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THÈSE
Pour l'obtention du grade deDOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS
École nationale supérieure d'ingénieurs (Poitiers)Pôle poitevin de recherche pour l'ingénieur en mécanique, matériaux et énergétique - PPRIMME
(Poitiers)(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)
École doctorale : Sciences et ingénierie en matériaux, mécanique, énergétique et aéronautique -SIMMEA (Poitiers)
Secteur de recherche : Energie, thermique, combustion
Présentée par :Khac Tien Nguyen
Dégradation thermique de matériaux solides poreux exposés au feu
Simulation numérique avec prise en compte des processuschimiques et mécanismes de transfert
Directeur(s) de Thèse :Jean-François Thovert, Thomas Rogaume
Soutenue le 18 décembre 2014 devant le jury
Jury :
Président Valeri Mourzenko Directeur de recherche, Pprime, Université de Poitiers
Rapporteur Arnaud Trouvé Professeur, Université du Maryland, College Park, USA
Rapporteur Gérald Debenest Professeur, INP, Université de Toulouse
Membre Jean-François Thovert Directeur de recherches CNRS, ISAE ENSMA, Université de Poitiers
Membre Thomas Rogaume Maître de conférences, XLIM, Université de Poitiers
Membre Éric Guillaume Ingénieur de recherche, LNE, Poitiers
Pour citer cette thèse :Khac Tien Nguyen. Dégradation thermique de matériaux solides poreux exposés au feu - Simulation numériqueavec prise en compte des processus chimiques et mécanismes de transfert [En ligne]. Thèse Energie, thermique,combustion. Poitiers : Université de Poitiers, 2014. Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr>
THÈSEpour l’obtention du Grade de
DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE POITIERS
(Faculté des Sciences Fondamentales et Appliquées)
(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)
École Doctorale :
Sciences et Ingénierie en Matériaux, Mécanique, Énergétique et Aéronautique
Secteur de recherche : Energétique, Thermique, Combustion
Présentée par
Khac Tien NGUYEN
Dégradation thermique de matériaux solides poreux exposés au
feu - Simulation numérique avec prise en compte des processus
chimiques et des mécanismes de transfert
Directeurs de thèse : M. Jean-François THOVERT
M. Thomas ROGAUME
Soutenance prévue le 18 décembre 2014
devant la Commission d’Examen
JURY
M. Gérald DEBENEST Professeur d’Université de Toulouse RapporteurM. Arnaud TROUVE Professeur d’Université de Maryland RapporteurM. Eric GUILLAUME Ingénieur de recherche ExaminateurM. Valeri MOURZENKO Directeur de Recherche au CNRS ExaminateurM. Thomas ROGAUME Maître de Conférences HDR ExaminateurM. Jean-François THOVERT Directeur de Recherche au CNRS Examinateur
ii
Table des matières
Remerciements vii
Résumé étendu ix
I Introduction générale 1
1 Contexte général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
2 Description générale du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
3 Objectifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
4 Brève revue de l’état de l’art . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
4.1 Modèle chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
4.2 Processus de transport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
4.3 Description de l’état du matériau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
4.4 Géométrie et conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
4.5 Méthodes de simulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
II Mécanismes et formulations microscopiques 21
1 Modèle chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
1.1 Données expérimentales, phénoménologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
1.2 Formulation d’un modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2 Modèle physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.1 Situation et scénario de base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
2.2 Propriétés des solides poreux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
2.3 Équations de bilan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
iii
Table des matières
2.4 Paramètres effectifs et équations constitutives . . . . . . . . . . . . . . . 48
2.5 Conditions initiales et conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . 51
2.6 Modèle de flamme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
III Modèle numérique 61
1 Description géométrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
2 Formulation aux volumes finis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
2.1 Principe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
2.2 Conservation des espèces condensées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
2.3 Conservation des espèces gazeuses . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
2.4 Conservation de l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
2.5 Formulation matricielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
3.1 Schémas explicites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
3.2 Schéma implicite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
4 Gestion des paramètres numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
4.1 Gestion du pas de temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
4.2 Convergence de l’algorithme itératif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
4.3 Lissage spatial des taux des réactions anaérobies . . . . . . . . . . . . . . 82
4.4 Traitement de la récession de la surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
IV Application au bois contreplaqué M1 89
1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
2 Simulations à l’échelle ATG . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
2.1 Modèle chimique de Fateh & al. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
2.2 Modèle chimique modifié . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
2.3 Modèle chimique simplifié . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base . . . . . . . . . . . . . . . 101
3.1 Compléments au modèle chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
3.2 Paramètres physiques et numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
3.3 Résultats locaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
3.4 Résultats globaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes . . . . . . . . . . . . . . . . 126
4.1 Influence des paramètres numériques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
4.2 Influence du modèle chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
iv
Table des matières
4.3 Influence des caractéristiques des matériaux . . . . . . . . . . . . . . . . 131
4.4 Influence de la configuration et du scénario d’exposition . . . . . . . . . . 138
5 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153
V Application au bois de sapin massif 157
1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
2 Adaptation des modèles chimique et physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159
3 Simulations à l’échelle ATG . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base . . . . . . . . . . . . . . . 165
4.1 Résultats locaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
4.2 Résultats globaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172
5 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes . . . . . . . . . . . . . . . . 175
6 Chemins réactionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
7 Discussion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182
VI Conclusions et perspectives 185
Références bibliographiques 189
v
vi
Remerciements
Dans un premier temps, je voudrais remercier le Conseil Régional Poitou-Charentes, qui a
financé la bourse dont j’ai bénéficié. Je souhaite également remercier Messieurs Jean-Paul Bon-
net puis Yves Gervais, Directeurs de l’Institut Pprime, et Monsieur Jacques Borée, Directeur
du Département Fluides Thermique Combustion, pour m’avoir accueilli au sein de l’entité de
recherche qu’ils dirigent.
Dans un second temps, je voudrais remercier tous les membres du jury d’avoir accepté
d’évaluer ce travail, et en particulier Messieurs Gérald Debenest et Arnaud Trouvé pour le
temps qu’ils ont bien voulu consacrer à l’établissement de leur rapport sur le mémoire.
Je voudrais adresser de grands remerciements à mes deux encadrants, Messieurs Jean-
François Thovert et Thomas Rogaume, qui tout au long de ces trois années m’ont beaucoup
aidé à développer mes connaissances en simulation numérique et à comprendre les mécanismes
physiques dans les milieux poreux. Ils m’ont apporté des connaissances dans le domaine de la
sécurité incendie et des travaux expérimentaux, et surtout m’ont inculqué les bases méthodolo-
giques d’un travail scientifique. Ils m’ont toujours donné de bons conseils et de bonnes solutions
lorsque j’étais bloqué. Les résultats de ce travail sont dûs en grande part à leur encadrement et
à leurs encouragements. Je tiens à remercier aussi Monsieur Valeri Mourzenko qui a activement
participé à l’encadrement concernant le développement du modèle numérique.
Il me faut aussi remercier mes collègues dans l’équipe expérimentale : Talal, Franck, Jocelyn,
Benjamin, Yen pour leurs données et leurs explications qui m’ont aidé à construire mes modèles
de calcul et à valider les résultats des simulations. Je souhaite remercier également Irina, Lu-
kasz pour leur aide et leur soutien concernant beaucoup d’outils informatiques dès mes premiers
jours au laboratoire. Je souhaite remercier les secrétaires du laboratoire et de l’école doctorale.
vii
Remerciements
Je pense notamment à Jocelyne Bardeau, Marie-Cannelle Cossin, Marie-Thérèse Peguin et Na-
thalie Fofana qui m’ont aidé pour les formalités administratives et ont rendu mes trois années
au laboratoire plus faciles et agréables. Je tiens à remercier beaucoup d’autres personnes au
laboratoire, étudiants stagiaires, doctorants, post-doctorants, pour l’expérience enrichissante et
pleine d’intérêt qu’elles m’ont fait vivre durant ces trois années.
Je tiens en dernier lieu à remercier mes parents qui m’ont accordé la confiance et les en-
couragements qui m’ont soutenu dans ce travail. Je voudrais exprimer tout ma reconnaissance
pour l’amour qu’ils me consacrent et pour les espoirs qu’ils placent en moi. Je leur dédie ce
travail comme un cadeau.
Ce travail a été financé par une bourse du Conseil Régional de Poitou-Charentes. Par ailleurs,
il s’inscrit dans le cadre du programme « Investissements d’avenir » portant la référence ANR-
11-LABX-0017-01 pour le laboratoire d’excellence INTERACTIFS.
viii
Résumé étendu
La combustion de matériaux solides comporte une phase de dégradation thermique avec
émission d’espèces volatiles, suivie de la combustion du résidu solide et des produits gazeux
dans l’espace avoisinant. Ce processus est d’une importance cruciale en situation d’exposition
au feu, volontaire ou accidentelle, puisque les substances combustibles émises par la pyrolyse
contribuent grandement à la naissance et à l’entretien du feu. La simulation du processus global
requiert une bonne description de la première phase, en fonction des paramètres ambiants
(température, concentration en oxygène). Toutefois, les caractérisations expérimentales par
mesure à petite ou grande échelles donnent des réponses différentes, du fait du couplage dans
le second cas avec des mécanismes de transport, de masse et de chaleur. L’objectif de l’étude
est d’établir la relation entre ces deux échelles, et de prédire le comportement macroscopique
du matériau en fonction des propriétés des constituants et des conditions ambiantes.
Ceci requiert une prise en compte détaillée des mécanismes chimiques et thermomécaniques
et de leurs couplages à différentes échelles. Une description des processus chimiques, incluant un
schéma réactionnel et les paramètres thermocinétiques associés peut être obtenue par mesures
thermogravimétriques sur des échantillons de taille suffisamment réduite pour exclure toute
influence limitante des processus de transport de chaleur et d’espèces chimiques. Des simulations
numériques peuvent ensuite être conduites à plus grande échelle, pour déterminer la réponse
du matériau dans une configuration géométrique donnée et selon l’historique des conditions
ambiantes.
La mise en place d’un outil numérique remplissant cette tâche fait l’objet de ce travail. Les
propriétés intrinsèques du matériau, parmi lesquelles un modèle chimique incluant un schéma
réactionnel et les paramètres thermocinétiques associés issus d’expérimentation à petite échelle
sont considérés ainsi que les mécanismes de transport et les effets limitants qu’ils peuvent
ix
Résumé étendu
introduire. La réponse du matériau peut ainsi être prédite pour des configurations géométriques
et des scénarios d’exposition arbitraires.
L’outil spécifique développé au cours de ce travail est basé sur une description à l’échelle de
Darcy. Il a pour objectif à terme d’être couplé à un code de simulation du feu dans son ensemble,
de sorte que les conditions auxquelles chaque élément solide serait exposé seraient décrites tandis
que la prédiction de l’évolution du feu dépendrait de la réponse des matériaux fournie par notre
module. Le modèle tient compte des réactions chimiques, des transports d’espèces et de chaleur
dans le milieu poreux par diffusion/conduction et convection par les gaz interstitiels, et de
l’évolution des propriétés du matériau au cours du processus. La résolution s’appuie sur une
formulation aux volumes finis avec un schéma implicite en temps à pas adaptatif. Le pas de
temps adaptatif est impératif, du fait des fortes non linéarités du problème, qui donnent lieu à
de brusques changements de régime.
Un jeu d’applications est présenté pour deux types de bois ayant des schémas réactionnels
différents, avec réactions séquentielles ou concurrentielles. Les simulations sont effectuées dans
des scénarios prescrits qui correspondent à des essais physiques normalisés en cône calorimètre
et une comparaison entre les résultats numériques et expérimentaux est effectuée. Ceci permet
d’établir une typologie des comportements, d’identifier les processus importants et les para-
mètres qui les gouvernent et de valider les prédictions numériques. Les résultats démontrent la
capacité du modèle numérique à prendre en compte des schémas réactionnels de formes diverses.
Ils rendent bien compte de la typologie des observations en diverse situations. La phénoménolo-
gie des processus est illustrée de façon détaillée sur des exemples et une grande variétés d’autres
situations est examinée, pour quantifier les influences des paramètres chimiques et physiques
ainsi que des conditions opératoires.
x
xi
xii
Chapitre I
Introduction générale
1 Contexte général
La lutte contre les incendies et notamment contre les incendies d’habitation est un enjeu
primordial. Les statistiques montrent qu’un incendie domestique se déclare toutes les deux mi-
nutes en France [1], avec des conséquences dramatiques. En dehors des graves dégâts matériels,
on recense 800 décès et 10 000 victimes dans 250 000 incendies d’habitation chaque année [1].
Les causes les plus fréquentes d’incendie domestique sont les installations électriques défec-
tueuses et les sources de chaleur (cigarette, barbecue, cheminée, feu allumé par un enfant... ).
Les meubles ou même les cloisons dans la maison sont pour la plupart combustibles (bois ou
plastique) ; ils prennent feu facilement et nourrissent l’incendie.
Du fait de l’impossibilité ou des forts coûts des essais expérimentaux à échelle réelle, les
investigations en sécurité incendie reposent sur l’expérimentation à échelle plus petite suivie
de simulations numériques. Pour étudier leur comportement au feu, les matériaux usuels de
construction ou d’ameublement tels que les plastiques (mousse de polyuréthane, polyméthacry-
late de méthyle (PMMA)... ), les bois (bois résineux ou contreplaqué en sapin, okoumé... ) sont
testés en laboratoire sous des dispositifs tels que le cône calorimètre. Ces expériences permettent
de décrire en partie la phénoménologie de la dégradation des matériaux solides poreux exposés
au feu. Cependant, bien que les expériences soient menées à des échelles plus petites, les coûts
demeurent considérables. Par ailleurs, tous les scénarios ne pouvant être considérés et tous les
paramètres physicochimiques ne pouvant être mesurés, ces expériences seules ne permettent
pas de comprendre et de quantifier en détail tous les mécanismes mis en jeu. La simulation nu-
mérique est donc nécessaire dans tous les cas au moins comme outil d’interprétation et autant
que faire se peut, de prédiction.
Dans la communauté de recherche en sécurité incendie, l’usage de codes de simulation est
1
Chapitre I. Introduction générale
de plus en plus développé. Les modèles dits de pyrolyse utilisés dans ces codes s’intéressent
notamment aux processus de dégradation thermique des matériaux solides, en décrivant le flux
de matière volatile émis et la perte de masse. Les modèles de pyrolyse actuellement utilisés
au sein des différents codes de simulation des incendies sont souvent sommaires et imprécis :
ils sont empiriques ou semi-empiriques, et lorsque la vitesse de perte de masse est décrite
par une loi cinétique, elle est souvent globale, simplifiée à 1 ou 2 étapes. Pourtant, de nom-
breux combustibles se décomposent thermiquement en de multiples réactions séquentielles ou
concurrentielles, rendant ces différents modèles inappropriés et sources d’erreurs. Devant cette
situation, il est nécessaire de créer un code capable de traiter des modèles de pyrolyse plus
complexes, de calculer plus précisément le débit de matière volatile et la perte de masse, et
pour être complet, de prendre en compte des processus chimiques autres que la dévolatilisation
(tels que la combustion hétérogène des matériaux).
Le présent travail, purement numérique, est réalisé en parallèle avec une autre étude de
nature expérimentale, menée dans l’axe Combustion Hétérogène de l’Institut Pprime à Poitiers
[2, 3]. Les observations et données expérimentales issues de travail et de nombreux autres anté-
rieurs dans l’équipe [4–10] fournissent les éléments de base pour la construction et la validation
du code de simulation.
Ce mémoire est organisé comme suit. Le reste du premier chapitre présente les traits les plus
généraux de la thèse. Une description plus concrète du contexte et de la nature du problème
que nous étudions est mise en place. Les mécanismes de base de la dégradation thermique des
matériaux solides poreux sont explicités, et les objectifs de notre travail sont définis. Puis, une
revue bibliographique décrit comment ce sujet est habituellement traité et situe la position de
notre travail dans ce contexte.
Le Chapitre II décrit l’approche conceptuelle. On présente d’abord le principe de la mo-
délisation des aspects chimiques, puis la prise en compte des phénomènes physiques qui inter-
viennent tels que convection de masse et de chaleur, diffusion de masse, conduction de chaleur,
rayonnement... ainsi que les configuations, scénarios et conditions aux limites associés.
Le Chapitre III décrit l’implémentation numérique des éléments du modèle physicochimique,
en commençant par la formulation discrétisée du problème. La procédure de résolution est
ensuite détaillée, ainsi que la méthode de gestion de certains aspects spécifiques.
Les Chapitres IV et V présentent les résultats des simulations pour deux matériaux différents
avec de nombreux éléments de discussion. Le premier concernent un bois contreplaqué, pour
lequel des résultats très complets sont décrits, avec exploration d’un grand nombre de variantes
relatives aux paramètres et aux scénarios d’exposition. Le second traite plus rapidement mais
2
I.2 Description générale du problème
de façon similaire le cas du bois de sapin massif.
Enfin, le Chapitre VI synthétise brièvement les résultats obtenus, décrit des améliorations
et extensions possibles du modèle et évoque les directions souhaitables pour une poursuite de
ce travail.
2 Description générale du problème
Avant tout, il est nécessaire d’éclaircir quelques notions. La dégradation (ou décomposition)
est un processus de transformation de substances complexes en substances plus simples sous
l’effet de processus thermiques ou chimiques. Par exemple, le bois est dégradé en charbon puis
en cendres avec émission de gaz ; un polymère peut être dégradé en monomère, gaz, huile...
Les matériaux étudiés ici sont à base de bois. Ils sont classiquement utilisés dans l’habitation
(matériaux de construction, d’ameublements). Il s’agit de solides poreux, c’est à dire qu’ils
contiennent des pores qui permettent la circulation de gaz ou de liquide. Ils se dégradent sous
l’effet d’une source de chaleur (un feu, un appareil électrique) et libèrent des combustibles
gazeux. Ces derniers, en réaction avec l’oxygène permettent s’enflammer ou alimenter un feu
pré-existant. Le processus mis en jeu est multi-physique et multi-phasique au sein du milieu
poreux.
L’étude de la décomposition des matériaux solides peut être menée à différentes échelles,
qui font intervenir des processus et surtout des couplages entre processus de complexités crois-
santes : échelle de la matière (échelle microscopique, millimétrique ou submillimétrique), échelle
du matériau (échelle du cône calorimètre ; centimétrique) et échelle du produit (objet, par
exemple). La première échelle ne met en jeu en principe que des processus chimiques, ou plus
précisément, les processus de transport ne jouent aucun rôle limitant. La dernière fait interve-
nir de multiples compétitions entre les nombreuses échelles de temps associées avec les deux
types processus. L’échelle intermédiaire correspond typiquement à celle d’essais normalisés en
cône calorimètre. Elle fait également intervenir des couplages mais dans des configurations et
scénarios simples, supposées être représentatifs de situations réelles. Le schéma de la figure I.1
donne une vision globale de ces études, des travaux à chaque échelle et des liaisons entre elles.
Les études à échelle réelle sont généralement difficiles à réaliser du fait de coûts très élevés.
Ceci proscrit leur usage ou restreint leur champ d’investigation a un très petit nombre de
scénarios, à mettre en regard du grand nombre susceptible de survenir en cas de sinistre. Cette
limitation peut être partiellement contournée dans l’étude des incendies par des expériences
à une échelle importante mais réduite, respectant moyennant une similitude des situations
3
Chapitre I. Introduction générale
Figure I.1 – Démarche scientifique de l’étude de la décomposition thermiques des matériaux solides.
réelles [11]. Toutefois, cette approche applicable à l’aspect traitant de la dynamique du feu
ne l’est pas pour l’étude de la dégradation des solides, faute d’une connaissance suffisante des
conditions de similitude. Celles-ci résultent de la compétition entre les processus chimiques et
thermomécaniques, qui constituent précisément le problème que le présent travail cherche à
décrire. Ainsi, le traitement du problème global du sinistre passe donc quasi-nécessairement
par la simulation numérique, et une bonne description du comportement des solides exposés au
feu est indispensable pour que cette simulation soit réaliste.
La connaissance nécessaire à cette description est traditionnellement recherchée dans des
essais à plus petite échelle, où un échantillon du matériau est exposé au feu dans une confi-
guration simple normalisée, avec un éventail de sollicitations supposées représentatives des
agressions subies en situation réelle. Le dispositif le plus courant dans l’étude de la décompo-
sition des matériaux solides à cette échelle est le cône calorimètre. A noter que les données
expérimentales utilisées dans ce travail sont issues d’essais avec ce dispositif [2, 6–8].
Dans les expériences sous cône calorimètre, les échantillons sont exposés à un flux de chaleur
contrôlé émis par une spirale chauffante. Ce flux est réputé uniforme [12] et le processus est
considéré comme unidimensionnel. Sous l’effet de la chaleur, le matériau se dégrade et libère
des produits gazeux. Les gaz émis s’enflamment éventuellement au dessus de l’échantillon si
le mélange formé avec l’oxygène présent dans le milieu ambiant le permet. Le produit final
de la décomposition thermique du bois est un résidu charbonneux. En présence d’oxygène, la
4
I.2 Description générale du problème
combustion de ce charbon aboutit finalement à la formation de cendres. Ces phénomènes font
intervenir des mécanismes physiques (transferts de chaleur et d’espèces chimiques) et chimiques
(pyrolyse, combustion). Au cours de l’expérience, la masse et le taux de perte de masse de
l’échantillon sont enregistrés en continu. Des mesures de température et de composition des
gaz émis peuvent également être effectuées conjointement.
A cette échelle, la réponse du matériau dépend de la configuration géométrique (épaisseur
de l’échantillon, par exemple) et des conditions ambiantes imposées (température, puissance
radiative incidente, teneur en oxygène... ). Toutefois, la réponse instantanée apparente, c’est-à-
dire les bilans de flux massiques et thermique à travers la face exposée de l’échantillon, ne dépend
pas que des conditions ambiantes régnant à chaque instant à l’extérieur. Elle résulte également
de la composition des réponses locales, en chaque point dans l’épaisseur du matériau, selon
les conditions locales de température, de concentration et de l’avancement de la dégradation.
Différentes phases de dégradation peuvent par exemple exister simultanément près de la surface,
où la température est déjà élevée, et en profondeur, où son élévation est différée. Par conséquent,
la réponse apparente instantanée dépend de toute l’histoire des conditions ambiantes, et donc
du scénario prescrit pour leur évolution.
Cette réponse complexe peut en principe être prédite si tous les processus mis en jeu et
leurs couplages sont décrits dans un modèle. Les réactions chimiques (séchage/déshydratation,
pyrolyse, combustion) se produisent à un taux qui dépend des concentrations en présence et
de la température locale. Elles consomment ou produisent de la masse et de la chaleur. Les
transferts de masse (par convection et diffusion) et de chaleur (par convection, conduction et
rayonnement) sont régis par des problèmes de mécanique des fluides et de thermique, qui font
intervenir les propriétés de transport effectives du matériau. Ces propriétés évoluent avec l’état
de dégradation. La prédiction de cette évolution est en elle-même un problème extrêmement
complexe. Elle n’est pas étudiée en tant que telle dans ce travail mais décrite par des lois empi-
riques. Les problèmes thermomécaniques peuvent donc être explicitement formulés, moyennant
quelques simplifications décrites en détail dans le Chapitre 2, et doivent être couplés avec un
modèle décrivant les processus chimiques.
Une caractérisation intrinsèque de ces processus chimiques est donc nécessaire. Afin de
s’affranchir de toute influence des processus de transport, elle doit être conduite séparément à
une échelle plus petite, l’échelle microscopique. La petite taille des échantillons et la rapidité
des transferts qui en découle permet alors de supposer l’uniformité de toutes les variables
d’état (température, concentrations). Les techniques d’analyse thermogravimétrique (ATG) et
de calorimétrie différentielle à balayage (Differential Scanning Calorimetry ou DSC) donnent
alors accès aux bilans de masse des réactions dans des conditions thermodynamiques données
5
Chapitre I. Introduction générale
(pour l’ATG), aux chaleurs de réaction associées (avec la DSC), et peuvent être complétées par
une analyse chimique des gaz produits, pour une meilleure caractérisation des réactions mises
en jeu. On peut alors en déduire un schéma réactionnel et les paramètres thermocinétiques
associés. Concrètement, les processus chimiques sont trop complexes pour qu’une description
complète soit possible et les modèles établis prennent la forme simplifiée de réactions globales
entre pseudo-espèces représentatives d’une réalité beaucoup plus compliquée.
3 Objectifs
Au vu de ce qui précède, il apparait souhaitable de disposer d’un outil de simulation numé-
rique capable, sur la base d’un modèle chimique intrinsèque pour un matériau donné, de prédire
son évolution sous une sollicitation thermique dans une configuration géométrique donnée. Ce
outil doit pouvoir se substituer à moindre coût et avec plus de souplesse aux essais physiques,
afin d’explorer l’infinie variété des situations d’exposition envisageables, et de prendre en compte
directement la dégradation du matériau exposé au cours de la simulation plus globale d’un in-
cendie.
Ainsi, le but de ce travail est de développer un tel outil. Ceci suppose la prise en compte de
tous les phénomènes décrits ci-dessus. L’objectif ultime, qui dépasse le cadre de ce travail mais
définit son orientation générale, est de contribuer à l’élaboration d’un simulateur complet des
situations réelles d’incendie, en articulant deux modules, comme le schématise la figure I.2 :
– un simulateur du feu proprement dit, dans le domaine extérieur (symboliquement dé-
nommé "FIRE"), décrivant notamment les conditions régnant à la surface des matériaux
présents dans le local ou constituant ses parois ;
– un simulateur de la dégradation des solides exposés au feu ("DEGRAD"), rendant compte
notamment des émissions de gaz combustibles, qui contribuent au développement du
sinistre.
Seul le second module est traité dans ce travail. Les résultats qu’il doit délivrer sont le
bilan thermique et les flux d’espèces chimiques à la surface du matériau, éventuellement en
chaque élément de surface du matériau inclus dans les frontières du domaine de calcul de
FIRE et soumis à des conditions qui peuvent être différentes. Ce sont ces paramètres qui
déterminent en grande partie l’évolution du sinistre, la puissance thermique de l’incendie, la
quantité d’oxygène consommée, sans oublier les risques pour les personnes associés à l’émission
de substances toxiques. Toutefois, l’obtention de ces paramètres globaux requiert comme on l’a
vu la simulation du détail des processus dans l’épaisseur des matériaux.
6
I.3 Objectifs
Figure I.2 – Schématisation de l’interface entre les simulations des domaines extérieurs au solide (FIRE)et intérieur au solide (DEGRAD).
Le code DEGRAD se place dans les conditions des expériences à l’échelle typique du cône
calorimètre. Le matériau et les conditions ambiantes auxquelles il est exposé sont considérés
comme uniformes dans les directions parallèles à la face exposée et le problème est unidimen-
sionnel, les variables ne dépendant que de la position dans la direction normale à cette surface.
Ceci est également une hypothèse raisonnable en situation d’incendie pour un élément de sur-
face à la frontière du domaine de simulation du code FIRE, dont le maillage est en principe
fixé de façon telle que les conditions varient peu sur l’étendue d’un élément de frontière. La
simulation par FIRE, 2D ou 3D, peut donc faire appel à DEGRAD pour connaître, avec la
résolution temporelle et spatiale désirée, le comportement et les émissions des matériaux qui
constituent ses frontières.
Le présent travail se concentre sur le développement du code DEGRAD et aucun couplage
effectif avec un code extérieur n’a été effectué à ce stade. Dans les exécutions pour la mise au
point du code et pour ses premières exploitations, les conditions ambiantes sont donc décrites
sous la forme de conditions aux limites prescrites, selon des scénarios simples qui correspondent
aux essais typiques sous cône calorimètre. Ce cadre permet notamment d’utiliser les résultats
des essais au cône calorimètre pour valider les prédictions du code, qui rappelons-le sont ba-
sées uniquement sur la description des transferts couplée à un modèle chimique issu des tests
7
Chapitre I. Introduction générale
ATG/DSC à l’échelle microscopique. Il permet également de mettre en évidence l’influence dans
ces essais de certaines caractéristiques du dispositif dont l’ampleur est difficile à évaluer d’une
autre façon, comme la configuration du porte-échantillon.
Il est à noter que nous considérons dans ce travail exclusivement des matériaux de type bois
ou dérivés du bois, dont la dégradation implique une étape anaérobie produisant un résidu solide
charbonneux ("charring"). L’oxydation et la dégradation ce charbon laissent elles-mêmes un
résidu solide ultime (cendres). La prise en compte de réactions sans résidu solide ne présenterait
pas de difficulté supplémentaire. Toutefois, les matériaux pouvant fondre (voire bouillir) sous
l’effet de la température, comme beaucoup de matières plastiques, donnent lieu à une situation
toute différente qui n’est pas abordée ici.
Concrètement, pour atteindre l’objectif ci-dessus, il faut réunir et articuler deux éléments :
– un modèle chimique décrivant les réactions chimiques ayant lieu lors de la dégradation du
matériau, avec les paramètres thermocinétiques associés ;
– un modèle physique décrivant tous les phénomènes thermomécaniques nécessaires dans
un milieux poreux, avec les coefficients effectifs associés.
Dans la pratique, beaucoup d’éléments d’information manquent à notre connaissance, concer-
nant aussi bien les paramètres thermochimiques que les propriétés effectives des matériaux dans
leurs états successifs de dégradation. Dans les applications effectuées ici, les schémas réaction-
nels et les lois cinétiques sont généralement issus de l’analyse des résultats obtenus par ATG.
Ils doivent être complétés par certaines données thermochimiques non mesurées, sur la base de
données de la littérature pour des matériaux comparables ou d’estimations raisonnées.
Les nombreux coefficients effectifs de transport dans le milieu poreux (porosité, perméabilité,
conductivité thermique, coefficient de diffusion, émissivité... ), et qui plus est dans les états de
dégradation successifs de ce milieu, sont tout aussi mal connus. Certaines valeurs peuvent être
trouvées dans la littérature, mais les résultats des travaux antérieurs font l’objet dans ce domaine
d’une très grande variabilité. On doit donc là encore compléter les données disponibles par des
estimations raisonnables des propriétés et de leurs lois d’évolution, basées sur des arguments
empiriques ou sur la considération de situations analogues. Il est toutefois à noter que ces
incertitudes n’enlèvent pas tout intérêt aux simulations. Des études paramétriques peuvent être
conduites en faisant varier ces coefficients dans une large plage, mettant ainsi en évidence les plus
déterminants pour le comportement global, et révélant du même coup les paramètres à mesurer
en priorité lors de la caractérisation du comportement au feu de matériaux de construction.
Enfin, la formulation du modèle numérique et la définition d’une procédure de résolution est
une tâche difficile et complexe. Ceci tient d’une part à la nature du problème lui-même, avec un
8
I.4 Brève revue de l’état de l’art
grand nombre de mécanismes couplés, présentant une grande variété de temps caractéristiques
associés entraînant des difficultés de gestion de la simulation, et souvent fortement non linéaires
ce qui pose des difficultés de stabilité et demande une gestion complexe de la simulation. D’autre
part, certaines contraintes résultent de l’objectif visé. L’outil doit être formulé de façon très
générale, afin de permettre facilement la prise en compte de schémas réactionnels divers, avec
des nombres d’espèces et de réactions potentiellement importants. Il doit permettre d’obtenir
une précision satisfaisante pour un coût raisonnable, puisqu’il est destiné à être appelé très
intensivement par le code FIRE pour décrire l’évolution du solide derrière un nombre d’éléments
de frontière qui peut être très grand. Il doit également présenter une bonne robustesse puisqu’il
devra opérer dans des conditions très variées et susceptibles d’évoluer fortement et rapidement
au cours d’une même simulation. On verra qu’en pratique, la stabilité et la robustesse sont
parmi les points les plus épineux à satisfaire.
4 Brève revue de l’état de l’art
Il n’est pas dans notre intention de dresser ici un panorama complet de la très vaste lit-
térature consacrée à la modélisation de la dégradation et de la combustion des combustibles
solides exposés au feu. Des revues très complètes et assez récentes peuvent être consultées dans
[13–16] et le paysage n’a pas fondamentalement changé depuis lors. Il est toutefois utile d’intro-
duire brièvement les principales approches conceptuelles dans le domaine et quelques éléments
techniques, afin de situer notre travail dans cet ensemble et notamment par rapport à quelques
uns des modèles existants. Notons que l’attention étant portée plus spécifiquement dans cette
thèse sur le bois, la brève revue bibliographique qui suit se concentre plutôt sur les modèles
applicables aux matériaux charbonneux, c’est-à-dire dont la pyrolyse donne lieu à la forma-
tion d’un résidu solide et combustible (charbon). En revanche, les sources ne se limitent pas
aux travaux de la communauté de la sécurité incendie. Les phénomènes qui nous intéressent
interviennent dans un cadre beaucoup plus large du génie chimique, bien que les situations
(par exemple réacteurs, souvent en lit fluidisé et donc solide sous forme de particules) et les
matériaux puissent différer.
Les modèles les plus simples visant à la description de la dégradation des matériaux solides
sont basés sur des arguments globaux, et relient par exemple la perte de masse au flux d’énergie
reçu par le matériau divisé par la chaleur de la réaction de pyrolyse, à partir du moment où sa
surface atteint un seuil de température déduit d’observations expérimentales. D’autres trans-
posent directement les taux de pertes de masse mesurés au cours d’expériences, par exemple
9
Chapitre I. Introduction générale
sous cône calorimètre dans des conditions d’exposition considérées comme représentatives.
Il va de soi qu’en dehors de circonstances très particulières, ces modèles ne permettent pas
de décrire la réponse au cours du temps du matériau en fonction des conditions ambiantes. Dans
les premiers, la réponse est supposée ne dépendre que d’un état d’exposition instantané ; ils ne
prennent pas en compte les transferts de chaleur au sein du matériau, qui en dehors de pièces très
fines peuvent considérablement en retarder la réponse. Les seconds supposent que des données
soient disponibles pour une plage suffisante de conditions (taux d’irradiation, composition de
l’atmosphère ambiante), qu’elles aient été acquises dans un scénario raisonnablement similaire
à celui auquel le matériau est soumis dans le cas d’application, et dans une configuration
également similaire (forme et épaisseur de la pièce, par exemple, et conditions à ses limites).
Comme cette réponse résulte d’effets limitants associés aux processus de transport, elle n’est
pas transposable à des scénarios ou configurations différentes. Enfin, les deux approches sont
peu applicables en dehors de schémas réactionnels très simples. Si par exemple la dégradation
présente plusieurs étapes successives, même séquentielles (mais qui peuvent devenir simultanées
en différentes positions à l’intérieur d’une pièce épaisse), une connaissance de l’état du matériau
en fonction de la position est nécessaire pour prédire le comportement global apparent, qui
résulte de la superposition des réponses locales.
Toutes ces raisons ainsi que le développement des moyens de calcul ont suscité l’apparition
de modèles plus détaillés, avec prise en compte explicite de processus de transport, sous une
forme plus ou moins élaborée. Ces modèles incluent divers mécanismes supposés contribuer à
la détermination des comportements globaux, qu’ils ont pour ambition de parvenir à prédire,
avec prise en compte possible (à des degrés divers) de l’influence de conditions ambiantes insta-
tionnaires et de configurations géométriques et conditions aux limites arbitraires. Les variables
telles que la température et les compositions des phases solides et gazeuses varient en fonction
du temps et de la position. Elles sont régies par des équations de conservation de masse, de
quantité de mouvement et d’énergie, couplées avec les lois cinétiques des réactions chimiques.
Au cours du temps, des modèles de complexité croissante sont ainsi apparus. Notre effort se situe
dans cette lignée, consistant à résoudre les équations du problème dans une formulation aussi
générale que possible, susceptible de s’appliquer à une diversité de situations et de matériaux.
Ce sont les approches de ce type qui sont discutées ici.
Les nombreux modèles décrits dans la littérature diffèrent par un grand nombre d’aspects :
(i) la complexité du modèle chimique : types et nombre de constituants considérés, types de
processus (séchage, pyrolyse, combustion... ) et nombre de réactions associées, types de
lois cinétiques (infiniment rapides ou taux de réaction finis et variables) ;
10
I.4 Brève revue de l’état de l’art
Figure I.3 – Typologie de modèles chimiques (illustration tirées de [17]).
(ii) la nature des processus de transport pris en compte ;
(iii) la description de l’état du matériau dans ses étapes successives de dégradation et de
l’évolution de ses propriétés ;
(iv) la configuration géométrique et le type de conditions aux limites considérées ;
(v) les méthodes numériques de simulations.
Ces différents points sont évoqués rapidement dans les sections suivantes. Les options retenues
dans certains modèles représentatifs sont mentionnées, pour comparaison avec celles adoptées
dans notre travail.
4.1 Modèle chimique
Le modèle chimique est un élément fondamental et il conditionne bien entendu beaucoup
les options possibles pour tous les autres aspects du modèle. Il repose en premier lieu sur
un choix des espèces ou pseudo-espèces qui seront prises en compte. Concernant la pyrolyse,
Grønli [17] en décrit les principales catégories, qui sont toutes implémentées dans son code
de simulation FLOWPOR, et qui sont schématisées dans la figure I.3. Di Blasi en donne une
classification similaire dans [18] avec quelques variantes plus élaborées dans [14]. Ces revues
compilent également les paramètres thermocinétiques associés qu’il est possible de trouver dans
la littérature.
La forme la plus simple est la plus ancienne historiquement puisqu’elle date au moins de
Kung (1972) [19]. Elle reste toutefois très utilisée jusque dans des travaux récents [17, 20–35].
La pyrolyse est modélisée par une seule réaction globale dont les produits sont un résidu solide
11
Chapitre I. Introduction générale
(char) et des espèces volatiles (figure I.3a). Ce modèle est parfois enrichi par la prise en compte
du séchage [36]. Le logiciel THERMAKIN, développé par le groupe de Stoliarov [31, 34, 37–39]
semble posséder la capacité de manipuler des schémas réactionnels complexes. Toutefois, les
applications qui en ont été présentées ne font intervenir qu’une réaction de dégradation, ou au
mieux deux réactions séquentielles.
Dans un autre modèle presque aussi ancien (Shafizadeh, 1977) [40], la biomasse en cours
de dégradation passe par un intermédiaire (”cellulose active”) et produit un résidu solide, des
produits volatils et des goudrons (tar). Ce modèle correspond à la figure I.3c. Noter qu’à la
température où ils sont produits, les goudrons sont à l’état gazeux. Plus récemment, ce modèle
a été utilisé en considérant que les goudrons se décomposent ensuite en char et volatils [41].
Le modèle de Chan et al. (1985) [42] n’inclut pas l’intermédiaire de la cellulose active mais
il utilise trois lois cinétiques indépendantes pour les productions de char, tar et de volatils. Il
inclut en outre le séchage et le cracking des goudrons, qui se décomposent en volatils légers et
en un résidu solide. Si cette décomposition se fait par deux réactions concurrentes, on obtient le
modèle de la figure I.3e [18]. Diverses formes plus élaborées en ont été données, telles que celui
de la figure I.3d qui détaille un peu plus la composition des divers produits [43]. Ce modèle
(e) est un des plus répandus [18, 40, 44–47]. Il peut prendre une forme simplifiée sans prise en
compte du cracking du tar [48, 49] ou en considérant qu’il ne produit que des volatils [50]. Il
peut aussi prendre une forme enrichie en introduisant un solide intermédiaire entre le bois et
le char [51].
Tous les modèles précédents sont d’une nature phénoménologique. Ils distinguent un nombre
plus ou moins important de réactions, selon une typologie globale et basée essentiellement sur
le type général d’espèces produites. Ils rendent compte d’un comportement apparent mais ne
prétendent pas décrire le détail des mécanismes chimiques et en particulier ils ne prennent pas
en compte la composition initiale du matériau soumis à la dégradation.
Une seconde catégorie de modèles procède différemment, en incluant cette composition
comme point de départ de la description. Il s’agit d’une approche plus ambitieuse, puisqu’elle
entreprend de remplacer une description phénoménologique par un modèle analytique. Typi-
quement, la biomasse est représentée pas ses trois composants principaux, la cellulose, l’hémi-
cellulose et la lignine, qui se décomposent de façons indépendantes suivant des lois cinétiques
qui peuvent être mésurées séparément pour chacun de ces éléments [52]. Ceci correspond au
modèle de la figure I.3b. Des travaux récents [53–55] utilisent ce type de description.
Il est intéressant de noter la démarche de Haseli et al. qui après avoir fait usage d’un
12
I.4 Brève revue de l’état de l’art
modèle détaillé de type (b) [54] sont revenus dans un travail ultérieur au modèle (a) à une seule
réaction [35] qui, convenablement conditionné, permet d’obtenir une réponse similaire. De la
même façon, Di Blasi utilise avec [36] un modèle à une seule réaction (quoiqu’avec prise en
compte du séchage) et se trouve donc en retrait par rapport à ses travaux antérieurs [18]. Là
encore, l’illustration est faite qu’un modèle simplifié (associé du reste à d’autres approximations)
peut fournir des résultats d’une précision raisonnable.
En dehors de ces deux cas, chaque auteur tend à avoir son modèle chimique de prédilection.
Toutefois, les codes FLOWPOR [17] et GPYRO [13] incorporent ou peuvent incorporer toutes
les variantes présentées ici. GPYRO possède en outre un module pour la détermination des
paramètres thermocinétiques, par optimisation basée sur des algorithmes génétiques à partir
de données expérimentales 1.
L’outil de simulation présenté dans ce mémoire n’est pas non plus limité a priori quant à la
forme du schéma réactionnel. Nous verrons plus loin que deux types de modèles ont été utilisés
dans notre étude. Le premier ([6], cf. figure IV.1) appartient à la première catégorie. Bien
que des étapes multiples soient distinguées pour rendre mieux compte d’événements successifs
dans les mesures de taux de perte de masse en analyse thermogravimétrique, la description est
phénoménologique. Le second ([2], cf. figure V.1) appartient à la seconde catégorie et présente
une complexité supérieure à la figure I.3b, puisque des interactions entre les décompositions
des composants initiaux (cellulose, hémicellulose, lignine) sont également prises en compte. En
outre, à la différence de FLOWPOR et de GPYRO, la combustion du charbon est prise en
considération.
Dans ce qui précède, nous n’avons évoqué que la description de la pyrolyse du matériau, sans
aborder la combustion hétérogène du résidu solide. Dans le domaine de la sécurité incendie,
pratiquement tous les modèles se concentrent sur la pyrolyse. Elle est d’importance cruciale
dans ce contexte, par la quantité de gaz combustibles (et éventuellement toxiques) qu’elle
libère et elle conduit au paroxysme du sinistre. La combustion du résidu solide intervient dans
une seconde phase, moins violente. De ce fait, la littérature consacrée à cet aspect provient
essentiellement de la communauté du génie chimique, en vue d’application au brûlage de bois
ou de charbon pour la production d’énergie, généralement en lit fluidisé. Une revue récente a
été établie par [15].
On ne peut toutefois ignorer l’importance de la combustion du solide dans certaines situa-
1. Ou du moins un module qui fournit une aide pour cette détermination. Une formulation préliminaire d’unschéma réactionnel reste nécessaire, et il est difficile de formaliser ou d’automatiser entièrement la recherche desparamètres thermocinétiques.
13
Chapitre I. Introduction générale
tions d’incendie. Les feux couvants peuvent présenter de grands risques et les feux de profondeur
perdurent très longtemps dans les incendies de forêt. En outre, le modèle que nous mettons
en place peut aussi trouver des applications dans le domaine des réacteurs pour la production
d’énergie. Nous avons donc choisi d’inclure la combustion du charbon dans notre description.
Il existe peu de modèles traitant à la fois de la pyrolyse et de la combustion hétérogène.
La plupart ne considèrent que le deuxième processus, [56–63], avec des particules carbonées
d’origines diverses, allant du charbon à des matériaux modèles. Parmi ceux qui considèrent les
deux mécanismes, tous utilisent le modèle de pyrolyse le plus simple de la figure I.3a [24, 27,
32, 35] à l’exception de [48] et [54] qui font usage de ceux des figures I.3e et b, respectivement.
Les combustibles considérés sont du charbon bitumineux [24], du charbon fossile [32] ou du
bois [27, 35, 48, 54]. Compte tenu de l’application et de la plage de température concernée, la
gazéification du carbone par CO2 est souvent considérée. La revue détaillée [15] des modèles
chimiques concernant la combustion des charbons lignocellulosiques rapporte que cette étape
est le plus souvent représentée par une unique réaction.
La très vaste majorité des travaux cités dans cette Section utilise la loi d’Arrhenius pour
décrire les cinétiques des réactions chimiques. Parmi les rares exceptions, on peut mentionner
[21, 23, 64] qui utilisent des cinétiques instantanées à température seuil pour la pyrolyse, et
[27] qui applique la loi d’Arrhenius pour les réactions de dégradation mais un taux limité par
l’apport d’oxygène depuis l’extérieur de la particule déduit d’une corrélation empirique pour la
combustion du charbon.
4.2 Processus de transport
Les mécanismes de transport susceptibles d’intervenir dans le processus de dégradation d’un
matériau poreux concernent les transferts de chaleur et de masse. Ils sont bien entendu couplés
avec les termes sources ou puits résultant des processus chimiques.
