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48 SUPPLÉMENT LAMY GRENELLE 2 OCTOBRE 2010 loi Grenelle 2, ces trois modifications principales concernant les éoliennes seront passées en revues. Il s’agit des dispositions visant à limiter le « mitage » des paysages, l’assujettissement des éoliennes au régime des installations classées, et les dispo- sitions concernant les collectivités locales. En effet, l’inscription dans la loi, pour la première fois de manière explicite, de la possibilité pour les collectivités locales d’exploiter ou de faire exploiter des énergies renouvelables, doit participer au dispo- sitif incitatif déjà en place pour favoriser un développement raisonné des « énergies vertes » en France. I – LES AUTORISATIONS NÉCESSAIRES Les projets de développement éolien doivent obtenir un certain nombre d’autorisations avant de pouvoir être mis en service. Dans un souci de synthèse, ces différentes autorisations ou contrats nécessaires, les conditions d’application et les réfé- rences aux textes législatifs ou réglementaires sont présentés dans le tableau ci-dessous (1) : L a loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant en- gagement national pour l’environnement, ou loi Grenelle 2 publiée au Journal officiel le 13 juillet, est venue rajouter certaines exigences au déve- loppement des projets éoliens, déjà soumis à des procédures relativement lourdes et longues. Les nouveautés apportées par la loi Grenelle 2 sont notamment l’assujettisse- ment des éoliennes au régime des installations classées, ou la création des schémas régionaux éoliens. Pourtant, la nouvelle loi ne cherche pas à freiner les énergies renouvelables, son article 90 prévoit même un objectif d’installation de 500 éo- liennes par an dont le gouvernement devra rendre compte au Parlement après trois ans d’application de la loi (L. n° 2010-788, 12 juill. 2010, article 90, III). Le ministère de l’Écologie a adressé aux préfets une circulaire, n° D10010516, du 7 juin 2010 pour rappeler ces objectifs et insister pour que le nouveau cadre législatif ne ralentisse pas le développement. Après une brève présentation de différentes autorisations né- cessaires à l’installation d’éoliennes dans le régime issu de la (1) Pour une présentation du déroulement respectif de chacune de ses autorisations, voir Sandrin-Deforge A., Aperçu sur la réglementation applicable aux éoliennes, BDEI n° 5/2006, n° 210 et Sandrin-Deforge A., Aperçu sur la réglementation applicable aux projets éoliens en mer, BDEI n° 21/2009, n° 857. (2) Pour les besoin de l’autorisation du ministre de l’énergie, une « installation » est constituée de l’ensemble des éoliennes comprises dans une ferme éoliennes. Le seuil des 4,5 MW est donc rapidement atteint avec les machines les plus récentes dont chacune a une puissance de 1,5 ou 2 MW. L’« après-Grenelle » des éoliennes : un point sur la réglementation applicable Le dispositif administratif auquel sont assujetties les éoliennes à terre comme en mer a été récemment complété par la loi Grenelle 2. Ce nouveau cadre législatif devra être bien maîtrisé par les développeurs, au rang desquels, pour la première fois, les collectivités locales sont incitées à se présenter. 1085 BDEI Par Armelle SANDRIN- DEFORGE Avocat à la Cour Shearman & Sterling LLP P A ll Exigences Application / procédures à respecter Textes Autorisation ministérielle pour exploiter une installation produisant de l’électricité Pour les installations (2) jusqu’à 4,5 MW : procédure de déclaration Au-dessus de 4,5 MW : procédure d’au- torisation D. n° 2000-877, 7 sept. 2000, art. 1 Implantation dans une zone de dévelop- pement de l’éolien (« ZDE ») Nécessaire pour bénéficier de l’obligation d’achat (à terre) L. n° 2000-108, 10 févr. 2000, art. 10-1, mod. Respect du schéma régional éolien C. env., art. L. 222-1 Permis de construire Pour les mats de 12 mètres et plus : notice d’impact C. urb., art. L. 421-1 et R. 421-2 (permis de construire) C. env., art. L. 553-2, abrogé au 13 juillet 2011 (étude d’impact) C. env., art. R. 122-8. 15 (étude d’impact) Pour les mats de plus de 50 mètres : – Étude d’impact – Enquête publique Pas de permis de construire pour les éoliennes en mer C. urb., art. L. 421-5

