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Journées francoitaliennes de psychomotricité et de réhabilitation neuropsychomotrice « Les gestes qui soignent » Milan les 4, 5 et 6 avril 2014 Maria Teresa PERSICO, Milan TNPEE (Thérapeute en neuropsychomotricité du développement)

Journées!franco-italiennesdepsychomotricité! et ...afpup.org/resources/Textes-interventions/Persico_FR.pdfde régulation, intersubjectif, caractérise aussi les cas cliniques complexes

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Journées  franco-­‐italiennes  de  psychomotricité  

et  de  réhabilitation  neuro-­‐psychomotrice  

 

«  Les  gestes  qui  soignent  »  

 

Milan les 4, 5 et 6 avril 2014

Maria Teresa PERSICO, Milan TNPEE (Thérapeute en neuropsychomotricité du développement)

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Le geste en suspens : la relaxation comme outil de formation Abstract This contribution is an introduction to the relaxation methodologies, starting from the specific of the method of J. Bergès, to think on their elective approach to the tonic dimension. The own use is indicated in clinic and educative fields as well as in the education of health worker. It is proposed as a first discussion on its application to the Italian situation. Pour travailler dans une relation de soin, il est nécessaire de suivre un parcours de formation axé sur les premiers échanges de la relation intersubjective, qui se manifestent à un stade précoce de développement. Ces échanges passent par la fonction tonique, qui joue en même temps le rôle de lien entre le fonctionnement interne et le monde extérieur auquel le corps/sujet se réfère, dans un système neuropsychique en activité constante chez tout individu. Ce fonctionnement primaire de régulation, intersubjectif, caractérise aussi les cas cliniques complexes auxquels le soignant est confronté dans le cadre de sa spécificité. La relaxation, axée sur la dimension tonique de la personne, devient donc un outil parfaitement adapté pour intervenir sur la fonction tonique, en soutenant l’individu dans un parcours qui l’amène avant tout à se percevoir, c’est-à-dire à prendre conscience de soi, à se savoir présent, à être attentif aux propres manifestations/modifications intérieures, aussi bien physiques que psychiques. Les premiers objets d’observation sont donc les différentes sensations, comme modifications/altérations des éléments internes, dans une dynamique de discontinuité-variation qui est propre au développement. La relaxation, grâce à sa structure et à sa méthodologie, va également permettre à l’individu de pouvoir appréhender tout le système relationnel dans lequel il est immergé avec son corps, en travaillant sur :

• Corps interne et extérieur • Moi et l’autre • Corps perçu et corps représenté • Segments corporels et unité • Tensions et émotions • Automatismes neurovégétatifs et conscience • Mouvement et repos • Temps subjectif et temps réel

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• Espace perçu et espace réel • Fonction et fonctionnement • Action et projet

