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La cour des sentiments version 1 Page 1 sur 58 © Daniel Pina
LA COUR DES SENTIMENTS
Pièce de théâtre pour ados
En trois actes
Huit personnages (4 femmes - 4hommes)
Version intégrale : Durée approximative : 90 minutes
Les jeunes d’un petit village se réveillent dans une prison à ciel ouvert. Où sont-ils, comment sont-ils arrivés là, pourquoi se retrouvent-ils
prisonniers, qui se cache derrière cette étrange machination ?
LES PERSONNAGES
Le narrateur (vient tantôt côté cour, tantôt au
centre, tantôt côté jardin)
La fée des jouets (habillée d’une robe scintillante, coiffée d’un diadème, ne se déplace
jamais sans sa baguette)
Agathe
Lisa
Billy Valentin
Alexia
Bruno
DECOR
Une arène à ciel ouvert, entourée de murs de briques (ou entièrement
blanc, ou autre, au choix) sans ouverture apparente, où l’on ne trouve que deux vieux bancs.
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PREMIER ACTE * SCENE 1
Arrivée du narrateur tenant son texte d’une main, qui se positionne sur un des côtés de la scène.
Narrateur – Monsieur le Maire avait sa tête des mauvais jours. Tout décidément allait de travers cette année et il n’arrivait pas à s’y faire.
Il était né et vivait depuis toujours dans ce village qu’il adorait. La vie
s’écoulait paisiblement au rythme des saisons. Entouré de monts et de fraîches rivières poissonneuses, enneigé l’hiver, inondé de soleil l’été,
c’était un endroit tranquille où il faisait bon vivre. Les gens y étaient
heureux. Jusqu’au jour de la malédiction. Tous les habitants travaillant pour la Société Avril s’étaient réunis dans la petite salle de la mairie,
habituellement fréquentée par le Conseil Municipal. L’heure était grave.
Le PDG était malade et désirait céder son affaire le plus rapidement possible à qui voudrait bien la reprendre. Hélas ! Il n’avait trouvé
aucun successeur. En ce mois de décembre, l’inquiétude avait
remplacé l’allégresse qui, les années précédentes, envahissait les demeures à l’arrivée de Noël. Pourtant, même dans les familles
concernées par la prochaine fermeture du site, c'est-à-dire le village
tout entier, un sapin trônait dans chaque salle à manger, orné de guirlandes et de décorations précieusement gardées au fil du temps. La
tradition dans ce village voulait que, un jour avant Noël, toutes les
familles se retrouvent dans l’église, seul endroit assez grand pour accueillir tout le monde. Aménagée pour l’occasion, chacun amenait ce
qu’il pouvait en fonction de ses moyens, un plat, un dessert ou une
boisson. Le but étant de se réunir une fois dans l’année afin de partager ces instants privilégiés de convivialité, pour célébrer la fête la
plus belle. Une fois le repas achevé, le Maire annonça la nouvelle à
ceux qui n’étaient pas encore informés, les enfants du village. À partir de cet instant, leur vie bascula dans l’impensable et
l’incompréhensible.
Le narrateur s’éclipse.
Agathe, Lisa, Billy, Valentin, Alexia et Bruno sont allongés à même le sol et dorment.
Ils se réveillent les uns après les autres en entendant la musique.
(Extrait de la Symphonie des jouets de HAYDN – 1er mouvement – Allegro – durée 27 secondes)
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La fée des jouets se tient sur le côté de la scène et les observe, une
baguette dans la main droite. Dès qu’elle touche sa main gauche avec,
la musique s’arrête. Agathe se redresse, s’assied et cherche dans sa poche.
Agathe – C’est mon portable qui sonne ? Allô ! Allô !
Lisa sort du sommeil.
Lisa – T’as changé ta sonnerie et que tu m’l’as même pas dit !
Agathe – C’est pas lui qui sonne il n’est même pas allumé, c’est quoi ce délire ?
Billy, Valentin, Alexia et Bruno se réveillent également et s’étirent.
Billy – Qu’elle heure est-il ?
Valentin – J’en sais rien mais j’ai faim.
Alexia – On est où là ?
Bruno se lève d’un bond.
Bruno – C’est vrai ça, qu’est-ce qu’on fait ici ?
Il regarde autour de lui, inquiet.
Bruno – C’est quoi cette plaisanterie ? On s’croirait dans un cirque.
Billy – Oui, mais sans chapiteau.
Valentin – Si on est dans un cirque on va trouver des gaufres et de la barbe à papa, chouette !
Le reste de l’équipe se lève également et commence à s’affoler. Ils se dirigent vers le mur et l’inspectent de gauche à droite, en tapant
dessus puis reviennent vers le centre de l’arène, regardent partout
autour d’eux, puis au-dessus d’eux.
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Bruno – C’est un gag ou quoi, c’est pour la caméra cachée ou surprise
sur prises ?
Agathe – Et c’était quoi cette musique, elle sort d’où ?
La fée des jouets fait quelques pas vers eux.
Bruno – Hé ! Vous l’avez vu celle-là, elle arrive directement d’un bal
costumé, quelqu’un la connaît ? Tu peux nous dire ce qu’on fiche ici ?
Tous se tournent vers elle.
La fée – C’est comme ça que vous parlez aux femmes dans votre
monde ?
Billy – De quoi elle parle l’autre ? Notre monde ! Quel monde ?
La fée – Celui où vous vivez, enfin, celui où vous viviez devrais-je dire.
Alexia – Excuse nous, je crois qu’on est tous un peu troublés, s’il te
plaît, tu peux nous dire où on est ?
La fée – Ah ! Je commençais à désespérer de rencontrer un être
humain qui connaît une formule de politesse.
Lisa – Dit, on fait quoi ici ?
Agathe – Comment on est arrivé là, j’en ai aucun souvenir.
Bruno – C’est bizarre moi non plus.
Alexia – Je n’me souviens de rien.
Billy – C’est un coup des parents ça, c’est sûr.
Valentin – Moi, je sais qu’avant d’me réveiller j’étais en train de manger une sacrée bonne tarte aux pommes.
Agathe – Oui t’as raison, c’est ça, on était à l’église pour la réunion annuelle.
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Lisa – Pourquoi on est là alors ?
La fée – Bon ! Quand vous aurez terminé je pourrai peut-être en placer une. Merci. Je comprends votre inquiétude qui est tout à fait
légitime. Ce que je peux vous dire c’est que vous et vous seuls êtes
responsables de ce transfert.
Bruno – Et on peut savoir ce qui nous arrive et c’que tu entends par
transfert ?
La fée – Tiens Bruno, le plus âgé de tous, tu es aussi le plus égoïste et
le plus mal élevé des enfants du village.
Bruno – J’suis plus un enfant, d’abord ! Et puis de quel droit tu te
permets de me parler comme ça, tu connais mon prénom comment ?
La fée – Et oui je connais ton prénom et des tas d’autres choses.
Bruno – Moi j’te connais pas. Tu viens d’emménager c’est ça, t’es
nouvelle et tu viens de la ville, vu ta tenue, ça ne fait aucun doute.
Lisa – Elles datent de quelle époque tes fringues, la révolution ?
Valentin – Tu les as eus dans une boutique de farces et attrapes ou c’est pour le carnaval ?
Agathe – Moi j’dirais qu’elle ressemble plus à Barbie fée du logis.
Billy – Ou Barbie boulangère avec sa p’tite baguette.
Alexia est en colère.
Alexia – Mais vous n’avez pas honte de la traiter comme ça, elle ne vous a rien fait, vous ne savez même pas qui elle est.
Dédaignant complètement les critiques qu’il vient de recevoir.
Bruno – Tiens c’est vrai ça ! On n’sait pas qui tu es… Mélusine ?
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La fée – Ah non ! Mélusine est une femme légendaire des contes
populaires du Moyen Âge, moi je suis bien réelle et je m’appelle
Eugénie.
A part Alexia, tous ricanent.
Bruno d’un air moqueur – Ça c’est moderne, Eu-gé-nie.
La fée – J’avoue que vous m’étonnez. Vous semblez plus vous préoccuper de mon apparence que de savoir exactement ce qui se
passe pour vous. Ça ne vous inquiète pas plus que ça de vous trouver
là dans cet endroit inconnu, sans savoir ni pourquoi ni comment vous y êtes arrivés. Si j’étais vous, j’aiguiserais ma curiosité, mais je ne suis
pas à votre place, et franchement, je préfère être à la mienne car la
vôtre n’est pas très enviable, surtout en ce moment.
Agathe – Qu’est-ce qu’on doit comprendre ?
La fée – Ça c’est à vous de trouver la clé de l’énigme, je suis là pour
voir de quelle manière vous allez vous en sortir, c’est tout. Peut-être
pourrai-je vous servir à quelque chose, vu mes pouvoirs.
Billy – Parce qu’on est des otages ?
La fée – C’est un bien grand mot.
Lisa – A quoi tu pourrais nous servir ?
La fée amusée – Suis-je étourdie. Vous connaissez mon nom mais pas
ma fonction.
Lisa – Une fonction ! De quoi tu parles ?
La fée – Je veux parler de ce que je suis, de ce que je peux faire pour
vous.
Valentin – Et qu’est-ce que tu peux faire pour nous alors ?
La fée – Mais bien sûr. Je me présente, je suis Eugénie, la Fée des jouets.
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Cette déclaration provoque l’hilarité générale, sauf pour Alexia qui ne
trouve pas ça drôle du tout.
Alexia – J’peux savoir c’qui vous fait rire bande de nases ?
Billy – Ça n’te fait pas marrer c’qu’elle vient de dire ?
Bruno – La fée des jouets, elle est bien bonne, et moi j’suis Tokio
Hôtel.
Ils continuent de rire de plus belle.
La fée – Je suis heureuse de constater que votre humeur est au beau
fixe. Je comprends aisément pourquoi vous avez atterri ici. Une lourde
tâche vous attend, ne perdez pas votre temps avec des futilités.
Alexia s’approche de la fée.
Alexia – Tu sais exactement pourquoi on est là n’est-ce pas ?
La fée – Ce que je comprends moins c’est pourquoi toi tu y es. Tu devras les aider un peu parce que franchement, avec eux, ce n’est pas
gagné.
Agathe – Qu’est-ce que vous racontez, vous avez monté ce coup
toutes les deux, hein !
Alexia – Ne raconte pas de bêtises voyons, mais si c’est ce que je
pense, je crois que vous n’allez pas rire longtemps.
Lisa – On peut savoir de quoi tu parles ? Je commence à avoir les
j’tons moi.
Valentin – Moi aussi d’un seul coup j’n’ai plus vraiment envie d’rire.