L’« après-Grenelle » des éoliennes : un point sur la .../media/Files/NewsInsights/...pour les ZDE qui seront crées ou modifi ées après l’adoption de ce document (4). Le

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loi Grenelle 2, ces trois modifi cations principales concernant les éoliennes seront passées en revues. Il s’agit des dispositions visant à limiter le « mitage » des paysages, l’assujettissement des éoliennes au régime des installations classées, et les dispo-sitions concernant les collectivités locales. En effet, l’inscription dans la loi, pour la première fois de manière explicite, de la possibilité pour les collectivités locales d’exploiter ou de faire exploiter des énergies renouvelables, doit participer au dispo-sitif incitatif déjà en place pour favoriser un développement raisonné des « énergies vertes » en France.

I – LES AUTORISATIONS NÉCESSAIRESLes projets de développement éolien doivent obtenir un certain nombre d’autorisations avant de pouvoir être mis en service. Dans un souci de synthèse, ces différentes autorisations ou contrats nécessaires, les conditions d’application et les réfé-rences aux textes législatifs ou réglementaires sont présentés dans le tableau ci-dessous (1) :

La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant en-gagement national pour l’environnement, ou loi Grenelle 2 publiée au Journal offi ciel le 13 juillet, est venue rajouter certaines exigences au déve-loppement des projets éoliens, déjà soumis à des

procédures relativement lourdes et longues. Les nouveautés apportées par la loi Grenelle 2 sont notamment l’assujettisse-ment des éoliennes au régime des installations classées, ou la création des schémas régionaux éoliens. Pourtant, la nouvelle loi ne cherche pas à freiner les énergies renouvelables, son article 90 prévoit même un objectif d’installation de 500 éo-liennes par an dont le gouvernement devra rendre compte au Parlement après trois ans d’application de la loi (L. n° 2010-788, 12 juill. 2010, article 90, III). Le ministère de l’Écologie a adressé aux préfets une circulaire, n° D10010516, du 7 juin 2010 pour rappeler ces objectifs et insister pour que le nouveau cadre législatif ne ralentisse pas le développement.Après une brève présentation de différentes autorisations né-cessaires à l’installation d’éoliennes dans le régime issu de la

(1) Pour une présentation du déroulement respectif de chacune de ses autorisations, voir Sandrin-Deforge A., Aperçu sur la réglementation applicable aux éoliennes, BDEI n° 5/2006, n° 210 et Sandrin-Deforge A., Aperçu sur la réglementation applicable aux projets éoliens en mer, BDEI n° 21/2009, n° 857.(2) Pour les besoin de l’autorisation du ministre de l’énergie, une « installation » est constituée de l’ensemble des éoliennes comprises dans une ferme éoliennes. Le seuil des 4,5 MW est donc rapidement atteint avec les machines les plus récentes dont chacune a une puissance de 1,5 ou 2 MW.

L’« après-Grenelle » des éoliennes : un point sur la réglementation applicableLe dispositif administratif auquel sont assujetties les éoliennes à terre comme en mer a été récemment complété par la loi Grenelle 2. Ce nouveau cadre législatif devra être bien maîtrisé par les développeurs, au rang desquels, pour la première fois, les collectivités locales sont incitées à se présenter.1085

BDEI

Par Armelle SANDRIN-DEFORGE

Avocat à la CourShearman & Sterling

LLP

P A ll

ExigencesApplication /

procédures à respecterTextes

Autorisation ministérielle pour exploiter une installation produisant de l’électricité

Pour les installations (2) jusqu’à 4,5 MW : procédure de déclarationAu-dessus de 4,5 MW : procédure d’au-torisation

D. n° 2000-877, 7 sept. 2000, art. 1

Implantation dans une zone de dévelop-pement de l’éolien (« ZDE »)

