon son point de vue et seulement selon son point de vue.

- La focalisation externe dans laquelle le narrateur ne décrit que ce qui est objectif etvisible, en n’accédant pas à la conscience des personnages.

l s Ainsi une séquence menée dans une classe de CM1 a pour objectifs de faire prendreconscience aux élèves de l’opposition auteur/ narrateur, de situer le point de vue du narrateur, decomprendre en le lisant silencieusement un texte littéraire court, de participer à un débat surl’interprétation d’un texte littéraire en étant susceptible de vérifier dans le texte ce qui interdit oupermet l’interprétation défendue, d’élaborer et d’écrire un récit.

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ss Matériel :

Le travail porte sur le récit L’enfant qui parlait aux animaux de Roald Dahl, Folio Junior,Gallimard.

ss Déroulement :

1) Présentation du livre à la classe par l’enseignant (auteur, genre, ... ).

2) Les élèves lisent individuellement le début du récit (jusqu’à la page 19). Cette lecture s’effectue lors de temps de lecture silencieuse réservés en classe.

3) Un temps d’échange collectif permet d’établir le nombre des personnages, leur identité, leurrôle, leurs relations, l’endroit et le moment où se passe l’histoire.

4) Collectivement, les élèves constatent l’identité du narrateur ( un homme, client de l’hôtel ), touten argumentant cette constatation en vérifiant dans le texte ce qui la permet.

Les élèves cherchent ensuite si tous les personnages de la scène de la capture en mer de la tortuepensent tous la même chose de l’évènement avec le même point de vue. D’autre part, lespersonnages n’en connaissent pas tous la même chose.

L’enseignant écrit au tableau les réflexions des élèves sur :- les pêcheurs (ils ont vécu la capture de la tortue, ont éprouvé de la peur quand elle

s’est débattue, sont fiers et heureux à l’idée de gagner une grosse somme d’argent avec leurprise, sont furieux contre David, ...)

- la tortue (elle a vécu la scène, s’est débattue, a eu peur, espère une intervention deDavid ; elle est peut- être honteuse, humiliée…)

- les parents de David (ils n’ont pas vécu la scène, ne veulent pas donner tort à leur fils,sont gênés, n’osent pas prendre parti ...)

- l’homme ventripotent (il n’a pas assisté à la scène, ne pense qu’à mériter l’admirationde sa femme avec la carapace de la tortue placée dans son salon, peut être furieux contreDavid, ...)

- David (il n’a pas assisté à la scène de la capture, est furieux contre les adultes quimaltraitent les animaux, est déterminé à tout faire pour la faire libérer).

5) Ecriture individelle. Les élèves reçoivent la consigne suivante : « choisir un personnage qui a assisté à la scène du

retour de la tortue sur la plage et lui faire raconter cette scène ».

ll Observations- Prolongements possibles :

La séquence a permis d’atteindre les objectifs que nous nous étions fixés.

La présentation du livre à la classe par l’enseignante a tout d’abord permis de créer chez lesélèves un horizon d’attente et de leur donner envie de lire le récit.

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Lors de la troisième étape, le temps d’échange collectif a bien permis aux enfants d’établirl’endroit et le moment où se passe l’histoire et de lister les personnages du récit.

La mise en évidence des relations entre les personnages a été plus délicate à mettre en place. Eneffet, les élèves ont eu des difficultés à percevoir la construction en réseau organisé de cespersonnages.

Nous avons donc dû passer plus de temps sur cet aspect essentiel à la compréhension du texte età la construction du sens des points de vue des narrateurs dans les étapes suivantes.

Les élèves ont donc classé ces personnages par ordre d’importance. Ils ont repéré ceux quis’opposaient (exemple : pêcheurs/ tortue) et ceux qui s’accordaient (exemple : David/ tortue ).

Notons que les analyses de Greimas sur les six catégories d’actants, dans la Sémantiquestructurale (Larousse) auraient pu être un point d’appui pour développer ce travail sur lespersonnages.

Afin de dynamiser la séance et varier les situations d’apprentissages, le temps d’échange collectifde cette troisième étape aurait pu être remplacé par deux temps : les élèves auraient pu remplir,individuellement ou par deux, un questionnaire par écrit, à la fin de leur première lecture (exemple :quels sont les personnages ? quels sont leur rôle ? leurs relations ? l’endroit et le moment où se passel’histoire ? ), puis une synthèse collective aurait pu constituer un second temps. De plus, les élèvesauraient ainsi été tous actifs et en réelle situation de recherche.

Lors de la quatrième étape, les élèves ont bien constaté l’identité du narrateur. Un repérage dans le texte a vérifié cette contatation. Les élèves ont ainsi repéré l’emploi de la

première personne du singulier : le narrateur est aussi un personnage de l’histoire. Les évènementssont donc décrits selon son point de vue et selon ce qu’il sait.

Les élèves ont participé activement à l’élaboration de la liste de ce que pensent tous lespersonnages de la scène de la capture en mer de la tortue. Le travail effectué en étape 3 sur lesrelations entre les personnages en a certainement facilité la tâche.

Les premiers jets de l’écriture individuelle de la cinquième étape ont fait mettre en évidence troisgroupes d’élèves :

- la plupart de élèves ont bien choisi un des personnages mentionnés collectivement pour en fairele narrateur en lui faisant employer la première personne du singulier ou du pluriel, et en lui faisantraconter ce qu’il sait en donnant son point de vue,

- quelques élèves ont effectivement choisi un des personnages listés collectivement mais ils ontemployé la troisième personne du singulier pour décrire ce personnage et son point de vue, utilisantainsi un narrateur omniscient,

- quelques élèves ont bien employé la focalisation interne en utilisant la première personne dusingulier et du pluriel mais ils n’ont écrit que le point de vue du narrateur- personnage, sans raconterles faits [voir ANNEXE 7].

Or, la description est importante dans le récit. En effet, il aurait été nécessaire de travailler sur la description dans les récits, mais faute de temps

nous n’avons pas pu exploiter cet apprentissage. Il aurait été intéressant notamment d’observer la localisation des passages descriptifs dans le

récit :

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- Le descriptif est déroutant dans sa diversité. Si les passages bien caractéristiques(portrait, paysage) sont faciles à isoler, on aurait tendance à ignorer les notations descriptivesfugitives et pourtant très fécondes pour le sens : courtes phrases, adjectifs, adverbes.

- Les passages descriptifs sont à des endroits stratégiques du récit. Cet aspect de ladescription serait peut- être à étudier avec le schéma narratif. En effet, l’exposition est richeen description, afin de présenter les lieux et les personnages. De même, la complication,l’action, la résolution et la conclusion sont le lieu où les descriptions font signe au lecteur,indiquant quand quelque chose s’est passée ou va se passer.

[voir ANNEXE 8 : proposition d’une séquence sur la description dans le récit]

Notons enfin qu’une lecture d’Une histoire à quatre voix d’Antony Browne peut être effectuéedans le cadre de l’apprentissage des points de vue des narrateurs. En effet, dans ce livre, la mêmehistoire est racontée quatre fois avec quatre points de vue différents de quatre personnages-narrateurs. Un jeu sur l’écriture des lettres et sur le style d’expression vient soutenir ces différentspoints de vue.