Un certain nombre de travaux font abstraction d’une description du transport des gaz
et se concentrent sur la simulation du transport de chaleur [65]. Si le modèle chimique est
suffisamment simple et qu’une seule espèce gazeuse est produite, une telle description peut
suffire dans certains cas. D’un point de vue global, le débit de gaz produit peut être déduit de
la perte de masse du solide. Toutefois, l’écoulement des gaz perturbe les transferts de chaleur et
de ce fait rétro-agit sur le champ de température et sur les taux de réactions. Si la combustion
du solide est prise en compte, il influe aussi sur les apports d’oxygène. Par conséquent, dans un
14
I.4 Brève revue de l’état de l’art
modèle un tant soit peu élaboré incluant la possibilité que les conditions thermodynamiques
varient avec la position, une prise en compte de l’écoulement est nécessaire au moins pour les
effets convectifs qu’il engendre.
Ceci peut se faire de deux façons. La plus simple est de considérer que le milieu est suf-
fisamment perméable pour pouvoir négliger les variations de pression. L’écoulement est alors
volumétrique, entièrement déterminé par les termes source/puits [27, 66–69]. Les gaz ne s’ac-
cumulent pas, ils s’échappent au fur et à mesure qu’ils sont produits. Dans une configuration
unidimensionnelle, on obtient le débit de gaz de pyrolyse par intégration des termes de produc-
tion, depuis une position x0 où sa vitesse est supposée s’annuler. Si plusieurs gaz sont produits,
la méthode s’applique de la même façon pour chacun d’eux.
L’hypothèse que la perméabilité est grande et que la pression et la densité du gaz ne varient
pas n’est pas nécessairement vérifiée. Malgré cela, les flux massiques sont respectés (moyennant
une hypothèse de quasi-staticité) et il est tout de même possible de prendre en compte de cette
façon la convection de chaleur ou d’espèces chimiques par l’écoulement. En revanche, à gradient
de fraction massique constant, les flux diffusifs des espèces dépendent de la densité du gaz, qui
n’est pas connue. En outre, même si le milieu est effectivement très perméable, la méthode
ne s’applique qu’à des écoulements unidirectionnels. Si les gaz sont produits à l’intérieur d’un
échantillon de matériau et ont la possibilité de s’échapper en plusieurs directions (par exemple en
face avant ou arrière d’une plaque), il est impossible de déterminer la proportion qui empruntera
chacun des chemins possibles.
Il est nécessaire pour ce faire de résoudre les équations de l’écoulement, qui est régi dans
ce genre de milieu par la loi de Darcy [13, 51, 70–72]. Cette approche plus générale permet
d’évaluer le champ de pression. Même si les variations de pression sont négligeables, cette
approche présente l’avantage de lever toute ambiguïté quant au chemin emprunté par les gaz
pour quitter leur lieu de production.
L’autre mécanisme de transport de masse est la diffusion par rapport au mouvement moyen
du gaz. Selon la revue de [45], elle est souvent négligée. Cela découle de la même hypothèse
que les gaz produits s’échappent d’une façon déterminée par leur taux de production. Ceci est
exact mais conditionne entièrement la composition du mélange gazeux, que la prise en compte
de la diffusion pourrait modifier (sans affecter les flux sortants). En particulier, cela prévient
entièrement la pénétration à contre-courant de l’oxygène, nécessaire dans la phase d’oxydation
du charbon, mais potentiellement importante également dans la phase de pyrolyse. Il a été
parfois observé [23] que la perte de masse des matériaux charbonneux augmente dans une
ambiance oxydante. Il est indispensable dans ce cas de modéliser la diffusion de l’oxygène, et
15
Chapitre I. Introduction générale
de façon plus générale, il est souhaitable de prendre en compte la diffusion de toutes les espèces
gazeuses.
Le transport de chaleur fait plus l’unanimité, tant son importance est primordiale. Dans
tous les cas, l’hypothèse d’équilibre thermique local est adoptée, considérant que les gaz et le
solide sont à la même température. La conduction est toujours prise en compte et la convection
par les gaz en écoulement l’est généralement aussi, quand l’écoulement du gaz est considéré.
La plupart des modèles les plus généraux et élaborés, comme FLOWPOR [17], GPYRO
[13] où ceux développés par Di Blasi [18, 44] prennent en compte tous les mécanismes évoqués
ci-dessus. Certains modèles récents et ambitieux semblent pourtant faire l’économie de la ré-
solution de l’équation de l’écoulement [54], voire de toute prise en compte d’effets convectifs,
comme THERMAKIN [31].
Le modèle numérique que nous présentons ici résout l’équation de Darcy pour déterminer
le champ de pression et inclut toutes ces contributions aux transports de chaleur et de masse.
4.3 Description de l’état du matériau
On retrouve ici une distinction entre deux grands types de modèles conceptuels, reposant sur
des approches analytique ou phénoménologique. Dans la première catégorie, on prend acte du
fait que le matériau en une certaine position est composé de diverses espèces et la composition
fait partie des inconnues du problème. Elle peut varier continûment et elle est à déterminer à
partir des équations locales de bilan, sans a priori quant à la forme de sa distribution spatiale.
La seconde catégorie prend acte de l’autre fait que dans la pratique, des fronts de réaction
existent, souvent relativement minces, séparant des solides dans des états intact et dégradé (vis
à vis de la réaction considérée ; il peut y en avoir plusieurs). Cette vision peut être soutenue
par des arguments théoriques, quand par exemple on applique des lois cinétiques infiniment
rapides. Elle peut aussi découler d’observations expérimentales ou de simulations numériques
détaillées. Il s’agit souvent d’une assez bonne approximation et inclure cette caractéristique
phénoménologique peut grandement simplifier une modélisation. Cette seconde catégorie est
désignée par Di Blasi sous le nom de ”shrinking unreacted-core model”.
Pour illustration, on peut mentionner deux études qui utilisent le même modèle chimique,
du type de la figure I.3a. Kung [19] utilise une loi cinétique d’Arrhenius, résout un jeu complet
d’équations et détermine un champ de densité (et donc de taux de conversion) qui varie de façon
continue. De leur côté, Moghtaderi et al. [21] admettent une loi cinétique infiniment rapide à
16
I.4 Brève revue de l’état de l’art
partir d’une température seuil, et par conséquent, un front de réaction infiniment mince qui
sépare des domaines où les matériaux sont intacts ou dégradés.
Les applications de l’approche ”shrinking unreacted-core” [21, 23, 26, 36, 64, 73–77] sont gé-
néralement associées à des modèles chimiques simples à une seule réaction (parfois deux, comme
[36] qui prend aussi en compte le séchage, mais nécessairement consécutives). Les équations de
bilan de masse et de chaleur sont écrites dans chaque domaine solide et elles sont complétées
par des conditions aux frontières extérieures et au front de réaction, qui constitue une frontière
mobile. Diverses approximations qui tirent parti de la simplifications des équations (uniformité
des propriétés et absence de réactions en dehors du front) sont généralement appliquées. En
particulier, les méthodes intégrales [21, 23, 36, 64, 73, 75, 78], qui reposent souvent sur une
hypothèse quant à la forme du profil de température, permettent de remplacer les équations aux
dérivées partielles par des équations différentielles ordinaires, ce qui réduit considérablement
l’effort numérique nécessaire. Cependant, l’hypothèse de front mince est généralement considé-
rée comme invalide si les flux de chaleur incidents depuis l’extérieur ne sont pas très grands
[13, 36] (quoique les avis soient partagés à ce sujet [76]). Par ailleurs, l’applicabilité de ces
modèles reste limitée à des schémas réactionnels ne comportant que des réactions séquentielles.
Avec les modèles chimiques qui présentent des réactions concurrentielles, de même qu’avec
ceux qui prennent en compte l’existence dès l’état initial de plusieurs espèces dans le maté-
riau (figure I.3b), la composition est susceptible de varier continûment. Combiner un modèle
chimique détaillé avec une description trop grossière de l’état du matériau serait difficile, et
quelque peu contradictoire. Une description continue est nécessaire, dont le prix est une com-
plexité accrue des équations mais aussi le besoin de modéliser les coefficients effectifs qui y
interviennent, tels que masse volumique, conductivité thermique, capacité calorifique, perméa-
bilité... Une grande diversité d’approches et de lois constitutives existe, empiriques ou heuris-
tiques, que nous ne détaillons pas. Ces modèles sont aisément modifiables et substituables. Des
lois de mélange volumiques ou massiques sont très souvent mises à contribution.
Sur un plan un peu différent, mentionnons que quelques travaux se sont intéressés au retrait
du matériau durant la formation de charbon [79, 80], mais qu’il en ressort que cet effet est faible
par rapport à la marge d’erreur expérimentale sur la perte de masse. Une étude très détaillée
[81] a été consacrée à cette question dans la phase d’oxydation, avec des effets complexes et
beaucoup plus sensibles. Toutefois, ce travail expérimental portait sur de petites particules
synthétiques de carbone et il n’est pas certain que les résultats soient transposables au charbon
de bois.
17
Chapitre I. Introduction générale
Dans le modèle que nous présentons ici, aucune hypothèse n’est formulée quant à l’épaisseur
des fronts de réactions. Les équations de bilan complètes sont résolues sans simplification de
cet ordre. Du reste, la forme d’au moins un des deux modèles chimiques employés proscrit
totalement une telle approche.
4.4 Géométrie et conditions aux limites
Très majoritairement, les simulations conduites dans les articles cités dans ce survol de la
littérature sont unidimensionnelles, avec une prédominance des géométries sphériques qui tient
en partie à la forte contribution de la communauté du génie chimique. Dans ce domaine, on
s’intéresse souvent à des particules, faisant implicitement partie d’un lit fluidisé.
On peut tout de même mentionner les simulations bidimensionnelles de Di Blasi (cf. la revue
[14]), et les extensions très récentes de THERMAKIN à deux dimensions [39] et de GPYRO à
trois dimensions [82].
Le modèle que nous présentons dans ce mémoire est unidimensionnel. Son extension à 2 ou
3 dimensions ne pose a priori aucune difficulté de principe, quoique les temps de calculs s’en
trouverait bien sûr fortement accrus. Cette extension n’est toutefois pas considérée comme une
priorité au vu de notre objectif, qui est schématisé dans la figure I.2. Nous souhaitons pouvoir
décrire la dégradation et la réponse du matériau constitutif d’une paroi exposée à un feu, à
prendre en compte dans une simulation globale de l’incendie. Les conditions d’exposition sont
réputées uniformes à l’échelle d’un élément de surface et un traitement unidimensionnel est
considéré comme approprié.
En ce qui concerne les conditions aux limites, elles s’expriment pour la surface exposée
en termes d’un flux radiatif incident (toujours) et de conditions qui peuvent varier d’un cas
à l’autre mais ne présentent pas de difficultés de traitement particulières. Dans certains cas,
notamment concernant l’oxydation du charbon, il peut être fait appel à des modèles empiriques
pour décrire les afflux d’oxygène. Ce n’est qu’une forme particulière de condition de flux, que
notre modèle peut prendre en compte.
De notre point de vue, le principal point épineux pour l’implémentation numérique concerne
la récession de la surface du solide durant la phase de combustion du solide, mais il n’est
quasiment pas abordé dans les articles que nous avons passés en revue. Nous reviendrons sur
ce point technique lors de la description de notre modèle numérique.
18
I.4 Brève revue de l’état de l’art
4.5 Méthodes de simulation
Les principaux éléments à ce propos découlent de l’emploi ou non de l’hypothèse de front
de réaction mince et des simplifications qui en découlent. Dans le cas du traitement du système
complet, la complexité et la non linéarité du problème proscrivent toute résolution analytique.
Toutes les implémentations numériques reposent sur des discrétisations avec formulations aux
différences ou aux volumes finis, pour autant qu’on puisse en juger car les aspects numériques
sont généralement peu mis en avant dans la littérature citée ici. On trouve par exemple fort
peu de mentions de difficultés de convergence ou d’instabilités du type de celles que nous avons
rencontrées.
En résumé, le modèle que nous présentons a l’ambition de se positionner parmi les plus
complets pour tous les critères que nous avons examinés. Il est comparable par exemple à
GPYRO [13] pour le modèle thermophysique et il a été équipé des modèles chimiques dont l’un
dépasse en complexité tous ceux illustrés dans la figure I.3.
Il est sans doute bon de conclure cette discussion par cette citation de Di Blasi [14] :
”In general, the limits of detailed models lie in the use of questionable kinetics or arbitrary
values of physical properties and, in numerous cases, in the scarce experimental validation. In
other words, only a better knowledge about decomposition kinetics and physical properties of the
biomass fuels can improve the predictive capabilities of transport models.” Elle énonçait déjà
cette opinion 15 ans auparavant [18] et nous la reprenons aujourd’hui avec elle. Maintenant que
notre modèle est en place, il reste à fournir les données physiques et chimiques et nos premières
simulations montrent qu’un très grand nombre de paramètres, assez mal connus, a une influence
considérable sur la réponse.
19
20
Chapitre II
Mécanismes et formulations microscopiques
Ce chapitre présente tous les mécanismes chimiques et physiques intervenant dans la dégra-
dation thermique des matériaux solides poreux exposés au feu et leur description. Premièrement,
un modèle chimique est présenté. Il se compose d’un schéma réactionnel et des paramètres ther-
mocinétiques associés. Deuxièmement, un modèle physique décrit tous les phénomènes qui sont
couplés avec les phénomènes chimiques. Un jeu de paramètres physiques est défini en se basant
notamment sur des études bibliographiques. Pour rendre la présentation plus compréhensible,
plusieurs exemples sont pris, concernant les matériaux cibles des premières simulations (bois
contreplaqué, sapin).
1 Modèle chimique
Dans cette Section, la méthode de construction d’un modèle chimique de dégradation des
matériaux solides est brièvement décrite. La caractérisation de la décomposition chimique est
la première étape importante car elle permet de décrire la nature et les modalités de la dé-
gradation des matériaux. Lors de cette dégradation, les phénomènes les plus évidents sont la
transformation de substances en d’autres substances et la perte de masse généralement associée.
La transformation des matériaux résulte de réactions chimiques correspondant à la destruction
de composants condensés sous l’effet de facteurs extérieurs (chaleur, chimie... ). La perte de
masse est causée par la libération de gaz issus de ces réactions chimiques. Il est donc nécessaire
d’établir d’abord un schéma réactionnel qui décrit la consommation et la production des es-
pèces solides et gazeuses. Les pertes de masse étant liées directement aux réactions chimiques,
la caractérisation des processus chimiques réside en la mesure de la masse et de la vitesse de
perte de masse, dans des conditions données. Toutefois, les processus mis en jeu dans les maté-
riaux lors de leur dégradation sont associés à des couplages complexes entre différents processus
physiques et chimiques. Les premiers régissent les conditions qui prévalent effectivement aux
21
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
lieux où se produisent les seconds. Il est donc souhaitable de se placer dans des conditions où
ces couplages sont éliminés, pour faciliter l’étude des mécanismes chimiques.
1.1 Données expérimentales, phénoménologie
Nous donnons ici un bref aperçu des techniques expérimentales utilisées pour la carac-
térisation des processus chimiques, sans insister sur les traitement souvent très sophistiqués
nécessaires pour les analyser et en extraire un modèle et ses paramètres. Plus de détails sont
fournis par [2, 4–8, 83], et les données que nous utilisons par la suite sont issues de certains de
ces travaux [2, 3, 6–10].
Si la taille de l’échantillon est grande, les transferts et les termes source/puits de chaleur
ou d’espèces chimiques liés aux processus chimiques engendrent inévitablement la présence de
gradient des paramètres physiques (température, concentrations... ). En effet, les transports
de masse et de chaleur ne sont pas instantanés. A grande échelle, l’intervention des processus
physiques n’est donc pas négligeable. L’étude du problème chimique doit donc être conduite
à une échelle plus petite (de l’ordre du mm3), nommée échelle de la matière. Cette étude est
menée expérimentalement à l’aide des analyses thermogravimétriques (ATG). Sans trop insister
sur la description des expériences, il convient cependant d’en rappeler le principe.
L’analyse thermogravimétrique dynamique consiste à appliquer une rampe de température
à une particule de très petite taille et faible masse, à vitesse de chauffage constante, depuis
la température ambiante jusqu’à une température élevée (environ 1000°C). Les conditions de
décomposition thermique au sein de ce dispositif sont supposées satisfaire certains critères :
– équilibre thermodynamique local au sein de la particule et notamment égalité des tempé-
ratures des phases solide et gazeuse ;
– pas de gradient de température au sein de la particule, donc température identique en
tout point de la particule (i.e., le matériau est considéré comme thermiquement fin) ;
– pas de limitation à la diffusion des espèces gazeuses au sein de la particule, donc concen-
trations et compositions uniformes ;
– température et concentration du gaz environnant uniformes dans le dispositif expérimental
utilisé et par conséquent, conditions effectives à la surface de la particule identiques aux
conditions prescrites et connues.
Les conditions qui assurent la satisfaction de ces critères sont examinées dans le Chapitre IV,
Section 4.4.5. Elles supposent notamment que les processus ne soient pas trop rapides et donc
que la vitesse de chauffage ne soit trop forte : il est reconnu qu’elle doit être inférieure ou égale
22
II.1 Modèle chimique
à 20°C/mn [16].
La décomposition est caractérisée à des vitesses de chauffage différentes, sous atmosphère
inerte (N2) et sous air. Lors des essais, l’analyseur thermogravimétrique peut être été couplé à
un spectromètre infrarouge à transformée de Fourier (IRTF) afin d’identifier les produits gazeux
émis au cours de la décomposition. Ainsi, le couplage de ces deux techniques permet de suivre
de manière conjointe la perte de masse, la vitesse de perte de masse et les émissions gazeuses
au cours du temps et en fonction de la température.
L’avantage de ce type d’investigation est de pouvoir séparer dans le temps et donc en
fonction de la température, les différentes réactions qui prennent successivement place au cours
de la décomposition du matériau solide. Ainsi, l’analyse des résultats de ces études permet
la définition d’un mécanisme de décomposition thermique, pour lequel peuvent ensuite être
calculés les paramètres cinétiques de chaque réaction mise en jeu.
Les incendies d’habitation se produisent généralement dans un environnement à atmosphère
naturel, contenant un taux standard d’oxygène. La décomposition de la plupart des matériaux
concernés laisse un résidu charbonneux (matériaux ”charring”) et combustible. Il faut donc
disposer de modèles décrivant les processus de pyrolyse et ceux de combustion. C’est pourquoi
la décomposition est caractérisée expérimentalement sous deux types d’atmosphères, inerte
(N2) ou oxydante (air).
La méthode d’obtention du modèle chimique est présentée dans la partie suivante. Pour être
concret, les résultats expérimentaux pour un matériau particulier sont pris comme exemple, un
bois contreplaqué (certifié M1 d’après le classement français de la réaction au feu). Ce matériau
est décrit plus en détail dans le Chapitre IV, où des applications le concernant sont présentées.
Un modèle de pyrolyse est d’abord obtenu grâce à l’analyse thermogravimétrique effectuée
sous atmosphère inerte (N2), sur la base de la mesure de la perte de masse et de la vitesse de
perte de masse (Mass Loss Rate, ou MLR). Les évolutions de la masse et de la MLR lors de la
décomposition thermique du bois contre plaqué de type M1 sous azote sont présentées dans la
figure II.1.
On constate que les évolutions de la masse en fonction de la température sont peu affectées
par les vitesses de chauffage (Fig. II.1a). Ceci fait penser à une loi commune décrivant la perte de
masse en fonction de la température valable pour n’importe quelle vitesse de chauffage. Au vu
de l’allure de ces courbes, on observe également trois étapes principales dans la décomposition
du matériau M1, ayant lieu dans les gammes de température suivante
– entre la température ambiante et 200°C, une première perte de masse de faible intensité ;
23
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
Figure II.1 – Évolutions de la masse (a) et de la vitesse de perte de masse (b) en fonction de latempérature pour le bois M1 en ATG sous azote, pour différentes rampes thermiques [6].
– entre 200°C et 400°C, la perte de masse principale est observée, avec une forte intensité ;
– enfin, pour les plus fortes températures, une faible perte de masse.
La première étape est liée à des processus comme le séchage, car la température encore
faible est insuffisante pour briser les liaisons chimiques des molécules des solides. Ceci est ha-
bituel pour les matériaux solides poreux qui absorbent de l’humidité quand ils sont environnés
de l’atmosphère naturelle. Ensuite, la température augmente et cause une importante perte de
masse dans la deuxième étape. Enfin, malgré l’augmentation constante de la température, la
perte de masse se ralentit dans la troisième étape. Cela montre que le bois initial est transformé
en des substances beaucoup moins actives thermiquement. Ces courbes de perte de masse nous
donnent de premières idées pour construire un schéma réactionnel du processus de pyrolyse des
matériaux solides. L’étude de leur dérivée temporelle (donc la vitesse de perte de masse) nous
donne plus d’information qui permet de cerner plus précisément le nombre de réactions ainsi
que les autres paramètres nécessaires.
Au contraire de la perte de masse qui est est relativement indépendante des vitesses de
chauffage, la vitesse de perte de masse est fortement influencée par la rampe thermique (Fig.
II.1b). Plus la vitesse de chauffage est grande, plus le maximum de la vitesse de perte de masse
est important. Ceci est facile à comprendre. Avec les mêmes pertes de masse (indépendantes
des vitesses de chauffage), il faut moins de temps pour atteindre une même certaine tempé-
24
II.1 Modèle chimique
Figure II.2 – Comparaison de l’évolution de la perte de masse et de la vitesse de perte de masse dubois M1 pour une vitesse de chauffage 15°C/mn, en ATG sous air et sous azote [6].
rature avec une vitesse de chauffage importante. Les dérivées temporelles des pertes de masse
respectent cette logique.
L’étude des vitesses de perte de masse nous permet également d’identifier une décomposition
plus complexe avec la présence de ruptures de pente de part et d’autre du pic principal (Fig.
II.1b). Ces ruptures de pente sont liées à la présence de réactions supplémentaires. Cette analyse
qualitative permet d’identifier le nombre de réactions ayant lieu et fournit une base pour d’autres
analyses plus quantitatives afin de construire un modèle de pyrolyse complet.
Il convient de noter que le petit nombre de réactions décelables de cette façon recouvre une
réalité bien plus complexe, faisant intervenir un très grand nombre de réactions et d’espèces
chimiques intermédiaires. Ce schéma réduit, où des réactions globales entre pseudo-espèces re-
présentent la résultante de nombreux processus chimiques intervenant dans une même plage
de température, permet toutefois de rendre compte de façon empirique de la réponse chi-
mique du matériau à l’agression thermique et peut suffire pour la modélisation du couplage
chimie/transport que nous voulons mettre en place.
La pyrolyse du bois comporte plusieurs étapes de décomposition des composant du bois tels
que cellulose, hémicellulose, lignine... Le produit final de ce processus sous azote est du char-
25
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
Figure II.3 – Évolution de la vitesse de perte de masse et des composés gazeux lors de la décompositionen ATG/IRTF du bois M1 pour une vitesse de chauffage de 15oC.mn−1 sous azote [6].
bon. Cependant, ce charbon est combustible et le processus de dégradation peut se poursuivre
en présence d’oxygène. Ceci va naturellement se traduire par une réponse différente lorsque
l’expérience ATG est conduite dans une atmosphère oxydante (air).
Ces deux types de réponses sont comparées dans la figure II.2, qui met bien en évidence le
fort impact de la présence d’oxygène. Une première différence peut être constatée dans une plage
de température 280°C < T < 350°C. La perte de masse est plus rapide sous air, ce qui traduit
l’accélération de la décomposition du bois, et notamment de la cellulose, causée par la présence
d’oxygène [84]. Une seconde différence bien plus notable apparaît au delà de 400°C, ce qui sous
azote, correspond à la formation du charbon, terme de la décomposition thermique. Sous air,
deux pics supplémentaires sont observés, qui correspondent à la combustion du charbon. Cette
combustion semble faire intervenir deux étapes successives, entre 400°C et 550°C et de 550°C
à la fin de l’essai. Ainsi, la masse résiduelle en fin d’essai sous air (cendres) est bien inférieure
à la masse finale sous atmosphère inerte (charbon).
L’étude des courbes de perte de masse et de vitesse de perte de masse permet de déceler
l’existence de différentes réactions mises en jeu au cours du processus de décomposition (ou de
plusieurs réactions globales apparentes regroupant une réalité plus complexe). Toutefois, pour
préciser leur nature, il est nécessaire de faire appel à des mesures chimiques et de tenir compte
de l’évolution de la composition des espèces gazeuses émises au cours de la décomposition. Il
est donc intéressant de suivre conjointement les évolutions de la vitesse de perte de masse de
l’échantillon et la composition chimique des émissions gazeuses en fonction de la température.
La figure II.3 présente l’évolution de la vitesse de perte de masse et des émissions gazeuses
26
II.1 Modèle chimique
Figure II.4 – Évolution de la vitesse de perte de masse et des composés gazeux lors de la décompositionen ATG/IRTF du bois M1 pour une vitesse de chauffage de 15°C.mn−1 sous air [6].
lors de la décomposition thermique du bois M1 sous atmosphère inerte à 15°C.mn−1.
Les composés gazeux détectés sont assez complexes. On peut citer parmi les principaux :
l’eau, le dioxyde de carbone, le monoxyde de carbone, le méthane, le formaldéhyde, le métha-
nol, et quelques acides (l’acide acétique, l’acide chlorhydrique, l’acide cyanhydrique, ...). Parmi
ces gaz, on s’intéresse surtout aux gaz combustibles, les inertes étant moins importants pour
les aspects liés au feu et à son développement. Noter qu’en revanche, la détection de l’émis-
sion d’espèces toxiques présente un intérêt certain dans la caractérisation des risques pour les
personnes. Cet aspect n’est abordé dans notre travail.
Cette analyse des gaz quantifie donc l’émission de gaz combustibles, et le pouvoir calorifique
associé. Ceci est important pour la modélisation aux échelles plus grandes car ces paramètres
influencent directement le développement du sinistre (ou de la flamme surmontant l’échantillon
dans un essai sous cône calorimètre). De ce fait, ils influencent également la consommation de
l’oxygène, la chaleur émise par la flamme et donc les conditions auxquelles le matériau solide
est exposé.
De façon similaire, la figure II.4 présente l’évolution de la vitesse de perte de masse et des
émissions gazeuses lors de la décomposition thermique du bois M1 sous air à 15°C.mn−1.
La plupart des gaz détectés sous air sont identiques à ceux détectés sous azote. Des diffé-
rences existent toutefois, d’une part car certaines espèces produites sous N2 sont immédiate-
ment oxydées et disparaissent dans l’expérience sous air, et d’autre part du fait de la présence
de produits de la combustion du charbon, CO et CO2. L’évolution de l’intensité CO et CO2
notamment au-delà de 450°C montre clairement l’existence de l’oxydation du charbon dans
27
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
l’environnement oxydant.
1.2 Formulation d’un modèle
Les analyses précédentes permettent de déterminer le nombre des réactions ayant lieu et les
espèces participant dans chaque réaction, ou plus précisément, un ensemble de pseudo-réactions
globales entre pseudo-espèces rendant compte de façon simplifiée mais considérée comme satis-
faisante d’une réalité beaucoup plus complexe. Il existe deux grands types de réactions pouvant
être décrits sous une forme générique. Les réactions de pyrolyse, ou plus généralement les ré-
actions anaérobies, peuvent s’écrire sous la forme générale suivante
S + Q → S ′ + GF + GI . (II.1)
Dans cette réaction, S est un composé solide, qui se décompose en un autre composé solide
S ′, en dégageant des produits gazeux. Pour les besoins des simulations à venir, on distingue
parmi ceux-ci les volatils combustibles (fuel) GF et les volatils inertes GI . Ces réactions sont
généralement endothermiques, et Q représente la quantité de chaleur nécessaire.
Les réactions de combustion hétérogène, peuvent s’écrire comme suit :
S + O2 → S ′′ + GC + Q (II.2)
Dans ce cas, le composé solide S est oxydé, en produisant un résidu solide S ′′ et des gaz de
combustion GC . On pourrait également distinguer parmi ceux-ci une fraction de gaz combus-
tibles (CO, par exemple), et une fraction de gaz inertes. On ne le fait pas ici car en pratique,
seule l’émission de CO2 est considéré (voir page 33), mais cela ne présenterait pas de difficulté
supplémentaire. Cette réaction exothermique libère une quantité de chaleur Q.
Ces équations chimiques décrivent la nature des processus intervenant dans la dégradation
des matériaux solides poreux, sous une forme qualitative. Elles doivent être complétées par des
paramètres quantifiés : les coefficients stœchiométriques et les paramètres thermocinétiques. Ces
derniers incluent les chaleurs de réactions, la forme et les coefficients de la loi cinétique décrivant
les vitesses de réaction. Face à un modèle chimique complexe comprenant plusieurs réactions,
séquentielles ou concurrentielles, l’extraction des paramètres cinétiques à partir des données
expérimentales est une tâche très délicate. Au delà d’une réaction, les méthodes analytiques
sont inapplicables et il est nécessaire d’avoir recours à des procédés d’optimisation reposant sur
des simulations numériques [2, 4–8].
28
II.1 Modèle chimique
Le taux de chaque réaction est exprimé sous la forme de la loi d’Arrhenius. Considérons par
exemple, la réaction l, qui consomme le composé solide i. On définit en premier lieu le taux
d’avancement
αi =mi
m0
, (II.3)
où mi est la masse instantanée de l’espèce i dans l’échantillon utilisé lors de l’analyse ATG, et
m0 une masse initiale de référence. Dans la description à plus grande échelle qui est développée
ultérieurement, où le taux de réaction doit être évalué en chaque position en fonction de l’état
local du système, ces masses totales sont remplacées par des masses volumiques locales.
Le taux ωl de la réaction l est égal au taux relatif C li de consommation de l’espèce i dans
cette réaction et on l’exprime sous la forme d’une loi d’Arrhenius
ωl = C li =
dαi
dt= Al e−
EalRT αnl
i
(P
Pa
YO2
)bl
Hi , (II.4)
avec comme paramètres l’ordre nl de la réaction, le facteur pré-exponentiel Al [s−1] et l’énergie
d’activation Eal [J/mol] associés à la réaction l. Le dernier terme Hi est une fonction de
Heaviside, prenant la valeur 1 si l’espèce i est présente et 0 dans le cas contraire. Elle est
mentionnée ici pour mémoire, mais sera omise à l’avenir. L’oxygène, présent avec une fraction
massique YO2 dans l’atmosphère, n’intervient que dans le cadre d’une réaction d’oxydation,
avec un ordre bl pris égal à 1. Le rapport de la pression P à la pression atmosphérique Pa
est introduit pour transposer les résultats obtenus en ATG sous pression atmosphérique dans
d’autres situations. Toutefois, on verra qu’en pratique la pression locale dans un échantillon
ne s’écarte jamais significativement de Pa durant la phase de combustion (contrairement à la
phase de pyrolyse).
L’emploi d’une loi cinétique de la forme (II.4) soulève deux questions. D’une part, la loi
d’Arrhenius résulte de considérations théoriques dans les cas de réactions en phase gazeuse,
et son application dans des situations de réactions faisant intervenir des réactifs solides n’est
pas a priori justifiée. Cependant, elle est traditionnellement appliquée en raison de son succès
pratique même en dehors d’un cadre théorique bien assis. Par ailleurs, un travail récent [2] a
ouvert des pistes pour lui fournir un fondement théorique, au moins en tant que comportement
apparent.
D’autre part, la définition de la masse de référence m0 pose question. Il est aisé de vérifier que
pour des réactions d’ordre nl=1, m0 peut être éliminé dans (II.4). Dans ce cas, la consommation
à l’instant t de l’espèce i est simplement proportionnelle à la quantité de i en présence à cet
instant, sans avoir à faire référence à un m0 qu’il devient inutile de définir, ce qui est satisfaisant
29
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
pour l’esprit. Les lois cinétiques utilisées pour le contreplaqué M1 dans le Chapitre IV sont de
ce type.
En revanche, si nl 6= 1 (comme il se produit dans le modèle pour le sapin utilisé dans le
Chapitre V), m0 ne peut pas être éliminé et une définition est indispensable. Comment le faire
pour une espèce qui n’existe pas dans l’état initial du système, mais n’apparaît que dans une
étape intermédiaire ? Dans les modèles que nous utilisons en tant que données d’entrées pour
les simulations, m0 est fixé arbitrairement à la masse initiale de l’échantillon soumis au test
ATG.
La forme des lois cinétiques qui nous sont fournies est heuristique, notamment en ce qui
concerne leur ordre. Elles décrivent correctement les résultats en ATG et peuvent être prises
en compte à ce titre dans les simulations. Leur détermination ou assise théorique ne rentrent
pas dans le cadre de ce travail. Néanmoins, on peut s’interroger sur leur signification et sur la
possibilité de les transposer dans une autre situation. Par exemple, si la réaction l consomme
une espèce i absente initialement et produite au cours du processus de pyrolyse, la loi cinétique
de dégradation de i fera référence à un matériau initial. Il est probable que des lois différentes
seront obtenues pour la même réaction selon qu’elle intervient dans la dégradation de divers
type de biomasse. Ceci dénie à la loi retenue un caractère intrinsèque et il n’est donc pas certain
qu’elle soit applicable dans toutes les situations. 1
Le problème n’est du reste pas limité au cas des ordres de réaction différents de 1. Une
formulation purement intrinsèque voudrait que le taux de conversion d’une espèce dmi/dt, ou
dρi/dt si on l’exprime en termes de masse volumique comme on le fera dans la suite, dépende
de l’état actuel du système (composition et température, principalement), sans qu’il soit besoin
de faire référence à son histoire, à l’origine du composant i qu’on considère ou à la masse (ou
densité) initiale de l’échantillon. On souhaiterait pouvoir utiliser une expression du taux de
conversion instantané défini par
1mi(t)
dmi
dt(=
ddt
ln mi) . (II.5)
qui serait à modéliser par une loi cinétique contrepartie de (II.4). La masse actuelle de i,qui
1. Notons qu’il serait possible, dans la formulation de la loi cinétique résultant de l’analyse des données ATG,de ”cacher” m0 dans le préfacteur Al, dont les dimensions deviendrait [mol1−nl s−1], ou [mol1−nl m3(nl−1) s−1]si on parle en termes de masses volumiques. Ceci ne règle pas le problème. Si par exemple nl était égal à 3, laloi cinétique prédirait un taux de réaction 4 fois plus grand pour échantillon de 2mg que pour deux échantillonsde 1mg posés l’un à côté de l’autre !
30
II.1 Modèle chimique
n’est pas nécessairement présente dans l’état initial, s’exprimerait par
mi(t) = mi(t = 0) +∫ t
0
dmi
dt
∣∣∣∣∣s
ds . (II.6)
Tout en conservant également l’option d’une définition du taux d’avancement du type de (II.3),
Lautenberger [13] (éqs. 3.55 et 3.56) fait un pas dans ce sens en considérant une quantité du
type de (II.6) où n’intervient toutefois que les productions de i (les valeurs positives de dmi/dt)
et pas les consommations, qu’il introduit au dénominateur de (II.5). La réticence à considérer
la véritable valeur instantanée de mi(t), c’est-à-dire l’intégrale (II.6) complète, semble tenir
à l’attachement au concept de taux de conversion, sur lequel repose toutes les formulations
habituelles des lois cinétiques et qui pourrait en effet formellement prendre dans ce cas des
valeurs hors de l’intervalle [0, 1]. Cependant, pour les besoins d’une simulation, seule la valeur
de dmi/dt est requise et pourrait être utilisée directement si un modèle de forme pertinente et
rendant compte des données expérimentales pouvait être formulé pour le taux instantané (II.5).
La mise en place d’une telle modification dans le modèle de simulation ne poserait pas
de difficulté technique. Toutefois, dans la mesure où les données expérimentales qui nous sont
disponibles, les analyses qui en ont été faites et les modèles chimiques qui nous sont fournis
sont tous basés sur le formalisme de (II.3), nous nous en tenons à ce stade à cette approche.
Les taux de production des produits de la réaction l se déduisent du taux défini ci-dessus,
c’est-à-dire du taux de consommation de i, par application d’un coefficient stœchiométrique.
Ainsi, la phase solide j est produite au taux P lj tel que
P lj = νl ωl = νl C l
i . (II.7)
Bien entendu, la fraction restante (1 − νl) de la masse de i correspond à la production de gaz
et contribue à la perte de masse (MLR) enregistrée lors de l’ATG.
Si l’on considère maintenant l’ensemble d’un schéma réactionnel, où certaines réactions (dont
les indices sont regroupés dans l’ensemble Lp) produisent i et d’autres (dans Lc) le consomment,
le taux de changement de masse pour l’espèce i est obtenu par sommation
MLRi =∂αi
∂t=∑
l∈Lp
P li −
∑
l∈Lc
C li . (II.8a)
Le taux global de changement de masse (de perte de masse, en pratique) résulte de l’ensemble
31
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
des taux de variations pour toutes les espèces solides,
MLR =∑
i
MLRi . (II.8b)
Rappelons que les taux d’avancements αi ont été définis en (II.3), en référence à une masse
arbitraire m0. Ceci explique la forme purement additive, a priori surprenante, de (II.8b). Si on
définissait le taux de perte de masse instantané d’une espèce comme 1mi(t)
dmi
dt(cf. éq. II.5), le
taux MLR global serait la moyenne des MLRi pondérée par les mi qui décrivent la composition
actuelle.
Les paramètres à déterminer pour chaque réaction sont donc le facteur pré-exponentiel A,
l’énergie d’activation Ea, l’ordre de la réaction n et le coefficient stœchiométrique ν . L’objectif
est de reproduire les courbes de vitesse de perte de masse totale en fonction de la température
lors de l’ATG. Quelques critères fournissent des indications, directement utilisables pour des
ajustements manuels, comme par exemple la perte de masse correspondant à certaines étapes,
ou séries d’étapes, quand elles peuvent être isolées : le produit des coefficients stœchiométriques
massiques νi pour toutes les étapes de pyrolyse doit coincider avec la masse résiduelle ultime
lors d’une expérience ATG sous atmosphère inerte. De la même façon, la masse résiduelle après
oxydation totale, doit correspondre aux produits de tous les coefficients stœchiométriques, com-
bustion comprise. D’autre part, les observations phénoménologiques mentionnées précédemment
comme les changements de pentes de la courbe de perte de masse ou les pics de la courbe de
MLR donnent des indications quant à l’existence de réactions et à la température où elles se
déclenchent, et donc dans une certaine mesure aux coefficients de leur lois cinétiques. Toutefois,
comme il a déjà été dit, seule une optimisation basée sur des simulations numériques permet
pour des schémas réactionnels un peu complexes de déterminer un jeu de paramètres qui rende
compte au mieux de toutes les observations.
Ces observations incluent notamment les résultats d’essais pour différentes rampes ther-
miques lors de l’ATG. La multiplicité de ces données est nécessaire d’une part pour assurer
dans une certaine mesure l’unicité de la solution, puisque le nombre de paramètres à déter-
miner est important. D’autre part, le succès de cette détermination, c’est-à-dire la possibilité
d’obtenir un jeu de paramètres qui rende compte des mesures dans des situations différentes
constitue si elle est réalisée une certaine garantie du caractère intrinsèque du modèle chimique.
Il est alors possible de supposer (moyennant les réserves émises plus haut à propos des ordres
de réaction différents de l’unité), qu’il restera applicable dans des scénarios plus complexes,
rencontrés dans des situations où les limitations dues aux mécanismes de transport font que le
32
II.1 Modèle chimique
matériau subit en différentes positions des conditions qui évoluent de façons différentes, sans
correspondre a priori à celles imposées lors des essais ATG.
Enfin, un dernier élément est nécessaire pour la description des processus quand les transferts
de chaleur ne peuvent plus être considérés comme instantanés, à savoir les chaleurs de réactions.
Par principe, elles ne peuvent pas être déterminées lors d’un test ATG. Elles pourraient l’être en
couplant ces tests à la calorimétrie différentielle (Differential Scanning Calorimetry, ou DSC).
Malheureusement, l’équipement nécessaire n’était pas disponible lors des expériences au cours
desquelles les modèles chimiques pour les deux matériaux considérés dans la suite ont été
élaborés. Nous avons donc eu recours à des estimations basées sur des données de la littérature,
sur des arguments globaux et sur des hypothèses que nous espérons raisonnables. Plus de détails
sont donnés dans la suite (cf. Chapitre IV, Section 3.1), mais les grandes lignes suivantes peuvent
être énoncées.
Le premier processus qui intervient est le séchage. On y associe une chaleur latente d’éva-
poration de l’eau dont la valeur 2,258 MJ/kg d’eau est bien connue. L’énergie nécessaire à la
désorption de l’eau liée n’est pas prise en compte. Différentes corrélations empiriques rapportées
par Grønli [17], montrent qu’elle augmente au fur et à mesure que la teneur en humidité dimi-
nue, mais qu’elle reste faible par rapport à la chaleur latente d’évaporation tant que l’humidité
résiduelle n’est pas très petite.
Une valeur typique de l’énergie nécessaire à la pyrolyse complète du bois est tirée de la
littérature. Quand la pyrolyse s’opère en plusieurs étapes successives, cette énergie totale est
distribuée au prorata des pertes de masse associées à chaque étape. Ceci est décrit plus en détail
dans la Section 3.1 du Chapitre IV.
Les produits finaux de la pyrolyse sont un matériau charbonneux, composé essentiellement
de carbone, qui pourra être oxydé, et de constituants inertes que l’on retrouvera dans les cendres.
La combustion de ce mélange est considérée comme l’oxydation totale du carbone qu’il contient
en CO2. La chaleur dégagée est donc fixée à 395 kJ/mol de C. Si le modèle chimique distingue
plusieurs étapes dans la combustion, ce dégagement est réparti au prorata des pertes de masse
associées à chaque étape.
Il faut mentionner que le produit de l’oxydation primaire du résidu charbonneux émet
probablement en majorité du monoxyde de carbone [15]. Une vaste littérature (et de longs
débats) concerne la caractérisation de cette réaction, et du rapport r=CO/CO2 de ses produits.
Il dépend de la structure du carbone et de son contenu en matière minérale qui peut avoir un
effet catalytique. Le ratio r a été mesuré dans diverses configurations, généralement pour des
particules isolées de carbone modèle. Dans certains cas [85, 86], des précautions étaient prises
33
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
pour inhiber l’oxydation du CO en CO2 ; dans d’autres [87], les produits étaient échantillonnés
très près de la particle, ou les résultats globaux étaient analysés par simulations numériques
tenant compte des limitations par les transports pour remonter au rapport r initial [88]. Bien
que les résultats soient très dispersés, il y a un accord général sur le fait que la production
de CO augmente avec la température et diminue avec la teneur en oxygène. Les résultats sont
généralement exprimés sous la forme
r = A e−B/T (II.9)
avec des paramètres qui varient selon les sources (dans l’ordre, pour [85–88], avec les plages de
température concernées) :
A = 2510 B = 1492K (T = 730 ∼ 1170K) (II.10a)
A = 50P −0.21O B = 3070K (T = 670 ∼ 1670K) (II.10b)
A = 928 B = 6240K (T = 600 ∼ 756K) (II.10c)
A = 600(ρgYO)−0.24 B = 8000K (T = 900 ∼ 1600K) (II.10d)
Une revue récente de la littérature [89] conclut que [86] fournit la prédiction la plus fiable, mais
quoiqu’il en soit, tous ces résultats prédisent une prédominance de CO à haute température.
Cependant, si l’oxydation du char produit du CO, son temps de résidence dans le matériau,
lorsqu’il migre vers l’extérieur à contre-courant de l’oxygène qui pénètre, est suffisamment long
pour que son oxydation en CO2 puisse se produire, avant même sa sortie du matériau solide.
La cinétique de la réaction de combustion homogène du CO est aussi un sujet de controverse,
et les lois cinétiques proposées diffèrent assez fortement, quoiqu’elles soulignent généralement
l’importance de la présence de vapeur d’eau. On peut par exemple mentionner la loi cinétique
suivante [90]
k e−15098/T [CO] [O2]1/2 [H2O]1/2 , (II.11)
où k = 1.3 1011 m3kmol−1s−1 avec les concentrations [X] données en kmol.m−3. L’application
de cette loi avec des valeurs raisonnables des paramètres prédit effectivement une conversion
quasi totale du CO en CO2 avant sa sortie de l’échantillon, comme le confirme les analyses
effectuées dans les expériences sous cône calorimètre.
Par ailleurs, si l’énergie dégagée par une oxydation primaire en CO est inférieure à celle
dégagée par l’oxydation totale, le complément est dégagé par l’oxydation ultérieure du CO,
également à l’intérieur du milieu, et donc sans influence globale sur le bilan thermique.
34
II.2 Modèle physique
En conséquence, quoiqu’une description plus fine incluant la possibilité d’émission d’un
mélange de CO et de CO2, suivi de la combustion en phase homogène du monoxyde serait
possible, elle n’est pas implémentée du fait du haut degré d’incertitude qui entâche les lois
cinétiques concernées et de l’absence de répercussion importante de l’application d’un modèle
simplifié.
Enfin, les gaz de pyrolyse sont en partie combustibles, et quand ils brûlent dans une flamme
à proximité de la surface de l’échantillon, une partie de la chaleur dégagée est renvoyée vers
l’échantillon et interfère avec le processus. Il importe donc de connaître la quantité d’énergie que
cela représente. Elle est déduite dans notre modèle d’une valeur typique issue de la littérature
du pouvoir calorifique inférieur du matériau, somme des chaleurs dégagées par la combustion
du char et des gaz de pyrolyse, diminuée de l’énergie requise pour la pyrolyse. Ceci est décrit
plus en détail dans la Section 2.6.