Chacun de ces éléments est une partie intégrante de la méthodologie de relaxation et peut devenir un objectif du parcours entrepris. Après cette brève introduction, nous allons entrer dans les détails de la méthode J. Bergès, qui a été conçue pour les enfants souffrant de troubles psychomoteurs et de troubles du langage. La méthode reprend les apports du training autogène de Schultz, du dialogue tonique précoce mère-enfant de Wallon et de la fonction tonique d’Ajuriaguerra. Une synthèse des éléments plus significatifs nous permet de généraliser des concepts au domaine de la relaxation et d’introduire des sujets de discussion sur les contenus et les méthodologies. L’effet principal recherché, commun à toutes les méthodes, intéresse le niveau tonico-musculaire, à travers la perception du tonus de base en situation de repos, où l’action est remplacée par sa représentation. Ce processus va intensifier la sensibilité proprioceptive et extéroceptive et permettre de retrouver une « mémoire corporelle cénesthésique » qui a entrelacé, dans l’histoire du sujet, des vécus, des événements corporels, des échanges et des relations, en laissant libre cours aux émotions et aux évocations. La prise de conscience de ces liens affine la sensibilité tonico-émotionnelle. D’autre part, l’organisation du parcours en segments va permettre de faire un travail sur le schéma corporel. Le démembrement de l’unité corporelle en plusieurs parties va donner lieu ensuite à une reconstruction progressive et ordonnée du schéma corporel, en partant d’abord des parties fonctionnelles des mains et des pieds, puis en remontant aux membres supérieurs et inférieurs, avant d’arriver aux parties centrales/viscérales, plus en rapport avec le fonctionnement émotivo-végétatif. Cette sorte de recomposition va permettre la perception de la forme du propre corps, rendue objectivable par l’intervention du thérapeute qui se confronte à l’image de soi propre à chacun. De plus, le travail sur la construction de l’ensemble corporel sous-tend la perception des propres limites, définies par la peau frontière de soi. La méthodologie prévoit que le thérapeute utilise le toucher, dans le but de nommer puis de mobiliser la partie du corps choisie à chaque séance. Le thérapeute doit exercer un contrôle tonique, car cette action doit être adaptée au niveau tonique du sujet, mais ne doit pas demander d’effectuer des modifications ; l’objectif ne sera pas, par exemple, d’obtenir un relâchement du segment, comme dans d’autres traitements musculaires segmentaires, mais d’aider/accompagner le sujet à se percevoir. Le thérapeute va aussi s’approcher et s’éloigner du corps du patient, et ses mouvements alternant proximité/distance vont avoir une résonnance relationnelle. Ce type de

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contact entraîne chez le patient une réactivation du dialogue tonique primaire, à la base de l’harmonisation tonique et de l’imitation posturale. Les phases de la séance de relaxation se déroulent dans un ordre séquentiel et se répètent pour chaque partie du corps, de façon à aider et à rassurer l’enfant qui peut ainsi prévoir et apprendre au mieux. Cela lui donne la possibilité de refaire l’exercice à la maison, en autonomie, en ayant pleinement conscience du parcours entrepris. Le processus répétitif se rattache aussi à une composante d’autorégulation acquise par autoinduction. Une autre caractéristique de la méthode Bergès est de reporter le moment de la verbalisation du vécu à la séance suivante. La question de la parole sur/dans le vécu du corps est à la frontière des approches à visée psychothérapique et interprétative. Le choix d’intégrer dans la séance de travail sur/dans le corps un moment de parole mémoire-évocation peut soutenir l’expérience de la temporalité, qui est un passage important dans le développement de l’enfant et se différencie de l’action motrice réalisée ici et maintenant. L’évocation de l’expérience vécue peut ainsi faire naître pensées et associations, c’est un moyen d’expression et d’identification de l’enfant lui-même. Ces contenus démontrent que les méthodes pratiques de relaxation sont indiquées dans de nombreux cas, que ce soit dans le domaine clinique, éducatif ou formatif. Qu’en est-il aujourd’hui de l’enseignement et de l’application de ces pratiques dans le service public en Italie ? Dans le domaine formatif, la relaxation s’avère essentielle pour les professionnels de la santé intéressés par les soins à médiation corporelle, elle occupe une place importante dans le parcours personnel du thérapeute en neuropsychomotricité du développement, qui doit prendre conscience de sa propre motricité à partir des fonctions toniques de base. À ce jour, les cours de sensibilisation à la relaxation et les opportunités d’apprentissage des méthodes sont relativement restreints dans le cursus universitaire du TNPEE. Dans le domaine clinique, le recours aux méthodes de relaxation est limité en raison de plusieurs facteurs. D’une part, peu nombreux sont les professionnels qui ont complété leur parcours de formation en effectuant une supervision. D’autre part, la relaxation n’est pas souvent prescrite par les neuropsychiatres infantiles qui connaissent mal ces méthodes de réhabilitation. Dernièrement, le système de santé a inclus dans la perspective d’une médecine fondée sur les preuves (EBM) certaines méthodologies de réhabilitation répondant aux critères des niveaux essentiels d’assistance (LEA), en particulier celles qui se rapportent aux fonctionnements/apprentissages. Cette décision répond en partie à des réductions de budget dans le secteur de la réhabilitation. Sauf dans certains cas précis, comme par