Nécessaire pour bénéfi cier de l’obligation d’achat (à terre)

L. n° 2000-108, 10 févr. 2000, art. 10-1, mod.

Respect du schéma régional éolien C. env., art. L. 222-1

Permis de construire Pour les mats de 12 mètres et plus  : notice d’impact

C. urb., art. L. 421-1 et R. 421-2 (permis de construire)C. env., art. L. 553-2, abrogé au 13 juillet 2011 (étude d’impact)C. env., art. R. 122-8. 15 (étude d’impact)

Pour les mats de plus de 50 mètres :– Étude d’impact– Enquête publique

Pas de permis de construire pour les éoliennes en mer

C. urb., art. L. 421-5

ed15061
Typewritten Text
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ÉNERGIE – CLIMATG

RENELLE 2

et qui assistent la commune dans la préparation du dossier de demande de ZDE (Le Conseil d’État insiste d’ailleurs pour que la procédure d’adoption des ZDE respecte le principe de participa-tion inscrit à l’article L. 110-1 du Code de l’environnement et pour que le public soit associé à l’élaboration des projets, par exemple à l’occasion de réunions ou de débats publics, CE, 16 avr. 2010, n° 318067). Afi n d’encadrer ces initiatives semi-privées et d’éviter le « mitage » des paysages, la loi Grenelle 2 impose désormais aux ZDE de respecter un schéma régional éolien, pour les ZDE qui seront crées ou modifi ées après l’adoption de ce document (4). Le schéma régional éolien consistera en un volet annexé au schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, tel que défi nit par l’article L. 222-1 du Code de l’en-vironnement dans sa rédaction issue de la loi Grenelle 2. Ce schéma régional sera élaboré conjointement par le préfet de région et le président du conseil régional, après consultation des collectivités territoriales concernées et de leurs groupe-ments. Chaque région devra avoir établi son schéma régional éolien avant le 30 septembre 2012.En plus de la ZDE elle-même sujette au schéma régional éo-lien, les projets nécessitant un permis de construire seront naturellement soumis aux documents d’urbanisme locaux (POS ou PLU) en vigueur. Sur ce dernier point, la loi Grenelle 2 a introduit une exigence supplémentaire. Il s’agit de l’obligation de respecter une distance de 500 mètres par rapport aux ha-bitations, inscrite dans le nouvel article L. 553-1 du Code de l’environnement, n’est pas exactement une surprise. En 2006 l’Académie de médecine avait recommandé de maintenir une distance de 1500 mètres entre les habitations et les éoliennes de plus de 2,5 MW. Dans son rapport de mars 2008, l’AFSSET avait

II – LA LOI GRENELLE 2 CONTRE LE MITAGE DES PAYSAGES

A.– ZDE et schémas éoliens

Afi n d’inciter le développement des éoliennes, utilisant une source d’énergie renouvelable, l’électricité produite est rache-tée par le gestionnaire du réseau de distribution sur lequel est raccordée l’éolienne à un tarif réglementé avantageux. EDF et les DNN (3) sont tenus d’acheter l’électricité lorsque l’exploitant d’une ferme éolienne en fait la demande, sous réserve du respect de certaines exigences techniques. Depuis la loi du 13 juillet 2005, pour bénéfi cier de cette obligation d’achat, les éoliennes doivent se situer dans une zone de développement de l’éolien, ou « ZDE ». La loi Grenelle 2 précise que les éo-liennes en mer, « implantées sur le domaine public maritime ou dans la zone exclusive économique » (L. n° 2000-108, 10 févr. 2000, art. 10-1, mod.) peuvent bénéfi cier de l’obligation d’achat sans être situées dans une ZDE.Les ZDE sont instituées par arrêté préfectoral, sur proposition de la commune sur le territoire de laquelle il est proposé d’instaurer une ZDE. Ces zones doivent être défi nies, selon des dispositions modifi ées par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite « Gre-nelle 2 », « 1° des délimitations territoriales inscrites au schéma régional éolien ; 2° de leur potentiel éolien ; 3° des possibilités de raccordement aux réseaux électriques ; 4° de la possibilité pour les projets à venir de préserver la sécurité publique, les paysages, la biodiversité, les monuments historiques et les sites remarquables et protégés ainsi que le patrimoine archéologique ». On notera que, dans un souci de cohérence, le quatrième point reprend en partie la liste des intérêts protégés par l’article L. 511-1 du Code de l’environnement, relatif aux installations classées pour la protection de l’environnement (« ICPE »), régime auquel seront désormais assujetties les éoliennes.En pratique, une grande partie des demandes de ZDE émanent de communes sollicitées par des développeurs éoliens qui souhaitent implanter une ferme éolienne sur leur territoire,