Ceci clôt la liste des éléments constituants un modèle chimique complet : un schéma réac-
tionnel décrivant les processus de la dégradation du matériau, incluant des phases de séchage,
de pyrolyse et de combustion, et des paramètres thermocinétiques associées à chaque réaction,
réputés intrinsèques. Ce modèle chimique est couplé dans la suite avec le modèle physique décrit
dans la Section suivante, pour prédire le comportement du matériau à plus grande échelle, dans
des situations réelles.
2 Modèle physique
Les hypothèses utilisées dans la Section précédente, c’est-à-dire l’absence d’influence des
processus de transferts dans les essais ATG utilisés pour établir un modèle chimique, ne s’ap-
pliquent plus dans des situations d’application à plus grande échelle, où les matériaux solides se
présentent sous la forme d’échantillons ou d’objets de plus grande taille, généralement thermi-
quement épais. Les conditions auxquelles est soumise la matière dépendent alors de la position
et du temps selon des scénarios d’évolution qui ne sont plus connus a priori et ne peuvent être
déterminées que par la prise en compte de nombreux mécanismes physiques. Cette évolution
fait donc intervenir la configuration géométrique, les propriétés du matériau et leur évolution
avec son état de dégradation. Des équations sont nécessaires pour décrire tous les transferts de
masse et de chaleur où les paramètres précédents interviennent. Ces équations sont couplées
avec celles associées au modèle chimique. Le couplage est fort, les transports déterminant les
conditions dans lesquels les processus chimiques se déroulent et donc les taux de conversion,
35
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
tandis que les réactions, par les quantités importantes de gaz émis et de chaleur dégagée ou ab-
sorbée, rétroagissent fortement sur l’évolution de ces conditions. Ceci vaut dès que la dimension
caractéristique du solide en décomposition dépasse la taille submillimétrique des échantillons
pour l’ATG. Dans la suite, on considère des échelles centimétriques, correspondant aux échan-
tillons soumis aux essais sous cône calorimètre qui nous servent d’éléments de comparaison
pour la réponse du modèle numérique. Toutefois, la formulation n’est pas limitée à cette plage
d’échelle.
Les transferts de chaleur sont un élément déterminant. Un solide est considéré comme
thermiquement fin lorsque le gradient de température sur toute l’épaisseur du matériau peut
être considéré comme négligeable, c’est-à-dire que sa température est raisonnablement uniforme.
Inversement, il est thermiquement épais si son épaisseur est plus grande que la profondeur
de pénétration thermique. On utilise souvent le nombre de Biot (Bi) pour quantifier cette
distinction. Sa définition fait intervenir un coefficient d’échange de chaleur h [W.m−2.K−1] avec
le milieu ambiant, l’épaisseur L [m] de l’échantillon et sa conductivité thermique λ [W.m−1.K−1]
tel que
Bi =hL
λ. (II.12)
Ce nombre compare l’amplitude des variations de température dans le matériau à la différence
entre sa température typique et la température ambiante à laquelle il est exposé. On consi-
dère que quand Bi < 0.1, la conduction de la chaleur à l’intérieur du solide est plus rapide
que les échanges entre sa surface et l’environnement. Les gradients de température sont alors
négligeables à l’intérieur du solide et la température peut être supposée constante dans tout
son volume. Dans le cas inverse, le gradient de température au sein de l’échantillon n’est pas
négligeable. Un exemple avec des valeurs typiques pour un bois contreplaqué, avec λ = 0.16
W.m−1.K−1, L = 0.018 m [6] et h = 10 W.m−2.K−1 [91], donne Bi ≈1.1 . Le bois est donc consi-
déré comme thermiquement épais lors des essais en cône selon cette classification. Le gradient
de la température entraine des évolutions différentes des processus chimiques en différentes
positions (profondeur). On peut noter que des limitations du même ordre existent du point de
vue des transports des espèces chimiques, et au premier chef dans la phase de combustion, qui
est généralement limitée par les apports d’oxygène.
La définition et l’usage du nombre de Biot posent toutefois certaines difficultés de principe.
En premier lieu, il ne s’agit pas d’une caractéristique de l’objet, mais de l’objet dans une
situation particulière, puisqu’il dépend du coefficient d’échange h. De plus, ce coefficient est
souvent assez mal quantifié et varie fortement selon la configuration, selon que la surface est
horizontale ou verticale, selon qu’il existe ou pas un écoulement pariétal significatif, ou selon
36
II.2 Modèle physique
le caractère laminaire ou turbulent de cet écoulement. En outre, comme dans les situations qui
nous intéressent, les échanges thermiques avec l’environnement peuvent être majoritairement
de nature radiative et la définition de h est là aussi problématique.
Pour toutes ces raisons, il peut être préférable de considérer le temps caractéristique τT [s]
de réponse thermique de l’objet, définit à partir de son épaisseur L et de sa diffusivité thermique
DT
τT =L2
DT
=ρcp L2
λ. (II.13)
Ce temps est une caractéristique intrinsèque de l’objet, indépendante des conditions opératoires
ou de toutes considérations extérieures à lui même. Il donne une estimation du délai nécessaire
pour qu’une variation de température à la surface exposée se répercute à la profondeur L,
ou de façon équivalente, pour que le retour à l’équilibre se produise quand les conditions de
surface évoluent, avec une température raisonnablement uniforme dans l’épaisseur du matériau
(en excluant tout autre mécanisme que la conduction thermique et notamment l’existence de
réactions chimiques). On est alors à même de juger si ce temps est négligeable ou non, comparé
aux autres temps caractéristiques du problème et en particulier à ceux liés aux conditions
d’exposition.
Dans le cas du contreplaqué M1, l’application de (II.13) avec les valeurs des coefficients
dans les tables (IV.6) et (IV.7) donne τT ∼ une heure. De façon évidente, ce temps est très long
comparé à celui de l’évolution des conditions extérieures dans une situation d’incendie, et il
est même supérieur au temps total requis pour la pyrolyse complète de l’échantillon, comme le
montre à la fois les essais physiques sous cône calorimètre ou les simulations que nous en faisons.
Par conséquent, la température ne pourra à aucun moment être considérée comme uniforme au
sein de l’objet. 2
Quelle que soit l’approche, basée sur Bi ou sur τT (ou sur le constat très simple et pragma-
tique que la face d’un échantillon exposée au cône calorimètre est totalement calcinée avant que
la face arrière soit significativement affectée), la conclusion est identique. Les facteurs physiques
expriment nettement leurs rôles dans le processus de dégradation des matériaux. On va donc
dans la suite formuler un modèle pour leur prise en compte, qui doit inclure plusieurs aspects :
– la description des états successifs du matériau dégradé et les propriétés associés ;
– les mécanismes de tranferts et les équations de bilan correspondantes ;
2. Il en irait autrement si le processus considéré était par exemple le séchage de la pièce de bois, dans uneétuve à température modérée, étalé sur une durée de l’ordre de la journée. Dans ce cas, après un transitoireinitial ”bref” (une heure, comparée à la durée totale du processus), une température uniforme consistuerait uneapproximation raisonnable).
37
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
Figure II.5 – Configuration géométrique d’un scénario général à l’échelle du matériau. L’élément desurface est soumis à un flux radiatif incident ΦQ,in dans une atmosphère à teneur en oxygène prescrite. Ilémet en retour un flux thermique ΦQ,out et diverses espèces chimiques sous forme gazeuse, ΦProduits.
– un ensemble de paramètres effectifs et d’équations constitutives nécessaires pour fermer
le problème ;
– la prise en compte de la configuration, des conditions initiales et des conditions aux limites.
Toutefois, pour fixer les idées et aider à la compréhension, une situation et un scénario typiques
sont décrits en premier lieu dans la Section suivante.
2.1 Situation et scénario de base
La figure II.5 présente un domaine d’investigation, représentatif dans le cadre de nos hypo-
thèses de la situation d’un matériau solide poreux se dégradant sous l’influence d’une source
de chaleur, tel que lors d’un essai sous cône calorimètre (cf. figure II.7).
Ce domaine représente un élément de surface d’un échantillon plus grand, par exemple
une petite partie de l’échantillon complet placé sous le cône calorimètre, ou un élément d’un
matériau (paroi, meuble... ) exposé au feu lors d’un incendie. On considère qu’à cette échelle, les
conditions d’exposition sont uniformes. Ceci est censé être réalisé dans le test normalisé, puisque
c’est la fonction du cône calorimètre de satisfaire à cette condition d’homogénéité d’exposition.
Cette condition est également supposée être satisfaite lors de la simulation numérique d’un feu :
le maillage des parois doit en principe être fixé de façon à résoudre spatialement les variations
des conditions qui règnent à leur surface. On suppose également que les conditions variant peu
dans la direction transversale à la paroi, les transferts dans cette direction sont négligeables.
Notons que ceci exclut la prise en compte d’effets de bord dans les tests normalisés, s’ils existent
38
II.2 Modèle physique
et conduit à une formulation unidimensionnelle du problème, en fonction d’une seule variable
de position dans la direction de la profondeur. L’origine de l’axe x (profondeur) est fixée à la
surface du solide.
Notre modélisation ne concerne que les phénomènes internes au solide. Les conditions am-
biantes (flux radiatif incident et composition de l’atmosphère) à sa surface sont supposées être
prescrites, soit par le scénario du test normalisé, soit par la simulation du feu dans le domaine
extérieur, prenant éventuellement en compte les bilans thermiques et massiques de la paroi. On
verra toutefois par la suite qu’une prise en compte minimale des phénomènes hors du maté-
riau mais proche de sa surface est indispensable, afin d’inclure dans nos simulation l’effet de
la chaleur dégagée par la flamme pariétale où sont éventuellement brûlés les gaz de pyrolyse.
Cet impact est non négligeable, et l’ignorer interdit une comparaison directe avec les résultats
expérimentaux. Nous sommes donc contraints de mettre en place une version minimaliste et
sans aucune prétention, en termes de réalisme ou de précision, d’un outil de simulation des
processus à l’extérieur du solide (cf. Section 2.6).
A l’échelle considérée, le matériau solide est traité comme un milieu continu. En d’autres
termes, la formulation se situe à l’échelle de Darcy, où la microstructure n’est pas prise en
compte explicitement, mais seulement par l’intermédiaire de coefficients effectifs (perméabilité,
conductivité, porosité... ) qui interviennent dans des équations de transports homogénéisées.
Ceci n’exclut pas la possibilité de prise en compte de variations de ces propriétés en fonction
de la position. Pour répondre à des exigences de qualité, ou simplement à des contraintes
technologiques, les matériaux sont souvent hétérogènes. Par exemple, le bois contreplaqué M1
utilisé dans l’expérience est constitué de couches croisées et contrecollées. Il peut aussi exister
des couches où la colle est plus ou moins concentrée, ce qui peut avoir une influence. On pourrait
aisément le prendre en compte dans les simulations, de même que n’importe quelle structuration
1D, mais en l’absence d’éléments d’information il n’en est pas tenu compte ici.
Les conditions ambiantes peuvent varier selon le scénario. Les conditions thermiques à la face
exposée sont un flux de chaleur, une température ambiante ou une température imposée sur la
surface du solide. Il y a échange convectif et radiatif entre la surface exposée et l’environnement.
L’ambiance chimique est caractérisée essentiellement par une concentration en O2, avec un
coefficient d’échange à modéliser selon les situations, sans doute avec un degré d’incertitude
assez élevé. Mais on peut estimer que l’apport diffusif d’O2 depuis l’extérieur n’est pas limitant
par rapport à sa diffusion à l’intérieur du matériau.
En face arrière de l’échantillon, il peut exister divers types types de conditions. On peut
considérer que tous les flux s’annulent (paroi adiabatique et imperméable). Ces conditions
s’appliqueraient (par symétrie) au plan médian d’une plaque d’épaisseur 2L exposée aux mêmes
39
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
conditions ambiantes sur ses deux faces. On peut aussi appliquer d’autres conditions, afin de
représenter des situations correspondant à celles régnant dans le cas d’application considéré.
On verra par exemple (Chapitres IV et V) que différentes conditions thermiques ont été testées
pour tenter de rendre compte des propriétés de différents port-échantillons dans les tests sous
cône calorimètre.
2.2 Propriétés des solides poreux
Durant la dégradation, les solides subissent plusieurs transformations en termes de compo-
sition et de structure. Par exemple, un bois humide est d’abord séché en bois sec. La pyrolyse le
transforme ensuite en charbon, éventuellement avec divers états intermédiaires. Puis le charbon
est brûlé et laisse un résidu inerte (cendre). Ces transformations peuvent être résumées selon
le schéma très simple suivant
Sh → Ss → Sc → Sr , (II.14)
où Sh désigne le solide humide, Ss le solide sec, Sc le charbon et Sr le résidu ultime.
Les propriétés structurales et de transport des matériaux solides aux stades successifs de
leur dégradation ne sont pas bien connues. Elles jouent pourtant un rôle important dans la
description des mécanismes de transport. Un modèle conceptuel est appliqué ici pour les estimer,
s’inspirant des observations de Grønli [17].
Gronli à étudié de façon très fouillée plusieurs types de bois dans leurs états natifs, ainsi que
les charbons correspondant. Nous nous intéressons particulièrement à ses mesures des spectres
de porosimètrie au mercure, qui concernent le bouleau (birch, sa figure 2.16) et le sapin (spruce,
sa figure 2.17). Considérés comme des bois dur et tendre, respectivement, ils ont des densités
apparentes après séchage de 580 et 470 kg/m3 qui ne sont pas éloignées de celles des bois que
nous considérons. Les densités des charbons qui en résultent sont de 390 et 290 kg/m3. Nous
reproduisons dans la figure II.6 les coupes microscopiques et les spectres de porosimétrie qu’il
fournit. Il apparaît que pour les deux bois, la porosité est bimodale, avec une microporosité
(inférieure à 1µm) et une macroporosité (supérieure à 1µm) de fractions volumiques approxi-
mativement identiques. En outre, même si la porosité totale est supérieure, une distribution
similaire existe également dans l’état charbonneux.
Nous ferons dans la suite l’hypothèse que cette observation, faite sur deux types de bois assez
différents, s’applique aussi aux matériaux que nous considérons. De plus, comme l’équipartition
approximative en volume des micro- et macropores est observée à l’état natif et à l’état charbon,
nous faisons l’hypothèse qu’elle s’applique aussi aux états intermédiaires lors de la dégradation.
Nous distinguerons donc la microporosité de fraction volumique ǫm et la macroporosité de
40
II.2 Modèle physique
(c) (d)
(e) (f)
Figure II.6 – Coupes microscopiques de charbons de bouleau (a) et de sapin (b). Spectres cumulés (c)et relatifs (d) des tailles d’entrée de pore dans le bouleau. Spectres cumulés (e) et relatifs (f) des taillesd’entrée de pore dans le sapin. En (c-f), les données concernent le bois natif (•) et le charbon (). D’aprèsles figs. 2.15-2.17 de [17].
41
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
fraction volumique ǫM . Leur somme constitue la porosité totale ǫT = ǫm + ǫM , et selon notre
modèle, ǫm = ǫM .
Comme le montre la figure II.6a-b, on peut associer la microporosité à l’espace interne des
cellules du tissu végétal, et la macroporosité à des canaux de plus grande dimension. Seuls ces
derniers ont vocation à transporter des fluides sur des distances importantes. Nous modélisons
les propriétés de transport du bois et du charbon conformément à cet argument. Bien que les
gaz aient accès à tout l’espace des pores, par des mécanismes de transfert locaux entre micro-
et macropores, on considère que les micropores ne contribuent pas aux coefficients de transport
macroscopiques, qui sont donc exprimés par des modèles fonction de la seule macroporosité.
Ce modèle conceptuel de microstructure permet de distinguer plusieurs types de densité.
On peut considérer en premier lieu l’espace solide à proprement parlé, c’est-à-dire le squelette
de la microstructure (en blanc dans la figure II.6a-b), et lui associer une densité squelettale ρsk.
Pour les besoins ultérieurs de la modélisation, on peut aussi considérer le milieu microporeux,
constitué du squelette et des micropores qu’il renferme, à l’exclusion des macropores. On notera
ρ∗ sa densité et φc sa fraction volumique. Enfin, la densité apparente, simplement notée ρ,
correspond à l’ensemble du matériau. Ainsi, dans un volume représentatif du matériau de
masse m et de volume V0, on distingue les volumes V M = ǫMV0 de macropores, V m = ǫmV0 de
micropores et V sk = (1 − ǫT )V0 de squelette, avec V0 = V sk + V M + V m. On a alors
ρ = mV0
(II.15a)
ρ∗ = mV sk+V m =
ρ
1 − ǫM
=ρ
φc
(II.15b)
ρsk = mV sk =
ρ
1 − ǫT
. (II.15c)
Sur la base de valeurs communément admises dans la littérature, on peut attribuer à ρsk une
valeur de l’ordre 1400 kg/m3 pour le bois [17], et de l’ordre de 2000 kg/m3 pour le charbon,
considéré comme du carbone amorphe [17, 81]. Comme ρ est directement accessible à la mesure,
la valeur de la porosité totale ǫT peut être déduite de (II.15c). On obtient ensuite les porosités
micro- et macroscopiques à partir de notre hypothèse que ǫm = ǫM = ǫT /2.
Le matériau peut passer par des états successifs Si lors de sa dégradation. Le même for-
malisme sera appliqué à chacun d’eux. En particulier, le matériau dans cet état est constitué
d’un milieu microporeux de densité ρ∗
Siet d’une macroporosité, ces quantités étant reliées à la
42
II.2 Modèle physique
densité apparente de Si par
ρ∗
Si=
ρSi
1 − ǫM,i
=ρSi
φci
. (II.16)
La densité apparente du bois sec est donnée par les mesures expérimentales, et celles des solides
dans les états dégradés successifs lors de la pyrolyse sont déduites des coefficients stœchiomé-
triques (voir l’éq. II.7). Rappelons qu’on admet que le retrait est négligeable, et qu’il n’y a donc
pas de variation de volume total. On peut donc calculer les porosités totale et macroscopiques
dans ces états par
ǫT,i = 1 −ρSi
ρskSi
(II.17a)
ǫM,i =ǫT,i
2. (II.17b)
Comme la densité squelettale ρskSi
n’est pas connue, une hypothèse doit être faite pour représenter
l’évolution de sa valeur, du bois intact à celle du charbon (voir Section 3.2 du Chapitre IV).
Enfin, le matériau peut contenir à une même position, où dans un élément de volume petit
devant les échelles spatiales du problème (par exemple un élément de volume du maillage utilisé
dans notre modèle numérique) du solide à des étapes diverses de décomposition. On considère
alors que différents solides microporeux Si constituent le matériau, avec des fractions volumiques
φci. La porosité macroscopique vaut alors
ǫM = 1 −∑
i
φci. (II.18)
La discussion ci-dessus porte sur la pyrolyse du bois, pour laquelle les évolutions morpho-
logiques sont au moins partiellement documentées, notamment par Grønli [17]. Pour la phase
de combustion qui suit, on pourrait tenter de mettre en place une modélisation spécifique en se
basant sur l’important travail de Dudek [81], qui a étudié l’évolution microstructurelle de par-
ticules isolées de carbone en combustion et relie la porosité au taux de conversion de différentes
façons selon le mode de réaction (limité par la loi cinétique ou par la diffusion de l’oxygène).
Toutefois, les particules considérées par Dudek ne sont pas d’origine végétale, et ses conclusions
étant très liées à la morphologie microscopique, rien n’assure qu’elles sont transposables à notre
situation 3. Nous avons donc choisi d’appliquer la même procédure à l’étape de combustion qu’à
l’étape de pyrolyse, en conservant notamment pour les cendres une densité squeletalle identique
3. Pour être plus précis, nous ne savons pas dans lequel des modes distingués par Dudek nous nous trou-vons. Une étude spécifique de ce point à l’aide de simulations non plus à l’échelle de Darcy mais à l’échellemicroscopique serait d’un grand intérêt mais dépasse le cadre de notre travail.
43
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
à celle du char, à l’exception du fait que toute la porosité est considérée comme macroscopique.
Dans son état initial, le matériau contient de l’eau. Comme discuté en détails dans [17],
par exemple, une part de l’eau est libre et peut s’écouler dans les macropores. Une autre par-
tie est liée et requiert de l’énergie pour sa désorption. Il serait possible de prendre en compte
séparément ces deux types d’eau, mais comme l’énergie de désorption est relativement faible
par rapport à la chaleur latente de vaporisation, comme mentionné précédemment, et comme
d’autre part le séchage n’est pas le centre d’intérêt principal de notre étude, un modèle sim-
plifié est appliqué. Aucune distinction n’est ainsi faite entre eau libre et eau liée. Par ailleurs,
l’écoulement de l’eau liquide n’est pas considéré ; l’eau s’écoule seulement dans l’état de vapeur,
après évaporation, comme un composant du mélange de gaz interstitiel. La fraction volumique
occupée par l’eau condensée est obtenue à partir de sa quantité volumique ρW et de sa densité
intrinsèque ρ∗
W = 1000 kg/m3
φW =ρW
ρ∗
W
. (II.19a)
Elle vient se déduire de la macroporosité ǫM pour obtenir la fraction volumique ǫg ouverte à
l’écoulement des gaz. Au vu de (II.18),
ǫg = ǫM − φW = 1 −∑
i
φci, (II.19b)
où la somme porte sur les fractions volumiques de toutes les espèces condensées, solides micro-
poreux ou eau. Bien entendu, ǫg = ǫM quand le séchage est achevé.
2.3 Équations de bilan
2.3.1 Espèces condensées
Les équations de conservation des espèces condensées sont déduites des équations II.8a. Pour
distinguer les espèces solides des espèces gazeuses, l’indice i dans II.8a est remplacée par ci, qui
signifie espèce condensée i,∂αci
∂t=∑
l∈Lp
P lci
−∑
l∈Lc
C lci
. (II.20)
Le volume total du matériau étant supposé constant, le rapport entre masse de l’espèce
condensée ci et masse initiale du matériau est égal à celui entre la densité apparente de l’espèce
44
II.2 Modèle physique
condensée ci et la densité apparente initiale du matériau,
αci=
mci
m0
=ρci
V0
ρ0V0
=ρci
ρ0
. (II.21)
On peut donc réécrire l’équation II.4 du taux de la réaction l qui transforme espèce condensée
ci en l’espèce condensée cj comme suit
ωl = C lci
= Al e−EalRT
(ρci
ρ0
)nl ( P
Pa
YO2
)bl
. (II.22)
L’équation II.20 devient alors
∂
∂t
(ρci
ρ0
)=∑
l∈Lp
P lci
−∑
l∈Lc
C lci
. (II.23)
Introduisons les notations suivantes, qui éliminent la référence à la masse volumique initiale,
ω′
l = ρ0 ωl (II.24a)
P ′lci
= ρ0 P lci
= νl ω′
l (II.24b)
C ′lci
= ρ0 C lci
= ω′
l . (II.24c)
En ces termes, le taux ω′
l de la réaction l qui transforme l’espèce condensée ci en l’espèce
condensée cj s’écrit explicitement comme suit :
ω′
l = ρ0 Al e−EalRT
(ρci
ρ0
)nl ( P
Pa
YO2
)bl
= Al e−EalRT ρnl
ciρ1−nl
0
(P
Pa
YO2
)bl
. (II.25)
En multipliant II.23 par ρ0, on obtient alors l’équation de bilan des espèces condensées sous la
forme∂ρci
∂t=∑
l∈Lp
P ′lci
−∑
l∈Lc
C ′lci
. (II.26)
2.3.2 Espèces gazeuses
Les espèces gazeuses prises en compte comprennent N2, O2, H2O, les gaz GC issus de la
combustion des solides (comme discuté plus tôt en Section 1.2, on considère que ces gaz sont
du dioxyde de carbone CO2), et les gaz de pyrolyse, parmi lesquels on distingue ceux qui sont
inertes (GI) et ceux qui sont combustibles (GF ). L’analyse expérimentale des gaz émis par
la dégradation des matériaux [6] permet d’identifier leur nature, mais pas de quantifier les
45
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
taux d’émission, ni surtout de les associer à des réactions spécifiques dans le schéma réaction-
nel. Nous ne nous pouvons donc pas détailler plus et traitons les gaz de pyrolyse sous cette
forme générique. Toutefois, toute information complémentaire comme la nature des gaz émis
par une réaction spécifique ou le cas échéant le dégagement à un certain point d’une espèce
toxique particulière, pourrait être introduite dans le modèle sans changement de principe de la
formulation.
Rappelons quelques éléments de phénoménologie. Les pores à l’état initial sont emplis d’air,
que l’on considère comme composé seulement de N2 et O2. Le séchage libère de la vapeur d’eau,
puis la pyrolyse émet les deux types de composés, inertes et combustibles représentatifs d’un
mélange complexe et mal connu. Dans chacune de ces deux phases, les gaz émis en grande
quantité tendent à remplacer dans les pores ceux qui y résidaient auparavant. En particulier,
la concentration en oxygène s’annule, pour cette raison mais aussi parce que la combustion
des GF dans une flamme proche de l’échantillon consomme l’essentiel de l’oxygène disponible
en provenance de l’espace extérieur. Sa concentration à la surface est donc nulle ou quasi-
nulle. Il n’y a donc en pratique pas ou très peu de coexistence des processus de pyrolyse et
de combustion. Quand la pyrolyse est achevée, ou suffisamment affaiblie pour que la flamme
s’éteigne, l’oxygène peut à nouveau atteindre la surface et diffuser vers l’intérieur du matériau,
pour oxyder le char. A ce stade, les flux de gaz (entrant d’oxygène et sortant de CO2) sont
faibles, et l’azote envahit de nouveau l’espace des pores.
Toutes ces espèces gazeuses obéissent à des équations du même type. L’équation de conser-
vation de l’espèce gazeuse i s’écrit en termes de sa fraction massique Yi
∂
∂t
(εT ρ∗
gYgi
)+
∂
∂x
(ρ∗
g vg Ygi
)−
∂
∂x
(D ρ∗
g Dg∂Ygi
∂x
)=∑
l∈Lp
P ′lgi
−∑
l∈Lc
C ′lgi
, (II.27)
où ρ∗
g est la densité intrinsèque du mélange gazeux (i.e., en masse par volume de pore). Le
produit ǫT ρ∗
g est donc la densité globale (masse par volume total) du gaz, et ǫT ρ∗
gYgidans le terme
d’accumulation celle de l’espèce i. Rappelons que la microporosité, bien que ne contribuant
pas aux transports macroscopiques, est accessible aux gaz par échanges locaux. C’est donc la
porosité totale qui intervient ici.
On reconnaît ensuite des termes convectifs et diffusifs, et le terme source/puits dû aux
réactions chimiques dans le second membre. La vitesse de filtration vg résulte de la loi de Darcy
qui la relie au gradient de pression
vg = −K
µ
∂P
∂x, (II.28)
46
II.2 Modèle physique
où P est la pression, µ la viscosité dynamique du gaz et K la perméabilité. Notons que la loi
de Darcy intègre implicitement l’équation de conservation de la quantité de mouvement, qu’il
n’est donc pas nécessaire de considérer ici. Le produit ρ∗
g vg est le débit massique de gaz, et
ρ∗
g vg Ygireprésente donc le flux convectif de l’espèce i.
On représente la diffusion par rapport à la vitesse moyenne barycentrique par une simple
loi de Fick, comme si chacune des espèces pouvait être considérée comme diluée dans une es-
pèce majoritaire. Ceci représente une approximation assez forte, mais une simplification dans
la formulation toute aussi importante. On peut du reste arguer qu’il existe en effet toujours une
espèce largement majoritaire, même si ce n’est pas toujours la même. En outre, les transferts
de gaz sont toujours largement dominés par la convection, ce qui permet de traiter la diffusion
avec une certaine approximation sans forte perte de précision, sauf dans la phase finale de com-
bustion. Toutefois, les résultats montrent que durant cette phase, la teneur en azote recouvre sa
valeur habituelle dans l’air ambiant, et que les deux expèces O2 et CO2 sont alors effectivement
relativement diluées.
On notera que la diffusion fait intervenir deux coefficients. L’un, Dg, est le coefficient de
diffusion moléculaire, propriété du gaz et fonction des variables d’état, comme on le verra plus
loin. L’autre, D, est le coefficient de diffusivité effective du milieu poreux. C’est un coefficient
sans dimension, qui ne dépend que de la géométrie, qui prend en compte le volume réduit ǫM
dans lequel le gaz peut diffuser, et la tortuosité du chemin qu’il doit suivre.
Enfin, les termes source/puits dans le second membre de (II.27) sont dûs aux réactions
chimiques. Ils s’écrivent de la même façon que dans (II.26 ). Les taux de production et consom-
mation volumiques P ′lgi
et C ′lgi
sont définis de la même façon que pour les espèces condensées,
en remplaçant νl par (1-νl) dans (II.24b,c).
2.3.3 Bilan d’énergie
Il est fait l’hypothèse que l’équilibre thermique local est assuré, c’est-à-dire que la même
température T prévaut dans les phases solides et gazeuses à chaque position x. De ce fait,
l’équation de conservation de l’énergie s’écrit
∂
∂t
[(∑
i
ρi cpi φi
)T
]+
∂
∂x
(ρ∗
g vg cpg T)
−∂
∂x
(λ
∂T
∂x
)=∑
l
(∆Hl ω′
l) , (II.29)
où la première sommation dans le terme d’accumulation porte sur toutes les espèces chimiques
i, de capacité calorifique cpi et occupant une fraction volumique φi (la masse volumique globale
ρi correspondant au produit φiρ∗
i de la masse volumique intrinsèque et de cette fraction volu-
47
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
mique). Le terme décrivant le transport de chaleur par convection est de la même forme que
dans (II.27), et le terme de conduction fait intervenir la conductivité thermique macroscopique
λ du matériau, décrite plus loin. La sommation dans le second membre porte sur toutes les ré-
actions chimiques l, d’enthalpie massique ∆Hl, et représente le termes source/puits volumique
d’énergie dûs aux réactions chimiques.
2.4 Paramètres effectifs et équations constitutives
Les équations de bilan à l’échelle de Darcy doivent être complétées par des équations consti-
tutives, qui fournissent leurs coefficients. Un premier ensemble de telles équations concerne les
propriétés du mélange de gaz dans l’espace interstitiel. L’équation d’état des gaz parfaits est
appliquée avec la masse moléculaire moyenne Mg,
P =ρ∗
gRT
Mg
, Mg =(
ΣiYgi
Mi
)−1
, (II.30)
où Mi est la masse molaire du gaz gi.
Pour les gaz purs, les coefficients physiques µ, λ et cp sont quasiment indépendants de la
pression sur une très large plage de 1 à 100 bars [92]. Nous supposons que cette propriété
s’applique également pour des mélanges de gaz et considérons ces coefficients comme fonctions
de la température seulement. Par exemple, le modèle de Sutherland [93] donne la viscosité d’un
gaz pur sous la forme
µ = µ0T0 + Ci
T + Ci
(T
T0
)3/2
, (II.31)
où C est un constante et µ0 est une valeur de référence de la viscosité à la température T0.
En outre, il est coutumier dans les simulations d’écoulements réactifs (voir par exemple [94])
de considérer que la viscosité cinématique ν, le coefficient de diffusion moléculaire Dg et la
diffusivité thermique DT sont liés par des rapports fixes, c’est-à-dire que les nombres sans
dimension de Prandtl, Schmidt et Lewis sont supposés constants
Pr =Cpµ
λ=
ν
DT
, Sc =µ
ρDg
=ν
Dg
, Le =λ
ρcpDg
=DT
Dg
=Sc
Pr. (II.32)
Ainsi, toutes les propriétés d’une espèce gazeuse peuvent être déduites d’une seule valeur
de référence et les propriétés du mélange peuvent en principe être déduites de lois de mélange
massique [95]. Cependant, la nature et donc les propriétés physiques des gaz de pyrolyse ne sont
pas bien connues, ce qui empêche un calcul réellement précis. En conséquence, une approche
48
II.2 Modèle physique
simplifiée est adoptée, dans laquelle l’équation (II.31) est appliquée au mélange des gaz avec
les paramètres pour l’air, C=110.4 K et µ0= 1.716 10−5 Pa.s à T0=273K. Ceci représente la
viscosité des espèces principales dans notre système (N2, O2, CO, CO2) avec au plus ±15%
d’erreur dans la gamme pratique de température pour nos applications (de 300 à 1200 K), mais
surestime la viscosité de la vapeur d’eau d’environ 60% dans la gamme 350 ∼ 500 K [96].
Pour la même raison et avec le même degré d’approximation, la capacité calorifique du
mélange de gaz est prise égale à celle de l’air, cpg=1.004 J kg−1 K−1, indépendante de la
température. Les autres coefficients sont déduits de (II.32) avec les valeurs typiques Le=1
et Pr=Sc=0.72. Cette approximation a l’avantage supplémentaire de simplifier beaucoup la
description de la diffusion de masse dans le mélange des gaz. Avec Dg identique pour toutes les
espèces gazeuses, les flux de diffusion dans l’approximation binaire diluée ont une somme nulle
et ne requièrent pas de correction barycentrique.
Un deuxième jeu d’équations constitutives doit fournir les propriétés des matériaux solides.
Hankalin et al. [97] ont mesuré diverses caractéristiques de bois dont leur capacité calorifique,
et rapportent également d’autres données issues de la littérature. Les résultats dépendent de la
température et du degré de dégradation du bois, mais il apparaît qu’une valeur typique cp =
1.5 kJ/kgK peut être adoptée. Elle représente les résultats de [97, 98] avec une erreur inférieure
à ±20% dans une gamme de température allant jusqu’à 1100 K. Pour plus de simplicité, cette
valeur constante est appliquée pour toutes les espèces solides dans le système.
La conductivité thermique du bois a également été mesurée par divers auteurs [17, 97, 98].
En raison de l’orientation des fibres du bois dans le contreplaqué, on considère que les mesures
effectuées dans la direction perpendiculaire aux fibres sont les mieux adaptées pour l’estimation
de la conduction thermique selon l’axe x normal à la surface de l’échantillon. Les données les
plus appropriées pour notre étude sont fournies par Hankalin et al. [97]. Ces auteurs ont mesuré
la conductivité du bois à différents stades de leur dégradation et l’ont tracée en fonction de la
densité apparente. Cette conductivité varie de 0.18 W/m.K à l’état natif jusqu’à 0.08 W/m.K
pour les densités les plus faibles, correspondant au charbon de bois. Nous utilisons ces données
pour estimer la conductivité λi des états successifs du bois dégradé en fonction de leur densité
apparente et nous supposons que la valeur pour du char reste applicable pour les résidus solides
de la combustion du char.
Cependant, les conductivités de Hankalin et al. sont données en fonction de la densité appa-
rente du matériau macroporeux. Mais dans un mélange de solides, la macroporosité de chaque
solide contribue à une macroporosité totale et on peut considérer que le volume du matériau
est la somme des volumes des macropores et des volumes de chacun des solides microporeux.
49
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
Si on veut alors appliquer une loi de mélange pour calculer la conductivité thermique effective
du milieu poreux, il faut introduire les conductivités thermiques des solides microporeux, que
nous notons λ∗
i et qui sont liées à celles des solides macroporeux par
λ∗
i =λi
1 − ǫM,i
. (II.33)
Avec cette convention, la conductivité thermique effective du matériau est donnée par 4
λ =∑
i
φciλ∗
i + ǫgλ∗
g +16 10−6σrT
3
(1 − ǫg)3 , (II.34)
où l’indice i court sur toutes les espèces condensées en présence. Le dernier terme, où σr est la
constante de Stefan-Boltzmann, est une contribution radiative à la conduction de la chaleur,
dans le cadre de l’approximation de Roseland pour des milieux poreux optiquement épais. La
forme de son expression ne prétend pas être théoriquement justifiée. Elle s’inspire du résultat des
simulations de [99], avec une modification du dénominateur afin de rendre quasi-transparents
aux échanges radiatifs les éléments de volume où seule reste une petite quantité de cendres,
durant la phase de combustion du char. Sa contribution est négligeable dans toutes les autres
situations.
Enfin, les autres propriétés effectives du milieu poreux doivent être décrites dans ses divers
stades successifs de décomposition. Pour ce ce qui concerne les flux de gaz et la diffusion des
espèces dans l’espace interstitiel, le coefficient effectif de diffusion D est représenté en fonction
de la macroporosité ǫg ouverte aux gaz par la formule
D =ǫg
1 − ǫ20g
. (II.35)
La perméabilité est supposée varier selon une loi cubique modifiée de la porosité ouverte de
l’écoulement de gaz,
K = K0
(ǫg
ǫg,0
)3 1 − ǫg,0
1 − ǫg
, (II.36)
où ǫg,0 et K0 sont la macroporosité et la perméabilité du bois sec initial (ǫg,0 = 0.31 et K0
= 2 10−15 m2, pour le contreplaqué M1). Cette valeur de K0 est dans le haut de la plage
10−18 ∼ 210−15 m2 rapportée par [17] dans sa compilation de données de la littérature pour la
perméabilité de bois mesurée dans la direction radiale.
Noter que le dénominateur de (II.35) et le dernier terme de (II.36), comme le dénominateur
4. Voir la Section 3.2 du Chapitre IV pour une illustration pratique.
50
II.2 Modèle physique
Figure II.7 – Schéma du dispositif expérimental du cône calorimètre selon la norme ISO5660 [100].
du dernier terme de (II.34), sont des artifices destinés à rendre les coefficients de transport très
grands quand ǫM approche de l’unité, et en particulier dans les éléments de volume du maillage
laissés à découvert par la récession de la surface de l’échantillon, durant la phase de combustion.
Cet aspect est discuté plus en détail dans la Section 4.4 du Chapitre III.
2.5 Conditions initiales et conditions aux limites
Dans le cadre de cette thèse, l’outil de simulation est appliqué pour simuler les expériences
avec le cône calorimètre. Afin de se figurer plus précisément l’environnement du matériau testé,
un schéma du dispositif expérimental de ces expériences est présenté dans la figure II.7.
L’outil de simulation ne considère que les processus au sein du matériau exposé à une source
de chaleur, et les conditions ambiantes telles que la température, les flux radiatif incidents, les
concentrations des espèces et la pression doivent être spécifiées. Sur cette base, les conditions
aux limites peuvent être énoncées, essentiellement sous la forme de flux de chaleur et de masse, à
prendre en compte dans les équations correspondant aux positions des frontières, le plus souvent
proportionnels aux différences de concentration ou de température avec les valeurs ambiantes
qui prévalent à une certaine distance Xa de la surface.
51
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
La face exposée, à x = 0, reçoit des flux de chaleur radiatifs incidents, dont celui émis par le
cône (Fc), et celui issu de la flamme proche de l’échantillon, quand elle existe (Fl). Cette surface
émet également un flux radiatif vers l’extérieur. La surface est considérée comme grise, avec une
constante d’émissivité ǫr = 0.9. Cette émissivité constante n’est qu’une approximation. Il a été
montré dans [12] qu’elle varie à la fois avec la longueur d’onde et avec le degré de dégradation.
Toutefois, la valeur sélectionnée ici est représentative des observations de [12] pendant la plus
grande partie du processus. De même, l’absorptivité de la face exposée est supposée constante
et égale à l’émissivité. Par conséquent, le raccord des flux de chaleur de part et d’autre de la
face exposée impose
−
(λ
∂T
∂x
)∣∣∣∣∣x=0
= ǫr (Fc + Fl) − ǫr σ T 4∣∣∣x=0
+ hT (Ta − T |x=0) , (II.37)
où hT est un coefficient d’échange avec le milieu ambiant, à température Ta. Noter que les flux
de chaleur par convection ne figurent pas dans (II.37) car ils sont continus à travers la surface
x = 0.
De même, le raccord des flux d’un espèce i de part et d’autre de la surface impose
−
(ρ∗
g D Dg∂Ygi
∂x
)∣∣∣∣∣x=0
= ρ∗
g
∣∣∣x=0
hg
(Y a
gi− Ygi
|x=0
), (II.38)
où hg est aussi un coefficient d’échange avec le milieu ambiant, où l’espèce i est présente avec
la fraction massique Y agi
. A nouveau, les flux convectifs ne figurent pas car ils sont continus à
travers la surface x = 0.
Dans l’expérience du cône calorimètre, un courant d’air frais pénètre dans le dispositif par
les côtés latéraux, et s’écoule au dessus de l’échantillon à une distance de l’ordre de Xa ≈
2cm 5. On fixe donc les valeurs de Ta et Y agi
égales à celles qui règnent dans le laboratoire, et on
estime les coefficients d’échange sur la base des coefficients de transport du gaz et de la distance
séparant la surface du courant d’air frais
hT =λg|x=0
Xa
(II.39a)
hg =Dg|x=0
Xa
. (II.39b)
5. Cette distance n’est qu’une estimation. Du reste, elle n’est sans doute pas constante du fait de la géométrieconique de l’espace au dessus de l’échantillon.
52
II.2 Modèle physique
Rappelons que λg et Dg sont calculés à partir des nombres adimensionnels dans (II.32)
λg =cpgµ
Pr(II.40a)
Dg =µ
Prρ∗
g
. (II.40b)
Ils varient donc au cours du temps, tandis que les valeurs ambiantes sont prises à une tempé-
rature de 30°C.
Dans le cas de la simulation d’un essai expérimental en cône calorimètre, le flux Fc prove-
nant de l’élément chauffant du cône calorimètre est prescrit. Il est considéré comme uniforme
sur la surface de l’échantillon. Dans d’autres situations, ce flux pourrait être fourni comme
résultant des conditions ambiantes, par exemple comme un flux radiatif σT 4a provenant de
l’environnement considéré comme un corps noir.
Enfin, la pression atmosphérique est imposée à la surface exposée
P |x=0 = Pa . (II.41)
A la face arrière x = L du domaine de calcul, différentes conditions peuvent être imposées.
Les plus simples consistent à supposer que la face arrière est imperméable et adiabatique,
c’est-à-dire que tous les flux s’annulent
vg|x=L = 0 ,∂Ygi
∂x
∣∣∣∣∣x=L
= 0 ,∂T
∂x
∣∣∣∣∣x=L
= 0 . (II.42)
Toutefois, ces conditions ne s’appliquent pas dans toutes les situations pratiques. Elles peuvent
être remplacées par des conditions générales du même type que celles (II.37, II.38, II.41) à la face
exposée, avec des conditions ambiantes et éventuellement des coefficients d’échange différents,
par exemple si la face arrière se trouve dans un autre local.
Dans les expériences sous cône calorimètre, deux types de porte-échantillon sont utilisés.
Aucun des deux n’est étanche à l’air. La condition de vitesse barycentrique nulle dans (II.42)
est donc remplacée par la condition de pression (II.41). Dès que les gaz commencent à sourdre à
la face arrière de l’échantillon, le transport de chaleur et des espèces chimiques dans l’interstice
entre l’échantillon et son support est dominé par la convection. Cette convection est prise en
compte, mais diffusion et conduction le long de cet interstice sont négligées.
Par ailleurs, le support avec lequel la face arrière est en contact peut être thermiquement
53
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
conducteur (duralumin) ou isolant (laine de roche). Par conséquent, les échanges conductifs
peuvent être inclus ou non, avec un coefficient d’échange hT b résultant des caractéristiques du
support. Ainsi, les flux de chaleur et de masse étant toujours continus à travers la face x = L,
les raccords des flux de part et d’autres de cette surface imposent
(λ
∂T
∂x
)∣∣∣∣∣x=L
= hT b (Tb − T |x=L) ,
(ρ∗
g D Dg∂Ygi
∂x
)∣∣∣∣∣x=L
= 0 . (II.43)
Le coefficient hT b est pris nul si le support est isolé avec de la laine de roche, ou égal à hT b = λd/ld
si le support est en duralumin, de conductivité λd et d’épaisseur ld.
Dans ce dernier cas, l’échantillon est en contact direct avec le support. En outre, l’épaisseur
du support est de l’ordre de 1 cm, le coefficient d’échange thermique entre le support et l’espace
environnant est de l’ordre de 10 W.m−2.K−1 et la conductivité thermique du duralumin est très
grande, de l’ordre de 150 W.m−1.K−1. Ceci donne un nombre de Biot (II.12) très faible (6
10−4). Le support est donc thermiquement fin et on peut considérer que la température de la
face arrière de l’échantillon est égale à celle de la face arrière du support. On peut alors ignorer
la présence du support et appliquer une condition de raccord de flux comme s’il était absent,
(λ
∂T
∂x
)∣∣∣∣∣x=L
= hT b (Ta − T |x=L) + ǫrσ(T 4
a − T 4∣∣∣x=L
)(II.44)
L’émissivité ǫr du fond est elle aussi supposée constante et égale à 0.9. Le coefficient d’échange
de chaleur hT b entre le fond et l’ambiance est calculé par le rapport entre la conductivité de la
phase gazeuse à cette position et la distance entre le fond et l’ambiance, pour laquelle on prend
la même valeur Xa que du côté de la face exposée
hT b =λg|x=L
Xa
. (II.45)
2.6 Modèle de flamme
Le modèle que nous développons n’a pas vocation à décrire les processus qui ont lieu en
dehors du matériau. Cette tâche est supposée être dévolue à un autre programme (FIRE,
voir fig. I.2), en interface avec notre module, fournissant les conditions ambiantes actuelles et
recevant en retour les paramètres de la réponse du matériau et les incorporant dans la poursuite
de ses calculs. Toutefois, certaines caractéristiques de l’essai sous cône calorimètre doivent être
prises en compte et en particulier la flamme près de la surface où les gaz de pyrolyse brûlent.
En effet, celle-ci a un impact significatif sur le bilan énergétique. Par conséquent, un module
54
II.2 Modèle physique
auxiliaire est conçu pour fournir une description grossière de ce phénomène.