Billy en criant – Je veux savoir ce qui s’passe.
La fée – Il se passe que vous êtes prisonniers dans la cour des
sentiments et que pour en sortir vous devez méditer sur les raisons qui vous ont amené ici. La liberté c’est la lumière. C’est la seule issue
possible pour la retrouver, elle vous guidera comme le phare guide les
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navires. Ne vous égarez pas. Je passerai de temps en temps voir
comment ça se passe pour vous.
Bruno – Tu es complètement folle ma pauvre, il faut te faire soigner.
Lisa – Je crois que t’es bonne à enfermer.
Alexia – Tu nous laisses vraiment seuls ?
La fée se dirige vers le fond de la scène, se retourne avant de partir.
La fée – Alexia est la plus apte à vous sortir de là, elle est pleine de
bon sens, écoutez ses conseils ils sont sages et pourront vous guider.
Alexia s’approche de la fée.
Alexia – Merci, mais tu crois qu’on va y arriver ?
La fée – L’avenir nous le dira, mais, confiance !
Bruno – Arriver à quoi ?
La fée – A sortir de cette prison.
Bruno – Alors on est vraiment prisonniers !
La fée ne répond pas à Bruno et sort par une porte à peine visible dans
le mur de briques, que personne ne semblait avoir vu. Bruno se
précipite derrière elle mais la porte reste close, pour la bonne raison c’est qu’elle n’a pas de poignée.
Alexia – Ben alors, pourquoi vous ne riez plus ?
Lisa – Waouh ! C’est délire, ça craint grave !
(Extrait de la Symphonie des jouets de HAYDN – 1er mouvement –
Allegro – durée
27 secondes)
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PREMIER ACTE * SCENE 2
Arrivée du narrateur.
Narrateur – Après les instants de rigolades vient le temps de la dure
réalité. Difficile de croire à ce qui nous échappe. L’irréel fait partie du quotidien des rêveurs, des artistes, des utopistes, mais quand on est
un tant soit peu sceptique et qu’on ne croit que ce que l’on voit,
comme il est dur d’accepter de devenir un cobaye livré aux mains de forces invisibles, qui se jouent de nous. L’obligation de se surpasser
devient alors une priorité, afin de préserver ce qu’on voudrait infaillible
et qui demeure pourtant si fragile, la raison.
Le narrateur s’éclipse.
Valentin – Vous avez vu comme moi, hein ! Elle est bien sortie par-là,
y avait bien une porte. Quelqu’un peut m’expliquer comment elle a fait
ça ?
Personne ne répond.
Agathe, Lisa et Valentin inspectent de nouveau le mur du côté gauche, Bruno, Alexia et Billy le mur du côté droit.
Bruno – Alors, vous trouvez quelque chose de votre côté ?
Agathe – Ma parole, on dirait bien qu’on est vraiment enfermés.
Lisa – Oui ! Mais il doit bien y avoir un moyen de sortir de là quand
même.
Billy – Quand tu l’auras trouvé, fait nous signe.
Bruno s’en prend à Alexia.
Bruno – Si tu nous disais maint’nant ce que tu sais, ça mettrait fin à
ce jeu stupide qui commence à m’énerver.
Alexia – Je n’en sais pas plus que vous, je vous dis que je n’ai rien à
voir avec ce qu’il se passe mais ce dont je suis sûre par contre, c’est que ce n’est pas un jeu.
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Lisa – Et comment tu sais ça toi ?
Agathe – Elle a raison, tu avais l’air bien copine avec la fée Clochette.
Alexia – Au lieu de m’accuser bêtement, vous feriez mieux d’avoir de
l’imagination et trouver le moyen de nous sortir de cette galère. Il faudrait qu’on se pose les bonnes questions, vous n’croyez pas ?
Valentin – Genre, qui est cette fille et comment elle a fait pour nous faire venir sans qu’on s’en aperçoive ?
Billy – Ça c’est une bonne question. Qui a la réponse, Alexia ?
Alexia – Lâche-moi tu veux, je vous répète que j’n’ai rien à voir dans
tout ça, combien de fois faudra le répéter ?
Lisa – Bon sang ! Qu’est-ce qu’on a fait pour mériter ça ?
Alexia – Je pense qu’on doit y réfléchir, c’est une question
fondamentale. Pour l’instant on n’a aucune idée de la façon dont on est
arrivé là, mais on peut essayer de comprendre pourquoi.
Agathe – Tu as sans doute raison. Elle n’avait pas l’air de rigoler tout
à l’heure hein ! Et si elle nous avait jeté un sort.
Bruno – Arrêtez de délirer les filles, tout ça n’est qu’une illusion,
bientôt je vais me réveiller et vous aurez tous disparus de ma vue.
Billy – Tout ce que je vois, c’est qu’on est prisonniers.
Valentin – Oui, et on n’a pas à manger.
Bruno – Non, je suis sûr que c’est pas possible, c’est un rêve !
Billy – Peut-être, mais alors comment tu expliques qu’on fasse tous le
même ?
Valentin – La fée on l’a tous vu, on n’a pas rêvé, quand elle est
arrivée il y a eu cette musique, et quand elle est partie aussi.
Bruno – Et alors ?
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Valentin – Alors on a tous vu la même chose, entendu la même
musique, comment ça s’peut. Et puis dis-moi si on dormait vraiment on ne pourrait pas faire le même cauchemar, surtout pas tous au même
moment. On ne dort pas il me semble, on est bien réveillés.
Soudain, Agathe a un éclair de lucidité.
Agathe – Je vais appeler mes parents de mon portable, bien sûr !
Bruno à Agathe – C’est maintenant que tu t’réveilles ?
Valentin – Si elle se réveille, peut-être que nous aussi.
Agathe à Bruno – C’est pas la peine de t’en prendre à moi.
Lisa à Bruno – Arrête de nous agresser.
Agathe à Lisa – Mais je n’t’agresse pas.
Lisa à Agathe – J’te parle pas à toi.
Valentin – Vous croyez que c’est l’moment ?
Lisa à Valentin – Oh toi on t’a pas sonné.
Alexia – Vous arrêtez oui !
Bruno – Toi Judas t’as pas la parole.
Lisa – Si on est là c’est à cause de toi.
Agathe – Tu vas nous rendre tous fous.
Alexia calmement – Je crois que vous n’avez pas besoin d’moi pour
ça.
Bruno à Agathe – Alors tu l’appelles ce numéro.
Agathe – Je suis assez stressée comme ça, n’en rajoute pas.
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Agathe allume son portable et tape son numéro.
Agathe – Y a pas d’réseau.
Valentin – Oh là là ! J commence à avoir sérieusement faim.
Lisa retourne vers le mur et tape dessus.
Lisa – Y a sûrement un moyen de sortir, sinon je vais piquer une crise de nerfs.
Billy – On va quand même pas passer le réveillon dans cette prison.
Alexia – On devrait essayer de rester calmes et d’analyser la situation
le plus sereinement possible. Vous vous rappelez des paroles de la fée des jouets ?
Bruno – Tu sembles croire que c’est une vraie fée.
Alexia – Ça ne fait aucun doute.
Agathe – T’es aussi dingue qu’elle ma parole.
Billy – Le plus important c’est de savoir où on est, de sortir de là, qu’elle soit fée ou pas on s’en fiche.
Valentin à Bruno – Mais j’y pense, ta montre elle fait GPS non ?
Bruno – Oui et après ?
Valentin à Bruno – T’es relou par moment, si on veut savoir où on est
utilise-la.
Bruno hésite à répondre, il est très mal à l’aise.
Bruno d’un air penaud – J’l’ai pas.
Lisa – Tu peux répéter ça !
Bruno – Je ne l’ai pas.
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Lisa – Quoi ! Tu nous as rebattu les oreilles avec ton GPS comme quoi
c’était le dernier cri, le plus fiable, le plus beau, le plus léger, le plus
formidable, et aujourd’hui qu’on en a un besoin vital tu nous dis que tu n’l’as pas. Mais t’es un cauchemar à toi tout seul, ça déchire.
Agathe – T’es vraiment un bof, hein !
Billy – J’y crois pas.
Valentin – Là, t’assures vraiment pas.
Alexia s’approche de Bruno.
Alexia – T’en fait pas, c’n’est pas si grave. Même si tu l’avais eu sur
toi, on n’aurait pas eu la solution pour sortir d’ici de toute façon.
A ce moment précis, une lumière vient éclairer la scène. Tous
regardent vers le haut.
Agathe – C’est quoi cette lumière ?
Valentin – C’est peut-être un hélicoptère qui apporte à manger ?
Billy – C’est pas Valentin qu’on aurait dû t’appeler mais Gargantua.
Lisa – Si tu continues de manger comme ça tu vas devenir râblé.
Alexia – Vous vous souvenez des paroles de la fée des jouets, elle a
dit la liberté c’est la lumière.
Agathe – C’est quoi cette lumière au juste, c’est matériel ou c’est
heu… comment on dit… une…
Alexia – Métaphore !
Agathe – C’est ça, et si la liberté c’est la lumière comment faire pour la trouver ? J’y comprends rien du tout.
Valentin – Cette lueur, qu’est-ce qui a pu provoquer son apparition ?
Lisa – Ça c’est subtil, il faut découvrir le déclencheur.
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Billy – La fée a dit qu’on était des prisonniers dans la cour des
sentiments je crois, ça veut dire quoi ?
Bruno – Ça veut dire que j’en ai marre de vous écouter dire n’importe
quoi. Les fées n’existent pas, d’accord !
Lisa – Et comment tu expliques ce qui nous arrive alors, et comment
elle a fait pour traverser le mur, et cette lumière qui arrive comme par enchantement, dis-le-nous si tu es si fort.
Bruno – C’est ça. Et vous allez me dire que vous croyez au Père Noël
aussi ?
A cet instant, la lumière apparue quelques instants plus tôt, s’éteint.
Agathe – Tu as vu c’que tu as fait ?
Bruno offusqué – Moi ! J’n’ai rien fait !
Lisa – Et si je crois au Père Noël ça te dérange à ce point-là ?
Bruno – C’est puéril.
Valentin – J’ai compris, la lumière, la cour des sentiments.
Bruno – Qu’est-ce que t’as compris minus ?
Valentin – Minus toi-même.
Bruno – Répète un peu pour voir !
Valentin – Tout c’que j’vois c’est que ton comportement a fait
disparaître la lumière.
Bruno – Vraiment n’importe quoi !
Alexia – Ce n’est pas si bête que ça.
Agathe – Quand ça s’est allumé c’était à quel moment ?
Bruno – Comment ça ?