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Bilan des séquences menées sur la structure et les outils de lanarration.

Ces trois séquences menées sur la structure et les outils de la narration ont permis aux élèvesd’atteindre plusieurs objectifs :

- prendre conscience de la structure d’un récit,- prendre conscience de la notion d’asynchronie (discordance entre le temps de

l’histoire et le temps du récit),- développer une utilisation réfléchie du « retour en arrière » en tenant compte du

caractère dramatique de l’histoire,- prendre conscience de l’opposition auteur/ narrateur,- savoir situer le point de vue du narrateur.

Par ailleurs, d’autres compétences liées à l’exercice de la parole, mais surtout de la lecture et del’écriture, ont été acquises pour chacune des séquences :

- être capable de lire en le comprenant un texte littéraire plus ou moins long, tout enmettant en mémoire ce qui a été lu et en mobilisant ses souvenirs lors des reprises,

- être capable de participer à un débat sur l’interprétation d’un texte littéraire en étantsusceptible de vérifier dans le texte ce qui interdit ou permet l’interprétation défendue,

- être capable d’élaborer et écrire un récit avec ou sans support, en respectant descontraintes orthographiques, syntaxiques, lexicales et de présentation,

- avoir compris que le sens d’une œuvre littéraire n’est pas immédiatement accessible,mais que le travail d’interprétation nécessaire ne peut s’affranchir des contraintes du texte.

La compréhension littéraire d’un récit permet donc des apprentissages riches et variés. Afin de varier les situations pédagogiques, les lectures des récits peuvent être diversifiées

également : lecture individuelle, silencieuse, à haute voix, par les élèves, par l’enseignant et parfoismême résumée par l’enseignant selon l’objectif à atteindre.

Cependant les œuvres choisies et évoquées dans ces séquences sont relativement courtes. Pour ce qui est des productions écrites, la révision reste à chaque fois un moment essentiel. Les

élèves ont, pour chaque production, été conduits à ajouter, supprimer, remplacer ou déplacer desfragments de textes sur leurs propres brouillons ou sur ceux de leurs camarades. Ainsi ils pouvaients’appuyer sur les annotations des autres élèves ou du maître et utiliser les outils construits par laclasse (exemple : tableau de référence).

Finalement, soulignons encore que ces apprentissages sur la structure et les outils de la narrationparticipent surtout à créer une culture littéraire chez l’enfant bien plus que des savoirs de règlesprécises applicables à tous les récits de la littérature de jeunesse.

Ces apprentissages leur permettront surtout de mieux comprendre les textes, d’être conscientd’une relation auteur- lecteur, de pouvoir créer des liens entre plusieurs œuvres et d’en apprécierencore plus la lecture.

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Interdisciplinarité etpluridisciplinarité par

le récit

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Le récit peut être exploité du point de vue de la compréhension littéraire enabordant la structure et les outils de la narration, mais il peut être aussi exploitéavec une approche interdisciplinaire et pluridisciplinaire.

En effet, le récit peut permettre de communiquer avec d’autres disciplinestelles que la géographie et l’histoire par exemple, tout en créant des échangesentre elles et des éclairages réciproques.

Le récit peut également permettre une simple juxtaposition des approches d’unmême objet d’étude avec une ou plusieurs autres disciplines telles que les artsvisuels et l’éducation musicale par exemple.

1- Découvrir le monde par le récit.

l Certains récits projettent le lecteur dans un pays, un autre milieu ou une autre culture, luiouvrant ainsi des horizons insoupçonnés. La lecture s’apparente alors à un voyage qui enrichit lasensibilité de l’enfant et qui favorise son ouverture d’esprit et développe la tolérance. L’élèvedécouvre ainsi de nouveaux paysages et rencontre des êtres humains à la fois semblables et différentsde lui.

Les genres et les thèmes de ces récits sont variés. On y trouve des contes et différents récitsmythiques ou légendaires tels que les Contes des rives du Niger de Jean Muzi chez Flammarion ouContes et légendes chez Nathan. On peut aussi y trouver des récits de voyages ou desautobiographies, mais encore des romans où se mêlent le réel et l’imaginaire à travers l’aventure d’unhéros, tels que Un Kimono pour Tadao de Yves- Marie Clément chez Hatier. Notons que chezSyros, la collection « L’aventure dans la ville » propose des romans d’aventures qui se déroulenttous dans le cadre d’une grande ville comme New York ou Tokyo et qui permettent d’en approcherl’atmosphère.

l s Ainsi, connaître un pays n’est pas seulement connaître sa situation géographique ; c’est aussitenter une approche de son histoire et de sa culture. Une séquence propose d’appliquer cette idée àl’Europe en permettant à des élèves de CM2 d’entrer en contact avec quelques textes du légendaireeuropéen.

Objectifs :

En français :- pouvoir mettre sa voix en jeu dans un travail en groupe portant sur un texte littéraire,- être capable d’élaborer et d’écrire un récit avec support,- comprendre qu’on ne peut confondre la fiction et le réel, et comprendre ainsi le travail

d’un écrivain,- être capable d’effectuer une lecture sélective : rechercher des informations

géographiques à travers un récit,- être capable de lire un texte explicatif.

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En géographie :- être capable d’effectuer une recherche dans un atlas imprimé,- être capable de mettre en relation des cartes à différentes échelles,- être capable de situer l’Europe et ses principaux Etats dans l’espace mondial,- être capable de lire un document géographique complexe : une carte.

ss Matériel :

L’enseignant constitue un ensemble de textes sur des pays d’Europe.- Sur l’Allemagne : Les enfants de Timpelbach de Henry Winterfeld, Le Livre de

Poche Jeunesse, Hachette, 1980.- Sur la Grande- Bretagne (Londres au 18e sicle) : Smith de Léon Garfield, Le Livre

de Poche Jeunesse, Hachette, 1984.- Sur le Portugal : La Légende de Caparica dans Contes du Portugal, Messidor / La

Farandole.- Sur les Pays-Bas : La Cité sous les eaux dans Légendes de la mer de Bernard

Clavel, Le Livre de Poche Jeunesse, Hachette, 1975.- Sur la Norvège : Les trois cordes de bois dans Légendes de la mer de Bernard

Clavel, Le Livre de Poche Jeunesse, Hachette, 1975.- Sur la Lituanie : La reine de la Baltique dans Légendes de la mer de Bernard

Clavel, Le Livre de Poche Jeunesse, Hachette, 1975.

- des Atlas, des dictionnaires, des livres documentaires de géographie,

- une grande carte de géographie représentant la Terre.

ss Déroulement :

1) L’enseignant présente les six livres à la classe (titre, auteur, pays concerné) sans en dévoiler lecontenu et présente l’objectif du travail attendu : former des ateliers qui travailleront sur un texte lupar les élèves du groupe et communiquer ce texte aux autres élèves de la classe qui ne le connaissentpas.