Ce modèle rudimentaire est illustré dans la figure II.8. La flamme est considérée comme une
zone de réaction infiniment mince près de la surface, où les gaz de pyrolyse combustibles GF
sont oxydés selon la réaction
GF + νFO2
O2 → νFCO2
CO2 + νFH2O H2O (II.46)
Afin de pouvoir établir la stoechiométrie et évaluer la puissance thermique émise par la flamme,
nous supposons que les gaz de pyrolyse contiennent 50% en masse de fuel GF et 50% en masse
d’inerte GI , et que GF est constitué de 50% en masse de CO et 50% en masse de CH4. On peut
en déduire les coefficients stœchiométriques massiques des espèces chimiques dans (II.46) : νFO2
= 2.286, νFCO2
= 2.16, νFH2O = 1.126.
Figure II.8 – Illustration des conditions aux limites sur la surface exposée et modèle rudimentaire de laflamme (représentation verticale).
La flamme se stabilise à une distance XF (<Xa) de la surface solide où l’alimentation
en oxygène à partir de Xa correspond aux proportions stœchiométriques de (II.46). La loi
cinétique de cette réaction est considérée comme infiniment rapide. La vitesse de réaction ωF
est déterminée par le taux d’alimentation des réactifs par convection et diffusion, à partir de
la surface du matériau (x = 0) et de l’extérieur (avec les conditions ambiantes spécifiées à la
distance Xa de la surface). L’équation donnant la position de la flamme, i.e., la distance XF
entre la flamme et la face exposée, est obtenue par le bilan entre l’apport d’oxygène et l’apport
de fuel GF vers la flamme. Ceci, moyennant l’hypothèse que tous les gaz combustibles sont brûlés
55
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
et que tout l’oxygène est consommé (c’est-à-dire que les conditions de stoechiométrie de (II.46)
sont assurées). Les coefficients d’échange de masse sont modélisés de la même manière que hg,
sur la base des distances XF (flamme / surface solide) et Xa − XF (flamme / environnement).
L’apport maximal d’oxygène de l’ambiance vers la flamme est calculée comme suit :
jO2 = ρ∗
g
∣∣∣x=0
hF,ag
(Y a
O2− Y F
O2
)+ ρ∗
gvgYO2
∣∣∣x=0
, hF,ag =
Dg|x=0
Xa − XF
. (II.47)
L’apport maximal de fuel de la face exposée vers la flamme est la somme :
jGF= ρ∗
gvgYF
∣∣∣x=0
+ hF,0g
(YGF
|x=0 − Y FGF
), hF,0
g =Dg|x=0
XF
. (II.48)
La demande en oxygène pour la réaction II.46 est νFO2
jgF. Pour simplifier le calcul, le flux
de diffusion du fuel est supposé toujours négligeable devant son flux convectif. En outre, la
condition de stœchiométrie Y FO2
= 0 = Y FGF
implique que l’oxygène n’atteint pas la surface
x = 0 quand une flamme existe, i.e., YO2|x=0 = 0. Les apports des réactifs vers la flamme et
l’équation de la position de la flamme deviennent donc
jO2 = ρ∗
g
∣∣∣x=0
hF,ag Y a
O2(II.49)
jGF= ρ∗
gvgYGF
∣∣∣x=0
(II.50)
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
Y aO2
Xa − XF
= νFO2
ρ∗
gvgYGF
∣∣∣x=0
. (II.51)
L’équation du premier degré (II.51) fournit une valeur de XF . Toutefois, des difficultés
peuvent survenir si l’émission de fuel est très importante. Formellement, une quantité illimitée
d’oxygène peut être fournie si XF s’approche de Xa, et tout le flux de GF peut être brûlé, avec un
très fort dégagement de chaleur, ce qui est irréaliste. On limite donc en pratique l’éloignement
de la flamme à XF,max = 1.9 cm, et
XF = min
(Xa −
Dg|x=0 Y aO2
(vgYGF)|x=0
, XF,max
). (II.52)
Ceci qui correspond surtout à restreindre son approche du lieu où la valeur ambiante de Y aO2
est appliquée (distance d’au moins 1 mm), et donc à limiter les apports d’oxygène. Ainsi, si la
position de la flamme s’établit avec 0 < XF < XF,max, tout le fuel est brûlé ; si XF = XF,max,
56
II.2 Modèle physique
le fuel n’est pas entièrement consommé et le taux de réaction dans la flamme (II.46) est limité
par l’apport d’oxygène(ρ∗
gDg)|x=0
Y aO2
Xa−X,max, tandis que XF,min = 0.
Lorsque le débit de GF est important, XF > 0, la flamme est détachée de la surface du
solide, que l’oxygène n’atteint pas. Lorsque la production de GF diminue, XF tend vers zéro.
Seule une partie (éventuellement nulle, quand la pyrolyse est terminée) de l’apport en oxygène
est consommée dans la flamme, et la partie restante peut atteindre le solide et y pénétrer. Il est
possible d’avoir une situation où le débit de fuel est encore positif mais faible devant l’apport
de l’oxygène, avec une position de flamme résultant de (II.52) négative. Dans ce cas, on fixe
XF à zéro. Le flux total d’oxygène à la face exposée dans cette situation vaut
JO2 |x=0 =(ρ∗
gvgYO2
)∣∣∣x=0
+
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
(Y a
O2− YO2|x=0
)
Xa
− νFO2
(ρ∗
gvgYGF
)∣∣∣x=0
. (II.53)
Du fait du fort taux d’émission de gaz pendant la phase de pyrolyse intense, on considère
que les gaz produits par la combustion dans la flamme sont emportés et ne rediffusent pas vers
la surface solide. Ainsi, en présence d’une flamme, nous supposons que l’échange diffusif entre
la flamme et la surface solide est négligeable. Les flux totaux de ces gaz quand il y a une flamme
sont calculés comme suit
JH2O|x=0 =(ρ∗
gvgYO2
)∣∣∣x=0
(II.54a)
JCO2|x=0 =(ρ∗
gvgYCO2
)∣∣∣x=0
. (II.54b)
En absence de flamme, l’échange de CO2 et H2O entre le milieu ambiant et la surface solide a
lieu normalement, avec
JH2O|x=0 =(ρ∗
gvgYH2O
)∣∣∣x=0
+
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
(Y a
H2O − YH2O|x=0
)
Xa
(II.55a)
JCO2|x=0 =(ρ∗
gvgYCO2
)∣∣∣x=0
+
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
(Y a
CO2− YCO2|x=0
)
Xa
. (II.55b)
Les gaz inertes (azote N2 et gaz de pyrolyse non combustibles GI) ne participent pas aux
réactions. Leur échange diffusif avec l’ambiance a lieu de la même façon qu’il y ait une flamme
57
Chapitre II. Mécanismes et formulations microscopiques
ou non. Leurs flux totaux à la face exposée sont calculés comme suit :
JN2|x=0 =(ρ∗
gvgYN2
)∣∣∣x=0
+
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
(Y a
N2− YN2|x=0
)
Xa
(II.56a)
JGI|x=0 =
(ρ∗
gvgYGI
)∣∣∣x=0
+
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
(Y a
GI− YGI
|x=0
)
Xa
. (II.56b)
Le taux de réaction de la flamme est donc donné par
ωF =
(ρ∗
gDg
)∣∣∣x=0
Y aO2
Xa − XF
. (II.57)
Aucune équation de bilan énergétique n’est écrite pour la flamme. Elle est considérée comme
transparente pour les échanges radiatifs entre le matériau et l’environnement, mais rayonne à
la fois vers l’extérieur et vers la surface solide. De façon très schématique, il est supposé ici
que la chaleur libérée par la réaction est évacuée pour un tiers par la convection par le flux
de gaz vers l’extérieur, un autre tiers par rayonnement vers l’extérieur, et un dernier tiers par
rayonnement en direction de la matière solide, qui est ajouté au flux radiatif incident Fc.
La chaleur de réaction dans la flamme ∆HF est calculée sur la base d’un argument très
global, utilisant les bilans thermiques des processus ayant lieu dans le milieu solide et le pouvoir
calorifique total du bois. Ce dernier est la somme de contributions positives ou négatives : la
chaleur latente de vaporisation de l’eau, la chaleur de pyrolyse, la chaleur de la combustion des
solides et la chaleur de combustion des gaz de pyrolyse combustibles. En utilisant la valeur de
ce pouvoir calorifique total estimée d’après la littérature et les coefficients stœchiométriques
massiques, on peut en déduire la chaleur dégagée par la combustion de GF par kilogramme de
bois initial, ou par un kilogramme de GF . La chaleur Fl dégagée par la flamme dans l’équation
(II.37) est le produit de la chaleur ∆HF de la réaction (II.46) et de son taux de réaction ωF
Fl = ωF ∆HF . (II.58)
Rappelons que tout le contenu de cette Section ne porte que sur un modèle très rudimentaire,
sans prétention à précision ou à réalisme très poussé, et ne sert qu’à permettre l’éxécution de nos
applications en phase de développement. Ce modèle de flamme doit à l’évidence être remplacé
par une gestion plus fine et rigoureuse des événements extérieurs au solide, mais ceci se situe
hors de notre champ d’investigation.
58
59
60
Chapitre III
Modèle numérique
Ce chapitre décrit l’implémentation numérique et les méthodes appliquées pour la résolution
des equations présentées dans le Chapitre II. Les grandes lignes peuvent se résumer en quelques
mots-clés : une formulation aux volumes finis est utilisée sur un maillage fixe régulier, avec un
schéma upwind pour les termes de flux convectifs ; les équations sont discrétisées au second
ordre en espace, et au premier ordre en temps ; la formulation est implicite en temps, ce qui
nécessite une methode itérative, du fait des non linéarités du problème.
1 Description géométrique
Rappelons en premier lieu que le problème est traité dans une configuration unidimension-
nelle. Le domaine de calcul englobe une couche de matériau d’épaisseur L, dont une des faces est
exposée au feu (face avant, ou face exposée) et l’autre est soumise à divers types de conditions
moins agressives (face arrière).
La discrétisation spatiale du domaine de calcul est schématisée dans la figure III.1. L’origine
d’un repère cartésien est placée sur la face exposée, qui correspond donc à la position x = 0,
tandis que la position x = L correspond à la face arrière. Un maillage régulier est défini. Il
comporte Nx + 1 points, séparés par un pas δx = L/Nx. Des points sont placés aux frontières
x=0 et x=L du domaine.
Toutes les variables d’état du système (température, pression, masses volumiques... ) sont
déterminées en ces points de maillage. Les paramètres physicochimiques (coefficients de trans-
port, taux de réactions, toutes propriétés des matériaux... ) sont évaluées en fonction de ces
variables, et sont supposés s’appliquer dans un certain volume entourant les noeuds correspon-
dants.
Il est à noter que le maillage utilisé ici est fixe et indéformable. Comme il a été discuté plus
tôt (Section 4), d’autres approches sont possibles, comme des maillages déformables suivant
61
Chapitre III. Modèle numérique
Figure III.1 – Maillage du domaine de calcul (a). L’épaisseur L de l’échantillon est représentée parNx + 1 points régulièrement espacés. Volumes de contrôle (b). Pour illustration, 5 volumes seulement sontreprésentés.
les déformations du matériau et/ou la récession de sa surface. Dans le cas présent, la phase
de pyrolyse laisse un résidu charbonneux, donc le volume est sensiblement identique à celui
du bois initial. Aucun phénomène de gonflement, intumescence ou retrait n’est considéré. Une
récession de la surface se produit effectivement durant la phase de combustion. Toutefois, à
ce stade, le choix de la simplicité du maillage fixe a été fait et la disparition de toute phase
solide dans certains éléments de volume est représentée par l’évolution des propriétés associées
(essentiellement, coefficients de transport très élévés et capacité calorifique très faible) de façon
à transférer sans modification à la surface du solide les conditions imposées en x=0.
2 Formulation aux volumes finis
2.1 Principe
Considérons une équation de bilan de la forme générique suivante :
∂Z
∂t+ ∇.J = S , (III.1)
62
III.2 Formulation aux volumes finis
où Z représente le contenu volumique d’une quantité extensive (masse, chaleur,... ), J son flux et
S un terme source. Dans la formulation aux volume finis, l’équation locale (III.1) est remplacée
par son intégrale sur un volume de contrôle Ω, et le second terme est converti en intégrale de
surface sur la frontière ∂Ω de ce volume par application de la formule de Green
∂
∂t
∫
ΩZdv +
∫
∂Ωn.Jds =
∫
ΩSdv , (III.2)
où n est la normale sortante de ∂Ω.
Ce formalisme général va être appliqué à toutes les équations de conservation formulées dans
le Chapitre II, afin d’obtenir la formulation discrète du problème. Les volumes de contrôle sont
des intervalles de longueur δx centrés autour des nœuds où les variables d’état sont définies,
comme illustré dans la figure III.1b. Le volume de contrôle contenant un point courant (P) a
deux volumes de contrôle voisins, à sa gauche (G) et à sa droite (D). Les flux à travers ses deux
frontières (g,d), qui interviennent dans l’équation de bilan, seront évalués à partir des valeurs
des variables disponibles en (G,P,D). Toutefois, les deux volumes de contrôle (E,L) situés aux
deux extrémités font l’objet d’un traitement particulier. Notons d’abord qu’ils ont un volume
δx/2 différent des autres volumes de contrôle. En outre, une de leur frontière coïncide avec une
face extérieure du domaine. Les flux qui la traversent sont donc déduits des conditions imposées
sur ces surfaces.
L’application de (III.2) dans ce contexte, et pour le volume de contrôle autour du point
courant P, donne
δx∂
∂tZ|P + [J|d − J|g] = δx S|P , (III.3)
où les intégrales volumiques sont évaluées au second ordre près à partir de la valeur de Z ou S
au centre du volume. Par ailleurs, le flux J peut faire intervenir des contributions convectives
et diffusives/conductives, sous une forme générique (susceptible de varier selon les cas)
J = V Z − D ∇Z . (III.4a)
Les gradients qui interviennent dans les termes diffusifs (et dans la loi de Darcy qui fournit la
vitesse du gaz) sont évalués au second ordre près par différence centrée des variables aux deux
noeuds de part et d’autres de la frontière de ∂Ω considérée. Les variables et paramètres dont
les valeurs sont nécessaires aux interfaces entre volumes de contrôle sont évalués par prise de
moyenne des valeurs aux noeuds de part et d’autre, et notés 〈.〉. Enfin, une formulation upwind
est adoptée pour tous les termes convectifs, considérant que l’écoulement véhicule un fluide
porteur de la valeur de Z au point de maillage situé en amont, dénoté par l’indice ”u”. Plus
63
Chapitre III. Modèle numérique
précisément, l’indice ”du” (ou ”gu”) signifie ”amont par rapport à l’interface d (ou g)”. Avec ces
notations, (III.4a) appliqué par exemple à la frontière en (d) entre deux volumes de contrôle
prend la forme
J|d = V |d Z|du − 〈D〉|d (∇Z) |d , (III.4b)
où Z|du = Z|P (resp. Z|D) si V est positif (resp. négatif). Une valeur identique du flux J est
bien sûr appliquée dans les équations de bilan des deux volumes de contrôle de part et d’autre
de l’interface, ce qui assure la conservation globale de la quantité Z.
La discussion ci-dessus s’applique aux points courants (de type P dans la figure III.1b). Les
éléments de volume contenant les points de maillages E et L aux extrémités du domaine de
calcul demandent quelques éléments complémentaires, du fait des conditions imposées à ces
limites.
A l’exception de la pression, pour laquelle une valeur Pa est prescrite aux frontières de
l’échantillon, toutes les autres conditions concernent des flux. En effet, même quand il s’agit
de prendre en compte l’existence d’une valeur ambiante Za d’une variable, ceci est fait par
l’intermédiaire d’une condition de flux, avec une expression pour le flux du type de h(Za −
ZE) où h est un coefficient d’échange (on prend ici le point E sur la face exposée comme
exemple ; les mêmes traitements s’appliquent en L sur la face arrière). Le cas échéant, une
valeur très grande de h permet d’imposer en pratique une condition de Dirichlet ZE = Za.
Dans le cas du point E, l’équation de bilan intégrée sur le volume de contrôle est donc de la
forme de (III.3) où δx est remplacé par δx/2, les échanges J|d avec le volume côté intérieur sont
évalués de la façon habituelle, et les échanges J|g avec l’extérieur sont simplement la somme
des différentes contributions pouvant exister suivant la situation (par exemple, conduction,
convection et radiation, pour l’équation de l’énergie). Ces flux peuvent dépendre ou pas de la
valeur de Z en E, et les traitements détaillés des deux cas sont décrits dans la Section 2.5.
Le traitement de la pression est particulier. La pression ne fait pas partie des variables
primaires dans la formulation du problème, qui sont les masses volumiques et la température.
La prescription de PE = Pa est donc réalisée en ajustant le flux de gaz à travers la frontière
de l’échantillon, selon la procédure décrite dans la Section 3.2.2, afin que la pression souhaitée
soit obtenue.
Les variables considérées dans les équations de bilan sont les masses volumiques des espèces
(i), qui se présentent en phase condensée et immobile (ρci) ou en phase gazeuse et mobile (ρgi
) et
la température T . Les équations de bilan correspondantes sont considérées dans les paragraphes
suivants.
64
III.2 Formulation aux volumes finis
2.2 Conservation des espèces condensées
Dans le cas des espèces condensées, le terme de flux dans (III.1) est nul. L’équation de
conservation pour le volume de contrôle P, obtenue à partir de (II.26), se réduit à
∂ρci
∂t=∑
l∈Lp
P ′lci
−∑
l∈Lc
C ′lci
, (III.5)
où le terme source résultant des processus chimiques est donné par (II.24, II.25).
2.3 Conservation des espèces gazeuses
L’équation de conservation des espèces gazeuses (II.27) s’écrit après intégration sur le volume
de contrôle P (et après division par δx) sous la forme,
∂
∂tρgi
|P +1δx
[ρ∗
gi
∣∣∣du
vg|d − ρ∗
gi
∣∣∣gu
vg|g
]
−1
δx2
[〈ρ∗
g〉|d〈D〉|d〈Dg〉|d(
Ygi|D − Ygi
|P
)− 〈ρ∗
g〉|g〈D〉|g〈Dg〉|g(
Ygi|P − Ygi
|G
)]= Sgi
|P .
(III.6)
Rappelons que les densités ”ρ” sont des masses par volume total (bulk), tandis que les densités
”ρ∗” sont des masses volumiques intrinsèques, par volume d’espèce gazeuse.
2.4 Conservation de l’énergie
De la même façon, l’équation de conservation de l’énergie (II.29) devient pour un volume
de contrôle P
∂
∂t
[(∑
i
ρi cpi
)T
]∣∣∣∣∣P
+1δx
[(ρgcpg
T)∣∣∣
duvg|d −
(ρgcpg
T)∣∣∣
guvg|g
]
−1
δx2
[〈λ〉|d (T |D − T |P ) − 〈λ〉|g (T |P − T |G)
]= ST |P ,
(III.7)
où la sommation∑
i porte sur toutes les espèces en présence.
65
Chapitre III. Modèle numérique
2.5 Formulation matricielle
Après discrétisation spatiale, les équations de bilan (III.5, III.6,III.7) peuvent s’écrire sous
une forme matricielle générique
∂
∂t(M · Z) + C · Z + D · Z = S + E , (III.8)
où Z représente une des masses volumiques ρi ou la température T . Le vecteur Z regroupe
les valeurs de Z aux Nx + 1 points de maillage. Les vecteurs S et E regroupent de la même
façon les termes sources/puits (d’origine chimique) et l’influence des conditions aux limites.
Par exemple, si Z=T , le flux radiatif incident sur la face exposée apparaît dans la première
composante de E.
La matrice M dans les termes d’accumulation est diagonale. La matrice C correspond aux
termes convectif et la matrice D aux termes diffusifs ou conductifs. Puisque qu’elles représentent
les interactions entre un volume de contrôle et ses voisins immédiats, ces deux matrices sont
tridiagonales.
A priori, et en dehors de quelques cas particuliers (C, D et E sont nuls pour les espèces
condensées et M=I, matrice unité, pour les espèces gazeuses et solides), toutes les matrices
et les vecteurs S et E dépendent de l’état du système. En particulier, les termes sources S
comportent des contributions qui se présentent sous des formes diverses. Elles peuvent être
indépendantes du champ Z considéré, comme la production d’une espèce condensée par la
pyrolyse d’une autre espèce. Elles peuvent en dépendre explicitement comme la consommation
d’une espèce par une réaction chimique, éventuellement de façon non linéaire selon l’ordre de la
réaction. Elles peuvent également en dépendre de façon indirecte, comme la chaleur libérée par
une réaction, proportionnelle à la quantité de matière convertie, mais avec un taux qui dépend
de la température via la loi d’Arrhenius. Ces différents cas seront distingués un peu plus loin
mais dans un premier temps, et tant que plus de détail n’est pas nécessaire, la simple expression
S est conservée par souci de simplicité.
La façon dont les termes issus des conditions aux limites sont intégrés dans ce schéma mérite
d’être un peu plus détaillée. Les principes en ont été donnés dans la Section 2.1. Hormis le cas de
la pression ambiante, qui est traitée de façon spécifique (cf. Section 3.2.2), toutes les conditions
aux limites sont exprimées par l’intermédiaire de flux.
Certains de ces flux ne dépendent pas des inconnues du problème, tels que le flux incident
radiatif incident qui provient du cône calorimètre quand ce type de test est considéré, ou
de l’espace environnant si on simule une situation d’incendie. Le flux associé apparaît donc
66
III.3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
naturellement dans le vecteur E, à la ligne correspondant au point E sur la face exposée.
D’autres flux dépendent linéairement des inconnues à déterminer. Beaucoup d’entre eux
prennent la forme d’échanges pouvant s’écrire sous la forme générique h(Za − ZE) (on prend ici
le point E sur la face exposée comme exemple ; les mêmes traitements s’appliquent en L sur la
face arrière). Dans ce cas, le terme hZa apparaît dans le vecteur E à la ligne correspondant au
point E, tandis que le coefficient (−h) du terme −hZE s’insère sur la diagonale de la matrice
D. D’un autre côté, les termes convectifs sont de la forme vgρ∗
i pour ce qui concerne les espèces
gazeuses, ou ρ∗
gcp,gvgT pour la chaleur. L’inconnue associée à la quantité transportée est ρ∗
i ou
T au point de frontière E. Le coefficient vg ou ρ∗
gcp,gvg apparaît donc sur la diagonale de la
matrice C sur la ligne correspondante.
Enfin, deux flux thermiques de nature radiative, émis depuis la surface de l’échantillon
ou reçu par la surface en provenance de la flamme qui existe éventuellement proche d’elle et
où sont brûlés les gaz de pyrolyse, dépendent également de l’état du système, mais ne sont
pas des fonctions linéaires des variables d’état. Ils ne s’inscrivent donc pas directement dans
la formulation matricielle linéaire (III.8), et la façon de les prendre en compte dépend du
schéma temporel adopté pour la formulation. Nous anticipons un peu ici pour en parler sur la
présentation de cette formulation dans la Section 3.
Le flux émis par la surface s’écrit (cf. éq. II.37) −ǫrσT 4E. Dans le schéma temporel implicite
qui sera décrit ultérieurement, ceci est exprimé sous la forme de −ǫrσT(k)3E T
(k+1)E , où les super-
scrits (k) et (k + 1) font référence aux états initiaux et finaux lors d’une itération (III.15). On
fait ainsi apparaître la quantité T(k+1)E à calculer, précédée d’un coefficient considéré comme
constant, ce qui s’inscrit dans le formalisme (III.8). Pour être complet, on pourrait ajouter à
(III.8) un terme R · Z, où −ǫrσT(k)3E apparaîtrait sur la diagonale. Dans la pratique, M, C,
D et cet éventuel R sont regroupés en une seule matrice A (cf. éq. III.13) et on peut donc
considérer que −ǫrσT(k)3E est implanté directement dans cette matrice.
Le flux radiatif reçu de la flamme est une fonction plus complexe de l’état du système, qui
dépend du débit de gaz émis et de sa composition. Dans le cadre du schéma itératif (III.15), il
est donc évalué à l’état (k), et on l’intègre de la même façon que le flux reçu du cône calorimètre
dans le vecteur E, c’est-à-dire au vu de (III.13) dans le second membre Bk de (III.15).
3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
Une discrétisation au premier ordre est appliquée, où les dérivées temporelles dans (III.5,
III.6, III.7) sont exprimées en fonction de l’incrément au cours du pas de temps δt entre les
67
Chapitre III. Modèle numérique
valeurs finale et initiale (superscript ”0”) , selon
∂
∂tZ =
Z − Z0
δt. (III.9)
3.1 Schémas explicites
Dans un premier temps, une version du code de simulation a été implémentée avec une
formulation explicite en temps, c’est à dire, si l’on se réfère à (III.8), que la valeur de Z après
un pas de temps est obtenue par simple application de
Z = Z0 + M−1 ·[−C · Z0 − D · Z0 + S + E
]δt , (III.10)
où tous les coefficients sont évalués dans l’état initial du système. L’emploi d’un pas de temps
adaptatif est indispensable, du fait des fortes non linéarités du problème qui donnent lieu à
d’abrupts changements de régimes. Le déclenchement soudain de réactions peut survenir quand
la température atteint un niveau requis, en raison de la forme exponentielle de la loi d’Arrhenius.
Ceci peut causer le brusque dégagement de grandes quantités de gaz, avec un fort impact sur
la composition du mélange (dont la pression est déduite) et sur la contribution convective
aux transports. Le pas de temps était donc gouverné par divers critères qui restreignaient les
variations des paramètres. En outre, certains critères de stabilité doivent être satisfaits dans un
schéma explicite, et ceux associés aux processus diffusifs (diffusion d’espèces, conduction de la
chaleur et particulièrement loi de Darcy) imposaient des valeurs prohibitivement faibles de δt.
Il était donc indispensable de s’orienter vers une formulation implicite. On peut noter qu’une
première étape dans ce sens consiste à écrire (III.8) sous la forme
[M + δt (C + D)] · Z = M · Z0 + δt (S + E) . (III.11)
Les valeurs finales de Z sont utilisées pour évaluer les flux, ce qui élimine les plus sévères des
limitations évoquées ci-dessus. Toutefois, tous les coefficients de l’équation (M, C, D, S, E)
restent évalués au début du pas de temps. Notons que cela implique en particulier que la dérivée
temporelle ∂(M · Z)/∂t est remplacée par M · ∂Z/∂t, ce qui revient à une approximation de
quasi-staticité. Celle-ci est généralement justifiée durant de brefs pas de temps, si l’on considère
que les propriétés du milieu (porosité, ou capacité calorifique, par exemple) varient beaucoup
plus lentement que les variables d’état.
Par ailleurs, l’emploi des valeurs initiales des coefficients à des conséquences qui mettent en
cause la stabilité du schéma. A titre d’exemple, le taux d’une réaction d’oxydation (dans S)
68
III.3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
évalué en début de pas de temps et appliqué pendant δt peut causer l’épuisement complet (ou
au delà !) de la concentration en oxygène. Ce taux sera donc nul au pas de temps suivant, et la
concentration en oxygène sera renouvelée par les apports diffusifs. Il en résulte un comportement
intermittent de la réaction, du dégagement de chaleur et de la production de gaz associés, des
fluctuations de la pression et donc des termes convectifs... Une grande variété de situations à
problème de ce type ou d’un autre peuvent survenir en particulier quand le modèle chimique
se complexifie.
Le fond du problème est que l’état Z du système prédit par (III.11) pour la fin du pas
de temps est solution d’une équation qui n’est alors plus valide. La solution consiste donc à
résoudre (III.11) avec les valeurs finales des coefficients, associées à la valeur de Z recherchée,
et aux valeurs finales de toutes les autres variables d’état, également à déterminer. Toutefois,
le problème comporte de nombreux aspects non linéaires. On peut citer notamment :
– la loi d’Arrhenius qui régit les cinétiques chimiques ;
– l’ordre des réactions chimiques quand il n’est pas égal à 1 ;
– le taux d’émission radiatif à la surface du matériau ;
– la réponse de la pression à l’évolution de la composition du mélange de gaz ;
– les termes convectifs qui font intervenir les produits entre des inconnues du système (la
quantité convectée et les masses volumiques, via la pression qui détermine la vitesse) ;
– les fractions massiques des gaz, qui dépendent de façon non linéaire des densités de toutes
les autres espèces gazeuses.
Le jeu d’équations est donc fortement non linéaire et concerne de nombreux champs couplés
entre eux. Par conséquent, la méthode de résolution implicite ne peut être que de nature
itérative.
3.2 Schéma implicite
3.2.1 Principe, pour un champ d’inconnues
La description de principe qui est donnée ici ne fait référence qu’à un seul champ d’inconnues
Z. Il s’agit d’une situation irréaliste, mais dont la simplicité permet une présentation plus aisée
d’une procédure, dont l’application effective dans une situation plus complexe est décrite dans
les paragraphes 3.2.2 et 3.2.3.
Pour simplifier l’écriture, l’équation (III.8) peut être écrite sous la forme standard
A · Z = B , (III.12)
69
Chapitre III. Modèle numérique
Figure III.2 – Schéma itératif de résolution du problème implicite (III.12).
avec
A =1δt
M + C + D , B =1δt
M0 + S + E . (III.13)
Le principe du schéma itératif de résolution est illustré dans la figure III.2 et décrit ci-
dessous. Les itérations sont indexées par l’entier k. L’état initial au début du pas de temps,
c’est-à-dire l’état atteint à la fin du pas de temps précédent, correspond à k=0. La matrice A0
et le vecteur B0 sont évalués dans cet état Z0. Une nouvelle valeur Z1 peut être obtenue en
résolvant le système suivant
A0 · Z1 = B0 . (III.14)
Ceci correspond en fait à la résolution du problème (III.11), mais la procédure est ici poursuivie.
Une nouvelle matrice A1 et un nouveau vecteur B1 sont évalués sur la base de Z1 et le processus
itératif se poursuit en alternant la résolution du problème
Ak · Zk+1 = Bk , (III.15)
et la réévaluation de Ak+1 et Bk+1, jusqu’à convergence. Notons que toutes les matrices Ak sont
tridiagonales et que les résolutions des systèmes linéaires correspondants sont aisément effec-
tuées à l’aide de programmes de bibliothèque standards (voir par exemple [101]). La convergence
est ici contrôlée par la diminution des incréments successifs, selon le critère relatif
|Zk+1 − Zk| ≤ η|Zk+1 − Z0| . (III.16)
La procédure exacte, légèrement plus complexe, est discutée plus loin (Section 4.2). Ce critère
doit être satisfait localement, en tout point du domaine de calcul. Notons qu’une condition
similaire doit être vérifiée pour les coefficients A et B, la non-linéarité impliquant que les deux
types de critères ne sont pas strictement équivalents. Ce second type de test a également été
implémenté. Toutefois, la vérification du seul critère portant sur Z s’avère suffisante en pratique.
70
III.3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
La convergence de la procédure n’est pas nécessairement assurée, du fait des non linéarités,
mais peut en pratique toujours être atteinte moyennant le choix d’un pas de temps suffisament
petit. Les quantités Ak, Bk et Zk+1 n’évoluent plus, et les valeurs limites qu’elles ont atteintes
sont solution du problème
A∞ · Z∞ = B∞ , (III.17)
qui correspond exactement à celui (III.12) que l’on cherchait à résoudre.
3.2.2 Algorithme 1, pour plusieurs champs d’inconnues
La mise en oeuvre du schéma de principe décrit au paragraphe précédent, de façon illus-
trative pour un seul champ Z d’inconnues, peut se faire pour le système complet d’équations
selon le schéma simple suivant. Au cours de l’itération k + 1 dans un pas de temps :
– Résolution de (III.15) où Z représente la concentration en oxygène, et Ak, Bk les coeffi-
cients associés ;
– Résolution de (III.15) où Z représente successivement toutes les autres espèces gazeuses
et Ak, Bk les coefficients associés ;
– Résolution de (III.15) où Z représente successivement toutes les espèces condensées et
Ak, Bk les coefficients associés ;
– Résolution de (III.15) où Z représente la température et Ak, Bk les coefficients associés ;
– Mise à jour du champ de pression, de tous les coefficients, et en particulier de la vitesse
du gaz ;
– k = k + 1.
Dans la mesure où les coefficients sont tous calculés sur la base de l’état du système à l’itération
k, sans mise à jour intermédiaire, l’ordre de résolution des problèmes individuels est indifférent.
La dernière étape mérite un commentaire. Après calcul des densités ρk+1gi
des gaz et de la
température T k+1, la pression P k+1 peut être évaluée en chaque point par la loi des gaz parfaits
(II.30), ainsi que la vitesse du gaz vgk+1 entre chaque paire de points voisins, par la loi de
Darcy (II.28). Toutefois, aux extrémités du domaine où une condition de pression P = Pa
est imposée (généralement à la face exposée x=0 et éventuellement en face arrière x=L), la
pression ainsi obtenue ne correspond pas à la valeur prescrite. La valeur de la vitesse, vg(0)
et éventuellement vg(L) sont donc corrigées. Le principe est que si la pression obtenue est
supérieure (resp. inférieure) à la consigne, la correction de vg doit laisser échapper plus (resp.
moins) de gaz afin de ramener P à la valeur souhaitée. La quantité de gaz en excès (resp.
71
Chapitre III. Modèle numérique
défaut) détermine l’amplitude de la correction à effectuer,
[vg
k+1 − vgk]
δt = −ǫδx
2P k+1 − Pa
Pa
, (III.18)
où ǫδx/2 représente le volume des pores dans le volume de contrôle à la paroi. L’ensemble du
terme de droite est donc la quantité de gaz que la correction de vitesse doit laisser échapper.
Après correction de la vitesse, P k+1 est ramenée à la valeur de consigne Pa avant de débuter
l’itération suivante.
On considère que la convergence de la procédure est atteinte quand le critère (III.16) est
satisfait pour tous les champs, et que la pression P k+1 obtenue est suffisament proche de la
consigne, selon le critère absolu
|P k+1 − Pa| ≤ ηP [bar] . (III.19)
La procédure exacte est discutée plus en détail dans la Section 4.2.
3.2.3 Algorithme 2, pour plusieurs champs d’inconnues
Le schéma décrit ci-dessus fonctionne et donne des résultats satisfaisants dans beaucoup de
cas, comme par exemple dans le cas du modèle chimique utilisé dans le Chapitre IV. Toutefois,
il donne lieu à un comportement instable (oscillant) avec le modèle utilisé dans le Chapitre V.
Notons que cela ne tient pas à la nature purement séquentielle du schéma réactionnel dans le
premier cas, ou à l’existence de réactions concurrentes dans le second, mais à la succession dans
le schéma de deux réactions, la première produisant une espèce et la seconde la consommant à
un taux plus élevé (dans une plage de température).
Un degré supérieur d’implicitation du schéma de résolution est nécessaire pour traiter cette
situation. Sa description nécessite un examen plus détaillé des termes sources/puits.
Considérons d’abord les réactions anaérobies, séchage ou pyrolyse, qui convertissent une
espèce condensée en une autre avec émission de gaz. En se plaçant du point de vue de l’espèce
condensée i, on peut distinguer les réactions anaérobie qui la produisent, dont les indices peuvent
être regroupés dans L(i)ap , et celles qui la consomment, dont les indices constituent l’ensemble
72
III.3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
L(i)ac . Les taux de production/consommation de i peuvent s’écrire
i → j + gas∑
l∈L(i)ac
ρnl
i Al (III.20a)
j → i + gas∑
l∈L(i)ap
ρnl
j(l) Al . (III.20b)
Les termes Al regroupent les coefficients et l’exponentielle de −El/RT de la loi d’Arrhe-
nius (II.25), ainsi que le coefficient stochiométrique approprié dans le cas d’une production.
De la même façon, on peut distinguer parmi les réactions d’oxydation, l’ensemble de celles
qui produisent (L(i)op ) et de celles qui consomment (L(i)
oc ) une espèce i. Les taux de produc-
tion/consommation de i peuvent donc s’écrire
i + O2 → j + gas∑
l∈L(i)oc
ρnl
i ρ02 Al (III.21a)
j + O2 → i + gas∑
l∈L(i)op
ρnl
j(l) ρ02 Al . (III.21b)
Les termes A regroupent en plus des éléments précédemment cités, le rapport P/Pa qui inter-
vient dans (II.25) et 1/ρg, qui assure la conversion de ρ02 en Y02 .
La difficulté de prendre en compte les termes sources/puits (III.20) sous forme implicite
provient de la non linéarité quand l’ordre des réactions est différent de 1. On applique donc une
linéarisation, sous la forme suivante :
i → j + gas∑
l∈L(i)ac
[(ρk
i )nl−1Al
]kρk+1
i (III.22a)
j → i + gas∑
l∈L(i)ap
[(ρk
j(l))nl−1
Al
]kρk+1
j(l) . (III.22b)
Les taux de production/consommation sont exprimés sous la forme d’une fonction linéaire des
consommations à déterminer à l’itération k + 1, avec un coefficient évalué à l’état k.
Les termes sources/puits (III.21) présentent une difficulté supplémentaire, puisqu’ils font
intervenir le produit de concentrations. Considérant que la concentration d’oxygène est suscep-
tible de varier plus rapidement que celle des constitutants solides, le choix a été fait de rendre
73
Chapitre III. Modèle numérique
la formulation implicite en ρ02 . Ainsi,
i + O2 → j + gas∑
l∈L(i)oc
(ρki )nl ρk+1
02A
kl (III.23a)
j + O2 → i + gas∑
l∈L(i)op
(ρkj(l))
nl ρk+102
Akl . (III.23b)
Dans ce qui suit, tous les termes sources/puits sont évalués conformément à (III.22, III.23),
directement pour les espèces condensées, par application des coefficients multiplicateurs stochio-
métriques appropriés pour les différents gas, et par multiplication par l’enthalpie de réaction
pour l’équation de l’énergie.
Les opérations au cours de l’itération k + 1 dans un pas de temps se décomposent comme
suit :
– Résolution simultanée des équations (couplées entre elles) pour toutes les espèces conden-
sées n’intervenant que dans des réactions anaérobies ; coefficients évalués à l’état k, termes
sources implicités selon (III.22) ;
– Résolution de l’équation pour l’oxygène ; coefficients évalués à l’état k, termes sources
implicités selon (III.23) ;
– Dans toutes les étapes suivantes, les termes sources seront identiques (moyennant les coef-
ficients stochiométriques appropriés) à ceux retenus ci-dessus, c’est-à-dire correspondant
notamment à ρk+1O2
;
– Résolution des équations pour les autres gaz (indépendantes les unes des autres) ;
– Résolution des équations (indépendantes les unes des autres) pour toutes les espèces
condensées affectées par les réactions d’oxydation ;
– Résolution de l’équation de l’énergie ;
– Mise à jour du champ de pression, de tous les coefficients, et en particulier de la vitesse
du gaz ;
– k = k + 1.
Les deux premières étapes sont découplées et peuvent s’effectuer dans un ordre indifférent.
Comme dans la première variante proposée dans la Section précédente, les coefficients sont
tous calculés sur la base de l’état du système à l’itération k, sans mise à jour intermédiaire.
La différence réside donc uniquement dans l’implicitation des taux de réaction, par rapport
à la concentration d’oxygène pour les réactions d’oxydation, et par rapport à l’espèce solide
de départ pour les réactions anaérobies, ainsi que dans la résolution simultanée de toutes les
équations mentionnées en première étape. C’est cette précaution qui permet de résoudre le
problème des réactions successives qui consomment une espèce plus vite qu’elle n’est produite.
74
III.3 Discrétisation temporelle et schéma de résolution
Ceci complique un peu la méthodologie pratique pour cette étape, et surtout la définition
d’une procédure automatique pour la formulation du problème s’adaptant à divers schémas
réactionnels. Les détails techniques de cette procédure sont décrits dans la Section 3.2.4.
3.2.4 Formulation du problème pour les espèces condensées
On peut distinguer parmi les espèces condensées :
– l’ensemble EP de celles qui n’interviennent que dans des réactions anaérobies (par exemple
le bois sec ou des espèces intermédiaires au cours de la pyrolyse) ;
– l’ensemble EO de celles qui n’interviennent que dans des réactions d’oxydation (par
exemple des étapes intermédiaires dans l’oxydation du char) ;
– l’ensemble EP O de celles qui interviennent dans les deux types de réactions.
Rappelons que dans tous les cas, ces espèces étant immobiles, leurs équations de bilans se
résument à l’égalisation du terme d’accumulation et du terme source.
3.2.4.1 Espèces appartenant à EP Au vu de (III.9) et (III.22), l’équation de bilan dans
un volume de contrôle pour une espèce i ∈ EP s’écrit lors de l’itération k + 1
ρk+1i − ρ0
i
δt= δx
∑
l∈L(i)ap
[(ρk
j(l))nl−1
Al
]kρk+1
j(l) −∑
l∈L(i)ac
[(ρk
i )nl−1Al
]kρk+1
i .
(III.24)
La dimension δx du volume de contrôle est réduite à δx/2 pour les deux situés aux extrémités
du domaine de calcul. On peut résumer ceci en regroupant dans un vecteur ρP les densités des
espèces de EP , et dans une matrice AP les coefficients (δx et δt inclus) qui interviennent dans
(III.24). Sous forme matricielle, cette équation devient
ρk+1P − ρ0
P = AkP · ρk+1
P . (III.25)
La matrice AkP est aisément construite en passant en revue toutes les réactions chimiques
anaérobies, en évaluant leur taux de réaction, et en le reportant à la position appropriée dans
AkP , avec application d’un coefficient stochiométrique dans le cas d’une production. Les termes
de consommation issus de (III.22a) donnent lieu à des coefficients sur la diagonale de AkP , et
les termes de productions issus de (III.22b) à des coefficients hors de la diagonale.
La matrice AkP est de petite taille (nombre d’espèces dans EP ). Une méthode directe passant
par la détermination d’une matrice inverse est donc applicable pour la résolution de (III.25) en
75
Chapitre III. Modèle numérique
chaque point du maillage, telle que
ρk+1P =
[I − A
kP
]−1
· ρ0P , (III.26)
où I est la matrice diagonale unité. On opère donc ainsi une mise à jour simultanée de toutes
les espèces condensées de EP .
3.2.4.2 Espèces appartenant à EO Les équations décrivant l’évolution des densités des
espèces dans EO sont formulées de façon implicite par rapport à la teneur en oxygène. Ainsi,
au vu de (III.23)
ρk+1i − ρ0
i
δt= δx
∑
l∈L(i)op
(ρkj(l))
nl Akl −
∑
l∈L(i)oc
(ρki )nl A
kl
ρk+1
02, (III.27)
Il est possible d’exprimer ceci sous une forme vectorielle
ρk+1O − ρ0
O = AkO ρk+1
02, (III.28)
où AkO est un vecteur dont les composantes regroupent les coefficients de production/consommation
de chaque espèce dans EO. Il n’est pas besoin ici de résolution, puisque la formulation est expli-
cite en termes de ρk+1O , une fois ρk+1
02déterminé lors d’une étape antérieure de l’itération k + 1
ρk+1O = ρ0
O + AkO ρk+1
02. (III.29)
3.2.4.3 Espèces appartenant à EP O Dans les schémas réactionnels rencontrés dans ce
travail, ces espèces sont produites par un processus de pyrolyse, puis soumise à une oxydation 1.
Leur bilan fait donc intervenir des termes de production issus de (III.22b), et des termes de
consommation issus de (III.23a)
ρk+1i − ρ0
i
δt= δx
∑
l∈L(i)ap
[(ρk
j(l))nl−1
Al
]kρk+1
j(l) −∑
l∈L(i)oc
(ρki )nl ρk+1
02A
kl
(III.30)
1. Notons que d’autres combinaisons seraient possibles et pourraient être prises en compte sans difficultédans ce formalisme.
76
III.4 Gestion des paramètres numériques
Sous forme matricielle, de la même façon que précédemment,
ρk+1P O − ρ0
P O = AkP · ρk+1
P O + AkO ρk+1
02. (III.31)
A nouveau, AkO est un vecteur, tandis que A
kP est une matrice diagonale, ce qui signifie que les
équations des diverses espèces dans EP O sont découplées. La solution de (III.31) vaut
ρk+1P O =
[I − A
kP
]−1
·[ρ0
P O + AkO ρk+1
02
]. (III.32)
Puisque[I − A
kP
]est diagonale, l’obtention de son inverse est immédiate.
4 Gestion des paramètres numériques
Cette Section est consacrée à divers aspects techniques de la mise en oeuvre de l’algorithme
de simulation, dont les principes généraux viennent d’être exposés.
La mise en place d’un schéma implite en temps lève la limitation sévère du pas de temps
liée aux critères de stabilité de Fourier, Dδt < δx2 où D représente les coefficients associés
aux divers processus de type diffusifs (y compris la diffusivité de la pression K/µP pour ce
qui concerne la loi de Darcy). Toutefois, la gestion dynamique du pas de temps demeure un
point essentiel et délicat, pour les raisons exposées au début de la Section 3.1 et liées aux non-
linéarités du problème, qui donnent lieu à de brusques changements de régime. Par ailleurs, la
gestion de la procédure itérative interne aux pas de temps demande un soin attentif, tant pour
la détection de sa convergence que pour l’adaptation du pas de temps en cas de difficulté. Ces
deux aspects sont traités dans les deux Sections suivantes.
Un aspect lié à la discrétisation spatiale est également discuté dans la Section 4.3, et le
traitement des régions affectées par la récession de la surface de l’échantillon est discuté dans
la Section 4.4.
Signalons que les performances de l’outil de simulation en termes de temps de calcul ou
de sensibilité à la résolution spatiale du maillage ne sont pas discutées en détail ici. Elles sont
plutôt illustrées de façon pratique dans les chapitres consacrées aux applications.