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Alexia – Je me souviens, c’était quand on a demandé pour ton GPS.
Lisa – Oui c’est ça, on s’est moqué parce que tu n’l’avais pas.
Billy – Tout à fait, seule Alexia a dit que ce n’était pas grave.
Agathe – Exact, et la lumière est arrivée.
Valentin d’un air désolé – Et oui, c’était pas un livreur de pizzas.
Bruno – Ça prouve quoi ?
Alexia – Que la lumière s’est éteinte suite à des pensées négatives.
Bruno secoue la tête – C’est n’importe quoi.
Lisa – Peut-être. Mais on n’est pas là sans raison et c’est une
explication qui en vaut bien une autre.
Bruno – Donc, tout ce qui arrive est de ma faute si j’comprends bien.
Billy – Personne n’a dit une chose pareille, je pense que si on est dans
cette situation c’est qu’on est tous responsables.
Agathe – On a fait quelque chose qu’il ne fallait pas.
Valentin – Oui. Maintenant c’est à nous de trouver quoi. Si je veux espérer remanger un jour.
PREMIER ACTE * SCENE 3
Arrivée du narrateur.
Narrateur – Lorsqu’on le pousse dans ses derniers retranchements, jusqu’où l’être humain est-il capable d’aller ? L’instinct de survie dans
des circonstances extrêmes, lui fait prendre conscience de ses
véritables capacités physiques et intellectuelles. Une épreuve aussi insurmontable qu’elle puisse paraître devient ainsi la pièce maîtresse
d’un combat sans merci, qu’il peut livrer en mettant en éveil maximum
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ses sens, sa sensibilité, la réflexion dont l’a doté la nature. La jeunesse
ne fait pas exception à la règle, ajoutant même une dose d’audace, un
soupçon de tendresse et d’émotions, un parfum de fraîcheur et de spontanéité, qui s’allient pour former un immense désir de
reconnaissances et de liberté.
Le narrateur s’éclipse.
Agathe – Bizarre cet endroit, on est dehors en plein mois de décembre et y’a pas un souffle de vent, il ne fait même pas froid.
Billy – On n’entend rien de la vie extérieure, on ne voit aucune étoile, il n’y a pas de nuages non plus.
Lisa – Pas de soleil, pas de lune, pas de chants d’oiseaux, aucun bruit de moteur.
Valentin – Y a pas de boulangerie, même pas un p’tit croissant à s’mettre sous la dent.
Alexia – Pauvre Valentin, on va faire c’qu’on peut pour se sortir de là
avant que tu ne meures de faim.
Alexia se rapproche de Bruno.
Alexia – Tu n’as pas l’air d’aller bien.
Bruno – Non, j’m’en veux.
Alexia – Mais de quoi ?
Bruno – Je suis en colère après moi.
Agathe se dirige vers le mur et l’inspecte encore une fois, de dépit, de rage, de désespoir.
Alexia – Pourquoi en colère, ce n’est pas ta faute si est on là.
Bruno – Et bien figure toi que je commence à me le demander.
Soudain Agathe crie.
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Agathe – Regardez, un passage dans le mur, là !
Tous se précipitent sur un côté de la scène.
Lisa – Comment tu as fait ?
Agathe – Je me suis juste appuyé et ça a bougé.
Lisa – Vous croyez qu’on peut allez voir où ça mène ?
Billy – Qu’est-ce qu’on risque après tout !
Valentin – Oui mais, il faut peut-être pas qu’on y aille tous, si jamais on se perdait, on n’sait pas ce qu’on va trouver là d’dans. Comme ça,
ceux qui vont rester pourront venir nous chercher.
Agathe – Bonne idée. Qui ça ne gêne pas de rester ?
Alexia – Moi je veux bien.
Bruno – Moi aussi, je ne veux pas te laisser seule. Ne prenez aucun
risque surtout et ne restez pas trop longtemps partis. D’accord ?
Billy – Qu’est-ce qu’il y a Bruno, tu deviens humain ? T’inquiètes pas,
on sera prudent.
Alexia – Et revenez entiers, et avec de bonnes nouvelles.
Agathe – Ouais, mais ça craint un peu.
Agathe, Billy, Lisa et Valentin empruntent le passage. Bruno et Alexia viennent au centre de l’arène et s’asseyent côte à côte.
Bruno – Tu crois que c’est un passage vers la liberté ?
Alexia – Peut-être, mais tant qu’on n’aura pas compris pourquoi on
est là, je doute qu’on puisse s’échapper si facilement.
Bruno – Comment on peut s’évader de ce cauchemar ?
Alexia – Je n’en sais trop rien. Il va nous falloir une bonne dose de
patience, de courage et d’imagination.
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Bruno – Tout bien réfléchi en ce qui me concerne, j’ai certainement
mérité d’être enfermé dans c’bazar.
Alexia – Pourquoi tu dis ça ?
Bruno – J’suis un sale mec. Je n’ai vraiment pas assuré avec mes
parents. Ils sont pourtant cool avec moi ça je n’ai pas à m’plaindre.
C’est moi qui suis injuste avec eux. Ils se donnent du mal pour que je n’manque de rien et en ce moment côté finances, ce n’est pas le
Nirvana, et je fais que des conneries qui leur coûtent cher.
Alexia – Et avec la fermeture d’Avril ça n’va pas s’arranger, et là on
est tous concernés.
Ils se tournent l’un vers l’autre au même instant.
Bruno – Mais oui c’est ça, on est tous concernés.
Alexia – Tu penses comme moi ?
Bruno diction rapide – Je pense bien que tu penses comme moi, tu
penses !
Alexia – Quelle est la dernière chose avant d’arriver ici dont tu te
souviennes ?
Bruno – Attends ! Le Maire nous prévenait de la possible fermeture
d’Avril.
Alexia – Exact ! Ensuite on s’est retrouvé dans ce chaudron. Donc ?
Bruno – Il faut se souvenir de tout ce qu’on a fait à partir de ce moment-là.
Alexia – Et sûrement que ce qu’on a dit doit aussi avoir de l’importance.
Bruno – Et on aura la solution pour sortir d’ici !
Alexia – Ça, c’est l’avenir qui nous le dira.
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Bruno – Je voudrais te présenter mes excuses parce que je n’ai pas
été très sympa tout à l’heure. J’peux te dire que t’es une chouette fille
et je regrette de t’avoir agressée.
Alexia – Tu veux me faire rougir ?
Ils se lèvent et se positionnent face à face.
Bruno – Je pense vraiment ce que j’dis. J’ai douté de ton intégrité et ça me fait de la peine pour toi.
Alexia – On n’en parle plus, d’accord ?
Bruno – Ça marche !
Ils s’approchent tout près, s’enlacent amicalement et se tapotent
mutuellement l’épaule. À ce moment précis, la lueur qui avait disparue
réapparaît au-dessus de leur tête. Comme ils entendent du bruit venant du passage, ils s’y dirigent. Agathe, Billy, Lisa et Valentin sont
de retour. Ils sont prostrés et viennent au centre de l’arène pour s’y
asseoir, ce que font également Alexia et Bruno. Soudain, la musique retentit : (Extrait de la Symphonie des jouets de HAYDN – 1er
mouvement – Allegro – durée 27 secondes) et la fée réapparaît,
arrivant du passage resté ouvert. Elle se dirige vers le groupe assis et une fois la musique arrêtée s’adresse à Bruno.
La fée – Alors Tokio Hôtel, c’est t’y que t’aurais un quelconque brin d’jugeote ou c’est Alexia qui t’a soufflé les bonnes réponses ?
Bruno – Quoi ! Ça ne va pas non !
La fée – T’inquiète ma brunette, j’t’ai écouté et tes déductions sur
votre présence ici m’ont ennuyé à mourir, alors j’ai bu de cette absinthe préparée au sixième siècle par Merlin, et maint’nant, j’ai un
peu la tête qui tourne.
Bruno – Au lieu de te moquer, dit-nous si on est sur la bonne voie.
Alexia – Cette lumière, c’est LA lumière ?
La fée ne semble pas les écouter. Elle s’adresse aux autres.
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La fée – Alors les aventuriers, comment c’était cette expédition ?
Ils la regardent mais demeurent sans réaction.
La fée – Je vois. Vous êtes les aventuriers de la langue perdue. Et
ben, ce n’est pas comme ça que vous allez vous en sortir les p’tits loups. Diction rapide – Il serait sage de faire le ménage de vos
méninges.
Le narrateur revient dans l’arène.
Narrateur – Comme vous pouvez le constater, les événements prennent un cours quelque peu inattendu. Le moral de l’équipe ne
semble pas très élevé, la fée des jouets ne faisant rien pour arranger
les choses.
La fée en criant – Qui a dit ça ?
Narrateur – C’est moi.
La fée vient vers lui.
La fée d’un air narquois – Et c’est qui moi ?
Narrateur – Tu le sais parfaitement voyons, je suis le conteur, et je
trouve que tu exagères, ce n’était pas prévu que tu dises ça.
La fée – Je peux changer le cours de l’histoire quand je veux.
Narrateur – Mais, tu n’peux pas faire ça !
La fée – Je n’devrais pas l’faire, mais je peux le faire.
Narrateur – C’est l’auteur qui décide du scénario, pas toi.
La fée – J’ai le pouvoir d’endormir qui je veux, si je le fais, l’histoire s’arrête maintenant.
Narrateur – Et les personnages, que deviendraient-ils ?
La fée – On n’en parlerait plus.
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Narrateur – Ce n’est pas c’que tu veux quand même ?
La fée en riant – Mais non ! J’rigole ! Une fée ne fait pas des choses pareilles.
Narrateur – Tu sais que tu m’as fait peur, je t’ai prise au sérieux. Pourquoi t’as fait ça ?
La fée – Il faut bien que j’m’amuse un peu. C’est pas drôle tous les jours d’être la fée des jouets, et puis, ça fait longtemps que personne
n’est venu dans cette arène, beaucoup trop longtemps. Je commençais
à m’ennuyer. Je n’ai rien fait depuis des siècles, ça fait huit jours pour vous. J’adore rigoler et je suis une farceuse, alors c’était l’occasion.
Narrateur – Tu connais d’autres fées ?
La fée – J’en connais une, elle s’appelle Carat.
Narrateur – Elle est connue ?
La fée – Oui, c’est la fée des diamants. Mais elle est toujours au boulot.
Narrateur – Ah bon !
La fée – Hé oui, la fée carat bosse.
Narrateur – Pff ! T’es une drôle de fée toi.
La fée – Je sais, mais ce n’est pas tout ça, on a une mission à finir tous les deux. Allez vas-y annonce la suite.