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exemple le service de neuropsychiatrie infantile de Reggio Emilia -voir ci dessous-, l’intervention de relaxation rentre actuellement dans le cadre de la prise en charge par le TNPEE, soit en fin de parcours individuel soit en association avec d’autres interventions de réhabilitation (logopédie par exemple). Le recours à la relaxation est plus courant dans le domaine de la psychologie, où l’on proposera des méthodes de relaxation interprétatives dans les cas de problématiques liées à la corporéité. Dans le domaine éducatif, les indications se réfèrent plus généralement à l’approche holistique des parcours de bien-être, et s’adressent aux jeunes et aux adultes. Une réflexion sur les besoins de l’enfant, aujourd’hui, doit prendre en compte :

• Une altération progressive des rythmes neurovégétatifs liés aux fonctions de régulation de l’enfant, en raison de la modification des modalités de comportements de l’attachement primaire et des organisations familiales et sociales actuelles ;

• La tendance au passage/transfert de fonctions corporelles à un système extracorporel (technologies) qui privilégie des canaux perceptifs sélectifs (vision), une activité corporelle limitée à la motricité fine des doigts en coordination avec la vue, à un rythme accéléré.

Ces changements justifient de nouvelles propositions d’intervention sur la globalité/unité du corps, la perception du soi corporel, à des rythmes définis par la motricité, qui sont tous des objectifs spécifiques du travail de relaxation. Pour terminer cet exposé, voyons les statistiques d’une étude clinique faite par nos collègues Bertozzi, Borsi, Rossi, Degani, Lorenzani, Bisi et Ghillani dans un service de neuropsychiatrie infantile (AUSL1 de Reggio Emilia et de la Province de Mantoue) où est utilisée la méthode Bergès. 43 cas sont suivis, répartis comme suit :

− Hyperactivité et troubles du déficit de l’attention, 4 enfants entre 8 et 11 ans ; − Troubles anxieux, 5 enfants entre 9 et 14 ans ; − Troubles du comportement, 2 enfants de 12 ans ; − Troubles de l’apprentissage, 1 enfant de 9 ans ; − Tics, 3 enfants entre 9 et 14 ans ; − Trouble de la parole, 13 enfants entre 7 et 12 ans ; − Maux de tête, 2 enfants de 7 et 9 ans ; − Inhibition, 2 enfants de 8 et 13 ans ; − Troubles dépressifs, 2 enfants de 9 et 10 ans ; − Trouble de l’adaptation dans un cadre clinique à base organique, 2 enfants de 8

et 9 ans ; − Faible estime de soi, 2 enfants de 8 et 10 ans

                                                                                                                         1 L’AUSL est l’équivalent de l’Agence Régionale de Santé. (N.d.T.)

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− Léger handicap mental associé à des difficultés de perception du corps, 4 enfants entre 9 et 11 ans ;

− Trouble de la personnalité, 1 enfant de 11 ans. Bibliographie Ammaniti M., Gallese V. (2014). La nascita dell’intersoggettività, Cortina, Milano.

Bergès J., Bounes M. (1978). Il rilassamento terapeutico nel bambino, Masson, Milano.

Caffo E., Camerini G.B. (a cura di) (1991). Clinica della psicomotricità e del rilassamento, Guerini e Associati, Milano.

Camerini G.B., De Panfilis C. (2003). Psicomotricità dello sviluppo, Carocci, Roma.

Persico M.T. (a cura di) (2011). Il rilassamento terapeutico di Jean Bergès. Riflessioni sull’esperienza, Psicomotricità, vol. 15, n. 2 (42), giugno, pp. 48-51, Erickson, Trento.

Stern D. (2011). Le forme vitali, Cortina, Milano.

Maria Teresa PERSICO, Milan TNPEE (Thérapeute en neuropsychomotricité du développement)