2) L’enseignant constitue des groupes d’environ 4 élèves. Chaque groupe prend alors en charge une des 6 œuvres présentées précédemment. Chacun des

élèves a un exemplaire de l’œuvre, dans la mesure du possible, ou des photocopies lorsque le texteest court.

Les œuvres sont distribuées selon leur niveau de difficulté et selon le niveau de lecture des élèves. Avant- même la lecture des récits, l’enseignant invite les élèves de chaque atelier à effectuer une

recherche documentaire sur le pays concerné dans leur livre afin de mieux connaître ce pays et depouvoir le localiser sur une carte du monde.

3) Puis l’enseignant affiche une grande carte de la Terre dans la classe où chaque groupe vientépingler le titre du récit à lire, à l’emplacement du pays concerné.

Cette grande carte de la Terre affichée accompagne les élèves tout au long de ce projet.

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4) Les élèves ont plusieurs jours pour lire leur récit. Des ateliers sont aménagés en classe poursuivre leur lecture.

5) Puis les élèves de chaque atelier réfléchissent à la façon dont ils vont communiquer leur récit aureste de la classe.

Trois manières de communiquer leur texte narratif s’offrent à eux :- lire un extrait du récit ou lire entièrement le texte si celui- ci n’est pas trop long,- raconter l’histoire à la manière d’un conteur,- présenter l’histoire à l’aide de dessins.

6) Les différents groupes présentent leur récit devant les autres élèves après avoir précisé lalocalisation du pays concerné dans leur livre à l’aide de la grande carte de la Terre affichée dans laclasse.

7) Collectivement, les élèves essaient de répondre à la question suivante : qu’ont en commun cessix livres ?

Réponses attendues :- ce sont tous des fictions, des légendes pour la plupart,- ils mentionnent tous un pays précis et réel.

Une réflexion prend place sur le fait que, à partir d’un lieu réel, l’auteur crée une histoireimaginaire.

8) A partir de la grande carte de la Terre et des étiquettes épinglées sur les pays des groupesd’élèves, la classe parvient à mettre en avant le point commun qu’ont ces pays entre eux : ils fonttous partie de l’Europe.

L’enseignant distribue une carte des pays d’Europe ([voir ANNEXE 9]) à chaque élève : les sixpays des six récits y sont repérés afin de mettre en évidence la segmentation en cinq parties del’Europe : l’Europe du Nord (exemple : la Norvège avec Les trois cordes de bois), l’Europe duSud (exemple : le Portugal avec La Légende de Caparica), l’Europe de l’Ouest (exemple : lesPays- Bas avec La Cité sous les eaux, l’Allemagne avec Les enfants de Timpelbach et leRoyaume- Uni avec Smith), l’Europe de l’Est (exemple : la Lituanie avec La reine de la Baltique),ainsi que l’Europe centrale pour laquelle aucun récit n’a été travaillé.

Un texte documentaire vient compléter cette lecture de carte.[voir ANNEXES 10 et 11]

9) Les élèves observent les procédures utilisées par les auteurs des récits pour écrire un textefictif à partir d’un lieu bien réel : quelle est la part de réel, quelle est la part d’imaginaire ?

Les vérifications se font dans des livres documentaires.

10) Les élèves sont invités à choisir un pays d’Europe non évoqué dans les récits et d’en faire unerecherche documentaire (climat, population, relief, …) afin d’écrire individuellement une légende quise déroule dans ce pays.

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ll Observations- Prolongements possibles :

Le travail sur la communication des récits au sein de chaque atelier a été particulièrementintéressant dans cette séquence.

Les élèves ont choisi avec une vraie réflexion leur manière de présenter leur texte narratif au restede la classe.s L’atelier qui a travaillé sur La Légende de Caparica a choisi de lire des extraits du récit. En

effet, ce texte se prête bien à la lecture à haute voix. Les élèves se sont partagé le texte en épisodeset ont tenu chacun un rôle : le narrateur, les personnages, … Cette lecture à haute voix a dû êtrepréparée de manière à s’approprier le texte et à travailler le souffle et l’intonation. Les élèves ontopté pour ce type de présentation car les dialogues sont nombreux dans le récit.

s Les ateliers qui travaillaient sur les livres Les enfants de Timpelbach et Smith ont choisi deraconter l’histoire à la manière d’un conteur. Ces deux ateliers ont été plus difficiles à mener car cerécit oral suppose que les élèves observent bien les articulations principales du texte et qu’ils soientcapables de différencier l’essentiel du détail. Les élèves qui ont eu tendance à se focaliser sur desdétails ont été aidés grâce à un questionnaire proposé par l’enseignant du type : où l’histoire sepasse- t- elle ? à quelle époque ? qui sont les personnages ? que font- ils ? quelle est la situation audébut et à la fin ?

s Enfin les ateliers qui travaillaient sur La Cité sous les eaux, Les trois cordes de bois et Lareine de la Baltique ont présenté leurs histoires à l’aide de dessins. Cette méthode a aussi supposéque les élèves choisissent des indices pertinents. Ils en ont choisi leur nombre également.

Dans La Cité sous les eaux, l’histoire d’une épouvantable inondation au pays des polders, oùseuls deux enfants survivent à la catastrophe, est ainsi représentée par sept dessins :

1- la ville avant le drame,2- le début de la tempête, les gens affolés rentrent chez eux,3- les deux enfants dans la cathédrale,4- les enfants au sommet du clocher : la ville a disparu,5- un bateau au large,6- le bateau embarque les enfants,7- la ville engloutie.

s La grande carte de la Terre affichée dans la classe et accompagnant les élèves tout au long duprojet a semblé motivé particulièrement les enfants. En effet, cette visualisation est intéressante carelle apparente la lecture à un voyage.

Certaines descriptions contenues dans les récits ont permis d’aborder les climats en Europe :climat océanique à l’Ouest (« vent », « tempête », « averse » aux Pays- Bas dans La Cité sous leseaux) par exemple, ainsi que le peuplement en Europe : le Royaume- Uni et l’Allemagne sont deuxpays très peuplés par rapport à la Norvège qui est peu peuplée (Smith et Les enfants deTimpelbach décrivent en effet de nombreux personnages, alors que Les trois cordes de bois nedécrit que quelques personnages isolés).

La différence entre la fiction et la réalité a pu être affirmée en repérant sur un Atlas les nomspropres réels tels que la « mer du Nord » (dans La Cité sous les eaux), « la mer Baltique » (dans

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La Reine de la Baltique), « Londres » (dans Smith) et les noms propres fictifs qui sont nombreuxnotamment dans les légendes.

Cependant, nous pouvons nous interroger sur l’intérêt de l’interdisciplinarité dans cette séquence,ou plutôt sur la réalité de l’interdisciplinarité ici. En effet, il n’y a pas réellement eu d’échange nid’éclairage réciproque entre le français et la géographie. Les récits offraient plus un prétexte pouraborder les pays d’Europe plutôt qu’un réel apport de connaissances à ce sujet.

L’interdisciplinarité m’a semblé délicate à mettre en place dans cette séquence. Le choix desouvrages en est aussi peut- être une des causes.