Narrateur – C’est que je n’sais plus où j’en suis moi.
La fée – Alors on fait une pause.
Narrateur s’adressant au public – Le temps de retrouver mes esprits,
et on se revoit dans quelques instants.
La fée fait quelques pas, puis revient vers le narrateur et lui donne une
tape sur l’épaule.
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Narrateur – Pourquoi tu as fait ça, c’est quoi ce geste ?
La fée – Ah ça ! C’est un coup d théâtre.
Narrateur – Alors je peux dire que c’est une idée, d’Eu-gé-nie.
DEUXIEME ACTE * SCENE 1
Narrateur – Dans la vie d’un être humain, à un moment ou à un autre, arrive l’heure où il faut rendre des comptes. À cet instant précis,
un repli sur soi-même n’est pas la solution, la vérité apparaissant
comme une nécessité. Si la liberté de l’âme aboutit à la délivrance du corps, la confession des actes répréhensibles permet de rétablir
l’équilibre. Dur de prendre conscience et de passer aux aveux, il faut
regarder devant soi et mettre de côté le passé qui devient une barrière, un frein qui empêche toute progression. Une vérité dissimulée
peut faire plus de mal qu’un mensonge fièrement déclamé.
Le narrateur s’éclipse. Bruno s’adresse à l’équipe de retour.
Bruno – Alors vous avez découvert quelque chose là-bas ?
Agathe – Hélas ! Rien qui puisse nous faire sortir d’ici.
Billy – La lumière est revenue on dirait !
Valentin – Oui, mais y a d’la bouffe nulle part.
Bruno – Il conduit où ce passage ?
Agathe – C’est un couloir étroit et sombre, puis des escaliers qui
descendent vers une pièce vide, sans ouverture.
Lisa – Sans espoir de sortie, je crois que j’vais craquer.
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Bruno s’approche de Lisa qui va de plus en plus mal.
Bruno – On n’va pas se décourager, on va y arriver je te le promets.
Lisa – J’en ai marre, on ne va jamais s’en sortir, je veux mes parents,
je veux que tout redevienne comme avant.
Lisa prend sa tête dans les mains et pleure. La fée compatissante s’en
approche.
La fée – Pleure pas, ça va aller tu vas voir.
Bruno à la fée, d’un air menaçant – Et toi, tu ne peux pas faire
quelque chose pour nous ? Une fée ça doit bien avoir des pouvoirs
non ?
La fée se tournant vers lui, en colère – Tiens ! Tu reconnais à présent
que je suis une fée ?
Bruno – Si ça peut nous aider à partir, je veux même bien croire que
t’es la reine d’Angleterre.
La fée outrée – Ce n’est pas en me parlant sur ce ton que tu vas t’en
sortir.
Bruno – Jamais tu n’as eu l’intention de nous aider.
La fée – Tu n’es qu’un goujat, un… un paltoquet.
Agathe – Depuis l’début tu t’moques de nous.
Lisa – Oui avec tes grandes phrases et tes mystères.
Billy – C’est ta faute si on est coincé là, c’est toi qui nous a amené ici,
je n’sais pas comment ni pourquoi, mais on va le découvrir, avec ou
sans toi.
Valentin – Tu nous énerves avec tes énigmes tu sais, alors soit tu
nous aides, soit…
La fée l’interrompt, furieuse.
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La fée – Soit quoi, hein ? Du courage bon sang, allez, dites-moi !
Bruno – Du courage on n’en manque pas il me semble.
La fée – Ah oui ! Tu as du courage toi !
Bruno – Il m’en faut un sacré pour te supporter, ça oui !
La fée – C’en est trop.
Elle s’approche de Bruno et le touche avec sa baguette. Il tombe à
genoux, puis s’écroule.
Lisa – Qu’est-ce que tu lui as fait ?
Agathe – T’es complètement dingue.
Valentin – Il est mort ?
Billy – On va tous y passer avec cette folle.
La fée – C’est moi que tu traites de folle jeune freluquet ?
Billy n’a pas le temps d’ajouter le moindre mot, elle s’approche de lui et le touche avec sa baguette. Il tombe à genoux puis s’écroule.
Agathe – T’as pété un câble ma vieille, t’es pas une fée mais une sorcière.
Alexia – Tu vas nous tuer les uns après les autres, c’est ça ?
La fée – Moi qui croyais en ton estime et qui te prenais pour une
personne sensée.
Alexia – T’es en train de faire du mal à mes amis et tu voudrais que
j’t’apprécie, tu es complètement ouf toi.
Lisa – Pourquoi tu t’en prends à nous ?
La fée – Tu voudrais que je m’en prenne qu’à toi, si c’est ce que tu
veux je peux arranger ça.
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Agathe – Laisse-la tranquille, tu n vois pas qu’elle ne va pas bien.
Valentin – Bruno et Billy sont morts ?
La fée – Mais non ils ne sont pas morts, ils dorment.
Agathe – Qu’est-ce que tu attends de nous, tu nous provoques et
quand on répond tu nous endors.
La fée – Ma pauvre Agathe si tu savais ce que Lisa, celle que tu
appelles ton amie, dit de toi lorsque tu as le dos tourné, tu serais moins empressée de prendre sa défense.
Agathe – Je n’te crois pas, Lisa n’est pas comme ça.
La fée – En es-tu vraiment sûre ?
Agathe – Elle a toute ma confiance.
La fée – Et toi Valentin, tu crois que tu es épargné ? Les filles se moquent de toi dès que tu n’es pas là. Et il n’y a pas que les filles
d’ailleurs.
Valentin en secouant la tête – Pff ! Tu peux dire c’que tu veux, j m’en
fous.
Lisa s’adressant à Valentin – Tu la crois ?
Valentin – Bien sûr que non. Vous êtes mes amies et ce n’est pas une fée déjantée d’la cafetière qui va changer ça.
La fée – Alexia est tellement jalouse de vous tous qu’elle vous a entraîné dans ce cauchemar infernal, par vengeance. Elle est ma
complice vous savez !
Agathe – Tu racontes n’importe quoi.
Valentin – Tu m’fatigues avec tes salades.
Lisa – Ouais, j’crois que t’es complètement frappée.
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Alexia – J’ai comme l’impression que tu viens de faire un bide ma
grande.
La fée fait quelques pas en arrière, tape plusieurs fois avec sa baguette
dans sa main ouverte et sourit. Elle les regarde les uns après les autres
en secouant la tête de haut en bas.
Agathe – Pourquoi tu nous regardes comme ça ?
Lisa – Tu te demandes comment tu vas nous achever ?
Alexia – C’est quoi ton problème ?
Valentin – On pourrait bien se mettre en colère tu sais !
La fée – Ça ne sera pas nécessaire.
Tous se regardent, étonnés. La fée se dirige vers Bruno et pose sa baguette sur lui, elle fait de même avec Billy. Ils se réveillent
instantanément, s’étirent et se lèvent. Agathe, Lisa, Valentin et Alexia
se précipitent vers eux.
Alexia – On est heureux de vous revoir sains et saufs les gars.
Lisa – Oui, on a vraiment eu peur pour vous.
Agathe – Mais nos problèmes ne sont pas terminés pour autant.
Valentin – Non, et je n’sais pas comment on va pouvoir les régler,
surtout le ventre vide.
La fée – Je peux avoir votre attention s’il vous plaît, merci. Avant que
vous me sautiez dessus pour me casser la figure, permettez-moi de vous féliciter.
Agathe – De nous féliciter ?
La fée – Mais oui. Je suis ravie de constater que vous vous êtes bien
acquittés de l’épreuve que je viens de vous infliger.
Alexia – Une épreuve ?
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La fée – Tout ça n’était qu’un test.
Valentin – Tu veux dire que tu l’as fait exprès ?
La fée – Tout juste. Il ne faut pas m’en vouloir, c’est un élément
déterminant pour trouver la clé.
Billy – Quelle clé ?
La fée – Pour sortir d’ici, la solution pour ouvrir la porte.
Bruno – Si j’ai bien compris tu nous as provoqués pour voir nos réactions ?
La fée – Exact.
Lisa – Mais de quel droit tu as fait ça, hein !
La fée – C’est pour vous aider à prendre conscience des raisons qui
vous ont amené ici.
Bruno – Ça veut dire aussi qu’on n’est toujours pas libres.
La fée – Vous êtes sur la bonne voie.
Valentin – Ce n’est pas humain de nous faire subir ça.
Billy – Tu mériterais une bonne correction.
Alexia – On est vach’ment en colère après toi tu vois !
La fée – Je sais, mais vous êtes surtout solidaires, vous n’avez douté à
aucun moment de votre amitié et c’est ce que je voulais savoir. J’ai vraiment essayé de vous déstabiliser mais sans succès. Vous n’hésitez
pas à vous liguer, ce n’est pas toujours pour être sympa mais vous
êtes une force, votre amitié prend le dessus sur l’adversité, c’est ça la solidarité.
Billy – Vraiment j’y crois pas.
Bruno – Et ben, tu t’es bien foutu d’nous en attendant.
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Alexia – Mais dis-moi, si on est si bons pourquoi la lumière n’est pas
plus intense ?
La fée – Mais elle l’est, il suffit de vous regarder et c’est un grand
bonheur de vous voir rayonner, ce n’est pas la lumière du ciel qui
compte mais la lumière intérieure, l’étincelle qui scintille dans vos yeux et la lueur qui brille dans vos cœurs.
Le silence envahit l’arène, chacun se dévisage.
La fée – Je suis heureuse.
Bruno – Ça en fait au moins une.
La fée – C’est bientôt noël, il va falloir vous réveiller.
Billy – C’est toi qui n’arrêtes pas d’nous endormir !
La fée – Bien vu, mais le temps passe et le temps presse.
Valentin – Tu crois qu’on ne l’sait pas !
La fée – Courage, c’est bientôt le bout du tunnel.
Lisa – Je ne crois pas, tu joues avec nous et ça t’amuses de nous voir prisonniers.
Agathe – On est les pions d’un jeu virtuel.
Alexia – Sauf qu’on n’a pas droit à plusieurs vies.
Billy – Tu n’veux pas nous mettre sur la voie, même à questions pour
un champion on leur donne un indice.
La fée – Pour les spectateurs, pas pour les visiteurs. Réfléchissez,
agissez et vous sortirez.
Valentin – Le ventre creux c’est difficile, on se sent faible.
La fée – Quand une faiblesse est partagée par tous elle devient une force. Ecoutez attentivement ce qui suit, quant à moi je reviendrai plus
tard.
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Lisa ironiquement – Non, tu n’vas pas t’en aller quand même, tu nous
manques déjà !