4.1 Gestion du pas de temps
Le pas de temps δt doit être fixé à une valeur suffisamment petite pour permettre de suivre
en détail l’évolution du processus. Ceci vaut du point de vue de l’utilisateur des résultats,
qui souhaite capturer tous les épisodes de l’évolution du système, qui sont parfois de brefs
77
Chapitre III. Modèle numérique
transitoires. Ceci vaut de la même façon du point de vue de l’algorithme de résolution. Avec
une discrétisation temporelle du premier ordre, l’opérateur A dans (III.12) est censé représenter
les processus qui se déroulent pendant toute la durée du pas de temps. Il peut être évalué en
début de pas de temps (schéma explicite) ou en fin de pas de temps (schéma implicite), mais
dans les deux cas l’état du système ne doit pas trop varier afin que la valeur retenue pour
A puisse être considérée comme applicable pendant toute la durée δt sans perte de précision
excessive. En outre, dans le schéma implicite retenu, la convergence de la procédure itérative
(III.15) n’est pas assurée si le pas de temps, et donc les variations de l’état du système, sont
trop importantes. Comme d’un autre côté, des pas de temps trop courts augmentent la durée
du calcul, une gestion optimale à cet égard est une question clé pour la performance et la
robustesse du simulateur.
Le pas de temps est donc fixé de façon adaptative au cours de la simulation, à l’aide de
différents critères visant à prévenir de trop grandes variations des variables. Ces critères sont de
deux types, absolus et relatifs. Les critères absolus fixent les amplitudes maximales autorisées
pour les variations des variables pendant un pas de temps. Les critères relatifs font de même
en termes de variations relatives. Ces critères sont appliqués sur la base des taux de variations
estimés dans l’état du système au début du pas de temps (c’est-à-dire à la fin du précédent).
Ils correspondent donc aux variations attendues si on appliquait le pas de temps dans une
formulation explicite.
En reprenant la notation Z pour une variable générique qui peut correspondre à une densité
de phase condensée, une densité de phase gazeuse ou à la température, ces taux de variations
estimés s’écrivent (voir éq. III.8 ou III.10)
(∂Z∂t
)0
=(M0
)(−1)·[−C0 · Z0 − D0 · Z0 + S0 + E0
](III.33)
Le pas de temps δt est alors fixé de facon à satisfaire partout et pour toutes les variables d’état
(∂Z
∂t
)0
δt ≤ Min(ǫZ,A, ǫZ,RZ0
). (III.34a)
Il prend donc la valeur
δt = MinZ,x
[Min (ǫZ,A, ǫZ,R Z0)
(∂Z/∂t)0
], (III.34b)
où le minimum est pris sur tous les points du maillage et pour toutes les variables (Z) avec
les critères absolu ǫZ,A et relatif ǫZ,R associés. Les valeurs utilisées pour ces paramètres sont
données dans les chapitres consacrés aux applications, mais des valeurs typiques sont ǫc,A=0.05
78
III.4 Gestion des paramètres numériques
kg m−3 pour la densité des espèces condensées, ǫg,A=0.001 kg m−3 pour la densité des espèces
gazeuses, et ǫc,T =1Kpour la température. Les paramètres relatifs sont ǫc,R=ǫg,R=0.9.
On peut noter que les critères relatifs sont très peu restrictifs. Leur principale fonction est
de gérer les situations où une espèce est sur le point d’être épuisée. Le pas de temps est alors
fixé de façon à consommer pendant δt presque toute mais pas plus que la quantité disponible de
cette espèce. Comme ce problème ne se présente pas avec la température, il n’y a pas de critère
relatif la concernant dans (III.34). Fixer ainsi δt de façon à consommer 90% d’une quantité
résiduelle d’une espèce conduit bien sûr à la diminution très rapide du pas de temps et de la
quantité Zi concernée, qui sont en gros divisés par 10 à chaque nouveau pas. Quand Zi atteint
un seuil fixé à 10−6kg m−3 pour les espèces condensées et 10−9kg m−3 pour les espèces gazeuses,
sa valeur est considérée comme nulle, et n’est plus prise en compte dans (III.34) pour la suite
des simulations.
A titre indicatif, on peut mentionner que dans les premières phases des simulations, ce sont
les variations de densité des phases condensées qui jouent le rôle déterminant dans (III.34).
Ultérieurement, ce sont plutôt les variations de densité des phases gazeuses qui limitent le pas
de temps.
Les critères mentionnés ci-dessus sont basés sur des variations des variables d’état considé-
rées comme ”raisonnables”. Toutefois, il peut se produire que la convergence de l’algorithme
itératif de résolution du problème implicite soit problématique, c’est à dire que les critères dé-
finis dans la Section 4.2 ne soit pas atteints rapidement. L’expérience montre que ces difficultés
peuvent être détectées après un nombre assez faible d’itérations, et qu’elles sont généralement
associées au comportement oscillant de certaines variables, résultant par exemple de l’épuise-
ment ou non d’une espèce lors d’itérations k et k + 1 successives. Rappelons que le critère
(III.34) prévoit d’éviter cette situation via le critère relatif de variation limité à 90%, mais qu’il
est basé sur l’état du système au début du pas de temps, tandis que dans la formulation impli-
cite c’est l’état final qui détermine les variations. Il peut donc se produire que les précautions
prises soient insuffisantes. La solution adoptée dans ce cas est de réduire le pas de temps.
En pratique, si la convergence n’est pas atteinte après Nmax,it=10 itérations de (III.15),
l’algorithme est repris depuis le début (k=0) avec un pas de temps plus petit, égal à celui
δt(cr) issu des critères (III.34) multiplié par un coefficient ct. Il peut se produire que cela soit
insuffisant, que la convergence ne soit toujours pas obtenue, et que l’opération doive être répétée,
un nombre m1 de fois. Le pas de temps vaut alors cm1t δt(cr).
L’expérience montre également que les difficultés de convergence sont associées à des épi-
sodes dans le processus (déclenchement d’une réaction, par exemple) et qu’elles ont donc ten-
79
Chapitre III. Modèle numérique
Figure III.3 – Evolution du pas de temps δt [s] (en rouge) et du taux de perte de masse [%/s] (ennoir) au cours d’une simulation avec un échantillon de contreplaqué M1 soumis à un flux de 40 kW/m2 enfonction du temps t [s].
dance à se reproduire sur des pas de temps consécutifs (d’autant plus que δt diminuant, il faut
un nombre de pas important pour couvrir cet épisode). Ainsi, après un pas où δt a dû être
réduit (m1 >0), il est généralement inutile (et donc coûteux) d’essayer d’utiliser la valeur δt(cr)
issu de (III.34) pour le pas de temps suivant. On démarre l’algorithme itératif directement avec
un pas réduit, cm1t δt(cr).
Cette réduction du pas de temps permet de passer l’étape difficile liée à un épisode parti-
culier. Toutefois, il importe d’introduire également un mécanisme permettant de revenir pro-
gressivement au pas de temps δt(cr), une fois cet épisode terminé. A cette fin, la valeur de δt
est également multipliée par un coefficient ft supérieur à 1, à chaque nouveau pas de temps.
Elle est donc en réalité de la forme cm1t fm2
t δt(cr). Quand après une période assez longue sans
difficulté (grand m2) le coefficient multiplicateur atteint 1, m1 et m2 sont remis à zéro.
A nouveau, les valeurs choisies pour ct et ft résultent de l’expérience. Il s’avère qu’en cas
de difficulté, une réduction assez importante du pas de temps est généralement nécessaire, et
ct est donc fixé à 1/2. Comme les épisodes difficiles durent un nombre de pas assez important
(notamment parce que la valeur des pas est réduite), ft doit être assez faible et il est fixé à
1.01. On peut ainsi s’adapter rapidement aux difficultés, conserver une valeur réduite de δt le
temps nécessaire, et progressivement revenir à la valeur standard issue de (III.34) une fois la
difficulté passée.
L’évolution du pas de temps au cours d’une simulation typique (cas de base décrit dans
80
III.4 Gestion des paramètres numériques
la Section 3 du Chapitre IV) est illustrée dans la figure III.3, parallèlement à l’évolution cor-
respondante du taux de perte de masse. De fortes variations sont observées, qui résultent des
déclenchements de divers processus, en diverses positions de l’échantillon. Il est à noter que
la valeur du pas de temps est échantillonnée seulement à des intervalles d’une seconde, dans
la figure. Les phases de décroissance brusque (quand m1 augmente) suivies de remontée lente
(quand m2 augmente) discutées ci-dessus ne sont donc pas visibles et se traduisent comme un
bruit apparent dans le tracé. Durant la phase de pyrolyse, δt varie entre environ 2 et 20 ms. Il
diminue ensuite dans la phase de combustion et varie entre environ 0.2 et 0.5ms dans la phase
finale.
Cette figure traduit à la fois un succès et un échec (relatif). Le succès est clair pour la
phase de séchage et de pyrolyse. Après beaucoup de difficultés, une formulation implicite et
une procédure de gestion du pas de temps efficaces semblent avoir été obtenues. En particulier,
la résolution simultanée des équations de bilan pour toutes les espèces condensées (procédure 2,
voir Section 3.2.3) a permis une augmentation significative de δt par rapport à la valeur typique
beaucoup plus faible, souvent de l’ordre de 0.1 ms, nécessaire auparavant dans cette période très
chahutée. En revanche, la phase de combustion est calme, sans transition de régime marquée.
Le fait que des valeurs de δt plus faibles que dans la phase de pyrolyse doivent être utilisées
montrent qu’une marge de progression existe encore et qu’il doit être possible d’améliorer les
performances dans ce régime. Un complément d’information est fourni sur ce point en Section
4.3.5 du Chapitre IV.
Ce relatif constat d’échec doit cependant être tempéré par une observation complémentaire.
Durant la phase de pyrolyse, 3 à 4 itérations de (III.15) sont généralement nécessaires pour
résoudre le problème implicite à chaque pas de temps. Dans la phase de combustion, une seule
itération suffit généralement. Par conséquent, s’il faut de l’ordre de 10 fois plus de pas de temps
pour simuler une minute de combustion que de pyrolyse, le coût en terme de temps CPU n’est
pas dans un rapport aussi important, puisqu’il est déterminé par le nombre total d’itérations
de (III.15).
4.2 Convergence de l’algorithme itératif
La définition de la convergence de l’algorithme itératif de résolution a été brièvement donnée
en (III.16, III.19). Elle est discutée ici de façon plus détaillée.
Dans le principe, on itère (III.15) jusqu’à convergence, définie comme le fait que Zk n’évolue
plus significativement et que l’on peut considérer que Zk = Z∞, solution exacte à la fin du pas
de temps. Il faut donc établir un critère pour la différence Zk+1 − Zk, qui est formulé en termes
81
Chapitre III. Modèle numérique
de variations relatives. Il faut que l’incrément Zk+1 − Zk au cours de la dernière itération soit
assez petit par rapport à l’incrément total de Zk+1 − Z0 depuis le début du pas de temps.
Toutefois, il arrive qu’une variable Z soit nulle (ou d’une valeur trop faible pour être si-
gnificative), où qu’elle n’évolue pas sensiblement. Un tel critère relatif est alors inadapté. Une
tolérance absolue est donc ajoutée au critère relatif, assez faible pour ne pas influencer la préci-
sion dans les cas courants. Les critères de convergence sont exprimés par l’inéquation suivante,
qui est la formulation réelle de (III.16) et qui doit être satisfaite partout et par toutes les
variables :
|Zk+1 − Zk| < ηR |Zk+1 − Z0| + ηA . (III.35)
Les valeurs utilisées pour les critères ηR et ηA sont données dans les chapitres consacrés aux
applications, mais des valeurs typiques pour les critères relatifs sont ηR,c=0.10 pour la densité
des espèces condensées, ηR,c=0.05 pour la densité des espèces gazeuses, et ηR,T =0.10 pour la
température. Les petites valeurs des tolérances additionelles sont de l’ordre de ηA,c=10−3 kg
m−3, ηA,g=10−7 kg m−3, et ηA,T =0.1 K.
Dans la pratique, ce sont généralement les densités des espèces gazeuses qui convergent le
plus lentement et déterminent donc la poursuite ou l’arrêt des itérations.
Enfin, un critère est également appliqué pour vérifier la convergence de la vitesse du gaz
aux points de frontière où une condition de pression est imposée. Cette vitesse est corrigée à
chaque itération par (III.18) afin de rétablir la pression à la valeur Pa prescrite et le critère est
donc exprimé en termes de pression, par le critère (III.19). Le critère ηP est fixé de l’ordre de
10 mb.
4.3 Lissage spatial des taux des réactions anaérobies
Comme dans tout modèle numérique, la résolution spatiale du maillage a une influence sur
le détail et sur la précision des résultats. Dans le cas présent, la multiplicité des processus
et leur non-linéarité rendent difficile de quantifier de façon systématique cette influence dans
la diversité de régimes qui peuvent se succéder au cours d’une simulation, ou coexister à un
moment donné en différentes positions. Elle sera donc plutôt illustrée dans le chapitre consacré
aux applications, par la comparaison de résultats obtenus dans différentes conditions (Section
4.1 du Chapitre IV).
Toutefois, un aspect lié à l’influence de la résolution spatiale est traité ici, parce qu’au delà
de la précision des résultats, il affecte la robustesse du modèle, crée des difficultés de gestion,
et a nécessité une adaptation de la formulation.
Les taux des réactions anaérobies (généralement endothermiques) sont représentés par (III.20,
82
III.4 Gestion des paramètres numériques
III.22), où le terme Al est évalué en fonction des variables d’état (et au premier chef de la tem-
pérature) au point de maillage centre du volume de contrôle, et supposé s’appliquer sur tout
ce volume. Or, dans les premières phases des simulations, séchage et pyrolyse, le profil de tem-
pérature près de la surface exposée présente des variations très raides, pouvant atteindre de
l’ordre de 100 K/mm. Par conséquent, la réaction dans un volume de contrôle peut se faire avec
un taux très faible basé sur la température en son centre, alors que la température et le taux
correspondant sont déjà bien plus élevés dans la partie de ce volume du côté de la face exposée.
De ce fait, quand le front d’une réaction passe d’une position où l’espèce concernée s’épuise
à la suivante, le coefficient Al retenu change brusquement de valeur. Ceci engendre au mieux
un comportement ”en escalier” de la perte de masse, et au pire un comportement oscillant des
variables d’état pouvant empêcher la progression de la simulation.
Une discrétisation spatiale plus fine est une manière de diminuer ces artefacts, mais au prix
bien sûr d’un temps de calcul bien plus important. Une autre solution est donc souhaitable. Dans
notre modèle, nous avons introduit un lissage spatial des taux des réactions anaérobies. Notons
que les oscillations n’ont lieu que dans les premiers temps de la simulation et n’affectent pas les
périodes plus tardives, sans doute du fait d’un profil de température beaucoup plus uniforme.
Aucun lissage n’a donc été appliqué aux taux des réactions d’oxydation.
Le lissage se présente sous la forme d’une combinaison linéaire des taux calculés dans un
volume de contrôle et dans les deux volumes voisins. En repérant un volume et ses voisins par
les indices G, P et D selon les notations de la figure III.1, cette pondération prend la forme
A =ωGρn
G AG + ωP ρnP AP + ωDρn
D AD
ωGρnG + ωP ρn
P + ωDρnD
, avec ωG + ωP + ωD = 1 . (III.36)
Pour un point courant, ωP =3/4 et ωG=ωD=1/8. Pour un point à la frontière du domaine,
ωP =3/4 et ωD=1/4 (pour x=0 ; en x=L, c’est ωP qui vaut 1/4).
Cette forme ressemble à une formulation spatiale d’ordre plus élevé, où l’intégrale de ρnA
sur le volume de contrôle ne serait pas réduite au produit de δx par la valeur de ρnA au centre
mais résulterait de l’intégrale d’un développement de Taylor au second ordre. Toutefois, cette
approche conduirait à des coefficients pondérants moins les volumes voisins, avec ωP =11/12 et
ωG=ωD=1/24. La formulation (III.36) que nous avons implémentée s’inspire de cet argument
théorique, mais le jeu de coefficients résulte d’une optimisation basée sur l’expérience.
La valeur A obtenue pour un élément de volume est ensuite utilisée en lieu et place de la
valeur AP , dans (III.20) et (III.22). En particulier, dans l’algorithme itératif, elle est évaluée en
fonction des variables à l’itération k. Il n’y a donc aucune modification de la procédure décrite
dans la Section 3.2.3. Il n’y a pas non plus d’incidence sur la procédure décrite dans la Section
83
Chapitre III. Modèle numérique
Figure III.4 – Influence du lissage des taux des réactions hétérogènes. Perte de masse cumulée [%] (a)et taux de perte de masse [%/s] (b), en fonction du temps t [s]. Données pour le contreplaqué M1 exposéà un flux de 40 kW/m2, pour des simulations sans lissage avec un pas δx=600µm (vert) ou δx=300µm(magenta), et avec lissage avec δx=600µm et ωG=ωD=1/24 (bleu) ou ωG=ωD=1/8 (rouge).
3.2.4 pour la résolution simultanée des équations de bilan pour toutes les espèces condensées
soumises à des réaction anaérobies, hormis le fait que la matrice AkP dans (III.25) est construite
à partir des Ak
au lieu des valeurs centrées AkP .
L’effet de cette procédure de lissage est illustré dans la figure III.4, où la perte de masse et
le taux de perte de masse d’un échantillon sont tracés en fonction du temps, pour différentes
variantes. Le comportement oscillant du taux de perte de masse est clairement visible dans la
figure III.4b durant la première minute de l’expérience simulée. Il s’estompe fortement par la
suite. Il se traduit par une évolution en escalier de la perte de masse cumulée (Fig. III.4a),
qui correspond à l’épuisement successif des éléments de volumes près de la surface. L’allure
globale de toutes les courbes de perte de masse cumulée pour δx=600µm est identique, mais les
ondulations sont sensiblement réduites par l’application de la technique de lissage (III.36), avec
ωP =3/4 et ωG=ωD=1/8. La même technique avec ωG=ωD=1/24 n’a pas d’effet très marqué. Par
ailleurs, doubler la densité de points de maillage, avec δx=300µm, est effectivement très efficace
pour réduire les oscillations. On peut aussi noter que même quand les oscillations disparaissent,
les courbes pour les deux résolutions suivent des évolutions parallèles, mais avec un décalage
temporel de l’ordre de 5 secondes. Ceci constitue une mesure de l’influence de la finesse du
maillage. Dans le cas présent, la résolution généralement adoptée qui est de 600µm n’introduit
qu’un décalage modéré, considéré comme acceptable.
84
III.4 Gestion des paramètres numériques
4.4 Traitement de la récession de la surface
Durant une première phase, le bois subit le séchage suivi de la pyrolyse, qui aboutit à la
formation du charbon. Au cours de cette période, aucune variation de volume du matériau n’est
prise en compte, comme il a été mentionné dans la Section 1 et conformément aux observations
directes au cours d’essais en cône calorimètre sur les types de matériaux étudiés ici. Dans le
cadre de cette approximation, aucune action particulière n’est requise. Le reste de cette section
ne concerne que l’étape ultérieure, lors de la combustion du résidu solide.
Ces réactions d’oxydation ne laisse in fine que très peu de résidu solide. En outre, les
cendres ne s’accumulent pas à la surface de l’échantillon, mais sont en pratique emportées par
l’écoulement du gaz environnant. Il est naturel de penser que ce serait d’autant plus vrai si
l’échantillon était disposé verticalement, voire horizontalement mais avec exposition au feu de
sa face inférieure, et de la même façon, pour un matériau solide en situation réelle d’incendie,
quelle que soit sa disposition.
Par conséquent, une partie du domaine de calcul, sur un intervalle 0 ≤ x ≤ XS, se trouve
à terme quasiment dépourvu de contenu solide. La surface du char en cours de combustion se
trouve exposée aux conditions ambiantes, c’est-à-dire que les conditions aux limites (pression
atmosphérique, flux radiatif incident... ) devraient être prescrites à la position x = XS et non
en x = 0.
Différentes approches existent pour suivre la récession de la surface et notamment la dé-
cimation du maillage, le suivi d’interface et la déformation du maillage. L’approche la plus
simple par décimation du maillage consiste à supprimer progressivement les mailles entière-
ment vides, ou de façon équivalente, à appliquer les conditions aux limites au point du maillage
qui à chaque instant se trouve le plus proche de la surface sans être à l’intérieur du solide. On
s’attend bien sûr à des discontinuités lorsque ce point change au cours de la simulation. Le
suivi de l’interface est une amélioration de ce principe et élimine cet artefact. Les conditions
aux limites sont imposées à l’intérieur de la cellule qui contient la surface, à une position XS qui
évolue continuement. Ceci nécessite un changement de formulation dans le volume de contrôle
contenant la face exposée. Cette technique a été appliquée dans diverses situations, par exemple
à l’ablation de composites C/C exposés à des conditions sévères dans des réacteurs de fusée
[102] afin de suivre durant le processus l’évolution complexe de la morphologie de la structure.
Enfin, la déformation de maillage a été appliquée par exemple par [13, 103] dans un contexte
similaire au nôtre. Les points de maillage se déplacent et le pas s’adapte de façon à suivre les
déformations de la phase solide. Toutefois, ceci est destiné à décrire les matériaux qui donnent
lieu à gonflement ou retrait et n’est pas mis en oeuvre pour les matériaux charbonneux, consi-
85
Chapitre III. Modèle numérique
dérés comme ici comme invariant en volume. En outre, le modèle GPYRO [13] se concentre sur
la pyrolyse et non sur la combustion du char.
Dans le présent modèle, le choix a été fait de privilégier la simplicité au vu de l’objectif
à terme de coupler notre code avec un outil de simulation globale de l’incendie. L’interfaçage
n’en est pas défini à ce stade, mais il est d’ores et déjà clair que simplicité et rapidité seront
des atouts importants. En outre, durant la phase de combustion du char, le processus limitant
est la diffusion de l’oxygène de l’espace extérieur vers l’intérieur de l’échantillon, et aucun des
processus à l’extérieur de la région solide n’a d’influence aussi déterminante. Une description
extrêmement fine de ces derniers n’est donc pas indispensable.
Pour les applications actuellement visées et sans exclure la possibilité d’améliorations dans
le futur si le besoin s’en faisait sentir pour traiter d’autres situations, on utilise donc un maillage
fixe et indéformable, et les conditions ambiantes restent prescrites en x = 0. Il convient par
conséquent de s’assurer que ces conditions sont bien transférées à la surface réelle de l’échan-
tillon. Ceci est réalisé en ”neutralisant” les éléments de volume intermédiaires, en jouant sur
leurs propriétés de transport.
Notons en premier lieu que, toujours par souci de simplicité, aucun changement de formula-
tion n’est opéré quand un élément de volume se trouve entièrement vidé de son contenu solide.
Ceci est légitime pour tous les transferts de type diffusifs et conductifs, et la modélisation des
propriétés effectives assurent que la composition des gaz est uniforme dans la zone découverte.
Le dénominateur dans l’expression (II.35) est un artifice dépourvu de signification physique
mais qui joue ce role, en augmentant très fortement D quand la fraction solide tend vers zéro.
A l’inverse, conserver une formulation identique n’est pas légitime sur le plan du principe
concernant les transferts radiatifs et l’écoulement. La loi de Darcy qui régit l’écoulement dans le
milieu poreux ne s’applique pas dans un milieu ouvert. Toutefois, la seule condition essentielle
à satisfaire est que la couche vidée de son contenu solide n’oppose pas de résistance significative
au passage des gaz, afin que la pression à la surface XS du solide corresponde bien à la consigne
Pa imposée en x = 0. La loi (II.36) utilisée pour modéliser la perméabilité fournit quand la
porosité est proche de 1 une valeur assez grande pour que cette condition soit satisfaite, dans
la phase de combustion où les débits de gaz sont très faibles.
Le point le plus important est probablement la bonne représentation des échanges ther-
miques entre le matériau et le milieu ambiant. Le flux radiatif incident, le flux radiatif émis et
tous les autres termes d’échanges étant toujours appliqués en x = 0, il importe que la couche
entre x = 0 et x = XS soit de faible capacité calorifique, ce qui est assuré puisqu’elle ne contient
que du gaz. Elle doit être thermiquement mince. Ceci est réalisé par le modèle (II.34) pour la
conductivité thermique. A nouveau, le dénominateur dans cette expression est un artifice qui
86
III.4 Gestion des paramètres numériques
permet d’assurer que λ devient très grand quand le contenu solide diminue fortement.
Le succès de cette technique est illustré par exemple dans la figure IV.15, qui concerne un
état avancé dans la phase de combustion du char. Il est visible que les conditions en x = 0 et
à la position courante de la surface du solide x ≈4 mm sont identiques.
87
88
Chapitre IV
Application au bois contreplaqué M1
1 Introduction
Ce chapitre décrit un ensemble d’applications à un matériau à base bois, un contreplaqué
(plywood) commercial certifié M1 selon le classement français de tenue au feu (arrêté du 21 no-
vembre 2002 relatif à la réaction au feu des produits de construction et d’aménagement [104]).
Il est constitué de feuilles de placage de bois déroulées, séchées, collées et pressées entre elles.
En général, ces feuilles de placages, appelées ”plis”, sont collées à fil croisé perpendiculairement
les unes aux autres en nombre impair afin d’obtenir une très bonne résistance mécanique. Le
contreplaqué M1 étudié est constitué d’okoumé à faces déroulées ignifugé non-inflammable. Il
est destiné à un emploi en milieu intérieur sec (selon la norme européenne EN 636-1) : agen-
cement de locaux recevant du public (expositions, stands, magasins), menuiseries d’intérieures,
ébénisterie, meubles, plafonds...
Ce chapitre se décompose en 4 sections. Dans un premier temps, des simulations prélimi-
naires en condition d’ATG sont présentées dans la Section 2. Elles ont pour objet de vérifier
l’adéquation du modèle chimique et la capacité de l’outil de simulation à reproduire les résultats
expérimentaux obtenus par analyse thermogravimétrique, en termes de perte de masse et de
vitesse de perte de masse. L’essentiel du modèle chimique résulte des travaux de Fateh et al.
[6–10]. Il est présenté en détail, et deux variantes sont également décrites.
Le reste du chapitre porte sur des simulations à plus grande échelle, dans des situations
d’essais en cône calorimètre. Une description très complète d’un cas de référence est d’abord
donnée dans la Section 3. Ensuite, l’influence de nombreux paramètres, numériques, chimiques,
physiques et opératoires est examinée dans le Section 4.
89
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
2 Simulations à l’échelle ATG
Les simulations en condition ATG présentées ici constituent un test de l’ensemble du modèle
chimique et de l’implémentation numérique qui en est faite. En effet, les prédictions numériques
peuvent être directement comparées à des résultats expérimentaux. On présente successivement
ci-dessous le modèle chimique proposé par Fateh et al. [6–10], puis une légère modification de
ce modèle et enfin une version très simplifiée qui permettra ultérieurement de tester le gain
apporté par une modélisation plus détaillée.
2.1 Modèle chimique de Fateh & al.
L’analyse thermogravimétrique montre que la dégradation thermique du bois se déroule en
trois étapes successives : séchage, pyrolyse et oxydation du résidu charbonneux. La pyrolyse ne
débute pas avant environ 200°C, et à cette température le matériau est totalement séché. L’éva-
poration ne contribue plus à la perte de masse durant le test ATG. Fateh & al. font abstraction
de cette première phase dans leur analyse et proposent un schéma réactionnel pour les deux
processus de pyrolyse et d’oxydation. Ce schéma, illustré dans la figure IV.1, comporte une série
de réactions séquentielles : trois réactions de pyrolyse suivies de deux réactions d’oxydation.
Ces dernières ne se produisent bien sûr qu’en présence d’oxygène. Toutes les réactions dégagent
des gaz, qui ne sont pas mentionnés dans la figure.
Par commodité, les noms génériques attribués par Fateh & al. aux états successifs du bois
au cours de sa transformation (ligne du haut de la figure IV.1) sont remplacés ici par une autre
notation, qui facilite la manipulation d’indices dans les équations. On parle donc de solide dans
les états Si, avec i=1 à 7. S1 correspond au matériau avant séchage, et ne figure pas dans le
schéma réactionnel qui ignore cette étape. S2 correspond au matériau sec et S7 au résidu final.
La deuxième ligne de la figure IV.1 donne la correspondance entre les deux notations.
Plywood → α-Plywood → β-Plywood → σ-Plywood → θ-Plywood → λ-Plywood
N2 N2 N2 Air AirS2 → S3 → S4 → S5 → S6 → S7
Figure IV.1 – Schéma réactionnel pour le contreplaqué M1 proposé par Fateh & al. [6–10]. La ligne duhaut utilise les noms des espèces tels que définis dans [6]. La ligne du bas donne la correspondance avec lesnotations utilisées dans notre travail.
90
IV.2 Simulations à l’échelle ATG
Réaction A Ea n ν[s−1] [kJ/mol]
(IV.1a) 108.16 108.6 1.07 0.74(IV.1b) 107.04 96.5 1.02 0.84(IV.1c) 105.42 79.76 3.09 0.51(IV.1d) 106.87 111.5 1.35 0.5(IV.1e) 105.15 113.9 1.39 0.4
Tableau IV.1 – Pré-facteur et énergie d’activation de la loi cinétique (II.4) et coefficients stœchiomé-triques νi pour les réactions chimiques du modèle (IV.1).
Avec cette convention, les réactions anaérobies s’écrivent comme suit,
S2 → ν2 S3 +(1 − ν2) gaz (IV.1a)
S3 → ν3 S4 +(1 − ν3) gaz (IV.1b)
S4 → ν4 S5 +(1 − ν4) gaz , (IV.1c)
tandis que les deux réactions d’oxydation possibles sous air s’écrivent
S5 → ν5 S6 +(1 − ν5) gaz (IV.1d)
S6 → ν6 S7 +(1 − ν6) gaz . (IV.1e)
Notons que le terme ”gaz” dans ces équations chimiques représente un mélange de gaz qui
peut différer pour chaque réaction. Les paramètres νi sont les coefficients stœchiométriques
massiques. Pour les réactions d’oxydation, le terme ”(1 − νi) gaz” est le bilan de masse net,
c’est-à-dire la masse des produits de combustion diminuée de la masse d’oxygène consommée.
Les paramètres cinétiques pour les réactions de ce schéma sont regroupés dans la table IV.1.
Bien que le modèle numérique décrit dans le Chapitre III soit conçu pour prendre en compte
de façon couplée les processus chimiques et les mécanismes de transport, il est possible de le
faire fonctionner en simulant les conditions d’un essai ATG, et ce de plusieurs façons. On peut
d’une part se placer effectivement dans ces conditions en réduisant la taille de l’échantillon. On
peut aussi supprimer toute influence limitante des transports, quelle que soit la dimension de
l’échantillon, en fixant les coefficients de transports à des valeurs très élevées. Toutefois, une
variante très simplifiée du code a aussi été écrite, où seuls les mécanismes chimiques sont pris en
compte, et qui permet des tests plus rapides dans ces conditions particulières. Il a été vérifié que
ces procédures donnent des résultats équivalents. La figure IV.2 compare les prédictions selon
91
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
M MLR
Figure IV.2 – Résultats des simulations basées sur le modèle chimique modifié (IV.5), pour un échantillonsoumis à une rampe de température ambiante égale à 30°C/mn, sous air. Masse normalisée par la masseinitiale (à gauche, en %), et taux de perte de masse (à droite, en s−1), en fonction de la température, en °C.Conditions ATG (noir), L=0.5 mm (rouge) et L=6 mm avec des transports extrêmement rapides (vert).
les trois procédures. Nous anticipons un peu en utilisant ici un modèle chimique modifié qui sera
introduit dans la Section 3.1 et qui inclut la phase initiale de séchage. Les courbes de masse et
de MLR obtenues en prenant en compte les transports dans un échantillon de taille L= 0.5 mm
(en rouge), dans un échantillon de taille L= 6 mm avec des transports extrêmement rapides
(en vert) et sans prise en compte des limitations par les transports (en noir) sont quasiment
superposées.
Les résultats obtenus en appliquant le modèle (IV.1) avec les paramètres de la table IV.1
sont présentés dans les figures IV.3 et IV.4, pour des tests respectivement sous azote et sous
air en comparaison avec les données expérimentales.
Les résultats numériques ont une allure générale satsfaisante, mais il existe des écarts par
rapport aux mesures. Comme ces écarts sont similaires à ceux observés par Fateh & al. lors
de la détermination des paramètres thermocinétiques [8], on peut conclure que la réponse du
simulateur est correcte et que le modèle chimique est responsable des imprécisions. Pour cette
raison, nous avons tenté de le modifier légèrement.
92
IV.2 Simulations à l’échelle ATG
a
10°C/mnb
c
20°C/mnd
e
30°C/mnf
g
40°C/mnh
i
50°C/mnj
Figure IV.3 – Résultats des simulations basées sur le modèle (IV.1) de Fateh & al. avec les paramètresde la table IV.1, en conditions ATG sous atmosphère inerte (N2), pour différentes rampes de température.Masse normalisée par la masse initiale (à gauche, en %), et taux de perte de masse (à droite, en % dela masse initiale par seconde), en fonction de la température, en °C. Données expérimentales (en noir) etnumériques (en rouge).
93
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a
10°C/mnb
c
20°C/mnd
e
30°C/mnf
g
40°C/mnh
i
50°C/mnj
Figure IV.4 – Résultats des simulations basées sur le modèle (IV.1) de Fateh & al. avec les paramètresde la table IV.1, en conditions ATG sous air, pour différentes rampes de température. Masse normaliséepar la masse initiale (à gauche, en %), et taux de perte de masse (à droite, en % de la masse initiale parseconde), en fonction de la température, en °C. Données expérimentales (en noir) et numériques (en rouge).
94
IV.2 Simulations à l’échelle ATG
2.2 Modèle chimique modifié
Une partie des difficultés du modèle chimique à rendre compte des mesures de perte de masse
résulte sans doute de la différence de réponse des essais ATG sous azote et sous air dans la
première phase, pour des températures inférieures à 400°C où aucune combustion n’est pourtant
supposée intervenir. Ceci suggère que la présence d’oxygène modifie le processus de pyrolyse, ce
qui n’est pas pris en compte dans le schéma réactionnel. Cette modification porte sur le taux de
perte de masse, mais aussi sur son amplitude, c’est-à-dire sur les coefficients stoechiométrique
des réactions. On observe par exemple dans la figure IV.3 une différence notable entre les masses
finales mesurées (≈ 21%) et celles prédites par le modèle, qui résultent simplement du produit
des coefficients ν2ν3ν4 ≈32%.
Par ailleurs, nous croyons déceler dans les courbes de taux de perte de masse, outre le pic
principal vers 350°C et l’épaulement qui le précède vers 300°C, deux changements de pente un
peu en dessous et un peu au dessus de 400°C. Ceci suggère l’existence de quatre réactions qui
se déclenchent dans ces plages de température, au lieu des trois décrites par Fateh & al.
Une des modifications apportées au schéma réactionnel est donc l’introduction d’une qua-
trième réaction de pyrolyse, avec une énergie d’activation assez faible permettant de rendre
compte de la persistence d’une perte de masse pour des températures élevées.
L’optimisation a été conduite de façon entièrement manuelle, sans recourir à l’outil numé-
rique (algorithme génétique) mis en oeuvre par Fateh & al. Elle a été effectuée sur la base
fournie par le modèle existant, comme point de départ. En particulier, il n’était pas envisa-
geable de modifier fondamentalement le schéma réactionnel, pour distinguer les processus de
pyrolyse avec ou sans présence d’oxygène. De ce fait, nous n’avons considéré que les résultats
de l’ATG sous air. Pour réduire le nombre de degrés de liberté et donc le nombre de paramètres
à manipuler, nous avons aussi fixé l’ordre de toutes les réactions à un.
Il en résulte un modèle dont le schéma réactionnel comprend 4 réactions de pyrolyse,
S2 → ν2 S3 +(1 − ν2) gaz (IV.2a)
S3 → ν3 S4 +(1 − ν3) gaz (IV.2b)
S4 → ν4 S5 +(1 − ν4) gaz (IV.2c)
S5 → ν5 S6 +(1 − ν5) gaz , (IV.2d)
95
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Réaction A Ea n ν[s−1] [kJ/mol]
(IV.2a) 2.09 1011 16.72 1 0.79(IV.2b) 2.71 1015 23.21 1 0.75(IV.2c) 1.46 106 11.25 1 0.74(IV.2d) 1.14 100 3.6 1 0.80(IV.2e) 4.07 103 8.21 1 0.48(IV.2f) 2.0 107 18.88 1 0.308
Tableau IV.2 – Pré-facteur et énergie d’activation de la loi cinétique et coefficients stœchiométriquespour les réactions chimiques du modèle (IV.2).
et 2 réactions d’oxydation,
S6 → ν6 S7 +(1 − ν6) gaz (IV.2e)
S7 → ν7 S8 +(1 − ν7) gaz . (IV.2f)
Les paramètres cinétiques et les coefficients stœchiométriques de ce modèle sont regroupés dans
la table IV.2.
Les résultats obtenus en appliquant ce modèle modifié sont présentés dans la figure IV.5, en
comparaison avec les données expérimentales et avec les prédictions issues du modèle initial.
Sans prétendre à un succès total, on note un rapprochement des courbes calculées et mesurées,
pour les rampes de températures supérieures ou égales à 30°C/mn. La modification n’engendre
pas de différence très conséquente pour les rampes plus faibles, à l’exception de la masse finale
qui est en accord avec l’observation expérimentale. Ceci a été satisfait en imposant que le
produit de tous les coefficients νi soit égal à la fraction massique résiduelle en fin d’expérience.
96
IV.2 Simulations à l’échelle ATG
a
10°C/mnb
c
20°C/mnd
e
30°C/mnf
g
40°C/mnh
i
50°C/mnj
Figure IV.5 – Résultats des simulations basées sur le modèle modifié (IV.2) avec les paramètres de latable IV.2, en conditions ATG sous air, pour différentes rampes de température. Masse normalisée par lamasse initiale (à gauche, en %), et taux de perte de masse (à droite, en % de la masse initiale par seconde),en fonction de la température, en °C. Données expérimentales (en noir) et numériques (en rouge). Lesprédictions du modèle (IV.1) de Fateh & al. sont rappelées (en bleu).
97
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
(Modèle IV.1, ATG sous N2) (Modèle IV.2, ATG sous N2)
(Modèle IV.1, ATG sous Air) (Modèle IV.2, ATG sous Air)
Figure IV.6 – Résultats des simulations basées sur le modèle (IV.1) de Fateh & al. avec les paramètresde la table IV.1 (à gauche) et sur le modèle modifié (IV.2) avec les paramètres de la table IV.2 (à droite),en conditions ATG sous azote (en haut= et sous air (en bas), pour une rampe de température égale à30°C/mn. Taux de perte de masse (en % de la masse initiale par seconde), en fonction de la température,en °C. Données expérimentales (en noir) et numériques (en rouge). Les autres courbes (pointillées) montrentles contributions des réactions successives à la MLR totale.
Une comparaison plus détaillée du modèle initial et du modèle modifié est proposée dans
la figure IV.6 pour le cas d’une rampe de température égale à 30°C/mn. Les contributions de
chacune des réactions à la MLR totale est indiquée. Noter l’existence d’un pic supplémentaire
très étalé entre 300°C et 600°C dans le modèle modifié.
Au delà de l’accord visuel, il est souhaitable de quantifier les erreurs associées à chaque
modèle, pour juger plus objectivement de leur adéquation. Toutefois, la définition d’un critère
d’ajustement n’est pas une évidence. Divers critères existent et nous avons mesuré ici une
quantité différente de celle utilisée par Fateh & al. pour quantifier la finesse de leur ajustement.
Il s’agit de la surface comprise entre les courbes numériques et expérimentales de la masse et
98
IV.2 Simulations à l’échelle ATG
Rampe EM [K] EMLR [K s−1]Modèle (IV.1) Modèle (IV.2 ) Modèle (IV.1) Modèle (IV.2 )
10K/mn 15.5 16.8 0.035 0.04120K/mn 8.1 9.2 0.037 0.04430K/mn 14.5 2.6 0.069 0.04440K/mn 23.1 9.4 0.115 0.06950K/mn 32.1 19.1 0.163 0.118
Tableau IV.3 – Critères EM et EMLR définis par (IV.3), pour les différents modèles chimiques et diversesrampes de température.
du taux de perte de masse, mesurée entre 200 °C et 800 °C, selon
EM =∫ 800
200|Mmod − Mexp| dT [ K ] (IV.3a)
EMLR =∫ 800
200|MLRmod − MLRexp| dT [ K s−1 ] . (IV.3b)
Noter que l’on considère ici l’évolution de la masse et l’évolution du taux de perte de masse,
alors que souvent, seule la seconde est prise en compte. Ces deux quantités sont certes liées,
mais correspondent à des pondérations différentes des erreurs. Noter aussi que EM est une
mesure du décalage horizontal moyen entre les courbes 1.
Les valeurs de ces critères, pour chaque modèle et pour diverses rampes de température,
sont données dans la table IV.3. La modification du modèle chimique apporte une diminution
très notable pour les rampes importantes, qui confirme l’impression visuelle.
2.3 Modèle chimique simplifié
A des fins d’illustration, un modèle simplifié a aussi été considéré, ou toutes les réactions de
pyrolyse sont fusionnées en une seule étape globale, de même que les deux réactions d’oxydation.
Le schéma réactionel réduit se ramène donc à
S2 → ν2 S3 +(1 − ν2) gaz (IV.4a)
1. Mesure légèrement sous-estimée. Il faudrait la diviser par la perte de masse entre 200°C et 800°C, del’ordre de 0.85.
99
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Réaction A Ea n ν[s−1] [kJ/mol]
(IV.4a) 6.5 105 10.58 1 0.351(IV.4b) 3.0 103 10.10 1 0.148
Tableau IV.4 – Pré-facteur et énergie d’activation de la loi cinétique et coefficients stœchiométriquespour les réactions chimiques du modèle (IV.4).
a b
Figure IV.7 – Résultats des simulations basées sur le modèle simplifié (IV.4) avec les paramètres dela table IV.4, en conditions ATG sous air, pour une rampe de température égale à 30°C/mn. Taux deperte de masse (en % de la masse initiale par seconde), en fonction de la température, en °C. Donnéesexpérimentales (en noir) et numériques (en bleu). Les résultats du modèle modifié (IV.2) sont égalementrappelés (en rouge).
pour la pyrolyse, et à
S3 → ν3 S4 +(1 − ν3) gaz (IV.4b)
pour l’oxydation.
Les paramètres cinétiques et la stœchiométrie de ce modèle sont données dans la table IV.4.
Les coefficients stoechiométriques sont déduits de ceux du modèle modifié. Ils sont égaux aux
produits ν2ν3ν4ν5 et ν6ν7 tirés de la table IV.2, de façon que la réaction de pyrolyse globale donne
la même masse de charbon que les étapes successives du modèle (IV.2), et que la combustion
laisse le même résidu final. En revanche, les paramètres cinétiques résultent d’un ajustement
manuel. Ce modèle ne peut pas bien sûr prétendre à un grand réalisme, comme le montrent les
résultats des simulations présentés dans la figure IV.7. Sa réponse à l’échelle du cône calorimètre
est examinée dans la Section 4.2.
100
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
Cette section est consacrée à une description très complète des résultats obtenus lors d’une
simulation d’expérience en cône calorimètre, dans une situation de référence. De nombreuses
variantes, portant sur les paramètres chimiques, physiques, ainsi que sur la configuration et le
scénario d’exposition, sont ensuite présentées dans la Section suivante 4. L’objectif est de tester
leur l’influence, en se référant au cas traité ici. La caractérisation de l’influence des paramètres
purement numériques tels que la résolution spatiale du maillage et les critères de convergence
est également reportée dans la Section 4.1. En toute logique, elle devrait figurer dans le Chapitre
III où le modèle numérique est décrit, mais il a semblé plus simple de la discuter après avoir
fourni un premier aperçu des résultats typiques.
Avant de passer à l’exposé des résultats, quelques paramètres restent à définir. Ceci fait
l’objet des Sections 3.1 et 3.2.
3.1 Compléments au modèle chimique
Nous utilisons ici le modèle chimique modifié (IV.2) décrit dans la Section 2.2. Toutefois,
il doit être complété, notamment pour la prise en compte du séchage, et précisé, concernant
la nature des gaz émis. La forme complète du schéma réactionnel s’écrit alors comme suit. En
premier lieu vient le séchage,
S1 → ν1 S2 + (1 − ν1) GW , (IV.5a)
où S1 désigne le bois humide, S2 le bois sec et GW la vapeur d’eau. Notons qu’on pourrait traiter
le séchage comme une relation ne faisant intervenir que l’eau, passant de la phase condensée
à la phase vapeur, sans référence aux solides. La formulation (IV.5a) correspond toutefois au
comportement apparent en terme de perte de masse et apporte une légère simplification par sa
symétrie avec les autres réactions ci-dessous. En revanche, son coefficient stoechiométrique ν1
dépend du contenu initial en eau ρW,0 et doit être adapté selon l’état d’humidité du matériau.