2- Découvrir le temps et l’histoire par le récit.

l L’école maternelle et l’école élémentaire aident l’enfant à se situer dans le temps vécu de lajournée, de la semaine, des mois et des saisons, puis à se repérer dans le temps linéaire avec les âgesde la vie, les générations, l’évolution de l’humanité et le temps historique.

Entre la réalité et la fiction, le roman historique présente justement des attraits indéniables pourfaire découvrir le temps et l’histoire aux élèves. En effet, il met en scène une intrigue, des aventuresavec des rebondissements et du suspense ainsi que des personnages qui souffrent, se battent,échouent ou réussissent.

A travers ces personnages, le roman historique fait revivre des pans du passé. Plus que ledocumentaire historique, la narration place le lecteur au cœur même de l’évènement. Le romanraconte l’Histoire, mais il raconte aussi une histoire. En personnalisant des réalités générales commepar exemple, le travail des enfants en Europe au 19e siècle, le récit les rend proches et l’élève peutparvenir à la conscience historique.

l sLes activités en classe sur le roman historique peuvent être variées. Parmi elles, une séquencemenée dans une classe de CE2 a plusieurs objectifs :

En français :- comprendre un récit historique en lui donnant son statut de récit historique,- comprendre que le roman historique s’appuie sur une documentation (et qu’il est

donc source de renseignements sur une période),- prendre conscience de la part de création de l’auteur d’un récit historique,- être capable d’avoir une lecture active et questionnante qui tienne compte de la nature

des textes en présence, en instaurant un va- et- vient entre roman et document.

En histoire :- être capable de distinguer une grande période historique : le 19e siècle, et pouvoir la

situer chronologiquement,- comprendre un document historique simple (texte écrit) en lui donnant son statut de

document,

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- noter les informations dégagées pendant l’examen d’un document,- comprendre un aspect de la période du 19e siècle à travers un groupe social : les

ouvriers, le travail en usine, et notamment le travail des enfants à cette époque.

ss Matériel :

Le travail porte sur un extrait du roman historique Claudine de Lyon de Marie- ChristineHelgerson, Castor Poche, Flammarion, 1984, et sur les documents suivants :

1- les articles 1 et 2 de la loi relative au travail des enfants employés dans lesmanufactures, usines ou ateliers, du 22 mars 1841,

2- les articles 1 et 4 de la loi sur l’enseignement primaire obligatoire de 1882,3- un rapport d’un commissaire de police de Fours sur le travail des enfants, de 1864,4- un compte rendu d’enquête de Villermé sur l’état physique et moral des ouvriers, de

1840.[voir ANNEXE 12]

ss Déroulement :

1) Par groupes de quatre, les élèves lisent et analysent les quatre documents historiquesprécédents en répondant à un questionnaire :

- De quel type de textes s’agit- il ?- Quand ont- ils été écrits ?- Par qui ont- ils été écrits ? A qui ?- Quels renseignements ces documents donnent-ils ?

2) Une synthèse collective permet de mettre en évidence les éléments suivants : Nous avons deux lois, un rapport de police et un compte rendu d’enquête qui est d’ailleurs à

l’origine de la loi de 1841 sur la réglementation du travail des enfants. Les documents s’échelonnentde 1840 à 1882 et montrent l’évolution des choses. Les documents 1, 3 et 4 ne mettent pas encause le travail des enfants mais l’analysent et le réglementent. Le document 2 marque la fin d’uneépoque et le début d’un statut nouveau pour l’enfant.

Les élèves apprennent ainsi qu’au 19e siècle, les enfants de familles pauvres travaillent, qu’à partirde 1841, huit ans est l’âge minimum pour être employé et que les parents ont besoin du travail deleurs enfants.

3) Les élèves lisent individuellement le début du premier chapitre (jusqu’à la page 9) du romanClaudine de Lyon et répondent aux questions suivantes :

- De quel type de texte s’agit- il ?- Quand a- t- il été écrit ?- Par qui a- t- il été écrit ? Pour qui ?

4) Collectivement, les élèves observent les indices qui signalent que ce texte est un extrait deroman : les références de l’auteur, du titre, de la collection, de l’éditeur, l’indication « chapitre 1 », lamise en scène de personnages et les dialogues.

5) Puis les élèves comparent les documents historiques et l’extrait du roman :

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- sur le plan des informations proprement dites,- sur la manière dont ces informations sont énoncées.

6) Les élèves réinvestissent cette attitude de lecteur actif dans la lecture intégrale du roman ennotant les renseignements historiques que celui- ci fournit et en croisant cette lecture avec d’autressources documentaires.

ll Observations- Prolongements possibles :

Les objectifs en littérature et en histoire ont été atteints, tout en liant ces deux champsdisciplinaires.

s Grâce aux questions posées dans l’étape n°1, les enfants ont ainsi été sensibilisés aux notionsd’émetteur, de destinataire, de situation de communication qui font partie intégrante du sens.

s L’étape n°4 a bien souligné le fonctionnement et les contraintes du roman historique. Les élèvesont en effet perçu que les informations purement historiques y sont de nature très différente : faits etdates, mais aussi vie quotidienne (vêtements, logement), vie sociale, mentalités, …

De même, les élèves ont compris que l’histoire personnelle du personnage principal estétroitement liée au contexte historique et social. L’héroïne est ainsi un personnage emblématique etsymbole d’une époque : le désespoir de Claudine et sa révolte face à un avenir sans horizonsymbolisent bien tout un destin collectif.

s Dans l’étape n°5, en mettant en correspondance le roman et les documents, les élèves ont faitapparaître leurs éclairages mutuels.

L’histoire se passe en 1881. Il est donc « normal » que Claudine travaille, puisqu’elle a onze ans,mais il est normal aussi qu’elle veuille aller à l’école, car même si la loi n’est pas votée, les chosescommencent à bouger et la petite fille s’en rend compte. Monsieur Boichon a besoin du travail de safille qui est malade et déjà marquée physiquement.

s Quant à l’étape n°6, elle pourrait être supprimée si l’emploi du temps de la classe ne la permetpas. Cependant, elle est intéressante car les enfants s’y entraînent à se poser eux- mêmes desquestions sans que l’enseignant leur en pose.

s Dans cette séquence, l’interdisciplinarité a bien fonctionné et les deux champs disciplinaires, lalittérature et l’histoire, se sont nourris réciproquement tout en apportant du sens aux apprentissages.

3- Découvrir l’art par le récit.

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l La lecture d’un texte passe toujours plus ou moins par la création d’images mentales. Cesimages sont suscitées par les mots, les phrases, qui évoquent des lieux et des personnages, dessensations et des idées nouvelles.

Le texte, d’ailleurs, ne donne pas tout. L’évocation s’appuie forcément sur des souvenirs,souvenirs de lectures antérieures ou de moments vécus, seuls capables de lui donner de la saveur etde l’épaisseur.

Un peu comme un voyage, la lecture enrichit l’expérience, la réflexion, la sensibilité, mais enmême temps elle s’appuie sur cette même expérience.

C’est en entrant dans l’exploitation du récit par une démarche pluridisciplinaire que l’enfant vapouvoir se créer une expérience plus riche et plus diverse. Cette expérience peut aussi s’appeler« culture ».