Valentin – Hé ! Quand tu reviendras, ramène-nous donc quelques
bricoles à grignoter !
Agathe – Et une boussole…
Billy – Ou une carte détaillée pour trouver la sortie.
La fée quitte l’arène, le narrateur entre.
Narrateur – Bonnes gens écoutez car c’est la bonne parole
Il ne faut plus douter de quitter cette geôle L’église est le départ, Noël est l’arrivée,
Reconnaître ses tares rendra la liberté
DEUXIEME ACTE * SCENE 2
Billy – Ça y est, encore une devinette.
Lisa – Moi j’suis prête à jouer ce qu’elle veut, du moment qu’on sorte
de là.
Alexia – On a peut-être trouvé un début de solution avec Bruno.
Agathe – Ah bon, explique !
Alexia – La fée des jouets nous a aidés. Et rappelez-vous des paroles du conteur, l’église est le départ, il faut qu’on se rappelle ce qu’on a
fait juste après l’annonce du Maire.
Billy – Et tu penses que ça suffira pour nous évader ?
Lisa – Franchement ça m’étonnerait beaucoup.
Bruno – Moi aussi j’avoue, mais on n’a pas l’choix.
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Valentin – Il va falloir faire des efforts de mémoire.
Billy – C’est une confession qu’ils attendent alors ?
Alexia – Quelque chose comme ça.
Bruno – Je veux bien commencer, mais par où ?
Agathe – Laisse aller le flot de ta pensée et essaie de te souvenir des détails de cette soirée.
Valentin – Vas-y, moi j’ai trop faim pour me concentrer.
Bruno fait du mieux qu’il peut pour se détendre.
Bruno – Après le repas je suis entré avec mes parents. Ils n’étaient
pas comme d’habitude, ils étaient tendus, préoccupés.
Lisa – Y a rien d’étonnant avec ce qui les attend.
Billy – Chut ! Laisse-le parler.
Bruno – Ouais, c’est dur pour tout l monde. Ils se sont disputés à
cause de la mère de Lisa. Ma mère n’était pas d’accord avec ce qu’affirmait mon père.
Lisa très surprise – Qu’est-ce que ma mère vient faire la d’dans ?
Bruno – Je… Je m’en rappelle plus.
Lisa – Je n’te crois pas.
Agathe – J’pense que tu n’dois rien cacher sinon ça ne marchera pas.
Bruno – Ce n’est pas facile.
Billy – Qu’est-ce qu’il y a de si dur à dire ?
Bruno – Il disait que c’est elle qui a persuadé Avril de fermer la boîte.
Le ciel tombe sur la tête de Lisa.
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Lisa – Pourquoi tu mens ?
Bruno – C’est la vérité.
Lisa – N’importe quoi, comme si ma mère avait le moindre pouvoir.
Alexia – C’est une grave accusation, tu as des preuves de ce que tu
avances ?
Valentin – Mais oui, qu’est-ce qui te permets de dire ça ?
Bruno – Mais tout l’monde le sait.
Valentin – Tout l’monde sait quoi ?
Bruno – Que… Que sa mère et Avril sortent ensemble.
Lisa – Quoi !
Alexia – Où tu as pêché ça ?
Lisa – J’suis trop vénère. T’es vraiment un… elle éclate en sanglots.
Alexia la prend dans ses bras pour la consoler.
Valentin – Je n’ai jamais entendu parler de cette histoire.
Alexia – Moi non plus.
Billy – Ni moi.
Agathe – C’est une pure invention, c’est honteux tu sais.
Bruno – Oh arrêtez de jouer les hypocrites !
Alexia – Mais qu’est-ce qui t’prends tout à coup.
Lisa – J’en ai vraiment marre de ce mec. Je vais lui éclater le pif.
Laissez-moi tranquille.
Lisa se dirige au fond de l’arène pour s’isoler, et s’assied par terre.
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Billy – C’est malin, pourquoi tu lui fais du mal ?
Bruno – C’est la réalité.
Alexia – Y a que toi qui sembles la connaître alors !
Bruno – Le but est de dire ce qui s’est passé et pas d’essayer de
préserver les susceptibilités de chacun.
Agathe – Tu n’es pas très délicat.
Alexia – C’est le moins qu’on puisse dire.
Valentin – Même s’ils sortent ensemble qu’est-ce que ça peut nous
faire ?
Billy – Ce n’est pas notre problème.
Valentin – Ça ne nous regarde pas toute façon.
Bruno – Si mes parents se retrouvent sans boulot c’est sa faute.
Agathe – Arrête, tu délires là !
Alexia – Avril est malade c’est pour ça qu’il veut arrêter, ce n’est pas
la faute de la mère de Lisa.
Bruno – C’est elle qui le pousse à fermer la boîte.
Alexia – Tu dépasses les bornes.
Valentin – Si personne n’est repreneur à qui la faute ?
Bruno – À la mère de Lisa.
Billy – Mais qu’est-ce que t’as contre cette femme, elle t’a fait quoi ?
Bruno méchamment – Rien, rien du tout.
Bruno quitte l’arène précipitamment et emprunte le passage. Tous le
regardent partir sans essayer de le retenir.
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Valentin – Ça ne mène à rien cette discussion, on reste au point mort.
Alexia – Il faut se concentrer.
Billy – C’était quoi les paroles du conteur déjà ?
Agathe – Moi je me souviens de Noël est l’arrivée, reconnaître ses
tares rendra la liberté, ou quelque chose dans l’genre.
Valentin – J’crois bien qu’c’est ça.
Billy – Ça veut dire qu’on est tarés ça ?
Valentin – Parle pour toi mon pote.
Alexia – Hé ho ! Pour un groupe solidaire on a des progrès à faire il
me semble.
Agathe – Oui, on ne peut que s’améliorer.
Lisa revient vers le groupe, calmée.
Lisa – Il faut absolument partir d’ici le plus vite possible.
Valentin – T’as raison. Il faut continuer.
Alexia – Allez les garçons, à confesse. Qui reprend le relais ?
Billy – Avec mon père on a parlé des cadeaux. Il était fou de rage de
perdre son emploi. Depuis la mort de ma mère on n’a plus jamais fêté noël et je lui ai pris la tête.
Il baisse la tête et met les mains dans ses poches.
Alexia – Vous vous êtes disputés ? C’est ça !
Billy – Oui. Je lui ai dit que j’voulais un GPS, comme celui de Bruno.
C’est vrai que ça m’a fait envie, j’ai fait un caprice quoi. Il m’a dit que
c’était vraiment pas l’moment, j’ai ajouté que de toutes façons c’était jamais le moment.
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Alexia – Et c’est tout ?
Billy – Non. J’ai dit aussi que j’en avais marre de cette vie, se priver tous les jours de tout y a des moments je préférerais être mort.
Alexia – T’as été dur là. Qu’est-ce qu’il a répondu ?
Billy – C’est ça l’problème, il n’a rien dit, il a pris son blouson et il est
sorti en claquant la porte.
Agathe – Et après ?
Billy – Après rien, j’me suis réveillé ici. J’m’en veux de lui avoir dit ça.
Alexia – Ça déchire.
Lisa – Ça craint.
Valentin – Ça creuse.
Valentin se gratte la tête.
Valentin – Dites les filles, Bruno a eu une dispute, Billy aussi, et moi
pareil, c’est curieux non ?
Agathe – Ah oui, toi aussi !
Valentin – Pourquoi t’es dans l même cas ?
Agathe – Exactement, et pour la même raison.
Lisa – C’est étonnant, avec ma mère j’ai abordé le même sujet. Elle
m’a dit qu’il n’était pas question de cadeaux cette année, vu la… conjoncture, on s’est un peu accrochées.
Alexia – Voilà, c’est ça le lien.
Lisa – Noël, et les cadeaux.
Valentin – Et les disputes.
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Bruno refait son apparition et vient se positionner devant le groupe.
Bruno – Alors les blaireaux on a la solution ?
Valentin – C’est à nous que tu parles comme ça ?
Billy – Pourquoi ce ton agressif avec nous, qu’est-ce que tu as à la
fin ?
Bruno – J’vous demande pardon, je suis désolé.
Bruno prend sa tête dans les mains. Tous croient qu’il pleure, mais il rit.
Agathe – Tu es de meilleure humeur on dirait !
Bruno – Tu peux l’dire.
Alexia – Et y a une raison à ça ?
Lisa – Tu ferais mieux de t’excuser au lieu de rire bêtement.
Bruno – Ah oui, et de quoi ?
Lisa – D’avoir dit des mensonges sur ma mère.
Bruno – Je n’ai fait que répéter ce que j’ai entendu.
Lisa – Oui, et sans savoir si c’est vrai, c’est ça le drame.
Arrivée dans l’arène du narrateur.
Narrateur – Avez-vous remarqué qu’à chaque fois qu’on dit il fait beau, peu après il pleut ? Demain je vais prendre la vie du bon côté, et
c’est là que tout va de travers. Je vais mettre tranquillement les choses
au point en disant ça, et on déclame tout le contraire de ce qu’on voulait dire. Les exemples ne manquent pas, je pourrais vous en
relater à foison. Quand les paroles dépassent la pensée ça peut
engendrer des situations dramatiques et injustes. Des disputes qu’on aurait pu éviter, des larmes qu’on n’aurait pas dû faire couler. La
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solidarité passe par la compréhension et l’indulgence, c’est le ciment
de l’amitié sincère et durable.
Le narrateur sort.
Bruno – Excuse-moi Lisa, je n’voulais pas te blesser.
Lisa – Pourtant ça m’a fait mal d’entendre dénigrer ma mère.
Bruno – J’ai eu tort, je l’reconnais.
Lisa – J’ai eu une discussion musclée avec elle et je t’assure que si elle sortait avec Avril elle me l’aurait dit, ça j’en suis certaine. Ce dont je
suis sûre c’est qu’elle cherche une solution pour sortir tout l’monde de
cette situation.
Bruno – Alors ils ne sont pas ensemble ?
Lisa – S’ils sont ensemble, c’est pour se battre en cherchant un
repreneur.
Bruno – J’ai été complètement stupide.
Lisa – Oui, je crois que tu es plus affecté que tu n’le penses.
Bruno – Quelque part ça nous touche, c’est normal.
Lisa – J’ne parlais pas d’ton cœur mais de ton esprit.
Bruno se positionne devant Lisa et lui prend les mains.
Bruno – Tu pourras me pardonner un jour ?
Elle l’embrasse sur la joue.
Lisa – T’as peur que j’te pète une dent ?
Bruno – Non, que tu m’en veuilles tout l’temps.
Lisa – J’t’en voudrais si on n’arrive pas à sortir de là.