101
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Viennent ensuite les réactions anaérobies de pyrolyse :
S2 → ν2 S3 +(1 − ν2)[12
GF +12
GI
](IV.5b)
S3 → ν3 S4 +(1 − ν3)[12
GF +12
GI
](IV.5c)
S4 → ν4 S5 +(1 − ν4)[12
GF +12
GI
](IV.5d)
S5 → ν5 S6 +(1 − ν5)[12
GF +12
GI
]. (IV.5e)
L’état final S6 représente le charbon, tandis que S3, S4 et S5 représentent des états intermédiaires
de dégradation. Comme expliqué dans la Section 2.6 du Chapitre II, les gaz de pyrolyse sont
supposés être composés à parts égales (en masse) de substances combustibles (GF ) et inertes
(GI). Enfin, les réactions d’oxydation s’écrivent
S6 + νO6 O2 → ν6 S7 +(1 + νO6 − ν6) GC (IV.5f)
S7 + νO7 O2 → ν7 S8 +(1 + νO7 − ν7) GC , (IV.5g)
où S8 représente le résidu minéral final (cendres). Comme discuté dans la Section 1.2 du Cha-
pitre II, on considère que les gaz de combustion GC sont essentiellement du CO2.
Pour un usage ultérieur, le modèle simplifié (IV.4) peut aussi être complété et précisé sous
la forme de
S1 → ν1 S2 +(1 − ν1) GW (IV.6a)
S2 → ν2ν3ν4ν5 S6 +(1 − ν2ν3ν4ν5)[12
GF +12
GI
](IV.6b)
S6 + (νO6 + ν6νO7) O2 → ν6ν7 S8 +(1 + νO6 + ν6νO7 − ν6ν7) GC . (IV.6c)
Finalement, on admet que la part combustible GF des gaz de pyrolyse se comporte comme
un mélange à parts égales (en masse) de CO et de CH4, et que leur combustion éventuelle obéit
donc à (voir éq. II.46)
GF + 2.286 O2 → 2.16 CO2 + 1.126 H2O . (IV.7)
Les paramètres des réactions des schémas (IV.5) et (IV.6) sont regroupés dans la table
IV.5. Le coefficient ν1 dépend du contenu en eau initial du matériau. Les autres coefficients
stoechiométriques résultent de l’exploitation des données mesurées en ATG. On peut noter que
des chaleurs de réaction ont été ajoutées aux paramètres évoqués dans la Section 2.2. Celles-
102
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
Réaction A Ea n ν ∆H[s−1] [kJ/mol]
(IV.5a) 1.06 104 44.24 1 ν1 = 0.9275 2.258 MJ/kg de H2O(IV.5b) 2.09 1011 16.72 1 ν2 = 0.79 80.86 kJ/kg de S2
(IV.5c) 2.71 1015 23.21 1 ν3 = 0.75 96.26 kJ/kg de S3
(IV.5d) 1.46 106 11.25 1 ν4 = 0.74 80.12 kJ/kg de S4
(IV.5e) 1.14 100 3.6 1 ν5 = 0.80 77.01 kJ/kg de S5
(IV.5f) 4.07 103 8.21 1 ν6 = 0.48 17.11 MJ/kg de S6
(IV.5g) 2.0 107 18.88 1 ν7 = 0.308 22.78 MJ/kg de S7
(IV.6a) 1.06 104 44.24 1 ν1 = 0.9275 2.258 MJ/kg de H2O(IV.6b) 6.5 105 10.58 1 ν2ν3ν4ν5 = 0.351 250.0 kJ/kg de S2
(IV.6c) 3.0 103 10.10 1 ν6ν7 = 0.148 28.04 MJ/kg de S6
(IV.7) - - - - 23.97 MJ/kg de GF
Tableau IV.5 – Pré-facteur et énergie d’activation de la loi cinétique, coefficients stœchiométriques etchaleurs de réaction pour les schémas réactionnels complet (IV.5) et simplifié (IV.6).
ci n’interviennent pas dans la réponse des essais ATG, si les conditions idéales sont réunies
(absence de limitation par les processus de transport, en particulier de la chaleur), et elles
n’ont pas été mesurées. Elles jouent cependant un rôle dans la situation à plus grande échelle
examinée ici et doivent être spécifiées.
Pour celà, nous utilisons des estimations, fixées comme suit. Une chaleur globale de réaction
(endothermique) égale à 250 kJ/kg [50] est attribuée à la pyrolyse complète du bois sec (IV.6b).
En l’absence d’autre information, nous admettons que dans le schéma détaillé (IV.5) cette
valeur totale se distribue parmi les étapes successives au prorata des pertes de masse associées,
c’est-à-dire que
∆Hi =1 − νi
1 − ν2ν3ν4ν5
× 250 kJ/kg , (i = 2, 3, 4, 5) . (IV.8)
On procède de la même façon pour l’oxydation, en se basant sur la chaleur dégagée par l’oxy-
dation complète du carbone en CO2, qui est de 32.9 MJ/kg, ou 28 MJ/kg de S6, puisque sa
teneur en carbone est 1 − ν6ν7=0.852. Ainsi,
∆Hi =1 − νi
1 − ν6ν7
× 32.9 MJ/kg , (i = 6, 7) . (IV.9)
On considère que le séchage absorbe une énergie égale à la chaleur latente de vaporisation de
l’eau. Enfin, l’énergie dégagée par la combustion (IV.7) des gaz de pyrolyse est fixée de façon
à ce que le pouvoir calorifique inférieur (LHV) du matériau, égale à la chaleur d’oxydation du
103
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Densité [kg/m3] Macro- Conductivité thermique [W/K.m]Apparente Squelettique Solide porosité Apparente Solide
micro-poreux micro-poreuxρSi
ρskSi
ρ∗
SiǫM,i λi λ∗
i
S2 530 1400 768.1 0.311 0.18 0.261S3 418.7 1550 659.3 0.365 0.15 0.236S4 314.0 1700 530.1 0.4076 0.11 0.186S5 232.4 1850 412.9 0.4372 0.09 0.16S6 185.9 2000 340.2 0.4535 0.08 0.147S7 56.1 2000 2000 0.9551 0.08 1.78S8 26.4 2000 2000 0.9862 0.08 5.79
Tableau IV.6 – Propriétés des matériaux solides S2 à S8.
charbon et des gaz de pyrolyse moins la chaleur nécessaire à la pyrolyse, prenne une valeur
raisonnable. Elle vaut ici 17.4 MJ/kg de bois sec, en bon accord par exemple avec le LHV =
17.8 MJ/kg du pin [105].
3.2 Paramètres physiques et numériques
Les réactions du schéma IV.5 étant séquentielles et toute variation de volume étant négligée,
on peut calculer la densité apparente de chaque solide Si grâce à la stœchiométrie du schéma.
La densité du bois sec S2 est connue, égale à ρS2=530 kg/m3. Celle des états ultérieurs s’en
déduit par
ρSi=
j=i∏
j=3
νj ρS2 . (IV.10)
Pour calculer les porosités totale, micro- et macroscopique, on se base sur la densité squelettale
ρskSi
(voir éqs. II.15 et II.17),
ǫT =ρSi
ρskSi
, ǫM = ǫm =ǫT
2. (IV.11)
La densité ρ∗
Sides solides micro-poreux en découle par (II.16). Sur la base de valeurs commu-
nément admises dans la littérature, on peut attribuer à ρsk une valeur de l’ordre 1400 kg/m3
pour le bois sec S2 [17], et de l’ordre de 2000 kg/m3 pour le charbon, considéré comme du
carbone amorphe [17, 81]. On suppose que la valeur pour S6 vaut également pour S7 et S8 et
on applique une variation graduelle de ρskS2
à ρskS6
pour les espèces intermédiaires S3, S4 et S5.
La conductivité thermique apparente de chaque espèce est estimée sur la base des mesures
104
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
Paramètres opératoiresL 18 mm Epaisseur de l’échantillonFc 40 kW/m2 Flux radiatif incident (cône)Fl 33% Flux radiatif incident
(fraction de la puissance de la flamme)Pa 1.01325 bar Pression ambianteXa 2 cm Distance à la veine d’air fraisYO2a 0.233 Oxygène dans l’air ambiantYN2a 0.767 Azote dans l’air ambiantTa 303.15 K Température ambianteP (x = L) = Pa Fond perméablehT b=0 Support isolant, cf. (II.43)Propriétés des constituantsρW,0 42.05 kg/m3 Contenu en eau initialK0 2 10−15m2 Perméabilité initiale, cf. (II.36)cp,e 4180 J/kg/K Capacité calorifique de l’eaucp,s 1500 J/kg/K Capacité calorifique des solides [97, 98]cp,g 1004 J/kg/K Capacité calorifique des gazµ0 1.71 10−5 kg/m/s Viscosité de référence, cf (II.31)Pr 0.72 Nombre de PrandtlLe 1 Nombre de Lewisǫr 0.9 Emissivité du solide [12]Constantes physiquesσ 5.67 10−8 W/m2/K−4 Constante de Stefan-BoltzmannMO2 32 g/mol Masse molaire de O2
MN2 28 g/mol Masse molaire de N2
MH2O 18 g/mol Masse molaire de H20MGF
20.32 g/mol Masse molaire de GF
MGI28 g/mol Masse molaire de GI
MCO2=MGC18 g/mol Masse molaire de GC
Tableau IV.7 – Paramètres opératoires et autres constantes physiques pour les simulations.
105
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Critères pour la détermination du pas de temps, cf. (III.34a)Valeur absolue Valeur relative
ρci0.05 kg/m3 90%
ρgi0.001 kg/m3 90%
T 1 K -Critères pour la convergence de l’algorithme itératif, cf. (III.35)ρci
10−3 kg/m3 10%ρgi
10−7 kg/m3 5%T 0.1 K 10%P (x = 0) 0.01 bar -P (x = L) 0.01 bar -Pas de maillage δx=0.6mm
Tableau IV.8 – Paramètres du modèle numérique.
de [97], pour des bois à différents stades de pyrolyse, de l’état natif à l’état de charbon. Ces
données sont présentées sous la forme d’un courbe en fonction de la densité apparente. Une
valeur lue sur cette courbe est donc associée aux différents états S2 à S6, selon leur densité
ρSi. On peut en déduire les conductivités λ∗
i des solides micro-poreux, utilisées pour évaluer la
conductivité globale λ par la règle de mélange (II.34).
Le récapitulatif de ces paramètres associées aux états successifs du solide est donné dans
la table IV.6. Les propriétés de transport de leurs mélanges sont déduites à l’aide des lois
constitutives énoncées dans la Section 2.4 du Chapitre II.
Un certain nombre de paramètres supplémentaires sont regroupés dans la table IV.7. Un
premier ensemble décrit la configuration géométrique et regroupe les paramètres qui décrivent
les conditions initiales et aux limites du domaine de calcul. Un deuxième lot regroupe des
constantes qui interviennent dans la détermination des propriétés de transport, selon les mo-
dalités décrites dans le Chapitre II. Le dernier groupe rappelle quelques constantes physiques
utiles.
Enfin, des paramètres de nature purement numérique sont listés dans la table IV.8. Ils
concernent les critères utilisés pour la gestion dynamique du pas de temps adaptatif, pour la
détection de la convergence de l’algorithme itératif de résolution des problèmes implicites en
temps, et la résolution spatiale du maillage. L’usage de ces paramètres a été décrit dans le
Chapitre III. Convenablement fixés, ils ne devraient pas avoir d’influence sur les résultats, ce
qui sera vérifié dans la Section 4.1.
106
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
3.3 Résultats locaux
Cette Section est consacrée à la description de résultats locaux, c’est-à-dire à l’évolution des
profils des variables d’états et de certaines propriétés du système, au cours de la dégradation.
Rappelons que lors des essais en cône calorimètre l’échantillon est exposé à partir du temps
t=0 à un flux radiatif de 40 kW/m2. Les résultats présentés dans les figures IV.10 à IV.16
correspondent aux temps successifs t=0, 300, 700, 1200, 4000, 8000 et 15000 s.
Chaque figure regroupe un ensemble de 12 profils, en fonction de la profondeur x, de 0 à
18mm, à un instant donné. Il sont organisés comme illustré dans la figure IV.8. En outre, les
codes de couleurs utilisés pour les compositions du solide, du mélange gazeux et pour les taux
de réaction sont indiqués dans la figure IV.9. Pour les autres quantités, la courbe en rouge
correspond au temps actuel. Les courbes en noir reprennent les profils aux instants précédents,
pour faciliter l’appréhension de l’évolution des profils.
La figure IV.10 décrit l’état initial. Tous les profils sont plats, les paramètres sont tous uni-
formes dans l’épaisseur de l’échantillon. Les compositions font apparaître que le solide contient
de l’eau et l’espèce S2 (bois sec), qui ensemble, constituent le bois humide initial S1. Le mélange
des gaz interstitiels a la composition de l’air ambiant.
3.3.1 Résultats à t = 300s
Après 5 minutes d’exposition (fig. IV.11), la température en surface (fig. IV.11f) dépasse 900
K et décroit dans l’épaisseur selon un profil à l’allure exponentielle, jusqu’à moins de 400 K en
face arrière. On peut noter un léger changement de pente dans le profil à la position x ≈5 mm,
qui on va le voir, correspond à l’intensité maximale des réactions endothermiques de pyrolyse.
La composition des espèces condensées (fig. IV.11a) fait apparaître que la pyrolyse est
déjà très avancée dans les 4 premiers millimètres du côté de la face exposée. En surface, le
matériau est déjà à l’état S6 (charbon). Toutefois, à une profondeur supérieure à 8 mm, le
bois est toujours intact. A proximité du fond de l’échantillon, le contenu en eau est encore
proche de sa valeur initiale. Dans une plage de profondeur de 2 à 7 mm, on observe la présence
des solides en état intermédiaire de dégradation, S3 à S5. Les transitions de composition ne
sont pas brusques. Deux espèces au moins sont toujours présentes, et à x = 3 ∼ 4 mm, trois
d’entre elles coexistent avec des concentrations notables. Les taux de réactions montrés en (c)
confirment ces observations. Proche du fond, le séchage est encore actif. Dans la zone x=2 à 8
mm, 4 pics nets sont visibles. Ils correspondent aux 4 réactions successives de pyrolyse et leurs
positions correspondent aux zones de transition entre les espèces concernées dans les profils de
composition du solide.
107
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Composition du solide Pression Taux de réactionρci P ω′ (cf. éq. II.24)
[ kg/m3 ] [ bar ] [ kg/m3 s ]
(a) (b) (c)
Composition du gaz Vitesse du gaz TempératureYgi vg T[ - ] [m/s ] [K ]
(d) (e) (f)
Macroporosité Porosité totale PerméabilitéǫM ǫT K[ - ] [ - ] [ m2 ]
(g) (h) (i)
Conductivité thermique Diffusivité Viscositéλ D µ
[ W/m.K ] [ - ] [ Pa.s ]
(j) (k) (l)
Figure IV.8 – Plan des sous-figures pour les résultats locaux dans les figures IV.10 à IV.16.
a b c
Figure IV.9 – Codes de couleur pour les profils des concentrations des espèces condensées (a), de fractionsmassiques des espèces gazeuses (b) et des taux de réaction (c) pour les figures IV.10 à IV.16.
108
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
La composition des gaz (fig. IV.11d) fait apparaître une forte présence de vapeur d’eau,
notamment près du fond où le séchage est encore en cours. Les espèces prédominantes sont les
gaz de pyrolyse, GI et GF . L’azote, qui dominait largement à t=0, a été en grande partie chassé
par le flux de gaz émis par la dégradation, mais sa cncentration demeure notable, surtout près
de la face exposée, car il peut diffuser à contre-courant. En revanche, l’oxygène est maintenant
absent. A cet instant, une flamme existe proche de la surface de l’échantillon, qui consomme
entièrement les apports possibles d’O2 depuis l’environnement et sa concentration est nulle en
x=0.
Du fait de la production de gaz, la pression s’est fortement élevée au coeur de l’échantillon,
où elle dépasse 2 bars (fig. IV.11d). La vitesse vg (fig. IV.11e), avec la convention que les
valeurs positives correspondent à un flux vers la face exposée, indique que les gaz s’échappent
majoritairement du côté de la face exposée, mais pas uniquement. La vitesse de sortie vaut
environ 1 cm/s en x = 0 et 2 mm/s au fond en x=18mm. Elle s’annule naturellement au
point où la pression est maximale. Cette dissymétrie s’explique dans une certaine mesure par
la plus grande proximité de la face exposée à la zone de production des gaz, mais surtout par la
différence de perméabilité, qui est montrée en (i). Le matériau dégradé présente une perméabilité
près de 4 fois supérieure à celle du matériau intact. Ceci est contrebalancé seulement en partie
par la viscosité plus faible (du fait de la température) dans la partie arrière (fig. IV.11e).
La variation de perméabilité s’explique par l’augmentation marquée de la porosité dans la
zone dégradée (figs. IV.11g,h), qui entraîne également une augmentation de la diffusivité (k).
En revanche, la conductivité thermique (j) diminue fortement proche de la face exposée, puisque
la conductivité du charbon est très inférieure à celle du bois intact.
3.3.2 Résultats à t = 700s
L’état du système à t=700 s (fig. IV.12) se prête à des commentaires similaires, bien que
la situation ait évolué. La température en surface a encore un peu augmenté, mais surtout,
elle dépasse 550 K sur toute l’épaisseur de l’échantillon. En conséquence, la viscosité augmente
aussi partout. Le séchage est entièrement terminé. Le solide est à l’état de charbon sur près
de la moitié de son épaisseur et dans un état partiellement dégradé sur l’essentiel de l’autre
moitié. Une poche de bois intact subsiste seulement proche de la face arrière. Les pics des
taux des 4 réactions de pyrolyse se sont déplacés dans la deuxième moitié de l’échantillon.
Ils se sont aussi étalés spatialement, du fait de l’augmentation générale de la température.
Les transitions de compositions du solide sont encore moins brusques que dans l’état précédent.
Comme la zone chaude est plus étendue, les taux globaux des réactions de pyrolyse ont augmenté
109
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
ainsi que la production de gaz, et la pression atteint maintenant 3 bars en x ≈12 mm. Noter
que la température permettrait le déclenchement de la combustion du charbon proche de la
face exposée, mais que tout l’oxygène pouvant provenir de l’espace avoisinant est toujours
entièrement consommé dans la flamme à l’extérieur de l’échantillon.
Les vitesses de sorties du gaz sont sensiblement équivalentes aux deux faces de l’échantillon,
de l’ordre de 1 cm/s. Bien que la perméabilité soit toujours plus faible en face arrière, la zone
de production des gaz s’est fortement décalée vers celle-ci. Ces gaz sont maintenant constitués
très majoritairement de GI et GF . La pénétration de l’azote par diffusion existe toujours du
côté de la face exposée, mais il doit migrer sur une distance plus longue, à contre-courant, et
il est quasiment absent dans la partie arrière de l’échantillon. L’augmentation de la porosité
et de la diffusivité suit l’avancement du front de pyrolyse, de même que la diminution de la
conductivité thermique.
3.3.3 Résultats à t = 1200s
A t=1200 s, la figure IV.13 montre à un état de transition dans la phase condensée entre la
pyrolyse, qui s’achève, et la combustion do solide, qui s’amorce. La flamme extérieure est sur le
point de s’éteindre, faute de combustible, et laisse désormais de l’oxygène parvenir à la surface
du solide, ce qui autorise la combustion du charbon. Le solide est constitué essentiellement de
charbon S6, avec un petit reliquat de S5 en face arrière et une très faible quantité du produit
d’oxydation S7 en face avant. Les taux de réaction font apparaître que la dernière étape de
pyrolyse est toujours en cours, sur une zone très étalée mais avec une faible intensité (noter
le changement d’échelle par rapport aux figures précédentes). La première étape d’oxydation
intéresse une mince région près de la face exposée. La température dépasse maintenant 800 K
dans toute l’épaisseur du matériau et la viscosité du gaz est donc relativement uniforme. On
peut noter que T est légèrement plus grande un peu en retrait de la face exposée, du fait de la
chaleur dégagée par l’oxydation.
L’émission de gaz étant modérée, sa vitesse est beaucoup plus faible que dans les états
antérieurs. Comme de plus la perméabilité a augmenté partout, la pression est retombée prati-
quement à la pression atmosphérique. La porosité est maintenant uniforme (et élevée, corres-
pondant à l’état charbon), à l’exception d’une fine couche superficielle près de la face exposée
où la combustion du solide a déjà débuté. Les conductivités thermiques et la diffusivité sont
également quasi-uniformes, avec les valeurs associées à S6.
La diminution des efflux de gaz a permis à l’azote de reconquérir l’espace interstitiel, où il
prédomine. Le mélange gazeux comprend également des gaz de pyrolyse, GI et GF , encore en
110
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
production en face arrière, et des gaz GC issus de la combustion du charbon en face avant.
3.3.4 Résultats à t = 4000et8000s
Les figures IV.14 et IV.15 sont commentées conjointement. Elles corespondent à des états
assez avancés de la phase de combustion du charbon. A t=4000 s et 8000 s, les fronts de réaction
se situent aux alentours de x=5 mm et 10 mm. Ces fronts sont toutefois assez étalés, comme le
montrent les profils de composition du solide avec une couche d’environ 5 mm où l’état oxydé
intermédiaire S7 est présent, ainsi que les profils des taux de réaction. De façon générale, la
figure IV.15 ressemble à la figure IV.14 avec un décalage de tous les profils d’environ 5 mm vers
la droite.
La température est sensiblement uniforme, proche de 1000K, avec toutefois une légère élé-
vation au niveau du front de réaction. Les vitesses du gaz sont très faibles et la pression est très
proche de Pa. Le gaz interstitiel se compose en grande partie d’azote, d’oxygène qui pénètre
depuis la face exposé et des gaz émis par la combustion.
Les propriétés de transport restent égales à celle du charbon S6 dans les régions où il est
présent. En revanche, elles augmentent très fortement dans les zones où la combustion est très
avancée et où l’espèce S8 prédomine. Ceci est particulièrement visible dans la figure IV.15, où
les 5 premiers millimètres sont entièrement consummés. Les valeurs atteintes par D et λ sont
délibérément exagérées, de façon à assurer le transfert des conditions à la limite x=0 vers la
surface effective en récession du matériau (voir la discussion à ce propos en Section 4.4 du
Chapitre III ). Rappelons que les cendres S8, bien que représentées dans la composition du
solide, ne demeurent pas en pratique à la surface de l’échantillon.
3.3.5 Résultats à t = 15000s
Enfin, l’état quasiment ultime est présenté dans la figure IV.16, à t=15 000 s. A l’exception
d’une très petite quantité de S7 qui subsiste près de la face arrière et qui est en cours d’oxydation
à un taux de réaction très faible, tout le matériau est reduit en cendres S8. La vitesse du gaz
est quasi-nulle, la pression quasi-atmosphérique. Le profil de température est uniforme, à une
valeur qui correspond à l’équilibre radiatif avec le cône calorimètre, sensiblement inférieure au
maximum atteint durant la combustion.
111
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.10 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=0. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleur pour(a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
112
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.11 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=300 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
113
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.12 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=700 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
114
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.13 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=1 200 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
115
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.14 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=4 000 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
116
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.15 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=8 000 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
117
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure IV.16 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=15 000 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. IV.9.
118
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
3.4 Résultats globaux
Après cet examen détaillé de la phénoménologie et de la chronologie des événements par
l’examen de l’évolution des champs et propriétés à l’intérieur de l’échantillon au cours de la
décomposition thermique, nous considérons ici des indicateurs globaux, qui correspondent plus
aux observations possibles depuis l’extérieur. Ils concernent également les quantités qui inter-
viennent en pratique du point de vue du développement d’un incendie et constituent les infor-
mations susceptibles d’être échangées entre un simulateur du feu dans le domaine extérieur et
notre module (FIRE et DEGRAD, respectivement, figure I.2).
Le premier élément à considérer est l’ensemble des flux massiques [g /m2.s] traversant les
faces de l’échantillon. Ils sont représentés dans la figure IV.17, séparément pour les faces avant
et arrière, soit pour la durée totale de la simulation (en bas), soit en zoomant sur la période
correspondant à la phase de séchage et de pyrolyse (en haut).
Les figures aux temps courts montrent que l’émission de vapeur d’eau est d’abord très intense
en face exposée, puis se répartit progressivement, avec une augmentation de la proportion émise
en face arrière, quand l’eau condensée ne subsiste que de côté de l’échantillon. Elle cesse à t ≈500
s. Les gaz de pyrolyse GI et GF sont émis de la même façon, dans un intervalle de temps allant
de 0 à 1200 s. On observe en face avant un pic très intense de ces gaz aux temps très courts,
suivi d’une baisse et d’un second pic à t ≈600 s, conformément à beaucoup d’observations
expérimentales pour des matériaux donnant lieu à la formation de charbon. Les émissions sont
également très importantes en face arrière. Le fort pic initial n’existe pas, mais le pic à t ≈800
s dépasse même en intensité celui à t ≈600 s en face avant.
Débute ensuite la phase de combustion du solide, du côté exposé, à partir de t ≈ 1000 s.
Ceci survient quand l’émission de GF faiblissant, l’oxygène jusque là entièrement consommé
par la flamme peut à nouveau atteindre la surface de l’échantillon. Cette phase dure très
longtemps (figure IV.17). Le taux d’émission de GC (CO2) atteint en face avant une valeur
proche de 1 g/m2.s, puis décroît lentement, et s’annule assez brutalement à t ≈ 15 000s du fait
de l’épuisement du combustible. La consommation d’O2 suit bien sûr les mêmes tendances. On
n’observe que des flux très faibles de O2 et GC en face arrière et seulement en toute fin de la
simulation.
On observe également vers t ≈1000 s et t ≈15 000 s une entrée de N2 dans le matériau en
face exposée, et une émission équivalente en face arrière. Ce phénomène est inattendu et il est
difficile de déterminer s’il s’agit d’un artefact du modèle numérique, où s’il correspond à un
effet réel. Quoiqu’il en soit, les quantités mises en jeu sont très faibles.
119
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
x=0 x=L
x=0 x=L
Figure IV.17 – Flux massiques [g/m2.s] traversant les faces exposée et arrière de l’échantillon, en fonctiondu temps t [s]. Par convention, les flux sortant sont comptés positivement. La ligne du haut concerne lapremière période, t ≤ 2000 s, où la pyrolyse se déroule. La seconde ligne donne une vue globale sur la duréetotale de la simulation. Le code de couleur correspond à la figure IV.9, avec O2 (bleu), N2 (cyan), H2O(marron), GI (magenta), GF (vert) et GC (rouge).
Les mêmes données sont présentées d’une façon différente dans la figure IV.18, qui permet
une comparaison plus aisée des flux en faces avant et arrière.
120
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
O2 N2 H2O
GF GI GC
Figure IV.18 – Flux massiques [g/m2.s] des espèces gazeuses traversant les faces avant (trait continu) etarrière (pointillés) de l’échantillon, en fonction du temps t [s]. Par convention, les flux sortant sont comptéspositivement. Noter que les échelles sont différentes selon les cas.
Le deuxième élément concerne le bilan d’énergie. Il fait intervenir les flux à travers les
frontières de l’échantillon (voir éq. II.37) :
(i) la part absorbée du flux radiatif incident en provenance du cône calorimètre, ǫr Fc ;
(ii) la part absorbée du flux radiatif incident en provenance de la flamme, ǫr Fl ;
(iii) le flux radiatif émis par la surface, ǫr σ T |4x=0 ;
(iv) le flux échangé par conduction avec le milieu environnant, hT (Ta − T |x=0) ;
(v,vi) le flux de chaleur emporté par le gaz, ρgcp,gvgT (en faces avant et arrière).
Le bilan de ces flux doit équilibrer :
(vii) le taux de variation de la chaleur sensible (intégrale sur tout le volume du premier terme
de l’éq. II.29),
ainsi que les termes source/puits dûs aux processus chimiques :
(viii) le taux global de consommation d’énergie par le séchage ;
(ix) le taux global de consommation d’énergie par la pyrolyse ;
(x) le taux global de dégagement de chaleur par la combustion du charbon.
121
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a c
b d
Figure IV.19 – Eléments du bilan thermique [kW/m2] en fonction du temps t [s]. Contributions (iv -ix) pour t ≤2000 s (a). Contributions (i - iii, x) pour t ≤2000 s (b) et pour toute la durée de la simulation(c). Code de couleurs (d).
Ces différents éléments sont représentés dans la figure IV.19 en fonction du temps. Quand
c’était nécessaire, les quantités ont été ramenées à l’unité de surface exposée. Par conséquent,
tous les éléments sont en kW/m2. La correspondance entre les termes listés ci-dessus et les cou-
leurs des courbes est donnée dans la figure IV.19. Le premier cadre (a), pour t ≤2000s, montre
des contributions qui sont importantes durant la phase de séchage/pyrolyse puis deviennent
bien plus faibles (v - ix). Y sont aussi tracées les pertes thermiques par échange conductif avec
l’environnement (iv), qui sont sensiblement constante durant toute la simulation.
Toutes ces contribution sont négatives, ce qui est naturel puisque les réactions sont endo-
thermiques, que les gaz sortant sont chauds et que l’échantillon est plus chaud que le milieu
ambiant. La chaleur sensible (vi) constitue une exception notable, avec un taux de variation
qui évolue de façon assez chaotique. Il est initialement très positif, ce qui traduit l’élévation de
122
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
température du matériau. Toutefois, dans la plage t=500∼1000 s, il devient fortement négatif,
alors que la température continue à s’élever. Ceci provient de la forte perte de masse durant
cette période, qui diminue d’autant le contenu calorifique du système. En effet, cette perte de
chaleur sensible correspond aux flux thermiques convectifs (v, vi), qui sont maximum durant
cette période (et d’importance comparable en faces avant et arrière).
Les autres termes (i - iii) et (x) sont représentés dans les figures IV.19b durant la même
période t ≤2000 s et IV.19c pour les temps plus long. La puissance (i) reçue du cône calorimètre
est une constante. Elle est contrebalancée en grande partie par le rayonnement (iii) émis par
la surface, qui atteint rapidement une puissance équivalente. Le flux radiatif incident (ii) en
provenance de la flamme extérieure est une contribution importante quand elle existe, c’est-à-
dire pendant les périodes d’émission intense de gaz de pyrolyse (jusqu’à t de l’ordre de 1000 s).
Son évolution suit fidèlement celle du taux d’émission de GF en face avant (cf. figure IV.18).
Noter que l’émission de la surface augmente aussi quand la flamme est puissante, ce qui vient
atténuer les fluctuations du bilan radiatif net. Enfin, la combustion dégage une puissance durant
une longue période, dont l’évolution suit fidèlement celle de la consommation de d’O2 ou de
l’émission de GC (cf. figure IV.17).
Il a été vérifié que les défauts de bilan globaux sont négligeables, en sommant toutes les
contributions qui interviennent. Les défauts sont des fluctuations aléatoires de l’ordre de 10−5
g/m2.s pour ce qui concerne la masse et 0.1 W/m2 pour l’énergie, à comparer aux ordres de
grandeur largement supérieurs des résultats dans les figures IV.17 et IV.19.
Les éléments éxaminés ci-dessus, et notamment les flux des espèces gazeuses, sont les quan-
tités les plus importantes dans l’optique d’un couplage de ces calculs avec un outil de simulation
d’un feu. Toutefois, on peut aussi considérer de façon encore plus globale la perte de masse de
l’échantillon, qui permet une comparaison avec des données expérimentales disponibles, puisque
l’essai sous cône calorimètre dans les conditions de cette simulation a été réalisé [6]. Ceci fait
l’objet de la figure IV.20. A cette occasion, nous comparons également les prédictions de la
température en quelques positions, qui ont elles aussi été mesurées.
L’évolution de la masse durant la simulation complète est montrée dans la figure IV.20a.
Après une chute brusque durant la phase de pyrolyse, la masse décroit de façon linéaire avec le
temps dans la phase de combustion. Ceci peut se comprendre en considérant les figures IV.14
et IV.15. Le taux de combustion est limité essentiellement par les apports diffusifs d’oxygène.
A tous les stades d’avancement du front de combustion, la zone de réaction qui s’étale sur 3∼4
mm d’épaisseur et se propage vers la face arrière, n’est recouverte que d’une couche de résidu
qui offre peu d’obstacle à l’arrivée d’oxygène (voire même est totalement découverte). Le taux
123
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b
c d
Figure IV.20 – Evolution de la masse de l’échantillon (en % de la masse initiale) en fonction du temps(s), sur toute la durée de la simulation (a) et pour t ≤2000 s (b). Taux de perte de masse (s−1) en fonctiondu temps. En (a,b,c), les courbes rouges correspondent aux résultats numériques et les courbes noires auxdonnées expérimentales. Evolution de la température (°C) en fonction du temps, à la face exposé (noir),au centre de l’échantillon (rouge) et en face arrière (bleu). Les courbes en pointillés correspondent auxrésultats numériques et les courbes en traits continus aux données expérimentales [6].
global d’oxydation est donc approximativement identique à tous ces stades, jusqu’à épuisement
du charbon.
La figure IV.20b se concentre sur une période plus courte, t ≤2000 s, durant laquelle séchage
et pyrolyse se produisent et pour laquelle des mesures expérimentales sont disponibles pour
comparaison. D’un point de vue très global, les formes des deux courbes sont en accord. On
note toutefois dans les données numériques un point d’inflexion vers t=400 s qui n’existe pas
dans la courbe expérimentale, et une brisure plus tardive (∼800 s vs. ∼700 s) de la courbe, au
moment où la pyrolyse prend fin et laisse place à la combustion.
Ceci peut être mieux appréhendé à l’aide de la MLR, présentée dans la figure IV.20c.
L’inflexion provient d’un passage par un minimum de la MLR dans les simulations, qui est
124
IV.3 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
beaucoup moins marqué dans les données mesurées. L’existence d’un minimum, et donc d’un
second pic, est couramment observée. On l’attribue parfois à la présence du charbon dans la zone
proche de la surface exposée, qui par sa conductivité thermique plus faible fait écran à l’apport
de chaleur et diminue provisoirement le taux de dégradation des couches plus profondes. La
forme de la courbe numérique n’est donc pas choquante. La différence par rapport à la courbe
expérimentale pourrait provenir d’une estimation de la conductivité thermique et de sa variation
avec l’état de dégradation.
Cependant, la forme de la courbe et l’existence du second pic dépendent aussi des conditions
en face arrière. Ceci a été observé dans des expériences décrites au Chapitre V, où deux types
de porte-échantillons présentant des degrés d’isolation thermique très différents ont été testés.
Nous retrouvons cet effet numériquement en simulant des expériences avec des conditions à la
face arrière différentes dans la Section 4.4.2 et dans le Chapitre V. Lautenberger a également
signalé cet effet ([13], Section 4.13). Les présentes simulations supposent que le porte-échantillon
est thermiquement isolant (hT b=0), condition la plus favorable à l’existence du second pic, mais
qui n’était peut-être parfaitement réalisée dans l’expérience.
D’autre part, la position du second pic est décalée dans le temps. Il est difficile d’en cerner
la raison, du fait du très grand nombre de paramètres, chimiques et physiques, parfois fixés
avec un haut degré d’incertitude, qui entrent en jeu. Tenter de quantifier l’influence de chacun
d’eux fait l’objet de la Section suivante. A ce stade, on retiendra que la réponse des simulations
n’est pas atypique, et qu’elle est quantitativement imprécise mais raisonnable.
On peut commenter la figure IV.20d de la même façon. On y présente les températures
calculées en x=0, L/2 et L au cours du temps, en comparaison avec les mesures expérimentales
[6]. En face exposée, l’accord est assez bon, à l’exception d’une montée en température beaucoup
plus rapide aux temps très courts dans les simulations. Ceci peut provenir du positionnement
des thermocouples, qui ne pouvait pas matériellement se trouver en x=0, mais nécessairement
légèrement en retrait de la surface. On observe également une montée en température plus rapide
dans les simulations au centre de l’échantillon. Elle peut résulter d’erreurs dans les données des
propriétés du matériau et de ses états dégradés. Mais elle peut aussi provenir de l’influence
de la condition en face arière, adiabatique dans les simulations et moins bien définie dans
l’expérience. Les données pour la température en face arrière (ou près de la face arrière, pour
les mêmes raisons de positionnement des thermocouples) supporte cette dernière hypothèse. T
n’atteint qu’une valeur très inférieure à celle de la face avant, alors qu’on s’attend à ce que
le profil de température soit beaucoup plus plat (cf. fig. IV.13f). Noter que la présence même
des percages qui recoivent les thermocouples perturbe les processus, en offrant notamment un
chemin préférentiel pour l’évacuation des gaz.
125
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
Un grand nombre de variantes par rapport au cas de base précédent est testé dans cette Sec-
tion, avec pour objectif de quantifier l’impact des paramètres de diverses natures, et d’identifier
ceux qui déterminent de façon prépondérante les comportements et doivent être pris en compte
avec le plus de soin. Nous débutons par des tests de l’influence de paramètres numériques, sans
pertinence physique. Ceci aurait dû trouver place dans le Chapitre III, mais il est plus facile
de le discuter après avoir fournit un aperçu du type de résultats que délivre la simulation. On
considére ensuite des variantes portant sur des aspects chimiques, sur des paramètres physiques,
et sur des paramètres opératoires (dimensions, scénarios d’exposition et conditions aux limites).
Dans tous les cas, seuls quelques aspects sont modifiés par rapport au cas de base définis dans
les Sections 3.1 et 3.2.
4.1 Influence des paramètres numériques
4.1.1 Influence de la discrétisation spatiale
En conservant toutes choses égales par ailleurs, des simulations sont conduites en utilisant
différent niveaux de discrétisation spatiale, qui vaut δx = L/Nx, avec Nx=2, 3, 4, 5, 10, 20, 30
et 40 (voir table IV.9). Rappelons que Nx = 30 dans le cas de base et dans toutes les autres
simulations présentées.
Nx 2 3 4 5 10 20 30 40δx [mm] 9 6 4.5 3.6 1.8 0.9 0.6 0.45tCP U 36 s 80 s 2 mn 3.5 mn 12 mn 61 mn 197 mn 462 mn
Tableau IV.9 – Caractéristiques des maillages et temps CPU pour la simulation.
L’évolution de la masse de l’échantillon est tracée en fonction du temps dans la figure IV.21.
On observe à droite que pour une durée de simulation de 1500 s, des effets très marqués de
discrétisation existent si Nx ≤5 (δx ≥ 3.6 mm). Ils se manifestent par des courbes en escalier,
dont les marches correspondent aux passages des fronts de réaction d’un élément de volume au
suivant. Rappelons que l’épaisseur de ces fronts est de quelques mm (voir figures IV.10 à IV.16).
Quand δx devient inférieur à cette épaisseur (Nx ≤10, δx ≤ 1.8 mm), les courbes deviennent
indiscernables à cette échelle.
La figure IV.21a est un agrandissement pour les temps courts. Un effet d’escalier visible
apparaît alors aussi pour Nx= 10, sans doute parce que les fronts aux temps courts sont de
126
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
a b
Figure IV.21 – Perte de masse dans cas de 2, 3, 4, 5, 10, 20, 30 et 40 nœuds.
plus faible épaisseur. Toutefois, après environ une minute et une perte de masse de quelques
pourcents, cet effet s’amenuise et finit par disparaître.
Tous les calculs présentés dans ce travail ont été effectués avec des résolutions bien supé-
rieures, afin de s’assurer de l’inexistence de source d’erreur de ce côté. En revanche, il apparaît
que des calculs d’une précision raisonnable peuvent être effectués à bien moindre coût pour des
applications intensives. Le temps de calcul varie en gros de façon quadratique avec la résolution
(voir table IV.9). Un calcul qui dure 3 heures avec δx=0.6 mm ne prend que 12 mn si δx est
fixé à 1.8 mm. Ce constat est d’une grande importance dans l’optique d’un couplage avec un
simulateur à grande échelle.
4.1.2 Influence des critères de convergence
L’algorithme itératif de résolution des problèmes implicites en temps fait usage de deux
paramètres pour définir son critère de convergence (voir éq. III.35), dont nous testons ici l’in-
fluence. Ils s’appliquent, avec des valeurs différentes, pour les calculs des densités des phases
gazeuses, des phases condensées et de la température. L’expérience montre que ce sont toujours
les densités d’espèces gazeuses qui convergent le plus lentement et ce sont donc les critères
associés que nous considérons ici. L’un d’eux est relatif, fixé à ηR,g=0.05 dans le cas de base
et dans tous les autres calculs de ce travail. Nous examinons ici les éventuelles différences si
ηR,g=0.10 ou 0.20. L’autre critère est absolu, fixé à ηA,g=10−7 kg m−3 dans les calculs habituels
et l’on examine ici les résultats si on lui donne une valeur 10−6 ou 10−5 kg m−3.
Les résultats sont présentés dans les figures IV.22 et IV.23. On trace en fonction du temps
127
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
O2 N2 H2O
GF GI GC
Figure IV.22 – Influence du critère relatif de convergence ηR,g sur les flux massiques de gaz en x=0.ηR,g =0.05 (rouge), 0.10 (bleu) et 0.20 (vert).
O2 N2 H2O
GF GI GC
Figure IV.23 – Influence du critère absolu de convergence ηA,g sur les flux massiques de gaz en x=0.ηA,g =10−7 (rouge), −6 (bleu) et −5 (vert) kg m−3.
128
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
l’évolution des flux massiques des diverses espèces gazeuses à travers la face exposée (x=0),
telles qu’obtenue avec les différents critères de convergence.
Les figures sont particulièrement mornes puisque toutes les courbes sont superposées et
indiscernables. Tout au plus observe t-on une très légère instabilité dans les flux d’azote si le
critère absolu est plus élevé, qui provoque de petites excursions très vite amorties.
Les valeurs employées dans nos calculs sont donc très sécuritaires. Elles pourraient être
assouplies dans des applications intensives, apportant un autre gain de temps de calcul, sans
doute appéciable mais qui n’a pas été quantifié.
4.2 Influence du modèle chimique
Nous comparons dans la figure IV.24 les réponses en termes de perte de masse et de MLR
si l’on applique différents modèle chimiques. Les simulations ont été conduites avec :
– le modèle modifié (IV.5) et ses paramètres dans la table IV.5 (cas de base, 4 réactions de
pyrolyse et 2 d’oxydation) ;
– sa version simplifié (IV.6) et ses paramètres dans la table IV.5 (1 réaction de pyrolyse et
1 d’oxydation) ;
– le modèle originel de Fateh & al. (IV.1) avec les paramètres de la table IV.1 (3 réactions
de pyrolyse et 2 d’oxydation).
La figure rappelle également les résultats expérimentaux. Toutes les courbes numériques ont
des allures similaires et les différences sont subtiles.
a b
Figure IV.24 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec les modèles chimiques(IV.5, en bleu), (IV.6, en vert), (IV.1, en rouge) et données expérimentales ([6], en noir).
129
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
En premier lieu, les courbes sont confondues jusqu’à t ≈500 s, c’est-à-dire dans la première
phase de la pyrolyse, avant le second pic de MLR. En particulier, tous les modèles présentent
la même inflexion et le même minimum de MLR vers t ≈400 s, ce qui suggère qu’ils résultent
bien d’effets de transferts thermiques (conductivité ou conditions aux limites), plutôt que de
coefficients de cinétiques chimiques. Une différence apparaît ensuite entre le modèle originel et
les deux versions modifiées, liée à la position du second pic de pyrolyse. Sans être tout à fait
en accord avec l’expérience, le modèle orginel s’en approche plus que les deux autres. Il est
difficile de l’expliquer, dans la mesure où les réponses du modèle originel et du modèle modifié
en condition ATG n’était pas fortement différentes (voir figure IV.6), tandis que celle du modèle
modifié et de sa version simplifiée ne se ressemblaient pas du tout (voir figure IV.7) alors qu’ils
donnent ici des résultats quasiment identiques.
Les modèles originel et modifié se rejoignent en terme de MLR quand la phase ultérieure
de combustion débute, vers t ≈1000 s, tandis que le modèle simplifié présente une transition
exagérement brusque. Ceci tient sans doute à son nombre minimaliste de réactions, avec une
seule pyrolyse et une seule dégradation.
Le point le plus étonnant est l’assez bon accord entre le modèle (IV.5) à 7 réactions et
sa version simplifiée (IV.6) à 2 réactions, surtout si l’on considère leurs fortes différences en
condition ATG (figure IV.7). On peut penser que ces différences étaient particulièrement mises
en valeur lors des essais ATG, avec des temps de réponses instantanés, alors qu’elles sont gom-
mées quand les limitations par les transports étalent les fronts de réaction et font que des
états d’avancement différents coexistent en différentes positions. Les seules propriétés explici-
tement conservées entre (IV.5) et (IV.6) sont les coefficients stoechiométriques et les chaleurs
de réaction pour les processus globaux de pyrolyse et d’oxydation, ainsi que la plage de tem-
pérature approximative de leur déclenchement. Il semble que ces ingrédients peuvent suffire à
une simulation raisonnablement précise dans un matériau épais.
Ceci est d’une importance pratique importante. On verra dans la suite que certains autres
facteurs ont une influence bien supérieure et induisent des changements de réponse beaucoup
plus marqués que celle observée ici entre les schémas réactionnels le plus et le moins détaillé.
On peut penser qu’à moins qu’une description chimique détaillée soit nécessaire pour d’autres
raisons (concernant des espèces toxiques, par exemple), une part plus importante de l’effort
expérimental pourrait utilement être porté sur l’étude des propriétés thermiques des matériaux
dégradés.
130
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
4.3 Influence des caractéristiques des matériaux
4.3.1 Contenu en eau
Les résultats de la figure IV.25 correpondent à des simulations avec différentes teneur ini-
tiales en eau, prenant les valeurs initiales 7.25 % en masse (cas de base), une valeur diminuée
de moitié 3.62% et 0%, .