Pour enrichir cette culture, l’enfant peut être invité à lire et écrire des mythes. En effet, l’enfant necesse de s’interroger sur le monde qui l’entoure, ses origines, son devenir, le pourquoi et le commentde ce qui existe autour de lui : les éléments, les phénomènes, les êtres, leurs différences, leursémotions, …

A travers la lecture des mythes, il va pouvoir reconnaître ses propres questions, prendreconscience que les hommes avant lui se sont posé les mêmes, ont éprouvé le besoin d’y apporterdes réponses. L’enfant va ainsi pouvoir se reconnaître comme appartenant à cette humanité qui, detout temps, cherche une signification au monde et à l’existence humaine.

l s Une séquence menée en CM1 a ainsi pour objectif général de donner aux enfants l’occasiond’enrichir leur « musée imaginaire » par la rencontre d’œuvres littéraires et artistiques faisant partiedu patrimoine universel, de les sensibiliser au fait que chaque civilisation répond aux questions quepose l’idée de création en fonction de sa culture, et de les inciter à créer leurs propres productionsafin qu’elles prennent place dans cet ensemble.

Objectifs :

Education musicale :- être capable de soutenir une écoute prolongée et utiliser des consignes d’écoute,- être capable de repérer des éléments musicaux caractéristiques en faisant appel à un

lexique approprié,- être capable de créer une production musicale inventée.

Arts visuels :- être capable de décrire une image et de s’exprimer sur une œuvre,- comprendre qu’une œuvre est l’expression d’une vision de son auteur sur un fait réel

ou imaginaire.

Littérature :- être capable de lire en le comprenant un texte littéraire court,- être capable de formuler dans ses propres mots une lecture entendue,- être capable de participer à un débat sur l’interprétation d’un texte littéraire,- être capable d’élaborer et d’écrire un récit avec support.

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ss Matériel :

Un corpus constitué de quatre mythes sur la création, issus de différentes civilisations : - Légende finlandaise de la création (dans Cent façons d’inventer le monde) [voir

ANNEXE 13] - La création du monde selon les Indiens du Montana (dans L’arbre à soleils, Henri

Gougaud, Points- Seuil, p 190) [voir ANNEXE 14] - Le Guéla d’en haut et le Guéla d’en bas (Afrique noire) (dans L’arbre à soleils) [voir

ANNEXE 15] - La création du monde par Mardouk (dans La naissance du monde, Seuil, 1959, p145, 146,

147) [voir ANNEXE 16] - La Genèse- extrait de la Bible de Jérusalem [voir ANNEXE 17]

- des objets sonores et des instruments de musique simples,- l’œuvre musicale La Création de Joseph Haydn- une grande reproduction (ou plusieurs petites) du Triptyque Le Jardin des délices de

Jérôme Bosch (panneaux fermés) [voir ANNEXE 18]- le livre Poussière d’étoiles de Hubert Reeves chez Seuil.

ss Déroulement :

1) L’enseignant lit trois mythes de la création :- Légende finlandaise de la création, [voir ANNEXE 13],- La création du monde selon les Indiens du Montana, [voir ANNEXE 14],- Le Guéla d’en haut et le Guéla d’en bas (Afrique noire), [voir ANNEXE 15].

Cette lecture peut s’effectuer en plusieurs fois, à différents moments d’une journée par exemple.Le thème de leur travail à venir est alors présenté. A propos de ces textes, les enfants expriment

ce qu’ils savent et ce qu’ils pensent de la création.

2) s Les élèves lisent eux- mêmes un autre récit mythique de la création : La création du mondepar Mardouk (texte babylonien ancien issu de la civilisation akkadienne sur le territoire de laMésopotamie).

[voir ANNEXE 16]

s Par groupes de quatre, les élèves effectuent une illustration sonore du texte à partir d’objetssonores : sable dans des récipients divers, seaux, ballon de baudruche, billes, barres de métal,plaque de polystirène et quelques instruments de musique.

Un apprentissage sur le vocabulaire musical est effectué : son long, son court, son grave, son aïgu,intensité (fort, doux), rythme lent, rythme rapide, accelerando, ...

3) s Après une production sonore effectuée par eux- mêmes, les élèves écoutent une oeuvremusicale créée par le compositeur autrichien Joseph Haydn : La création (1798).

Les élèves écoutent une première fois six extraits de La Création : extraits n°1, n°2, n°4, n°9,n°13 et n°24.

Les enfants s’expriment sur les impressions qu’ils ressentent à cette audition.

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C’est aussi l’occasion de préciser que l’oeuvre est un oratorio : une composition musicaledramatique, à sujet religieux avec des récitatifs, des airs, des choeurs et un orchestre.

s Cet aspect religieux de l’oeuvre permet à l’enseignant d’introduire le texte de La Genèse(extrait de la Bible de Jérusalem).

Les élèves lisent Les origines du monde et de l’humanité de La Genèse jusqu’au verset n°27[voir ANNEXE 17].

Une explication collective s’en suit.Puis les élèves sont invités à associer chacun des six extraits de l’oeuvre de Joseph Haydn avec

une phrase de La Genèse afin de décrire les grandes étapes de la création du monde selon la Bible,et tout en argumentant leur choix en utilisant un vocabulaire adapté.

4) Les arts visuels sont ensuite utilisés pour alimenter le « musée » des mythes de la création etnotamment avec le verso (panneaux fermés) du Triptyque de Jérôme Bosch : Le jardin des délices(peints vers 1503) [voir ANNEXE 18].

Un temps est laissé aux enfants pour leurs réactions. L’enseignant les incite à regarder plusparticulièrement les couleurs et l’atmosphère qu’elles créent.

Les élèves sont conduits à s’interroger sur la nature de l’oeuvre qu’ils regardent, l’époque àlaquelle elle a été créée et ses particularités.

L’enseignant explique ce qu’est un triptyque et parle de ce que les contemporains de Bosch(Renaissance) savaient de la création du Monde et de la représentation de la terre.

5) Puis les élèves observent les illustrations du livre de Hubert Reeves : Poussière d’étoiles chezSeuil.

Cet ouvrage scientifique est en effet abondamment illustré. Les illustrations donnent lieu à unéchange.

L’aspect scientifique de la création du monde est abordé très rapidement car cette connaissancetrop complexe n’est pas au programme de l’école primaire. De plus, plusieurs théories tententd’expliquer la genèse du système solaire qui remonte à 5 milliards d’années environ.

6) Les élèves sont invités à écrire sur la création du monde en s’appuyant sur les récits mythiques,sur l’oeuvre musicale ou l’oeuvre picturale, et surtout sur leur propre imagination.

ll Observations- Prolongements possibles :

Cette séquence sur les mythes de la création a bien permis aux enfants d’enrichir leur imaginationpar la rencontre d’oeuvres littéraires et artistiques. Ils ont été sensibilisés au fait que chaquecivilisation répond aux questions que pose l’idée de création en fonction de sa culture et ils ont puprendre place dans cet ensemble grâce à leurs propres productions.

s Dans l’étape n°3, les enfants se sont beaucoup exprimé à l’écoute de l’oeuvre musicale deJoseph Haydn.