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DEUXIEME ACTE * SCENE 3
Alexia – Maintenant qu’on pense avoir trouvé ce qui nous relie, on fait quoi ?
Arrivée de la fée des jouets.
La fée – Pertinente question n’est-ce pas ?
Bruno – Te revoilà toi, qu’est-ce que…
Lisa lui coupe la parole.
Lisa – Bruno tais-toi tu veux, je sens que tu vas encore dire des
bêtises.
Bruno arrogant : – Non j’t’assure, je voulais seulement savoir qu’elle
est la prochaine étape, on est libéré ou on va crever sur place ?
La fée – C’est très élégant comme langage.
Lisa – C’est vrai ça, tu crains grave tu sais.
Bruno – Ce n’est peut-être pas élégant de ma part mais on tourne en rond et elle continue de jouer avec mes nerfs.
La fée – Je t’assure que non. Je suis ravie !
Bruno – Ravisseuse tu veux dire !
Valentin – Moi j’dirais, ravissante.
Billy – Moi aussi, c’est c’que j’dirais.
Agathe – La fée des jouets à des fans on dirait.
Lisa – C’est une évidence.
Alexia à la fée : – J’peux savoir pourquoi tu es si heureuse ?
La fée – Ce que j’ai entendu tout à l’heure est très encourageant.
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Lisa – Quoi, que les garçons te trouvent à leur goût ?
La fée – Non ! Même si je suis flattée par tant de délicatesse, vos
révélations sur ce qui s’est passé avec vos proches est une réelle
avancée, c’est ça qui me réjouit.
Valentin – Comment tu fais pour savoir c’qu’on dit sans être
présente ?
La fée – Ma qualité de fée des jouets me procure quelques privilèges.
Bruno – Ça y est, ça recommence.
Alexia – Qu’est-ce qui te dérange encore ?
Bruno – Ce qui me dérange ? Mais c’est la façon qu’elle a de vous
embobiner, de se servir de vous, voilà ce qui m’dérange, et d’être enfermé comme un cafard dans une boîte d’allumettes.
La fée – Et si tu agissais autrement que lui.
Bruno – Autrement que qui ?
La fée – Que le cafard.
Bruno – Tu me traites de cafard là, j’n’ai pas rêvé ?
La fée – Mufle, pédant, prétentieux, imbu de ta personne seraient plus
juste mais cafard te va bien aussi.
Bruno – Espèce de… Lisa lui coupe à nouveau la parole.
Lisa – Ça suffit Bruno, maintenant tu la ferme où j’te pète un bras.
Agathe – Tu commences à nous chauffer Bruno, parce que là tu n’vas pas dans l bon sens.
Bruno – Ah oui, et c’est quoi le bon sens, attendre le bon vouloir de cette… cette créature qui s’prend pour une fée ?
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Billy – Méfie-toi Bruno, elle pourrait bien te renvoyer dans le royaume
des songes.
Valentin – Sans billet retour.
Bruno – Vous êtes tous avec elle à c’que j’vois !
Billy – Ça va maint’nant, arrête de délirer et calme toi, ce n’est pas en
agissant ainsi qu’on va s’en sortir.
Bruno va s’asseoir le plus loin possible du groupe.
La fée – Surtout mes amis que vous êtes tout près du but.
Alexia – Ah bon !
Agathe – C’est vrai ou c’est encore un test ?
La fée – Vous avez progressés, c’est évident.
Lisa – Il ne me semble pas pourtant.
La fée – Nous avons un ami commun qui va venir une nouvelle fois
vous aiguiller.
La fée regarde vers les coulisses et met sa main près de sa bouche en
portevoix. La fée – Monsieur le conteur, auriez-vous l’amabilité de venir distiller
quelques indices qui vont permettre à ces jeunes gens de regagner
leurs pénates ?
Il refait son apparition.
Narrateur – Avec plaisir, car c’est un grand honneur pour moi de
pouvoir vous rendre ce service, ma bonne fée.
Bruno qui était à l’écart se lève d’un bond et vient vers le narrateur.
Bruno – T’en n’as pas marre de lui servir de bouffon ?
Narrateur – Si tu n’te tais pas j’te pète l’aut’e bras, pigé ?
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Bruno s’éloigne, vexé. Le narrateur prend une feuille de papier dans sa
poche, l’ouvre et se racle la gorge.
Narrateur – L’être humain n’est pas parfait c’est le moins qu’on puisse
dire, et c’est tant mieux car la vie serait triste à mourir autrement. De
tous les défauts que nous pouvons avoir, il y en a que l’on doit garder en soi car ils font partie intégrante de notre personnalité et d’autres
que l’on doit essayer d’améliorer à tout prix, afin d’éviter qu’ils
transforment nos petits travers en drames. Noël vient chaque année pour embellir nos sapins, nos rues, nos maisons, mais aussi et surtout
pour mettre dans le cœur de chacun de nous la chaleur de l’amitié, la
chaleur du partage, la chaleur de l’amour. Qu’est-ce qui nous fait plaisir ? Ce sont les cadeaux bien sûr, mais le plus beau de tous c’est
celui qu’un être cher peut apporter par son soutien. Le partage n’est
pas que matériel. Non, le partage des sentiments est de loin le plus bénéfique. C’est de lui dont on se souvient chaque mois de l’année, et
ce jusqu’au noël suivant. Le plus beau des cadeaux c’est la chaleur
qu’un être cher peut apporter par sa seule présence.
Le narrateur reste dans l’arène. Bruno revient vers le groupe et
s’adresse à la fée.
Bruno en applaudissant : – Bravo, vraiment bravo ! Tu es très forte.
La fée – Venant de ta part je doute que ce soit un compliment.
Bruno – Tu es même… brillante. Tu nous tiens en otage et ils sont à tes pieds.
Lisa – Tu n’exagères pas un peu là ?
Bruno – Si ça s’trouve elle a demandé une rançon.
Agathe – Une rançon mais à qui ?
Alexia – Mais non voyons, elle sait que personne de notre entourage n’a beaucoup d’argent. Mais tu es fou, une fée ne ferait pas ça.
Agathe – Je suis d’accord.
Lisa – Parfaitement, c’est toi qui délires.
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Billy – Mais alors tu n’as rien écouté de ce que vient de dire le
conteur.
Valentin – À croire que le partage des sentiments ça te laisse froid ?
Bruno – Le partage je veux bien, les sentiments… !
Billy – J’te comprends pas.
Bruno – Mais vous ne voyez pas qu’elle nous manipule !
Billy – Tu ferais mieux de garder ton énergie pour que finisse cette
aventure.
Bruno d’un ton théâtral : – Aventure ? Mais c’est un drame, que dis-
je, un mélodrame.
Narrateur – Je m’en vais.
Bruno – T’en as marre de narrer ?
Narrateur – Je suis fatigué de tes plaintes continuelles.
Bruno – Non attend, si tu es fatigué je peux te remplacer.
Narrateur – Et pourquoi ferais-tu ça ?
Bruno – Pour te ménager, je veux bien prendre la relève.
La fée – Je vois où tu veux en venir, tu es impatient de savoir
comment et quand ça va se terminer.
Valentin – C’est pour ça que tu veux relever le conteur !
Narrateur – C’est une folle espérance car hors de question, ma mission n’est pas terminée et je la mènerai à son terme. Sache qu’un
conteur ne peut pas être laissé pour compte.
Bruno – Message reçu, monsieur l’comte.
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Narrateur – J’y compte bien sinon ton compte est bon.
Alexia – J’ai l’impression qu’on s’égare, non ?
Lisa – J’en ai plus qu’assez, je veux rentrer chez moi.
Valentin – Moi aussi, c’est plus un estomac que j’ai, c’est un abysse.
La fée se détache quelque peu du groupe et tape sa baguette dans sa main.
La fée – Ecoutez-moi tous, vous voulez passer Noël en famille, très bien ! Alors vous êtes libres.
Agathe – Qu’est-ce que tu dis ?
La fée – Vous pouvez partir.
Valentin – C’est encore une plaisanterie de ta part ?
Alexia – Une nouvelle épreuve ?
Bruno – C’est un piège, c’est du bluff.
Lisa – Tu es sérieuse, on peut vraiment rentrer chez nous ?
La fée – Puisque je vous le dis ! Empruntez le passage et vous retrouverez la liberté.
Bruno – Il n’y a pas d’issue.
La fée – Maintenant, si.
Ils se regardent, n’osent à peine bouger. C’est Bruno qui le premier se
dirige vers le passage. Juste avant de le franchir il se retourne.
Bruno – Si je passe la porte je vais être transformé en quoi en prince
charmant ?
La fée – Même avec mes pouvoirs je ne sais pas si j’y arriverais, parce
que là, y a du boulot !
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Et il sort, suivi de toute l’équipe qui se précipite sans un regard vers la
fée. Alexia est la dernière à quitter l’arène.
Alexia – Alors ça s’termine comme ça sans autres explications, sans se
dire adieu ?
La fée – Pas tout à fait.
Alexia sourit et lui fait signe de la main.
Alexia – On est appelé à se revoir n’est-ce pas ? Je m’disais aussi !
La fée – Oui, dans pas longtemps.
Alexia – Alors, à dans pas longtemps !
La fée s’assoit sur un banc, le narrateur en fait autant.
Narrateur – Alors ma bonne fée, es-tu satisfaite du résultat ?
La fée – Il y a encore un peu de travail mais, on est sur la bonne voie.
Narrateur – Je les aime bien ces jeunes, ils sont vachement sympas
je trouve, ils méritent vraiment un petit coup de main.
La fée – Parfaitement monsieur le narrateur, laissons-les passer ce
Noël en famille après on s’occupera d’eux, c’est bien pour ça que nous sommes là.
Rideau
TROISIEME ACTE * SCENE 1
Agathe, Lisa, Billy, Valentin, Alexia et Bruno sont allongés à même le sol et dorment. Ils se réveillent en entendant la musique. (Extrait de la
Symphonie des jouets de HAYDN – 1er mouvement – Allegro – durée
27 secondes) La fée des jouets se tient sur le côté de la scène et les observe, une baguette dans la main droite. Dès qu’elle touche sa main
gauche avec, la musique s’arrête. Agathe se lève la première, puis
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Lisa, suivie de Valentin, Alexia, Billy et Bruno. Ils font une tête de six
pieds de long. Ils s’adressent les uns après les autres à la fée.
Agathe – Non, c’n’est pas vrai, elle a remis ça.
Lisa – Le cauchemar continue alors !
Valentin – J’espère que cette fois elle a prévu les sandwiches.
Alexia – Je n’déteste pas cette musique, elle est même plutôt jolie
vous n trouvez pas ?