(3) Distributeurs d’électricité non nationalisés, par exemple Electricité de Strasbourg, ou Sorégie dans la Vienne.(4) Le schéma régional éolien tiendra compte des ZDE existant à la date de son adoption, afi n d’éviter les contradictions.

ExigencesApplication /

procédures à respecterTextes

Déclaration ou autorisation au titre de la loi sur l’eau

Pour les éoliennes en mer installées sur le domaine public maritimeAvec étude d’impact et enquête publique

C. env., art. L. 214-1

Concession d’occupation du domaine public

Pour les éoliennes en mer installées sur le domaine public maritimeAvec enquête publique

D. n° 2004-308, 29 mars 2004

Autorisation au titre des installations classées

Pour les fermes de 5 machines ou plus, mats de plus de 50 mètres :– Étude d’impact

C. env., art. L. 122-1 et R. 122-8

– Enquête publique C. env., art. L. 512-2

Contrat d’achat EDF Pour les fermes de 5 machines ou plus :– à terre situées en ZDE– offshore dans le domaine public mari-time ou la ZEE

L. n° 2000-108, 10 févr. 2000 art. 10-1 mod.

Obtention d’un certifi cat d’obligation d’achat délivré par le préfet (DREAL)

D. n° 2001-410, 10 mai 2001

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L ’ « A P R È S - G R E N E L L E » D E S É O L I E N N E S : U N P O I N T S U R L A R É G L E M E N T A T I O N A P P L I C A B L E

On notera toutefois que la notice d’impact disparait pour les projets de moindre importance, et la loi Grenelle 2 prévoit que les projets qui seront soumis à étude d’impact seront défi nis par un décret à paraitre. Néanmoins, il ne fait pas de doute que les Éoliennes de plus de 50 mètres (à ce titre ou en qualité d’ICPE) demeureront soumises à une étude d’impact. Le minis-tère de l’Écologie a ainsi publié en juillet 2010 l’actualisation de son « Guide de l’étude d’impact sur l’environnement des parcs éoliens », sans attendre la parution du décret. Ce guide, qui s’adresse aux différents acteurs du développement éolien, indique que l’étude d’impact doit être effectuée au niveau du parc éolien, plutôt que de chaque éolienne individuellement, et considère qu’il existe un parc « lorsque [les éoliennes] sont suffi samment proches pour former une même entité visuelle ».

C.– Obligation d’achat et règle des cinq machinesL’obligation d’achat par EDF, qui constitue la principale moti-vation économique des projets éoliens en France, est imposée par l’article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000. Cet article a été modifi é par la loi Grenelle 2 sur plusieurs points. Tout d’abord, l’obligation d’achat est étendue aux projets éoliens en mer, lorsqu’ils sont installés sur le domaine public maritime ou dans la zone économique exclusive. Ensuite, toujours pour éviter le « mitage » des paysages, les projets terrestres comme maritimes ne bénéfi cieront de l’obligation d’achat que s’ils sont constitués d’au moins cinq machines. Cette obligation ne s’impose toutefois pas aux éoliennes pour lesquelles un permis de construire a été déposé avant le 13 juillet 2010 ou aux petites éoliennes ayant une puissance inférieure à 250 kW et un mat de moins de 30 mètres. Ces dernières sont généralement mises en place par des ménages ou des agriculteurs et, en pratique, ne sont pas multipliées sur un même site.