L’association des six extraits de l’oeuvre avec des étapes de La Genèse a bien fonctionné pourcertains groupes. Un groupe, par exemple, a su argumenter ses choix :

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- premier extrait (n°1), le début de l’oeuvre : « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre.Or la terre était vague et vide, les ténèbres couvraient l’abîme ». Après l’audition, les enfants ontparlé du néant des ténèbres et de l’impression qu’ils ressentaient en l’évoquant.

- deuxième extrait (n°2), l’entrée du choeur : « Et Dieu dit : que la lumière soit et la lumière fut ».La « puissance » des voix du choeur leur faisait penser à la « puissance » de la lumière.

- troisième extrait (n°4), un air de ténor : « que les eaux qui sont sous le ciel s’amassent en uneseule masse ». Les enfants ont parlé de l’eau et de ce qu’elle apporte à la terre.

- quatrième extrait (n°9), un air de soprano : « que la terre verdisse de verdure : des herbesportant semence et des arbres fruitiers donnant sur la terre des fruits contenant leur semence ». Lesenfants ont associé la voix élevée de soprano à la légèreté ressentie en regardant un paysage decampagne.

- cinquième extrait (n°13), l’orchestre : « l’apparition du soleil ». Les élèves ont ressenti une forteémotion à l’écoute de l’orchestre qui a de la puissance. Ils ont donc pensé au soleil, astre puissant etdominant.

- sixième extrait (n°24), l’orchestre et un air de ténor : « la création de l’homme et de la femme ».Le retour de la voix d’un homme leur a fait pensé à la création de l’homme.

Plusieurs désaccords sont apparus, notamment pour l’extrait n°2 : certains groupes y ont vul’apparition du soleil, d’autres de la lumière, pour l’extrait n°9 : certains groupes y ont vu la présencede l’eau plutôt que celle de la nature toujours grâce à la légèreté de la voix de soprano qui peut fairepenser à la légèreté de l’eau.

L’essentiel était que les élèves argumentent leurs choix, qu’ils expriment ce qu’ils ressentent touten prenant conscience qu’un compositeur peut jouer sur plusieurs aspects musicaux pour créer uneoeuvre et faire passer des émotions : voix aïgue, grave, instruments en nombre plus ou moinsimportant, intensité, rythme, ...

s De même, dans l’étape n°4, les enfants ont beaucoup réagi face au Tryptique Le jardin desdélices peint par Jérôme Bosch.

Ils ont décrit avec leurs mots l’atmosphère du tableau : « c’est comme une bulle », « une bulle decristal », « il y a des arbres et de drôles de rochers », « des choses cassées », « tout en haut àgauche il y a un tout petit personnage », « c’est peut- être celui qui vient de créer la Terre, il regardela Terre de haut », « il n’y a pas encore d’homme », « c’est un monde sans couleur », « le paysageflotte », « c’est comme si tout était dans la cendre », « c’est très silencieux », ...

s Enfin, l’étape n°6 a conduit les enfants à exprimer leur propre mythe de la création du monde,tout en effectuant un travail littéraire : écrire un récit en respectant des contraintes orthographiques,syntaxiques et lexicales [voir ANNEXE 19].

s Finalement, cette séquence a été exploitée d’un point de vue pluridisciplinaire en découvrant eten juxtaposant des approches différentes d’un même objet d’étude. Certes il n’y a pas eu d’échangeentre les différentes disciplines mais il y a eu des abords différents à propos des mythes de lacréation du monde et c’est en cela que cette entrée dans l’exploitation du récit est intéressante etmotivante pour les enfants.

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Bilan des séquences menées sur l’interdisciplinarité et lapluridisciplinarité par le récit.

Les trois séquences menées à partir du récit en communiquant avec d’autres champsdisciplinaires tels que la géographie, l’histoire, les arts visuels et l’éducation musicale a permis unvéritable décloisonnement des apprentissages disciplinaires. Elles ont ainsi offert aux élèves un réelsens à ces apprentissages disciplinaires tout en garantissant la motivation d’apprendre.

Plusieurs compétences ont été travaillées en littérature, que se soit en lisant des récits, en disantdes textes ou en écrivant à partir de la littérature.

D’autres compétences ont été acquises en géographie en abordant les pays d’Europe et leurlocalisation, ou en histoire, en abordant le travail des enfants au 19e siècle : être capable d’effectuerune recherche documentaire, ou encore lire une documentation géographique (une carte) ouhistorique (texte écrit) par exemple.

De même, des compétences d’écoute et de création musicale, ainsi que des compétences dedescription et d’expression d’une image ont été acquises en éducation musicale et en arts visuels ausujet des mythes de la création.

Cependant, si nous observons l’aspect interdisciplinaire des apprentissages mis en place dans cesséquences à partir du récit, seule la séquence sur le roman historique me semble répondre à unvéritable intérêt. En effet, l’interdisciplinarité a vraiment fonctionné ici. Le récit éclaire les documentshistoriques et les documents historiques éclairent le récit. Il y a un échange riche et très motivant,pour les élèves et pour l’enseignant, entre la littérature et l’histoire.

Pourtant la séquence sur les mythes de la création a bien fonctionné aussi. En réalité, il s’agit plusde pluridisciplinarité que d’interdisciplinarité dans cette séquence. Et cela n’en est pas moinsintéressant pour autant.

Il y a eu moins de réflexion autour de l’écriture des récits des mythes qu’autour du récit historiquede la séquence sur le travail des enfants au 19e siècle, mais les approches artistiques de la créationdu monde ont tout de même participé à la compréhension de ces textes.

Enfin, la séquence sur la découverte du monde à partir de récits évoquant six pays différentsd’Europe n’a pas apporté toute la richesse qu’aurait pu apporter une véritable interdisciplinarité oupluridisciplinarité avec la géographie. Elle a cependant fonctionné en tant que séquence littéraire surle récit.

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Conclusion

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La littérature de jeunesse a longtemps été considérée comme une sous- littérature par rapport à lalittérature générale. Mais depuis quelques décennies, le secteur éditorial de la littérature de jeunesseest en pleine expansion et il représente maintenant un nombre croissant de nouveautés chaque année.Le récit permet tout particulièrement un travail riche d’intérêts en lecture et en écriture.

L’enseignant veille alors à choisir des récits littéraires qui comportent des liens entre eux etd’autres textes, ainsi qu’avec le contexte culturel de la création de ceux- ci. Il veille aussi à leurvariété, leur nombre suffisant, leur adaptation à l’âge des élèves, et à l’intérêt qu’ils suscitent chez lesenfants et lui- même. Ces récits étant choisis parmi les « classiques » et les plus récents.

L’enseignant veille également à varier les entrées dans l’exploitation des textes narratifs.Le récit permet tout d’abord un travail enrichissant sur la compréhension littéraire. Il offre aux

élèves des apprentissages sur la structure des textes, en observant le schéma quinaire par exemple.Cet outil théorique favorise en effet la compréhension d’un certain nombre de récits. Cependant, ildoit être utilisé plutôt qu’appliqué. Il ne doit pas devenir un contenu d’enseignement figé mais unmodèle adaptable aux textes.