Billy – J’aimerais mieux être au concert de U2.
Lisa – Ouais, ça n’vaut pas Maroon Five.
Bruno – N’importe où sauf ici.
Agathe – Alors on est vraiment de retour c’est ça ?
Lisa – Oui, c’était trop beau. Enfin, façon d’parler.
Valentin – T’as raison, ça été le pire noël de toute ma vie.
Alexia – Pour moi aussi.
Billy – À qui l’dis-tu !
Bruno – Vous n’allez quand même pas m’dire que vous êtes contents
d’être là non ?
Lisa – Non mais !
La fée – Bienvenue tout le monde, on ne peut plus se passer de moi
on dirait ?
Bruno – Pourquoi on a l’choix ? Tu m’crois si j te dis que tu n’m’as pas
manqué ?
La fée – Moi aussi j’t’aime bien. Ma compagnie ne vous plaît pas ?
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Billy – C’n’est pas ça mais… Bruno l’interrompt.
Bruno –Tu nous as encore bien eu, qu’est-ce qu’on fait encore ici, hein ?
Alexia – Je savais qu’on allait se revoir, je n’imaginais pas que ça se ferait si rapidement.
La fée – Mes amis, pas de panique. Je vous ai invité pour savoir comment ce sont passées les fêtes de noël pour vous, c’est tout !
Bruno – Une invitation ne se fait pas contre le gré des gens.
La fée – Mon cher Bruno je peux te confirmer que tu n’as opposé
aucune résistance, j’en déduis donc que tu es consentant.
Bruno – Tu as décidé de jouer avec mes nerfs.
La fée – Je ne joue pas, je prends ma tâche très au sérieux au
contraire. J’ai une mission à remplir et je compte bien la mener à son
terme.
Agathe – Et c’est quoi cette mission au juste ?
La fée – Patience.
Lisa – Bruno a raison quand il dit que tu joues avec nos nerfs. La question est pourquoi ?
La fée – Je vous propose de vous asseoir bien que ce ne soit pas très confortable.
Aucun d’eux ne se décide à obéir.
La fée – Allez, venez !
Ils s’exécutent, seul Bruno refuse et reste debout.
Billy – Viens avec nous Bruno, ne reste pas tout seul.
Bruno – C’est bon les moutons, lâchez-moi.
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Alexia – Toujours aussi agréable.
La fée – J’aimerais que vous me racontiez comment s’est déroulé ce réveillon.
Billy – C’est pour ça qu’on est là ?
La fée – Oui !
Billy – On n’aurait pas pu s’voir ailleurs qu’ici, dans le village, au
troquet où n’importe où pour en parler ?
La fée – Parce que tu fréquentes ce genre d’endroit toi ?
Billy – Tu sais bien c que j’veux dire, pourquoi nous avoir de nouveau endormis et ramenés dans cette taule ?
Lisa – Il n’a pas tort.
La fée – Où que vous soyez vous vivez dans le présent, alors qu’ici
vous êtes dans une dimension différente. Vous n’êtes plus dans le passé et pas encore dans l’avenir.
Valentin – Ce qui veut dire en clair !
La fée – Que dans cet endroit, et là seulement, le temps suspend son
cours.
Valentin – Waouh ! Et tu crois qu’on va gober ça ?
La fée – Vous vous trouvez dans la cour des sentiments, ce n’est pas
par hasard et ce n’est pas pour rien.
Agathe – Elle sert à quoi cette cour ?
La fée – À vous donner une deuxième chance.
Alexia – Une deuxième chance pour quoi faire ?
La fée – Pour changer le cours des choses.
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Lisa – Ça, c’est impossible !
La fée – Pour moi rien n’est impossible, n’oubliez pas que je suis une fée.
Bruno – On n’risque pas de l’oublier.
La fée – J’espère bien, je suis là avant toute chose pour vous aider,
ma mission est de vous renvoyer dans le présent afin de revivre ce que vous avez raté.
Le silence envahit l’arène, chacun se regarde à nouveau sans trop comprendre ce que dit la fée.
La fée – Je ne vous raconte pas de salade vous savez !
Valentin – Ne parle pas d’salade ça m’donne faim.
Bruno – Parce qu’on a raté quelque chose ?
La fée – C’est à vous de me rapporter ce qui s’est passé.
Valentin – Mais qu’on te raconte quoi au juste ?
La fée – Je vous l’ai dit tout à l’heure, j’attends que vous me racontiez
votre soirée de noël.
Agathe – C’était tellement nul qu’il n’y a rien à dire.
La fée – Justement, c’est ça que j’ai besoin d’entendre. Ça ne s’est pas passé comme tu voulais ?
Agathe – Ah ça ! C’est rien de le dire. D’habitude on fête noël comme il se doit, mais cette année rien dans l’sapin, pas de cadeau, aucune
déco à l’extérieur, le strict minimum dans les assiettes et pas de
dessert. Même pas de champagne pour les parents. Seulement la gueule toute la soirée et même pas un billet pour acheter ce qui me
fait plaisir.
La fée – Je vois !
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Valentin – Pareil chez moi, c’était sinistre, du jambon et de la purée,
vous vous rendez compte d’un repas de noël !
Lisa – Moi j’ai demandé à ma mère si elle sortait avec Avril, bonjour
l’ambiance. On s’est disputé comme jamais. Elle m’a répondu qu’elle
avait suffisamment de problèmes à régler sans avoir à écouter mes bêtises. J’ai demandé si j’allais avoir mon téléphone quand même, elle
a passé noël dans sa chambre et moi dans la mienne.
La fée – D’accord, d’accord !
Billy – Même chose pour moi, j’attendais un MP3 et ben non, même pas un CD, rien.
La fée – Et toi Bruno ?
Bruno – Pas de cadeau non plus, la tronche toute la soirée, que du
bonheur.
La fée – Et pour toi Alexia, ça s’est passé comment ?
Alexia – Un peu différemment. Je n’voulais rien pour noël vu la
situation. J’ai eu un ordinateur portable, ça m’a fait pleurer. Les
difficultés sont nombreuses à la maison alors je l’ai rapporté au magasin et j’ai demandé le remboursement. Mais ils ont refusé, alors
je l’ai mis en vente sur un site internet. Mes parents sont supers
géniaux mais je n’veux pas qu’ils se sacrifient pour ça, ça n’en vaut pas la peine. Qu’ils gardent leur travail est de loin le plus important, les
cadeaux ce n’est pas une priorité.
La fée – Si j’ai bien compris, à part Alexia, c’est le fait de ne pas avoir
de cadeaux qui vous met en colère ?
Bruno – Ben oui, y a de quoi non !
La fée – Que vos parents se retrouvent sans travail et sans salaire ne vous a pas émus le moins du monde, espèce d’égoïstes que vous êtes,
vous ne pensez qu’à votre confort et votre intérêt personnel, pas une
fois vous vous êtes mis à la place de vos parents. Que préférez-vous, manger tous les jours ou avoir des cadeaux plein le sapin une fois dans
l’année ?
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Le narrateur refait une apparition et vient se positionner à côté de la
fée.
Le narrateur – Vous n’avez pensé qu’à vous, reléguant au second
plan la détresse que seuls peuvent ressentir ceux qui vivent un drame
et essaient de gérer au mieux une situation qui les dépasse. Que pèsent un ordinateur portable, un téléphone, un GPS ou autres lecteurs
DVD ou MP machin devant la tristesse d’un père et d’une mère qui ne
peuvent plus subvenir aux besoins de leurs enfants.
La fée – Avez-vous mesuré l’ampleur de leur désarroi ne serait-ce
qu’une seconde ? Certes pas. Sinon vous ne seriez pas là à nous écouter vous rappeler la valeur fondamentale de la famille. L’amour
que chacun de vous peut apporter par la compréhension et le soutien,
en restant unis, surtout dans les situations les plus pénibles.
Le narrateur – Des noëls il y en aura d’autres, beaucoup d’autres.
Alexia est un exemple pour tous, exemple que vous-mêmes vous pouvez devenir, que vous allez devenir.
L’émotion se lit sur les visages.
Le narrateur – Le plus important c’est de rester soudé pour lutter
contre les épreuves. La santé et l’amour sont les plus beaux présents que nous offre la vie.
La fée – La cour des sentiments permet à tous ceux qui s’égarent de ne plus jamais en être à court.
Rideau
TROISIEME ACTE * SCENE 2
Le narrateur revient au milieu des jeunes.
Bruno – Maintenant que tu nous as fait la morale on peut partir ou tu vas nous garder prisonniers histoire de rigoler encore un peu ?
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La fée – Mais vous n’avez jamais été prisonniers.
Bruno – Tu te moques de moi.
La fée – Jamais je ne me permettrai de me moquer de toi, ni des
autres d’ailleurs.
Bruno – Si on n’était pas prisonniers on était quoi alors ?
La fée – Des visiteurs.
Bruno – Et ce mur-là, c’est une illusion peut-être ?
La fée – Vous pouviez partir à chaque instant, seulement vous n’auriez
pas eu de seconde chance. Mais oui c’est une illusion, si vraiment vous aviez envie de quitter cet endroit vous auriez trouvé un moyen. Si vous
aviez eu un comportement différent dès le début, vous seriez partis
depuis longtemps.
Billy – Bon Bruno, t’en n’as pas marre de tout l’temps agresser les
autres, ça ne te sert pas de leçon ce qu’on vient de vivre ?
Valentin – J’crois qu’on n’a pas à être fiers de nous, alors mets une
sourdine tu veux !
Bruno – Ça va, c’est bon là, c’est bon !
Billy – Donc on peut s’en aller d’ici quand on veut !
La fée – Oui, mais sans oublier de dire au revoir.
Bruno – Tant mieux, j’en ai ras l’bol de vous.
La fée – Nous aussi on est content de t’avoir connu.
Lisa – Si le temps suspend son cours ça veut dire qu’on ne vieillit plus ?
La fée – Exact !
Lisa – Alors j’veux bien rester ici.
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La fée – Tu as une belle vie qui t’attend, ça serait dommage de passer
à côté. Comme vous tous.
Alexia – Tu as bien dit que tu allais nous renvoyer dans le présent afin
de recommencer ce qu’on a raté, c’est bien ça ?
La fée – C’est bien ça !
Alexia – On va donc revivre la soirée de noël.
La fée – Oui.
Agathe – Mais si j’ai bien tout compris en évitant de commettre les
mêmes erreurs.
La fée – Bien Agathe. Vous êtes un des meilleurs groupes que je n’ai
jamais eus.
Valentin – Parce qu’il y en a eu d’autres ?
La fée – Heureusement, sinon je m’ennuierais ferme.