III – L’ASSUJETTISSEMENT DES ÉOLIENNES AU RÉGIME DES INSTALLATIONS CLASSÉES

Le principe de l’application du régime des installations classées aux éoliennes a longtemps été combattu par les défenseurs des énergies renouvelables et les développeurs éoliens. La régle-mentation sur les « établissements dangereux, incommodes ou insalubres » de 1810 (7) devait-elle s’étendre, deux siècles plus tard, à des installations de production d’énergie « verte » ? Le régime d’autorisation qui s’applique aux « installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l’article L. 511-1 » (8) était-il adapté à des éoliennes qui ne rejettent pas de substance polluante ? Le législateur a tranché : les éoliennes deviennent des ICPE.La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite « Grenelle 2 » assujettit les parcs éoliens terrestres d’au moins cinq machines, dont

jugé cette recommandation peut judicieuse, d’une part parce que très peu d’éoliennes terrestres atteignent une puissance de 2,5 MW, d’autre part parce qu’une adaptation au cas par cas semblait préférable. Force est de constater, néanmoins, qu’une trop grande proximité avec les habitations existantes est source de contentieux pour les projets éoliens. Les juges administratifs ont ainsi imposé des distances de 300 à 500 mètres avec les habitations, soit pour des raisons de nuisances sonores soit du fait des risques de bris de pales (cf. notamment, CAA Nantes, 7 avr. 2010, n° 09NT00829 ; CE 27 juill. 2009, n° 317060). En fi xant une distance minimum, le législateur a donc privilégié un compromis destiné à assurer une meilleure qualité de l’envi-ronnement des riverains, et une certaine sécurité juridique pour les développeurs éoliens. Cette distance imposée aux éoliennes peut être comparée aux 100 mètres appliqués aux installations classées d’élevage, et aux calculs au cas par cas effectués pour les plans de prévention des risques technologiques entourant les installations Seveso 2.L’éloignement de 500 mètres est imposé par rapport « aux constructions à usage d’habitation, aux immeubles habités » mais également aux « zones destinées à l’habitation défi nies dans les documents d’urbanisme en vigueur à la date de la publication de la loi ». Cette dernière disposition, qui fait du 13 juillet 2010 la date de référence pour l’urbanisme éolien, ne manquera pas d’être précisée par la jurisprudence. La notion de « zone destinée à l’habitation » n’est en effet pas défi nie par le Code de l’urbanisme. Sans doute sera-t-il nécessaire d’étudier au cas pas cas les zones urbaines (zones U) et zones à urbaniser (zones AU) existantes, pour déterminer au sein de chacune les périmètres constructibles destinés au loge-ment à différencier des espaces verts ou des constructions commerciales ou industrielles (encore faut-il que les documents d’urbanisme existants soient précis : un espace vert au sein d’une zone à urbaniser n’est pas nécessairement inconstructible, voir CE, 26 mai 2010, n° 320780). La nouvelle loi ne dit pas non plus si l’éloignement sera appliqué de façon réciproque aux deman-deurs de permis de construire dans un rayon de 500 mètres autour des éoliennes existantes, sur le modèle de réciprocité existant déjà par exemple pour les élevages (C. rur., art. 111-3).

B.– Études d’impactJusqu’à l’intervention de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite « Grenelle 2 », la demande de permis de construire pour les éoliennes de plus de 50 mètres devait contenir une étude d’impact, et le projet était soumis à enquête publique (C. env., art. L. 553-2). Les éoliennes plus petites étaient soumises à une notice d’impact. Cependant, l’article L. 553-2 du Code de l’environnement qui imposait une étude ou notice d’impact sera abrogé à la date du 13 juillet 2011.Sous le régime issu de la loi Grenelle 2, le permis de construire demeurera obligatoire pour les éoliennes terrestres de 12 mètres de haut ou plus, à l’exception des éoliennes en mer (5). De plus, l’étude d’impact et l’enquête publique resteront nécessaires pour les éoliennes de plus de 50 mètres. En effet, l’enquête publique sera obligatoire pour les éoliennes terrestres au titre de la demande d’autorisation ICPE (cf. infra) et pour les éoliennes en mer au titre de la concession d’occupation du domaine public. Quant à l’étude d’impact, l’article L. 122-1 du Code de l’environnement l’impose pour tous les projets « sus-ceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine », et l’article R. 122-8 précise que pour les installations classées soumises à autorisation (C. env., art. R. 122-8 6° a)) et les éoliennes dont le mat dépasse 50 mètres y sont soumises (C. env., art. R. 122-8 15°) (6).