De même, les élèves peuvent exploiter les outils de la narration tels que le temps, et notammentles discordances entre le temps de l’histoire et celui du récit, ou encore les points de vue desnarrateurs. Ces notions de narratologie sont effectivement indispensables pour lire et pourcomprendre des récits, et plus encore pour en produire. Elles permettent de construire des conceptsessentiels de la culture écrite littéraire. Pourtant, là aussi, n’oublions pas que ce ne sont que desoutils.

Parmi ces outils de la narration, d’autres apprentissages peuvent être effectués. Ainsi le systèmedes personnages peut être travaillé en classe, et particulièrement la construction en réseau organiséde ceux- ci souvent mal perçu par les élèves. Comme nous l’avons abordé précédemment, ladescription dans le récit est aussi importante à travailler avec les enfants.

D’autres entrées sont encore possibles dans l’exploitation du récit. L’interdisciplinarité est ainsiune approche intéressante. En effet, le récit peut permettre de communiquer avec d’autres disciplinestelles que la géographie et l’histoire, mais aussi les arts visuels et l’éducation musicale. Notons que laréelle interdisciplinarité exige des échanges et des éclairages réciproques entre différentes disciplinessur le même objet d’étude. Or, cette approche n’est pas à confondre avec la pluridisciplinarité quielle, juxtapose des entrées d’un même objet d’étude. Cependant, l’une et l’autre constituent desentrées motivantes, riches et fructueuses du point de vue des apprentisages. Elles permettent dedynamiser les séances en classe et de donner du sens aux différents champs disciplinaireshabituellement cloisonnés.

L’interdisciplinarité par le récit peut aussi s’appliquer aux sciences. Notons par exemple l’ouvrageSciences et français. L’interdisciplinarité par les albums de C. Rubiliani (CNDP) qui traite deces entrées dans le récit particulièrement stimulantes.

Enfin, le récit a l’avantage de posséder des atouts indéniables : il peut faire rire, ou rêver, envivant des aventures grâce aux récits d’aventures par exemple, et il peut permettre de se connaîtresoi- même, grâce aux contes.

Au- delà de l’aspect narratif et informationnel, le récit offre toute une chaîne de significationspossibles et incitent l’enfant à partir à la découverte de ses propres ressources émotionnelles etsensorielles. Il permet surtout aux enfants d’acquérir des compétences dans le domaine de la maîtrisede la langue, liant la lecture à l’écriture, tout en privilégiant le plaisir des livres et en se créant uneculture littéraire.

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BIBLIOGRAPHIE

ll OUVRAGES LUS

- Programmes de l’école primaire, Ministère de l’Education National. CNDP, 1995.- Les nouveaux programmes de l’école primaire (2002), Ministère de l’Education Nationale.- La Maîtrise de la langue à l’école, Ministère de l’Education Nationale et de la Culture. CNDP,1992.- Littérature, Cycle des approfondissements, Minitère de l’Education Nationale. Documentsd’application des programmes. CNDP.- Histoire de la Littérature enfantine en France, François Caradec. Albin Michel.- Ecrire en classe, Groupe d’Ecriture de l’Ecole Normale de l’Yonne. CDDP de l’Yonne.- La littérature de jeunesse à l’école, Renée Léon. Hachette Education.

ll OUVRAGES CONSULTES

- Morphologie du conte, Vladimir Propp. Points/ Seuil.- Poétique n°19, Paul Larivaille. Points/ Seuil.- Sémantique structurale, Greimas. Larousse.- Introduction à l’analyse structurale du récit, Roland Barthes. Communications n°8. Points/Seuil.

ll RECITS ISSUS DE LA LITTERATURE DE JEUNESSE

- A ta santé, le loup, Eléonore Schmidt. Centurion Jeunesse.- Le papa de Simon, Guy de Maupassant. « Histoires douces amères ». Ecole des Loisirs.- L’enfant qui parlait aux animaux, Roald Dahl. Folio Junior. Gallimard.- Les enfants de Timpelbach, Henry Winterfeld. Le livre de Poche Jeunesse. Hachette.- Smith, Léon Garfield. Le Livre de Poche Jeunesse. Hachette.- La Légende de Caparica, « Contes du Portugal ». Messidor/ La Farandole.- Légendes de la mer, Bernard Clavel. Le Livre de Poche Jeunesse. Hachette.- Claudine de Lyon, Marie- Christine Helgerson. Castor Poche. Flammarion.- L’arbre à soleils, Henri Gougaud. Points/ Seuil.- La naissance du monde. Seuil.

ll REFERENCES

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Cours de littérature, assurés par Monsieur Claustre, professeur à l’Université de Dijon, sectionLettres modernes, année scolaire 1999- 2000.

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Annexes

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ANNEXE 1 : schéma narratif, P. Larivaille, Poétique n°19, 1974.

AVANT PENDANT APRES

état initial

équilibre

transformation processus dynamique

provocation action sanction

déclenchement conséquence

état final

équilibre

ANNEXE 2 : schéma narratif du récit A ta santé, le loup, E. Schmidt, Centurion Jeunesse.

EXPOSITION COMPLICATION ACTION RESOLUTION CONCLUSION

Des loupsémigrent vers denouveauxterrains dechasse à la suited’une famine.

Ils abandonnent Petit-Loup qui ne peut passuivre près d’unvillage.

Petit- Louprecherche uneaide chez leshommes : 3 essaiset 3 refus.Petit- Loup va- t-il mourir ?

Petit- Loup trouveune aideprovidentielle. Ilest sauvé. Ceuxqui avaient refuséleur aide font unedémarche enverslui.

Petit- Loup aretrouvé unesécurité. Lebonheur est gagnépar tous lespersonnages.

ANNEXE 3 : généralisation du schéma narratif à partir du récit A ta santé, le loup.

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ANNEXE 4 : production d’élève.

David est heureux au Maroc mais il doit quitter son pays car son papa va chercher du travail enFrance. Seulement il laisse tous ses copains en partant.

« Est- ce que je vais trouver de nouveaux copains pour jouer avec eux ? » se demande- t- il.En France, David va à l’école mais il est triste. Les enfants ne veulent pas jouer avec lui : il a la

peau marron, il ne parle pas comme eux. Le soir, après l’école, il va dans la rue. Il pense pouvoirjouer mais les enfants qu’il rencontre le trouvent trop petit.

Le mercredi, il s’inscrit au foot parce qu’il pense que là, il va trouver des copains. Mais il n’a pasde belle tenue de sport ni de chaussures.

Alors sa maman qui le voit déçu lui achète un équipement et il devient gardien de but. Il joue bien.Il fait gagner son équipe.

Maintenant David est heureux, il a trouvé de bons copains dans son nouveau pays.

ANNEXE 5 : liste des moments dans l’ordre chronologique du récit Le papa de Simon, Guyde Maupassant, Ecole des Loisirs.