Billy – Ça veut dire aussi qu’on n’est pas les seuls à avoir des défauts.
La fée – Avant que vous ne partiez, j’aimerais que vous me disiez ce
que vous retenez de cette expérience.
Bruno – Qu’on est obligé de croire aux fées.
La fée – Bien Bruno, tu progresses.
Valentin – Que si on veut bien manger ce n’est pas ici qu’il faut venir.
La fée – Oui c’est vrai mais encore !
Lisa – Qu’il ne faut jamais écouter et croire les rumeurs. Ça fait très
mal et à des gens qui bien souvent ne le méritent pas.
Alexia – Il ne faut pas se fier aux apparences, elles sont souvent
trompeuses.
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Bruno – Ne pas porter de jugements hâtifs et condamner les gens
sans preuves et sans procès.
La fée – Excellent Bruno, avec toi je vais de surprises en surprises.
Valentin – Ecouter son cœur et sa conscience avant son estomac.
La fée – Je crois que de ce point de vue-là, tu ne changeras jamais.
Bruno s’approche tout près de la fée.
Bruno – Avec tout le respect que je dois, tu te permets de juger Valentin il me semble.
La fée – Pourquoi me dis-tu ça ?
Bruno – Tu viens de dire qu’il ne changera jamais, c’est un jugement
hâtif pour moi.
La fée – Très bien Bruno tu as raison, mais je me suis mal exprimée,
j’ai dit je crois alors que j’aurais dû dire, je sais.
Bruno – Ah bon ! Tu sais qu’il ne changera jamais ?
La fée – Ça fait partie de mes petits privilèges de savoir ce qui se
passera plus tard. Agathe tu voulais dire quelque chose ?
Agathe – Penser aux gens qui nous entourent en prenant soin d’eux,
ça peut nous empêcher de sombrer dans le nombrilisme.
La fée – C’est parfait tout ça. En général, pour vivre en paix avec soi-
même et son entourage évitez tous ces pièges où il est facile de
tomber.
Le narrateur – Ça fait un peu cliché non ?
La fée – Oui, mais c’était nécessaire tu vois, maintenant ils sont
conscients de l’ampleur de la tâche qui les attend.
Le narrateur – De quelle tâche parles-tu ?
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La fée – D’abord ils sont enfants, puis ados, et ensuite arrivés à l’âge
adulte ce sont d’autres problèmes qu’ils doivent affronter.
Le narrateur – D’être passés par la cour des sentiments les rendront
plus forts, plus aptes, c’est ça ?
La fée – Tout juste.
Le narrateur – Bravo la fée, ils ont raison, tu déchires !
La fée – Allez les jeunes, vous êtes libres et pour de bon cette fois.
Passez ce noël comme il se doit et relativisez les situations qui vous paraissent insurmontables.
Le narrateur – Comme m’a dit un jour une fée que je connais, le monde évolue, les situations également, ce qui est difficile à vivre
aujourd’hui ne sera plus qu’un mauvais souvenir demain.
La fée – Je vous souhaite de passer un excellent noël. Heureuse de
vous avoir connus.
Billy – C’est bon alors, on peut vraiment y aller ?
La fée – Vous pouvez vraiment y aller !
Billy – J’y vais.
Alexia – Non attends !
Billy – Quoi ! Tu veux rester ?
Alexia – Je te remercie pour tout ce que tu as fait. Tout le monde n’a
pas le privilège d’avoir une seconde chance, je t’en serai éternellement reconnaissante d’avoir changé le cours de notre existence.
Agathe, Lisa, Billy et Valentin répondent en cascade : – Merci !
La fée – Pensez à tous ceux qui n’ont pas la possibilité de fêter noël,
les malades, les sans-abris, les personnes âgées, les personnes seules
au monde, pensez-y, les handicapés de toutes sortes, la misère est malheureusement présente et souvent tout près de nous, réfléchissez
à la vie que vous menez avant de vous plaindre, mesurez la chance
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que vous pouvez avoir. Maintenant, partez avant que je me mette à
pleurer.
Agathe et Alexia sortent, suivies de Billy, puis Valentin et Lisa. Avant
que Bruno ne quitte l’arène, la fée l’interpelle.
La fée – Tokio Hôtel, tu peux venir une seconde s’il te plaît ?
Ils se dirigent tous les deux vers le mur et se tiennent face à lui. Après quelques instants Bruno s’en va, le sourire aux lèvres. La fée revient
vers le narrateur.
Le narrateur – Qu’est-ce qui se passe, tu as l’air tout drôle ?
La fée très enjouée, limite hystérique : – Tu te rends compte il m’a touché la main et il m’a dit danke schön.
Le narrateur – Oui, et alors ?
La fée – Alors ! C’est le plus beau jour de ma vie, c’est Tokio Hôtel
quand même !
Le narrateur – Et le fait qu’il t’ait touché la main te rend heureuse à
ce point-là ?
La fée – Tu n’peux pas comprendre si tu n’es pas un tant soit peu «
people », ça restera un fait divers.
Le narrateur – J’avais déjà du mal à comprendre les femmes mais ça
me fait un drôle d’effet de fréquenter une fée.
La fée – Ne t’inquiètes pas, les fans comprendront.
Le narrateur – Et bien tant mieux parce que sur c’coup-là, je me sens
un peu seul et complètement largué.
Rideau
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TROISIEME ACTE * SCENE FINALE
Le narrateur et la fée sont assis sur un banc.
Le narrateur – Alors ma bonne fée tu as l’air heureux du travail
accompli !
La fée – Oui, mais ils vont me manquer tu sais.
Le narrateur – Ils ont retrouvé l’esprit de noël, et grâce à toi ils vont
passer les fêtes dans un climat serein et chaleureux. Que vont-ils
devenir si Avril ferme ?
La fée – Ça ne va pas fermer, monsieur Avril est un sage et un
homme prévoyant, dans son infinie bonté il a fait don des trois quarts de sa fortune à tous les salariés, qui du coup ils vont devenir les
principaux actionnaires de la société, tous patrons. Quant à lui, il va
rester au village dans sa maison et recevoir les soins dont il a besoin.
Le narrateur – C’est noël en avril ! Les jeunes vont avoir leurs
cadeaux avec tout cet argent ?
La fée – Non, tout sera réinvesti dans du matériel neuf pour qu’ils
soient les plus compétitifs possibles.
Le narrateur – Tu as réussi un sacré tour de force, comment ne pas
croire au père noël après ça ?
La fée – L’homme a beau s’en défendre, mais noël fait partie de
chaque étape de sa vie.
Le narrateur – Comment ça ?
La fée – Quand il est enfant il croit au père noël, une fois adolescent il
ne croit plus au père noël, quand il est père il se déguise en père noël,
et quand il est grand-père il ressemble au père noël.
Le narrateur – C’est tout à fait vrai. Dis-moi, il y a une chose que
j’aimerais te demander.
La fée – Je t’écoute.
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Le narrateur – Le profane que je suis voudrait savoir si on peut
tomber amoureux d’une fée ?
La fée – En voilà une drôle de question, bien sûr que oui voyons !
Le narrateur – Et est-ce qu’une fée peut tomber amoureuse d’un humain ?
La fée – Ah ! J’ai compris, tu es en train de me demander si j’ai des sentiments pour toi ?
Le narrateur – Heu ! Oui !
La fée – J’aime tout le monde du même amour, mais je n’ai ni le droit
ni la possibilité d’être amoureuse, ce n’est pas le rôle d’une fée. Ceci dit, il peut m’arriver d’avoir des préférences et me sentir mieux près
d’une personne que d’une autre.
Le narrateur – D’accord, message reçu.
La fée – Ces moments passés près de toi ont été très agréables si tu
veux le savoir.
Le narrateur – C’est un grand bonheur pour moi aussi de t’avoir
rencontré. C’était, comment dire, féerique.
La fée – Tu sais, mon amour est universel, mais je vais te confier un
secret que tu devras garder pour toi seul. Je t’aime.
Le narrateur – Ça me fait très plaisir de le savoir, mais tu dis la
même chose à tout le monde n’est-ce pas ?
La fée d’un air coquin et joyeux – Oui !
Le narrateur – Dit donc ça serait grave si tu n’avais pas de
sentiments vu l’endroit où l’on se trouve.
La fée – Oh c’est bien vrai ça, je serais obligée de me punir moi-
même.
Le narrateur – Bon, ma bonne fée avant de se quitter, j’ai un cadeau
à te faire.
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La fée – Un cadeau ! Pour moi ?
Le narrateur prend la fée par le bras et l’emmène au centre de l’arène.
Le narrateur – Oui, je te demande d’accueillir les visiteurs.
Agathe entre, un bonnet de noël sur la tête. Elle se positionne sur le
côté de l’arène, face à la fée.
Agathe – Je suis Agathe et je te souhaite un joyeux noël.
Valentin entre, un bonnet de noël sur la tête. Il se positionne à côté d’Agathe et lui donne la main.
Valentin – Je suis Valentin et je te souhaite un joyeux noël.
Lisa entre, un bonnet de noël sur la tête. Elle se positionne à côté de
Valentin et lui donne la main.
Lisa – Je suis Lisa et je te souhaite un joyeux noël.
Billy entre, un bonnet de noël sur la tête. Il se positionne à côté de Lisa
et lui donne la main.
Billy – Je suis Billy et je te souhaite un joyeux noël.
Alexia entre, un bonnet de noël sur la tête. Elle se positionne à côté de Billy et lui donne la main.
Alexia – Je suis Alexia et je te souhaite un joyeux noël.
Bruno entre, un bonnet de noël sur la tête. Il tient une boîte dans ses
mains qu’il va remettre à la fée. Il se positionne à côté d’Alexia et lui donne la main.
Bruno – Je suis Tokio Hôtel… Heu non, je suis Bruno et je te souhaite un joyeux noël.
La fée ouvre son cadeau et découvre une baguette dorée. Elle est très émue.
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Le narrateur – Pour te remercier de tes bons pouvoirs ils t’offrent
cette baguette magique, gage de leur amitié et de leur reconnaissance.
La fée – C’est un vrai conte de fée !
Le narrateur – Non, un conte de noël, et pour eux tu es une fée qui compte beaucoup.
La fée – Elle est vraiment magique cette baguette ?
Le narrateur – Oui mais il faut y croire.
La fée – À quoi ? Agathe, Valentin, Lisa, Billy, Alexia et Bruno
répondent ensemble en criant et en lançant leur bonnet en l’air : – Au
père noël.
(Extrait de la Symphonie des jouets de HAYDN – 3 ème mouvement –
Allegro moderato)
Fin
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