(5) La loi précise « lorsqu’elles sont situées sur le domaine public maritime ». Les éoliennes situées en dehors du domaine public maritime, à plus de 12 milles nautiques des côtes, ne seront en toute hypothèse pas soumise à permis de construire puisque le sol sur lequel elles reposeraient, le cas échéant, n’est pas le territoire de la République bien qu’il soit sous contrôle des autorités françaises dans la ZEE.(6) On notera que les éoliennes terrestres sont donc désormais soumises à étude d’impact au double titre de d’éolienne et d’ICPE, alors que les éoliennes en mer le seront uniquement en qualité d’éoliennes puisqu’elles ne seront pas soumises au régime des ICPE.(7) Décret impérial du 15 octobre 1810.(8) Les intérêts protégés par l’article L. 511-1 du Code de l’environnement, modifi é par la loi Grenelle 2, sont : « la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, la salubrité publiques, l’agriculture, la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ».

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ÉNERGIE – CLIMATG

RENELLE 2

Il est vrai que les sociétés-mères d’exploitants d’éoliennes devraient être peu sollicitées, puisque l’exploitant a l’obliga-tion de constituer des garanties fi nancières durant la période d’exploitation du parc, afi n de pourvoir au démantèlement des machines et à la remise en état du site à l’issu de l’exploita-tion. Pour les éoliennes, cette obligation existe déjà depuis la loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003 (9) mais elle n’est pas encore en vigueur faute de décret d’application. La loi Grenelle 2 promet qu’un décret sera pris avant le 31 décembre 2010. On notera que, de manière générale, si les exploitants d’ICPE sont responsables de la remise en état du site, les seules autres installations soumises à garanties fi nancières sont les Seveso II, les carrières et les installations de stockage de déchets.Enfi n, les nouveaux projets éoliens devront respecter l’obliga-tion d’éloignement décrite plus haut vis-à-vis des logements et « zones destinées à l’habitation ».

IV – L’ENCOURAGEMENT DU DÉVELOPPEMENT PAR LES COLLECTIVITÉS LOCALES

L’article 88 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 dite « Gre-nelle 2 » encourage le développement des énergies renouve-lables par les collectivités locales en autorisant explicitement les départements, les régions ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale, à « aménager, ex-ploiter, faire aménager ou faire exploiter » des installations de production d’énergie.Cette activité n’était jusqu’ici ni interdite ni explicitement ou-verte aux collectivités locales. Certaines communes ont ainsi choisi de profi ter de la liberté offerte par l’article L. 1521-1 du Code général des collectivités territoriales qui leur permet de créer des sociétés d’économies mixtes locales pour exploiter des activités d’intérêt général, et fondé des SEML exploitant des éoliennes (10). La loi Grenelle 2 valide donc, s’il en était besoin, le fait que l’exploitation d’installations de production d’énergies renouvelables est bien une activité d’intérêt général, et permet aux collectivités qui le souhaiteraient d’exploiter en direct des énergies renouvelables sans passer nécessairement par une SEML.Les installations devront être implantées sur le territoire de la collectivité qui les exploite ou qui les fait exploiter. Naturelle-ment, les collectivités seront astreintes aux mêmes exigences que les exploitants privées et devront obtenir les autorisations réglementairement prévues, notamment l’autorisation minis-térielle prévue à l’article 7 de la loi du 10 février 2000 pour l’exploitation d’une installation produisant de l’électricité.En ce qui concerne les éoliennes, les collectivités locales qui choisiront de passer par un concessionnaire privé pour faire exploiter leurs installations, devront être particulièrement vigilantes quant aux responsabilités qui leur incombent. En effet, un récent arrêt du Conseil d’État a rappelé qu’en matière d’installations classées, le responsable des (potentiellement coûteuses) opérations de remise en état était le titulaire de l’autorisation d’exploiter, en l’occurrence la communauté de communes, et non la société privée titulaire du contrat d’ex-ploitation passé avec le district (CE, 29 mars 2010, n° 318886,