Il apparaît que les réponses sont quasiment identiques jusqu’à t ≈300 s. Elles diffèrent
ensuite, essentiellement par un décalage du second pic de pyrolyse. Après achèvement complet
de la pyrolyse (t ≥ 1200 s), les réponses sont à nouveau identiques en termes de MLR. Il subsiste
un décalage des courbes d’évolution de la masse, mais il correspond simplement aux différences
des masses d’eau initiales.
La réponse du modèle avec le bois initialement sec est la plus proche des données expérimen-
tales, ce qui est surprenant puisque les échantillons n’ont pas été préalablement séchés avant
ces essais en cône calorimètre et que la teneur en eau du cas de base a été déduite des données
expérimentales en ATG, avec un matériau stocké dans des conditions a priori identiques.
L’explication du déplacement temporel du second pic de pyrolyse est sans doute liée à
un effet thermique. Dans le cas de base (7.25 %), de l’eau subsiste à t=300 s dans la partie
arrière de l’échantillon (voir figure IV.11a). La vaporisation de cette eau constitue un puits
de chaleur, qui retarde l’élévation de température dans le matériau. Par conséquent, le second
pic avec émission massive de gaz et perte de masse importante qui survient au moment où la
température est suffisament élevée dans une zone très étendue dans l’échantillon (vers t ≈700
s, voir figure IV.11), est également retardé.
a b
Figure IV.25 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec des taux d’humiditéinitiale valant 0% (rouge), 3.62% (vert) et 7.25 % (bleu) et données expérimentales ([6], noir).
131
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Notons qu’on pourrait aussi avancer l’idée que le puits de chaleur est perçu de la même
façon qu’une perte de chaleur vers l’extérieur au delà de x = L. Elle modifierait la condition
d’adiabaticité admise dans ces simulations pour la face arrière. Toutefois, ce puits est volumique
et son influence se fait sentir beaucoup plus tôt à une position donnée (où à une profondeur
moindre à un instant donné) que des pertes en x = L. Les effets spatio-temporels attendus sont
donc différents et il est sans doute imprudent de baser une réfléxion sur une telle analogie.
4.3.2 Chaleur de pyrolyse
Comme discuté en Section 3.1, les chaleurs des réactions de pyrolyse sont fixées sur la base
d’une estimation de la chaleur globale égale à 250 kJ/kg de bois sec (cf. éq. IV.8), qui ne résulte
pas d’une mesure sur notre matériau. Nous testons ici l’influence d’une modification de cette
valeur, en la ramenant à 200 kJ/kg. La comparaison est faite dans la figure IV.26.
L’effet de ce changement est très similaire à celui d’une modification de la teneur initiale
en eau (figure IV.25) et le limite à un décalage de la position du second pic de pyrolyse, qui se
produit plus tôt.
On peut tenter de justifier ceci en comparant la variation de la chaleur de pyrolyse, qui
diminue de 50 kJ/kg de bois sec dans le présent test et la variation de la chaleur de vaporisation,
qui diminue d’environ 80 kJ/kg de bois sec quand la teneur en eau est divisée par deux dans
le test précédent. Ainsi, la chaleur totale nécessaire à la conversion (séchage + pyrolyse), varie
de quantités du même ordre de grandeur, et l’on peut songer que c’est cette variation nette qui
importe pour la réponse du matériau.
a b
Figure IV.26 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec des chaleurs globalesde pyrolyse égale à 200 (rouge) ou 250 (bleu) kJ/kg de bois sec et données expérimentales ([6], noir).
132
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
Il convient toutefois d’être prudent. Même à variation de chaleur globale équivalente, celle
due à la vaporisation agit comme un puits de chaleur dans une zone où la pyrolyse n’a pas
encore débuté, tandis que celle due à la pyrolyse modifie le bilan thermique dans la zone où la
pyrolyse se produit (donc ailleurs, et plus tard). A nouveau, les effets spatio-temporels attendus
sont différents et il est imprudent de l’ignorer. Par exemple, la figure IV.26 montre que le second
pic de MLR n’est pas seulement déplacé, mais change de forme (plus élevé et moins étalé), ce
qui ne se produisait pas quand la teneur en eau était divisée par 2 (figure IV.25). Ceci confirme
qu’on a à faire dans le second cas à un simple délai, dû à un retard de conditions locales sous
l’influence d’une cause d’origine distante et sans couplage direct, tandis que dans le second cas
la réponse est différente aussi dans sa forme, du fait du couplage entre l’effet perturbateur et
son résultat.
4.3.3 Perméabilité
La perméabilité du bois et de ses états dégradés est un des paramètres les plus mal connus.
Nous examinons ici l’influence d’un changement du pamarètre K0 (voir éq. II.36), en le multi-
pliant ou en le divisant par un facteur 10. Les résultats sont présentés dans la figure IV.27.
Il apparaît que ces changements n’ont aucune influence sur les courbes de perte de masse et
de MLR en fonction du temps. En revanche, ils se répercutent sur la pression des gaz, présentée
en fonction du temps au centre de l’échantillon, durant la période d’émission la plus intense de
gaz de pyrolyse. La valeur maximale d’environ 3 bars obtenue dans le cas de base est remplacée
par 1.5 bar (forte perméabilité) ou 9 bars (faible perméabilité).
a b c
Figure IV.27 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec des valeurs de K0 égalesà 2 10−16 m2 (vert), 2 10−15 m2 (bleu) et 2 10−14 m2 (rouge) et données expérimentales ([6], noir). PressionP (L/2) [bars] au centre de l’échantillon (c).
133
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Cette absence d’effet sur le processus de dégradation peut expliquer l’hypothèse souvent faite
que les fortes surpressions n’existent pas en pratique. Ce sont pourtant elles qui provoquent la
projection de brandons dans un feu de bois, ou dans un autre contexte, qui contribuent (avec
le retrait dû à la déshydratation) au délitage de panneau de plâtre de protection au feu [106].
Si ses effets chimiques sont négligeables, la prise en compte de l’élévation de pression peut-être
importante concernant la dégradation et l’intégrité mécanique du matériau.
4.3.4 Conductivité thermique
Les résultats présentés dans la figure IV.28 ont été obtenus d’une part dans le cas de base ,
et d’autre part en doublant le coefficient λ de conductivité thermique effective obtenue par la
loi de mélange (II.34), quel que soit l’état de dégradation du matériau.
L’effet de ce paramètre est spectaculaire. On peut dire avec une assez bonne précision que
doubler λ accélère le processus par un facteur 2. La courbe qui représente la masse en fonction
de 2t est très proche de la courbe du cas de base. En accord avec ceci, les pics de la MLR
apparaissent à des temps deux fois moindres et sont deux fois plus élevés. En dehors de ces
homothéties, les courbes sont peu déformées.
Ceci s’explique assez facilement. En dehors d’un bref transitoire initial durant lequel la tem-
pérature à la surface de l’échantillon s’élève fortement, seule une faible partie du rayonnement
incident est absosrbé. La plus grande partie est ré-émise. La température de la surface s’écarte
peu de la température d’équilibre Teq = F 1/4c /σ, tant que le prélévement effectué par transfert
vers l’intérieur du matériau est faible en comparaison de Fc. On peut vérifier dans la figure
IV.19a que tous les termes d’échange sont beaucoup plus faibles que Fc. Par conséquent, et en
première approximation, l’énergie absorbée par le matériau est directement proportionnelle à
λ puisque ce prélèvement affecte peu la température de surface. De façon très globale, on peut
donc dire qu’un apport double d’énergie est ici disponible pour chauffer le milieu et soutenir la
pyrolyse. Ainsi, ces deux processus se déroulent deux fois plus vite.
Ce raisonnement a pourtant ses limites, du fait d’une part de la non-linéarité des lois ci-
nétiques et d’autre part de la non simultanéité des processus. Un exemple en est fourni par le
comportement aux temps courts (voir figure IV.28). La perte de masse est en fait plus lente à
démarrer quand λ est doublé. Puisque la capacité calorifique n’a pas été modifiée, la diffusivité
thermique est également doublée. Ceci implique que la chaleur pénètre plus rapidement dans
le matériau, étalant le profil de température et ralentissant son élévation. La quantité d’énergie
absorbée sous forme de chaleur sensible est bien supérieure, mais la température s’élève moins
vite et atteint en un temps plus long le seuil nécessaire au déclenchement de la pyrolyse. En
134
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
a b
Figure IV.28 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations dans le cas de base (bleu) eten doublant la conductivité thermique λ (rouge) et données expérimentales ([6], noir). La courbe pointillésen (a) est la masse tracée en fonction de 2t.
revanche, quand le profil de température ne varie plus que lentement et que ce seuil est atteint
partout, l’énergie disponible pour soutenir la pyrolyse est effectivement double et le taux de
conversion peut doubler 2. Nous avons là un nouvel exemple de la prudence nécessaire quand
les limitations par les transports interagissent avec les processus réactifs.
D’autre part, le doublement de λ quel que soit l’état de dégradation est un test simpliste,
suffisant pour illustrer que des effets très forts sont possibles, mais peu représentatifs du type
d’incertitude associée aux données. Pour d’évidentes raisons métrologiques, la conductivité du
bois intact est plus facilement accessible que celle de ses états dégradés et on peut facilement
imaginer que les erreurs commises dans nos estimations ne consistent pas en un facteur constant.
4.3.5 Diffusivité
Un test similaire au précedent a été effectué concernant la diffusivité D du milieu poreux,
en doublant sa valeur par rapport au cas de base. Sans surprise, les résultats dans la figure
IV.29 montrent que cela n’a pas d’influence sur la phase de séchage et de pyrolyse. Dans ce
régimen aucun apport de réactif n’est nécessaire et les produits sont évacuées essentiellement
par convection.
De façon plus surprenante, l’effet est également très faible dans la phase ultérieure de com-
bustion, alors que ce processus est limité par les apports diffusifs d’oxygène. Une partie de
2. On peut cependant avoir des différences selon la position et le temps dans les états d’avancement desdiverses étapes de la pyrolyse selon que λ est doublé ou non. Comme dans notre modèle, la chaleur de réactiona été répartie au prorata des pertes de masse, cela ne fait pas de différence dans un bilan global énergie/pertede masse. Mais ce serait le cas si une autre répartition existait.
135
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b
c d
Figure IV.29 – Réponse en perte de masse (a,c) et MLR (b,d) des simulations dans le cas de base (bleu)et en doublant la diffusivité D (rouge) et données expérimentales ([6], noir).
l’explication peut résider dans un mécanisme auto-limitant de la diffusion à contre-courant.
L’oxygène doit migrer pour parvenir au site de réaction depuis la surface exposée à contre-
courant du flux de CO2 qui est produit. Si on doublait l’apport d’oxygène, ce flux de CO2
doublerait aussi, rendant de ce fait la rétro-diffusion de l’oxygène plus difficile. Il est donc cer-
tain que le doublement de D ne peut pas conduire à un doublement du taux de combustion,
mais il n’est pas sûr que cela justifie la faiblesse de l’effet observé ici. Un examen plus poussé
de cette question doit étre conduit pour s’en assurer.
Par ailleurs, l’évolution du pas de temps numérique au cours de la simulation dans cette
variante est comparée dans la figure IV.30 à celle dans le cas de base. Rappelons que dans le
cas de base, le pas de temps adaptatif prend une valeur faible durant la phase de combustion
du solide, alors qu’on s’attendrait à ce qu’il soit plus grand que durant la phase plus complexe
de pyrolyse. Ce comportement était considéré comme décevant et inexpliqué (voir la discussion
en Section 4.1 du Chapitre III). Quand D est doublé, la décroissance du pas de temps adaptatif
136
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
Figure IV.30 – Evolution du pas de temps au cours d’une simulation avec un échantillon de contreplaquéM1 soumis à un flux de 40 kW/m2 en fonction du temps t [s], dans le cas de base (en rouge, cf. fig. III.3)et en doublant la diffusivité (en bleu).
ne se produit pas, et il augmente même très fortement au delà de t =8000s. Les perturbations
de δt à intervalles réguliers dans la plage t =2000∼8000s et dans une moindre mesure au delà
de t =8000s correspondent à la progression du front de combustion d’un élément de volume au
suivant dans le maillage. La brusque augmentation de δt à t =8000s correspond au moment
où l’oxygène qui réinvestit les pores de l’échantillon atteint x = L. Sans expliquer précisément
les mécanismes qui font que la gestion du pas de temps est bien plus efficace dans la situation
présente, la figure IV.30 montre qu’un gain significatif de performance est possible et donne
des pistes pour y parvenir en identifiant certains événements qui jouent un rôle important à ce
point de vue.
137
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
4.4 Influence de la configuration et du scénario d’exposition
4.4.1 Fraction de la puissance de la flamme ré-émise vers la surface exposée
Dans le cas de base, il a été supposé qu’une fraction 1/3 de la puissance thermique dégagée
par la combustion des GF dans une flamme proche de la paroi revenait vers la surface de
l’échantillon sous forme de rayonnement (la fraction restant étant évacuée par convection par les
gaz produits et par rayonnement dans la direction opposée). Cette valeur n’est pas déraisonnable
mais partiellement arbitraire et peut dépendre de nombreux facteurs liés à l’environnement,
parmi lesquels les conditions de l’écoulement extérieur. Nous examinons avec la figure IV.31
l’effet d’une modification de cette fraction, portée ici à 1/2.
Comme on peut s’y attendre, cette modification n’a d’effet que durant la période où une
flamme existe, c’est-à-dire pour t ≤ 800 s (voir figure IV.19b). L’effet est globalement similaire à
ceux observés précédemment, dans des tests portant sur des paramètres qui entrent en jeu dans
le bilan énergétique, tels que la teneur initiale en eau (figure IV.25) ou la chaleur des réactions
de pyrolyse (figure IV.26). On observe notamment un décalage du second pic de pyrolyse de
MLR très semblable à celui causé par une réduction de l’humidité initiale.
Il ne faut toutefois pas exagérer l’importance du rayonnement reçu de la flamme, même s’il
peut être très intense. Il cause une élévation de la température de surface exposée, et le flux
radiatif émis par celle-ci s’en trouve immédiatement considérablement augmenté. Nous avons
montré dans la figure IV.19b que l’évolution du flux émis suit et compense en majeure partie
l’évolution de la puissance recue de la flamme.
a b
Figure IV.31 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations dans le cas de base où 1/3de la puissance de la flamme est rétro-émis vers l’échantillon (bleu) et d’un cas où cette fraction vaut 1/2(rouge) et données expérimentales ([6], noir).
138
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
4.4.2 Influence des conditions en face arrière
Les simulations présentées dans la figure IV.32 correspondent à des conditions différentes
en face arrière. Dans le cas de base, l’écoulement du gaz (et la convection de chaleur par les
gaz chauds) se fait librement, mais les échanges thermiques par conduction sont proscrits. Ce
cas est désigné par ”adiabatique/perméable”. Il correspond à un type de porte-échantillon où
une isolation thermique est assurée en face arrière par une couche de laine de roche, mais
sans étanchéité au gaz. Dans une premiere variante, ”adiabatique/imperméable”, on proscrit
également l’écoulement du gaz. Aucun flux ne traverse donc la face à x = L. Dans un seconde
variante, ”conducteur/perméable”, l’échantillon est en contact avec un matériau très conducteur
de chaleur, comme dans un autre type de dispositif expérimental où il repose sur une plaque
d’aluminium.
Il apparaît qu’autoriser ou non l’écoulement des gaz a une influence, encore une fois assez
similaire à celle de la teneur initiale en eau (figure IV.25) ou d’autre variante jouant sur le bilan
énergétique. Avec une face arrière imperméable, le second pic de MLR survient un peu plus
tard et il est plus étalé dans le temps que quand le gaz peut s’échapper.
Ce constat semble a priori très paradoxal. Nous avons montré (figure IV.19a) que les gaz
sortant à l’arrière du matériau convectent de la chaleur, ce qui représente un flux loin d’être
négligeable. Il est en fait le plus important dans la période du second pic de MLR. Malgré tout,
la dégradation est plus rapide quand de telles pertes thermiques sont possibles.
a b
Figure IV.32 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec diverses conditionsà la face arrière : adiabatique/perméable (bleu), adiabatique/imperméable (rouge), conducteur/perméable(vert) et données expérimentales ([6], noir).
139
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
La raison en est que si les gaz de pyrolyse ne peuvent pas s’échapper en face arrière, il
doivent le faire en face avant. Il en résulte une convection thermique à rebours de l’arrivée
de la chaleur provenant de la surface exposée. Les gaz expulsés vers l’avant font obstacle à sa
pénétration et le processus en est globalement ralenti.
Toutefois, la levée de la condition d’adiabaticité en face arrière a un effet bien plus spec-
taculaire, en gommant complètement le second pic de MLR. Dans un cas avec fond isolant,
ce pic provient de l’accumulation de chaleur, de la montée de temperature qui en résulte, et
du déclenchement massif de la pyrolyse sur une zone étendue. Si le fond est conducteur, il n’y
a pas cette accumulation, la température s’élève beaucoup plus lentement et la pyrolyse ne
déclenche pas d’un coup dans toute une zone 3. Ce comportement est connu, et nos résultats
sont en accord sur ce point avec ceux de ([13], Section 4.13).
Un autre effet du type de condition en face arrière, de nature différente, est illustré IV.33.
Dans le premier cas (figure IV.33a), la face arrière est du type ”adiabatique/imperméable” et
on suppose que le flux radiatif en provenance du cône calorimètre est interrompu à t=300 s.
Le profil de température à t=200 s montre une température de surface d’environ 650°C et une
décroissance jusqu’à 60°C en face arière. Les profils à des temps ultérieurs, t=400, 600 et 1000s,
montrent une décroissance rapide de T . La faible épaisseur de la zone chaude et productrice
de GF au moment de l’exctinction du cône n’était pas suffisante pour entretenir une flamme
conséquente et le processus s’arrète.
a b b
Figure IV.33 – Profils de température en fonction de la profondeur, à des instants successifs, pour uneface arrière ”adiabatique/imperméable” avec extinction du cône à t= 300 s (a), ”adiabatique/perméable”avec extinction du cône à t= 700 s (b), et ”adiabatique/imperméable” avec extinction du cône à t= 700 s(c).
3. Selon les conditions, on pourrait même faire en sorte que le seuil de déclenchement ne soit jamais atteint,si les pertes themiques sont assez importantes
140
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
Dans le second cas, (figure IV.33b), la face arrière est du type ”adiabatique/perméable”
et l’extinction du cône calorimètre est plus tardive, à t=700 s. A cet instant, la température
vaut 700°C en face avant, 250°C en face arrière, et de façon générale est plus élevée dans toute
l’épaisseur que lors de l’extinction du cône dans le cas précédent. La production de GF est
donc bien supérieure. L’énergie rayonnée par la flamme peut ralentir le refroidissement, mais
l’extinction finit tout de même par se produire.
Dans le troisième cas, (figure IV.33c), la face arrière est à nouveau du type ”adiaba-
tique/imperméable” et l’extinction du cône calorimètre survient au même moment que pré-
cédemment, à t=700 s. Le profil de température à ce moment est semblable à celui de la figure
IV.33b, et l’émission de GF est donc également identique. On observe pourtant une décrois-
sance bien plus lente de la température après extinction du cône. Elle dépasse encore 500°C en
surface à t=800 s. Elle décroit ensuite encore, mais on observe ici qu’elle finit par remonter.
L’émission de GF était suffisante pour entretenir une flamme assez puissante, capable d’assurer
l’auto-entretien du processus.
La différence entre les deux derniers cas, partant d’une situation à t =700 similaire, tient à
l’écoulement du gaz en face arrière. Dans le cas ”adiabatique/perméable”, on note dans la figure
IV.18 qu’à t ≥700 s, la plus grande partie des gaz de pyrolyse combustibles s’échappe en face
arrière. La même quantité de GF est produite dans les deux cas, mais la majorité est perdue
pour la flamme quand le fond est perméable. Ceci montre que l’étanchéité du fond, qui n’avait
que peu d’influence quand le cône calorimètre assure l’apport d’énergie (figure IV.32) devient
cruciale quand la puissance de la flamme n’est plus un apport marginal et que le processus doit
s’auto-entretenir
4.4.3 Puissance du flux radiatif incident
La figure IV.34 compare des résultats obtenus avec des flux de chaleur différents. Le cône
calorimètre est supposé délivrer un flux Fc de 20, 40 ou 60 kW/m2 (la valeur intermédiaire
correspond au cas de base).
Les courbes de perte de masse se décalent de façon globale, avec une dégradation d’autant
plus rapide que l’exposition est importante. Ceci est normal et rappelle le comportement observé
dans la figure IV.28. D’une certaine manière, il s’agit du même phénomène, c’est-a-dire dans
les deux cas de différences d’apport énergétique, même si la raison en est différente. Toutefois,
l’amplitude de l’effet est plus modeste. La raison en est que l’augmentation de Fc de 40 à 60
kW/m2 (+50%) n’augmente pas la chaleur apportée au matériau dans les mêmes proportions.
Il suffit que sa température en surface s’élève de 10% pour que le flux radiatif émis vienne
141
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b
Figure IV.34 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b) des simulations avec une exposition de 20(vert), 40 (bleu) ou 60 (rouge) kW/m2.
compenser l’augmentation du flux incident. Inversement, quand Fc est divisé par 2, il suffit que la
température en surface baisse de 20% pour rétablir l’équilibre radiatif. Dans nos simulations, le
matériau est considéré comme opaque. Le flux radiatif n’est pas supposé pénétrer au delà d’une
profondeur très faible et les transferts vers l’intérieur de l’échantillon se font principalement par
conduction, c’est à dire qu’il varient directement comme la température de surface. On peut
noter, plus à titre d’illustration que de résultat quantitatif, que la courbe du cas de base dans
la figure IV.34a ramenée en fonction de 0.90 t ou de 1.20 t approche assez bien les deux autres
courbes.
Les courbes pour la MLR de la figure IV.34b présentent des caractéristiques qui découlent
des observations ci-dessus, avec un décalage (d’environ -10% et +20%) de la position du second
pic. En revanche, on note un comportement assez accidenté de la MLR pour la puissance
d’irradiation 20 kW/m2. La cause n’en est pas entièrement élucidée, mais il est possible qu’un
effet de discrétisation spatiale intervienne.
4.4.4 Epaisseur de l’échantillon
Nous considérons ici une variante simple du cas de base, où l’épaisseur L de l’échantillon
varie, prenant les valeurs 6, 9, 18, 27 et 36 mm. Les résultats en termes de perte de masse
et de MLR sont présentés dans la figure IV.35. Comme des échelles de temps différentes sont
associés aux diverses épaisseurs, les résultats sont présentés séparément pour les plages de temps
différentes, t ≤1 000s, t ≤4 000s et t ≤40 000s, ce qui permet de visualiser plus clairement tous
les régimes.
Toutes les réponses présentent les caractéristiques habituelles, avec une inflexion dans la
142
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
M (t ≤ 1 000s) MLR (t ≤ 1 000s)
M (t ≤ 4 000s) MLR (t ≤ 4 000s)
M (t ≤ 40 000s) MLR (t ≤ 40 000s)
Figure IV.35 – Réponse en perte de masse (à gauche) et MLR (à droite), en fonction du temps (s),pour des épaisseurs L = 6, 9, 18, 27 et 36 mm. Les lignes correspondent à des plages de temps croissantes.
143
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
(a) L × (1 − M) vs. t (b) L × MLR vs. t
(c) M vs. t/L2 (d) L2 × MLR vs. t/L2
(e) M vs. t/L (f) L × MLR vs. t/L
Figure IV.36 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b), en fonction du temps (s), pour des épaisseursL = 6, 9, 18, 27 et 36 mm. Les données de la figure IV.35 sont renormées de façon différentes suivant lesplages de temps.
144
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
courbe de perte de masse et donc un second pic de MLR, puis une partie finale où la com-
bustion s’opère à au taux global approximativement constant jusqu’à consummation complète.
Toutefois, les différents événements se déroulent à des instants ou sur des plages de temps
très variables suivant l’épaisseur de l’échantillon, et leurs amplitudes sont également diverses.
Quelques arguments simples peuvent être avancés pour rationaliser cette diversité.
Notons en premier lieu qu’aux temps très courts, la dégradation n’intéresse qu’une zone
superficielle et l’échantillon est perçu dans tous les cas comme d’épaisseur infinie. Sa perte de
masse (absolue) est donc une fonction du temps, en principe indépendante de L. Si l’on note
M la masse courante normée par la masse initiale, qui est proportionnelle à L, la perte de
masse absolue est proportionnelle à L × (1 − M). Cette quantité est tracée aux temps courts
dans la figure IV.36a. Cette représentation unifie les résultats avec un grand succés. Toutes les
courbes sont superposées, à l’exception de celle pour L=6 mm qui s’en s’écarte un peu, mais
sans commune mesure avec la dispersion observée dans la figure IV.35a. Du reste, la définition
des ”temps très courts” est sans doute à prendre avec précaution pour un échantillon aussi fin,
puisque qu’il a déjà perdu 20% de sa masse à t =40 s. Ceci suggère qu’il n’apparaît déjà plus
comme un milieu infini.
Le même argument conduit à penser que L×MLR est une fonction du temps indépendante
de L dans cette plage de temps, ce que confirme clairement la figure IV.36b. A nouveau, toutes
les courbes sont superposées à l’exception de celle pour L =6 mm qui diffère un peu.
Dans un second temps, l’onde thermique atteint la face arrière et le caractère fini de l’échan-
tillon commence à être perçu. Toute cette épaisseur est intéressée si ce n’est encore par les
réactions chimiques, du moins par les effets thermiques. Comme le chauffage et l’évolution du
profil de température repose sur la conduction, il est naturel de penser qu’une échelle de temps
caractéristique existe, et qu’elle est proportionnelle à L2/DT , où DT est une diffusivité ther-
mique. On s’attend donc à ce que la perte de masse relative soit une fonction de t/L2. La figure
IV.36c présente les données en ces termes, pour la plage de temps intermédiaire. A nouveau,
un saisissant regroupement des courbes qui étaient très dispersées dans la figure IV.35c est
observé ici. Toutes les courbes suivent une évolution parallèle, avec un léger décalage temporel.
Dans ce cadre, la MLR doit se comporter de manière à ce que L2 × MLR soit une fonction
du temps t/L2, ce que confirme la figure IV.36d. Les courbes sont là encore regroupées et de
mêmes formes, avec un petit décalage en temps.
Ce décalage provient du changement de régime entre les temps courts et les temps intermé-
diaires. M(t) est l’intégrale de la MLR depuis le temps t =0. Quand on trace en fontion de t/L2
l’intégrale d’une fonction qui dépend non pas de t/L2 mais de t/L sur la première partie de
145
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
l’intervalle d’intégration, il en résulte un offset qui dépend de L. Toutefois, comme la transition
se produit à un moment où la perte de masse relative est encore très faible (dans une moindre
mesure pour L=6 mm), le décalage reste très modéré.
Enfin, dans la phase finale, le taux de combustion est à peu près constant. Comme on l’a
déjà discuté (p. 123) et comme l’illustrent les figures IV.14 et IV.15, un front de combustion
se propage dans ce régime, à l’interface entre un milieu dorénavant découvert et une couche de
charbon. Le taux de réaction est contrôlé par les apports d’oxygéne en face avant et le profil de
température est approximativement uniforme dans le solide. Nous retombons dans la situation
des temps très courts, où l’épaisseur L ne joue plus de rôle. On s’attend à ce que la masse
absolue soit une fonction de t, et donc à ce que M soit une fonction de t/L. Le succès de cet
argument est illustré dans les figures IV.36e,f. Les courbes très dispersées des figures IV.35e,f
sont encore une fois regroupées de façon spectaculaire. Le même petit décalalge en temps que
précédemment existe. Il resulte de la même raison, liée aux changements de régimes, et reste
très modéré. Notons que dans la mesure où la MLR est approximativement constante durant
la phase de combustion, les courbes de la figure IV.36f auraient aussi bien pû être tracées en
fonction de t. Toutefois, l’usage de t/L à l’avantage de regrouper également la durée totale, où
toute l’épaisseur est consumée.
Nous disposons donc d’un modèle descriptif, physiquement justifié, qui décrit la perte de
masse d’une plaque d’épaisseur arbitraire, selon trois fonctions du temps au cours de trois phases
successives. Il serait possible de pousser l’analyse plus loin, en quantifiant par exemple l’échelle
de temps L2/DT et en exprimant tous les résultats en fonction d’un temps adimensionnel
basée sur cette caractéristique du matériau. Toutefois, l’estimation même de DT n’est pas
une évidence, puisque le transport conductif de chaleur est perturbé par la convection et par
les processus chimiques. En outre, un utilisateur confronté à un autre matériau ne serait pas
forcément à même de connaître sa valeur dans ce cas. De la même facon, la vitesse du front de
combustion peut dépendre des conditions extérieures et n’être pas transposable d’une situation
à une autre.
En revanche, les lois énoncées ci-dessus sans faire référence à ces quantités sont transpo-
sables, pour un même matériau et dans des conditions identiques, à des pièces d’épaisseurs
différentes. D’un point de vue pratique, on peut donc en déduire à partir d’un essai pour une
épaisseur donnée le comportement attendu pour une épaisseur différente, avec une assez bonne
précision et sans besoin d’information complémentaire.
146
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
4.4.5 Un scénario d’exposition différent
Pour finir, une dernière variante est examinée ici, où un scénario d’exposition très différent
est appliqué. Au lieu de soumettre le matériau à un flux radiatif imposé, ne condition de
température est appliquée à sa surface. Dans la pratique, cette condition s’inspire de celle
appliquée en ATG, avec une rampe de 30 K/mn, à partir d’une condition initale à 300 K.
On suppose aussi que le gaz environnant a la composition de l’air. Aucun flux radiatif n’est
pris en compte (ou de façon équivalente, l’équilibre radiatif est supposé entre la surface et
l’environnement) et les gaz de pyrolyse GF ne brûlent pas. La face arrière est considérée comme
adiabatique et imperméable. Elle peut par exemple correspondre au plan médian d’une plaque
d’épaisseur totale 2L, exposée aux mêmes conditions de part et d’autre. Tous les flux s’y
annulent donc, par symétrie.
Selon la taille de l’échantillon, la réponse devrait se rapprocher de celle de l’ATG (pour de
petites tailles), où s’en éloigner pour des pièces plus massives. L’examen de cet aspect constitue
un test de la taille requise pour un essai ATG fiable 4, et de la façon dont on s’en écarte si
l’échantillon est trop épais.
Les pertes de masse et MLR obtenues pour des tailles L= 0.5, 1, 2, 3, 4, 6, 9 et 18 mm
sont présentées dans la figure IV.37. Pour la lisibilité, les MLR sont aussi présentées en deux
vues séparées, pour les petites et grandes tailles. Noter que les simulations ont été conduites
en adaptant le maillage à l’épaisseur considérée, avec δx= 0.1 mm quand L ≤ 4 mm, δx= 0.3
mm quand L = 6 ou 9 mm, et δx= 0.6 mm quand L = 18 mm.
Il apparaît que la réponse pour la plus petite taille est effectivement très proche de celle
obtenue en conditions ATG, qui correspondrait à la limite L → 0. Celle pour L=1 mm en est
aussi assez proche, mais présente un écart perceptible dans la plage t=750∼1000 s, du fait du
déclenchement très brusque d’une réaction d’oxydation, qui donne lieu à un petit pic aigu de
la MLR.
Pour les dimensions supérieures, le comportement devient notablement différent. Pour L=2,
3 et 4 mm, la perte de masse est plus rapide qu’en condition ATG. Ceci résulte aussi essentiel-
lement d’un déclenchement subit et très important de l’oxydation. Durant la phase de pyrolyse,
les réponses sont très semblables pour tous les L ≤ 4mm. A l’inverse, la perte de masse (rela-
tive) est plus lente pour les tailles L ≥6 mm. Ceci intervient dès la phase de pyrolyse, ce qui est
naturel puisque le chauffage de l’intérieur de l’échantillon est différé et se poursuit également
dans la phase de combustion, malgré un déclenchement subit et intense de l’oxydation mais
4. En supposant que l’appareil ATG soit capable de maintenir les conditions de température et de compositiondes gaz à la surface du solide.
147
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
a b
c b
Figure IV.37 – Réponse en perte de masse (a) et MLR (b,c,d) en fonction du temps (s) des simulationsavec L= 0.5, 1, 2, 3, 4, 6, 9 et 18 mm. La courbe en pointillés rouges en (c) correspond à la réponse enconditions parfaites d’ATG.
après un temps plus long.
Il est difficile d’expliquer ces comportements irréguliers. L’examen de certaines quantités
présentées dans les figures IV.38 et IV.39 peut y aider. Y sont tracées, en fonction du temps et
pour chaque valeur de L, la température et la fraction massique d’oxygène aux positions x=0,
L/2 et L. Afin de détecter les périodes où chacune des réactions se déroule, leur bilan thermique
E [kW/m2], endothermique pour le séchage et la pyrolyse et exothermique pour l’oxydation,
comptabilisé globalement pour toutes les étapes de pyrolyse et d’oxydation, est aussi présenté.
Considérons en premier lieu la température. Elle suit fidèlement la consigne extérieure pour
L=0.5 mm, mais l’excède d’environ 100°C quand L=1 mm au moment où l’oxydation commence
au point considéré. Noter que ce point se trouve à ce moment à la surface réelle de l’échantillon,
148
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
T , L=0.5 mm Y02, L=0.5 mm E, L=0.5 mm
T , L=1 mm Y02, L=1 mm E, L=1 mm
T , L=2 mm Y02, L=2 mm E, L=2 mm
T , L=3 mm Y02, L=3 mm E, L=3 mm
Figure IV.38 – Température T [K], fraction massique d’oxygène Y02et énergie E [kW/m2] libé-
rée/absorbée par les réactions, en fonction du temps (s), en trois positions (x= 0, L/2 et L).
149
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
T , L=4 mm Y02, L=4 mm E, L=4 mm
T , L=6 mm Y02, L=6 mm E, L=6 mm
T , L=9 mm Y02, L=9 mm E, L=9 mm
T , L=18 mm Y02, L=18 mm E, L=18 mm
Figure IV.39 – Température T [K], fraction massique d’oxygène Y02et énergie E [kW/m2] libé-
rée/absorbée par les réactions, en fonction du temps (s), en trois positions (x= 0, L/2 et L).
150
IV.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
puisque la zone amont a été entièrement consummée. Le même phénomène persiste et s’amplifie
fortement pour les valeurs de L jusqu’à 4 mm, où un léger retard de la température dans le
matériau par rapport à la consigne extérieure commence à être perceptible. Pour L encore plus
grand, l’échantillon devient thermiquement très épais et le délai de chauffage est de plus en plus
important. Ceci explique le retard de la perte de masse par rapport à l’ATG et de l’oxydation
qui lui succède.
Le comportement vis-à-vis de la pyrolyse est donc naturel, avec une déviation (retard) du
comportement en ATG quand L atteint 4 mm, où l’uniformité de la température n’est plus
assurée. Noter que ce seuil dépend de la rampe thermique et que la déviation apparaîtrait pour
des tailles plus petites si la rampe de chauffage était plus importante, par exemple.
Le comportement du taux de combustion et notamment son déclenchement soudain et
intense ne font pas intervenir que des aspects thermiques, mais également les conditions prescites
pour le taux d’oxygène en surface.
L’évolution en temps de YO2 à x = L/2 et L est tracé dans les vues de la colonne centrale
des figures IV.38 et IV.39. Par hypothèse, YO2 en x=0 ne varie pas. En profondeur, des baisses
de teneur en oxygène sont observées avant que la combustion ne débute (t ≤ 500 s). Elles
sont causées par l’émission de la vapeur d’eau et des gaz de pyrolyse, qui tend à chasser O2
vers l’extérieur. Toutefois, à l’inverse du cas de base où la présence d’une flamme faisait que
l’oxygène était absent à la surface exposée, sa concentration à l’extérieur est ici à la valeur
standard et il peut donc se maintenir dans le matériau par rétro-diffusion.
YO2 s’annule ensuite (pour tous les L ≥ 2 mm) quand le front de la première étape d’oxy-
dation atteint la position concernée (considérons par exemple les courbes en rouge, qui corres-
pondent à x = L/2), ce qui signifie que le taux de réaction est limité par les apports d’O2. La
contradiction avec l’hypothèse qu’une concentration constante en oxygène est supposée dans
le milieu extérieur et jusqu’à la surface n’est qu’apparente. La réaction n’est pas surfacique,
mais se produit dans le volume du matériau 5 et des limitations à sa diffusion depuis la surface,
même très proche, existent donc bien. Ce sont elles qui déterminent la vitesse approximative-
ment constante de progression de ce front, déjà discutée par exemple dans la Section 4.4.4.
Quand le front de la première étape d’oxydation a dépassé la position observée (L/2), YO2
réaugmente. La combustion n’est pas achevée, mais l’état S7 du solide présente une diffusivité
très importante et YO2 s’annule un peu plus en profondeur. Une deuxième baisse, plus modérée,
5. Du moins à l’échelle de Darcy considérée. L’oxydation est effectivement une réaction surfacique à la micro-échelle, se déroulant à la surface du solide dans le milieu micro-poreux. Mais dans la description homogénéiséeprésente, et aussi bien de façon apparente pour un observateur dépourvu de microscope, ce qui se déroule à lasurface des micropores se comporte comme un effet volumique dans un milieu continu apparent.
151
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
est observée lors du passage du front de la seconde étape d’oxydation. Une fois que celui-ci est
passé, la position considérée se retrouve à découvert et YO2 reprend sa valeur standard.
Les courbes pour la puissance globale émise par la combustion (colonne de droite des figures
IV.38 et IV.39), ont un aspect très différent de celles lors d’essais sous cône calorimètre, par
exemple figure IV.19c. En premier lieu, elles démarrent par un pic très aigü, qui correspond à
celui de la MLR à cet instant et qui n’existe pas dans l’essai sous cône. Ceci résulte directement
de la condition d’oxygénation imposée en surface. Dans l’essai sous cône, la figure IV.17a montre
clairement que l’émission de GC débute très progressivement, dans une période où la production
de GF s’amenuise et finalement cesse. C’est ce dernier évènement qui diminue la consommation
d’O2 dans la flamme, lui permet d’atteindre la surface en quantité croissante et autorise le
début progressif de la combustion du solide. Dans le cas présent, YO2 est constant en x=0, et la
combustion peut démarrer brutalement quand la température requise est atteinte, même si la
pyrolyse est loin d’être terminée (voir le large recouvrement des plages de E pour la pyrolyse
et la combustion dans les figures IV.38 et IV.39).
La combustion se poursuit ensuite, avec un taux global qui passe par un minimum puis par
un second pic. Cette caractéristique est également absente lors des essais sous cône, du fait
de la consommation de l’oxygène par la flamme dans ce dernier cas. La combustion ne peut
pas démarrer en pratique tant que la pyrolyse n’est pas presque achevée, dans toute l’épaisseur
du matériau. En attendant cette circonstance, la température du matériau s’élève et quand
O2 devient disponible, elle est à un niveau suffisant pour que les deux étapes d’oxydation se
déclenchent, à peu près simultanément. Dans la situation présente, ce délai n’existe pas. Chaque
étape d’oxydation déclenche au moment (fixé par la rampe thermique) où la température requise
est atteinte, c’est à dire avec un décalage temporel.
On peut douter de la possibilité pratique d’assurer une oxygénation constante quand de
tels taux de réaction existent et donc du réalisme de ce type de condition à la surface de
l’échantillon. C’est pourtant l’hypothèse qui est faite dans une expérience d’ATG sous air. Il
est probable qu’en réalité, quand un fort pic de demande en oxygène survient, sa concentra-
tion à la surface baisse provisoirement dans une certaine mesure, du fait de la limitation des
apports depuis le milieu environnant. Le pic de réaction s’en trouverait alors lissé, avec une
influence éventuellement considérable sur l’interprétation des données pour la détermination de
lois cinétiques.
152
IV.5 Discussion
5 Discussion
Nous avons présenté dans ce chapitre un ensemble important d’applications de notre modèle
numérique à la dégradation thermique et à la combustion du bois contreplaqué M1.
Dans un premier temps, les conditions de l’ATG ont été examinées, dans le but de valider
d’une part les outils numériques et d’autre part le modèle chimique. Une modification en a été
proposée, qui semble légérement mieux rendre compte des données expérimentales de l’ATG.
Ceci semblait un préliminaire souhaitable avant de passer à des applications plus complexes,
faisant intervenir les couplages avec les mécanismes de transport. A cette occasion, un modèle
simplifié minimaliste a aussi été formulé, à fin de comparaisons.
Un cas de base a été défini, avec un jeu complet de paramètres chimiques, physiques, et
opératoires correspondant à un essai en cône calorimètre. Les résultats acquis dans ce cadre
ont été décrits en détail, en commençant par un exposé complet des champs des variables
d’état locales et des principaux coefficients physiques, afin de bien cerner la phénoménologie
des processus. Dans le même cadre, des indicateurs plus globaux ont été présentés, qui se
rapprochent plus des résultats à produire en situation d’exploitation, et qui permettent une
comparaison avec des mesures expérimentales. Ces indicateurs sont pour l’essentiel des flux,
d’espèces chimiques et de chaleur, qui sont les quantités percues de l’extérieur sans avoir accès
à l’intérieur du matériau. Les comparaisons avec l’expérience ont pu se faire sur la base de la
perte de masse et de la MLR globale, ainsi que de quelques mesures de température.
La comparaison n’est pas quantitativement très précise mais raisonnable, et la typologie
des comportements est conforme aux observations les plus courantes. Par exemple, la présence
d’une inflexion de la perte de masse et l’existence d’un second pic de MLR lors de la dégradation
sont bien rendues, tout comme leur dépendance aux conditions en face arrière de l’échantillon.
Dans un second temps, un grand nombre de variantes a été exploré plus rapidement, afin
de tester l’influence de la multitude de paramètres qui peuvent déterminer les comportements
et influer quantitativement sur les résultats.
Un premier jeu de tests a porté sur des paramètres purement numériques, sans intérêt fon-
damental, mais d’une certaine importance pratique. En premier lieu parce qu’il fallait s’assurer
de leur adéquation, mais aussi parce qu’on a à cette occasion montré que d’importants gains
de performance sont possibles. Les calculs présentés ici ont été conduits avec des critères très
stricts, qui peuvent être grandement assouplis en situation d’exploitation.
Les résultats du test comparatif des trois variantes du modèle chimique sont intriguants. Il
s’avère que la version originelle, par certains aspects (position du second pic de la MLR), donne
des prédictions plutôt plus conformes à l’expérience en cône calorimètre que la version modifiée.
153
Chapitre IV. Application au bois contreplaqué M1
Il est difficile de savoir si ce meilleur accord ne résulte pas de la combinaison de multiples autres
facteurs, tant les sources potentielles d’erreurs sont nombreuses. Certaines tiennent éventuelle-
ment au modèle numérique, d’autres à l’incertitude sur les coefficients physiques associés aux
matériaux, et d’autres enfin à la connaissance insuffisante de certains aspects du dispositif expé-
rimental. C’est pour cette raison que le test des influences potentielles de tous ces facteurs revêt
une grande importance. Un autre point intriguant est la réponse quasi-identique des modèles
simplifié et complet dans l’essai en cône, alors que la réponse du modèle simplifié en condition
d’ATG est assez grossière. Il semble que lorsque les transports jouent un rôle limitant prépon-
dérant, le respect par le modèle chimique des conditions de stoechiométrie, du bilan thermique
et des plages de température réalistes soit suffisant pour une réponse globale correcte, sans
qu’une description très détaillée des étapes des processus soit indispensable.
Parmi les autres paramètres testés, n’ont pas d’influence notable, tels que la perméabilité
du matériau (hormis en ce qui concerne l’élévation de la pression) ou sa diffusivité.
Un second groupe de paramètres, qui ont tous trait au bilan thermique, fait montre d’une
influence notable. Certains parmi ceux-ci constituent des termes sources/puits de chaleur : la
teneur initiale en eau (qu’il faut vaporiser), la chaleur de réaction de pyrolyse, le taux de ré-
émission vers la surface de l’échantillon de la puissance dégagée par une flamme, ou la puissance
du rayonnement incident issu du cône calorimètre. Ils ont tous une influence observable mais
modérée, et ne modifient pas la typologie des résultats. La conductivité thermique est sans
doute le paramètre le plus important d’un point de vue quantitatif. Nous avons montré dans
un exemple (simpliste) que le taux global des réactions peut lui être quasiment proportionnel.
Enfin, les conditions thermiques en face arrière sont aussi un élément déterminant, avec cette
fois une influence sur la forme même de la courbe de perte de masse. Il semble donc que c’est
du côté des propriètés thermiques des matériaux, y compris dans leur état dégradé, qu’une
amélioration de la connaissance doit être recherchée en priorité.
Enfin, d’autres conditions opératoires ont été examinées. Outre celles liées à la puissance du
cône calorimètre ou de la flamme et des conditions en face arrière, déjà mentionnées, nous avons
examiné le devenir d’un échantillon quand l’exposition au rayonnement du cône est interrom-
pue, et illustré des conditions dans lesquelles un processus auto-entretenu peut se maintenir.
A cette occasion comme en d’autres auparavant, le modèle numérique a démontré sa capacité
à reproduire des comportements connus et à effectuer des prédictions phénoménologiquement
raisonnables dans d’autres situations. L’examen du cas d’échantillons épais soumis aux condi-
tions supposées être réalisées dans un essai ATG met en lumière des effets à prendre en compte
pour juger si ces conditions sont effectivement réalisées ou non dans les expériences. L’étude
de l’influence de l’épaisseur de l’échantillon est un succès tout particulier, puisqu’elle débouche
154
IV.5 Discussion
sur un modèle permettant de façon très pratique de transposer les résultats acquis avec une
certaine épaisseur à d’autres valeurs de celle-ci, sans nécessiter d’information complémentaire
et avec une bonne précision.