1- Vie heureuse de Simon et de sa mère sans contact avec le monde extérieur.2- Mépris de la population pour la Blanchette laissée seule par son fiancé à la naissance de

Simon.3- Entrée de Simon à l’école.4- Regroupement des enfants autour de Simon à sa première sortie de l’école à la suite d’une

nouvelle apportée par l’un des plus grands : « Simon n’a pas de papa ».5- Colère et rébellion de Simon qui entraînent la fuite des enfants.6- Résolution de Simon de se noyer pour mettre fin à son malheur.7- Arrivée d’un homme qui reconduit Simon chez sa mère.8- Confidence de Simon à sa mère sur ses intentions de se noyer car il n’a pas de père.9- Chagrin de la mère.10- Demande de Simon à l’homme prénommé Philippe : accepter qu’il soit son père.11- Revanche de Simon sur ses camarades : « Mon papa s’appelle Philippe ».12- Nouveau doute : « Ton papa n’est pas le mari de ta maman ».13- Nouvelle demande de Simon à Philippe : accepter d’être le mari de sa mère.14- Demande en mariage.15- Victoire de Simon qui peut annoncer à l’école : « Mon papa, c’est Philippe Rémy, le

forgeron ».

ANNEXE 6 : axes établis par les élèves à partir des moments du récit Le papa de Simon.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15Temps de l’histoire : ______________________________________

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6 3 4 5 7 8 1 2 9 10 11 12 13 14 15Temps du récit : ______________________________________

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ANNEXE 7 : production d’élève.

Ah ! La belle bête ! Il faut que je l’attrape. Aïe ! Elle se débat ! Il faut que je paraisse courageux.Je ne suis pas très rassuré mais je ne dois le dire à personne, mes camarades comptent sur moi pourla prendre.

Ouf ! Ca y est ! Elle est coincée ! Je suis sacrément content de pêcher cette tortue. Je leraconterai demain à tous mes copains pêcheurs. Ce soir je le dirai à ma famille, mes enfants vont êtrefiers de moi. Ils regretteront de ne pas avoir vu ça.

J’ai eu du mal à l’attraper cette grosse bête ! Mais heureusement que je n’étais pas tout seul.

ANNEXE 8 : proposition d’une séquence sur la description.

Objectifs:- permettre aux élèves d’identifier le descriptif dans le récit,- situer les fonctions du descriptif par rapport au narratif,- repérer la façon dont il s’inscrit de manière harmonieuse et naturelle dans le récit.

Matériel :L’auto- stoppeur de Roald Dahl (dans L’enfant qui parlait aux animaux), Folio- Junior.

Déroulement :1) Lecture individuelle du récit suivie d’un temps d’échange collectif (remarques, impressions, ...).2) Les élèves recherchent les articulations du récit. La structure du récit est donc supposée avoirdéjà été travaillée.3) Un bilan collectif permet de compléter au tableau l’organisation suivante :

Exposition Complication Action Résolution ConclusionPrésentation despersonnages et descirconstances deleur rencontre.

Défi lancé parl’auto- stoppeur auconducteur :sortede pari pourl’automobiliste quiveut prouver lesqualités de sonbolide.

L’excès devitesse.L’intervention dumotard : énoncédu délit/ procès-verbal/interrogation dupassager/ menacesLes suites :recherche del’identité dupassager,hypothèses/révélation par lepassager de sonidentité.

L’intervention dumotard est annuléepar le vol descarnets. Le voleura payé sa detteenversl’automobiliste.

Poursuite duvoyage. Les deuxpersonnages sontdevenuscomplices.L ’auteur admire levoleur.

(suite page suivante)

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4) Il s’agit de découvrir la présence du descriptif, d’en rechercher toutes les traces à l’intérieur durécit et d’en analyser le rôle.

5) Le bilan collectif de cette recherche doit permettre de situer ces éléments descriptifs,essentiellement présents dans la présentation et lors du développement de l’action.

Le tableau précédent peut alors être complété, avec une autre couleur, à l’aide des élémentssuivants :

s Colonne exposition :- L’automobiliste : luxe, confort, vitesse... fierté du propriétaire qui lance le défi.- L’auto- stoppeur : caricature : « sorte de rat ». Il est décrit longuement lors de son entrée en

scène et apparaît comme un personnage déplaisant, mystérieux et inquiétant.- Circonstances de la rencontre : quelques descriptions précisent la saison et le paysage.

s Colonne action :- L’automobile : évocation de sa puissance par opposition aux autres voitures qui n’avancent pas.- Le motard : « comme le bourreau vers sa victime » : portrait caricatural. Opposition avec

l’auto- stoppeur qui est maigre. Sa voix « tantôt dangereusement douce, tantôt telle un aboiement »,son allure méprisante, son regard dur, son assurance tranquille représentant la force satisfaite.

- L’auto- stoppeur : quelques courtes descriptions précisent sa voix, son regard, sa façon derouler sa cigarette, ses mains et ses doigts.

- Les objets restitués : courte description de la bague, objet de valeur.

6) Situations d’écriture.Plusieurs situations d’écriture sont possibles :

- Ecrire un récit dans lequel est inséré une description : « Je viens de recevoir un nouvel objetdont je suis fier (jouet, vélo, vêtements, ...). Un camarade m’incite à l’utiliser de façon excessive. Ilse produit un incident et je risque une punition ... Décrire l’objet en fonction de ce qui va seproduire ».

- Faire votre auto- portrait réel ou imaginaire.- A partir d’une trame de récit donnée aux enfants, décrire un personnage et son véhicule. Cette

description se situera dans la situation initiale (exposition) mais quelques éléments pourront êtreajoutés au cours du récit (action).

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ANNEXE 19 :production d’élève.

Le monde était vide et silencieux. Il y avait juste des étoiles qui s’ennuyaient.Mais un jour les étoiles pleurèrent et leurs larmes formèrent une grosse boule transparente. Mais il

n’y avait rien non plus sur cette boule. Mais un matin il y eut beaucoup de vent. Le vent fit tournertrès vite cette boule et elle se transforma en notre planète, la Terre.

Alors le soleil qui était parti chercher des amis dans l’univers réapparu car il était content detrouver une amie. Le soleil et la Terre jouèrent tous les deux. Comme elle était contente, elle fitpousser sur elle des fleurs et des arbres.

Puis un autre jour, des rivières, des routes et des animaux sont venus. Et puis, un soir, les hommeset les femmes apparurent sur la Terre. La Terre était vraiment heureuse.

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LE RECIT AU CYCLE 3 :

une variété d’entrées, une variété d’apprentissages, une variété de plaisirs

RESUME :

La diversité de textes qu’offre le récit n’est pas suffisante pour faire entrer les élèves dans uneculture littéraire. En effet, l’exploitation même du récit est à diversifier. Le choix de ces texteslittéraires s’effectue en regard de ce qu’a été et de ce qu’est la littérature à l’école. Une fois les récitsintroduits à l’école, deux entrées dans leur exploitation sont possibles : la compréhension littéraireavec la structure et les outils de la narration, et l’interdisciplinarité et la pluridisciplinarité par le récit.

MOTS CLES :

- récit- expression écrite

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- cycle des approfondissements- interdisciplinarité