la hauteur de mat dépasse 50 mètres de haut, au régime des installations classées soumises à autorisation. La loi Grenelle 2 fi xe un délai d’un an au gouvernement pour modifi er la no-menclature des installations classées en ce sens. Le sort des autres éoliennes (parc plus petits, éoliennes terrestres moins hautes, éoliennes en mer) devra, le cas échéant, être précisé ultérieurement même si on comprend que les éoliennes en mer ne devraient pas devenir des ICPE.L’application du régime des installations classées aux éoliennes entraine plusieurs contraintes. Les nouveaux parcs éoliens devront déposer une demande d’autorisation, comprenant les pièces prévues aux articles R. 512-3 à R. 512-9 du Code de l’environnement, en particulier une étude d’impact et une étude de dangers. La procédure d’instruction de la demande d’autorisation comprend une enquête publique, comme c’était déjà le cas pour l’instruction des permis de construire pour les éoliennes de plus de 50 mètres. Compte tenu du temps nécessaire pour la préparation du dossier de demande par le futur exploitant et pour son instruction par l’administration des installations classées, les délais d’obtention d’une autorisation ICPE devraient encore allonger le montage d’un projet éolien.L’autorisation d’exploiter une ICPE est prise par un arrêté préfectoral, qui contient des prescriptions techniques que l’exploitant doit respecter. Le préfet peut également prendre des prescriptions complémentaires à tout moment durant la vie de l’installation. Pour les éoliennes qui sont déjà en service à la date de publication de la loi Grenelle 2, il est demandé aux exploitants de procéder à une déclaration auprès du préfet dans l’année qui suivra la publication du décret modifi ant la nomenclature des installations classées. À titre transitoire, les projets éoliens en cours, qui ont déjà fait l’objet d’une étude d’impact et d’une enquête publique, ou pour lesquels un arrêté d’ouverture d’enquête publique a été pris, peuvent être mis en service suivant les procédures précédemment applicables. Cependant, ces éoliennes seront soumises au régime des installations classées.Les éoliennes ne seront toutefois pas des ICPE comme les autres. La loi Grenelle 2 leur impose en effet plusieurs obli-gations supplémentaires par rapport aux autres installations classées soumises à autorisations. Il s’agit notamment d’un régime spécifi que de remise en état et de responsabilité de la société-mère, d’une obligation de garanties fi nancières, et une obligation d’éloignement par rapport aux habitations.Le nouvel article L. 553-3 du Code de l’environnement im-pose à l’exploitant d’éoliennes, dès la fi n de l’exploitation, de procéder au démantèlement et de la remise en état du site. Compte tenu de la spécifi cité des éoliennes, cette obligation ne fait pas l’objet d’une procédure de consultation du préfet, du maire et du propriétaire du terrain pour décider de l’usage futur du site, comme c’est le cas pour les ICPE soumises à autorisation en application de l’article L. 512-6-1. De plus, l’article L. 553-3 prévoit qu’en cas de défaillance de l’exploitant éolien, sa société-mère sera responsable du démantèlement et de la remise en état du site. La loi Grenelle 2 a créé, avec le nouvel article L. 512-17, une responsabilité subsidiaire des sociétés-mères pour la remise en état des (autres) ICPE, mais cette responsabilité est encadrée et ne peut s’appliquer que dans le cadre d’une procédure de liquidation de la fi liale exploi-tante, et seulement si une décision judiciaire détermine que la société-mère a commis une faute caractérisée ayant contribué à l’insuffi sance d’actifs de sa fi liale. Pour les éoliennes, l’article L. 553-3 du Code de l’environnement ne prévoit ni procédure de liquidation, ni d’intervention d’un juge ni de preuve de la faute de la société-mère.