155
156
Chapitre V
Application au bois de sapin massif
1 Introduction
Nous présentons dans ce chapitre un jeu de résultats de simulations pour un autre matériau,
le bois de sapin massif. La trame adoptée dans le chapitre précédent est suivie. Toutefois, de
nombreux d’éléments étant identiques, ils ne sont pas systématiquement répétés.
Le modèle chimique élaboré par Batiot [2] pour décrire la dégradation thermique du sapin
est d’une nature différente de celle du modèle de Fateh [6] pour le bois contreplaqué. Ce dernier
rendait compte des événements successifs dans la courbe du taux de perte de masse en ATG
en considérant que le bois subissait des conversions entre des états successifs, par une série de
réactions séquentielles. Ces états ne prétendaient pas rendre compte précisément et univoque-
ment de la composition réelle du matériau dégradé. Nous les avons pourtant utilisés comme
des pseudo-espèces, pouvant toutes entrer dans la composition du matériau à un instant donné.
En attribuant des propriétés à chacune de ces pseudo-espèces, on pouvait à l’aide de règles de
mélange modéliser les proprietés du matériau en fonction de sa composition.
Le modèle de Batiot est basé sur une approche différente, qui s’appuie plus directement
sur la chimie. Le bois sec n’est plus un simple état ”S2”. On prend en compte le fait qu’il est
composé de plusieurs constituants assez bien connus, la cellulose, la lignine et l’hémicellulose.
Ces constituants subissent des dégradations, peuvent passer par l’état d’espèces intermédiaires
(α et β) avant d’être finalement réduits en charbon. Ils peuvent emprunter des chemins différents
pour y parvenir. Le schéma réactionnel est présenté dans la figure V.1.
Les états successifs S3 à S5 de Fateh correspondrait ainsi à des mélanges des espèces figurant
dans cette figure, en diverses proportions à divers stades de la dégradation. Cependant, il est
visible dans la figure V.1 que différents chemins sont possibles. La lignine peut par exemple
passer ou non par l’état α avant d’aboutir au charbon. On verra un peu plus que loin que
157
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
Figure V.1 – Schéma réactionnel proposé par Batiot [2] pour la dégradation du bois de sapin sousatmosphère inerte.
même la perte de masse dépend du chemin suivi. Par ailleurs, et on en donnera plus loin une
illustration, le chemin suivi peut dépendre des conditions opératoires. Les états S3 à S5 de Fateh
sont donc a priori associés à un type de scénario et peuvent éventuellement être remplacés par
d’autres dans des situations différentes.
Il ne fait donc pas de doute que l’approche de Batiot est supérieure d’un point de vue
théorique, en renforçant le caractère intrinsèque de la description. Ceci permet en principe de
rendre compte d’un spectre plus étendu de situations. Elle pose toutefois de nouvelles difficultés
d’application pratique. La nature un peu floue de ce que représentait Si chez Fateh & al. se
prêtait bien à l’usage de données, concernant par exemple la conductivité thermique, mesurées
sur un bois dans un état de dégradation caractérisée par la densité, sans plus de détails. Mais
comment prendre en compte le détail de la composition, s’il est mieux connu, pour déterminer
ce paramètre ?
La microstructure du bois et l’arrangement des trois constituants dans son état natif sont
illustrés dans la figure V.2. On observe un haut degré d’organisation et d’intrication entre les
trois espèces. Tenter de décrire la conductivité thermique de l’ensemble par une règle de mélange
à partir des conductivités des constituants, si même elles étaient connues ce qui n’est pas le
cas, ne fournirait au mieux qu’une grossière approximation. Nous n’avons donc pas à ce jour
de réponse à la question ci-dessus. La forme du modèle chimique de Batiot peut permettre une
description plus précise et robuste des processus réactionnels, et ceci bénéficie aux simulations.
En revanche, la meilleure connaissance du contenu chimique réel ne peut pas à ce stade être
exploitée pour améliorer la description des propriétés thermophysiques. Nous utilisons dans la
suite des modélisations du même type que dans le chapitre précédent, basées simplement sur
la densité instantanée du matériau.
158
V.2 Adaptation des modèles chimique et physique
Figure V.2 – Organisation de la cellulose, de l’hémicellulose et de la lignine dans le bois [107].
Ce chapitre est organisé suivant la même trame que le Chapitre IV concernant le bois
contreplaqué M1. Nous apportons dans un premier temps des compléments de description
du modèle, prenant en compte ses différences par rapport à celui de Fateh et les remarques
précédentes. On présente ensuite des résultats de simulation en conditions ATG pour s’assurer
de la bonne réponse du modèle dans la situation qui a servi à le calibrer. Un cas de base est
ensuite examiné en détail ainsi que quelques variantes. Un aspect supplémentaire qui n’avait
pas lieu d’être pour le contreplaqué est toutefois examiné ici concernant les chemins réactionnels
effectivement empruntés durant la dégradation.
2 Adaptation des modèles chimique et physique
Pour les mêmes raisons de commodité, les espèces présentes dans la figure V.1 ont été
rebaptisées S2 à S7. La correspondance est indiquée dans la figure. La dénomination S1 est
réservée pour désigner l’eau dans le cas où le matériau serait initialement humide. Ce n’est pas
le cas dans les expériences et dans les simulations que nous en faisons, mais une prise en compte
ne présenterait pas de difficulté. Si la combustion du charbon était prise en compte, on pourrait
avoir des espèces supplémentaires. Ce processus n’a pas été considéré par Batiot, qui ne l’a
donc pas inclus dans son schéma réactionnel. On pourrait simplement considérer d’appliquer
la description qu’en donne Fateh, par deux réactions d’oxydation successives avec les mêmes
paramètres. En ces termes, le schéma réactionnel de la dégradation du bois sous atmosphère
159
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
Réaction A Ea n ν ∆H[s−1] [kJ/mol]
[R2] (V.1a) 1 109 164 0.4 0.1 250 kJ/kg of S2
[R3] (V.1b) 1 108 122 1.9 0.8 55.31 kJ/kg of S2
[R4] (V.1c) 1 106 106 2 0.4 220.8 kJ/kg of S3
[R5] (V.1d) 1 108 116 3 0.5 250 kJ/kg of S3
[R6] (V.1e) 1 108 130 0.5 0.12 243.4 kJ/kg of S4
[R7] (V.1f) 1 109 124 1 0.6 131.6 kJ/kg of S5
[R8] (V.1g) 1 108 100 1 0.4 197.4 kJ/kg of S6
Tableau V.1 – Pré-facteur et énergie d’activation de la loi cinétique et coefficients stœchiométriquespour les réactions chimiques du modèle (V.1) [2]
inerte de la figure V.1 s’écrit donc [2]
[R2] S2 → ν2 S7 +(1 − ν2) gaz (V.1a)
[R3] S2 → ν3 S4 +(1 − ν3) gaz (V.1b)
[R4] S3 → ν4 S4 +(1 − ν4) gaz (V.1c)
[R5] S3 → ν5 S7 +(1 − ν5) gaz (V.1d)
[R6] S4 → ν6 S7 +(1 − ν6) gaz (V.1e)
[R7] S5 → ν7 S6 +(1 − ν7) gaz (V.1f)
[R8] S6 → ν8 S7 +(1 − ν8) gaz (V.1g)
Les paramètres cinétiques et les coefficients stœchiométriques associés sont regroupés dans la
table V.1. On notera que les ordres n peuvent être très différents de l’unité.
Les gaz émis par les réactions ne sont pas différenciés ici. Dans les calculs, on suppose qu’ils
sont tous identiques, composés en masses égales d’inertes GI et de combustibles GF , comme
pour le bois M1. Les simulations qui suivent concernent des essais sous cône calorimètre en
atmosphère inerte (N2). Les proportions et la composition des GF n’ont donc aucune incidence,
mais ces points devraient être clarifiés si la combustion des GF devait être prise en compte.
On peut en outre supposer que les gaz émis par les diverses réactions sont différents, si l’on
considère que la cellulose perd 90% de sa masse, l’hémicellulose 76% et la lignine seulement
50% lors de leur conversion en charbon, comme le montrent les coefficients stœchiométriques
des réactions R2, R5, R7 et R8 dans la table V.1.
Comme pour le bois contreplaqué M1, les chaleurs de réaction ne résultent pas d’une mesure.
La littérature n’est pas d’un grand secours d’un point de vue pratique, car les chaleurs de
160
V.2 Adaptation des modèles chimique et physique
réaction mentionnées pour la cellulose et la lignine prennent des valeurs extrêment dispersées,
parfois endothermiques et parfois exothermiques [108, 109]. Elles ont été estimées suivant le
même principe que pour le contreplaqué M1. La méthode décrite dans la Section 3.1 du Chapitre
IV a été utilisée avec une estimation à 250 kJ/kg de bois sec de la chaleur globale de pyrolyse,
et une répartition parmi les réactions au prorata de la perte de masse. Comme des chemins
réactionnels différents existent pour aller de S2 et S3 à S7, la solution n’est pas unique et les
valeurs de la table V.1 sont en partie arbitraires. Elles n’ont aucune prétention à une grande
précision, mais les simulations présentées dans la figure IV.26 ont montré que la chaleur de
pyrolyse a une influence notable mais pas extrême sur les résultats.
Comme pour le contreplaqué M1, la conductivité thermique est modélisée comme une simple
fonction de la densité apparente, sur la base des données de [97], pour des bois à différents stades
de pyrolyse, de l’état natif à l’état de charbon. En pratique, on utilise les valeurs de λ dans la
table IV.6 pour les états allant du bois intact au charbon et on en fait un ajustement polynomial
pour pouvoir ultérieurement calculer λ pour toute valeur de ρS. On procède de la même façon
pour la porosité totale, ce qui aboutit à
λ = 0.1293 − 0.0007ρS + 3 10−6ρ2S − 3 10−9ρ3
S (V.2a)
ǫM = 0.8825 + 0.0009ρS − 5 10−6ρ2S + 4 10−9ρ3
S (V.2b)
Nous appliquons toujours les équations constitutives et les paramètres effectifs donnés dans la
Section 2.4 du Chapitre II, à l’exception de la loi de mélange (II.34) qui est remplacée par
(V.2a). Enfin, nous conservons l’hypothèse que la porosité totale se décompose à parts approxi-
mativement égales en micro- et macroposité (voir la discussion dans la Section 2.2, Chapitre II).
L’ensemble de tous ces éléments permet d’associer à tout état dégradé les paramètres effectifs
dont nous avons besoin, sur la base de sa densité apparente.
La table V.2 reprend les autres paramètres de ce qui va constituer le cas de base. Elle est
pour sa plus grande partie identique à la table IV.7. Les différences y sont signalées en rouge.
Elles portent sur le flux radiatif, la composition de l’atmosphère ambiant et la composition
initiale du matériau. Tous les paramètres numériques (critères de convergence, discrétisation...
) sont pris identiques à ceux donnés dans la table IV.8.
161
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
Paramètres opératoiresL 18 mm Epaisseur de l’échantillonFc 50 kW/m2 Flux radiatif incident (cône)Fl 33% Flux radiatif incident
(fraction de la puissance de la flamme)Pa 1.01325 bar Pression ambianteXa 2 cm Distance à la veine d’air fraisYO2a RE 0 Oxygène dans l’air ambiantYN2a RE 1 Azote dans l’air ambiantTa 303.15 K Température ambianteP (x = L) = Pa Fond perméablehT b=0 Support isolant, cf. (II.43)Propriétés des constituantsρS,0 458 kg/m3 Densité du bois secρW,0 0 Contenu en eau initialρS2,0 42% ρS,0 Densité initiale de S2
ρS3,0 36% ρS,0 Densité initiale de S3
ρS5,0 22% ρS,0 Densité initiale de S5
K0 2 10−15m2 Perméabilité initiale, cf. (II.36)cp,e 4180 J/kg/K Capacité calorifique de l’eaucp,s 1500 J/kg/K Capacité calorifique des solides [97, 98]cp,g 1004 J/kg/K Capacité calorifique des gazµ0 1.71 10−5 kg/m/s Viscosité de référence, cf (II.31)Pr 0.72 Nombre de PrandtlLe 1 Nombre de Lewisǫr 0.9 Emissivité du solide [12]
Tableau V.2 – Paramètres opératoires et autres constantes physiques pour les simulations. Les modifi-cations par rapport à la table IV.7 sont signalées en rouge.
162
V.3 Simulations à l’échelle ATG
Figure V.3 – Porte-échantillon ”standard” et ”dural”.
Mentionnons pour finir que deux types de porte-échantillon ont été utilisés durant les ex-
périences en cône calorimètre, désigné par les termes ”standard” et ”dural”. Leurs coupes sché-
matiques sont présentées dans la figure V.3. Le premier correspond au cas de base présent et
est conforme à la norme ISO 5660. Fateh utilisait également un dispositif de ce type pour les
essais avec le bois contreplaqué M1. L’échantillon est placé dans un réceptacle en acier, posé
sur une épaisseur de laine de roche. Un cache est placé au dessus pour le maintenir pressé sur
l’isolant. L’ouverture de ce cache mesure 94×94 mm2. Il masque donc une partie de l’échantillon
qui mesure 100×100 mm2 et dont seulement 88% de la surface est directement exposée au flux
radiatif. Le second dispositif, ”dural”, consiste à placer simplement l’échantillon sur une plaque
épaisse de duralumin. La surface de l’échantillon est entièrement exposée, et aucune isolation
thermique n’est assurée en face arrière.
Aucun des deux dispositif n’assure d’étanchéité au gaz. Le porte-échantillon standard se
rapproche des conditions de type ”adiabatique/perméable” en face arrière, tandis que le porte-
échantillon dural est du type ”conducteur/perméable”. Le cas de base se réfère au premier et
certaines des variantes examinées ultérieurement se réfèrent au second.
3 Simulations à l’échelle ATG
Considérons en premier lieu les résultats des simulations qui ont été conduites à titre de
vérification en conditions ATG, dans la figure V.4.
Un excellent accord entre les résultats des calculs et les mesures expérimentales est observé
pour tous les rampes thermiques, de 10°C/mn à 50°C/mn.
163
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
M (%) vs. t(s)
[ 10°C/mn ]
MLR (%/s) vs. t(s)
M (%) vs. t(s)
[ 20°C/mn ]
MLR (%/s) vs. t(s)
M (%) vs. t(s)
[ 30°C/mn ]
MLR (%/s) vs. t(s)
M (%) vs. t(s)
[ 40°C/mn ]
MLR (%/s) vs. t(s)
M (%) vs. t(s)
[ 50°C/mn ]
MLR (%/s) vs. t(s)
Figure V.4 – Résultats des simulations basées sur le modèle chimique (V.1), avec les paramètres de latable V.1, en conditions ATG sous atmosphère inerte (N2), pour différentes rampes de température. Massenormalisée par la masse initiale (%), et taux de perte de masse (s−1), en fonction de la température (°C).Données expérimentales (en noir) et numériques (en rouge).
164
V.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
Figure V.5 – Codes de couleur pour les profils des concentrations des espèces condensées (a), de fractionsmassiques des espèces gazeuses (b) et des taux de réaction (c) dans les figures V.6 à V.10.
4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
4.1 Résultats locaux
Comme dans le chapitre précédent, nous commençons par un exposé détaillé de résultats
locaux. Ils font l’objet des figures V.6 à V.10, correspondant aux t=0, 300, 500, 700 et 1200 s.
On y présente l’évolution des profils des variables d’état et de certaines propriétés du système,
au cours du processus de dégradation. Les quantités considérées sont les mêmes que dans les
figures IV.10 à IV.16, et leur organisation est décrite par la figure IV.8. En outre, les codes de
couleurs utilisés pour les compositions du solide, du mélange gazeux et pour les taux de réaction
sont indiqués dans la figure V.5. Pour les autres quantités, la courbe en rouge correspond au
temps actuel. Les courbes en noir reprennent les profils aux instants précédents, pour faciliter
l’appréhension de l’évolution des profils. La phénoménologie a été longuement décrite dans la
Section 3.3 du Chapitre IV à propos du contreplaqué et la plupart des observations s’appliquent
de la même façon ici. Nous nous bornerons à signaler les différences.
La première, au temps t=0, concerne bien sûr la composition du gaz, qui ne comporte ici
que de l’azote et du solide. Celui-ci se compose de trois constituants et ne contient pas d’eau.
On observe ensuite dans les figures V.7 et V.8 (t=300 et 500 s), la propagation d’un front
de réaction où les espèces initiales sont converties soit directement en charbon, soit en une
des espèces intermédiaires S4 et S6 (α et β). Toutefois, la durée de vie de ces dernières est
très brève. Sitôt produites, elles sont dégradées en charbon quasiment instantanément 1. On
1. C’est cette circonstance qui a causé beaucoup de difficultés pour les simulations et demandé la mise enplace d’une implicitation plus poussée du schéma temporel.
165
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
distingue dans les figures une petite quantité de S4 (rouge) dans la zone de fort gradient de
composition, mais l’espèce S6 est invisible. Elle constitue pourtant un passage obligé, puisqu’il
n’y a qu’un chemin réactionnel de l’hémicellulose S5 au charbon S7, passant par S6. On observe
aussi une persistance de la lignine S3 bien après que les autres constituants initiaux aient
entièrement disparu.
Les gaz de pyrolyse GF et GI sont présents en quantités égales, ce qui est naturel puisque
GF ne réagit pas en l’absence d’oxygène. L’azote est en grande partie chassé par les gaz émis,
mais demeure présent sur toute la profondeur de l’échantillon.
Les taux de réaction présentent une figure plus complexe que dans la figure IV.11, par
exemple, puisque le modèle chimique comporte 7 réactions de pyrolyse concurrentielles, au lieu
des 4 réactions séquentielles du modèle (IV.2).
Pour le reste, les figures IV.11 et V.7 au même temps t=300 s sont assez semblables, avec
notamment des profils de température et de pression similaires.
Des différences notables apparaissent toutefois un peu plus tard, comme le montre la com-
paraison des figures IV.12 et V.9 pour t=700 s. Le sapin est dans un état de dégradation bien
plus avancé que le contreplaqué. Des composants initiaux, seule subsiste de la lignine dans la
partie arrière. La dégradation plus lente et répartie sur une plage étendue de température de
la lignine est en accord avec les comportements rapportés par [109]. Des réactions sont encore
actives dans cette région, comme en témoigne la pression qui se maintient à environ 2 bars à
x ≈12 mm, ainsi que le flux important de gaz émis qui s’échappe pour l’essentiel en face arrière.
Il est bien sûr tentant d’expliquer l’état de dégradation plus avancé observé ici par le flux
plus intense reçu par l’échantillon (50 kW/m2 au lieu de 40). Toutefois, les tests effectués
avec une puissance de 60 kW/m2 avec le contreplaqué n’avaient pas montré une accélération
très marquée du processus (figure IV.34). En outre, les résultats de la figure IV.12 pour le
contreplaqué M1 correspondent à un essai sous air. La combustion des gaz GF contribuait donc
significativement au bilan thermique. Il faut ainsi en conclure que le traitement du contreplaqué
qui lui assure son classement M1 présente une certaine efficacité.
Finalement, la figure V.10 pour t=1 200 s correspond à la toute fin du processus de dégra-
dation. Tous les profils sont plats, les taux de réactions sont extrêment faibles et la température
est uniforme, à l’équilibre radiatif avec le milieu environnant.
166
V.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure V.6 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=0 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleur pour(a,c,d) sont donnés dans la fig. V.5.
167
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure V.7 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=300 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. V.5.
168
V.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure V.8 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=500 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. V.5.
169
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure V.9 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=700 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. V.5.
170
V.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
a b c
d e f
g h i
j k l
Figure V.10 – Profil des variables d’état du système et de ses propriétés, en fonction de la position x[mm], à l’instant t=1 200 s. L’organisation de la figure est décrite dans la fig. IV.8 et les codes de couleurpour (a,c,d) sont donnés dans la fig. V.5.
171
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
x=0 x=L
Figure V.11 – Flux massiques [g/m2.s] traversant les faces exposée et arrière de l’échantillon, en fonctiondu temps t [s]. GF et GI (superposés, en magenta) et azote (cyan).
4.2 Résultats globaux
Les indicateurs globaux considérés ici comprennent à nouveau les bilans de masse et d’éner-
gie. Les flux massiques [g /m2.s] traversant les faces de l’échantillon sont représentés dans la
figure V.11, séparément pour les faces avant et arrière. Ils se résument ici aux flux de gaz
de pyrolyse et d’azote. Les gaz de pyrolyse s’échappent essentiellement en face avant jusqu’à
t ≈500s et majoritairement en face arrière après cet instant. Leur flux total constitue la MLR
de l’échantillon, qui est discutée un peu plus loin. L’azote est chassé rapidement par les gaz émis
par la pyrolyse et réinvestit l’espace des pores quand cette émission s’amenuise, pour t ≥700s.
Le bilan d’énergie fait intervenir des contributions en nombre plus réduit que dans la liste
énoncée page 121, du fait de l’absence de combustion et de séchage. Elles comprennent ici des
flux (i - v), qui s’équilibrent avec le taux de variation de la chaleur sensible et un seul terme
puits dû aux processus chimiques :
(i) part absorbée du flux radiatif incident en provenance du cône calorimètre, ǫr Fc ;
(ii) flux radiatif émis par la surface, ǫr σ T |4x=0 ;
(iii) flux échangé par conduction avec le milieu environnant, hT (Ta − T |x=0) ;
(iv,v) flux de chaleur emporté par le gaz, ρgcp,gvgT (en faces avant et arrière).
(vi) taux de variation de la chaleur sensible ;
(vii) taux global de consommation d’énergie par la pyrolyse.
Ces différents éléments, ramenés à l’unité de surface exposée, sont représentés dans la figure
V.12 en fonction du temps. Outre l’absence de certains termes, on note deux différences par
172
V.4 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, cas de base
(iii - vii) (i, ii) Code couleur
Figure V.12 – Eléments du bilan thermique [kW/m2], en fonction du temps t [s].
rapport à la figure IV.19 pour le contreplaqué M1. La première est le temps plus long requis
pour que le flux radiatif émis par la surface s’établisse, c’est-à-dire pour que la température de
surface s’échauffe à une valeur proche de Teq correspondant à l’équilibre radiatif avec le flux Fc
reçu du cône. Ceci résulte directement de l’absence de flamme, qui apportait une contribution
très significative aux temps courts lors des essais sous air (voir figure IV.19c). La seconde est
l’absence du pic que présentait vers t ≈500s la variation de chaleur sensible pour le contreplaqué.
La aussi, l’absence de flamme est l’explication la plus logique. Le flux radiatif réentrant associé
présentait à cet instant un pic dans la figure IV.19b, qui compensait en partie la perte en
contenu calorifique de l’échantillon due à l’émission de gaz chauds. Les différences de conditions
opératoires rendent donc impossible une similitude complète des résultats, même si l’allure
générale des figures IV.19a et V.12a est similaire.
Enfin, les courbes de perte de masse et de taux de perte de masse en fonction du temps sont
présentées dans la figure V.13, en comparaison avec des résultats de tests expérimentaux. Noter
que deux expériences ont été réalisées dans des conditions identiques et produisent des courbes
en léger décalage. Ceci fournit une estimation de la répétabilité et du degré d’incertitude associés
aux données expérimentales. Ce décalage est du même ordre de grandeur que les changements
observés dans certaines des variantes considérées dans la Section 4 du Chapitre IV, telles que
la division par deux du contenu initial en eau (figureIV.25), la réduction de 20% de la chaleur
globale de pyrolyse (figureIV.26), le changement de la fraction de la puissance de la flamme
émise en direction de l’échantillon (figure IV.31), ou même l’augmentation de 40 à 60 kW/m2
de la puissance du cône (figure IV.34).
Dans une première période, t ≤500s, les courbes de perte de masse sont en bon accord
quantitatif global, mais une petite différence est perceptible. La courbe numérique présente
173
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
M MLR
Figure V.13 – Evolution de la masse de l’échantillon (en % de la masse initiale) et du taux de pertede masse (s−1) en fonction du temps (s). Les courbes rouges correspondent aux résultats numériques et lescourbes noires aux données expérimentales pour deux essais dans des conditions identiques [2].
une pente initiale supérieure, suivi d’un léger point d’inflexion absent dans les courbes expé-
rimentales. Dans les courbes de MLR, ceci se traduit par un fort pic initial dans les données
numériques, puis d’un retour pour t=100∼500s à un taux en bon accord avec les mesures. Une
partie de la différence de pente initiale peut résulter d’effets de discrétisation, aux temps très
courts où seul le premier volume de contrôle de la discrétisation est interessé par la dégradation.
Mais le phénomène se prolonge ici au-delà de cette période. Le reste de cette différence peut
s’expliquer par la géométrie du porte-échantillon, décrite dans la figure V.3. Seule une fraction
(88%) de la surface de l’échantillon est initialement exposée au rayonnement du cône. Les 12%
restant ne participent pas dans un premier temps à la perte de masse, entraînant une pente
initiale de la courbe plus faible. Cet effet s’amenuise ultérieurement, notamment du fait de la
conduction thermique transversale vers les zones périphériques moins exposées et le retard de
la perte de masse est compensé. Mais le délai occasionné peut gommer l’existence de l’inflexion
dans les courbes expérimentales. On verra plus loin que le même effet est observé pour tous
les cas où le porte-échantillon standard est utilisé, mais pas dans les cas où il est fait usage du
porte-échantillon dural.
Une seconde différence plus marquante apparaît à t ≈500s, avec une chute beaucoup plus
brutale de la masse et un pic plus élevé de la MLR dans les simulations que dans l’expérience.
Ceci peut résulter de diverses raisons, comme par exemple la façon discutable dont les chaleurs
des diverses réactions ont été fixées. Mais on peut aussi penser que la condition d’adiabaticité
appliquée en face arrière dans les simulations ne l’est qu’imparfaitement dans les expériences.
174
V.5 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
La différence survient au moment où le front de réaction dépasse le plan médian de l’échan-
tillon. Le second pic de MLR résulte de l’accumulation de chaleur dans la couche profonde, qui
se produit quand la face arrière est adiabatique. Il n’existe pas quand cette face est en bon
contact thermique avec l’environnement. Une isolation imparfaite peut conduite à la situation
intermédiaire, avec un second pic modéré, observée dans les courbes expérimentales.
Enfin, une troisième différence réside dans l’écart très significatif entre les masses finales,
quand la dégradation est achevée, à t ≥1 200s. Elles correspondent à 28% de la masse initiale
pour les résultats expérimentaux et 22% pour les simulations numériques. Ceci provient très
probablement de l’emprunt de chemins réactionnels différents. Avec les coefficients stœchiomé-
triques massiques de la table V.1, la lignine perd 50% de sa masse quand elle est directement
convertie en charbon et 95% quand elle passe par l’intermédiaire de la phase α. Un effet si-
milaire mais beaucoup moins important existe pour la cellulose, selon le passage ou non par
l’état α. Globalement, en tenant compte de la composition initiale du bois, le résidu final peut
représenter entre 11% et 28% de la masse initiale, selon le chemin réactionnel parcouru. La
valeur expérimentale correspond au haut de cette plage, quand la totalité de la lignine est dé-
gradée directement en charbon, sans passage par l’état α. Le résultat numérique est près du
centre de la plage possible. Le chemin réactionnel joue donc un rôle important et il est examiné
spécifiquement dans le Section 6.
5 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
Faute de temps, l’éventail de variantes considéré ici est plus réduit que dans le Chapitre IV.
On examine les quatre situations (dont une constitue le cas de base) obtenues par la combinaison
de deux types de porte-échantillon et de deux valeurs 30 et 50 kW/m2 de la puissance du cône
calorimètre.
Les résultats obtenus expérimentalement avec le support standard et numériquement avec
une condition d’adiabaticité de la face arrière sont comparés dans la figure V.14. Le cas de la
puissance 50 kW/m2 est le cas de base, déjà discuté ci-dessus. Il est répété ici pour faciliter la
comparaison.
Quand la puissance du cône vaut 30 kW/m2, les simulations prédisent une dégradation
beaucoup plus rapide que celle observée expérimentalement. On retrouve une pente initiale
forte suivie d’une inflexion, qui sont peut-être gommées dans les courbes mesurées pour la
même raison que précédemment puisque le porte-échantillon est identique. Au-delà de cette
phase initiale, la MLR numérique reste sensiblement plus élevée. Le second pic est à nouveau
175
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
beaucoup plus marqué, avec l’explication possible de l’influence d’une isolation imparfaite en
face arrière durant les expériences. L’état ultime n’est pas atteint expérimentalement, ce qui
ne permet pas de connaître la masse qui serait obtenue. Dans les simulations, elle est similaire
à celle obtenue lors des essais avec la puissance de 50 kW.m2.
Les résultats concernant le porte-échantillon dural sont présentés dans la figure V.15 et sont
d’une typologie différente.
Notons en premier lieu que les pentes initiales des courbes numériques et expérimentales
sont toujours en bon accord, avec ce dispositif où l’intégralité de la surface de l’échantillon est
exposée au cône. Ceci conforte l’hypothèse faite pour expliquer certaines différences dans la
figure V.14 entre les données numériques et expérimentales par l’influence du cache du port-
échantillon masquant une partie de la surface.
D’autre part, les formes des courbes issues des calculs et des mesures sont en accord qua-
litatif. Aucune ne présente le second pic de MLR qui était systématiquement observé avec
une face arrière isolée. Il en reste une trace sous la forme d’un épaulement de la MLR pour
la puissance du cône la plus importante, 50 kW/m2, mais il a quasiment totalement disparu
pour une puissance plus faible 30 kW/m2. Ceci est en accord avec de nombreuses observations
expérimentales, outre celles présentées ici et avec les prédictions numériques de [13], comme il
a déjà été discuté.
Il existe toutefois un désaccord quantitatif, avec une dégradation bien plus lente dans les
prédictions numériques que dans l’expérience. Il est probable que les pertes thermiques en face
arrière ont été surévaluées dans les simulations.
Quelques essais (non présentés) laissent penser qu’une optimisation des paramètres qui
interviennent dans la description des conditions thermiques en face arrière de l’échantillon
permettrait de réconcilier les prédictions numériques avec les observations expérimentales. Ces
paramètres comprennent notamment le coefficient d’échange hT b (ici égal à 1.2 W/m2K) et la
température Tb (ici égale à 303 K), qui interviennent dans (II.43). On peut également inclure
les échanges radiatifs entre la plaque support et l’environnement et surtout l’inertie thermique
de cette plaque qui n’est actuellement pas prise en compte. Nous n’avons malheureusement
pas eu le temps de procéder à cette étude, mais caractériser ainsi les propriétés thermiques du
porte-échantillon dural (et par la même occasion du porte-échantillon standard) présenterait
un intérêt certain au vu de l’utilisation qui en est faite dans les tests de dégradation en cône
calorimètre.
176
V.5 Simulation à l’échelle du cône calorimètre, variantes
R
Fondstandard
Fc =50 kW/m2
MLR
R
Fondstandard
Fc =30 kW/m2
MLR
Figure V.14 – Evolution de la masse de l’échantillon (en % de la masse initiale) en fonction du temps(s), et taux de perte de masse (% par seconde) en fonction du temps, pour des essais en cône calorimètreavec une puissance de 30 et 50 kW/m2. Résultats des simulations avec une face arrière adiabatique (rouge)et des mesures [2] avec le porte-échantillon standard (noir).
177
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
R
Fonddural
Fc =50 kW/m2
MLR
R
Fonddural
Fc =30 kW/m2
MLR
Figure V.15 – Évolution de la masse de l’échantillon (en % de la masse initiale) en fonction du temps(s), et taux de perte de masse (% par seconde) en fonction du temps, pour des essais en cône calorimètreavec une puissance de 30 et 50 kW/m2. Résultats des simulations (rouge) et des mesures [2] (noir) avec leporte-échantillon dural.
178
V.6 Chemins réactionnels
6 Chemins réactionnels
Comme on l’a déjà mentionné, différents chemins réactionnels sont possibles pour la dé-
gradation des composants initiaux du bois. Celui effectivement emprunté peut dépendre du
scénario d’exposition. Ceci influe notamment sur la masse finale après dégradation complète.
Avec la façon de fixer les chaleurs de réaction adoptée ici , l’influence sur le bilan thermique
est minimisé, mais il pourrait en aller autrement si des données plus réalistes et éventuelle-
ment significativement différentes étaient prises en compte. Nous quantifions ici les chemins
effectivement parcourus dans les simulations en condition ATG et dans le cas de base en cône.
La figure V.16 concerne le cas de l’ATG. Les quantités de matières converties par les réac-
tions R2 et R3 (à partir de la cellulose S2) et par les réactions R4 et R5 (à partir de la lignine S3)
sont tracées en fonction de la température, normées par la masse initiale de l’échantillon, pour
toutes les rampes thermiques de 10 à 50°C/mn. Notons en premier lieu que la figure confirme
que la cellulose est entièrement décomposée dans une plage étroite de température, 300∼400°C,
tandis que la dégradation de la lignine s’étale sur une plage bien plus large de 300 à 600°C. Par
ailleurs, on observe une dépendance à la valeur de la vitesse de chauffage. Par exemple, dans
l’état final, le taux de conversion par R4 varie d’environ 15 à 13% quand la rampe augmente
de 10 à 50°C/mn, c’est-à-dire que la fraction de lignine passant par l’état α passe de 42 à 37%.
Des résultats du même type sont présentés dans la figure V.17 pour des essais en cône dans
le cas de base. Les profils des taux de conversion par R2 à R5 sont tracés en fonction de la
position x, à des temps t=300, 500, 700s et dans l’état final à 2000s. Les taux des réactions en
compétition (R2,R3) et (R4,R5) sont présentés ensemble.
Cette représentation permet en premier lieu de suivre l’évolution au cours du temps des
fronts associés à chacune des réactions. Elle montre également, si l’on considère l’état final,
que les chemins parcourus ne sont pas identiques en différentes positions dans l’échantillon.
Proche de la surface exposée, les taux de conversion par R2 et R3 sont d’environ 38 et 4%,
respectivement. Près de la face arrière, ces taux sont de l’ordre de 32 et 10%. Ainsi, environ
10% de la cellulose en face avant passe par l’état α, et 24% en face arrière.
Les taux de R4 et R5 sont beaucoup plus uniformes, avec des valeurs d’environ 11% pour
R4 et 25% pour R5. Ainsi, 31% de la lignine passe par l’état α. Rappelons que cette proportion
évoluait dans une plage de 37 à 42% dans les conditions ATG, suivant la valeur de la rampe
thermique. Le taux de conversion de la lignine via R4 (avec une perte de masse plus importante)
est donc inférieur lors des essais en cône qu’en ATG.
C’est un succès considérable du modèle chimique de parvenir à prédire ainsi des compor-
tements différents selon les conditions auxquelles le matériau est exposé. Toutefois, il subsiste
179
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
une erreur quantitative, puisque la perte de masse finale mesurée dans l’essai en cône suggère
que le taux de conversion de la lignine via R4 est quasi nul, comme discuté dans la Section 4.2.
Le modèle chimique associé à notre modèle numérique fournissent des résultats en accord avec
cette tendance, mais toutefois sans rendre compte de toute l’amplitude du phénomène.
R2 R3
R4 R5
Figure V.16 – Quantités de matières converties par les réactions R2-R5, normées par la masse initialede l’échantillon, en fonction de la température (°C). Simulations en conditions ATG, avec des rampesthermiques de 10 à 50°C/mn.
180
V.6 Chemins réactionnels
R2, R3
t= 300 sR4, R5
R2, R3
t= 500 sR4, R5
R2, R3
t= 700 sR4, R5
R2, R3
t= 2 000 sR4, R5
Figure V.17 – Quantités de matières converties par les réactions (R2, R3) et (R4, R5), normées par lamasse initiale de l’échantillon, en fonction de la position x (mm) à des instants successifs t=300, 500, 700set 2000s. Simulations d’un essai en cône calorimètre, cas de base.
181
Chapitre V. Application au bois de sapin massif
7 Discussion
Les applications présentées dans ce chapitre montrent la capacité du modèle numérique à
incorporer un schéma réactionnel plus complexe par son caractère concurrentiel et plus exigeant
par la raideur des lois cinétiques que celui appliqué dans le Chapitre IV. La possibilité de
chemins réactionnels différents selon les conditions opératoires est bien prise en compte, et des
différences de comportement sont effectivement observées entre les tests en ATG pour diverses
rampes thermiques et en cône calorimètre.
Les réponses obtenues numériquement dans les différentes situations examinées, correspon-
dant à des essais en cône calorimètre dans des conditions différentes, rendent bien compte
des tendances effectivement observées, même si des désaccords quantitatifs parfois importants
existent. Aux temps courts, les désaccords peuvent s’expliquer par la conception d’un des deux
types de porte-échantillon, qui occulte une partie de la surface des échantillons. Aux temps plus
long, les raisons des désaccords sont attribuées à une connaissance insuffisante des conditions
thermiques qui prévalent en face arrière de l’échantillon ainsi qu’à la mauvaise représentation
qui en est donnée dans le modèle numérique.
Si la caractérisation directe des propriétés thermiques des porte-échantillon est difficile et
n’est pas de notre ressort, leurs propriétés pourraient être déduites par l’optimisation des pa-
ramètres qui les décrivent dans le modèle numérique afin de concilier au mieux les résultats
numériques et expérimentaux. Ceci serait d’un intérêt pratique pour les expérimentateurs et
constituerait une bonne validation pour le modèle numérique.
Nous n’avons malheureusement pas eu le temps de nous y atteler. De façon plus générale, le
temps a manqué pour pousser très loin l’étude relative au bois de sapin, en examinant autant
de variantes que pour le contreplaqué M1, et c’est très regrettable.
L’étude expérimentale de B. Batiot dans le cadre de son travail de doctorat [2] a été conduite
en parallèle et en concertation avec le présent travail numérique. Un matériau plus simple a été
choisi (ne contenant par exemple pas de colle). Les expériences ont été effectuées en contrôlant
mieux certains aspects et en explorant plus de situations (ATG sous air et sous N2, essais en cône
calorimètre à atmosphère contrôlé, sous air ou sous N2, différents types de porte-échantillons...
), avec le double objectif de (1) fournir à la modélisation le maximum d’éléments en tant que
données d’entrée et (2) fournir des mesures dans une variété de configurations à grande échelle,
en vue de la confrontation des résultats avec les simulations.
Ces données sont malheureusement arrivées un peu tardivement. Dans l’intervalle il a été
fait usage des données disponibles car antérieures de Fateh & al. En outre, quand un modèle
182
V.7 Discussion
chimique pour le sapin nous a été fourni, d’une forme différente de celui utilisé pour le contre-
plaqué M1 mais surtout présentant des contrastes de vitesse de réaction bien supérieurs, il s’est
avéré que l’outil de simulation n’était pas en mesure de faire face aux instabilités numériques
auxquelles il donnait lieu, comme discuté plus en détail dans la Section 3.2.3 du Chapitre III.
Une modification de fond du modèle a été nécessaire. Les difficultés ont été surmontées et grâce
à cette stimulation, le simulateur présente dorénavant un degré de robustesse bien supérieur.
En contrepartie, le temps consacré à ce travail de développement a manqué plus tard pour les
mises en application.
Il ne fait pas de doute que l’important capital constitué par le jeu de résultats expérimentaux
existants et par l’outil numérique qui vient d’être développé devra être valorisé par une poursuite
de cette étude.
183
184
Chapitre VI
Conclusions et perspectives
Un modèle numérique qui permet la simulation de la dégradation thermique de matériaux
poreux exposés au feu a été développé au cours de ce travail, prenant en compte les phases de
séchage, de pyrolyse et de combustion du résidu charbonnneux. Il permet de suivre en détail
l’évolution du matériau quand celui-ci est soumis à des conditions d’exposition arbitraires, et
fournit notamment sa réponse macroscopique en termes des flux d’énergie et des diverses espèces
chimiques impliquées à travers sa surface. Ces éléments sont les quantités nécessaires dans la
simulation du feu à grande échelle pour une prise en compte réaliste de la dégradation des solides
exposés et de l’influence sur le développement du sinistre des émissions de gaz combustibles qui
en résultent.
Le modèle est basé sur un modèle chimique réputé intrinsèque, issu de mesures sur des
échantillons de taille suffisamment réduite pour éliminer toute influence des mécanismes de
transport, et sur un modèle thermophysique qui introduit les couplages avec ces derniers. Ces
deux éléments permettent de simuler l’évolution du matériau dans des configurations géomé-
triques et des conditions d’exposition arbitraires.
Le modèle est formulé à l’échelle de Darcy, en fonction de propriétés effectives du matériau
homogénéisé. Le problème est discrétisé dans une formulation aux volumes finis et résolu à l’aide
d’un schéma implicite en temps. La non linéarité du problème et les nombreux et brusques
changements de régime rendent la gestion de la simulation délicate. Une procédure robuste
faisant appel à une gestion adaptative du pas de temps a été mise en place.
Le modèle a été appliqué à la simulation d’essais de dégradation thermique sous cône ca-
lorimètre de deux types de matériau à base de bois, un contreplaqué et un bois massif, qui
présentent des schémas réactionnels de dégradation différents, séquentiels ou concurrentiels.
Dans les deux cas, les résultats pour un cas de base constitué d’un jeu de paramètres
chimiques, physiques et opératoires ont été présentés en détails. L’évolution des champs des
variables locales a été décrite afin de bien cerner la phénoménologie des processus, et des indi-
185
Chapitre VI. Conclusions et perspectives
cateurs plus globaux qui permettent une comparaison avec des mesures expérimentales ont été
présentés. Les prédictions numériques sont en accord quantitatif raisonnable avec les mesures,
et reproduisent la typologie des comportements généralement observés, comme l’existence d’un
second pic de perte de masse lors de la dégradation et sa dépendance aux conditions en face
arrière de l’échantillon. A cette occasion, on a pu vérifié la capacité du modèle à incorporer
des schémas réactionnels de formes diverses et montrer la prévalence de chemins réactionnels
différents selon les conditions opératoires.
Dans un second temps, un grand nombre de variantes a été exploré afin de tester l’influence
de la multitude de paramètres qui peuvent déterminer les comportements et influer quanti-
tativement sur les résultats. De nombreux paramètres d’ordre chimiques et physiques ont été
considérés pour le bois contreplaqué. Ceux qui affectent le bilan d’énergie sont identifiés comme
les plus déterminants et au premier chef la conductivité thermique du matériau, dans ses états
intact et dégradés. Les écarts entre prédictions et observations peuvent résulter d’une mau-
vaise représentation de ces aspects dans le modèle. En revanche, des modèles chimiques avec
des degrés de complexité très différents mais respectant quelques critères globaux conduisent
à des prédictions quasi-identiques. Ces tests de sensibilité mettent donc en évidence certaines
priorités pour les caractérisations expérimentales des matériaux.
Une autre série de variantes portant sur les conditions opératoires a été examinée pour les
deux types de bois. Il apparaît que la réponse des matériaux dépend du flux thermique auquel
ils sont soumis, ce qui est naturel. Elle dépend aussi de l’épaisseur de l’échantillon, influence
que nous avons pu modéliser. Ceci peut être d’un grand intérêt pratique, en permettant de
transposer les résultats expérimentaux acquis avec une certaine épaisseur à d’autres valeurs de
celle-ci, avec une bonne précision et sans nécessiter d’information complémentaire. Enfin, la
réponse dépend également de la conception du porte-échantillon. La connaissance insuffisante
des propriétés thermiques des porte-échantillons explique à notre avis la majeure partie des
écarts entre prédictions et observations. D’autre part, la sensibilité aux conditions thermiques
qui prévalent à la face arrière de l’échantillon est préoccupante quant à l’interprétation des
résultats expérimentaux. Notre modèle numérique constitue un bon outil pour examiner ce
point plus en détail.
Le temps n’a pas permis de nous y atteler. Pour la même raison, nous n’avons exploité
qu’une partie de l’importante quantité de résultats expérimentaux disponibles pour le bois de
sapin massif. De ce fait, il nous semble que les travaux qui pourraient être conduits dans le
prolongement du nôtre devrait naturellement se répartir en deux volets :
– Exploitation : En l’état actuel du modèle, une exploitation plus poussée devrait être
186
conduite, avec des simulations correspondant à des situations d’exposition différentes
en termes de puissance de rayonnement, de concentration en oxygène ou de type de
porte-échantillon, pour lesquelles des expériences ont été réalisées. Ceci permettrait, d’une
part, de continuer à affiner le modèle et surtout les valeurs des coefficients qui décrivent
les propriétés des matériaux, et d’autre part, de caractériser les propriétés des porte-
échantillon et leur influence sur les comportements observés.
– Développement : Certains aspects de la modélisation, concernant notamment la des-
cription de la diffusion multicontituants dans les mélanges gazeux et la représentation de
la surface en récession, pourraient faire l’objet d’améliorations. Par ailleurs, il convien-
drait sans doute d’optimiser les performances numériques et nous avons vu qu’une marge
de progression existe de ce point de vue. Enfin, il faudrait procéder au couplage effectif
de notre module avec un outil de simulation d’un feu à grande échelle, à 2 ou 3 dimen-
sions. L’interfaçage ne présente pas de difficulté de principe, mais peut en poser quelques
unes dans la pratique. On retrouve à ce niveau de grands contrastes d’échelles de temps
caractéristiques entre les domaines extérieur et intérieur au matériau, qui demandent
probablement une gestion assez soigneuse des aspects temporels des simulations.
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