(9) Loi n° 2003-590 du 2 juillet 2003, Urbanisme et habitat ayant créé l’article L. 553-3 du Code de l’environnement – Pour les parcs en mer, les garanties doivent exister dès le début de l’exploitation, comme prévu par la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005.(10) Cf. par exemple la SEML d’énergie des Cévennes ardéchoises, exploitant du parc éolien du plateau du Coiron et détenue à 51 % par la communauté de communes des Cévennes vivaroises.

Page 5: L’« après-Grenelle » des éoliennes : un point sur la .../media/Files/NewsInsights/...pour les ZDE qui seront crées ou modifi ées après l’adoption de ce document (4). Le

52 S U P P L É M E N T L A M Y G R E N E L L E 2 • O C T O B R E 2 0 10 •

L ’ « A P R È S - G R E N E L L E » D E S É O L I E N N E S : U N P O I N T S U R L A R É G L E M E N T A T I O N A P P L I C A B L E

Communauté de communes de Fécamp). Cette solution s’appli-quera donc aux éoliennes, devenues des installations classées.Il reste à voir si les collectivités locales seront nombreuses à répondre à cette incitation nouvelle. Certes, les dossiers de développement d’éoliennes sont complexes et les coûts d’une telle opération sont importants, mais les collectivités locales disposent une position privilégiée notamment pour défi nir la localisation la plus judicieuse pour les éoliennes et faire impli-quer les citoyens dans la production d’énergie renouvelable. L’implication des collectivités locales dans l’éolien pourrait être un modèle à la française d’« éolien participatif » qui connait un succès grandissant dans à l’étranger (11).On notera enfi n que le législateur profi te de la loi Grenelle 2 pour résoudre une question qui restait encore en suspens. L’article 10 de la loi du 10 février 2000 a été modifi é de ma-nière à préciser que les contrats d’achat d’électricité avec EDF ou les DNN sont des contrats administratifs. Dans la mesure où des personnes publiques sont désormais explicitement autorisées à en devenir signataires, cette précision est parti-culièrement utile. Jusqu’à l’intervention de la loi Grenelle 2, les textes ne précisaient pas la nature du contrat d’achat, et les dispositions de ce contrat lui-même ne permettaient pas de le défi nir, la clause de compétence renvoyant notamment « aux juridictions françaises » sans plus de précision. La cour administrative de Bordeaux s’était néanmoins estimée compé-tente pour connaitre d’un litige portant sur un contrat d’achat

(CAA Bordeaux, 4 janv. 2010, n° 08BX03313). Bien entendu, les contrats d’achat sont également des contrats administratifs lorsqu’ils sont passés entre EDF (société anonyme de droit privé) et une société privée exploitant des éoliennes ou même une personne physique (ménage, agriculteur).Que conclure de ce nouveau régime applicable aux éoliennes, issu de la loi Grenelle 2 ? Outre certains choix politiques large-ment débattus par ailleurs, les éoliennes entrent dans l’âge de raison, avec des responsabilités croissantes et plus de maturité. En effet, l’évolution des paysages avec l’installation d’éoliennes de plus en plus grandes et de plus en plus nombreuses, de même que le retour d’expérience sur une dizaine d’années d’éolien « industriel » justifi aient l’établissement d’un nouveau régime pour les éoliennes. La situation juridique méritait également d’être clarifi ée pour les collectivités locales comme pour les parcs offshore, qui sont deux « terrains » importants pour le développement de l’éolien si la France veut atteindre les objectifs qu’elle s’est fi xée pour la production d’énergies renouvelables. ◆

(11) « En Bretagne, l’éolien participatif tente de se frayer un chemin », Le Monde, 27 juill. 2010 ; « Éolien et citoyens, une clé pour l’avenir de l’éolien », A. Gossement, Système solaires le journal des énergies renouvelables, n° 198 - 2010.

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Reprinted from Bulletin du Droit de l'Environnement Industriel, Issue "Supplément Lamy Grenelle 2" , October 2010, with the permission of Wolters Kluwer France
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